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Éditions en ligne de l'École des chartes http://elec.enc.sorbonne.fr Paul Guérin (éd.) Paul Guérin, Recueil des documents concernant le Poitou contenus dans les registres de la Chancellerie de France, t. X : 1456-1464, Paris, 1906 (Archives historiques du Poitou, 35).

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Création du fichier
Recueil des documents concernant le Poitoux contenus dans les registres de la Chancellerie de France publiés par Paul Guérin, archiviste aux archives nationales, X, (1456-1464)
Introduction

Le tome X des documents concernant le Poitou recueillis dans les registres du Trésor des chartes contient les actes des cinq dernières années du règne de Charles VII et ceux des quatre premières années de Louis XI. Sur les cent trente pièces dont il se composé, quatre-vingt-une émanent de la chancellerie de Charles VII et quarante-neuf de celle de son fils. On peut classer ces actes en diverses catégories que nous allons passer rapidement en revue, en indiquant sommairement, pour chacune, ce que l'on y trouve de plus important.

I

Les lettres de rémission continuent à occuper une place prépondérante ; prises dans leur ensemble, on peut dire que leur caractère essentiel ne diffère pas sensiblement de ce qui a été remarqué à propos de celles qui ont été publiées dans les précédents volumes. Elles sont- dans celui-ci au nombre de quatrevingt-douze, dont près du tiers se rapporte à des gentilshommes ou à des personnages tenant un rang élevé dans la société, tels que Jean de Châteaupers, Mathurin Chappeau, écuyer, Jean d'Escoubleau, Pierre Berchou, Robert de Brilhac, Jacques Le Jude, écuyer, Mathurin d'Appelvoisin, chevalier, Jacques Jousseaume, sr de la Geffardière, Jean et Jacques de Puyguyon. Jean Beufmont, Pierre de Lugny, chevalier, Payen el Briand Boutou, ses neveux, Pierre Bonneau, sr de Saint-Michau, son gendre, Perrot de La Lande écuyer, Amaury de Liniers, Louis de Lestang, Jean de La Rochefaton, Guyon de Vaucelles, Jean de Pérusse des Cars, Jacques de Belleville, Renaud Chabot, sire de Jarnac, Louis, son fils, et Jacques Goulard, écuyer, tous coupables de meurtres, les uns comme auteurs principaux, les autres comme complicesIl a paru inutile de répéter ici les références aux numéros et aux pages du volume où se trouvent les lettres relatives à ces personnages et à d'autres qui seront rappelés ci-dessous, la table alphabétique fournissant toutes les indications nécessaires.. On pourra constater que, dans beaucoup de cas, les violences commises, qu'elles soient préméditées ou accomplies dans un moment de colère, ont pour point de départ une question d'intérêt matériel. Le même mobile se retrouve dans les actes criminels qui nécessitèrent le recours de Jean de Vivonne et de Georges de La Trémoïlle à la clémence royale. Le premier avait fabriqué un faux en écriture publique, dans le but de rentrer en possession de la terre de l'Aublonnière qu'il avait été contraint, pour payer ses dettes, de céder à sa cousine germaine, Isabelle de Vivonne, dame de Thors et des Essarts. Le second était poursuivi pour séquestration de la personne de Péan de Valée, qui avait circonvenu Catherine de l'Isle-Bouchard, douairière de La Trémoïlle, s'était emparé de l'administration de ses biens et donnait des motifs de craindre que l'héritage attendu par ses enfants ne leur parvint pas intégralement.

D'autres homicides sont imputables seulement à la brutalité des mœurs et quelques-uns à des causes psychologiques. Jean de La Rochefaton, rentrant au milieu de la nuit en son hôtel de Montalembert, poussé par le soupçon d'une infidélité conjugale, trouva en effet sa femme et son frère Alexandre couchés ensemble. Voulant venger son honneur, ou plutôt obéissant à une impulsion naturelle et s'abandonnant à la colère aveugle, il frappa à coups d'épée les deux complices ; le frère succomba et la femme fut grièvement blessée. On peut noter une particularité d'ordre spécial dans le cas de Jacques de Belleville. Sous le coup de poursuites motivées par plusieurs crimes et délits mis à sa charge, il avait tué, en l'hôtellerie du Mouton à Poitiers, où il était descendu, le fermier de la prévôté de cette ville et un de ses officiers qui venaient le mettre en état d'arrestation. Rémission lui fut octroyée, mais à la condition d'aller combattre les infidèles. Dans cette catégorie d'actes, il en est un encore, intéressant à un autre point de vue, qui mérite de retenir l'attention : c'est l'abolition accordée, le 18 décembre 1463, à Jean Barbin, sr de Puygarreau, avocat du roi au Parlement, mari de Françoise Gillier. Il avait été privé de cet office dès le début du règne de Louis XI, jeté en prison et poursuivi judiciairement pour abus de pouvoir, dénis de justice, fraudes, contrats usuraires, etc., commis dans l'exercice de sa charge. Mais on lui reprochait surtout d'avoir tenu des propos injurieux contre le nouveau roi. Sa grâce dut être payée chèrement ; il ne l'obtint qu'en échange de la somme énorme de douze mille écus d'orCi-dessous, n° MCCCLXXXIX, p. 435..

Pour la plupart des textes publiés dans le volume, nous n'avons rien à ajouter ici aux faits qui y sont relatés, ni aux éclaircissements biographiques ou juridiques dont ils sont accompagnés. Nous nous contenterons de quelques observations d'ordre général. Tout d'abord nous ferons remarquer le nombre relativement considérable de rémissions délivrées à des francs-archers. Anciens hommes de guerre et le plus grand nombre n'ayant servi que dans des bandes de routiers, ils avaient conservé des habitudes d'indiscipline, de violence et de pillage, et n'avaient pu se plier à une vie régulière. Dans la nouvelle milice, ils avaient beaucoup de loisirs ; au lieu de les employer à l'exercice d'un métier honnête, ils s'enquéraient de tous les mauvais coups à faire et étaient toujours disposés à y prêter la main, beaucoup plus redoutables à leurs concitoyens qu'aux ennemis du royaume. Ce grave inconvénient de l'institution des francs-archers, qui a déjà été signalé ailleursCf. le vol. précédent, Introduction, p. XXII, et p. 182, note. est mis en lumière dans une douzaine d'endroits de ce volume, mais plus particulièrement dans des lettres de rémission, très justifiées celles-là, données au mois d'avril 1459, en faveur de Jean Dousset, sergent du roi à Poitiers, qui avait frappé mortellement Jean Michau, parce que celui-ci s'opposait par la force à un exploit de justice qui lui avait été confiéN° MCCCIV, p. 114 et suiv., voici dans quelles circonstances. Après la déposition de Pierre Troillon, abbé de la Colombe, Philippe de La Fa, élu par les moines, avait été pourvu canoniquement de cette dignité par l'abbé de Cîteaux, du consentement du chapitre général de Tordre. D'autre part, Jean Brachet, qualifié de protonotaire du Saint-Siège, prétendait que le précédent abbé l'avait résignée à son profit entre les mains du Légat et que celui-ci lui avait baillé l'abbaye en commende et l'en avait mis en possession régulière. De là conflit et long procès, sur lequel il n'y a pas lieu de revenirPour les détails de cette affaire, voy. ci-dessous, p. 115 note.. Brachet s'était en effet rendu maître de l'abbaye de la Colombe, mais par la force armée, avec l'aide d'une troupe de trois cents hommes, parmi lesquels il avait enrôlé beaucoup de francsarchers, au nombre desquels se trouvait Jean Michau. Lorsque Jean Dousset se présenta pour exécuter le mandement qu'il avait reçu de prendre au corps plusieurs des partisans et complices de Brachet et de les amener prisonniers à la Conciergerie, il fut reçu à coups de couteau, et c'est en se défendant qu'il blessa mortellement Jean Michau.

Le procès entre Philippe de La Fa et Jean Brachet, ainsi qu'un second dont il est longuement question dans un autre endroitCi-dessous, p. 110 et 111, note., à propos de la commanderie de Saint-Antoine de La Lande, dont un moine nommé Pierre Faure s'était emparé par violence, dans des conditions identiques, en l'absence du légitime possesseur, Aimery Ségaud, offre de très curieux exemples des conflits en matière bénéficiale, qui furent si fréquents à cette époque, sous le régime de la Pragmatique-Sanction de Bourges et depuis sa révocation par Louis xi, entre les juridictions royales et la curie romaine.

Dans une note consacrée à Louis Chabot, sr de Jarnac, à l'occasion de la part qu'il avait prise au meurtre de Gilles de Quatrebarbe, neveu du sr de La Tour-Landry, à Clairvaux en Châtelleraudais, dont Renaud, son père, et le sr de La Tour étaient coseigneurs, nous avons dit quelques mots d'un fait particulièrement intéressant par ses conséquences pour l'histoire économiqueCf. p. 405, note 1., et sur lequel d'autres renseignements de même nature et de même source nous permettent d'insister. Le Parlement en effet fut saisi de plusieurs procès semblables à celui que des sujets de Louis Chabot ; soutenus par le comte d'Angoulême, intentèrent à leur seigneur. A chacune de ces causes, les registres de la cour, se répétant dans les mêmes termes, nous font connaître que, aussitôt après la réduction du duché de Guyenne et des pays voisins occupés par les Anglais, les trois états de Poitou, de Saintonge et d'Angoumois, d'un commun accord, avaient fait appel aux laboureurs de bonne volonté, quels qu'ils fussent et d'où qu'ils vinssent, pour remettre en culture les terres demeurées en friche et abandonnées par suite des guerres. Ces terres devenaient leur propriété et l'on n'exigeait d'eux, comme redevance, que le dixième ou le neuvième, suivant les lieux, des grains et fruits qu'ils y récolteraient, grâce à leur travail et à leur industrie.

Ce moyen de repeupler le pays et de rendre à l'agriculture son ancienne prospérité réussit à souhait et donna en très peu de temps les plus heureux résultats. Dès l'année 1459, les campagnes avaient repris un si bel aspect, les terres cultivées à nouveau donnaient un si bon rendement que plusieurs seigneurs commencèrent à regretter d'avoir consenti des conditions aussi avantageuses aux défricheurs. Dans le but de rentrer en possession des domaines concédés de cette façon ou d'en tirer, en attendant, un profit plus grand, beaucoup n'hésitèrent pas à recourir à des moyens déloyaux, comme de faire payer aux nouveaux tenanciers des droits de terrage supplémentaires, en dehors des redevances portées dans les traités. Ainsi les exactions de plus en plus abusives de Jean de La Rochefoucauld, leur seigneur, obligèrent les immigrés des châtellenies de Montignac et de Marcillac à se syndiquer et à s'adresser au Parlement pour obtenir l'exécution stricte des conventions. Le 15 juillet 1460, le procureur du roi proposa une transaction qui fut ratifiée par la cour. Le sr de La Rochefoucauld s'était primitivement engagé à laisser les laboureurs jouir de leur récolte, sauf le dixième sillon qui serait laissé sur pied à son profit ; désormais cette dîme lui serait livrée. « siée et abattue », et il éviterait ainsi les frais de moisson. Il parut se contenter de cette concession. Jusqu'en 1465, on s'en tint de part et d'autre à cet arrangement qui fut accepté, dans les pays voisins, par tous ceux qui à l'origine avaient traité aux mêmes conditions. Mais depuis, les exigences excessives des seigneurs reparurent et ne firent que s'accroître. En 1472 les procès recommencèrent et durèrent plusieurs années, comme on l'apprend par une plaidoirie prononcée au Parlement, le 4 décembre 1478, pour Pierre et François Salles, frères, contre Jean seigneur de Montignac et Pierre de Barbezières, qui leur avaient baillé desterres à défricher et, non contents de leur réclamer-des redevances qui n'avaient pas été prévues au contrat, leur faisaient subir toute sorte de mauvais traitements.

Pour les contestations de même nature entre Louis Chabot et ses sujets, les actes que nous avons cités sont du 4 mars 1477Consulter, pour l'affaire des habitants des châtellenies de Montignac et de Marcillac contre Jean de La Rochefoucauld, le registre X2a 28, aux dates des 3 et 15 juillet 1460 ; pour la plainte des frères Salles contre Pierre de Barbezières, X2a 43, date du 4 décembre 1478 ; et pour les contestations entre Louis Chabot et ses sujets, X2a 41, à la date du 4 mars 1477. c'est-à-dire d'une époque très voisine. Nous ne connaissons pas la solution de ces différentes affaires. Quoique, au moment de la transaction proposée par le procureur général et acceptée par Jean de La Rochefoucauld, on parût prévoir la promulgation d'un règlement général, il est plus probable que chaque litige fut l'objet d'un arrêt spécial, lequel pouvait d'ailleurs avoir force de loi pour tous les cas semblables. Les registres du Parlement mentionnent un assez grand nombre d'autres faits qui se rapportent à cette intéressante question ; nous n'en avons pas entrepris le relevé et nous ne voulons que les signaler à l'attention des chercheurs.

Les documents du nouveau volume, qui viennent s'ajouter aux rémissions, présentent une assez grande variété ; il en est qui peuvent encore être groupés par espèce et d'autres qui échappent à toute classification. Parmi ces derniers, quelques-uns méritent une mention particulière. Par lettres du 22 octobre 1458, Charles VII fit don à Jean bâtard d'Orléans, comte de Dunois, des villes, terres et châtellenies de Parthenay, Secondigny Vouvant, Mervent, le Coudray-Salbart, Châtelaillon, Matefelon et autres, pour en jouir après le décès d'Artur de Richemont, devenu duc de BretagneN° MCCXCIII, p. 73 et suiv.. Dunois ne tarda pas à entrer en possession de ce riche héritage, le comte de Richemont étant mort le 26 décembre suivant. De 1456 à 1463, des lettres d'anoblissement furent accordées à sept Poitevins, de familles plus ou moins connues : Guillaume Chauvin, licencié en lois, sans doute le même qui fut lieutenant du bailli de Gâtine ; Michel Darrot, sieur de Beaufou et de la Poupelinière ; Jean Doucereau, Henry de Gouys, Jean Malescot, Hélionnet Vidalvin et Pierre Ségaud, de Champdeniers. Les lettres en faveur de ce dernier mentionnent deux notables personnages, de sa parenté, qui remplirent, hors de leur patrie, des fonctions éminentes et sur lesquels nous avons pu recueillir des renseignements biographiques intéressants. Le premier, Aimery Ségaud († 1470), son oncle paternel, évêque de Bellay en 1438, transféré, vers la fin de cette année, à l'évêché de Mondovi, médiateur de la paix entre Louis Ier, duc de Savoie, et François Sforza, duc de Milan, fut en même temps commandeur de Saint-Antoine de la Lande, non loin de Champdeniers. Son éloignement facilita l'intrusion d'un compétiteur sans scrupule, qui, après s'être emparé de force de la commanderie, lui suscita de graves ennuis et un procès interminable dont nous avons relaté toutes les péripéties. Le second, Jean Bretonneau, appelé aussi Jean de Champdeniers, oncle de la femme de Pierre Ségaud, était à la tête de la commanderie de Saint-Antoine de Viennois d'Issenheim en Alsace. Accrédité par le duc Sigismond d'Autriche auprès de Charles VII, il fut chargé d'importantes négociations et tenta de réconcilier le dauphin Louis avec son pèreSur ces deux personnages, cf. ci-dessous, p. 109, note, et 112, note..

Des permissions d'élever des fortifications furent octroyées à François de Vendel, chevalier, pour son hôtel de l'Ebaupinaye, mouvant d'Argenton (février 1459) ; à Jean de Montournais, chevalier, avec droit de guet et de garde, pour la place de Puymorin, dont il était seigneur (mai 1459 et 22 septembre 1462) ; à Jean de Mondon, écuyer d'écurie du comte du Maine, pour son château des Coutaux (novembre 1460) ; à Jean Mourraut, conseiller du roi, conservateur des privilèges de l'Université de Poitiers, pour son hôtel de la Motte-sur-Croutelle (novembre 1461) ; les mêmes lettres lui accordaient tous droits de haute et moyenne justice en ladite seigneurie. Jacques Rataut, écuyer, obtint aussi, par lettres de mai 1462, l'autorisation de clore de murs et de fortifier Curzay et, par un autre acte de même date, d'ériger en ce lieu des fourches patibulairesVoy. p. 94, 121, 269, 305, 356, 358 et 381.. Le roi fit don enfin à Mathurin Arembert, son procureur en la sénéchaussée de Poitou, de la haute justice de la seigneurie de SepvretN° MCCCLXXXI, p. 411.. Un marché hebdomadaire fut institué à Vouillé, par lettres de décembre 1460, à la requête et au profit du chapitre de Sainte-Radegonde de Poitiers, seigneur du lieuN° MCCCXLV, p. 271..

On peut citer encore trois lettres de légitimation, données, en faveur : 1° de Guillaume Lemaire, fils naturel de Guillaume, sr de Fontaines, et de Jeanne Cantereau ; 2° de Bernard Morinet, fils de feu frère Jean Mauclaveau, prieur de l'église Saint-Hilaire de

Leigné-sur-Usseau, et de feu Jeanne Morinet ; 3° de Louis Perceval, homme d'armes de l'ordonnance dans la compagnie du sire de Crussol, sénéchal de Poitou, enfant naturel d'Olivier de Monferaut, dit Perceval, connu pour avoir pris part aux excès de la bande de Jean de La Roche, sr de Barbezieux, et à la rébellion de Guy, sr de VerteuilVoy. p. 190, 295 et 449.. Terminons cette énumération par les lettres de naturalisation qui furent délivrées à deux Ecossais établis en-Poitou, Job Henzell et Robin Vernon, et à Pierre de Sainte-Marthe, commis de Jean Hardouin, sr de Nozay, trésorier de FranceCi-dessous, p. 64, 65 et 262.. Ces dernières, portant la date de septembre 1460, sont adressées, entre autres officiers royaux, au bailli de Touraine. Rien de ce qui peut avoir trait, de près ou de loin, à la famille de Sainte-Marthe, dont tant de membres se sont fait un nom illustré dans l'histoire littéraire aux XVIe et XVIIe siècles, ne saurait nous laisser indifférent. Aussi croyons-nous devoir insister ici sur l'importance possible d'un texte qui paraît avoir échappé jusqu'à présent à la critique. On sait que les Sainte-Marthe, possessionnés dès la fin du XVe siècle dans le Loudunais, qui faisait alors partie du bailliage de Tours, ont émis la prétention de se rattacher à une famille féodale de même nom, sur laquelle du reste on n'est que fort peu renseigné, car on n'en connaît que deux membres : Guillaume-Raimond de Sainte-Marthe, sr de Roquebert, chevalier, qui servit le roi Philippe de Valois, et Nicole de Sainte-Marthe, qui fut, paraît-il, armé chevalier par le comte de Foix au siège de Bayonne, l'an 1451. Dreux du Radier et les historiens qui, à la suite de l'auteur de la Bibliothèque historique et critique du Poitou, se sont occupés de nos Sainte-Marthe, ont admis cette prétention sans la discuter. Elle ne s'appuie cependant sur aucune preuve et il y a peu d'apparence qu'elle soit justifiée. A partir du moment où sa filiation peut être établie avec certitude, la famille poitevine fournit des médecins, des magistrats, des avocats, des historiens, des poètes et des théologiens ; il est donc plus vraisemblable qu'elle était simplement d'origine bourgeoise, et il serait très possible qu'elle eût pour fondateur ce Pierre de Sainte-Marthe, commis d'un trésorier de France, lequel était un personnage considérable, possédant à Tours un hôtel où il donna plus d'une fois l'hospitalité à Charles VII. Ses lettres de naturalisation ne disent malheureusement pas de quel pays il était originaire, mais seulement qu'il était « estranger et natif de hors nostre royaume, où il a commencé à fréquenter il y a vingt ans et plus ». Ces renseignements peu précis ne permettent que des conjectures. On peut supposer que Pierre de Sainte-Marthe fut le père de Louis, sr de Villedan (près de Beuxe en Loudunais), le premier dont l'identité et la descendance soient certaines, et même qu'il épousa Marie, fille naturelle de Jean Hardouin, laquelle fut légitimée le même jour. Les recherches que nous avons faites, dans l'espérance de changer cette présomption en certitude, n'ont point donné de résultat. D'autres seront peut-être plus heureuses. En tout cas, nous persistons à croire que cette piste ne doit pas être négligéeCf. p. 262, note, ci-dessous.. Les premiers actes de Louis XI relatifs au Poitou que nous ayons rencontrés dans les registres de la grande chancellerie sont donnés en faveur de la ville de Niort. Il n'avait pas oublié que, lors de la Praguerie, les habitants de cette ville lui avaient fait un bon accueil, et il voulut les en récompenser non seulement en confirmant leurs anciens privilèges et franchisesLettres de novembre 1461, n° MCCCXL1X, p. 297 et note 2. ce qui au début d'un règne n'était guère qu'une formalité ordinaire, mais en leur en octroyant de nouveaux. Nous publions le texte des lettres de noblesse qu'il accorda, en novembre 1461N° MCCCL, p. 299., au maire, aux douze échevins et aux douze conseillers jurés de la commune, comme, près d'un siècle auparavant, Charles V l'avait fait en faveur des magistrats municipaux de Poitiers et de la Rochelle. On sait, d'autre part, qu'à la même date il rétablit à Niort le siège et auditoire des élus, qui avaient été transférés par son père à Saint-Maixent, et qu'il y institua en outre un siège royal et cour ordinaire, dispensant par cette création les habitants d'attendre, pour le jugement de leurs procès, les assises du sénéchal ou d'aller plaider à Poitiers.

Le nouveau roi confirma aussi les lettres patentes des comtés de Poitou et des rois de France, particulièrement celles de Charles VII, les unes instituant la commune de Poitiers, les autres accordant aux habitants et aux officiers municipaux divers privilèges, libertés et franchises ; les statuts donnés aux barbiers de cette ville, en août 1410, par Jean duc de Berry ; le règlement et les statuts du métier de tailleur et pourpointier ; les lettres d'amortissement obtenues du comte de Poitou, en 1405, par le chapitre et l'église collégiale de Saint-Hilaire-le-Grand, pour des biens acquis ou à acquérir pouvant s'élever jusqu'à 200 livres de revenu annuel3 Les textes en question sont imprimés sous les nos MCCCLV, MCCCLXI, MCCCLXXXIII et MCCCLXXXVII., etc. On trouvera, en tète du prochain volume (année 1465), d'autres confirmations du même genre, en faveur de plusieurs établissements poitevins. Citons encore des lettres de sauvegarde de février 1462, octroyées à l'évêque et au chapitre de l'église de MaillezaisCi-dessous, n° MCCCLVII, p. 314. ; des lettres portant exemption, au profit des vingt-cinq échevins nobles de Poitiers, de tout service militaire en dehors de la villeDécembre 1463, n0 MCCCLXXXVIII, p. 432. ; un acte de cession en toute propriété à Jean Mourraut, conseiller du roi, du Bois de la Marche, sis en la châtellenie de Lusignan, en échange de sa maison de Poitiers qu'il louait antérieurement à la Monnaie établie dans cette villeLe 26 décembre 1463, n° MCCCXCI.p. 444.. On voit, par ces quelques exemples, que ce nouveau volume fournit encore à l'historien des matériaux aussi variés qu'intéressants.

Au cours des quatre premières années de son règne, Louis XI traversa à plusieurs reprises le Poitou, mais sans y faire de longs séjours. Au mois de janvier 1462, se rendant de Touraine en Guyenne, il passa par Poitiers, Beauvoir, Marans, la Rochelle, etc., et à son retour, en mai et juin, il s'arrêta à Ruffec, Lusignan, Châtellerault, Champigny, d'où il alla se reposer pendant un mois à Chinon. La même année, au mois de septembre, on trouve des actes royaux datés de Bressuire et de Thouars. Puis, lors d'un second voyage à Bordeaux, en janvier 1463, le roi séjourna à SepvretEntre Amboise et cette localité l'itinéraire royal n'est pas connu. et ensuite à l'abbaye de Celles. La Guyenne et le Languedoc le retinrent pendant six mois, et ce ne fut que dans les premiers jours de juillet qu'il repassa par le Poitou, notamment à Chauvigny. Postérieurement, on ne rencontre pas d'actes de la grande chancellerie datés de localités poitevines avant les mois de février et de mars 1465 ; à cette époque, Louis XI fit un assez long séjour à Poitiers ; on peut citer plusieurs lettres patentes et missives qui furent expédiées de cette ville, du 21 février au 9 mars. Il fut ensuite à Parthenay et à Thouars, où il demeura une dizaine de jours environ, suivant les indications fournies par quatre actes signés de lui, les 16, 20, 22 et 24 mars. Le 28, il était à Saumur, où il résida jusqu'au 18 avril.

II

Nous avons réservé pour être placés ici les développements que comporte l'examen critique d'un attentat particulièrement dramatique et odieux, parmi tant d'autres qui accusent les mœurs déplorables de l'époque. Neuf lettres de rémission obtenues par les principaux coupables, gentilshommes et magistrats, font connaître le fait brutal, mais altèrent et travestissent singulièrement la vérité en ce qui touche les causes, les circonstances et le but poursuiviPour le texte de ces lettres, voir les n°s MCCCV1I à MCCCXIII, p. 125 à 165, et le n° MCCCLIII, p. 311-317, et la note de la p. 126, dans laquelle nous annonçons l'intention de contrôler, dans l'Introduction, les assertions invraisemblables qu'elles contiennent.. C'est le récit partial d'hommes qui cherchent à dissimuler le plus possible leur responsabilité et à circonvenir de leur mieux le dispensateur des grâces, afin d'échapper au châtiment. Cette remarque peut s'appliquer en général à presque tous les faits relatés dans les rémissions, comme nous avons eu plus d'une fois déjà l'occasion de le faire observer. Mais dans le cas actuel, il y a un parti pris de mensonge qui dépasse les bornes.

On nous pardonnera d'insister, peut-être trop longuement, sur cette affaire ; le rang des personnages qui y jouèrent un rôle en accroît l'importance, et, d'un autre côté, les exemples nombreux de faits semblables à la même époque lui donnent, ce nous semble, une portée plus générale. Après avoir opposé le récit des parents de la victime à celui de auteurs des l'attentat, nous examinerons dans toutes leurs complications les poursuites judiciaires qui en furent la conséquence; elles caractérisent assez exactement le type des procès d'alors en matière d'entérinement de rémissions. L'on y verra aussi combien la plus haute juridiction du royaume restait elle-même impuissante, pour la répression des crimes, devant l'audace de coupables bien protégés et les subterfuges auxquels il leur était permis de recourir.

Le dimanche 14 mai 1458, Hector Rousseau fut assailli par une nombreuse troupe armée dans son hôtel du Breuil-Barret et, comme il ne voulait pas se laisser prendre et s'était enfermé dans sa maison, on en fit le siège puis on y mit le feu. Pour échapper aux flammes, il dut se réfugier sur le toit, où il fut tué d'un trait d'arbalète. Si l'on s'en rapportait au seul texte des rémissions, il n'y aurait pas eu en réalité d'autre coupable que la victime ellemême. Les inculpés étaient poursuivis sans aucune raison, n'ayant fait que remplir un devoir ; encore l'avaient-ils accompli avec des ménagements dignes d'éloges. Et cependant, singulière contradiction, ils avaient recours à la clémence royale !

D'après leurs dires, le sénéchal de Poitou, dûment informé de plusieurs crimes, rançonnements, excès, voies de fait et autres délits et maléfices commis par Hector Rousseau, l'avait décrété de prise de corps et avait donné mandement à Mathurin Marot, substitut du procureur à Fontenay-le-Comte, de le mettre en état d'arrestation. Celui-ci, sachant que ledit Hector était toujours escorté de gens de guerre et prêt à résister par la force aux officiers du roi, qu'il les avait déjà plusieurs fois battus et maltraités, requit quelques gentilshommes du pays, entre autres Mathurin d'Appelvoisin, Jacques Jousseaume, sr de la Geffardière, Jean de Puyguyon, sr du Teil, et Jean Beufmont, autre écuyer, devenir lui prêter main forte pour exécuter sa commission. Tous avaient obéi, comme ils y étaient tenus, et quand ils s'étaient présentés au Breuil-Barret, accompagnés de leurs gens, Rousseau, qui les attendait et s'était mis en état de leur opposer une vigoureuse résistance, avait fait tirer sur eux deux coulevrines et des arbalètes. Néanmoins ils s'étaient bornés à lui faire entendre des paroles conciliantes, cherchant, dans son intérêt, a le persuader de se rendre de bon gré et de se constituer prisonnier, s'engageant à le conduire sain et sauf à Poitiers. Pendant ces pourparlers, après avoir invité Mathurin d'Appelvoisin à entrer dans sa maison, pour causer plus à l'aise, il avait usé de traîtrise et porté à celui-ci un grand coup d'épée qui lui aurait ouvert la gorge, si l'arme n'avait heureusement dévié en heurtant le bord de sa salade. Quant à l'incendie, on donnait à entendre qu'il avait été allumé à l'intérieur, soit à dessein, soit par accident : les flammes bleuâtres répandaient une odeur de soufre, ce qui tendait à prouver que le feu avait pris à un amas de poudre à canon, dont l'hôtel du Breuil-Barret était approvisionné. Réfugié sur le toit, et protégé par une cheminée, Hector Rousseau tirait encore sur les hommes qui entouraient l'hôtel sans aucune mauvaise intention et jetait contre eux des pierres et les tuiles de la couverture. Il avait été frappé d'une flèche, dont il était mort (cela n'était pas niable), mais on ne pouvait savoir par qui. En tout cas, on se trouvait en état de légitime défense et l'homicide était tout ce qu'il y a de plus excusable. Tel est le résumé de la version contenue dans les différentes requêtes présentées par Mathurin d'Appelvoisin, Jacques Jousseaume et les autres, en vue de se faire délivrer plus facilement leur rémission.

Hector Rousseau, qui appartenait à une famille estimée et bien apparentée, était procureur du roi en la sénéchaussée de Guyenne et placé sous la sauvegarde royale depuis un autre attentat dont il avait été victime six ans auparavant, et qui avait failli déjà lui coûter la vie. Nous avons parlé avec quelque détail de ce premier crime dans un autre endroit de ce volumeCi-dessous, p. 147, note., et il nous suffira de rappeler ici que son principal auteur, Jean de Beaumanoir, sr de la Héardière, était parent par alliance du sr de la Geffardière. Hector avait deux frères, Albert, qualifié écuyer, et Charles, religieux de l'ordre de Saint-Benoît. Par son second mariage, il était entré dans la famille d'un président au Parlement bien connu, Jean Rabateau.

Aussitôt après le tragique événement, Louise Rabateau, veuve d'Hector, tutrice de sa fille Jeanne, et Albert Rousseau, comme ayant le bail de Marguerite, fille du premier lit du défunt, demandèrent justice tout d'abord aux officiers de la sénéchaussée de Poitou. Mais ceux-ci firent preuve d'une grande partialité en faveur des inculpés, parce qu'ils craignaient de déplaire au sénéchal, Louis de Beaumont, sr de la Forêt-sur-Sèvre, qui avait épousé une cousine germaine de Jacques Jousseaume, sr de la Geffardière. Un semblant de procédure fut entamé à Poitiers, et dès le premier incident, les plaignants, voyant le peu de bienveillance des juges, relevèrent appel. Le Parlement de Paris, au premier examen de l'affaire, en retint la connaissance et s'en réserva le jugement. C'est dans les registres criminels de la cour que nous puisons les renseignements qui vont suivre.

Vingt inculpés, au début du procès, étaient englobés dans les poursuites : Jacques Jousseaume, écuyer, sr de la Geffardière, Mathurin d'Appelvoisin, chevalier, Jean et Jacques de Puyguyon, Jean Beufmont, écuyers, Mathurin Marot, substitut à Fontenay-le-Comte, Nicolas Martin, praticien en cour laie, demeurant à Saint-Pierre-du-Chemin, Jean Chauvin (aliàs Derveau ou Dreveau, dit Chauvin), de Montournais, Maurice Herpin, du Breuil-BarretCes neuf premiers sont ceux qui obtinrent les lettres de rémission datées de mai et juin 1459 (pages 125-165). Jean Lermenier, Mathurin Helyot, dit Hariau, Guillaume Durant, Jean Auguin, Jean Brisset, Jean Dauras, Guillaume Guérart, sergent, Etienne Bérault, archer, Jean Payron, Marsault Martin et Guillaume Pauvereau. Avant d'indiquer les phases diverses d'une procédure très compliquée, nous devons tout d'abord présenter, d'après les plaidoiries et les arrêts, un résumé - des faits, tels qu'ils furent exposés par les parents de la victime et leur avocat Popaincourt.

Celui-ci, après avoir rappelé l'état civil d'Hector Rousseau, qui avait trente-cinq ans au moment de l'attentat, l'honorabilité de sa famille, ses deux mariages, les alliances qui en résultaient, ses fonctions de procureur du roi en Guyenne, l'estime, la considération et aussi les biens patrimoniaux considérables dont il jouissait, explique l'origine de la haine que lui avaient vouée les deux principaux accusés. Le lieu sur lequel le défunt avait fait construire ou plutôt réédifier la maison du Breuil-Barret lui appartenait, ainsi que la censive et la justice. Jaloux de garder ses droits et d'améliorer son domaine, il y fit creuser deux étangs, qui coûtèrent d'ailleurs fort cher. Mathurin d'Appelvoisin, à l'instigation de sa mère, qui se prétendait lésée, fit par deux fois rompre les chaussées des étangs et battre les terrassiers qui y travaillaient. Dès lors il devint l'ennemi juré de ce voisin peu commode qui, fort de son bon droit, avait porté plainte contre lui à la sénéchaussée de Poitou, puis à la cour, et s'était fait placer sous la sauvegarde du roi. Le sr de la Geffardière, de son côté, prenant fait et cause pour son cousin Jean de Beaumanoir qui, en réparation de son agression criminelle contre Hector et quoiqu'il eût, lui aussi, obtenu des lettres de rémission, avait été condamné à de grosses amendes et à la prisonCf. ci-dessous, p. 127, note., cherchait tous les moyens de le venger et avait conclu dans ce but un pacte avec Mathurin d'Appelvoisin. Ils avaient certainement résolu l'un et l'autre, depuis longtemps, la mort d'Hector Rousseau. L'avocat raconté une première tentative qu'ils firent pour se débarrasser de lui et qui échoua parce qu'ils ne purent l'atteindre. Cette fois déjà, accompagnés de « gens armés et embastonnés », ils étaient venus à son hôtel du Breuil-Barret, pour le surprendre. Heureusement il était absent. Les deux complices durent se contenter de rompre les huis et les fenêtres et d'emporter ce qu'ils purent. Puis ils se rendirent à l'hôtel de Pierre Goulart et lui demandèrent où était Hector, jurant et reniant Dieu qu'ils lui « osteroient la vie du corps quelque part que trouver le pourroient ». Goulart leur remontrant que ce serait folie, Jousseaume ajouta qu'il voudrait avoir perdu 2000 écus et que Rousseau fût mort, et que, quoi qu'il advint, il le ferait périr. Ayant appris alors qu'Hector allant à Paris devait passer par Parthenay, ils partirent à sa poursuite de toute la vitesse de leurs chevaux, poussèrent jusqu'à Parthenay et là ayant su que le voyageur avait beaucoup d'avance, ils renoncèrent à aler plus loin. « Il l'a échappé belle ! » dit Jousseaume, et pour se consoler, il battit la femme d'un maréchal, en relations avec Hector, de qui il tenait le renseignement.

Hector Rousseau fut averti de cette entreprise ; il sut aussi que le sr de la Geffardière, mettant à profit sa parenté avec le sénéchal de Poitou, avait réussi, par ses démarches et sollicitations, à se faire délivrer un décret de prise de corps contre lui par le juge de Fontenay. Il releva appel à la cour, et comme on venait le signifier à Jousseaume, celui-ci vint s'embusquer dans un bois avec plusieurs de ses gens, en habillement de guerre et tenant à la main une arbalète bandée. Il ne trouva pas encore l'ennemi qu'il cherchait, mais seulement son frère Charles Rousseau, un de ses serviteurs nommé Nalot et le sergent qui était chargé de porter à sa connaissance l'acte d'appel ; il leur donna la chasse et battit le sergent, ne lui cachant pas que son plus vif désir était qu'Hector mourût de sa main, ce qu'il répétait du reste publiquement. Dans cette intention il vint plusieurs fois au Teil, distant d'un quart de lieue du Breuil-Barret, et il continuait, malgré l'appel, à circonvenir le sénéchal afin d'en obtenir un nouveau mandat d'amener. Rousseau, qui était au courant de ces menées, se rendit à Poitiers, où il demeura plusieurs semaines, se montrant chaque jour au Palais et répétant aux officiers de justice que son ennemi, il le savait bien, voulait le faire emprisonner, qu'il prenait les devants et était prêt à répondre à quiconque voudrait se faire partie contre lui. Mathurin d'Appelvoisin et Jousseaume chargèrent Puyguyon et un autre de leur faire dire quand Hector retournerait à son hôtel. Celui-ci en effet, après avoir vainement attendu qu'on le poursuivît judiciairement, se décida à quitter Poitiers et rentra chez lui le samedi veille de la Pentecôte. Ses adversaires, immédiatement avertis, arrivèrent le jour même à l'hôtel du Teil, chez les Puyguyon. Jousseaume, accompagné de dix ou douze hommes armés, y coucha ; le soir il planta contre le mur une chandelle allumée sur laquelle il fit tirer ses arbalétriers, disant qu'elle représentait son ennemi et que celui qui la toucherait aurait dix écus. Le lendemain matin, il envoya requérir Mathurin Marot et Appelvoisin de faire toute diligence, et en même temps, sur son ordre, Maurice Herpin alla dire à Rousseau que son père, avec lequel il était en procès, très désireux d'en venir à un arrangement, le viendrait voir dans la journée, et qu'il l'attendît. Rousseau, crédule, répondit qu'il était très content de cette ouverture et pria le messager de rester à dîner avec lui, invitation que celui-ci déclina, prétextant qu'il en avait accepté une semblable de Guillaume Durant, son beau-frère, et lui avait engagé sa parole. Le sr de la Geffardière et sa compagnie demeurèrent au Teil sans bouger, du samedi au dimanche 14 après midi. Charles Rousseau, le religieux bénédictin, vint sur ces entrefaites dire à son frère qu'il y avait au Teil des gens assemblés contre lui, et en conséquence qu'il s'enfermât dans sa maison ou bien, ce qui serait mieux, qu'il quittât le pays sans perdre de temps. D'autres avertissements semblables lui vinrent de différents côtés. Hector se mit à table. Après dîner et comme il disait ses grâces, arriva la bande de Jousseaume, celui-ci en tête, criant : « A mort, à mort ! tuez, tuez ! » et tirant des raillons, par les fenêtres ouvertes. La femme d'Hector sortit, espérant calmer ces forcenés ; elle se mit à genoux devant Jousseaume, lui requérant merci, faisant appel à son honneur de gentilhomme et lui demandant ce qu'il reprochait à son mari. Mais il lui arracha son chaperon, la déchevela et la traita de ribaude et de p.... Alors elle rentra dans sa maison. Rousseau vint à une fenêtre, haute de dix à douze pieds et toute treillissée ; il la ferma à cause des traits qui y pleuvaient. Jousseaume, qui l'aperçut, lui cria qu'il aurait son corps et le diable son âme, et qu'il ne fallait que lui pour bourreau. Hector lui déclarant qu'il appelait de cette agression, il repartit que cet appel ne lui servirait de rien. A ce moment, Louise Rabateau sortit de nouveau et trouva des arbalétriers tout autour de son hôtel. Elle s'agenouilla une seconde fois devant Jousseauame et le pria d'avoir pitié de son mari, lui offrant de bailler caution et de promettre par serment qu'il se rendrait partout où l'on voudrait le mener. Le sr de la Geffardière ne lui répondit rien, mais Colas Martin la frappa d'un vouge et la renversa dans un fossé rempli d'épines, où elle fut blessée cruellement au visage et aux mains ; or elle était grosse et quelques jours après elle accoucha d'un enfant mort.

Ensuite Jousseaume envoya Puyguyon et Herpin dire à Appelvoisin et à Marot de se hâter. Sur les trois heures, le premier arriva à la tête d'une troupe armée et demanda si le ribaud n'était pas pris. Alors il fit apporter des fagots et des bûches contre la porte de l'hôtel, rompit l'huis et essaya de pénétrer à l'intérieur. A Hector qui lui demandait ce qu'il voulait, il répondit qu'il avait charge de l'emmener prisonnier ; puis, invité à montrer sa commission, il déclara que ce n'était pas nécessaire. Après quelques pour parlers plus courtois, il entra seul dans l'hôtel, affirma que la commission existait, qu'elle était entre les mains de Marot, mais qu'on ne l'attendrait pas et qu'il fallait s'en rapporter à lui et obéir. Hector lui signifia qu'il appelait de cette commission, et Louise le supplia à genoux d'avoir pitié de son mari : « Je ne puis, répondit-il, lui vouloir du bien, après le tort qu'il m'a fait.» Alors Rousseau et sa femme lui dirent qu'ils remettaient leur sort entre ses mains, ce dont il parut satisfait surie moment, et même, à la prière qu'ils lui adressèrent de faire partir Jousseaume, il répondit qu'il voulait bien essayer. A cet instant, croyant les choses en voie d'apaisement, Louise porta dehors du pain et du vin ; mais ce fut une nouvelle occasion d'injures de la part du sr de la Geffardière ; il s'écria qu'il ne goûterait pas au vin de ce « vilain sorcier clerjaut » et ne quitterait la place qu'après avoir accompli sa volonté. Appelvoisin rapporta ces propos à Hector et ajouta qu'ils n'étaient pas de nature à faciliter l'accord. Puis il sortit de nouveau, continuant l'entretien avec Louise Rabateau ; il la conduisit à l'hôtel de la Houssaye, et lui promit encore de faire ses efforts pour arranger l'affaire et d'écrire dans ce but au sénéchal de Poitou, qui se trouvait à cette heure au château de la Forêt-sur-Sèvre. De fait il se mit à écrire et fit le semblant de bailler sa lettre au fils de la Houssaye, pour la porter au destinataire. Celui-ci n'alla guère loin, car il était au Breuil-Barret dans la même soirée et fut témoin des événements qui suivirent.

Cependant Jousseaume demeurait inflexible et se montrait de plus en plus insultant. A une nouvelle tentative que fit Louise pour le fléchir, il lui conseilla d'aller changer sa robe rouge contre une noire, et à la fille aînée d'Hector il dit que si elle voulait rester là, il lui ferait manger du cœur de son père. Un notable marchand qui passait par le pays osa lui reprocher sa conduite et offrit de donner jusqu'à dix mille écus de caution pour Rousseau, dont il répondrait corps pour corps. « Va-t-en d'ici, ou il pourrait t'en cuire ! » lui repartit en jurant La Geffardière, et il répétait qu'il aurait le corps et le diable l'âme. De son côté, Hector criait qu'il ne demandait pas mieux que d'obéir, mais qu'on lui montrât la commission, ajoutant qu'il était appelant et renouvelait son appel.

Sur le soir, Marot arriva avec ses archers. Appelvoisin s'était désarmé et avait revêtu la robe blanche d'un moine. Jousseaume, qui avait fait apporter des vivres, lui envoya demander s'il viendrait souper avec lui et tiendrait son serment. Il se rendit à l'invitation, et vint déclarer à Hector qu'il n'y avait rien à faire et que, eût-il cent vies, il n'en réchapperait point et mourrait ce jour-là. Leurs compagnons et complices rompirent alors une vieille loge de charpenterie, mirent le bois en un tas, assemblèrent, trois ou quatre cents fagots dont Hector avait fait provision et placèrent le tout contre la porte de l'hôtel. Appelvoisin alla s'armer de nouveau et revint dire à Rousseau qu'il lui rendit sa foi, car il fallait qu'il mourût. Louise Rabateau avec ses enfants s'en fut à l'église prier pour son mari. Marot dit alors que, puisque le ribaud n'était pas pris, on allait lui faire un beau feu. Jousseaume, Appelvoisin et Marot se retirèrent un peu en arrière et conférèrent ensemble. Le premier chargea Nicolas Martin de recommander à Guillaume Julien, proche voisin, d'enlever ses meubles et de faire sortir de la maison ses enfants, parce qu'on se disposait à brûler l'hôtel des Rousseau. Aussitôt Marot cria au feu! avant même qu'il fût allumé, puis, feignant d'être malade, il s'en alla au Breuil-Barret.

Le feu, activé par le vent, prit de tous les côtés à la fois et bientôt serra de si près Hector qu'il dut se réfugier sur le toit, criant qu'il se rendait à Jousseaume et lui requérait merci. Celui-ci lui répondit en ricanant : « Brûle, ribaud, brûle ! » En même temps on faisait pleuvoir sur le malheureux des pierres et des traits. Finalement il s'adossa à la maçonnerie d'une cheminée et commença à faire sa prière. Jousseaume, le voyant en cette posture, le montra à l'un des arbalétriers que Marot avait amenés, nommé Etienne BéraultDu moins, dans le pays, cet homme passait pour avoir tiré le coup mortel, parce que depuis le jour de l'attentat il avait pris la fuite et n'avait pas reparu (X2a 30, fol. 199). qui lui tira un raillon par le travers du corps. Il mourut sur le coup. Jousseaume fit monter Jean Chauvin sur la maison et lui donna l'ordre de jeter le cadavre en bas, lui promettant sa dépouille. Ainsi fut fait. Une fois à terre, Chauvin lui ouvrit la bouche à l'aide d'une javeline, afin de s'assurer qu'il était bien mort, puis il lui retira ses vêtements et les suspendit à un bâton, disant que c'était la peau du loup. Jousseaume fit déchausser sa victime, pour voir, disait-il, « l'eguillette que son cousin Beaumanoir lui avoit baillée », et joignant l'ironie à la cruauté, il eut cette exclamation : « Tu peux te vanter, ribaud, de nous avoir donné du mal ! » Le cadavre resta deux jours sur la place. Ce fut seulement le troisième jour qu'Albert Rousseau arriva, et le fit ensevelir et enterrerCe détail est fourni par un acte postérieur (X2a 32, à la date du 23 février 1464)..

L'hôtel fut entièrement consumé et les meubles, papiers et biens qu'il renfermait devinrent la proie des flammes. On ajoute que deux jeunes pèlerins, qui étaient venus de Bretagne le jour même et avaient été retenus à dîner par Hector Rousseau, furent brûlés sous un lit où la frayeur les avait fait se cacher. Charles Rousseau le religieux, frère du défunt, sauta par une fenêtre au moment de l'incendie. Les forcenés le rouèrent de coups et Peussent tué s'il n'eût trouvé le moyen de leur échapper par la fuite. Les deux serviteurs du défunt, Etienne Nalot et Jean Potier, tombèrent dans leurs mains, subirent leurs mauvais traitements, furent liés à la queue des chevaux et menés à Fontenay-le-Comte et de là à Poitiers, où ils restèrent longtemps en prisonVoir les reg. X2a 28, à la date du 17 juillet 1459 ; X2a 29, fol. 165 et suiv.; X2a 30, fol. 195 V° et suiv..

Ce récit diffère du tout au tout de celui des lettres de rémission, comme il est facile de s'en assurer en comparant les deux textes. Peut-être, si l'on voulait les discuter phrase par phrase, ce que nous n'avons pas l'intention de faire, trouverait-on que certains points restent obscurs, la question des coulevrines par exemple. Il n'était pas commun que des engins de guerre de cette sorte se trouvassent dans des maisons particulières. Aussi les inculpés n'auraient certainement pas imaginé d'accuser Rousseau de s'en être servi contre eux, s'il n'en eût possédé au moins une au Breuil-Barret. L'avocat de ses héritiers eut l'occasion, dans une réplique, de reconnaître qu'en effet il y avait une coulevrine dans l'hôtel d'Hector, mais qu'elle était hors d'usage et provenait de Jean Mourraut, le premier mari de Jeanne RabateauReg. X2a 28, à la date du 20 juillet 1459.. Rousseau aurait essayé de s'en servir pour repousser ou effrayer les assaillants, qu'il n'y aurait pas lieu d'en être autrement surpris ; il n'était probablement pas d'un caractère plus endurant que ses adversaires. Mais cela n'excuserait en rien la conduite de ceux-ci.

Dès le 26 mai 1458, le Parlement prescrivit une information sur les lieux et l'emprisonnement des coupables. Guillaume Artault, premier huissier de la cour, commis à l'exécution de ces ordres, parvint à mettre en état d'arrestation, à Poitiers même, Mathurin Marot et Jacques Jousseaume. Il saisit leurs chevaux et confia les deux prisonniers à la garde d'Hugues de Conzay, lieutenant du sénéchal. Il se rendit ensuite à Saint-Pierre-du-Chemin, pour prendre Mathurin d'Appelvoisin. Celui-ci l'ayant menacé de sa dague, il se contenta de l'ajourner et revint à Poitiers. Là il réclama en vain ses prisonniers, qu'il était chargé de conduire à Paris ; Conzay et le procureur du roi, Jean Barbe, refusèrent de les livrer et, deux jours après, les firent remettre en liberté.

La cour, continuant les procédures, ajourna à plusieurs reprisesLe premier ajournement avait été fixé au 20 juillet 1458, mais il dut être reporté au 21 novembre suivant, parce que le Parlement siégeait pour le procès de Jean duc d'Alençon et avait été obligé de se transporter à Montargis d'abord, puis à Vendôme, jusqù'au 10 octobre 1458. (Arch. nat., X2a 29, fol. 165 et suiv.) Mathurin d'Appelvoisin, Jacques Jousseaume et tous les complices dont nous avons relevé les noms ci-dessus. Aucun né comparut. Louise Rabateau et Albert Rousseau obtinrent trois défauts contre eux, le 21 novembre 1458, les 1er mars et 4 mai l459. Plusieurs des inculpés cependant, entre autres Appelvoisin, Jousseaume, Marot et Martin, étaient venus à Paris, afin de faire agir leurs amis et négocier leur rémission ; en attendant, ils s'étaient mis en franchise au couvent des Frères mineurs, comme on l'apprend par un mandement de la cour au sénéchal du Poitou, où il est dit aussi que celle-ci, ayant été consultée et considérant le cas comme irrémissible, avait donné un avis défavorable, ce qui avait décidé les susdits à regagner leur pays. Ce mandement avait pour objet de faire mettre en vente les biens des coupables, afin de permettre à Albert Rousseau, avec l'argent qui en proviendrait, de continuer les poursuites. Cependant, le 19 juin suivant, munis enfin de leurs lettres de rémission, Mathurin d'Appelvoisin le sr de la Geffardière, Jean de Puyguyon, Jean Beufmont, Mathurin Marot, Nicolas Martin et Jean Derveau, dit Chauvin, se présentèrent devant la cour, pour en requérir l'entérinement. La veuve d'Hector Rousseau et son frère, auxquels s'était joint le procureur général, se déclarèrent opposants à cette requête et demandèrent : 1° l'emprisonnement des impétrants; 2° un double de leurs lettres, afin de pouvoir les réfuter, ce qui leur fut accordé. Les sept demandeurs furent incarcérés à la Conciergerie jusqu'à nouvel ordre. A la même audience, se produisit une autre complication : l'évêque de Poitiers fit réclamer les prisonniers, prétendant qu'ils étaient clercs et par suite ses justiciables. On verra que plus tard Jacques de Puyguyon, fils de Jean et l'un des inculpés, fut rendu, lui, à l'évêque de Paris, qui fit instruire son procès séparément, sa qualité de clerc étant établie. Quant aux autres, leur prétention n'avait d'autre but que de créer un incident, de compliquer la procédure et d'en retarder la conclusion ; elle fut écartéeId. X2a 29, fol. 66.. Ce même jour encore, 19 juin, Louise Rabateau et Albert Rous- seau se firent adjuger le profit d'un nouveau défaut contre Mathurin Hélyot dit Hariau et Jean Lermenier. Disons tout de suite que ces deux complices subalternes de l'assassinat d'Hector Rousseau furent condamnés comme contumaces, le 10 septembre 1460, à être pendus et étranglés, ou, s'ils ne pouvaient être appréhendés, au bannissement perpétuel et a la confiscation de tous leurs biens, sur lesquels préalablement seraient retenues la valeur et estimation de l'hôtel du Breuil-Barret et des autres biens qui avaient péri dans l'incendie, plus 200 livres de dommages et intérêts au profit des parents de la victime. Dans cet arrêt dont le préambule et les considérants sont très explicites, on rappelle toutes les procédures antérieures et on précise beaucoup de détails particuliers sur les excès commis contre Hector Rousseau par ses meurtriers, notamment par le sr de la Geffardière, et sur les réparations qu'exigeaient Louise Rabateau et Albert RousseauL'arrêt contre Hélyot et Lermenier occupe dix pages (X2a 29, fol. 165 r°, à 169 v°). Les réparations demandées alors étaient bien plus compliquées et les chiffres de dommages plus élevés qu'ils ne le sont dans l'acte du 17 juillet . 1459, mentionné dans l'alinéa suivant. Citons aussi la signification et ordre d'exécution de l'arrêt du 10 septembre 1460, portant même date, (Id., fol. 248.).

C'est le mardi 17 juillet 1459, à la suite d'une première remise à huitaine, que les parties commencèrent leurs plaidoiries. Après avoir exposé les faits tels qu'ils ont été relatés ci-dessus et ajouté que les coupables n'avaient obtenu leur rémission qu'à l'aide d'une fausse déclaration, ayant prétendu, contrairement à la vérité, qu'ils avaient donné satisfaction aux parents du défunt, Albert Rousseau et Louise Rabateau firent connaître ce qu'ils demandaient à titre de réparation civile : amende honorable, apposition de trois inscriptions rappelant le crime, l'une sur la porte de l'hôtel d'Appelvoisin, la seconde sur la porte de l'hôtel de la Geffardière et la troisième sur 1'emplacement de l'hôtel d'Hector Rousseau ; érection sur la place publique du Breuil-Barret d'une croix de pierre avec une inscription semblable ; image taillée, représentant la victime, que les meurtriers, après l'avoir baisée sur la bouche, porteraient eux-mêmes à l'église, où ils feraient célébrer trois messes chantées et cent messes basses, auxquelles ils seraient tenus d'assister et à l'issue desquelles, vêtus de deuil et tenant à la main une torche ardente, ils reconduiraient les parents chez eux et distribueraient aux pauvres du pays une aumône de deux blancs à chacun. Ils entendaient aussi que les coupables fussent condamnés à fonder une chapelle dotée de cent livres de revenu, plus les calices et ornements nécessaires aux cérémonies du culte, dont la collation appartiendrait à l'évêque de Maillezais et la présentation aux plus proches parents d'Hector ; à remettre la maison brûlée en l'état où elle se trouvait avant l'incendie, y compris les meubles, le tout estimé à 3 000 écus ; à payer à la veuve et aux enfants une somme de 12.000 écus et à leur asseoir une rente annuelle de 400 livres, etc.

Le 20 juillet, continuation des plaidoiries. Popaincourt examine l'une après l'autre les lettres de rémission et démontre qu'elles sont subreptices, obreptices et inciviles. Nous ne le suivrons pas dans le développement de ses arguments, ce qui nous entrainerait trop loin. De façon générale il reproche aux accusés d'avoir tu certains faits et défiguré les autres. En ce qui touche plus particulièrement Mathurin d'Appelvoisin et Jacques Jousseaume, il fait connaître leurs antécédents et leur moralité, que ceux-ci prétendaient au-dessus de toute atteinte, alors que le premier avait rompu les étangs d'Hector et battu les terrassiers, ce qui avait été établi avec toute certitude, et que le second s'était rendu coupable de sévices graves sur la personne de René Chauderier, et avait fait mettre à-mort Jacques Coulon, de la Loge-Fougereuse, sur une fausse accusation de sorcellerie, et détruire aussi sa maison par le feuJousseaume nia avec assurance les deux attentats mentionnés ici. Et cependant nous avons vu dans ce volume même (ci-dessous, p. 137, note) qu'il fut reconnu coupable de là mort illégale de Jacques Coulon et condamné pour ce motif à la confiscation de sa seigneurie et justice de la Loge-Fougereuse, et à une amende au profit du fils de sa victime. Quant aux sévices contre un Chauderier, nous avons trouvé trace au Parlement d'un procès criminel entre Jean Jousseaume, père de Jacques, et René Chauderier, sr de Nueil, son beaufrère, l'an 1441 (X2a 22, aux dates des 28 et 30 mars, 12 et 20 juin 1441 ; 1er et 12 mars, 19 avril et 6 août 1442 ; et X2 23, fol. 53, r° et v°, 24 juillet 1441). Peut-être est-il fait allusion ici à des voies de fait dont Jacques Jousseaume aurait usé contre son oncle, à l'occasion de ce procès..

Ensuite Champront, avocat de Charles Rousseau et des deux serviteurs d'Hector, fit le récit des graves excès commis contre eux et des coups qu'ils reçurent au moment où ils s'enfuyaient de la maison incendiée. Poignant, avocat des inculpés, opposa tout d'abord aux plaignants une fin de non-recevoir, sous prétexte qu'ils avaient cédé leur action à M. Guy Pignard, procureur, et que c'était ce dernier qu'il aurait dû avoir en face de lui. Néanmoins ce jour-là et le 2 août suivant, après avoir fait un grand éloge de ses clients et parlé des services rendus au roi par Mathurin d'Appelvoisin et le sr de la Geffardière, il développa longuement les raisons qui pouvaient être invoquées en faveur des rémissions obtenues, affirmant que celles-ci contenaient l'exacte vérité, que la commission donnée contre Hector Rousseau était basée sur des motifs sérieux, qu'en aidant à son exécution, comme ils en étaient requis, Appelvoisin, Jousseaume et les autres avaient accompli un devoir, et que la mort de Rousseau et l'incendie de son hôtel n'étaient que des accidents auxquels ils avaient été présents, sans en être responsables, niant tous les faits produits à leur charge par les parents du défunt. Le récit qu'il leur oppose est la reproduction du contenu des rémissions. Son plaidoyer occupa encore les audiences des 9 et 16 août, et il le termina en concluant à l'absolution de tous ses clients, à leur mise en liberté immédiate, à l'entérinement pur et simple de leurs lettres de rémission, et à des dommages et intérêts à leur profit.

Le lendemain, le procureur du roi, intervenant, déclara que les rémissions n'auraient jamais été octroyées, si les impétrants avaient avoué la haine qu'ils portaient à Hector, les procès qui étaient pendants entre eux, l'infraction de la sauvegarde royale, leur culpabilité certaine en ce qui touche le crime d'incendie, résultant de ce fait bien constaté et prouvé qu'ils avaient amoncelé des fagots et autres matières combustibles contre la porte de l'hôtel. En conséquence, les lettres devaient être tenues pour subreptices et obreptices, et la requête d'entérinement rejetée. Il requit que les témoins, qui avaient été interrogés déjà trois fois sur la façon dont le feu avait été bouté, comparussent devant la cour. En ce qui concernait les peines encourues par les inculpés, il les demandait sévères : la confiscation de leurs biens, le bannissement à perpétuité, ou au moins à temps, l'amende honorable, une amende profitable double de celle que les parents de la victime requéraient, et la prison jusqu'au parfait paiement.

Dans les répliques prononcées le 20 août, qui reviennent sur des points de détail, nous ne relèverons que l'affirmation de-Popaincourt que la commission dont se prévalaient les accusés n'existait pas au moment de l'attentat, et qu'ils l'avaient sollicitée depuis et obtenue frauduleusement pour atténuer le cas. Il ajoutait que, de toute façon, il eût été absolument contraire à la raison et aux lois de charger de l'arrestation d'Hector Rousseau des hommes avec lesquels il était en conflit d'intérêts et qui faisaient profession publique de la détesterPour toutes ces plaidoiries, voy. le reg. X2a 28, aux dates indiquées, de puis le 17 juillet jusqu'au 20 août 1459.. Mathurin d'Appelvoisin et ses complices restaient détenus à la Conciergerie, où ils avaient été enfermés dès le 19 juin, comme on l'a vu, et leurs biens saisis étaient administrés sous la main du roi par des commissaires. Pendant ce temps, Louis Chabot, seigneur du Petit-Château de Vouvant, prétendant que la connaissance des faits incriminés lui appartenait, parce que l'hôtel où avait été tué Hector Rousseau était situé en son domaine et seigneurie, avait fait ajourner les accusés à comparaître personnellement à son assise du Petit-Château, par cédules affichées à la porte de leurs domiciles respectifs, « soit à la requête d'Albert Rousseau et de Louise Rabateau, disaient ceux-ci (ce qui est peu vraisemblable), soit autrement ». Il avait même commencé les procédures et prononcé plusieurs défauts contre eux. Le 13 septembre 1459, la cour, par mandement adressé au premier huissier ou sergent sur ce requis, fit interdire à Louis Chabot, à ses sénéchal et autres officiers, d'attenter quoi que ce soit au préjudice du procès pendant devant elle, sub certis magnis penisRegistre X2a 29, fol. 89 r°..

Deux jours après, le 15 septembre, la chambre criminelle se prononça sur les provisions requises de part et d'autre. Les prisonniers obtinrent leur élargissement dans la ville de Paris jusqu'au lendemain de la Saint-Martin suivante, à condition de réintégrer ce jour-là la Conciergerie du Palais et de faire élection de domicile à Paris, sous peine d'être déchus ipso facto de l'effet de leur rémission. Sur leurs biens meubles et immeubles saisis, une provision de 300 livres fut accordée à la veuve et aux héritiers d'Hector, « pour leur vivre et la conduite de leur procès ». Recréance provisoire fut faite aux inculpés du restant, avec permission de prélever, aussi pour leur vivre et frais de leur procès, savoir à Appelvoisin et à Jousseaume, chacun 200 livres, et aux cinq autres chacun 40 livres, mais avec interdiction d'aliéner quoi que ce fût de leurs immeubles jusqu'à ce qu'il en fût ordonné autrement. Il était mandé au sénéchal de Poitou ou à son lieutenant de faire exécuter ces décisionsId., fol. 89 v°..

Les choses paraissent être restées en l'état jusqu'au 26 mars 1460. A cette date fut rendu un arrêt interlocutoire, qui marque un point de repère important dans la marche du procès. Nous en donnons la substance. Entre Louise Rabateau, en son nom et comme tutrice de Jeanne, sa fille mineure, Albert Rousseau, curateur de sa nièce Marguerite, fille du premier lit d'Hector Rousseau, et le procureur général joint avec eux, à cause du meurtre dudit Hector et de l'incendie de son hôtel, demandeurs; les mêmes requérant les dépens de certains défauts par eux obtenus contre Mathurin d'Appelvoisin, chevalier, Jacques Jousseaume, Jean de Puyguyon, Jean Beufmont, écuyers, Mathurin Marot, Nicolas Martin et Jean Dreveau, dit Chauvin, demandant en outre sur les biens des susnommés une provision de 2000 écus d'or, d'une part, et lesdits Mathurin d'Appelvoisin et ses consorts, appelants de Guillaume Artault, premier huissier du Parlement, et requérant l'entérinement de leurs rémissions, la mise en liberté de leurs personnes et mainlevée de leurs biens séquestrés à cause desdits forfaits, et en outre demandant qu'il soit dit que Louise Rabateau et Albert Rousseau ne doivent avoir nuls dépens à cause des dits défauts et aucune autre provision sur leurs biens, d'autre part; vu par la cour les lettres, titres, exploits, productions, etc., il a été arrêté : 1° touchant l'entérinement des rémissions, les excès et l'appel relevé par Hector Rousseau, que les parties sont appointées contraires, qu'en conséquence ils sont admis, de part et d'autre, à établir et à prouver leurs faits et à procéder pour ce, chacun de son côté, à une enquête; qu'ils se communiqueront réciproquement leurs écritures, dûment collationnées, à la Saint-Jean-Baptiste prochaine. La cour accordé aux parties, pour faire lesdites enquêtes et les lui rapporter, jusqu'au lendemain de la Saint-Martin d'hiver suivante, pour tout terme et délai. Mathurin d'Appelvoisin et les autres viendront en personne répondre aux articles de leurs adversaires per crédit vel non crédit ; de même ils devront être présents à la réception des enquêtes. 2° Touchant leur appel de l'exploit de Guillaume Artault, il est dit que cet huissier a agi légalement et conformément à sa commission, que lesdits d'Appelvoisin et consorts ont appelé à tort et qu'en conséquence ils paieront l'amende au roi seulement et aussi les dépens de ladite cause d'appel. En outre, ils sont condamnés aux dépens des défauts visés, chacun pour la part et portion qui peut le toucher, le chiffre des dits dépens réservé à la courIls furent fixés à la somme de 132 livres 8 sous parisis, et le 9 juillet suivant, mandement fut adressé au premier huissier ou sergent de contraindre Mathurin d'Appelvoisin, Jousseaume, Jean de Puyguyon, Jean Beufmont, Marot, Martin et Chauvin à la payer à Louise Rabateau et à Albert Rousseau, par prise, vente et exploitation de leurs biens (XSa 29, fol. 222).. 3° En ce qui concerne les provisions requises par les deux parties, Louise Rabateau et Albert Rousseau auront une nouvelle somme de 500 livres sur les biens des défendeurs, pour leur vivre et conduite du procès, savoir 150 livres sur ceux de Mathurin d'Appelvoisin, 150 sur ceux de Jousseaume, sur ceux de Puyguyon, de Marot et de Martin, 50 livres chacun, et sur ceux de Jean Beufmont et de Chauvin, 25 livres chacun. Recréance sera faite à ceux-ci du restant de leurs biens saisis et ils en pourront jouir jusqu'à nouvel ordre. Puis, à la charge d'élire domicile à Paris et de se représenter à toute réquisition, la cour les élargit partoutVoir registre X2 29, fol. 102..

Le 29 mars suivant, fut réglé aussi un incident soulevé par Mathurin Marot. Pendant qu'il était détenu à Paris, ses ennemis avaient fait courir le bruit qu'il était destitué de son office de substitut à Fontenay-le-Comte et qu'il allait être remplacé. Gilles Corbeau, agissant en qualité de sergent du roi, à l'instigation, disait Marot, de Louise Rabateau et d'Albert Rousseau, s'était transporté avec d'autres personnes dans sa maison et en avait enlevé tous ses papiers, registres, sacs, enquêtes, y compris les informations touchant le domaine et la juridiction du roi ; il en avait confié la garde à un habitant de Fontenay, nommé Etienne Besnereau. Mandement fut envoyé au sénéchal de faire remettre l'exposant en possession de tous ses papiers et d'empêcher qu'il ne fût désormais troublé dans l'exercice et la jouissance de son officeId., fol. 197.. De leur côté, Louise et Albert s'étaient plaints à la cour de n'avoir pu se faire payer de la somme qui leur avait été accordée à titre de première provision, par arrêt du 15 septembre 1459. Les commissaires chargés de l'administration de l'hôtel de la Bodinatière et des autres héritages dévolus à Mathurin d'Appelvoisin par suite du décès de son père, avaient réuni en ce lieu tous les fruits et revenus provenant non seulement de cette terre, mais aussi des autres appartenant à celui-ci et mises sous la main du roi. Quand, pour se conformer à l'ordonnance de la chambre criminelle, ils s'étaient transportés à la Bodinatière, dans l'intention de procéder à la vente de ce qui était nécessaire pour parfaire la somme requise, la mère de Mathurin leur en fit fermer les portes, leur interdit d'y rien prendre, prétendant que ces biens étaient sa propriété à elle, et appela de leur commission, si bien qu'ils n'avaient osé procéder à son exécution et que les exposants restaient frustrés des 100 livres -qu'ils avaient droit de prélever sur lesdits biens. Ils n'avaient rien pu avoir non plus des 20 livres que devait, aux termes du même arrêt, leur payer Jean Beufmont, sous prétexte que celui-ci et ses frères n'avaient pas encore fait le partage de la succession de leurs parents. Le même jour, 29 mars, en conséquence, la cour manda au sénéchal de tenir la main à l'exécution intégrale de l'arrêt du 15 septembre et aussi de celui du 26 mars suivant, ordonnant une nouvelle provision de 500 livres, nonobstant toutes oppositions et appellationsVoir id. fol. 196. Nicolas Martin refusant aussi d'acquitter les 50 livres qu'il avait été condamné à payer par l'arrêt du 26 mars, Albert Rousseau avait dû faire saisir ses chevaux et autres objets qui étaient restés à Paris. Martin s'étant engagé par serment devant la cour à apporter cette somme le 15 juillet suivant, en la maison de Guillaume de La Coussaye, au Breuil-Barret, ou à se constituer prisonnier jusqu'au parfait paiement, obtint mainlcvéc par arrêt du 10 juin 1460. (Id., fol. 217.).

Louise Rabateau et Albert Rousseau ne devaient pas tarder à se trouver en présence d'obstacles plus sérieux, de difficultés et tracasseries autrement graves, et en butte même à des actes de violence. A peine remis en liberté et de retour en Poitou, Mathurin Appelvoisin et le sieur de la Geffardière, Nicolas Martin et leurs autres complices ne songèrent qu'à se venger des poursuites entreprises contre eux ; à tout instant ils proféraient des menaces et exerçaient des sévices à rencontre de ceux qui les avaient chargés dans leurs dépositions ou avaient blâmé leur conduite. Ils comptaient par ces moyens intimider les témoins et empêcher Albert Rousseau de procéder à l'enquête qu'il devait présenter au Parlement et de la terminer en temps utile. Partout où ils le rencontraient lui-même, ils lui répétaient : « Tu périras comme ton frère et, toi mort, il n'y aura plus personne pour nous poursuivre ». Un jour qu'Albert traversait un village, nommé le Busseau, Mathurin d'Appelvoisin, qui s'y trouvait, l'aperçut et, saisissant aussitôt son épée, il jura que s'il pouvait l'atteindre, il le tuerait sur la place, et de fait il l'eût frappé, si des gens du pays ne l'eussent empêché d'accomplir son dessein. Une autre fois, Nicolas Martin avait blessé jusqu'à grande effusion de sang un des serviteurs d'Albert et plusieurs autres personnes qui, dans les informations-faites à la requête de celui-ci, avaient témoigné contre lui, contre Jacques Jousseaume et leurs complices. Le même Nicolas Martin avait proféré les plus terribles menaces contre plusieurs de ces témoins, et les autres, qui n'avaient pas encore été examinés, il s'efforçait de les suborner par des présents et des promesses, leur faisant jurer de ne pas dire la vérité, quand on les interrogerait. Ne pouvant vivre en sécurité dans le pays, Albert porta plainte de ces agissements, et la cour, le 2 juillet 1460, donna commission à l'enquêteur de la sénéchaussée de Poitou et au premier huissier ou sergent sur ce requis de s'adjoindre un autre sergent et un notaire de cour laie, et de procéder ensemble à une information diligente et secrète sur les coups et blessures, menaces et subornations dénoncés, et de renvoyer close et scellée à ParisRegistre X2a 29, fol. 220 v°..

Mathurin d'Appelvoisin avait imaginé encore un autre moyen d'empêcher Albert Rousseau de poursuivre son enquête ; il l'avait accusé d'avoir fait usage d'un sceau royal falsifié. C'était un nouveau procès qui pouvait le retenir longtemps hors du pays, car la juridiction en cette matière appartenait au chancelier de France, qui suivait la cour dans ses déplacements. Rousseau dut se rendre prisonnier à Bourges. L'accusation ne reposant sur aucun fondement, son innocence fut reconnue ; mais il avait perdu plusieurs semaines et dépensé pas mal d'argent. Cependant, comme il avait été rendu à la liberté plus tôt que ne l'espéraient ses ennemis, on dut recourir à d'autres vexations. Le terme donné par la chambre criminelle aux parties pour produire leur enquête était proche, et il n'y avait plus de temps à perdre. Appelvoisin et le sieur de la Geffardière en revinrent aux moyens violents. Ils avaient réuni un certain nombre de gens malintentionnés, dont faisait partie Jean Bricare, sergent royal à Poitiers, celui qui, sur l'ordre obtenu du sénéchal, avait conduit Albert Rousseau à Bourges, dans le but d'exercer une pression sur les derniers témoins et de les terroriser. Ces gens avaient trouvé l'occasion de mettre une fois encore la main surie frère d'Hector ; ils l'avaient frappé, malgré le sauf-conduit du Parlement, et mené, ainsi blessé et ensanglanté, au château de la Forêt-sur-Sèvre, c'est-à-dire chez Louis de Beaumont, sénéchal de Poitou, l'y avaient mis aux fers et détenu dans une étroite prison, où il était encore le 18 septembre 1460, quand, ces criminels excès venus à la connaissance de la cour, celle-ci enjoignit au sénéchal, à son lieutenant, à Jean Bricare et à toutes les personnes qui avaient participé à ces violences, de faire remettre Albert en liberté, ou du moins de le faire conduire, avec les charges qui pouvaient avoir été relevées et les informations qui pouvaient avoir été faites contre lui, dans les prisons de la Conciergerie du Palais à Paris. Pour le cas où ils refuseraient d'obéir ou chercheraient des échappatoires, ordre était donné aux porteurs du mandement de prendre Albert et de l'ajourner devant la cour, et, en tout état de cause, de procéder à une enquête secrète et diligente sur tous ces faitsRegistre X2a 29, fol. 248.. C'est vers cette époque que Louis de Beaumont dut quitter le sénéchalat de PoitouVoyez notre volume précédent, p. 378-379, note. ; peut-être y a-t-il quelque rapport entre son remplacement et l'emprisonnement illégal de Rousseau au château de la Forêt ? On n'oserait l'affirmer. La coïncidence toutefois vaut la peine d'être notée.

Quoi qu'il en soit, Mathurin d'Appelvoisin et Jousseaume avaient atteint leur but. Quand arriva la Saint-Martin d'hiver, l'enquête que devait produire Albert Rousseau n'était pas parachevée ; celle de ses adversaires n'était pas prête non plus. Néanmoins, le mardi 18 novembre 1460, les parties comparurent au Parlement, comme elles y étaient tenues. Poignant prétendit que ses clients avaient été empêchés de faire leur information, parce que Louise Rabateau et Albert Rousseau avaient mis opposition sur leurs biens et revenus, dans le but de leur enlever les moyens d'en user pour faire face aux dépenses obligatoires, et requit un nouveau délai. Popaincourt répondit que, aux termes de l'appointement du 26 mars précédent, ses adversaires devaient être déclarés forclos. Pressé d'en finir, Albert Rousseau renoncerait lui-même à poursuivre plus avant son enquête ; d'ailleurs Appelvoisin et les autres avaient tout mis en œuvre pour la rendre illusoire, tandis qu'au contraire ils avaient eu, eux, tout le temps et toutes les facilités de parfaire la leur ; s'ils ne l'avaient pas fait, c'est qu'ils avaient intérêt à temporiser. Finalement il déclara ne pas s'opposer à un nouveau délai, à condition qu'il fût courtRegistre X2a 28, à la date du 18 novembre 1460. Voir aussi le même registre, au 4 août précédent.. Malgré tout, la production fut prorogée jusqu'au 15 mai 1461. Les meurtriers d'Hector Rousseau gagnaient du temps ; c'est ce qu'ils voulaient par-dessus tout, sentant bien que le jugement définitif ne pouvait que leur être contraire.

Le 5 mai 1461, on trouve sur le registre un défaut donné par la cour à Louise Rabateau et au procureur général contre Mathurin Marot et Guillaume Guérart, le sergent qu'il avait amené au Breuil-Barret, le jour du meurtreX2ª 28, à la date., ce qui indiqué que la cause était disjointe en ce qui concernait ces deux personnages ; il n'est plus d'ailleurs question d'eux à partir de cette date. L'explication, on le verra plus loin, c'est que, à l'insu de sa belle-sœur, Albert Rousseau avait transigé avec Marot et, au moyen d'une composition pécuniaire, avait cessé les poursuites contre lui.

Le 15 mai, les parties se retrouvent donc à la chambre criminelle. Albert Rousseau, croyant cette fois toucher au terme, demande que les enquêtes soient reçues à juger. Mais ses adversaires ont découvert un nouveau moyen dilatoire. Quoique, en présence des commissaires chargés des informations, ils aient précédemment déclaré qu'ils renonçaient « à besongner plus avant », ils présentent une requête tendant à obtenir une visité de l'hôtel incendié et la levée d'un plan, parce que, prétendent-ils, ce supplément d'enquête établira péremptoirement que le feu mis du dehors n'aurait pu consumer la maison. Le débat recommence. Popaincourt dit que la matière est épuisée ; les commissaires ont reçu les dépositions des témoins qui étaient dans la maison et de ceux qui étaient dehors, au moment de l'incendie ; la preuve est faite : le feu a bien été allumé à l'extérieur. Cependant, que l'on fasse ce que l'on voudra, pourvu que les inculpés soient tenus en prison. Poignant répond que les témoins, ou du moins plusieurs d'entre eux, ont déposé faussement. Le procureur général qualifié la nouvelle requête de subreptice, obreptice, incivile et déraisonnable, dit qu'il ne doit y être obtempéré, qu'il est suffisamment prouvé que l'appentis a été démoli, le bois en provenant et les fagots disposés en tas contre la maison et que les flammes se propagèrent de l'extérieur à l'intérieur. Il conclut que les enquêtes sont suffisantes et doivent être admises comme telles. Faisant droit à ses conclusions, la cour ordonna qu'il fût procédé au jugement sur les enquêtes reçues, que la requête et les plaidoyers auxquels elle venait de donner lieu seraient joints au procès, et que les parties produiraient, dans trois semaines, « les lettres et reprouches de témoinsX2a 28, à la date du 15 mai 1461. ».

On pouvait alors se croire à la veille de la conclusion de cette interminable affaire. C'était une erreur. L'arrêt se fit attendre encore près de deux ans et demi; il devait être prononcé dans des circonstances bien différentes. La chambre criminelle, ayant reconnu et déclaré que la cause était en état d'être jugée et ayant ajourné sa suprême décision à trois semaines seulement pour les dernières formalités de procédure, comment expliquer son inertie? Ne devait-elle pas, les parties présentes ou absentes, quitte à mettre en défaut une ou plusieurs fois de plus les manquants, donner enfin la solution si longtemps attendue? Aucun document ne permet de répondre avec certitude à cette question. On ne peut que constater le silence complet des registres criminels, entre le 15 mai 1461 et le 15 mars 1462.

Dans l'intervalle étaient survenus la mort de Charles VII et l'avènement de Louis XI, événements importants dans l'ordre politique et de plus favorables sans conteste aux intérêts particuliers de Mathurin d'Appelvoisin, de Jacques Jousseaume et de tous leurs adhérents. Au début d'un règne, il y a toujours des grâces à recueillir pour ceux qui disposent de certaines influences. Les Beaumont étaient très avant dans la faveur du nouveau roi, et les meurtriers d'Hector Rousseau, à côté de ceux-ci, avaient probablement d'autres protecteurs encore à la cour. Néanmoins ils durent attendre près de six mois l'occasion propice, c'est-à-dire le premier voyage de Louis XI dans la région poitevine. Informés de la prochaine arrivée du roi à Marans et usant d'un stratagème assez fréquemment employé dès avant cette époque, ils s'étaient arrangés de façon à se faire admettre dans les prisons de cette ville, afin de bénéficier de la délivrance et de la grâce plénière que les rois avaient coutume d'octroyer, à l'occasion de leur première entrée dans une ville, aux condamnés ou prévenus qui y étaient incarcérés. De toute évidence il fallait un ordre supérieur, adressé à la justice locale, pour autoriser un étranger à recourir à un procédé aussi abusif, qui certainement n'était pas à la portée de tout le monde. Primitivement cette prérogative royale s'exerçait au seul profit des prisonniers ressortissant à la juridiction du lieu ; mais, comme beaucoup d'institutions, elle subit peu à peu des déformations et engendra des abus. Quand la venue du roi était annoncée comme prochaine, il était devenu d'usage courant que l'on transférât dans les geôles d'une ville voisine les prisonniers du pays, pour faire place à des criminels venus de plus ou moins loin et que de hautes influences voulaient soustraire au châtiment.

Les lettres données par Louis XI à Marans, le 20 janvier 1462Ci-dessous, p. 311 à 320; voy. particulièrement la note de la p. 312, en faveur de Mathurin d'Appelvoisin, Jacques Jousseaume, Jean et Jacques de PuyguyonJacques de Puyguyon avait été rendu comme clerc à l'évêque de Paris. Aussi son nom ne figure pas à côté des autres sur les registres du Parlement. Cependant, le 15 mars 1462, il présenta à la cour des lettres d'abolition à son nom, datées de Marans, à la suite de quoi il fut appointé que Louise Rabateau et Albert Rousseau bailleraient par écrit une cédule « de ce qu'ils veulent requerir en ceste partie ». (Reg. X2a 32, à la date.), Jean Beufmont, Nicolas Martin et Jean Derveau, dit Chauvin, étaient, on n'en peut douter, concertées à l'avance. Elles se rapprochent beaucoup par la forme des lettres de rémission ordinaires, en ce que, comme celles-ci, elles contiennent la relation développée des faits incriminés ; mais elles sont beaucoup plus explicites et péremptoires en ce qui concerne la remise des peines encourues : le procès instruit au Parlement est complètement mis à néant. D'ailleurs, par le fait même qu'elles étaient octroyées pour la joyeuse entrée du roi à Marans, leur vertu était plus efficace. Les actes de cette nature étaient considérés comme un motu proprio royal, qui ne pouvait être discuté et dont on ne pouvait combattre entérinement et l'exécution. Aussi, quand elles furent présentées au Parlement, Albert Rousseau et Louise Rabateau demeurèrent seuls, avec leur avocat, pour essayer d'en empêcher l'effet. Le procureur général cessa de faire cause commune avec eux. La poursuite criminelle était forcément abandonnée ; restait seulement la réparation civile, et même celle-ci devait être réglée avec plus de modération, conséquence naturelle de la grâce plénière.

Ce fut seulement le 6 mai de cette année que Mathurin d'Appelvoisin, Jousseaume, Puyguyon, Beufmont, Martin et Chauvin se présentèrent pour requérir l'entérinement de leurs nouvelles lettres d'abolition. Simon, au nom du procureur général, déclara qu'en cette matière il en avait toujours vu user ainsi : les prisons ouvertes franchement et les prisonniers aquittés des peines encourues envers la justice. Par suite, il ne pouvait empêcher l'entérinement des lettres et s'en rapportait à la discrétion de la cour. Popaincourt cependant tenta encore un effort pour parer ce coup. Il argua que les incidents dépendant de la première instance devaient être préalablement réglés, notamment en ce qui touchait la somme allouée à ses clients à titre de provision sur les biens de Mathurin d'Appelvoisin ; celui-ci avait toujours refusé de rien donner, sous prétexte qu'il n'était que nu-propriétaire de la Bodinatière et autres terres, et que sa mère en avait l'usufruit tant qu'elle vivrait. Cette question fut en effet réservée et donna lieu à divers actes de procédure indiqués sur les registres, aux 25 et 28 mai. On retrouve même, le 13 décembre 1462 et le 19 juillet 1463, des défauts accordés à la veuve et au frère d'Hector Rousseau à rencontre de Mathurin d'Appelvoisin et des autres, tenus pour solidairesVoy. le registre X2a 32, aux dates des 15, 25 et 28 mai et 13 décembre 1462. 3 et 19 juillet 1463.. En somme, Albert Rousseau n'était plus aussi pressé d'arriver à la solution définitive, qui ne pouvait être que beaucoup moins avantageuse maintenant aux intérêts qu'il représentait qu'elle ne l'eût été avant les lettres de Marans ; il voulait d'abord être assuré du paiement de tout ce qu'il pouvait légitimement réclamer à ses adversaires, la question d'indemnité primant désormais toutes les autres, et pour arriver à ce but, il ne craignait plus d'être responsable, à son tour, des retards.

Enfin, le 10 septembre 1463, la cour rendit son arrêt. On y trouve reproduits la relation du meurtre d'Hector Rousseau et l'incendie de son hôtel, l'indication des principales phases du procès qui s'ensuivit et les dires contraires des parties. Le dispositif porte que les lettres d'abolition du 20 janvier 1462 seront entérinées ; Mathurin d'Appelvoisin, le sr de la Geffardière, Jean de Puyguyon, Jean Beufmont, Nicolas Martin et Jean Derveau, dit Chauvin, sont condamnés seulement à une réparation civile reglée ainsi qu'il suit : l'hôtel brûlé sera réédifié à leurs coûts et dépens, et remis dans l'état où il était avant l'incendie, y compris les meubles, lettres, papiers terriers et obligations et autres choses qu'il renfermait alors, qu'ils seront tenus de restituer, s'ils existent encore, et, sinon, d'en payer la juste valeur, celle-ci devant être déterminée par la cour après l'estimation qui en sera faite, sous la foi du serment, par Louise Rabateau et Albert Rousseau. De plus, ils acquitteront solidairement une somme de 100 livres qui sera employée en messes et autres œuvres pies pour le salut et le repos de l'âme d'Hector Rousseau. Comme amende utile au profit de la veuve, du frère et des enfants de leur victime, Appelvoisin et Jousseaume verseront chacun 1200 livres, Puyguyon et Martin, chacun 200 livres, Beufmont et Chauvin chacun 60 livres, plus 300 livres au profit d'Etienne Nalot et de Jean Potier, les deux serviteurs d'Hector, c'est-à-dire chacun 50 livres, et en outre les dépens du procès, dont la cour se réserve la taxation. Tous les six ils tiendront prison fermée jusqu'au parfait paiement de ces sommes et complète satisfaction des autres condamnations. L'arrêt exempte, d'autre part, la veuve et le frère du défunt, aussi longtemps qu'ils vivront, des juridiction, foi et hommage, droits et devoirs seigneuriaux auxquels ils pouvaient être tenus envers lesdits Mathurin d'Appelvoisin, Jacques Jousseaume et consortsLe texte de cet arrêt se trouve sur le reg. X2a 30, fol. 495 v° à 200 v..

Les coupables s'en tiraient à bon compte. En revanche, Louise Rabateau et Albert Rousseau étaient tout juste indemnisés des pertes éprouvées dans l'incendie et des frais considérables que leur avait coûtés le procès. Le désaccord se mit entre la belle-sœur et le beau-frère, quand il s'agit de répartir les sommes qui leur avaient été allouées à titre de dommages et intérêts. Mathurin d'Appelvoisin et les autres profitèrent encore de ce dissentiment pour retarder le plus possible les paiementsPrétextant qu'ils ne pouvaient en prison s'occuper de la reconstruction à laquelle ils avaient été condamnés, Jousseaume et Appelvoisin avaient obtenu leur mise en liberté sous caution, peu de temps après l'arrêt définitif. Néanmoins les travaux n'étaient même pas commencés le 20 juillet 1466, date d'une sommation qui leur fut faite par huissier, à la requête d'Albert Rousseau, d'avoir à procéder sans délai à la réédification de l'hôtel du Breuil-Barret (X2a 34, fol. 216).. Nous n'entrerons pas dans les détails (bien qu'il y en ait beaucoup d'intéressants) de ce triste épilogue de la tragédie du Breuil-Barret. Le procès entre la veuve et le frère d'Hector Rousseau s'envenima de diverses accusations, qu'il serait difficile et fastidieux de contrôler, et dura d'ailleurs fort longtemps. Louise Rabaleau, entre autres choses, reprochait à son beau-frère d'avoir traité, à son insu, d'un accommodement avec Mathurin Marot, dont il avait eu 400 écus, et d'avoir composé de la même façon avec d'autres inculpés, sans jamais lui en faire part ni compter de ces deniers avec elleSur ce nouveau procès, voir X2a 32, au 29 novembre 1463 ; 13,16, 23 février et 29 août 1464..

Quelques années après (entre le 10 juillet 1466 et le 22 septembre 1472), Louise avait contracté un troisième mariage avec Antoine Augier, écuyerVoy. un acte du 22 septembre 1472, dans le reg. X2a 39.. Le 18 février 1473 n. s., Jeanne, la seconde fille d'Hector Rousseau, devenue majeure, n'avait encore rien reçu pour sa part des amendes et s'en prétendait frustrée par son oncle. Comme Mathurin d'Appelvoisin et ses consorts n'avaient pas encore versé le montant des dépens taxés à 1037 livres, elle réclamait cette somme et obtenait que les meurtriers de son père fussent contraints à la payer immédiatement, sous peine de saisie et de vente de leurs biensReg. X2a 40, fol. 49 v°.. D'autre part, le 6 juillet 1474, à la requête d'Albert, la cour faisait enjoindre à Louise Rabateau de venir prêter serment et donner son estimation des biens meubles détruits par l'incendie (il y avait de cela seize ans passés !), afin que l'on pût enfin en réclamer le prix à qui de droit, conformément à l'arrêt du 10 septembre 1463Id. ibid., fol. 79 v°..

Paul Guérin.

Paris, le 12 décembre 1906.

Actes royaux du Poitou, t. 10 (1456-1464) MCCLXVIII Mai 1456

Rémission accordée à Jean Boucault, franc-archer de l'ordonnance, paroissien de Veniers, coupable du meurtre de Jean Tiffault, curé dudit lieu, qui, dans une discussion d'intérêt dégénérée en rixe, l'avait attaqué à coups de pierres.

AN JJ. 183, n° 115, fol. 86 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receu l'umble suplicacion de Jehan Boucault, nostre franc archier, parroissien et demourant ou vilage de Venez, contenant que, le lendemain de la feste Nostre Dame my aoust, ledit supliant, venant de la feste de Loudun, en la compaignie de Pierre Guerin, prieur dudit lieu de VenezLe prieuré et la cure de Notre-Dame de Veniers dans l'archidiaconé de Loudun dépendaient de l'abbaye Saint-Florent de Saumur. Le prieuré jouissait, au XVIIe siècle, d'un revenu de 800 livres. (Beauchet-Filleau, Pouillé du diocèse de Poitiers, p. 427.), trouva Jehan Tiffault, prebstre, lors curé dudit lieu de Venez, assis ou cymetière d'icelluy lieu de Venez, auquel curé il dist telles parolles ou semblables : «  Monsieur le curé, vous mangez tout le poisson qui est en nostre fossé, duquel je doy avoir la moitié, dont je ne suis pas bien contempt ». Et lors ledit curé luy fit responce qu'il avoit exploité par an et par jour et qu'il n'y auroit aucune chose. Auquel curé ledit supliant respondy: « Si auray, s'il vous plaist, ou je le feray mourir de soif. » Lequel curé respondy incontinent audit supliant que autant qu'il en despeceroit que il en referoit. Lequel supliant, incontinent après lesdictes parolles dictes, ala ou prieuré dudit lieu de Venez querir une trancheCe mot signifiait à la fois bêche et divers autres outils pour trancher. (F. Godefroy, Dict. de l'anc. langue française.) et se mist en pourpoint, et s'en ala au lieu dont estoit ledit debat qui est bien près et dessoubz l'eglise dudit lieu de Venez ; et commença à rompre le cours de l'eaue qui passoit parmy la terre dudit supliant, laquelle abuvroit et nourrissoit ledit poisson. Et incontinent vint ledit curé audit supliant et luy dist : « Tu as beau rompre, car autant que tu en rompras j'en feray, avant qu'il soit mynuyt ». Et sans plus atendre, ledit curé, meu de mauvaise voulenté et sans vouloir user de voye de justice, prinst plusieurs pierres et cailloux en sa main et les getta contre ledit supliant qui estoit en ladicte terre, de deulx desquelles pierres il fut frapé, et tellement qu'il cheut à terre. Lequel curé, incontinent qu'il [le] vyt cheut, s'en vinst à luy et le tinst par long temps soubz luy; mais ledit supliant, qui estoit garny d'une dague, se commença fort à remuer et revenir tellement qu'il se mist hors de dessoubz ledit curé ; lequel curé le frapoit tousjours de pierres sur la teste et sur le visage, et tant qu'il le vilena et oultraga très fort de sa personne. Et quant icelluy curé fut hors de dessus icelluy supliant, ledit supliant, tout esmeu et blecé, tira sa dague en tousjours combatant et soy deffendant dudit curé qui tousjours le tenoit au corps, dont icelluy supliant ne se povoit despescher, en jurant icelluy curé la char Dieu et la teste Dieu qu'il tueroit icelluy supliant. Et se commença ledit curé à baisser pour cuider derechef mettre à terre ledit supliant, mais icelluy supliant en soy deffendant et combatant, comme dessus est dit, dudit curé, le frapa ung cop seullement dessus la teste, duquel cop ledit curé ala tantost après de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas, ledit supliant s'est absenté du pays, ouquel il ne oseroit jamais retourner, demourer ne converser, se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartie ; en nous humblement requerant que, atendu que ledit curé a esté le premier agresseur et que le cas advint en soy deffendant, et que en tous autres cas il a esté de bonne vie, renommée et honneste conversacion, etc., nous luy veuillions impartir nostre dicte grace et misericorde. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit supliant ou cas desdusdit avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, à nostre bailly de Touraine et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou moys de may l'an de grace mil iiiic lvi, et de nostre règne le xxxiiiime.

Ainsi signé : Par le conseil, Tarenne. — Visa. Contentor. N. Aymar.

MCCLXIX Juillet 1456

Lettres de rémission accordées à Jean Thimbault, de Saint-Benoît-du-Sault, prisonnier pour avoir dérobé une charge de fer à la forge de l'Étang de Saint-Gautier, en compagnie de « Denis Billault et de Pagault, dit le Bloys, et s'être rendu coupable de plusieurs autres vols dans différentes localités du pays voisin ». « Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Poictou, etc. Donné à Gannat, ou mois de juillet l'an de grace mil cccc. cinquante six, et de nostre règne le xxxiiiieNous donnons l'analyse de cet acte uniquement parce qu'il témoigne que Saint-Benoît-du-Sault faisait, au milieu du XVe siècle, partie de la sénéchaussée de Poitou.. — Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Disome. Visa. Contentor. J. Du Ban ».

AN JJ. 189, n° 47, fol. 25 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.
MCCLXX Août 1456

Lettres d'anoblissement de Henri de Gouys, homme d'armes de l'ordonnance.

AN JJ. 187, n° 224, fol. 120 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Karolus, etc. Ad perpetuam rei memoriam. Decens et juri consonum arbitramur illos nobilitatibus et aliis prerogativis muniri, quos probos et fideles ac vita laudabili, morum honestate aliisque virtutum insiginiis decoratos adinvenit regia magestas. Sane, licet dilectus noster Henricus de Gouys, homo armorum ad stipendia nostra, libere condicionis et de legitimo matrimonio ex innobilibus parentibus traxerit vel sumpserit originem, verumptamen vita laudabilis, morum honestas, vera erga nos eciam ipsius fidelitas et alie virtutes quibus persona ejus insignitum ipsum nobilem in suis actibus reddunt et nos inducunt ut erga eum reddamur ad graciam liberales. Notum igitur facimus, presentibus et futuris, quod premissorum nec non serviciorum per memoratum Henricum nostris in guerris et aliàs diu et multimode nobis impensorum consideracion, eumdem Henricum de Gouys et ejus posteritatem et prolem masculinam et femininam, in legitimo matrimonio nascituram, nobilitavimus et de gracia speciali, ex nostra certa sciencia, plena potestate et auctoritate regia nobilitamus per presentes et nobiles facimus et creamus, expresse concedentes ut ipse et tota ejus posteritas nascitura predicta in omnibus suis actibus, in judicio et extra, ab omnibus pro nobilibus habeantur et reputentur, et habile sreddimus ut ipsi universis et singulis privilegiis, libertatibus et aliis juribus, quibus ceteri nobiles regni nostri, ex nobili genere procreati, uti consueverunt, utantur, gaudeant pacifice et fruantur ; ipsum Henricum et ejus posteritatem predictam aliorum nobilium, ex nobili prosapia seu stipite procreatorum, numero et celui aggre- gantes, licet ipse Henricus ex nobili genere ortum non habuerit vel sumpserit originem, ut predictum est. Volentes insuper et concedentes ut idem Henricus et ejus proles predicta, dum et quociens eis placuerit, à quocumque milite cingulum milicie valeant adipisci, et feoda ac res nobiles à nobilibus et quibuscunque aliis acquirere, et jam acquisitas ac eciam acquirendas retinere et possidere perpetuo, absque eo quod ea vel eas nunc velfuturo tempore, ignobilitatis occasione, extra manum suam ponere vel alienare cogantur. Solvendo tamen nobis una vice dumtaxat financiam moderatam. Quocirca dilectis et fidelibus nostris gentibus compotorum nostrorum et thesaurariis, senescallis Pictavie, Xanctonensi et Lemovicensi, ceterisque justiciariis et officiariis nostris, vel eorum locatenentibus, presentibus et futuris, et ipsorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, damus in mandatis quatenus nostris presentibus gracia et nobilitacione dictum Henricum et ejus posteros utriusque sexus, in legitimo matrimonio procreandos, uti et gaudere plenarie et pacifice faciant et permittant, omni impedimento cessante penitus et amoto. Quod ut firmum et stabile perpetuo perseveret, nostrum presentibus litteris fecimus apponi sigillum. Nostro in aliis et alieno in omnibus jure semper salvo. Datum in opido Nadarum, in mense augusti anno Domini millesimo cccc° quinquagesimo sexto, et regni nostri xxxiiii°.

Per regem. De La Loère. — Visa.

MCCLXXI Novembre 1456

Rémission donnée en faveur de Jean de Châteaupers, licencié en loi de l'Université de Poitiers, coupable du meurtre d'un clerc tonsuré, valet de son oncle, Guillaume de Châteaupers, écuyer, qui l'avait démenti par deux fois.

AN JJ. 187, n° 207, fol. 110 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de maistre Jehan de ChasteaupersIl appartenait à une famille du Bas-Poitou sur laquelle on ne possède que fort peu de renseignements. La nouvelle édition du Dictionnaire des familles du Poitou en mentionne cinq membres des XVe et XVIe siècles, dont le premier portant le même prénom que celui dont il est question ici. Il s'agit de Jean de Châteaupers, écuyer, sr de Massigné, qui épousa, le 27 juin 1469, Marguerite Goulart, fille de Jacques, écuyer, sr de la Ferté, et de Jeanne de Montalembert, dont il eut Jeanne, mariée à Louis L'Hermite, écuyer, sr de Moudion. (Tome II, p. 310.) On ne connaît pas la filiation du recteur de l'Université de Poitiers, dont nous n'avons pas trouvé mention ailleurs, non plus que de Guillaume de Châteaupers, écuyer, son oncle, nommé quelques lignes plus bas., licencié en loix et bachelier en decret, aagé de vingt et six ans ou environ, contenant que ledit suppliant depuis son jeune aage s'est bien, notablement et honnorablement gouverné ès universitez de Paris et de Poictiers, où ses parens et amis l'avoient mis et tenu à l'escolle, pour aprendre et avoir degré de science, et telement a ledit suppliant estudié èsdictes universitez, et mesmement en l'université de Poictiers, que il a esté licencié en loix, ce que il a esté par le congié de tout le collège des docteurs de la dicte université, commis et ordonnez à ce. Et depuis que ledit suppliant a esté licencié, pour son bon gouvernement,il a esté esleu par meure deliberacion recteur de la dicte université, et durant sa rectorie a esté bachelier en decret, et depuis ce s'est departy de la dicte université de Poictiers, pour aler veoir ses amis, et mesmement en l'ostel de Guillaume de Chasteaupers, escuier, son oncle. Ou quel hostel par l'espace d'un an et demi et plus il s'est gouverné bien et honnestement, jusques à ce que ou moys de octobre derrenier passé, ung des varletz de la maison dudit de Chasteaupers, son oncle, nommé Jehan Dardes, clerc tonsuré, aagé de vingt six à vingt huit ans ou environ, du diocèse de Laon, et ledit suppliant eurent parolles ensemble, pour ce que ledit Dardes dit audit suppliant qu'il estoit le plus fort à servir du monde, à l'occasion de ce que ledit suppliant lui avoit dit qu'il ne mettoit pas bien à point des pommes qu'il estuyoit, et vouloit qu'elles fussent mises ailleurs ; car la tante dudit suppliant l'avoit envoié pour les faire estuyer. Et après ce que ledit suppliant lui eut dit qu'il mist bien à point lesdictes pommes, ledit Dardes lui dist qu'il n'en feroit riens pour lui, et qu'il s'en alast au dyable, et le dist par deux ou par trois foiz. Et adoncques ledit suppliant lui dist qu'il estoit devenu trop orgueilleux, et que, quant ledit suppliant l'envoia à son dit oncle pour estre son clerc, qu'il n'estoit que ung paillart pouilleux ; lequel clerc lui dist lors qu'il n'en estoit riens et qu'il avoit menti par la gorge, et lesdictes parolles reitera par deux fois, et qu'il ne l'oseroit dire devant son dit oncle. Et lors ledit suppliant, fort esmeu et desplaisant des oultrages que lui disoit ledit Dardes et sans cause raisonnable, s'approucha dudit Dardes, lequel lui dist que s'il s'en approuchoit, qu'il le frapperoit, et leva la main pour le cuider frapper. Et lors ledit suppliant trouva ung baston de boys assez large, duquel à la chaulde il frappa ledit Dardes sur le coul, et incontinent ledit Dardes descendi du grenier, où fut fait ledit coup, et s'en ala en sa chambre, et gecta beaucoup sang par la bouche et par le nez, sans ce qu'il en gectast point par le lieu où il fut frappé, et telement perdy son sang que, par faulte de gouvernement ou autrement il est alé de vie à trespassement. A l'occasion duquel cas ledit suppliant, doubtant rigueur de justice s'est absenté du pays, ou quel il n'oseroit jamais retourner ne repairer, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, comme il dit, humblement requerant que, attendu ce que dit est et que ledit Dardes, qui estoit simple serviteur, respondoit si rudement audit suppliant en le injuriant et oultrageant, que par avant ilz n'avoient hayne ne malvueillance l'un contre l'autre, mais s'entr'amoient fort, et en est ledit suppliant moult courroucié et desplaisant, et que en tous autres cas il a esté et est homme de bonne vie, fame, renommée et honneste conversacion, sans oncques mais avoir esté actaint ne convaincu d'aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise sur ce lui impartir nosdictes grace et misericorde. Pour ce est il que nous, ce que dit est consideré et mesmement que ledit cas est advenu par chaude colle, voulans en ceste partie misericorde estre preferée à rigueur de justice, audit maistre Jehan de Chasteaupers, suppliant, avons ou cas dessus dit quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces presentes aux seneschaulx de Poictou et de Xanctonge au gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Vienne, ou moys de novembre l'an de grace mil quatre cens cinquante six, et de nostre règne le xxxve.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. J. de Reilhac

La famille de Reilhac, originaire du Limousin, entre Saint-Junien et Confolens, où était situé son principal fief, Brigueuil, mouvant de la tour de Maubergeon, avait une branche fixée à Poitiers dans la première moitié du XVe siècle. Pierre de Reilhac était conseiller au Parlement, dans les dernières années du XIVe, et son frère Clément, mort vers 1400, avocat du roi en la même cour. La veuve de ce dernier, Pernelle de Magnac, et leurs enfants étaient en procès avec Simon de Cramaud au sujet de la terre de Brigueuil, le 11 mai 1401. (Arch. nat., X1a 48, fol. 61 v°.) L'un de ses fils, nommé aussi Clément, fut commis à la garde de la conciergerie du Palais à Poitiers dès le 9 avril 1431 (X2a 21, fol. 159 V; X2a 9194, fol. 47 v°), et comme tel fut compromis dans l'affaire de l'évasion de Jacques de Pons (à la fin du mois de février 1445), qu'on l'accusait d'avoir favorisée. Sa confession devant le Parlement, datée du 9 mars 1445, est conservée à la Bibl. nat., ms. fr. 20494, fol. 87. Mais le plus célèbre de la famille est Jean de Reilhac, nommé ici, fils de Guillaume de Reilhac, maître de la Chambre aux deniers de Louis Ier de Bourbon, comte de Montpensier.

Il était secrétaire du dauphin Louis dès l'année 1454, puis notaire et secrétaire du roi dans les dernières années de Charles VII. Conservé dans ses fonctions par Louis XI, auquel il avait sans doute rendu certains services secrets, durant qu'il était investi de la confiance de Charles VII, il fut, aussitôt l'avènement du nouveau roi, chargé de délicates missions diplomatiques. Par lettre du 13 octobre 1461, ce prince l'accrédita, avec Aymar de Poysieu, dit Capdorat, en qualité d'ambassadeur auprès du Principat de Catalogue, à Barcelone. (J. Vaësen, Lettres missives de Louis XI, t. II, p. 17; Calmette, La question du Roussillon, Annales du Midi, n° de janvier 1896, p. 17.) Jean de Reilhac ne tarda pas à devenir un des personnages importants de la cour de Louis XI, qui le créa maître des comptes, puis général des finances. Son crédit était grand et le capricieux monarque semble avoir eu pour lui une condescendance toute spéciale, pendant les premières années de son règne. La liberté de langage de Reilhac lui attira-t-elle la défaveur de son maître? Toujours est-il qu'il tomba en disgrâce; il ne reprit ses fonctions qu'à l'avènement de Charles VIII; il devait les exercer encore pendant vingt-deux ans, jusqu'à sa mort survenue en 1505. Cf. Jean de Reilhac, secrétaire, maître des comptes, général des finances et ambassadeur des rois Charles VII Louis XI et Charles VIII (Documents pour servir à l'hist. de ces règnes, de 1455 à 1499. Paris, Champion, 3 vol. in-4°, 1886-1889 ; tirés à 100 exemplaires). Dans cette publication, M. le comte A. de Reilhac élucide à la fois la biographie de son ancêtre et l'histoire des événements auxquels il fut mêlé.

. —Visa.

MCCLXXII Novembre 1456

Rémission accordée à Mathurin Chappeau, écuyer, de Jaunay, prisonnier à Poitiers comme complice du meurtre d'un homme de guerre, tué dans une mêlée par divers habitants de Jaunay, au préjudice desquels il avait commis divers excès, ainsi que deux de ses compagnons.

AN JJ. 487, n° 208, fol. 110 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion des parens et amis charnelz de Mathurin Chappeau, escuier, demourant ou bourg de JaunayIl y avait en Poitou plusieurs familles nobles de ce nom. Celle qui était fixée à cette époque à Jaunay, et à laquelle appartenait Mathurin, est fort peu connue. MM. Beauchet-Filleau mentionnent seulement un Thomas Chapeau, paroissien de Jaunay, qui céda ses droits sur une maison près de Montierneuf à Jean Chapeau, habitant de Poitiers, le 22 janvier 1370. (Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. II, p. 238.) près la ville de Poictiers, aagé de quarante ans ou environ, chargé de femme et de six petiz enfans, contenant que ledit Mathurin Chappeau dès son jeune aage s'est employé en nostre service et ses frères ou fait de la guerre contre noz ennemis anciens les Anglois, et encores par ung sien frère en nostre ordonnance, par lesquelz noz ennemis ledit Mathurin, estant en la compaignie du seigneur de Boussac ou païs de Beauvois en Beauvoisin

L'événement rappelé ici paraît devoir se rapporter à une expédition relatée par Monstrelet, à la fin de 1431, ou dans les premiers mois de 1432. Après la campagne du sacre, Charles VII avait créé Jean de Brosse, sr de Boussac et de Saint-Sévère, son lieutenant général au delà des rivières de Seine, Marne et Somme, par lettres données à Jargeau, le 11 novembre 1430. A la fin de l'année suivante, on le trouve le plus souvent en résidence à Beauvais : « Item, en l'an dessus dit, le mareschal de Boussac, Pothon de Sainte-Treille et messire Loys de Waucourt et aulcuns autres capitaines tenans le parti du roy Charles, accompagnés de huit cens combatans ou environ, partirent de la ville de Beauvais, pour aler querir leur aventure et fourer le pays, envers Gournay en Normandie. » Cette entreprise venue à la connaissance du comte de Warwick, il assembla en grande diligence six cents hommes, se mit à leur tête et chevaucha en tirant de Gournay à Beauvais. Il surprit l'ennemi et avant que Boussac ait eu le temps de se préparer à la défense, il l'assaillit vigoureusement, le déconfit et mit sa petite armée en déroute. Huit ou dix hommes seulement furent tués, mais il y eut soixante prisonniers, parmi lesquels Waucourt et Saintrailles, et les autres avec le maréchal s'enfuirent à Beauvais et s'y enfermèrent. (Chronique de Monstrelet, édit. Douët d'Arcq, pour la Soc. de l'hist. de France, t. IV, p. 433.) C'est dans cette circonstance sans doute que Mathurin Chappeau tomba entre les mains des Anglais.

et ailleurs ès frontières et marchès des Anglois, fut prins prisonnier par lesdiz Angloys, et son dit frère y a esté prins par neuf foiz ; à l'occasion desquelles prinses et rançons où ilz ont esté mis, et pour eulx entretenir et mettre sus pour le fait de la guerre, audit Mathurin et son dit frère a convenu vendre leur héritage qu'ilz avoient bel et de bonne revenue, et de present n'ont pas que à peine vaille dix livres de rente, dont ledit suppliant vit povrement. Et depuis certain temps ença ledit Mathurin s'est marié et a sa femme et six petiz enfans, dont il a grant charge, comme dit est, et est à present demourant ou bourc de Jaunay près de la ville de Poictiers, où il vit de ce petit d'eritage que lui et son dit frère ont, le mieulx qu'il peut. Et soit ainsi quele jour precedant la veille de saint Barnabé derrenierement passée, vindrent audit lieu de Jaunay troys compaignons de guerre qui se disoient estre à ung cappitaine qu'ilz nommoient ChambreIl s'agit ou de Nicole Chambre (forme francisée de Chambers), fils du capitaine de la garde écossaise de Charles VII (cf. notre volume précédent, p. 366, note), ou, si, comme on le prétend, Nicole était mort en 1454, de quelqu'un de ses parents. On conserve une lettre de Catherine Chenin, veuve de Nicole Chambre, au roi Louis XI, datée de Villeneuve-la-Comtesse, le 15 août [1461 probablement], lui demandant des secours en souvenir de son mari, qui avait été compromis pour l'avoir servi du temps qu'il était dauphin et par suite avait subi de graves préjudices. Elle le priait aussi de l'autoriser à prêter hommage devant le sénéchal de Saintonge, pour les terres de Villeneuve-la-Comtesse, Champagne-Mouton et la Jarrie-Audouin, appartenant à elle et à ses enfants. (Bibl, nat., ms. fr. 20486, fol. 191.) Elle rendit son aveu pour Villeneuve-la-Comtesse, le 20 novembre 1461. (Arch nat., P 1145, fol. 142 et v°.) ou autrement ; lesquelz trois compaignons estoient avec huit ou dix autres compaignons de guerre, qui estoient logiez les aucuns à Saint-Georges de Baillargereux (sic), les autres à ung petit village appellé Clain, qui sont assez près dudit lieu de Jaunay, et lesquelx compaignons de guerre ont fait de grans et innumerables maulx ou païs de Poictou et ailleurs ilec environ où ilz ont logié, et s'en aloient par le païs pillant et rançonnant, bastant gens et faisant autant de maulx ou plus que jamais on feist par le temps de la guerre, et se sont en plusieurs lieux efforcez de forcer femmes, et en ont forcé femmes en la Marche Basse, et mesmement ledit jour precedant ladicte veille, lesdiz trois compaignons qui ainsi estoient venuz oudit bourc de Jaunay furent chés ledit Mathurin Chappeau, où ilz trouvèrent sa femme seule avec ses enfans; à laquelle ilz se prindrent pour la vouloir forcer ; mais pour ce qu'elle se escria, ilec survindrent gens et la laissèrent. Mais non obstant, ilz emportèrent de sa maison ung quartier de mouton et un couvre chief que depuis ilz ne recouvrérent Et ce fait, iceulx compaignons alèrent devant le four bannier dudit bourc, qui estoit fermé, et parlèrent à ung nommé Tiffailleau, fournier, auquel ilz distrent que leur ouvrist ledit four. Lequel leur dist que non feroit il, qu'il y avoit du pain qui estoit aux povres gens dudit bourc, et que si ledit pain estoit perdu, qu'il n'auroit pas de quoy leur restituer ; et leur dist qu'ilz avoient assez pain et qu'il n'estoit point mestier qu'ilz entrassent oudit four. Lesquelz lui dirent et regnièrent Dieu qu'ilz romproient l'uys dudit four. Et ledit fournier leur dist qu'il s'en rapportoit à eulx et qu'il ne l'empescheroit pas ; et leur dist que ledit four estoit au cappitaine de Chasteleraut. Et pour ce lors ilz s'en alèrent à leur logys. Auquel logys ilz se vantèrent que le lendemain ilz occiroient ledit fournier. Et ledit lendemain, qui fut ladicte veille de saint Barnabé, lesdiz compaignons retournèrent, armez et habillez d'armes invasibles et leurs espées nues, oudit bourc et s'en alèrent chés ledit Tiffailleau et ilec rompirent les ponnesCuviers. Dans le Poitou on nomme encore aujourd'huiponne une sorte d'auge ronde en pierre ou en terre cuite, dont on se sert pour la lessive. (A. Theuriet,Le fils Maugars, p. 75, cité par F. Godefroy. Dict. de l'anc. langue française.) où l'en fait la buhée ou lessive, les escuelles de boys et les seilz de ladicte maison, et y firent plusieurs autres grans dommages, et non contens de ce, la femme dudit fournier, qui estoit en la dicte maison et se debatoit avec eulx, la prindrent à la gorge, la firent crier et frapper contre les murs de la teste et la frappèrent sur le braz telement que de long temps elle ne s'en est pu aidier. Et pour ce que une jeune femme, bruz de la dicte femme, qui estoit ensaincte, la voulut secourir, ilz se prindrent à elle et la batirent et lui passèrent une dague par plusieurs coups par entre les jambes et cuisses, croyans la frapper par le ventre, et lui firent plusieurs pertuis en sa robe et lui depessèrent et rompirent ung sien chapperon et le misdrent en plus de cent pièces ; par quoy firent ilec lesdites femmes grant cry. Auquel survindrent deux des enfans dudit Tiffailleau et ung nommé Morin dudit village, qui estoient et besoignoient assez près de ladicte maison, en une loge en laquelle ledit Tiffailleau a acoustumé besoigner en charpenterie, quant il en a à besoigner. Et incontinent que lesdiz compaignons les apperceurent, saillirent contre eulx les espées traites, dont lesdiz enfans et Morin eurent tele paour et fraieur qu'ilz s'en fouirent et lesdiz compaignons coururent après eulx. Et au bruit et conflict qui fut oudit village, ledit Mathurin Chappeau, qui estoit sur son lit en son hostel où il s'estoit dormy, et mis sa jacquette et sa chemise et tout nuz piez, saillit de sa maison en la rue, et en son chemin devant l'estable de ses beufx, trouva une fourche de fer, laquelle il print. Et quant il fut en la rue, il vit lesdiz compaignons de guerre, dont l'un estoit à cheval et les autres de piez, leurs espées nues, et l'un d'eulx avoit abatu ledit Morin soubz soy d'un cop d'espée qu'il avoit baillé sur la teste, et lui avoit fait une grant plaie dont sailloit grant effusion de sang ; et l'eussent tué se n'eussent esté autres qui survindrent ilec. Et quant ledit Mathurin fut arrivé à eulx, leur dist teles parolles ou semblables : « Messeigneurs, messeigneurs, ce n'est pas bien fait de batre les povres gens ». Et incontinent sans autre chose dire, l'un d'eulx nommé Jehan Biglier, natif du pays de Picardie, vint contre lui, sa dicte espée nue, disant teles parolles : « Villain, en parles tu ? tu en auras autant comme lui », et avec sa dicte espée le cuida frapper. Mais ledit Mathurin rabaty le coup, et en le revalant haussa sa fourche et bailla audit Jehan Biglier ung coup ou deux entre le coul et les espaules, dont il cheut à terre, sans lui faire aucune plaie ; et depuis ne le toucha plus. Et lors les diz enfans dudit Tiffailleau se ralièrent ensemble contre l'autre desdiz compaignons de guerre, et secoururent ledit Morin, lequel pour leur aider se releva et ilec batirent les diz compaignons de guerre telement qu'ilz l'abatirent à terre, et après le laissèrent, pour ce que ledit Chappeau et autres qui ilec estoient presens les gardèrent que ne le tuassent. Et après ce alèrent audit Jehan Biglier que ledit suppliant avoit frappé, auquel iceulx enfans et autres dudit village donnèrent plusieurs coups tant de pierres par le visage que de fourches et bastons. Et après ledit conflict, lesdiz compaignons de guerre dudit Jehan Biglier, qui ainsi avoit esté frappé, le misdrent à cheval et en le y mettant, on lui demanda s'il se vouloit confesser, et que ilec avoit ung chappellain, lequel dist que non, et se print à chanter une chançon qui est : « Dont venez vous, Janette, ma mie? », et après l'en emmenèrent à leur logys qui diste dudit lieu, où furent les choses dessus dictes faictes, de trois traiz d'arc ou environ, où, une heure et demie après ala de vie à trespassement, à l'occasion des diz coups que lui baillèrent lesdiz Tiffailleau et autres, ou par faulte de bon gouvernement. Et [quoi] que ledit Chappeau ne sache ne autres ne sauroient dire la verité qu'il soit mort du coup que lui bailla ledit Chappeau ou desdiz coups qui depuis lui furent baillez, comme dit est, ce non obstant ledit Mathurin Chappeau, à l'occasion dudit cas, a esté prins et constitue prisonnier ou lieu de Poictiers, où il est de present detenu, et se doubte que, à l'occasion de ce et qu'il estoit en la compaignie des dessus diz quant le cas advint, où il survint en la manière dessus dicte, l'on vueille contre lui proceder à aucune pugnicion corporelle ou à l'en mettre en aucune grosse amende, qui seroit bien piteable chose. Requerant que, attendu le cas tel qu'il est advenu, qu'il n'a frappé fors ainsi que dessus est dit, et que lesdiz Tiffailleau et autres le batirent depuis, et que ce que ledit suppliant a fait il l'a fait en soy deffendant et pour obvier que ledit Biglier ne le tuast, comme de ce faire et sans cause il estoit entalenté et s'efforçoit de faire, et que ledit Mathurin est homme bien famé et renommé, né et extrait de noble, non actaint ne convaincu d'aucun villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise sur celui impartir nosdictes grace et misericorde. Pourquoy nous, ces choses considerées, voulans en ceste partie misericorde estre preferée à rigueur de justice, audit Mathurin Chappeau, suppliant, avons quicté, pardonné et remis, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Vienne, ou moys de novembre l'an de grace mil quatre cens cinquante six, et de nostre règne le xxxvme.

Par le roy, à la relacion du conseil. Rolant. — Visa. Contentor. Daniel.

MCCLXXIII Avril 1457

Lettres de rémission octroyées à « François Paillete, natif du païs de Poictou, en l'evesché de Mailezais », établi et marié à Saint-Lô en Cotentin, où il exerçait « le mestier ou marchandise de quincaillerie et mercerie », lorsqu'il avait été poursuivi, emprisonné et mis à la torture, pour avoir donné cours à des monnaies fausses ou prohibées, comme étrangères, et s'était ensuite échappé, mis en franchise à l'abbaye de Saint-Lô, et enfin avait quitté la Normandie pour se soustraire au châtiment Tous les faits reprochés à François Paillete se rapportant à l'époque où il habitait loin du Poitou, il suffit de donner cette courte analysé des lettres de rémission qu'il se fit octroyer. Un Bernard Paillete, que l'on rencontre trente ans plus tard parmi les serviteurs de Jacques de Brézé, grand sénéchal de Normandie, et qui pourrait bien être le fils de François, se rendit coupable d'un meurtre et fut condamné par le Parlement à être pendu, le 19 février 1485 n. s. Comme il avait agi à l'instigation de son maître et pour lui rendre service, celui-ci ne l'abandonna pas ; il le fit enlever des mains du bourreau, au pied même des fourches patibulaires de Montfaucon, par le capitaine de Pontbriand et par Robin Heston, premier huissier d'armes du roi, qui s'étaient mis à la tête d'une troupe de quarante hommes d'armes. Grâce au crédit du grand sénéchal, l'affaire fut arrangée quelques jours après et Bernard Paillete obtint aussi des lettres de rémission. (Arch. nat., X2a 48, aux 19, 21 et 25 février, 22 mars et 11 avril 1485.). « Donné à Saint Priet en Daulphiné, ou moys d'avril l'an de grace mil cccc. lvi. avant Pasques, et de nostre regne le xxxvme. — Ainsi signé : Par le roy tenant ses requestes, èsquelles maistres Estienne Le FèvreFils de Pierre Le Fèvre, président au Parlement de Paris, Etienne fut pourvu d'une charge de maître des requêtes de l'hôtel, par lettres de Charles VII du 24 décembre 1454, en remplacement de Guy Bernard, promu à l'évêché de Langres; son acte de réception au Parlement est du 10 avril 1455. (Blanchard,Généalogies des Maistres des requestes, p. 179.) C'est à partir de cette époque que le nom d'Etienne Le Fèvre se rencontre fréquemment parmi les membres du Conseil., Jehan Le BoulengierJean de Montigny, dit Le Boulanger (beaucoup plus connu sous ce dernier nom), fut d'abord reçu conseiller au Parlement de Paris, puis maître des requêtes de l'hôtel, président à mortier en 1461 au lieu d'Arnaud de Marie, et enfin premier président, le 8 décembre 1471. Il mourut le 24 février 1481 et fut inhumé au cimetière des SS. Innocents, auprès de Philippe Cottereau, sa femme, décédée le 4 novembre 1473. (Blanchard,Les premiers Présidents du Parlement, in-fol., p. 43). et François Hallé

François Hallé se trouve au nombre des membres du Conseil royal à partir de l'an 1455. Peu après la date de ces lettres, qu'il souscrivit, il fut envoyé en ambassade, avec Richard Olivier, évêque de Goutances, Jean Le Boursier, seigneur d'Esternay, et Jean Le Roy, auprès du dauphin retiré à Genappe, pour lui demander de déclarer les raisons de son éloignement de la cour et du royaume, et auprès du duc de Bourgogne, qu'ils étaient chargés de mettre en demeure de s'employer à obtenir du dauphin qu'il reconnût l'autorité paternelle. Ils arrivèrent à Bruxelles le 21 septembre 1457. (De Beaucourt, Hist, de Charles VII, t. VI, p. 148, 354.) François Hallé devint avocat du roi au Parlement. Louis XI adressa, le 25 juin 1471, un mandement aux généraux des finances pour le faire rembourser d'une somme de 1.000 écus qu'il avait avancée au roi. (Bibl. nat., ms fr. 20497, fol. 24.)

estoient. Rolant. — Visa. Contentor. Chaligaut.

AN JJ. 187, n° 271, fol. 145 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.
MCCLXXIV Avril 1457

Rémission octroyée à Guillaume Gado, sellier, demeurant à Lusignan, prisonnier à Poitiers pour un vol avec effraction qu'il avait commis en l'hôtel d'Husson Nouvellet, prêtre, du bourg Saint-Hilaire.

AN JJ. 191, n° 261, fol. 140 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l'umble supplicacion des parens et amis charnelz de Guillaume Cado, natif de Chasteau Gontier ou diocèse d'Angiers, jeune compaignon, aagé de vint ans ou environ, sellier, demourant à Lezignen, chargé de femme, à present detenu prisonnier en noz prisons à Poictiers, contenant que, environ la feste de saint Jehan Baptiste derrenierement passée, ledit Guillaume fut conjoinct par mariage avecques Fleur Rigouronne, fille de feu Olivier Rigouron, en son vivant demourant à Poictiers. Depuis lequel mariage et environ la saint Michiel aussi derrenierement passée, icellui Guillaume ala demourer audit lieu de Lezignen, où il avoit demouré autresfoiz, en entencion de gaingner sa vie et de sadicte femme. Et pour ce que audit lieu de Lezignen ne à Poictiers, il ne povoit bonnement gangner sa vie ne de sadicte femme, dont il estoittrès marry et desplaisant, pourpensa en son courage qu'il lui failloit avoir de l'argent pour vivre et entretenir son mesnage et mestier. Et de fait...La place de deux mots est restée en blanc au registre. a ou environ, ung jour de dimenche, icelluy Guillaume se partit du lieu de Lezignen et print ses turquoises Tenailles ou pinces. à lui necessaires en son dit mestier de sellier, et vint audit Poictiers, en entencion de desrober Husson Nouvelle prebstre, demourant ou bourg Saint Hillaire, qui avoit nom d'estre riche homme et en l'ostel duquel il avoit autresfoiz esté, par le moien d'une chamberière du païs d'Anjou que ledit Husson avoit, qui l'avoit mené boire oudit hostel ; et lui estant audit Poictiers, coucha celle nuyt avecques sa femme, en l'ostel de la mère d'icelle. Et le lendemain qui fut jour de lundi, ledit Guillaume en venant de Saint Hilaire le Grant dudit Poictiers, se transporta en l'ostel dudit Husson, et par dessus le mur de la court estant au devant d'icelle entra en la gallerie de ladite maison, et lui estant en ladite gallerie vit qu'il n'y avoit personne en icelle maison, ouvrit à sesdites turquoises la chambre dudit Husson et entra en icelle, en laquelle il trouva deux coffres appartenans audit Husson, lesquelz de sesdites turquoises il ouvrist et rompit les serrures, et trouva en l'un desdiz coffres la somme de sept escuz, et en l'autre la somme de cent escuz d'or neufz et ung petit tissu et une petite sainture garnie d'argent, cinq tasses et trois cuillers d'argent; lesquelz sommes et choses dessus dictes il print et emporta, et près l'estang dudit Saint Hilaire, en certain lieu où ne habité guères personne les mussa dedens terre, fors seulement cinq escuz d'or qu'il retint par devers lui ; lesquelz il fist changer et d'iceulx achetta des mors de brides et des estrivières, lesquelles ledit jour il porta audit lieu de Lezignen. Et certain jour après retourna querir lesdites choses au lieu où il les avoit mussées, et les emporta audit lieu de Lezignen. Et depuis naguères, par suspeçon ou autrement, à l'occasion dudit cas, il a esté prins et constitué prisonnier en nos dites prisons où il est de present, et a confessé avoir commis ledit cas par la manière que ditest. Et doubte que on vueille contre lui proceder par rigueur de justice et le pugnir corporellement, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu ce que dit est et que ledit Guillaume par neccessité a commis ledit cas, et que en tous autres cas il est bien famé et renommé, de bonne vie et honneste conversacion, non actaint ne convaincu d'aucun autre vilain cas, blasme et reprouche, il nous plaise lui impartir icelles. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit Guillaume avons oudit cas quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Lyon sur le Rosne, ou moys d'avril l'an de grace mil cccc. cinquante six avant Pasques, et de nostre règne le xxxvme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Gauvigneau. — Visa. Contentor. Duban.

MCCLXXV Mai 1457

Rémission octroyée à Christophe Micheau, natif de Secondigny en Gâtine, prisonnier à la Mothe-Saint-Héraye pour un nombre considérable de vols avec effraction et autres, par lui commis en divers lieux.

AN JJ. 187, n° 274, fol. 146 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receue l'umble supplicacion des parens et amis charnelz de Christofle Michea, natif de Secondigné en Gastine, aagé de xxvii, ans ou environ, à present detenu prisonnier ès prisons de la Mothe Saint Eraye, contenant que, le xxiiii jour d'octobre derrenier passé, le dit Christofle en venant du village de SoubertSic. Peut-être est-ce une mauvaise lecture pour « Sepvret ». audit lieu de la Mothe, il passa parmi le village de la Ville Dieu du Coux, distant dudit lieu de la Mothe d'un quart de lieue ou environ, et lui estant oudit village, entra à force dedens une maison, en laquelle il print furtivement une pièce de drap de gris, contenant trois aulnes ou environ et deux couvrechiez qu'il emporta oudit lieu de la Mothe et s'efforça de les vendre ; mais il ne peut trouver à qui, et fut ledit cas averé. Et à ceste cause a esté mis ès dictes prisons, èsquelles il a esté interrogué et examiné par les officiers dudit lieu, et a confessé avoir commis ledit cas par la manière que dit est, et aussi plusieurs autres larrecins par lui commis ; et que le jeudi paravant, en alant de Pamprou à Saint Maixent, il passa par le village de la Villëdieu de Comblé, et quant il fut devant le chastel dudit lieu, il entra, environ x. heures de jour, en certaine maison par une fenestre qui est ou planche au devant de ladicte maison, qui n'estoit pas fort fermée. Et incontinent qu'il fut dedens, avecques ung costreCoin. F. Godefroy cite un seul exemple emprunté à notre texte, dans son Dict. de l'anc. langue française (au mot costre). à fendre boys qu'il trouva en ladicte maison, leva la claveure d'un coffre, ouquel il print et emporta ung chapperon de morequin Le morequin ou molequin était une étoffe précieuse de lin. (Id.,verbo Molequin.), qui avoit la cornette courve comme d'un prebstre, et unes chausses noires. Et aussi le dimenche xxiiiie jour dudit mois, ledit Christofle se transporta en ung village entre Pamprou et Saint Maixent, deliberé d'embler aucune chose ; et de fait, à l'eure que les gens estoient à la grant messe, il entra en une maison où n'avoit personne, en laquelle il print et emporta furtivement deux aulnes et demie de gros blanc, qu'il vendit ledit jour. Pareillement icellui Christofle, le jour de la saint MauriceLa saint Maurice se fête ordinairement le 22 septembre. derrenierement passé, en venant de Lezignen audit lieu de Pamprou, deliberé d'embler aucune chose, entra en une maison dont l'uis estoit ouvert, et en laquelle il print d'emblée ung manteau de gros drap, lequel il vendit lendemain oudit lieu de la Mothe, et environ le viiie jour dudit mois, ledit Christofle ala en la ville de Xainctes, deliberé d'embler aucune chose, et lui estant en icelle, à l'eure de midi, entra en l'osteld'un chappellain, demorant près l'eglise de Saint Ytrope dudit lieu, ouquel hostel il print et emporta furtivement ung petit livre escript en lettre de court, ou quel sont contenuz vigilles, les sept psalmes et plusieurs oroisons, et aussi print ung gibecier de cuir, ou quel avoit une cedule faisant mencion comme unghomme de Jarnac Charante, le nom duquel il ne sauroit nommer, devoit audit chappellain deux escuz vielz ; laquelle cedulle ledit Christofle porta devers ledit homme audit lieu de Jarnac, et lui dist que ledit chappellain lui mandoit par lui qu'il lui baillast lesdiz deux escuz et qu'il lui bailleroit ladicte cedule ; et lesquelz icellui homme lui bailla, desquelz il achapta ung pourpoint et le drap d'une robe de pers. Et tantost après, icelluy Christofle en un village qui est entre ladicte ville de Xainctes et la ville de la Rochelle, print et embla une robe de gros drap. Et aussi trois ans a ou environ, ledit Christofle, en la ville de Partenay, entra, environ heure de mynuyt, en une maison estant près du reloge dudit lieu, en laquelle ung gentilhomme qui estoit avecques nostre très chier et très amé cousin le connestable de FranceArtur de Bretagne, comte de Richemont, seigneur de Parthenay, Secondigny, Vouvant, Mervent, etc., connétable de France. tenoit son logeiz ; et lui estant en icelle, leva la claveure d'un coffre avecques une sarpe, qu'il trouva en ladicte maison, où il ne trouva que robbes de hommes et de femmes, pourpoins, chausses et autres habillemens, dont il print seulement une robbe et chausses d'omme de drap violet, et estoit ladicte robbe fourrée de panne noire, et aussi ung pourpoint de velours noir presque tout neuf. Et ladicte nuyt, pour doubte qu'il ne fust descouvert, saillit hors ladicte ville par dessus les murs d'icelle, avecques une corde qu'il print en ladicte maison. Lesquelles choses ledit Christofle a depuis rendues audit gentilhomme, lequel en fist diligence et poursuite promptement. Et incontinent après, icellui Christofle s'en ala en la ville de Touars, où il vendit ung romans qu'il avoit prins à l'ostel de son père, à ung gentilhomme ou marchant, pour le pris et somme de deux escuz et demi. Et pour ce qu'il vit le lieu où ledit homme print les diz deux escuz et demi, qui estoit en ung coffre, et apperçut qu'il y avoit de l'argent plus largement, ledit jour espia que ledit homme disnoit en la ville et qu'il n'y avoit personne en ladicte maison, trouva moyen d'y entrer par ung huys qui estoit où vergier derrière icelle maison, et leva avec ung syreauSans doute « ciseau ». qu'il avoit la serreure dudit coffre, ou quel il print xlv. ou cinquante escuz, n'est recors du nombre, lesquelz estoient en une bourse avecques unes heures enluminées d'or et une petite verge ou anneau, qui estoit d'or ou dorée. Et aussi depuis ledit Christofle, en la ville de Grenoble, robba à ung des escuiers de nostre très chier et très amé fils le daulphin de Viennois, nommé Loys de Saint PrierD'une famille notable du Dauphiné, Louis Richard, seigneur de Saint-Priest, fils de Gilles de Saint-Priest, était non seulement écuyer du dauphin Louis, mais encore son filleul. A l'occasion de son mariage avec Jeanne de Buigny, son parrain, devenu roi de France, lui céda, par lettres datées de Tours, le 8 décembre 1461, les seigneuries de Vaux et de Saint-Symphorien-d'Ozon en Dauphiné, comme garantie d'une dot de 8.000 livres qu'il lui constituait. (Arch. de l'Isère, B. 3048, fol. 302; J. Vaësen, Lettres missives de Louis XI, t. II, p. 55.) Par autres lettres du 17 octobre 1473, Louis XI confia à son protégé l'intérim du gouvernement du Dauphiné, vacant par suite du décès de Louis de Crussol, emploi qu'il exerça jusqu'à la nomination de Jean de Daillon, sr du Lude, qui eut lieu le 7 mars 1474. Après le décès de Louis de Saint-Priest, qui arriva vers 1489, sa veuve Jeanne de Buigny se remaria avec Pierre de Chissé, comte de Chalant, conseiller et chambellan du roi Charles VIII. (Pilot de Thorey, Catalogue des actes du dauphin Louis II, Grenoble, 1899, in-8°, t. I, p. 34, note.), ung pourpoint de satin noir, ung manteau noir doublé de taffetas, lesquelz il rendit pour ce qu'il en fut poursuy. Et semblablement icellui Christofle a dit et confessé que, certain temps a, il coucha avec ung marchant qui estoit parent de Saint Pié (sic), le nom duquel il ne sauroit nommer, ou bourg de Champdenier, et pour ce que ledit marchant lui dist qu'il avoit trois draps nommez blanchez en la ville de Nyort, chez ung marchant, du nom duquel il n'est recors, ledit Christofle, le lendemain, sitost que ledit marchant s'en fut alé, escrivy unes lettres ou nom dudit parent du dit Saint Pié audit marchant de Nyort, contenant qu'il lui baillast lesdiz blanchez, et que en ce faisant il lui tenoit quicte; lesquelles lettres il porta audit marchant de Nyort. Lequel, incontinent qu'il eut receu lesdictes lettres, lui bailla lesdiz blanchetz, lesquelz icellui Christofle vendit en ladicte ville, et de l'argent fist ce que bon lui sembla, A dit aussi et confessé que, en venant dudit lieu de Xainctes à Sainct Jehan d'Angely, à une lieue de Sainct Jehan, il embla deux aulnes et demye de gris, lesquelles il vendit xxv. solz tournois. Et aussi a dit et confessé que naguères il coucha audit lieu de Pamprou, et entra la nuyt, environ onze heures de nuyt, en la forteresse dudit lieu de Pamprou, par dessus les murs d'icelle, en laquelle il leva la claveure d'un forcier avecques deux sireaux et l'ouvrit, cuidant y trouver de l'argent, maiz il n'y trouva que linceulx, du fille des lingères et du linge, desquelz il ne print riens ; et semblablement entra en ung autre hostel, ou quel il ne print riens, pour ce qu'il n'y trouva chose propre pour embler. Et ladicte nuyt, leva en ladicte ville de Pamprou les serrures de trois maisons, èsquelles il ne print riens, pour ce quil n'y trouva chose propre pour embler. Et finalement ledit Christofle dit et confessé que, deux ans a ou environ, il se transporta en la cité de Vienne ou païs du Dauphiné, et certain jour regarda et advisa ou banc d'un changeur, nommé Guillaume Blanc, ou quel avoit grant somme d'or et d'argent, et pour en robber, icellui Christofle se transporta de nuyt à l'ostel dudit Blanc, et rompit et leva la serreure du cellier dudit Blanc, cuidant lever la serreure dudit ouvrouer, pour embler de l'or et de l'argent qu'il avoit veu, ou autres choses, ce qu'il ne peut faire. A l'occasion desquelz larrecins ainsi faiz et commis par ledit Christofle, ses parens et amis doubtent qu'on vueille contre lui proceder par rigueur de justice et le punir corporellement, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerans icelles. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit Christofle Michea avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, aux seneschaulx de Poictou et de Xanctonge et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieuxtenans, etc. Donné à Lyon sur le Rosne, ou moys de may l'an de grace mil cccc. cinquante sept, et de nostre règne le xxxvme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil, Rolant.

— Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCLXXVI Juin 1457

Rémission accordée à Macé Bertineau, boucher de Champdeniers, coupable, ainsi que son frère, du meurtre de Jean Servier qui lui louait une boucherie audit lieu et avec lequel il était en discussion d'intérêt.

AN JJ. 187, n° 31, fol. 19 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receue l'umble supplicacion de Macé Bertineau, boucher, chargé de femme et de trois petis enfans, du lieu de Champdenier ou païs de Poictou, contenant que, cinq ans a ou environ, ung nommé Jehan Servier, lors demourant audit lieu de Champdenier, eut à ung certain jour parolles avecques la femme dudit suppliant, et lui dist qu'il vouloit vendre la moitié de la boucherie qui lui appartenoit, assise audit lieu de Champdenier, laquelle ledit suppliant tenoit à louage ; à quoy ladite femme dudit suppliant lui demanda pour quelle cause il vouloit vendre ladite boucherie, et lors icellui Servier dist à la dite femme dudit suppliant ces mots en substance : « Baillez moy de l'argent du louage ou vrayement je la vendray, ou je vous mettray à pain querre », et à tant se departi ledit Servier de ladite femme dudit suppliant, tout mal content d'elle. Et le lendemain ensuivant dudit jour, ledit Servier vint devers ledit suppliant, lequel ne savoit riens desdites parolles, pour prendre congié de lui, pour ce qu'il vouloit aler hors en ses besongnes. Lequel Servier et ledit suppliant burent ensemble avant de partir et dirent adieu l'un à l'autre, et après le departement dudit Servier, ladite femme dudit suppliant dist à icellui suppliant que ledit Servier le menaçoit de le mettre au pain querre et de vendre ladite boucherie, et lui dist oultre plusieurs autres choses et parolles que elle disoit que ledit Servier lui avoit dictes. Lequel suppliant dist à sa dite femme que ledit Servier avoit tort de ce dire. Et le lendemain après ces choses, icellui suppliant envoya querir son frère, nommé Jehan Bertineau, et lui demanda s'il vouloit aler querir ung beuf avecques lui, et il le paieroit ; lequel lui respondi que oy voluntiers. Et ce fait, ledit suppliant et son dit frère se misdrent à chemin pour aler querir ledit beuf, et ainsi qu'ilz aloient leur dit chemin, et qu'ilz furent hors dudit lieu de Champdenier, ledit suppliant dist audit Jehan Bertineau, son frère, que ledit Servier s'en aloit mal content de lui, et qu'ilz alassent après lui pour faire sa paix ; et après ce, ledit suppliant et sondit frère cheminèrent tant qu'ilz aconceurent ledit Servier qui s'en aloit devant eulx leur chemin en la forest de Boulay. Et incontinent que ledit suppliant le veit de loing en ladite forest, icellui suppliant sifïla en sa main pour faire arrester ledit Servier. Lequel Servier, incontinent qu'il oy ledit sifïlet, se arresta et regarda après lui et attendi ledit suppliant et sondit frère, et eulx estans tous trois arrivez ensemblement, ilz saluèrent l'un l'autre ; et dist icelluy suppliant audit Servier, après plusieurs parolles, que ledit Servier avoit dit qu'il vouloit vendre ladite boucherie et qu'il mettroit au pain querir ledit suppliant, et que par Dieu s'estoit mal dit à lui. A quoy ledit Servier lui respondi qu'il povoit bien ce faire, en lui disant plusieurs parolles injurieuses et mal sonnantes. Après lesquelles parolles, ledit Jehan Bertineau, frère dudit suppliant, dist à icellui suppliant que, se icellui Servier lui disoit plus riens qu'il lui despleust, qu'il lui donnast ung cop de baston. Et ce fait et dit, pour ce que ledit Servier ne se vouloit tenir ne deporter de parler rigoreusement à rencontre dudit suppliant, ledit Jehan Bertineau, son frère, se tira près dudit Servier et leva ung baston qu'il tenoit en sa main, et lui en donna ung cop ou deux sur la teste, non cuidant le occire ; desquelz cops icellui Servier cheut à terre et ala de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas ledit suppliant s'est absenté du païs, doubtant rigueur de justice, et n'y oseroit jamais plus demourer ne repairer, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, requerant humblement [que, consideréCes deux mots, nécessaires au sens de la phrase, ne se trouvent pas sur le registre.] qu'il et sondit frère n'alèrent après ledit Servier en entencion de le batre, mutiller ne occire, mais seulement pour cuider accorder avecques lui de ladite boucherie qu'il vouloit vendre, afin qu'il ne vendist icelle là où il aloit, et que icellui Servier fut premier invaseur et aggresseur de parolles, etc., et aussi qu'il ne frappa ou fist frapper par sondit frère ledit Servier, et la charge qu'il a de sesdiz femme et enfans, et que satisfacion a par lui esté faicte à partie, il nous plaise lui remettre, quicter et pardonner le dit cas et sur ce lui impartir nosdictes grace el misericorde. Pour quoy nous, ce consideré, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, à icellui suppliant avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement , par ces dictes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Feurs en Forestz, ou moys de juing l'an de grace mil cccc. cinquante sept, et de nostre règne le xxxvme.

Ainsi signé : Par le conseil. G. de Thoucy. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCLXXVII Juin 1457

Rémission accordée à Thomas Rioteau, de Saint-Michel-le-Cloucq, prisonnier audit lieu pour un vol commis au préjudice de son oncle maternel, Jean Liet, auquel d'ailleurs il avait fait restitution.

AN JJ. 187, n° 33, fol. 20 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receue l'umble supplicacion de Thomas Ryoteau, povre homme de labour, fils de Jehannin Rioteau, natif de Saint Michau le Clou, jeune homme de Faage de xxii. ans ou environ, contenant que, ou mois d'avril derrenierement passé, à l'occasion de certaines parolles et injures verballes à lui dictes par Jehan Lyet, son oncle maternel, demourant audit lieu ele Saint Michau, il dolent et courrocié des dictes injures, contre [lui par] sondit oncle [proferées], conceut haynne contre lui, et à ceste cause fut esmeu de faire desplaisir à son dit oncle en ses biens meubles ; lequel suppliant, pour acomplir son propos et volunté à Fencontre de son dit oncle, se transporta en l'ostel d'icellui son oncle, ouquel il ne trouva personne et entra oudit hostel qui n'estoit point fermé à la clef. Et après ce qu'il fut entré oudit hostel, d'une serpe qu'il avoit rompit le morteul d'un forcier ou coffre qui estoit en icelluy, ouquel il trouva certaine quantité de linge comme linceulx, thouailles, lettres et autres choses, dessoubz lesquelles il trouva une poche ou sachet de linge, en laquelle avoit certaine quan- tité de monnoye, autrement n'en scet le compte, parce qu'il ne le compta point. Et aussi trouva en une escuelle d'estaing la monnoye de deux escuz ou environ, et en unes burletes quatre escuz d'or ; lesquelz quatre escuz et monnoye il mist en son bonnet avecques ladicte poche où estoit ledit or, et le tout en son sain. Et ce fait, s'en ala hors dudit hostel et ferma la dite porte après lui, ainsi qu il l'avoit trouvée, et d'ilec s'en ala ou village de la Freslerie, et en soy retournant dudit village, il mist ladite poche où estoit ledit or, excepté certaine partie qu'il mist en sondit bonnet, où estoient encores lesdiz quatre escuz et partie de ladicte monnoie des diz deux escuz, qu'il enterra au pied d'un chesne en l'arbrière ou haye de boys de Ponsinière près dudit lieu de Saint Michau ; et le surplus dudit or et aussi lesdiz quatre escuz et monnoie enterra autre part au pié d'un cormier appellé le Cormier Robert, assis près de l'ostel de la Louherie. Et incontinant qu'il fut arrivé audit lieu de Saint Michau, survint en l'ostelde sondit père, où il estoit, Pierre Le Jay, sergent de Pierre Bonnea, escuier, seigneur dudit Saint Michau le ClouIl était fils d'autre Pierre Bonneau, écuyer, et de Marie de Saint-Micheau, qui avait eu la terre de Saint-Michel-le-Clou, comme héritière de son frère Gillet, mort jeune. Ce fief qui relevait du roi ou des comtés de Poitou, à cause de Fontenay-le-Comte, jusqu'en 1419 au moins, était dès 1428 dans la mouvance de Mervent, domaine des seigneurs de Parthenay. Lancelot de Saint-Micheau en était seigneur à la fin du XIVe siècle. Peu de temps après sa mort, sa veuve Jeanne Brisson, tutrice de Gillet, leur fils mineur, en rendit l'aveu à Jean duc de Berry, le 2 mai 1403 ; elle fit de même, le 16 juin suivant, pour les terres que possédait son mari à Gourgé, mouvant de Lusignan, et le 19 mai 1404, pour le fief de Beaumont à la Meilleraye près Fontenay, aujourd'hui commune de Saint-Michel-le-Clou. (Voir Arch. nat., R1* 2171 p. 296; R1* 217 2, p. 1084, 1086-1094.) Sur le livre des aveux et hommages rendus, en 1418, au dauphin Charles, comme comte de Poitou, on trouve la mention d aveux fournis alors pour les mêmes seigneuries, et particulièrement pour « la Mothe Saint-Michaule Clôuq, où souloit avoir anciennement chastel ». (Id., P. 1144, fol. 22 v°, 46 v°, 48 v°.) Le 15 octobre 1419, Pierre Bonneau en fit hommage au même prince, à cause de sa femme, Marie de Saint-Micheau (P. 1145, fol. 47 v°), et le 2 octobre 1428, il en rendit l'aveu à Richemont, sr de Parthenay, Vouvant et Mervent, ainsi que du fief de la Chapelle-Béraud (même paroisse de Saint-Michel). Le Dict. des familles du Poitou cite d'autres aveux pour Saint-Michel-le-Clou, des 20 août 1447, 10 septembre 1460 et 14 janvier 1469 (nouv. édit., t. I, p. 605). Ces derniers furent rendus par Pierre Bonneau le fils, celui dont il est question ici, qui, le 26 septembre 1447, dans un aveu de ses terres de Courgé, est dit « sous le bail de Pierre Boutou, chevalier, sr de la Baugissière ». (Arch. nat., P. 1145, fol. 71.) L'aveu du 20 août 1447 pour Saint-Michel-le-Clou, hôtel, hébergement et dépendances, daté de Benet, rendu au comte de Richemont, comme seigneur de Mervent, donne les noms des possesseurs d'arrière-fiefs tenus à foi et hommage plein dudit Saint-Michel. Ce sont : Jean de Blavetes, pour son lieu de la Mothe, en ladite paroisse ; Louis de Baugis, pour son hôtel de la Girardière, sis près dudit lieu de la Mothe ; Guillaume du Berrot, pour raison d'un fief appelé la Quintaine, assis en la paroisse de l'Orberie ; les hoirs de feu Jean Voyer, chevalier, à raison d'une dîmerie et autres choses en la paroisse de Cezais ; Geoffroy Pasquet, pour son hôtel et appartenances de Malevoisine, en la paroisse de Vouvant ; et Pierre Boutou, chevalier, à raison d'un fief de vignes appelé le Rouil, en ladite paroisse de Saint-Michel-le-Clou. (Arch. nat., R 1* 204, fol. 27.) Pierre II Bonneau épousa, avant 1457, la fille de Pierre de Leugny, chevalier, seigneur du Bois-Berthier près Niort, comme on le voit dans des lettres de rémission accordées, en août 1459, audit sr de Leugny, à son gendre et à plusieurs autres, dont un Guillaume Bonneau, frère ou cousin de Pierre, coupables de meurtre. (Ci-dessous, n° MCCCXVII)., laquelle seigneurie de Saint Michau ledit escuier tient noblement à foy et hommage de nostre très chier et amé cousin le conte de Richemont, à cause de son chastel et chastellenie de Mairevent. Auquel Rioteau, suppliant, le dit RioteauSic. Il faut sans doute lire « sergent » au lieu de « Rioteau ». dist que ledit Liet, son oncle, estoit tout enragié de son argent qui lui avoit esté emblé, et s'en estoit alé et que l'on ne savoit qu'il estoit devenu, et que s'il avoit eu ledit argent et biens meubles, qu'il lui conseilloit qu'il les rendist et restituast audit Liet, son oncle. Et lors ledit suppliant fist response audit sergent qu'il n'avoit point eu les dites choses et que par ce il n'en departiroit point le païs. Après laquelle response faicte par ledit suppliant audit sergent, icellui sergent s'en ala d'avecques ledit suppliant. Et après ce que le dit sergent s'en fut alé, le dit Ryoteau, suppliant, fut très dolent de ce que son dit oncle s'en estoit ainsi alé, et delibera en soy de rendre et restituer ledit or et argent, et ce qu'il avoit ainsi prins, appartenant à son dit oncle. A l'occasion desquelles choses ainsi emblées par ledit suppliant ou autrement, il fut prins prisonnier par ledit sergent et mis et constitué ès prisons dudit seigneur de Saint Michau, où il est encores detenu. De laquelle prinse et emprisonnement il appella, lui estant èsdites prisons, pour empescher qu'il ne fust aucunement interrogué des cas dessus diz, combien qu'il eust tousjours vouloir et entencion de rendre et restituer à sondit oncle les dites choses par lui prinses furtivement comme dit est. Et depuis a renoncé à son dit appel, lui estant èsdites prisons, et enseigné lesdites choses par lui prinses et ravyes ; lesquelles ont esté rendues et baillées à son dit oncle ou à autre pour lui, et en est content dudit suppliant. Non obstant laquelle restitucion ainsi faicte que dit est, ledit suppliant est detenu prisonnier ès dites prisons dudit seigneur de Saint Michau, èsquelles il est en avanture de finer ses jours miserablement, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties ; en nous humblement requerant que, attendu ce que dit est, et que ledit suppliant a rendues et restituées les dites choses, etc., et que ce qu'il l'a meu à embler lesdites choses à son dit oncle, fut à l'occasion desdites parolles et injures qu'ilz eurent lui et son dit oncle, il nous plaise sur ce lui impartir nostre dite grace. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans grace et misericorde preferer à rigueur de justice, audit Thomas Rioteau, prisonnier, avons oudit cas quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces presentes à nostre seneschal de Poictou, ou à son lieutenant à son siège de Nyort, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Monbrison en Forestz, ou mois de juing, soubz nostre seel ordonné en l'absence du grant, l'an de grace mil cccc. lvii, et de nostre règne le xxxvme.

Ainsi signé : Par le conseil. G. de Thoucy. —Visa. Contentor. Briçonnet.

MCCLXXVIII Juin 1457

Rémission en faveur de Guillaume Jarlaut, laboureur, l'un des collecteurs de la taillé en la paroisse de Chouppes, meurtrier de Perrot Guibert.

AN JJ. 189, n° 169, fol. 80 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de Guillaume Jarlaut, laboureur, demourant ou vilaige de Voirmes en la parroisse de Chouppes en la chastelenie de Mirebeau, ou bailliage de Touraine, contenant que icelui suppliant qui avec d'autres a esté colecteur de certaine taillé par nous mise sus en ladicte parroisse de Chouppes, pour le payement et vivre de noz gens d'armes, pour ung an finissant le derrenier jour de decembre mil iiiie liiii, le vendredi xviie jour de janvier oudit an ou environ, ledit Jarlaut fist prendre une oye par execucion sur ung nommé André Marbeuf, pour xviii. deniers que ledit Marbeuf lui devoit de reste de son taux ; au moyen de laquelle execucion, le dimenche ensuivant, xixe jour dudit moys de janvier, la femme dudit Marbeuf demanda audit suppliant ladicte oye. Lequel suppliant lui respondi qui la lui feroit voulentiers bailler en lui payant lesdiz xviii. deniers et ii. deniers pour la despense de la dicte oye. Et à ceste cause, la dicte femme dudit Marbeuf ala oudit vilaige de Voirmes demander â ung nommé Perrot Guibert qui lui voulsist prester demy boisseau d'avoine pour bailler audit suppliant pour la despense de ladicte oye ; lequel Guibert incontinent et assez tost après yssi hors de sa maison et s'en ala devant l'ostel dudit suppliant, tout mal esmeu et eschauffé, en appellant et disant à icelui suppliant qu'il estoit mauvais homme, larron et pilleur de bonnes gens. Lequel suppliant lui respondi qu'il n'estoit point larron et qu'il ne lui demandoit aucune chose, et atant se partirent l'un de l'autre. Et assez tost après, c'est assavoir deux heures ou environ, ledit Guibert, qui estoit homme très litigieux, noysif et fort chargié de vin, s'en yssit de rechief hors de sa maison, tenant ung grant baston ou levier en ses mains, lequel s'efforsa de mettre une grant pièce de boys qui estoit audit suppliant, estant en ung grant chemin, en une pièce de terre appartenant audit Guibert, en disant que se ladicte pièce de boys estoit en son heritaige qu'elle seroit scienne, et tantost s'en retourna en sadicte maison. Et depuis, ledit suppliant qui yssit en la rue et apparceut sadicte pièce de boys près de la terre dudit Guibert, print ung baston ou fourche et remist ladicte pièce de boys oudit grant chemin. Et en ce faisant, ledit Guibert y arriva tout eschauffé et mal esmeu, et s'approucha dudit suppliant, en rappellant de rechief par plusieurs fois larron, et qu'il avoit pillé les habitans de la dicte parroisse de Chouppes, tant comme colecteur de ladicte taillé que comme procureur de la fabricque de la dicte eglise de Chouppes. Lequel suppliant, soy voyant ainsi injurié, dudit baston qu'il avoit, afin de desmouvoir ledit Guibert de ses dictes paroles, le cuida frapper sur l'espaule, mais il le frappa ung seul coup par Je col ou par la teste tant qu'il cheut à terre. Depuis lequel coup, ledit Guibert qui a fait bonne chière et souppa très bien et qui a dit qu'il n'avoit nul malQuelques mots ont été omis en cet endroit par le copiste, ou bien il faut supprimer les deux « qui » de ce premier membre de phrase. mais trois ou quatre jours après ledit coup, ala de vie à trespas. Soubz umbre duquel trespas et pour doubte de rigueur de justice, ledit suppliant, qui a fait satisfacion à partie, s'est absenté et ne se oseroit bonnement trouver au pays, converser ne demourer, se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartie, si comme il dit, humblement requerant, etc. Pour quoy nous, attendu ces choses, audit suppliant ou cas dessusdit, avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement au bailly de Touraine ou à son lieutenant à son siège de Chinon, etc. Donné à Paris, ou moys de juing l'an de grace mil cccc. cinquante sept, et de nostre règne le xxxvme.

Ainsi signé : Par le conseil. — Visa. Contentor. N. Aymar.

MCCLXXIX 6 août 1457

Rémission octroyée à Jean de Vivonne, écuyer, prisonnier à la Conciergerie pour avoir fait fabriquer un acte faux dans le but d'annuler la cession qu'il avait faite de la nu-propriété de sa terre et seigneurie de l'Aublonnière à Isabeau de Vivonne, dame de Thors et des Essarts.

AN JJ. 187, n° 54, fol. 30 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receu ['umble supplicacion de Jehan de VivonneCe personnage, sur lequel les généalogies sont muettes, sauf en ce qui concerne sa filiation, était le second fils de Guillaume de Vivonne, seigneur de la Tour-Chabot, décédé l'an 1418, et de Catherine de Sainte-Flaive, fille de Thibaut de Sainte-Flaive et de Létice de Parthenay. Son frère aîné Regnaut qui, le 6 décembre 1427, passait un traité avec ses cohéritiers au sujet de la succession paternelle, mourut sans postérité. Il avait aussi une sœur, Marie, qui épousa Guy de Vivonne, seigneur de Saint-Gouard, son parent. La seigneurie de l'Aublonnière (et non Lublonières, comme disent Du Chesne et Beauchet-Filleau, 1re édit.) était une châtellenie mouvante des Essarts et comprenant la majeure partie de la paroisse de Sainte-Cécile. Jean de Vivonne en hérita de son frère aîné, qui la tenait de sa mère, celle-ci l'ayant eue de la succession de Thibaut de Sainte-Flaive, son père. Quant à Guillaume de Vivonne, seigneur de la Tour-Chabot, il était le troisième fils de Renaud, seigneur de Thors, les Essarts, Aubigny, Faye, etc., sénéchal de Poitou, décédé peu après le 16 novembre 1392, et de Catherine d'Ancenis. (Cf. notre t. V, Arch. hist. du Poitou, t. XXI, 269-272.) Jean, sr de l'Aublonnière, au profit duquel sont données es présentes lettres de rémission, était le cousin germain d'Isabelle de Vivonne, et c'est à elle, comme dame des Essarts, qu'il devait l'hommage pour l'Aublonnière. escuier, à present detenu prisonnier ès prisons de la Conciergerie de nostre Palaiz à Paris, contenant que, tant à l'occasion de certain gros procès qu'il a eu à rencontre de nostre amé et feal l'evesque de Luxon

Nous n'avons point retrouvé trace de ce procès, dont la date n'est point indiquée ici. Il s'agit sans doute d'André de La Roche, qui fut évêque de Luçon de 1451 au 16 février 1462, ou de l'un de ses deux prédécesseurs, Jean Fleury (juillet 1431-17 octobre 1441), ou Nicolas Cœur (1441-1er octobre 1451).

en quoy il a moult frayé et despendu, que de ce qu'il a esté detenu longuement maladie qui lui a beaucoup cousté, que aussi qu'il est homme de petite conduite et gouvernement ou fait de sa despence, il s'est fort endebté, et a vendu sur lui à Emery Bertin

Emery Bertin ou Bretin, de Fontenay-le-Comte, fils de Pierre Bertin, sr de Pamplie, était seigneur de Boisse à Saint-Médard-des-Prés près Fontenay. Il avait épousé Catherine Toreil ou Toureille et mourut à la fin de 1459 ou au commencement de 1460. (Voy. une notice sur sa famille dans notre précédent volume, p. 309.) Dans un compte de la châtellenie de Fontenay-le-Comte pour Artur de Richemont, à la date du 20 mars 1432 n. s., « Méry Bretin » est qualifié bourgeois et changeur à Fontenay. (Bibl. nat., ms. fr. 8819. fol. 47 v°.)

, de Fontenay, et à autres certaine grant rente, et doubtant que, se ladicte rente couroit sur lui, sa terre de l'Oblouynière fust vendue à vil pris, se trahy jà pieçà par devers feue nostre cousine Ysabeau de Vivonne, dame d'Avaugour, de Thors, des Essars

Isabelle de Vivonne, dame d'Aizenay, fille de Savary, seigneur de Thors, les Essarts, etc., tué à la bataille de Nicopolis (1396), fils aîné de Renaud de Vivonne, sénéchal de Poitou. Sa mère était Jeanne d'Apremont. La mort de ses deux frères Renaud et Savary, qui ne laissèrent pas d'enfants, la fit héritière finalement de toutes les terres et possessions de son père. Elle les porta en mariage à Charles de Blois, dit de Bretagne, seigneur d'Avaugour, troisième fils de Jean de Blois, dit de Bretagne, comte de Penthièvre, vicomte de Limoges, etc., et de Marguerite de Clisson, fille puînée du connétable. Celui-ci ayant assisté son frère aîné Olivier de Blois, dans la prise par trahison de Jean, duc de Bretagne, à Chantoceaux, l'an 1420, ses terres et celles de sa femme, situées dans le Bas-Poitou, furent confisquées et données à Richard de Bretagne, comte d'Etampes, frère d'Artur de Richemont. Après la mort de son mari (1434), Isabelle de Vivonne intenta un procès au Parlement de Poitiers, pour recouvrer ses biens. (Curieuses plaidoiries du 29 juillet 1434, Arch. nat., X1a 9200, fol. 271 ; et actes divers de procédure, 24 février 1436 n. s., Xlª 9193, fol. 125, et 18 juillet 1436, X1a, 21 à la date.) Dans l'intervalle, elle soudoya des troupes et essaya de reprendre par la force sur Richard de Bretagne ses placés du Bas-Poitou, particulièrement les Essarts et Palluau. Il a été question à plusieurs reprises de cette guerre privée dans notre t. VIII (cf. l'Introduction, p. XXI et LIV, et p. 181 n., 295 n., 383 n.), et nous n'y reviendrons pas ici. Antérieurement, dans une contestation qu'elle avait avec Jean Harpedenne, sr de Belleville, le 5 août 1418, Isabelle de Vivonne demanda une délégation pour faire examiner des témoins vieux et impotents (X1a 4792, fol. 61). Vers la même époque, sa belle-sœur, Catherine de la Haye, veuve de Renaud de Vivonne, lui réclamait l'exécution des clauses du testament de son mari relatives à son douaire qu'il lui avait assigné sur les terres d'Aizenay, Poiroux. Rié, Mortagne. (Actes des 31 janvier, 3 février, 25 avril et 2 mai 1412, X1a 4792, fol. 22 v° 25, 40 v°, 43 v°.) Deux ans plus tard, en qualité de dame pour une part de Mortagne-sur-Sèvre, Isabelle de Vivonne eut à soutenir, avec Jean de La Haye et Pierre de Brezé, co-seigneurs de Mortagne, un procès contre Jean de Sainte-Maure, seigneur de Moritgauguier, et Jeanne des Roches, sa femme (31 janvier 1420, X1a 9190, fol. 75). Elle actionna aussi au Parlement de Poitiers les habitants de la Merlatière, qu'elle prétendait astreindre à participer à la garde du château des Essarts (9 mars 1420 n. s., id., fol. 85). Le 21 avril 1449, elle passa une transaction avec Maurice, abbé de Boisgrolland, au sujet d'une fondation de messes faite par Renaud de Vivonnè, son frère, seigneur de Thors et de Poiroux, inhumé dans l'église de cette abbaye. (Coll. dom Fonteneau, t. I, p. 549.) Nous n'avons pas trouvé la date de la mort d'Isabelle de Vivonne. Sa fille unique, Nicole de Blois, fut mariée à Jean II de Brosse, seigneur de Sainte-Sévère et de Boussac. (Voy. ci-dessous, p. 38, note.)

de laquelle il estoit prouchain parent, la pria et requist qu'elle voulsist achetter lesdites rentes, à ce que la dicte terre ne fust perdue, ce qu'elle fist. Et après ces choses, il fut conseillé par maistre Jehan MacaireDans un procès criminel entre Jean Harpedenne, sr de Belleville, et Nicolas Queyré, son sénéchal de Montaigu, il est question de Jean Macaire, qui était alors (premiers mois de l'an 1446) sénéchal de Belleville. (Arch. nat.,X2a24, Plaidoiries des 27 et 28 février 1447 n. s.), lors son seneschal de la dicte terre de la Blouynière, pour demourer quicte envers la dicte de Vivonne de la dicte rente qu'elle avoit droit de prendre sur lui, des arrerages qui lui en povoit devoir, et moiennant viiie escuz qu'elle lui bailla content, que aussi qu'elle lui donna droit de chastellenie et seaulx aux contractz, et certains ses hommes pour estre gaystables à son chastel de la Blouynière, il lui donna et transporta sa dicte terre et seigneurie de la Blouynière, retenu l'usuffruit sa vie durant seulement. Après laquelle donacion ainsi faicte et que elle fut venue à la notice des amis dudit suppliant, et qui le blasmèrent d'avoir fait ladicte donnacion, le dit suppliant deist audit maistre Jehan Macaire, son seneschal, qu'il l'avoit mal conseillé de lui avoir fait faire la dicte donnacion et que toute la charge en estoit sur lui. Et alors ledit Macaire dist qu'il y pourverroit bien et demanda audit suppliant s'il avoit la lettre du droit de chastellenie que ladicte Ysabeau de Vivonne lui avoit donné ; lequel dist que oy. Lequel Macaire dist à icelluy suppliant qu'il les lui portast, et que les notaires qui avoient passé le contract de la dicte donnacion, qu'il avoit faicte à icelle Ysabeau, estoient ceulx qui avoient passsé les lettres du don du droit de la dicte chastellenie, que icelle Ysabeau de Vivonne avoit donné à icellui suppliant, qui estoit signées des seings manuelz de Guillaume Furet et de Jehan Loys, notaires aux contractz de Boussac. Et fist icellui Macaire une minute d'une lettre de revocacion dudit don, laquelle il bailla audit suppliant...Plusieurs mots ont été certainement omis parle scribe en cet endroit., lui deist qu'il lui feist faire et grossoyer, et qu'il la lui envoyast en sa maison, et que on ne pourrait faillir à contrefaire les seings des diz notaires, puisqu'on les avoit. Lequel suppliant envoya querir ung nommé Thibault Legendre, auquel il fist grosser ladicte minute en parchemin et en feist deux grosses, jasoit ce que ledit suppliant cuidast qu'il n'en eust fait que une. Et après ce, icellui suppliant demanda à ung de ses serviteurs, nommé Bertran, natif de Saint Laurens sur Sèvre, s'il savoit qu'il y eust aucun bon escripvain audit lieu; lequel respondi que oy. Et lors ledit suppliant lui bailla une coppie de la dicte lettre pour lui aler faire grosser et lui bailla argent pour ce faire. Lequel serviteur dudit suppliant apporta à icellui suppliant deux grosses de la dicte lettre, faictes à Mortagne sur Sèvre; lequel les envoya audit Macaire en sa maison, ala Macayère. Lequel Macaire s'en ala tenir les assises à Montagu. Et ce pendant survint ung nommé, maistre Jehan Bertrand, praticien à Saincte Secille, dont le dit suppliant est de parroisse, pour une journée qui estoit entreprise entre certains gentilz hommes. Et en alant ledit suppliant à la messe audit lieu de Saincte Secille, rancontra icellui maistre Jehan Bertran, auquel il demanda qui l'avoit là mené, qui lui respondi qu'il y estoit venu pour certaine journée entreprinse d'un debat qui estoit entre certains gentilz hommes du païs. Auquel Bertran ledit suppliant dist que, s'il s'en aloit sans le venir veoir en sa maison et boire de son vin, que jamais ne l'ameroit. Lequel Bertran fut veoir ledit suppliant en son hostel de la Blouynière, et lui estant audit hostel, ledit suppliant lui compta le contract et donnacion qu'il avoit faicte à la dicte Ysabeau de Vivonne, et lui pria qu'il lui fist une minute de revocacion dudit don, et la lui fist le plus se ver et prouffitable qu'il pourroit, affin que ses heritieis ne puissent venir au contraire. Lequel maistre Jehan Bertran fist ladicte minute, où il mist que, si les heritiers de ladicte damoiselle Ysabeau aloient au contraire, ilz encourussent la peine ou (sic) la tierce partie de tous les heritages de la dite feue Ysabeau de Vivonne. Et bailla ledit Bertran ladite minute audit suppliant et lui demanda s'il avoit plus que faire de lui ; auquel il dist que non. Et assez tost après, retourna ledit Macaire dudit Montagu, où il avoit tenu les assises, et fut audit lieu de la Blouinière tenir les assises dudit suppliant. Et quant il y fut, ledit suppliant lui deist telles parolles : «Et puis, se fera bien la besongne? » Lequel Macaire respondi qu'il estoit seur qu'elle se feroit bien, et que cellui qui la faisoit se devoit rendre à son hostel à la Macairière, et lui devoit apporter les besongnes toutes prestes. Et après ce, ledit suppliant dist audit Macaire que, depuis qu'il avoient parlé ensemble, maistre Jehan Bertran estoit venu audit lieu de la Blouynière et lui avoit fait une minute sur la matière qu'il savoit. Laquelle minute ledit suppliant monstra audit Macaire. Lequel la lut et, après ce, dist audit suppliant qu'elle valoit mieulx et estoit plus seure que celle qu'il avoit faicte; et emporta icelle minute et se chargea la faire grosser et signer. Et depuis ce que cellui qui devoit apporter les autres lettres signées fust venu en l'ostel dudit Macaire, icellui Macaire le demanda audit suppliant et qu'il ala par devers lui à sa maison de la Macairière et apportast x. escuz, ce que fist le dit suppliant ; et quant il y fut, ledit Macaire lui monstra celluy qui avoit contrefait les seings des notaires, que on nommoit Jehan ou Guillaume Lemée, et le dit suppliant demanda audit Macaire se c'estoit celluy qui devoit faire les besongnes, qui lui dist que oy. Et alors ledit Macaire dist audit suppliant que, quant ledit Mée yroit à sa maison qu'il lui feist bonne chière et congneust le plaisir qu'il lui faisoit, qui dist que si feroit il. Et demourèrent toutes lesdites lettres entre les mains dudit Macaire plus d'un quart d'an, par ce que ledit Macaire les voult avoir devers lui, jusques à ce que ladicte damoiselle Ysabeau fust trespassée. Lequel Macaire dist audit suppliant qu'il lui diroit quant il seroit temps de lui aider desdites lettres. Et après ce que ladite demoiselle Ysabeau fut trespassée, ledit Macaire porta lesdites lettres audit suppliant et lui dist qu'il les gardast bien, par especial la grande qui parloit de la tierce partie ; et au regart des autres, lui dist qu'elles ne lui servoient de riens. Lequel suppliant mist lesdites lettres en son hostel, en certains coffres. Et après ce, pour certain debat qui survint entre nostre amé et feal conseiller l'evesque de Luxon et ledit suppliant, et à la requeste de nostre dit conseiller et de noz officiers en Poictou, certains noz officiers, ledit suppliant estant absent et hors de sa dicte maison, entrèrent dedans icelle, la mirent en nostre main, rompirent les coffres dudit suppliant, prindrent ses biens et entre autres choses deux des dictes lettres et une coppie qui furent baillées à nostre dit cousinSic. Il n'en a pas encore été question dans ce qui précède. Voy. la note de la page suivante. le conte de Penthevre. Et au regart de la grant lettre parlant de la tierce partie, elle cheut en autres mains et fut rendue audit suppliant par ung nommé Guillaume François, soubz umbre de certaine monicion que ledit suppliant fist publier contre tous ceulx qui auroient prins ses biens. Et quant ledit suppliant ot recouvert la dicte lettre, il envoya querir le dit maistre Jehan Macaire et la lui monstra. Lequel Macaire en fut bien joyeulx et dist audit suppliant que en fist faire trois ou quatre vidimus, et après lui portast l'original desdites lettres, ce que ledit suppliant fist. Et lors ledit Macaire dist audit suppliant que, s'il vouloit, il s'aideroit desdites lettres. Lequel suppliant lui demanda la manière comment, et ledit Macaire deist que Gilles Boissière, serviteur de la dite damoiselle Ysabeau, et lequel elle aymoit bien et se fioit en lui, estoit trespassé, et que ledit suppliant diroit que ledit Boissière lui avoit apporté de par ladite Ysabeau toutes lesdites lettres. Et après ledit Macaire cheust malade ou lit, de la maladie dont il trespassa, et, lui estant ainsi malade, manda querir ledit suppliant et lui bailla ladicte lettre, et lui dist telles parolles : « Monseigneur, je vous pry que tenez à mon filz ce que vous lui avez promis ». Lequel suppliant, comme dit est, en feist faire quatre grosses ou vidimus de la dite lettre par Colas Regnault, sans ce que ledit suppliant ait fait autre chose des dites lettres et coppies, ne que d'icelles il se soit aucunement aidé. Neantmoins puis naguères et après ce s'en ala ledit compaignon et oncques puis ne le veist ledit suppliant. Et après le trespas de ladicte Ysabeau de Vivonne, nostre chier et amé cousin Jehan de BrosseJean II de Brosse, seigneur de Sainte-Sévère et de Boussac, conseiller et chambellan du roi, fils de Jean Ier, maréchal de France, connu sous le nom de maréchal de Boussac, et de Jeanne de Naillac. Il avait épousé, par contrat du 18 juin 1437, Nicole, fille unique de Charles de Blois, dit de Bretagne, baron d'Avaugour, et d'Isabelle de Vivonne. Ayant obtenu, en conséquence du traité de Nantes conclu, le 27 juin (448, entre François Ier, duc de Bretagne, et Jean de Blois, comte de Penthièvre (voy Fr.-A. du Paz, Hist. Généal. de plusieurs maisons illustres de Bretagne, in-folio, 1620, Penthièvre, p. 52), la restitution des biens confisqués sur ses parents, Nicole était comtesse de Penthièvre, vicomtesse de Limoges, dame de Thors, les Essarts, Reignac, etc. Le mariage eut lieu à la condition que leur postérité porterait le nom et les armes de Bretagne. Jean de Brosse céda à Louis XI, en 1479, les droits sur le duché de Bretagne que son épouse tenait de Jean de Bretagne, comte de Penthièvre, son grand-père. (Voir le Dict. des familles du Poitou, nouv, édit., t. II, p. 17.) La biographie de Jean II de Brosse est relativement connue: il n'est pas nécessaire d'en rappeler ici les principaux faits. On a de lui un hommage rendu au roi le 31 juillet 1452, pour la terre et haute justice du Pâtis, mouvant de la châtellenie de Fontenay-le-Comte, seigneurie qui ne comptait guère à côté des importants et nombreux fiefs qu'il possédait en propre ou qui lui venaient du chef de Nicole de Blois. chevalier, conte de Penthèvre, et Nicole de Bretaigne, sa femme, estans advertiz que ledit suppliant avoit lesdites lettres, jasoit ce que d'icelles il ne se fust aidé en aucune manière, comme dit est, ont obtenu de nostre chancellerie lettres, par vertu desquelles, informacion precedent, ledit suppliant a esté adjorné à comparoir en personne par devant noz amez et feaulx conseillers les gens tenans les requestes de nostre Palais à Paris. Par devant lesquelz il a comparu et a esté par eulx interrogué sur ledit cas par diverses foiz, et a nyé par serement avoir fait faire les diz seings et contrefait les dites lettres. Et depuis a, par leur ordonnance, esté constitué prisonnier et a cogneu et confessé avoir commis et perpetré le dit cas et fait contrefaire les diz seings desdiz notaires par la manière dessus declairée. Et combien que desdites lettres il ne se fust ne soit aucunement aidé contre nosdiz cousin et cousine, le conte et contesse de Penthèvre, ne semblablement contre feue Ysabeau de Vivonne, mère de nostre dite cousine, et qu'il ait fait grosser et signer les dites lettres par simplesse et exortacion d'autruy etc., nous lui vueillons impartir nostre grace. Pour ce est il que nous, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant avons ou cas dessus dit quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, à noz amez et feaulx conseiller les gens tenans les requestes de nostre Palaiz à Paris et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Saint Poursain, le sixiesme jour d'aoust l'an de grace mil cccc. lvii. et de nostre règne le xxxve.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Rolant. — Visa. Contentor.

MCCLXXX Septembre 1457

Rémission en faveur de Pierre Maigneau, coupable d'homicide par imprudence sur la personne de Simon Mesnagier.

AN JJ. 18b, n° 334, fol. 227 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Pierre Maigneau, filz de Maurice Maigneau et de Parnelle CourrionneOn n'indique point dans ces lettres le lieu où habitaient Pierre et Maurice Maigneau. Un André Corrion possédait en 1453 et 1459 le fief et herbergement noble du Mureau en la paroisse de Gersay, tenu de la seigneurie de Bouillé-Saint-Paul à foi et hommage plein, dix-huit deniers de service annuel et deux setiers de froment, mesure de Thouars. Il en rendit aveu, le 20 décembre 1453, à Pierre Fleury, chevalier, seigneur de Bouillé-Saint-Paul. (Le Mis de l'Estourbeillon, Inventaire des archives du château de Sainte-Verge près Thouars. Vannes, 1895, in-8°, p. XXII et 15.), sa femme, contenant que, environ la feste saint Jehan Baptiste mil cccc. cinquante deux, ledit suppliant qui estoit en l'ostelde ses diz père et mère, print ung arc en son poing et certain nombre de flèches, pour aler tirer et s'esbatre, ainsi qu'il avoit acoustumé de faire et faisoit souvent. Et luy estant hors dudit hostel, commença à tirer contre ung fumier qui estoit ilec près, et ainsi qu'il tiroit, ung nommé Simon Mesnaigier qui estoit derrière ledit fumier, et lequel icellui suppliant ne veoit point et ne l'avoit aucunement apperceu, se leva de derrière ledit fumier, et icelluy suppliant le frappa de la flèche qu'il avoit tirée par le front et tellement le blaissa que par le moyen de ce ou autrement, par faulte de gouvernement huit jours après ou envi- ron, il ala de vie à trespassement. A l'occasion duquel cas ainsi avenu que dit est, ledit suppliant doubtant rigueur de justice, s'est absenté du païs, et n'y oseroit jamais retourner, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties, ainsi qu'il nous a fait dire et remonstrer, en nous humblement requerant que, attendu que ledit cas est avenu d'aventure et que en tous autres ledit suppliant s'est bien et doulcement gouverné, sans avoir fait ou commis ne esté actaint ou convaincu d'aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise nosdictes grace et misericorde luy impartir. Pourquoy nous, les choses dessus dictes considerées, voulans misericorde estre preferée à rigueur de justice, audit suppliant ou cas dessusdit avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Bourbon, ou mois de septembre l'an de grace mil cccc. cinquante sept, et de nostre règne le xxxve.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Daniel. — Visa. Contentor. J. Du Ban.

MCCLXXXI Septembre 1457

Rémission accordée à Regnier de MontignyFils de Jean de Montigny, panetier du roi et élu de Paris, ce personnage, né à Bourges vers 1429, est connu comme compagnon de débauché de François Villon; il périt surie gibet, malgré cette rémission et très peu de temps après. (A. Longnon, Etude biographique sur François Villon, Paris, 1877, in-8º, p. 70-74, 80, 152-155.) prisonnier au Châtelet de Paris, sous l'accusation de divers crimes, entre autres... « d'avoir esté, en la compaignie d'un nommé Jehan Le SourtNous nous sommes assuré que les registres du Trésor des chartes ne contiennent pas de rémission particulière en faveur de ce Jean Le Sourt. en la ville de Poictiers, par devers ung marchant drappier, faingnant d'acheter du drap; auquel marchant ils firent tant que ilz eurent pour vint escus de drap et vint escus en argent, et de ce lui fut baillé une bougette ou boiste en laquelle ilz faingnoient mettre vint nobles, mais ilz lui entregettèrent une autre bougette ou boiste où il n'y avoit rens dedans qui vaulsist... Donné à Paris, ou mois de septembre l'an de grace m. cccc. cinquante sept, et de nostre règne le xxxve.

AN JJ. 189, n° 199, fol. 96 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

MCCLXXXII Octobre 1457

Rémission en faveur de Perrin Benoist, d'Avanton, réfugié en franchise à la suite d'un homicide qu'il avait commis, en aidant son neveu à s'emparer d'un homme coupable de vol.

AN JJ. 189, n° 210, fol. 102 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de Perrin Benoist, aagé de xl. ans ou environ, demourant en la parroisse d'Aventon, contenant comme, le lundit devant Noël derrenier passé, ung nommé Jehan Mary, son nepveu, le rencontra et lui demanda s'il avoit point veu ung homme qui avoit robé son maistre, nommé Perrot Legros, d'un cuèvre chief et de neuf deniers qu'il devoit de son escot, lequel lui respondi que non, et alors ledit Jehan Mary lui pria qu'il alast avecques lui après le larron et qu'il avoit ung grant cousteau, lequel ilz lui osteroient pour récompense de son escot. Et ainsi qu'ilz faisoient leur entreprise, seurvint ung nommé Simon Rat, qui appella ledit Jehan Mary et lui demanda quel homme c'estoit et quelz habillemens il avoit; lequel lui respondi qu'il avoit une robe de gris noir et ung petit chien rouge. Lequel Simon Rat lui dist que celui qu'il demandoit estoit venu le dimenche precedent au soir devers Sissé jusques au droit de la justice du seigneur d'AventonLa châtellenie d'Avanton était dans la mouvance de la Tour de Beaumont qui relevait elle-même de la vicomté de Châtellerault. Jean Labbé, fils a autre Jean et de Jeanne Ogier, en était seigneur en 1432, date de sa mort. Son frère Guy Labbé, prêtre, en hérita, mais on ne dit point combien de temps il la garda et quand il mourut. Après celui-ci, Avanton devint la propriété de N. de la Viaudière, qui avait épousé Marie Viaud et était décédé avant 1474. A cette date, Jacques Hervet, écuyer, en devint seigneur à cause de son mariage avec Louise de la Viaudière. M. l'abbé Lalanne, auquel sont empruntés ces noms de possesseurs, donne aussi une courte description du château d'Avanton, qui existe encore en parfait état de conservation. (Histoire de Châtetleraud, 2 vol. in-8°, t. 1, 1859, p. 350.) et que ledit larron qui estoit texier lui avoit demandé s'il seroit bien de jour à Bram et qu'il vouloit tirer droit à Chasteleraud ; lequel Simon Rat lui dist que ouy. Et incontinent après ces paroles, ledit Jehan Mary s'en retourna à l'ostelde son dit maistre et lui dist que ledit larron texier vouloit tirer vers Chasteleraud et qu'il lui baillast la fourche de fer, et qu'il avoit ung grant cousteau de quoy il lui pourroit faire desplaisir. Et après se mirent à che min [les diz] Jehan Mary et suppliant, son oncle, et alèrent l'un droit à Aventon et l'autre à Jaunay. Et depuis se rencontrèrent lesdiz Jehan Mary et suppliant, et dist icelui Jehan Mary audit suppliant qu'il s'en alast droit à Bram et il s'en yroit droit à Jaunay, et s'il le rencontroit le premier, qu'il le hueroit. Et ainsi que ledit Jehan Mary tiroit son chemin, avisa ledit larron et commença à crier et huer « au larron, au larron ! » Et quant il oyt le bruit, se tira à part du chemin, et quant il vit icelui Jehan Mary près de lui, il se retourna contre lui. Et en ce bruit seurvint ung homme dudit Jaunay qui avoit une deschaussouèreLa déchaussoire était une sorte de houe. Godefroy cite deux exemples de ce mot, empruntés aux registres du Trésor des chartes. (Dict. de l'anc. langue française, verbo Deschaussoire.) au col, qui demanda que c'estoit qu'ilz avoient, et ledit Jehan Mary lui dist que ledit texier avoit desrobé ledit Legros, son maistre, d'un cuèvrechief et de son escot. Lequel homme de Jaunay dist audit texier qu'il rendist ledit cuèvrechief et qu'il payast son escot. Et en disant ces paroles, seurvint ledit suppliant qui dist audit texier qu'il seroit bien froté s'il ne rendoit ledit cuèvrechief. Et alors ledit Jehan Mary dist audit suppliant qu'il ne le frappast point et qu'il le rendroit. Et adoncques ledit texier print ledit cuèvrechief où il l'avoit mis et le bailla audit Jehan Mary, [lequel] après lui demanda lesdiz neuf deniers qu'il devoit pour son escot, mais il lui dist qu'il n'avoit point d'argent. Et lors Jehan Mary et ledit suppliant, son oncle, le mirent devant eulx pour aler conter audit Legros; et ledit texier demanda audit Jehan Mary qui le payeroit de sa journée, lequel lui respondi qu'il seroit bien payé. Et en alant par le chemin, icelui texier print une pierre et dist à icelui Jehan Mary qu'il le feroit bien reculer arrière ; et adoncques ledit suppliant dist audit Jehan Mary qu'il descendist de dessus une jument où il estoit monté et qu'il Patachast, ce qu'il fist. Et après ce, icelui suppliant dist audit texier qu'il ostast la main du cousteau, qui lui respondi que non feroit. Et quant icelui Jehan Mary vit que icelui texier avoit une pierre en sa main et l'autre main sur le cousteau, il lui donna de la dicte fourche sur les espaules ; lequel, quant il se sentit frappé, laissa la main sur son cousteau et faisoit semblant de frapper ledit Jehan Mary arrière main ; et quant ledit suppliant l'apperceut, lui donna sur la teste d'un paufourCet instrument est ainsi décrit dans un autre acte de l'année 1475, enregistré au Trésor des chartes : « Ung gros baston forchu de plain poing et long d'une brasse et plus vulgairement appellé paufour ou fourche». (Arch. nat., JJ. 204, n° 67.) On trouve aussi pauforc et pauforche., et derechief icelui Jehan Mary, après aucunes paroles, frappa ledit texier de ladicte fourche sur la temple, tellement que le sang en saillit ; et alors ledit suppliant lui dist qu'il ne le frappast pas sur la teste, mais il l'avoit jà frappé. Et combien que ledit suppliant eust dit audit Jehan Mary qu'il ne le frappast sur la teste, neantmoins lui mesmes lui donna dudit paufour sur le coing du front, tellement que du coup il cheut à terre, et que le sang en sailloit en grant habundance. Et quant ledit Jehan Mary vit que ledit texier estoit couchié, lui osta son cous- teau. Et certain temps après ledit texier, par mauvais gouvernement ou autrement, est alé de vie à trespas. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant s'est traict en franchise, de laquelle il n'oseroit saillir, pour doubte d'estre prins et que justice ne voulsist proceder rigoreusement à rencontre de lui par pugnicion corporelle, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant, etc. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit Perrin Benoist suppliant avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou moys d'octobre l'an de grace mil cccc. cinquante sept, et de nostre règne le xxxve Avant le 22, la trente-cinquième année du règne de Charles VII finissant le 21 octobre 1457.

Ainsi signé : Par le conseil. G. d'Asnières. — Visa. Contentos. Valengelier.

MCCLXXXIII Octobre 1457

Rémission accordée à Jean Paisonneau, détenu dans les prisons de la prévôté de Poitiers, pour un vol avec effraction commis au préjudice de Perrette Chartier, à Poitiers.

AN JJ. 187, n° 331, fol. 178 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion des parens et amis charnelz de Jehan Paisonneau, detenu ès prisons de la prevosté de Poictiers, contenant que ledit Paisonneau, estant et frequentant en l'ostel et maison de Perrette Chartière et maistre Jehan Berart, son filz, vit par plusieurs foiz que la dite Perrette tiroit d'un sien coffre une bourse, et en icelle avoit, comptoit et prenoit del'or et monnoie. Lequel Paison- neau, veant ces choses, meu de mauvais propos et voulenté, eut entencion et vouloir d'avoir ledit or, et à ceste cause, pourmettre sa voulenté à execucion, se transporta, ung peu paravant la feste Nostre Dame de septembre derrenierement passée, en l'ostel d'un mareschal, demourant près l'eglise de Saint Michel dudit lieu de Poictiers, et ilec print, au desceu dudit mareschal, unes tenailles et ledit jour de Nostre Dame, s'en ala musser en une chambre sur le foing, en la maison de la dite Perrette et son dit filz, faignant et disant qu'il aloit veoir le curé de Chasseneuil, son oncle. Et luy estant en la dicte chambre, la dicte Perrette et sa chamberrière s'en yssirent dudit hostel et fermèrent l'uys de clef ; et après qu'elles s'en furent yssues dudit hostel et que ledit Paisonneau aperceut qu'il n'y avoit personne, entra en une chambre où ledit coffre estoit et, à force et par le moien des dictes tenailles, rompit ledit coffre et y trouva deux tasses d'argent, et dedens l'une d'icelles de la monnoie, de laquelle il print jusques à trente cinq grans blans ou environ ; aussi il trouva ung gobellet d'argent et ladicte bourse en laquelle avoit soixante quinze pièces d'or de divers coings, laquelle bourse, or et monnoie il print et emporta et s'en yssit hors de la dicte chambre, et après s'en ala achetter des soliers et boire avecques jeunes compaignons ; et d'ilec se transporta au lieu de Lesignan, où, à l'occasion du dit cas il fut prins et constitué prisonnier audit lieu de Lesignen. Et luy estant ilec prisonnier, a fait restitucion à partie des dictes choses amblées ; et depuis a esté amené ès prisons de ladicte prevosté de Poitiers, èsquelles il est detenu et en aventure d'y finer miserablement ses jours, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties, si comme ilz client, en nous humblement requerant que, attendu ce que dit est et que ledit Paisonneau a fait restitucion, comme dit est, et que en tous autres cas il est homme paisible, de bonne vie et honneste conversacion, non actaint ou convaincu d'aucun villain cas, blasme oureprouche nous plaise lui impartir icelles. Pourquoy nous, ces choses, considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit Paisonneau, oudit cas, avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces dictes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Saint Amand Laillier, ou mois d'octobre l'an de grace mil cccc. cinquante sept, et de nostre règne le xxxvieAprès le 22, jour où commence la trente-sixième année du règne de Charles VII.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Rolant — Visa. Contentor. A. Disome.

MCCLXXXIV Décembre 1457

Lettres de rémission en faveur de Jean EscoubleauCe personnage pourrait être le fils cadet de Léonnet Escoubleau, écuyer, seigneur de Sourdis (décédé avant le 10j uin 1447), et d'Etiennette d'Oyron, ou plutôt son neveu Jean, fils aîné de Maurice Escoubleau, aussi sr de Sourdis, qui décéda un peu antérieurement au 21 janvier 1472, et de Guillemette Foucher. Ce second Jean Escoubleau, alors jeune, servait en 1460 dans la compagnie de Charles d'Anjou, comte du Maine, vicomte de Châtellerault, et en qualité d'homme d'armes aux bans de Poitou des années 1471, 1491 et 1492; il mourut le décembre 1494. (Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. III, p. 286.) Les faits relatés dans ces lettres de rémission n'ayant pas eu lieu en Poitou, il suffit d'en donner le sommaire., archer de l'ordonnance sous la charge du maréchal de LohéacAndré de Laval, sr de Lohéac, de Pouzauges et de Tiffauges, maréchal de France, sur lequel voy. notre volume précédent, p. 398, note., qui, revenant d'Auverse en Anjou à Beauvais où il tenait garnison, avait assisté à une querelle entre Jean du Domaine et le bâtard de Quite, hommes d'armes de ladite compagnie, dans laquelle ce dernier fut frappé à mort d'un coup de dague. « Si donnons en mandement par ces presentes au bailly de Touraine et des ressors et exempcions d'Anjou et du Maine, etc. Donné à Tours, ou mois de decembre l'an de grace mil cccc. cinquante sept, et de nostre règne le xxxvie Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Rolant. — Visa. Contentor. J. Du Ban. »

AN JJ. 189, n° 140, fol. 65 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.
MCCLXXXV Janvier 1458

Rémission octroyée à Jean Paynnot, de Beauvoir-sur-mer, et à sa femme, meurtriers de Guillaume, anglais pris à Castillon, devenu valet de Jean Loiset, de Beauvoir, contre lequel ils avaient été obligés de se défendre à la suite de remontrances qu'ils lui avaient adressées parce qu'il laissait paître dans leurs avoines les chevaux de son maître.

AN JJ. 189, n° 157, fol. 73 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace, de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue Fumble supplicacion de Jehan Paynnot, filz de feu Nicolas PaynnotNous avons publié dans notre t. VIII, p. 290 et suiv., des lettres de rémission en faveur de Thibaut Paynnot, écuyer, demeurant en l'île de Magné. On trouve aussi vers la même époque une famille de ce nom établie à Boismé et aux environs, dont Guillaume Paynot, meunier de la Rénelière, possessionné à la Maurière et propriétaire d'une maison à Boismé. (Actes du 28 décembre 1473 et du 23 juillet 1477; Archives du château de la Barre, par A. Richard, t. II, p. 346, 347.) Il est probable que ces personnages et les Paynnot de Beauvoirsur-mer n'avaient de commun que le nom. et de Marie Pouillète, sa femme, fille de feu Jehan Pouillet, demeuransà Beauvoir sur merTrois ans après la date de ces lettres, Emery Gautier, curé de Beauvoir-sur-mer, et Nicolas son frère, portèrent plainte au Parlement contre plusieurs habitants de cette localité qui les avaient assaillis dans leur maison, avaient brisé les portes et les fenêtres, leur avaient jeté des pierres, etc., pour se venger de ce. que ledit Emery Gautier leur avait intenté un procès. (Mandement d'enquête du 15 septembre 1461, X2a 30, fol. 88.), aagez de xviii. à xx. ans ou environ, contenant que, sept ans a ou environ, les diz supplians furent conjoings ensemble par mariage en ladicte ville de Beauvoir ou bas païs et conté de Poictou, duquel lieu ilz et leurs predecesseurs d'ancienneté sont natifs, lesquelz supplians demourèrent orphelins et en bas aage et pupillarité soubz le gouvernement de certains leurs tuteurs, après le décès de leurs pères et mères ; et pour ce que les diz supplians, ou temps de leurs mariages, estoient jeunes et n'avoient encores sens ne discrecion de tenir maison ne gouverner leurs heritaiges, Jaques Barbier, bourgeois dudit lieu de Beauvoir, prouchain parent et lignagier de ladicte Marie, suppliant, retira à luy et en sa maison lesdiz supplians ; avec lequel Barbier ilz ont demouré par aucun temps, durant lequel ilz se sont bien doucement gouvernez. Et puis deux ou trois ans ença, se sont lesdiz supplians mis à leurmesnaige et à tenir maison audit lieu de Beauvoir, où ilz se sont gouvernez bien et honnestement et conversé avec leurs voisins doulcement et paisiblement, sans avoir noise ne division à aucune personne, et jamais ne furent souspeçonné, actains ou convaincus d'aucun cas digne de reprehencion. Lesquelz supplians, à cause de ladicte Marie Pouillète, entre autres heritaiges qui leur compettent et appartiennent, sont seigneurs proprietaires d'une pièce de pré contenant quatre journaulx ou environ, nommé le Pré Gaultier, assis près ledit lieu de Beauvoir, ou fief et tenement, appellé la Mareschaucie, encloz ledit pré de fossez et fermant à une barrière ; lequel pré ledit Jehan Paynnot, suppliant, environ la feste de Chandeleur derrenière passée, loua à ung nommé Laurens Carbiret, cousturier dudit lieu de Beauvoir, pour ung an, et environ la feste saincte Katherine derrenière passée, ledit Jehan Paynnot, suppliant, pour avoir en l'année avenir de quoy nourrir son mesnaige, fist mettre et semer de l'orge sur les bossilz et levées qui sont à l'entour dudit pré. Et pour ce que les bestes chevalines d'un nommé Jehan Loyset, demourant audit lieu de Beauvoir, qu'il mettoit oudit pré et auquel Loyset, comme l'en dit, ledit Carbiret avoit loué et affermé ledit pré, durant le temps de sa ferme, et degastoient de jour en jour ledit orge, ledit suppliant requist plusieurs foiz ledit Loyset et autres gens de sa famille qu'il leur pleust retraire lesdictes bestes et gaiger qu'elles ne luy gastassent sondit orge ; dont ledit Loyset ne tint conte, mais bouta et fist bouter ses dictes bestes oudit pré, comme paravant, et ne les garda ne fist garder de gaster ledit orge qui a du tout esté mengé, gasté et perdu par lesdictes bestes, en quoy ledit suppliant a esté grandement endommaigé, et a ledit Loyset fait faire ce que dit est à l'occasion de certaines haynes par luy conceues sans cause à l'encontre desdiz supplians. Lesquelz supplians, le mardy d'après Noël, jour de saint Jehan l'Euvengeliste derrenier passé, alèrent disner en l'ostelde André Gauguin, distant dudit lieu de Beauvoir d'un quart de lieue ou environ, et après qu'ilz eurent disné et s'en vouloient retourner en leur maison, ledit Paynnot suppliant print en sa main une verge de fleau, non pensant à aucun mal, et en eulx retournant ilz passèrent par ledit pré, pour ce qu'il est près du chemin, et trouvèrent les bestes dudit Loyset qu'ilz gastoient ledit orge. Et lors ledit Paynnot suppliant se print à chasser lesdictes bestes et les amena jusques auprès de labarrière qui est à l'entrée dudit pré, à laquelle barrière survint ung nommé Guillaume, anglois et natif du païs d'Angleterre, lequel avoit esté prins à la journée de CastillonLa «journée » de Castillon (Dordogne), 17 juillet 1453, décida du sort de la Guyenne. L'armée française avait entrepris le siège de cette place et les opérations en étaient dirigées par Jean Bureau, Joachim Rouault et le comte de Penthièvre. Les forces réunies devant la ville s'élevaient à environ 1800 lances avec un corps defrancsarchers; elles étaient sous les ordres de l'amiral de Bueil, du grand maître Chabannes et des maréchaux de Lohéac et de Jalognes. Talbot, pressé par les habitants de Bordeaux, se décida, après quelque hésitation, à se porter au secours des assiégés II livra bataille aux Français qui s'étaient retranchés dans un vaste camp, à une demi-lieue de . la place, entre la Dordogne et la Lidoire. Elle fut désastreuse pour les Anglais Talbot et son fils furent tués et leur armée, réduite de moitié (elle avait perdu 4.000 hommes), s'enfuit en désordre. Castillon capitula le 20 juillet, L'armée française marcha aussitôt sur Saint-Emilion et sur Libourne, qui ouvrirent leurs portes. La campagne se termina par l'occupation de Bordeaux, 10 octobre. (De Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. V, p. 271-277.) ou voyage de Gascongne, comme on dit, qui estoit varlet et serviteur dudit Loyset, et avoit demouré avec luy l'espace de cinq quartiers d'an ou environ ; et portoit ledit Guillaume une pale ferrée sur son espaule et une dague à sa sainture ; après lequel venoit une jeune fille de l'aage de vingt ans ou environ, chamberrière dudit Loyset. Auquel Guillaume ledit suppliant dist que les bestes de sondit maistre luy avoient fait grand dommaige en sondit orge et que c'estoit mal fait de les y mettre, et qu'il ouvrist ladicte barrière et les emmenast. Lequel Guillaume respondit en jurant Dieu et saint George qu'il neouvreroit point ladite barrière et que lesdites bestes demou[re-] roient pour pasturer oudit pré, et que sa maistresse, femme dudit Loyset, lui avoit commandé de les y mettre et tenir. Oye laquelle responce, ledit Jehan Paynnot suppliant ouvrit ladicte barrière, pour cuider mettre lesdictes bestes hors du pré. Mais incontinent ledit Guillaume, qui estoit fort et puissant de corps, de l'aage de trente six ans ou environ, leva ladicte paile ferrée et l'aproicha de la gorge dudit Jehan Paynnot suppliant, pour l'en vouloir frapper. Lequel Paynnot, voiant la malice et mauvais propos dudit anglois, se tira arrière et de ladicte verge de fleau qu'il tenoist en sa main, destourna le cop dudit anglois, qui non contant de ce et en perseverant en sa malice et mauvaise voulenté, releva ladicte paile et en frappa ledit Jehan Paynnot suppliant sur la teste, tellement qu'il luy fist cheoir à terre ses chappeau et bonnet, et à l'occasion dudit coup fut ledit Paynnot comme estourdy ; et lors laissa ledit anglois ladicte paile, laquelle ledit Jehan Paynnot suppliant print pour empescher que ledit anglois ne le blessast et frappast d'icelle. Et ce voyant ledit anglois, il tira sa dague et d'icelle s'efforça frapper ledit Paynnot par la poictrine pour le murtrir et tuer, et l'eust murtry de fait, se ne fust que ledit suppliant se desmarcha, et néanmoins le frappa ledit anglois de la dicte dague sur le bras dextre et persa la menche de sa robe. Lequel Paynnot suppliant, qui cuidoit estre très enormement blecié, pour resister à la fureur dudit anglois, qui tousjours le poursuivoit, tenant ladicte dague en sa main, print son chappeau à sa main senestre et s'en targea pour doubte que ledit anglois ne le tuast et murtrist, et à sa main dextre tira ung petit cousteau de Prasgue qu'il avoit pendu à sa sainture, duquel cousteau ledit suppliant, en soy deffendant, frappa ledit anglois par la poictrine et luy entra dedens le corps. Mais ce non obstant ledit anglois, en perseverant en sa mauvaise voulenté, ne laissa point de tousjours poursuir ledit Paynnot, jusques [à ce que] ladicte Marie, femme dudit Paynnot suppliant, voyant le dangier en quoy estoit sondit mary d'estre tué, se vint mettre entre luy et ledit anglois, lequel anglois elle print et le arresta, et lors il luy aproicha sadicte dague du ventre pour la cuider ferrer, mais elle se escria en disant audit anglois qu'il ne la frappast point, et que s'il la frappoit, elle le feroit pendre. Et à ceste cause se escouy ledit anglois, pour soy eschapper des mains de ladicte Marie suppliant, et la fist reculer et tumber à ung genoil, à laquelle cheute elle descira et rompit la chemise dudit anglois, et lors se escreva la playe qui avoit esté faicte par ledit Paynnot suppliant audit anglois, lequel incontinent estuya sa dague et leva ladicte paile qu'il avoit laissée cheoir en terre et s'en ala audit lieu de Beauvoir, en donnant grans menasses ausdiz supplians. Lesquelz, voyans ledit cop ainsi advenu et le sang qui yssoit de ladicte playe, eurent grant desplaisance et encores ont de present dudit cas et debat. Et quant ledit anglois fut audit lieu de Beauvoir, il se fist, comme l'en dit, charmer par ung franc archier demourant audit lieu de Beauvoir et laissa sadicte playe, sans soy faire aucunement penser ne abiller, au moins par personne experte à ce; mais print ung barbier qui est viel et ancien, non congnoissant en telz besongnes, et par faulte de gouvernement et d'estre apareillé comme il appartenoit, est ledit anglois, unze jours après ladicte blessure, alé de vie à trespassement. A l'occasion duquel cas, lesdiz supplians se sont absentez du païs, et ont esté leurs biens prins et saisiz par Ja justice de nostre très cher et amé cousin le conte d'Angolesme, seigneur dudit lieu de BeauvoirJean comte d'Angoulême, fils puîné de Louis de France, duc d'Orléans, et de Valentine de Milan, né le 26 juin 1404, resta prisonnier en Angleterre, comme otage de son frère, de 1412 à 1444, et ne prit possession de son comté qu'en l'année 1445. Il mourut au château de Cognac, le 30 avril 1467. Dans son contrat de mariage avec Marguerite de Rohan, seconde fille d'Alain IX, vicomte de Rohan, et de Marie de Bretagne, contrat qui porte la date du 31 août 1449, le comte d'Angoulême promit à sa future épouse, pour son douaire, la somme de neuf mille écus d'or vieux de soixante-quatre au marc, avec l'usufruit pendant vingt ans des terres de Beauvoir-sur-mer et de l'île d'Yeu, ladite rente rachetable au cours de ces vingt ans moyennant la somme de quarante mille écus d'or. (Orig., Arch. nat., P. 14031, pièce n° VI.) On verra par des lettres de décembre 1465, publiées ci-dessous, que Jean d'Angoulême avait d'autres possessions en Poitou. A la mort du comte Jean, son fils aîné, Charles, qui épousa plus tard (1484) Louise de Savoie, et fut père du roi François était âgé de sept ans seulement et fut placé, ainsi que ses sœurs, sous la tutelle de leur mère, qui vivait encore en 1496. Marguerite de Rohan, à peine veuve, voulut imposer sur les habitants de Beauvoir-sur-mer une taxé de 200 livres par an, et fit saisir les biens de ceux qui refusaient le paiement. Ceux-ci protestèrent et firent assigner la comtesse douairière au Parlement, qui, par mandement du 19 novembre 1467, prescrivit une enquête. (Arch. nat., X2a 36, fol. 51 v°.) La justice s'exerçait à Beauvoir, au nom du comte d'Angoulême, par un sénéchal dont les sentences étaient portées en appel au Parlement de Paris. (Acte du 12 décembre 1463, X2a 32.), et n'oseroient iceulx supplians jamais retourner au païs, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu ce que dit est, etc., il nous plaise leur impartir icelles. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, ausdiz supplians oudit cas avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, aux seneschaulx de Poictou et de Xantonge et gouverneur de la Rochelle, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou mois de janvier l'an de grace mil cccc. cinquante sept, et de nostre règne le xxxvie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. BriçonnetJean Briçonnet, sr de Varennes, originaire de Tours, fils de Jean et de Jeanne Belleteau, fut secrétaire du roi, puis receveur général des finances de Languedoïl, à la place de Pierre Jobert, par lettres datées d'Orléans le 14 décembre 1466. (Bibl. nat., ms. fr, 20685, fol. 401.) Il avait été commis à la régie de la régale de Tours en 1443 et au paiement des ouvrages du château de Langeais, en 1465 et 1467. Briçonnet fut le premier maire institué à Tours, fit rebâtir l'église de Saint-Clément de cette ville, représenta le bailliage de Touraine aux Etats généraux de 1484, mourut le 30 octobre 1493, et fut enterré, avec ses père et mère, en l'église Sainte-Croix de Tours, suivant le désir qu'il en avait exprimé dans ses testaments de 1471 et 1491. (Le P. Anselme, Hist. généal., t VI, p. 428.). — Visa. Contentor. J. Du Ban.

MCCLXXXVI 20 février 1458

Lettres portant remise d'une partie des peines prononcées par les officiers du duc de Bretagne à Fontenay-le-Comte contre Jean Buchon, tisserand de drap audit lieu, qui, pour se venger des mauvais traitements qu'il en avait reçus, avait frappé François Thibaut d'un coup d'épée.

AN JJ. 485, n° 322, fol. 119 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, etc., à tous ceulx qui ces presentes lettres verront, salut. L'umble supplicacion de Jehan Buchon, povre homme, natif de nostre ville de Saint Jehan d'Angeli, tixerrant en draps, aagé de trente trois ans ou environ, à present detenu prisonnier ès prisons de Fontenay le Conte, avons receue, contenant que, puis aucun temps ença il est venu demourer audit lieu de Fontenay, pour y gaingner sa vie à la peine de son corps et excercice de son dit mestier, au mieulx qu'il pourroit ; et jasoit ce qu'il n'eust meffait ne mesdit à François Thibaut, demourant audit lieu de Fontenay, ce neantmoins ledit Thibault et autres qui sans cause raisonnable avoient conceu grant haine et malveillance à rencontre de lui, de nuyt et à heure indeue, en mettant la dite haine à excecucion, depuis ung an ença, d'une espée ou autre ferrement, batirent et navrèrent le dit suppliant très griefvement. Depuis la quelle bateure ledit suppliant, qui ne avoit eu aucune reparacion d'icelle, ainsi qu'il trouva ledit Thibaud devant la maison du dit suppliant, souvenant et aiant en memoire l'injure, bateure et oultrage qui luy avoit esté fait par le dit Thibault, frappa icellui Thibault d'une espée qu'il avoit plusieurs coups. A l'occasion de laquelle bateure, jasoit ce qu'il eust esté le premier batu et injurié, et par ce eu cause et couleur de batre le dit Thibault, il a esté prins et constitué prisonnier par les gens et officiers de nostre très chier et très amé cousin le duc de BretaigneLe connétable de Richemont, devenu duc de Bretagne sous le nom d'Artur III par la mort de son neveu Pierre II (22 septembre 1457), qui ne laissait point d'enfants, jouissait de Fontenay-le-Comte (château, ville et châtellenie) et de ses revenus avec droit d'y instituer les officiers, depuis son premier mariage, 10 octobre 1423. Charles VII l'avait assigné avec d'autres terres et seigneuries à Marguerite de Bourgogne, veuve de Louis, dauphin, duc de Guyenne, pour son douaire. Après la mort de celle-ci, par lettres patentes datées de Lusignan, le 10 mars 1442, le roi confirma à Richemont la possession de Fontenay, sa vie durant, et il en jouit effectivement jusqu'à son décès (26 décembre 1458). Il a été question de ce démembrement du domaine de Poitou dans notre précédent volume, Introduction, p. XXXI-XXXII. M. Cosneau cite comme une preuve de la générosité et de l'indulgence du connétable les lettres de rémission qu'il octroya à Jean Buchon, de Fontenay-le-Comte, dont la confirmation royale est publiée ici. (Le connétable de Richemont, p. 446, 458 note.), connestable de France, audit lieu de Fontenay, par lesquelz, pour occasion de ladicte bateure, il a esté condempné en douze escuz d'or d'amende envers nostre dit cousin et à estre batu et fustigé par ung jour de marché publiquement audit lieu de Fontenay, et banny des terres de nostre dit cousin, et à reparer et amender ledit delit audit Thibault. Depuis laquelle condempnacion, aucuns des parens et amis dudit suppliant se sont traiz par devers nostredit cousin et lui ont fait remonstrer que, se la dicte sentence estoit à l'encontre de lui ainsi rigoureusement mise à execucion, ce seroit et pourroit estre la destruction total, deshonneur et vitupère dudit suppliant, qui est jeunes homs et a bon vouloir de vivre désormais honestement et non faire chose dont il doye estre reprins, icellui nostre cousin, en faveur de ce, luy a quicté et remis la moitié de la dicte amende de douze escuz qu'il a paiée, ensemble la dicte amende corporelle et rappellé le dit bannissement, et de ce luy octroya ses lettres patentes, signées de sa propre main et de l'un de ses secretaires. Neantmoins ledit suppliant doubte, obstant ce que nostre dit cousin n'est seulement que usuffructuaire dudit lieu de Fontenay, que aucuns voulsissent dire nostre dit cousin n'avoir povoir de faire la dicte quictance corporelle et rappeller ledit bannissement, et que par ce, obstant iceulx, on voulsist rigoureusement ladicte sentence mettre à rencontre de lui à excecucion, se par nous ne lui est ledit bannissement rappellé et peine corporelle quictée et pardonnée et sur ce nostre grace eslargie, si comme il dit, requerant humblement que, attendu que ledit suppliant a esté le premier batu,par quoy a esté aucunement meu d'avoir batu le dit Thibault, que icellui Thibault est guery et sain, sans ce qu'il en soit demouré malade, que pour occasion dudit cas, il a jà esté longuement prisonnier, en grant povreté et misère et jà paié la moitié de la dite amende de douze escuz en quoy il estoit condempné envers nostre dit cousin, ainsi que nostre dit cousin, par sesdictes lettres, l'avoit voulu et octroié, il nous plaise la dicte peine corporelle luy quicter et remettre, et le dit bannissement rappeller, et sur ce luy impartir nostre grace. Pour quoy nous, ce consideré, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant avons ladicte amende corporelle quicté et pardonné, quictons et pardonnons, de grace especial, plaine puissance et auctorité roial, par ces presentes, et de nostre plus ample grace avons ledit bannissement rappellé et rappellons par ces dictes presentes, en le restituant à ses bonne fame et renommée, audit païs et à ses biens non confisquez par ledit bannissement, satisfacion faicte à partie civilement tant seulement, se faicte n'est, et reservé à nostre dit cousin ou autres à qui il appartendra la dicte amende civile. Si donnons en mandement à nostre seneschal de Poictou ou à son lieutenant à son siège de Poictiers, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, le xxe jour de fevrier l'an de grace mil cccc. cinquante sept, et de nostre règne le xxxvie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. G. Authouis.

MCCLXXXVII Mars 1458

Rémission donnée en faveur d'Etienne Hérissé, Pierre Pinart et Jean Guillaudeau, responsables de la mort de Thoraine Effray, prétendue sorcière, qu'ils avaient emmenée en chemise, une nuit de décembre, au bout du village d'Andillé en Loudunais, sous prétexte de lui demander de désensorceler ledit Pinart.

AN JJ. 187, n° 173, fol. 89 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble suplicacion de Estienne Herissé, Pierre Pinart et Jehan Guillaudeau, contenant que, le lundi après la feste de Nouel et jour de saint Estienne derrenierement passé, entre huit et neuf heures de nuit, ilz se transportèrent ou village de Andillé ou pays de Loudunois, ouquel village demouroit une femme nommée Thomine l'Effrayte, aagée de lx. ans ou environ, qui estoit renommée d'estre sorcière, laquelle estoit couchée en son lit, vestue de sa chemise et chaussée de ses chausses; laquelle ilz firent lever en l'estat qu'elle estoit et la mirent hors de la maison en laquelle estoit couchée et la menèrent en ce point à part dudit villaige, sans la batre ne fraper, et pour ce que troys ou quatre ans avoit que ladite Thomine avoit emblé audit Pinart, en faisant son lit, ung bonnet, du larrecin duquel bonnet elle fut trouvée actaincte et qu'il se doubtoit que, en haine de ce elle l'eust ensorcelé, à l'occasion de ce que depuis le larrecin dudit bonnet, la peau de son corps et de ses bratz luy est tumbée, les diz suplians, à l'occasion dessusdicte, l'interrogèrent tous ensemble pourquoy elle avoit ensorcellé ledit Pinart et aussi ung homme de bien, nommé Jehan Souchier, et ung autre nommé Jehan Lemée, et la fille de Estienne Thomas, et que de ce ledit jour et par avant avoit esté grant bruit et parolles en la parroisse, ilz se transportèrent par devers ladite Thomine et luy requirent que, si elle avoit fait telles sorcelleries, qu'elle le voulsist deffaire. Ausqueulx elle respondit qu'ilz s'en allassent par devant ung nommé Gaudin, lequel estoit de la suite et avoit acoustumé de deffaire telles choses. Lesqueulx suplians, voyans qu'elle ne vouloit autre chose dire, la ramenèrent doulcement oudit villaige, sans la batre ne luy faire autre desplaisir ou mal et la mirent à Puis de l'oustel où ilz l'avoient prinse ; ouquel houstel estoient couchez son filz et la femme de son dit filz, et la laissèrent à l'uy dudit houstel, pensans que son dit filz et sa femme luy ouvrissent l'uys et la feissent chauffer ; et atant se departirent lesdiz suplians et s'en allèrent au lieu dont ilz estoient venuz. Et le lendemain qui fut le mardi enssuivans les diz suplians oyrent que ladite Thomine estoit allée de vie à trespassement icelle nuyt, et n'avoit sur elle aucuns coups, bateures, coups orbes, ne autre chose dont elle deust estre morte, se ce n'est de froidure ; et presume l'en que elle est morte de froidure ou de maladie à elle sourvenue, pour ce que deux ou troys jours devant, elle desiroit mourir. A l'occasion duquel cas, les diz suplians doubtent que on vueille contre eulx proceder à prinse et emprisonnement de leurs personnes, ou autrement à pugnicion corporelle, se nostre grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu ce que dit est, et qu'ilz n'ont ladite Thomine batue ne fait autre chose que dit est, et qu'elle estoit renommée d'estre sorcière et avoir ensorcelé ledit Soucher et luy avoir fait le mal qu'il souffiroit de jour en jour, et pareillement avoit fait mourir le père dudit Lemée, deux beufz et deux jumens, et pareillement d'avoir ensorcellé la fille dudit Thomas, tellement que elle courroit folle parmy les chemins toute nue, et de avoir fait mourir oudit villaige la femme de ung nommé Laurens Effray, qu'ilz n'allèrent point vers ladite Thomine en entencion de la batre,frapper ne la mutiller, aussi ne l'ont ilz point fait, et n'y allèrent tant seulement que en entencion de parler à elle, pour deffaire ce qu'elle avoit fait audit Pinart, qui se doubtoit que elle l'eust ensorcellé et en entencion qu'elle la guerist ou deffeist ce que elle avoit fait, que ilz sont gens de bon fasme, renommée, honneste conversacion, non actains ou convaincuz d'aucun villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise leur impartir icelles. Pour quoy nous,attendu cequedit est, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, ausdiz suplians avons, en l'onneur et reverance de la Passion Nostre Seigneur Jhesu Christ qui à tel jour souffrist mort et passion, quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement aux seneschaulx de Poictou, bailly de Touraine, des ressors et exempcions d'Anjou et du Maine, ou à leurs lieuxtenans, etc. Donné à Tours, ou moys de mars l'an de grace mil cccc. cinquante sept, et de nostre règne le xxxvie avant Pasques.

Ainsi signé : Par le roy, tenans ses requestes , èsquelles vous, maistres Jehan TudertJean Tudert, fils d'Olivier, originaire de Mirebeau, avait été nommé conseiller lai au Parlement de Paris par lettres du 43 novembre - 1437. Un an plus tard, le 18 décembre 1438, Jean Tudert, son oncle, doyen de Paris et-de Poitiers, qui venait d'être élu évêque de Châlons il mourut le 9 décembre 1439, avant d'avoir été sacré), résigna en sa faveur sa charge de maître des requêtes de l'hôtel et l'institua son héritier et exécuteur principal, son frère Olivier l'ayant précédé dans . la tombé. Jean, le jeune, prêta serment entre les mains du chancelier de France, le 20 avril 1439. L'an 1445, Charles VII lui fit don de 300 livres, outre ses gages ordinaires, en considération des services qu'il lui avait rendus en son office de maître des requêtes et pour subvenir aux dépenses qu'il était obligé de faire à la suite de la cour; il renvoya, en 1453, en qualité d'ambassadeur auprès du duc de Savoie. M. de Beaucourt dit qu'il entra au conseil en 1455, mais que sa nomination remontait au 29 août 1448 (Hist. de Chartes VII, t. VI, p. 354). Louis XI conserva à Jean Tudert sa bienveillance et lorsqu'il établit le Parlement de Bordeaux (12 juin 1462), il le créa premier président de cette cour, charge qu'il exerça jusqu'au commencement de l'année 1472. Il siégea par conséquent à Poitiers, le Parlement ayant été transféré dans cette ville, quand Charles, frère du roi, reçut le duché de Guyenne en apanage (1469). Par lettres du 9 mars 1472 n. s., Louis XI autorisa Jean Tudert à résigner son office de premier président au profit de Jean Bérard, maître des requêtes de l'hôtel, et en récompense des services qu'il avait rendus « par bien longtemps » à son père et à lui, il lui conféra le droit de continuer à siéger au Parlement, avec le titre et les privilèges et prééminences de premier président, tant qu'il vivrait, et lui assigna chaque année une somme de 600 livres pour ses gages. (Copie col lat. aux Archives du château de la Barre. Invent. Analytique, par A. Richard, 1.1, p. 259.) Cet ouvrage contient la mention de beaucoup d'autres documents relatifs à Jean Tudert et sa famille. Sa femme, Catherine de Champdeniers, était en effet dame de la Barre-Pouvreau. ll en eut quatre fils et une fille et décéda le 13 septembre 1473 ; il fut inhumé, avec son épouse, dans le chœur de l'église des Cordeliers de Mirebeau. (Blanchard, Généalogies des Maistres des requestes de V hostel, in-fol., p. 157; Catalogue de tous les conseillers au Parlement de Paris, 1647, in-fol., p. 14; A. Thomas, Etats provinciaux sous Charles VII, t. I, p. 356; de Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. IV-VI, passim.), George HavartGeorges Havart, chevalier, sr de la Rosière au Perche, vicomte de Dreux, sénéchal héréditaire du comté d'Eu, nommé maître des requêtes de l'hôtel vers 1450, membre du conseil du roi en i455, décédé 1 an 1484. (Cf. notre précédent volume, p. 297 note.) Françoys HalléSur François Hallé, voir ci-dessus, p. 15, note 4., et plusieurs autres estoient. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCLXXXVIII Mars 1458

Rémission accordée à Guillaume et à Pierre Lorteau, demeurant à la Cailletière, paroisse des Brouzils, coupables du meurtre d'un nommé Jean Pichet, leur ennemi, qui les avait dépossédés induement de la ferme de la Noue-Baron, et lésés dans leurs intérêts en d'autres circonstances.

AN JJ. 187, n° 174, fol. 90 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de Guillaume et Pierre Lorteau, povres gens de labour, demourans ou villaige de la Cailletère en la parroisse de Broussilz en la chastellenie de Montagu, contenant que les diz supplians, qui sont povres gens, demourans ensemble en une communauté oudit village de la Cailletère, chargé de femme et de plusieurs petiz enffens, pour faire et entretenir leur labeur, quatre ans a ou environ, louèrent et affer- mèrent d'ung nommé Collas AimartSic. Le même personnage est nommé plus loin Admiraud et ailleurs encore Amyaud. La seconde leçon parait la plus vraisemblable ; car on trouve des Admirault dans la région, à cette époque. et Marguerite Baronne, sa femme, une pièce de heritaige, vulgaument appellé la Nohe Baron, à huit années après ensuivant, pour certaine ferme ou cense que les diz suplians estoient tenuz faire chacun an ausdiz Admiraud et sa femme, durant les huit années. Et combien que les diz suplians, au moyen et tiltre de la dicte ferme, à eulx faicte dudit heritaige en ayent depuis joy et usé et de ses appartenances, et ayent encores povoir d'en joyr par autres quatre années, selon ladicte cense, ce non obstant ung nommé Hurtault Dupré, demourant à l'Erbergement Entier, en hayne de ce que les diz suplians avoient prins ou fait prendre de ses bestes qu'ilz trouvoyent ès appartenances dudit heritaige, se trahit par devers les accenseurs ou bailleurs d'icelluy heritaige, et d'eulx le print et afferma au desceu des diz supplians, ce qui ne se povoit faire, obstant ladite première acsense ou ferme faicte ausdiz supplians, comme dit est. Lequel heritaige, comme on dit, le dit Hurtaut depuis bailla à feu Jehan Pichet, en mariaige faisant de sa fille avec le filz dudit Pichet. et l'avoit prins ledit Pichet pour nuyre et grever les diz supplians, pour ce que dès longtemps il avoit conceu grant hayne contre eulx à l'occasion du tenement de la Varinère, pour raison duquel iceluy Pichet qui estoit ung grant plaideur, fort noiseux et rioteux, et lequel avoit esté homme de guerre, et souvantes fois avoit debat avecques plusieurs gens de bien, a fait convenir et adjourner lesdiz supplians et mis en involucions de procès en diverses instances en la court des grans assises de Montagu, et non content de ce, pour celle cause a autresfois très fort batu ledit Guillaume Lorteau et feu Maurice Laurteau, frère et nepveu des diz suplians, dont il gagea l'admende, et pour ces moyens se conceut entre eulx plus grant hayne et malvueillance que devant. Et il soit [ainsi] que, le samedi xxviiie jour de janvier dernièrement passé, les diz suplians qui ignoroient le droit que ledit Hurtaut et Pichet se disoient avoir audit lieu et heritaige de la Nobe, conclurent entre eulx, et aussi ledit Guillaume, leur nepveu, de aler querir de la ramehée audit lieu de la Nohe, pour mettre sur leurs fèves et choux qu'ilz avoient plantez, naguères avoit. Et de fait ledit Guillaume, leur nepveu, s'en ala le premier audit lieu, pour en copper et dist audit Pierre supliant, son oncle, qu'il amenast après luy les beufz et la charrette pour emmener ladite ramée audit lieu de la Cailletère. Et de fait ledit Guillaume print une coignée et une sarpe et s'en alla le premier, et ledit Pierre alla lier les beufz et les atela à la charrette, et print une fourche à deux doiz pour decloure le pas, affin d'entrer en ladite Nohe Baron et se rendi avecques les diz beufz et charrette audit Guillaume, son nepveu, qui estoit oudit heritaige et illec esbranchoit ung chesne; et ledit Pierre supliant monta en la dite charrette pour faire la charge de la ramée, et ledit Guillaume, aussi supliant, commança à luy en bailler branches et reymes pour mettre en ladicte charette, et, en cliargant, ledit Pierre regarda vers ledit villaige de la Cailletière et vit ledit Jehan Pichet venir contre eulx impetueusement, et avoit en sa main une fourche de fer à deux doiz et une grant serpe à sa sainture. Et lors ledit Pierre dist audit Guillaume, son nepveu : « Voyés là Pichet qui vient vers nous, bien eschauffé. Je vous prie qu'il n'y ait point de noise ne de tabust, car il vouldroit mieulx laisser tout et nous en aller ». Lequel Guillaume luy respondit : « Ne vous chaut, laissez le venir ». Et quant ledit Pichet arriva à eulx, il leur dist très rigoureusement qu'ilz ne meneroient point ladite ramée et qu'elle estoit sienne, parce qu'ilz l'avoient prinse en son heritaige ; auquel ledit Pierre respondit bien gracieusement qu'ilz tenoient ladite Nohe, où ilz avoient prins ladite ramée, de Colas Amyaud et de sa femme, à ferme de huit ans, dont n'estoient encores passés que quatre, et que à ceste cause, ilz l'avoient encor à tenir autres quatre années. Et avec ce luy dist ledit Pierre que, se de leur debat il vouloit croire gens de bien, que au regart de luy et dudit Guillaume ilz en estoient d'accord, sans sur ce avoir aucun debat. Mais ledit Pichet très rigoureusement et despiteusement luy respondi qu'il ne digneroit, et sans autre chose dire, vint contre ledit Pierre avec ladicte fourche de fer qu'il avoit et luy vint mettre les deux doiz contre la poictrine, mais ledit Pierre se trahit bien tost, en disant audit Pichet: « Ne me frappé point, car se tu me frappés, tu t'en repentiras ». Et adonc icelluy Pichet vint derrechief contre luy avec ladicte fourche et luy cuida passer d'estoce parmy le ventre, maiz il se retrahit encores en arrière, et ledit Guillaume estant illec près, [voyant] que ledit Pichet poursuivoit ainsi de près ledit Pierre, son oncle, pour le tuer ou mutiller, dist audit Pichet : « Ne frappé point mon oncle, car je ne te veulx point frapper ». Et iceluy Pichet lui respondi en jurant le sang Nostre Seigneur : « Et luy avec ! » et de fait en ce disant ledit Pichet frappa ledit Guillaume de ladicte fourche par la poictrine et luy persa la robe et le double jacques à la chair. Lequel Guillaume, [tenant] en sa main ladicte fourche ferrée que avoit aportée son dit oncle, soy voyant avoir esté ainsi frappé et oultragé par ledit Pichet, le frappa de la dicte fourche sur la teste ung cop tellement qu'il cheut à terre, et depuis, tantost après, pour ledit cop il ala de vie à trespassement. A l'occasion duquel cas, doubtant rigueur de justice, les diz suplians se sont absentez du pays, ouquel ilz n'oseroient jamaiz converser, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu ce que dit est, qu'ilz sont povres simples gens, chargez de femmes et de plu- sieurs petiz enffans, que ledit deffunct fut agresseur, etc., il nous plaise leur impartir icelles. Pour quoy nous, attendu ce que dit est, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, ausdiz suplians avons oudit cas remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou moys de mars l'an de grace mil cccc. cinquante sept , et de nostre règne le xxxvime.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. G. de Thoucy. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCLXXXIX Mars 1458

Lettres de naturalisation et permission d'acquérir des biens dans le royaume, octroyées à Job Henzelle, Ecossais établi en Poitou.

AN JJ. 187, n° 348, fol. 188 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, que, aians consideracion aux bons et agreables services que nous a par cy devant fait nostre bien amé Job HenzelleM. Francisque Michel, Les Ecossais en France, ne mentionne point ces lettres de naturalisation et ne fournit de renseignement sur aucun personnage du nom d'Henzell. homme d'armes de nostre corps, natif du païs d'Escosse, fait chacun jour et esperons que plus face ou temps avenir, considerans aussi qu'il s'est marié en cestui nostre royaume, en entencion de y demourer le surplus de ses jours, à icellui Job Henzelle, qui sur ce nous a fait requerir, avons pour ces causes et pour la seureté de lui et de ses hoirs, octroyé et octroyons par ces presentes, voulons et nous plaist qu'il puisse acquerir en cestui nostre dit royaume tant de biens meubles et inmeubles qu'il en pourra licitement acquerir, et disposer de ses diz biens et aussi de ceulx qu'il y a jà acquis, par testament, ordonnance de derrenière voulenté ou autrement, ainsi que bon lui semblera, tout ainsi que s'il estoit natif de nostre dit royaume. Et quant à ce l'avons habilité et habilitons, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, non obstans les ordonnances royaulx à ce contraires, en nous paiant pour ce finance moderée pour une foiz. Si donnons en mandement, par ces dictes presentes, à noz amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieux tenans, presens et avenir, et à chascun d'eulx, si comme, à lui appartendra, que ledit Job Henzelle et ceulx qui de lui' auront cause, facent, souffrent et laissent joïr et user paisiblement dé nostre presente grace, habilitacion et octroy, sans leur faire ne souffrir estre fait, ores ne pour le temps avenir, aucun empeschement ou destourbier au contraire. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l'autruy en toutes. Donné à Tours, ou moys de mars l'an de grace mil cccc. cinquante huitSic. Il semble que l'on doive corriger sept au lieu de huit, Pâques étant tombé, la 36e année du règne de Charles VII (octobre 1457octobre 1458), le 2 avril. La date de lieu se rapporte mieux aussi au mois de mars 1458 n. s. D'autres actes émanant de Charles VII à cette époque sont datés de Tours. Cette observation s'applique de même à l'acte qui suit. et de nostre règne le xxxvime.

Ainsi signé : Par le roy, J. de La Loère. — Visa.

MCCXC Mars 1458

Lettres de naturalisation et permission d'acquérir des biens dans le royaume, données en faveur de Robin Vernon, Ecossais établi et marié en Poitou.

AN JJ. 187, n° 349, fol. 188 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, que, ayans consideracion aux bons et agreables services que nous a par cy devant faiz nostre bien amé Robin VernonIl est plus que vraisemblable que ce personnage appartenait à la même famille écossaise que Laurent Vernon, chevalier, venu en France avec l'année de secours que le comte de Buchan et John Stuart de Dernley y amenèrent, et auquel Charles vii céda les château, ville et châtellenie de Montreuil-Bonnin, dont son fils Jacques était possesseur à l'avènement de Louis xi (Cf. notre précédent vol., Introduction, p. XXXI) ; mais nous n'avons rien trouvé qui permette de fixer leur degré de parenté. M F. Michel mentionne les lettres de naturalisation de Robin ou Bobert Vernon, sous la date inexacte du 12 août 1462, qui est celle de lettres semblables en faveur de trois autres Ecossais. (Les Ecossais en France, in-8°, t. I, p. 231.), homme d'armes de la garde de nostre corps, natif du païs d'Escosse, fait chacun jour et esperons que plus face ou temps avenir, considerans aussi qu'il s'est marié en cestui nostre royaume, en entencion de y demourer le surplus de ses jours, à icellui Robin Vernon, qui sur ce nous a fait requerir, avons, pour ces causes et pour la seureté de lui et de ses hoirs, octroyé et octroyons par ces presentes, voulons et nous plaist qu'il puisse acquerir en cestui nostredit royaume tant de biens meubles et immeubles qu'il en pourra licitement acquerir, et disposer de ses diz biens et aussi de ceulx qu'il y a jà acquis, par testament, ordonnance de derrenière voulenté ou autrement, ainsi que bon lui semblera, tout ainsi que s'il estoit natif de nostre dit royaume. Et quant à ce l'avons habilité et habilitons de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, non obstans les ordonnances royaulx à ce contraires, en nous paiant pour ce finance modèrée pour une foiz. Si donnons en mandement, par ces dictes presentes, à noz amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d'eulx, si comme à lui appartendra, que le dit Robin Vernon et ceulx qui de lui auront cause facent, seuffrent et laissent joïr et user paisiblement de nostre presente grace, habilitacion et octroy, sans leur faire ne souffrir estre fait, ores ne pour le temps avenir, aucun empeschement où des- tourbier au contraire. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l'autruy en toutes. Donné à Tours, ou moys de mars l'an de grace mil cccc. cinquante huit et de nostre règne le xxxvime.

Ainsi signé : Par le roy; J. de La Loère. — Visa.

MCCXCI Avril 1458

Rémission donnée en faveur de Pierre Pompart, de Vasles, responsable de la mort d'un nommé Jean Vadier, qu'il avait frappé dans une rixe.

AN JJ. 187, n° 180, fol. 93 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l'umble suplicacion de Pierre Pompart, de la parroisse de Vaalles en nostre pays de Poictou, contenant que, depuis certain temps ença, ledit supliant achata d'un nommé Pierre Ferron ung millier de late le pris et somme de treze solz quatre deniers, duquel argent ledit supliant paya et bailla lors audit Ferron la moité ; et certain temps après vint ledit Ferron dire audit supliant qu'il allast querir ladicte late. Lequel y ala et aussi y ala celui à qui [estoit] la maison où devoit estre mise icelle late, et bailla ledit Pompart cincq solz audit Ferron, et ne luy devoit plus que deux solz ung denier à cause du dit millier de late. Et luy monstra ledit Ferron icelle late qui estoit en ung tax, en disant qu'il en y avoit plus d'ung millier, lequel supliant dist qu'il n'en savoit riens ; et ne fut point lors comptée. Et sept ou huit [jours] après, ledit Ferron ala de vie à trespassement bien souldainement. Et après ledit supliant s'en ala à la vefve dudit Ferron, qui savoit bien qu'il avoit payé à son dit feu mary la dicte late, excepté lèsdictz deux solz ung denier, et luy dist qu'elle luy alast compter la dicte late, dont elle fut contente ; et s'en [alèrent] lui et la dicte femme au boys et comptèrent la dicte late et trouvèrent qu'il en failloit dudit millier ung cent et trente lates. Et incontinant icelle femme s'en ala devers Jehan Vadier, qu'elle pensoit qu'il avoit prins ce qu'il failloit dudit millier, pour ce qu'il disoit que son mary luy devoit de l'argent, et en la presence de plusieurs personnes, luy dist : « Vous avez prins ung cent et trente lates d'ung millier que mon mary avoit faictes à Jehan Pompart cy present. Baillez les lui ou nous les irons prendre. » Lequel Vadier dist qu'il n'en bailleroit point. Et adonc ledit suppliant, voyant que ledict Vadier ne lui vouloit bailler la dicte late, il ala luy, ladicte femme et le varlet dudit Pompart supliant, là où estoit icelle late ; et commença icellui supliant à compter les dites cent et trente lates qu'il failloit dudit millier. Et quant ledit Vadier vit que ledit supliant commençoit à compter, il se descendit de dessus ung chevallet à sier bois où il estoit, et print ung levier en sa main, et vint vers ledit supliant. Et incontinant que icelluy Pompart le vit, il luy demanda qu'il vouloit faire dudit levier, et ledit Vadier ne sonna mot et se print à la late que ledit supliant et son varlet comptoient, et dist audit supliant qu'il n'en auroit point. Et adonc ledit Pompart luy dist que sy auroit et qu'il laissast ledit levier. Lequel Vadier le mist à terre et derrechef ledit supliant se print à compter ladicte late, luy et sondit varlet, comme par avant. Et adoncques ledit Vadier s'efforça d'oster audit [supliant] et à son varlet ladicte late, et eurent ensemble plusieurs parolles injurieuses, et commencèrent à desmentir l'un l'autre, tant qu'ilz s'entrefrappèrent l'un l'autre du poing, et en ce conflict ledit Vadier print une late et en frappa le varlet dudit Pompart, supliant, au travers du bras, et ledit supliant print le levier que ledit Vadier avoit apporté, et le cuida frapper sur les espaulles ; maiz il le frappa sur l'oye, dont icelluy Vadier chey sur la dicte late et se relieva tantost, et dist audit Pompart qu'il n'auroit point icelle late, et la deust il garder jour et nuyt. Et incontinant iceluy supliant s'en ala aux autres personnes qui estoient bien près d'illecques, là où il avoit du feu, et ledit Vadier vint incontinant après luy et se coucha au pié d'une souché, sans prendre point de chapperon. Et luy dist ung nommé Simon Liege, qui illecques estoit, qu'il print sa robe et qu'il vensist au feu, dont il ne voult riens faire du premier cop. Toutesvoyes tantost après il s'aproucha du feu et print sa robe; et adoncques la femme dudit Ferron vint à luy et luy demanda de l'argent pour querir de l'autre late, s'il ne lui vouloit bailler celle là. Et adonc ledit Vadier luy demanda à emprunter de l'argent audict Simon Liege qui estoit en la presence, et ledit Simon Liege lui dist qu'il n'en avoit point. Et lors icellui Vadier dist à la dicte femme quelle alast faire compter ledit cent et trente lates et qu'elle les baillast audit supliant. Et incontinant la dicte femme ala faire compter icelle late à ung nommé Pierre Billerot et la bailla audit supliant. Et s'en alla le dit supliant à sa maison, et laissa ledit Vadier et autres illec. Et tantost après ledit Simon Lege et autres envoyèrent querir la femme dudit Vadier et luy distrent que son mary estoit bien malade, et lui enmenèrent en une charrète en son houstel, et ledit jour, environ minuyt, ala icelui Vadier, par faulte de gouvernement ou autrement, de vie à trespassement. Et incontinant furent prins et saisiz tous ses biens par la justice dudit lieu où il estoit demourant. Pour occasion duquel cas, ledit supliant, doubtant rigueur de justice, s'est absenté du pays, auquel il n'oseroit jamès retourner, converser ni demourer, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, ainsi qu'il dit. Et pour, ce nous a humblement fait supplieret requerir que, attendu cequedit est, que ledit supliant n'a pas esté agresseur, maiz ledit feu Vadier, et que en tous autres cas Ie dit supliant a esté et est de bonne fame et renommée, sans avoir jamès esté actaint ou convaincu d'aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise sur ce luy impartir nostre dicte grace et misericorde. Pour quoy nous, les choses dessus dictes considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit Pierre Pompart, supliant, avons, au cas dessus dict, quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à nostre senneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou moys d'avril l'an de grace mil cccc. cinquante huit, et de nostre règne le xxxvie après Pasques.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Briconnet. —Visa. Contentor. Du Ban.

MCCXCII 9 août 1458

Rémission octroyée à Pierre Maignen, poursuivi devant le sénéchal de Champgillon, pour avoir mis en circulation de la monnaie rognée qu'il tenait d'un compagnon de guerre.

AN JJ. 187, n° 247, fol. 132 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. A tous ceulx qui ces presentes lettres verront, salut. Receu avons l'umble supplicacion de Pierre Maignen, laboureur, demourant en Poictou en la chastellenie de Fontenay le Conte, chargé de femme et de quatre petiz enffans, contenant que tout son temps il s'est meslé du fait de labour et aucunes foiz de vendre vin et logier les passans, et aussi du fait de marchandise, en quoy il s'est bien et honnestement gouverné, et jusques à environ deux ans qu'il vint logier en son hostel en passant païs ung compaignon de guerre, archier, à lui incongneu ; lequel, après ce qu'il eut beu et repeu, demanda audit suppliant la monnoye d'un escu, laquelle lui bailla ledit suppliant, et d'icelle retint l'escot dudit compaignon. Et ce fait s'en ala, maiz depuis retourna et demanda à icelui suppliant s'il vouloit avoir de la monnoye pour de l'orLe texte par erreur porte « pour de loi »., et qu'il en avoit assez, dont il fut esmerveillé pour ce qu'il lui en avoit baillé pour ung escu, comme dit est ; et toutesvoyes dist audit compaignon de guerre qu'il estoit content d'en avoir pour trois escus. Lesquelz il lui bailla et ledit compaignon lui bailla la monnoye, et quant icellui suppliant l'eut en ses mains, il apparceut qu'elle avoit esté rongnée, et lui dist qu'il n'en vouloit point et qu'elle ne lui sembloit pas bonne ; et ledit compaignon lui respondit que si estoit. Sur quoy ilz eurent ensemble plusieurs parolles tellement que icellui compaignon lui dist qu'il ne lui rendroit point ses diz trois escus, maiz qu'il lui bailleroit encores sept solz six deniers tournois, dont fut ledit suppliant content doubtant que icellui compaignon qui estoit homme de guerre, comme dit est, ne lui fist aucun desplaisir, et par ainsi furent trente solz tournois pour escu. Et après ce en parlant de ladicte monnoye, icellui compaignon confessa oudit suppliant qu'elle estoit rongnée, mais qui n'y avoit point de dangier de la mettre ne de rongner, et lui dist que s'il en rongnoit, qu'il le feist si secrettement et le plus qu'il pourroit, et atant s'en partit ledit compaignon. Laquelle monnoye ledit suppliant employa, mist et aloua comme bonne, en plusieurs ses affaires et besongnes. En haine de laquelle monnoye ainsi mise et allouée, comme dit est, aucuns larrons, ses haineulx, se transportèrent, ung an a ou environ, en l'ostel où gisent les bestes dudit suppliant, où ilz trouvèrent une boeste de bois qu'il y avoit mussée pour le bruit qui fut en nostre païs de Poictou que les Anglois, noz anciens ennemis et adversaires, y estoient descenduz ; en laquelle il avoit mis deux lingotz, l'un d'un escu et ung salut romputz et l'autre de vieulx blancs de forge ancienne et de hardizCette monnaie avait la même valeur que le liard (trois deniers) ; on la nommait ainsi, disent les auteurs, à cause du roi Philippe III, qui le premier la fit frapper., monnoye d'Espaigne ; lesquelz blancs souloient courir pour dix deniers, pesant ledit lingot quatre mares d'argent ou environ. Lesquelz escu, salut et monnoye il avoit fonduz en intencion de faire faire de ladicte monnoye ou de partie d'icelle ung calisse et dudict or le faire dorer, pour le donner à son eglise, dont il a esté et est procureur et receveur. Lesquelz lingotz ainsi faiz, peu après s'est repenti, doublant qu'on y suspeçonnast aucun mal. Et quant ledit suppliant sceut qu'on lui avoit emblé sadicte boète qu'il y avoit mussée pour ledit bruit, fut moult desplaisant et courroucié, et pour ce en fist faire amonicion generale en saincte eglise. Pour quoy icelle boeste fut mise et baillée par les larrons qui l'avoient prinse, qui ont esté ses varletz, ès mains d'un voisin dudit suppliant, son haineulx, qui la bailla au seneschal ou juge de ChangillonIl y avait à Champgillon une commanderie, membre dépendant du grand prieuré d'Aquitaine. La châtellenie qui lui appartenait comprenait les paroisses de Champgillon et de Thiré et partie de celle de Saint-Juire, Saint-Martin-lArs, la Chapelle-Thémer, Saint-Martin-des-Fontaines, la Jaudonnière, Saint-Aubin-la-Plaine, Nalliers, Saint-Jèànde-Beugné, l'Hermenault, Sainte-Pexine, Bessay, le Simon, Sainte-Hermine, Moutiers-sur-Lay, Saint-Hermand, Saint-Valérien, Saint-Etienne-de-Brillouet, Sainte-Gemme de Luçon, Saint-Philbert-de-Pontcharrault, la Réorthe, Saint-Vincent de Fort-du-Lay, Chantonnay, Bournezeau, Puybéliard, Saint-Germain-de-Prinçay, Saint-Mars-des-Prés et Saint-Pierre-du-Chemin. (Les juridictions bas-poilevines, par A. Bitton, Annuaire de la Société d'émulation de la Vendée, 1889, p. 153.) La commanderie de Champgillon réclamait aussi toute juridiction sur le village de Maupirison, ainsi que le droit d'y établir des mesures pour le vin et le blé et de contraindre les habitants à faire moudre leur blé aux moulins delà commanderie, choses que lui contestait André Grignon. Un arrêt du Parlement de Poitiers, du 31 mars 1428 n. s., lui donna pleinement gain de cause. (Arch. nat., X1a 9191, fol. 90.) en la jurisdicion duquel icellui suppliant demeure, en intencion de faire perdre audit suppliant ladicte boeste. Lequel seneschal ou juge fist aler par devers lui ledit suppliant, qui confessa ladicte boeste estre sienne. Et pour ce qu'il donnoit à entendre à icellui suppliant qu'il lui feroit avoir remission du cas par lui commis, lui fist confesser plusieurs choses non veritables. Et à ceste cause, ledit suppliant a esté adjourné à comparoir en personne en ladicte justice de Champgillon, et ses biens prins et saisiz. A quoy ne s'est osé comparoir, maiz s'est ledit suppliant absenté du païs, doubtant rigueur de justice, et n'y oseroit jamais retourner, se nostre grace ne lui estoit sur ce impartie. En nous humblement requerant que, attendu que ledit suppliant n'a aucunement rongné ladicte monnoye et qu'il fut induit, séduit et comme contraint par ledit compaignon de guerre à la prandre, mesmement qu'il fist reffuz de la prandre après qu'il l'eut apperceue, et que ledit compaignon ne lui voult rendre ses diz trois escus, aussi qu'il ne cuidoit en riens mesprendre de fondre lesdiz or et monnoye, aussi que les choses par lui confessées audit seneschal ou juge de Champgillon, parce qu'il lui donnoit à entendre qu'il lui feroit avoir remission, ne sont pas veritables, et que en tous autres cas il est bien famé et renommé, et ne fut oncques actaint d'aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, nous lui vueillons sur ce impartir nostre dite grace et pardonner le fait et cas dessusdit. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde et grace estre preferées à rigueur de justice, audit suppliant oudit cas avons quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, à nostre seneschal de Poictou ou à son lieutenant et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, le ixe jour de aoust l'an de grace mil iiiie lviii, et de nostre règne le xxxvime.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. A.

Rolant

MCCXCIII 22 octobre 1458

Don à Jean bâtard d'Orléans, comte de Dunois, des villes, terres etchâtellenies de Parthenay, Secondigny, Vouvant, Mervent, le Coudray-Salbart, Châtelaillon, Matheflon et autres, pour en jouir après le décès d'Artur de Richemont, duc de Bretagne.

AN JJ. 188, n° 98, fol. 50 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, comme par noz lettres patentes données en nostre ville de Poictiers, le xxiiiie jour d'octobre mil cccc. xxvCes lettres confirmaient en faveur du comte de Richemont la donation des domaines de Jean II Larchevêque, sire de Parthenay, à condition de parfaire les payements annuels de la somme stipulée dans le contrat de vente, que celui-ci avait faite au dauphin Charles, à Bourges, le 19 novembre 1419, sauf l'usufruit qu'il se réservait, sa vie durant. Le texte ne paraît pas en avoir été conservé. M. B. Ledain, outre ces lettres, en mentionne d'autres de teneur semblable, datées du 9 août 1424. (La Gâtine historique, in-4°, p. 203.), veriffiées et expediées par nostre Chambre des comptes et enregistrées en icelle, le xiie jour d'aoust l'an mil cccc. xxvi, et autres noz lettres données à Tours, le ixe jour d'avril mil cccc. xxxiv. avant PasquesLes lettres du 9 avril 1435 sont imprimées dans notre huitième volume (t. XXIX des Archives historiques, p. 90 à 99), avec des éclaircissements sur la succession de Jean II Larchevêque et sa prise de possession par Richemont., et [par] nostre commandement leues et publiées en nostre court de Parlement, le cinquiesme jour de mars l'an mil cccc. xxxv, declaratoires de nostre entencion et confirmatoires desdictes premières lettres, et pour les causes contenues en icelles eussions donné, cedé, delaissé et transporté à nostre très chier et amé cousin, Artur de Bretaigne, connestable de France, pour luy et ses hoirs masles, descendans de son corps en loyal mariage, la propriété des villes, chasteaulx, chastellenies, terres et seigneuries de Partenay, de Secondigny, de Vouvant, de Mervant, du Couldray Salbart, de Chasteaulaillon et de Mathefelon, et généralement toutes autres terres et seigneuries, que feu Jehan Larcevesque, en son vivant chevalier, seigneur de PartenayVoir la notice biographique, consacrée à ce personnage, p. 294 et 295 de notre septième volume (t. XXVI des Arch. hist.)., nous avoit vendues, delaissées et transportées pour certaine grant somme de deniers, et tout le droit, nom, action et poursuicte que avoir povions en icelles, à cause de ladicte vendicion et au moien d'icelle, pour en joir et user par luy et ses hoirs masles, procréez et descendans de sa char en loyal mariage ; et s'aucuns n'en avoit, eussions en ce cas, après le trespas de nostre dit cousin, données icelles terres et seigneuries et leurs appartenances à feu nostre nepveu, Pierre de BretaignePierre était le second fils de Jean V, duc de Bretagne, et de Jeanne de France, fille de Charles VI. Né le 7 juillet 1418, il devint duc de Bretagne, sous le nom de Pierre II, à la mort de son frère aîné, François Ier, le 18 juillet 1450, et décéda lui-même, sans enfants, le 22 septembre 1457. Son oncle Artur comte de Richemont, par acte spécial daté de Redon, le 11 janvier 1442 n. s., avait ratifié cette clause des lettres patentes du 9 avril 1435, dans les termes suivants : « Nous avons voulu, consenti et accordé que, ou cas que n'aurons enffans legitimes qui nous succèdent, nostre très cher et très amé filz et nepveu, Pierre de Bretaigne, soit nostre vray heritier et succédé à noz terres et seigneuries, que aurons et tendrons en Poitou et ailleurs, à cause de la seigneurie de Partenay, au jour et heure de nostre trespassement de ceste vie mortelle, et que, après lui, ses enffans legitimes, descendans de sa char, nez et procreez en loyal mariage, viengnent à ladicte succession... » Et à défaut de Pierre et de ses héritiers directs, il déclarait leur substituer son autre neveu François et les enfants légitimes de celui-ci. (E. Cosneau, Le connétable de Richemont, p. 584, 585.) Pierre de Bretagne avait épousé, par contrat du 21 juillet 1431, Françoise d'Amboise, fille aînée de Louis d'Amboise, vicomte de Thouars, et de Marie deRieux ; elle vécut jusqu'en 1485. (Id., p. 183.), pour en joyr après le trespas de nostre dit cousin par nostredit nepveu et ses hoirs masles, procréez de son corps en loyal mariage, nonobstant les reservacions et condicions apposées oudict contract de vendicion, faisant mention de l'union ou adjunction desdictes terres au demaine de nostre conté de Poictou ; lesquelles reservacions ou condicions ne voulions aucunement nuire ou prejudicier ausdiz dons, cessions et transpors par nous faiz à nosdiz cousin et nepveu, voulans tous empeschemens et procès faiz et encommencez au contraire par noz procureur, advocatz et autres noz officiers et justiciers, estre ostez, adnullez et mis du tout au neant, en imposant sur ce scilence perpetuelle à nostredit procureur et autres officiers, et en mandànt à nosdiz procureur et advocaz, et à chascun d'eulx, eulx desister et deppartir du tout du procès par eulx encommencié contre nostredit cousin, sans plus y proceder ne tenir nostre dit cousin en procès. Depuis lesquelz dons, transpors et longtemps après nostredit nepveu, Pierre de Bretaingne, est alé de vie à trespas, sans hoirs masles procreez de son corps en loyal mariage, en deffault desquelz hoirs masles et après le trespas de nostredit cousin, lesdictes terres et seigneuries nous doivent retourner, competler et appartenir ; et nous loisoit et appartiengne audit cas en disposer et ordonner à nostre bon plaisir. Et soit ainsi que, depuis le temps de nostre jeune aage, nostre très chier et amé cousin Jehan bastard d'Orleans, conte de Dunois

Jean bâtard d'Orléans, comte de Dunois et de Longueville, fils naturel de Louis de France, duc d'Orléans, et de Mariette d'Enghien, dame de Cany, né vers 1403, mort à Saint-Germain-en-Laye, le 28 novembre 1468. Il ne tarda pas à entrer en jouissance de cette donation, Arthur comte de Richemont, qui avait succédé comme duc de Bretagne à son neveu Pierre n, le 22 septembre 1457, étant décédé le 26 débre 1458 ; mais il ne fit jamais que des séjours courts et espacés à Parthenay, La formalité de l'évaluation des revenus des terres poitevines du connétable de Richemont et de la visité de ses châteaux et bâtiments ne fut accomplie qu'au milieu de l'année 1460. Charles vu chargea de cette opération, par lettres du 14 juin de cette année, Guillaume Ripaut, clerc de la Chambre des comptes de Paris. « Le commissaire royal vint à Parthenay. Les officiers de la baronnie, Jacques Esteau, procureur, Jacques Rataut, bailli de Gâtine, capitaine de la ville, Guillaume Sicart, châtelain, Nicolas Giraut, avocat, se mirent à sa disposition. Ils lui montrèrent les titres, chartes, comptes, terriers et registres déposés de toute ancienneté dans la chapelle du château de Parthenay. Ripaut en fit faire des copies ou extraits et prit des informations auprès des notables, gens d'église, bourgeois, seigneurs et laboureurs... » (B. Ledain, La Gâtine historique, p. 227.) La visité se continua par les châteaux de Secondigny, de Béceleuf et du Coudray-Salbart. Le procèsverbal, avec l'information sur la valeur et le revenu de ces seigneuries, est conservé aux Arch. nat., R1* 207. L'analyse de ce curieux document nous entrainerait trop loin ; nous devons nous contenter de le signaler ici.

, nous ait continuellement servy et employé le temps de sa jeunesse, tant en nostre hostel et près de nous et noz conseilz, comme en noz guerres, tant en resistant aux grandes entreprinses faictes par noz anciens ennemis les Anglois, que à la repulsion d'iceulx, comme nostre lieutenant general, et autrement en plusieurs manières, ainsi qu'il est assez congneu et tout notoire ; et aussi que par nostredit cousin Artur de Bretaingne, connestable de France, auquel de nouvel est venue et escheue la duché de Bretaingne, nous ait esté dit et remonstré de bouche comment, de nostre grace et octroy, luy eussions donné, cedé, quicté et trans- porté lesdictes terres et seigneuries dessus declairees, à luy et à ses hoirs masles, par luy procreez en loyal mariage, et qu'il n'avoit aucuns hoirs de luy procreez en loyal mariage, et pour ce, saichant et considerant lesdiz services faiz par nostredit cousin de Dunois à nous et à la chose publicque de nostre royaume, nous ait conseillé, requis et supplié que dès maintenant voulsissions ceder et transporter à icelluy nostre cousin de Dunois lesdictes terres et seigneuries, pour en joyr et user après le décès de nostredit cousin de Bretaingne, ou cas que, ou temps de sondit décès, il ne laisseroit aucuns hoirs masles descendans de son corps en loyal mariage.

Pour ce est il que nous, ayans consideracion aux choses dessus dictes et mesmement ausdiz services faiz par nostredit cousin de Dunois à nous et à la chose publicque de nostredit royaume, qui sont dignes de memoire et de grande remuneracion, voulans iceulx services recongnoistre envers nostredit cousin et les siens, et que bien raisonnable et convenable chose est que recongnoissons les services à nous faiz, et mesmement en grans et vertueux faiz, en quoy pour nous s'est employé nostre dit cousin de Dunois, dont s'est ensuy grant honneur, prouffit et utilité à nous et à la chose publicque ; pour lesquelles causes et aussi pour la proximité de lignaige en quoy nostredit cousin nous attient, et autres causes et consideracions à ce raisonnablement nous mouvans, avons, de nostre certaine science et mouvement, et par l'advis et deliberacion de plusieurs de nostre sang et lignaige et des gens de nostre Grant-conseil, ou cas que nostredit cousin de Bretaingne yroit de vie à trespas, sans hoirs masles, procréez de son corps en loyal mariage, dès à present comme pour lors et dès lors comme de present, donné, cedé, delaissé et transporté, donnons, cedons, delaissons et transportons, par cesdictes presentes, à nostredit cousin de Dunois et à ses enfans masles, procréez en loyal mariage, et aux masles descendans d'iceulx enfans masles en loyal mariage, perpetuellement et à tousjours, toutes lesdictes terres, seigneuries et baronnies de Partenay, de Secondigny, de Vouvant, de Mervant, du Couldray Salbert, de Chasteaulaillon et de Mathefelon, et généralement toutes les autres terres et seigneuries que ledit feu Jehan Larcevesque, en son vivant chevalier, seigneur de Partenay, nous avoit vendues, delaissées et transportées, comme dit est, par nous données et transportées à nostredit cousin Artur, à present duc de Bretaingne, avecques tous les droiz, noms, raisons, actions et poursuictes, qui, à cause desdictes vendicions et transpors à nous faiz par ledit feu Jehan Larcevesque, nous povoient, pourroient ou pevent competter et appartenir, ou autrement, par quelconques autres titres ou moiens que ce soit. Pour lesdictes terres et seigneuries avoir, tenir, posseder et exploicter par nostredit cousin de Dunois et ses enfans masles, procréez en loyal mariage, et les masles descendans desdiz masles aussi en loyal mariage, perpetuellement et paisiblement, sans aucune chose y reserver ne retenir à nous, fors seulement les foy et hommaige et la souveraineté et ressort en nostre comté de Poictou et ailleurs, et tant par la fourme et manière que lesdictes terres et seigneuries ressortissoient anciennement et qu'elles ressortissoient et ont ressorti depuis lesdiz dons par nous faiz à nostredit cousin de Bretaingne, en payant les charges et faisant les devoirs deuz à cause desdictes terres et seigneuries, où et ainsi qu'il appartendra. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx conseillers les gens tenans nostre Parlement et qui tendront ceulx avenir, les gens de noz comptes et tresoriers, et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans et à chacun d'eulx, si comme à luy appartendra, que de nosdiz don et transport ilz facent, seuffrent et laissent nostredit cousin de Dunois et ses enfans masles, procréez en loyal mariage, et les masles descendans desdiz masles aussi en loyal mariage, perpetuelment et à tousjours joyr et user plainement et paisiblement, sans leur faire ne souffrir, ores ne pour le temps avenir, estre fait ne donné aucun destourbier ou empeschement, en quelque manière ne soubz quelque couleur ou occasion que ce soit, nonobstant quelzconques ordonnances par nous faictes, ou par noz predecesseurs, de non aliener aucune chose de nostre dommaine, et le contenu èsdictes lettres de vendicion et transport, que nous et noz successeurs contes de Poictou, par quelque cause, condicion ou moien que ce fust, ne pourrions aliener ne transportez separer ne departir les terres, baronnies et seigneuries devant dictes de nostredit conté de Poictou, et autres choses à ce contraires. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Vendosme, le xxiie jour du mois d'octobre l'an de grace mil cccc. cinquante huit, et de nostre règne le xxxviieCes lettres furent enregistrées au Parlement de Paris, par arrêt du 19 janvier 1460 n. s., dont voici la teneur : « Lecta, publicata et registrata Parisius in Parlamento, sine prejudicio jurium partium, videlicet domine Katherine de Luxembourg, defuncti domini Arturi, dum vivebat ducis Britannie, relicte, comitumque de l'ancarvilla et de Monterevello, domini Johannis domini de Ussono, militis, et Arturi de Capella et ejus uxoris, et Procuratoris regis generatis, tam in petitorio possessorioque quam aliàs, atque processuum incuria Parlamenti pendentiunl, et sine ipsorum judicationis retardamento. Actuin in dicto Parlamento, die xixª januarii anno Domini m°cccc°lix°. Sic signatum: Chesneteau. » (Arch. nat., X1a 8605, fol. 204 v°.).

Ainsi signé : Charles. — Par Ie roy, en son conseil, ouquel Messeigneurs les ducs d'Orleans, de Bourbon, les contes d'Eu, de Foiz et de là Marche, vous, l'evesque de Constances, le sire de Beaujeu, Janus de Savoye, Loys de Saluces, les sires de Torcy, de Precigny et du Monteil, messire Guillaume Cousinot, chevalier, maistres Estienne Le Fèvre et Jehan Bureau, sire Jehan Hardoin, maistres Pierre Doriole, Pierre et Raoul de Refuge, Denis DaucerreCette liste des membres du Grand conseil est reproduite textuellement au bas des lettres de même date qui suivent immédiatement ; c'est là qu'on trouvera leur identification. et autres presens. J. de La Loère. — Visa.

MCCXCIV 22 octobre 1458

Déclaration portant que le don de Parthenay fait à Dunois, le même jour, ne doit point préjudicier aux droits prétendus sur cette terre par les héritiers de Jean Larchevêque, ni modifier l'issue du procès pendant au sujet de cette succession.

AN JJ. 188, n° 86, fol. 40 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France, à tous ceulx qui ces presentes lettres verront, salut. Comme, par noz autres lettres et pour les causes contenues en icelles, ayons aujourd'uy donné, cedé et transporté à nostre très chier et amé cousin Jehan bastard d'Orleans, conte du Dunois, et à ses enfans masles, procréez en loyal mariage, et aux masles descendans d'iceulx enfans masles en loyal mariage, les villes, chastellenies, terres et seigneuries de Partenay, Secondigny, Vouvant, Mervant, le Couldray Salbert, Chastellaillon, Mathefelon et autres terres et seigneuries, que feu Jehan Larcevesque, en son vivant chevalier, seigneur de Partenay, nous avoit vendues, delaissées et transportées, pour en joyr par nostre dit cousin et ses enfans masles, procreés en loyal mariage, et les masles descendans desdiz masles aussi en loyal mariage, perpetuellement et à tousjours, ou cas que nostre très chier et très amé cousin Artur, duc de Bretaigne, connestable de France, auquel avions dès pieça fait don et transport desdictes terres et seigneuries, et à ses hoirs masles, yroit de vie à trespassement sans hoirs masles procreés de son corps en loyal mariage, pour les causes et ainsi qu'il est plus à plain contenu en nosdictes autres lettres ; à cause desquelles terres et seigneuries pend procès en nostre court de ParlementJean II Larchevêque, sr de Parthenay, avait déjà vendu, par contrats de 1405 et de 1416, comme nous l'avons vu ailleurs (Arch. hist. du Poitou, t. XXVI, p. 295, note), à Jean duc de Berry, comte de Poitou, la baronnie de Parthenay et ses autres possessions. Ses deux sœurs, Marie, qui avait épousé, vers 1379, Louis Ier de Chalon, comte de Tonnerre, et Jeanne, mariée, le 21 janvier 1390, à Guillaume de Melun, comte de Tancarville, vicomte de Melun, seigneurde Montreuil-Bellay, etc., s'y étaient opposées, et les contrats n'avaient jamais reçu d'exécution. Elles et leurs héritiers attaquèrent aussi la vente faite à Charles vu, à Bourges, le 19 novembre 1419, et la donation consentie par le roi au profit de Richemont. Nous pouvons citer les plaidoiries qui eurent lieu à ce sujet, au Parlement de Poitiers, le 3 février 1429, le 3 janvier 1430, le 17 mai 1431. (Arch. nat., X1a 9199, fol. 121, 212, 393 v° à 396.) Le procès dura plus de trente ans et ne fut jamais jugé. Aussi il serait oiseux de rechercher les noms des enfants, petits-enfants et neveux des deux sœurs de Jean Larchevêque, vivant en 1458, et qui ne cessaient de revendiquer contre la couronne leurs droits prétendus à la succession de Parthenay, en dehors de ceux qui sont nommés dans le présent acte et dans l'arrêt d'enregistrement au Parlement, cité cidessus, p. 79, note 1., entre nostredit cousin de Dunois et nostre chière et amée cousine Marie de HarecourtMarie d'Harcourt était la fille de Jacques d'Harcourt, baron de Montgommery, qui périt massacré dans le château même de Parthenay, dont il avait voulu s'emparer par ruse, en 1423, ainsi que de la personne de Jean II Larchevêque, son oncle (Cf. B. Ledain, La Gâtine hist., p. 204), et de sa seconde femme, Marguerite de Melun, fille unique de Guillaume de Melun, comte de Tancarville, vicomte de Melun, seigneur de Montreuil-Bellay, chambellan et connétable héréditaire de Normandie, tué à Azincourt. Par son mariage avec Dunois (contrat du 6 octobre 1436), dont elle fut la seconde femme, elle avait apporté à celui-ci sa part des droits à la succession de Parthenay, que réclamait la maison d'Harcourt, du chef de Jeanne Larchevêque, sœur de Jean II sr de Parthenay. En acceptant la donation du 22 octobre 1458, elle reconnaissait d'ailleurs implicitement que ces droits appartenaient en réalité au roi, au profit duquel le Parlement les consacrait une fois de plus, par son arrêt d'enregistrement. Marie d'Harcourt mourut à Chouzésur-Loire, près Saumur, le 1er septembre 1464. (Le P. Anselme, Hist. Généal. t., V, p. 137.) sa femme, à cause d'elle, le conte de TancarvilleGuillaume d'Harcourt, comte de Tancarville, vicomte de Melun, baron de Montgommery, frère de père et de mère de la précédente, né vers 1418, chambellan du roi, connétable et chambellan héréditaire de Normandie, grand maître des eaux et forêts de France, décédé à Montreuil-Bellay, le 27 octobre 1484, et enterré dans la collégiale Notre-Dame de cette ville qu'il avait fondée. (Id. ibid., p. 138.) et le seigneur de HussonLouis II de Chalon, comte de Tormerre, fils de Louis Ir et de Marie de Parthenay, eut de son épouse, Marie de La Trémoïlle, dame du Bois-Pouvreau et de Cherveux (vol. précédent, p. 252, note), huit enfants. Ses fils étant décédés avant lui, deux de ses filles se partagèrent le comté de Tonnerre : Jeanne épousa le 10 août 1400 Jean de La Baume, dont postérité ; Marguerite, la plus jeune, fut mariée à Olivier, seigneur de Husson, chambellan de Charles VII, dont elle eut Marie, qui épousa, le 30 novembre 1442, Laurent Ier, sire de Vieuxpont et de Courville, baron de Neufbourg, et Jean de Husson. Ce dernier, ici nommé, était par conséquent l'arrière-petit-fils de Marie de Parthenay. sœur de Jean II Larchevêque. Il fut comte de Tonnerre, seigneur de Saint-Aignan, et avait épousé, vers 4446, une Poitevine, Jeanne Sanglier, dame de Château-Guibert, veuve de Jean de La Rochefoucauld, seigneur de Barhezieux, le sénéchal de Poitou, fille de Guillaume Sanglier, seigneur de Bizay, et de Jeanne de Rougemont. (Voy. notre t. VII, Arch. hist. dit Poitou, XXVI, p. 7, note.) Leur fils Charles de Husson, comte de Tonnerre, épousa, l'an 1473, Antoinette de La Trémoïlle. (Contrat du 8 juillet 1473, dans la coll, dom Fonteneau, t. XXVI, p. 463.) demandeurs en matière petitoire et autrement, d'une part, et nostredit cousin Artur, duc de Bretaingne, et nostre procureur general, adjoinct avec luy, d'autre, non voulans que ledit don ne prejudicie aucunement à nosdiz cousin et cousine ele Dunois ne à leurs enfans, ne aux droiz, parties et porcions qu'ilz pretendent èsdictes terres et seigneuries par les faiz, et moiens declairez oudit procès. Pour ces causes et consideracions, avons declairé et declarons par ces presentes que nostre entencion n'a esté ne n'est que, par ledit don et transport desdictes terres et seigneuries fait à nostre dit cousin de Dunois et à ses enfans masles procreés en loyal mariage et aux masles descendans desdiz enfans masles en loyal mariage, soit fait ou porté aucun prejudice à nosdiz cousin et cousine de Dunois, à leurs hoirs et successeurs quelconques, ne aussi à la poursuicte qu'ilz ont fait ou pourroient faire, en nostre dicte court et ailleurs, pour raison desdictes terres et seigneuries, ne aussi que ceste presente reservacion face ou porte aucun prejudice ne derogue en aucune manière au droit qui luy peut appartenir, à cause du don que luy avons fait et faisons presentement. Mais voulons et nous plaist que nosdiz cousin et cousine et leursdiz hoirs et successeurs quelxconques soient et demeurent entierement en tous leurs droiz, noms, raisons, actions et poursuites qu'ilz ont de present et que leur pevent ou pourroient eschevoir, avenir et appartenir, à cause desdictes terres et seigneuries, leurs appartenances et deppendences, en quelque manière que ce soit, tout ainsi qu'ilz estoient par avant ledit don, cession et transport et non obstant icelluy. En tesmoing de ce, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Donné à Vendosme, le xxiie jour du mois d'octobre l'an de grace mil cccc. cinquante huit, et de nostre règne le xxxviie .

Ainsi signé : Par le roy en son conseil, ouquel Messieurs les ducs d'OrléansCharles duc d'Orléans et de Milan, comte de Valois, de Beaumontsur-Oise et d'Asti, sire de Coucy, né en l'hôtel de Saint-Paul à Paris, le 26 mai 1391, fils de Louis de France, duc d'Orléans, et de Valentine de Milan, mort le 4 janvier 1466. et de BourbonJean II duc de Bourbon, fils de Charles Ier et d'Agnès de Bourgogne, duc de Bourbon et d'Auvergne, comte de Clermont et de Forez, nommé grand chambrier de France par lettres données à Saint-Priest en Dauphiné, le 12 mars 1457, gouverneur de Guyenne et de Languedoc en 1483, mort le 1er avril 1488, sans enfants légitimes., les contes de EuCharles d'Artois, comte d'Eu et pair de France par lettres patentes datées de Vendôme, avril 1458 (le P. Anselme, t. III, p. 327), fils de Philippe d'Artois, et de Marie de Berry. Pris à Azincourt, il resta en Angleterre jusqu'en 1438, fut gouverneur de Paris en 1465, et décéda sans postérité, le 25 juillet 1472., de FoixGaston IV, comte de Foix et de Bigorre, vicomte de Béarn, fils de Jean comte de Foix et de Jeanne de Navarre, né vers 1422, se distingua à la bataille de Castillon (1453) et mourut à Roncevaux, le 21 juillet 1472. et de la MarcheBernard d'Armagnac, comte de Pardiac, vicomte de Carlat et de Murat, puis comte de la Marche par son mariage avec Eléonore de Bourbon, fille de Jacques de Bourbon, comte de la Marche, était le second fils de Bernard VII, comte d'Armagnac et connétable de France, et de Bonne de Berry. Il mourut avant l'année 1462., vousLe chancelier de France était alors Guillaume Juvénal des Ursins, baron de Traynel (1445-1461), né le 15 mars 1400, décédé le 23 juin 1472., l'evesque de ConstancesRichard Olivier de Longueil, licencié ès lois, président en la Chambre des comptes, chantre de Lisieux, chanoine et archidiacre d'Eu en l'église de Rouen, évêque de Coutances depuis le 28 septembre 1453, l'un des juges au procès de réhabilitation de Jeanne d'Arc. Comme conseiller de Charles VII, il lui rendit de nombreux services diplomatiques. (Gallia christ., t. XI, col. 893 ; de Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. V et VI, passim.), le seigneur de BeaujeuPierre sire de Beaujeu, né en novembre 1439, frère puîné de Jean II duc de Bourbon (ci-dessus), marié par traité passé à Jargeau près Orléans, le 3 novembre 1473, à Anne de France, fille aînée de Louis xi, duc de Bourbon après la mort de son frère (1488), décédé le 8 octobre 1503., Janus de SavoyeJanus de Savoie, comte de Genevois, l'un des quinze enfants (huit fils et sept filles) que Louis comte de Savoie (1451-1465) eut d'Anne de Lusignan, sa femme, fille de Janus ou Jean II, roi de Chypre, mort en 1462., Loys de Sa- lucesLouis Ier marquis de Saluces, fils de Thomas III, et de Marguerite de Roussy, avait succédé à son père en 1416. Il épousa, en 1433, Isabelle, fille de Jean-Jacques Paléologue, marquis de Montferrat, et mourut le 8 avril 1475., les sires de TorcyJean d'Estouteville, seigneur de Blainville, puis de Torcy, après la mort de son père, prévôt de Paris en 1446 et grand maître des arbalétriers en 1449. Il se distingua, l'année suivante, à la conquête de la Normandie, servit fidèlement Charles vu et Louis XI ; on le trouve encore combattant à Guinegatte (1479) ; il mourut fort âgé, le 11 septembre 1494., de PrecignyBertrand de Beauvau, sr de Precigné ou Pressigny, grand sénéchal de Provence, premier chambellan de René d'Anjou, roi de Sicile, mort en 1462. et du Monteil, Guillaume CousinotPour Guillaume Cousinot, chevalier, seigneur de Montreuil, voy. ci-dessous, au bas d'un acte d'avril 1461., chevalier, maistres Estienne Le FèvreEtienne Le Fèvre (cf. ci-dessus, p. 15, note 2). et Jehan BureauJean Bureau, sr de Montglat, trésorier de France et maître de l'artillerie. (Voy. nos t. VIII, p. 172, note, et IX, p. 18, 92, 118, 201, 264.), sire Jehan HardoinJean Hardouin, maître des comptes et trésorier de France. (Cf. ci-dessous, dans au acte de septembre 1460.), maistres Pierre DorioleSur Pierre Doriole, sr de Loiré, cf. idem, au bas d'un acte d'avril 1459., Pierre et Raoul de RefugePierre de Refuge, sr de Fougères, fils de Jean de Refuge, général des aides, puis des finances, et de Jeanne de Faucrois, fut général des finances, gouverneur d'Asti, capitaine de cinquante lances, chambellan du duc d'Orléans, assista au procès de Jean duc d'Alençon en 1458 et vivait encore en 1480. — Raoul de Refuge, son frère puîné, d'abord général sur le fait des aides, fut reçu maître des comptes le 20 décembre 1446, à la survivance de Jean Le Vavasseur, confirmé le 12 mars 1452, après la mort dudit Le Vavasseur, et demeura en l'exercice de cette charge jusqu'au 12 septembre 1461. et Denis DaucerreUne note est consacrée au poitevin Denis d'Ausseure, quelques pages plus loin. et autres presens. J. de La Loère.

MCCXCV Novembre 1458

Rémission accordée à la veuve de Macé Secrestain, de Châtellerault, qui s'était rendue coupable d'un infanticide, trente ans auparavant.

AN JJ. 188, n° 3, fol. 1 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umhle supplicacion des parens et amis charnelz de Jehanne, vefve de feu Macé Secrestain, à present detenue prisonnière ès prisons de Chastelleraud, contenant que, trente ans a passez, ledit feu Macé Secrestain, en son vivant, et ladicte Jehanne, sa femme, furent logiez ès foussez et douves du chastel de Puymillereou, assis ou viconté dudit Chastelleraud, où ilz s'estoient retraiz pour eslre à seureté des gens de guerre qui tenoient lors les champsA l'époque sans doute où le connétable de Richemont disgracié fit une démonstration armée, de concert avec ses alliés les comtés de Clermont, de Pardiac et d'Armagnac, et tenta inutilement de pénétrer dans Châtellerault qui refusa de lui ouvrir ses portes, vers la Toussaint de l'année 1427. (Voir Introduction de notre huitième volume, t. XXIX des Archives historiques, p. IV.)     et ilec demeurèrent l'espace d'un an et plus ; pendant lequel temps ledit feu Macé Secrestain, son mary, fut longtemps malade de fièvres quartes et tellement que, obstant sadicte maladie, il ne habita et ne congneut charnelement pendant icelle ladicte Jehanne, sa femme. Mais ce néanmoins, icelle Jehanne par mauvais conseil et ennortement à quoy elle fut induicte, eut ce pendant congnoissance charnelle d'autre homme que de son dit mary, tellement qu'elle en fut ensaincte, et d'ilec à cinq mois après ladicte concepcion ou environ, sondit mary gary habita charnelement à elle. Et pour ce qu'il la trouva lors plus grosse qu'il ne luy sembloit qu'elle avoit esté et estoit paravant, à ung certain jour après il luy deist qu'elle estoit enflée et elle luy respondi qu'elle avoit ung cuevrechier sur les rains pour doubte d'avoir froit ; et lors doubta que sondit mary eust aperceu et congneu qu'elle fust grosse d'enfant, pour ce que en l'eure et depuis, comme elle dit, il luy fist à ceste cause mauvaise chière, combien que il ne luy en dist oncques plus riens. Et huit jours ou environ au devant qu'elle fust à terme d'enfenter et qu'elle enfantast, sondit mary s'en ala dehors én ses affairès, où il demoura jusques au jour qu'elle erifanta une fille, environ l'eure de deux à trois heures après my jour en la presence d'une femme nommée la Bolande et d'une autre femme nommée Loyse Perrote, ses voisines et commères, lesquelles receurent ladicte fille et la baptisèrent en la paisle et l'ordonnèrent comme il appartient, et la misdrent au près de ladicte Jehanne, sa mère, laquelle estoit couchée en son lit. Et incontinent en l'eure arriva en la maison ledit mary de ladicte Jehanne, qui venoit de dehors de ses affaires; lequel icelle Jehanne, sa femme, entendi au parler, et aussi ladicte Bolande luy deist que sondit mary estoit venu ; et à ceste cause eut lors grant paour et fut moult effrayée pour le doubte qu'elle avoit que sondit mary congneust que ladicte fille n'estoit pas sienne et qu'il ne l'eust engendrée. Et à ceste cause doubta icelle Jehanne que sondit mary la voulsist faire mourir ou l'oultraigast en son corps; et pour y cuider obvier, elle estant couchée en son lit, temptée de l'ennemy, luy vint voulenté d'estaindre sadicte fille, afin que sondit mary cuidast que ladicte fille ne fust pas venue à terme, et elle estant en ceste mauvaise temptacion, de chaulde colle et chaleur toute esmeue, mist sa poictrine sur sadicte fille, et en ce faisant l'estaigny et la fist mourir ; et tantost après sondit mary arriva en ladicte chambre, à laquelle il demanda s'elle estoit ja acouchée, et lors ladicte Bolande luy respondi que oy elle estoit acouchée en celle heure d'une fille, et qu'il estoit neccessité d'avoir des compères pour luy donner baptesme, jasoit ce qu'elle eust esté baptisée en la paisle. A quoy ledit mary ne deist mot. Et après ce ladicte Bolande prist ladicte fille, laquelle elle trouva morte, dont elle s'effraya très fort, dont ladicte Jehanne ne dist aucune chose à ladicte Bolande touchant ledit cas. Et après ce, ladicte fille ainsi morte fut enterrée en terre saincte ledit jour, pour ce qu'elle avoit esté baptisée comme dit est. Et depuis ce, ladicte Jehanne eut très grant desplaisance, tristesse et douleur à son cœur d'avoir fait et commis ledit cas, et tellement que pour ceste cause elle ala oudit an à Poictiers au pardon qui estoit et est en l'eglise Monsieur Saint Hillaire le Grant de Poictiers, par chacun an, en chacune feste de sa translacion, et ilecques soy confessa dudit cas et autres ses pechiez à ung penitancier qui luy bailla penitance pour iceulx ; laquelle elle a faicte et parfaicte. Et tousjours depuis s'est bien gouvernée avec sondit mary, jusques il a seize ans ou environ qu'il ala de vie à trespassement. Depuis lequel temps elle s'est semblablement bien gouvernée, sans ce qu'elle ait fait, commis ne perpetré aucun villain cas, et jusques à ce que, puis six sepmaines en ça, par le moien de ce que on a eu souspeçon à rencontre d'elle qu'elle usoit de art de sorcerie, moiennant certaine quelle informacion faicte à la requeste du procureur dudit lieu de Chastelleraud sur les cas dessus diz, qu'elle a esté prise par les sergens et officiers dudit lieu de Chastelleraud, et mise ès prisons dudit lieu, ès quelles elle a esté et encores est detenue prisonnière, à grant povreté et misère. Et ilec a esté interroguée et questionnée, et sans geheyne, peine ou torment, a confessé, en la presence du juge dudit lieu de Chastelleraud, voluntairement qu'elle avoit commis ledit cas en ladicte fille, par la manière dessus dicte. Mais au regard du cas de sortilège dont elle avoit esté acusée, elle n'en a en riens esté trouvée chargée, ne jamais n'en usa ne aucune en sceut oncques, ains en est pure et innocente. Mais ce nonobstant, lesdiz supplians doubtent que, à l'occasion dudit cas ainsi fait et commis par icelle Jehanne en ladicte fille, que on vueille proceder à l'encontre d'elle par rigueur de justice, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties, comme ilz dient, humblement requerant que, attendu que ladicte Jehanne commist ledit cas par la temptacion de l'ennemy et pour le doubte et fureur de sondit feu mary qui l'avoit menacée, et advint ledit cas soubdenement et de ehaulde colle, et pour cuider monstrer à sondit mary que ladicte fille n'estoit venue à terme, afin qu'elle demourast tousjours en l'amour de sondit mary, et que tousjours elle s'est depuis bien et honnestement gouvernée, sans jamais avoir esté actainte d'aucun cas de crisme, blasme ou reprouche, et le long temps qu'il a que ledit cas advint, comme de trente ans et plus, et aussi que ele present elle est aagée de lx. ans et plus, et que des autres cas à elle imposez, et pour lesquelz elle a esté emprisonnée, elle est innocente et non coulpable en aucune manière, il nous plaise sur ce luy impartir iceulx grace et misericorde. Pourquoy nous, etc. à ladicte Jehanne avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou mois de novembre l'an de grace mil cccc. cinquante huit, et de nostre règne le xxxviie.

Ainsi signé : Par leroy, ala relacion des gens du Grant conseil. CauvigneauSic. ll faut corriger Gauvigneau, nom que l'on a rencontré déjà précédemment au bas de plusieurs lettres de la chancellerie royale. Il s'agit de Macé Gauvigneau, clerc, notaire et secrétaire du roi, qui fut, avec Jean Yver, licencié ès lois, enquêteur ordinaire au pays et comté de Poitou, ordonné commissaire; en 1460, sur fait des francs-fiefs et nouveaux acquêts en Poitou. (D'Hozier, Armorial général, in-fol., t. II, p. 459.) — Visa. Contentor. Puigiraut.

MCCXCVI Décembre 1458

Rémission octroyée à Pierre Berchou, de la Rochénard, coupable du meurtre d'un nommé Pierre Gazeau.

AN JJ. 188, n° 6, fol. 3 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de Pierre Berchou, de la parroisse de Roche EsnartPierre Berchou appartenait probablement à la même famille que Gilles et Jean Berchou ou Bréchou, seigneurs de Puitsec près Fontenayle-Comte, dont il a été question dans nos tomes V, p. 413, et VII, p. 156 et 284. Le Dictionnaire des familles du Poitou mentionne Jean Berchou, écuyer, sr de la Rochénart, qui rendit, à cause de Jeanne de Viron, sa femme, aveu du fief de Prissé, le 3 juillet 1381, à Mme de Surgères, dame de Dampierre-sur-Boutonne. (Nouv, édit., t. I, p. 456.), ou païs de Xanctonge, aaigé de xxxv. ans ou en- viron, contenant que, ung certain jour entour la feste de Nostre [Dame] de septembre derrenier passé, il se partit de son hostel et s'en ala pour s'esbatre ou villaige d'Usseau, et comme il avoit acoustumé de porter ung espieu de chasse, il le porta et demoura oudit villaige d'Usseau jusques à basses vespres. Et ce temps pendant qu'il y fut, ung nommé Jehan GaseauUn Jean Gazeau, de Pissot, était, le 3 janvier 1452 n. s., procureur du comte de Richemont, seigneur de Parthenay, à Mervent, et reçut en cette qualité les aveux des fiefs relevant de cette seigneurie. (Arch. nat., R1* 204, fol. 2.) Dans le même registre sont transcrits un aveu d'Antoine Gazeau, pour son hébergement de Saint-Thomas, avec le village de Peyrusse dans la même mouvance, daté du 25 février 1428 n. s., et un autre de Coline Gazeau, veuve de Pierre Machon, du 16 novembre 1446 (fol.-7 et.43 v°). Une famille noble de ce nom était possessionnée. dans la même région. Elle était représentée à cette époque par Jean Gazeau, sr de Champdoré, qui avait été reconnu noble et déclaré tel par sentence des élus de Poitou; en date du 6 octobre 1446. Son fils, Yvon Gazeau, fut châtelain de Chizé. (D'Hozier, Armorial général, in-fol. t. II, p. 457, et Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 1er édit., t. II, p. 148.) Citons encore un Jean Gazeau, métayer, à Saint-Christophe-sur-Roc, de Floridas Linard, gentilhomme demeurant à Champdenier, qui, l'an 1438, fut taxé à la somme de trente sols par Pierre de Tuillières, conseiller au Parlement, « commissairé enquêteur et réformateur sur le fait de plusieurs exemptions, faute et abuz faiz par aucuns des habitans du pays de Poictou ». (Bibl. nat., ms. fr. 24160, fol. 7.) se transporta en l'ostel dudit suppliant et demanda une barrique en quoy avoit eu paravant du vin, qu'il avoit jà pieça vendu audit suppliant. Auquel Jehan Gaseau les gens dudit suppliant disdrent qu'ilz ne congnoissoient sa barrique, mais que ledit suppliant retourneroit tantost et la lui bailleroit très voulentiers, et qu'il le voulsist attendre, dont il fut refusant, et dist qu'il l'emporteroit, et de fait en print une qui n'estoit pas audit suppliant, oultre le gré et voulenté des gens o dudit suppliant, et en la prenant, rompit une seelle de cheval qui povoit valoir xxx. solz tournois. Et tantost après qu'il s'en fut alé, arriva ledit suppliant en sondit hostel, sondit espieu à son coul ; auquel ses gens dirent que ledit Gaseau emportoit une autre barrique que la sienne, et pour ce s'en ala ledit suppliant après ledit Gaseau, lequel il trouva en l'ostel de Pierre Gaseau, son frère. Auquel Pierre il demanda où estoit Jehan Gaseau, son frère, en lui disant qu'il avoit prins chiez lui une barrique qui n'estoit pas sienne ne audit suppliant, ains appartenoit à ung autre, et aussi qu'il lui devoit deux solz six deniers ; à quoy ledit Pierre respondit qu'il n'avoit point veu sondit frère. Et ledit suppliant lui dist qu'il l'avoit veu entrer chiez ledit Pierre, où ilz estoient. Et incontinant icellui Jehan Gaseau, sans ce que ledit suppliant dist autre chose, sinon qu'il avoit très mal fait de prendre ladicte barrique, sans son congié, sallit d'entre une porte et ung lit, et se print audit suppliant, et semblablement ledit Pierre Gaseau et sa mère, qui le mirent à terre et batirent très fort d'un sien cousteau qu'ilz lui ostèrent ; et après ce, en soy defendant, se eschappa d'eulx et s'en retourna en sondit hostel, et en courant apparceut la jument dudit Jehan Gaseau, et après dist à lui mesmes qu'il avoit mal fait qu'il ne l'avoit prinse, pour la retenir jusques à ce qu'il eust eu son espieu et son cousteau, que les dessusdiz lui avoient ostez ; et de fait lui estant encores esmeu et en la chaulde, print une javeline bien hastivement et se mist à chemin pour aler querir et prendre ladicte jument, et en y alant, rencontra en son chemin lesdiz Jehan et Pierre Gaseau, frères, qui derechief le assallirent avant qu'il les apperceust, l'un d'eulx tenant ledit espieu et cousteau dudit suppliant, et l'autre une fourche ferrée, et là s'entrebatirent tellement que ledit suppliant tint par la robe ledit Jehan Gaseau avec sadicte javeline contre ung mur, et adonc ledit Pierre saisit ledit suppliant au corps et dist : « Je le tiens, le ribault, aide moy ». Pour quoy icellui suppliant, doubtant qu'ilz le tuassent, tira sa dague et en frappa ledit Pierre Gaseau qui le tenoit, ne scet par quel endroit, pour ce qu'il estoit bien ung heure de nuyt, et après le lascha et s'en ala ledit suppliant en son hostel. Lequel Pierre Gaseau, au moien de ladicte bleceure, par deffault d'estre bien habillé et gouverné ou autrement, seize ou dix sept jours après est alé de vie à trespassement. A l'occasion duquel cas ainsi avenu, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s'est absenté du païs et doubte aussi que aucuns defaulx n'aient à rencontre de lui esté donnez, et au moien d'iceulx banny du païs ; pour quoy il n'y oseroit plus retourner, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties et par nous rappellé ; humblement requerant que, attendu que ledit Jehan Gaseau, frère dudit deffunct, au moien duquel ledit cas est avenu, avoit prins et emporté de l'ostel dudit suppliant et par force ladicte barrique qui n'estoit pas sienne, que lesdiz deffunct et Jehan Gaseau lui ostèrent, en l'ostel d'icellui deffunct, ses dictz espieu et cousteau, aussi qu'ilz le assallirent oudit chemin, comme dit est, avant qu'il les apparceust, etc., et par ce furent agresseurs, qu'il estoit seul contre eulx deulx et fut meu de frapper ledit Pierre, pour ce qu'il l'avoit saisi au corps, afin qu'il le laissast et qu'il ne feust entre ses mains tué ou villené de son corps, nous lui vueillons sur ce impartir nosdictes grace et misericorde, et le rappeller. Pour quoy nous, considerans les services qu'il nous a faiz ou fait de noz guerres à l'encontre de noz anciens ennemis et adversaires les Anglois, audit suppliant ou cas dessus dit avons remis, quicté et pardonné, etc., et avons revoqué et revoquons tous bans, appeaulx, proclamacions et evocacions de defaulx, s'aucuns en avoient pour ce contre lui esté donnez, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Xanctonge et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou mois de decembre l'an de grace mil cccc. cinquante huit, et de nostre règne le xxxviie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. A. Rolant. — Visa. Contentor. Duban.

MCCXCVII Janvier 1459

Rémission accordée à Jacques Mignon, pauvre aliéné, enfermé depuis huit mois dans les prisons de Thouars, parce qu'il s'accusait d'avoir noyé sa femme, la vérité de ce prétendu crime ne pouvant être établie.

AN JJ. 188, n° 15, fol. 10 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion des parens et amis charnelz de Jacques Mignon, povre homme, perturbé et alteré de son entendement, à present et depuis huit mois ença detenu prisonnier ès prisons de Thouars, contenant que, quinze ou seize ans a ou environ, ledit Mignon fut marié avecques une jeune femme, nommée Mathurine Paynelle, laquelle estoit toute sote, de simple et très petit gouvernement, en telle manière qu'elle ne se savoit gouverner, non plus que ung petit enfant, et ne savoit faire son mesnaige, gouverner ne nourrir ses enfans ne faire autre chose, sans la conduicte et remonstrance d'aucune autre personne. Lequel Mignon a demouré tout son temps, conversé et repairé au villaige de la Richardère en la chastellenie de Bressuyre et ilec environ, et s'est bien doulcement et paisiblement gouverné ; et estoit amé au païs pour ce qu'il se mesloit et entremettoit de faire roues de charette, et en ce et autres choses faisoit plusieurs plaisirs aux gens du païs d'ilec environ. Et pour ce que, ung an a ou environ les voisins dudit Mignon et autres gens du païs congneurent qu'il n'avoit ne ténoit plus sadicte femme aveques luy, ainsi qu'il avoit acoustumé de faire le temps passé, et que on ne povoit savoir nouvelles de ladicte femme ne qu'elle estoit devenue, à ceste cause ledit Mignon fut prins, par souspeçon, huit mois a ou environ, et fut mis et constitué prisonnier ès prisons de Thouars, et incontinent, de sa franche voulenté, sans aucun parforcement, contraincte de gehaine ne autrement, dist et confessa que, à cause de ce que sadicte femme l'avoit plusieurs foiz incité et ennorté d'aler veoir ses père et mère, qui demouroient au lieu de la Trape près Mauleon, icelluy Mignon et sadicte femme se partirent, ung an a ou environ, à certain jour de samedi, environ l'eure de myenuit dudit villaige de la Richardière pour aler audit lieu de la Trape, où il y a de distance de deux lieues ou environ, et laissèrent cinq petiz enfans qu'ilz avoient, couchez en leur lit ; et en alant dudit villaige de la Richardière audit lieu de la Trape, ainsi que luy et sadicte femme furent au droit de la rivière du Puy, au dessoubz d'un molin, appellé le molin de la Voy, ledit Mignon print sadicte femme au travers du corps et la gecta en ladicte rivière, et ilec la fist noier ; et incontinent s'en retourna ledit Mignon en son hostel coucher auprès de sesdiz enfans, jusques environ le point du jour qu'il se leva, et ala à la messe à l'eglise de Flazay. Et pour ce que les officiers dudit lieu de la justice de Thouars, veans que la confession dudit Mignon estoit ainsi voulentaire et qu'il persistoit et encores persiste en icelle, et requeroit que on le fist mourir, ilz ont fait toute diligence de adverer et actaindre ledit cas autrement que par sadicte confession, et ont plusieurs foiz envoyé au lieu de ladicte rivière qui est petite, et ilec environ, pour savoir si on avoit point trouvé aucune personne morte ou noyée en icelle rivière, ne autres apparences et conjectures sur ledit cas, con formes et consonans à la depposicion dudit Mignon. Mais, pour quelque dilligence qu'ilz en aient faite, ilz n'en ont peu trouver ne savoir aucune chose, jasoit ce que ledit Mignon, à tous les interrogatoires que on luy a faiz, soit tousjours persistant à sadicte depposicion et confession, en requerant les officiers de ladicte justice qu'ilz le facent mourir. Lesquelz officiers, après ledit procès dudit Mignon fait et acomply en grant et meure deliberacion, ont fait consulter la matière au conseil à Poictiers et ailleurs, et ne trouvent pas que par sa simple confession ainsi faicte que dit est, et mesmement que luy mesmes requiert estre executé par justice, que ilz le doivent condempnez à mourir ; mais par l'advis et oppinion dudit conseil, ont trouvé qu'il seroit le mieulx, pour satisfaire à justice, que il nous pleust donner audit Mignon noz lettres de remission sur ledit cas et sur ce luy impartir nostre grace. Pour quoy nous, les choses dessusdictes considerées et que à rencontre dudit Mignon n'y a aucune partie formée ne poursuivant, fors seulement les officiers de la justice, pour adverer et actaindre ledit cas, la verité duquel ne peut estre sceue, fors ainsi que dit est, et qu'il est vraysemblable que icelluy Mignon soit fort blecié et perturbé en son entendement, actendu mesmement qu'il requiert luy mesmes estre mis à mort et executé par justice, et que en telles matières qui gisent en doubte et dont la verité ne peut bien clerement estre sceue et actainte, la voye de misericorde et de doulceur estre à eslire et preferer à rigueur de justice, audit Mignon avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné, ou mois de janvier l'an de grace mil cccc. cinquante huit, et de nostre règne le xxxviie, en nostre ville de Tours.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. De Puygiraut. —Visa. Contentor. J. Du Ban.

MCCXCVIII Février 1459

Permission à François de Vendel, chevalier, de fortifier son hôtel de l'Ebaupinaye, mouvant d'Argenton.

AN JJ. 188, n° 37, fol. 20 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de nostre amé et feal François de Vendel, che- valier, seigneur dé l'EsbaupinayeUn Guillaume de Vendel était maître d'hôtel d'Artur, comte de Richemont, seigneur de Parthenay, connétable de France, et de Marguerite de Bourgogne, duchesse de Guyenne, sa femme. Il est fréquemment question de ce personnage, entre les années 1427 et 1442, dans la Chronique d'Arturde Richemont par Guillaume Gruel (édit, de M. Le Yavasseur pour la Société de l'hist. de France) et dans la récente biographie du connétable par M. E. Cosneau. Peut-être était-il le père de ce François de Vendel, seigneur de l'Ebaupinaye (aujourd'hui village de la commune du Breuil-sous-Argenton), dont nous n'avons point trouvé d'autre mention. Hardoin de Vendel, aussi seigneur de l'Ebaupinaye, sans doute fils de François, épousa Marie Chabot, fille cadette de Perceval Chabot, seigneur de la Turmelière et de Liré, et de Jeanne de risle-Bouchard. (Th. Courtaux, Hist. généal. de la maison de l'Esperoitnière, in-8°, p. 128, et Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. II, p. 192.) On trouve encore Olivier de Vendel qui, le 28 mars 1481, rendit au vicomte de Thouars l'aveude la Ménardière, paroisse de Luché, fief relevant de Thouars à hommage plein, à cause d'Hérisson réuni à ladite vicomté. (Cf. Les fiefs de la vicomté de Thouars, par le duc de La Trémoïlle et II. Clouzot, in-4°, p. 151.) On voit dans cet ouvrage que les Vendel possédaient, à la fin du XVe et au XVIe siècles, plusieurs autres fiefs dans le Thouarsais. en nostre seneschaucie de Poictou, contenant que ledit lieu et hostel de l'Esbaupinaye, qui est tenu noblement du seigneur d'ArgentonLe seigneur d'Argenton était alors Antoine d'Argenton, sr de Gourgé, de l'Hérigondeau, Souvigné, etc., fils de Guillaume, seigneur d'Argenton, et de Jeanne de Naillac; il avait épousé, le 3 février 1455, Marguerite de Razilly, et décéda en 1461, sans postérité. (Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. I, p. 102.) Les Archives nationales possèdent quatre aveux rendus, le 1er avril 1451 n. s., par Antoine d'Argenton, à Artur comte de Richemont, à cause de la baronnie de Parthenay, le premier d'une borderie de terre désherbergée, appelée la «Borderie aux Milles », en la paroisse de Lhoumois, le deuxième de son hôtel et fief de Gourgé ; le troisième de son herbergement sis à Parthenay même, en la paroisse de Sainte-Croix, près des murs de la ville, et le quatrième de l'herbergement de l'Hérigondeau assis près de la ville de Parthenay. Le premier de ces fiefs était tenu à hommage plein, les trois autres à foi et hommage lige, avec devoir de rachat. Le seigneur d'Argenton possédait en outre, à la même époque, deux groupes d'arrière-fiefs en la même mouvance, le premier relevant de la Salle de Fenioux, qui appartenait alors à Yonnet Sauvage, comprenait plusieurs borderies de terre sises dans les paroisses de Secondigny, d'Azay, de la Pérate, de Gourgé, de Clessé et aux environs. Le second se composait de dix borderies de terre relevant de Saint-Pardoux, sises dans les paroisses de Cours, Soutiers, Beaulieu et Soulièvre. Elles s'appelaient la Fantinière, la Roulière, Puyreneau, la Rousselière, la Mouelière, la Lière, la Jamonnière, le fief de la Meule et le fief du Gastineau. (R1* 190, fol. 66 à 69, 251, 266 v°.) La veuve du sr d'Argenton, Marguerite de Razilly, était en procès au Parlement, Pan 1470, contre Jean de Chambes, sr de Montsoreau, par appel de Jean Favereau, prévôt de Poitiers. (Arrêt du 18 avril, X2a 36, fol. 288 v°.) En 1473, François Gibert, écuyer, et Pierre Marvillau, sr delà Vernaye, qui, douze ans auparavant, avaient fabriqué un faux au profit de cette dame, à la requête de Louis Chabot, sr de la Grève, obtinrent des lettres de rémission, pour l'enregistrement desquelles ils plaidaient en la cour les 3 et 10 juin, contre Jean de Chambes et Philippe de Commynes (X2a 39, à ces dates)., de tout temps et d'ancienneté a esté fermé de douves et fossez et jusques à puis huit ou dix ans ença, que ledit suppliant, considerant les dangiers qui chacun jour pevent survenir à nobles gens demourans ou plat païs, voulant obvier aux entreprinses et voyes de fait que on vouldroit contre luy faire sans cause, a commencé à remparer et fortifier sondit hostel, par le congié de bouclie dudit seigneur d'Argenton, et soit ainsi que ledit suppliant, considerant qu'il n'avoit eu ledit congié que de bouche, doubtantque pour le temps avenir on luy en peust aucune chose demander ; doubtant aussi que, à l'occasion de ce qu'il n'avoit de nous congié de fortiffier et emparer sondit hostel, nostre procureur et aultres voulsissent proceder à demolir ou faire demolir et abatre sondit hostel et les fortiffications et emparemens qui y ont esté faiz, et contre luy lendre en amende, nous ait fait humblement supplier et requerir nostre grace et provision luy estre sur ce imparties. Pour ce est il que nous, les choses dessus dictes considerées et les bons et agreables services que ledit de Vendel nous a faiz en maintes manières, et esperons que encores face ou temps avenir, ladicte fortifficacion et emparement faictes par ledit suppliant en sondit lieu et hostel de l'Esbaupinaye avons eue et avons agreable, et de nostre plus ample grace luy avons donné et octroyé, donnons et octroyons par ces dictes presentes congié et licence de parachever, fortiffier et emparer ledit lieu et hostel de l'Esbaupinaye de fossez, murailles, tours, paliz, barbacannez, bonlevars, machicoliz, eschiffes, portaulx, pons levys et autres cloustures et fortifficaeions acoustumées a fortifficacions de placés, et qu'il verra estre neccessaires pour la seureté dudit hostel, pourveu toutesvoyes que ce ne porte dommaige ou prejudice à lachose publicque du païs. Si donnons en maii dement, par ces dictes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d'eulx, si, comme à luy appartendra, que, se, appellé nostre procureur et autres qui seront à appeller, il leur appert ladicte fortiffication n'estre dommageable à la chose publicque du païs, ilz facent, seuffrent et laissent ledit suppliant joyr et user plainement et paisiblement de noz presente grace, don, congié, licence et octroy, sans luy faire, mettre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun empeschement au contraire, ores ne pour le temps avenir, pourveu que à ce se consente ledit seigneur d'Argenton, de qui est tenu ledit lieu et hostel de l'Esbaupinaye, se ja fait et consenty ne l'a, et que les habitans et subgetz de icelluy lieu de l'Esbaupinaye, s'aucuns en y a, seront tenuz de faire guet et garde là où ilz l'ont acoustumé de faire d'ancienneté, non obstant ladicte fortifficacion, et aussi que ledit suppliant garde ou face garder ledit lieu tellement et si seurement que aucun inconvenient n'en adviengne à nous ne à noz subgetz du païs d'environ. En tesmoing de ce, nous avons fait mettre nostre scel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l'autruy en toutes. Donné à Montbason, ou mois de fevrier l'an de grace mil cccc. cinquante huit, et de nostre règne le xxxviie.

Ainsi signé : Par le roy, maistre Jehan TudertSur Jean Tudert, cf. ci-dessus, p. 59, note. et autres presens. Rolant. — Visa. Contentor. J. Du Ban.

MCCXCIX Février 1459

Rémission donnée en faveur de Richard Therry, couturier, demeurant à Saint-Maixent, coupable du meurtre d'un de ses compagnons dans une rixe, le mardi-gras précédent.

AN JJ. 188, n° 39, fol. 20 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Richart Therry, cousturier, aagié de xix. ans ou environ, demeurant à Saint Maixent, contenant que ledit Richart, dès environ la feste des Roys derrenière passée jusques aujour du mardi gras, a besoigné de son mestier de cousturier en l'ostelde Guiot Paloton, cousturier, demourant audit lieu de Saint Maixent, en la compaignie de feu Jehan de Molieme, aussi cousturier ; lequel Richart et ledit Molieure (sic) souppèrent ensemble, le mardi vie jour de ce present mois de fevrier, en l'ostel dudit Guiot Paloton. Aussi y souppa ung jeune homme nommé Alixandre, qui autresfoiz fut varlet dudit Paloton. Et après qu'ilz eurent souppé, lesdiz Richart, Molieure et Alixandre se rendirent à l'ostel de Mougin Maignen, ouquel estoient Mathurin Gouraud, père de la femme dudit Mougin, ledit Mougin, sa femme, Perrette Gouraude, fille dudit Mathurin. Aussi se rendirent oudit hostel ung nommé Jehan de Caus, varlet de Vincent Maillé, cousturier, ung nommé Jehan, varlet de Sanson Vincent, barbier, ung nommé Pierre, varlet de Jehan Le Roux, cousturier, ung nommé Pierre, varlet de Guillaume de Panpelie, cousturier, Jehan de Celles, filz de Jehan de Celles, cousturier, ung jeune enfant, cousturier, nommé Chaigneau. Ouquel hostel dudit Mougin ledit Richart et les dessus nommez se rendirent, à la requeste dudit Alixandre. Et après ce qu'ilz eurent ung peu demouré oudit hostel dudit Mougin, les aucuns d'eulx changèrent de robes par manière d'esbat et yssirent dudit hostel dudit Mougin, et avec eulx estoit ung nommé François Gouraud, fils dudit Mathurin, qui sonnoit d'une reberbe, et alèrent dansant jusques à la maison de Marsault Chalaphin, cousturier en la rue Chaslon de ladite ville ; lequel Marsault, qui estoit couchié, se leva de son lit et leur fist très bonne chère ; et quant ilz eurent beu oudit hostel, ilz s'en alèrent dansant et en leur compaignie ledit Marsault jusques à l'ostel de Mery Dugué couslurier ; lequel Dugué n'estoit point en son hostel ; et ilz trouvèrent Jehan de Saint George, père de la femme dudit Dugué. Lesquelz de Saint Georges et ladicte femme dudit Dugué les firent boire oudit hostel, et quant ilz eurent beu, ilz s'en alèrent d'ilec dansant jusques à l'ostel de Vincent Maillé ; et s'en ala avec eulx ung nommé Rolland, varlet dudit DuguéUn Méry Dugué, marchand drapier, a été échevin de Saint-Maixent de 1474 à 1499, (Alfred Richard, Recherches sur l'organisation communale de Saint-Maixent, 1870, p. 174.) . Ouquel hostel ilz entrèrent ci trouvèrent ledit Vincent couchié en son lit ; et après ce qu'ilz eurent beu et dancé oudit hostel, ilz s'en alèrent en l'ostel de Jehan Merceron, aussi cousturier, lequel Merceron ilz trouvèrent aussi couchié, et le firent lever du lit et dancèrent et burent oudit hostel, et d'ilec s'en alèrent dansant au long de la grant rue Chaslon jusques au marchié. Et quant ilz furent devant la maison de Pierre Mynet, bourgois et esleu de ladicte villeM. Alfred Richard n'a pas relevé le nom de Pierre Mynet dans sa Liste chronologique des maires de Saint-Maixent. Il l'indique seulement comme échevin. (Id., p. 179.), ilz trouvèrent maistre Thibault GracienThibaut Gracien, licencié en lois, fut élu (maire) de Saint-Maixent en 1464, il fut échevin de 1456 à 1499. (Id., pp. 150 et 176.), Michau et Guillaume CassezMicheau Cassez était échevin de Saint-Maixent en 1462. (Id., p. 172.) et plusieurs autres, et avec eulx ung nommé Bourguinion, lequel estoit crucifié et avoit ung trepié sur la teste. Et d'ilec ilz s'en alèrent à l'ostel de Ymbert Jousbaut, cousturier, demourant en la rue de la Croix de ladicte ville, et avec eulx s'estoient assemblez en ladicte rue Chaslon Jehan Joussaut, cousturier, Guillaume Ayraut, Guillaume Pampelye et ledit Ymbert Jousbaut, et semblablement estoit avec eulx Jehan Pasquier, gueysnier ; et quant ilz furent oudit hostel, ilz dansèrent en icelluy et beurent, et dudit hostel dudit Ymbert s'en alèrent à l'ostel de Jehan d'Azay, cousturier, et dudit hostel dudit d'Azay à l'ostel de Mathurin Gouraud, cousturier, et d'ilec s'en vindrent à l'ostel dudit Paloton, leur maistre, et d'ilec s'en alèrent à l'ostel de Guillaume Pampelye, près le marchié de ladicte ville, èsquelz hostelz ilz burent et dancèrent, comme ilz avoient fait ès autres lieux, et d'ilec s'en alèrent à la porte de Guillaume Ayraut, pour ce qu'il s'estoit amblé d'eulx et frappèrent à l'uys dudit hostel, mais ilz n'entrèrent point en icelluy. Et à ceste cause ilz chargèrent ilec une petite coulevrine que ledit Richart avoit ledit jour achattée et certaine quantité de pouldre de canon du xaintier de ladicte villeLe xaintier ou saintier est un fondeur de cloches, ou simplement un fondeur. Godefroy, dans son Dictionnaire, dit par erreur que le xaintier est celui qui est chargé de l'entretien d'un canal. et dedens ladicte coulevrine misdrent du papier et ladicte coulevrine firent sonner et tirer par plusieurs foiz, tant en ladicte rue de la Croix que ilec devant l'uys dudit Ayraut, et tint plusieurs foiz ledit Molieme ladite coulevrine, pour icelle faire tirer. Et après ce que ledit Molieme eut chargié ladicte coulevrine de pouldre, et mis par dedens ung tapon de bois et du papier, ledit Richart voulut empescher que ledit Molieme ne tirast ladicte coulevrine, et luy dist qu'il alast achapter des pouldres, s'il là vouloit faire tirer, et luy voult ledit Richart bailler la broche qu'il avoit. Et à ceste occasion se meut parolles entre ledit Richart et ledit Molieme, et commencèrent à tanser de parolles, et à se appeller l'un l'autre paillart et s'entreprendre aux colletz de leurs prepoins ; et ainsi qu'ilz se tenoient l'un l'autre, ledit Alixandre se print à eulz pour les vouloir departir et frappa ledit Richart du poing sur la teste ; et lors ledit Richart dist audit Alixandre que, se il ne se ostoit d'ilec, qu'il le frapperoit. Et comme ledit Richart voulut tirer du fourreau une dague qu'il avoit, ledit Alixandre luy osta ladicte dague, et après qu'il luy eut ostée ladicte dague, ledit Alixandre le frappa deux ou trois coups du poing, en l'appellant paillart. Et ledit Molieme s'en aloit devant eulx, et après qu'ilz furent au droit de la maison de Laurens Paen, ledit Richart se print au corps dudit Molieme, et lors ledit Alixandre print ledit Richart et le gecta par terre, et cheurent lesdiz Alixandre et Molieme sur ledit Richard ; lequel Richard ledit Guillaume Pampelye leva de terre et le rusaRuser, plus souvent écrit reuser, signifiait pousser, écarter, éloigner. à part dudit Alixandre et aussi dudit Molieme. Et quant ledit Richart fut levé de terre, luy estant eschauffé, jura par grans seremens (n'est recors du serement) que s'ilz ne se reculoient qu'il les frapperoit, et tira ung cousteau qu'il avoit ; et lors ledit Pasquier qui estoit en leur compaignie, comme dessus est dit, le print au colet de son pourpoint en luy demandant qu'il vouloit faire. Auquel Pasquier ledit Richart dist qu'il le laissast ester, ou autrement qu'il le blaisseroit ; et pour ce que ledit Pasquier ne le vouloit laisser, il se eschappa de luy à force, et après ce se tira et addreça audit Molieme en courant après luy, lequel il ataigny et aconsceut au droit de la maison des PoictevinsFamille municipale de Saint-Maixent, à laquelle appartenait Robert Poitevin, qui fut médecin des rois Charles VII et Louis XI, et trésorier de Saint-Hilaire-le-Grand de Poitiers. ou ilec près, en ladicte ville de Saint Maixant, et le frappa ung seul coup dudit cousteau parmy l'aine, du cousté senestre ; et lors ledit Molieme cria : « Au meurtre ! je suis mort ! » Par le moien duquel coup, ledit Molieme ala le landemain de vie à trespassement. A l'occasion duquel cas ledit Richart a esté et est encores detenu prisonnier par justice et est en voye de y finer miserablement ses jours, se noz grace et misericorde ne luy sont sur ce imparties, humblement requerant que, attendu ce que dit est et mesmement que ledit cas est advenu par fortune et chaulde colle, et que paravant icelluy lesdiz Richart et Molieme estoient bien amis, etc. Pour quoy nous, etc., audit suppliant avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnôns en mandement, parces presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, etc. Donné à Montbason, ou mois de fevrier l'an de grace mil cccc. cinquante huit, et de nostre règne le xxxviie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. J. de Reilhac. — Visa. Contentor. J. Du Ban.

MCCC Mars 1459

Rémission octroyée à Denis Penissault et à Guillaume Simonnet, de Migné-en-Brenne, faisant métier de vendre du sel en Poitou, Saintonge et Gascogne, coupables du meurtre d'un nommé Lancelot, « lequel ne servoit que de raençonner les povres marchans du païs », et ayant appris qu'ils devaient se rendre à Saint-Jean-d'Angély pour leur commerce, était venu les « espier pour savoir quel chemin ilz tieudroient, et avoit avecques lui deux frans archiers qu'il avoit fait mettre en embusche en ung villaige près d'ilec, nommé Chastres, pour cuidier destrousser iceux supplians et les autres marchans dudit lieu de Meigné, lesquelx il avoit raençonnez au devant de ce par plusieurs foiz... Si donnons en mandement, par ces presentes, à nostre seneschal de Poictou ou à son lieutenant à Montmorillon... Donné à Tours, ou mois de mars l'an de grace mil cccc. cinquante huit, et de nostre règne le xxxviie. »

AN JJ. 188, n° 48, fol. 25 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

MCCCI Mars 1459

Rémission en faveur de Robert de Brillac, écuyer, âgé de vingt-deux ans ou environ, fils puîné de Guiart, seigneur de Brillac, et de Mathe de Pompadour, sa femmeD'une famille de la Basse-Marche, dont une branche possédait, dès le commencement du XVe siècle, les seigneuries de Monts en Loudunais et de Bâlon, Guyard de Brillac était fils de Guy, seigneur de Brillac et de Villemexant. Le nom de sa femme, Mathe (Marthe, suivant d'Hozier et la nouv. édit, du Dict, des familles du Poitou), ne figure pas sur la généalogie de la maison de Pompadour, publiée par le P. Anselme et par La Chenaye-Desbois. Elle appartenait bien cependant à cette famille, comme on en trouve la preuve ici. Guyard était, l'an 1435, en état d'hostilité armée contre Jean seigneur de Brizay et dut se mettre sous la protection du Parlement de Poitiers. Un arrêt de la cour fit défense à celui-ci, à peine de cinq cents mares d'or, « qu'il ne mefface ne face meffaire par voie de fait à Guyar seigneur de Brillac, en corps ne en biens, en quelque manière que ce soit, en lui enjoignant que, se aucune chose lui veult demander, il le poursuive par voie de justice ». (Arch. nat., X2a 21, à la date du 19 novembre 1435.) Sous Louis XI, le sr de Brillac et de Villemexant fut sénéchal de Rodez. Le roi lui fit don, par lettres du 29 juin 1465, d'une somme de 10.000 écus d'or, pour le récompenser de la part qu'il avait prise au mariage du comte d'Armagnac avec Marie de Savoie, sœur de la reine. (Bibl. nat., ms. fr. 20428, fol. 40 bis.) Il eut quatre enfants : Antoine, Clément, évêque de Saint-Papoul, puis de Tulle, Souveraine, mariée à Léonet Gourjault, écuyer, seigneur de Miauray, et Robert, au profit duquel sont expédiées les présentes lettres de rémission. Ce dernier épousa, suivant les généalogies, Isabeau Chambre, aliàs de la Chambre, et n'eut qu'une fille, Marguerite, mariée à François de Chabanais, puis à Georges Imbault, sr de Montbrun. (Beauchet-Filleau, Dictionnaire, nouv, édit, t. I, p. 777.). Trois ans avant, son oncle, l'évêque de ViviersElie de Pompadour, l'un des fils de Jean Ier, seigneur de Pompadour, et de Madeleine de Ventadour, conseiller au Parlement de Poitiers (1429), puis à celui de Toulouse (1443), évêque d'Alet, le 8 février 1448, transféré, le 29 novembre 1454, par Calixte III, au siège de Viviers, décédé en 1478. (Cf. notre t. VIII, p. 308, note 4.) chargé par le roi d'une mission à Rome, l'avait emmené avec lui. A leur retour, se trouvant à la cour à Vendôme, Robert s'étant pris de querelle avec un serviteur du seigneur de PompadourJean II, seigneur de Pompadour, de Cromières, de Chanac, etc., fils de Gulfier de Pompadour (mort en 1441) et d'Isabelle de Comborn, fille de Guichard, vicomte de Comborn, seigneur de Trignac, fut élevé auprès de ses oncles l'évêque de Viviers et l'évêque de Carcassonne. Chambellan de Louis XI, par brevet du 12 décembre 1464, Charles VIII le fit capitaine de Capdenac en 1485 et l'employa en diverses missions, ainsi que Louis XII. Il épousa Marguerite Chauveron, dame de Ris et de Laurière, et fit son testament le 16 janvier 1502. (Le P. Anselme, Hist. généal., t. VIII, p. 244.), que ce dernier avait dépêché à l'évêque audit lieu de Vendôme, l'avait frappé mortellement de deux coups de couteau. « Donné aux Roches Tranchelion, ou mois de mars l'an de grace mil cccc. cinquante huit, et de nostre règne le xxxviie ».

AN JJ. 188, n° 52, fol. 27 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

MCCCII Mars 1459 (le 23)

Rémission accordée à Jacques Le Jude, écuyer, seigneur de Maugué, qui, soupçonnant son page de lui avoir dérobé un écu, l'avait maltraité au point d'avoir occasionné sa mort.

AN JJ. 188, n° 60, fol. 30 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Jaques Le Jude, escuier, seigneur de Maugué, contenant que, comme ledit suppliant soit homme de bien et d'estat doulx et paisible, et tousjours s'est gou verné et vesqu et conversé doulcement et paisiblement entre ses congnoissans, sans ce que jamais il fist chose qui fust digne de reprehencion, et dès son jeune aage s'est employé en nostre service ou faict de la guerre, où il s'est honnorablement porté, et mesmement ou voyage de TartasL'affaire connue dans l'histoire militaire de Charles VII sous le nom de «Journée de Tartas » (23 juin 1442) eut un grand retentissement. Le roi avait concentré et rangé en bataille une armée de 30.000 combattants devant cette ville, où les Anglais tenaient le sire d'Albret assiégé depuis l'année précédente. Les ennemis, n'osant soutenir le choc, se retirèrent et rendirent les otages. il se y porta grandement et honnorablement durant icelluy, et fut le premier qui entra dedens Saint SeverCette place avait été prise, au milieu de juin 1453, par l'armée commandée par le comte de Clermont et le comte de Foix, le fait d'armes de Jacques Le Jude, rappelé ici, est confirmé dans ce passage du troisième compte de Mathieu Beauvarlet, commis à la recette générale des finances : « Jacques Le Jude, escuier, lequel fut le premier qui entra dedans Saint Sever, quant la place fut reduite en l'obeissance du roi, VIXXVIII. livres X. sols en avril. » C'est un compte du 1er octobre 1452 au 30 septembre 1453, et le paiement eut lieu en avril suivant, (De Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. V, p. 269.), quant il fut pris derrenierement ; et depuis a esté et est de nostre ordonnance et retenue, soubz la charge de nostre cher et feal cousin le sire d'OrvalArnaud-Amanieu d'Albret, sire d'Orval, troisième fils de Charles II, sire d'Albret, et d'Anne d'Armagnac, reçut en don de Charles VII les château, ville et châtellenie de Lesparre (août 1450). Louis XI le nomma son lieutenant général en Roussiilon, où il mourut l'an 1463.. Or est il ainsi que puis naguères ledit suppliant, qui estoit logié à Connerré avec la compaignie de nostre dit cousin, demanda congié à nostre dit cousin ou à Poncet de Rivière

Cette famille de Rivière, originaire de Gascogne, s'était fixée en Poitou par le mariage d'Odet de Rivière avec Blanche de Chanac, héritière des seigneuries de Château-Larcher et du Bourg-Archambaut. Nous avons relaté précédemment une partie des hauts faits et des brigandages de ce capitaine de routiers et de son frère Ponchon de Rivière (voy. notre tome VIII, Introduction, p. XLVI-XLVIII, et 408-410, note). Ce dernier qui prenait le titre d'écuyer d'écurie du roi et avait accompagné, en 1444, le dauphin Louis dans son expédition en Suisse et en Alsace, où il commandait les bandes gasconnes, fut tué pendant cette campagne, au siège de Saint-Hippolyte (Haut-Rhin), dans les premiers jours d'octobre, et fut enterré à Issenheim. (Tuetey, Les Ecercheurs sous Charles VII, t. I, p. 166 et 277.) Poncet de Rivière, chevalier, ici nommé, était son fils. Le 5 février 1463, Odet de Rivière et Blanche de Chanac, n'ayant pas d'enfants, firent don à celui-ci, leur neveu, de tous leurs droits sur la terre et châtellenie de Château-Larcher. (Coll. dom Fonteneau, t. LV.) Les revenus de ce domaine, que son oncle avait engagés sa vie durant, lui firent retour, quand le contrat d'échange eut été annulé par justice, comme on le verra ci-dessous, dans une note relative à Floridas Frotier (n° MCCCLXVI). Poncet de Rivière en rendit aveu au roi le 20 mars 1466 n. s., et une seconde fois, le 8 mars 1476 n. s. (Arch. nat., P. 1145, fol. 150, 152.) D'après un acte du 13 mai 1465, il était à cette date bailli de Montferrand et d'Usson (Bibl. nat., ms. fr. 26089, n° 393), et le premier compte de Jean Briçonnet, l'aîné (16 déc. 1466 au 30 septembre 1467) le qualifié conseiller et chambellan du roi. (ld., ms. fr. 20685, fol. 404 v°.) Suivant Chastelain, Poncet de Rivière fut l'un des chefs des troupes envoyées par Louis xi, au début de son règne, contre les Liégeois. (Chronique des ducs de Bourgogne, livre. VI, ch. XIV, édit. Kervyn de Lettenhove, t. IV, p. 70.) Il commandait à Montlhéry les archers de l'année royale. Un mandement du roi, daté de Saumur, le 10 avril 1465, ordonné à Antoine Raguier de payer au sr de Château-Larcherune somme de 412 livres 10 sols en 300 écus d'or pour son entretien. (Bibl. nat., ms. fr. 20496, fol. 14.) Néanmoins, peu de temps après, il quitta le service de Louis XI pour celui de Charles le Téméraire. A la suite de l'entrevue de Péronne. et à la demande du duc de Bourgogne, le roi accorda à son ancien chambellan des lettres d'abolition ; elles ne furent expédiées cependant qu'au mois d'août 1470, à Angers (JJ. 196, n°199). Le texte en sera publié dans notre recueil, à cette date, avec quelques autres renseignements sur le rôle politique de Poncet de Rivière.

Le roi cependant ne lui avait pas pardonné sincèrement, ou bien Poncet garda de la méfiance. Toujours est-il que moins d'un an après on le retrouve conseiller et chambellan de François II, duc de Bretagne, et comme tel envoyé par celui-ci, tant en son nom qu'en celui de Charles duc de Guyenne, frère du roi de France, vers le duc de Bourgogne, pour conclure un traité d'alliance contre Louis XI. (Instructions du 16 juillet 1471 ; Dupuy, Hist. de la réunion de la Bretagne à la France, t. I, p. 286.) Le registre criminel du Parlement du 4 mai 1474 contient un mandement au premier huissier ou sergent, sur ce requis, lui ordonnant, à la requête du procureur général, que, sans tenir compte des oppositions ou appel, il prenne au corps Poncet de Rivière, chevalier, maître Itier Marchant et Alexandre Lorget, qui sont chargés d'avoir voulu empoisonner le roi, et de les amener prisonniers à la Conciergerie du Palais à Paris, et, dans le cas où l'on ne pourrait se saisir de leurs personnes, de les faire ajourner à son de trompe et cri public, sous peine de bannissement. (Arch. nat., X2a 40, fol. 147.) Cependant, dans le traité conclu entre Louis XI et le duc de Bretagne à la Victoire-lès-Senlis, le 9 octobre 1475, les lettres d'abolition d'août 1470 sont rappelées et confirmées (Dom Morice, Preuves de l'hist. de Bretagne, t. III, p. 289), et le roi qui, pour le punir de ses trahisons, avait fait démolir les fortifications de Château-Larcher, lui permit de les rétablir par lettres de mars 1478 n. s. (JJ. 203, n° 73), qui seront publiées à leur date. Poncet de Rivière vivait encore le 12 juin 1487. (Commines, édit, de Mlle Dupont, t. III. p. 551.) M. l'abbé Drochon le fait mourir quelques années trop tôt et fixe son décès à l'année 1483. Dans son estimable étude intitulée : Château-Larcher et ses seigneurs, cet auteur mentionne ou publié plusieurs documents intéressants sur cette localité, du temps qu'Odet, puis Poncet de Rivière en furent seigneurs ; mais il ne paraît pas avoir soupçonné le rôle politique de ces deux personnages. (Mémoires de la Soc. des antiquaires de ['Ouest, t. XXXIX, 1875, p. 237-261.)

lieute- nant d'icelluy nostre cousin, d'aler veoir ses besongnes, lequel le luy donna jusques au mois de mars, lors prouchainement venant ; et pour ce, le second jour du mois de decembre, ledit suppliant, qui se disposoit pour s'en aler en son hostel qui est en nostre païs de Poictou, laissa au matin son pourpoint en sa chambre sur son lit; ouquel pourpoint estoit sa bourse, en laquelle avoit sept escus neufz et deux frans en monnoye, et, luy estant hors son dit logis, ung nommé Simonnet, aagié de quinze ans ou environ, qui dès longtemps avoit esté son paige, et Valentin d'Alest, son varlet, prindrent ledit pourpoint et ladicte bourse, et comptèrent ledit or et argent, et après misdrent ledit pourpoint et ladicte bourse en ung petit coffre qui estoit en la chambre dudit suppliant. Et le tiers jour dudit mois de decembre, ledit Jaques suppliant s'en voult partir pour aler faire ses besongnes à sa maison, et prist sondit pourpoint pour prendre sadicte bourse et argent, lesquelz il trouva oudit coffret ; et lors icelluy suppliant print sadicte bourse et trouva que desdiz sept escus d'or qu'il y avoit mis n'en y avoit que six et qu'il en avoit esté prins ung escu. Et incontinent ledit suppliant appella ledit Valentin, son varlet, et luy demanda qui avoit esté en sa bourse et qui avoit mis son pourpoint oudit coffre ; lequel luy dist que se avoit esté luy, et que quant il luy mist, lesdiz sept escus et quarante solz y estoient, et que luy et ledit Simonnet l'avoient compté. Et lors ledit suppliant envoya querir icelluy Simonnet qui estoit en l'estable et luy demanda son escu, et luy dist qu'il luy avoit emblé et qu'il failloit qu'il le luy eust emblé, parce qu'il avoit la clef de la chambre, et que nul autre ne l'avoit emblé que luy, et comment qu'il fust, qu'il le rendist et il ne le batroit point, ou s'il ne le rendoit qu'il luy eopperoit une oreille, et luy lya les posses et fist semblant de luy copper l'oreille. Et lors ledit paige dist audit suppliant, son maistre, qu'il le laissast aler, et qu'il l'avoit baillé à une femme de la ville, et qu'il le yroit querir et l'apporteroit ; moiennant lesquelles parolles, il laissa aler ledit Simonnet vers la femme à qui il avoit baillé ledit escu, laquelle femme luy respondi qu'elle ne savoit que s'estoit. Et en icelle heure, ledit paige s'en voult fouir, mais ledit Valentin incontinent le print et le mena audit suppliant ; lequel suppliant luy dist qu'il avoit emblé son dit escu et aussi de l'argent et des esguillettes par plusieurs foiz ; et à ceste cause ledit suppliant estant en sadicte chambre fist despouiller ledit Simonnet tout nu et le mena devant le feu qui estoit en sadicte chambre, et luy dist qu'il luy feroit brûler les nages, s'il ne luy confessoit verité, et ilec le bati d'une coupple à coupler chiens, à quoy le dit suppliant vouloit couppler ses chiens d'oiseaux pour s'en aler, et le tint longuement près du feu en le batant dudit coupplet ; et pour ce qu'il ne voult riens confesser, il luy donna ung coup du pié contre le ventre, tant que ledit Simonnet cheut contre le feu et se brula les nages et l'eschine ; mais incontinent icelluy Simonnet se leva et ledit suppliant, qui de ce fut desplaisant, luy dist qu'il se vestist, ce qu'il fist. Et après icelluy suppliant ala querir une phisicienne, qui estoit en ladicte ville de Connerré, et luy monstra ce que sondit paige avoit ; laquelle luy dist qu'il avoit grant mal, mais que au plaisir Dieu, elle le gariroit bien ; et aussi en parla à ung barbier et luy recommanda ; et bailla ledit suppliant à ladicte phisicienne de l'argent, ce qu'elle luy demanda, pour le penser, et luy dist qu'elle le pensast bien, et qu'il la contenteroit si bien qu'elle en seroit bien contente, dont elle print la charge. Et incontinent ledit suppliant qui estoit tout prest pour s'en aler en sadicte maison, qui jamais ne creust que mal ou inconvenient venist audit Simonnet, s'en party du lieu et s'en ala en sadicte maison oudit païs de Poictou faire ses besongnes. Et depuis, ledit suppliant estant à sesdictes besongnes, luy a esté rapporté que de là à trois ou quatre jours qu'il s'en estoit party dudit lieu de Connerré, ledit Simonnet estoit alé de vie à trespas. A l'occasion duquel cas ainsi advenu que dit est, ledit suppliant doubte estre en dangier de justice, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties, en nous humblement requerant que, attendu la manière comment icelluy cas est avenu que dit est, et que icelluy suppliant ne cuidoit pas que mort s'en deust ensuir, et est vraysemblable à croire que, s'il eust esté bien gouverné il ne fust pas mort, que en tous autres cas icelluy suppliant s'est bien et doulcement gouverné, sans avoir fait ou commis, ne esté attaint ou convaincu d'aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise nosdictes grace et misericorde luy impartir. Pour quoy nous, les choses dessus dictes considerées, voulant misericorde preferer à rigueur de justice, audit Jacques Le Juge (sic), suppliant, en l'onneur et reverence de la Passion Nostre Seigneur, qui à tel jour souffry mort et passion, avons ou cas dessus dit quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces presentes au....Le nom de l'officier royal auquel le mandement était adressé, est resté en blanc sur le registre. et à tous noz autres justiciers, etc. Donné aux Roches Tranchelion, ou mois de mars l'an de grace mil cccc. cinquante huit avant Pasques, et de nostre règne le xxxviie.

Ainsi signé : Par le roy tenant ses requestes, èsquelles les sires de VauvertJean de Lévis, seigneur de Vauvert, conseiller et chambellan de Charles VII. (Cf. notre vol. précédent, p. 288, note.), de ChasteaubrunCharles de Gaucourt, seigneur de Châteaubrun en Berry, fils de Raoul VI de Gaucourt et de Jeanne de Preuilly, entra au conseil de Charles vu en 1455. (De Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. VI, p. 354.) Louis XII le fit chevalier à Reims, le jour même de son sacre. Après la fuite de Charles de France, frère du roi, en Bretagne, le sr de Châteaubrun fut chargé de maintenir le Berry dans l'obéissance et de saisir les biens des partisans du fugitif. Le 27 octobre 1465, Louis XI lui céda la seigneurie de Vierzon contre l'abandon des capitaineries de Chinon, de Rouen et de Gisors, et, le 10 novembre suivant, il ajouta à ce don une pension annuelle de 4000 livres. Charles de Gaucourt mourut à Paris en 1482 et fut enterré dans l'église de Saint-Jean-en-Grève. (Le P. Anselme, t. VIII, p. 371.), maistres Georges HavartGeorges Havart, voy. ci-dessus, p. 60, note 1., Jehan Le BoulengersJean Le Boulanger, voy. ci-dessus, p. 15, note 3. et plusieurs autres estoient. A. Rolant. —Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCIII Avril 1459

Lettres portant anoblissement de Pierre Segaud, demeurant à Champdenier, et de sa postérité.

AN JJ. 188, n° 70, fol. 35 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Karolus, Dei gracia Francorum rex. Ad perpetuam rei memoriam. Decens et juri consonum arbitramur illos nobilitatibus et aliis prerogativis muniri, quos probos et fideles, ac vita laudabili, morum honestate aliisque virtutum insigniis decoratos adinvenit regia majestas. Sane, licet dilectus noster Petrus Segaud

L'anoblissement de Pierre Segaud nous fournit l'occasion de mettre en lumière deux personnalités poitevines de sa parenté, qui méritent à coup sûr d'être tirées de I'oubli, quoique leur existence se soit écoulée à peu près entièrement en dehors de leur patrie : Aimery Segaud, oncle paternel vraisemblablement de Pierre, et Jean Bretonneau, dit de Champdenier, oncle de sa femme. Le premier fut commandeur de Saint-Antoine de la Lande, non loin de Champdenier, on ne sait depuis quelle époque, mais certainement dès avant sa nomination à l'évêché de Belley, qui eut lieu au commencement de 1438. Il n'occupa pas longtemps ce siège, car dès le 28 novembre de cette même année, une bulle du pape Eugène IV le transféra à l'évêché de Mondovi en Piémont, par permutation avec Perceval de La Baume, originaire de Savoie. L'Italia sacra le qualifié ainsi qu'il suit : Aymericus Segaudus de Chevrelis, Lucionensis Gallus, ordinis Sancti Antonii et prseposilus Landensis, vir magni consilii et doctrinæ. Segaud assista au concile de Florence présidé par Eugène IV. Il s'attacha ensuite à la cause de l'antipape Félix V, duc de Savoie sous le nom d'Amédée VIII, que le concile de Bâle avait élevé sur le trône pontifical, et lui demeura fidèle jusqu'à ce que celui-ci, pour faciliter l'apaisement du schisme, eût renoncé volontairement à la tiare (1449). L'année suivante, l'évêque de Mondovi et Jacques de Valpergue furent médiateurs de la paix entre Louis Ier duc de Savoie, fils d'Amédée VIII, et François Sforza, duc de Milan. Aimery Segaud mourut chargé d'ans en 1470, et fut inhumé en l'église de Saint-Antoine-de-Viennois. (Ughelli, Italia sacra, t. IV, p. 1090 Gallia christiana, t. XV, col. 630.)

Quoique éloigné de son pays, Segaud n'avait pas renoncé à la commanderie de la Lande ; ce fut même pour sa vieillesse une cause de graves soucis et de tourments. Un compétiteur sans scrupule employa tous les moyens pour l'en déposséder. L'évêque dut soutenir, d'abord devant le sénéchal de Poitou, puis au Parlement de Paris, un long procès contre frère Pierre Faure, son adversaire, et les complices de celui-ci, et l'on ne sait comment il se termina. Les registres de la cour contiennent, entre le 1er septembre 1463 et le 1er avril 1466, les plaidoiries de cette affaire, de nombreux mandements, des arrêts interlocutoires et des appointements, des adjudications de défauts etc. ; mais on n'y trouve point l'arrêt définitif (il y a beaucoup de lacunes dans la collection des arrêts criminels). Toujours est-il que Segaud avait obtenu du sénéchal de Poitou une sentence provisionnelle portant que, pendant la durée du procès, il demeurerait en possession de Saint-Antoine de la Lande et en percevrait les fruits et revenus. Son adversaire s'étant pourvu au Parlement contre cette décision, il se vit débouté et condamné à l'amende pour fol appel. Mais au cours de son procès en appel, Pierre Faure, aidé de Mathurin Charron, Macé Bardon et Antoine Gautereau (aliàs Gauchereau), aggrava son cas, en s'emparant de force de la commanderie. Bien que Nicolas Prévost, procureur et représentant d'Aimery Segaud, leur montrât la sentence que celui-ci avait obtenue sur le possessoire et leur défendit de rien faire à son préjudice, ils dirigèrent l'attaque à la tête de vingt-cinq hommes d'armes qui rompirent la porte de l'église, au moment où l'on y chantait la grand'messe, s'y introduisirent avec Pierre Faure, qui au milieu du tumulte déclara en prendre possession ; ensuite ils pénétrèrent dans le cloître de la même façon, firent sauter Thuis de la chambre du commandeur et la mirent au pillage, emportant tout ce que bon leur sembla. Ils battirent « jusqu'à grande effusion de sang » les religieux qui étaient dans la commanderie et reconnaissaient l'autorité de Segaud, en firent sortir de force les commissaires chargés par la cour de l'administration de la communauté, et y demeurèrent en garnison pendant neuf semaines. En réparation de ces excès, Aimery Segaud demandait qu'une croix de pierre avec inscription relatant les sévices fût dressée devant la porte rompue, aux frais des coupables, qu'ils fussent condamnés à faire amende honorable, tête nue et en chemise, tenant à la main une torche de cire ardente, à restituer les biens qu'ils avaient pris, et à payer chacun deux mille livres d'amende. L'avocat de Pierre Faure et de ses complices nia tous les excès dont on les accusait, et déclara que les gens d'armes n'avaient pas été amenés par eux, qu'ils étaient logés auparavant dans le bourg de la Lande, et qu'ils n'entrèrent dans la commanderie que pour prendre les femmes que les religieux y entretenaient. Luillier répliqua pour l'évêque de Mondovi que, de l'aveu même des défendeurs, les gens de guerre avaient tenu garnison pendant neuf semaines dans la commanderie, et que par conséquent il ne pouvait s'agir de la simple opération dont ils parlaient, sans raison aucune d'ailleurs. Il requit une confrontation des coupables avec les témoins qui avaient été convoqués et dont l'on attendait incessamment l'arrivée. Les plaidoiries où sont exposés ces faits, sont du 9 février 1464 n. s. Le 1er mars suivant, on en trouve d'autres contre Guillaume Girault, substitut du procureur du roi à Parthenay, auquel Segaud reprochait d'avoir communiqué aux défendeurs les informations qu'il avait été chargé de faire contre eux, à sa requête.

Cependant Pierre Faure, qui se vantait de lasser la patience de son adversaire, avait saisi la curie romaine de sa réclamation. Le Parlement informé lui interdit de ne rien entreprendre au préjudice de l'appel pendant devant la cour. Malgré toutes les défenses, il se transporta à Rome, y fit citer Segaud et s'ingénia à l'accabler de vexations; entre autres il fit afficher sur les portes de la commanderie que l'évêque de Mondovi était excommunié. Faure ayant ainsi enfreint l'ordonnance royale interdisant à tous les ecclésiastiques de se rendre à Rome sans permission et d'y porter de l'argent pour obtenir des bulles de grâces expectatives, la cour, le 22 février 1465 n. s., adressa un mandement au bailli de Touraine, au sénéchal de Poitou, au conservateur des privilèges de l'Université de Poitiers et aux prévôts de Tours et de Poitiers, leur enjoignant de rechercher, saisir et mettre entre ses mains toutes les bulles, citations, monitions et censures obtenues ainsi à prix d'argent par ledit Faure et par l'intermédiaire de son oncle, Mathurin Faure, qui s'était fixé à Rome dans ce but, et de faire une enquête approfondie sur leur façon de procéder et sur leurs agissements, faisant en attendant défense expresse à Pierre Faure de faire usage desdites bulles. Celui-ci néanmoins les avait présentées à Guillaume Peyrochon, prieur du Bois-d'Alonne, qui n'hésita pas à les mettre ou à s'efforcer de les mettre à exécution, se rendant coupable de désobéissance et de rébellion. Le Parlement fît saisir le temporel du prieuré et ordonna à Peyrochon de comparaître en personne, par acte du 3 juillet 1465. Cependant les procédures continuaient contre Pierre Faure, qui se gardait bien de se rendre aux assignation. Le 10 juin de cette même année, il fut mis en défaut pour la cinquième fois au profit de Segaud, et ajourné-une fois de plus, sans pour cela cesser un instant de poursuivre son adversaire en cour de Rome. Etant parvenu, grâce à l'abbé de Fontaine-le-Comte, à mettre dans ses intérêts le cardinal d'Avignon, Alain de Coëtivy, il avait réussi à en obtenir la mise sous séquestre de la commanderie de la Lande. C'est un bien curieux exemple des conflits entre les juridictions royales et la curie romaine, en matière bénéficiale, qui furent si fréquents dans la seconde moitié du XVe siècle. Le Parlement adressa, le 1er avril 1466, un dernier mandement au sénéchal de Poitou, au bailli de Touraine et aux prévôts de Poitiers et de Tours, leur ordonnant de prendre au corps et d'amener à la Conciergerie Pierre Faure et Guillaume Peyrochon, et, s'ils ne pouvaient être trouvés, de les ajourner, à son de trompe et cri public en tous les lieux où ils avaient commis leurs excès et désobéissance, à comparaître en personne devant la cour, sous peine de bannissement du royaume et de confiscation, et d'être convaincus de toutes les rébellions dont ils étaient chargés, et en attendant de procéder à la saisie de tous leurs biens. (Voir Arch. nat., X1a 30, fol. 278 v°, 283, 354 v° ; X2* 31, fol. 23 v° ; X2a 32, aux dates des 20 décembre 1463, 7, 9 et 27 février, 1er et 5 mars, 10 et 26 avril et 2 juillet 1464 ; X2a 34, fol. 107 v°, 113 v°, 116 v° et 189 v°.)

, de patria nostra Pictavie oriunclus et ad presens in loco de Champdenier in dicta patria commorans, libere condicionis et de legitimo matrimonio ex innobilibus parentibus traxerit vel sumpserit originem, verumptamen vita laudabilis, morum honestas, vera eciam erga nos ipsius fidelitas et alie virtutes quibus persona ejus insignitum, ipsum nobilem in actibus reddunt et nos inducunt ut erga eum reddamus ad gratiam liberales. Notum igitur facimus universis, presentibus et futuris, quod, premissorum consideracione, necnon eciam in favorem sincere dilecti nostri fratris Johannis BretonneauJean Bretonneau, que l'on trouve désigné aussi sous le nom de Jean de Champdeniers, est simplement mentionné dans la liste des commandeurs d'Isenheim ou Issenheim: « Johannes Bertonnelli, Pictavus, 1446 ». (Alsatia sacra par Grandidier, publ. par le P. lngold, 3 vol. in-8°, 1899, t. Il, p. 391.) Il entra en relations, deux ans avant cette date, avec le dauphin Louis, lors de l'expédition que ce prince dirigea en Suisse et en Allemagne, à la tête des routiers dont il voulait débarrasser le royaume, pour venir en aide au duc Sigismond d'Autriche. M. Tuetey a publié une lettre missive et deux très précieuses relations des événements qui s'accomplirent à cette époque, adressées aux bourgeois de Strasbourg par le commandeur de Saint-Antoine-de-Viennois d'Issenheim. Elles sont datées du 19 août, du 5 septembre et de novembre 1444, et contiennent des renseignements tellement précis sur les causes et les conséquences de l'expédition qu'il ne peut y avoir de doute sur la source et la sûreté de ses informations. (Les Ecorcheurs sous Charles VII, 1.1, p. 137 et suiv. ; t. II, p. 509 et suiv.) On sait d'ailleurs que Jean Bretonneau était le représentant accrédité du duc Sigismond. Le roi l'employa, douze ans plus tard, dans les négociations de l'alliance avec Ladislas, roi de Hongrie. « Au moment même où Tambassadeur du roi de Hongrie arrivait à Lyon, dit M. de Beaucourt, Charles VII mandait auprès de lui Jean de Champdeniers, commandeur d'Issenheim, qui résidait en Allemagne où il représentait le duc d'Autriche ; il l'interrogea secrètement sur la situation de Ladislas, l'étendue de ses Etats, les ressources dont il disposait. Peu de jours après (septembre 1457), rendant compte de son voyage au duc Sigismond, le commandeur lui faisait part des dispositions favorables à l'alliance qu'il avait rencontrées chez le roi et les seigneurs de sa cour. » L'année suivante, Charles VII ayant résolu d'intervenir comme médiateur entre l'empereur Frédéric III, son frère Albert et son cousin Sigismond, il donna mission à Jean, seigneur de Fénestrange, maréchal de Lorraine, et à Jean de Champdeniers, commandeur d'Issenheim, de se rendre en Allemagne et d'y parler à Frédéric et à Albert en faveur de Sigismond, dont les droits étaient méconnus. Ils étaient chargés aussi de régler d'autres questions importantes. Un rapport détaillé de Bretonneau sur la situation de l'Empire, adressé au dauphin, le 8 juin 1458 (Bibl. nat., ms. fr. 15537, fol. 165), donne à cet égard les plus curieux détails. Il préconisait la réconciliation du dauphin avec son père. (Hist. de Charles VII, par M. de Beaucourt, t. VI, p. 161, 199-202.), preceptoris preceptorie de Ysenhem, ordinis Sancti Anthonii, avunculi Marguerite, uxoris dicti Petri de Segaud, eumdem Petrum et ejus posteritatem et prolem, masculinam et femininam, in legitimo matrimonio natam et nascituram, nobilitavimus etdegracia speciali, ex nostra certa scientia, plena potestate et auctoritate regia nobilitamus per presentes et nobiles facimus et creamus, expresse concedentes ut ipse Petrus Segaud et ejus posteritas, nata et nascitura predicta, in omnibus suis actibus, in judicio et extra, ab omnibus pro nobilibus habeantur et reputentur ; et habiles reddimus ut ipsi universis et singulis privilegiis, libertatibus et aliis juribus quibus ceteri nobiles regni nostri, ex nobili genere procreati, uti consueverunt, utantur, gaudeant pacifice et fruantur ; ipsum Petrum et ejus posteritatem predictam aliorum nobilium, ex nobili prosapia seu stipite procreatorum, numero et cetui aggregantes, licet ipse Petrus ex nobili genere ortum non habuerit vel sumpserit originem, ut predictum est. Volentes insuper et concedentes ut idem Petrus et ejus proles, nata et nascitura, dum et quociens eisdem placuerit, a quocumque milite cingulum milicie valeant adhipisci, et feoda ac res nobiles a nobilibus et quibuscunque aliis acquirere et jam acquisitas ac eciam acquirendas retinere et possidere perpetuo, absque eo quod ea vel eas nunc vel futuro tempore, ignobilitatis occasione extra manum suam ponere vel alienare cogantur ; solvendo tamen nobis una vice dumtaxat financiam moderatam. Quocirca dilectis et fidelibus nostris gentibus compotorum nostrorum et thesaurariis, senescallo Pictavie ceterisque justiciariis et officiariis nostris, vel eorum locatenentibus, presentibus et futuris, et ipsorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, damus in mandatis quatinus nostris presentibus gracia et nobilitacione dictum Petrum Segaud et ejus posteros utriusque sexus, de legitimo matrimonio procreatos ac procreandos, uti et gaudere plenarie et pacifice faciant et permittant, omni impedimento cessante penitus et amoto. Quod ut firmum, etc. Nostro in aliis et alieno, etc. Datum in castro de Ruppis Trenchelion in Turonia, in mense aprilis anno Domini millesimo cccc° lix°, et regni nostri tricesimo septimo. Sic signatum : Per regem, domino de Montilio, Johanne

Hardoin, magistris Stephano MilitisSur Jean Hardouin, trésorier de France, et Etienne Chevalier, maître des comptes, contrôleur des finances, etc., voir notre précédent volume, p. 177, note, et 334, note, et ci-dessous, n° MCCCXXXIX. et Petro DoriolePierre Doriole, chevalier, seigneur de Loiré en Aunis, originaire de la Rochelle, général des finances, maire de la Rochelle, conseiller maître à la Chambre des comptes de Paris, nommé chancelier de France le 26 juin 1472, destitué en mai 1483 et pourvu, le 23 septembre suivant, de la première présidence de la Chambre des comptes, décédé le 14 septembre 1485. ac aliis presentibus. J. de La Loère. —Visa. Contentor. J.

Chaligaut.

MCCCIV Avril 1459

Rémission accordée à Jean Dousset, sergent du roi à Poitiers, qui avait frappé mortellement Jean Michau, franc-archer, parce que celui-ci s'opposait par la force à l'accomplissement d'un exploit de justice dont l'exécution était confiée audit Dousset, contre l'abbaye de la Colombe.

AN JJ. 188, n° 62, fol. 31 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de Jehan Dousset

Jean Dousset, aliàs Doucet, exerçait encore les mêmes fonctions de sergent du roi à Poitiers l'an 1467, comme on le voit par deux mandements du Parlement, l'un du 4, l'autre du 16 mars de cette année. Ayant fait, en vertu de son office, divers exploits et exécutions contre l'official et autres officiers de l'évêque de Poitiers, il avait encouru leurs rancunes et subi leurs vexations. Ainsi, le jour de Pâques 1466, Dousset assistant à la messe à Saint-Germain, sa paroisse, le curé refusa publiquement de lui donner la communion et déclara qu'il ne l'y admettrait que s'il en avait congé des officiers de l'évêque. Dousset se rendit alors, avec Yves Simon, chanoine de l'église cathédrale, en l'hôtel épiscopal, où ils trouvèrent Michel Groleau, Jean Tapault et Jean Petit, qui reconnurent hautement avoir interdit de le recevoir à la communion, parce qu'il était excommunié, ayant commis un sacrilège en saisissant en pleine église les bulles de messire Jean Pelaud. Dousset leur ayant remontré qu'il n'avait agi que par ordre de la cour, il lui fut répondu que la cour avait gravement manqué à ses devoirs en donnant cet ordre, et lui en l'exécutant. Les officiers de l'évêque s'étaient en outre vantés de le faire inhumer en terre profane, s'il venait à mourir. On approchait de Pâques, et Dousset, redoutant la répétition delà même scène scandaleuse, avait adressé requête à la cour afin quelle fît défense à ses persécuteurs de recommencer. Le mandement du 4 mars ordonné au sénéchal de Poitou et aux enquêteurs audit pays de faire information sur ce fait et de renvoyer close et scellée a Paris. Celui du 16 mars prescrit aux mêmes :1° de faire défense à l'official, à Michel Groleau et à Me Jean Petit et autres de ne rien entreprendre ou innover au préjudice du procès pendant au Parlement, au sujet desdites exécutions ; 2° de s'enquérir des graves excès dont ils s'étaient rendus coupables à l'égard dudit Dousset. (Arch. nat., X2a 34, fol. 301 v°, 302.)

, nostre sergent, demourant rant en nostre ville de Poictiers, contenant que certain procès en matière de nouvelleté fut ja pieça meu et intenté pardevant vousIl s'agit sans doute du sénéchal de Poitou, à qui les lettres sont adressées., à Poictiers, entre deux parties contendans l'abbaye de la Coulumpne

L'abbaye de la Colombe (Columpna, puis Colomba), commune de Tilly, canton de Belâbre (Indre), était (fille de Preuilly en Brie, de l'ordre de Cîteaux, et avait été fondée, en 1146, dans les domaines du vicomte de Brosse. Anciennement du diocèse de Bourges, puis de celui de Limoges, elle faisait partie de la sénéchaussée de Poitou. Ses principaux bienfaiteurs furent les seigneurs de La Trémoïlle, par lesquels elle fut restaurée et très largement dotée, et qui avaient leur sépulture dans une chapelle de l'église, dite des La Trémoïlle. La liste des abbés qui se trouve dans le Gallia christiana donne simplement pour cette époque : « Petrus II, 1454 et 1455 ; Philippus II de Lapha, ab anno 1456 ad 1489», sans rien de plus. (Tome II, col. 640.) Les deux personnages qui se disputaient la possession de l'abbaye de la Colombe et qui avaient interjeté appel du sénéchal de Poitou au Parlement, comme il est dit ici, étaient, d'une part, Jean Brachet, licencié en décret, protonotaire du Saint-Siège, appelant, et d'autre part, Philippe de La Fa. Le premier prétendait que Pierre Troillon, précédent abbé de la Colombe, avait occupé ce siège pacifiquement pendant dix ans, puis l'avait résigné entre les mains du légat du Saint-Siège, à son profit, et que le légat la lui avait baillée en commende, qu'il en avait pris possession à ce titre, et en avait joui longtemps. La Fa ayant entrepris de le troubler dans sa légitime possession, Brachet, en qualité d'étudiant en l'Université d'Orléans, avait obtenu des lettres ordonnant que le litige serait soumis au conservateur des privilèges de ladite Université. Néanmoins Philippe de La Fa le fit assigner devant le sénéchal de Poitou, et sous ce prétexte Jean Audoyn, sergent royal, voulut mettre l'abbaye en la main du roi, exécution dont ledit Brachet releva appel. Puis celui-ci avait obtenu du roi des lettres en vertu desquelles le garde du sceau royal à Limoges, après constat de la possession exercée par ledit Brachet, avait fait surseoir à l'exécution et attribué à celui-ci la jouissance de l'abbaye. Son adversaire n'avait point appelé de cette décision. Toutefois Jean Vaillant, autre sergent, vint à son tour pour mettre l'abbaye sous séquestre, et Brachet interjeta de nouveau appel de cet exploit.

Philippe de La Fa, de son côté, disait que Pierre Troillon, en raison de certains grands crimes et délits par lui commis, avait été cité pardevant l'abbé de Citeaux, son chef d'ordre, à qui la connaissance et la correction desdits faits appartenaient. Déclaré coupable, il fut dépouillé de sa dignité abbatiale et condamné à l'amende. L'abbaye étant ainsi vacante, le père abbé de Cîteaux en pourvut La Fa, du consentement du convent de l'abbaye et du chapitre général de tout l'ordre. Le légat, tenu dans l'ignorance de ce qui s'était passé, donna en effet l'abbaye de la Colombe en commende à Brachet, mais contre tout droit. Celui-ci, pour en prendre possession, la fit assiéger par trois cents hommes armés, et il contraignit par la violence les moines à lui en ouvrir les portes. Une fois dans la place, il y prit et emporta tout ce qu'il voulut. C'est pourquoi La Fa l'avait fait assigner devant le sénéchal de Poitou. Depuis, les deux prétendants avaient décidé de s'en remettre à certains arbitres et de terminer leur débat à l'amiable. Mais Brachet refusant de sortir de l'abbaye, comme il le devait, en attendant la sentence, La Fa s'était fait délivrer des lettres en vertu desquelles Audoyn d'abord, puis Vaillant, avaient saisi l'abbaye au nom du roi, nommé des commissaires pour en administrer les revenus, et fait défenses aux parties de se pourvoir ailleurs que devant le sénéchal de Poitou. Pendant ce temps, Brachet restait toujours à la Colombe avec ses hommes de guerre, et, avec son principal complice, nommé Huguet Ambasmare, il s'y livra à divers autres excès sur lesquels une enquête fut ordonnée. C'est alors que des arrestations furent prescrites et que se produisit le . meurtre, pour lequel Jean Dousset obtint la présente rémission. Brachet et Ambasmare furent ajournés l'un et l'autre au Parlement, pour répondre de ces faits criminels. Par arrêt du 9 juin 1459, la cour déclara Jean Brachet mal fondé en sa cause d'appel, approuva les exécutions des deux sergents et, en conséquence, enjoignit à l'appelant d'évacuer les lieux et de les rétablir en l'état où ils étaient, quand il s'en était emparé. De plus et en attendant la fin du procès, elle commit Philippe de La Fa au gouvernement de l'abbaye, moyennant qu'il rendrait compte à justice de son administration. Elle renvoya les parties devant le sénéchal, au siège de Poitiers, leur donnant jour au 15 juillet suivant, pour juger de la cause de nouvelleté et des excès commis par Brachet et ses complices, et condamnant ceux-ci aux dépens de l'appel. (Arch. nat.,X1a 88, fol. 63, et X1a 1484, fol. 52 v°.) L'affaire n'était pas terminée en mars 1460. A cette date, Brachet fut de nouveau condamné aux dépens par la cour sur un point de procédure (X1a 1484, fol. 101 v°). Finalement Philippe de La Fa demeura en possession de l'abbaye de la Colombe, à la tête de laquelle il était encore en 1489, comme le dit la Gallia christiana.

, assise en nostre dit païs de Poictou, lequel procès par appel a esté devolu en nostre court de Parlement et encores y est pendant, et pour ce que l'un desdiz contendans tenoit gens de guerre en ladicte abbaye, qui est ung peu fortiffiée, pour empescher que ladicte abbaye et fruiz d'icelle ne feussent sequestrezet mis en nostre main, par le moien du fournissement de complaintes l'autre contendant obtint plusieurs lettres à vous addreçans et au prevost de Poictiers, par lesquelles vous estoit mandé, et aussi audit prevost et à chascun de vous, fournir ladicte complainte et mettre ladicte abbaye en nostre main, nonobstant opposicions et appellacions quelconques, et en ce faire par manière que feussions entie- rement obey, et des rebelles et desobeissans prendre au corps jusques à certain nombre et les mener prisonniers, soubz seure garde, en nostre dicte court de Parlement, comme tout ce et autres choses l'en dit plus à plain apparoir par nosdictes lettres. Pour lesquelles mettre à execucion, nostredit prevost, acompaigné dudit suppliant et autres noz sergens, se transportèrent ou mois d'octobre derrenier passé audit lieu de la Coulumpne et trouvèrent par informacion qu'il y avoit en ladicte abbaye plusieurs gens de guerre, tant de noz frans archiers que autres, et qu'ilz ne obeyroient point à nosdictes lettres ; mais ce non obstant ledit prevost, acompaigné des dessusdiz, se transporta par devant ladicte abbaye, et par vertu desdictes lettres fist commandement de par nous ausdiz gens de guerre qu'ilz obeissent et meissent ladicte abbaye en nostre main, selon la teneur de nosdictes lettres, dont ilz ne vouldrent riens faire. Et à ceste cause et moyennant l'informacion sur ce faicte, ledit prevost, en executant nosdictes lettres, delibera en prendre ou faire prendre au corps jusques au nombre qui luy estoit mandé par icelles. Et pour ce que ledit suppliant advisa ung compaignon franc archier, nommé Jehan Michau, qui avoit une arbaleste et estoit yssu hors ladicte abbaye et se tenoit aux foussez et douhes d'icelle, en monstrant qu'il se vouloit deffendre, ledit suppliant se addreça à luy et mist les mains en luy de par nous, en disant qu'il le feroit nostre prisonnier, et tantost ledit franc archier tira ung grant cousteau qu'il avoit, duquel il frappa ledit suppliant sur la main dextre, tellement qu'il luy eoppa presque tout le bras et luy fist une playe ou deux, parle moien de laquelle il est perdus dudit bras à jamais. Et lors ledit suppliant, voyant que ledit franc archier s'efforçoit de le tuer, qui fut chault et esmeu, volant garder nostre auctorité, à la main senestre tira sa dague et d'icelle frappa ledit Michau, franc archier, par les joues et luy fist seulement une playe, par le moien de laquelle ou autrement, par mauvais gouvernement, on veult dire que ledit Jehan Michau, franc archier, ala de vie à trespassement. Et doubte ledit suppliant que à ceste cause on voulsist proceder contre luy à la prinse de sa personne, et que nostre procureur et la vefve dudit feu Jehan Michau l'en vueillent mettre en procès et tendre à pugnicion corporelle ou autres grosses amendes, et à privacion de son office, qui de raison ne se devroit faire, attendu le cas ainsi advenu ; et pour ce nous a humblement fait supplier et requerir que, attendu ce que dit est, que ce qu'il a fait a esté en officiant, que ledit Jehan Michau ne devoit desobeir, qu il fut agresseur, par quoy de raison estoit leu (sic) et permis audit suppliant de soy deffendre, qu'il ne l'a pas fait par malveillance ne d'aguet apensé, mais par chaleur et en soy deffendant, nous luy vueillons sur ce pourveoir de noz grace et misericorde. Pour quoy nous, etc., audit Jehan Dousset ou cas dessusdit avons quicté, remis et pardonné, etc., satisfacion faicte à partie civilement tant seulement, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou mois d'avril l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Daniel. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCV Mai 1459

Rémission accordée à Lucas et Pierre Rateau et à leurs femmes, coupables du meurtre de Pierre Baron, lequel, à la suite de discussions d'intérêt qu'ils avaient eues ensemble, les avait provoqués et injuriés et s'était livré à des voies de fait contre la femme de Lucas Rateau.

AN JJ. 188, n° 76, fol. 36 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Lucas Rateau et Ysabeau Romaige, sa femme, et Pierre Rateau, povres gens de labour, chargiez de petiz enfans, contenant que feuz Guillaume Romaige et Huguete Andrie, père et mère de ladicte Ysabeau et de Pernelle, sa seur, femme dudit Pierre, furent conjoinctz par mariage, pendant et durant lequel ledit feu Romaige ala de vie à trespassement, survivant à luy ladicte Huguete ; laquelle aucun temps après convola à secondes nopces avecques Pierre Baron, du païs de Xaintonge. Depuis la consummacion duquel mariage, plusieurs debatz, questions et controuverses se sont meues entre lesdiz supplians, d'une part, et ledit Baron, d'autre, pour raison des partaiges et divisions des biens meubles et immeubles demourez du décès dudit feu Romaige, en quoy ledit Baron, qui estoit homme de perverse condicion, impetueux et plain de sa voulenté, a par diverses foiz desnyé ausdiz supplians leurs droiz èsdiz biens, et en ce faisant, leur a donné plusieurs grans menaces, disant qu'il les tueroit et qu'ilz ne mourroient jamais d'autres mains que des siennes. A l'occasion desquelles menasses, iceulx supplians, doubtans sa fureur, en ont esté souventes foiz espoventez, tellement qu'ilz en ont fouy et delaissié sa compaignie. Paravant ou pendant lesquelz debatz et questions, iceulx supplians prindrent à service, pour garder leur bestail, Jehan Romaige, aagié de douze ans ou environ, frère desdictes femmes, seurs. Pour lequel service icelluy Baron, le septiesme jour de ce present mois d'avrilSic, bien que la rémission soit datée de mai. La supplique, dont les termes sont évidemment reproduits dans ce texte, avait sans doute été présentée au mois d'avril., vint devers lesdiz supplians et tout impetueusement leur demanda le salaire dudit Jehan Romaige ; sur quoy iceulx supplians et Baron eurent plusieurs grosses parolles et injurieuses l'un contre l'autre, tellement que ledit Baron qui, comme dit est, estoit tout esmeu et hors de bon propos, tira ung cousteau neuf qu'il avoit pendu à sa sainture, et le print en l'une de ses mains et en l'autre une pierre, et jura la couronne de Dieu qu'il les tueroit tous quatre tous platz, et qu'ilz ne mourroient d'autres mains que des siennes; et non content de ce, perseverant en sa malice, appella ladicte Ysabeau paillarde et luy dist, en la presence de sondit mary, plusieurs autres injures et villennies qui grandement touchoient l'onneur et estat de sa personne et de sondit mary ; de quoy ladicte Ysabeau qui d'icelles se sentoit pure et innocent, le desmenty seulement, en hayne de quoy ledit Baron gecta ladicte pierre, qu'il tenoit en l'une de ses mains, contre ladicte Ysabeau, tellement que, s'elle n'eust obvié audit coup, il l'eust grandement endommaigié en sa personne. Et lors ledit Lucas, mary d'elle, desplaisant desdictes injures que ledit Baron avoit dictes et proferées à sadicte femme, et que ce néanmoins il l'avoit voulu frapper, luy dist qu'il s'en alast de ladicte place et il feroit que saige. Mais ce non obstant ledit Baron insista tousjours de vouloir tuer lesdiz supplians, en jurant derechef la couronne Dieu qu'il les tueroit tous quatre, et les poursuivant pour ce faire, ledit cousteau en sadicte main. Laquelle Pernelle, veant sa fureur et son obstinacion en sa malice et mauvais propos, doubtant que inconvenient n'en avenist ausdiz supplians ou à aucuns d'eulx, bailla audit Pierre Rateau, son mary, ung baston de la grosseur d'un pal de charrette ou environ, disant à sondit mary qu'il se deffendist, ou autrement il estoit mort ; lequel Pierre à ceste cause desplaisant et comme de chaulde colle, sans y penser, print ledit baston et en donna ung seul coup sur le col dudit Baron, du costé senestre. Après lequel coup icelluy Baron s'adreça contre ledit Lucas et le voult derechief blecer dudit cousteau qu'il avoit ; et lors ledit Lucas, voyant tousjours qu'il continuoit en sa malice, le frappa par la poictrine d'un baston qu'il tenoit, tellement qu'il tumba à terre, et après qu'il fut tumbé, lesdictes femmes, doubtans qu'il se relevast et leur portast dommaige, le frappèrent sur les jambes quatre ou cinq coups de bastons, et ce fait, lesdiz supplians le laissèrent en la place et s'en alèrent. Et après ledit Baron fut emmené en sa maison par sa femme et une sienne fille, et six jours après ou environ, à l'occasion desdiz coups, il est alé de vie à trespassement. A l'occasion duquel cas, iceulx supplians, doubtans rigueur de justice, se sont absentez du païs et n'y oseroient jamais retourner, converser ne repairer, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, comme ilz dient, humblement requerans que, attendu ce que dit est, que ledit deffunct fut agresseur, etc., il nous plaise leur impartir icelles. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, ausdiz supplians ou cas dessus dit avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, etc. Donné à Chinon, ou mois de may l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. J. de Puigirault. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCVI Mai 1459

Lettres permettant à Jean de Montournois, chevalier, de continuer et d'achever les fortifications qu'il a commencé de faire faire à la place de Puymorin, dont il est seigneur.

AN JJ. J88, n° 108. fol. 54 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de nostre amé et feal chevalier, Jehan de Montornoys, seigneur de Puymorin

La seigneurie de Puymorin, qui appartenait déjà aux Montournois au XIVe siècle, resta en possession de cette famille jusqu'au commencement du xvie siècle. Le 17 mars 1381 n. s., Guy de La Rochefoucauld, évêque de Luçon, confirma la fondation d'une chapelle faite par feu Terry de Mon tournois et l'augmentation des revenus de cette chapelle par Pierre de Montournois, écuyer, seigneur de Puymorin et principal héritier dudit Terry. (Coll, dom Fonteneau, t. VIII, p. 159, copie d'un acte conservé au château de la Flocelière.) Jean de Montournois, fils ou petitfils de Pierre, était poursuivi, en 1448, aux grandes assises de la châtellenie de Bressuire par le procureur du seigneur du lieu, «pour avoir fait édifier fortillesse audit lieu de Puymorin, sans congé de la cour ». Puis, en 4451, l'enquêteur désigné pour instruire cette affaire ayant rapporté qu'il n'y avait audit lieu ni forteresse ni trace de fortification, Jean fut mis hors de cause. (Arch. des Deux-Sèvres, chartrier de Saint-Loup, E. 1700, fol. 40 et 260.) Dans l'intervalle, en 1449, Jean de Montournois était en procès devant la même juridiction, qui lui fit commandement de remettre aux mains du sergent de la cour, avec les charges et informations qu'il pouvait avoir réunies contre lui, un nommé Guillaume Giraut, qu'il détenait depuis longtemps dans la prison de son autre seigneurie de Saint-Marsault, sans le vouloir entendre ni juger, lui faisant excès et violence, et sans tenir compte de l'appel dudit Giraut à la cour de Bressuire. (Id. ibid., fol. 112.) C'est en 1453 que le seigneur de Bressuire accorda à Jean de Montournois, chevalier, en récompenses de ses bons et loyaux services, le droit de forteresse en son hôtel de Puymorin. Par le même acte, il lui cédait en outre les droits de guet, garde et réparations qu'il possédait sur les hommes de ladite seigneurie, ainsi que des droits de criée, de sceau à contrats et de création de notaires, réservé au suzerain son droit de châtellenie, baronnie et juridiction souveraine, moyennant quoi ledit chevalier et ses successeurs, pour tout devoir et droit de rachat, devaient payer au seigneur de Bressuire un épervier garni de gets et de longes de soie et de deux sonnettes d'argent doré, plus la somme de cent sols tournois pour le droit de guet et garde. (Chartrier de Saint-Loup, E. 1478.) Sous la même cote on conserve l'acte de foi et hommage fait au sr de Bressuire par Jean de Montournois, pour le droit de fortification et les autres droits qui lui avaient été concédés à Puymorin (1453) ; un aveu rendu en 1495 par Mathurin de Montournois pour les châtel, murailles, Créneaux. tours, guette, canonnières, arbaletrières, fossés, pont-levis, etc., et deux autres aveux semblables émanant de Jean de La Forest, écuyer, en 1511, et par Louis de Souvigné, écuyer, en 1529. (Id., E. 1478.) Citons encore un acte donné par Louis de Beaumont, chevalier, seigneur du Plessis-Macé et de la Forêt-sur-Sèvre, chambellan du roi, sénéchal de Poitou, en date du 25 juin 1459, ordonnant l'entérinement des lettres royaux obtenues par Jean de Montournois, chevalier, pour faire ériger la terre de Puymorin en châtellenie. (Coll. dom Fonteneau, t. VIII, p. 205, acte provenant du château de la Flocelière.)

en la chastellenie de Bersuyre, contenant que, aucun temps ença, pour obvier aux inconveniens de guerre et entreprinses des mauvaises gens, et pour se tenir en seurté, luy et ses subgetz dudit lieu de Puymorin, il a fait faire certaine fortifficacion et emparement en sadicte place et forteresse dudit Puymorin, du congié, vouloir et consentement du seigneur dudit lieu de BersuyreJacques de Beaumont, chevalier, seigneur de Bressuire, Lezay, la Mothe-Saint-Héraye, la Haye en Touraine, etc., était le fils d'André de Beaumont, décapité à Poitiers le 8 mai 4431, et de Jeanne de Torsay. Placé, après la mort tragique de son père, sous la tutelle de son aïeul, Guy ou Guyard de Bressuire, il succéda à celui-ci comme seigneur de Bressuire, en 1440, à peine âgé de vingt ans. Louis XI, qui se l'était attaché, étant dauphin, le nomma son chambellan par lettres de décembre 1461, et le traita constamment comme l'un de ses principaux confidents. Jacques de Beaumont joua un rôle important et souvent odieux sous ce règne ; il sut néanmoins conserver la faveur de la régente Anne de Beaujeu et du roi Charles VIII. Il devint sénéchal de Poitou en 1489, en remplacement d'Yvon du Fou, et décéda, le 15 avril 1492, au château de la Mothe-Saint-Héraye, que Charles vin avait érigé en baronnie. (Voir B. Ledain, Histoire de Bressuire.) duquel est ladicte place de Puymorin tenue, et luy a donné pour la garde et seureté d'icelle droit de guet sur ses subgetz de sadicte terre de Puymorin, lesquelz d'ancienneté l'estoient tenuz de faire audit lieu de Bersuyre; et laquelle fortifficacion et emparement ainsi encommencez, ledit suppliant, pour obvier ausdiz inconveniens et afin qu'il se puisse doresenavant plus seurement tenir et demourer et sesdiz subgetz retraire en sondit hostel et place de Puymorin, il feroit voulentiers parachever et de tout point emparer sadicte place ; mais il doubte que à ce faire on luy voulsist mettre aucun empeschement, s'il n'avoit de nous prealablement sur ce noz congié et licence, si comme il dit, en nous humblement requerant qu'il nous plaise ladicte fortifficacion par luy encommencée avoir pour agreable et luy octroyer nosdiz congié et licence d'icelle parachever. Pour quoy nous, eue consideracion aux choses dessus dictes et aux grans services à nous faiz par ledit suppliant, ses frères, enfans et nepveuz, tant aux conquestes de Normandie et de Guienne que paravant, ladicte fortifficacion et emparement encommencez en ladicte place ele Puymorin par ledit suppliant, dudit consentement, congié et licence dudit seigneur de Bersuyre, avons eu et avons pour agreable et à icelluy suppliant avons donné et octroyé, donnons et octroyons de grace especial, par ces presentes, congié et licence de parachever ledit ediffice et fortifficacion de tours, machecos (sic), pons leveys et de toutes autres choses prouffitables et neccessaires ès fortifficacions, acoustumées à fortifficacion de placés et qu'il verra bon et convenable pour la seureté de luy, sondit hostel et place. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d'eulx, si comme à luy appartendra, que se, appellé nostre procureur et autres qui feront à appeller, il leur appert ladicte fortifficacion n'estre dommaigable à nous et à la chose publique dudit païs, ilz facent, seuffrent et laissent ledit suppliant joir el user plainement et paisiblement de noz presens grace, congié, licence et octroy, sans luy faire, mettre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné, ores ne pour le temps avenir, aucun destourbier ou empeschement au contraire, pourveu que ce ne porte dommaige ou prejudice, comme dit est, à nous ne à la chose publicque du païs, et que ledit seigneur feodal dudit lieu se soit à ce consenti ou consente, non obstant ladicte fortifficacion [sic), et aussi que ledit suppliant garde ou face garder icelle place bien et seurement, en manière que aucun inconvenient n'en adviengne à nous et à noz subgetz du païs d'environ. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Razilly, ou mois de may l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviie.

Ainsi signé : Par le roy, maistre Estienne Le FèvreSur Etienne Le Fèvre, cf. ci-dessus, p. 15, note 2., Denis Dausserre

Denis d'Ausseure, licencié en lois, conseiller du roi et du comte du Maine, était fils d'Etienne d'Ausseure, bourgeois et échevin de Poitiers, et de Catherine de Beaupuy (vol. précédent, p. 332, note). Dans un acte du 13 janvier 1447, il est qualifié de seigneur des Roches, et fut maire de Poitiers en 1449-1450. On conserve aux archives municipales de cette ville (J. 1081) un compte des dépenses faites pendant sa mairie pour réparations aux ponts et portes de la ville, pour l'achèvement des grandes écoles, etc. M. de Beaucourt dit que Denis d'Ausseure entra au conseil du roi en 1456 ; cependant il souscrivit dès les derniers mois de 1452 des lettres de grande chancellerie, pendant le séjour que Charles vu fit alors en Poitou, notamment au château de la Villedieu ; il était à cette époque l'un des commissaires chargés d'instruire le procès de Jacques Cœur. (Hist. de Charles VII, t. V, p. 77, 109 et suiv. ; t. VI, p. 354.) Sous Louis XI, il fut maintenu comme membre du grand conseil ; on a une lettre signée de lui, adressée à ce roi, de Poitiers, le 8 janvier (sans millésime), dans laquelle il s'excuse de ne pouvoir se rendre auprès de lui, en raison de son état de santé. (Bibl. nat., ms. fr. 20485, fol. 113.) Denis d'Ausseure mourut vers la fin de 1466. C'est lui, et non son fils, comme le prétend le Dict. des familles du Poitou (nouv, édit., t. I, p. 185), qui avait épousé Marguerite Poussard. Celle-ci, en qualité de tutrice de leurs enfants, rendit divers aveux au roi le 8 janvier 1467 n. s. Dans cet acte, elle avoue tenir l'hébergement des « Forges-Aufrain, au dedans des douhes anciennes » (à Poitiers), à hommage-lige au devoir d'un homme de pied armé pour les guerres du roi pendant quarante jours, quand les hommes féodaux de la châtellenie de Poitiers s'y doivent rendre. Elle donne en outre le dénombrement de ce qu'elle est tenue de fournir pour la serrurerie des huis et portes de la grande Salle du roi à Poitiers. (Arch. nat., P. 1145, fol. 125.) Le 28 juillet 1477, Marguerite Poussard et ses enfants, Jacques et Jeanne d'Ausseure, Louis Chèvredent et Marguerite d'Ausseure, sa femme, étaient appelants au Parlement d'une sentence du sénéchal de Poitou donnée en faveur de Denis Lenoir et de Michaut Le Roux. (Plaidoiries de cette date, X2a 41.)

et autres presens. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCVII Mai 1459

Rémission en faveur de Mathurin d'Appelvoisin, chevalier, compromis dans les événements qui amenèrent le meurtre d'Hector Rousseau et l'incendie de son hôtel

Ces lettres de rémission et les sept qui suivent immédiatement ont trait à la même affaire : l'assassinat d'Hector Rousseau et l'incendie de l'hôtel où il demeurait au Breuil-Barret, non loin de Fontenayle-Comte. Si l'on s'en tenait à ces lettres, on en pourrait conclure que, la victime étant entrée en rébellion armée contre l'autorité judiciaire et ayant attaqué furieusement, et sans rien vouloir entendre, ceux qui étaient venus, munis d'une commission régulière, pour l'arrêter et lui demander compte de crimes énormes, sa mort était très excusable, puisque le substitut du procureur du roi de Fontenay et les gentilshommes qui lui prêtaient main-forte auraient été en état de légitime défense. Même en lisant certaines de ces lettres, notamment celles qui furent octroyées à Mathurin d'Appelvoisin, on se demanderait quel blâme il pouvait bien avoir encouru, son rôle s'étant borné, d'après son récit, à intervenir dans un but de conciliation et à essayer de faire entendre à Hector Rousseau la voix de la raison. On peut donc supposer, d'autre part, que Mathurin d'Appelvoisin et ses compagnons, pour obtenir plus facilement leur rémission, avaient grandement atténué leur responsabilité, comme le cas se présentait fréquemment. Avant même qu'ils n'aient eu le temps de se soustraire aux poursuites en se couvrant de la grâce royale, ils avaient été ajournés devant le sénéchal de Poitou, puis au Parlement, et quand ils purent produire devant la cour leurs lettres de rémission, la veuve et les parents d'Hector Rousseau s'opposèrent à leur entérinement. Toutes les pièces du long procès qui en résulta nous sont fournies par les registres criminels du Parlement. On peut en conséquence contrôler les affirmations contenues dans les lettres que nous publions ici. Cette affaire dut avoir à l'époque un grand retentissement eu Poitou, tant à cause du drame en lui-même que par le rang des personnages qui y jouèrent un rôle, et, à ce titre, elle mérite d'être soumise aux règles de la critique et examinée contradictoirement. Comme cette étude exige un certain développement et qu'elle dépasserait de beaucoup les bornes d'une simple note, nous nous réservons de la présenter avec quelque détail dans l'introduction qui sera placée en tête du présent volume.

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AN JJ. 188, n° 87, fol. 41 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble suplicacion de nostre amé et feal Mathurin d'Appellevoisin, chevalier, seigneur dudit lieu d'AppellevoisinMathurin d'Appelvoisin, chevalier, seigneur dudit lieu et du Bois-Chapeleau, chef de la branche aînée de cette famille d'antique origine du pays de Gâtine, était fils de Huguet et de Jeanne Payen. Il était doublement allié aux Jousseaume, sa grand'mère maternelle était Marquise Jousseaume, et l'une de ses filles, Jeanne, épousa François Jousseaume, écuyer, sr de Soulandreau. Mathurin fut un des exécuteurs testamentaires de Jacques de Surgères, sr de la Flocellière, et servit, en qualité d'homme d'armes du seigneur de Bressuire, au ban des nobles du Poitou, en 1467. (Dict. des familles du Poitou, nouv, édit., t. I, p. 84.) Il tenait comme héritier de son grandpère, Guillaume d'Appelvoisin, à hommage de Jean du Fouilloux, écuyer, seigneur du Buignon-Pothereau : 1° Les Charantonnières, sises en la paroisse de Saint-Paul-en-Gâtine ; 2° une borderie de terre désherbergée en la paroisse du Breuil-Barret. (Arch, nat., R1a 204, fol. 40 v°.) On verra par le procès que son inimitié avec Hector Rousseau provenait de contestations au sujet de proprietés limitrophes. Sa femme, Catherine de La Noué, alors veuve, rendit, l'an 1487, un aveu à Nicole de Bretagne, comtesse de Penthièvre, comme dame de Poiroux. (Coll. Dugast-Matifeux, à la Bibl, de la ville de Nantes, liasse 122.) contenant que puis certain temps ença, nostre seneschal de Poictou ou son lieutenant, deument informé de plusieurs crimes, rançonnemens, excès, voyes de fait et autres deliz et malefices, commis par maistre Hector Rousseau

Hector Rousseau qui, est qualifié, dans un acte judiciaire de l'an 1452, maître ès arts et bachelier en lois, avait été pourvu de l'office de procureur du roi en la sénéchaussée de Guyenne à Bordeaux, après la seconde conquête du duché. Nous ne savons à quelle famille il doit être rattaché et s'il appartenait à une branche des Rousseau, seigneurs de la Boissière, dont la noblesse fut confirmée par les commissaires royaux en 1398 et 1408. (Cf. notre t. VII, Arch. hist., t. XXVI, p. 135.) Hector Rousseau avait été marié une première fois avec Mathurine de

Liniers ou de Linières (on trouve les deux versions), dont il lui restait une fille, Marguerite, encore mineure, et de sa seconde femme, Louise Rabateau, il avait aussi une fille, qui était toute jeune lors de la mort tragique de son père. Six années auparavant, déjà, Hector avait bien failli succomber sous les coups d'autres ennemis également acharnés à sa perte, dont les principaux d'ailleurs étaient parents ou alliés de ceux qui obtinrent les rémissions de mai 1459. Jean de Beaumanoir, seigneur de la Héardière, et son fils Jean, François de Sarmonnières, François Bourdin, Mathurin Cailleteau et plusieurs autres firent un jour irruption en armes dans cette même maison du Breuil-Barret où habitait Hector Rousseau ; ils se saisirent de sa personne, le frappèrent, lui percèrent le bras d'une dague, l'entraînèrent dans un petit bois à deux lieues de là, où ils le laissèrent pour mort avec trente-deux blessures pénétrantes, après lui avoir volé sa bourse pleine d'argent, emmené deux de ses chevaux, pillé ses meubles et joyaux. Poursuivis d'abord devant le sénéchal de Poitou, ils se gardèrent bien de comparaître. Le 19 septembre 1452, Hector obtint contre eux des lettres d'ajournement au Parlement de Paris pour lé 12 décembre suivant, sous peine de bannissement. Le sr de la Héardière et ses complices firent encore défaut. Le procureur du roi joint à Hector Rousseau demanda une condamnation sévère : le bannissement et la confiscation, la restitution des biens volés, le payement des frais de médecin et autres, l'amende honorable dans la cour de Parlement et devant la porte de l'église du Breuil-Barret, tête et pieds nus, en chemise, une torche de cire ardente de deux livres à la main, des dommages-intérêts de 2.000 livres parisis au profit de la victime, etc. Dans l'intervalle, les coupables parvinrent à se faire délivrer des lettres de rémission et en requirent l'entérinement. Le Parlement rendit son arrêt définitif, le 28 avril 1453 ; pour réparation civile, Beaumanoir et ses complices furent condamnés à restituer ce qu'ils avaient pris, à dédommager Hector Rousseau de tous les frais, qu'il avait faits à lui payer chacun 400 livres parisis et 100 livres d'amende envers le roi, à tenir prison fermée jusqu'au parfait règlement de ces sommes, et à tous les dépens des différents procès. La cour déclarait en outre que Rousseau serait désormais placé sous la sauvegarde royale. (Arch, nat., X'2a 26, fol. 270.) Cette mesure ne réussit pas à le soustraire à sa destinée tragique : Mathurin d'Appelvoisin, Jacques Jousseaume, Jean de Puyguyon et les autres nommés ci-dessous achevèrent l'œuvre commencée par leurs parents et amis.

et autres ses complices, et pour ce que ledit maistre Hector Rousseau estoit continuelment acompaigné de gens de guerre et avoit tousjours procedé et procedoit par force, violence et voye de fait plus que de raison, et resisté par plusieurs foiz de tout son povoir à rencontre de noz officiers et justice, batu et envillenny nosdiz officiers en faisant et exerçant leursdiz offices, et lequel, à l'ocasion des voyes de fait dont il usoit nosdiz officiers ne le povoient prandre et aprehender, Mathurin Marot, substitut de nostre procureur au lieu de Fontenay le Conte, et Guillaume Guerart, nostre sergent, lesquelz avoient charge de mettre à execucion certaines lettres de commission de nostredit seneschal, pour prandre au corps ledit Rousseau et le mener en noz prisons à Poitiers, firent savoir audit suppliant qu'il voulsist secourir et aider avecques autres à prendre au corps ledit Rousseau et le mener à justice ; lequel supliant en obeissant à justice, ainsi comme faire le devoit, se transporta, le xiiiie jour de may mil cccc. cinquante huit, au lieu du Brueil Barret, acompaigné d'un varlet et garny seulement d'un harnois de brigandines, d'une salade sur la teste, pour ce que ledit Rousseau estoit nottoirement renommé de grever et envillenner nosdiz officiers et de leur desobeir de tout son povoir, comme dit est, et aussi qu'il estoit tousjours garny de coulevrines et d'abillemens de guerre ; et lui arrivé audit lieu du Breuil Barret, où il trouva nostre bien amé Jacques Jousseaume, escuier, seigneur de la Gefardère, avec autres, ausquelz avoit esté fait commandement de eulx rendre audit lieu, et cuidant y trouver ledit Mathurin, substitut, et Guerart et autres dessus nommez, qui encores n'estoient arrivez, s'en ala devant l'ostel dudit Rousseau, sans entencion d'aucun mal ou dommage faire à icelui Rousseau. Et lui dist ledit suppliant qu'il s'en rendist prisonnier à nous et à nosdiz officiers, et que nostre seneschal de Poitou lui avoit donné commandement de le prandre prisonnier et l'avoit illec envoyé pour ce faire, et que il n'auroit de par lui mal ne villennye. Lequel Rousseau incontinant renya Dieu qu'il ne feroit riens pour roy ne pour royne, et appela ledit supliant et aussi ledit Jousseaume, qui sont gens nobles, de grant honneur et estat : « Vilains, traitres, ribaulx, ladres», en regnyant tousjours Dieu qu'il le seigneroit de la vaine du col et mengeroit de leurs foies roustiz sur le gril, et dist plusieurs autres grans injures et vilennies ; et de fait injuria aussi fort, en sa presence, ledit Jousseaume. Et après plusieurs paroles et injures par lui dictes, ledit maistre Hector Rousseau apela ledit supliant à parler à lui, à seurté et fiance, par une fenestre de la maison, et que il lui pardonnast les injures qu'il lui avoit dictes et proferées. Lequel supliant, usant de bonne foy et qui ne tendoità aucun mal lui faire, ala parler à lui, et lui dist ledit Rousseau telles paroles : «  Faictes cesser ce traictre, ribault, meseau Jousseaume, filz de putain, engendré d'un ribault cordelier à la basinette ». À quoy ledit suppliant respondy audit Rousseau que il disoit mal et que ledit Jousseaume estoit prouche parent de plusieurs gens nobles du païs et de grant maison, et mesmes de la femme de nostredit seneschal de PoitouJeanne Jousseaume, fille de Jean, seigneur de la Forêt-sur-Sèvre et de Commequiers, et de Jeanne de l'Isle-Bouchard, héritière de la Forêt-sur-Sèvre à la mort de son frère Louis, avait épousé, l'an 1440, Louis de Beaumont, chevalier, sr de Vallans, qui fut sénéchal de Poitou du 3 avril 1451 n. s. à la fin de 1460. (Cf. notre précédent volume, p. 378, note.). Mais ledit Rousseau en continuantLe texte du registre porte fautivement « incontinent », au lieu de « en continuant ». tousjours ses grosses parolles, lui dist que il ne donnoit de la truande seneschalle ne du truant Jousseaume ung bouton, et encores plus deshonnestement. Et après dist ledit Rousseau de rechief audit supliant qu'il se aprouchast de lui et qu'il vouloit parler à lui de secret, et ne vouloit point que ce vilain Jousseaume le oyst. Lequel supliant, qui ne pensoit en aucun mal engin, s'aproucha à la seurté dudit Rousseau, près de ladicte fenestre où il estoit, cuidant que icelui Rousseau lui voulsist dire aucunes paroles de secret, et ainsi que ledit supliant cuida haulser et lever la teste à parler à lui, ledit Rousseau voult frapper par la gorge ledit suppliant d'une grande espée qu'il avoit, et se n'eust esté le bort de sa salade qui arrèsta le coup, il eust couppé la gorge audit supliant, et l'eust illec tué et occis de la dicte espée. Et incontinant ledit supliant, se voyant ainsi injurié, blasmé et trahy par ledit Rousseau, ala au premier huys de la dicte maison et le ouvry ou rompy et entra dedans ; et ainsi qu'il entroit, ledit Rousseau et ses complices qui avoient chargé deux coulevrines au second huys de l'alée de ladicte maison, tirèren lesdictes coulevrines, dont l'une ne fist que bruyre, et tantost que ledit supliant la sentit et oyt bruire se tira ung acousté, et l'aultre tira tout oultre et passa par l'uys où estoit entré ledit supliant et l'eust tué, se il ne se feust contregardé. Et sans autre chose faire, s'en ala ledit supliant et se tira dehors de ladicte maison, où il trouva la femme dudit Rousseau, laquelle lui dist qu'il ne prist point à desplaisance ce que lui faisoit son mary. Et lors ledit supliant lui respondi que il feroit tant que il seroit prins par justice. Après lesquelles injures et vilenies ainsi dictes et faictes audit supliant, et lui parlant à la femme dudit Rousseau, icelui Rousseau requist derechief ledit supliant à mains jointes qu'il alast parler à lui à seurté oudit hostel où il estoit, en disant audit supliant : « Je vous requier pardon de ce que vous ay fait ». Lequel supliant lui respondi qu'il n'estoit pas homme à qui il deust parler et en qui il deust avoir fiance, attendu qu'il l'avoit cuidé et voulu tuer de ladicte espée en trahison et coupper la gorge, et aussi desdictes coulevrines. Auquel supliant ledit Rousseau dist ces motz : « Monseigneur, je sçay bien que je suis faulx et traictre de vous avoir fait ce que je vous ay fait. Je vous prye qu'il plaise le me pardonner, et que je parle à vous». Auquel Rousseau et à sa requeste ala ledit supliant parler ; lequel supliant dist audit Rousseau que il lui tint à ceste foiz meilleure foy et seureté que il n'avoit faicte à l'autre foiz, et que il lui conseilloit obeir à justice, et se autrement il le faisoit, il seroit mal conseillé, et que ledit Mathurin Marot, substitut de nostre dit procureur en Poictou, avoit la charge et mandement de le prendre, et si tost qu'il seroit venu, que il seroit prins et mené à justice, et se il le vouloit croire, il le meneroit seurement par devers nostre dit seneschal de Poictou, et lui feroit tout le mieulx qu'il pourroit. Lequel Rousseau respondi audit supliant, en renyant Dieu par plusieurs foiz, que il aimeroit mieulx mourir cent mil foiz que de soy rendre aux vilains trippiers de Poictiers et de Fontenay, et que s'il estoit en la ville de Poictiers, il donneroit ung coup de dague ou de cousteau au vilain lieutenant trippier et bougeronMot ayant la même signification que bougre: homme de mœurs contre nature., et après s'en yroit hors de ladicte ville, et n'en feroit autres nouvelles. Lequel suppliant, voyant la volenté et obstinacion dudit Rousseau, lui dist que c'estoit mal dit. Et lors ledit Rousseau lui dist qu'il estoit bien content dont ledit vilain Marot et les autres vilains trippiers de Fontenay venoient, et qu'il vouldroit que le villain trippier ChevredensJean Chevredent, qui était alors procureur du roi en la sénéchaussée de Poitou. Il a été question de ce personnage dans nos deux précédents volumes et son nom reparaîtra encore plusieurs fois dans celui-ci. et autres y feussent, en regnyant tousjours Dieu et sa loy, que il feroit icelui jour le plus grant meurtre que il vit oncques et que il mengeroit de leurs foies roustiz ; en disant oultre audit suppliant que il ne s'en alast point et que il verroit ung beau jeu, en regnyant tousjours Dieu, que il seroit vangé ledit jour de tous ses ennemis. Auquel Rousseau ledit suppliant dist encores que c'estoit mal fait et mal dit et que il lui conseilloit de soy rendre et faire obeissance à justice. Et atant se departy ledit supliant dudit Rousseau et s'en ala hors dudit hostel. Et quant la femme dudit Rousseau vit les rebellions, desobeissances et parolles dessus dictes, que sondit mary faisoit et disoit, vint à l'entrée de l'uis de ladicte maison, pria et requist sondit mary que par Dieu il se rendist en l'obeissance de nous et de noz officiers et que il n'auroit aucun mal. Lequel Rousseau respondy à sadicte femme telz motz : « Truande, paillarde, oste toi d'ilec et que je ne te voye plus », en renyant tousjours Dieu que autrement il la tueroit ; car aujourd'uy il feroit mourir tous ses ribaulx, meseaulx, ladres, « et me cheviray bien d'eulx comme je me suis chevy d'autres». Laquelle femme dudit Rousseau, voyant l'obstination de sondit mary et qu'il ne vouloit faire aucune obeissance à justice, s'en ala d'illec avec ledit supliant ou bourg dudit lieu du Breuil Barret, en l'ostel d'un nommé de La CoussaieDans la rémission en faveur de Maurice Herpin (ci-dessous, n° MCCCXIII), il est nommé Guillaume de La Coussaye. Une généalogie de la famille de La Coussaye, originaire de la Gâtine, se trouve dans la nouv. édit, du Dict. des familles du Poitou, t. Il, p. 702 et suiv., mais elle ne permet pas de déterminer sûrement lequel de ses membres possédait à cette époque un hôtel au Breuil-Barret. Cette généalogie débute par un Guillaume, sr de la Coudre et Chicheville (paroisse du Beugnon, canton de Coulonges-sur-l'Autize) décédé avant 1461., et parlèrent après ledit suppliant et elle longuement ensemble, et mangèrent et beurent, et tout pour le bien et prouffit dudit Rousseau et d'elle. Et ce pendant survint oudit hostel ung des serviteurs dudit Jousseaume, fort blecié d'un raillon au travers du braz, auquel ledit supliant et la femme dudit Rousseau, après que ledit raillon fut osté, misdrent en la playe ung lardon et le pensèrent au mieulx qu'ilz peurent. Et ce fait, ladicte femme dudit Rousseau pria ledit suppliant que il alast à la maison dudit Rousseau, devant laquelle estoit ledit Jacques Jousseaume avecques plusieurs autres, pour garder que plus grant inconvenient n'en advint ; lequel supliant y ala avant vespres, desarmé de sesdictes brigandines et salade, et vestu d'une robe blanche qui estoit au compaignon du prieur dudit lieu du Breuil Barret, de l'ordre de Saint Augustin, de l'abbaye de Saint RuCe prieuré de chanoines réguliers de Saint-Augustin, de la congrégation de Saint-Ruf, paraît différent du prieuré-cure du Breuil-Barret, sur lequel le Pouillé des diocèses de Luçon et de Maillezais publ. par l'abbé Aillery (Fontenay, 1860, in-4°, p. 174) fournit quelques renseignements sommaires., et parla de rechief audit Rousseau, auquel il dist que c'estoit mal fait d'avoir ainsi blecié ledit homme. Lequel lui respondi, en renyant encores Dieu, qu'il vouldroit en avoir autant fait à tous les autres illec estans, et atant s'en retourna ledit suppliant à son logeis, cuidant trouver ladicte femme dudit Rousseau, laquelle s'en estoit alée, et à la requeste de la femme de Herbert RousseauCe frère d'Hector Rousseau est plus souvent nommé Albert, particulièrement sur les registres du Parlement. C'est lui qui eut l'administration de la personne et des biens de Marguerite, la fille aînée de son frère, et fit les frais des poursuites contre les meurtriers. Il eut à ce sujet un procès contre sa belle-sœur qui se jugeait lésée, ainsi que sa fille Jeanne, dont elle avait la tutelle, dans la réparation des dommages-intérêts. (Voir un acte d'opposition de celle-ci au Parlement, du mardi 22 septembre 1472, Arch. nat., X2a 39, à la date.) Le même Albert Rousseau obtint de la cour, le 19 janvier 1475 n. s., un mandement d'information, adressé aux enquêteurs et au clerc de la sénéchaussée de Poitou, contre les frères Guillaume et Jacques Le Maçon, prisonniers à sa requête, qu'il accusait d avoir commis à son préjudice divers excès non précisés (X2a 40, fol. 220 v°)., frère dudit Hector, ala ledit supliant, ainsi desarmé, par plusieurs foiz parler audit maistre Hector Rousseau, pour le cuider faire rendre à justice. Lequel maistre Hector dist en renyant Dieu qu'il aimoit mieux mourir que se rendre à aucuns de noz officiers. Et tantost après, sans autre chose faire, s'en ala ledit suppliant soupper avecques ledit Jacques Jousseaume. Et après ledit soupper vindrent et arrivèrent lesdiz Marot et Guerart, nosdiz officiers, audit lieu du Breuil Barret devant ladicte maison dudit Rousseau, après ou environ souleil couchant, et firent commandement audit suppliant qu'il aidast à prendre ledit Rousseau ; lequel suppliant, après lesdiz commandemens faiz, en nous voulant obeir et à nosdiz officiers, s'en ala à sondit logeis et se arma de sesdictes brigandines et salade, et revint devant ledit hostel dudit Rousseau. Auquel Rousseau il dist que nosdictes gens et officiers estoient ilec presens et que il se rendist à eulx. Lequel supliant ledit Rousseau appela traictre chevalier, meseau, et lui dist plusieurs autres injures et vilennies, et tira et fist tirer plusieurs coulevrines et arbalestes. Et lors se tira à part ledit supliant avec ledit Jousseaume, bien loing d'environ d'un gect de pierre de ladicte maison, en tirant vers sondit logeis, et aussi s'en ala ledit Marot tout malade ; et depuis ne se aproucha ledit supliant dudit hostel, mais vit tantost après le feu sortir hault par la cheminée qui estoit en ladicte maison dudit Rousseau, et par aucun temps après oyt dire qu'il estoit mort. Dont il fut dolent, et ne fut aucunement consentent desdiz feu et meurtre. Et après prindrent nostre dit sergent et autres qui l'acompaignèrent aucuns des malfaicteurs et complices dudit Rousseau, et les menèrent là où bon leur sembla. Depuis lequel cas ainsi advenu et qu'il vint à la notice et congnoissance de nostredit procureur en Poitou, il a fait faire informacion sur ce, et, ladicte informacion faicte et veue, a fait adjourner ledit supliant et autres à comparoir en personne par devant nostre dit seneschal de Poictou ou son lieutenant à son siège de Poictiers, à certain jour après ensuivant. Auquel jour il s'est comparu avecques les autres adjournez, et fut arresté prisonnier et mis ès prisons de la conciergerie de nostre palais de Poictiers. Et lui estant ilec prisonnier, maistre Guillaume Artault, premier huissier en nostre court de Parlement, par vertu de certaines lettres obtenues ou nom de Loyse Rabatelle

La généalogie de la famille Rabateau qui se trouve dans la 1er édit, du Dict. des familles du Poitou est trop incomplète (M. Daniel Lacombe n'y a rien ajouté, dans son étude sur le président Jean Rabateau, L'hôte de Jeanne d'Arc à Poitiers, Paris, Niort, 1895, in-8°), pour que l'on puisse y reconnaître la filiation de Louise Rabateau. Elle paraît être la nièce de Jean, président au Parlement, dont il a été question, à plusieurs reprises, dans nos deux derniers volumes. Il avait un frère qui laissa certainement plusieurs enfants, dont au moins une fille, car dans un acte du Parlement du 31 mai 1462 (Arch. nat., X2a 32, à la date), il est parlé d'une nièce du président. Jean Rabateau, sr de la Rabatelière, lieutenant général au siège de Fontenay-le-Comte, marié à Marie Thibault, devait être le petit-fils et non le fils, comme le dit M. Beauchet-Filleau, de ce frère du président, car Marie Thibault, alors sa veuve depuis peu de temps, réclamait, le 7 novembre 1533, la riche succession de Jean Rideau, sr de Bernay à Iteuil. (Arrêt du Parlement de cette date, Xla 1536, fol. 465 v°, 481.) Quoi qu'il en soit, Louise Rabateau, avant de devenir la femme d'Hector Rousseau, avait épousé en premières noces Jean Mouraut, oncle sans doute ou cousin de Jean Mouraut, sr de la Mothe-sur-Croutelle (sur lequel voyez notre vol. précédent, p. 328, note). Après la mort de son second mari, dont elle avait une fille, nommée Jeanne, elle contracta un troisième mariage avec Antoine Augier, écuyer, comme on le voit par le passage suivant d'un registre de la cour : « Me Jacques Olivier, procureur de Anthoine Augier, escuier, et demoiselle Loyse Rabatelle, sa femme, comme ayant le gouvernement de sa fille, s'oppose à ce que aucun exécutoire de despens ne soit baillé ou delivré à Albert Rousseau, pour certaines causes, etc., 22 septembre 1472. (X2a 39.)

veuve, et autres parens dudit Rousseau, adjourna ledit supliant et lesdiz Jousseaume, Marot, Martin et autres à comparoir en personne en nostredicte court de ParlementMathurin d'Appelvoisin et ses co-accusés avaient été ajournés au Parlement pour le 21 novembre 1458 (X2a 28, à la date). C'est la première mention d'un procès dont il sera question dans l'introduction du présent volume et dont on retrouve encore la trace sur les registres de la cour, le 6 juillet 1474. (X2a 40, fol. 159 v°.), à certain jour ensuivant, sur paine de bannissement et de confiscacion de corps et de biens, pour raison dudit cas, pour lequel ilz avoient par avant esté adjournez et estoient arrestez, constituez et detenuz prisonniers à Poitiers, comme dit est. [Pour quoy ne s'est ledit suppliant comparu audit jour] et aussi pour doubte que rigueur de justice leur feust faicte, avant qu'ilz peussent monstrer de leurs justificacions et deffences, et a esté mis en trois deffaulx en nostredicte court, ainsi que on dit, et adjourné sur le prouffit d'iceulx. Et doubte ledit suppliant, jasçoit ce que par lui ne par son commandement ledit cas n'ait esté fait, et qu'il ne feust alé audit lieu du Breuil Barret en entencion ne volonté aucune de meffaire ne faire meffaire, en corps ne en biens, audit Rousseau, en aucune manière, mais seulement pour secourir, aider et donner secours, confort et aide à noz officiers et à justice, ainsi que mandé lui avoit esté, que l'on voulsist contre lui proceder à rigueur de justice, mesmement, pour ce qu'il est chevalier et de bonne maison, se tint avec grant assemblée de peuple et de gens armez et embastonnez, avant que le commissaire et exécuteurs des lettres dessusdictes feussent arrivez, et aussi qu'il estoit en la compaignie, quoy que soit près d'ilec, quant ledit cas advint, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties. En nous humblement requerant que nous, eu regard à ce que dit est, que ledit suppliant, qui est nobles homs et de grant maison, nous a servy ou fait de noz guerres et sert de jour en jour, quant mestier en est, aussi ont fait ses predecesseurs, et s'est toujours bien et notablement gouverné, sans avoir fait, commis et perpetré aucun villain cas, blasme ou reprouche, etc., nous lui vueillons nosdictes grace et misericorde impartir. Pour quoy nous, les choses dessusdictes considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant le fait et le cas dessus touché avons quicté, remis el pardonné, etc. Si donnons en mandement, par cesdictes presentes, à noz amez et feaulx conseillers les gens tenans et qui tendront nostre Parlement à Paris et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Razillé près Chinon, ou mois de may l'an de grace mil cccc. cinquante et neuf, et de nostre règne le xxxviie.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. A. Rolant. — Contentor. Chaligault.

MCCCVIII Mai 1459

Rémission donnée en faveur de Jacques Jousseaume, écuyer, seigneur de la Geffardière, qui avait pris part au meurtre d'Hector Rousseau et à l'incendie de son hôtel.

AN JJ. 188, n° 88, fol. 42 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de nostre bien amé Jacques Jousseaume

Jean Jousseaume, seigneur de la Geffardière, père de Jacques, a été fréquemment mentionné dans nos deux précédents volumes, à l'occasion des procès qu'il eut à soutenir, en qualité de tuteur des enfants de son neveu, Jean Jousseaume, seigneur de la Forêt-sur-Sèvre et de Commequiers, et de Jeanne de l'Isle-Bouchard, celle-ci s'étant remariée, très peu de temps après le décès de son premier mari (1430), avec Perceval Chabot, sr de la Turmelière, qui s'était emparé du château de Commequiers, au préjudice des deux mineurs. Il y aurait beaucoup à dire encore sur ces procès, mais cela nous entrainerait trop loin. Nous nous contenterons de fixer la filiation des srs de la Geffardière et leur rattachement à la branche principale de la famille Jousseaume. Jean, sr de la Geffardière, était le troisième fils de René Ier Jousseaume, qui avait épousé Isabelle de la Forêt, l'héritière de la Forêt-sur-Sèvre et de Commequiers. (Arch. hist, du Poitou, t. XXVI, p. 221, note.) Il contracta mariage avec Jeanne Chauderier, dame de Rouzay en Aunis, poursuivit le frère de sa femme, René Chauderier, sr de Nueil, au Parlement criminel pour graves excès (Arch. nat., X2a 22, aux dates des 28 et 30 mars, 12 et 20 juin 1441 ; Ier et 12 mars, 19 avril et 6 août 1442 ; X2a 23, fol. 53, au 24 juillet 1441), et était mort avant le 18 mai 1449. A cette date, Jeanne Chauderier, qui se dit sa veuve, rendit aveu à Richemont, sr de Parthenay, de son hôtel de la Caillière près Fontenay-le-Comte, mouvant de Mervent. (Arch. nat., R1* 204, fol. 49.) Leur fils Jacques, qui obtint ces lettres de rémission de mai 1459, était, comme on le voit, seigneur, de la Geffardière et de Loge-Fougereuse. Par arrêt du Parlement du 14 août 1466, il perdit la justice de cette dernière seigneurie, qui fut confisquée au profit du îroi, et condamné à 250 livres d'amende, à la requête de Me Pierre Coulon et en réparation de l'exécution de Jacques Coulon, père de ce dernier, Jean Jousseaume, sr de la Geffardière, et son fils Jacques, ayant été convaincus de lui avoir fait subir le dernier supplice à Loge-Fougereuse, sans raison suffisante. (X2a 31, fol. 39, et X2»34, fol. 155 v<>.) Cet arrêt, qui était la confirmation de la sentence du juge de première instance, a été cité déjà dans notre précédent volume (p. 116, note) ; nous le rappelons ici, parce que, dans cette première mention, il n'apparaissait pas que le seigneur de Loge-Fougereuse et le seigneur de la Geffardière étaient un seul et même personnage. Le 24 août 1466, par lettres données à la Mothe-d'Egry, Louis XI fit don à Louis de Beaumont, seigneur de la Forêt-sur-Sèvre et de Vallans, ancien sénéchal de Poitou et cousin parsa femme du sr de la Geffardière, de tout le droit de haute, moyenne et basse justice en la terre et seigneurie de Loge-Fougereuse. (Bibl. nat., ms. fr. 21405, p. 162, et JJ. 194, n° 190.) Elles seront publiées dans notre prochain volume.

Jacques Jousseaume épousa Jeanne de La Roche, fille de Guillaume de La Roche, chevalier, seigneur de Vieux-Varèze, et de Marguerite Feydeau. Le 6 juin 1469, il rendait un aveu, à cause de sa femme, pour le tenement de la Pirouardière, à Chariot d'Orfeuille, écuyer, sr de Foucault. Il eut quatre fils : Jean, André, François, Joachim, sr de Soulandreau, et une fille, Jeanne, femme de Guillaume Gillier, écuyer, sr de Salles. (Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 1er édit., t. II, p. 270.) D'après la nouv. édit., c'est François qui fut seigneur de Soufandreau, et il épousa Jeanne, fille de Mathurin d'Appelvoisin. (Cf. cidessus, p. 126, note.)

, escuier, seigneur de la Geffardière et de Laugefaugereuse, contenant que, le samedi xiiie jour de may cccc. cinquante huit, ledit supliant estant en son hostel de la Geffardière, receut, à heure de souleil couchant ou environ, certaines lettres missives escriptes à Fontenay le Conte, le jour precedent douziesme jour d'iceluy mois, que Mathurin Marot, substitut de nostre procureur en Poictou, à ce ordonné et commis de par nous ou siège et ressort dudit Fontenay le Conte, escripvoit audit supliant, contenant que ledit Marot, substitut dessusdit, avoit mandement ou commission de nostre seneschal de Poictou ou de son lieutenant, duquel il envoyoit audit supliant la coppie avecques lesdictes lettres missives, pour prendre au corps Ector Rousseau et ses adherans et complices ; lequel Rousseau, qui devoit estre le dymenche ensuivant au Brueil Barret, ainsi que ledit Marot avoit entendu, estoit homme malicieux, qui avoit acoustumé de user de rebellions et desobeissances à nous et à noz officiers, et usoit de voyes de fait, et avecques lui tenoit varletz en habillemens de guerre et autrement, sur lesquelz ledit Marot ne povoit, quoy que soit ne osoit entreprandre à faire l'execucion de sadicte commission, obstant lesdictes voyes de fait, dont ilz estoient coustumiers de user, sans avoir aide et secours des nobles et autres gens du païs ; et pour ce prioit et requeroit, de par nous et au moyen et par vertu de certaines autres lettres de commission emanées de nostredit seneschal ou de son lieutenant, ledit supliant qu'il lui pleust se rendre avec ses gens en bon habillement, ledit dymenche xiiiie jour d'icelui moys de may, audit lieu du Breuil Barret, et illec ou auprès d'icelui lieu atendre ledit Marot, substitut dessusdit, jusques à ce qu'il feust par devers ledit supliant, pour proceder ou fait de ladicte prinse, en la meilleure forme que l'on verroit estre à faire. Après la recepcion des quelles lettres, ensemble de ladicte coppie desdictes lettres de nostredit seneschal ou de son lieutenant, ainsi par ledit Marot envoyées audit supliant, icelui supliant, qui tousjours a obey et voulu obeyr à son povoir à noz officiers et à justice, et les secourir et donner secours et aide, toutes et quantes foiz que sommé et requis en a esté, considerant que dudit lieu de la Geffardière jusques audit lieu du Breuil Barret y avoit trois grosses lieues ou environ, et doubtoit que, s'il attendoit à partir le lendemain au matin, qui estoit le jour de dymenche, pour y aler, qu'il n'y peust estre si tost ne si matin qu'il croyoit que ledit Marot, substi- tut, y feust, se habilla et arma de ses brigandines et salade et de son espée et dague seulement, et fist aussi habiller ung nommé Jean BeufmontJean Beufmont obtint aussi des lettres de rémission, pour sa participation au meurtre d'Hector Rousseau. (Ci-dessous, n° MCCCXIV.), Mathurin HariauIl est nommé Mathurin Herveau dans les lettres en faveur de Jean de Puyguyon ci-dessous., Jehan Lermener et autres ses gens et serviteurs, jusques au nombre de huit ou neuf arbalestes ou voulges, et monta à cheval et sesdiz gens aussi, et s'en party dudit lieu de la Geffardière, environ souleil couchant, et print son chemin avec sesdiz gens pour tirer droit vers ledit lieu du Bruil Barret, et passa par Saint Pierre du Chemin; auquel il trouva Colas Martin, qui y fait sa résidence, et lequel avoit par plusieurs foiz esté avec ledit supliant en nostre service ou fait de noz guerres. Auquel Martin ledit supliant dist qu'il se habillast pour aler avec icelui suppliant et sesdiz gens audit lieu du Breuil Barret, pour donner secours et aide à nostre procureur ou son substitut et autres noz officiers, à faire ou faire faire la prinse dudit Rousseau et de sesdiz complices. Lequel Martin se habilla de ses brigandines, salade et voulge et se mist en la compaignie dudit suppliant et prindrent le chemin à tirer vers ledit Breuil Barret. Et quant ilz furent au vilaige du Tail, qui est à ung quart de lieue ou environ dudit Breuil Barret, fut nuyt, et à ceste cause demourèrent à souper et au coucher chez Jehan de PuyguionVoy. quelques pages plus loin, la notice consacrée à ce personnage., escuier, seigneur dudit vilaige du Tail. Et le lendemain au matin, qui fut ledit jour de dymenche, ledit supliant et ceulx de sa compaignie furent et atendirent audit lieu du Tail jusques environ midy, attendant ouïr nouvelles que ledit Marot feust arrivé audit lieu du Breuil Barret ; et pour ce que n'en avoient aucunes nouvelles et qu'il doubtoit qu'il se feust transporté sans passer par son logeis, et aussi que rapporté avoit esté audit suppliant que ledit Rousseau, qui avoit esté adverty que on le vouloit prendre et à ceste cause s'en vouloit fouir et sesdiz complices, icelui suppliant avec sesdiz gens ou partie, et aussi ledit Jehan et Jacques de Puiguion, son filz, qui se misdrent en sa compaignie, se transportèrent audit lieu du Breuil Barret, où ilz arrivèrent environ mydi devant la maison en laquelle ledit Rousseau et autres ses complices estoient enfermez et garniz de harnoiz et artillerie, comme de arbalestes, coulevrines et autres habillemens de guerre, esperans y trouver ledit Marot ; mais n'estoit encores venu. Et incontinent que ledit Rousseau et ses complices virent ledit supliant et ceulx qui estoient lors avec lui devant ladicte maison, tirèrent trait d'arbalestes et coulevrine contre eulx, en disant par celui Rousseau oudit supliant injures et obprobres vilz et deshonnestes à desmesure, et sur ce eurent plusieurs parolles chaleureuses les ungs vers les autres, telement que d'une part et d'autre y eut du trait tiré ; toutes voyes n'y eust riens blecié pour celle heure. Et après ce dist et desclaira ledit supliant audit Rousseau qu'il n'estoit ilec alé en entencion aucune de lui faire aucun grief ne violence, mais pour secourir justice et par commandement à lui fait, pour secourir et aider à noz officiers qui ilec se devoient rendre pour le prendre et sesdiz complices au corps, et que, s'il se vouloit rendre prisonnier à nous, qu'il n'auroit mal ne desplaisir ; mais, s'il ne le faisoit, ledit Marot venu, metroient peine de ravoir et sesdiz complices. Et ce pendant que ledit supliant et autres estoient ainsi devant ladicte maison, où ilz avoient esté l'espace de deux ou trois heures ou environ, en attendant ledit Marot à venir, et gardant que ce pendant ledit Rousseau et sesdiz complices ne se evadassent, arriva environ heure de vespres devant icelle maison Mathurin d'Appellevoisin, chevalier, armé de brigandines et salade, avecques lui ung serviteur armé d'un jacques et salade, et trouva ledit supliant avec sesdiz gens et autres qui y estoient venuz paravant. Lequel d'Appellevoisin, incontinant qu'il y fut arrivé, exorta gracieusement ledit Rousseau qu'il se rendist à nous prisonnier, et que nostredit seneschal de Poitou les avoit ilec envoyez et donné en commandement de le faire nostre prisonnier. Lequel Rousseau, oyes lesdictes parolles, renya Dieu, ainsi que paravant l'avoit renyé par plusieurs foiz, que point ne se rendroit ne riens ne feroit, pour le roy ne pour la royne, et appelloit lesdiz supliant et d'Appellevoisin, qui sont nobles, nez et extraitz de noble et ancienne lignée et de grant honneur et estat, villains, traitres, ribaulx, ladres, mangez de loups, en renyant tousjours Dieu qu'il les seingneroit de la vaine du col et mengeroit de leurs foyes roustiz sur le gril. Et appella ledit Rousseau ledit d'Appellevoisin en seureté, en lui disant telles parolles : « Faictes cesser ce ribault, traitre, meseau Jousseaume, filz de putain, engendré d'un ribault cordelier à la basinette. » Et se tindrent lesdiz suppliant, d'Appelevoisin et autres, depuis le temps et heure dessusdicte jusques environ souleil couchant, en attendant ledit Marot à venir, devant ladite maison en laquelle ledit Rousseau et sesdiz complices estoient, à ce qu'il ne se evadast, comme dit est.

Et ce pendant icelui Rousseau et sesdiz complices tirèrent contre ledit supliant, d'Appellevoisin et autres qui illec estoient, plusieurs traiz tant de coulevrines que d'arbalestes, en leur disant continuelement injures et vilenies, regnyant et blafemant le nom de Dieu, et frapèrent ledit Nycolas Martin d'un trait parla poitrine et l'eussenttué, s'il n'eust eubrigandines, et aussi blecièrent ung nommé Mathurin Hariau d'un trait par le bras ; pendant lequel conflict ou debat, et en surattendant tousjours la venue dudit Marot, survint illec certain grant nombre de peuple, et pou après, comme environ souleil couchant, ledit Marot, substitut, et Guillaume Guerart, nostre sergent, lesquelz avoient avecques eulx les commissions dessus dictes pour prandre au corps ledit Rousseau et ses complices, arrivèrent audit lieu du Breuil Barret, où ilz trouvèrent ledit supliant, d'Appellevoisin et autres dessus nommez, avec ledit peuple qui s'y estoit assemblé en grant nombre. Et lesquelz Marot et sergent ainsi arrivez avec leursdictes commissions, et acertenez des voyes de fait, rebellions et desobeissances que ledit Rousseau et sesdiz complices avoient fait, faisoient et s'efforçoient faire, requisdrent et prièrent lesdiz supliant, d'Appelevoisin et autres leurs gens et serviteurs, ausquelz ilz monstrèrent et exibèrent de rechief lesdictes lettres de commission, ilec presens, de donner confort et aide de faire ladite execucion à l'encontre dudit Rousseau et de sesdiz complices. Et de fait ledit Guerart, sergent, pour faire ladicte execucion, se transporta devant et près de ladicte maison en laquelle ledit Rousseau et sesdiz complices estoient ; auquel Rousseau à haulte voix, en parlant à sa personne, il fist exprès commandement de par nous qu'il lui fist ouverture de ladicte maison pour accomplir le contenu en ladicte commission dudit sergent, en requerant par lui icelui Rousseau qu'il obeist à justice. Lequel Rousseau dist et respondi audit sergent qu'il ne lui daigneroit faire obeissance, en disant fy de lui et de son commandement. Et lors icelui sergent dist audit Rousseau qu'il le faisoit et constituoit nostre prisonnier, et nous obeist et à justice. A quoi ledit Rousseau respondy et dist telles parolles : « Fy du roy et de la royne », et que point ne se rendroit prisonnier ne riens ne feroit pour roy ne pour roc, en disant tousjours « fy » et autres parolles très oultrageuses et arrogantes,et que bien en paieroit ledit Guerart, nostre sergent, et qu'il lui souvenist comment il avoit autres foiz galléLe même mot est employé dans les lettres pour Colas Martin, cidessous. les villains de Fontenay. Et tira icelui Rousseau, aussi firent sesdiz complices, plusieurs traitz d'arbaleste et coulevrine en telle manière que nul ne s'osoit tenir devant ladicte maison. Et à ceste cause s'estoient lesdiz Jousseaume, supliant, et d'Appellevoisin ung peu retraiz et eslongnez de la dicte maison, et aussi s'en estoit alé ledit Marot à son logeis, pour ce qu'il s'estoit trouvé mal disposé. Et incontinent ou pou après le derrenier traict de coulevrine qui fut tiré de ladicte maison où estoit ledit Rousseau, une grant flambe de feu yssy et apparut parle thuau de l'une des cheminées d'icelle maison, de la haulteur de demie lance ou environ, la flambe ynde et perse et sentoit le souffre, et en peu d'eure fut ladicte maison arse et brulée, et ledit Rousseau tué d'un trait d'arbaleste de l'un de ceulx qui estoient devant ladicte maison, ne scet ledit supliant par qui, pour ce que ledit supliant estoit assez loing de ladicte maison et de l'autre cousté d'icelle où estoit ledit Rousseau ; ne aussi ne scet ledit supliant en quelle manière ledit feu se print en ladicte maison, fors que on dit que ceulx de dedens le y misdrent par leur fol et meschant gouvernement, quoy que soit, n'y fut mis par son ad veu ne à son sceu, ne par son commandement ne fut fait ledit cas, et n'en sceut riens tant qu'il fut advenu, et s'en retourna avec sesdiz gens et serviteurs à coucher audit lieu du Tail, et d'ilec s'en ala à son hostel de la Geffardière. Et après ledit cas advenu et pour raison d'icelui, informacion precedent, nostredit procureur en Poitou fist adjourner ledit supliant et lesdiz d'Appelvoisin, Marot, Martin et autres à comparoir en personne par devant nostredit seneschal de Poictou ou son lieutenant à Poictiers, à certain jour, auquel ilz comparurent, et furent arrestez et constituez prisonnier, et eulx estans ilec prisonniers, maistre Guillaume Artault, premier huissier en nostre court de Parlement, par vertu de certaines lettres obtenues ou nom de Loyse Rabatelle, veuve, et autres parens d'icelui feu Rousseau, adjourna lesdiz supliant, d'Appelevoisin, Marot, Martin et autres à comparoir en personne en nostredicte court de Parlement, à certain jour ensuivant, sur peine de bannissement et de confiscation de corps et de biens, pour raison dudit cas, pour lequel ilz avoient paravant esté adjournez et estoient arrestez, constituez et detenuz prisonniers à Poictiers, comme dit est. Auquel jour ne s'est ledit suppliant comparu, doubtant que rigueur de justice lui feust faicte, avant qu'il peust monstrer de ses justificacions et deffenses, et pour ce a esté mis en trois deffaulx en nostre dicte court de Parlement, ainsi que on dit, et adjourné sur le prouffit d'iceulx. Et doubte ledit supliant, jasçoit ce que par lui ne son commandement ledit cas n'ait esté fait, et qu'il ne feust alé audit lieu du Breuil Barret en entencion ne voulenté aucune de meffaire ne faire meffaire, en corps ne en biens, audit Rousseau, mais seulement pour aider, secourir et donner secours, confort et aide à noz officiers et à justice, ainsi que mandé lui avoit esté, que l'on voulsist contre lui proceder à rigueur de justice, mesmement pour ce que il, qui est escuier et de bonne maison, se tint avec grant assemblée de peuple et de gens armez et embastonnez, avant que les commissaires et executeurs des lettres dessusdictes feussent arivez, et aussi qu'il estoit en la compagnie, quoy que soit assez près d'ilec, quant ledit cas advint, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties. En nous humblement requerant que nous, etc., lui veuillons nosdictes grace et misericorde impartir. Pourquoy nous, les choses dessusdictes considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit supliant oudit cas avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx conseillers les gens tenans ou qui tendront nostre Parlement à Paris et à tous noz autres justiciers et officiers, etc. Donné à Razillé près Chinon, ou mois de may l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviie.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. Rolant. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCIX Mai 1459

Rémission accordée à Colas Martin, praticien en cour laie à Saint-Pierre-du-Chemin, qui avait pris part à la même affaire.

AN JJ. 188, n° 89, fol. 43 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Colas Martin, praticien en court laye, demourant ou villaige de Saint Père du Chemin en nostre païs et conté de Poitou, contenant que ledit suppliant estant aux assises royaulx de Nyort, qui ilec furent tenues ou mois d'avril mil cccc. cinquante et huit derrenierement passé, Mathurin Marot, substitut ordonné et commis de par nous de nostre procureur en Poictou au lieu, siège et ressort de Fontenay le Conte, lequel estoit ausdictes assises de Nyort, dist et notiffia audit supliant que, par la deliberacion des gens de nostre conseil en Poictou estans assemblez ausdictes assises royaulx dudit lieu de Fontenay, lesquelles pou de temps avant celles de Nyort avoient esté tenues, et informacion precedent faicte sur les pilleries, roberies, abuz, force et violence, ravissemens de femmes et voyes de fait, port d'armes, rebellions, desobeissances et autres crimes, excez et delitz en moult grant nombre commis et perpetrez par feu Ector Rousseau, qui lors vivoit, et par Jehan Raillon, Guillaume Paluya, Guillaume Artault, ung autre nommé Paulet, ung autre nommé Lescalier et autres aliez et complices dudit Rousseau, nostre seneschal de Poictou ou son lieutenant avoit donné lettres pour prandre au corps ledit Rousseau et lesdiz complices, et les mener prisonniers en noz prisons à Poictiers, pour ilec ester à droit. Et dist oultre ledit Marot que il avoit esté et estoit commis pour faire executer lesdictes lettres par le premier sergent et que il avoit entencion de faire faire ladicte execucion, le dymenche xiiiie jour de may, en requerant ledit supliant de soy y rendre en habillement, pour ce que ledit Rousseau et sesdiz complices avoient esté et estoient rebelles et desobeissans à noz officiers et à justice et usoient de fait. Et après ce que ledit suppliant fut retourné desdictes assises de Nyort à son hostel audit lieu de Saint Pierre du Chemin, Jacques Jousseaume, escuyer, seigneur delà Geffardière, le samedy xme jour dudit moys, passa devers le soir avec ses gens et serviteurs, armé de brigandines, salade, dague et espée, et sesdictes gens en habillement par ledit lieu de Saint Pierre du Chemin, et parla audit supliant et lui dist qu'il se habillast et alast avec luy au lieu du Breuil Barret, pour donner secours et aide audit Marot, pour prandre ledit Rousseau et ses complices au corps et mener prisonniers à Poictiers, disant iceluy Jousseaume que ledit Marot lui avoit escript et mandé que se y rendist en habillement avec sesdiz gens, ledit jour de dymenche, et lui avoit envoyé le double desdictes lettres, qui données avoient esté pour prandre ledit Rousseau et sesdiz complices. A quoy ledit supliant respondi et dist que, luy estant ausdictes assises de Nyort, ledit Marot lui avoit semblablement dit et requis de soy rendre en habillement, icelui jour de dymenche, audit lieu du Breuil Barret, et qu'il estoit content de y aller en la compaignie dudit Jousseaume, avec lequel il avoit esté par plusieurs foiz en nostre service ou fait de noz guerres. Et se habilla ledit suppliant de ses brigandines et salade et print ung voulge en sa main et se mist en la compaignie dudit Jousseaume et prindrent le chemin à tirer vers ledit

Breuil Barret. Et quant ilz furent au vilaige du Tail...La suite du récit est exactement semblable au texte des lettres précédentes, données en faveur de Jacques Jousseaume., ung nommé Mathurin Hariau d'un traict par le bras, Et pendant icelui temps, presque tout le peuple d'iceluy bourg ou vilaige du Breuil Barret et des vilaiges et pais d'environ, qui savoient que l'en vouloit prandre ledit Rousseau et sesdiz complices pour les mener à justice, se rendit jusques au nombre de deux cens personnes ou environ, les aucuns embastonnez et les autres non, devant ladicte maison en laquelle ledit Rousseau et sesdiz complices estoient [et] tiroient tousjours traictz d'arbaleste et de coulevrine, comme dit est. Et environ souleil couchant, ledit Marot, substitut dessus dit, et Guillaume Guerart, nostre sergent...La fin est la reproduction textuelle desdites lettres en faveur de J. Jousseaume. Donné à Razillé près Chinon, ou moys de may lan de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviime.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. Rolant. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCX Mai 1459

Rémission accordée à Mathurin Marot, substitut du procureur du roi en Poitou au siège de Fontenay-le-Comte, poursuivi comme complice de la mort d'Hector Rousssau.

AN JJ. 188, n° 90, fol. 44 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Mathurin Marot, substitut de nostre procureur en Poictou ou ressort et siège de Fontenay le Conte, contenant que, comme ès assises royaulx tenues audit lieu de Fontenay, ou moys d'avril l'an mil cccc. cinquante huit, par deliberacion de noz officiers illec, eussent esté octroyées lettres par nostre seneschal de Poictou ou son lieutenant, adreçans au premier nostre sergent, pour prandre au corps feu maistre Hector Rousseau et ses complices et les mener prisonniers à Poictiers, pour ilec ester à droit, pour occasion de certaines pilleries, roberies, ravissemens de femmes, voyes de fait contre noz officiers et autres excez, crimes, deliz et malefices, dont icelui Rousseau et sesdiz complices estoient trouvez chargez et coupables, et avecques ce eust esté octroyé par la deliberacion que dessus, pour ce que ledit Rousseau estoit coustumier de user de voyes de fait et desobeissances, lettres de commission audit suppliant pour faire mettre à execucion lesdictes lettres de nostredit seneschal contre ledit Rousseau. Par le moyen de quoy icelui supliant, saichant et adverty que pour lesdictes desobeissances et voyes de fait dont usoit icelui feu Rousseau, et aussi pour plusieurs gens de mauvaise et dissolue vie, qu'il avoit et tenoit en sa compaignie, ne seroit pas à lui possible mettre et faire mettre lesdictes lettres à execucion sans grande aide, bailla lesdictes lettres pour les executer à Guillaume Guerart, nostre sergent, et en ce faisant manda par ses lettres à Jacques Jousseaume, escuier, seigneur de la Geffardière, que en aide de justice il se trouvast à certain jour lors ensuivant, en certain lieu où ledit Rousseau se tenoit, en bon et suffisant habillement armez pour lui aider à mettre lesdictes lettres à execucion contre ledit Rousseau. Et ce fait, aucun temps après, iceulx supliant et Guerard, armez d'unes brigandines et d'aucuns autres habillemens de guerre, accompaignez de Jehan Dexmer, sergent de feu nostre cousin Artur, en son vivant duc de Bretaigne, connestable de France derrenier trespassé, embastonné d'une javeline et d'une espée, Estienne BeraultC'est ce Bérault qui lança le trait d'arbalète dont fut tué Hector Rousseau, suivant plusieurs actes du procès intenté aux meurtriers par la veuve et le frère de la victime., serviteur dudit supliant et franc archer, armé d'unes brigandines et tenant ung voulge et une espée, et d'une arbaleste avec du trait, et d'un autre nommé Simon, aussi franc archer, armé d'unes brigandines et tenant ung voulge et une espée, partirent dudit lieu de Fontenay et s'en alèrent audit lieu où ledit Rousseau estoit, où ilz arrivèrent environ souleil couchant, et se transportèrent devant la maison où ledit Rousseau estoit, qui avoit avec lui huit ou dix hommes armez et embastonnez d'armes invasibles et deffendues pour resister à ladicte execucion. Au devant de laquelle maison, ilz trouvèrent ledit Jousseaume qui les attendoit pour obeir à justice, armé comme mandé lui estoit, et ses gens, aussi avec luy Mathurin de Pelevoisin, chevalier, Nicolas Martin et plusieurs gens du païs en grant nombre, qui s'i estoient renduz ; contre lesquelz ledit Rousseau et ses complices avoient jà tiré plusieurs traictz tant d'arbalestes que de coulevrines, dont ilz avoient blecié plusieurs de ceulx qui estoient devant ladicte maison, comme il fut [r]aporté audit supliant, lequel, pour occasion desdictes rebellions qui luy furent lors dictes et proferées par ceulx qui estoient dedans ladicte maison, pria et requist audit de Pelevoisin, Jousseaume, Nicolas Martin, leurs gens et serviteurs et autres ilec presens, qu'ilz aidassent et donnassent conseil, confort et aide audit Guerart, nostre sergent, executeur desdictes lettres, et atant se departy d'ilec et s en ala malade et mal disposé en la maison d'un nommé Colas Ferret, au lieu appellé le Breuil Barret, et luy estant en icelle maison, oyt dire que le feu s'estoit prins en ladicte maison où estoit ledit feu Rousseau et que ledit feu Rousseau avoit esté tué d'un trait d'arbaleste. Pour occasion duquel cas, qui fut fait au desceu dudit supliant et lui estant en ladicte maison, nostre procureur oudit païs de Poictou fist adjourner lesdiz suppliant, Jousseaume, Martin et autres à comparoir en personne devant nostredit seneschal de Poictou à Poictiers, à certain jour lors ensuivant. Auquel jour ilz comparurent et furent constituez prisonniers ès prisons de la Conciergerie de nostre Palais audit Poictiers ; et eulx estans ilec prisonniers, maistre Guillaume Artault, premier huissier en nostre court de Parlement, par vertu de certaines lettres obtenues ou nom de Loyse Rabatelle, veuve, et autres parens d'icelui Rousseau, adjourna lesdiz supliant, d'Apelevoisin, Jous- seaume et Martin et autres à comparoir en personne en nostredicte court de Parlement, à certain jour ensuivant, sur peine de banissement et de confiscacion de corps et de biens, pour raison dudit cas, pour lequel ilz avoient paravant esté adjournez et estoient arrestez, constituez et detenuz prisonniers à Poictiers, comme dit est. Auquel jour ne s'est ledit suppliant comparu, pour doubte que rigueur de justice lui feust faicte, avant qu'il eust peu monstrer de ses justificacions et deffenses ; et par ce a esté mis en trois deffaulx en nostredicte court, ainsi que on dit, et adjourné sur le prouffit d'iceulx. Et doubte ledit suppliant que, jasoit ce que par lui ne son commandement ledit cas n'ait esté fait et qu'il ne feust alé audit lieu du Breuil Barret en entencion seulement de executer et faire executer lesdictes lettres de nostredit seneschal, ainsi que par icelles mandé lui estoit, que on veuille au moyen d'iceluy cas et desdiz trois deffaulx, contre lui proceder à rigueur de justice, mesmement pour ce que icelui cas advint en la presence d'aucuns qu'il manda venir à l'aide de justice et qu'il estoit lors près dudit lieu où ledit cas fut commis et perpetré, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties ; en nous humblement requerant que, etc., nous lui veuillons nosdictes grace et misericorde impartir. Pour quoy nous, les choses dessusdictes considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant le fait et cas dessus touché avons quicté, remis et pardonné, etc., satisfacion faicte à partie civilement tant seulement, se faicte n'est. Si donnons en mandement, par cesdictes presentes, à noz amez et feaulx conseillers les gens tenans et qui tendront nostre Parlement à Paris et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Razillé près Chinon, ou moys de may l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviie.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. Rolant, —-Contentor. Chaligaut.

MCCCXI Mai 1459

Rémission accordée à Jean de Puyguyon, écuyer, seigneur du Teil, pour les mêmes faits que les précédents.

AN JJ. 188, n° 93, fol. 46 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Jehan de PuyguyonSur un registre d'aveux rendus à Artur comte de Richemont, seigneur de Parthenay, pour les fiefs mouvant de la châtellenie de Mervent, a été transcrit celui de Germain de Vivonne, sr d'Aubigné, à cause de ses seigneurie, forteresse et dépendances de laChâtaigneraie, en date du 16 novembre 1446. Parmi les noms de ceux qui tenaient des arrière-fiefs sous l'hommage de ladite seigneurie de la Chàtaigneraie, on lit : « Item, Jehan de Puyguyon, seigneur du Puybretonnea (le Puy-Bretonneau, maison noble, commune de Saint-Mesmin, canton de Pouzauges), homme plain pour raison d'une borderie et autres choses assises en la paroisse de Montnoblet (Menomblet). » (Arch. nat., R1* 204, fol. 43 v°.) Dans un autre registre de la même époque, où sont inscrites les redevances dues au s'de Parthenay à cause de sa terre et seigneurie de Secondigny, se trouve cette autre mention : « Jehan de Puiguion, pour une borderie de terre appellée la Golardière, qu'il tient à hommage plein de Saint-Mesmin, xv. sols. » (Id., R1* 190, fol. 241.) Il s'agit très vraisemblablement dans ces deux textes du Jean de Puyguyon, qualifié dans nos lettres « seigneur du Teil en Poictou ». C'est le même encore que l'on trouve dans l'enquête faite, en 1439, par Adam Hodon, secrétaire du roi, commissaire en Poitou sur le fait des exempts et autres dudit pays et comté, parmi les nobles de la châtellenie de Pouzauges qui s'étaient soustraits, sans se faire excuser, au service qu'ils devaient au roi dans ses armées, et qui eut à payer pour sa part des amendes quatre livres dix sols. (Bibl. nat., ms. fr. 24160, fol. 37 v°.) Jean de Puyguyon, écuyer, seigneur du Puy-Bretonneau, était le troisième fils de Guillaume, seigneur de Puyguyon (lequel était, en 1380, sous la tutelle de son oncle, Jean de Puyguyon), et de Jeanne Racodet, fille de Renaud, sr de « la Barbote. » Il rendit aveu de sa borderie du Puy-Herbert au seigneur de Saint-Mesmin, et obtint du juge de Parthenay, le 5 septembre 1446, une sentence qui déboutait de sa requête Jean de Montfaucon, écuyer, seigneur dudit Saint-Mesmin, lequel prétendait que le métayer du Puy-Bretonneau était sujet au guet et à la garde du château de Saint-Mesmin. (Dict. des familles du Poitou, 1er édition, t. II, p. 568.) Jacques de Puyguyon, fils de Jean, obtint à son tour des lettres de rémission, le 20 janvier 1462, pour sa participation au meurtre d'Hector Rousseau ; elles sont publiées dans le présent volume, ci-dessous, n° MCCCLIII. escuier, seigneur du Teil en Poictou, contenant que, le xiiiie jour de may mil cccc. cinquante huit, Jacques Jousseaume, aussi escuier, seigneur de la Geffardière, se transporta en l'ostel dudit supliant ouquel il ne le trouva pas, et pour ce dist aux gens et serviteurs d'iceluy supliant que, quant il seroit venu, ilz le feissent aler au lieu du Breuil Barret, où iceluy Jousseaume aloit, ainsi qu'il disoit, pour aider à prendre par justice au corps maistre Hector Rousseau et ses aliez et complices, et les mener prisonniers en nostre ville de Poictiers, pour ilec ester à droit et recevoir pugnicion de certains excès, crimes et malefices par luy commis et perpetrez, et que là se devoit rendre Mathurin Marot, substitut à Fontenay le Conte pour nostre procureur en Poictou, et autres noz officiers, qui de ce faire avoient commission de nostre seneschal de Poictou. Et tantost après arriva ledit suppliant en sondit hostel, où il trouva encores ledit Jousseaume, lequel lui dist ce que dessus est dit. Et incontinent icelui Jousseaume se mist à chemin et six ou sept compaignons, ses gens et serviteurs avec lui, pour aler audit lieu du Breuil Barret, ensemble ledit supliant et plusieurs autres. Et si tost qu'ilz furent arrivez devant l'ostel dudit maistre Hector, icelui maistre Hector et sesdiz complices tirèrent à l'encontre d'eulx plusieurs traitz d'arbalestes et de coulevrines, et en blecèrent aucuns. Et tantost après vit venir nostre amé et feal Mathurin d'Appellevoisin, chevalier, et plusieurs autres en sa compaignie, au devant duquel icelui supliant ala, et en y alant, frère Charles RousseauCharles Rousseau, religieux de l'ordre de Saint-Benoit (on ne dit pas à quelle abbaye ou à quel prieuré il appartenait), était aussi plaignant avec sa belle-sœur, Jeanne Rabateau, et son frère Albert, au procès intenté aux meurtriers d'Hector Rousseau. (Acte du 10 septembre 1463. X2a 30, fol. 195 v°.), frère dudit maistre Hector, le suivy tant qu'il peut, et quant il fut près de lui, dist à iceluy supliant telles paroles ou semblables : « Ha ! vilain, tu mourras ». Auquel ledit supliant deffendit qu'il ne se aprouchast point de luy, en lui deffendant sa personne, dont icelui Charles ne voult riens faire et print trois ou quatre grosses pierres, desquelles il frappa par plusieurs foiz ledit supliant, dont il le bleça très fort. Et après que ledit d'Appelevoisin fut ilec arrivé, ledit supliant le vit aler parler audit maistre Hector, et ledit Jousseaume et autres avec eulx. Auquel Rousseau ledit d'Appelevoisin dist qu'il avoit ilec esté envoyé pour le prandre et mener par devers nostre seneschal de Poictou ; lequel Rousseau lui respondit qu'il ne lui daigneroit faire obeissance ne aler parler à luy quelque mandement qu'il eust donné. Et lors ledit d'Appelevoisin dit derechief audit maistre Hector de se faire nostre prisonnier. A quoy iceluy Rousseau respondit en tele manière : « Fy du roy et de ton mandement », et disoit à iceluy d'Appelevoisin telz motz : « Ladre, pren tes cliquettes et t'en va à ta ladrerie », et plusieurs autres grans injures. Et aussi appela ledit Jousseaune, qui estoit avec ledit d'Apelevoisin : «  Vilain cordelier », en disant telles parolles : « Tu n'es pas des Jousseaumes, si non de bastardie, tu es filz du cordelier de la Basinette ». Pour lesquelles parolles et rebellions dudit Hector, ledit d'Apelevoisin voult entrer dedens ledit hostel dudit Rousseau, lequel Rousseau, pour à ce obvier, gettoit et fesoit getter grosses pierres et aussi tirer plusieurs traictz d'arbaleste et de coulevrines, dont furent bleciez ung nommé Maturin Herveau, Colas Martin et autres, et convint que lesdiz d'Appellevoisin et Jousseaume et ceulx qui estoient avec eulx se reculassent de ladicte maison. Et puis après, iceluy Hector appela ledit d'Apelevoisin et luy dist qu'il alast parler à luy à seurté, dont ledit d'Apelevoisin fut content et y ala ; et quant il fut près dudit Rousseau, iceluy Rousseau s'efforça de le frapper par la gorge d'une espée qu'il tenoit et l'eust tué, se n'eust esté sa salade qu'il avoit en la teste. Et après ce ledit d'Appelevoisin dist audit Rousseau qu'il se rendist prisonnier, ce qu'il ne voult faire, et atant s'en revint ledit d'Apelevoisin. Et environ souleil couché, vit ledit supliant arriver ilec ledit Mathurin Marot, en sa compaignie quatre compaignons, et si tost qu'il y fut arrivé, vint parler ausdiz d'Appelevoisin, Jousseaume, supliant et autres touchant la prinse dudit maistre Hector. Lesquelz recitèrent audit Marot les rebellions et desobeissances que avoit faictes ledit Rousseau. Et lors iceluy Marot dist aux dessusdiz qu'il convenoit prandre ledit Rousseau et que, pour ce faire, il avoit amené des sergens et autres gens, en les requerant de donner confort et aide ausdiz sergens, et mesmement à Guillaume Guerart, nostre sergent. Après lesquelles parolles, ledit Marot s'en ala et enmena ses chevaulx ou bourg dudit Breuil Barret, en l'ostel d'un nommé Ferret. Et après que ledit Marot s'en fut alé, ledit Guillaume, nostre sergent, se aproucha dudit maistre Hector, auquel en parlant, à lui fist commandement à haulte voix de par nous qu'il fist ouverture de sondit hostel et qu'il se voulsist rendre nostre prisonnier, et qu'il avoit mandement de le prandre. Auquel ledit Hector respondit qu'il ne se rendroit point à lui ne à nous prisonnier, en disant fi du roy, de la royne et de nostredit sergent, et que autresfoiz il avoit bien gouverné le vilain trippier Marot, et qu'il le gouverneroit encores mieulx. Et après, nostredit sergent dist à iceluy Rousseau qu'il le faisoit nostre prisonnier, en lui faisant tousjours commandement de faire obeissance et de se rendre prisonnier, dont il ne voult riens faire, et dist qu'il aimeroit mieulx vivre et mourir en ladicte maison que se rendre prisonnier, feust à nous ou à autre. Et cependant vit ledit supliant par les fenestres dudit hostel le feu tout ynde au dedens d'iceluy hostel, qui yssoit par le dessus des cheminées, lequel feu sentoit à souffre et pouldre de canon, en telle manière que on ne povoit ilec durer. Et tantost après ledit Rousseau, qui estoit sur ledit hostel, fut frappé au travers du corps d'un traict d'arbaleste. Et après ledit cas advenu et par raison d'icelui, informacion precedent, nostredit procureur en Poictou fist adjourner ledit supliant et lesdiz d'Appelvoisin, Marot, Martin et autres à comparoir en personne par devant nostre dit seneschal de Poictou, ou son lieutenant à Poictiers, etc... La suite comme aux lettres précédentes en faveur de Mathurin Marot, p. 149 ci-dessus.. Donné à Razillé, ou moys de may l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviie.

Ainsi signé : Par le roy, en son conseil. Rolant. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXII Mai 1459

Rémission accordée à Jean Derveau, dit Chauvin, qui avait pris part à la même affaire.

AN JJ. 188, n° 94, fol. 47 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receue l'umble suplicacion de Jehan Derveau, dit Chauvin, demourant à Monternoys, aagé de quarante cinq ans ou environ, contenant que, le xiiiie jour de may mil cccc. cinquante huit, il fut au lieu du Breuil Barret, par le commandement de nostre amé Jacques Jousseaume, escuier, seigneur de la Geffardière, lequel lui avoit dit qu'il aloit audit lieu du Breuil Barret et que Mathurin Marot, substitut de nostre procureur en Poictou, lui avoit mandé se y trouver et qu'il avoit commission de prendre maistre Hector Rousseau. Et après qu'il y fut arrivé, vit devant ladicte maison dudit maistre Hector plusieurs personnes armez et embastonnez, à rencontre desquelz ledit Rousseau et ceulx qui estoient avec lui en ladicte maison tirèrent d'une coulevrine et plusieurs traictz d'arbaleste et gettèrent pierres à rencontre de ceulx qui ilec estoient venuz, pour prandre ledit maistre Hector. Et ledit supliant estant ilec avec les autres, vit ledit Jousseaume parler audit Rousseau par plusieurs foiz, et disoit à iceluy Rous- seau qu'il se rendist à nous ou à nostre seneschal de Poictou, et qu'il n'auroit point de mal, et yroit avec luy à Poictiers ou par devers nostredit seneschal. Auquel Jousseaume ledit maistre Hector Rousseau respondit en l'appelant vilain ladre, filz de putain et de cordelier, et disant teles paroles : « Fy du roy et de la royne et dudit seneschal. Avant que de me rendre, il mourra plus de cinquante hommes devant moi ». Et après, la femme dudit Rousseau sortit dudit hostel et vint parler audit Jousseaume et luy suplia et requist qu'il lui pleust se deporter et ne courist point sur audit Rousseau, son mary. A laquelle ledit Jousseaume respondit et dist que ledit Rousseau alast parler à luy, et que s'il se vouloit rendre, qu'il n'y auroit point de mal; et atant s'en retourna ladite femme audit hostel. Et pou après elle retourna audit Jousseaume, auquel elle dist qu'elle creoit que sondit mary avoit le diable bu corps et qu'il ne se rendroit point pour roy ne pour royne, ne pour ledit seneschal, et que incontinent qu'elle lui avoit parlé de soy rendre, qu'il l'avoit cuidé tuer et regnia Dieu que s'elle lui en parloit jamais, qu'il la tueroit. Et lors ledit Jousseaume luy dist qu'elle n'y retournast plus. Et tantost après ledit Hector Rousseau vint à la fenestre dudit hostel, qui estoit serrée, et adreça ses parolles audit Jousseaume, en lui disant : « Vilain ladre, es tu ycy venu pour prescher ?» et d'un voulge qu'il tenoit cuida frapper ledit Jousseaume qui s'estoit aprouché de ladicte fenestre, pour lui remonstrer qu'il se rendist. Et semblablement s'aproucha de ladicte fenestre nostre amé et feal Mathurin d'Appellevoisin, chevalier, et luy pria et requist qu'il se rendist et obeist à justice. Mais ledit Rousseau l'appela vilain ladre, filz de putain, comme il avoit fait ledit Jousseaume, et lui dist fy de lui et qu'il ne mourroit que de ses mains, et les seingneroit de la maistresse vayne du col, et d'une grant espée à deux mains qu'il avoit le frappa contre sa salade, et l'eust iceluy Rousseau [tué] ou fort blecié, comme il cuide, se n'eust esté sa salade. Et incontinent après, ledit d'Appelevoisin ala à la porte dudit hostel pour entrer dedens, et quant ledit Rousseau sentit ladite porte estre rompue, requist audit d'Apelevoisin qu'il alast parler à luy à seurté. Lequel y ala et y demoura ung grant quart d'eure ou environ, et ne scet ledit supliant qu'ilz dirent ensemble ne que ledit d'Appelevoisin fist, mais tantost après qu'il fut sorty, oyt qu'il dist audit Rousseau qu'il se gardast bien et qu'il ne sauroit tant faire qu'il ne feust prins prisonnier, avant que l'en partist d'ilec, puisqu'il ne se vouloit rendre. Lequel maistre Hector dist audit d'Appelevoisin teles parolles ou semblables : « Fy du roy, de la royne, du seneschal, de la senesclialle et des vilains tripiers de Poitiers et de Fontenay », et que autresfoiz il les avoit bien gouvernez et que si feroit il encores, et ne les craingnoit riens, et feussent ilz plus qu'ilz n'estoient. Et cependant les portes dudit hostel furent fermées, en manière qu'on n'y povoit entrer. Et ce fait, Guillaume Guerart, nostre sergent, qui illec estoit arrivé, fist commandement de par nous et nostredit seneschal audit Rousseau, qu'il se rendist, et qu'il avoit commission de le faire prandre et faire nostre prisonnier. Auquel maistre Hector dist fy de luy et de son commandement, en regniant Dieu, qu'il avoit autresfoiz cliauffé les vilains de Fontenay et que si feroit il encores. Et commancèrent luy et ceulx de sa compaignie à tirer d'arbalestes et geter pierres, en regniant Dieu qu'il tueroit tous ceulx qui estoient devant ladicte maison et les feroit mourir. Et pour ce fist nostredit sergent commandement ausdiz Jousseaume, d'Appelevoisin et autres qui ilec estoient qu'ilz se meissent en ordonnance en tour ledit hostel, afin que ledit Rousseau feust prins et garder qu'il ne saillist. Et environ souleil couchant, vit ledit supliant le feu qui sailloit par une des clieminées dudit hostel et sentoit fort comme à souffre et à pouldre de canon. Et quant on aperceut le feu, chacun cria audit maistre Hector qu'il se rendist et qu'il estoit en grant dangier de se brûler oudit hostel. Et quant le feu fut fort prins, ledit supliant vit iceluy Rousseau s'en yssir par dessus ledit hostel, tenant une grant espée, et ceulx qui estoient avec luy dedens ledit hostel, jusques au nombre de huit ou neuf, s'en partirent et se rendirent, ce que ne voult faire ledit Rouseau, mais regnia Dieu que jamais il ne se rendroit et gettoit des thieulles de ladicte maison à ceulx qui estoient devant ladicte maison. Et tantost après vit ledit maistre Hector Rousseau frappé d'un trait darbaleste, dont il cheut sur ladicte maison, en disant : « Ha ! tu m'as tué ! » et ne parla plus que ledit supliant oyst, dont il fut bien esbay. Et après monta ung homme sur ladicte maison pour descendre ledit Rousseau qui jà estoit mort. Et lors ung chacun se departy. A l'occasion duquel cas et pour raison d'icelui, informacion precedent, nostredit procureur en Poictou fist adjourner ledit supliant et lesdiz d'Apelevoisin, Marot, Martin et autres à comparoir par devant nostredit seneschal de Poitou ou son lieutenant à Poictiers, etc... La fin comme aux lettres précédentes en faveur de Mathurin Marot, p. 149 ci-dessus. Donné à Razillé près Chinon, ou mois de may l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviie.

Ainsi signé: Par le roy en son conseil. Rolant. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXIII Juin 1459

Rémission en faveur de Maurice Herpin, du Breuil-Barret, poursuivi comme complice du meurtre d'Hector Rousseau.

AN JJ. 188, n° 118, fol. 57 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'um- blé supplicacion de Morice Herpin, de la parroisse du Brueil Barret, contenant que le...Blanc au registre. jour de may l'an mil cccc. cinquante huit, ledit suppliant estant audit lieu s'en ala à la messe et, après qu'il l'eut oye et qu'elle fut dicte, s'en sortit hors de l'eglise et trouva maistre Hector Rousseau, lequel estoit avecques la femme Guillaume Jarrouceau« Guillaume Jarroceau et Pierre Jarroceau, son filz, eulx disans nobles, composez à XV. livres, pour non avoir suy les armes par aucun temps passé », lit-on dans l'enquête faite en 1439 par Adam Hodon, secrétaire du roi, commissaire en Poitou pour la recherche de ceux qui s'étaient exemptés sans motif, soit du service militaire, soit du payement des tailles. (Bibl. nat., ms. fr. 24160, fol. 34 v°.) Ils sont inscrits parmi les personnes taxées dans la châtellenie de Mortagnesur-Sèvre. Voici une autre mention qui se rapporte avec plus de certitude au personnage nommé dans ces lettres de rémission : « Guillaume Jarrouceau, homme plain à cause d'un fief appellé le Chardonnoys, assis en la parroisse de Bruil Barret, sous l'hommage d'Appellevoisin, lieu et herbergement en la parroisse de Saint Pol en Gastine », novembre 1446. (Arch. nat., R1a 204, fol 23.) Cette famille noble était d'ailleurs originaire de cette région, du moins elle y était possessionnée dès le milieu du XIVe siècle. Un Jean Jarrousseau rendit aveu, en octobre 1368, pour la prairie de Saint-Médard-des-Prés, mouvant de Fontenay-le-Comte. (Id., P. 1145, fol. 44 v°.) Citons encore un accord passé, le 13 mars 1419 n. s., entre Jean Jarrouceau, fils de Pierre, neveu et héritier de Guillaume Jarrouceau, d'une part, et Catherine Rocher, veuve dudit Guillaume, alors remariée à Philippe Boscher. La contestation portait sur la jouissance de l'hébergement de la Thibaudière, avec étangs, garennes, prés, etc., sis en la paroisse d1 « Aubepère ». Guillaume Jarrouceau par son testament avait exprimé la volonté que sa veuve le tint et exploitât, tant qu'elle vivrait, et Jean Jarrouceau ne voulait pas lui en reconnaître le droit. (Id., X1c 117, vol. 209, n° 69.), seigneur de La Vau, lequel maistre Hector demanda audit suppliant où estoit Mathurin Herpin, son père, et icelluy suppliant luy respondi qu'il n'en savoit riens. Et dist oultre audit Rousseau ledit suppliant que ledit Mathurin, son père, avoit oy dire qu'il avoit ung mandement pour le prendre, et lors ledit Rousseau dist audit suppliant qu'il fist venir ledit Mathurin, son père, parler à luy, à heure de vespres, ou que, s'il n'y venoit, il luy feroit despendre quatre foiz plus qu'il n'avoit vaillant, et convya icelluy Rousseau ledit suppliant à disner avec luy, mais il n'y voult aler et luy dist qu'il devoit disner avec son frère en la ville. Et après disner, pour ce que le seigneur d'Appel- levoisin avant avoit dit audit suppliant qu'il luy sceust à dire où estoit Jacques Jousseaume et que, luy estant en ladicte eglise, avoit oy dire que ledit Jacques Jousseaume estoit au Teil en ladicte paroisse du Brueil Barret, s'en ala audit lieu du Teil où il trouva ledit Jousseaume, lequel luy demanda où estoit ledit seigneur d'Appellevoisin, et ledit suppliant luy dist quil cuidoit qu'il fust à son hostel à la Guerinère, et icelluy Jousseaume dist audit suppliant qu'il alast dire audit d'Appellevoisin que, comment que ce fust, qu'il se rendist audit lieu du Brueil Barret, et que Mathurin Marot, nostre procureur ou substitut de nostre procureur à Fontenay le Conte, se y devoit rendre ; lequel suppliant ala devers ledit seigneur d'Appellevoisin et luy dist que icelluy Jacques Jousseaume luy mandoit qu'il se rendist à luy audit lieu du Brueil Barret et que là ilz devoient trouver ledit Mathurin Marot ; lequel d'Appellevoisin dist audit suppliant qu'il se rendist audit lieu du Brueil Barret et alast tousjours devant, ce que ledit suppliant fist en l'ostel de Jehan Aubert. Et peu après arriva ilec ledit d'Appellevoisin, et trouva ledit suppliant auquel il bailla son cheval et se fist oster ses esperons, et dist audit suppliant qu'il mist son cheval en l'estable d'un nommé Guillaume de la CoussayeGuillaume de la Coussaye, dont il est question déjà dans les lettres de rémission en faveur de Mathurin d'Appelvoisin (ci-dessus, p. 132). ce qu'il fist ; et après qu'il le y eut mis, ala dire audit d'Appellevoisin qu'il avoit mis sondit cheval en ladite estable ; et icelluy d'Appellevoisin luy dist qu'il alast querir une espaule de mouton en l'ostel dudit Guillaume de la Coussaye, laquelle ledit suppliant ala querir et l'aporta audit d'Appellevoisin et deux pains blancs qu'il print en l'ostel de Perrette Gaclète. Après lesquelles choses, icelluy suppliant ala vers ledit lieu du Brueil Barret et vit venir ledit Marot et ung nommé Guillaume Guerart, nostre sergent ; lequel Guerart dist de par nous audit suppliant qu'il gardast son cheval, lequel suppliant print ledit cheval dudit Guerart et le mist en l'estable de Huguet GoulartDans les plaidoiries au Parlement, le 17 juillet 1439, on dit « l'hotel de messire Pierre Goulart et son fils ». On sait, d'autre part, qu'une branche au moins de cette famille nombreuse était établie près de Fontenay-le-Comte et dans la région voisine. Le 17 mai 1420, un Simon Goulart rendait aveu à Charles dauphin, comte de Poitou, pour le fief du Martrois en la paroisse de Saint-Médard-des-Prés. (Arch. nat., P. 1145, fol. 45.) et après s'en sortit de ladicte estable ; et quant il fut hors d'icelle, oy dire que le feu estoit en la maison dudit Rousseau. Et lors s'en ala icelluy suppliant vers la maison dudit Rousseau, à un gect de pierre près ou environ, et oyt dire que icelluy maistre Hector Rousseau estoit mort, et vit les gens dudit Rousseau qui sortoient par dessus ladicte maison pour doubte du feu ; et ala ledit suppliant veoir ledit maistre Hector Rousseau tout mort, qui avoit ung traict parmy le corps. Après lequel cas advenu et pour occasion d'icelluy, ledit suppliant a esté adjourné par Jehan Corbeau, nostre sergent, à comparoir en personne en nostre court de Parlement, par deux ou trois foiz, sur peine de bannissement, de confiscation de corps et de biens ; et doubtant que rigueur de justice luy fust faicte, avant qu'il peust monstrer de ses justificacions et deffences, n'est aucunement audit jour ou jours comparu, et a esté mis en deux ou en trois defaulx en nostredicte court, si comme l'en dit. Et doubte icelluy suppliant, jaçoit ce que par luy ledit cas n'ait esté fait, que on vueille contre luy proceder à rigueur de justice, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties, humblement requerant que, etc., nous luy vueillons sur ce impartir nosdites grace et misericorde. Pourquoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, à noz amez et feaulx conseillers les gens tenans et qui tendront nostre Parlement à Paris, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Razillé, ou mois de juing l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviie.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. Rolant. — Visa. Contentor. J. Du Ban.

MCCCXIV Juin 1459

Rémission octroyée à Jean Beufmont, écuyer, poursuivi comme complice du meurtre d'Hector Rousseau.

AN JJ. 188, n° 119, fol. 57 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons nous avoir receue l'umble supplicacion de nostre amé Jehan BeufmontLe Dict. des familles du Poitou a recueilli les noms de quatre membres seulement de cette famille noble de la Gâtine, deux du XIVe siècle et deux du XVe : Miles Beufmont, écuyer, sr de la Courvaisière, et sa fille Louise, mariée le 16 janvier 1430, à Pouzauges, avec Nicolas Tortreau, sr de la Tortrelière. (Nouv, édit., t. I, p. 516.) Nous n'avons nous-même qu'une mention à y ajouter, celle de Guillaume Beufmont, qui, assigné à la Cour des Aides (ou, pour mieux dire, devant les généraux surie fait des aides), en compagnie des héritiers de feu Ameil Franchaut, collecteur des aides en la paroisse de Verruye, par Henri Blandin, notaire et secrétaire du roi, depuis élu en Poitou, agissant en qualité d'ancien receveur de l'aide de 108.000 livres imposée par le roi, l'an 1425, en Poitou, se laissa condamner par défaut, le 14 décembre 1442. (Arch. nat., Z1a 13, fol. 119.) escuier, demourant à la Geffardière, aagé de xxx. ans ou environ, contenant que, ou mois de may mil cccc. cinquante huit et un jour de samedi devers le soir, nostre amé Jaques Jousseaume, escuier, seigneur dudit lieu de la Geffardière, son maistre, lui dist que Mathurin Marot, substitut à Fontenay le Conte de nostre procureur de Poictou, lui avoit fait savoir qu'il se rendist le lendemain, jour de dimenche, avecques ses gens au Brueil Barret, pour aider à prandre maistre Hector Rousseau et que de ce il l'avoit prié et requis ; et dist audit suppliant qu'il se mist à point pour aler avecques lui. Et devers le soir, lesdiz seigneur de la Geffardière et suppliant montèrent à cheval et s'en alèrent à l'ostel de Colas Martin, lequel s'en ala avecques eulx. Et après s'en alèrent tous ensemble à coucher au Tail, en l'ostel de Jehan de Puyguyon, seigneur dudit lieu, ouquel ilz demourèrent jusques au dimenche ensuivant, qui fut le dimenche devant la feste de la Penthecouste oudit an mil cccc.lviii. Et après ledit de la Geffardière, Jehan Lermener et Jehan de Puyguion et ledit suppliant montèrent à cheval et s'en alèrent à Brueil Barret, cuidans y trouver ledit Marot, lequel avoit escript audit seigneur de la Geffardière qu'il se y rendist avecques ses gens en habillement de guerre, pour mettre à execucion certaines lettres de commission de nostre seneschal de Poictou à l'encontre de maistre Hector Rousseau, le prandre au corps et ses complices et les mener en prison en nostre conciergerie de nostre palais de Poictiers, pour ilec ester à droit et recevoir pugnicion des cas, crimes et malefices, commis et perpetrez par ledit Rousseau et sesdiz complices. Après lesquelz s'en alèrent à pié Jaques de Puyguion, Colas Martin, Maturin Ayreau, Jehan Derveau, dit Chauvin, et plusieurs autres. Et quant ilz furent arrivez audit lieu du Brueil Barret, ledit maistre Hector et deux autres compaignons tenans arbalestes bandées alèrent à l'encontre de ceulx qui estoient venuz à cheval et tirèrent deux ou trois trectz contre eulx ; et quant il vit ceulx de pié, il se retira avecques sesdiz complices en sondit hostel. Et après que lesdiz compaignons qui estoient là venuz furent tous armez, ledit de la Geffardière dist audit Rousseau qu'il n'estoit nul mestier de soy deffendre de lui, car il n'estoit ilec venu sinon pour secourir ledit Maturin Marot, quant il seroit venu pour mettre ung mandement de justice à execucion, qu'il avoit à executer contre ledit Rousseau, et qu'il feroit bien de faire obeissance à justice. Lequel Rousseau respondit qu'il ne feroit pour roy ne pour royne riens, en appellant ledit de la Geffardière villain ladre et en renyant Dieu qu'il le feroit morir de male mort, lui et tousles autres qui estoient ilec venuz avecques lui. Et lors ledit de la Geffardière, voyant la grant fureur dudit Rousseau, qui tousjours faisoit guerre, en tirant traictz d'arbalestes et gectant pierres, envoya loger ses chevaulx au bourg dudit Brueil Barret, et demoura devant ladicte maison dudit Rousseau, lui et les autres, en attendant ledit Maturin Marot. Et ce pendant survint ilec nostre amé et feal Mathelin d'AppelIevoisin, chevalier, avec ung varlet, lequel d'AppelIevoisin dist audit Rousseau qu'il estoit ilec venu, de par nostre seneschal de Poictou, pour le faire nostre prisonnier. Auquel ledit Rousseau respondit, en lui disant : « A ! es tu venu, villain traistre, chevalier ladre », en renyant Dieu qu'il le feroit mourir. Et aussi dist audit seigneur de la Geffardière en rappellant filz du cordelier de la Basinete, et disant fy du roy, de la royne, du seneschal et de sa femme ; et dist plusieurs autres injures. Et ilec lesdiz d'AppelIevoisin et de la Geffardière attendirent jusques environ souleil couchant que ledit Mathurin Marot arriva, en sa compaignie Guillaume Guerart, nostre sergent, et trois autres hommes armez. Lequel Guerart, incontinent qu'il fut arrivé, monstra ung mandement, et par vertu d'icellui fist commandement audit Rousseau de se rendre nostre prisonnier. Lequel Rousseau, en perseverant tousjours en sa malice, menasses, rebellions et desobeissances, dist à nostre dit sergent telles parolles : « Fi de toi et de ton mandement, du roy et de la royne», en renyant Dieu qu'il le tueroit et tous les autres villains trippiers de Fontenay. Et aussi dist audit Marot, en jurant la char Dieu, qu'il le feroit mourir, ensemble tousles villains qui ilec estoient devant lui, et dist plusieurs autres injures. Et lors nostredit sergent lui dist qu'il le faisoit nostre prisonnier, et fist commandement à tous ceulx qui ilec estoient de le secourir et aider à prandre ledit Rousseau. Et pour ce qu'il n'osa entrer en ladicte maison par les portes, il monta par dessus la maison d'un bon homme, qui estoit près et joignant d'icelle dudit Rousseau, et ceulx qui là estoient se misdrent à l'entour de ladicte maison dudit Rousseau. Lequel Rousseau et ses complices qui estoient dedans ladicte maison, jusques au nombre de neuf ou dix personnes, tiroient traictz d'arbalestes, de coulevrines et gectoient grosses pierres à rencontre de ceulx qui estoient devant eulx. Et quant ilz eurent tiré le derrenier coup de leur coulevrine, ledit suppliant vit tantost après sortir par l'une des cheminées de ladicte maison une flembe de feu toute ynde, qui sailloit bien hault, puant très fort à souffre et gresse ; et incontinent vit le feu en ladicte maison, maiz neantmoins ledit Rousseau et sesdiz complices qui estoient dedans se deffendant tousjours, et après ledit Rousseau dessus ladicte maison, au droit d'une cheminée, tenant une grant espée et renyant Dieu qu'il en tueroit. Et tantost après le vit cheoir sur ladicte maison, au moien d'un traict d'arbaleste dont il fut feru à la poictrine, dont il ala tantost après de vie à trespas. Après lequel cas advenu et pour raison d'icellui, nostre procureur en Poictou, informacion precedant, fist adjourner, etc....La fin de ces lettres est de même teneur que celles dont bénéficia Jacques Jousseaume (ci-dessus, n° MCCCVIII, p. 143). Donné à Razillé, ou mois de juing l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviime.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. Rolant. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXV Juin 1459

Rémission octroyée à Maurice Marbeuf, complice du meurtre de Jean Cheverron, fermier de l'imposition de la draperie à Montaigu, qui l'avait ajourné devant les élus de Poitou, à Mauléon.

AN JJ. 188, n° 111, fol. 55 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Morice Marbeuf

Guillaume Marbeuf, parent de Maurice, avait été condamné à cent livres tournois d'amende, en 1439, conjointement avec six autres commissaires et collecteurs des tailles de la ville et châtellenie de Montaigu, par Adam Hodon, secrétaire du roi et enquêteur en Poitou, « tant pour trop fraiz qu'ilz pourroient avoir mis en leurs dictes tailles que pour non avoir apporté la pluspart de leurs rolles, commissions et assiètes du temps passé. » (Bibl. nat., ms. fr. 24160, fol. 40.) Ils n'avaient sans doute rien de commun avec la famille noble de Marbeuf, originaire de Bretagne, dont La Chenaye-Desbois, Dict. de la noblesse, a publié la généalogie. Maurice Marbeuf, Guillaume Guilhaud et Jean Dujardin (leurs noms sont ainsi écrits sur le registre du Parlement, au lieu de « Quillaut » et « Jardrin ») avaient obtenu chacun séparément des lettres de rémission du meurtre de Jean Chevron, Cheveron ou Cheverron. La veuve de la victime et ses autres héritiers s'étaient accordés avec les meurtriers et avaient finalement consenti à l'entérinement de ces lettres par le sénéchal de Poitou, auquel elles étaient adressées. Mais l'un de ses fils, messire Nicole Chevron, prêtre, chanoine en l'une des églises d'Orléans, et se disant étudiant à l'Université de cette ville, s'y était opposé et, pour avoir réparation du meurtre, avait assigné ses trois auteurs par-devant le conservateur des privilèges de ladite Université. Le sénéchal avait rendu une ordonnance interdisant à celui-ci de prendre connaissance de l'affaire et la lui avait fait signifier par Jean Grasmouton, sergent royal en Poitou. Alors Nicole Çhevron s'était porté appelant au Parlement de cette procédure contre le sénéchal et le sergent. La cause d'appel fut plaidée devant la cour, Ie 25 mai 1462. Toute la question se résumait à savoir qui, du sénéchal de Poitou ou du conservateur des privilèges de l'Université d'Orléans, devait être juge du principal, c'est-àdire de l'affaire d'assassinat et de l'entérinement des rémissions. Nicole Chevron fit exposer ses raisons par l'avocat Nanterre, et Artaud plaida pour Maurice Marbeuf. Le procureur général requit une confrontation entre celui-ci et ses deux complices, « pour averer la verité du cas ». La suite du procès ne se retrouve pas dans les registres du Parlement. Il n'y a d'intéressant en réalité dans les plaidoiries que la version du crime exposée par le demandeur; il la donne d'ailleurs sommairement, puisqu'il s'agit surtout de la procédure. Jean Chevron, son père, était en son vivant notable homme, dit-il, fermier de l'imposition de la draperie à Montaigu, où il demeurait. Marbeuf et Guillaume Guilhaud étant tenus envers lui pour le fait de ladite imposition et refusant de le payer, il les fit ajourner par-devant les élus à Mauléon. De là leur haine contre lai; ils résolurent de le tuer et le firent induire par Dujardin à se rendre en personne à Mauléon. Il répondit tout d'abord qu'il n'était pas nécessaire qu'il y allât, puisqu'il avait son procureur près de l'élection, et que sa femme d'ailleurs n'était point d'avis qu'il fit le voyage. Finalement il consentit à se mettre en route. Alors Marbeuf, Guilhaud et Dujardin prirent les devants; ils allèrent jusqu'à la Guyonnière et de là à Saint-Martin-l'Ars. Quand ils eurent dépassé ce lieu, ils se mirent en embuscade dans lin bois, guettant l'arrivée de Chevron. Aussitôt que celui-ci fut à leur portée, ils se jetèrent sur lui, et le battirent et navrèrent tellement qu'il resta mort sur la place. Pour dissimuler leur crime, ils se rendirent le lendemain à leur assignation, requirent défaut contre leur victime et envoyèrent Guilhaud en l'hôtellerie où ledit Chevron avait coutume de descendre, pour faire apprêter son dîner. On voit combien ce récit, si court qu'il soit, diffère de l'exposé contenu dans les lettres de rémission. (Arch. nat,, X2a 32, aux dates des 18 et 25 mai 1462, matinée et après-dîner.)

, jeune homme de l'aage de xxviii. ans ou environ, chargié de femme et d'enfans, contenant que, ceste presente année, Jehan Cheverron a prins à ferme de Colas Guerry ou de son filz, fermiers de l'imposicion de la drapperie de la ville de Montagu en Poictou, le droit et prouffit d'icelle imposicion en icelle ville, et pour ce que ledit suppliant se mesle de vendre aucun pou dé draps, icelluy Cheverron demanda audit suppliant qu'il luy baillast soixante solz pour l'imposicion des draps qu'il avoit venduz en ladicte ville, lequel suppliant luy dist qu'il ne luy devoit pas tant, mais qu'il estoit content de le paier raisonnablement et qu'il luy sembloit qu'il ne luy povoit devoir que douze ou quinze solz tournois, qu'il estoit prest de luy bailler, dont ledit Cheverron ne fut pas content ; et à ceste cause, icelluy suppliant, voulant eschever plait et procès, luy voult bailler vingt solz, mais il les reffusa et fist bailler audit suppliant adjournement par devant les Esleuz en Poictou, ou leur lieutenant ou commis à Mauleon, au lundi xxie jour du mois de may derrenier passé. Et pour aler à sadicte journée, ledit suppliant se disposa dès le dimanche precedant, et s'acompaigna avec Jehan Savary, Jehan Jardrin et Guillaume Quillaut, tous marchans ; et eulx estans à chemin, ledit Savary se party d'eulx pour aler à ung sien hostel, nommé la Belutière, où icelluy suppliant et autres dessus nommez ne vouldrent aler, parce qu'ilz vouloient aler couchier au lieu de Saint Martin l'Art, pour estre le landemain au matin audit lieu de Mauleon. Et en alant leur chemin, passèrent par le lieu de la Guyonnière, où ilz beurent chez ung mareschal, et estoit jà le souleil couchié ; et ainsi qu'ilz beuvoient, survint ilec frère François Savary, religieux de l'abbaye ele Mauléon, oncle mater- nel de la femme dudit suppliant, lequel leur dist qu'il vouloit aler audit lieu de Mauléon, dont icelluy suppliant fut bien joyeulx, et s'en partirent lesdiz suppliant, Jardrin et religieux, et ledit Quillaut demoura pour recevoir de l'argent que luy devoit ledit mareschal, et s'en alèrent leur chemin vers ledit lieu de Saint Martin, où ilz avoient entencion d'eulx logier pour celle nuit ; et eulx estans au chemin, ledit Quillaut qui estoit demouré comme dit est, les attaigny près d'un molin à vent, et quant il fut à eulx, il leur dist qu'il avoit trouvé ledit Cheverron, en disant telles parolles ou semblables : « J'ay trouvé Cheverron là ou boys qui vient après nous et nous menace fort, et dit que nous perdons noz pas d'aler à Mauléon, et qu'il aura deux blancs de chacun de nous pour chacune lieue ». Et tantost après, ledit Cheverron qui estoit à cheval survint sur icelluy suppliant et autres dessus nommez, qui aloient tout bellement parce que ledit religieux estoit à pié et ilz le surattendoient, et incontinent icelluy Cheverron leur dist : « Demourez ! » et ilz luy respondirent : « Mais vous ?» Et lors dist ausdiz supplians et autres: « Vous n'estes pas encores ou yous cuidez», et audit suppliant : « Je ne vous quicteroye pas à present pour lx. solz tournois ! » et audit Quillaut : « Me cuidez tu esbaïr pour aler à Mauléon ? », et leur dist plusieurs autres parolles rigoureuses et malgracieuses. Auquel lesdiz suppliant et autres dessus nommez, veans que il ne demandoit que noise et debat, disdrent qu'il chevauchast devant ou derrière. Lequel respondi qu'il n'en feroit riens, et en ce disant, ledit Quillaut frappa comme par manière d'esbatement icelluy Cheverron d'un petit baston qu'il avoit parmy l'eschine ung coup, en luy disant : « Chevauche devant ou derrière, et nous laisse ester». Et incontinent ledit Cheverron descendi à pié et tira ung cousteau qu'il avoit, en renyant Dieu quelles tueroit, et s'adreça vers ledit suppliant, et cuida prendre la bride de son cheval, mais icel- luy suppliant le frappa d'un petit baston gros comme le posse d'un homme sur la main ; et en ce debat frappèrent les dessus diz de bastons qu'ilz avoient, trois ou quatre coups sur ledit Cheverron, sans aucune violence ou mutilacion ; mais icelluy Cheverron se deffendi tellement qu'il les mist tous trois en fuyée et s'en aloient leur chemin ; et quant ilz furent ung peu esloignez, ilz oyrent ledit Savary religieux qui venoit tout bellement après eulx, qui crioit, et incontinent retournèrent pour luy aider, et trouvèrent que ledit Cheverron le tenoit par la poictrine et ne le vouloit lascher, combien qu'il luy dist qu'il ne luy demandoit riens. Et incontinent que lesdiz suppliant et autres dessus nommez furent arrivez sur eulx, il laissa ledit religieux et leur vint courir sus, et gecta son cousteau qu'il tenoit ou poing contre eulx, pour les frapper ou l'un d'eulx, et frappoit sur eulx d'un gros baston qu'il avoit partout où il pouvoit attaindre, et tellement se eschauffèrent ensemble que ledit suppliant tira une dague qu'il avoit et d'icelle frappa une foiz et plusieurs ledit Cheverron, ne scet en quelle part, aussi frappèrent sur luy de bastons lesdiz Quillaut et Jardrin, et tellement que icelluy Cheverron chey à terre ; et incontinent les dessusdiz et suppliant s'en partirent et s'en alèrent couchier audit lieu de Saint Martin, et cuidoient que ledit Cheverron fist le mort ou le malade ; et le landemain, parce qu'ilz virent que il ne venoit point audit lieu de Mauléon, furent fortesbays, et ont sceu que, à l'occasion desdiz coups ou autrement par faulte d'estre pensé et habillé, il est alé celle mesme nuyt de vie à trespassement. Et à ceste cause ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s'est absenté du païs et n'y oseroit jamais retourner, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties, ainsi qu'il nous a fait dire et remonstrer, en nous humblement requerant que, attendu que ledit cas est advenu de chaulde cole et qu'il fust meu de retourner, parce qu'il oyt crier ledit frère François Savary, qui est oncle de sa femme, et que avant qu'il frappast ledit Cheverron de ladicte dague, icelluy Cheverron l'avoit frappé et blecié, etc., il nous plaise nosdictes grace et misericorde luy impartir. Pour quoy nous, etc., audit suppliant ou cas dessus dit avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Chinon, ou mois de juing l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Daniel. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXVI Juillet 1459

Rémission accordée à Huguet Lautier, de Lezay, qui, en abattant un chêne, avait causé involontairement la mort d'un enfant de six ou sept ans.

AN JJ. 188, n° 127, fol. 62 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Huguet Lautier, povre homme de labour, demourant en la parroisse de Lezay, contenant que puis certain temps ença ledit suppliant, Jehan Baulouet et Thomas Cherpin achetèrent le branchaige de la moictié par indivis de certain bois appellé le Cloudi Bourrea, assis en ladicte parroisse de Lezay, et après que ledit boys fut parti entre ledit suppliant et sesdiz compaignons, ilz baillèrent à copper et esbranchier leurdicte moictié dudit bois à ung nommé Pierre Madorrea pour certain pris et somme de deniers. Lquel Madorrea, en voulant acomplir le marchié par luy fait, le tiers jour du mois d'avril derrenier passé, se print à abatre et esbranchier ung gros chesne fourchu ; et pour ce que en voulant abatre et esbrancher ledit chesne et autres estans oudit bois, survin- drent ilec plusieurs petiz enfans de villaiges de la Chelle, de Beauvoir et d'ailleurs ilec environ, lesquelz amenèrent plusieurs chièvres pour mengier les cymes des arbres qui seroient abatuz. Et afin que lesdiz enfans et bestes ne feussent bleciez ou tuez des arbres qui tomboient, ledit suppliant, aussi ledit Pierre Madorreau, Huguet Regnou, Pierre Merlet et autres firent à leur povoir oster et aler ailleurs assez loing d'ilec lesdiz enfans et bestes. Et de fait ledit Pierre Merlet, pour ce que iceulx enfans ne se vouloient oster ne emmener leursdictes chièvres, print unes verges et se print à courir après eulx. Et après ce que ledit Pierre Madorreau eut coppé ainssi comme les deux pars ou environ dudit gros chesne forchu, à quoy il s'estoit fort lassé, il appella ledit suppliant qui estoit ilec près, auquel il pria qu'il luy voulsist aider à parachever d'abatre ledit chesne, en luy disant qu'il est gauchier et qu'il avenoit mieulx que ledit chesne cheust du cousté devers la main senestre que d'autre part, et qu'il luy aideroit autant à faire d'autres besongnes. Lequel suppliant, desirant faire plaisir audit Madorreau, et en obtempérant à sa requeste, se mit à parachever d'abatre ledit chesne, pensant que ilec environ ne feussent demourez aucuns desdiz enfans ne autres choses à quoy la choiste dudit chesne peust ne deust prejudicier, et tant fist, que ledit arbre cheust à main senestre. Près duquel arbre et au droit de ladicte choiste, environ la longueur de demy lance loing dudit arbre abatu, estoit demeuré ung petit enfant, nommé Olivier Raoulea, de l'aage de six à sept ans ou environ, au pié d'un autre gros chesne, en une fourcigne dudit chesne, qui par cas de fortune fut frappé au droit de la temple du costé senestre d'une branche dudit chesne ou de celluy soubz lequel il fut trouvé, ne scet ledit suppliant en quelle manière, parce que on ne savoit pas que ledit enfant feust ilec ; et après que on eust apperceu ledit enfant, ledit suppliant et autres qui ilec estoient se assemblèrent, levèrent ledit enfant de terre, le portèrent ilec près à l'ostel Perrot Baudin et baillèrent aux femmes estans lors oudit hostel et autres estans près d'ilec, qui le chauffèrent par l'espace de deux heures tout vif, et en le chauffant ala entre leurs mains de vie à trespassement. Après lequel cas ainsi avenu, Jehan Raoulea l'ainsné, maçon, et Marguerite Columbelle, sa femme, père et mère dudit enfant, saichans ledit cas estre avenu par fortune, aussi ledit suppliant estre homme de bonne vie, luy pardonnèrent icelluy cas, promettant de jamais ne luy en faire question ne demande, comme par lettres sur ce faictes l'en dit ce apparoir. Mais ce nonobstant, pour occasion dudit cas ainsi avenu, le procureur de nostre amé et feal Jehan de Lezay, chevalier, seigneur du Maroys de LezayJean III de Lezay, chevalier, seigneur des Marais, fils de Jean II et de Louise de Granges. Une notice lui a été consacrée dans notre précédent volume, p. 260, à l'occasion de sa participation à l'expédition de Guyenne. C'est lui sans doute, ou son fils Jean IV, qui rendit aveu au roi, le 7 janvier 1480, de la seigneurie de Surin, mouvant de la châtellenie de Niort. (Arch. nat., P. 5543, cote IIIe XLIII.) qui a audit lieu tout droit de justice et juridicion haute, moienne et basse, pour ce que icelluy suppliant et les père et mère dudit deffunct sont ses hommes levans et couchans en toute justice et juridicion, a mis icelluy suppliant en procès en sa court et assise dudit lieu de Maroys, et ilec s'efforce à cause de ce vexer et travailler ledit suppliant ; lequel doubte que ou temps avenir justice voulsist proceder contre lui rigoureusement, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu ce que dit est et qu'il ne savoit aucunement que ledit enfant fut près dudit arbre, et est ladite mort advenue par cas de fortune, dont il a esté et est très deplaisant, et que les père et mère dudit deffunct, voians qu'il estoit innocent et n'en povoit mais, luy ont pardonné ; aussi a esté et est en tous autres ses affaires de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans jamais avoir esté actaint d'aucun villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise luy impartir icelles. Pourquoy nous, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné, etc. Donnons en mandement, par ces presentes, aux seneschaulx de Poictou, bailly de Touraine et des ressors et exemptions d'Anjou et du Maine, etc. Donné à Chinon, ou mois de juillet l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. P. de Fontaines. — Visa. Contentor. J. Du Ban.

MCCCXVII Août 1459

Rémission octroyée à Pierre de Lugny, chevalier, Payen et Briand Boutou, écuyers, ses neveux, Pierre Bonneau, écuyer, son gendre, et plusieurs autres, coupables du meurtre de deux hommes faisant partie d'une bande armée par Louis Fumé pour empêcher ledit de Lugny d'exercer le droit de rachat qui lui appartenait sur la seigneurie de Belleville près Sainte-Verge.

AN JJ. 188, n° J 44, fol. 71 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de nostre amé et feal Pierre de Luigné

On trouve ce nom écrit tantôt Lugné, Luigné, Leugné, tantôt Lugny, Luigny, Leugny. La localité dont cette famille poitevine a pris le nom paraît être Leugny. Aux XIVe et XVe siècles, on la trouve établie entre Thouars et Niort. Guillaume de Lugny, écuyer, prêta serment de fidélité à Jean Chandos, à Saint-Maixent, le 28 septembre 1361. (Bardonnet, Mém. de la Soc. de statistique des Deux-Sèvres, 2e série, t. VI, 1866, p. 241.) Le même (son nom est écrit Luigné) rendit au prince de Galles, le 30 août 1364, l'aveu de ses hébergement, maison, verger, etc., sis à Faye, mouvant de Saint-Maixent. (Arch. nat., P. 1145, fol. 107 v°.) Le Bois-Berthier (commune d'Echiré) où Pierre de Luigné faisait sa plus habituelle résidence, fut, ce semble, dès la fin du XIVe siècle, le principal fief des Lugny. Beaucoup d'aveux nous en ont été conservés pour le XVe siècle. Le 20 avril 1407, Jean de Luigné, chevalier, rendit aveu à Jean duc de Berry et comte de Poitou de son hébergement de Boisbertier et autres fiefs mouvant de Niort. (Arch. nat., R1* 2172, p. 1024.) Sa veuve Marguerite Chauvereau, le 8 juin 1414, procéda à la même cérémonie, en qualité de tutrice de leurs enfants, Aubert, Pierre et Jeanne (P. 1145, fol. 6 v°) ; le 23 avril 1420, autre aveu à Charles dauphin, comte de Poitou, par Aubert, fils aîné de Jean. (Id., fol. 8.) Celui-ci mourut sans doute sans postérité, et Bois-Berthier passa à son frère cadet Pierre, qui en fit hommage au roi le 23 novembre 1451 (P. 5661, cote 2812); il était d'ailleurs qualifié déjà seigneur de Bois-Berthier, le 12 juillet 1432, lorsqu'il rendit à Artur de Richemont, seigneur de Parthenay, l'aveu de différents petits fiefs sis en la ville et paroisse d'Echiré, parmi lesquels le Champ Ravart, contenant trois sexterées de terre, le Champ de la Barre, d'une contenance de trois minées, trois autres sexterées de terres sises à la Couture-d'Echiré, un hébergement et ses appartenances, appelé les Champs, le fief de la Sablière consistant en terre arable et en vignes. (Acte passé à Benet, Arch. nat., R1* 190, fol. 160 v°.) Comme il est dit ci-dessous que Payen et Briand Boutou étaient ses neveux à cause de sa femme, il est à présumer que Pierre de Lugny avait épousé Marguerite, fille de Jean Boutou et de Sibille Voussard. C'est sans doute son fils, aussi prénommé Pierre, qui donna, le 7 novembre 1483, le dénombrement de la seigneurie du Bois-Berthier, comprenant le « Chaigneau, Pouligné et Pousaus ». (P. 5543, cote 359.)

, chevalier, Paen Boutou

La généalogie de la famille Boutou, imprimée dans la nouv. édit, du Dictionnaire des familles du Poitou, contient de graves erreurs en ce qui concerne les personnages nommés ici et leurs parents. La vérité est que Pierre Boutou, seigneur de la Baugissière, qui servit sous Richemont et fut capitaine de Maillezais, avait épousé Louise de Payré, fille de Hugues, seigneur de Payré-sur-Vendée, qu'il en eut trois fils : Payen, l'ainé (nommé quelquefois Poinsonnet), Pierre et Briand, et qu'il était mort avant le mois de septembre 1467, époque où sa veuve et ses enfants furent victimes de sauvages agressions et de violences sanglantes de la part de leurs voisins, Pierre Rincent (Raincent ou Rainxent), sr de la Vergne, de ses trois fils et d'une bande de vingt des plus mauvais sujets de la région. Après le décès de leur père, Payen s'était fixé a la Baugissière, dont il était devenu seigneur, et suivait la carrière des armes; Pierre et Briand résidaient à Payré, auprès de leur mère, dont ils surveillaient les intérêts. Le dimanche 6 septembre 1467, les Rincent, y compris le bâtard Philippe et leurs complices, armés de pied en cap, se transportèrent de bon matin en l'église de Payré, où Pierre Boutou, écuyer, 2e fils de Louise de Payré, avec un serviteur du sr de la Grève, nommé Pierre Pellisson, se proposaient d'entendre la messe. Ils les firent sortir, les entraînèrent dans le cimetière et commencèrent à les assaillir et à les frapper à coups d'épée. Le bâtard Philippe Rincent en particulier porta à Pierre Boutou un coup de vouge à la tête jusqu'à effusion de sang. Sur ces entrefaites, des gens revenant de la procession séparèrent les combattants et empêchèrent les agresseurs de poursuivre leur mauvais dessein. Le jour même, à quatre heures après midi, la bande des Rincent quitta une seconde fois l'hôtel de la Vergne, distant d'une demi-lieue de Payré, et revint à la charge contre Pierre Boutou, qui jouait à la paume non loin de l'église, criant à travers le village : « A mort, à mort! tuez, tuez! » frappant tous ceux qu'ils trouvaient sur leur passage, et entre autres Briand Boutou et un nommé Moreau. Briand reçut des blessures sur la tête, au cou, à la face, eut une main coupée et resta sur la place plus mort que vif. Deux de ses serviteurs, Jean Robin fut blessé en deux endroits de la tête, et Jean Roy eut une joue enlevée et un œil arraché. Les jours suivants, les forcenés promenèrent leurs ravages dans le voisinage, s'attaquant aux biens de Louise de Payré, détruisant de fond en comble un de ses colombiers.

Le dimanche après la Saint-Michel, 3 octobre, une nouvelle agression se produisit dans les mêmes conditions. Pierre Boutou, accompagné de Pierre Pellisson, entendait la messe à Payré, sans armes. Les Rincent et leurs complices se jettent sur lui et vont l'entraîner hors du cimetière, pour le tuer hors lieu saint. L'arrivée de plusieurs paroissiens les empêche une seconde fois d'exécuter leur criminel projet. Ils revinrent en force dans l'après-midi, trouvèrent Pierre Boutou jouant à la paume et l'assaillirent sur-le-champ. Heureusement pour lui, il eut le temps de se réfugier avec les autres joueurs dans l'hôtel de sa mère. A ce moment, Briand rentrait de voyage, ne se doutant de rien. Ce fut lui encore qui reçut le choc; les misérables l'abattirent sur le soi et le transpercèrent de vingt-sept coups d'épée, de dague, de vouge, etc. Puis ils tentèrent d'envahir l'hôtel de Louise de Payré; mais les gens qui y étaient entrés avec Pierre les repoussèrent. Le lendemain, sur le bruit que le seigneur de Bressuire, cousin des Boutou, s'était mis en route pour s'emparer des coupables, ceux-ci trouvèrent moyen de se mettre en sûreté. Cependant des poursuites furent exercées contre eux par le sénéchal de Poitou. Pierre Rincent, sr de la Vergne, le père, n'avait pas pris une part effective aux lâches agressions; mais il fut convaincu de les avoir favorisées et condamné à de fortes amendes envers les victimes. Il en appela au Parlement, et les procédures devant la cour durèrent plus de quatre ans. Le 9 mai 1468, Pierre Rincent était déchu de sa cause d'appel par défaut de comparoir; mais il trouva moyen de se faire relever de cette déchéance. Ce fut seulement le 16 mars 1471 que Louise de Payré, Briand Boutou et leurs serviteurs obtinrent un arrêt confirmant la sentence du premier juge : Rincent était condamné à payer à Briand Boutou 50 livres de rente perpétuelle, plus 400 livres de dommagesintérêts audit Briand, 200 livres à Louise de Payré, 200 livres à Jean Roy, 100 à Jean Bobin, et 400 livres d'amende envers le roi. Les plus coupables, c'est-à-dire Briand, Pierre et Philippe Rincent (ce dernier bâtard), Jean Laurenceau et Raoul Legendre, avaient réussi à échapper à la juste punition de leurs forfaits. Condamnés par défaut en la cour du sénéchal, ils avaient aussi relevé appel de cette sentence. Un décret de prise de corps avait pu être mis à exécution (8 février 1471), au moins contre Briand et Philippe Rincent; mais, enfermés à la Conciergerie, ils avaient encore trouvé moyen de s'évader. Un nouveau mandat était décerné, le27 février 1472, pour les appréhender, mais sans succès. On ne les revit plus. Le 14 août suivant, la cour déclara les contumaces définitivement déchus de leur appel, et la sentence par défaut du sénéchal de Poitou exécutoire. En attendant, l'arrêt du Parlement contre Pierre Rincent, le père, n'était pas encore exécuté au milieu de l'année 1472; il était mort avant le mois de mai 1471 ; Louise de Payré succomba à son tour dans les derniers mois de cette année. Le 30 janvier et le 24 août 1472, Payen et Briand Boutou, écuyers, se faisaient délivrer par la cour des mandements adressant à Jean Laidet, lieutenant du sénéchal de Poitou à Niort, pour la mise à exécution de l'arrêt du 16 mars 1471, à défaut de Pierre Rincent décédé, contre sa veuve, Guillemette Beschade. (Arch. nat., X2a 36, fol. 26, 107, 239 v°; X2a 37, plaid. aux dates des 10 juillet 1470, 19 février et 4 avril 1471 ; X2a 38, fol. 10, 23, 24 v°, 27 v°, 33 v°, 50 v°, 59, 63, 147 v°, 156 v°, 201.)

, Pierre BonneauPierre Bonneau, écuyer, seigneur de Saint-Michel-le-Clou, sur lequel cf. ci-dessus, p. 28 note. Guillaume Bonneau, nommé deux lignes plus bas, était sans doute son parent; nous n'avons pu déterminer à quel degré., Brient Boutou, escuiers, Jehan Moreau, serviteur dudit Paen Boutou, Guillaume Raguin, Mathurin Viault

On retrouve plus tard Mathurin Viault exerçant à son tour des poursuites au Parlement contre frère Pierre de Vernou, abbé de Mauléon, André Vignerot, religieux de ladite abbaye, Pierre Herpin, écuyer, et Pierre Galland, sergent royal, pour raison de certains cas criminels. Le 22 août 1485, après interrogatoire par eux subi devant les conseillers commis à l'instruction de leur procès, sur le rapport de ceux-ci et conformément aux conclusions du procureur général, les intimés furent élargis partout, à condition de se représenter à toute réquisition sub pena convicti et sous les autres peines accoutumées. Ils firent élection de domicile à Paris, en l'hôtel de Me Jean Nontron, procureur. (Arch. nat., X2a 48, la date.) Cette affaire se termina sans doute à l'amiable.

et Guillaume Bonneau, contenant que ledit de Luigné, outre ses autres terres et seigneuries, est seigneur d'un hostel appellé de la Flocelerie, assis en la parroisse de Saincte Vierge près la ville de Thouars, à cause duquel hostel il a plusieurs hommes, vassaulx et subgetz, qu'ilz (sic) tiennent et ont acoustumé tenir, eulx et leurs predecesseurs, de lui plusieurs beaux domaines et heritaiges, les aucuns à foy et hommaige et droit de rachact, selon la Coustume du païs, et les autres à cens, rentes et devoirs ; et entre autres, estoit homme de foy lige feu Jaques de DercéJacques de Dercé, chevalier, seigneur de Saint-Loup et de Dercé, fils de Jean de Dercé, tué à la journée des Harengs, et de Marquise Goulard. La nouvelle édition du Dictionnaire des familles dit Poitou cite un très grand nombre d'actes relatifs à ce personnage et à ses sept enfants, trois fils et quatre filles, et dit qu'il avait épousé Catherine Rouault (t. III, p. 74, 75). Or il semble résulter d'un passage du plaidoyer prononcé au Parlement, le 31 janvier 1460 n. s., pour obtenir l'entérinement de la rémission accordée à Pierre de Lugny et à ses complices, que la femme de celui-ci s'appelait aussi Catherine Rouault, et que c est à elle qu'appartenait la terre et seigneurie de Belleville, dont il est question ici. (Arch. nat., X2a 28, à la date.) La phrase n'est du reste pas claire et il se peut que ce soit une erreur commise par le clerc du greffe, et qu'il faille corriger « femme dudit Jacques de Dercé »., en son vivant seigneur de Saint Lou, à cause de la femme dudit de Luigné, suppliant, pour raison d'un hostel appellé Belleville, assis près ledit lieu de Saincte Vierge et environs, tenu dudit de Luigné, à cause de son dit hostel de la Flocelière, et soubz lequel hommaige dudit de Dercé, part prenant, par mettant ou autrement, estoient et sont tenuz certains autres doumaines et heritaiges assis près ledit lieu de Saincte Vierge ou environ, dont se dit et porte seigneur maistre Lois Fumé

Bien que son nom se trouve écrit ailleurs Fumée, il n'appartenait pas à la famille Fumée (des Roches-Saint-Quentin, en Touraine), dont quelques membres s'allièrent à des familles poitevines, mais à une famille d'Anjou, établie au XVe siècle en Poitou, confirmée dans sa noblesse en 1475, et dont plusieurs membres ont figuré dans l'échevinage de Poitiers et dans la magistrature. (Maintenues de noblesse, etc., publ. par M. A. de la Bouralière, Arch. hist. du Poitou, t. XXII, p. 330; Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. III, p. 627.) Louis Fumé, licencié ès lois, avocat au Parlement de Paris, était le second fils de Colin Fumé, seigneur de la Pierrière, et de Jeanne Le Bascle. Il partagea noblement avec son neveu Pierre, fils de Nicolas, son frère aîné, le 13 avril 1463, et rendit aveu en 1469 au sr de Parthenay pour le fief des Bazilières ou Bazières. Sa veuve, Jeanne Bruère, fit le même aveu en 1476. (B. Ledain, La Gâtine historique, p. 368.) Le 25 octobre 1475, Louis obtint une sentence contradictoire des commissaires du roi pour le fait des francsfiefs et nouveaux acquêts en Poitou, par laquelle il fut déclaré qu'il avait justifié suffisamment de sa noblesse. En 1443, on le trouve châtelain de Bressuire, où il avait été nommé par Louis d'Amboise, vicomte de Thouars, pour tenir les plaids de la châtellenie pendant le temps que dura le rachat advenu audit vicomte par la mort de Guy de Beaumont. (Arch. des Deux-Sèvres, chartrier de Saint-Loup,E. 1641.) Après avoir été longtemps au service du vicomte de Thouars, longo temporis spatio, il se brouilla avec son maître et fut obligé de demander protection au Parlement contre lui. Louis d'Amboise lui reprochait de n'avoir pas défendu ses intérêts dans un procès qu'il soutenait contre le duc et la duchesse de Bretagne, et dans une contestation que la vicomtesse de Thouars avait eue avec son frère, le sr de Rieux, au sujet de la succession de leur père; il l'accusait même d'avoir suborné des témoins, qui auraient fait, à son instigation, une déposition mensongère en faveur du duc de Bretagne. Aussi il l'avait pris en haine et à plusieurs reprises l'avait fait menacer par ses officiers. Pour se soustraire aux projets de vengeance de son ancien maître, Louis Fumé était resté trois ans sans oser paraître à Thouars ni aux environs, où se trouvaient sa femme, ses enfants et ses possessions. Faute de surveillance, ses domaines tombaient en ruine. Il obtint, le 4 septembre 1456, des lettres de sauvegarde du roi et un sauf-conduit de la cour, qui furent signifiées par un sergent royal au vicomte et à ses officiers. Celui-ci, de son côté, se fit délivrer une commission, adressée aux sénéchaux de Poitou et de Limousin, et au bailli de Touraine, leur enjoignant d'exercer des poursuites pour subornation de témoins contre son adversaire, de saisir ses biens et de l'incarcérer à Poitiers. Sur une nouvelle requête de Louis Fumé, la cour commit un de ses membres pour faire défenses expresses, sous des peines sévères, au vicomte et à ses gens, de no rien entreprendre au préjudice des procès pendants devant elle et des lettres octroyées à son adversaire, et en même temps pour s'informer secrètement si les accusations du vicomte paraissaient avoir quelque fondement. (Mandement du 23 juillet 1457, Arch. nat., X2a27, fol. 271.) Louis Fumé attribuait à la vengeance du vicomte de Thouars les mauvais traitemements dont il avait été victime de la part de Pierre de Lugny et de ses complices ; du moins il le donne formellement à entendre dans une plaidoirie, dont il sera question quelques pages plus loin, qui fut prononcée en son nom, le 31 janvier 1460, pour s'opposer à l'entérinement des présentes lettres de rémission.

; par le trespas duquel de Dercé, ledit de Luigné suppliant ait droit, par la coustume du païs de Thouarçois, de prendre, par faulte de homme ou droit de rachapt, les fruiz, proufiz, revenues et emolumens de tous et chacuns les dommaines et heritaiges tenuz en foy et hommaige de lui par ledit de Dercé, et de tous autres qui se tenoient soubz ledit hommaige, part prenant, part mettant, en parage ou autrement; et ledit droit par deffault d'omme ou droit de rachat ledit de Luigné, par le trespas dudit feu de Dercé, volt prandre et faire prandre et lever, et à ceste cause envoya de ses gens et serviteurs sur lesdiz dommaines et heritaiges, lesquelz lui firent savoir que ledit Fumée les empeschoit à lever les fruiz ; et pour ce icellui de Luigné, qui est demourant en ung sien hostel appellé Boisbretier, voulant joir de ses droiz et pourveoir à son cas, fist savoir ausdiz Boutouz, qui sont ses nepveuz à cause de sa femme, et audit Pierre Bonneau, qui a espousée sa fille, qu'ilz se rendissent à lui audict lieu de Saincte Virge, pour l'acompaigner et avoir leur adviz et conseil de la forme et manière comment il se conduiroit touchant ledit empeschement ; lesquelz se y rendirent et eurent plusieurs paroles avecques la femme dudit Fumée et autres de ses parens et amis, pour le fait des fruiz et levées des choses tenues dudit chevalier, suppliant, à hommaige, qui pretendoit à lever tant par deffault d'omme que par droit de rachapt ; et poury veoir et en ordonner amiablement, deputèrent entre eulz Jacques Rouault

Jacques Rouault, chevalier, était le 2e fils de Jean Rouault, seigneur de Boisménart, chambellan du roi, tué à la bataille de Verneuil, et de Jeanne Du Bellay, dame du Colombier, sa femme, et le frère cadet de Joachim, sr de Gamaches, créé maréchal de France au début du règne de Louis XI. Jacques était seigneur de Riou, de Greffier et du Pressoir-Bachelier, bailli de Caux en 1461. Aux dates du 3 et du 26 août 1482, il était poursuivi au Parlement, ainsi que ses deux fils, Louis et Jacques Rouault, Jean Bérault et autres leurs complices, par François d'Aubigné, écuyer, seigneur du lieu, en cas d'excès et attentats. Jean de Canlers, conseiller, fut chargé par la cour d'instruire cette affaire. (Arch. nat., X2a 45, aux dates susdites.) Le 10 septembre 1485, Jacques Rouault fit une fondation de messe et élection de sa sépulture dans l'église des Cordeliers de Thouars, à l'exemple de son épouse, Anne de Châteaubriant, de Tristan vicomte de Thouars, de Joachim son frère, et de Jeanne Du Bellay, leur mère.

, elie- valier, et Pareeval d'AppellevoisinPerceval d'Appelvoisin, 5° fils de Louis d'Appelvoisin, chevalier, seigneur de Chaligné et de Pugny, et de sa 3e femme Perrette Mignot, veuve de Jean Gendrot. Nous avons parlé dans notre précédent volume, p. 90-91, note, de ses démêlés avec Jean Gendrot, de Thouars, qu'il accusait d'avoir détourné la riche succession de sa sœur utérine, Colette Gendrot, veuve sans enfants de Jean Labbé. Perceval était seigneur de Sceaux, la Roche de Maupertuis, dont il rendit aveu au seigneur d'Airvault, le 23 novembre 1445, de Pugny, de Pierrefitte, de Bournezeaux, de Marnay et du Bouchet, qu'il tenait du vicomte de Thouars, auquel il en rendit hommage le 14 juillet 1470. (Cf. Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. Ier, p. 87.), escuier, qui eurent plusieurs paroles de traictié avec les parties, mesmement ledit d'Appellevoisin, et y eut plusieurs journées et assignacion entreprinses sur ce, mais ilz ne les peurent mettre d'acord, car de la part de la femme dudit Fumée et ses amis ne fut obey ne comparu aux jours et heures entreprinses sur ce, sur la forme dudit traictié, et le firent rompre par ung nommé maistre Jehan ChichéJean Chiché est mentionné en 1439 comme seigneur de Garsay en Chanteloup, de la Touche-Barré et des Roches-Guiton, arrière-fief relevant de Noireterre. (Bélisaire Ledain, Hist. de la ville et baronnie de Bressuire, in-80, 1866, p. 412.), qui estoit du conseil dudit Fumé. Et pendant et durant le temps que ledit de Luigné se attendoit que on traictast dudit debat, il fut adverti que la femme dudit Fumée avoit assemblé gens de divers estatz, qu'elle avoit envoiez, armez et habillez de vouges, haches, arbalestres, arcs, trousses, fourches de fer, espées et autres armes invasibles et deffendues, aux dommaines et heritaiges tenuz en et soubz ledit hommaige, pour prandre et emmener reaument et de fait les blez creuz en iceulx, que ledit de Luigné pretendoit à lui appartenir par deffault d'omme ou droit de rachapt, comme dit est, et que jà ilz en avoient emmené grant quantité de gerbes, combien qu'il n'eust jamaiz pensé qu'ilz eussent fait. Laquelle assemblée venue à la notice dudit de Luigné, icellui de Luigné, voulant garder ses droiz et possession, acompaignié des dessus nommez et de leurs varletz et serviteurs, jusques au nombre de dix ou douze personnes, dont il y avoit trois paiges, habillez seulement un chacun d'eulx de leurs espées et dagues, fors l'un qui avoit une faulx à fauclier emmanchée au revers, qu'il print en ung villaige, et ung autre une fourche de fer, et ung autre une arbaleste qu'il print pareillement en ung villaige, garnie d'un ou de deux materaz seulement, sans autre traict, pour ce que on leur dist que les gens dudit Fumée avoient bastons ferrez, se partirent dudit lieu de la Flocelière, pour aler sur les lieux veoir se la femme dudit Fumée avoit prins et fait prandre et emmener lesdiz blez ; et en y alant, yssirent de la maison dudit Fumée, où ilz avoient mis lesdictes gerbes, Guillaume Aubery, filz de la femme dudit Fumée, en son prepoint, ayant en sa main une hache, ung nommé Julien GuyneauSur le registre du Parlement (X2a 28, à la date du 31 janvier 1460 n. s.), ce nom est écrit Guenyau. Dans leur plaidoirie, Lugny et ses complices citent aussi parmi leurs adversaires « Mre Guy Gueniau, aussi armé d'une voulge ». A cette époque, les Guyneau étaient seigneurs de Riparfond. Cf. l'aveu rendu, en 1447, au seigneur de Bressuire par Nicolas Guyneau d'un quarteron de terre desherbergée, appelée les Sourdis, faisant partie des terres de la métairie de la Basse-Givre. (Arch. des Deux-Sèvres, chartrier de Saint-Loup, E. 1566.), ayant aussi en sa main une fourche de fer, Jehan Guesdon, prestre, tenant en sa main ung vouge, Pierre MartineauEn 1446, Jean Martineau et, en 1493, Colas Martineau rendaient aveu du fief de la Salle-Guibert, paroisse de Tessonnières, près Saint-Loup. (Id., E. 1616, 1650.), dit de la Saulvagière, ayant une fourche de fer, Marquis Mestivier, une arbaleste, le Bonnetier de Thouars, ung arc et une espée à deux mains, et autres jusques au nombre de douze à treze personnes, lesquelz mal esmeuz sortirent au devant des gens et serviteurs desdiz de Luigné et Boutouz, qui venoient de ladicte maison dudit chevalier droit au champ où estoit lors le debat ; et estoint lesdiz de Luigné et Boutouz assez loing de leurs gens, et eurent certaines paroles arrogantes ensemble pour occasion dudit blé. Et veans lesdiz de Luigné et Paen Boutou, supplians, qui sont bien nobles gens, que par le moyen des dictes paroles pourroit sortir debat et que grans inconveniens s'en ensuveroient, leur disrent et crièrent par plusieurs foiz qu'ilz ne feissent point de noise, et se mist ledit de Luigné entre deux pour empescher ledit debat de tout son povoir, mais lesdiz supplians ou aucuns d'eulx et ceulx dudit Fumée se escliauffèrent telement qu'ilz frappèrent les ungs sur les autres, et fut ledit Pierre Bonneau, suppliant, frappé et blecié sur l'ueil ; aussi fut son varlet et autres ; et commancèrent à frapper ceulx de la part dudit Fumée, et reculèrent les gens dudit de Luigné, supplians, [lesquelz] eulx veans ainsi bleciez et qu'ilz s'efforçoient de les villainer et injurier de leur povoir, se misdrent de leur povoir tous ensemble en deffense, et l'un de ceulx dudit Fumée voult frapper ledit de Luigné d'une fourche, mais il recueilli le coupt d'un petit baston qu'il avoit et lui osta sadicte fourche, moyennant sadicte dague qu'il tira, de laquelle fourche il se deffendi et frappa à la chaude comme les autres. Et à ce conflict en eut plusieurs blecez d'une partie et d'autre, et telement que pour les coups qui furent donnez audit Guedon, prestre, qui estoit en prepoint et avoit ung vouge en sa main, il chey à terre, et incontinant fut confessé et emmené hors d'ilec, et tantost après ala de vie à trespassement. Et aussi fut telement batu ung nommé Pierre Martineau, dit de la Sauvagière, qu'il ala incontinent de vie à trespassement ; et en y eut plusieurs autres blecez en diverses parties de leurs corps; aussi furent ilz blecez, de la part dudit de Luigné, jusques au nombre de quatre ou cinq, et les aucuns d'eulx l'avoient esté paravant qu'ilz se meissent en deffense. A l'occasion desquelz cas ainsi advenuz que dit est, qui ont esté faiz en chaude cole, les- diz supplians, doubtans rigueur de justice, se sont absentez du pays et ny oseroient jamais retourner, se nostre grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, ainsi qu'ilz nous ont fait dire et remonstrer, en nous humblement requerant que, attendu ce que dit est, que ledit cas est advenu en chaulde cole, et furent aggresseurs et assaillans ceulx de la part dudit Fumée, et que ledit de Luigné avoit juste cause de vouloir empescher que on ne emportast les blez qui lui appartenoient, que lesdiz supplians ne furent oncques actaincts d'aucun villain cas, blasme ou reprouche et ont tousjours vescu doulcement entre leurs voisins, il nous plaise nosdictes grace et misericorde leur impartir. Pour quoy nous, etc., ausdiz supplians et à chacun d'eulx ou cas dessusdit avons quictié, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc.

Louis Fumé et les héritiers des deux victimes, Thomas Martineau et Pierre Guesdon,formèrent opposition à l'entérinement de ces lettres de rémission et s'inscrivirent en faux contre la façon dont les faits y étaient rapportés. D'autre part, Pierre de Lugny et ses complices avaient des intelligences parmi les officiers de la sénéchaussée de Poitou qui devaient examiner les lettres royales et se prononcer au sujet de leur mise à exécution. N'étant pas absolument sûrs que le lieutenant général Hugues de Conzay, qui devait occuper le siège, leur fût favorable, ils avaient réussi à faire commettre à sa place Claveurier, l'un des fils sans doute de Maurice Claveurier, lui-même lieutenant général du sénéchal, décédé à la fin de mai 1455. Le procureur du roi était absent; « n'y avoit que son substitut qui n'en faisoit pas grant compte, et l'avocat du roy, qui est en même temps seneschal de Thouars, et avoit esté en partie cause de faire avoir ladite remission ausdiz Luigny et complices ». Aussi Fumé, qui était avocat en Parlement, usa de son crédit pour se faire délivrer des lettres d'anticipation portant que la cause serait déférée à la cour.

Les plaidoiries eurent lieu les 31 janvier et 7 février 1460 n. s. Fumé, d'après Popaincourt, son avocat, était un homme notable, très occupé comme avocat au Parlement, ayant comme clients plusieurs grands seigneurs de Poitou et d'autres pays, possédant, tant à cause de lui que du chef de sa femme, de quatre à cinq cents livres de rente annuelle et diverses seigneuries, parmi lesquelles Belleville, voisine d'une terre de Pierre de Lugny. Des contestations s'étaient élevées autrefois déjà entre eux, à cause de ces terres, et, à l'occasion d'excès commis par Lugny et ses gens contre Louis Fumé, ses serviteurs et biens, celui-ci avait obtenu des lettres royaux ordonnant une enquête, puis la comparution personnelle de Lugny devant le lieutenant du bailli de Touraine à Chinon. De son côté, sous prétexte que le fief occupé par Fumé à Belleville lui appartenait, ou du moins était tenu de lui, Lugny intenta des poursuites contre celui-ci. Quant aux faits qui nécessitèrent les lettres de rémission, voici comment Popaincourt les rapporte. Une première fois, Pierre de Lugny, accompagné de quelques hommes, se rendit sur une pièce de terre dépendant du fief litigieux et voulut en emporter la récolte. Guillaume Aubry, fils d'un premier lit de la femme de Fumé, avec quelques autres personnes, s'y opposa et, esquivant un coup de dague que lui portait l'agresseur, il parvint à l'empêcher de mettre son dessein à exécution. Lugny s'éloigna en jurant qu'il reviendrait une autre fois mieux accompagné. En effet, quelques jours plus tard, la femme de Fumé, qui se trouvait à Thouars, fut avertie que Lugny avait rassemblé environ dix-huit hommes armés et qu'il venait l'attaquer. Elle se rendit immédiatement à Belleville et envoya Pierre Martineau, son neveu, pour parlementer. Celui-ci ne parvint qu'avec beaucoup de peine à échapper à la fureur des compagnons de Lugny et s'en revint en grande hâte. La femme de Fumé alors sortit de son hôtel et se porta au-devant des agresseurs, accompagnée de son fils, de Jean Guesdon, prêtre, son cousin, et de quelques autres. Le bordier de Pierre de Lugny faisait le guet sur la route et alla prévenir son maître, qui se mit en route avec sa troupe, marchant à couvert, si bien qu'il arriva tout près de la femme de Fumé, sans en avoir été aperçu. Celle-ci, aussitôt qu'elle les vit, se jeta à genoux devant Lugny, disant : « Monseigneur, souviengne vous de vostre honneur ! » Alors l'un des agresseurs tira son épée et allait la frapper au ventre, quand ledit Guesdon détourna heureusement le coup. Au cri qu'elle poussa, plusieurs gens de labour sortirent de l'hôtel de Fumé et parmi eux un sergent de Thouars, qui venait d'y arriver par hasard. « De par Monseigneur de Thouars, je défends la voie de fait », s'écria le nouvel arrivant. Pierre Martineau et Jean Guesdon déposèrent aussitôt leurs bâtons. Mais Pierre de Lugny, furieux, frappa le sergent jusqu'à effusion de sang, puis toute sa bande, dont faisaient partie un anglais prisonnier qui devait sa rançon, un écossais et des inconnus, se rua sur les parents de Fumé et les cerna. Martineau, désarmé, fut frappé mortellement par Pierre Bonneau, malgré les efforts de sa tante, qui cherchait à le protéger; Jean Guesdon fut pareillement tué sur la place, et plusieurs autres furent navrés et mutilés. Pierre de Lugny et ses complices, par la bouche de Poignant, leur avocat, se défendirent en reproduisant la version contenue dans leurs lettres de rémission et accusant les amis et parents de Louis Fumé d'avoir été les premiers agresseurs. Ils prétendaient en outre avoir combattu à force égale, douze contre douze, et demandaient simplement leur renvoi devant le sénéchal de Poitou, conformément au texte des lettres, qui le commettaient à en assurer l'exécution. Popaincourt ayant fait cette objection que le sénéchal de Poitou était parent des intimés, ceux-ci demandèrent alors que le lieutenant du bailli de Touraine à Chinon fût saisi de l'affaire. Mais la cour en retint la connaissance. Aux 6 et 8 mai 1460, il est question d'un incident soulevé par Lugny, que le Prévôt de Paris fut appelé à juger, et dont la sentence fut portée en appel devant la cour. Le registre des arrêts criminels du Parlement n'existe pas pour cette époque, de sorte que l'on ne peut connaître l'issue exacte du procès.

Les réparations réclamées de la partie adverse par Fumé et les parents des victimes sont curieuses, et en admettant même qu'elles ne leur furent pas accordées intégralement, elles méritent de n'être pas passées sous silence. Elles consistaient à amender lesdits attentats et, en attendant, à aller tenir prison en la Conciergerie ; à faire amende honorable aux demandeurs, à composer une représentation ou épitaphe, où serait reproduite la forme dudit cas ; à baiser par figure en la bouche lesdits trépassés, à prendre habit de deuil et à offrir chacun une torche de cire ardente du poids de deux livres au lieu de la sépulture, et par chacun d'eux aussi à offrir aux pauvres, de leurs propres mains, six chevaux chargés de blé, pour le salut des âmes des défunts ; à fonder deux chapelles, chacune de 100 livres de rente amortie, garnies d'ornements d'église convenables ; à ériger une croix sur le lieu du meurtre, avec une inscription relatant le crime et énumérant les coupables ; à payer des amendes profitables, montant à 4000 livres pour chacun des intimés, et à tenir prison jusqu'au parfait payement; à assigner au père de Pierre Martineau et à ses hoirs 100 livres de rente perpétuelle, et autant à Pierre Guesdon, neveu de Jean Guesdon, prêtre. En ce qui touche ledit feu Guesdon, comme il était chargé de l'administration des biens de Louis Fumé et de sa femme, ceux-ci demandaient aussi que les inculpés fussent condamnés à payer tout ce dont il leur pouvait être redevable au moment de sa mort ; de plus, s'il était trouvé que Fumé et sa femme tiennent aucun fief de Pierre de Lugny ou que celui-ci tienne aucune chose dudit Fumé, qu'il soit déclaré l'avoir forfait et que ledit fief soit confisqué au profit de Fumé. (Voir Arch. nat., X2a 28, aux dates des 31 janvier, 7 février, 6 et 8 mai 1460.)

. Donné à Champigny, ou mois d'aoust l'an de grace mil cccc. cinquante et neuf, et de nostre règne le xxxviie.

Visa : Par le roy en son conseil. A. Daniel, scriptor. — Contentor.

MCCCXVIII Août 1459

Rémission accordée à Pierre Célier, homme de labour, poursuivi par la cour de Pouzauges pour avoir frappé et blessé Jean Gaborit, avec lequel il était en état d'assurement.

AN JJ. 188, n° 150, fol. 74 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Pierre Celier, povre simple homme de labour, contenant que, le xxve jour de juillet derrenier passé, feste de saint Jacques et saint Christofle, ung nommé Jehan Gaborit se transporta en ung heritaige appartenant audit suppliant, estant de son domaine, et monta en ung cerisier pour cuillir des cerises, et ainsi qu'il les cuilloit, il rompit des branches dudit cerisier, et en ce faisant, survint Jehan Celier, filz dudit suppliant, qui dist audit Gaborit que c'estoit mal fait de rompre ledit arbre ; à quoy il luy respondit que ledit cerisier n'estoit pas sien, et après plusieurs paroles, descendit dudit arbre pour le cuider batre, mais il s'en fouyt en l'ostel dudit suppliant, son père, qui estoit ilec près ; et devers le soir, quant ledit suppliant fut venu, ledit Jehan son filz luy rapporta ce que dit est. Et le landemain, xxvie jour dudit mois, icelluy suppliant se transporta en une maison appellée la Gaillardière, où a taverne publicque, et ilec fut boire depuis le matin jusques environ soleil couchant, et aussi y fut boire ledit Gaborit, comme l'en dit ; et quant ledit [suppliant] eut beu, il se mit à chemin avec deux ou trois autres pour s'en retourner en son hostel, et en alant, trouva d'aventure oudit chemin ung petit baston, non pensant le y trouver. Et quant ilz eurent plus avant alé, rencontrèrent ledit Gaborit qui venoit d'ailleurs, auquel ledit suppliant dist telles parolles ou semblables : « Ha ! Gaborit, pourquoy rompiez vous hier mes cerisiers, et vouliez batre mon filz ?» A quoy il respondit que les cerisiers n'estoient pas siens. Et lors ledit suppliant luy dist tout incontinent, comme eschauffé et embeu de vin, qu'il avoit menti ; et en ce disant, ledit Gaborit qui estoit sur une juement, tourna la teste de sadicte juement contre ledit suppliant, à luy disant que luy mesmes avoit menti ; et adonc ledit suppliant hausssa ledit baston qu'il avoit trouvé, et luy en donna sur la cornière du front, dont il cheut de sadicte juement à terre et en yssit effusion de sang; et depuis qu'il fut cheut, le frappa ung coup, duquel ledit baston rompit. Et depuis ledit Gaborit se redressa et print ledit suppliant par la poictrine, lequel se voyant...Plusieurs mots omis par le scribe. frappa ledit Gaborit plusieurs coups du poing, et atant se departirent. Et depuis les autres, qui estoient en la compaignie dudit suppliant, prindrent ledit Gaborit et le mirent sur sadicte jument, et l'emmenèrent en l'ostel d'un nommé Oliveau, où il fut apareillé, et de là s'en ala de luy mesmes en son hostel ; et trois ou quatre jours après, il fut guery, au moins aloit en ses besongnes comme paravant, et de present est du tout guery, et se sont luy et ledit suppliant pardonnez l'un l'autre et ont appoincté ensemble. Mais ce non obstant, à l'occasion dudit cas et de ce qu'ilz avoient seureté l'un de l'autre, par l'ordonnance de la court de PousaugesLe seigneur de Pouzauges était André de Laval, sire de Lohéac, à cause de sa femme, fille de Gilles de Rais et de Catherine de Thouars, dame de Pouzauges et de Tiffauges. (Voy. notre vol. précédent,p. 398, note.) qui est la justice ordinaire dudit lieu, a esté procedé contre ledit suppliant, lequel doubte qu'elle vueille contre luy tendre à pugnicion corporelle, selon la coustume du païs de Poictou, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties ; humblement requerant que, attendu ce que dit est, que ledit Gaborit est guery et ne s'en est aucune mort ensuye, que aujour et heure de ladite bateure, il estoit fort chargié et embeu de vin, et que en tous autres cas il est bien famé et renommé, il nous plaise sur ce luy impartir nosdictes grace et misericorde. Pour quoy nous, ces choses considerées, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes à nostre seneschal de Poictou ou à son lieutenant à son siège ele Fontenay le Conte, et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieuxtenans, etc. Donné à Chinon, ou mois d'aoust l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. G. de Thoucy. — Visa. Contentor. J. Du Ban.

MCCCXIX Août 1459

Rémission en faveur de Pierre Daindre, maréchal, demeurant à Talmont, coupable du meurtre de Nicolas Maynart, autre maréchal du même lieu, qui l'avait gravement offensé dans son honneur.

AN JJ. 188, n° 157, fol. 78 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Pierre Daindre, povre jeune homme, chargé de femme et d'enfans, demourant et natif de la ville de Thalemont en nostre pays de Poictou, contenant que, quatre ans a ou environ, ledit suppliant qui est mareschal, bon ouvrier de son mestier, fut marié avecques une jeune fille de l'aage de xviii. ans ou environ, et après ledit mariage, s'en ala demourer près la maison d'un nommé Nicolas Maynnart, aussi mareschal. Lequel Maynnart, qui estoit fort sedicieux et plain de mauvais lengaige, s'estoit vanté par plusieurs foiz et vantoit publiquement et notoirement en ladicte ville de Thalemont qu'il avoit habité et congneu charnelement la femme dudit suppliant et en faisoit à son plaisir toutes et quantes foiz que bon lui sembloit. Desquelles choses ledit suppliant fut adverti et en fut très desplaisant, doulant et courroucié à rencontre dudit Maynnart ; lequel, ung certain jour du mois d'aoust derrenier passé, environ l'eure de mydi, ledit suppliant trouva hors ladicte ville de Thalemont, près ung russeau d'eaue appellé Guy Robert, ainsi que icellui suppliant aloit querir du fer pour son mestier à l'ostel de Espinaye près d'ilec ; et demanda ledit suppliant audit Maynnart s'il vouloit maintenir les dictes parolles diffamatoires qu'il avoit ainsi dictes de sadicte femme, en les lui recitant comme il les avoit dictes. Lequel Maynnart lui respondit de felon couraige qu'il avoit eu compaignie charnelle de sadicte femme tout à son apetit, et que en ce faisant elle lui avoit prins et osté l'argent de sa bourse. Et ce veant, ledit suppliant tout esmeu et eschauffé de ce que dit est, se print audit Maynnart et ilec s'entredesmentirent et dirent plusieurs parolles injurieuses, et enfin ledit suppliant geta ledit Maynnart par terre, et incontinent d'un baston de houx qu'il avoit le frappa sur la teste tellement que, ainsi comme il se cuidoit relever, pour l'estourdissement dudit coup il rechey à terre, mais ce non obstant en soy cuidant relever, continuoit tousjours et disoit en reprouchant audit suppliant les parolles dessus escriptes de sadicte femme. Et adonc ledit suppliant qui ne povoit plus endurer ce que lui disoit ledit Maynnart, et aussi pour doubte qu'il ne se relevast pour le grever et endommaiger de sa personne, le frappa plusieurs coups dudit baston de houx par la teste, bras, jambes et autres parties du corps, tellement que icellui Maynnart demoura illec tombé à terre par aucune espace de temps, et après se releva et s'en ala en ladicte ville de Thalemont, jusques près de la maison d'un nommé Janin Bourdet, et illec chey de rechief à terre, et fut pris et emmené par sa femme et autres en sa maison, où il fut confessé et receut tous ses sacremens, et tantost après, ce jour mesmes, ala de vie à trespas. A l'occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, se mist en franchise à l'abbaye dudit lieu de ThalemontL'abbé de Sainte-Croix de Talmont était alors François du Puydu-Fou, que la Gallia christiana cite aux années 1455 et 1407 (t. II, col. 1424). où il s'est tenu par aucun temps, et après s'est absenté et n'oseroit converser seurement au pays, se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartie ; humblement requerant que, attendu ce que dit est et que ledit suppliant a esté meu de juste douleur par les parolles que ledit Maynnart lui disoit de sadicte femme, et que ce qu'il a fait ce a esté par chaude colle et esmeu desdictes parolles et reprouclies à lui faictes par icellui Maynnart, et que en toutes autres choses ledit suppliant a tousjours esté bien famé et renommé, etc., il nous plaise lui impartir icelles. Pour ce est il que nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, aux senescliaulx de Poictou et de Xantonge et gouverneur de la Rochelle, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou moys d'aoust l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviime.

Ainsi signé: Par le roy, à la relacion du conseil. De Puigirault. — Visa. Contentor. J. Du Ban.

MCCCXX 31 août 1459

Rémission donnée en faveur de Georges de La Trémoïlle, sire de Craon et de l'Ile-RouchardSecond fils de Georges de La Trémoïlle, le fameux ministre de Charles VII, et de Catherine de l'Ile-Bouchard, sa seconde femme, il n'eut point dans sa part de la succession paternelle de terres et seigneuries en Poitou. Ce document n'intéressant pas directement notre province, nous nous contentons d'en donner une courte analysé. Il a du reste été publié par M. le duc de La Trémoïlle : Archives d'un serviteur de Louis XL Documents et lettres (1451-1481). Nantes, 1888, in-4°, p. 2-13., ajourné devant le lieutenant du bailli de Touraine à Chinon comme coupable de séquestration de la personne de Péan de Valée, dont il avait à se venger. Celui-ci ayant circonvenu Mme de La Trémoïlle, douairière, s'était emparé de toute l'autorité et du gouvernement de sa maison, et en avait abusé vis-à-vis des enfants de cette dame, et particulièrement de Georges, auquel il avait fait subir de nombreuses vexations. « Donné au Rivau lez Chinon, le derrenier jour d'aoust l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviime ». Ainsi signé : Par le roy en son conseil. J. de Reilhac. »

AN JJ. 188, n° 166, fol. 83 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

MCCCXXI Septembre 1459

Lettres de légitimation en faveur de Guillaume Lemaire, fils naturel de Guillaume Lemaire, sr de Fontaines, et de Jeanne Cantereau.

AN JJ. 188, n° 167, fol 84 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Karolus, Dei gracia Francorum rex. Illegitime genitos, quos vite decorat honestas nature vicium minime decolorat, nam decor virtutis abscondit in prole maculam geniture et pudicicia morum pudor originis aboletur. Notum igitur facimus universis, presentibus et futuris, quod, licet Guillermus Lemaire, filius naturalis deffuncti Guillermi Lemayre, dum viveret domini de Fontanis, et Johanne Canterelle, ex illegitima copula et infra matrimonium dicte Johanne Canterelle traxerit originem, talibus tamen virtutum dono et morum venustate insignitur quod in ipso supplent merita et virtutes id quod ortus odiosus accedit, adeo quod super deffectu natalium quem patitur, graciam quam a nobis humilime postulavit merito debet obtinere. Hinc est quod nos, premissis attentis necnon pluribus serviciis per predictum deffunctum Guillermum Lemayre, nostris in guerris, nobis multimode impensis, ipsum Guillermum Lemayre, de nostre regie potestatis plenitudine auctoritateque regia et gracia speciali, legitimavimus et legitimamus ac legitimacionis titulo decoramus per presentes ; volentes ut ipse Guillermus deinceps, in judicio et extra, pro legitimo habeatur, ac eidem concedentes et cum eo dispensantes ut, quanquam ipse de cohitu illicito traxerit originem, bona mobilia temporalia quecunque et immobilia acquirere, et jam acquisita retinere et paciffice possidere, possit et valeat, ac de ipsis disponere inter vivos vel in testamento ad sue libitum voluntatis, ad successionemque dictorum patris et matris ceterorumque parentum et amicorum suorum carnalium et aliorum quorumlibet, ex testamento vel ab intestato, dummodo de eorum processerit voluntate et consensu, et nisi alteri foret jus jam quesitum, et ad quoscunque honores, officia et alios actus legitimos admittatur, ac si esset de legitimo matrimonio procreatus, quodque eciam liberi ipsius Guillermi Lemayre, si quos in futurum habeat, totaque ejus posteritas, de legitimo matrimonio procreanda, in bonis suis quibuscunque eidem jure hereditario succedant et succedere valeant, nisi aliud quam deffectus hujusmodi natalium repugnet, predicto deffectu quem prorsus abolemus, jure, consuetudine, statuto, edito, usu generali vel locali regni nostri ad hoc contrariis nonobstantibus quibuscunque ; solvendo nobis tamen propter hoc hac vice financiam moderatam. Quocirca dilectis et fidelibus gentibus compotorum nostrorum et thesaurariis, senescallis Pictavensi etXanctonensi, ceterisque justiciariis et officiariis nostris, aut eorum loca tenentibus, presentibus et futuris, et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, tenore presentium mandamus quatinus predictum Guillermum Lemayre et ejus posteros nostris presentibus legitimacione, concessione et gracia uti et gaudere paciffice faciant et permittant, absque quovis impedimento, quod si illatum foret, id reparent et ad statum pristirfum et debitum reducant seu reduci faciant indilate, visis presentibus. Quibus ut perpetue, etc. Salvo in ceteris, etc. Datum Caynone, in mense septembris anno Domini millesimo ccccmo lixmo, et nostri regni xxxviimo.

Sic signatum : Per regem, domino Sancti EracliSous cette traduction de fantaisie on a peine à reconnaître le nom de Saintrailles. Il s'agit cependant bien du fameux Poton, sire de Saintrailles ou Xaintrailles, capitaine d'écorcheurs, puis maréchal de France (1454) et gouverneur de Bordeaux (1459), mort dans cette ville, le 7 octobre 1461. Son nom figure assez fréquement parmi les membres du Conseil royal, qui souscrivirent des ordonnances et lettres de grande chancellerie dans les dernières années de Charles VII. L'on a vu ci-dessus (p. 10, note) que Monstrelet le nomme Pothon de Sainte-Treille. et aliis presentibus. Reilhac. —Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXXII Septembre 1459

Rémission octroyée à Pierre Champtegain, laboureur, coupable du meurtre de son frère Michaut, dans une rixe provoquée par celui-ci.

AN JJ. 188, n° 177, foi. 88 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Pierre Champtegain, povre homme de labour, chargié de femme grosse, preste à gesir, et de quatre petiz enfans, contenant que ledit suppliant et feu Michau Champtegain, son frère en son vivant, estoient demourans ensemble, et durant le temps qu'ilz ont demouré ensemble, ilz ont tousjours vesqu paisiblement et jusques à ce que, en mestives dernières passées a eu ung an, ledit suppliant et Micheau son frère, estans avec leurs gens en une pièce de froment à eulx appartenant, en laquelle ilz mestivoient et cueilloient le blé estant en icelle, environ heure de prime, se departirent et delaissèrent de leur besongne et ouvraige, pour aler desjeuner ou champ mesmes ouquel ilz mestivoient et cueilloient ledit blé ou froment. Et ainsi qu'ilz vouloient commencer à desjeuner et prendre leur refection, icelluy feu Michau, frère dudit suppliant, apparceut et vit leurs beufz qui vouloient aler en dommaige; lequel feu Michau dist au filz dudit suppliant, nommé Estienne, telles parolles en effect et substance : « Estienne, pren du pain et va virer les beufz ! » Lequel Estienne respondi et dist audit feu Michau, son oncle, telles parolles : « Je n'ay cure d'y aler, car vous ne faictes que dire que je ne vueil riens faire ». Et lors ledit suppliant dist à sondit feu frère que lesdiz beufz n'estoient point encores en dommaige, car il n'y avoit guères qu'il les avoit veuz. Lequel sondit feu frère respondit mal gracieusement que de par tous les dyables il ne seroit pas temps de y aler, quant ilz seroient en dommaige. Et ce voyant, la femme dudit suppliant dist gracieusement audit feu Michau, son serourge, telles parolles en substance : « En verité, vous avez une mauvaise grace, car quant voz gens vueillent prendre leur refection, vous ne les faites que noiser et tancer». Lequel feu Michau respondi à sadicte serourge bien malgracieusement et dit : « Forz vostre fievre cartaine ! » Et lors icelluy suppliant luy respondi : « Qui te puissent tenir ! — Mais toy », dist ledit feu Michau audit suppliant, «  car, par le sang Dieu, il yra ». Lequel suppliant respondi que sondit filz n'y entreroit point, et icelluy feu Michau dist que si feroit. Et adonc icelluy suppliant respondi que non feroit, en disant à son dit feu frère : « Va te chier, bavart ! » Et en eulx contralyant ilec de parolles injurieuses, ledit suppliant print une plaine borroche de prunes estant ilec, laquelle il gecta à rencontre de sondit feu frère, le cuidant atteindre par la teste, mais il ne le frappa point ; et voiant qu'il ne le peut attaindre ne frapper de ladite borroche, estant tousjours esmeu à cause desdictes parolles à luy dictes par sondit feu frère, print une courge à porter eaue ilec estant, de laquelle il poussa sondit feu frère par le cousté, lequel sondit feu frère vint à rencontre dudit suppliant, ung cousteau ou poing, et le cuida frapper d'icelluy, et de fait l'eust frappé, se ledit suppliant ne se fust reculé arrière, et pour doubte qu'il ne le frappast dudit cousteau, commença icelluy suppliant à fouyr à l'environ d'un aubespin. Mais ce non obstant, sondit feu frère le poursuyvoit tousjours, en le cuidant frapper d'icelluy cousteau, et tellement poursuyvi icelluy deffunct ledit suppliant qu'il luy osta sadicte courge, delaquelle il luy donna si grant coup parmy la teste que il le coucha à terre, duquel coup yssit grant effusion de sang et tellement que icelluy suppliant demoura à terre par long temps, sans se povoir relever. Et après ce que ledit suppliant fut relevé, esmeu et eschauffé de ce que sondit feu frère l'avoit ainsi villainement navré et mutilé, s'en vint vers sondit feu frère, et eulx contralyèrent encores de plusieurs parolles injurieuses. Voyant que sondit feu frère tenoit encores icelle courge en sa main, s'en ala querir son cousteau, lequel il avoit gecté à terre, quant il print ladicte courge, pour frapper sondit feu frère, et estant eschauffé et esmeu de ce que sondit feu frère l'avoit ainsi navré et injurié, comme dit est, frappa sondit feu frère en chaulde cole dudit cousteau ung coup seulement par la poictrine, le cuidant frapper ou bras ; à l'occasion duquel, tantost après il ala de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s'est absenté du païs, ouquel il n'oseroit jamais retourner ne repairer, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties ; requerans humblement que, etc., il nous plaise luy impartir icelles. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant, avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois de septembre l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. J. Gautier. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXXIII Octobre 1459 (après le 21)

Rémission accordée à Perrot de La Lande, écuyer, fils de Jean de La Lande, seigneur de Lage-Compeau, poursuivi comme complice du meurtre de Guillaume Arnault.

AN JJ. 188, n° 187, fol 94 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Perrot de La Lande, escuier, filz de Jehan de La Lande, aussi escuier, seigneur de Lage Com- peauCette seigneurie est dite ailleurs Lage-Contaut. Elle appartenait à une branche cadette de la famille de La Lande, les seigneurs de Busserolle. Pierre ou Perrot de La Lande, seigneur de Busserolle, fils et héritier de Pierre III et d'Alix d'Avaroux, fille d'Etienne d'Avaroux, qui possédait un fief à Limalonges et d'autres héritages en la châtellenie de Civray, l'an 1418 (Arch. nat., P. 1144, fol. 60 v°), fut père de Guyot de La Lande, qui épousa Marguerite du Plessis et eut deux fils : Jacques, seigneur de Busserolle, et Jean, seigneur de Lage-Contaut, celui qui obtint ces lettres de rémission d'octobre 1459. Le 14 mars 1452, noble homme Jean de La Lande, écuyer, sr de Lage-Contaut, et Pierre d'Allemotin, écuyer, sr de Mays, arrentèrent à perpétuité à Colin Bonaventure le lieu et hôtel de la Journaudière, fief noble relevant de la seigneurie de Bagneux près Persac, à hommage-Iige et au devoir d'une paire d'éperons blancs de la valeur de deux sous six deniers, et consistant en un hébergement avec cens, rentes, maisons, terres, prés, bois, vignes, landes, etc. Le 17 janvier 1486, noble homme Perrot de La Lande, fils du précédent, seigneur de Lage-Contaut et de la Journaudière en partie, et damoiselle Marguerite Bonnin de Messignac, sa femme, firent également un arrentement à Bagneux. (M. le baron d'Huart, Persac et la châtellenie de Calais, Mémoires de la Société des Antiquaires de l'Ouest, année 1887, p. 319 et 418.) chargié de jeune femme et d'enfans, contenant que, puis certain temps ença, ung nommé Guillaume Arnault, qui estoit homme yvroigne et de vie dissolue, fist tant avec Simon Arnault, son oncle, qu'il se donna à luy pour la provision de son corps, combien que icelluy Simon eust de beaux enfans, et à cause d'icelluy sesdiz enfans le laissèrent et habandonnèrent et s'en alèrent demourer à part de leur dit père. Après laquelle donnacion ainsi faicte pour provision de corps, ledit Guillaume Arnault qui, comme dit est, estoit yvroigne et de dissolue vie, laissa courir les arreraiges des rentes et devoirs qui estoient deues sur les heritaiges d'icelluy Simon, donnateur, et tellement que à l'occasion d'iceulx arreraiges on emporta tout le blé dont devoit vivre ledit Simon et sa femme, et ne demoura chez luy que environ deux sextiers de meil ; mais ce non obstant et que, par le moien de ladicte donnacion, icelluy Guillaume Arnault fust tenu de nourrir et alimenter ledit Simon, icelluy Guillaume, ung certain jour du mois de septembre derrenier passé, se transporta à heure de nuyt à l'ostel dudit Simon et dist qu'il vouloit emporter ledit meil ; lequel Simon luy dist que non feroit et qu'il n'avoit autre chose de quoy vivre, et que, quant il n'en auroit point, il seroit tenu de le nourrir ; et eurent lors plusieurs grosses parolles ensemble, et tellement que ledit Guillaume commença à frapper sur icelluy Simon. Et lors la femme dudit Simon s'en ala à l'ostel de Jehan Arnault, filz dudit Simon et d'elle, et luy dist que ledit Guillaume batoit son père et vouloit emporter leur meil et qu'il renyoit Dieu et faisoit grant noise à leur hostel ; lequel Jehan qui n'osoit aler à l'ostel de son dit père, pour la craincte qu'il avoit dudit Guillaume, s'en ala en l'ostel dudit suppliant, qui estoit près d'ilec, et appella, par ce qu'il souppoit, et parla à ung des varletz d'icelluy suppliant et luy dist qu'il voulsist dire audit suppliant, son maistre, que ledit Guillaume Arnault estoit en leur maison et qu'il batoit son père, en luy suppliant qu'il y voulsist aler. Lequel suppliant dist qu'il yroit voulentiers après quil aroit souppé ; et de fait, incontinent qu'il eut souppé, il se mist à chemin avec ledit Jehan Arnault et ung sien varlet, et s'en ala à l'ostel dudit Simon Arnault, sans avoir aucun baston que une dague qu'il a acoustumé de porter. Et quant luy et sondit varlet et aussi ledit Jehan furent près ledit hostel, ilz escoutèrent et oirent qu'on faisoit grant bruit en icelluy, et que ledit Guillaume, qui avoit emmené une beste, vouloit emmener ledit meil ; et lors se mirent oudit hostel en une chambre, pour escouter que icelluy Guillaume Arnault fairoit, et tantost après ledit Guillaume qui avoit une javeline voult entrer en ladicte chambre où estoit ledit suppliant, et mist le bout de sadicte javeline qui estoit barbelée devers le manche dedens la porte de ladicte chambre ; et lors icelluy suppliant la print et saulta dehors, et du plat de sa dague donna ung coup par la joue dudit Guillaume, tellement quil luy fist saillir deux dans. Et après icelluy Guillaume s'en cuida fouir, mais ledit suppliant l'ataigny et luy donna trois coups de ladicte dague par une jambe, dont il fut fort blecié, en luy disant que, s'il retournoit plus pour faire ilec tel debat qu'il avoit fait, qu'il l'en chastiroit tellement qu'il luy en souviendroit toute sa vie. Et adonc survindrent lesdiz Simon Arnault et Jehan, son filz, qui avoient chacun ung grant pal au col, et incontinent qu'ilz furent arrivez, commencèrent à frapper sur ledit Guillaume et luy donnèrent plusieurs coups, combien que ledit suppliant le deffendoit de tout son povoir, en luy disant : « Va t'en » ; mais il ne vouloit s'en aler et fut très fort batu par lesdiz père et filz, et eut plusieurs coups avant qu'il s'en voulsist aler ne partir d'ilec ; et après s'en ala à l'ostel dudit Simon et se mist sur ung lit, mais lesdiz Simon et son filz le suivirent tousjours et s'efforçoient de l'envillener et luy tirer les yeulx, et tellement que ledit suppliant, qui estoit dehors dudit hostel et cuidoit qu'on ne lui touchast plus, oy le cry que fist ledit Guillaume et entra en icelluy hostel et les empescha et garda qu'il ne luy touchassent plus, et osta audit Jehan ung baston qu'il tenoit, en luy disant que s'il luy touchoit plus, qu'il le courrouceroit. Lequel luy promist que non feroit il. Et lors ledit Guillaume s'en party dudit hostel, pour s'en aler au lieu du Dorat, dont il estoit ; et incontinent qu'il fut à chemin, icelluy Jehan, non obstant qu'il eust promis audit suppliant qu'il ne luy toucheroit plus, le suyvi ; laquelle chose veant, ledit suppliant, doubtant que icelluy Jehan le tuast d'un grant baston qu'il avoit, courut après pour le garder, mais avant qu'il les peust aconcevoir, ledit Jehan donna plusieurs coups audit Guillaume dudit baston, tellement qu'il estoit cheu à terre. Et quant il fut arrivé, il garda icelluy Jehan qu'il ne le frappast plus. Et après lesdiz suppliant, Simon et Jehan Arnault le prindrent et emportèrent devant l'ostel d'icelluy Simon et le misdrent sur de la paille et le couvrirent fort, et luy lava ledit suppliant les mains et le visaige d'eaue chaulde ; et tantost après s'en ala icelluy suppliant en son hostel, et fut ledit Guillaume mis ou lit; et cinq ou six jours après, icelluy Guillaume, par faulte de gouvernement ou autrement, est alé de vie à trespassement. A l'occasion duquel cas ainsi advenu que dit est, et aussi que autresfois ledit feu Guillaume avoit eu seureté judiciaire dudit suppliant, combien que depuis ilz se feussent appoinctez et beu et mangié ensemble, icelluy suppliant, doubtant rigueur de justice, s'est absenté du païs et a habandonné son père et ses femme et enfans, et n'oseroit jamais retourner, se nostre grace et misericorde ne luy estoient imparties, ainsi qu'il nous a fait dire et remonstrer, en nous humblement requerant que, attendu ce que dit est, que ledit feu Guillaume estoit homme de perverse vie, noiseux et rioteux entre ses voisins, et qu'il est vraysemblable à croire qu'il ne mouru point pour les coups que luy donna ledit suppliant, car il ne le frappa que par la jambe et en la joue du plat de sadicte dague, et depuis le deffendi de tout son povoir des autres dessusdictz, mais il ne peut oncques tant faire qu'ilz ne luy baillassent plusieurs coups de gros bastons qu'ilz avoient, que en tous autres cas ledit suppliant s'est bien et doulcement gouverné, sans oncques avoir esté actaint d aucun villain cas, blasme ou reprouche, qu'il nous a servy ou fait de noz guerres, tant au recouvrement de noz païs et duchiez de Normandie et de Guienne que autrement, en maintes manières, et que plusieurs de ses predecesseurs et parens sont alez de vie à trespassement en nostre service, et aussi que ledit feu Guillaume estant en sa maladie, à cause de ce que dit est, a dit qu'il ne mouroit point de coups que luy avoit baillez icelluy suppliant, il nous plaise nosdictes grace et misericorde luy eslargir. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant, en faveur de sesdiz femme et enfans et aussi desdiz services, avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, etc. Donné à Chinon, ou mois d'octobre l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. De Puigiraut. —Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXXIV Novembre 1459

Rémission accordée à Guillaume Brisart, laboureur, détenu dans les prisons du commandeur de Coudrie pour le meurtre de sa première femme, dont il s'était rendu coupable vingt-quatre ans auparavant.

AN JJ. 188, n° 196, fol. 99 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion des parens et amys charnelz de Guillaume Brisart, laboureur, demourant en la terre et seigneurie de Cousdrie ou bas païs de Poictou, à present detenu prisonnier ès prisons de ladicte terre et seigneurie, appartenant au commandeur dudit lieuCoudrie, commanderie de l'ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem du grand prieuré d'Aquitaine, antérieurement commanderie du Temple, en la paroisse de Challans. C'était, au point de vue judiciaire, une châtellenie qui s'étendait sur les paroisses de Coudrie et des Habites et sur partie des suivantes : Froidefont, Falleron, la Garnache, Challans, Sallertaine, Saint-Gervais, Beauvoir, Bois-de-Céné, le Perier, Soulane, Notre-Dame de Rié, Saint Hilaire de Rié, Saint-Christophe-du-Ligneron, Apremont, Aizenay, Commequiers et Vairé. Le cartulaire de la commanderie de Coudrie a été publié par M. de la Boutetière. (Arch. hist. du Poitou, t. II, 1873.) contenant que dès pieça ledit Guillaume Brisart fut conjoinct par mariage avecques feue Hylaire, en son vivant fille de deffunct Estienne Gougeau, ouquel mariage ilz furent par aucun temps et d'eulx yssit ung enfant nommé Pierre, encores vivant. Et advint, xxiiii. ou xxv. ans a, environ le mois d'avril, que ainsi que ledit Guillaume Brisart entroit en sa maison estant ou villaige de la Benestre, il trouva que Cathin Lanberte, sa mère, avee laquelle il demouroit lors, et ladicte feue Hylaire, sa femme, tensoient ensemble, et en ce faisant, ainsi que ladicte Hylaire estoit sur le bers dudit Pierre, lors estant oudit bers, sadicte mère amonnestoit ladicte feue Hylaire qui estoit fort pesant et negligent d'aler tirer le lait de leurs bestes et lesdictes bestes mettre ès champs, parce qu'il estoit sur l'eure de deux heures après midy, dont ladicte feue Hylaire tint peu de compte, comme il sembla audit Brisart ; et à ceste cause ledit Brisart en fut contre elle indigné et courroucé, et en esperance de la corriger et afin qu'elle fust plus diligente une autres foiz et obeist à sadicte mère, frappa ladicte Hylaire, sa femme, deux ou trois coups du pié, environ le flanchet du cousté. Et lors ladicte Hylaire se print à crier : « A l'aide ! bonnes gens », et d'ilec se leva et s'en ala ou jardin estant derrière ladicte maison. Lequel Brisart suivi lors en celle chaleur sadicte femme qu'il ramena dudit jardin en sadicte maison, en luy donnant de la main sur la joue, et en entrant en ladicte maison, trouva une cuillier de boys de laquelle il frappa ladicte Hylaire ung coup sur la joue et l'autre sur les espaules. Et ce fait, ledit Brisart, desplaisant de ce qu'il avoit batu sadicte femme, s'en ala au lieu de la Ganache querir du blé qu'il avoit retraict, pour les gens d'armes qui lors couroient par le païs. Et après qu'il fut retourné ledit jour en sadicte maison, il trouva sadicte femme très fort malade, avec laquelle estoient plusieurs autres femmes du villaige qui l'estoient venu veoir, et ledit jour mesmes que ledit suppliant donna à sadicte femme lesdiz coups, icelle femme, à l'occasion desdiz coups ou autrement, ala de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas, ledit Brisart a puis naguères esté constitué prisonnier èsdictes prisons, èsquelles il est de present detenu à grant povreté et misère, et doubtent sesdiz parens et amys supplians que contre luy on voulsist à ceste cause rigoureusement proceder, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties, et pour ce nous ont humblement supplié et requis que, attendu que ledit Brisart, en donnant lesdiz coups à sadicte femme n'avoit aucun propos ne entencion de la tuer ne mutiler, ains seulement de la corriger de ses faultes et l'admonnester d'estre une autresfoiz plus diligente qu'elle n'estoit et obeir à ladicte mère dudit Brisart, et faire ce qu'elle luy ordonneroit, à laquelle elle ne vouloit obeir, dont ledit Brisart estoit fort desplaisant; aussi le longtemps qu'il y a que ledit cas advint, que de ladicte mort il a esté et est très desplaisant, et est en tous autres cas homme bien famé et renommé, sans jamais avoir esté actaint ne convaincu d'aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, et que les premiers mouvemens ne sont pas en puissance de homme, et que paravant ledit Brisart luy avoit par plusieurs fois remonstré par parolles doulces et benignes de obeir à sadicte mère et avoir en soy diligence ; et que depuis ledit cas advenu, a esté ledit Brisart et encores est à present marié avec une autre femme, dont sont yssus ung filz et neuf filles, qui encores sont à marier, et sadicte femme preste d'avoir enfant, il nous plaise en préférant misericorde à rigueur de justice nosdictes grace et misericorde audit Brisart impartir. Pour quoy nous, ces choses considerées, audit Guillaume Brisart, etc., avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois de novembre l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. P. de Fontaines. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXXV Novembre 1459

Rémission accordée à François Queret, natif de Mauléon, archer des ordonnances, qui dans une rixe avait frappé mortellement Jean Guilloteau, franc-archer, à Thors.

AN JJ. 188, n° 206, fol. 103 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de François Queret, povre jeune homme de l'aage de xxv. ans ou environ, archier estant à noz gaiges et souldes soubz la charge de nostre amé et feal conseillier et chambellan, le conte de DampmartinAntoine de Chabannes, comte de Dammartin, né en 1411, mort à Paris, le 25 décembre 1488, grand panetier de France depuis l'an 1447. (Cf. notre vol. précédent, p. 334, note.) contenant que, dix ans a ou environ, ledit suppliant se parly du lieu de Mauléon en Poictou, dont il est natif, et s'en ala demourer avec ung nommé Jehan Velart, homme d'armes de nostre retenue soubz la charge de nostre cher et feal cousin le sire de LoheacAndré de Laval, seigneur de Lohéac, maréchal de France, né en 1411, mort en janvier 1486, était aussi seigneur de Pouzauges et de Tiffauges par son mariage avec Marie de Laval, fille du fameux Gilles de Rais et de Catherine de Thouars, dame desdites terres et seigneuries. (Cf. notre vol. précédent, p. 398, note.) A la date des faits rappélés ici (1449), il commandait sur la frontière du Maine et de la Normandie. mareschal de France, avecques lequel il a esté et demouré par aucun temps, sans avoir fait ou commis aucune chose digne de reprehencion ; lequel François, suppliant, qui puis cinq ou six ans ença a esté mis en nostre ordonnance, en estat d'archier, soubz la lance de Pierre PommierA propos de ce personnage et sans prétendre qu'il y ait lieu à identification, nous citerons le document suivant : Quittance donnée par Christin Pommier et Jeanne Légier, sa femme, assistés de Jacques de Poignes, écuyer, sr de la Chapelle, et de Marie du Retail, sa femme, veuve de feu Pierre Pommier et mère dudit Christin, à Marie de la Brosse, veuve de Jean Légier, écuyer, seigneur de la Sauvagère, et à Jean et Jacques Légier, mère et frères de ladite Jeanne, d'une somme de 100 livres sur celle de 250 livres qu'ils lui avaient donnée en dot. 8 mai 1498. (A. Richard, Archives du château de la Barre, t. Ier, p. 140.), homme d'armes soubz la charge de nostredit conseillier le conte de Dampmartin, s'est par aucun temps ença tenu au lieu de Thors en Xainctonge où ledit Pommier a son hostel et domicille, et lui estant audit lieu, est advenu que, le jour et feste de saincte Marguerite qui fut le vintiesme jour du moys de juillet derrenier passé, auquel jour se tenoit illec la foire, survint, environ l'eure de vespres, ung nommé Jehan Guilloteau, franc archier devant l'ostel d'ung nommé Jehan Legrant, assis près du lieu où se tenoit ladicte foire ; auquel Guilloteau ledit suppliant demanda s'il vouloit changer sa dague à la sienne. Lequel Guilloteau malicieusement et fierement lui respondi que non et que nous la lui avions donnée, et ledit suppliant lui dist que nous ne savions qui il estoit ; et lors ledit Guilloteau lui dist que si mieulx que lui, et ce dit, icelui suppliant en soy riant dist audit Guilloteau telles paroles ou semblables : « Quant le roy nous auroit perduz, il perdroit son royaume ». Lequel Guilloteau, desplaisant de ce et de mauvais couraige, se tray deux ou troys pas en arrière et tira sa dague, et dist audit suppliant : « Quiconques aura ma dague, il l'aura par le bon bout ». Et lors ledit suppliant lui demanda pourquoy il tiroit sa dague et s'aproucha de lui et la lui osta, et ce fait lui en bailla sur l'espaule troys ou quatre coups de plat et, après ce, mist la dague en une braye et la fist ployer et la redreça, et ce fait la gecta à terre, en disant audit Guilloteau : « Pren ta dague ; je ne te daigneroie batre de ton baston » ; lequel la print et mist en sa gaynne, et dist audit suppliant qu'il avoit fait que fol, et incontinent ledit Guilloteau se mist ou grant chemin qui estoit ilec près, et derechief tira sa dague en demandant audit suppliant s'il vouloit riens dire. Lequel suppliant, qui n'avoit pas une pouvre dague à sa sainture, print une besche et s'aproucha dudit Guilloteau, en lui disant : « Se je t'ay rendu ta dague, ne te en tiens point plus fier, et t'en va, car se ne feust pour l'onneur de la foire et du seigneur dudit lieu de ThorsThors était l'une des nombreuses terres et seigneuries dont Nicole de Blois, dite de Bretagne, avait hérité de sa mère, Isabelle de Vivonne, et qu'elle apporta à son mari avec le comté de Penthièvre et autres biens de son père. Le seigneur de Thors était alors par conséquent Jean n de Brosse, seigneur de Sainte-Sévère et de Boussac, comte de Penthièvre, etc., qui avait épousé Nicole, par contrat du 18 juin 1437. (Cf. ci-dessus, p. 38, note.) je t'en envoyeroie bien tost, et ne me menace point, si tu fais que saige ». Lequel Guilloteau n'en voult riens faire, ainçoys s'efforça frapper de sadicte dague deux ou troys fois ledit suppliant ; et ce voyant, ledit suppliant, qui n'avoit point vouloir de lui mal faire, se retray en l'ostel dudit Jehan Legrant, ouquel il trouva et print une broche ou haste de boys, et meu et eschauffé des oultraiges que s'estoit efforcé lui faire ledit Guilloteau, sortit et yssit hors dudit hostel et trouva ledit Guilloteau, auquel il frappa et bailla ung cop dudit haste par la poictrine, dont il ala tantost après, par faulte de gouvernement ou autrement, de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s'est absenté du païs ou mis en franchise, ouquel il n'oseroit jamais reperer, converser ne demourer, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, ainsi qu'il nous a fait dire et remonstrer, en nous humblement requerant que, attendu ce que dit est, que ledit feu Guilloteau fut agresseur et non pas ledit suppliant, aussi que ledit cas est advenu de chaulde cole et que ledit suppliant a esté et est de bonne vie et renommée, et ne fut jamais actaint ne convaincu d'aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, qu'il est jeunes homs et nous a bien et loyaument servy ou fait de noz guerres, il nous plaise sur ce lui impartir nosdictes grace et misericorde. Pour quoy nous, les choses dessusdictes considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit François Queret, suppliant, oudit cas avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à nostre seneschal de Xaintonge et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou moys de novembre l'an de grace mil cccc. cinquante et neuf, et de nostre règne le xxxviiime.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. L. Daniel. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXXVI Novembre 1459

Rémission octroyée à Laurent Boutin, franc-archer, demeurant à Chaban, qui s'était rendu coupable de nombreux vols à l'instigation et avec la complicité d'autres francs-archers de la région.

AN JJ. 188, n° 208, fol. 104 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Laurent Boutin, franc archier, demourant à Chabans, chargié de femme et de trois petiz enfans, contenant que, cinq ans a ou environ, ung nommé Jehan de Saint Remy, aussi franc archier, qui est cault, subtil et malicieux, se transporta par devers ledit suppliant, qui estoit povre simple homme, lequel nous a servi ès reductions par nous, graces à Dieu, faictes en nostre obeissance de noz païs et duchez de Normandie et de Guienne, et luy dist telles parolles ou semblables en substance : « Tu es povre et meschant homme et n'as de quoy vivre et nourrir ton mesnaige. Se tu me veulx croire, parle sang Dieu, toy et moy serons riches à jamais. Se tu veulx venir avec moy et en ma compaignie trois mois, où je te meneray, nous aurons beaucop de biens ». Lequel suppliant, qui ne savoit et ne scet aucun mestier, de quoy il peust gangner la vie de luy, sa femme et enfans, et desiroit guaigner, luy dist qu'il estoit content et d'accord de faire ce qu'il luy commanderoit, et aler où il vouldroit aler. Et après ce, s'en ala icelluy suppliant avec ledit de Saint Remy, Jehan Chabans et Denis Olivier, aliez et complices dudit de Saint Remy, en la parroisse de Bouillié près Nyort, où ilz prindrent certaine quantité de froment, dont ledit suppliant eut en sa part six boisseaux ou environ. Et après se transportèrent ledit suppliant et les autres dessus nommez en l'ostel d'un nommé Jehan Picart, de Soiché près dudit lieu de Nyort, ouquel hostel ilz prindrent autre grant quantité de blé, appellé mesture, dont icelluy suppliant eut en sa part dix boisseaux ; et ce fait, se transportèrent les dessusdiz et suppliant au port de Nyort, et ilec prindrent en la saunière de Milors de PoictiersAu xve siècle vivait à Poitiers Pierre de Varennes, dit Milord. certaine quantité de sel, duquel sel icelluy suppliant eut en sa part six boisseaux. Et aussi se transportèrent les dessusdiz et suppliant en ung bourc appellé Ruffigné en la chastellenie de Saint Mexant, où ilz prindrent certaine autre quantité de froment en l'ostel des Ypeaux dudit lieu de Ruffigné, dont ledit suppliant eut en sa part dix boisseaux. Et depuis ledit suppliant se transporta, en la compaignie d'un nommé Jehan des Lignes, aussi franc archier, en ung certain lieu, où ilz ostèrent à ung nommé Martin Greusset, prebstre, chappellain de maistre Jehan Giller

Jean Gillier était le fils aîné d'Etienne Gillier, sr des Rosiers, procureur du roi en la sénéchaussée de Saintonge, et d'Andrée et non Jeanne Andraut, dame de la Villedieu-de-Comblé. Nous pouvons aujourd'hui ajouter quelques renseignements à la notice imprimée dans notre volume précédent (p. 274, note) sur Etienne Gillier. Le prénom de sa femme était en réalité Andrée et elle avait été mariée en premières noces à Me Jacques Royrand. Du vivant de son premier mari, elle avait acquis de Pierre Auffroy et de Bonne Rouillé, sa femme, une rente annuelle de cent sous tournois. Le 9 juillet 1455, Guillaume Auffroy, prêtre, fils des vendeurs, voulant décharger les biens de ses parents alors décédés et les siens de cette redevance, passa, à la Mothe-Saint-Héraye, avec Etienne et Jean Gillier, père et fils, un contrat par lequel, en échange de ladite rente, il leur cédait une maison avec verger derrière, « un froustis de maison », trois quartiers de pré, etc., le tout sis audit lieu de la Mothe-Saint-Héraye. (Original, Bibl. nat., ms. fr. 27808, pièce 29 du dossier Gillier.) Le même manuscrit contient six quittances des gages d'Etienne Gillier, comme procureur du roi en Saintonge et dans la ville et le gouvernement de la Rochelle, à raison de 50 livres par an : elles sont datées des 10 novembre 1440, 31 janvier 1446 n. s., 28 novembre 1452, 8 juin 1458, 5 février 1463 n. s. et 15 juin 1463 ; la signature de cette dernière se caractérise par le tremblement notable de la main qui tenait la plume (Id., n° 36). Viennent ensuite des lettres patentes de Louis XI, à Paris, le 9 septembre 1461, confirmant Gillier dans ledit office, et sous la date de Marcilly en Aunis, une autre confirmation émanant de la reine Marie d'Anjou, à laquelle le roi son fils avait cédé comme douaire, entre autres domaines, le comté de Saintonge et le gouvernement de la Rochelle. D'autres lettres de Louis XI, données à Poitiers, le 2 juin 1462, portent qu'un nommé Méry Rabeau, trois mois auparavant, par importunité et sous prétexte que ledit Etienne était « vieil et debilité », s'était fait pourvoir de son office de procureur du roi en Saintonge ; elles rétablissent ce dernier et le confirment de nouveau dans cette charge, avec exclusion formelle de son rival. Citons encore un mandement du même roi, daté d'Amboise, le 8 octobre 1461, ordonnant au sénéchal de Poitou de recevoir Etienne Gillier à la foi et hommage qu'il est tenu de faire à raison de son hôtel et appartenances de Saugé, mouvant de Lusignan. A ce mandement est joint un acte d'Hugues de Conzay, lieutenant général du sénéchal, certifiant que, le ler janvier 1462 n. s., ledit Gillier a fait devant lui ladite foi et hommage. (Ms. fr. 27808, nos 23 à 33.) Le décès d'Etienne dut avoir lieu dans les derniers mois de l'année 1464.

Jean Gillier lui succéda comme seigneur de la Villedieu-de-Comblé; Il rendit aveu, le 10 mars 1465 n. s., de l'office héréditaire de clerc des présentations de Poitou, qui lui revenait également par la mort de son père. (Arch. nat., P. 1145, fol. 150.) Il épousa Françoise Méhée et en eut plusieurs enfants. En 1472, il poursuivait au Parlement Aimery Chauvin, chevalier, Artus Chauvin, fils de celui-ci, sa femme et ses enfants, qu'il accusait de violence et d'excès à son préjudice, à l'occasion d'une contestation qu'ils avaient ensemble au sujet de la propriété des terres et seigneuries de Riberolles et de « Florence ». Jean Gillier, qualifié écuyer, seigneur de la Villedieu-de-Comblé, obtint de la cour, le ler février 1473 d. s., un arrêt qui lui adjugeait le bénéfice de quatre défauts contre ses adversaires et condamnait ceux-ci à lui restituer les terres litigieuses, à lui payer 400 livres parisis de dommages-intérêts, et à 300 livres d'amende envers le roi. Un mandement pour l'exécution dudit arrêt se trouve sur le registre de Parlement, à la date du 13 juillet 1475. (Arch, nat., X2a 39, séance du 23 avril 1472 ; X2a 40, fol. 8 v0 et 249.) Il était décédé avant le 7 juin 1482.

, ung cheval qui valoit bien environ six escus, lequel cheval a esté depuis rendu audit Greusset, prebstre, et aussi a satisfait à ceulx à qui il povoit estre tenu à cause de ce que dit est. Pour occasion desquelz cas, ledit suppliant n'oseroit, doubtant rigueur de justice, bonnement converser ne repairer au païs, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce par nous imparties, requerans humblement que, attendu qu'il a satisfait aux parties, sans à ce avoir esté contrainct, et que la grant povreté en quoy il estoit lors luy firent faire lesdiz larrecins, moyennant l'avertissement que luy en fist ledit de Saint Remy, aussi que en tous autres cas il est bien fame et renommé, et ne fut jamais actaint ne convaincu d'aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise luy impartir nosdictes grace et misericorde. Pour ce est il que nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant, en faveur de sesdiz femme et enfans, et des services qu'il nous a faiz èsdictes redduccions, avons lesdiz larrecins dessus declairez oudit cas quictez, remis et pardonnez, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Poictou ou à son lieutenant et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois de novembre l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviiie.

Ainsi signé : Par le roy, a la relacion du conseil. A. Rolant. — Visa. Contentor.

MCCCXXVII 24 novembre 1459

Lettres d'amortissement, en faveur de l'abbaye et des religieux de Saint-Laon de Thouars, d'une somme de cent livres de rente, destinée à la fondation de l'anniversaire de la dauphine Marguerite d'Ecosse.

AN JJ. 188, n° 211, fol. 105 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Karolus, Dei gracia Francorum Rex. Notum facimus universis, presentibus et futuris, nos humilem supplicacionem dilectorum nostrorum religiosorum abbatis et conventus monasterii Sancti Launi de Thoarcio, ordinis Sancti Augustini, Pictavensis diocesis, recepisse, continentem quod carissima dudutn filia nostra MargaretaMarguerite d'Ecosse, fille de Jacques Ier roi d'Ecosse, première femme du dauphin Louis, mariée le 24 juin 1436, morte, âgée de vingt et un ans seulement, à Châlons-sur-Marne, le 16 août 1445. Ce ne fut que le 31 octobre 1479 que son corps fut transporté à l'abbaye de Saint-Laon de Thouars, et il y fut inhumé le dimanche 14 novembre suivant, dans un tombeau à droite de la chapelle de la Vierge. (Voy. notre huitième vol., t. XXIX des Arch. hist., p. 405, note.), deffuncti carissimi ac dilectissimi consanguinei, fratris et confederati nostri Jacobi, Scotorum regis, primogenita et, dum ageret in humanis, conthoralis carissimi et dilectissimi nostri primogeniti Ludovici, dalphini Viennensis, pio ducta proposito, de sua ac predecessorum suorum salute animarum attente cogitans, ad Dei omnipotentis laudem, honoreiri ac beatissime Virginis gloriose, disponerit, ordinaverit et statuerit quandam capellam in dicto monasterio Sancti Launi erigi, construi et edifficari, ac sub nomine et vocabulo SepulcriSur l'édification de cette chapelle, commencée du vivant de la dauphine, cf. id. ibid. 406, note. sacratissimi Domini nostri Jhesu Christi nuncupari seu appellari, eodemque in monasterio jamdicto quolibet anno anniversarium solenne, pro salute anime dicti deffuncti fratris nostri Scotorum regis, ea die qua decessit ; et insuper missam unam alta voce, cum presbytero, diacono et subdiacono, qualibet die Lune, ad honorem ipsius Virginis gloriose solenniter celebrari. Qui quidem presbiter, dyaconus, subdiaconus et alii religiosi, post ipsius misse finem seu complementum, dicere solenniter tenebuntur alta voce Subvenite Sancti Dei, seu Ne recorderis, etc., cum oracionibus sequentibus : Inclina, Domine, aurem tuam, Quesumus Nomine, pro tua piétate, et Fidelium Deus omnium, etc. Ordinavitque insuper prefata Margarita, pro premissis peragendis ac debite adimplendis, summam sex centorum scutorum auri de cugno auree monete nostre, semel ipsis supplicantibus tradi realiterque numerari, procurareque aut procurari facere erga nos et alios quos interesse posset admortizationem et indempnitatem usque ad summam centum librarum turonensium monete currentis, per ipsos abbatem et religiosos vel successores ipsorum, pro premissorum fundacione dotacioneque ac divini cultus augmento, acquisitarum seu acquirendarum. Quorum pretextu deffunctus Nicolaus GadartNicolas Gadart fut abbé de Saint-Laon de 1430 à 1444 environ, ll avait eu pour successeur dès l'année 1446 Nicolas Lecocq, que l'on trouve aussi nommé Leroy, et ce dernier était encore à la tête de ce monastère le 14 janvier 1481. (Loc. cit. 404 et 406, notes). C'est lui par conséquent qui obtint les lettres d'amortissement publiées ici. jamdictus ipsius monasterii abbas, tunc temporis agens in humanis, cappellam ipsam ad instar sepulture dominice decenter erigi fecit atque construi, predicta sex centorum scutorum auri summa per jamdictum olim abbatem aut alium ejus nomine recepta ; quinymo pro securitate solucionis ipsius summe recepit et habuit ab eadem Margarita, per modum pignoris aut vadii, horas quasdam speciosissimas gloriose Virginis, quas quidem reddere promisit atque realiter tradere eidem Margarete, recipiendo ab ea summam ipsam sexcentorum scutorum auri ; verum ipsa rebus humanis postmodum exempta summaque sexcentorum scutorum auri minime persoluta, hore ille in manibus ipsius abbatis remansere. Quibus quidem ad noticiam nostram deductis, nos salutem animarum personarum preclare prosapie regia pietate desiderantes, piamque et laudabilem intencionem ipsius Margarete, nostre filie, attendentes, utque eciam suffragiorum spiritualium que inibi deinceps fient nos ac successores nostri participes efficiantur, que siquidem ipsa Margareta voluit, statuit et ordinavit sepe dictam summam sexcentorum scutorum auri de cugno predicto cursum usualem pronunc habentium, eciam litteras admortisacionis usque ad summam centum librarum turonensium per ipsos supplicantes semel vel successive acquisitarum aut deinceps acquirendarum, pro capelle predicte debita perfectione et missarum ac anniversariorum commemoracionumque et suffragiorum spiritualium predictorum fundacione atque dotacione, ipsis supplicantibus tradi et liberari, quibus quidem horis per ipsos nobis traditis, ipsis predictam summam sexcentorum scutorum auri tradi, deliberari aut assignari fecimus decenter, ut in talibus fieri est consuetum. Et jam hoc mediante, ipsi supplicantes pro premissis peragendis et perficiendis modo et forma premissis, tangentibus dictam fundacionem et dotacionem ipsius capelle cum anniversario, missis, serviciis supratactis, nobis aut successoribus nostris, ad futuram rei memoriam, obligacionem datam, factam et sigillatam sub eorum sigillo et debite passatam more solito tradiderunt, ob hocque pretacti supplicantes nobis humiliter postularunt ut eisdem, secundum formam et tenorem ipsius Margarete deffuncte voluntatis, velimus concedere litteras nostras admortisacionis ipsius summe centum librarum turonensium acquisitarum aut acquirendarum, ut dictum est, et nostram graciam super hoc benigniter, impartiri. Quocirca premissis attentis, et ut oracionum, precum et operum pietatis et caritatis, que in dicto monasterio fiunt et in posterum fient, participes efficiamur, aliisque de causis ad hoc animum nostrum moventibus, ipsis supplicantibus et eorum dicto monasterio, de nostris certa sciencia auctoritateque regia admortisavimus et admortizamus usque ad dictam summam centum librarum turonensium redditus, acquisitarum seu acquirendarum, admortisatamque esse volumus et decernimus de gracia speciali per presentes, absque eo quod ipsi supplicantes nec eorum successores financiam propter hoc nobis debitam minime solvere teneantur, quam eisdem ex causis premissis dedimus et contulimus, damusque et contulimus (sic) de ipsa nostra speciali gracia per presentes, volentes quod de cetero prefati supplicantes eorumque successores in ipso monasterio teneant habeantque et possideant tenereque et possidere valeant dictos redditus usque ad dictam summam centum librarum turonensium, absque eo quod per nos, successores nostros, seu a nobis commissos et depputatos aut quosvis alios depputandos imposterum, quacunque fungantur auctoritate, compelli sive cogi possint ipsos redditus extra manus suas ponere, tanquam non admortisatos nec propter hoc aliquam financiam nobis aut successoribus nostris persolvent. Dantes tenore presentium in mandatis dilectis et fidelibus nostris camere nostre compotorum gentibus et thesaurariis, senescallo nostro Pictavensi ceterisque justiciariis et officiariis nostris, aut eorum locatenentibus, presentibus et futuris, et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, quatliinus memoratos supplicantes et eorum successores aut alios quorum întererit aut interesse poterit in futurum, nostris presentibus gracia, concessione et admortizacione uti et gaudere plene, pacifice et quiete faciant et permittant, nec ipsos quomodolibet in contrarium molestent, impediant aut perturbent seu molestari, perturbari aut eciam impediri faciant nec permittant quoquo modo. Et in rapportando has presentes manu nostra signatas, aut eorum vidimus una vice, et quictanciam aut recognicionem dictorum supplicantium super hoc sufficientem solum, volumus et mandamus dictam financiam, nobis super hoc debitam, ut dictum est, esse allocatam in compotis receptoris nostri cui pertinebit per dictos gentes nostros compotorum. Quibus mandamus ut ita faciant, quoniam sic fieri volumus, ordinacionibus mandatisque, restrinctionibus et deffensionibus [in contrarium] non obstantibus quibuscunque. Et ut stabilitatis robur obtineant, hiis presentibus litteris sigillum nostrum duximus apponendum. Nostro tamen et alieno in ceteris jure semper salvo. Datum Razilliaci prope Caynonem, die vicesima quarta mensis novembris anno Domini millesimo ccccmo quinquagesimo nono, et regni nostri tricesimo octavo.

Sic signatum : Charles. — Per regem in suo consilio. Chaligaut. —Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXXVIII Mars 1460

Rémission octroyée à André Havet, poursuivi comme complice du meurtre d'un clerc du Palais de Poitiers, nommé Saunier, qui avait été frappé à mort dans le conflit de deux bandes de jeunes clercs et de gens de guerre de passage dans la ville, qui s'étaient réunis, à la tombée de la nuit, pour battre le pavé.

AN JJ. 190, n° 17, fol. 9 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de André HavetCe n'était pas la première fois qu'André Havet avait maille à partir avec la justice et ce ne devait pas être la dernière. Déjà quatre ans plus tôt il avait pris part avec Michel et Maurice Claveurier, André et Jean de Conzay et plusieurs autres, à l'escalade de l'hôtel de Pierre de Morry ou Mourry, chanoine et sous-doyen du chapitre de Saint-Hilaire-le-Grand de Poitiers. Ils y avaient pénétré de nuit, l'avaient dévalisé et maltraité les gens du sous-doyen. Les registres criminels du Parlement contiennent en cinq endroits des renseignements sur cette affaire, entre le 15 novembre 1456 et le 5 décembre 1458. (Voy. notre précédent volume, p. 131 note.) Le 20 décembre 1463 et le 5 janvier 1464, on le retrouve devant la cour, ayant à répondre d'actes de pillage commis à Vouillé. Les chanoines de Sainte-Radegonde, comme seigneurs du lieu, avaient porté plainte d'abord devant le sénéchal de Poitou et devant Aymar Mouraut, conservateur des privilèges de l'Université de Poitiers. André Havet était encore cette fois en bonne compagnie ; ses co-accusés étaient Pierre de Frozes, chevalier, Bertrand de Marconnay, Michel Babaud, Simon Claveurier, Mahuet le francarcher, Mathurin et Pierre de Marconnay, Pierre de Ry, Jean Malemouche, Pierre Buffeteau, Simon de Marconnay, Jacques Gouffier, Guillaume de Cherves et Alexandre Babaud. Le chapitre de Sainte-Radegonde n'ayant pu obtenir des premiers juges une réparation suffisante de cet attentat et des dommages subis, se porta appelant au Parlement de leur sentence. On ne trouve sur les registres de la cour qu'un mandement d'enquête et deux arrêts de procédure relatifs à ce procès. (Arch. nat., X2a 30, fol. 357 ; X2a32, aux dates des 20 décembre 1463 et 5 janvier 1464.) aaigé de vingt et cinq ans ou environ, contenant que, le lundi xxvme jour de fevrier derrenier passé, ainsi que ledit suppliant s'en aloit par la ville de Poictiers, trouva Colin Corgnou

En cet endroit et plus loin, ce nom paraît écrit plutôt « Coignon ». Nous croyons qu'il faut lire de préférence Corgnou, dont le nom se trouve aussi sous la forme Corgnol. Ce personnage doit être identifié, semble-t-il, avec Colin Corgnol, écùyer, seigneur de Châtillon-sur-Dive, époux de Marie de Massougne, le plus jeune enfant de Louis

Corgnol, écuyer, seigneur de Tessé, Miserit, Châtillon et autres lieux, et de Marguerite Janvre, ceux-ci mariés vers 1430. (Voy. Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 2° édit , t. Il, p. 624.) Colin était décédé avant le 12 août 1479, date d'un appointement donné en Parlement au profit de sa veuve et de ses deux enfants, Aubert et François Corgnou, mineurs, placés sous le gouvernement de Louis Corgnou, leur grand-père sans doute, contre Eustache Chaslon, Guyon François et Vincent Espaillart. (Arch. nat., X2a 43, à la date.) Il a été question de Louis Corgnou ou Corgnol, sr de Miserit et du Breuild'Aigonnay, dans notre précédent vol., p. 391, note.

et Charlot Debutz, hommes d'armes, ausquelx il avoit grant congnoissance et amitié et se entrefirent grant chière ensemble. Et ce fait, ledit suppliant leur demanda où ilz aloient, et lesdiz Corgnou et Debutz respondirent : « Nous alons à la grant maison, si vous voulez venir avecques nous », et ledit suppliant leur respondit qu'il leur tiendroit voulentiers compaignie. Et allèrent ensemble aux estuves, et quant ilz furent dedans lesdites estuves, disdrent que, s'il n'y avoit de belles filles, qu'ilz ne se estuveroient point, et pour ce quil n'y en avoit nulles, s'en alèrent et en eulx en alant, virent Berthommée la Rousse, laquelle s'en alloit vers Saint Pierre, et lesquelx la poursuivirent jusques à l'eglise de Sainct Jehan Baptiste, et là parlèrent à elle ; et ledit suppliant la print par dessoubz le braz et lui dist : « Il fault que tu nous faces plaisir, et nous te paierons bien ». Laquelle lui respondit qu'elle estoit contente, mais qu'elle eust place. Et ledit suppliant lui dist et respondit qu'il la meneroit bien en ung lieu secret. Et ladicte Rousse respondit qu'elle le vouloit bien, mais qu'elle eust fait ung tour jusques chiés elle. Et ledit suppliant lui dist qu'elle y alast, mais qu'elle revint tantost ; et ladicte Rousse promist qu'elle ne leur fauldroit point et feroit tout leur plaisir. Et ledit suppliant lui dist que là où elle ne tiendroit sa promesse, que lui mesmes la iroit querir jusques au dedans. Laquelle Rousse n'y vint point, mais s'en entra chiés ung prebstre où il tenoit vin à vendre el taverne publicque. Et ledit suppliant et lesdiz Corgnou et Debutz entrèrent en ladicte maison et demandèrent du vin, ce qu'ilz eurent et le paièrent bien. Et après ce, Colin Corgnou lui dist : « Venez ça, ma belle fille, tenez nous ce que vous nous avez promis et nous vous donnerons de l'argent ». Laquelle Rousse lui fist responce : « Alez devant, je ne vous fauldray point ». Et ce fait, vint ung homme, nommé Hilairet Cosnac, audit suppliant et lui dist : « Et puis serez vous prest entornuyt, vous et Colas »; auquel lui qui parle dist : «  Saugé m'en a aujourduy parlé ; car il m'a dit que c'est pour avoir une belle fille ». Puis ledit Cosnac dist audit suppliant : « Or ne faillez pas de vous y rendre, car il y a gens qui me doivent dire de verité où est ladicte belle fille ». Et atant se departirent de ladite maison, et ledit suppliant et hommes d'armes s'en vindrent à l'Escu de France, et là ledit suppliant laissa lesdiz hommes d'armes et s'en ala à la place Nostre Dame ; auquel lieu ledit suppliant, à heure de vespres, trouvaung nommé Colas Godart, son compaignon, auquel il dist que Colin Corgnou et Chariot Debutz estoient en la ville. Et lors ledit Godart dist audit suppliant qu'ilz les alassent veoir, ce qu'ilz firent. Et alèrent à l'Escu de France et là trouvèrent Charlot Debutz seullement; lequel Charlot les convia à boire et beurent, et ledit Charlot dist ausdiz Godart et suppliant qu'ilz lui finassent de quelque belle fille, et que ilz estoient de la ville et devoient savoir du fait de la ville mieulx que lui. Auquel Charlot ledit Godart respondit : « Ne vous en soussiez, nous aurons quelque chose ». Et ce fait lesdiz Godart et suppliant se partirent, et en alant leur chemin vers Nostre Dame la Petite, trouvèrent ledit Hilairet Cosnac, lequel Cosnac dist audit suppliant que la Rousse, dont dessus est faicte mencion, avoit dit à son frère que les gens d'armes qui estoient alez ala taverne y estoient alez pour l'amour de sa seur et non pas pour l'amour d'elle, en disant : « De fïèvre cartaine soit espousée la ribaulde ; elle a fait blasmer sa seur sans cause ». Et de là lesdiz Godart et suppliant, avecques ledit Cosnac, s'en alèrent à la maison du lieutenant de nostre seneschal de PoictouLe lieutenant général du sénéchal de Poitou était alors Hugues de Conzay, auquel nous consacrons une notice quelques pages plus loin, no MCCCXLII. veoir s'ilz trouveroient ledit Jehan Saugé, clerc dudit lieutenant, et en alant, ledit Cosnac appella à la maison de maistre Estienne Jamin

Etienne Jamin appartenait à une famille notable de la haute bourgeoisie et était membre du conseil des cent et greffier des assises de Poitou. Sa fille Louise était filleule de Louis XI, comme on l'apprend par une lettre même de ce roi, datée de Nogent-le-Roi, le 44 mai 1464, et adressée aux maire, échevins et bourgeois de Poitiers : « Chers et bien amez, nous avons sceu que nostre cher et bien amé maistre Estienne Jamin, nostre greffier des assises de Poictou et l'un des cent de nostre ville de Poictiers, est content et veult en faveur du mariage que naguères avons faict de nostre amé et feal notaire et secretaire, maistre Jehan de Moulins et de Loyse Jamine, nostre fillolle, resigner son lieu dudit nombre des cent de nostre dicte ville audit maistre Jehan de Moulins. Et pour ce que nostre entencion est que ledit de Moulins face doresnavant sa principale résidence en nostre dicte ville, et que voulons qu'il soit audit nombre des cent, nous envoions presentement par devers vous nostre amé et feal notaire et secretaire maistre Loys Jure, pour sur ce vous dire plus à plein nostre vouloir et entencion... Voulons que en la présence dudit Jure, vous receviez ledit maistre Jehan de Moulins ou lieu dudit maistre Estienne Jamin, oudit nombre des cent et que par lui nous escripvez ce que faict en aurez... » Louis XI étant à Amiens écrivit de nouveau aux maire et échevins de Poitiers, le 12 juin 1464, pour les remercier de lui avoir obéi en faisant entrer Jean de Moulins au conseil de la ville et leur ordonner, maintenant qu'il était éligible, de le choisir pour maire à la prochaine élection, sans prétexter, pour ne pas le nommer, qu'il n'avait pas prêté encore le serment auquel il était tenu, et en tout cas de l'admettre au serment par procureur. Le sénéchal de Poitou, Louis de Crussol, porteur de cette lettre, était chargé de leur expliquer les raisons de cette détermination. (Arch. hist. du Poitou, t. I, p. 149, 150 ; Vaësen, Lettres de Louis XI, t. II, p. 181 et 188.) Il fut fait encore une fois selon la volonté du roi. Jean de Moulins, que l'on trouve qualifié d'écuyer, seigneur de Rochefort en la châtellenie de Mirebeau, du Breuil, de Seuilly, etc., fut élu maire pour l'année suivante et, après sa mairie, il fit partie du corps des vingt-cinq échevins. En qualité de notaire et secrétaire du roi, on lit sa signature au bas de beaucoup de lettres expédiées en la grande chancellerie ; on trouve son nom, comme tel, au bas de plusieurs actes publiés dans le présent volume ou qui seront imprimés dans le suivant. Louis XI, en outre, donna à Jean de Moulins, le 10 mars 1469 n. s., une maison avec ses dépendances, qu'il avait acquise et meublée dans ce but, et dont la garde lui avait été conférée antérieurement ; car dans un compte de 1465, il figure avec le titre de concierge de l'hôtel du roi à Poitiers. Par lettres de même date, Jean de Moulins fut gratifié d'une pension annuelle de 200 livres surie domaine de Poitou, et le 27 juin 1472. il fut nommé greffier du Grand Conseil. Il fut aussi avocat du roi en la sénéchaussée de Poitou. Son château de Rochefort, qu'il avait acquis, en 1464 ou 1465, de Guillaume Gouffier, seigneur de Bonnivet (E. de Fouchier, La baronnie de Mirebeau, p. 231), ayant été brûlé, il le fit rebâtiret, le 10 mars 1475 n. s., le duc d'Anjou lui permit de le fortifier. M. Beauchet-Filleau fournit beaucoup d'autres renseignements sur ce personnage (Dict. des familles du Poitou, 1er édit., t. II, p. 422). L'une de ses filles, Radegonde de Moulins, épousa, par contrat du 12 mars 1490 n. s., Yves Boylesve, sr de la Brosse, licencié en droit, fils de feu Nicolas Boylesve et de Marie de Janaillac. La dot était de 1000 écus d'or à la couronne, dont 600 pour meubles et 400 pour héritages, et 60 livres de rente pour douaire. Jean de Moulins s'engageait à donner à son gendre son office d'avocat du roi en Poitou, à vêtir sa fille bien et convenablement et à faire les frais de la noce. (A. Richard, Arch. du château de la Barre, 1.1, p. 6.) Jean de Moulins et Louise Jamin étaient décédés avant le 26 décembre 1500. Leurs enfants survivants étaient : Jean qui succéda à son père ; François, qui devint grand aumônier de France sous François Ier ; Charles, seigneur de Seuilly ; Radegonde, nommée ci-dessus, et Louise, femme de Jamet Gervais, sr de Verneuil. Voir aussi trois documents, des 31 juillet 1473, 24 mai 1485 et 1er juillet 1492, relatifs à la dîme de Thurageau acquise par Jean de Moulins. (Arch. de la ville de Poitiers, F. 89, et Invent. H XXXIX, p. 135; H XL, p. 135.)

Les renseignements sur Etienne Jamin sont beaucoup plus rares que pour son gendre. On ignore le nom de sa femme, mère de la filleule de Louis XI. Outre Louise, il eut certainement un fils (sinon plusieurs) qui laissa postérité. «Le XIIe de juin mil quatre cens soixante trèze, fut enterrée en l'église Saincte Opportune Mme de Périgné, vefve de feu Mr Jamin, qui a fondé le festiage de la Magdelaine, ainsy qu'il est porté par son testament (reg. 237). » (Arch. hist. du Poitou, t. XV, p. 339.) Cet extrait, sans qu'on puisse l'affirmer, paraît se rapporter à la femme d'Etienne. La seigneurie de Périgné (aliàs Parigné), qu'elle ait appartenu en propre à cette dame ou à son mari, resta dans la famille Jamin. Car on retrouve longtemps après une Françoise Porcheron, veuve de feu maître Jean Jamin (fils ou petit-fils d'Etienne), demeurant à Poitiers, paroisse Saint-Paul, qui se qualifiait aussi « dame de Parigné ». Cette dame fit son testament le 15 juin 1530, par lequel elle déclare sa volonté d'être enterrée en l'église Saintpaul, près de son mari. Elle y fondé et dote deux chapelles, plus une autre à la Chasteigneraye, pour dotation de laquelle elle donne la moitié de sa métairie de la « Corbenerie », qu'elle avait acquise étant mariée à Jean Joncel, son premier époux. Elle lègue la maison où elle demeurait, paroisse Saint-Paul, à son neveu François Porcheron,et d'autres biens aux enfants de Jeanne Porcheron, femme de Pierre Joly, et aux enfants de Pierre Mayaud et de sa feue sœur, femme dudit Pierre, de Chauvigny. Il n'y est point question d'enfants de son second mariage. (Bibl. nat., ms. fr. 28051, pièces orig. n° 1567, pièce 1.) Parigné ou Périgné doit être identifié avec le Grand-Parigny à Champigny-le-Sec, dont les seigneurs étaient, selon M. E. de Fouchier, Jeanne de la Touraine, veuve de Pierre de Bonnemain, en 1440, Jean Jamin en 1508, Etienne Jamin en 1534. (La baronnie de Mirebeau du XIe au XVIIe siècle, p. 135.) D'autre part, on trouve que Jean de Bonnemain rendit aveu au château de Mirebeau de l'herbergement et forteresse du Grand-Parigny, en 1462. (Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. I, p. 619.) Faut-il en conclure qu'une fille de ce Jean de Bonnemain, héritière de Parigny, aurait épousé un Jamin ? Citons encore un Hugues Jamin, qui est mentionné dans un acte du 20 mai 1505, comme exerçant alors l'office de receveur du roi en Poitou. (A. Richard, Arch. du château de la Barre, t. I, p. 18.)

, pour savoir si Constantin estoit leans; lequel y estoit. Et ledit Cosnac parla à lui, en la presence desdiz Godart et suppliant, et lui dist : « Viendrastu entornuyt ? » Auquel ledit Constantin fist responce qu'il n'yroit point, pour ce qu'il n'osoit bouger de la maison. Et ledit Cosnac lui dist, en la presence dudit suppliant : « Tu y puis bien venir; car tu n'auras jà la fille ainsnée ». Puis emprès ledit Cosnac dist ausdiz Godart et suppliant qu'ilz alassent veoir s'ilz trouveroient Saugé, clerc dudit lieutenant, et que ce pendant il parleroit avecques Constantin ; lesquelx furent à la maison dudit lieutenant et là trouvèrent ledit Saugé, qui dist audit Godart : « Je te requier, ne faulx pas entornuyt ». Et aussi dist audit suppliant : « Et toy, viendras tu ? » Lequel suppliant lui fist responce que il ne savoit. Et ce fait, se departirent tous ensemble, et en venant vers Nostre Dame, trouvèrent lesdiz Cosnac et Constantin qui parloient ensemble, et tous se arrestèrent et parlèrent ensemble. Et dist ledit Godart ce qui s'ensuit : a Jehan Saugé, qui sera à l'armée? » et ledit Saugé lui respondit : « Les clers de la bauzoche et d'autres assez ». Emprès ce, ledit Saugé dist audit Godart: « Je me rendray à ta maison », et atant se departirent tous et alèrent soupper; et s'en ala ledit suppliant avec ledit Godart. Et après ce qu'ilz eurent souppé, ledit suppliant et Godart allèrent querir leur maistre qui souppoit avecques maistre Jehan ChevredansJean Chevredent, d'abord procureur au Parlement à Poitiers, puis procureur du roi en la sénéchaussée de Poitou, maire de Poitiers en 1453-1454, a été mentionné à diverses reprises dans nos deux précédents volumes, où l'on trouve les quelques renseignements que nous avons recueillis sur ce personnage, en dehors de ceux que la nouv. édit, du Dict. des familles du Poitou a fournis, d'après les archives de la ville de Poitiers, en deux articles qui paraissent devoir être réunis en un seul. On n'y trouve point d'ailleurs sa généalogie. Il sera de nouveau question du procès que lui intenta Etienne Boynet (voy. notre t. IX, p. 272, note), ainsi qu'à Hugues de Conzay, dans une note relative à ce dernier (ci-dessous, n° MCCCXLII)., nostre procureur en ladicte seneschaucée, et en alant, trouvèrent ung nommé Longue Espée, nostre sergent, avecques autres armez et embatonnez ; lequel Longue Espée dist audit Godart : « Ne viendras tu pas? Va toy armer », et ledit Godart lui respondit : « Je yray tantost ». Et ce fait, alèrent querir leur dit maistre, comme dessus, lequel leur maistre s'en esloit jà allé à son hostellerie au Cheval blanc, et là lesdiz Godart et suppliant allèrent pour servir leurdit maistre à son couchier. Et quant leurdit maistre fut couchié, ledit Godart dist audit suppliant : « Il nous fault aler avecques Saugé. Prenez voz brigandines et vostre salade, et allons veoir si nous le trouverons ». Et s'en allèrent lesdiz Godart et suppliant seulx vers la place Nostre Dame, et illec trouvèrent Colin Corgnou, Chariot Debutz et Jehan DesmierCet autre homme d'armes de d'ordonnance pourrait fort bien être, d'après les données chronologiques, Jean Desmier, dit Gargouille, second fils de Jean, écuyer, seigneur du Breuil de Blanzac, et de Marguerite de Xandrieux, qui devait avoir vingt ans, à la date de ces lettres, et épousa plus tard Marguerite Goumard, veuve de Guillaume de Savigné. (Id. ibid., t. III, p. 96.) Un nommé Jean Hugon ayant été assassiné, sa veuve, Philippe Dutillet, et Guillaume Hugon, son fils, poursivirent Jean Desmier comme l'instigateur du meurtre. Ayant été constitué prisonnier, il s'était évadé des mains du sergent. Alors il fut ajourné avec les autres coupables devant le sénéchal de Poitou, le 14 juin 1474. Mis en défaut, il releva appel au Parlement, qui prescrivit une nouvelle enquête, par mandement du 2 juin 1475 (Arch. nat., X2a 40, fol. 240) ; mais on ne trouve aucun autre renseignement sur cette affaire. hommes d'armes de nostre ordonnance, qui jouoyent à ung oublieur soubz ung aulvent ; lesquelx demandèrent ausdiz Godart et suppliant où ilz alloient, et ilz leur disdrent : « Nous voulons aler querir une belle fille avecques les clers du Palais ». Lors lesdiz Corgnou, Debutz et Desmier dysdrent : « Nous yrons avecques vous ». Ausquelx lesdiz Godart et suppliant disdrent : « N'y venez pas, si vous n'avez habillement; car vous pourriez estre bleciez ». Lesquelx Corgnou, Desmier et Debutz leur disdrent : « Il faut que vous nous en baillez », et ledit suppliant et ledit Godart leur disdrent qu'ilz n'en avoient point, mais que Guillaume Pye en avoit bien, si leur en vouloit bailler. Lors tous ensemble allèrent à l'ostel dudit Pye et trouvèrent ledit Pye à la porte de son hostel ; auquel ilz disdrent, et mesmement lesdiz Corgnou, Desmier et Debutz : « Cappitaine, il fault que vous nous baillez de vostre harnois ; nous voulons aler querir une belle fille; et si les escoliers nous trouvoient sans habillement, ilz nous pourroient bien batre » ; ce que ledit Pié leur reffusoit, en leur remonstrant que c'estoit grant folie; et neantmoins montèrent en la chambre dudit Pye et prindrent du harnoys pour lesdiz Corgnou, Desmier et Debutz, et leursdiz deux varletz chacun une salade et ungs ganteletz. Et ce fait, partirent tous ensemble de l'ostel dudit Pié et s'en alèrent passer devant la maison dudit lieutenant, cuidant trouver ledit Saugé, et passèrent oultre jusques au pilory et là ledit Godart ala parler à ung nommé Guillaume MichauOn trouve aux archives de la ville de Poitiers un mandement de Pierre Prévost maire, Clément Dousseau et Henri Blandin, échevins, commis à la distribution des deniers de la ville, à Jean Boylesve, receveur desdits deniers, de payer à Guillaume Micheau, marchand, la somme de 95 livres 5 sous pour les draps par lui fournis pour les livrées du procureur de la ville, du receveur, du greffier, du visiteur des œuvres, des quatre sergents, du clerc du maire, du maître des œuvres, du concierge de la maison de ville, du rompette, du messager et du paveur, mandement daté du 6 mai 1455. (Arch. comm., J. 1212-1213.) affin qu'il lui prestast ung baston ; lequel Guillaume Michau lui presta une hache, et ce fait, tous ensemble s'en allèrent jusques au Marchié viel et d'ilec à Saint Hilaire de la Selle, et de là aux Jardrins, auquel lieu ladicte Rousse, dont est faicte mencion, faisoit sa résidence. Et frappa ledit Godart deux ou trois cops du pié à l'uys, tellement que le mist au dedans dudit hostel. Et lesdiz Corgnou, Desmier et Debutz et lesdiz varlez entrèrent en icelui hostel et transmirent le mary de ladicte Rousse dehors; et croit ledit suppliant que cependant ilz firent ce que bon leursembla de ladicte Rousse, et lui ne toucha oncques autrement à ladicte Rousse ; et atant s'en partirent sans autre bruyt. Et d'illec les dessusdiz tous ensemble s'en vindrent jusques à Saint Pierre et se rendirent devant la maison dudit maistre Jehan Chevredans, et quant ilz furent là tous assemblés, ledit Godart passa oultre toute la compaignie, et dist : « J'ay oy gens, laissés moy aler, car si se sont les clers du Palais, nous ne leur demanderons riens », et ledit Godart se sault le premier. Et quant ilz furent au coing de Sernouze le chappellier, ilz rencontrèrent certaines gens armez et embastonnez, entre lesquelx ledit Godart entendit ung nommé Archilaïs Jacques et ung nommé Mignot, lesquelz se preparèrent de leur courir sus ; et en ce faisant ledit Godart entendi lesdiz Archilaïs et Mignot, et ledit Godart dist : « Estes vous là, Archilaïs ? » Auquel ledit Archilaïs respondit « oy », et lors ledit Godart dist : « Tout ung », et lesdiz Mignot et Archilaïs demandèrent audit suppliant et à ses compaignons : « Dont venez vous, messeigneurs ? » Ausquelz ledit Godart fist responce : « Nous venons devers Saint Pierre et de ses quartiers abas (sic) où nous n'avons riens trouvé » ; et ledit Mignot dist : « Ne nous aussi ». Et lesdiz Archilaïs et Mignot leur demandèrent : « Avez vous point trouvé quatre de noz compaignons? » Ausquelz ledit Godart fist responce que non, et atant se despartirent et disdrent adieu, d'un cousté et d'autre ; et lui qui parle et lesdiz hommes d'armes s'en alèrent jusques davant l'ostel de l'Ymaige Nostre Dame ou environ, sauf ledit Godart qui demoura devant l'ostel du pintier. Et oyt ledit suppliant ung bruyt que ceulx qu'ilz avoient laissez, c'est assavoir lesdiz Mignot et Archilaïs et leur compaignie disdrent ; « Voiez cy gens ! » Et lors ledit Godart tout seul tourna avecques eulx tout court, et entrèrent lesdiz Mignot, Archilaïs et Godart et autres leurs compaignons jusques au nombre de vii. ou viii. en la vanelle qui va de la maison dudit Sernouze à la maison de Janailhac

Jean Janailhac, Janoilhacou Genoilhac, riche marchand de Poitiers, avait été victime, en 1451, d'un vol dont il est question dans notre précédent volume (p. 204). Voy. aussi p. 318, où est mentionné l'hôtel de Janoilhac à Poitiers. Un Léonard de Janoilhac était marié à Liette de Conzay (acte du 13 avril 1473 ; Arch. nat., X2a 40, fol. 58); et celle-ci était sa veuve le 29 août 1500 (Arch. de la ville de Poitiers, D. 25).

, criant à haulte voix : « Tuez, tuez ! » et subitement ledit suppliant avecques lesdiz hommes d'armes s'en allèrent après les autres et oyrent qu'ilz frappoient les ungs sur les autres ; et incontinant qu'ilz furent auprès d'eulx, il vit que tout fuyoit vers la maison dudit Janailhac, et que ilz trouvèrent en ladicte vanelle ung de leur compaignie qui leur dist qu'il en y avoit ung fort blecié. Et ledit suppliant lui demanda qui c'estoit, auquel il respondit que c'estoit le roy de la basoche. Et lors allèrent ledit suppliant et lesdiz hommes d'armes après jusques à la maison de maistre Nicole Servant en ladicte vanelle, et là ouyt ledit suppliant que il en y avoit ung qui crioit à haulte voix : « Je pers tout le sang », et oy comment aucuns disdrent : « Helas! que ne parliez vous ? » Et atant ledit suppliant et lesdiz hommes d'armes et Godart s'en retournèrent jusques à l'Ymaige Nostre Dame, là où ilz oyrent un jeune compaignon qui venoit emprès eulx. Auquel ledit Godard demanda : « Es tu là, enquesteur, qui est ce qui est blecié ! » Et ledit compaignon lui respondit : « C'est Saunier qui est blecié » ; et ledit Godart lui demanda : « Qui l'a blecié ? » et il lui respondit : « Ses compaignons mesmes ». Et atant ledit suppliant et lesdiz hommes d'armes s'en allèrent d'un cousté, eulx desarmez, et ledit Godart, d'autre. Et deux heures après ou environ, ledit Saunier, par la grant effusion de sang qu'il vuida, mauvais gouvernement ou autrement, ala de vie à trespas. A l'occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s'est mis en franchise, dont il n'oseroit yssir, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties ; humblement requerant que, attendu ce que dit est, et que ledit suppliant n'avoit aucune hayne ou malveillance audit Saunier, et fut desplaisant, quant il sceut ledit Saulnier avoir ainsi esté tué et mutilé, que ledit cas est arrivé par fortune et en absence dudit suppliant qui estoit demouré derrière, que ledit suppliant est bien famé et renommé ou païs, etc., nous lui vueillons impartir nosdictes grace et misericorde. Pourquoy nous, les choses dessus dictes considerées, vou lans grace et misericorde preferer à rigueur de justice, audit André Havet, suppliant, ou cas dessus dit, avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou moys de mars l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviiime.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. A. Rolant. — Visa. Contentor.

MCCCXXIX Mars 1460

Rémission accordée, sous la réserve d'un emprisonnement de deux mois au pain et à l'eau, à Colas Godart, clerc de la trésorerie des guerres, réfugié en franchise dans l'église des Augustins de Poitiers, à la suite du meurtre dudit Saunier, dont il paraissait être le véritable auteur.

AN JJ. 190, n° 18, fol. 10 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Colas Godart, jeune compaignon, chargé de jeune femme et de petiz enfans, contenant que, le lundi xxvme jour de fevrier, feste de saint Mathias, derrenière passée, environ dix heures devers le matin, ledit suppliant rencontra ung nommé Jehan Saugé, clerc du lieutenant de nostre seneschal de Poictou, devant l'ostel de Guillaume de Mons, barbier, en la rue qui va du Palais à la place Nostre Dame ; auquel suppliant ledit Saugé, après autres parolles qu'ilz eurent ensemble, lui demanda s'ilz yroient point ensembleement celle nuyt deux heures batre le pavé. Auquel icelui suppliant respondit qu'il en estoit content. Et ainsi qu'ilz parloient ensemble, survint ung nommé Hilairet Cosnac, auquel ledit Saugé dist : « Je parloye à Godart si nous yrions aujourd'uy batre le pavé. Il nous fault trouver tous au Palais, à deux heures après midi, pour faire l'assemblée et pour ordonner en quel lieu nous nous rendrons tous ensemble ». Et ledit Cosnac respondit qu'il en estoit contant ; et atant se departirent. Et icelui jour, heure de vespres, ledit suppliant trouva à la place Nostre Dame André Havet, son compaignon, lequel Havet lui dist que Colin Corgnou et Charlot Debutz estoient venuz ; lequel et ledit suppliant leur dist qu'ilz les alassent veoir, ce qu'ilz firent à l'Escu de France, là où ilz estoient logez ; auquel lieu ilz trouvèrent Charlot Debutz tant seulement, qui les fist boire, et ce fait, dist ausditz suppliant et Havet : « Me finerés vous d'une belle fille, vous qui estes de la ville » ? Et ledit suppliant fist responce : « Ne vous en soussiez, nous trouverons façon d'avoir quelque chose ». Et ce fait, icelui suppliant, acompaigné dudit Havet, se departit et en alant leur chemin vers Nostre Dame la Petite, trouvèrent ledit Hilairet Cosnac, et de là ledit suppliant et Havet avecques ledit Cosnac s'en alèrent à la maison du lieutenant veoir s'ilz trouveroient ledit Jehan Saugé, clerc dudit lieutenant ; et en alant, ledit Cosnac appella à la maison de maistre Estienne Jamin, pour parler à ung nommé Constantin, auquel il parla, et lui dist : « Viendras tu encores à nuyt ? » Ledit Constantin fist responce qu'il pensoit que non, pour ce qu'il ne povoit bouger de l'ostel. Et lors ledit Cosnac lui dist : « Tu y peuz bien venir ; car tu n'auras jà la fille aisnée ». Et après dist ledit Cosnac ausdiz suppliant et Havet qu'ilz alassent veoir s'ilz trouveroient ledit Jehan Saugé, clerc dudit lieutenant, et ce pendant il parleroit avecques ledit Constantin. Lesquelx suppliant et Havel furent à l'ostel dudit lieutenant, et là trouvèrent ledit Saugé, qui dist audit suppliant, en la presence dudit Havel : « Je te requier, ne faulx pas aujourd'uy de nuyt ». Et de rechief que ledit Saugé demanda audit Havet : « Et toy, viendras tu » ? et ledit Havet lui fist responce qu'il yroit, s'il povoit. Et ce fait, s'en partirent tous troys ensemble, et en venant vers la place Nostre Dame, trouvèrent lesdiz Cosnac et Constantin qui parloient ensemble, et tous ensemble se arrestèrent ; et demanda ledit suppliant audit Saugé, en la presence de tous les susdictz, qui seroit à l'armée ; et ledit Saugé lui respondit que les clers de la basouche et d'autres assez y seroient, Et emprès ce, ledit Saugé dist audit suppliant : « Je me rendré à ta maison », et atant se departirent tous ensemble et s'en alèrent en leurs maisons soupper ; et ala ledit Havet soupper avec ledit suppliant. Et après qu'ilz eurent souppé, lesdiz suppliant et Havet alèrent querir leur maistre, qui souppoit avecques maistre Jehan Chevredans, nostre procureur en la seneschaucée de Poictou ; et avoit ledit suppliant ses brigrandines soubz sa robe. Et en alant, trouvèrent ung nommé Mulatel, dit Longue Espée, sergent, avecques plusieurs autres armés et embastonnés devant l'ostel de Estienne Jugant ; lequel Longue Espée dist audit exposant ce qui s'ensuit : « Et ne viendras tu pas? Colas, va toy armer » ; et ledit suppliant lui dist : « Je yray tantost ». Et ce fait, se departirent, et alèrent lesdiz suppliant et Havet querir leur dit maistre comme dessus, lequel s'en estoit alé en son hostellerie au Cheval blanc ; et là lesdiz Havet et suppliant alèrent pour servir à leur dit maistre à son couchier. Et quant leur dit maistre fut couchié, ledit suppliant dist audit Havet : « Alons veoir si nous trouverons Saugé », et s'en alèrent tous seulz vers la place Nostre Dame, auquel lieu ilz trouvèrent Colin Corgnou, Charles Debutz et Jehan Desmier, hommes d'armes, qui jouoyent aux oblies soubz unghauvant ; lesquelx Corgnou, Debutz et Desmier demandèrent ausdiz Havet et suppliant où ilz aloient, et ilz leur firent responee qu'ilz alloient querir une fille amoureuse avecques les clers du Palais, et pour desroquerDesroquer, aliàs desrochier, avait la signification de renverser, culbuter, en parlant des personnes. (Cf. Godefroy, qui cite précisément ce passage, Dict. de l'anc. lang. Franç., v° Desrochier.) les escoliers, s'ilz les trouvoient. Et lors lesdiz Corgnou, Debutz et Desmier disdrent qu'ilz yroient avecques eulx, et lesdiz suppliant et Havet leur disdrent : « N'y venez pas, si vous n'avez habillemens, car vous pourriez estre bleciez ». Et tantost lesdiz Corgnou, Debutz et Desmier leur disdrent : « Il fault que vous nous en baillez ». Et lesdiz suppliant et Havet leur disdrent qu'ilz n'en avoient point, mais que Guillaume Pye en avoit bien, s'il leur en vouloit bailler. Et tous ensembleement alèrent à l'ostel dudit Pié et trouvèrent ledit Pye à sa porte ; auquel lesdiz Corgnou, Desmier et Debutz disdrent : « Cappitaine, il fault que vous nous baillez de vostre harnois; nous voulons aler à l'esbat, et si les escoliers nous trouvoient, ilz nous pourroient bien batre ». Et emprès ce, montèrent en la chambre dudit Pye et prindrent, oultre son gré et voulenté, unes curasses, deux brigandines, sallades, gantellez et deux ou troys javelines, pour lesdiz Corgnou, Desmier et Debutz, et pour leurs diz varletz chacun une salade et ungs ganteletz. Et ce fait, partirent tous ensemble de l'ostel dudit Pye et s'en allèrent devant la maison dudit lieutenant, cuidant trouver ledit Saugé, et passèrent oultre jusques au Pilory. Et la ledit suppliant se transporta jusques vers ung nommé Guillaume Michau, affin qu'il lui prestast ung baston ; lequel Michau lui presta, selon qu'il dit, une hache. Et ce fait, tous ensemble s'en alèrent jusques au Marchié Viel, et là print à son hostel une javeline, et ledit suppliant en bailla une autre audit Havet, et bailla ladicte hache à ung desdiz hommes d'armes ; et d'ilec se transportèrent tous ensemble vers Saint Hilaire de la Celle et d'ilec à Saint Supplicien, auquel lieu, une nommée la Rousse, femme amoureuse et mariée, fait sa résidence. Et ledit suppliant frappa deux ou troys cops du pié contre l'uys d'icelle, tellement qui le rompit et brisa. Et ce fait, ledit suppliant yssit hors dudit hostel avecques ledit Havet, et lesdiz Corgnou, Desmier et Debutz et leursdiz varletz entrèrent au dedans dudit hostel et envoyèrent le mary de ladite Rousse dehors ; et ce pendant firent leur plaisir de ladite Rousse, ainsi que depuis le disdrent audit suppliant lesditz Corgnou, Desmier et Debutz, mais ledit Havet et lui ne touchèrent en aucune façon à icelle Rousse, et au partir, tant le mary d'elle que eulx (sic) furent d'eulx contans; et atant s'en partirent tous ensemble, sans autre bruyt. Et d'illec tous ensemble s'en vindrent du long de la rue Saint Pierre devant la maison dudit maistre Jehan Chevredans, nostre procureur ; auquel lieu ledit suppliant passa devant la compaignie, en disant : « J'oy gens, laissez moy aller ; car si se sont les clercs du Palais, nous ne leur demanderons riens ». Et quant ilz furent au coing de Sernouze le chappellier, ilz rencontrèrent certaines gens armez et embastonnez jusques au nombre de six ou sept, entre lesquèlx ledit suppliant entendit ung nommé Archilaïs Jacques et ung nommé Mignot, ausquelx ledit suppliant dist : « Estes vous là, Archilaïs » ? Auquel ledit Archilaïs respondit oy, et lors ledit suppliant dist: « Tout ung, tout ung ». Et lors ledit Archilaïs demanda audit suppliant et à sesdiz compaignons : « Dont venez vous, Messieurs? » Auquel ledit suppliant fist responce : « Nous venons devers Saint Pierre, où nous n'avons riens trouvé ». Et lesdiz Archilaïs et Mignot disdrent : « Ne nous aussi » ; et en oultre dist ledit Archilaïs : « Avez vous point trouvé quatre de noz compaignons? » et lui qui parle leur respondit que non, et atant se departirent et disdrent adieu d'un cousté et d'autre. Et lesdiz Corgnou, Desmier, Debutz, Havet et leurs varletz s'en alèrent jusques davant l'ostel de l'Image Nostre Dame ou environ, et ledit suppliant demoura en la compaignie d'un des compaignons desdiz Archilaïs et Mignot davant la maison de Pierre le Pintier, duquel compaignon il n'a aucune congnoissance. Et tantost ledit suppliant et ledit compaignon, lequel il ne congnoist, se departirent, et subitement ledit suppliant oy ung cry jecté de la partie desdiz Archilaïs et Mignot, disans : « Vées cy gens, sus, sus ! » Et lors ledit suppliant tourna avecques Archilaïs et Mignot et leurs gens tout court, et entrèrent tous ensemble en la rue de BesuchetSans doute la rue où se trouvait l'hôtel habité par Jean Bésuchet, alors receveur ordinaire du roi en Poitou, sur lequel voy. ci-dessous une note biographique (n° MCCCXLII). et ilec rencontrèrent en ladicte ruelle ung compaignon armé de brigandines et deux ou troys autres armez de harnoys blanc, cuidant que ce fussent gens qui leur voulsissent courir sus ; et lors crièrent : « Tuez, tuez, à mort, à mort ». Et lors s'entrebatirent, donnèrent et frappèrent de grans cops d'un costé et d'autre, en assaillant et deffendant, mais ne savoient sur qui, pour ce qu'il estoit nuyt et ne veoit on riens. En parfin l'un d'iceulx contre qui ilz frappoyent, qui estoit armé d'un harnois blanc fut frappé d'un cop d'estoc parmy la gorge ; et après lesdiz cops ainsi frapez, lesdiz compaignons se misdrent en fuite et l'un d'iceulx cria et dist : « Ha, je pers tout le sang » ; et ilec ledit suppliant oy dire que c'estoit ung nommé Saunier, qui estoit des clers dudit Palais, dont il fut très desplaisant, car il l'amoit très fort ; et s'en ala désarmer et puis après vint veoir ledit Saunier en la maison du barbier où on le mettoit à point, et vit que il avoit esté frappé en la gorge. Par quoy doubte, veu qu'il frappa deux ou troys cops d'estoc et qu'il trouva sa javeline senglant, que il frappa ledit cop. Duquel ledit Saunier ala, deux heures après ou environ, par la grant effusion de sang qu'il vuida, mauvais gouvernement ou autrement, de vie à trespas. A l'occasion duquel cas ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s'est mis en franchise en l'eglise des Augustins de Poictiers, dont il n'oseroit saillir, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, si comme il dit, humblement requerant que, attendu ce que dit est et les bons services que ledit suppliant nous a faiz en la compaignie de nostre amé et feal trésorier de noz guerres, maistre Anthoine RaguierAntoine Raguier était déjà trésorier des guerres, le 30 mai 1441. Les fragments importants qui nous restent de ses comptes (celui de l'année 1441 est le quatrième dans l'ordre chronologique) sont fréquemment cités par les historiens du XVe siècle de Beaucourt dit que Raguier remplaça en 1428 Guillaume Ripault en qualité de receveur général de toutes les finances delà les rivières de Seine et Yonne, et qu'il eut lui-même pour successeur, le 25 juillet 1443, Etienne de Bonnay. (Histoire de Charles VII, t. III, p. 177, 179, 466, 467.) ll etait sans doute fils d'Hémon Raguier, mort avant le mois d'août 1423, qui avait été trésorier des guerres sous Charles VI. Antoine Raguier décéda en 1468 et exerça cette charge jusqu'à sa mort. Son fils aîné Jean, écuyer, sr de la Mothe, aussi trésorier des guerres au duché de Normandie, fut investi, de 1468 à 1480, de l'office de receveur général des finances de Normandie., et fait encores chacun jour avecques l'un de ses clers et autrement, que ledit suppliant n'avoit aucune hayne ne malveillance audit Saunier, ains fut très desplaisant quant il sceut le dit Saunier avoir ainsi esté tué et mutilé, que ledit cas est advenu par fortune, etc., nous lui vueillons nostre dicte grace et misericorde impartir. Pour quoy nous, les choses dessus dictes considerées, voulans grace et misericorde preferer à rigueur de justice, audit Colas Godart avons quicté, remis et pardonné, etc., pourveu qu'il tiendra prison fermée deux moys, au pain et à l'eau. Si donnons en mandement, par ces presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou moys de mars l'an de grace mil cccc. cinquante et neuf, et de nostre règne le xxxviiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil., Rolant. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXXX Mars 1460

Rémission octroyée aux frères Perrin et Jean Guynaut, fermiers de la Gengaudière, paroisse de Saint-Laurent-de-Jourde, que Geoffroy Taveau, chevalier, seigneur de Mortemer et de Lussac, avait baillée à perpétuité à leur père et à ses descendants, lesdits frères coupables du meurtre d'Etienne Michelet, ancien homme de guerre, qui ne cessait de les troubler dans la possession et l'exploitation de cette terre.

AN JJ. 190, n° 24, fol. 14 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Perrin Guynaut et Jehan Guynaut, frères, contenant que, dix neuf ans a ou environ, Geoffroy Taveau, chevalier, seigneur de Mortemer et de Lussac

Fils de Guillaume Taveau et de Sibille de Saint-Martin, Geoffroy, chevalier, baron de Mortemer, Lussac. Dienné, Normandon, Verrière, Valanfray, Empuré, etc., rendit au roi aveu de sa terre et baronnie dé' Mortemer, le 14 juin 1428, et au comte de la Marche de celle de Lussac, le 22 février 1436, et renouvela le premier les 13 janvier 1478 n. s. et 28 septembre 1485. (Arch. nat., P. 1145, fol. 146 v°, 154 v°.) Il transigea, le 14 juillet 1428, avec Maubruni de Liniers, sr d'Airvault, son neveu, au sujet de la succession de ses père et mère, et ce dernier obtint une part importante des terres, en qualité de mari de Sibille Taveau, fille de Philippe, frère aîné de Geoffroy. Nous avons vu précédemment comment, en 1434, il fut arrêté prisonnier à Poitiers, pour faits de détrousse dont les gens d'armes de sa compagnie s'étaient rendus coupables, et comment la cour, malgré ses propres excès, lui donna mission de courir sus aux pillards et batteurs d'estrade. (Introduction de notre t. VIII, p. XLVII.) Le 14 mai 1435, il donnait assurement, devant le Parlement de Poitiers, à Nicolas Savary, prieurcuré de Salles[-en-Toulon] près Mortemer, qui avait des raisons de se croire menacé par lui. (Arch. nat., X2a 21, à la date.) Geoffroy Taveau eut d'ailleurs à soutenir un grand nombre de procès, soit comme demandeur, soit comme défendeur ; il avait la réputation d'être caut et subtil. L'an 1450, il poursuivait au criminel Joachim de Volvire, seigneur de Ruffec, qui avait contraint ses sujets à faire le guet à Ruffec, sans qu'ils y fussent tenus en droit (acte du 9 septembre 1450 ; X2a 26, fol. 87 v°), et longtemps après il avait encore des démêlés à ce sujet et pour d'autres motifs avec Jean de Volvire, fils de Joachim (7 mai 1478 ; X2a 42). Il était encore demandeur, en cas d'excès et attentats contre Jean Cravant, chevalier, le 9 décembre 1462, et le même jour, il obtint défaut contre Pierre Perrot, besson, qu'il avait fait ajourner, sous peine de bannissement et de confiscation (X2a 32, a la date) ; le 7 mai 1478, autre défaut lui fut accordé contre Guillaume Bouctart et Jean de Corbeil, qu'il poursuivait toujours sous cette vague accusation d'excès et attentats à son préjudice (X2a 42, à la date). Un carton des Archives nat. (K. 2378) renferme de nombreuses pièces dé procédures relatives à ces diverses affaires, et surtout au procès criminel que lui intentèrent Guy Frotier, sr de la Messelière, Jeanne de Maillé, sa femme, puis Floridas Frotier, son frère, au sujet de ses manœùvres frauduleuses d'abord et de ses actes de violence ensuite pour redevenir maître du château et de la seigneurie d'Empuré. Il dura fort longtemps et mérite qu'on l'expose avec quelque détail.

Marie Taveau, sœur aînée de Geoffroy, avait été mariée, vers l'an 1400, à Jacques de Maillé, auquel elle apporta les château, terré et seigneurie d'Empuré ; ils en jouirent paisiblement jusqu'à leur mort. Leur fille unique Jeanne, héritière de la totalité de leurs biens, resta aussi en possession de ladite seigneurie jusqu'à ce que Geoffroy Taveau, ayant appris qu'Odet de Rivière et Blanche de Chanac, sa femme, voulaient aliéner leur seigneurie de Château-Larcher, dont on leur offrait 7000 écus, persuada sa nièce qu'il était de son intérêt de faire un échange avec ledit Odet, et il s'en fit le négociateur. Jeanne de Maillé, veuve d'Arhaury de Teigné, était alors remariée à Sandebault d'Oradour, mais comme son second mari, atteint de la lèpre, exigeait néanmoins qu'elle remplit tous ses devoirs d'épouse, elle avait quitté le toit conjugal et s'était réfugiée auprès de sa tante, femme de Geoffroy Taveau. Par l'intermédiaire de celui-ci, Empuré fut en effet échangé contre Châtèau-Larcher et le contrat en fut passé à Lussac en 1448 ou 1449. Jean Pichier, prieur de Château-Larcher, interrogé judiciairement au sujet de cet acte, le 17 juin 1454 dit dans sa déposition qu'il avait eu lieu cinq ou six ans auparavant; il ajouta que le château de Château-Larcher était en fort mauvais état d'entretien. (L'abbé Drochon, Château-Larcher et ses seigneurs, p. 245-259.) Geoffroy Taveau avait fait croire à Jeanne de Maillé qu'Empuré ne valant que 4000 écus, tandis que Château-Larcher en valait 7000, il avait payé lui-même la différence à Odet de Rivière, et en récompense se fît constituer par sa nièce une rente de 300 livres par an, assignée sur les revenus de' la terre dont elle devenait propriétaire II ne tendait à rien moins qu'« à tirer à luy par môiens exquis (sic) » ladite seigneurie, sans qu'il lui en coûtât rien, donnant à entendre à la naïve Jeanne qu'il ne lui demanderait jamais le paiement de la rente et qu'elle resterait d'ailleurs dame d'Empuré, parce qu'il racheterait cette seigneurie d'Odet de Rivière et de sa femme, moyennant 4000 écus, mais qu'il était nécessaire que les contrats se fissent de cette manière, « pour obvier à retrait et que le seigneur du fief n'eut la dicte seigneurie de Chastelarcher par puissance de fief ». Sur ces entrefaites, son second mari étant décédé à son tour, Jeanne de Maillé épousa Guy Frotier, sr de la Messelière. Celui-ci rendit hommage au roi du château et de la seigneurie de Château-Larcher, mouvant du comté de Poitou, le 25 juillet 1454, en rendit un premier aveu le 3 juin de la même année, et un second, le 22 juin 1463 (Arch. nat., P. 5661, cote 2836 ; P. 1145, fol 89 v°, 149), parce qu'il croyait le posséder légitimement du chef de sa femme. Cependant les 4000 écus n'avaient pas été payés à Odet de Rivière, comme Geoffroy l'avait promis ; il en résulta plusieurs procès longs et coûteux, qui se terminèrent par un arrêt de la Cour cassant et annulant le contrat d'échange d'Empuré contre Château-Larcher, comme (frauduleux, deceptif, feint et simulé». Jeanne de Maillé et Guy Frotier, son second mari, furent condamnés à restituer les fruits de la seigneurie de Château-Larcher, « à certaines grandes réparations » et aux dépens du procès, ce qui leur coûta plus de 2000 écus. Le 5 février 1464 n. s., Odet de Rivière et Blanche de Chanac firent don de Château-Larcher à Poncet de Rivière, comme on Fa vu ci-dessus, p. 104, note.

La conséquence naturelle de l'arrêt de la Cour semblait être que Frotier et sa femme retournassent eu possession d'Empuré. Mais Geoffroy Taveau ne l'entendait pas ainsi ; il s'y était installé en maître et refusait de s'en dessaisir, ce qui motiva les discussions et la brouille entre Jeanne de Maillé et son mari. Cependant, dès cette année 1463, Frotier transigea avec Taveau, à davantage de celui-ci. Sous couleur que Geoffroy consentait à se désister de la rente de 300 écus d'or qu'il prétendait lui être toujours et réellement due par Jeanne de Maillé, Frotier le croyant, et de son côté agissant de bonne foi, lui céda la nue propriété de ladite seigneurie d'Empuré, à condition que lui et sa femme en auraient l'usufruit leur vie durant et à la survivance l'un de Fautre. Taveau devait en faire foi et hommage, et il s'engageait si, par raison de négligence ou de manquement dans l'observation des conséquences de ce devoir, la seigneurie était grevée, à désintéresser les usufruitiers de tout le préjudice qu'ils en pourraient souffrir. On fit serment de se conformer à ladite transaction, sous peine de 1500 écus d'or, et Taveau promit de la faire ratifier par sa femme et par Guillaume, son fils. Les ratifications furent échangées en janvier 1464 n. s. Mais Taveau n'en observa pas loyalement les clauses. Il commença par différer l'acte de foi et hommage, puis, pour brouiller les choses et créer des difficultés à Frotier dans sa jouissance, il imagina d'offrir au comte d'Angoulême l'hommage qui était dû et avait été fait jusque-là au seigneur de Ruffec, Empuré étant dans la mouvance immédiate de ce dernier. La seigneurie d'Empuré fut saisie, par suite de ce conflit, et tenue sous séquestre pendant longtemps. Lorsque finalement on obtint mainlevée, au lieu de la restituer à Guy Frotier, Guillaume et Mathurin Taveau, fils de Geoffroy, poussés par leur père, s'y introduisirent, s'installèrent dans le château et, sans tenir compte de l'appel interjeté par Guy, ils l'occupèrent pendant deux mois, en touchèrent les revenus et en emportèrent tous les biens meubles, d'une valeur de 2000 livres, appartenant à Jeanne de Maillé et à son mari, il y eut ensuite un apaisement momentané

Les hostilités reprirent bientôt. En septembre 1473, alors que Guy Frotier était à l'armée de Roussillon, qui assiégeait Perpignan, Guillaume Taveau vint à Empuré, au milieu de la nuit, en compagnie de quatre-vingts à cent hommes d'armes qui forcèrent les portes au château, entrèrent dans la chambre de Jeanne de Maillé, « à laquelle ilz firent plusieurs execrables oultraiges et injures, tant de parolles que de fait », la traitant de vieille sorcière et la battant « énormement et jusqu'à grant effusion de sang ». On lui prit son argenterie et une bourse contenant cent écus d'or ; puis elle fut mise de force hors du château, que Guillaume et ses complices occupèrent jusqu'à ce qu'ils feussent complètement déménagé. En raison de ces excès, le seigneur de Mortemer et ses fils furent ajournés au Parlement, mais se gardèrent de comparaître. Depuis, cependant, ils subirent un interrogatoire devant le lieutenant du sénéchal de Poitou et sur le vu de leur confession, la cour admit Guy Frotier à présenter par écrit les faits de sa cause, ce qui fut fait. Quelque temps après, le sr de la Messelière décéda, sans laisser d'enfants. Jeanne de Maillé, sa veuve, reprît le procès, ainsi que son frère et principal héritier, Floridas Frotier. Celui-ci étant « fort simple gentilhomme, sans grant sens et entendement », son fils Geoffroy lui fut donné comme curateur par autorité de justice, « pour gouverner luy, ses biens, causes et procès». Alors, sous prétexte de sauvegarder les droits de Jeanne de Maillé, le seigneur de Mortemer, admettant l'intervention de Prégent Frotier, baron de Preuilly, que Guy avait institué son légataire universel, s'empara des hôtels de la Messelière et de Chambonneau, et de tout l'héritage de Guy. Geoffroy Frotier, au nom de son père, en ayant obtenu recréance, c'est-à-dire la jouissance jusqu'au jugement du procès, Taveau les fit saisir de nouveau, soidisant pour se gager de la rente de 100 écus (réduction acceptée, par transaction antérieure, des 300 écus qu'il réclamait primitivement), dont les arrérages ne lui avaient pas été payés. Cette affaire déjà embrouillée vint encore se compliquer, en 1473 et 1478, de nouvelles réclamations (suivies de voies de fait) de Jean de Volvire, sr de Ruffec, qui prétendait différents droits sur la seigneurie d'Empuré, entre autres le droit de guet et garde, comme nous l'avons dit plus haut. Jeanne de Maillé mourut à son tour (1482), sans avoir vu la fin de ce procès, dont nous perdons désormais la trace. Les détails qui précèdent sont empruntés à un mémoire dressé par Geoffroy Frotier, au nom et comme curateur de noble homme Floridas Frotier, écuyer, seigneur de la Messelière, son père (Arch. nat., K. 2378, n° 31), et dans les plaidoiries et autres actes de procédures enregistrés au Parlement. (Voir X2a 31, fol. 91 v° ; X2a 39, aux dates des 29 mars, 18 avril, 24 et 26 mai, 30 juin, 28 juillet et 2 août 1474 ; X2a 40, fol. 132 v°, 144 v°, 146, 153, 156, 181 v°, 186 v°. 245 ; X2a 41. aux dates des 13 mars, 2 et 5 mai 1475 ; X2a 44, date du 18 novembre 1479.)

Geoffroy Taveau, baron de Mortemer, qui vécut jusqu'en 1489, avait épousé Marie d'Oradour, fille d'André, seigneur du Bouchet-en-Brenne, et d'Annette de Rochedragon, avant l'an 1445 ; car on mentionne un acte de cette date par lequel, en qualité de mari de cette dame, il transigé, au sujet d'une somme de 200 livres, avec Louis d'Oradour, sr du Bouchet-en-Brenne, sans doute son beau-frère. M. Beauchet-Filleau fournit quelques autres renseignements sur ce personnage (Dict. des familles du Poitou, 1re édit , t. II, p. 695), et M. le baron d'Huart rectifie quelques assertions de cet ouvrage touchant les enfants de Geoffroy Taveau (Persac et la châtellenie de Calais, Mém. de la Société des Antiquaires de l'Ouest, année 1887, t. X de la nouv, série, p. 142).

bailla et afferma à perpetuité, pour lui et les siens, à feu Huguet Guinaut, père desdiz supplians, et aux siens et qui cause auroient de lui, le lieu et appartenances de la Jangaudière, assis et situé en la parroisse de Jorde, feussent lesdictes choses, maisons, fondeis, murailles, vergiers, terres labourées et non labourées, prez, bois, pasturaiges et autres choses, qui antiennement furent à ung nommé Jehan de Jorde, pour certain pris et ferme de blé et d'argent , que ledit feu Guinault promist et s'obliga lui en rendre et paier par chacun an. Et en ce faisant, fut dit, parlé et accordé entre lesdictes parties, entre autres choses, que ledit feu Guinault seroit tenu labourer certaine quantité de boys, tant qu'il le pourroit faire ou faire faire, et desdictes terres ou boys estans en blez seroit tenu, ledit Guenant, preneur, rendre et paier audit chevalier et aux siens ruitiesme gerbe des fruiz croissans en icelles, et des appartenances et appendances duquel lieu de la Jongaudière, qui estoit partie en labouraige et partie en boys, vulgaument nommée et appellée la Riougeroye, autrement le champ de la Charbonnière, contenant douze provenderées de terre ou environ, tenant, d'une part, au chemin par lequel l'en va de Gençay à Lussac, et, d'autre part, le long d'un terrier en tirant au Cormenier des Laurencelles et d'illec tirant au Chaigne Jehan Grant; laquelle pièce de terre ou la plus part d'icelle ledit feu Huguet Guinaut, durant sa vie, et lesdiz supplians ses enfans, en sa compaignie, essartèrent de grans boys et bruyères où elle estoit de paravant, et icelle mirent et convertirent en labouraige, et depuis ont icelle tenue, possidée et explectée, joy et usé, prins, levé et parceu les fruiz paisiblement, en payant l'uitiesme gerbe audit chevalier, mesmement en joy et usa ledit feu Huguet Guinault jusques à son décès et trespassement, qui peut avoir esté cinq ou six ans ou environ, et après son trespassement, lesdiz supplians en ont semblablement joy et usé,sans aucun contredit ou empeschement , jusques quatre ansa ou environ, que ung nommé Estienne Michelet dist et declaira ausdiz supplians que ladicte pièce de terre dessus declairée lui appartenoit. Et soubz umbre de ce, ledit Estienne Michelet, qui avoit esté homme de guerre, leur donna de grans menasses de les batre et envillanner, s'ilz exploictoient ne labouroient plus ladicte pièce de terre. Lesquelx supplians, qui sont pouvres simples gens de labour, furent en grant doubte et crainte des menasses que leur donnoit ledit Estienne Michelet à l'occasion de ladicte pièce de terre, et à ceste cause se tirèrent par devers ledit Geoffroy Taveau, en lui remonstrant qu'ilz avoient essarté et mis en labouraige la pluspart de ladicte pièce de terre, soubz umbre de la baillète qu'il avoit faicte audit feu Huguet Guinaut, leur père, où ilz avoient mis et exposé leurs corps, frayé et despendu bien largement du leur, et que ledit Estienne Michelet la leur vouloit oster et tollir ; et pou de temps après, firent adjourner ledit Estienne Michelet par devant lui. Lequel Geffroy Taveau deffendit audit Michelet qu'il ne feust si hardy ne osé de soy mettre ou intruyre en ladicte pièce de terre, et qu'il en laissast joir et user lesdiz supplians, sans leur faire aucun empeschement en la joissance d'icelle. Et depuis a ledit Estienne Michelet esté absent du païs l'espace de troys ans ou environ, durant lequel temps lesdiz supplians ont tousjours joy et usé de ladicte pièce de terre, jusques environ la saint Michel derrenierement passée, que ledit Michelet vint au pays. Et tantost après qu'il fut retourné, donna encores de grans menasses ausdiz supplians que, s'il les trouvoit labourans et exploictans ladicte pièce de terre, qu'il les feroit courroussez du corps et que il coupperoit certaine grant quantité de arbres fructiers que lesdiz supplians et ledit feu Huguet Guynaut, leur père, avoient plantez et nntez en ladicte pièce de terre, disant qu'il en vouloit faire sa clouaison à l'entour d'icelle pièce de terre ; laquelle lesdiz supplians ont labourée par plusieurs années derrenières passées en bien grant doubte de leurs personnes, et souventes foiz quant ilz laissoient leur areau et autres habillemens de leur labouraige en ladicte terre, ilz les trouvoient rompuz et gectez hors d'icelle pièce de terre, afin qu'ilz ne s'en peussent aider, et mesmement le jour des octaves de Toussains derrenierement passé, ung jeune enfant de l aage de xiii. ans ou environ, nommé Jehan Malereau, filz de ung nommé Mery Malereau

Divers membres de cette famille étaient établis, au commencement du XVe siècle, en la paroisse de Saint-Secondin, canton de Gençay. Pernelle Malereau, fille de feu Huguet Malereau, rendit aveu à Jean duc de Berry, comte de Poitou, le 8 juillet 1404, de son hébergement de

Monceaux (Mousseaux), sis en ladite paroisse, et d'autres terres, mouvant du comté de Civray. Il fut renouvelé, le 11 août 1405, par Jean Moreau, paroissien de Saint-Secondin, qui venait d'épouser ladite Pernelle. (Arch. nat., copie du Grand-Gauthier, R1* 2172, p. 1219, et R1* 2173, p. 1690.)

, prouchain voisin desdiz supplians, vint dire à iceulx supplians, à leur maison dudit lieu de la Jongaudière, où ilz estoient et se esbatoient, parce qu'il estoit feste ce jour, que ledit Estienne Michelet estoit en ladicte pièce de terre avec une poignée et qu'il voulloit aller coupper leurs autes, qui estoient en icelle terre. A l'occasion de quoy, lesdiz supplians partirent de leur maison qui estoit près et joignant de ladicte pièce de terre, et prindent chacun ung baston en son poing, c'est assavoir ledit Perrin Guinaut ung baston ferré en forme de demye lance, et ledit Jehan Guynaut trouva en son chemin ung baston de haye, ainsi qu'ilz aloient droit là où estoit ledit Estienne Michelet, qui estoit en icelle pièce de terre. Lequel Estienne Michelet, si tost qu'il vit et apparceut lesdiz supplians, qui estoient en chemin qui est le long de ladicte terre, vint et se adreça vers eulx, ladicte congnée qu'il avoit en son poing, en disant qu'ilz avoient labouré sa terre oultre et contre son gré et voulenté, et qu'il les en paieroit bien et ne mourroient d'autres mains que des siennes. Lesquelx supplians estans oudit chemin, le long de ladicte terre, remonstrèrent le plus doulcement qu'ilz peurent que ladicte pièce de terre leur appartenoit,comme des appartenances et appendances de leur hostel de la Jongaudière, au moien de la baillette que leur en avoit faicte ledit Geffroy Taveau. Mais ledit Estienne Michelet disoit tousjours que ladicte terre lui appartenoit et qu'il les garderoit bien qu'ilz n'en joissent, en leur donnant de grans menasses que, s'il les trouvoit dedans, qu'il les tueroit. Sur quoy ilz eurent entre eulx plusieurs parolles contencieuses, parce que lesdiz supplians disoient qu'ilz ne laisseroient point pour lui à exploicter. A l'occasion desquelles noises et debatz, Michelle Guerine, femme dudit Perrin Guynault, suppliant, sortit hors de la maison dudit lieu de la Jongaudière et s'en tira vers le lieu où estoient sondit mary et son frère, et si tost qu'elle y fut, remonstra audit Estienne Michelet que c'estoit mal fait à lui de prendre noise et question avecques sondit mary et ledit Jehan Guynaut, son frère, à l'occasion de ladicte pièce de terre, dont eulx et leurs predecesseurs, tenans et exploictans ledit lieu de la Jongaudière, en avoient joy et usé de tout temps et ancienneté. Et soubz umbre de ce, eurenl lesdiz supplians et Michelet entr'eulx plus grans noises que devant ; et s'efforça ledit Estienne Michelet, qui estoit au dedans de ladicte terre, ladicte congnée toute tendue en son poing, comme dit est, de passer hors d'icelle pièce de terre par dessus une vieille haye ou clouaison qui estoit entre lui et eulx, pour venir contre lesdiz supplians. Et laquelle chose voyant, ledit Perrin suppliant, qui estoit oudit chemin avecques ledit Jehan son frère, doubtant que ledit Estienne Michelet, qui estoit homme de guerre, comme dit est, ne le frappast de ladicte coignée, tendit au devant dudit Estienne Michelet sondit baston ferré qu'il avoit en forme de demie lance, et d'icelui frappa ledit Estienne Michelet,...Sic. Le scribe a omis quelques mots qu'il est facile de suppléer. tantost après, lui estant encores en ladicte pièce de terre, ala de vie à trespassement. A l'occasion duquel cas, lesdiz supplians, doubtans rigueur de justice, se sont absentez du pays et n'y oseroient jamais retourner ne seurement demourer, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties ; humblement requerans que, attendu que ledit cas advint de chaulde colle et que lesdiz supplians, quant ilz alèrent devers ledit deffunct, n'avoient pas entencion de le tuer, mais de sa mort furent et sont très desplaisans et courrouciez, et ne prindrent lesdiz bastons fors pour obvier qu'il ne les batist, parce qu'il estoit homme de guerre et les avoit menassez de les batre et tuer, Comme dit est, que les premiers mouvemens ne sont pas en la puissance de l'omme et qu'ilz sont pouvres gens de labour, bien famez et renommez, non actains ou convaincuz d'aucuns autres villains cas, blasmes ou reprôuches, il nous plaise leur impartir icelles. Pour quoy nous, ces choses consi derées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, ausdiz Perrin et Jehan Guynault, supplians, oudit cas avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons enmandement, par ces presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou moys de mars l'àn de grace mil cccc. cinquante et neuf, et de nostre règne le xxxviiime.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. J. de La Loère. —Visa. Contentor. J. Du Ban.

MCCCXXXI Mars 1460

Rémission accordée à Mathurin Béguin, franc-archer de la paroisse de Vançais, détenu dans les prisons de Germain pour le meurtre d'Etienne Biron, auquel il avait acheté et payé un pourpoint, et qui refusait de le lui livrer.

AN JJ. 190, n° 26, vol. 15 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion des parens et amys charnelz de Mathelin Béguin, aagié de quarante ans ou environ, nostre franc archier de la parroisse de Vançay en Poictou, prisonnier à present detenu ès prisons de Germain

André de La Roche était alors seigneur de Germain à cause de sa femme, Jeanne de Vezançay, qui l'avait eu de la succession de son père ou de celle de son frère..Guillaume de Vezançay, chevalier, le père, était mort avant le 9 novembre 1426, laissant deux enfants en bas âge, Pierre et Jeanne, sous la tutelle de leur mère, Marguerite Feydeau ou de Fesdeau (cf. notre t. VII, p 299, note). Celle-ci ayant épousé en secondes noces Guillaume de La Roche, chevalier, veuf lui aussi, maria sa fille au fils du premier lit de son mari, André de La Roche.

Sur l'état des personnes taxées et condamnées à l'amende par Pierre de Tuillières, conseiller au Parlement, commis par lettres patentes de Charles vu, en date du 14 janvier 1438, pour rechercher et punir les abus commis en Poitou, on lit : « Jehan Cadiou, mestoyer de André de La Roche, seigneur de Germain,audit lieu de Germain, en la parroisse de Saint Coustans, a esté tauxé et imposé par manière de prest fait au roy nostre sire, à la somme de XLVI. solz VIII. deniers ». (Bibl. nat., ms. fr. 24160, fol. 11 v°.) Nous citerons encore une transaction du 9 juillet 1463, par laquelle André de LaRoche, chevalier, seigneur de la Roche et de Germain, et Jeanne de Vezançay, sa femme, furent admis par Jean de Lezay, chevalier, seigneur des Marais à lui faire foi, et hommage de l'hôtel du Vignault, dont par suite ils étaient reconnus légitimes possesseurs. (Arch. nat., T. 110.) Le même André de La Roche poursuivait, en 1469, au Parlement de Paris, Jean de Melun, seigneur de Lezay, le fils de celui-ci et leurs complices, en réparation des injures et excès dont ils s'étaient rendus coupables envers lui et ses sujets de la seigneurie de Germain. (Mandement d'enquête du 17 juillet 1469, X2a 36, fo1. 242.)

près Saincte Soline en Poictou, contenant que, le jeudi sixiesme de ce present mois, ledit Mathelin Beguin se partit après disner de son hostel et s'en ala en la taverne d'un nommé Chaigne, et ilec trouva feu Estienne Birori, Simon Bellault et Jehan Pannetier, dit Chetif, et après ce burent ensemble jusques qui fust nuyt, et en buvant firent le marchié d'un pourpoint que ledit feu Biron vendit audit Mathelin Beguin pour certain pris convenu entre eulx, que ledit Beguin paya content audit feu Biron. Et après qu'ilz eurent ainsi beu que dit est, partirent de ladicte taverne et se misdrent à chemin les diz feuz Simon Biron et Jehan Pannetier, pour eulx en aler à leurs hostelz audit lieu de Saincte Soline, avecques lesquelz s'en ala ledit Beguin, du consentement dudit feu Biron, pour avoir de lui le pourpoint qu'il avoit achapté et payé. Et quant ilz furent là arrivez, qui fut environ l'eure de mynuit, ledit Beguin dist audit feu Biron qu'il luy alast querir son pourpoint et qu'ilz yroient boire à l'ostel de la Chappelle estant audit lieu de Saincte Soline, car il s'en vouloit aler au matin pour besongner avec le prieur de Lezay, à qui il l'avoit promis. Lequel feu Biron luy respondy qu'il ne lui bailleroit mes huy ledit pourpoint. Et lors ledit Beguin jura le sang Dieu que si feroit et qu'ilz yroient boire audit hostel de la Chap- peile, et pour y vouloir aler se avença au devant d'eulx, et ledit Birori dist ausdiz Billault et Pannetier ces parolles ou semblables : « Ne alons point avec luy, par le sang Dieu ! il est excommenié ». A quoy respondit ledit Beguin que par la mort Dieu il n'en estoit riens et qu'il avoit menti, et dist : « Tu es bien paillart, tu m'asfait venir ycy, et ne me veult bailler mon pourpoint, et si me dis villenie. Je te tenoys mon amy et te aymoie bien, et tu es celluy qui plustost me dis oultraige. Par le sang Dieu, tu me bailleras mon pourpoint ou mon argent que je t'en ay baillé, ou nous nous entrebatrons ». A quoy ledit Billault respondit audit Beguin : « Par le sang Dieu ! se tu luy touches, nous te batrons bien », et se alièrent lesdiz Biron et Billault ensemble contre ledit Beguin. Lequel, se voyant ainsi seul contre eulx deux et injurié, se avença contre ledit Biron, et après plusieurs parolles leva le bras et d'un pal qu'il avoit prins ou chemin pour passer les rivières, et qu'il estoit nuyt, en donna ung coup audit Biron sur la teste en descendant sur la temple et en donna ung coup audit Biron autre sur les cuisses, dont ledit Biron cheut à terre et mourut incontinent. A l'occasion duquel cas, il a estéconstitué prisonnier èsclictes prisons, où il est miserablement detenu, en voye de finer ses jours, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties, si comme dient lesdiz supplians, requerans humblement que, [comme] ledit feu Biron fut premier agresseur de parolle en tant qu'il le appelloit et disoit qu'il estoit excommenié, et que ledit Beguin n'avoit entencion de le tuer, mesmement qu'il ne voult oncques tirer sa dague qu'il avoit, ce qu'il eust peu faire, aussi que lesdiz Biron et Billault se estoient aliez contre luy, et qu'il n'estoit alé audit lieu se non en entencion d'avoir ledit pourpoint qu'il avoit achapté et payé, que en tous autres cas il est bien fame et renommé, et ne fist oncques aucun villain cas, blasme oureprouche, il nous plaise luy impartir nosdictes grace et misericorde. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit Matherin Beguin avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, etc. Donné à Chinon, ou mois de mars l'an dé grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne Ie xxxviiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Oquet. — Visa, Contentor. J. Du Ban.

MCCCXXXII Avril (avant le 13) 1460

Rémission en faveur de Louis et Jean Michau, le premier en fuite, le second prisonnier à Niort, pour le meurtre d'Hélie Raoul, curé de Fontaines-sur-Boutonne.

AN JJ. 190, n° 54, fol. 28 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir,nous avoir receu l'umble supplicacion de Loys et Jehan Michaux, jeunes homs, natifs du païs de Poictou, contenant que, deux ans a ou environ, ledit Jehan s'en entra en l'eglise de Fontaines sur Boutonne oudit païs de Poictou, avec plusieurs autres pour doubte de tonnoirre et fort temps, et après qu'il fut passé s'en ala en ung jardrin pour faire son aisement, et estoit devers le soir assez tart, et lui estant en icelui jardrin, feu Helies Raoul, en son vivant prebstre et curé dudit [lieu] de Fontaines, qui estoit ribleux, putenier et homme de très mauvaise vie, tenant une espée en sa main, donna de ladicte espée audit Jehan ung grant tail au travers du visaige tant qu'il le tumba à terre, avec plusieurs autres cops tant de tail que d'estoc sur l'un des bras, lui persa de part en part, tellement qu'il en est mautrouxMautroux, estropié, dit Godefroy, qui ne cite qu'un seul exemple, emprunté précisément au présent texte. (Dict. de l'anc. langue française.) ou presque impo- tent de l'une des mains. Et depuis ce, ledit Jehan pardonna audit feu Helies, moyennant qu'il lui bailla certain argent pour lui et pour paier le barbier qui le habilla. Lequel feu Helyes depuis, pour plus vouloir injurier ledit Jehan, suppliant, qui avoit esté nouvellement marié, poursuivit sa femme qui estoit jeune femme, en la priant de deshonneur et lui reprouchant ledit Jehan, son mari et l'appellant mautroux, et lui dist, entre autres choses, à une foiz ou plusieurs, qu'il auroit sa compaignie, voulsist ou non, et qu'il ne demourroit pour lui ne autres. Lesquelles choses elle dist audit Jehan son mary, qui le dist audit Loys son frère. Et à ceste cause, lesdiz supplians, voyans la mauvaise voulenté dudit feu Helyes, congnoissans que c'estoit ung putenier et de ce fort famé, et aussi estoit plein de toute mauvaitié, doubtans qu'il prensist ladicte jeune femme dudit Jehan et la deshonnorast, se misdrent de nuyt par deux foiz en aguet de le trouver, et à la dernière foiz, qui fut le premier jour de karesme derrenierement passé, le trouvèrent, environ jour couchant, ainsi qu'il vouloit entrer en sa maison, et lui donnèrent plusieurs cops d'espées tant sur la teste que ailleurs, tellement qu'il demoura mort en la place. A l'occasion duquel cas ledit Jehan a esté pris et est de present prisonnier en noz prisons de Nyort, et ledit Loys s'est absenté, et n'oseroient jamais seurement converser ne demourer au païs, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu que en tous autres cas ilz ont esté et sont bien famez, etc., il nous plaise nosdictes grace et misericorde sur ce leur impartir. Pour quoy nous, les choses dessus dites considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, ausdiz supplians et chacun d'eulx le fait et cas dessus declairé avons, pour honneur et reverence de la Passion Nostre Sauveur Jhesu Crist, qui à ce jour souffrit mort et passion pour nostre redemption, quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et â tous noz autres justiciers, etc. Donné aux Roches Trenchelion, oumoys d'avril avant Pasques l'an de grace mil cccc.lix, et de nostre règne le xxxviiime.

Ainsi signé : Par le roy tenant ses requestes, èsquelles maistre Jehan TudertJean Tudert, conseiller au Parlement de Paris et maître des requêtes. (Voy. ci-dessus, p. 59, note.) , Henry de MarieHenri de Marie, chevalier, seigneur de Versigny, fils aîné d'Arnoul, seigneur dudit lieu, président au Parlement de Paris, et de Marie de Runay, sa première femme. Le 18 mai 1422, il fut reçu conseiller au Parlement, charge qu'il exerça jusqu'en 1455; il fut alors pourvu de la charge de maître des requêtes de l'hôtel, et il en prit le titre par les lettres qu'il obtint en chancellerie, le 3 août 1456. En cette qualité, Henri de Marie fut l'un des commissaires députés par Charles VII, en 1460, pour terminer certains débats et différends entre les maire et échevins de la Rochelle et le procureur général du roi. Puis, sous Louis I, l'office de premier président au Parlement de Toulouse lui fut donné, pour le récompenser de ses services ; il en remplit les fonctions jusqu'à sa mort arrivée a Paris, l'an 1495 ; il fut enterré dans l'église des Filles-Pénitentes de cette ville. Henri de Marie avait épousé Jeanne, fille d'Adam de Cambray, premier président du Parlement de Paris. (Blanchard, Généalogies des maistrès des Requestes, in-fol., 1670, p. 180.) Jehan de la ReautéJean de La Réauté est nommé deux fois en qualité de membre du conseil royal sous Charles vu, en 1460 et 1461, dans l'histoire de ce roi, par M. de Beaucourt (t. VI, p. 312 n., 354) ; on ne le trouve pas auparavant. et plusieurs autres estoient. Rolant. — Visa. Contentor.

MCCCXXXIII Avril 1460

Rémission accordée à Jean Bonnitaud, demeurant au village de la Jarrie. Poussé à bout par son frère aîné Guillaume, qui ne cessait de lui faire tort et de lui chercher querelle, ainsi qu'à un autre de ses frères, il l'avait, dans une rixe, frappé mortellement.

AN JJ. 190, n° 41, fol. 22 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Jehan Bonnitaud, de l'aage de vingt trois ans ou environ, demourant ou villaige de la Jarrie ou païs de Poictou, contenant que puis aucun temps ença, pour eslongner et fouyr la compaignie de feu Guillaume Bonnitault, son frère ainsné, qui estoit de très perverse vie et avoit fait et porté plusieurs desplaisirs et dommaiges à luy, à Guillaume Bonnitault, leur frère, et à leurs feuz père et mère, icelluy suppliant et ledit Guillaume, son puisné frère, s'en alèrent du villaige de Chastillon demourer audit lieu de la Jarrie, où ils prindrent certaine maison avec aucuns heritaiges, en entencion d'y demourer et vivre ilec paisiblement, hors la compaignie dudit Guillaume, leur frère ainsné ; mais ledit Guillaume, leur ainsné, pour porter dommaige à sesdiz frères, s'en ala audit villaige de la Jarrye, où il avoit achapté ung vielz fondis et y fist faire une chetive maison près de celle de sesdiz frères, en entencion de leur nuyre, comme il dist depuis, et aussi dist qu'il les destruiroit. Lequel Guillaume l'ainsné, depuis qu'il vint demourer en icelluy villaige, a tousjours mené noise et debat à sesdiz frères et leur a fait gaster à ses bestes leurs blez de jour et de nuyt, et avec ce leur a desrobé ce qu'il a peu. Auquel villaige a ung puis qui de toute ancienneté a acoustumé estre commun à tous les habitans oudit villaige de la Jarrye, pour eulx servir de ladicte eaue, tant à abrever leurs bestes que autrement; auquel puis lesdiz supplians et Guillaume, son puisné frère, envoièrent, le mardi devant la feste de Noël l'an mil cccc. cinquante sept, leur chamberière, environ huit heures du matin, pour avoir de l'eaue pour faire du pain et pour leurs autres affaires ; laquelle chamberière trouva sur ledit puys ledit Guillaume l'ainsné, lequel, incontinent qu'il la vit et qu'elle avoit ses vaisseaulx pour emporter de l'eaue, luy dist qu'elle n'auroit point de l'eaue dudit puys. Laquelle chamberière luy dist lors : « Et pourquoy ?» et s'approcha dudit puys, pour en cuider tirer. Et lors ledit Guillaume, pour empescher que sesdiz frères n'eussent point de ladicte eaue...Mots passés par l'inadvertance du scribe. lesquelz par default de ce, ne peurent faire euire leur pain ce jour, parce qu'ilz estoient loing de toute autre eaue d'un quart de lieue ou environ. Lequel suppliant et Guillaume son puisné, qui dès ladicte heure de huit heures estoient alez à leurs labouraiges, arrivèrent sur le soir en leur hostel, environ souleilh couchant, et quant ilz furent ilec arrivez, trouvèrent leurdicte chamberière qui, pleuroit et estoit toute moulée. Lequel suppliant luy demanda qu'elle avoit, et elle luy respondit qu'elle venoit dudit puys pour cuider avoir de l'eaue et qu'elle y avoit trouvé ledit Guillaume l'ainsné, qui l'avoit empeschée d'en aporter, et non content de ce, luy avoit gecté ung seau d'eaue sur elle, combien qu'il gelast très fort et faisoit grant froit, et qu'elle y estoit aussi alée au matin et qu'il l'avoit batue, et que de tout ledit jour il n'estoit party dudit puys et n'avoit voulu souffrir qu'ilz eussent de l'eaue, et n'en avoient point eu de tout ledit jour, et qu'il disoit qu'ilz n'en auroient point. Et lors ledit suppliant dist audit Guillaume, son puisné frère, qu'il prist ung vaisseau et alast audit puys querir de l'eaue, pour ce qu'ilz ne s'en povoient passer et convenoit qu'ilz en eussent, et qu'il yroit après luy pour le garder que ledit Guillaume, leur ainsné, ne le batist. Lequel Guillaune print ung vaisseau pour avoir de l'eaue et s'en ala audit puys, et ledit suppliant print ung baston carré qu'il trouva en sa maison, de grosseur de plain poing et de quatre piez de longueur ou environ, et ala après sondit frère audit puys. Et estoit à heure de volée d'assée devers le soir ou environ. Et quant ledit suppliant fut près ledit puys, il vit ledit Guillaume Fainsné qui disoit audit Guillaume puisné qu'il n'auroit point de l'eaue dudit puys, et que ledit Guillaume puisné luy demandoit pourquoy, el en disant ces parolles, ledit Guillaume Fainsné, qui avoit en l'une de ses mains ung gros baston et en l'autre ung grant cousteau tout nu, apperceut ledit suppliant et incontinent ala à rencontre de luy en criant à l'aide et menoit grant effroy ; lequel Guillaume le voult frapper dudit cousteau qu'il tenoit tout nu en ses mains. Mais ledit suppliant retourna le coup dudit baston qu'il avoit et d'icelluy tout esmeu et eschauffé, desplaisant dont ledit Guillaume l'avoit voulu batre, le frappa parmy les jambes tellement que icelluy Guillaume l'ainsné tumba d'un genoil à terre, et incontinent se releva et dudit cousteau qu'il avoit cuida et s'efforçade rechief de frapper ledit suppliant parmy le ventre ; mais icelluy suppliant se recula et ne le frappa que parmy la robe, en laquelle il fist ung grant pertuys, et ledit suppliant en reculant audit coup frappa de rechief de son dit baston ledit Guillaume Fainsné sur aucune partie de son corps, ne scet bonnement où, parce qu'il estoit nuyt, pour lequel coup icelluy Guillaume, le landemain environ neuf heures de matin, ala de vie à trespassement. A l'occasion duquel cas, icelluy suppliant, doubtant rigueur de justice, s'est absenté du païs et n'y oseroit jamais retourner, converser ne repairer, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties, comme dit ledit suppliant, humblement requerant que, attendu que ledit suppliant fut meu d'aler devers ledit deffunct parce qu'il avoit batu sadicte chamberière et qu'il les empeschoit d'avoir de l'eaue audit puys qui estoit commun audit villaige, non pas en entencion de le tuer, ains de sa mort fut et est très desplaisant et courroucié, mais seulement pour savoir pour quoy il empeschoit qu'il n'eustde l'eaue, et que ledit deffunct fut tousjours agresseur et estoit homme de mauvaise vie, etc., il nous plaise luy impartir icelles. Pourquoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant oudit cas avons quicté, remis et par- donné, etc. Si donnons en mandement, par cesdictes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Saint Espain, ou mois d'avril l'an de grace mil cccc. soixante, et de nostre règne le xxxviiie .

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Reynault. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXXXIV Avril 1460

Rémission en faveur de Louis Gendron, demeurant au port du Gué en la paroisse de Vouillé-les-Marais, soupçonné d'avoir causé par ses mauvais traitements la mort du fils d'un premier lit de Berthomée Gabillon. sa femme.

AN JJ. 190, n° 51, fol. 27 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Loys Gendron, pouvre homme de labour, chargé de jeune femme, demourant ou port du Gué en la parroisse de Saint Maixent de Voilhé, contenant que, puis aucun temps ença, il a esté conjoinct par mariaige avec Berthomée Gabilhonne. qui par avant avoit esté mariée avec feu Jehan Jouhot, duquel et de ladicte Berthomée estoit yssu ung enfant nommé Andry Jouhot, lequel suppliant, le lundi après la feste saint Pierre d'aoust mil cccc. cinquante et huit ou environ, en alant de son hostel au lieu de la Taillée pour aucuns ses affaires et, lui estant en son vaisseau et passant l'eaue, raencontra deux de ses voisins qui pareillement estoient sur l'eaue en leurs vaisseaux, lesquelx avoient noise et debat ensemble, telement qu'ilz vouloient batre l'un l'autre. Pour appaiser lequel debat, ledit suppliant commença à les tencer et blasmer très fort, et pour les cuider departir, s'approucha d'eulx si hastivement et sans y penser que lesdiz vaisseaulx hurtèrent les ungs contre les autres en telle manière que ledit suppliant tumba en l'eaue, et après se releva et tout moulhé se departit d'eulx et s'en ala en sa maison qui estoit fermée de clef, parce que sa femme s'en estoit alée à la messe assés loing d'illec et l'avoit fermé de clef, et par ce s'en ala à l'uys derrière de sadicte maison et fist tant qu'il entra dedans. Et quant ledit Andry Jouhot, filz dudit feu Jehan Jouhot et de ladicte Berthomée, lequel n'avoit que troys ou quatre ans et estoit ou lit, quant il oyt ledit suppliant, cuidant que ce feussent autres gens, se prist à crier très fort, et lors ledit suppliant lui dist qu'il se teust et n'eust point de paour, car s'estoit lui, ce neantmoins ledit Andry ne se voult taire, ains cria encores, et lors icelui suppliant qui estoit tout desplaisant et courroucé dont il estoit ainsi moulhé, pour le cuider faire appaiser lui donna seullement deux ou troys cops de la main, et après s'en ala en son ayrepour l'apprester à batre du blé, et rencontra sadicte femme qui venoit de l'eglise et la blasma très fort dont elle avoit tant demouré, et ce fait s'en alèrent tous deux ensemble en ladicte maison ; et quant ilz y furent, ladicte femme ala ou lit où elle avoit laissé ledit Andry son filz et le trouva qu'il estoit trespassé, ne scet ledit suppliant bonnement se ce fust pour lesdiz deux ou troys cops qu'il lui avoit donnez de la main seullement ou pour la toux qu'il avoit lors, dont il estoit fors passionné. Mais ce nonobstant, icelui suppliant, à l'occasion d'icelui cas ainsi avenu, doubtant rigueur de justice, n'oseroit seurement converser ne repairer ou païs, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant, etc. icelles. Pourquoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant oudit cas avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de [PoictouLa désignation du sénéchal est restée en blanc sur le registre.] et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou moys d'avril l'an de grace mil cccc. soixante, et de nostre règne le xxxviiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Reynaut. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXXXV Mai 1460

Rémission en faveur de Simon Gastineau, dit Gervais, et de Pierre Pageaut, dit Thévenin, de Vouillé près Poitiers, qui craignaient d'être inquiétés comme complices d'un meurtre.

AN JJ. 190, n° 62, fol. 32 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Simon Gastineau, dit Gervays, et Pierre Pageaut, dit Thévenin, pouvres gens mecaniques demourans à Vouilhé près Poictiers, contenant que lesdiz Gastineau et Pageaut, dès leur jeune aaige jusques à present, ont esté et sont de bonne vie et honneste conversacion et se sont tousjours bien et honnestement gouvernez selon leur estat, et ont vesquu de leur mestier bien et loyaument et conversé doulcement et paisiblement avecques leurs voisins, sans ce que jamais ilz aient esté actains et convaincuz d'aucun vilain cas, blasme ou reprouche, et que, environ le xiiiime jour d'octobre derrenier passé, il avint que ledit PageautLe texte du registre porte par erreur Gastineau. fut convié ou semont à soupper par ung nommé Pierre Moreau, son voisin, vendant vin à détail audit lieu de Vouilhé, où ledit suppliant ala. Et lui estant ilec ainsi à souper avecques ledit Moreau, ledit Gastineau, son serourge, vint et se rendy ilec en entencion de lui faire achapter une jument, pour ce que ledit Pageaut avoit prié icelui Gastineau de la lui faire avoir. Auquel lieu et hostel il trouva soupant ensemble lesdiz Moreau et Pageaut et Macé Bigot, Guillemin Rolant et Jehan Picart, et s'i arresta et beurent et mengèrent ensemble. El eulx estans ainsi à table, ledit Bigot demanda audit Pageaut s'il vouloit point ehanger de botes ou houseaux ; à quoy ledit Pageaut respondi que oyl. Et en ce disant, survint ung nommé Phelippon ChevalierLe rôle joué par Philippon Chevalier dans les faits relatés ici montre déjà qu'il était plutôt querelleur par nature et ne craignait pas le pugilat. Nous le retrouvons un peu plus tard dans une autre circonstance où son caractère turbulent l'entraina à se mettre à la tête d'une rébellion contre l'autorité. Avant que Vouillé fût fortifié, les habitants étaient tenus de faire le guet et la garde au château de Montreuil-Bonnin. Le chapitre de Sainte-Radegonde ayant obtenu, par lettres patentes du 7 avril 1431, la permission royale de fortifier l'église et le bourg de Vouillé et de préposer un capitaine à la défense de cette place, Laurent Vernon, seigneur de Montreuil-Bonnin, consentit seulement à la fortification de l'église et sous la condition que les habitants du bourg continuerent à faire le guet à Montreuil (transaction entérinée au Parlement, le 6 décembre 1432). Néanmoins, quelques années après, les chanoines, s'appuyant sur l'autorisation de Charles VII, entourèrent la ville de murailles, de fossés et de portes avec pont-levis. De ce moment les habitants qui devaient faire la garde de la nouvelle place forte refusèrent de remplir ce devoir à Montreuil, malgré les poursuites et les contraintes du seigneur. Il s'en suivit un long procès devant le sénéchal de Poitou, puis au Parlement, La cour, par arrêt du 14 avril 1449, reconnut en principe l'exemption des habitants de Vouillé, mais déclara que provisoirement et dans les cas de péril imminent, ils devaient cependant se joindre aux autres sujets de Laurent Vernon, pour garder le château de Montreuil-Bonnin et y faire le guet. Ce provisoire durait encore en 1465. Laurent était mort depuis dix ans et son fils, Jacques Vernon, lui avait succédé. Pendant la Ligue du bien public, Louis XI avait écrit à celui-ci de tenir son château en état de défense. Alors il somma les habitants de Vouillé de venir faire leur devoir à Montreuil, tant pour le guet que pour les réparations du château. Ceuxci s'y étant refusé, le prévôt de Poitiers leur envoya un sergent pour les y contraindre ; ils continuèrent la résistance, s'assemblèrent, « garnis de voulges, arbalestres tendues, javelines et autres armes ». Le sénéchal de Poitou, saisi d'une plainte par Jacques Vernon, décréta de prise de corps les meneurs de la rébellion qui étaient Philippon Chevalier, Pierre Billaud et Pierre Chevreau, et en ajourna à comparaître devant lui une dizaine d'autres parmi les plus compromis. Ils se portèrent appelants au Parlement. Le 14 juin 1468 seulement, l'affaire fut plaidée. Chevalier, Billaud et Chevreau s'étaient rendus prisonniers à la Conciergerie du Palais et les autres comparurent en personne. A l'accusation portée contre eux, ils répondirent, pour leur défense, que la question de droit n'étant pas résolue, puisque le procès était toujours pendant, on ne devait pas les contraindre La cour, le 17 juin, élargit les trois prisonniers et les renvoya avec les autres devant le sénéchal de Poitou, pour être jugés surie cas d'excès et violences, mandant à celui-ci que, « s'il appert d'eminent peril », il contraigne ceux de Vouillé à faire le guet à Montreuil-Bonnin, en se conformant à l'arrêt du 14 avril 1449. (Arch. nat., X2a 35, aux dates des 14 et 17 juin 1468; X2a 36, fol. 116 v°; Arch. de la Vienne, G. 1376, 1378, 1438.) cordouennier demourant audit lieu de Vouilhé, natif du païs d'Anjou, avecques ung sien varlet dudit mestier de cordouennerie, de l'aage de xx. ans ou environ, nommé Jehan Quantet, lesquelx ilz promisdrent croyre dudit eschange. Et après ce, lesdiz Bigot et Chevalier se prindrent à vouloir composer ledit marché d'eschange de botes, et ainsi que ledit Bigot essayoit les botes dudit Philippon Chevalier, les boucles dudit Bigot furent emblées et doubtèrent ou souspeçonnèrent ledit varlet l'avoir fait, pour ce qu'il avoit par ung pou de temps esté près et joignant desdictes botes. Et ce voyant, ledit Bigot demanda lesdictes boucles et dist qu'il les auroit, ainçois que personne saillist dehors, et ce dit, s'en ala fermer la porte de l'ostel dudit Moreau et s'en revint où estoit ledit Philippon Chevalier. Et ainsi qu'il fut retourné, ledit Phelippon Chevalier dist audit Bigot telles parolles ou semblables en substance : « Hée, paillard, cuides tu que je laisse pour toy à m'en aler de ceans? Je renye Dieu si je laisse pour toy, et si tu te mectz au devant, je te mectré sur les carreaulx ». Et en ce disant, mist icelui Philippon Chevalier la main à sa dague et la tyra demie ; mais ledit Gastineau suppliant l'empescha en le prenant au braz et au fourreau de sadicte dague, et en la remettant en icelui fourreau, sans le lascher, lui dist telz motz : « Beau sire, vous qui estes homme de bien, pour ung pou de chose, voulez vous deffaire la compaignie ? » Et lors ledit Phelippon Chevalier lui dist : « Lasche moy, je m'en veulx aler et n'en parleray plus ». Et adonc le lascha, mais incontinent qu'il fut lasché, il tyra sadicte dague et renya Dieu de rechief que le premier qui se mettroit au devant de lui pour l'empescher a s'en aler, il le mettroit sur les carreaulx. Et ce nonobstant, lesdiz Rolant et Picart se prindrent audit Chevalier et lui retournèrent sadicte dague oudit fourreau. Et ce fait, lesdiz Gervais, Pageaut, Rolant, Picart et Bigot se departirent de la compaignie dudit Phelippon Chevalier et de sondit varlet et s'en alèrent dehors, pour eschever noise, en l'ostel dudit Pageaut. Et quant ilz furent retraiz, icelui Phelippon Chevalier et sondit varlet vindrent escouter que l'en disoit et faisoit devant la maison dudit Pageaut. Et ainsi qu'ilz estoient illec escoutans, aians et venans, icelui Gastineau print troys petites theulles et en lensa ou gecta l'une contre ung des estallonsPoteaux, pieux. de la halle dudit lieu de Vouillé par une fenestre, et incontinent après ferma ladicte fenestre ; et tantost icelui Phelippon Chevalier et sondit varlet ou l'un d'eulx gectèrent deux pierres contre ladicte fenestre, tellement qu'ilz en desrompirent ung ays. Et lors icelui Gervays print troys petiz theublaz et les gecta contre l'eschelle des greniers estans sur ladicte halle, non pas pour les fraper, mais en entencion de les faire cesser et en aler. Et quant icelui Pageaut vit qu'ilz gectoient ainsi les pierres les ungs aux autres et contre sadicte maison, il se courroussa, disant qu'il sauroit pourquoy on gectoit ainsi les pierres contre sadicte maison, et en ce disant sailli en la rue tout nu piez. Et lors ledit Phelippon Chevalier gecta une pierre de plain poing contre ledit Pageaut et l'eust frappé, s'il ne se feust remué, et icelui Pageaut lui en gecta une autre contre lui. Et ce fait, iceulx

Picart, Bigot et Rolant yssirent dehors ledit hostel dudit

Pageaut, ayans en leurs mains, c'est assavoir ledit Picart une forche de fer emmanchée, ledit Bigot ung bourdon ferré et ledit Rolant ung gros baston de somme de boys et poursuirent tellement ledit Phelippon Chevalier qu'ilz le firent retraire hastivement en son hostel ; et ainsi qu'il y fut entré, lesdiz Picart et Bigot se tindrent et arrestèrent devant la porte dudit hostel, qui estoit toute ouverte, en lui disant : « Saulx, saulx ! » Et en ce disant, ledit Philippon Chevalier ferma sadicte porte et s'en monta en son plancher. Et ce fait, ledit Roland s'en ala frapper troys ou quatre cops d'estoc avecques ledit baston contre la fenestre de l'ouvrouer dudit Phelippon Chevalier. Et incontinent après, ledit Chevalier ou autres de ses gens gectèrent deux gros tisons de feu par la fenestre dudit plancher, à l'endroit d'icelle fenestre dudit ouvrouér, contre ledit Rolant, mais ilz ne le frappèrent point. Et ce fait, iceulx Phelippon Chevalier, ses femme et varlet descendirent dudit plancher au bas et ouvrirent, ou l'un d'eulx, la porte, et icelle ouverte, dist ledit Chevalier à sesdiz femme et varlet qu'ilz saillissent dehors ; et incontinent saillirent icelle femme et varlet, et ledit Phelippon Chevalier demoura au dedans et ferma la porte sur lui. Et estant ladicte femme ainsi dehors, dist audit Picart : « Pourquoy nous faictes vous ces oultraiges? » A quoy ledit Picart respondi qu'elle s'en alast à son hostel et qu'ilz ne lui feroient nul mal. Et neantmoins lesdiz Rolant et Picart s'àpprouchèrent dudit hostel et y trouvèrent ledit varlet, auquel icelui Rolant donna ung cop dudit baston par l'eschine, et ledit Picart dist à icelui varlet : « Ha, ribaut, c'est vous qui avez couppé les boucles ». Et lors ledit varlet lui dist : « Je vous deffends mon corps, et ne me frappez point ; car si vous me frappez, vous en repentirez ». Et lors, ledit Picart lui bailla de ladite fourche sur la teste par derrière, tellement qu'il le fist cheoir à terre en adentAdent, adens avait le sens de a la face contre terre, à plat ventre. (Godefroy, Dict. de l'anc. langue française.) au long du mur dudit hostel d'icelui Rolant. Et ce fait, ledit Picart adreça ses parolles contre ledit Philippon Chevalier, disant : « Saulx, saulx, ribaut, infame, saulx hardiement ! » A quoy ledit Phelippon Chevalier lui respondi : « Viens, viens; par le sang Dieu, si tu viens, je te serviray bien ». Et ledit Picart lui dist : « Et par le sang Dieu, si ferai ge ! » Et y ala et se combatirent ensemble ung peu de temps avecques lesdictes fourche de fer et dague, et en ce faisant, des cops qu'ilz frappoient sur lesdictes dague et fourche de fer faisoient saillir le feu et s'entredisoient plusieurs injures et villenies. Et frapa ledit Picart de ladicte forche contre ladicte porte dudit hostel ung peu entre ouverte, tellement qu'il mist sadicte forche entre la claveure et l'ays de ladicte porte. Et adonc icellui Phelippon Chevalier de sadicte dague frappa ledit Picart contre la poictrine, et cuida estre blecié, ainsi qu'il dist lors, mais il ne le fut pas, obstant l'estoffe de son pourpoint qui estoit espez. Et après ce, ledit Phelippon Chevalier ferma sadicte porte et ala gecter ung petit tison par une petite fenestre qui estoit à l'endroit de l'eschelle contre ledit Picart ; et lors ledit Gastineau vit et apperceut ledit varlet qui estoit cheu tout adent contre terre au long dudit mur d'icelui hostel dudit Chevalier; lequel Chevalier après monta ou plancher et crya : « Justice, justice à ces larrons qui me veullent rober ! » Et lors ledit Picart lui dist qu'il n'y avoit personne qui voulsist riens du sien, fors que sa personne. Et après icelui Phelippon Chevalier descendi jusques à sa porte qui estoit ouverte, et ledit Picart qui le sceut le poursuy jusques à troys eschellons de ladicte eschelle avecques la forche, tant qu'il le fist monter hastivement en sondit plancher, et quant il y fut, gecta deux gros tisons de feu au long de ladicte eschelle et aussi ung landier contre ledit Picart, cuidant l'avoir frappé. Et pour plus amplement cuider le batre, sailly dehors et trouva sondit varlet, cuidant que ce fust ledit Picart, et lui donna plusieurs cops et colées lui et sadicte femme, disant : « Ha, ha, Picart, y estes vous venu, et par le sang Dieu, vous l'acheterez ! » Et en frappant ainsi sur ledit varlet, cuidant frapper sur ledit Picart, ladicte femme dudit Phelippon Chevalier apperceut que c'estoit leurdit varlet et dist audit Phelippon, son mari, qu'il ne frappast plus et que c'estoit icelui varlet. Adonc dist ledit Chevalier audit Picart telles parolles ou semblables en substance : « Picart, je te prie, laisse moy faire aux autres, je ne te demande riens. Et fust ores mon varlet mort ». Et lors lesdiz Picart et Roland entrèrent oudit hostel dudit Phelippon Chevalier et parlèrent certaine espace de temps ensemble. Et en ce faisant, ledit Gastineau suppliant approucha la dague ou poing et dist audit Phelippon Chevalier que c'estoit belle chose d'avoir pour ung meschant paillart tousjours noise, en regnyant Dieu qu'il tueroit tout homme. Et lors ledit Phelippon Chevalier lui dist telles ou semblables parolles : « Es tu là, villain. Par le sang Dieu, je t'en paieray bien », et sailly dehors, en disant ausdiz Picart, Bigot et Rolant qu'ilz ne se meissent point au devant et qu'ilz le laissassent faire, et ce fait, poursuivy ledit Gastineau suppliant atout sadicte dague jusques à l'uys dudit Pageaut, aussi suppliant, en regniant Dieu qu'il les tueroit. Et ce voyant, ledit Gastineau print troys pierres et les gecta contre ledit Phelippon Chevalier, et après s'en ala en l'ostel dudit Pageaut et trouva icelui Pageaut qui avoit son espée ou poing, à la porte de sondit hostel, lequel dist audit Phelippon Chevalier qu'il se tirast arrière et que, s'il se tiroit plus avant, il le feroit marry et s'en trouveroit trompé. Et après lesdiz Picart et Rolant firent retraire ledit Phelippon Chevalier en sondit hostel ; et ce fait, icelui et sa femme prindrent leurdit valet qui estoit adonc devant ladicte porte dudit hostel fort malade, et le portèrent sur ung lit oudit hostel ; et le lendemain ala ung peu à l'esbat et parla à des gens qui là estoient ; et après ce qu'il fut retourné dudit esbat, il se mist au lit duquel oncques puis il ne bouga et ne parla, et ainsi vesquy environ troys sepmaines et jusques à la veille de Toussains derrenierement passée qu'il ala de vie à trespas. Et combien que ledit cas ne soit advenu par la faulte ne coulpe ne par la baterie desdiz supplians, mais par celle desdiz Rolant et Picart, Chevalier et sa femme, toutesvoyes, pour ce que lesdiz supplians estoient presens à ladicte baterie et à chacer ledit Phelippon Chevalier,qui les estoit alé assaillir et insulter, et lequel il est voix commune au pais estre homme baveur et noiseur, et pour occasion de sesdictes baves et noises a esté chacé du pays, toutesvoies lesdiz supplians, doubtans qu'on les voulsist appréhender, mettre en justice et rigoureusement proceder contre eulx et leurs biens, se nostre grace et misericorde ne leur estoit sur ce prealablement impartie, humblement requerans (sic) icelle. Pour ce, etc., ausdiz supplians avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons [en mandement au seneschal de PoictouMots suppléés ; il y a à cet endroit un blanc sur le registre.] et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou moys de may l'an de grâce mil cccc.lx, et de nostre règne le xxxviiie.

Ainsi signé : E. Des Jardrins. — Visa. Contentor.

MCCCXXXVI Juin 1460

Rémission octroyée à Jean Petitjean, page de Pierre de Commarque, homme d'armes de la compagnie de Pierre de Louvain, chambellan du roi, logée en partie à Sainte-Soline, prisonnier audit lieu à cause du meurtre de Pierre Beauvoir.

AN JJ. 190, n° 107, fol. 57 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Jehan Petitjehan, paige de Pierre de Commarque, homme d'armes de nostre ordonnance soubz nostre amé et feal chevalier et chambellan, Pierre de Louvain

Pierre de Louvain, vicomte de Berzy, chevalier, conseiller et chambellan du roi, puis maître de l'hôtel de Louis XI; capitaine d'une companie de soixante lances fournies des ordonnances, capitaine de la ville e Puy en 1444, il prit part à la bataille de Formigny et fut fait chevalier devant Fronsac, l'année suivante, 1451. II est connu surtout par le meurtre d'un célèbre capitaine, Guillaume de Flavy, gouverneur de Compiègne, dont il avait séduit la femme, Blanche d'Aurebruche, ou plutôt d'Overbreuc, vicomtesse d'Acy, née vers 1426, fille de Robert, sr de Francières. Mariée en premières noces, juillet 1436, avec ce Guillaume de Flavy et maltraitée par lui, elle se vengea en le faisant assassiner, le 9 mars 1449, de complicité avec son amant. Le 26 mai suivant, Pierre de Louvain et Blanche furent arrêtés, mais obtinrent des lettres de rémission qu'ils réussirent à faire entériner; ils furent remis en liberté le 14 novembre 1450, et Pierre de Louvain fut réintégré dans sa charge de capitaine. (M. Pierre Champion, La vie de Guillaume de Flavy. Positions des thèses soutenues à l'Ecole des Chartes par la promotion de 1905, in-8°, p.54.— Cette thèse vient d'être publiée à la librairie Champion).

Les deux complices contractèrent mariage et vécurent ensemble jusqu'au 15 juin 1464 ; à cette date, Pierre de Louvain fut à son tour « cruellement et inhumainement, d'aguet apensé et propos deliberé, murtry et occis » par Raoul et Hector de Flavy, frères de Guillaume, « en haine de certain procès pendant au Parlement entre ledit Pierre et sa femme, d'une part, et lesdits Hector et Raoul, d'autre ». Blanche d'Overbreuc restait chargée de huit petits enfants mineurs. Par lettres données à Saint-Valéry-sur-Somme, le 18 août 1464 ; Louis XI lui accorda délai et souffrance d'un an, pour faire les foi et hommage de ses terres et seigneuries. (Bibl. de l'Ecole des Chartes, t. XXXVII, année 1876, p. 60.) Dès le 9 septembre suivant, la veuve de Guillaume de Flavy et de Pierre de Louvain se maria pour la troisième fois et épousa Pierre Puy. (M. de Beaucourt, Blanche d'Aurebruche, vicomtesse d'Acy, et ses trois maris, article dans les Mémoires de la Soc. des Antiquaires de Picardie, t. XIX, 1863, in-8°, p. 401-423; J. Vaësen, Lettres de Louis XI, t. VIII, p. 59.)

, aagié de xviii. à xix. ans ou environ, natif de Solongne, contenant que, depuis six ou sept mois en ça, aucuns gens de guerre de la charge dudit Pierre de Louvain ont este logiez au lieu et bourgaige de Saincte Seuline en Poictou, et entre autres le maistre dudit suppliant, et que le lundi de Penthecoste derrenier passé, icelluy suppliant estant audit lieu de Saincte Seuline en

Poictou, luy, ung nommé grant Jehan Beauvoir, dudit

Saincte Seuline, et ung autre nommé Cartelot, autrement dit le Picart, semisrent à jouer à la paulme pour le vin, et quant ilz eurent assez joué, s'en alèrent boire à la taverne ; eulx estans à laquelle et après qu'ilz eurent bien beu, certaine noise et debat se meut entre eulx pour le paiement d'une pinte de vin, en telle manière que, après plusieurs parolles injurieuses dictes les ungsaux autres et à l'occasion d'icelles, ledit Picart bailla ung coup de dague audit grant Jehan Beauvoir et ledit Beauvoir pareillement frappa ledit Picart en la teste. Et ce voyant, ledit suppliant qui estoit compaignon dudit Picart en fut très mal content, et par ce frappa aussi ledit Beauvoir ung autre cop. Pendant lequel debat, survint ung nommé Pierre Beauvoir, frère dudit Jehan Beauvoir, qui estoit esleu roy d'une feste qu'on a acoustumé faire par chacun an en la parroisse de Saincte Soline ou diocèse de Poictiers, le landemain de la Penthecoste. Lequel Pierre Beauvoir, acompaigné de plusieurs autres, les departirent, et ce fait, s'en alèrent lesdiz Picart de Petitjehan à leur logeis, cuidant que la noise fust rapaisée, et comme ilz s'en aloient vers leur dit logis, sans plus penser audit debat, parce que ledit roy les avoit departiz, ledit grant Jehan Beauvoir les suivy et print une pierre en sa main, de laquelle il bailla par derrière entre les deux espaules audit suppliant ; lequel, quant il se senty ainsi frappé de ladicte pierre ruée par ledit Beauvoir, ala querir une espée, et en venant de querir icelle espée, ledit grant Jehan Beauvoir, en perseverant tousjours en sa malice luy bailla de rechief d'une autre pierre par la poictrine, et adonc ledit suppliant courut sus audit grant Jehan Beauvoir atout son espée nue, ledit Picart avecques luy, et ilec de chault sang et chaulde colle, tout atainéAtainer signifiait fâcher, chagriner. (Godefroy, Dict,. de l'anc. langue française.) des coups que ledit Beauvoir luy avoit donnez, en cuidant frapper ledit grant Jehan, frappa ledit Pierre Beauvoir, frère dudit grant Jehan, qui estoit de rechief survenu audit debat, pour aider sondit frère et garder qu'ilz ne se meffeissent, ung coup de ladicte espée, dont tantost après il ala de vie à trespassement. A l'occasion duquel cas, ledit suppliant a esté prins au corps par les officiers du seigneur de Saincte SolineLa seigneurie de Sainte-Soline relevait de la Tour Maubergeon et plusieurs hommages et aveux nous en ont été conservés. Après avoir appartenu à Louis d'Amboise, depuis vicomte de Thouars (aveu du 6 juin 1416, Arch. nat., R1* 2171, p. 219), elle passa entre les mains de Georges de La Rochefoucauld, seigneur de Barbezieux, fils de Jean, le célèbre sénéchal de Poitou, qui en fit hommage à Charles VII, par acte du 19 mai 1453. (Id., P. 5661, cote 2830.) Celui-ci étant mort sans postérité, le 10 avril 1457, sa sœur Marguerite hérita de tous ses biens et porta successivement Sainte-Soline à ses deux maris, Jean, seigneur de La Rochefoucauld, et Hardouin IX de Maillé, qui en fit aveu le 30 juillet 1477. (Id., P. 1145, fol. 153...) et par eulx constitue prisonnier ès prisons dudit lieu, où il est à present detenu en grant povreté et aventure d'estre pour ce executé par justice et finer ses jours miserablement, se noz grace et misericorde ne luy sont sur ce imparties. En nous humblement requerant que, attendu ce que dit est, que ledit cas est avenu de chault sang et chaulde colle, qu'il ne frappa sciemment ledit deffunct, ains cuidoit frapper sondit frère, qui l'avoit par avant deux foiz frappé de ladicte pierre, que, depuis qu'il est prisonnier, il a chevy et accordé pour la satisfacion de la mort dudit deffunct, avec les père et mère d'icelluy, à certaine somme de deniers, que en autres choses il a tousjours esté de bonne vie et renommée, sans avoir esté actaint d'autre cas, blasme ou reprouche, il nous plaise nostredicte grace luy impartir. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit Jehan Petitjehan, suppliant, avons le fait et cas dessusdit quicté, remis et pardonné. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou mois de juing l'an de grace mil cccc. soixante, et de nostre règne le xxxviiie.

Ainsi signé: Par le roy, à la relacion du conseil. J. de Reilhac. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXXXVII Juillet 1460

Lettres d'anoblissement en faveur de Michel Darrot.

AN JJ. 190, n° 132, fol. 71 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Karolus, Dei gracia Francorum rex. Ad perpetuam rei memoriam. Decens et juri consonum arbitramur illos nobilitatibus et aliis prerogativis muniri [quosMot omis. Ce texte présente d'ailleurs d'autres lacunes de même nature et des incorrections qui font supposer que le scribe ignorait le latin.] probos et fideles ac vita laudabili, morum honnestate aliisque virtutum insigniis decoratos adinvenit regia majestas. Sane licet dilectus noster Michel DarotFamille originaire de la Gâtine, dont le nom est écrit Darrot, Darot ou d'Arrot, sur laquelle on trouve un grand nombre de renseignements dans les archives du château de la Barre. (Invent. publié par A. Richard, t. I, p. 30 à 69.) Michel Darrot, seigneur de Beaufou et de la Poupelinière, était fils de Guillaume Darrot et de Louise, fille de Michel Baudouin, juge châtelain de Parthenay. Ces lettres d'anoblissement sont mentionnées, sous la date inexacte de 1450, dans un inventaire des titres de la famille publié par M. Richard. En 1453, Michel étant encore mineur, son père rendit aveu, en son nom, à la seigneurie de Vernay, pour l'hôtel de Vérines. Il servit comme homme d'armes du seigneur de Bressuire au ban de 1467. M. Richard (op. cit., p. 30) cite une quittance donnée par Michel Darrot à Nicolas Verdoys, son commis en Gâtine, de la somme de 6 livres 10 sols à valoir sur ce qu'il pouvait lui devoir par la fin et arrêt de ses comptes. Il avait épousé, par contrat du 2 mai 1457, Catherine Grignon, fille de Nicolas, écuyer, sr de la Pélissonnière, et de Jeanne Du Bois, dont il eut un fils et une fille, Louis et Marguerite. Sa seconde femme, Gillette Texier, lui donna encore un fils. Guillaume, sr de Boisdanne qui fut chef de la branche de la Fromentinière. Michel était décédé avant le 20 mars 1471, car à cette date le sénéchal de Pouzauges pourvut à la curatelle de ses enfants mineurs. Son fils aîné, Louis Darrot. époux de Catherine Olivier, rendit aveu en 1483 de la seigneurie de la Cotinière, paroisse de Secondigny, et, l'an 1491, de celle de la Poupelinière, paroisse d'Azay-sur-Thouët, relevant du prieuré de Parthenay-le-Vieux. (B. Ledain, La Gâtine historique, p. 396 et 400; Dict. des familles du Poitou, nouv, édit., t. III, p. 28.) libere condicionis et legitimo matrimonio procreatus, innobilibus parentibus traxerit vel sumpserit originem, verumptamen vita laudabilis, morum honnestas, vera erga nos eciam ipsius fidelitas et alie virtutes quibus personna ejus insignitur ipsum nobilem in suis actibus reddunt et nos inducunt ut erga eum ad gratiam reddamur liberales. Notum igitur facimus universis, presentibus et futuris, quod premissorum consideracione, eumdem Michaelem Darrot et ejus posteritatem et prolem masculinam et femininam, in legitimo matrimonio natam et nascituram, nobilitamus et de gracia speciali ex nostra certa sciencia, plena potestate et auctoritate regia, eos nobiles facimus et creamus, expresse concedentes ut ipse et tota ejus posteritas, nata et nascitura predicta, in omnibus suis actibus, in judicio et extra, ab omnibus pro nobilibus habeantur et reputentur, et habiles eos reddimus ut ipsi universis et singulis previlegiis, prerogativis, libertatibus et aliis juribus, quibus ceteri nobiles regni nostri [ex nobili genere] procreati, uti consueverunt et utuntur, gaudeant pacifice et fruantur; ipsum Michaelem et ejus posteritatem predictam aliorum nobilium, ex nobili prosapia seu stipite procreatorum, consortio aggregantes, licet ipse Michael ex nobili genere ortum non habuerit vel sumpserit originem, ut predictum est. Volentes insuper et concedentes ut idem Michael Darrot et ejus proles, nata et nascitura, dum et quociens voluerit, à quocumque milite cingulum milicie valeant adipisci, et feoda et res nobiles à nobilibus et quibuscumque aliis acquirere, et jam acquisita ac eciam acquirenda retinere et possidere perpetuo, absque eo quod ea vel eas, nunc vel futuro tempore, ignobilitatis occasione extra manum suam ponere vel alienare cogantur ; solvendo tantum nobis hac vice financiam moderatam. Quocirca dilectis et fidelibus nostris gentibus compotorum nostrorum et thesaurariis, senescallo Pictavensi ceterisque justiciariis et officiariis nostris, aut eorum locatenentibus, et eorum cuilibet, tenore presentium damus in mandatis quatinus nostris presentibus gracia et concessione ac nobilitacione dictum Michaelem et ejus posteritatem predictam, in legitimo matrimonio procreatam et procreandam, uti et gaudere plenarie et pacifice faciant et permittant, omni impedimento cessante seu amoto. Quibus ut perpetua, etc. Salvo,etc. Datum apud Montem Richardi, in mense julii anno Domini millesimo quadringentesimo sexagesimo, et regni nostri tricesimo octavo.

Sic signatum : Per regem, magistro Johanne BurelliJean,Bureau, sr de Monglat, trésorier de France et maître de l'artillerie. (Voy. nos t. VIIF, p. 472, note ; IX, p. 48, note 3, et ci-dessus, p. 84, note.) et aliis presentibus. De La Loère. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXXXVIII Juillet 1460

Rémission acordée à Pierre Couverte, demeurant au « Montet BarotPlus loin on lit : « ll se partit de son hostel de Montharot où il est demourant». Saint-Desier au diocèse de Limoges et comté de Poitou, c'est Saint-Dizier, canton de Bourganeuf, et Essarteaux est une commune du canton de Vallières (Creuse). en la parroisse de Saint Desier ou diocese de Limoges et conté de Poitou qui, conduisant trois chevaux chargés de sel à Felletin et ayant rencontré en route d'autres conducteurs, avait, comme ceux-ci, le soir venu, fait paître ses bêtes dans un herbage public, près d'Essarteaux. Trois hommes dudit lieu ayant voulu les empêcher, il s'en suivit une rixe au cours de laquelle l'un d'eux, nommé Petit Pierre, fut frappé mortellement. « Si donnons en mandement aux seneschaulx de Poitou et de Limosin, etc. Donné à Romorentin, ou moys de juillet l'an de grace mil cccc. soixante, et de nostre règne le xxxviiie ».

AN JJ. 190, n° 134, pl. 72 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

MCCCXXXIX Septembre 1460

Lettres de naturalité en faveur de Pierre de Sainte-Marthe, commis de Jean Hardouin, trésorier de France.

AN JJ. 190, n° 162, fol. 87 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de nostre amé Pierre de Sainte Marthe

La Chenaye-Desbois, Moréri, Dreux du Radier (Bibl. historique et critique du Poitou, t. V, p. 84 et s.), Beauchet-Filleau (Dict. des familles du Poitou, 1er édit., t. II, p. 660), sont d'accord pour faire remonter l'origine de cette illustré famille du Poitou à Nicole de Saint-Marthe, qui fut fait chevalier par le comte de Foix au siège de Bayonne en 1451, lui-même apparemment issu de Guillaume-Raimond de Sainte-Marthe, chevalier, seigneur de Roquebert, « qui servit le roi Philippe de Valois en 1350 et prenait en 1368 la qualité de messire et de chevalier... » On cite, à l'appui de cette filiation, l'épitaphe de Louis, soi-disant fils de Nicole, d'après laquelle il aurait accompagné Charles vin à l'expédition de Naples et serait mort en 1535. De toute évidence, ce texte a été rédigé longtemps après le décès de Louis de Sainte-Marthe (Dreux du Radier le reconnaît), et il ne peut faire foi ; même il serait permis de le tenir pour suspect. Si peu solides toutefois que soient les pré mières assises de la généalogie imprimée dans les ouvrages qui viennent d'être cités, nous ne pouvons avoir la prétention de nous inscrire en faux contre les allégations des auteurs en question, en nous basant sur les lettres de naturalisation de Pierre de Sainte-Marthe, que nous publions ici. Ce serait mettre une simple hypothèse à la place d'une affirmation qui paraît dénuée de preuve ; par conséquent le problème, si problème il y a, ne serait pas pour cela résolu. Quoique l'on puisse douter que le commis du trésorier de France se rattaché à i'illustre famille de Sainte-Marthe, il nous semble que nous ne devions pas écarter ce texte à priori. Comme nom de famille, celui de Sainte-Marthe est très peu répandu. On rappelle ici que Pierre était commis de Jean Hardoin, maître des comptes et trésorier de France, personnage important, qui possédait à Tours un hôtel où, dit M. de Beaucourt, il donna plus d une fois l'hospitalité à Charles vu. Les lettres de naturalité sont adressées au bailli de Touraine, dont faisait partie le Loudunais, et c'est dans cette région que se trouvaient les possessions de Louis de Sainte-Marthe, le premier de cette famille dont l'identité soit bien établie. Il n'est pas impossible qu'il y ait une correlation entre la légitimation de la fille naturelle de Jean Hardoin et la naturalisation de Pierre de Sainte-Marthe, qui sont de même date, et données l'une et l'autre à la requête d'Hardoin, dans le but peut-être de faciliter ou de régulariser un mariage. Enfin nous avons pensé que ces lettres pourraient servir de point de départ à de nouvelles recherches utiles, et c'est pourquoi nous les publions.

, contenant que lui, qui est estrangier et natif de hors nostre royaume, a puis vint ans ença et plus commence à fréquenter et converser en nostredit royaume et y a demouré comme serviteur et familier de nostre amé et feal conseiller Jehan Hardoin

Immédiatement à la suite de la naturalisation de Pierre de Sainte-Marthe, sont transcrites des lettres de légitimation en faveur de Marie, fille naturelle de Jean Hardoin, trésorier de France, sans mère désignée, avec mandement au bailli de Touraine. Même date : la Sallele-Roi en Berry, septembre 1460. « Per Regem, domino de Castrobruni et aliis presentibus. De Reilhac ». (JJ. 190, n° 163.) Jean Hardoin ou Hardouin, sr de Nozay, fut secrétaire et argentier du duc d'Orléans, comme on le sait par des actes des 6, 17 et 18 janvier 1442. (Bibl. nat., ms. fr. 27964, n°s 6-8.) Reçu maître des comptes le 7 décembre 1445, au lieu d'Etienne Bernard, il resta en exercice jusqu'au 30 mars 1461 n. s. A cette date, il obtint des lettres, lui permettant de résigner cet office au profit d'Àrnoul Boucher, sr d'Orsay, son gendre, et d'en continuer néanmoins l'exercice sa vie durant. (Anc. mém. L de la Chambre des comptes, toi. 158, et Coustant d'Yanville, La Chambre des Comptes.) Il était en même temps trésorier de France, qualité qu'il prend dans divers actes entre 1445 et 1466. Par lettres du 9 mars 1457 n. s., le duc d'Orléans lui fit un don de 100 livres « en faveur du roy de Sicile qui loge en mon hostel à Tours, pour luy aider à accomplir les ediffices de ma dicte maison ». En 1469, sa veuve et ses héritiers étaient en procès contre le procureur général, qui leur réclamait un fermaillet et deux sommes, l'une de 2i 27 livres et l'autre de 1600, qu'il devait au roi. Mandement de Louis XI à ce sujet, daté d'Amboise le 9 mars 1469 (ms. fr. 27.964, n°s 10-12). Voy. aussi notre vol. précédent, p. 334, note 4.

, trésorier de France, par bien long temps et fait encores de present, et combien que ledit suppliant, au moien de son service ait acquis en nostredit royaume pluseurs grandes congnoissances et bonnes amitiés, par quoy il ait bon vouloir de soy y retraire et faire sa continuelle residance et demeure le demourant de ses jours, toutesfois il craint de ce faire pour ce qu'il n'est pas de nostredit royaume, comme dit est, doubtant qu'il ne peust disposer de ses biens et que, s'il aloit de vie à trespas, sesdiz biens qui seroient à l'eure [de sa mort] en nostredit royaume feussent à nous appartenans par aubanage ou autrement, requerant humblement que sur ce lui vueillons impartir nostre grace. Pour quoy nous, attendu ce que dit est, voulans icelluy atraire en nostredit royaume, en faveur dés services qu'il a faiz à nostredit conseiller et trésorier, qui sur ce nous a fait requerir, audit Pierre de Sainte Marthe, suppliant, pour les causes et consideracions et autres à ce nous mouvans, avons octroyé et octroyons de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes,que lui etles siens puissent doresnavant demourer et faire leur résidence en nostredit royaume et acquerir en icellui biens meubles et immeubles, et iceulx tenir et possider, et en faire et disposer par testament ou ordonnance de dernière voulenté, ou autrement en quelque manière que ce soit, à leur plaisir, et que les enffans dudit de Sainte Marthe, suppliant, ou autres parens abilles à lui succeder puissent avoir la sucession et biens soit par mort, testament ou autrement, et joyssent doresnavant de telles franchises et libertez, comme s'il estoit natif de nostredit royaume, sans ce que, à cause de ce qu'il est estrangier, sesdiz biens soient ne puissent estre dictz ou reputez aubains, ne que en nostre royaume aucune chose [ne leur puisse estre] demandée, en quelque manière que ce soit. Et quant à ce imposons silence perpetuel à nostre procureur, en nous paiant toutesvoyes pour ce par ledit suppliant finance mouderée et raisonnable pour une fois. Sy donnons en mandement, par cesdictes presentes, à noz amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers, au prevost de Paris, bailliz de Touraine et de Berry et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chacun d'eulx, si comme à lui appartendra, que ledit suppliant et les siens facent, seuffrent et laissent joir et user plainement et paisiblement de nostre presente grace et octroy, sans leur faire, mettre ou donner ne souffrir estre fait, mis ou donné, ores ne pour le temps avenir, à ceste cause, aucun destourbier ou empeschement au contraire, en quelque manière que ce soit ; ainçois, se fait, mis ou donné leur estoit, ilz l'ostent et facent oster et mettre chacun en droit soy, sans delay, au premier estat et deu. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à la Salle le Roy en Berry, ou mois de septembre l'an de grace mil cccc. soixante, et de nostre règne le xxxviiime.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil et autres presens. De Reilhac. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXL Novembre 1460

Rémission octroyée à Louis Blanchart, préposé de l'abbaye au passage de Moreilles, prisonnier audit lieu pour le meurtre de Jean Bénart, marchand de Sigournay.

AN JJ. 190, n° 190, fol. 105 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Lois Blanchart, filz de Jehan Blanchart, povre jeune homme de labour, de l'aage de vint et six ans ou environ, contenant que puis aucun temps ença les religieux, abbé et convent de Pabbaie de MoureillesMoreilles ou Moureilles, paroisse Sainte-Radegonde-des-Marais. L'abbaye royale, fille de Clairvaux, placée sous le patronage de Notre-Dame, existait dès l'an 1109 et valut à un moment jusqu'à 20.000 livres de revenu. Ruinée pendant les guerres de religion, son église fut reconstruite, en 1699, par Denis Gédouin, prieur de Moreilles. Il ne reste plus de cette abbaye qu'un vaste enclos, un mur de l'église et les écuries. En 1459, l'abbé était Guillaume II, que la Gallia christiana ne nomme même pas et sur lequel M. l'abbé Aillery, qui le cite, ne donne aucun autre renseignement que cette date. (Pouillé des diocèses de Luçon et de Maillezais, p. 141.) ou diocèse de MaillezaisLe copiste du registre a écrit « Mellerans » au lieu de Maillezais. acuillèrent à varlet et serviteur ledit Blanchart, à estre passager et les servir en cellui office et autrement à certain port et passaige qu'ilz ont audit lieu de Moureilles, où les marchans du païs de Poitou passent pour aller à la Rochelle ; lequel suppliant estant, ung certain jour puis six sepmaines ença, audit port pour passer les passans, vit de loing venir de devers la Rochelle cinq ou six marchans, avecques leurs chevaulx chargez de fer et autres marchandises, tirans vers ledit port, comme il sembla audit suppliant ; et quant ilz furent à demy quart de lieue ou environ dudit port, il apperceut qu'ilz prindrent ung chemin qui tiroit droit à passer par la chenau le roy, où il n'y a point de passage ne de chemin où l'on ait acoustumé de passer, en delaissant ledit port. Pourquoy ledit suppliant tira vers lesdiz marchans tant qu'il peut et parla à eulx, ainsi qu'ilz s'efforçoient de passer, avec lesdiz chevaulx et marchandises par ladicte achenau, laquelle lesdiz religieux, abbé et convent dudit lieu de Moureilles et phasieurs autres gens d'eglise et autres sont tenuz de tenir en estat et repparacion deue et convenable pour la tuicion et garde du bien publique du païs, et leur dist et remonstra par doulces parolles que illec où ilz vouloient passer n'y avoit point de chemin ne de passage ne acoustumé de y en avoir en saison et temps quel qu'il soit, et que à y faire chemin et passaige ce seroit à destruire et desmolir ladicte achanau, qui est faicte et tenue en point pour recevoir les eaues qui y abondent, pour ce que c'est païs de marais, où toutes eaues du païs se abreuvent ou temps d'iver et par chacun an decourent par ledit achenau à la mer qui est près d'illec. Lesquelz marchans, entre lesquelz estoit ung nommé Jehan Benart, s'eslevèrent contre ledit suppliant et jurèrent le sang Dieu plusieurs fois qu'ilz passeroient par ladicte achenau et ne laisseroient point [pour] lui. Et ledit suppliant jura semblablement qu'ilz n'y passeroient point et qu'ilz viendroient passer audit passaige, où ilz avoient acoustumé de passer. Et lors les aucuns d'iceulx marchans prindrent des barres de fer dont estoit chargez lesdiz chevaulx et les autres prindrent d'autres bastons, et en jurant comme dessus disoient que, voulsist ou non ledit suppliant, ilz passeroient par ledit achenau, en donnant plusieurs menaces audit suppliant, si se mettoit au davant d'eulx et deleursdiz chevaulx, qu'ilz le batroient et villeneroient du corps, comme ilz s'efforçoient faire. Pour lesquelles menaces, ledit suppliant se contregarda d'eulx au mieulx qu'il peut, combien qu'il feust tout seul, et se deffendit très fort, pour ce que lesdiz marchans estoient fort esmeuz contre lui, et en se deffendant frappa d'une forche qu'il tenoit en ses mains, dont il boutoit le vesseau audit port, l'un desdiz marchans, ne scet lequel, mais ledit Benart print ladicte forche et la tint très fort, tellement que ledit suppliant ne la lui povoit oster. Ce voiant, icellui suppliant, doubtant que lesdiz autres marchans, compaignons dudit Benart, le blessasse ou feissent pis, tira ung sien cousteau qu'il avoit au cousté, pendant à sa sainture, qui estoit de longueur d'un pié et demy ou environ, et en frappa ung coup ledit Benard en ung des bras et le blessa, ne scet en quelque (sic) part, mès en yssit grant effusion de sang, et après ledit suppliant laissa aller ladicte forche audit Jehan Benard. Et quant ledit Benard se vit ladicte forche, il s'efforceoit de courir sus audit suppliant, non obstant qu'il feust blecié comme dit est. Et alors ledit suppliant cria à l'aicle à haulte voix, en soy recullant et fuyant en arrière, pour doubte de sa personne et que ledit Benard et ses compaignons marchans ne le tuassent ou feissent desplaisir. Auquel cry survint ung nommé Macé Compaignon, aussi commis audit passaige de Moreilles, tenant une autre forche que print ledit suppliant pour se deffendre et resister contre lesdiz marchans, qui le suivoient très fort et de près pour lui faire desplaisir et dommaige, et de ladicte forche icellui suppliant frappa sur l'un desdiz marchans, ne scet sur lequel, tellement qu'il rompit ladicte forche. Et pendant ce que lesdiz marchans et ledit suppliant estoient illec à eulx combatre comme dit est, survint ung des religieux de ladicte abbaye de Moreilles, nommé frère Pierre Berry, qui les blasma de ce qu'ilz faisoient et les seppara, et fist tant avecques ledit suppliant qu'il gecta la partie dudit forche rompu, qu'il avoit entre ses mains. Alors ledit Benart, qui estoit blessié, s'esbayt pour ce qu'il avoit perdu du sang largement pour ladicte playe et blesseure, requist confession audit religieux, lequel Poyt de confession, et après ledit Benard, marchant blessié, et sesdiz compaignons alèrent passer audit port de Moureilles, et les passèrent lesdiz religieux et Macé, et eulx ainsi passez, fut ledit Benard mis sur ung cheval par sesdiz compaignons et mené jusques au lieu du Maigny, où illec il fut pancé par ung barbier et d'illec fut mené par ses parens et amis à son hostel ou lieu de Sigornay, où il estoit demourant. Après, par faulte de bon gouvernement ou autrement, est, quatre ou cinq jours après, allé de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant a esté constitué prisonnier ès prisons dudit lieu de Moreilles, par les gens de la justice, et illec estroictement tenu ; et doubte que l'on vueille proceder contre lui rigoureusement, par pugnicion corporelle ou autrement, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, si comme il dit, requerant humblement que, attendu ledit jeune aage dudit suppliant, que ledit cas est avenu de chaude colle en corps deffendant et gardant le droit dudit passaige et que en tous autres cas il a tousjours esté de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans jamais avoir esté actaint ne convaincu d'aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise lui impartir nosdictes grace et misericorde. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant ou cas dessusdit avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, etc. Donné à Bourges, ou mois de novembre l'an de grace mil iiiic soixante, et de nostre règne le xxxixme.

Ainsi signé : Par le roy, a la relacion du conseil. Froment. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXLI Novembre 1460

Permission à Jean de Mondon, écuyer d'écurie du comte du Maine, de fortifier son château des Coutaux en Poitou.

AN JJ. 190, n° 202, fol. 110 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de nostre bien amé Jehan de MondonCe personnage appartenait probablement à la famille de Mondion, dont le nom est écrit aussi Mondeon. Mondion (auj. commune du canton de Leigné-sur-Usseau) était le siège d'une châtellenie relevant de la baronnie de Marmande, qui fut possédée jusqu'au milieu du XVe siècle par la famille du même nom. Tristan L'Hermite, grand prévôt de Louis XI, en fut ensuite seigneur à cause de Guillemette de Mondion, sa femme. (L'abbé Lalanne, Hist. de Ghâtelleraud et du Châtelleraudais, t. I, p. 448.) Des branches de cette famille étaient établies depuis longtemps dans le Loudunais. On cite un Jean de Mondion, seigneur de Mépied, écuyer, qui eut de Marie Bausson, son épouse, Guillaume et Jean. Ceux-ci transigeaient, le 20 août 1492, au sujet de la succession de leur mère. (Dict. des familles du Poitou, 1re édit., t. II, p. 391.) Rien n'indique d'ailleurs que ce Jean doive être identifié avec l'écuyer d'écurie du comte du Maine ; nous ne le mentionnons que par suite du rapprochement chronologique. escuier d'escurie de nostre très chier et très amé frère et cousin le conte du MaineCharles d'Anjou, comte du Maine, vicomte de Châtellerault, seigneur de Saint-Maixent, Melle, Civray, Chizé, Sainte-Néomaye, lieutenant du roi en Poitou, etc., mort le 10 avril 1473. (Voy. nos tomes VIII, p. 146 ; IX, p. 12, et passim.) contenant que à lui compette et appartient le lieu, terre et seigneurie des Cousteaux assis ou païs de Poictou ; auquel lieu il a commence à faire certaine fortifficacion et emparement, en entencion desoy y retraire et ses biens ; laquelle fortifficacion il feroit voulentiers parachever, mais il doubte que, sans avoir sur ce noz lettres de congié de ce faire, nostre procureur voulsist proceder à la demolicion et desemparacion d'icelle place, ou lui donner sur ce aucun troublé ou empeschement ; laquelle chose seroit en son très grant grief, prejudice et dommaige, ainsi qu'il nous a fait dire et remonstrer ; requerant humblement que, attendu ce que dit est, il nous plaise ledit emparement par lui ainsi fait faire avoir agreable et sur ce lui impartir nostre grace. Pour ce est il que nous, ces choses considerées et les bons services que ledit exposant nous a faiz, tant ou fait de noz guerres que autrement, et pour certaines causes à ce nous mouvans, nous, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, avons eu et avons ladicte fortifficacion ainsi faite par ledit suppliant audit lieu des Cousteaux pour agreable, et de plus ample grace lui avons octroié et octroions par ces presentes qu'il puisse parachever ledit emparement et fortifficacion et faire en icelle place ou forteresse pons levéis, tours, eschiffes, barbacannes, palliz, fossez et tous autres emparemens et fortifficacions necessaires et appartenans à fait de fortifficacion que bon lui semblera, pourveu que, nonobstant ladicte fortifficacion, ceulx de ladicte place ne laissent à faire guet et garde ou d'ancienneté et par avant icelle fortifficacion ilz estoient tenuz ou avoient acoustumé de le faire, sinon toutesvoies que ce procedast du gré et consentement de cellui ou ceulx à qui la chose touche. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poitou ou à son lieutenant, et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chacun d'eulx, si comme à lui appartiendra, que se, appellé nostre procureur, il leur appert ladicte fortifficacion n'estre dommageable à la chose publique du païs, ilz facent, seuffrent et laissent ledit suppliant joir et user plainement et paisiblement de noz presens grace, congié et licence, sans lui faire, mettre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné, ores ne pour le temps avenir, aucun destourbier ou empeschement au contraire ; pourveu aussi que le seigneur feodal dudit lieu des Cousteaux à ce se consente, et que icellui suppliant sera tenu de garder ou faire garder icelle place bien et seurement, en manière que aucun inconvenient n'en aviengne à nous ne à noz subgietz du païs d'environ. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Bourges, ou mois de novembre l'an de grace mil iiiie soixante, et de nostre règne le xxxixme.

Ainsi signé : Par le roy, de Reilhac. —Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXLII Décembre 1460

Lettres autorisant le chapitre de Sainte-Radegonde de Poitiers à instituer à Vouillé un marché, le mardi de chaque semaine

L'original de ces lettres de Charles VII est conservé dans les archives du chapitre de Sainte-Radegonde de Poitiers (une copie s'en trouve dans la coll. dom Fonteneau, t. XXIV, p. 197), ainsi qu'une déclaration du même roi, portant qu'il ne sera tenu aucun compte de l'opposition faite par Jacques Vernon, seigneur de Montreuil-Bonnin, à établissement de ce nouveau marché. (Arch. de la Vienne, G. 1380.) Les seigneurs de Montreuil-Bonnin ne laissaient échapper aucune occasion de soulever des conflits avec les chanoines pour tout ce qui concernait Vouillé et de faire valoir les droits qu'ils prétendaient sur les habitants de ce bourg. (Cf. ci-dessus, p. 250, note.) L'année précédente, le chapitre de Sainte-Radegonde avait obtenu du roi des lettres lui permettant de continuer a lever pendant quatre ans le dixième du vin vendu en détail dans la paroisse de Vouillé, pour en employer le produit à l'achèvement et à l'entretien des fortifications du bourg. (Id. G. 1438.) Rappelons que nous avons publié dans un de nos précédents volumes les lettres d'institution par Jean duc de Berry, comte de Poitou, de quatre foires annuelles et d'un marché le vendredi de chaque semaine à Vouillé, au mois de février 1377 n. s., avec la confirmation de Charles VI, datée d'octobre 1386. (Arch. hist. du Poitou, t. XXI, p. 307315.)

AN JJ. 189, n° 477, fol. 267 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, que comme dès l'an mil cccc.lv, nos bien amez les prieur et chappitre de l'esglise Saincte Ragonde de Poictiers eussent de nous obtenu nos lettres dont la teneur est telle :

Charles, par la grace de Dieu roy de France, à nos amez et feaulx gens de nos comptes et tresoriers à Paris, salut et dilection. Nos bien amez les prieur et chappitre de Saincte Ragonde de Poictiers nous ont fait exposer que, entre les autres choses, terres, dommaines et seigneuries, ilz sont seigneurs du lieu et bourg de Vouillé, assiz en nostre pays de Poictou, à trois lieues près de nostredicte ville de Poictiers, ou quel lieu de Vouillé ilz ont toute justice et juridicion, et est lieu commun, assiz en pays fertil et y a bon et grant bourg et forteresse, et que, se le marché y estoit au jour du mardi chacune sepmaine, consideré que à six lieues près dudit lieu de Vouillé n'a aucun marché audit jour, ce seroit le proffit du pays d'environ icellui lieu et des aides ordonnées pour la guerre, ainsi qu'ilz dient, en nous humblement requerant icelluy marché leur estre par nous octroyé. Pourquoy nous, eu regart à ce que dit est, voulans en ce meurement proceder, vous mandons et commettons, se mestier est, que par vous ou les commis et depputez à ce vous vous informez bien et diligemment de et sur ce que dit est et du proffit ou dommaige qui pourroit ensuir, se ledit marché estoit octroyé audit jour, et l'informacion qui faicte sera sur ce veez et visitez diligemment, en pourvoyant ausdiz exposans de par nous et faisant sur l'octroy dudit marché, ladicte informacion veue, ainsi que verrez appartenir et estre à faire. Et nous mandons à tous nos justiciers, officiers et subgez que à vous et à vosdiz commis et depputez, en ce faisant, obeissent et entendent diligemment. Donné au Bois sire Amé, le xxe jour de juing l'an de grace mil cccc.lv, et de nostre règne le xxxiiie.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. A. Roland.

Pour faire informacion sur le contenu desquelles lettres et sur le proffit et dommaige qui pourroit ensuir en l'octroy dudit marché, et ainsi pour le crier et publier et faire ainsi que en tel cas est acoustumé faire, nos amez et feaulx les gens de nosdictz comptes, ausquelz elles furent présentées, eussent descerné et baillé leurs lettres de commission, atachées à icelles soubz leurs signetz, en la forme qui s'ensuit :

Les gens des comptes du roy nostre sire à Paris, au seneschal de Poictou ou à son lieutenant, salut. Par vertu des lettres royaulx ausquelles ces presentes sont atachées soubz l'un de nos signetz, impetrées et à nous présentées de la partie des prieur et chappitre de Saincte Ragonde de Poictiers, faisans mencion d'un marché chacune sepmaine au jour de mardi, qu'ilz requièrent avoir au lieu et bourc de Vouillé ou pays dé Poictou, pour les causes et consideracions contenues èsdictes lettres, et afin que puissions plus seurement proceder à l'expedicion d'icelles, comme de raison, nous vous mandons et commettons par ces presentes que, appeliez avec vous les procureur et receveur du roy nostre dit seigneur en ladicte seneschaucie et ung ou deux des esleuz sur le fait des aides ordonnées pour la guerre oudit pays de Poictou, ou leurs lieuxtenant ou subtitud, vous vous informez bien et diligemment, avec gens nottables et dignes de foy, tant de ladicte ville de Vouillé comme des villes d'environ, si proffitable chose seroit pour le roy nostredit seigneur et pour le bien publique du pays que en ladicte ville fust ledit marché, en quoy et comment seroit ledit proffit, et se aucun dommaige ou prejudice s'en pourroit ensuyr audit seigneur, au bien publique, ou aux seigneurs et villes ayans marché environ ladicte ville, et si les drois, devoirs et dommaine du roy nostredit seigneur en seroient aucunement diminuez ou retardez, et des cas et causes pour quoy et en quoy ce pourroit estre. Et aussi sachez et enqueréz quelz marchez sont environ ladicte ville, à quatre ou six lieues prés d'icelle de tous costez, à qui sont lesdiz marchez et en quelz jours ilz sieent, et semblablement se, à quatre ou six lieues à l'environ, a aucunes villes et lieux appartenans au roy nostredit seigneur, èsquelz ledit marché peust estre plus convenablement mis pour le bien et utillité dudit seigneur et du pays d'environ, que en ladicte ville de Vouillé. Et afin que ceulx à qui ce touche n'en puissent pretendre ygnorance, faictes publier ès lieux acoustumez afaire criz ès villes voysines, à six lieues près d'icelle ville, lesdictes lettres royaulx et ces presentes, en faisant savoir par ladicte publicacion que, se aucun veult contredire, empescher ou soy opposer à ce que ledit marché ne soit octroyé, voyse ou envoye par escript, par devers vous, les causes d'opposition, contredit ou empeschement, dedans ung mois au plus tart après ladicte publicacion, afin que, icelles veues avecques l'informacion que ferez comme dit est, nous la renvoyrez feablement close et scellée, avec vostredit adviz et desdiz procureur, receveur et esleuz, ou leursdiz lieutenans et substitud, le plus tost que bonnement pourrez, afin que puissons pourveoir au seurplus cofcme de raison. Donné à Paris, le xe jour de juillet l'an mil cccc.lviii. — Ainsi signé : J. de Badovillier.

Par vertu desquelles lettres et en ensuivant la teneur d'icelles, ladicte information et lesdictes publicacions aient esté faictes et envoyées en forme deue et feablement closes par devers nosdictes gens des comptes, par lesquelles elles aient esté veues bien au long au bureau en la chambre d'iceulx comptes, et par icelles et par l'adviz de noz bien amez maistres Hugues de Conzay

Sauf la filiation de quatre degrés au XVe siècle et au commencement du XVIe, on ne possède point de généalogie de cette famille originaire de Saint-Maixent. Le plus connu de ses membres est Hugues, nommé ici et que l'on trouve mentionné plusieurs fois déjà dans les notes de notre précédent volume. On n'a point de renseignements sur son père, dont on ne connaît même pas le prénom ; on sait seulement qu'il avait épousé Guillemette Eschalard, fille de Robert, écuyer, sr de Maillé, et de Jeanne Rousseau, sa seconde femme, alors qu'elle était veuve de Guillaume Poussard, sr des Guerruces en la châtellenie de Saint-Maixent. Hugues apparaît pour la première fois, le 21 juin 1422, dans un acte de partage de la succession de son oncle, Nicolas Eschalard, conseiller au Parlement de Poitiers, décédé sans alliance. (Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. II, p. 605.) Son nom figure ensuite, parmi les notables habitants de Saint-Maixent, dans un accord entre l'abbaye et la ville, au sujet de la contribution de la première à l'entretien des fortifications, le 24 octobre 1427. (A. Richard, Chartes de l'abbaye de Saint-Maixent ; Arch. hist. du Poitou, t. XVIII, p. 216.) Le 5 juillet 1434, il assistait dans cette ville, comme témoin, au contrat de mariage de Maurice Claveurier, lieutenant général de la sénéchaussée de Poitou, avec Louise, fille de Simon Eschalard, sr de Maillé. (A. Richard, Arch. du château de la Barre, t. I, p. 13.) Peut-être à cette date exerçait-il déjà les fonctions de lieutenant du sénéchal de Poitou à Saint-Maixent; une sentence qu'il avait rendue en cette qualité contre Mathurin Arembert fut portée en appel au Parlement de Poitiers. Acte du 24 mai 1436. (Arch. nat., X2a 21, à la date.) En tête du registre des grandes assises de la châtellenie de Bressuire de 1445 à 1447 et au commencement du suivant, qui comprend les années 1448-1451, Hugues de Couzay s'intitule licencié en lois, conseiller du roi en sa comté de Poitou, lieutenant du sénéchal de Poitou au siège de Niort, et sénéchal en la châtellenie de Bressuire. (Arch. des Deux-Sèvres, chartrier de Saint-Loup, E. 1698,1700.) Il remplaça ensuite Maurice Claveurier dans sa charge de lieutenant général de la sénéchaussée de Poitou ; MM. Beauchet-Filleau disent des 1448, mais nous croyons que c'est par suite d'une interprétation fautive d'un passage de l'inventaire des archives de la ville de Poitiers. Maurice Claveurier mourut à la fin de mai ou dans les premiers jours de juin 1455 ; son codicille est du 17 mai (Arch. de la Barre, t. I, p. 15), et nous avons vu précédemment qu'un acte du 6 juillet 1455 le mentionne comme décédé (voyez notre t. VIII, p. 42, note). Il ne conserva sans doute pas jusqu'à la fin de sa vie les fonctions de lieutenant-général. Hugues de Conzay paraît en avoir été pourvu vers le milieu de 1450. Ce qui est incontestable, c'est qu'il s'intitulait lui-même « lieutenant de Poitou » lorsqu'il fut élu maire de Poitiers (juillet 1451). On conserve aux archives de Poitiers le compte des deniers dépensés pendant qu'il remplissait cette charge (1451-1454), pour les réparations et autres affaires de la ville, et la mention de la somme qui lui fut allouée, le 14 janvier 1452 n. s., pour être allé, en compagnie d'André Vernon, à Châtellerault conférer avec Charles d'Anjou, comte du Maine, lieutenant de Charles vit en Poitou, au sujet de la navigation du Clain, de la création d'un Parlement à Poitiers et des autres intérêts de la municipalité. (Arch. comm. J. 1166 et 1183.) Ce compte a été publié par Berger de Xivrey (Bibl. de l'Ecole des Chartes, t. I, p. 229). La clôture des comptes de Jean Boylesve (1448-1455),et de Jean de La Fontaine(1456-1462), que Conzay présidait en qualité de lieutenant général de la sénéchaussée, eut lieu pour le premier en 1456 seulement, et pour le second, le 25 février 1465 (Id., K. 6 et 7).

Le procès intenté par Etienne Boynet au Parlement à Hugues de Conzay et la condamnation à une amende de 500 livres qui lui fut infligée, par arrêt du 3 septembre 1468 (voy. notre vol. précédent, p. 272, note), pour avoir abusé de son pouvoir judiciaire au profit de Jean Chévredent, procureur du roi en Poitou, et au préjudice dudit

Boynet, attrista ses derniers jours. Nous n'entrerons point dans le détail de cette affaire qui exigerait un trop long développement, nous contentant d'ajouter que Conzay refusa de se soumettre à l'exécution de l'arrêt et que la cour dut envoyer plusieurs mandements pour l'y contraindre, le 1er et le 16 décembre 1468 et le 21 janvier 1469. Quand ce dernier arriva à Poitiers, Hugues de Conzay venait de mourir (son décès n'eut donc point lieu en 1466, comme on le dit dans le Dict. des familles du Poitou), et le 10 mars une nouvelle injonction fut adressée à ses enfants et héritiers. (Arch. nat., X2a 36, fol. 180 v°, 186, 194 v° et 210 v°.) Quatre ans plus tard, une somme de 243 livres était encore due à Etienne Boynet, qui obtint de nouvelles contraintes contre les héritiers du défunt, le 13 avril 1473 et le 29 mars 1474. Ceux-ci sont ainsi désignés dans les mandements de la cour : André et Jean de Conzay, fils alors vivants de Hugues ; Pierre Roigne et Jeannette de Conzay, sa femme, et Jean de Conzay, gendre, fille et fils de Louis de Conzay, autre fils, alors décédé, de Hugues; Guillaume Chauvin et Perrette de Conzay, sa femme; Léonard de Janoilhac et Liète de Conzay, sa femme, et Marguerite de Conzay, veuve, à cette date, de feu Jacques Roigne. Cest donc six enfants (et non trois, comme le disent MM. Beauchet-Filleau), qu'avait eus Hugues de Conzay, trois fils : André, Jean et Louis, et trois filles : Jeanne, femme de Pierre Roigne, Liète, femme de Léonard de Janoilhac, et Marguerite, femme de Jacques Roigne. Le nom de leur mère ne nous est pas connu. C'est sans doute Louis de Conzay, le troisième fils d'Hugues, qui fut échevin et maire de Saint-Maixent en 1448 (A. Richard, Recherches sur l'organisation communale de Saint-Maixent, p. 427, 439), sénéchal de ladite ville pour le comte du Maine, qui en était seigneur, en 1452. L'hôtel des Conzay à Poitiers était situé rue de la Regratterie ; l'on voit aussi que le chapitre de Notre-Dame-la-Grande avait arrenté à Hugues de Conzay le fondis de Château-Gaillard, dans la rue allant du four Notre-Dame au Pilori. (Arch. de la Vienne, G. 1128.)

lieutenant de nostredit seneschal de Poictou, et l'un des esleuz sur le fait desdic- les aides, Jehan ChevredensSur Jean Chévredent, procureur du roi en la sénéchaussée de Poitou, voy. ci-dessus, p. 218, note., nostre procureur, et Jehan Besuchet

Jean Bésuchet, notaire et secrétaire du roi, était probablement le fils d'un secrétaire du duc de Berry, de même prénom, que l'on trouve mentionné dans un acte du Parlement du 29 novembre 1404. (Arch. nat. X1a 52. fol. 291.) Dès le 15 juin 1434, il est dit receveur des nouveaux acquêts au pays de Poitou, dans un mandement de Charles VII, lui ordonnant de payer la somme de cent réaux d'or à maître Jean Rabateau, président en la Chambre des comptes, pour ses gages de commissaire sur le fait desdits nouveaux acquêts. (H. Daniel-Lacombe, L'hôte de Jeanne d'Arc à Poitiers, maître Jean Rabateau, Paris-Niort, 1895, in-8°, p. 90.) Cependant, par lettres patentes données à Montpellier, le 18 mars 1437 n. s., Bésuchet fut commis à la recette des francs-fiefs et amortissements en Poitou, Saintonge et gouvernement de la Rochelle, en remplacement de Jean Gillier, «puis naguères décédé». (Original, Bibl. nat., Chartes royales, ms. fr. 25710, n° 105.) Il s'agit sans doute de deux offices distincts. Le 19 mars 1445 n, s., il était en compagnie de Jean François, marchand de Poitiers, commissaire ordonné en la ville et châtellenie de Poitiers, « à lever la porcion impôsée pour partie de l'aide presentement mise sus ou païs de Poictou, tant pour l'entretenement des gens d'armes et oster la pillerie, que autres causes ». Nous avons un mandement de ces deux commissaires à Pierre Poyteau et Jean Mouraut, collecteurs de Nieuil-l'Espoir, leur faisant savoir que ladite paroisse a été taxée à 42 livres et leur enjoignant d'asseoir ladite somme sur eux et les autres habitants du lieu, le plus également et le plus diligemment que faire se pourra, et d'en apporter auxdits commissaires, la moitié au 1er avril prochain et l'autre moitié au 1er août suivant. (Copie du 22 octobre 1446 ; Arch. nat., K. 2378, n° 17.) Jean Bésuchet fut ensuite pourvu de l'office de receveur ordinaire du roi en Poitou, comme on le voit ici. Des mandements à lui adressés et des quittances à lui délivrées, les 20 août 1451, 1er juillet 1452, 8 janvier, 8 et 31 juillet 1454, lui donnent cette qualification. (Bibl. nat., Pièces orig., vol. 246, nos 51, 53, 56, 60-65.)

nostre receveur ordinaire oudit pays de Poictou, escript en la fin des informacions, leur soit apparu que l'octroy et institution dudit marché n'est en riens prejudiciable à nous ou à aucuns des seigneurs d'environ ledit lieu de Vouillé, ne à la chose publique du pays, et aussi leur soit apparu que nosdictes lettres dessus transcriptes ont esté publiées etsigniffiées par cry publique ès villes de Poictiers, Lezignen, Coussay et la Farière estans à l'entour d'icelle de Vouillé, ès lieux et ainsi qu'il est acoustumé y faire criz ; à quoy aucun ne s'est opposé ne apparu contredisant. Nous, pour consideracion des choses dessusdictes et par l'adviz et deliberacion de nosdictes gens des comptes, avons ausdiz prieur et chappitre de l'eglise Saincte Ragondede Poictiers octroyé et octroyons, par la teneur de ces presentes, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, et moyennant la somme de quarante une livres cinq solz tournois, laquelle ilz seront tenuz payer avant tout euvre au changeur de nostre tresor, pour une foiz seulement, que audit lieu et bourg de Vouillé, à eulx appartenant, soit desoresmais tenu ledit marché par chacun jour de mardi à tousjours perpetuelment, et que tous marchans et autres y puissent aler et venir, distribuer, vendre, acheter et eschanger toutes manières de denrées et marchandises, licites et non deffendues, tout ainsi que on fait et [a] acoustumé de faire ès autres marchez de nostre royaume, enpayant nos aides et autres droiz. Si donnons en mandement à nostredit seneschal de Poictou et à tous nos autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d'eulx, si comme à luy appartendra, que nostre present octroy facent signiffier et publier, se requis en sont, ès lieux et ainsi qu'ilz verront estre à faire, et d'icelluy facent, seuffrent et laissent joyr et user paisiblement lesdiz prieur et chappitre et tous autres à qui ce pourra toucher, en ostant et faisant oster, sans delay, tout ce qui seroit fait ou donné au contraire. Car ainsi nous plaist il estre fait. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l'autruy en toutes. Donné à Paris, ou moys de decembre l'an de grace mil cccc. soixante, et de nostre règne le xxxixe.

Ainsi signé : Par le conseil estant en la chambre des comptes. J. de Badoviller.

MCCCXLIII Mars 1461

Rémission accordée à Michel Ravary, qui avait fait usage d'une obligation fausse, dans un procès qu'il soutenait, devant le lieutenant du sénéchal de Poitou à Lusignan, contre Pierre Girault, de Poitiers.

AN JJ. 189, n° 500, fol. 282 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de Michel Ravary, povre homme de labour, chargé de femme et de cinq petiz enfans, contenant que jà pieçà il presta à ung appellé Bertrand Babineau la somme de lix. royaulx xv. solz tournois, et pour ce que de ladicte somme n'avoit acteLe registre porte « saite » au lieu d'acte. ne obligacion dudit Babineau, se transporta en nostre ville de Poictiers èt se tira par devers ung jeune clerc nommé Regn[aut] auquel il soy conseilla et comme il se aideroit de ladicte somme et en pourroit estre payé dudit Babineau, attendu que d'icelle n'avoit lettre ne obligacion ; lequel Regn[aut] luy respondi qu'il ne s'esmayastS'émouvoir, s'inquiéter, s'effrayer. (Godefroy, Dict. de l'anc. langue franc., v° Esmaier.) point et que, s'il luy vouloit donner ung bon bonnet du pris d'un escu, qu'il lui feroit bien sa besoigne ; auquel Regn[aut] ledit suppliant qui estoit et est simple homme de labour et non cuidant mal faire, luy donna ung escu, et tantost après ledit Regn[aut] bailla audit suppliant unes lettres obligatoires de ladicte somme de cinquante neuf royaulx xv. solz tournois, signées des seings et signatures de feu Pierre Vaslin et Marquis Fouscher, prebstres et notaires, et seellées en forme autentique. Et après ce, ledit suppliant se tira par devers ung nommé Jehan ChallesCe sergent du roi « mal famé et renommé » pourrait bien être le même que Jean Charles, qualifié déjà a nostre sergent », qui avec sa femme et son beau-frère, Huguet Goyn, archer de l'ordonnance, demeurant à Pamproux, s'était rendu coupable du meurtre d'un homme d'armes nommé Jean de Poitou, et à la suite avait obtenu des lettres de rémission au mois de janvier 1449. (Voy. notre vol. précédent, p. 110-114.) soy disant nostre sergent, qui, ainsi que l'en dit, estoit mal famé et renommé, duquel il acheta unes lettres de debitis du seneschal de Poictou ou dé son lieutenant. Depuis lesquelles choses ainsi faictes, ung nommé Pierre GiraultPierre Girault, bourgeois de Poitiers, fils de feu Huguet Girault, étant sous la tutelle de Henri du Roussignol, le 14 novembre 1418, avait rendu au dauphin Charles, comte de Poitou, l'aveu de son hébergement des Forges en la paroisse de Saint-Georges-de-Baillargeaux, relevant de la tour Maubergeon, pour lequel il était tenu à hommagelige et au « devoir de ung homme de pié, armé de cotte gamboisée, de capeline, de cousteau et d'espée », pour servir le roi dans ses armées, entre la Loire et la Dordogne, pendant quarante jours et quarante nuits, toutes les fois que la commune de Poitiers était tenue elle-même de s'y rendre en armes. Son père avait fourni le même aveu à Jean duc de Berry, comte de Poitou, le 27 décembre 1408, et sa fille Guillemette, lui étant décédé, le rendit à son tour au roi Louis XI, le 9 avril 1463 n .s. (Arch. nat., R1* 2171,p. 77 ; P. 1145, fol.86 v° et 143 v°.), demourant en nostredicte ville de Poictiers, pour avoir paiement de certaines sommes de deniers qu'il maintenoit luy estre deues par feu Jehan Ravary, père dudit suppliant, s'efforça faire faire execucion sur ses biens ; de laquelle execucion ledit feu Jehan Savary, ou reffuz de le recevoir à opposition, appella et sondit appel releva par devant nostre seneschal de Poictou ou son lieutenant à son siège de Lezignen, et pendant ledit appel est ledit Jehan Savary alé de vie à trespas, delaissé ledit suppliant son filz et heritier, qui comme tel a reprins ledit procès en l'estat qu'il estoit, et, icellui reprins, oudit procès tant a esté procedé entre lesdictes parties qu'elles ont esté appoinctées à escripre leurs faiz, causes et raisons par ung acte d'un chacun costé ; auquel appoinctement elles ont fourny et obey, et prins jour à produire leurs lettres, tiltres et tout ce que bon leur sembleroit. En faisant laquelle production, ledit suppliant, qui est simple homme de labour, non congnoissant les termes de plaidoyries, sans avoir conseil d'aucun advocat ou praticien, a mis et produit par devers la court de nostredit seneschal lesdictes lettres obligatoires dudit Bertran Babineau et debitis par luy achapté dudit Jehan Challes, à l'encontre dudit Pierre Girault, combien qu'ilz ne servissent de riens à la matière et ne portassent aucun prejudice audit Girault. Lequel, pour ce que a tort et mauvaise cause et pour cuider par vexacion icelle gaigner, icelles s'est efforcé d'arguer de faulxOn lit sur le registre « s'est efforcé d'avoir defaulx », ce qui est dénué de sens., et pour mieux parvenir à son entente, s'est tiré par devers nostre dit seneschal et de luy, tant en son nom que ou nom de nostre procureur en ladicte seneschaucie, a obtenu certaines nos lettres, par vertu desquelles a fait mettre en nostre main tous les biens dudit suppliant, et avecques ce icelluy fait adjourner par devant nostre dit seneschal par deux ou trois assignacions et journées, ausquelles ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, ne s'est osé comparoir, par quoy est tumbé et coulé en deux ou trois deffaulx, s'est absenté du pays et n'y oseroit jamais retourner, converser ne demourer, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties ; en nous humblement requerant que, attendu que ladite somme de lix. royaulx xv. solz tournois luy est loyaument deue et est prest de prouver et monstrer icelle avoir esté prèstée royaument et de fait audit Babineau, et par icellui Babineau non avoir esté payée, par quoy n'y peut on noter dol ou fraude de son costé, qu'il est homme de labour, simple, rural, non lettre, ne savant lire ne escripre, et qui tousjours, selon son povre estat de labour et condicion, a tousjours bien et honnestement durant son temps vescu et conversé, sans estre actaint ne convaincu d'aucun villain cas ou blasme, portant en soy aucune note d'infamye, et mesmement d'aucun crime de faulx dont il est à present accusé, attendu aussi que par le fait d'autruy, comme simple et ignorant, a esté séduit et deceu, et que lesdictes lettres par lui produictes ne servent de riens à sa matière, nous luy vueillons sur ce impartir nostre grace et misericorde. Pour ce est il que nous, consideré ce que dit est, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant, en faveur de sesdiz femme et enfans, avons ou cas dessus dit quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous nos autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou moys de mars l'an de grace mil iiiielx, et de nostre règne le xxxixe.

Ainsi signé : Par le conseil. Tribole. —Visa. Contentor. Valengelier.

MCCCXLIV Mars 1461

Rémission en faveur de Jean Taillé, demeurant à Pontrot, paroisse de Vernou, poursuivi pour le meurtre de Pierre Marconnay, qui lui avait cherché querelle sans motif.

AN JJ. 192, n° 69, fol. 49 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Jehan Taillé, texier en linge, povre homme aaigé de cinquante ans, chargé de jeune femme et de quatre petiz enffans tous en bas aage et minorité, demourant en ung hostel appellé Pautrot en la parroisse de Vernou ou diocèse de Poitiers, contenant que Jehan BonnetCe personnage paraît être Jean Bonnet, seigneur de la Chapelle-Bertrand, Saint-Lin, la Boissière-en-Gâtine, etc., qui, soit de son patrimoine, soit à cause de sa femme, Marie de Vivonne, fille de Jean, seigneur de Bougouin et d'Iteuil, possédait cet hôtel de Pontrot en la paroisse de Vernou-sur-Boutonne. Le registre des hommages et aveux rendus à Artus, comte de Richemont, en qualité de seigneur de Parthenay, le mentionne fréquemment ; à la première page,l'acte d'hommage qu'il fit le 8 avril 1428 pour la seigneurie de Saint-Lin y est transcrit in extenso ; puis c'est l'aveu et dénombrement du même fief, l'analyse de l'hommage de la Chapelle-Bertrand, etc. Dans un aveu et dénombrement de Mauvergne, rendu par Aymar de La Rochefoucauld, à cause de Jeanne de Martreuil, sa femme, le 21 avril 1447, Jean Bonnet est dit tenir de cette seigneurie quelques borderies de terre qui lui proviennent de la succession de Jean Ojart. (Arch. nat., R1* 190, fol. 1, 49, 63, 248, 257 et 272 v°.) M. Ledain cite d'autres aveux qu'il fit, en 1457, des seigneuries de la Chapelle-Bertrand, la Boissière et Saint-Lin, et en 1463, de celle de la Cordinière, et le qualifié chevalier. (La Gâtine historique, p. 371.) Jean Bonnet eut trois fils : Briand, sr de la Chapelle-Bertrand ; Artus, sr de Saint-Lin (dont aveu en 1473), Couzay, Bouillé, le Retailsur-Vendée ; Henri,chef de la branche du Breuillac ; et une fille, Jeanne, mariée à Guyot Du Bois, écuyer, seigneur du Port. (Dict. des familles du Poitou, nouv, édit., t. I, p. 615.) chevalier, puis aucun temps en ça a baillé à exploicter audit suppliant une pièce de pré qui est joingnant de sondit hostel, pour en prandre les fruiz, prouffiz et emolumens, en icelluy pourveans ; lequel pré à ce tiltre ledit suppliant a tenu et exploicté par deux années on environ paisiblement et paciffiquement, au veu et sceu de feu Pierre Marconnay, en son vivant aussi demourant oudit hostel Pautrot, et de tous autres qui l'ont voulu veoir et savoir. Et combien que icellui Marconnay n'eust oudit pré aucun droit, toutesvoyes par pluseurs et diverses foiz il mist ses beufz en icellui et fist gaster l'erbe qui estoit dedans, par quoy ledit suppliant lui deffendi par pluseurs foiz qu'il ne le fist plus, dont icellui Marconnay print pluseurs noises et debatz contre ledit suppliant, et non con- tent de ce, envoya de rechief pour faire desplaisir et dommaige audit suppliant ses beufz ou pré d'icellui suppliant, et tellement que vint à la congnoissance dudit suppliant, lequel pour les mettre hors dudit pré et preserver qu'ilz ne le gastassent, se transporta, le xvie jour du mois de septembre passé, environ heure de soleil levant, en sondit pré ouquel il trouva quatre beufz audit Marconnay appartenans, lesquelz il commança à chacer et mettre hors d'icellui pré avecques une petite javeline qu'il avoit portée en sa main, et en les chaçant et boutant hors d'icellui, pour ce que lesdiz beufz ou aucuns d'iceulx faisoient difficulté d'en yssir, ledit suppliant en picqua ung par la cuisse de derrière de ladicte javeline, dont il yssy sang, mais ledit beuf n'en fut point pire et ne laissa à charrouer et labourer, et le lendemain à mener du blé à l'ostel dudit Bonnet, chevalier dessusdit. Et lors ou tantost après, yssi dudit hostel de Pantrot ledit Pierre Marconnay, à qui appartenoient lesdis beufz, avecques une forche de bois qu'il avoit entre ses mains, et incontinant qu'il s'aproucha desdiz beufz et vit l'un d'iceulx blecié par la cuisse, cria à haulte voix, en adressant sa parolle contre ledit suppliant, telles parolles ou semblables en effect et substance : « Le faulx traitre Taillé a blessé mon beuf », et fist icellui Marconnay tourner sesdis beufz devers la rivière appellée de l'Aleu. Et ce fait, s'en revint très fort emeu et suyvy ledit suppliant jusques oudit pré où il estoit, en disant : « A ! ribault, tu as picqué mon beuf ! Par le sang Dieu, je te tueray ». Et en disant lesdictes parolles, bailla audit suppliant de ladicte fourche qu'il avoit deux ou trois coups sur l'espaulle, du cousté senestre, tellement qu'il lui rompit l'espaulle. Et ce voyant ledit suppliant et doubtant que ledit Marconnay le voulsist tuer, dist à icellui Marconnay qu'il ne le frapast plus et que s'il le frapoit plus, il se deffendroit. Et pour ce que icelluy Marconnay, qui estoit entallanté dé thuer ou villenenement blessier et endommaiger ledit suppliant en sa personne, comme il sembloit, s'efforça derechief frapper ledit suppliant, il, pour soy garder et preserver de ce, dressa ladicte javeline contre ledit Marconnay qui venoit contre lui, et d'icelle le frappa par la poitrine, dont yssit grant effusion de sang, et ledit cop baillé, icellui Marconnay se transporta jusques au pont dudit lieu de Pantrot, auquel pont les femme et filles d'icellui Marconnay le trouvèrent, et d'illec le portèrent en leur hostel, ouquel, par le moien dudit cop, certain temps après, il ala de vie à trespas. Pour occasion duquel cas, les biens meubles et immeubles dudit suppliant ont esté prins et saisiz par justice où ledit delit a esté commis et perpetré, et s'est icellui suppliant, doubtant rigueur de justice, absenté du païs ouquel, ne ailleurs en nostre royaume, il n'oseroit jamais seurement converser ne demourer, se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce prealablement impartye, requerant humblement que, attendu les choses dessus dictes, mesmement que ledit suppliant a commis et perpetré ledit cas en son corps deffendant et que ledit deffunct a esté agresseur, aussi que icellui suppliant a esté tousjours de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans jamais avoir esté actaint ne convaincu d'aucun villain cas, blasme ou reprouche, et qu'il est chargé, comme dessus est dit, de femme et de petiz enffans fans mineurs, il nous plaise nostredicte grace et misericorde lui impartir. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant ou cas dessus dit avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poitou ou à son lieutenant et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Bourges, ou mois de mars l'an de grace mil cccc. soixante, et de nostre règne le xxxixme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Des Vergiers. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXLV Avril 1461 (avant le 5)

Rémission octroyée, à l'occasion du Vendredi saint, à Catherine Dangoisse, femme de Thomas Floriau, laboureur, demeurant à Fressineau, détenue dans les prisons de Châtellerault pour le meurtre de Jeanne Chiquard, qui avait débauché son mari.

AN JJ. 192, n° 10, fol. 5 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de Katherine Dangoisse, femme de Thomas Floriau, laboureur, demourrant en la parroisse de Fressineau ou viconté de Chastelleraud, contenant que ladicte suppliant, qui par cy devant a esté bien famée et renommée ou païs et s'est bien entretenue et honnestement gouverriée avec lëdit Thomas, son mary, sans avoir fait cas digne de reprehencion, pour ce qu'elle sceut, puis demy an ença, que son dit mary conversoit, hentoit et frequentoit avecques feue Jehanne Chiquarde, vulgaument appellée la Berthonne, femme de Jehan Morin, maçon, demourant en ladicte parroisse de Fressineau, [qui] estoit renommée en ladicte parroisse et illec environ d'estre ribaude et adultaire et de soy gouverner mal de son corps en son mariaige, et que icellui son mary venoit souventes fois de nuyt d'une maison estant en ladicte parroisse où ladicte feue aloit, se tenoit et frequentoit souvant, comme est tout notoire en ladicte parroisse et illec environ, ladicte suppliant se doubta que ledit Floriau, sondit mary, maintenist ladicte deffuncte. Pour quoy elle dist et remonstra à sondit mary par pluseurs foiz qu'il faisoit mal de ainsi hanter, converser et fréquenter avecques ladicte deffuncte et de y estre ainsi de nuyt avecques elle, qui estoit mal blasmée et renommée d'estre ribaude, et qu'elle creoit qu'il la maintenoit, et que, s'il y aloit plus, elle en seroit courroucée et dolente. Lequel Floriau dist à icelle suppliant par pluseurs foiz qu'il ne laisseroit pas pour elle à aller là où bon lui sembleroit et, si elle lui en disoit plus rien, qu'il la batroit. Et à cause de ce, entre ledit Floriau et ladicte suppliant, sa femme, se sont, depuis ledit temps de demy an ença, meues plusieurs noises et debatz, et mesmement le premier mercredi du mois de mars dernier passé, pour ce que, après que ladicte suppliant fut retournée de laver sa buye, lui fut dit par une petite et jeune fille d'elle et dudit Floriau, nommée Perrine, que ladicte feue Jehanne Chiquarde estoit venue en leur maison et que ledit Floriau, son père, lui avoit baillé de l'argent et l'avoit baisée, se meut au soir grant noise et debat entre eulx, tellement que à cause de ce ledit Floriau batit d'un baston ladicte suppliant, sa femme, et lui en donna pluseurs coups. Pour lesquelles causes ladicte suppliant fut très doulente et courroussée et consceut dès lors haine contre ladicte deffuncte, tellement qu'elle delibera de lui faire desplaisir du corps. Et huit jours après, qui fut le second mercredi dudit mois de mars, ladicte suppliant ala guecter et veoir aux champs si elle trouveroit ledit Floriau et ladicte feue ensemble ; et en y allant, elle trouva, à une fontaine estant en ladicte parroisse, une nommée Matheline, femme de Pierre Justaut, qui y estoit allée querir de l'eau ; à laquelle Matheline icelle suppliant demanda si elle avoit veu ledit Floriau son mary. Laquelle Matheline lui respondit que non et demanda à ladicte suppliant pourquoy elle le demandoit. Et icelle suppliant lui dist qu'elle ne l'accusast point et qu'elle estoit allée veoir si elle trouveroit sondit mary avecques ladicte deffuncte, et que, s'elle vouloit, qu'elles feroient mauvaisement les besongnes d'icelle deffuncte et la batroient tant qu'elle en mourroit. Et pour ce faire, icelle suppliant promist bailler et donner à ladicte Matheline deux blans de dix deniers. Laquelle Matheline dist et respondit qu'elle en ecstoit contente et d'accord. Et entreprindrent entre elles que l'endemain au matin, à l'eure que l'en meyne les bestes aux champs, elles se rendroient et assembleroient en une çourance d'eaues estant en ladicte parroisse, où ladicte deffuncte avoit acoustumé de passer pour aller et venir en ladicte maison où elle frequentoit et alloit souvant, et que ilecques elles la bastroient. Auquel jour de lendemain au matin, ladicte suppliant se rendit la première et après elle ladicte Matheline, lesquelles attendirent longtemps illec pour veoir si ladicte feue y viendroit, et pour ce qu'elle n'y vint point, ladicte Matheline ala veoir en icelle maison où ladicte deffuncte frequentoit ; laquelle elle n'y trouva, ainsi qu'elle rapporta à ladicte suppliant. Et après ce, entreprindrent entre elles que ladicte suppliant yroit en la maison où ladicte deffuncte demouroit, pour savoir si elle y estoit, et ladicte Matheline yroit en sa maison veoir de sa fille, qu'elle y avoit laissée, et que, si ladicte suppliant trouvoit ladicte feue, qu'elle yroit querir ladicte Matheline en sadicte maison, pour aller acomplir leur entreprinse. Laquelle suppliant, en fillant sa quenoille, y alla et trouva icelle deffuncte en une court devant sadicte maison, où elle cousoit en linge ; à laquelle elle demanda si elle lui bailleroit du chenevoie qu'elle lui avoit autres foiz promis de bailler. Laquelle feue lui respondit que les souriz l'avoient tout mangé, et illecques se demoura par aucun temps en fillant sadicte quenoille, et puis s'en ala devers ladicte Matheline , et lui dist qu'elle avoit trouvé icelle deffuncte devant sa maison, où elle cousoit et estoit assise en ung coing de sa court près d'un mur ; et après lui bailla lesdiz deux blans qu'elle lui avoit promis et lui dist qu'il failloit qu'elle alast la première auprès de ladicte deffuncte et qu'elle ne se doubteroit pas tant d'elle comme de ladicte suppliant qui y avoit esté, et que ladicte suppliant yroit par derrière et par dessus le mur, encontre lequel ladicte feue estoit assise, et sortiroit sur elle et la prendroit à la gorge, et ladicte Matheline lui aideroit et la prandroit au visaige, et lui abastroient son chapperon et ses cheveux devant le visaige et la bouche, affin que on ne l'oyst crier, et illecques l'estrangleroient. Et incontinant s'en deppartirent et, ainsi le firent et acomplirent leur mauvaise voulenté et entreprinse, et estranglèrent ladicte feue par la manière dessus dicte, environ l'eure de vespres. A l'occasion duquel cas ladicte suppliant a esté prinse par les officiers de la justice dudit lieu de Chastelleraud et mise ès prisons dudit lieu, où elle est detenue. Et doubte ladicte suppliant que on vueille contre elle rigoureusement proceder et tendre à pugnicion corporelle, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties ; requerant humblement que, attendu qu'elle a esté tousjours et jusques audit cas bien famée et renommée, et s'est de son corps bien et honnestement gouvernée envers sondit mary, duquel elle a pluseurs beaulx enffans, par quoy il n'avoit cause de maintenir autre que elle et que, par desplaisance et courroux qu'elle a eu des menasses et noises de sondit mary et de ce que icelle deffuncte, qui estoit blasmée de son corps, estoit venue en son hostel, elle a consceu ladicte hayne et icelle sans intervalle de temps a mise à execucion, aussi qu'elle se sent ensainte, que jamais elle ne fut actainte ne convaincue d'aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise, en l'onneur de la Passion Nostre Seigneur, lui impartir nosdictes grace et misericorde. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, en l'onneur et reverence de nostre Createur et Redempteur Jhesu Crist, qui souffrit mort et passion à tel jour qu'il est aujourduy, à icelle suppliant avons oudit cas quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poitou et à tous noz justiciers, etc. Donné à Mehun sur Yèvre, ou mois d'avril l'an de grace mil iiiie soixante avant Pasques, et de nostre règne le xxxixme.

Ainsi signé : Par le roy en ses requestes, èsquelles mon- seigneur Charles de FranceCharles de France, duc de Berry, second fils et dernier enfant de Charles VII et de Marie d'Anjou, né le 28 décembre 1446, mort en mai. 1472. Louis XI devenu roi lui donna le duché de Berry avec la pairie et une pension importante; mais, poussé par ses conseillers, le jeune prince, qui « en toutes choses, dit Commines, était mené et conduit par autrui », s'allia à Charles le Téméraire et aux seigneurs mécontents et fut cause de la guerre dite du Bien public. Son frère, obligé de lui céder la Normandie, la lui reprit la même année (1466), et consentit, après de nouvelles intrigues, à lui donner le duché de Guyenne, auquel il joignit le comté de Saintonge et le gouvernement de la Rochelle, qui avaient fait partie du douaire constitué à la reine Marie d'Anjou, décédée le 29 novembre 1463. Plusieurs seigneurs poitevins se trouvant parmi les familiers de Charles, nous le retrouverons sans doute dans la suite de cette publication. le conte de FoixGaston IV, comte de Foix et de Bigorre, pair de France, vicomte de Béarn, fils de Jean comte de Foix et de Jeanne d'Albret, sa seconde femme, fit hommage à Charles VII, le 2 avril 1442, du comté de Foix et de Bigorre et le renouvela à Louis xi, le 30 décembre 1461. Lieutenant du roi à l'année de Guyenne pour la seconde expédition contre les Anglais en cette province, il eut une grande part à la victoire de Castillon (1453). Gaston IV fit son testament, le 21 juillet 1472, à Roncevaux, où il mourut, âgé d'environ cinquante ans, et fut enterré dans l'église des Jacobins d'Orthez. (Le P. Anselme, Hist. Généalt., III, p. 374.), le sire de la TourBertrand de La Tour, seigneur de Montgascon, était membre du Conseil de Charles VII depuis le mois de mai 1446. (De Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. IV, p. 411.), maistres Georges Havart, François HalléSur maîtres Georges Havart et François Hallé, cf. ci-dessus, p. 15 et 60, notes.     et pluseurs autres estoient, Daniel. —Visa. Contentor. Duban.

MCCCXLVI Avril 1461 (après le 5)

Lettres d'anoblissement octroyées à Jean Doucereau, poitevin, en récompense de ses services militaires.

AN JJ. 192, n° 6, fol. 3 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Karolus, Dei gratia Francorum rex. Ad perpetuam rei memoriam. Decens et juri consonum arbitramur illos nobilitatibus et prerogativis muniri, quos probos et fideles ac vita laudabili, morum honnestate et aliis virtutum donis decoratos adinvenit regia majestas. Sane licet dilectus noster Johannes DocereauOn trouve ce nom sous les formes Docereau, Doucereau (plus bas dans ces mêmes lettres) et Daucereau. Le Dict. des familles du Poitou ne l'a recueilli sous aucune de ces formes. Jean Doucereau était seigneur d'un hébergement sis au village de Ghantegain, paroisse de Saint-Georges-de-Baillargeaux, dont il fit hommage au roi, le 27 mai 1451, et rendit aveu, une première fois, le 1er avril 1447, et une seconde, le 14 mai 1462. « Jehan Daucereau advohe tenir du roy, à cause de sa conté de Poictou, à homage lige, au devoir d'ung homme de pié, armé de cotte gamboisée, de capeline, de lance, de cousteau et d'espée, dedans certaines mettes anciennement acoustumées, c'est assavoir entre Loire et la Dourdongne, xl. jours et xl. nuys, aux despens dudit Daucereau et de ses frerescheurs et parsonniers, une foiz ès guerres dudit seigneur, c'est assavoir quant la commune de Poictiers part pour y aler; premierement ung hebergement et appartenances assis en la parroisse de Saint George en villaige de Chantegain, etc., par lettre du premier jour d'avril mil cccc. xlvii ». En marge de l'aveu du 14 mai 1462, on lit : « Istud procedit bono ordine, licet videatur deffectus, quia hebergamentum non nominatur ». (Arch. nat., P. 5661, cote 2703 ; P. 1145, fol. 89, 123.), libere condicionis et de legitimo matrimonio procreatus ex plebeis parentibus, verumptamen vita laudabilis, morum honnestas et alie laudabiles virtutes quibus persona ejus decoratur et adornatur ipsum nobilem et insignem reddunt in suis actibus, et nos inducunt ut erga eum reddamur ad gratiam liberales. Notum igitur facimus universis, tam presentibus quam futuris, quod nos, premissorum consideracione nec non quamplurimorum arduorum nobis in guerris nostris obsequiorum gratuitorum per dictum Johannem Doucereau contra et adversus capitales nostros inimicos factorum et impensorum, veluti in insultu per nostras gentes in villa Rothomagensi, dum ab ipsis nostris inimicis occupabatur et tempore redductionis ipsius facto, dietaque et conflictu per nos obtentis contra et adversus ipsos inimicos nostros apud Formigniacum ac aliis in multiphariis conflictibus et dietis et alias quibus viriliter et bellicose gessit et habuit, ipsum et ejus posteritatem et prolem, masculinam et femininam, legitimo matrimonio natam et nascituram, nobilitamus et per presentes, de gracia speciali et nostra certa sciencia, plena potestate et auctoritate regia, nobiles facimus et creamus. Concedentes ut ipse Johannes Doucereau ac tota ejus posteritas utriusque sexus in legitimo matrimonio nata et nascitura, in judicio et extra, ab omnibus pro nobilibus habeantur et amodo reputentur, ac habiles eos reddimus, ut ipsi universis et singulis privilegiis, libertatibus et aliis juribus quibus ceteri nobiles regni nostri usi sunt et utuntur, gaudeant et fruuntur pacifice, ipsum Johannem Doucereau et ejus posteritatem predictam aliorum nobilium regni nostri ex nobili stipite procreatorum numero et cetu agregantes, licet ipse ex nobili genere ortum non traxerit, ut dictum est. Volentes insuper et concedentes quod sepedictus Doucereau ejusque proles et posteritas, nata et nascitura, dum et quocienseta quocumque milite voluerit cingulum milicie valeant adipisci, et feoda et retrofeoda ac res nobiles a nobilibus et quibuscumque aliis acquirere et jam acquisitas ac eciam acquirendas retinere et possidere perpetuo valeant et tenere, absque eo quod ea vel eas nunc vel in futurum, innobilitatis occasione, extra manum suam ponere vel alienare cogantur nec compellantur ; solvendo tamen nobis hac vice financiam moderatam. Quocirca dilectis et fidelibus nostris gentibus compotorum nostrorum et thesaurariis, senescallo Pictavensi ceterisque justiciariis nostris, vel eorum locatenentibus, presentibus et futuris, et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, tenore presentium mandamus quatinus nostris presentibus nobilitacione, concessione et gracia dictum Doucereau et ejus posteritatem utriusque sexus in legitimo matrimonio, ut pretactum est, natam et nascituram, uti et gaudere plenarie et pacifice faciant et permittant, absque quovis impedimento, quod si forsan illatum foret, ad statum pristinum et debitum reducant seu reduci faciant indilate, visis presentibus. Quibus, ut perpetue stabilitatis robur obtineant, nostrum jussimus apponi sigillum. Nostro in aliis et in omnibus quolibet alieno jure semper salvo. Datum Magduni supra Ebram, in mense aprilis anno Domini millesimo quadringentesimo primo post Pasca et regni nostri tricesimo nono.

Sic signatum : Per regem, comite Fuxi, domino de Turre, comite de DampmartinoGaston IV comte de Foix (voy. ci-dessus, p. 289, note 2), Bertrand de La Tour et Antoine de Chabannes, comte de Dammartin, cf. le vol. précédent, p. 334, note, et ci-dessus, p. 202 et 289, notes. domino Guillermo CosinotGuillaume Cousinot, seigneur de Montreuil, né vers 1400, fils de Pierre II (comme on l'admet généralement) et neveu de Guillaume ier Cousinot, fut d'abord conseiller du dauphin Louis, depuis l'an 1435 environ, et premier président du Conseil delphinal, devenu plus tard le Parlement de Dauphiné. Nommé bailli de Rouen après la prise de cette ville (1449), à laquelle il avait contribué et où il avait gagné le titre de chevalier, il fut chargé d'arrêter le duc d'Alençon, accusé de trahison (1456), prit part, l'année suivante, à l'expédition de Pierre de Brézé sur les côtes d'Angleterre, et représenta Charles VII au concile de Mantoue, en 1459. Emprisonné au début du règne de Louis XI, il recouvra bientôt la faveur royale et ses fonctions de chambellan (1463) ; d'ailleurs il servit efficacement le roi pendant la ligue du Bien public. Capitaine de Cabrières, gouverneur de Montpellier, etc., les Etats généraux tenus à Tours en 1484 furent le dernier événement important auquel il se trouva mêlé. ll mourut vers cette époque. (Vallet de Viriville, art. Cousinot, dans la Nouvelle biographie générale.) et aliis presentibus. Reynaut. — Visa.

MCCCXLVII Avril 1461 (après le 5)

Rémission en faveur de Jean Ripault, Grégoire, son frère, et Huguet Prevost, leur voisin, lesquels, poursuivant André Bouju qui avait volé une jument audit Jean Ripault, l'atteignirent et le frappèrent de telle sorte qu'il succomba quelques jours après.

AN JJ. 192, n° 5, fol. 2 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Jehan RippaultNous citerons, à propos de ce personnage, un acte donné le 14 avril 1458, par Regnaut Le Monayer, procureur de Faye, qui reconnaît avoir reçu de Jean Ripaut, fils de Jean Ripaut, dit de la Parrelière, un aveu de fief rendu par celui-ci à la châtellenie de Faye (cne de Nanteuil) pour une pièce de pré contenant journée de trois faucheurs, sise en la rivière de Fontperron, tenue à hommage plain, à dix sous de devoir et cinq sous de service, toutefois que le cas de mortemain y advient. (Invent. des Arch. du château de la Barre, par A. Richard, t. II, p. 116.) La date et la région où se trouvait le pré autorisent le rapprochement que nous faisons, sans affirmer qu'il s'agit d'un seul et même personnage., Gregoire, son frère, et Huguet Prevost, povres gens de labour, chargez de femme et enffans, contenant que trois sepmaines a ou environ, ainsi que ledit Jehan labouroit en ses terres, survint en ses pastureaux feu André Bouju, qui illec print furtivement et embla une jument appartenant audit Jehan, suppliant, qui pasturoit, et mist dessus ung bast qui estoit sur une autre jument qu'il avoit illec amenée, toute lasse et deffaite qu'il laissa oudit pasturau et emmena celle dudit Jehan Ripault, suppliant, et assés tost après on lui dist que ung larron s'en fuioit avec sa jument, dont il fut bien dolent. Et tout incontinant, lui esmeu, print ung gros baston en sa main et se tira par devers lesdiz Gregoire et Huguet, ses frère et voisin, supplians, et leur dist ledit larrecin, en leur priant qu'ilz lui voulsissent aider à recouvrer sadicte jument, et s'en ala devant tout hativement, suivant au mieulx qu'il povoit par où avoit [passé] ledit larron, et de fait fist tant qu'il eut aucune congnoissance qu'il estoit en ung bois appellé le bois des Pilliers, loing dudit pasturau de trois quars de lieue ou environ ; et pour ce qu'il estoit seul et qu'il doubtoit que ledit larron feust embastonné et acompaigné d'autres, attendit lesdiz supplians, ses frère et voisin, et eulx venuz, pour ce qu'ilz ne savoient bonnement le lieu et place où estoit ledit larron, environnèrent ledit bois et firent tant qu'ilz trouvèrent en icellui ledit André, et mesmement ledit Jehan suppliant le trouva le premier en ung lieu où il s'estoit mussé ; et incontinant qu'il l'apperceut, lui esmeu et courroucé de ce que ladicte jument lui avoit esté ainsi emblée, de chaude colle lui courut sus avec un forche de fer qu'il avoit trouvée en son chemin et l'avoit prinse à ung enffant qui la portoit, et de ladicte fourche poussa fort ledit André, et puis la print par le manche et en donna audit larron par les espaules et par le visaige, et aussi lui donna des souffïés de sa main oudit visaige, et pour lors n'y avoit que eulx deulx ; mais ainsi qu'il le tenoit, survindrent lesdiz supplians et eulx estans tous ensemble, prindrent conclusion de mener ledit larron à justice. Mais il leur requist, en joingnant les mains, que pour Dieu ilz ne le menassent à ladicte justice, et dist audit Jehan qu'il reprint sadicte jument et qu'il lui donnoit la sienne qui estoit demourée oudit pasturau, et aussi lui donnoit le bast, la sengle et le licol et ung estrief qui estoit audit bast, et avec ce lui donna sa bourse et trois deniers qui estoient dedans, laquelle bourse avoit esté rompue par ledit Jehan oudit debat ; et lui dist ledit André qu'il estoit bien marry qu'il n'y avoit cinq francs dedans ladicte bourse, pour le récompenser du dommaige et desplaisir qu'il lui avoit fait. Et ne lui fut fait autre mal, sinon que ledit Gregoire, en le voulant mener à justice le poussa d'un baston qu'il avoit et lui en donna ung cop par derrière. Et peu après ledit Jehan et ledit André Boujon (sic) se requirent pardon l'un à l'autre, et le laissèrent en aller. Et s'en vint icellui Jehan avec sadicte jument et apporta lesdiz sangle, liecol, estrief et bourse, et lui laissa ledit bast dont il n'avoit cure, et ledit Prevost aporta ung sac que ledit Boju lui avoit donné. Et ce fait, s'en ala ledit André coucher à demye lieue d'ilec, et depuis s'en ala au lieu et parroisse de la MoteSans doute la Mothe-Saint-Héraye. où trois jours après ou environ, par faulte de bon gouvernement ou autrement, ii ala de vie à trespassement. A l'occasion duquel cas, lesdiz supplians, doubtans rigueur de justice, se sont absentez du païs, ouquel ilz n'oseroient jamais converser ne demourer, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce impartyes, humblement requerant que, attendu ce que dit est, qu'ilz sont simples gens de labour, chargez de femmes et d'enffans et sont bien famez au païs, etc., il nous plaise sur ce leur impartir nosdictes grace et misericorde. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, ausdiz supplians ou cas dessus dit avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poitou ou à son lieutenant et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Bourges, ou mois de avril l'an de grace mil cccc. soixante et ung après Pasques, et de nostre règne le xxxixme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. De Thoucy. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXLVIII Mai 1461

Lettres de légitimation en faveur de Bernard Morinet, fils naturel de feu frère Jean Mauclaveau, prieur de i'église Saint-Hilaire à Leignésur-Usseau, et de feu Jeanne Morinet.

AN JJ. 192, n° 27, fol. 20 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Karolus, Dei gratia Francorum rex. Illegitime genitos quos vite decorat honnestas nature vicium minime decolorat, nam decor virtutis abscondit in prole maculam geniture et pudicicia morum pudor originis aboletur. Notum igitur facimus universis, presentibus et futuris, quod, licet Bernadus Morinet, filius naturalis deffuncti fratris Johannis MauclaveauNous avons trouvé trace d'une famille noble de ce nom en Poitou. Philippon Mauclaveau, seigneur de Ligné, rendit aveu le 9 avril 1428, et fit hommage au roi, le 3 avril 1438, de cette seigneurie qui relevait de la châtellenie de Chizé. (Arch. nat., P. 5531, cote 358; P. 1145, fol. 30 v°.) condam prioris Sancti Hilarii de Luigné, Pictavensis diocesis, ordinis Sancti Augustini, et deffuncte Johanne Morinete, ex illicita coppula traxerit originem, talibus tamen virtutum dono et morum venustate insignitur quod in ipso supplent merita et virtutes, quod ortus odiosus ajecit, adeo quod super deffectu natalium quem patitur gratiam quam a nobis humilime postulavit merito debet obtinere. Hinc est quod nos dictum Bernadum Morinet, de nostre regie potestatis plenitudine, auctoritateque regia et gracia speciali, legitimavimus et legitimacionis titulo decoramus per presentes. Volentes ut ipse Bernadus deinceps in judicio et extra pro legitimo habeatur, ac eidem concedentes et cum eo dispensantes ut, quanquam ipse de cohitu illicito traxerit originem, bona mobilia temporalia quecumque et inmobilia acquirere et jam acquisita retinere et paciffice possidere valeat et de eis disponere inter vivos vel in testamento ad sue libitum voluntatis, ad successionemque [dicte] matris ceterorumque parentum ac amicorum carnalium suorum et aliorum quorumlibet ex testamento vel ab intestato, dummodo de eorum processerit voluntate et consensu et nisi alteri foret jus jam quesitum, et adquoscumque honores et alios actus seculares legitimos admittatur, ac si esset de legitimo matrimonio procreatus ; quodque eciam sui liberi, nati et nascituri, si quos habeat, et tota ejus posteritas, de legitimo matrimonio procreata vel procreanda, bonis suis quibuscumque eidem jure hereditario succedant et succedere valeant, nisi aliud quam deffectus hujusmodi natalium repugnet, predicto deffeetu quem prorsus abolemus, jure, constitucione, statuto, edicto generali vel locali regni nostri ad hoc contrariis non obstantibus quibuscumque. Solvendo nobis propter hoc hac vice financiam moderatam. Quocirca dilectis et fidelibus gentibus compotorum nostrorum et thesaurariis, senescallo nostro Pictavensi ceterisque justiciariis et officiariis nostris, aut eorum loca tenentibus, presentibus et futuris, et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, tenore presentium mandamus quatinus predictum Bernadum Morinet et ejus posteros, natos et nascituros, nostris presentibus legitimacione, concessione et gracia uti et gaudere paciffice faciant et permittant, absque quovis impedimento, quod si illatum foret, id reparent et ad statum pristinum et debitum reducant seu redduei faciant indilate, visis presentibus. Quibus, ut perpetue stabilitatis robur obtineant, nostrum sigillum duximus apponendum. Salvo in ceteris jure nostro et in omnibus quolibet alieno. Datum apud Mag- dunum, in mense maii anno Domini millesimo quadringentesimo sexagesimo primo, et regni nostri tricesimo nono.

Sic signatum : Per regem, domino de CastrobruniCharles de Gaucourt, seigneur de Châteaubrun, membre du Conseil du roi. (Voy. ci-dessus, p. 108, note 3.) et aliis presentibus. De La Loère. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCXLIX Novembre 1461

Confirmation des privilèges et franchises de la ville de Niort.

AN JJ. 198, n° 103, fol. 104 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Ludovicus, Dei gracia Francorum rex. Notum facimus universis, presentibus et futuris, nos litteras carissimi domini et progenitoris nostri, in cera viridi sigillo suo sigillatas, bene dilectis et fidelibus nostris majoribus, burgensibus et communie ville nostre de NyortoEn souvenir sans doute du bon accueil qu'il avait rencontré à Niort, lors de la Praguerie, Louis XI témoigna toujours une extrême bienveillance aux habitants de cette ville. Outre cette confirmation de leurs franchises et les lettres qui suivent conférant la noblesse aux maire, échevins et conseillers, il leur octroya, dès son avènement, deux autres marques de sa faveur. Tout d'abord il leur rendit l'élection (siège et auditoire des élus) qui avait été transférée par son père à Saint-Maixent, « enjoignant à ceux qui seroient convenus par devant les élus du Poitou du ressort de Nyort qu'ilz comparussent audit siège de Nyort et non à Saint Maixent ». Puis, par autres lettres patentes données à Amboise le 14 novembre 1461, le nouveau roi, à la requête des maire et échevins, institua un siège royal et cour ordinaire à Niort, dispensant ainsi les habitants d'attendre, pour le jugement de leurs procès, les assises du sénéchal de Poitou tenues à Niort, ou d'aller plaider à Poitiers. Le préambule de ces lettres porte que la ville de Niort est une des bonnes et principales villes du Poitou et un des sièges de la sénéchaussée du comté, dans laquelle se tient la juridiction du sénéchal, et où il y a grand ressort et grandes assises où ressortissent les manants et habitants du pays de Gâtine. (Copie du XVIIIe siècle, d'après l'original conservé à l'Hôtel-de-Ville de Niort, dans la coll, dom Fonteneau, t. XX, p. 257. — Ces lettres ont été publiées par Augier de la Terraudière, Thrésor des titres de la ville de Nyort. Niort, 1675, in-12, p. 16 ; dans le recueil des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XV, p. 188, et par extraits dans l'Hist. de la ville de Niort, par L. Favre. Niort, in-8°, 1880, p 98.) in comitatu nostro Pictavie concessas, vidisse, formam que sequitur continentes :

Karolus, Dei gracia Francorum rex, etc. Datum Turonis, die vicesima prima mensis augusti anno Domini millesimo cccc. tricesimo quarto, regni nostri duodecimoLes lettres de Charles VII contenant le texte de celles de Philippe-Auguste et de saint Louis (Poitiers, 1204 ; Saint-Maixent, juillet 12301 ont été publiées, avec quelques indications bibliographiques, dans notre tome VIII. (Arch. hist. du Poitou, t. XXIX, p. 58.)

Quas quidem litteras suprascriptas et omnia in eisdem contenta ratas et gratas, rataque et grata habentes, eas et ea laudamus et approbamus auctoritateque nostra regia et plena potestate confirmamus per presentes, volentes et concedentes eisdem majoribus, burgensibus et habitatoribus predicte ville nostre de Nyorto, presentibus et futuris, quathinus privilegiis, franchisiis, prerogativis et libertatibus de quibus in predictis litteris suprascriptis fit mentio, et aliis quibuscunque sibi per predecessores nostros concessis utantur et fruantur pacifice, ac in ipsis manuteneant et conserventur nunc et in futurum, prout et quemadmodum hactenus debite usi sunt, de gracia speciali per presentes. Earum serie, senescallo nostro Pictavensi ceterisque justiciariis et officiariis nostris, presentibus et futuris, aut eorum loca tenentibus, seu commissis, mandantes quatinus supradictos majores, burgenses et alios habitatores predicte ville nostre de Nyorto nostris presentibus ratifficacione, confirmacione, concessione et gracia uti et gaudere faciant et permittant, nullam molestiam sive impedimentum in contrarium inferentes seu inferri patientes quoquomodo ; quod si illatum foret, illud ad statum pristinum et debitum reducant seu reduci faciant indilate. Quod ut firmum et stabile perpetuum perseveret, nostrum presentibus jussimus apponi sigillum. Nostro tamen in ceteris et alieno in omnibus juribus semper salvis. Datum Ambasie, mense novembris anno Domini millesimo cccc. sexagesimo primo, regni vero nostri primoLes lettres de Louis XI, avec les vidimus des actes antérieurs confirmés, sont imprimées dans le recueil des Ordonnances des rois de France, t. XV, p. 218. Voy. aussi Chr. Augier de la Terraudière, op. cit..

Sic signatum : Per regem, dominis du LauAntoine de Châteauneuf, sr du Lau, membre du Conseil royal. Charles VII lui avait fait don de la terre et seigneurie de Duras et d'autres biens confisqués sur Gaillard de Durfort, qui avait, en 1452, contribué à rouvrir aux Anglais les portes de Bordeaux, et Louis xi lui confirma ce don par lettres datées de Chinon, juin 1462, enreg. au Parlement le 13 juillet suivant. (Arch. nat., X1a, 8605, fol. 268 v°.) Ce prince, lors de son avènement au trône, avait pourvu le sr du Lau de l'office de sénéchal de Guyenne et des Lannes (Avesnes, le 3 août 1461, enreg. au Parl. le 19 novembre de la même année. Id., fol. 221), et lui fit don, par lettres d'août 1463, de la terre et seigneurie de Blanquefort, confisquée sur Antoine de Chabannes (Xla 8606, fol. 28 v°). Après la guerre du Bien public, du Lau fut emprisonné, mais il parvint à s'échapper du château d'Usson en Auvergne, où il était enfermé. Rentré en grâce, le roi le nomma, fan 1470, gouverneur du Roussillon. et BaugyJean de Bar, seigneur de Baugy, général des finances de 1444 à 1452, puis employé dans plusieurs ambassades et négociations par Charles VII durant les dernières années de son règne. (De Beaucourt, Hist. de Charles VII, tomes III à V, passim.), et aliis presentibus. Le Prevost. —Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCL Novembre 1461

Lettres octroyant la noblesse au maire, aux douze échevins et aux douze conseillers jurés de la ville de Niort.

AN JJ. 198, n° 58, fol. 48 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de noz chiers et bien amez les maire et eschevins, conseillers et pers de nostre ville de Nyort, contenant comme de tout temps et d'ancienneté ilz aient acoustumé avoir corps, collège et communaulté en ladicte ville, du nombre de cent personnes, c'est assavoir de maire, douze eschevins et douze conseillers jurez et soixante quinze pers, ainsi que ont acoustumé d'avoir et ont eu par cy devant noz chiers et bien amez les habitans de noz villes de Poictiers et de la Rochelle, en noz pays de Poictou et de Xanctonge, du nombre desquelz eschevins soient à present noz chiers et bien amez Huguet FouchierHuguet Fouchier, écuyer, fils de Michel, mineur en 1406, était en procès le 12 juin 1434, au Parlement de Poitiers, où il est qualifié marchand de Niort. (Arch. nat., X2a 21, à la date.) Echevin en 1453 et maire depuis le 25 mars 1461, il laissa deux fils, Huguet, écuyer, sr de Tesson en Saintonge, et Guillaume. à present maire, Jehan Bastier, seigneur de MormartinJean Bastier, sr de Mormartin (de la Mort-Martin, dit le Dict. des familles du Poitou, nouv, édit., 1.1, p. 325), fut maire de Niort en 1440, procureur syndic, échevin et candidat à la mairie, maire une seconde fois en 1443; il fut encore présenté au choix du sénéchal (le maire était choisi sur trois candidats présentés par le conseil de ville) en 1454, 1455 etl456.Il mourut en 1487, léguant une rente à la Charité de la Blée ou Aumônerie de Saint-Georges. Un Jean Bastier, dit bourgeois et échevin de Niort, que MM. Beauchet-Filleau paraissent distinguer du maire (lui ayant consacré un article spécial), était possesseur de la terre et seigneurie de la Motte-d'Aiffre, mouvant du château de Niort, dont il fit hommage au roi, le 3 novembre 1465, et rendit aveu le 29 novembre suivant. (Arch. nat., P. 5661, cotes 2943, 2945 ; P. 1145, fol. 7.) Dans un acte du 2 mai 1458, il se qualifiait élu en Poitou., maistres Guillaume LaydetGuillaume Laidet ou Laydet, maire de Niort en 1430, eut à soutenir contre le duc d'Alençon, auquel Charles VII avait engagé la ville et seigneurie de Niort, un procès au Parlement de Poitiers touchant la nomination et les droits du maire, la garde des clefs de la ville, etc. (Curieuses plaidoiries des 2 et 28 mars 1430 n. s., Arch. nat., X1a 9199, fol. 242 v°, 257 v°.) Guillaume Laidet fut élu de nouveau à la mairie à dater du 25 mars 1434 n. s. (Xla 9194, fol. 63 v°), et était en instance devant la Cour, les 3 et 4 juin 1435, au sujet de la tutelle d'André Coquet, de Niort, dont il était chargé. (Id., fol. 102 v°.), Pierre LaidetPierre Laidet était lieutenant du sénéchal de Poitou à Niort dès le 21 mai 1448 (Arch. nat., X2a 23, fol. 384 v°), et il en portait encore le titre le 13 mai 1477. Il était poursuivi en cette qualité, à cette date, ainsi que Jean Rousseau, procureur du roi audit siège, par Mathieu Poqueron, prêtre, et Pierre Rivolet, qui les accusaient d'excès et abus de pouvoir (X2a 41, à la date). Pierre Laidet était en même temps conservateur des privilèges de l'Université de Poitiers; les archives de la ville renferment des actes de lui en cette qualité, entre le 16 novembre 1467 et le 16 août 1468. (Voy. l'Inventaire de L. Rédet, publié par MM. Richard et Barbier, 1883, in-8º, p. 152-154.) Le 4 déc. 1475, il était ajourné en cette même qualité de conservateur des privilèges de l'Université, à la requête de Guillaume de Roquemaure, écuyer, et se faisait excuser par Jacques Girouard, son clerc. (X2a 41, à la date.) On trouve aussi un Pierre Laidet, seigneur de la Cigogne (il pourrait fort bien être le même que le maire de Niort), qui de 1468 à 1470 était en procès, ainsi que sa femme, contre Elie de Coudun,seigneur de Saint-Etienne-de-la-Cigogne, conseiller au Parlement de Paris. (Voir X2a 35, aux dates des 28 et 30 juin, 12 décembre 1468, et 27 mars 1470 n. s. ; X2a 36, fol. 77 v°, date du 20 février 1468 n. s.) Jehan Yver

Jean Yver poursuivait au criminel, pour excès commis à son préjudice, Jacques Charlet, Pierre Thibaut et Jean Jaubert (acte du Parlement du 31 décembre 1454, X2a 27, fol. 17). En 1460, on le trouve qualifié de licencié ès lois, enquêteur ordinaire au pays et comté de Poitou; il était alors avec Macé Gauvigneau, clerc, notaire etsecrétaire du roi, l'un des commissaires ordonnés audit pays et comté de Poitou sur le fait des francs-fiefs et nouveaux acquêts. (D'Hozier, Armorial général, in-fol., t. II, p. 459.) L'an 1462, Pierre Arnault, secrétaire du roi, lui était adjoint au lieu de Macé Gauvigneau, et tous deux, en qualité de commissaires des francs-fiefs, composèrent avec le chapitre de Sainte-Radegonde de Poitiers à la somme de 23 livres 7 sols 6 deniers pour l'amortissement des acquisitions faites par les chanoines depuis soixante ans. (Arch. de la Vienne, G. 1345.) Arnaud Buignon, curé de Marigny, intenta en 1465 un procès criminel à Jean et Jacques Yver, père et fils, pour avoir réparation d'excès et violences qu'ils avaient exercés contre lui. (Mandements des 5 et 6 août 1465, 28 avril et 14 août 1466 ; X2a 34, fol. 117 v°, 118 v°, 196, 227.)

, Jehan JauUn Jean Jau possédait en 1410, comme mari de la fille de Jean Coutanceau, l'hébergement du Soulier en la paroisse d'Allonne, mouvant de la seigneurie de la Lionnière. (Aveu au sire de Parthenay du 9 janvier 1410 n. s., Arch. nat., R1* 190, fol. 12.) Quatre-vingts ans plus tard, vivait un autre Jean Jau, qui s'intitulait seigneur de la Barre. Son témoignage fut invoqué dans une enquête faite au presbytère de Vautebis par François Mignot, enquêteur en Poitou, commissaire désigné par le sénéchal avec Antoine Ghasserand, notaire, touchant le droit de sépulture en l'église dudit lieu, que revendiquaient Louis Cathus et Louise de Gousdun, sa femme, à rencontre de Jean et Jacques Légier, du 16 au 20 novembre 1493. (Invent. des Arch. du château de la Barre, par A. Richard, t. I, p. 138.), Jehan Laydet [..] jeuneJean Laidet, de Niort, figure sur le registre des hommages et aveux rendus à Artus de Richemont, seigneur de Parthenay, de 1427 à 1450, comme possesseur «de la Grange de Champdeniers soubz l'omage lige que le seigneur de Champdeniers fait à monseigneur de Parthenay, et doit courre en rachapt comme Champdeniers ». (Arch. nat., R1* 190, fol. 259 v°.) On le trouve qualifié lieutenant du sénéchal de Poitou à Niort, le 30 janvier 1472 n. s. (X2a 38, fol. 147), et encore le 28 novembre 1477, date a laquelle fut plaidé au Parlement l'appel d'une sentence par lui rendue entre Jean Gautier du Querroy, d'une part, Antoine Bagier, Pierre Charpentier, Louis Mesmin, etc., d'autre, dans lequel Laidet fut pris à partie par le procureur général. (X2a 42 et 43, à la date.) C'est sans doute le même qui s'intitulait seigneur de Rambault et lieutenant du sénéchal à Niort, et obtint, en janvier 1483 n. s., de Louis XI une déclaration confirmant, en ce qui le concernait particulièrement, l'anoblissement octroyé, au mois de novembre 1461, aux maire, échevins et conseillers de la ville de Niort, et à leur postérité. (JJ. 209, n° 248, fol. 138.) Cet acte sera publié à sa date., Pierre TaveauPierre Taveau, licencié en lois, et Jean Barbe, avocat du roi en Poitou, furent institués, en date du 5 novembre 1456, exécuteurs testamentaires de Simon Birochon, prêtre, naguère curé de Notre-Dame d'Echiré. (A. Richard, Arch. du château de la Barre, t. II, p. 253.), Jehan Laidet, Jehan Martin, Jehan GalemitPour l'identification des noms et la chronologie de ces maires, on peut consulter le travail de M. A. Bonneau, Liste et armoiries des maires de Niort, dans les Mémoires de la Société de statistique des Deux-Sèvres, année 1865, p. 141. lesquelz aient esté par cy devant maires de ladicte ville, en quoy ilz se soient employéz bien et grandement et tellement que ladicte ville et habitans en icelle ont tousjours depuis esté gouvernez et entretenuz par cy devant en bonne police et gouvernement, au bien de nous et de la chose publicque de ladicte ville ; savoir faisons que nous, les choses dessus dictes considerées et la très grant loyaulté et vraye obeissance, vouloir et affection que ont euz continuellement les dessus diz Huguet Fouchier, à present maire, Jehan Bastier, maistres Guillaume Laidet, Pierre Laidet, Jehan Yver, Jehan Jau, Jehan Laidet le jeune, Pierre Taveau, Jehan Laidet, Jehan Martin et Jehan Galemit, qui ont esté maires de ladicte ville, comme dit est, et sont de present du nombre desdiz douze eschevins, à nous et à la couronne de France, et pour les bons et grans services qu'ilz ont faiz par cy devant à noz predecesseurs et à nous ou temps passé, et que esperons que plus facent ou temps avenir, et pour consideracion du bon et grant gouvernement qui a acoustumé estre d'ancienneté en ladicte ville, et que esperons qui y sera ou temps avenir, pour avoir acoustumé de eslire à excercer lesdiz offices desdiz maire, eschevins et conseillers jurez des plus notables et bonnes personnes, dignes de grans vertuz et merites, afin que ce soit exemples aux autres habitans de ladicte ville, quant ilz verront les dessus diz estre essauciez, eslevez et perferez en honneur, preheminence et dignité, yceulx maire, eschevins et conseillers jurez de ladicte ville de Nyort et lesdiz Huguet Fouchier, à presant maire, Jehan Bastier, maistres Guillaume Laydet, Pierre Laidet, Jehan Yver, Jehan Jau, Jehan Laidet le jeune, Pierre Taveau, Jehan Laidet, Jehan Martin et Jehan Galemit, qui ont esté maires de ladicte ville et qui sont à present du nombre desdiz douze eschevins et douze conseillers, et tous ceulx qui ou temps à venir et perpetuelment en seront, avec toute leur lignée descendue, née et à naistre de loyal mariage, nonobstant que ilz ne soient ou n'ayent esté nez, extraictz et procréez de noble sang et lignage, de nostre certaine science, plaine puissance, auctorité royal et de nostre grace especial, avons anobliz et anoblissons par ces presentes ; et leur avons octroyé et octroyons, voulons et nous plaist que ilz soient tenuz et reputez dès maintenant et à tousjours maiz pour nobles, en jugement, en fait d'armes et ailleurs, en quelque lieu que ce soit, et que eulx et leurs enffans masles et leurdicte lignée masculine, procréez et à procréer ; puissent, toutes foiz qu'il leur plaira, estre aornez de l'ordre et estat de chevalerie, par quelque chevalier dudit ordre que bon leur semblera, et avec ce, que eulx et toute leur lignée, née et à naistre, et chacun d'eulx puissent acquerir et conquester par tout nostre royaume, et ceulx qu'ilz ont deja acquestez tenir, avoir et posseder à tousjours maiz, soient fiefz, arrière fiefz, terres, possessions, heritages, justices, seigneuries et quelconques autres choses nobles et de noble condicion, sans ce que pour ce ilz ne aucun d'eulx dudit nombre desdiz douze eschevins, maire et douze conseillers, soient jamaiz tenuz de paier aucune finance à nous ne à noz successeurs roys de France ; et laquelle finance, quelle et combien grande que elle soit et pourroit monter, nous, de nostre auctorité et puissance dessusdicte, l'avons quictée, remise et donnée, quictons, donnons et remettons, de nostre dicte grace, par la teneur de ces dictes presentes. Et avec ce, leur octroyons et voulons qu'ilz joyssent de tous privilèges, droiz, immunitez, franchises, coustumes, libertez, usaiges et de toutes autres choses, comme font et ont acoustumé et doivent faire chevaliers et escuiers et autres nobles dudit pays et de nostre dit royaume, et tout ainsi et par la forme et manière qu'il a esté autresfoiz octroyé par feu nostre très chier seigneur et ayeul, que Dieu absoille, ausdiz maire, eschevins et conseillers de nosdictes villes de Poictiers et de la Rochelle

Les lettres patentes de Charles V en date de décembre 1372, conférant la noblesse aux maire et échevins de Poitiers, ont été publiées dans l'un de nos précédents volumes. (Arch. hist. du Poitou, t. XIX, p. 233-236). Celles que le même roi donna en faveur des officiers municipaux de la Rochelle sont datées du Louvre, le 8 janvier 1373 n. s. Le texte en est imprimé dans le recueil des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. V, p. 575.

. Si donnons en mandement, par ces dictes presentes, à noz amez et feaulx gens de noz comptes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, officiers et commissaires, par nous commis et à commettre, ou à leurs lieuxtenans et commis, presens et avenir, et à chascun d'eulx, si comme à lui appartiendra et qui requis en sera, que lesdiz maire, douze eschevins et douze conseillers jurez et les dessus nommez quia present sont, et tous leurs successeurs èsdiz offices, qui ou temps avenir seront, et leurdicte lignée, et chascun d'eulx, facent et laissent joir et user de nostre grace et octroy, sans leur faire ne souffrir estre fait au contraire aucun destourbier ou empeschement; lequel, se pour ce fait, mis ou donné leur avoit esté ou estoit, si le rappellent, ostent et remettent, ou facent rappeller, oster et mettre sans delay au premier estat et deu. Et pour ce que lesdiz maire, eschevins et conseillers jurez et les dessus nommez et leurs successeurs ne se pourroient bonnement aider de ces dictes presentes ne icelles monstrer, quant ilz voudroient ou mestier leur seroit, pour ce que elles touchent et pourroient toucher plusieurs personnes et leurs successeurs ou temps avenir, nous voulons et leur avons octroyé et octroyons que aux transcriptz ou vidimus d'icelles, faiz soubz seel royal, soit adjoustée plaine foy, et que ilz leur vaillent et prouffitent et leur soient de tel effect et valeur, comme ce present original. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autre chose nostre droit et l'autruy en toutes. Donné à Amboise, ou moys de novembre l'an de grace mil cccc. soixante et ung, et de nostre règne le premier

Une copie de ces lettres, faite sur l'original conservé à l'Hôtel-de-Ville de Niort, se trouve avec, l'arrêt d'enregistrement, à la Chambre des

Comptes, du 5 février 1463, dans la collection de dom Fonteneau (t. XX, p. 261 et 267). Elles ont été publiées par Augier de la Terraudière, Thrésor des titres de la ville de Niort, 1675, d'après cet original, et par les éditeurs des Ordonnances des rois de France, t. XV, p. 219, d'après le registre du Trésor des chartes. M. L. Favre en a reproduit la partie essentielle dans son Hist. de la ville de Niort, in-8°, 1880, p. 99-101. A. Giry les a commentées dans le chapitre consacré aux institutions municipales de Niort de sa remarquable étude intitulée : Les Etablissements de Rouen, t. I, p. 138-169.

La Chambre des comptes n'enregistra les lettres conférant la noblesse aux maire et échevins de Niort, qu'après avoir fait des remontrances au roi et sur lettres de jussion, le 5 février 1463 n. s., avec d'autres lettres de Louis XI du 11 février 1462, recueillies aussi par dom Fonteneau, faisant remise aux maires, échevins et conseillers de la finance qu'ils devaient au roi pour avoir joui des fiefs et héritages nobles avant d'avoir été anoblis. Enfin des lettres patentes du 14 mars 1466 déclarèrent que l'intention du roi avait été et était que seuls ceux qui vivaient noblement, parmi lesdits maires, échevins et conseillers de la ville de Niort, devaient être déchargés, exempts et affranchis des tailles et des aides. (Dom Fonteneau, t. XX, p. 265, 267, et Ordonnances, t. XV, p. 323.)

. Ainsi signé : Par le roy, les sires du Lau et de Baugy et autres presens. Le Prevost. —Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCLI Novembre 1461

Lettres permettant à Jean Mourraut, conseiller du roi, de fortifier son hôtel et lieu de la Motte-sur-Croutelle, et lui octroyant tous droits de haute et moyenne justice en ladite seigneurie.

AN JJ. 198, n° 323, fol. 283 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de nostre bien amé maistre Jehan Mourraut

Jean Mouraut ou Mourraut, seigneur de la Mothe-sur-Croutelle, conseiller du roi, conservateur des privilèges royaux de l'Université de Poitiers, a été l'objet d'une notice biographique dans notre précédent volume, p. 328, note. Nous avons vu aussi (en cet endroit et cidessus, p. 134, note) que Louise Rabateau, femme d'Hector Rousseau, assassiné au mois de mai 1458, avait été mariée en premières noces à un Jean Mouraut, dont elle avait alors une fille, ce qui reporte le décès de son premier mari à l'année 1455 au plus tard. Or, comme l'on rencontre dans les textes, de 1433 à 1468, le nom de Jean Mouraut, conseiller du roi, seigneur de la Mothe-sur-Croutelle, etc., nous avions tout d'abord supposé qu'il avait pu y avoir durant cette période deux personnages de même nom, revêtus des mêmes charges et titres, le père et le fils, et que Louise Rabateau avait dû être la seconde femme du père. Mais, d'autre part, les textes où il est question de cette union ne disant pas qu'il s'agissait d'un sr de la Mothe, d'un conseiller du roi ou d'un conservateur des privilèges de l'Université, le premier mari de Louise Rabateau pouvait être aussi bien un oncle ou un cousin du côté paternel de notre personnage, portant le même prénom si commun de Jean. Aussi nous pensons maintenant que, malgré ce mariage, il est plus vraisemblable d'admettre que les documents rapportés dans notre précédent volume et ceux dont il est question ici se réfèrent à un seul et même Jean Mouraut, sr de la Mothe-sur-Croutelle, fils de Simon, seigneur du même lieu, qui vivait encore en 1437.

Ce Jean Mouraut avait épousé, avant le 26 août 1434, Jeanne Larcher, d'une famille bien connue de Poitiers. A cette date, il rendit à cause d'elle au seigneur de la Barre-P ouvré au un aveu de Hebergement de la Roche et ses appartenances, du moulin de Pouvreau avec le pré de la Rivière, et du ténement appelé les Ors-Piart, assis à la Pagerie, qu'il tenait à hommage plein à 60 sous de devoir à muance d'homme, aveu qu'il renouvela le 8 août 1443. Un autre aveu qu'il rendit vers 1450, toujours à cause de Jeanne Larcher, sa femme, de l'hébergement de la Boucherie, à Jean Tudert, maître des requêtes de l'hôtel, et à la femme de celui-ci, Catherine de Champdenier, dame de la Barre-Pouvreau, fut renouvelé le 10 juin 1456, à Guillaume Grany, seigneur dudit lieu, et à cette même date il rendit encore à ce personnage un aveu de deux borderies de terre appelées l'hébergement de la Boutinière, autre possession de Jeanne Larcher. Dans ce dernier acte, Jean Mouraut est qualifié licencié en lois, élu pour le roi en Poitou. (A. Richard, Archives du château de la Barre, t. II, p. 64, 65, 85, 223, 224.) Dans un contrat d'arrentement d'un hébergement à Seuilly qu'il conclut, en 1459, avec Jean Payen, bourgeois de Mirebeau, il prend le titre de conservateur des privilèges royaux de l'Université de Poitiers. (Arch. de la Vienne, G. 1213.) Une sentence arbitrale rendue par Denis d'Ausseure et Nicolas Acton, le 23 juin 1462, pour régler la possession du grand hôtel des Claveuriers et le partage d'autres biens entre les enfants de Maurice Claveurier, lieutenant général du sénéchal de Poitou, rappelle qu'un premier arbitrage, avait été demandé à Jean Mouraut, maire, et à Thomas Boylesve, bourgeois de Poitiers, qui avaient estimé à 3.000 livres la valeur dudit hôtel. (Arch. de la Barre, t. II, p. 403.) M. Ch. Babinet dit que notre Jean Mouraut faisait partie, avant 1437, de l'échevinage en qualité de conseiller non pair, qu'il passa, cette année-là, dans le collège des treize conseillers maîtres, qu'il fut cinq fois maire de 1438 à 1461, et mourut le 5 septembre 1468. (Les Echevins de Poitiers de 1372 à 1675. Extrait des Mém. de la Société des Antiquaires de l'Ouest, t. XIX, 1896, p. 13 du tirage à part.) Jean Mouraut et Jeanne Larcher eurent une fille unique, Anne, mariée à Yvon du Fou, chevalier, qui fut chambellan du roi, grand veneur de France, capitaine de Lusignan, gouverneur d'Angoumois, bailli de Touraine, sénéchal de Poitou, etc., mort en 1488. Nous le retrouverons dans notre prochain volume. Après la mort de son beau-père, il fit au nom de sa femme les hommages et aveux des fiefs de la Roche, de la Boutinière, de la Boucherie, etc., au seigneur de la Barre-Pouvreau, les 6 novembre 1469, 5 janvier 1470 et 2 mars 1474, puis, Anne Mouraut étant décédée, il les renouvela au nom de leurs deux fils mineurs, Jacques et François du Fou, dont il avait l'administration, le 20 septembre 1479. (Arch. du château de la Barre, t. II, p. 65, 66, 85, 86, 224.)

, nostre conseiller, contenant que il a plusieurs beaulx et anciens dommaines et heritaiges, tant à cause de la succes- sion de ses predecesseurs que autrement, situez et assis à cinq et à six lieues autour et à l'environ de nostre ville et cité de Poictiers, et mesmement en la chastellenie de Lezignen, enlaquelle il a plusieurs hommes et subgietz avec ung bel hostel assis en ladicte chastellenie, appellé la Mote et plusieurs hommes et subgiectz, rentes et revenues estans des appartenances et deppendances d'icelluy, et qu'il tient par hommaige et noblement de nous, à cause de nostre chastel de Lezeignen, et auquel lieu de la Mote il a une belle place et avantageuse, se elle estoit fortiffié, distant ele nostre dit chastel de Lezignen de quatre lieues ou environ et de nostredicte ville de Poictiers d'une lieue et demye ou environ ; laquelle place, pour la seurté de luy, sa femme et mesnaige, où il a entencion de user partie de ses jours, et pour obvier aux roberies et pilleries qui lui pourroient estre faictes, quant il y resideroit, pour ce que ladicte place est près du grant chemin, icellui suppliant a entencion de clourre et fortiffier ladicte place appellée la Mote, mais il ne l'oseroit faire, sans avoir noz congié et licence, si comme il dit, humblement requerant iceulx. Pour ce est il que nous, ces choses considerées et que lesdiz hommes et subgectz dudit suppliant n'ont lieu où ilz se puissent retraire en temps d'ostilité et de guerre, si propice et convenable que ledit lieu de la Mothe, à icellui suppliant, pour ces causes et pour consideracion de plusieurs bons, grans et agreables services que lui et autres ses parens et amis nous ont fait, font chascun jour enmaintes manières, et esperons que plus facent ou temps avenir, avons donné et octroyé, donnons et octroyons de grace especial, par ces presentes, congié et licence de fermer, clourre et fortiffier ledit lieu et place de la Mote, de fossez, paliz, tours, tournelles, portailz, garritez, barbecanes, pons leveiz, eschiffes et autres fortifficacions à ce necessaires et convenables, telles et ainsi que bon lui semblera ; et de nostre plus ample grace lui avons donné et octroyé, donnons et octroyons audit lieu de la Mote et sur toutes ses appartenances et appendances, hommes et subgietz dudit lieu, toute justice et juridicion, haulte et moyenne, forches patibulaires et tout ce qui de haulte et moyenne justice se deppend, peut et doit deppendre, reservé toutesvoyes à nous les ressort et souveraineté en cas d'appel seullement, et que il tiendra ladicte justice de nous par et soubz l'ommaige qu'il nous fait et est tenu de faire, à cause de sondit hostel de la Mote. Si donnons en mandement, par cesdictes presentes, à noz amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers à Paris, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans ou commis, presens et avenir, et à chascun d'eulx, si comme à lui appartiendra, que de noz presens grace, congié et licence et octroy facent, seuffrent et laissent nostredit conseiller, ses hoirs et successeurs joyr et user plainement et paisiblement, sans pour ce les molester, travailler ne empescher, ores ne pour le temps avenir, en corps ne en biens, en aucune manière; mais s'aucun empeschement leur avoit esté ou estoit fait, mis ou donné, si l'ostent et mettent ou facent oster et mettre sans delay à plaine delivrance et au premier estat et deu ; car ainsi nous plaist il estre fait. Et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l'autruy en toutes. Donné à Amboise, ou moys de novembre l'an de grace mil cccc. soixante et ung, et de nostre règne le premierCes lettres furent aussi enregistrées au Parlement de Paris, par arrêt de la cour en date du 13 mars 1464 n. s. (Arch. nat., reg. X1a 8606, fol. 41 v°.).

Ainsi signé : Par le roy, les sires du LauAntoine de Châteauneuf, sr du Lau. (Cf. ci-dessus, p. 299, note 2.), de CrussolLouis de Crussol, sénéchal de Poitou, auquel nous consacrons une notice ci-dessous, n° MCCCXCII., messires Jehan BureauJean Bureau, sr de Montglat. (Voy. notre vol. précédent, p. 92, note, et ci-dessus, p. 84, note.) Pierre BerartPierre Bérard, sr de Chissay, trésorier de France, anobli par Charles VII, membre du Conseil royal dès l'an 1445 (vol. précédent, p. 334, note 5)., chevaliers et plusieurs autres presens. Le Prevost. — Visa. Contentor. Dorchère.

MCCCLII Décembre 1461

Rémission accordée à Guillaume Guérineau, marchand de l'île de Bouin, meurtrier d'Yvonnet Joye, boucher, qui l'avait attaqué, pour se venger de ce qu'il l'avait fait exécuter pour dette.

AN JJ. 198, n° 69, fol. 68 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de Guillaume Guerineau, marchant demourant en l'isle de Bouing, de l'aage de vingt et cinq ans ou environ, contenant que, pour estre paié de la somme de cent solz monnoie de Bretaigne et cinquante et deux livres de suif en quoy ung nommé Yvonnet Joye, boucher, luy estoit tenu au terme saint Michel derrenier passé, pour certain appointement fait entre eulx deux, et auquel appoinctement tenir et garder lesdictes parties avoient esté condennées de leurs consentemens et à leurs requestes, ledit suppliant voyant que ledit Joye ne le paieoit ainsi que faire devoit raisonnablement, fist faire execucion sur les biens dudit Yvonnet Joye, en son absence, jusques à la valeur des dictes sommes...Blanc de deux ou trois mots sur le registre. par justice dudit lieu de Bouign touchant la Bretaigne, le dix neufviesme jour du moys d'octobre derrenier passé, dont ledit Yvonnet Joye fut couroucé, et à ceste cause en conceut hayne contre ledit suppliant, en disant qu'il en paieroit bien de ce qu'il avoit fait faire sur lui ladicte execucion ; et en ce mesmes jour trouva manière de rencontrer ledit suppliant, lequel estoit audit lieu de Bouign et s'en aloit à la maison de sa mère, environ l'eure de souleil couchant. Et incontinant que ledit Joye apparceut ledit suppliant,il lui dist en soy monstrant fort esmeu, telles parolles en effect : « Tu m'as aujourd'uy fait exécuter ! » A quoy ledit suppliant respondit que il l'avoit fait pour estre paié desdictes sommes que ledit Yvonnet Joye lui devoit bien et raisonnablement, en lui disant oultre qu'il le contentast et il lui feroit rendre ses gaiges. Et lors ledit Joye, en respondant audit suppliant et comme esmeu plus que devant, lui dist que voirement il le paieroit, mais que ce seroit tout à ung cop, qui sonnoit forme de menasse envers la personne dudit suppliant, jà soit ce que lui et ledit feu Yvonnet Joye feussent en asseurté l'un vers l'autre, et par ce ne se deussent meffaire l'un à l'autre sur peine capitale, selon les coustumes et usaiges de nostre dit païs de Poictou. Et en procedant de parolles en effect, ledit Yvonnet Joye se print malicieusement à la personne dudit suppliant et aussi icellui suppliant, en resistant à la malice dudit Yvonnet, embrassa ledit Yvonnet et se tindrent au corps l'un l'autre par aucun temps, et jusques à ce qu'il survint des gens qui par charité les departirent. Lesquelx, voyans le felon couraige dudit Yvonnet Joye, le detindrent a force, afin qu'il ne courut sus audit suppliant. Lequel suppliant incontinant à ceste cause se mist à chemin pour s'en aler, et en s'en retournant, rencontra la femme dudit Yvonnet Joye, laquelle incontinant lui courit sus et le print aux cheveulx et lui donna plusieurs cops sur le visaige et ailleurs ; et non contens de ce, ledit Yvonnet Joye acourut contre ledit suppliant, tenant ung cousteau en sa main ; et quant il fut près dudit suppliant, survint illec ung homme qui le print au corps ou à la robbe. Laquelle chose voyant, ledit suppliant qui estoit fort esmeu et desplaisant des oultraiges que on lui faisoit desdiz debatz et ques- tions, et en grant chaleur, et lequel à ceste cause doubtant estre envilleny de sa personne par ledit Yvonnet Joye, et pour obvier à sa fureur, tira ung petit cousteau, qu'il avoit en sa gayne ataché à sa saincture, et en frappa ledit Yvonnet Joye ung seul cop en la cuisse et le ventre ; lequel Yvonnet tout incontinant couru après ledit suppliant et par l'effusion du sang qui yssy de sa playe cheut à terre et en fut emporté à la maison d'une sienne parante, et tantost après, par faulte de bon gouvernement ou autrement, ala de vie à trespassement. A l'occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s'est absenté du pais et n'y oseroit jamais retourner, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant, [consideré] ce que dit est et que ledit suppliant n'a esté aggresseur en ce fait ne en parolles, et que ce qu'il a fait il l'a fait faire par justice et pour estre paié de ses debtes, et que en tous autres cas il est bien famé et renommé, il nous plaise sur ce lui impaitir iceulx. Pour quoy nous, attendu ce que dit est, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant avons ou cas dessus dit remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par cesdictes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou moys de decembre l'an de grace mil cccc. soixante et ung, et de nostre règne le premier.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Gavigneau. — Visa. Contentor. Detaise.

MCCCLIII 20 janvier 1462

Lettres données à l'occasion de l'entrée de Louis XI à Marans, portant délivrance de la personne de Jacques de Puyguyon, écuyer, détenu dans les prisons dudit lieu, et remise des peines qu'il avait encourues comme complice du meurtre d'Hector Rousseau.

AN JJ. 198, n° 314, fol. 276 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France, à tous ceulx qui ces presentes lettres verront, salut. Receue avons l'umble supplicacion de nostre bien amé Jacques de Puiguion

Déjà au mois de mai 1459 (ci-dessus, p. 151), Jacques de Puyguyon avait obtenu de Charles VII des lettres de rémission pour le même fait, c'est-à-dire pour la part qu'il avait prise au meurtre d'Hector Rousseau. Il n'en est pas question dans ce nouveau texte. Le sr de Puyguyon n'était pas encore parvenu à les faire entériner. C'est pour cela qu'il imagina ce subterfuge, de se rendre dans les prisons de Marans, ayant appris que Louis XI, se rendant de Saintes à la Rochelle, s'arrêterait dans cette ville, et afin de bénéficier de la grâce plénière que le roi avait accoutumé d'octroyer aux prisonniers à sa première entrée dans une ville. Les lettres qui accompagnaient cette mise en liberté avaient une efficacité plus grande que les rémissions proprement dites. Le roi était censé avoir accordé cette grâce de son plein gré, motu proprio, sans aucune requête et pour ainsi dire à l'insu du criminel. Dans un article intitulé le Meurtre de Jean Berry, secrétaire du duc de Bourbon, dont les coupables obtinrent, dans les mêmes conditions exactement, des lettres d'abolition, M. B. de Mandrot fait ressortir la différence que nous signalons (Revue historique, n° de mars-avril 1905, p. 246). « La lettre de grâce d'entrée de ville, dit-il, n'était pas débattue d'obreption, de subreption ni d'incivilité. » Toutefois il n'était pas fait remise de la réparation civile due à la victime ou à ses héritiers et ayants droit.

Quoique la grande chancellerie n'ait transcrit sur ses registres que les lettres de grâce d'entrée à Marans délivrées en faveur de Jacques de Puyguyon, les autres complices de l'assassinat d'Hector Rousseau n'avaient pas manqué d'avoir recours au même stratagème, alors assez fréquemment employé, comme nous l'apprend le registre du Parlement. Dès le 25 mars 1462, Jacques de Puyguyon se rendit prisonnier en la Conciergerie du Palais et présenta à la Cour ses lettres d'abolition dont il requérait l'entérinement. Les autres ne comparurent que le 6 mai et adressèrent la même requête. C'étaient Mathurin d'Appelvoisin, chevalier, Jacques Jousseaume, Jean de Puyguyon, Jean Beufmont, écuyers, Nicolas Martin et Jean Drevon (sic) dit Chauvin. Leur avocat, après avoir exposé où en était la procédure relative à l'enregistrement des premières rémissions accordées aux meurtriers d'Hector Rousseau, ajoute : « Depuis est advenu Ie trespas du feu roy, après lequel le roy s'est trouvé à Marans, où a trouvez prisonniers Appelvoisin et les autres dessus diz pour raison dudit cas, leur a fait ouvrir les prisons, leur a pardonné ledit cas touchant son interest et baillé ses lettres d'abolicion, par lesquelles il mande les mettre hors de procès et imposé silence à son procureur, sans ce qu'ilz soient plis tenuz retourner en personne. Si requiert que les lettres soient veues et entérinées, et en ce faisant qu'ilz soient mis hors de procès touchant Ie Procureur du roy, et ne soient plus tenuz de comparoir en personne. » Le procureur général, par la bouche de son substitut Simon, « dit qu'il a veu les lettres d'abolicion octroyées à Appelvoisin et autres dessus diz par le roy et pour son joyeux advènement, et a tousjours veu user en telles matières que les prisons ont esté ouvertes franchement et quictement aux emprisonnez, au moien de telles lettres d'abolicion touchant l'interest de justice, et pour ce ne peut empescher que lesdites lettres ne soient enterinées, et s'en rapporte à la discretion de la court », Popaincourt, avocat de Louise Rabateau et d'Albert Rousseau, la veuve et le frère de la victime, répondit que les demandeurs avaient tellement épouvanté les témoins que plusieurs étaient en fuite, qu'ils avaient trouvé moyen par une fausse accusation de faire mettre en prison Albert Rousseau, pour l'empêcher de faire procéder à son enquête en temps utile, qu'ils avaient usé de fraude et de contrats simulés pour se soustraire à un arrêt de la Cour adjugeant une provision pécuniaire à la veuve et aux enfants d'Hector Rousseau. Dans l'abolition qu'ils s'étaient fait délivrer à Marans, ils avaient confessé plus que dans leur première rémission. Pour ces motifs, il demandait que l'on continuât à procéder sur ladite rémission, nonobstant l'abolition, et que, pour le payement des provisions, on pût toujours user de contrainte contre les meurtriers par emprisonnement de leurs personnes, etc. (Arch. nat., X2a 32, aux dates des 15 mars et 6 mai 1462.) En effet, les procédures se poursuivirent contre Appelvoisin, Jousseaume, Pùyguyon et les autres ; mais incontestablement leur situation judiciaire était devenue bien meilleure, depuis leur subterfuge de Marans, et les réparations auxquelles ils furent condamnés par l'arrêt définitif du 10 septembre 1463 furent beaucoup moins dures qu'elles ne l'eussent été, sans les lettres de grâce du 20 janvier 1462. (Voy. l'Introduction du présent volume.)

escuier, filz de Jehan de Puiguion, à present prisonnier ès prisons de ceste ville de Marant, contenant que, ou moys d'avril mil cccc. cinquante huit, le seneschal de Poictou ou son lieutenant qui lors estoit et les gens et conseilliers en Poictou de feu nostre très chier seigneur et père, que Dieu absoille, estans lors assemblez à Fontenay le Conte et deuement informez par informacion precedente des exactions, pilleries, excès, voye de fait, rebellions, desobeissances et autres maulx innumerables que avoit faiz et faisoit de jour en jour feu maistre Hector Rousseau, lequel demouroit en une maison assise ou villaige ou bourg de Brueil Barret, laquelle il avoit de fait et de force ostée et tollue à ung povre laboureur du païs, et pour soy deffendre et resister aux officiers royaulx et autres et à justice, ainsi qu'il estoit acoustumé de faire, y avoit et tenoit coulverines, arbalaistres et autres habillemens de guerre, et avec luy tenoit en habillement de guerre gens meurdriers, larrons et autres gens de très mauvaise vie, fut deliberé et ordonné que il et sesdiz complices seroient prins aux corps et menez en noz prisons de Poictiers, pour illec ester à droit et recevoir pugnicion et correction desdiz crimes et delitz, selon leurs demerites. Et pour ce faire, furent par ledit seneschal ou sondit lieutenant et par deliberacion desdictes gens de conseil données lettres ou mandement adressans à nostre premier sergent, et aussi certaine commission à Mathurin Marot, lors substitut à Fontenay le Conte du procureur en Poictou de nostre dit feu seigneur et père. Lesquelz GuerartGuérart est le nom du sergent royal, comme on le voit par les lettres de rémission de mai 1459 ci-dessus. et Marot, sachans que ledit Rousseau et sesdiz complices usoient de voye de fait et se tenoient en habillement de guerre, pour eulx defendre et courir sus aux officiers de justice, et que pour ce n'oseroient sans avoir aide proceder à la poursuite dudit Rousseau et de sesdiz complices, mandèrent, que que soit ledit Marot, à Jacques Jousseaume, escuier, seigneur de la Geffardière, qu'il se rendist et ses gens en bon habillement, à certain jour de dimenche, devant ladicte maison dudit Rousseau audit lieu du Brueil Barret, pour aider à prendre icellui Rousseau et sesdiz complices. Lequel Jousseaume, voulant obeir à justice, se rendy, ses gens et autres en habillement au lieu du Teil, le samedy au soir, qui est près dudit lieu du Brueil Barret, en l'ostel du père dudit suppliant. Duquel hostel ledit Josseaume et ceulx de sa compaignie partirent le landemain jour de dimenche et se transportèrent devant l'ostel dudit Rousseau audit lieu du Brueil Barret, et avecques eulx et tantost après y ala ledit suppliant et porta avecques lui une arbalaistre et certain nombre de traict. Et après ce que ledit suppliant et autres furent devant ladicte maison, et avant que lesdiz Marot et Guerrart, qui ne vindrent jusques au soir, feussent arrivez, ledit Rousseau qui s'estoit enfermé oudit hostel et huit ou dix hommes de defense avecques lui en habillement de guerre, tira traict d'arbalaistre et coulverines, en usant de parolles oultraigeuses et deshonnestes contre ledit Jousseaume et autres qui estoient devant ledit hostel, par aucun desqueulz y eut aussi traict tiré, mais non pas par ledit suppliant. Et ainsi que lesdiz Guerart et Marot qui avoient lesdiz mandement ou commission de prandre au corps icellui Rousseau furent arrivez et que l'en voult faire diligence de prandre au corps icellui Rousseau et ses diz complices, qui estoient enfermez oudit hostel et se deffendoient, advint par coulpe et faulte dudit Rousseau et autres qui estoient enfermez avecques luy, et par les pouldres de canon et gresses qu'ilz avoient en l'une des chambres d'icellui hostel, ouquel icellui Rousseau se tenoit et deffendoit et par la fenestre de la chambre de laquelle il avoit tiré et tiroit traict de coulverines et arbalaistes, que le feu se print soubzdainement en ladicte chambre et ou lit estant en icelle, par lequel ladicte chambre et tout ledit hostel furent ars et brulez. Et qui plus est, advint aussi que ledit Rousseau, lequel à l'occasion dudit feu s'estoit retraict sur ledit hostel fut tué d'un raillon ou autre trait d'arbalaiste, qui fut tiré par ung arbalaistier qui estoit devant ledit hostel et n'estoit avec ledit Jousseaume, ne autres de sa compaignie, et n'avoient de lui congnoissance. Pour occasion duquel cas et pour certaines lettres impetrées sur ce de nostre dit feu seigneur et père, par Loise Rabatelle, vefve dudit feu Rousseau et Albert Rousseau, ès noms qu'ilz procedent, contre ledit suppliant, en lui voulant imposer qu'il estoit chargié et coulpable dudit cas, fut dès l'an mil cccc. cinquante et huit prins au corps et constitué prisonnier ès prisons...,Quelques mots paraissent avoir été omis par le scribe en cet endroit. duquel il fut et a esté detenu prisonnier l'espace de deux ans ou environ, sans proceder contre luy à absolucion ou condempnement. Mais ce pendant, pour ce que il sembla audit suppliant que aucuns des conseillers de nostredicte court, lesquelz estoient commis à assister à cause dudit cas previlegié avecques l'official et autres officiers de nostredit conseiller l'evesque de Paris, à faire le procès dudit suppliant, l'avoient grevé et lui faisoient grief, appella d'eulx. Duquel appel il [fut] decheu et pour ce fut par nostredicte court de Parlement condempné en l'admende de soixante livres parisis, et certain temps après fut ledit suppliant par nostre dicte court de Parlement eslargy touchant ledit cas previlegié jusques à certain jour, et semblablement fut eslargy par nostre dit conseiller touchant le delit commun. Mais ce neantmoins il demoura prisonnier par long temps à cause et pour raison de ladicte amende de soixante livres parisis, et après de rechief fut eslargy à certain jour ou jours, tant par nostredicte court de Parlement que par nostredit conseiller l'evesque de Paris, sans ce que contre lui ait esté procedé à absolucion ou condempnacion ; et pour ce que tous jugemens sont à doubter et que pour raison du cas et choses dessus dictes ledit suppliant pourroit demourer en grant et longne involucion de procès, ainsi qu'il nous a fait remonstrer, requerant humblement comme, pour ladicte cause, il ait par long temps esté tenu en procès et souvent obey personnellement tant en nostredicte court de Parlement que par devant l'official de nostredit conseiller, et à ceste cause faiz si grans fraiz qu'il y a despendu tout son vaillant, que ses predecesseurs ont toute leur vie servy ou fait de la guerre pour la deffense de nostre royaume, il nous plaise le mettre du tout hors dudit procès, en lui donnant plainière grace et pardon dudit cas, et le lui pardonner et sur ce luy benignement impartir et eslargir nostre grace. Savoir faisons que nous, les choses dessus dictes considerées et les bons services que les predecesseurs dudit suppliant ont fait à nous et aux nostres ou fait de la guerre et que esperons que feront, et qu'il. a pour ladicte cause souvant comparu personnellement tant en nostredicte court de Parlement que en la court de l'official de nostredit conseiller, et fait de grandes mises et despenses, considerans aussi que avons bien acoustumé, après nostredit joyeulx avenement à la couronne, eslargir liberalment nostre grace à tous ceulx qui sont prisonniers ès villes et placés où nous entrons et passons, ledit Jacques de Puiguion avons, pour cescauses et [autres] consideracions à ce nous nouvans, à nostre première entrée en ceste ville et place de Marant depuis nostredit nouvel advenement à la couronne, fait delivrer et mettre hors desdictes prisons de Marant, et le fait et cas dessus declairé, les circonstances et deppendences d'icelluy, en quelque manière et pour quelque cause et occasion qu'il soit advenu, et que ledit suppliant soit ou puisse estre chargié, coulpable et tenu envers nous et justice, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, lui avons quicté, remis et pardonné, quictons, remettons et pardonnons par ces presentes, avec toute peine, offense et amende corporelle, criminelle et civille en quoy il pourroit, à cause des choses dessus dictes et des deppendances, estre encouru envers nous et justice. Et en oultre avons volu et ordonné, voulons et ordonnons que lesdiz procès qui faiz ont esté, tant en nostredicte court de Parlement que en la court dudit official de nostredit conseillier l'evesque de Paris, et les deppendances soient mis au neant et les y avons mis et mettons par ces dictes presentes, et que ledit suppliant soit entièrement mis hors de court et desdiz procès, sans ce que à cause du cas et procès dessusdiz ne des deppendences, il soit plus tenu aler ne comparoir en personne en nostredicte court de Parlement ne par devant ledit official, ne autres officiers de nostredit conseillier. Et sur ce imposons silence perpetuel à nostredit procureur, sauf l'interetz et satisfacion à partie, s'aucune en y a. Si donnons en mandement, par ces dictes presentes, à noz amez et feaulx conseilliers, les gens tenans et qui tiendront nostredit Parlement, que de nos- tre presente grace et octroy ilz facent, seuffrent et laissent ledit suppliant joïr, etc. Donné audit lieu de Marant, le xxme jour de jamrier l'an de grace mil cccc. soixante et ung, et de nostre règne le premier.

Ainsi signé : Par le roy, les mareschaulx, les sires Du Lau et de MontglatJean Bureau, chevalier, seigneur de Montglat et de la Houssaye, maître de l'artillerie. (Cf. ci-dessus, p. 84, note 6, et notre t. VIII, p. 172, note.) Au début de son règne, Louis XI, par lettres patentes dont on a conservé la minute sans date, confirma le sire de Montglat, trésorier de France, chambellan et conseiller du roi, maître des comptes, maire perpétuel de Bordeaux, dans les offices dont il avait été pourvu par Charles vu. (Bibl. nat., ms. fr. 20488, fol. 65.) et autres presens. De La Loère.

MCCCLIV Janvier 1462

Rémission octroyée à Florent Morin, de Sainte-Gemme, soupçonné d'avoir causé la mort de Mathurin Barbier, son voisin, parce que, dans une altercation, il l'avait frappé d'un bâton à la tête.

AN JJ. 198, n° 150, fol. 131 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et à venir, nous avoir receue l'umble supplicacion des parens et amys charnelz de Florant Morin, chargié de deux petiz enfans orphelins, demourant ou bourg Sainte Gemme en Poictou ou diocèse de Luçon, contenant que, le vendredi devant la feste monsieur saint Vincent, ou moys de janvier derrenier passé eut ung an, ledit suppliant se trouva près l'ostel d'un sien voisin oudit lieu de Sainte Gemme, nommé Mathelin Barbier, ouquel hostel il avoit acoustumé aler, venir et converser paisiblement comme chex son bon voisin, et illecques desjuna et incontinant après s'en yssy hors dudit hostel, pour aler là ou bon lui sembleroit, comme il avoit acoustumé ; et tantost emprès lui souvint qu'il avoit oublié ung bissac chex ledit Mathelin, lequel il retourna querir, et en entrant oudit hostel et à l'entrée d'icellui, il ouy ledit Mathelin Barbier reprochant à sa femme qu'elle avoit esté icellui matin chez ledit Florant Morin, suppliant, dont il n'estoit riens ; mais oudit debat ou reproche dudit Mathelin et de saclicte femme, dist ledit Mathelin plusieurs parolles portant haynne etjalousie contre ledit suppliant. Auquel suppliant ladicte femme dist, au retour qu'il vint querirsondit bissac, tantost qu'elle le vit : « Ne venez plus ceans, car je suis batue par depit de vous ». A la quelle sondit mary va respondre : « Tu mens », et elle lui respondy : « Vrayement, si suys. » Après lesquelles parolles, ledit suppliant va dire : « Vrayement si, vous l'avez batue par despit de moy. Car je l'ay bien ouy dès l'uvs, quant je suis entré seans». Et lors ledit mary dist : « Et bien, veez la par despit de vous », en frappant sadicte femme du pié par my le costé, elle toute estandue en la place par devant lui. Et incontinant ledit suppliant s'avança pour defendre ladicte femme, pour l'oster du dangier de sondit mary, et les vouloit separer pour les rapaiser ; car il veoit ledit Mathelin vilainnement esmeu pour oustragier sadicte femme, et le rebouta doulcement. Et lors ledit Mathelin va dire : « Vous en faites de belles, quant je n'y suis pas ». Auquel ledit suppliant, desplaisant desdictes paroles, va dire : « Vrayement, tu mens » ; et ledit Mathelin respondi : « Vrayement, mais toy, et va ou deable ». Puis icellui suppliant va repplicquer : «Mais toy », tant que plusieurs foiz se retournèrent comme bien courroucez, en disant l'un à l'autre : « Mais toy, mais toy, mais toy ». Pour occasion desquelles parolles, ledit Mathelin s'efforça de vouloir rebatre sadicte femme ; et lors ledit suppliant, fort esmeu et courroucé que par despit de luy et desdictes paroles il vouloit rebatre sadicte femme en sa presence, print emprès lui ung batoer à bute qu'il trouva devant lui sur une huche, et de chaude colle frappa deux cops sur la teste dudit Mathelin, qui se efforçoit de vouloir frapper ledit suppliant. Après lesquelz cops, ladicte femme se mist entre deux pour les deppartir, et ledit suppliant s'en yssi hors dudit hostel. Et incontinant icelle dicte femme s'en ala plaindre et denoncer à justice que ledit suppliant avoit batu son mary ; après laquelle denonciacion, ladicte femme s'en retourna à sondit hostel par devers sondit mary, lequel elle fist abiller de sa teste, laquelle il avoit blecée, comme dit est. Et tantost après, en ladicte heure et jour, ala et vint ledit Mathelin par sondit hostel, et beut et menga comme il avoit acoustumé de faire paravant, jusques au dimanche ensuivant qu'il se senty fort malade quoy que soit de l'estomac, lequel il avoit de long temps grevé et debilité, et aussi des autres parties de son corps, dont il se senty fort alteré et vesqui jusques au mercredi ensuivant. Pendant lequel temps, ledit Mathelin disposa et ordonna son fait et derrenière voulenté, tout ainsi que bon lui sembla ; et entre autres choses lui desplaisoit très fort, à la fin de ses jours, d'avoir eu suspeçon contre sadicte femme ne aussi d'avoir injurié ledit suppliant. Pour laquelle foiblesse et autres maladies, et par deffault de gouvernement ou autrement, il est alé de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s'est absenté du païs et n'y oseroit jamais retourner, converser ne demourer, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, si comme il dit, humblement requerant iceulx, etc. Pour quoy nous, consideré ce que dit est, voulans misericorde estre preferée à rigueur de justice, audit suppliant, en faveur de ses diz petiz enfans, le cas dessusdit avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces dictes presentes, au seneschal de Poictou [ou à son lieutenant] à son siège de Fontenoy le Conte, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou moys de janvier l'an de grace mil iiiie lxi, et de nostre règne le premier.

Ainsi signé : Par le conseil. Authouis. — Visa. Contentor. Valengelier.

MCCCLV Janvier 1462

Confirmation des statuts accordés aux barbiers de la ville de Poitiers, en août 1410, par Jean duc de Berry, comte de Poitou.

AN JJ. 198, n° 356, fol. 312 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir veu certaines lettres de feu nostre très chier seigneur et père, que Dieu absoille, obtenues par Colinet Candillon, son premier barbier et varlet de chambre, et les autres barbiers demourans ès villes de noz païs et conté de Poictou, desquelles la teneur s'ensuit : Charles, etc. Donné à Poictiers, ou mois de fevrier l'an de grace mil cccc. trente huit, et de nostre règne le xviieCette confirmation du roi Charles VII contient le texte des statuts, leur ratification par Jean duc de Berry, et les premières lettres du même Charles VII, alors qu'il n'était encore que dauphin et comte de Poitou (Bourges, janvier 1420 n. s.). Ces divers textes ont été publiés dans nos septième et huitième volumes (Arch. hist. du Poitou, t. XXVI, p. 355, et XXIX, p. 110) et dans le recueil des Ordonnances des Rois de France (in-fol. t. XX, p. 307), avec les confirmations subséquentes de Louis XI de Charles VIII, novembre 1485, et de Louis XII, mai 1499.. Lesquelles lettres dessus transcriptes et tout le contenu en icelles nous aians agreables, avons loué, ratiffié et approuvé, et, par la teneur de ces presentes, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal dont nous usons, louons, ratiffions, approuvons et confermons, en tant qu'ilz en ont acoustumé bien et deuement joyr et user le temps passé. Si donnons en mandement, par ces presentes, aux seneschaulx de Poictou et de Xantonge, bailly de Touraine, des ressors et Exempcions d'Anjou et du Maine, gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d'eulx, si comme à lui appartiendra, que audit Colinet Candillon, nostre premier barbier et les autres barbiers de nostre dicte ville de Poictiers et païs de Poictou, qui à present sont et qui pour le temps avenir seront, desdiz previlleiges et franchises facent, seuffrent et laissent joir et user plainement et paisiblement, sans les molester, travailler ou empescher, ne souffrir estre molestez, travaillez ou empeschez aucunement au contraire, mais s'aucun empeschement leur avoit esté ou estoit sur ce fait, mis ou donné au contraire, si l'ostentet facent oster et mettre sans delay au premier estat et deu. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l'autruy en toutes. Donné à Poictiers, ou moys de janvier l'an de grace mil cccc. soixante et ung, et de nostre règne le premier.

Ainsi signé : Par le roy....Mots omis.. Visa. Contentor. J. Duban.

MCCCLVI Février 1462

Rémission en faveur de Jean Laurens le jeune qui, en défendant son père et sa mère, avait frappé mortellement Jean Marot d'un coup de bâton.

AN JJ. 198, n° 281, fol. 247 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Jehan Laurens le jeune, contenant que, depuis deux moys ença, entre Jehan Laurens et Guillemette, sa femme, et Bertrand Laurens, aussi leur filz, d'une part, et Raymond Marot, presbstre, Jehan Marot, son frère, et Mathurine, sa femme, se meut debat et noyse et tellement que lesdiz Raymond et Jehan Marotz, frères, et ladicte Mathurine, femme dudit Jehan Marot, blecèrent très enormement lesdiz Jehan Laurens et sa femme jusques à grant effusion de sang, et dont ledit Jehan Laurens est encores malade. Auquel debat et conflict survint ledit Jehan Laurensle jeune, suppliant, qui en oy les nouvelles, lequel avoit ung baston en son poing et trouva sesdiz père et mère bleciez. Et lors ledit Jehan Marot, lequel tenoyt une pierre en chacune de ses mains, non content de ce que il avoit fait à sesdiz père et mère, geta l'une desdites pierres tant qu'il peut contre la poictrine dudit Bertrand Laurens, frère dudit Jehan Laurens le jeune. Et ce voyant ledit suppliant, qui de ce fut desplaisant et aussi de sesdiz père et mère qui estoient ainsi bleciez, frappa dudit baston qu'il tenoit ledit Jehan Marot ung coup par my la temple, duquel il cheut à terre. Et lors fut par les femmes qui illec estoient relevé et, luy relevé, gecta des pierres contre lesdiz laurens et ladicte femme dudit Jehan Laurens l'aisné. Et après s'en alla tant de son pié que à l'aide d'aucuns en sa maison, et ung jour ou deux après, par le moyen dudit cop, par deffault de bon gouvernement ou autrement, est allé de vie à trespassement. A l'occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s'est absenté du pays et n'y oseroit jamais retourner, converser ne repairer, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu que lesdiz Marotz furent agresseurs en fait et en parolles, et que ledit suppliant, à l'eure qu'il frappa ledit coup, estoit tout courroucié, eschauffé et esmeu de ce que on avoit blecié sesdiz père et mère et que depuys ledit coup frappé ledit Marot gecta dereschief des pierres et qu'il a depuis vescu par deux jours, que en autres cas ledit suppliant est bien famé et renommé, il nous plaise sur ce luy impartir iceulx. Pourquoy nous, attendu ce que dit est, audit suppliant avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Poictou ou à son lieutenant, etc. Donné à Bordeaulx, ou moys de feuvrier l'an de grace mil cccc. soixante et ung, et de nostre règne le premier.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. P. de Fontaines. — Visa. Contentor. Duban.

MCCCLVII Février 1462

Lettres de sauvegarde en faveur de l'évêque et du chapitre de l'église cathédrale de Maillezais.

AN JJ. 198, n° 312, fol. 275 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Ludovicus, Dei gracia Francorum rex. Notum facimus universis, tam presentibus quam futuris, quod nos predecessorum nostrorum vestigiis inherere volentes, totis desideramus affectibus regni nostri subditos et precipue personas ecclesiasticas in pacis transquilitate fovere, ut eo libentius valeant Domino famulari et ad divinum servicium intendere devocius astringantur, quo per regalem potenciam ab invasionibus, oppressionibus, inquietatibus, injuriis et violenciis noverint se deffensas. Eapropter nos, ad supplicacionem dilectorum nostrorum episcopi et capituli ecclesie cathedralis Malleacensis

L'évêque de Maillezais, de 1455 à 1475 environ, fut Louis Rouault, non pas fils de Louis, dit Béthis, comme le prétendent les généalogistes, mais son petit-fils. Il était fils cadet de Miles Rouault, sr de la Mothe, et frère de Marguerite, qui avait épousé Bertrand Rataut, seigneur de Curzay, et fut connu tout d'abord comme prieur d'Auzay avant Pan 1430. Nous avons vu comment, n'ayant pu se faire élire abbé de l'Absie contre Bernard d'Appelvoisin, Louis Rouault s'empara de l'abbaye par un coup de force avec l'aide de son beau-frère, le 5 octobre 1430, l'occupa militairement et la mit au pillage. (Voy. notre t. VIII, p. 139141, note.) Il fut élu abbé de Saint-pierre de Bourgueil, le 31 octobre 1439, et resta à la tête de ce monastère comme commendataire, pendant le temps qu'il occupa le siège épiscopal de Maillezais. Louis Rouault mourut le 3 des ides de mars (13 mars) 1477, quelques années après avoir abdiqué, lit-on dans la Gallia christiana (t. XIV, col. 664 ; voy. aussi t. II, col. 1374).

L'évêque de Maillezais fut aussi impliqué dans un long procès criminel, dont on suit la trace sur les registres du Parlement depuis le 20 mars 1467 jusqu'au 21 mai 1471, sans savoir comment il se termina. Il s'agissait de contrainte et violences qui auraient été exercées contre Catherine Rouault, la plus jeune fille de feu Regnaut Rouault, chevalier, et de feu Jeanne du Puy-du-Fou, sa femme, que ses deux sœurs et leurs maris Hardoin Du Bois et René Boussiron, de complicité avec l'évêque, qui paraît être leur oncle, avaient voulu forcer à se taire religieuse à Saint-Jean de Bonneval près Thouars. Celle-ci, ayant pu se soustraire à ses persécuteurs, épousa Pierre de La Grue, écuyer, et c'est ce dernier qui entreprit les poursuites contre Louis Rouault, l'évêque de Maillezais, et contre ses beaux-frères et belles-sœurs. On voit que feu Regnaut Rouault, outre ces trois filles, avait eu aussi un fils, Miles Rouault, qui était aussi décédé à l'époque du procès. Quel que soit l'intérêt de cette affaire, nous nous abstiendrons de plus longs développements. Les faits sont précisés dans les plaidoiries du 10 décembre 1467 et des 12 et 16 mai 1468 (Arch. nat., X2a 35, à ces dates), et dans un mandement du 10 juin 1468. (X2a 36, fol. 110 v°.) On peut voir aussi un arrêt de renvoi au bailli de Touraine, en date du 20 mars 1467 n. s. (X2a 34, fol. 307 v°) et divers actes et mandements du Parlement, des 17 mai 1468, 25 janvier 1469, 18 avril, 26 juillet et 31 août 1470 (X2a 36, fol. 107, 357 v°, 382 v°, 391), 17 décembre 1470 et 21 mai 1471. (X2a 38, fol. 44 et 66.)

, in protectione et salva et speciali gardia regis, tam in capite quam in membris, una cum eorum familiaribus atque bonis suis omnibus quibuscunque ab antiquo existentibus, ipsos episcopum et capitulum presentes et futuros ecclesiamque predictam, tam in capite quam in membris, ac dictorum episcopi et capituli familiares hominesque de corpore, si quos habeant, cum eorum rebus et bonis universis, ex habundanti in nostris protectione ac salva et speciali gardia suscipimus et ponimus per presentes de gratia speciali. Et eisdem gardiatores deputamus spéciales gubernatorem ville nostre de Ruppella ac senescallum nostrum Pictavensem, presentes et futuros, vel loca tenentes eorundem ; quibus et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, mandamus, ac dicto gubernatori quoad possessiones et bona dicte ecclesie existentes et defensores commorantes in senescalia et ressorto Xantonensi et senescallie Angolismensis, committimus, necnon dicto seneschallo, quoad possessiones et bona ipsius ecclesie existentes et deffensores commorantes in senescallia Pictavensi, ac ressortis eorumdem, etiam committimus per presentes quathinus predictos episcopum et capitulum, tam in capite quam in membris ac singulas personas dicte ecclesie, necnon familiares ipsorum et homines atque omnia quecunque bona sua deffendant seu deffendi faciant ab omnibus injuriis, violenciis, gravaminibus, oppressionibus, molestacionibus, vi armorum, potencia laicorum ac inquietatibus et novitatibus indebitis, novitates fieri vel inferri [interdicendo], quas, si factas esse vel fuisse, in presentis nostre salve gardie et ipsorum prejudicium, invenerint, ad statum pristinum et debitum reducant seu reduci faciant, ac nobis et parti emendam condignam propter hoc fieri et prestari dictamque salvam gardiam nostram, ubi oportunum fuerit, solenniter publicari, et in signum ejusdem penuncellos nostros seu baculos regios in et super locis, domibus, rebus et possessionibus, juribus, juridicionibus et bonis eorundem ac cujuslibet ipsorum, in terra que jure scripto regitur, et alibi, in casu eminentis periculi, situatis, apponi faciant et procurent ; inhibentes seu inhiberi facientes ex parte nostra omnibus personis de quibus fuerint requisiti, sub certis et magnis penis nobis applicandis, ne eisdem aut eorum familiaribus hominibusque predictis, grangiis, domibus, possessionibus, rebus aut bonis suis quibuscunque quomodolibet forefacere presumant ; et si in casu novitatis inter ipsos aut familiares eorumdem et homines predictos et alios, racione bonorum ecclesie predicte quorumcunque aliquod oriatur debatum, ipsum et rem contenciosam ad manum nostram tamquam superiorem ponant seu poni faciant et, per ipsam facta recredentia illi ex partibus cui de jure facienda, partes debatum facientes, et etiam hujusmodi salvegardie infractores et contemptores et qui, in contentum ejusdem, predictis gardiatoribus aut eorum alteri, seu deputandis ab ipsis vel eorum altero injuriam fecerint vel offensam, sive qui inobedientes fuerint vel rebelles, adjournent seu adjournari faciant coram ipsis, processuri super hoc ut jus erit. Si vero dicti episcopus et capilulum aut singulares persone dicte ecclesie vel aliqui de suis familiaribus et hominibus predictis ab aliquo, vel aliquibus assecuramentum habere voluerint, illud eisdem prestari faciant bonum et legitimum, juxta patrie consuetudinem et prout fuerit de racione faciendum. Omnibus autem justiciariis et subditis regni nostri, presentibus et futuris, damus tenore presentium in mandatis quatinus prefatis guberna- tori et senescallo, et eorum cuilibet, ac deputandis ab ipsis vel eorum altero in premissis et eorum singulis pareant efficaciter et intendant, prestentque auxilium et favorem, si opus sit et super hoc fuerint requisiti. Quod ut firmum et stabile perpetuo permaneat in futurum, presentes litteras sigilli nostri munimine jussimus roborari. Nostro in aliis et quolibet alieno in omnibus jure salvo. Datum apud Sanctum Johannem Angeliacensem, in mense februarii anno Domini millesimo quadringentesimo sexagesimo primo, et regni nostri primoLe texte de ces lettres est imprimé dans le recueil des Ordonnances des Rois de France, in-fol., t. XV, p. 347..

Sic signatum: Per regem ad relacionem consilii. Daniel. — Visa. Contentor. Rolant.

MCCCLVIII Février 1462

Rémission octroyée à Louis Chesneau, de Mauléon, prisonnier à Aunay, pour le meurtre d'un compagnon qui, avec deux autres, avait pénétré dans sa maison et refusait d'en sortir.

AN JJ. 198, n° 313, fol. 275 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de la femme, enfans, parens et amys charnelz de Loys Chesneau, à present detenu prisonnier ès prisons d'Aunay en Poictou, contenant que, le samedi des jeunes des Quatre temps deux ans aura en caresme prochain venant, ledit Loys Chesneau, qui est natif de Mauléon et de l'aage de xxxvii. ans ou environ, se loua avecques ung sien cheval pour le jour avecques ung nommé Estienne Rochefort, queulx du seigneur de PaintièvreJean II de Brosse, seigneur de Sainte-Sévère et de Boussac, devenu comte de Penthièvre par son mariage avec Nicole de Blois, dite de Bretagne. (Cf. ci-dessus, p. 38, note.), demourant audit lieu de Maleon, et devers le soir, environ heure de complie, ledit Loys, qui lors demouroit audit lieu de Mauleon, s'en vint en son hostel, ouquel il trouva sa femme et avecques elle deux compaignons, l'un nommé Colin Porret et l'autre Symon Bodin, lesquelz jouèrent et farsèrent avecques sa dicte femme, dont il ne fut pas content, et mesmement dudit Bodin, pour ce qu'ilz avoient eu autresfoiz debat ensemble. Et dist icellui Loys audit Bodin telles parolles ou semblables en effect : « Qu'es tu venu faire icy en ma maison et m'as amené telles manières de gens ? Je n'en suis point content et te commandé que tu t'en aille de ma maison, comment qu'il soit. Et tu scez bien que je te l'ay deffendue ». Et ledit Bodin dist audit Loys qu'il n'en ystroit point pour lui et qu'il bevroit et mengeroit avant que yssir dudit hostel, malgré lui. Lequel Loys lui dist que vraiement si feroit, et eurent illec ensemble grant debat, et tellement que ledit Loys print une espée qui estoit près d'ilec et la tira hors du forreau et dist audit Bodin qui s'en ystroit de son hostel, bon gré ou mal gré qu'il en eust. Lors ledit Bodin se print audit Chesneau et le gecta à terre et pareillement la table sur lui. Et tantost ledit Loys se leva, et quant il fut levé, se prindrent de rechief ledit Loys et Bodin et s'entrebatirent et frappèrent l'un l'autre tant que ledit Bodin blessa ledit Chesneau très enormeement. Ouquel debat estoit ledit Colin Porret qui incontinant tira sa dague ; et aussi y survint ung compaignon, dont ledit Loys ne scet le nom ne n'a congnoissance de luy, mais dit qu'il estoit vestu court et estoit assis devant la dicte maison, et se mist oudit debat ; se entrebatoient et frapoient l'un l'autre d'espées, de dagues, et frappa ledit Loys par plusieurs foiz sur eulx et eulx sur luy, et ce faisoit pour les mettre hors de son hostel, et fist tant qu'il les mist tous troys hors. Et oudit debat ledit Loys oyt que l'un des troys compaignons cria : « Haa ! je suis blecé ! » Et atant s'en alèrent tous troys, c'est assavoir lesdiz Porret, Bodin et ledit vestu court qui estoit survenu oudit debat, et ledit Loys Chesneau demoura en son hostel. Et tantost après on lui vint dire que ledit compaignon vestu court estoit mort. A l'occasion duquel cas ledit Chesneau, doubtant rigueur de justice, s'est absenté du pays, jaçoit ce qu'il ne sache lequel d'entr'eulx donna ledit coup, et depuis certain temps ença a esté prins par justice dudit lieu d'Aunay, où il est detenu encores prisonnier en grand povreté et misère....Sic. Le copiste a omis ici tout un membre de phrase, que l'on peut facilement suppléer par les formulaires habituels des lettres de rémission, comme par exemple : « ès quelles il est en avanture de finer miserablement ses jours; se nostre grace... » se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartie, comme les femme, enfans, parens et amys dudit Chesneau nous ont fait remonstrer, humblement requerant que, attendu ce que dit est et que ledit Loys Chesneau ne demandoit riens ausdiz Colin Porret et Simon Bodin, lesquelz estoient venuz avecques sa femme, qui estoit seule avecques ses enfans en son hostel, el ne s'en voult ledit Porret yssir dudit hostel, ains lui respondit que malgré lui il bevroit et mengeroit en sondit hostel, avant que yssir, etc., que ne donna point le cop audit vestu court, au moins qu'il sache certainement, et que en tous autres affaires ledit Loys a esté et est homme de bonne renommée, etc., il nous plaise nostre dite grace lui impartir. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit Loys Chesneau avons oudit cas quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, aux bailly de Touraine, des ressors et Exempcions d'Anjou et du Maine, seneschaulx de Poictou et de Xantonge et gouverneur de la Rochelle, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Saint Jehan d'Angely, ou moys de fevrier l'an de grace mil cccc. soixante et ung, et de nostre règne le premier.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Gauvigneau. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MCCCLIX Février 1462

Lettres d'amortissement d'une rente de soixante livres sur les revenus de l'île de Ré, confirmée par Louis d'Amboise, vicomte de Thouars, à l'abbaye de Saint-Michel-en-l'Herm, pour la fondation d'une messe quotidienne en ladite abbaye, ordonnée par Marguerite de Thouars, dame de Talmont, dans son testament.

AN JJ. 198, n° 335, fol. 297 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, parla grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, que comme nostre chier et feal cousin Loys d'Amboise, viconte de ThouarsLouis d'Amboise, vicomte de Thouars, comte de Benon et de Guines, seigneur de Talmont, Mauléon, Montrichard, nie de Ré, Marans, etc., fils d'Ingelger II, seigneur d'Amboise, et de Jeanne de Craon, avait hérité en 1422 de tous les biens de son oncle Pierre d'Amboise, vicomte de Thouars ; il mourut dans les premiers mois de l'année 1470. (Voy. une longue notice relative à ce personnage dans notre t. VIII, p. 60-62.). Le vicomte de Thouars venait de vendre à Louis XI (25 février 1462 n. s.) ladite vicomté et les seigneuries de Mauléon et de Berrie pour la somme de 100.000 écus d'or, avec la réserve de l'usufruit et une pension de 4.000 livres sa vie durant (Arch. nat., P. 2299, p. 284), acte qui fut attaqué par ses héritiers naturels et donna lieu à un procès dont parle l'histoire. Marié deux fois, la première à Marie de Rieux, la seconde à Nicole de Chambes, fille de Jean de Chambes, seigneur de Montsoreau, et de Jeanne Chabot, il n'eut point d'enfants de cette dernière. Du premier lit il avait eu seulement trois filles: Françoise, femme de Pierre II, duc de Bretagne, qui décéda sans postérité ; Pernelle, femme de Guillaume d'Harcourt, comte de Tancarville, morte la première (1453), aussi sans enfants ; et Marguerite, qui avait épousé Louis de La Trémoïlle, fils de Georges, le célèbre ministre de Charles VII, et de Catherine, dame de l'Isle-Bouchard. Par acte du 24 mars 1469 n. s., Françoise d'Amboise, duchesse de Bretagne, fit abandon à Louis de La Trémoïlle, fils de sa sœur, de tous les droits et intérêts qu'elle pouvait avoir dans le procès intenté à leur père Louis d'Amboise, au sujet de la vente qu'il avait faite au roi de la vicomté de Thouars (Coll. dom Fonteneau, t. XXVI, p. 425, 449), de sorte que Marguerite, la plus jeune, et son mari restèrent seuls à revendiquer ce riche héritage. On sait ce qu'il en advint et comment, après avoir été dépouillé iniquement par Louis xi, Louis de La Trémoïlle fut remis en possession de Thouars par la régente Anne de Beaujeu., seigneur de Talemont et de l'isle de Re, nous a fait dire et remonstrer que feue Marguerite de Thouars, en son vivant dame des- diz lieux de Talemont et de l'isle de ReMarguerite de Thouars, dame de Talmont, Curzon, la Chaise-le-Vicomte, nie de Ré, etc., troisième fille de Louis vicomte de Thouars, et de Jeanne de Dreux, avait épousé : lo Thomas, seigneur de Chemillé et de Mortagne ; 2° vers 1375, Guy V Turpin, seigneur de Crissé et de Vihiers. Elle mourut après le 23 octobre 1404. La fondation de messe qu'elle avait faite en l'abbaye de Saint-Michel-en-l'Herm, dont il est question dans le présent acte, est du 6 février 1404 n. s. (Cf. Arch. hist. du Poitou, t. XXI, p. 104, note ; t. XXVI, p. 72, note.) [voult] et ordonna par son testament et ordonnance de derrenière voulenté, estre dit et celebré de là en avant perpetuelment, pour le salut de son ame et de ses parens et amys trespassez, tous les jours de l'an, une messe en l'eglise et abbaye de Saint Michel en Lair, par les religieux, abbé et convent de ladicte abbaieL'abbé de Saint-Michel-en-l'Herm était alors Guillaume III, mentionné, d'après des actes authentiques, entre le 31 décembre 1452 et le 30 avril 1475. (Chartes du fonds Gaignières,à la Bibl. nat.) Cette même année 1452, au mois de juillet, dit la Gallia christiana, l'abbaye fut dévastée par Louis d'Amboise, vicomte de Thouars, et le seigneur de Chateaubriand. L'année suivante, l'abbé Guillaume confirma en chapitre général, le jour de saint Michel, un échange fait, le 8 mai, par Michel Savary, prieur de Saint-Sauveur de Mareuil (t. II, col. 1421). Le même recueil dit que l'on trouve le nom du prédécesseur immédiat de Guillaume III, Richard Paule, cité dans des chartes originales des 24 décembre 1445, 20 novembre 1446, 12 novembre 1448, 30 novembre 1449, 2 décembre 1450 et 31 décembre 1451 ; mais il ne parle point de la compétition au possessoire qui s'éleva entre Jean Morin et ce Richard Paule, compétition qui donna lieu à des violences, puis à un procès criminel, auquel furent mêlés Jean Giffart, chevalier, et plusieurs autres. Nous nous contenterons de l'indiquer ici, sans en faire l'exposé, d'après six passages des registres du Parlement, des 9 août 1444, 22 février, 16 mars et 2 juillet 1445, 12 juillet 1446 et 5 février 1448. (Arch. nat., X2a 23, fol. 181 v° et 380 ; X2a 24, aux dates.) ; et pour ce faire et continuer, donna et legua à ladicte abbaye soixante livres tournois de rente anuelle et perpetuelle, à icelle avoir et prandre pour chascun an sur la revenue de ladicte ysle de Ré, à deux termes, par la main du receveur d'icelle ysle pour le seigneur. Et avecques ce, voult et ordonna que ses heritiers et successeurs, mesmement les seigneur ou seigneurs qui tiendront ladicte ysle, fussent tenuz d'amortir lesdictes soixante livres tournois de rente et en paier l'indempnité qui à ceste cause en pourroit estre deue. Laquelle rente nostredit cousin, comme seigneur, ou ses gens et officiers ont tousjours paiée et continuée ausdiz abbé et convent de Saint Michel en Lair, et d'icelle rente ont joy iceulx religieux jusques à puis naguières que nostre procureur et les commissaires ordonnez sur le fait des francs fiefz ont en la perception de ladicte rente donné empeschement et icelle fait mettre en nostre main, et commandé qu'ilz en vuidassent leurs mains, comme lesdiz religieux ont donné à entendre à nostredit cousin. Lequel, à ceste cause, se soit traict par devers nous et nous a fait remonstrer le vouloir et entencion de la dicte feue Marguerite de Thouars et l'ordonnance par elle faicte, pour le salut de son ame, et pour icelle chargé nostredit cousin, comme son heritier, de paier ladicte rente sur la revenue dudit ysle de Ré, et de icelle admortir, que grant charge dame et de conscience seroit à lui, se lesdictes messes n'estoient dictes et celebrées par lesdiz religieux, selon et en ensuivant le vouloir et entencion de la dicte Marguerite, ce que ne pourroient faire lesdiz religieux, s'ilz estoient contrains de vuider leurs mains d'icelle rente, et qu'ilz ne la peussent avoir et prandre ; en nous humblement requerant qu'il nous plaise octroyer et consentir que lesdiz religieux, abbé et convent de Saint Michel en Lair puissent tenir lesdictes soixante livres tournois de rente, à eulx ainsi leguées et ordonnées par ladicte feue Marguerite de Thouars, et icelle leur admortir et sur ce leur impartir nostre grace. Pour quoy nous, ce que dit est consideré, desirans le vouloir et entencion de ladicte Marguerite de Thouars estre acomply, pour honneur et reverance de monsieur saint Michel, et que tousjours soions participans ès biensfaiz et oroisons de ladicte eglise, ausdiz religieux, abbé et convent de ladicte eglise de Saint Michel en Lair avons octroyé et octroyons qu'ilz puissent et leur loise, et leurs successeurs, tenir lesdictes soixante livres tournois de rente sur la revenue dudit ysle de Ré, comme admorties et à Dieu dediées. Et laquelle rente nous leur avons admortie et admortissons de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, sanz ce qu'ilz ne leurs successeurs soient ne puissent estre contraincts à icelle rente de soixante livres tournois vuider ne mettre hors de leurs mains, ne pour ce en paier aucune finance ou indempnité ; et laquelle nous, en faveur et consideracion des choses dessus dictes et autres à ce nous mouvans, leur avons donnée et quictée, donnons et quictons par ces dictes presentes, signées de nostre main. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers à Paris, au seneschal de Xantonge et gouverneur de la Rochelle, et à tous noz autres justiciers et officiers ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d'eulx, si comme à lui appartiendra, que de nostre presente grace, admortissement et octroy facent, seuffrent et laissent lesdiz religieux, abbé et convent de Saint Michel en Lair et leurs successeurs joir et user plainement et paisiblement, sans leur faire, mettre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun empeschement au contraire. Et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces dictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l'autruy en toutes. Donné à Saint Jehan d'Angely, ou moys de fevrier l'an de grace mil cccc. soixante et ung, et de nostre règne le premier.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. Le Prevost. — Visa. Contentor. J. Duban.

MCCCLX Mars 1462

Rémission en faveur de Guillaume Prévost, franc-archer de Chauray, coupable d'un homicide involontaire sur la personne de Jean Pinart.

AN JJ. 198, n° 215, fol. 200 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de Guillaume Prevost, demourant au lieu de Grant Mauduyt, franc archier de la perroisse de Chaurray en nostre pays de Poictou, contenant que, le jeudi unziesme jour de ce present moys de mars, ledit suppliant s'en alla au marchié en la ville de Nyort, qui se tient toutes les sepmaines ledit jour, pour aucunes ses besoignes et affaires, et y demoura jusques environ trois heures après midy qu'il se mist à chemin pour s'en retourner audit lieu de Grant Mauduyt, et sur le chemin rencontra Jehan PinartLa veuve d'un Jean Pinart, nommée Berthomée Thibaut, conclut un échange le 11 mars 1482 n. s., par lequel elle cédait à Jean et à Colas Carrens, ses gendres, la maison de la Vergne, sise près de la Sauvagère, contre trois boisselées de terre, à la mesure de Saint-Lin, sises au champ de Lousme près la Béraudière. (A. Richard, Arch. du château de la Barre, t. II, p. 382.), procureur et fabriqueur de la perroissse de la Revestizon, et Jehan Siguoigneau, franc archier ; lequel Pinart avoit sur sa teste une sallade. Et incontinant que ledit suppliant vit ledit Pinart ayant ladicte sallade, il tira sa dague en soy jouant et esbatant et en frapa ung coup sur ladicte sallade, en disant audit Pinart : « Veulx tu estre gendarme ? » et encores le veult frapper ung autre coup sur icelle salade, en soy jouant comme devant. Mais ledit Pinart leva la teste contremont et la visière de ladite sallade, et ledit suppliant l'ataigny de celle dague et de la pointe sur l'ueil et le blessa bien fort, dont icellui suppliant fut très desplaisant et courroucé. Et dix jours après, ledit Pinart, à l'occasion dudit coupt ou autrement, par faulte de gouvernement, est allé de vie à trespassement. Et doubte ledit suppliant que à ceste cause on le vueille molester et travailler, et proceder contre lui à pugnicion corporelle, par quoy il ne se oseroit tenir au pays ne y habiter ne converser, se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartie, ainsi qu'il nous a fait dire et remonstrer, en nous humblement requerant, attendu qu'il ne cuidoit aucunement blecier ne villonnir ledit Pinart et ne se penssoit que jouer, car icellui Pinart el lui estoient bons amis et n'avoient l'un à l'autre noise, haine ne procès, et fut icellui suppliant bien courroucé et desplaisant quant il lui eut fait mal, que en tous autres cas il s'est tousjours bien et doulcement gouverné, etc., il nous plaise nos dictes grace et misericorde lui impartir. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant le fait et cas dessusdit avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Bourdeaulx, ou mois de mars l'an de grace mil cccc. soixante et ung, et de nostre règne le premier.

Signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Daniel. Visa.

MCCCLXI Mars 1462

Lettres de ratification des statuts et règlement du métier de tailleur et pourpointier en la ville de PoitiersLe texte de ces lettres est imprimé dans le recueil des Ordonnances des Rois de France, in-fol., t. XV, p. 402..

AN JJ. 198, n° 290, fol. 252 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion des maistres jurez du mestier de tallenderie, pourpointerie et autres garnimens et habiz en nostre ville et cité de Poictiers, contenant que, puis certain temps ença, à l'occasion de plusieurs plaintes qui venoient des faultes et abuz qui se faisoient audit mestier par ceulx qui se entremettoient et leurs varletz et serviteurs, et aussi pour les debatz qui chascun jour survenoient entre les maistres d'icellui mestier, pour ce qu'ilz prenoient les varletz et apprentis les ungs des autres, sans avoir regard s'ilz avoient parachevé leur service, furent faictes et advisées, pour le bien de la chose publicque de ladicte ville, par les maire, bourgoys et eschevins d'icelle, certains statuz et ordonnances dont lesdiz supplians ont jusques à present usé et usent ; desquelz statuz et ordonnances la teneur s'ensuit :

Les maire, bourgoys et eschevins de la ville de Poictiers, à tous ceulx qui ces presentes lettres verront et orront, salut. Comme plusieurs plaintes et clameurs nous aient pieça esté faictes et encores nous viennent de jour en jour des faultes et habuz qui se sont faiz et commis, font et commettent de jour en jour, en l'office et mestier de taillanderie, pourpoincterie et autres garnimens et habiz en ladicte ville de Poictiers par ceulx qui exercent ledit office et mestier, tant par faulte et coulpe des varletz et autres non espers oudit mestier, qui soubz umbre des maistres d'icellui besongnent et ouvrent oudit mestier, et aussi que plusieurs debatz ont esté et sont souvent entre les maistres dudit mestier, pour ce qu'ilz prennent les varletz et apprentiz les ungs des autres, sans avoir regard si lesdiz apprentiz ont finy et parachevé le temps par eulx promis à leursdiz maistres ; savoir faisons que nous, pour ces causes et autres touchans le bien publicque, voulans pourveoir aux choses dessus dictes, ainsi que à nous appartient, affin que ou temps avenir aucunes clameurs, plaintes, pertes et dommaiges ne s'en puissent ensuir en la chose publicque de ladicte ville, par l'advis et deliberacion de Perrin Apostelle, Mathurin Regnault, Jehan Garzouyn, Jehan Ragueau, Jehan Toupinet, Guillaume Georget, Guillaume Nau et plusieurs autres, François Frapperot, Macé Renouart et Michau Jaliet, maistres dudit mestier, par nous sur ce appeliez, et après ce que par serement et autrement les avons deuement interroguez sur le fait et gouvernement dudit mestier et comment icellui mestier, ou temps avenir, pourra prouffitablement et deuement estre gouverné au bien et prouffit de la chose publicque de ladicte ville, après ce qu'ilz ont donné leur consentement, avons fait et ordonné oudit mestier les statuz et ordonnances qui s'ensuivent :

1. Et premierement, que à la garde et visitacion dudit mestier seront esleuz, commis, depputez et ordonnez par chacun an, en chacune feste de Trinité, par les maistres dudit mestier, quatre souffisans preudes homs maistres jurez dudit mestier, lesquelz incontinant après seront tenuz venir faire le serement à nous dit maire de ladicte ville ou à noz successeurs ou commis, de bien, justement et loyaument garder et visiter ledit mestier et les poincts et articles cy après declairez, sans enfraindre. Et pour ceste presente année ont esté esleuz par lesdiz maistres dudit mestier lesdiz Savoye, Deremin,Tristant et Yvonnet, lesquelz incontinant après nous ont fait le serement en tel cas acoustumé. Et auront lesdiz maistres jurez totale visitacion sur l'ouvraige dudit mestier, circonstances et deppendances d'icellui par toute ladicte ville de Poictiers et faulxbourgs d'icelle, et tantost après seront tenuz rapporter par leurs seremens à nous dit maire et à nosdiz successeurs ou commis toutes les forfaictures, abuz et mesprentures qu'ilz trouveront estre commises ou faictes en icellui mestier.

2. Item, que nul vacabunt, en ladicte ville demourant ne ès faulxbourgs d'icelle, ne puisse lever establée ou ouvrouer ne tailler garnimens, jusques à ce qu'il ait esté examiné par lesdiz maistres jurez, esprouvé, experimenté de tailler et présenté à nous dit maire et à nosdiz successeurs ou commis, pour faire le serement, se ce n'est le taillandier du roy nostre sire ou les taillendiers des seigneurs de son sang, eulx estans en ladicte ville ; car autrement pour convoitise de gaingner, aucuns pourroient entreprendre besongne en laquelle ilz gasteroient et diffameroient les draps et vestemens, et de ce ne pourroient faire restitucion, qui reddonderoit au vitupère dudit mestier et deshonneur des autres bons ouvriers d'icellui, et au grant prejudice et dommaige de la chose publicque. Et qui fera le contraire, paiera ung solz d'amende à applicquer, la moitié à ladite ville et moitié à la confrairie dudit mestier. Laquelle confrairie les maistres tallendiers et ouvriers dudit mestier veulent et entendent constituer et ordonner en honneur et reverance de Dieu et de la Sainte Trinité en ceste dicte ville de Poictiers, en l'esglise des Frères Prescheurs, en la chappelle de Sainte Marguerite. Aussi paiera cellui qui fèra le contraire deux solz six deniers ausdiz maistres jurez, tant pour les povres d'icellui mestier que pour les paines et salaires desdiz jurez ouvriers qui prendront plusieurs peines et travaulx pour le fait d'icellui mestier, que aussi pour l'absolucion d'aucuns d'icellui mestier qui par povreté n'auroient de quoy vivre et pourroient cheoir en sentence d'excomenge ou autrement.

3. Item, que aucun ouvrier d'icellui mestier, pour achever garniment ne autrement... Bien qu'il n'y ait point de blanc au registre en cet endroit, un membre de phrase a été évidemment omis par le copiste, la phrase telle qu'elle est transcrite n'ayant pas de sens. Les éditeurs des Ordonnances proposent de suppléer : « ne pourra travailler les jours de dimanche et fêtes ». exceptée la besongne de nosdiz seigneurs et dames du sang royal, et robbes d'osèques de trespassés et des nopces, ou qu'il convient besongner neccessairement pour estressir ou eslargir ung garniment qui par avant fust fait et parfait. Et qui fera le contraire, il paiera deux solz six deniers à ladicte ville d'amende, deux solz six deniers à ladicte confrairie et deux solz six deniers ausdiz maistres. Et s'il est varlet, il paiera douze deniers à ladicte ville et douze deniers à ladicte confrairie. Et s'il advenoit que aucun maintenist que fust pour nosdiz seigneurs ou dames, pour nopces ou pour obsèques de trespassez, et l'en trouvoit le contraire, il paiera le double et l'amende.

4. Item, que aucuns varletz ne puissent demourer ne aler ne ouvrer hors d'avecques leurs maistres, sans leur congié, jusques à ce qu'ilz aient achevé leur terme et temps promis à leursdiz maistres et chacune besongne par eulx commencée, sur paine de soixante solz d'amende, à appliquer moitié à ladicte ville et moitié à ladicte confrairie et cinq solz aus diz jurez, et en oultre sur peine de interdicion de non ouvrer dudit mestier en ladicte ville et faulxbourgs, tant qu'ilz aient repparé les faultes dessus dictes ; de quoy lesdiz maistres seront tenuz de advertir lesdiz varletz, et des autres ordonnances dudit mestier, quant ilz viendront en leur service.

5. Item, que aucun ouvrier dudit mestier ne puisse ne doyve fortraire, ne mettre en euvre en ladicte ville et faulxbourgs, les varletz et apprentiz d'aucun maistre, sans son congié et licence et jusques à ce qu'il ait achevé son service et besongne par lui commencée, sur peine de cent solz d'amende, à applicquer moitié à ladicte ville et moitié à ladicte confrairie.

6. Item, que si aucun taillandier de robbes ou d'autres garnimens, en ladicte ville ou faulxbourgs, mestaille aucune robbe ou garniment, pour mal ordonner le drap ou par l'ingnorance de sa taillé, il repparrera le dommaige à celluy à qui appartiendra ladicte robe ou garniment, et en paiera deux solz six deniers d'amende à ladicte ville et deux solz six deniers à ladicte confrairie, et deux solz six deniers ausdiz maistres jurez pour leur visitacion.

7. Item, que nul ne mette layne ou estouppes en pourpoint ou doublet quil face pour vendre. Et qui fera le contraire, le pourpoint ou doublet sera ars et paiera deux solz six deniers à ladicte, deux solz six deniers à ladicte confrairie et douze deniers ausdiz maistres jurez.

8. Item, que chacun desdiz maistres et ouvriers puissent tailler et faire pourpoint ou doubletz qu'il face pour vendre à ceulx qui vouldront et les en requerront de telles estofïes comme ilz bauldront.

9. Item, que aucun maistre ou ouvrier dudit mestier ne puisse mettre hors de sa main les garnemens ou ouvraiges qui lui seront baillez pour empruncter argent dessus ne autrement les engaiger, sur peine de dix solz d'amende à applicquer comme [dessus].

10. Item, quant aucun ouvrier dudit mestier sera trouvé habillé et souffisant pour estre maistre, et il le requerra estre, lesdiz maistres jurez seront tenuz de le mener et présenter à nous dit maire ou nosdiz successeurs ou commis à ce, pour d'icellui recevoir le serment de justement entretenir et acomplir sans enfraindre les ordonnances et statuz dudit mestier ; ou autrement il ne sera pas repputé maistreAprès « maistre », le texte du registre ajoute « et plusieurs autres statuz et ordonnances ». Ces mots n'ayant point de sens, nous les supprimons, comme l'ont fait d'ailleurs les éditeurs du recueil des Ordonnances des Rois de France..

11. Item, et quant aucun des maistres dudit mestier yront de vie à trespassement, tous les autres maistres d'icellui seront tenuz d'aler à leur enterrement, en leur faisant savoir, sur peine d'une livre de cire, à applicquer à ladicte confrairie.

Si donnons en mandement aux maistres jurez dudit mestier, par nous pour ce ordonnez, et à chascun d'eulx, si comme à lui appartiendra, que [entretiennent] les dictes ordonnances ainsi par dessus devisées, [et du] consentement desdiz maistres dudit mestier qui les ont promis garder et tenir sans enfraindre, nous les avons fait publier, affin que aucun ne pretende cause d'ignorance, et à icelles avons fait mettre et apposer nostre seel. Donné et fait en la court ordinaire de l'eschevinage de Poictiers, tenue audit lieu, le xxixe jour de juing l'an mil cccc. cinquante et huit. Ainsi signé : M. ArembertMathurin Arembert, procureur du roi en la sénéchaussée de Poitou, fils de Jean, qui avait exercé le même office. (Voy. une notice sur ce personnage, ci-dessous, n° MCCCLXXXI.), Herbert, procureurFrançois Herbert, procureur de la ville de Poitiers. D'Hozier donne la généalogie de cette famille, mais à partir seulement de François, écuyer, seigneur de Bellefond, mari de Bernardine Vernon, qui vivait au commencement du XVIe siècle. (Armorial général, in-fol., t. I, p. 290, 291.) Les archives municipales de Poitiers fournissent un certain nombre de renseignements sur François Herbert, procureur de la ville, dont il fut maire en 1474. Le 6 décembre 1459, on lui paya la dépense qu'il avait faite pendant un voyage accompli, en compagnie de Nicolas Acton, maire, et de Jamet Gervain, à Chinon pour remontrer au roi les nécessités de la ville et du pays, la ruine des murailles, le supplier d'affranchir la ville de tailles et aides et de diminuer les lances. La municipalité lui donna procuration spéciale, le 31 décembre 1462, pour acheter la forêt de Colombiers, c'est-à-dire la jouissance pendant neuf ans que le roi cédait à la ville moyennant 1000 écus, et pour aliéner des rentes et propriétés de la ville jusqu'à concurrence de 1500 écus. En outre de cet acte, il vendit à Thomas Boylesve 40 setiers de froment et 40 sous de rente dus par les héritiers d'Olivier et Jean Gonnault, une autre rente à Amberre et tout ce qui appartenait à la ville de Poitiers dans cette paroisse et dans celle de Charay, la dîme de Chaumont, etc., le tout moyennant 400 écus d'or. Citons encore le retrait fait, 1e 13 juillet 1465, par Jamet Gervain, pour la somme de 200 écus, d'une rente annuelle de 20 livres assise sur l'hôtellerie de l'Image Saint-Jacques, laquelle avait été vendue à Nicolas Acton par maître François Herbert, procureur de la ville. (Inventaire des arch. de la ville de Poitiers, par M. L. Rédet, publié en 1883 par MM. A. Richard et Ch. Barbier, nos 532, 1021, 2001 et 2006.) Voy. aussi Notice sur la maison de la famille Herbert à Poitiers par M. Genesteix. (Bulletin de la Société des Antiquaires de l'Ouest, 1887, p. 206.), et Jehan TouchantIl faut probablement corriger ce nom et lire « Jehan Tranchant » ou Trenchant. Un personnage ainsi nommé était garde du sceau aux contrats de la ville de Poitiers et figure en cette qualité dans un acte du 20 septembre 1443 (vol. précédent, p. 158) et dans deux autres, datés du 6 juin 1447 et du 24 janvier 1448. (Arch. hist, du Poitou, t. XXXI, p. 119, 124.) Cf. des aveux des 15 mars 1483 et 17 avril 1484, rendus au seigneur de la Barre-Pouvreau par Jeanne Tranchant, femme de Jean Aubert, procureur en la cour de Parlement, pour l'hôtel du « Gros-Chaigne », et diverses pièces de terre qui furent à défunts Jean et Guillaume Tranchant. (A. Richard, Arch. du château de la Barre, t. II, p. 87, 89.), pour registre.

Et pour ce que iceulx statuz et ordonnances n'ont encores esté par feu nostre très chier seigneur et père, que Dieu absoille, ne par nous octorisées ne approuvées, se sont lesdiz supplians lirez par devers nous, en nous humblement requerant iceulx statuz et ordonnances avoir agreables et les ratiffier, louer et approuver, en tant que mestier est, et sur ce leur impartir nostre grace. Nous, les choses dessus dictes considerées, inclinans à la requeste desdiz maistres jurez dudit mestier, supplians, lesdiz statuz et ordonnances dessus declairées avons louez, ratiffiez et approuvez, louons, ratiffions et approuvons de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, [par] ces presentes, et voulons iceulx estre tenuz, entretenuz et gardez de point en point, selon leur forme et teneur. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou, ou à son lieutenant, que de nostre presente grace, ratifficacion et approbacion facent, souffrent et laissent lesdiz supplians doresenavant joir et user plainement et paisiblement, et iceulx statuz et ordonnances tenir, entretenir et garder de point en point, selon leur forme et teneur, sans faire ne souffrir estre fait aucune chose au contraire, ains se fait, mis ou donné estoit, le mettent ou facent mettre sans delay à plaine delivrance. Car ainsi le voulons et nous plaist estre fait. En tesmoing de ce, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l'autruy en toutes. Donné à Bourdeaulx, ou moys de mars l'an de grace mil cccc. soixante et ung, et de nostre règne le premier.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Rolant. — Visa. Contentor. Duban.

MCCCLXII Mai 1462

Rémission donnée en faveur de Jean Bricoul, demeurant à la Ralière, paroisse de Notre-Dame de Boulogne, au diocèse de Luçon, qui avait frappé mortellement Jamet Treia, dans une rixe provoquée par celuici.

AN JJ. 198, n° 340, fol. 299 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, parla grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de Jehan Bricoul, povre homme chargié de femme et de plusieurs petiz enffans, habitans ou villaige de la Reielère en la parroisse de Nostre Dame de Boloigne, ou diocèse de Luçon en Poictou, contenant que, le penultime jour du moys d'avril derrenier passé, les oisons dudit suppliant pasturoient en la place commune que l'en appelle ou querreux dudit village, et combien que ledit quereulx soit lieu commun et que sesdiz oisons ne feissent mal ou domaige à aucun, neantmoins ung nommé Jamet Treia, homme noiseux, voisin dudit suppliant, voult frapper ou tuer lesdiz oisons d'un grant rameau qu'il tenoit et de fait en tua ung. Et ce voyant, icellui suppliant lui dist : « Que veulx tu faire ? Les veulx tu tous tuer ? Ferme ton courroux et te rapaise. » Oyes lesquelles parolles, ledit Triea esmeu de male voulenté, courut querir une grant fourche de fer avecques laquelle il vint hastivement contre ledit suppliant et d'icelle fist son efforce de le frapper en l'estomac, mais icellui suppliant se recula pour fouyr au cop, et non content de ce ledit Triea, pour domaiger ledit suppliant en ses biens, vint en celle fureur en une truye dudit suppliant estant en ung pré appartenant à lui et audit Triea et commença à crier après ladicte beste, disant et jurant qu'il la tueroit. Et lors ledit suppliant lui dist et requist que pour Dieu il ne la tuast ; mais ledit Triea dist et respondit qu'il tueroit ladicte truye et ledit suppliant avecques. De quoy icellui suppliant fut moult esperdu, pour ce que ladicte truye estoit plaine et estoit l'une partie de son vaillant, et pour ce que icellui suppliant, voulant garder sa beste et deffendre, ala après priant et requerant ledit Tryea que pour Dieu il ne la voulsist tuer, icellui Triea delaissa ladicte beste et s'adressa audit suppliant et derechief le voult frapper de ladicte fourche, mais icellui suppliant en son corps deffendant, soy voyant en dangier de mort et pour eviter icelle, retourna pour rebatre le cop dudit Tria d'un baston qu'il tenoit, duquel il frappa ledit Triea parmy la teste de chaulde colle ung cop seulement, non le cuidant tuer, duquel cop ledit Triea, ce jour mesmes environ deux ou troys heures après, par faulte de bon gouvernement ou autrement ala de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant doubtant rigueur de justice, s'est absenté du païs et n'y oseroit jamais retourner, et pour ce est en voye, sa femme et enfans, de miserablement finer leurs jours, se nostre grace et misericorde ne leur sont sur ce imparties, humblement requerant iceulx. Pour quoy nous, etc., à icellui suppliant avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Bourdeaulx, ou moys de may l'an de grace mil cccc. soixante et deux, et de nostre règne le premier.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Fournies — Visa. Contentor. J. Duban.

MCCCLXIII Mai 1462

Lettres données à l'occasion de l'entrée de Louis XI à Lusignan, portant délivrance de la personne d'Amaury de Liniers, écuyer, et de Pierre Grimoart, son serviteur, détenus pour le meurtre de Jean de Volvire, bien qu'ils eussent obtenu de Charles VII des lettres de rémission, et leur remettant les peines qu'ils avaient encourues.

AN JJ. 198, n° 350, fol. 306 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, parla grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Amaurry de Linières

Sic, au lieu de Liniers. Amaury de Liniers, chef de la branche de Saint-Pompain, était le fils puîné d'Amaury, seigneur de la Meilleraye, Liniers, Saint-Pompain, etc., et de Marie de Chausseraye, dame d'Airvault, qui se remaria à Louis Chenin, chevalier, seigneur de l'Ile-Bapaume. Il rendit aveu de la seigneurie de Saint-Pompain, mouvant de la châtellenie de Vouvant, aux seigneurs de Parthenay, en 1423, 1438 et le 1er décembre 1459. Il épousa Catherine Chauvegrin et n'en eut qu'un fils, Jean, écuyer, seigneur de Saiut-Pompain, marié à Catherine Goulard, suivant les généalogies. (Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 1re édit., t. II ; J. Richard, Généalogie de la famille de Liniers, Mém. de la Société de statistique des Deux-Sèvres, 2° série, t. VI, 1866.) Mais, d'après les actes du Parlement que nous citons cidessous, on voit qu'Amaury de Liniers eut aussi une fille, mariée à Mathurin de La Faye. Il était mort avant le 1er janvier 1469.

, escuier, et Pierre Grimoart, son serviteur, contenant que, ou moys de jung derrenier passé, ilz obtindrent de feu nostre très chier seigneur et père, que Dieu absoille, ses lettres de remissionSi ces lettres de rémission de juin 1461 ont été transcrites au Trésor des chartes, ce ne peut être que sur un registre aujourd'hui en déficit ; car nous les avons vainement cherchées. Les présentes ne les remplacent pas, puisqu'elles ne donnent point de renseignement sur le meurtre de Jean de Volvire et insistent seulement sur les procédures qui en furent la conséquence ; nous y suppléerons dans une certaine mesure, grâce aux registres du Parlement (ci-dessous, p. 351, note 1). Dans le but d'arriver plus facilement à faire entériner leur rémission, Amaury de Liniers et Pierre Grimoart avaient imité l'exemple de Jacques de Puyguyon et des autres meurtriers d'Hector Rousseau, dont il est question ci-dessus, p. 312, c'est-à-dire qu'ils s'étaient constitués prisonniers à Lusignan, quelques jours avant l'arrivée de Louis XI dans cette ville, et avaient profité des grâces que le roi avait coutume d'octroyer en ouvrant les prisons dans toutes les villes où il entrait pour la première fois. pour occasion de la mort et occision commise et perpetrée en la personne de feu Jehan de Veluyre, lesquelles, par vertu de noz autres lettres à eulx octroyées, ilz présentèrent à nostre seneschal de Poictou ou à son lieutenant à son siège de Poictiers, par vertu desquelles et de l'execucion dudit seneschal, lesdiz supplians firent adjourner Guillaume de Veluyre

Guillaumé de Volvire, chevalier, appartenait à une branche de cette noble famille Poitevine dont la généalogie n'a pas été dressée.

Il fut seigneur de Beaulieu, d'Ardin, de Dilay, de Perrière, etc., et marié deux fois. Sa première femme, dont il eut Jean, la victime d'Amaury de Liniers, était Marguerite Machon. Elle mourut avant le 1er octobre 1438, car, à cette date, Guillaume, en qualité de tuteur de leur fils, rendit aveu de l'hôtel des Loges (Saint-Hilaire-des-Loges) près Saint-Hilaire-sur-l'Autize et de la tierce partie de certaines autres terres, ainsi que du fief de Nisson, paroisse des Loges, le tout mouvant du château de Mervent. (Arch. nat., R1* 204, fol. 17 et 18.) Il épousa en secondes noces Jeanne du Retail, fille d'Imbert, seigneur du Retail. Le registre des hommages et aveux dus à Artur comte de Richemont, seigneur de Parthenay, contient plusieurs aveux et dénombrements rendus par Guillaume de Volvire, à cause de sa seconde femme, le 12 juillet 1445 : 1° pour son hébergement d'Ardin et les dépendances, avec beaucoup de petits fiefs tenus de lui par diverses personnes, mouvant de Parthenay ; 2° pour l'hébergement de Peyrières (Perrière), sis en la paroisse de Saint-Pardoux ; 3° pour la moitié par indivis d'une masure de terre appelée la Boisselière, en la paroisse de Vouhé, avec énumération de tout ce qui était tenu à hommage lige et à rachat, selon la coutume du pays, dans la mouvance de la seigneurie du Boisgrollier. Son beau-père, Imbert du Retail, avait fait les mêmes hommages et aveux à Richemont, le 49 mai 1428. (Arch ?. nat., R1* 190, foi. 18, 147, 149, 278 v°.) Jeanne du Retail, dame d'Ardin et de Dilay, était veuve de Guillaume de Volvire en 1476, date d'une transaction conclue entre elle et Jean de Lezay, chevalier, seigneur de Surimeau. (Bibl. de la ville de Nantes, collection Dugast-Matifeux. Manuscrits, 1. 108, n° 1.)

et nostre procureur en ladicte seneschaucie, à certain jour avenir, pour proceder à l'enterinement desdictes lettres de remission. Auquel jour ou autre deppendant d'icelluy, lesdiz supplians requisdrent l'enterinement desdictes lettres de remission par devant le seneschal ou son lieutenant, et prindrent sur ce leurs conclusions pertinens au cas, et pour y deffendre fut donné delay par ledit seneschal ou son lieutenant à nostre procureur audit lieu de Poictiers à certain jour ensuivant. Et combien que lesdites lettres de remission fussent et soient raisonnables, attendu que la mort dudit de Veluyre estoit venue en lui par sa faulte, neantmoins ledit Guillaume de Veluyre les fist debatre par plusieurs moiens non recevables, et sur ce furent lesdiz supplians mis en nos prisons en la consiergerie de nostre Palais dudit Poictiers, et leur fut assigné jour ensuivant pour reppliquer. Auquel jour ledit de Veluire qui procedoit contre ledit suppliant par grant hayne, pour les faire detenir prisonniers èsdictes prisons, appella frivolement dudit seneschal ou son lieutenant. Lesquelz supplians, voyant qu'ilz estoient grandement retardés ou procès desdictes lettres de remission, tant à cause dudit appel que pour les pors et faveurs que ledit de Veluyre avoit audit Poictiers, obtindrent noz autres lettres, par lesquelles estoit mandé à nostre bailly de la Touraine ou son lieutenant à Chinon, congnoistre dudit procès et faire mener lesdiz supplians en noz prisons dudit Chinon ; par vertu desquelles lettres maistre René DreuxLe Dictionnaire des familles du Poitou (nouv, édit., t. III, p. 162, 173) cite un Guillaume Dreux qui fut bailli du lieutenant de Touraine à Chinon, d'après des actes de 1446, 1448 et du 19 février 1450, et un René Dreux qui, suivant l'Armorial d'Anjou, exerça le même office en 1443 ; mais, ajoute-t-il, « il y a probablement confusion de nom avec Guillaume ». Au contraire, comme on le constate ici, il y eut bien un René Dreux, lieutenant particulier du bailliage de Chinon ; seulement la date de 1443 est peut-être une faute de lecture pour 1463., licencié en loiz, lieutenant particulier dudit bailli à Chinon, voult proceder à l'execucion d'icelles. Mais ledit Guillaume de Veluyre, pour empescher et faire tousjours detenir prisonniers lesdiz supplians, appella frivolemcnt dudit maistre René. Par le moien duquel appel il surcey de plus avant proceder à l'execucion desdictes lettres, et à ceste cause lesdiz supplians, ou moys de fevrier derrenier passé, obtindrent noz autres lettres par lesquelles estoit mandé au premier de noz conseilliers en nostre court de Parlement que, s'il lui apperroit desdictes appellacions et autres choses dessusdictes, que, nonobstant icelles faictes ou à faire, il prensist reaulment et de fait lesdiz supplians en nosdictes prisons de Poictiers et les menast ou fist mener en noz prisons de Saint Jehan d'Angely, et fist commandement de par nous audit seneschal de Poictou ou son lieutenant, grefïier de sa court et autres officiers d'icellui lieu de lui bailler les informacions qu'ilz avoient contre lesdiz supplians et pour eulx, pour les porter audit lieu de Saint Jehan d'Angely, par devers nostre seneschal de Xaintonge ou son lieutenant illec, et y adjournast à certain jour ensuivant les parties adverses desdiz supplians, pour proceder audit procès, sur l'enterinement desdictes lettres de remission, selon lesMots illisibles. faiz audit lieu de Poictiers ainsi que de raison. Auquel jour se présentèrent lesdiz supplians et aussi ledit de Veluyre, Jehan et Jehan (sic) Dufay et leurs femmes, parties adverses desdiz supplians ; lesquelz en soustenent les lettres de remission firent reppliquer, et ledit de Veluyre et nostre procureur en ladicte seneschaucie adjoinct avec lui firent dupplicquer, et sur ce, oyes lesdictes parties bien au long, furent appoinctées contraires, sauf à leur faire raison des choses de droit et escripture par articles. Et ce fait, de la part desdiz supplians fut dit [que] par auctorité dudit seneschal de Poictou ilz avoient fait faire certaines informacions valans enques[tes] pour estre eslargis desdictes prisons pendant ledit procès, qu'ilz avoient jà pieça mis par devers la court dudit seneschal de Poictou ou son lieutenant, pour leur donner appoinctement sur ledit eslargissement, mais que par le moien des pors et faveurs que ledit de Veluyre avoit audit lieu de Poictiers et des appellacions par lui interjectées, n'y avoit esté besongné, et estoient lesdiz supplians, depuis la presentacion de leurs lettres de remission, tousjours demourez en prison audit lieu de Poictiers, jusques au tiers jour de mars derrenier passé, en grant povreté et misère de leurs personnes. Lesquelles enquestes nostredit conseillier avoit apportées dudit lieu de Poictiers par devers ledit seneschal de Xaintonge, par quoy lesdiz supplians requisdrent que, moiennant icelles enquestes, veue la longue detencion de leurs personnes et qu'ilz estoient prestz de monstrer le cas de la mort dudit de Veluyre estre advenu ainsi qu'il estoit contenu èsdictes lettres de remission, estre eslargiz desdictes prisons, offrans donner bonne caucion d'ester à droit et obeyr à toutes les assignacions qui leurs seroient baillées jusques en diffinitive, et aussi attendu que ledit procès principal estoit contesté et que, après contestacion en la court dudit seneschal de Xaintonge, estoit acoustumé faire eslargissement à tous ceulx qui demandoient l'enterinement de lettres de grace et remission en cas de omicide. Lequel eslargissement le lieutenant dudit seneschal de Xaintonge differa faire pour lors, moiennant ce qu'il disoit n'avoir veu le tout desdietes enquestes, et eslargy lesdiz supplians par nostre ville de Saint Jehan d'Angely, qu'il leur bailla pour prison, et leur assigna certain jour pour oyr droit sur ledit eslargissement. Auquel jour ou autre deppendant d'icelluy, lesdictes parties comparurent par devant ledit lieutenant et par lui veu et visité ce qui par lesdictes parties avoit esté produit, il dist et declaira par sa sentence et appoinctement que lesdiz supplians estoient en voye d'eslargissement et les eslargy partout jusques à la publicacion d'enqueste dudit procès principal, moiennant certaine caucion qu'ilz donnèrent et qu'ilz seroient tenuz venir et obeir à chascune assignacion en personne, et au jour de la publicacion de l'enqueste eulx rendre prisonniers en nostre chastel dudit lieu de Saint Jehan d'Angely, sur peine d'estre privez, forcloz et deboutez de l'effect et contenu èsdictes lettres de grace et remission.

De laquelle sentence et appoinctement nostredit procureur, qui estoit principalle partie, n'appella aucunement et y acquiessa. Mais ce neantmoins ledit de Veluyre, combien que icelle sentence ne touchast le procès principal, mais seulement l'eslargissement desdiz supplians pendant ledit procès, pour tousjours faire detenir prisonniers lesdiz supplians, appella frivolement de ladicte sentence ou appoinctement. Par le moien duquel appel et par avant que ledit de Veluyre Peust relevé, au moins qu'il feust venu à la congnoissance desdiz supplians, doubtans que s'ilz aloient hors de ladicte ville de Saint Jehan d'Angely, nostredit procureur voulsist dire et pretendre qu'ilz estoient encourus ès peines à eulx indites et les faire priver et debouter de l'effect desdietes lettres de grace et remission, demourèrent en arrest ès prisons dudit lieu de Saint Jehan d'Angely par aucun temps, pendant lequel ilz nous firent donner à entendre le cas tel que dessus en effect et substance, et moiennant ce obtindrent noz lettres par lesquelles, et pour les causes plus à plain de- dans contenues, estoit mandé et commis aux gouverneur de la Rochelle, prevost de Saint Jehan, [commis] à la garde du seel desdiz lieux, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d'eulx, que en leur faisant apparoir dudit eslargissement fait par ledit lieutenant du seneschal de Xaintonge, et que nostre dit procureur eust acquiescé audit appointement, sans en avoir appellé, de la coustume et usance dont en ladicte senescliaucée est faicte mencion, et en baillant par lesdiz supplians bonne et seure caucion, autre qu'ilz n'avoient baillée, de ester et fournir à droit, qu'il les eslargist partout, tant pour la prosecucion dudit procès comme autrement, jusques ad ce que desdiz appeaulx fust discuté, pourveu qu'ilz seroient tenuz comparoir en personne à toutes les journées qui leur seroient assignées par ledit seneschal de Xaintonge ou son lieutenant oudit procès principal et à la publicacion de leur enqueste, de eulx rendre prisonniers en nostre chastel de Saint Jehan lesquelles noz lettres le juge de la prevosté dudit chastel de Saint Jehan, duement informé du contenu en icelles, a mises à execucion, et par ce moien ont lesdiz supplians esté eslargiz. Mais ce neantmoins ledit de Veluyre s'est tiré devers nostre chancellerie à Paris et, soubz colleur de ce qu'il nous a donné à entendre subreptissement et contre verité que ledit Jehan de Veluyre avoit esté inhumainement occis par lesdiz supplians et Mery Fèvre, sans ce qu'il leur eust mesfait ne mesdit, et que de ce ilz avoient prins lettres de remission dont ilz avoient demandé renterinement par devant nostredit seneschal de Poictououson lieutenant à Poictiers, où ils avoient esté constituez prisonniers, interroguez sur ledit eas, et leurs concessions redigées par escript, et que examen de tesmoins avoist esté fait touchant le debat de ladicte remission et pour savoir si, nonobstant icelle, ledit seneschal ou son lieutenant procederoit contre eulx par procès extraordinaire, et que ledit examen avoit esté rapporté par devers ledit seneschal de Poictou ou son lieutenant, et que lesdiz supplians avoient sceu que ledit de Veluyre et nostre procureur avoient prouvé que ladicte remission estoit subreptice et Savoient lesdiz supplians en icelles confessé la verité du cas, dont riens n'estoit, qu'ilz avoient prins lettres de nous, donnans à entendre que noz procureur et advocat en ladicte seneschaucie de Poictou avoient affinité et faveur oudit de Veluyre, pour interdire la congnoissance dudit procès audit seneschal de Poictou ou son lieutenant et la commettre audit seneschal de Xaintonge ou son lieutenant, et que après ilz furent èsdictesprisons de Saint Jehan, que ledit Fèvre avoit brisé lesdictes prisons et s'estoit absenté sans auctorité de justice, dont riens n'estoit, et que lesdiz supplianz avoient requis estre eslargis et mis hors desdictes prisons, ce que avoient debatu au contraire par ledit de Veluyre, et que pour ce qu'il avoit esté appoincté par ledil seneschal de Xaintonge ou sondit lieutenant que lesdiz supplians seroient eslargiz et mis hors desdictes prisons, sans faire droit sur ledit procès et sur ledit debat de ladicte remission, ledit de Veluyre avoit appellé à nous et à nostre cour de Parlement

On ne trouve pas trace de cette affaire sur les registres criminels du Parlement avant le 10 juin 1462. A cette date, on y lit l'appointement qui suit : « Sur ce que messire Guillaume de Veluire, chevalier, seigneur de Dilay, appellant du seneschal de Xantonge ou son lieutenant à Saint Jehan d'Angely, et demandeur en cas d'excès, et le procureur general du Roy adjoint, avec luy au regart desdiz excès, requerant defaut leur estre donné à 1'encontre d'Amaury de Liniers et Pierre Grimoart, intimez et défendeurs oudit cas d'excès, tenuz de comparoir ceans en personne, pour lesquelz Valin, leur procureur, a dit qu'il a lettres pour eulx afin d'estre receuz par procureur, dont il requiert l'enterinement, et au contraire par lesdiz demandeurs a esté dit qu'ilz sont appelans de ce que lesdiz défendeurs ont esté eslargiz, aussi que iceulx défendeurs sont porteurs de rémissions, par quoy sont tenuz de comparoir en personne, et nonobstant icelles ilz auront leur defaut, et ainsi l'ont requis ; appoincté est que la court verra lesdictes lettres et informacions et au conseil en ordonnera ainsi que de raison. » Les plaidoiries eurent lieu seulement le mardi 22 mars 1463 ; elles ne contiennent qu'une très sommaire relation du meurtre. Jean de Volvire était le fils unique de Guillaume, notable chevalier, allié de plusieurs gentilshommes du Poitou. Amaury de Liniers, qui avait conçu une haine violente contre le père et le fils, avait résolu leur mort ; à plusieurs reprises il avait tenté de mettre son projet à exécution. Même il avait passé marché avec six archers qui s'étaient engagés, moyennant une somme de dix écus, à tuer Guillaume et Jean, et il leur avait avancé à chacun quatre écus pour les encourager, ce qui avait été établi par Instruction judiciaire. Un jour, ayant reçu avis que Jean de Volvire était à la chasse, Amaury alla l'attendre avec plusieurs autres armés d'épées et de dagues ; il fut assailli par toute la bande, sans avoir le temps de se mettre en garde, et Liniers lui passa lui-même son épée au travers du corps ; il tomba mort sur le coup et ses compagnons reçurent tous quelques blessures. Telle fut la version de Guillaume de Volvire. L'avocat de son adversaire répondit que Liniers, notable écuyer, avait servi le feu roi dans ses guerres et avait toujours bien vécu, sans encourir aucun blâme. Voisin des Volvire, qui sont ses vassaux pour une partie de leurs possessions, ils avaient eu des débats ensemble à l'occasion de la propriété d'un bois, par suite desquels ceux-ci avaient commencé les hostilités contre lui et par plusieurs fois s'étaient efforcés de le tuer. Ils avaient même réussi à le blesser d'un trait d'arbalète, dont il fut longuement malade. Le jour de la rencontre mortelle, Jean de Volvire et ses compagnons avaient été encore les agresseurs. Ayant trouvé Amaury en un chemin, ils se précipitèrent sur lui et d'un coup de bâton sur la tête ils le firent choir à genoux, « lequel, pour eviter plus grant inconvenient de sa personne, bailla de son espée et se défendit à l'aide d'un de ses levriers, tellement qu'il prit le dessus sur ses adversaires ».

Aussitôt après le meurtre, Guillaume de Volvire fit ajourner Liniers en personne par-devant le sénéchal de Poitou. Celui-ci ne comparut point et se laissa condamner par défaut à de fortes amendes. Mais, dans l'intervalle, il avait fait appel à la clémence du roi et en avait obtenu les lettres de rémission de juin 1461 ; il les présenta audit sénéchal pour l'entérinement. Celui-ci appointa que les témoins examinés à l'information seraient recolés sur le principal et que les parties, si bon leur semblait, en feraient interroger d'autres encore, et que cet examen vaudrait enquête. Depuis, Liniers ayant appris que le procureur du roi en Poitou était parent de Volvire, il obtint des lettres royaux pour faire renvoyer la cause devant le lieutenant du bailli de Touraine à Chinon. Son adversaire appela de cette décision et, sur sa requête, le sénéchal de Saintonge fut définitivement commis pour prendre connaissance de l'affaire. Celui-ci ou son lieutenant à Saint-Jean-d'Angély fit déposer par Liniers une caution de 10.000 livres, en conséquence de laquelle il prononça son élargissement. Le meurtrier avait été détenu prisonnier pendant dix mois. Guillaume de Volvire interjeta de nouveau appel, et c'est alors que le Parlement fut saisi. L'affaire n'y demeura pas longtemps. Liniers demandait, à la suite de sa plaidoirie, que son élargissement fût maintenu, et que ses biens saisis lui fussent délivrés. (Arch. nat., X2a 32, aux dates des 40 juin 1462 et 22 mars 1463.) Le 19 avril 1463, la cour rendit son jugement. Du consentement des parties, elle les renvoya devant le bailli de Touraine ou son lieutenant à Tours, commis à se prononcer au principal, et leur y donna ajournement à un mois. Là Liniers et Grimoart devaient renouveler leurs cautions et faire appeler les commissaires chargés de l'administration de leurs biens placés sous la main du roi, pour en rendre compte. (Id., X2a 30, fol. 244 v°.)

Depuis lors, nous perdons de vue le procès pendant plusieurs années. Amaury de Liniers mourut avant d'en voir la fin. Le 3 janvier 1469 n. s., retour au Parlement, Jean de Liniers et Mathurin de La Faye, fils et gendre du meurtrier, ayant relevé appel de la sentence du bailli de Touraine. Ceux-ci prétendaient alors que Guillaume de Volvire avait déserté l'appel. Mais l'huissier qui portait son ajournement avait été détroussé en route, de sorte que le père de la victime n'avait pu être touché par l'assignation. Comme il n'entendait pas abandonner la cause, au moment d'obtenir satisfaction, il se fit délivrer et présenta à la cour des lettres de prorogation. Le Parlement appointa donc, le 3 janvier 1469, que le procès était reçu comme procès par écrit pour juger an benè velmalè fuerit appellatum. (Id., X2a 35, à la date.) En conséquence, les procédures reprirent et se continuèrent encore pendant plus de trois ans. Enfin, le 24 mars 1472 n. s., la cour rendit son arrêt définitif, laissant au meurtrier et à ses héritiers le bénéfice des deux lettres de rémission. Pour réparation de l'homicide commis, douze ans auparavant, sur la personne de Jean de Volvire, par Amaury, de Liniers et Pierre Grimoart, son serviteur et complice, et en l'emboursement des frais, dépenses et dommages occasionnés à Guillaume de Volvire par le procès, elle condamna Jean de Liniers et Mathurin de La Faye à lui payer 800 livres tournois, et ledit Grimoart 100 livres, et à constituer solidairement une rente annuelle de 10 livres pour le salut de l'âme de la victime, la fondation d'un obit perpétuel et la célébration d'un anniversaire solennel, chaque année, en l'église d'Ardin où avait été inhumé le corps de Jèan de Volvire ; ils devaient aussi acquitter pour une fois le prix de cent messes, dont trois à haute voix, avec diacre et sous-diacre, et de douze torches de cire, chacune du poids de deux livres, décorées des armes du défunt. Grimoart était en outre condamné à tenir prison fermée jusquau complet paiement des 100 livres. (Arch. nat. X2a 38, fol. 110 v°.) A la même date du 24 mars 1472, on trouve un autre arrêt portant que Jean de Liniers et Mathurin de La Faye ayant « mal appelé et sans grief », ils paieront au roi une amende de 60 livres parisis, sans plus. (Id., X2a 31, fol. 70.)

il a obtenu noz lettres d'adjournement en cas d'appel, par vertu desquelles ledit seneschal de Xaintonge ou son lieutenant a esté adjourné au huitiesme jour du moys de jung prochain venant, pour soustenir et deffendre les tors et griefz que icellui de Veluyredit lui avoir esté faiz par ledit lieutenant, iceulx veoir repparer et amender comme de raison, et aussi a esté enjoinct audit seneschal de envoyer lesdiz supplians prison- niers soubz bonne et seure garde ès prisons de la Conciergerie de nostre Palais à Paris, avec ledit procès, charges et informacions feablement cloz et seellés par devers nostredicte court de Parlement, pour en estre ordonné ainsi que de raison, et intimer lesdiz supplians. Et en oultre ce, a esté mandé par icelles noz lettres au premier huissier de nostre Parlement ou nostre sergent que, s'il lui appert ledit Fèvre avoir impetré ladicte remission et brisé lesdictes prisons, de le prendre au corps et le mener prisonnier en nostredicte Conciergerie à Paris. Desquelles lettres le lieutenant dudit seneschal de Xantonge a donné son excecutoire, par le moien duquel il a donné mandement au premier nostre sergent de adjourner ledit suppliant audit huitiesmejour de jung prochain, de eulx rendre en personne en ladicte court de Parlement, avec la caucion qu'ilz avoient autresfoiz donnée en toute la cause, sur peine d'estre actains et convaincuz des cas à eulx imposez et de estre [privez] et deboutez de l'effect et contenu de leurdicte remission ; et a baillé à Jehan de VilleneufveOn trouve, à la date du 7 avril 1426, un contrat de partage entre Jean de Villeneuve, chevalier, à cause de feu Aynor de Chausseraye, sa femme, Yves, seigneur de Saint-Mars, écuyer, à cause de Madeleine-Catherine de Chausseraye, aussi sa femme, d'une part, et Louis Chenin, chevalier, seigneur de l'Ile-Bapaume, époux de Marie de Chausseraye, veuve en premières noces d'Amaury de Liniers, d'autre part, de la succession de feu Payen de Chausseraye, seigneur d'Airvault, et de Marguerite de La Porte, sa femme. (Coll. dom Fonteneau, t. XI, p. 659.) Si le Jean de Villeneuve, « qui est à la poste dudit de Veluyre », dont il est question ici, était, comme il paraît vraisemblable, le fils de Jean et d'Aynor de Chausseraye, il était cousin du meurtrier de Jean de Volvire. qui est à la poste dudit de Veluyre, les procès, enquestes et informacions pour porter en nostre court de Parlement audit jour. Et avec ce iceulx supplians, par vertu dudit executoire, ont esté adjournez audit jour en la forme dessus declairée.

Et depuis naguères ont esté detenuz prisonniers en nostre chastel de Lezignen, pour occasion dudit cas. Et pour ce que, à nostre nouvel advenement à la couronne et à nostre nouvelle entrée en chascune ville ou place, il nous loise delivrer tous prisonniers et leur remettre tous et chacuns les cas par eulx commis et perpetrez, dont ilz sont ou pourroient estre accusez, iceulx supplians, narracion à nous faicte des choses dessus dictes et des lettres de remission dudit cas de feu nostre dit seigneur et père, dont dessus est faicte mencion, eulx estans prisonniers en nostre dit chastel de Lezignen, à nostre première entrée en icellui, nous ont humblement supplié et requis noz grace et misericorde leur estre sur ce imparties. Pour quoy nous, ces choses considerées, ausdiz supplians et chascun d'eulx, pour ces causes et consideracions et autres à ce nous mouvans, avons, en tant que mestier seroit, de rechief et de nouvel, et en usant des droiz et prerogatives de noz predecesseurs roys de France, en chacune ville ou place de nostredit royaume, après nostredit nouvel advenement ala couronne, comme dit est, et autrement, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, remis, quicté et pardonné, remettons, quictons et pardonnons, par ces presentes, ledit cas et omicide dont ès lettres de grace de nostre dit feu seigneur et père est faictemencion, et autrement en la manière que ledit cas est ou pourroit estre advenu, et autres cas s'aucuns en avoient commis, ensemble toute peine, amende et offense corporelle, criminelle etciville, en quoy, à l'occasion dessus dicte, ilz sont ou pourroient estre encouruz envers nous et justice, et les avons restituez et restituons à leur bonne fame et renommée, au païs et à leurs biens non confisquez, satisfaction faicte à partie civilement tant seulement, se faicte n'est. Et sur ce imposons scilence à nostre procureur general, present et avenir, et à tous autres, en mettant au neant par ces dictes presentes tous procès, deffaulx, ban et appeaulx sur ce ensuiz, tant par nostredit seneschal de Poictou que autre part, en quelque manière que ce soit. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx conseilliers les gens tenans nostre Parlement à Paris et à tous noz autres justiciers, etc., leurs corps et biens pour ce prins, saisiz, arrestez ou empeschez leur mettent ou facent mettre sans delay à plaine delivrance, etc. Donné à Lezignen, ou moys de may l'an de grace mil cccc. soixante et deux, et de nostre règne le premier. Ainsi signé : Par le roy, le sire du LauAntoine de Châteauneuf, seigneur du Lau, sur lequel cf. ci-dessus, p. 299, note 2. le bailly de SensCharles de Melun, chevalier, seigneur de la Borde, de Nantouillet, etc., baron des Landes, conseiller et chambellan du roi, grand maître de France, capitaine de Vincennes et gouverneur de la Bastille, était encore bailli de Sens le 14 avril 1463. (Edit. de Commines, par Mlle Dupont, Pièces justificatives.) Ce n'est que postérieurement à cette date que Louis XI le remplaça par Regnault du Chastelet. et autres presens. Le Prevost. — Visa. Contentor. J. Du Ban.

MCCCLXIV Mai 1462

Permission à Jacques Rataut, écuyer, seigneur de Curzay, de clore de murs et de fortifier sadite place de Curzay.

AN JJ. 198, n° 430, fol. 387 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de nostre cher et bien amé Jacques Ratault, escuier, seigneur de Curray (sic)Jacques Rataut, écuyer, seigneur de Curzay, fils de Bertrand Rataut et de Marguerite Rouault, sa seconde femme, était bailli de Gâtine et capitaine de Parthenay pour Jean bâtard d'Orléans, comte de Dunois. Nous n'avons que très peu de chose à ajouter à la notice biographique qui lui a été consacrée dans notre t. VIII et avant-dernier, p. 140, note. Le 2 avril 1473, maître Jean Giraut était appelant au Parlement de Jacques Rataut, bailli de Gâtine, et de Guillaume Chauvin, son lieutenant, et demandeur contre eux en cas d'excès. Le premier avait été ajourné en personne et le second simplement ; comme ils n'avaient point comparu, sinon par procureur, Rataut prétendant avoir obtenu des lettres lui accordant cette faculté, Jean Giraut requérait défaut contre lui. La cour, vu les exploits de justice et informations en cette matière, renvoya les parties par-devant le sénéchal de Poitou ou son lieutenant à Poitiers, et leur donna jour à un mois, pour procéder sur ledit appel, sur les excès et touchant aussi la question de comparution personnelle. (Arch. nat., X2a 40, fol. 57 v°.), contenant que il a plusieurs belles terres et seigneuries situées et assises en nostre seneschaucée de Poictou, et entre les autres il est seigneur de ladicte terre et seigneurie de Curray et à cause d'icelle a plusieurs hommes et subgectz, rentes et revenues, en laquelle seigneurie de Curray ledit suppliant a une mote belle et aventageuse, si elle estoit fortiffiée, distant de nostre chastel de Lezignen de deux lieues ou environ, et de nostre ville de Poictiers de cinq lieues ou environ ; laquelle place, où il a entencion user partie de ses jours, pour obvier aux roberies qui lui pourroient estre faictes, quant il y resideroit, et pour la seurté des personnes de lui, sa femme et mesnaige et de ses diz hommes et subgectz, lesquelz en temps de guerre et hostillitez n'ont lieu où ilz se puissent retraire, aisé ne plus prouffitable pour eulx que ladicte mothe de Curray, feroit voulentiers clorre et fortifier, maiz il ne l'oseroit faire sans noz congié et licence, si comme il dit, humblement requerant nostre provision. Pour ce est il que nous, ces choses considerées, à icellui suppliant, en faveur et consideracion des bons et agreables services, par lui et les siens faiz, ès temps passez, à feu nostre très chier seigneur et père, que Dieu absoille, et à nous, pour ces causes et en consideracion des[diz] bons et agreables services, avons donné et octroyé, donnons et octroyons, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, congié et licence de fermer, clorre et fortiffier ladicte mothe et place de Curray de foussez, paliz, murailles, tours, tournelles, portail, garites, barbacannes, pons leveis, eschiffez et autres fortifficacions à ce neccessaires et convenables, et telles et ainsi que bon lui semblera. Si donnons en mandement, par ces dictes presentes, à noz amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers à Paris, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d'eulx, si comme à lui appartiendra, que de noz presens grace, congié et licence ilz facent, seuffrent et laissent ledit suppliant, ses hoirs et successeurs, joir et user plainement et paisiblement, sans pour ce le molester ou travailler, ores ne pour le temps avenir, en aucune manière au contraire; mais s'aucun empeschement leur avoit esté ou estoit mis, si l'ostent et mettent, ou facent repparer et mettre sans delay au premier estat et deu. Et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces dictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l'autruy en toutes. Donné à Lezignen, ou moys de may l'an de grace mil cccc. soixante et deux, et de nostre règne le premier.

Ainsi signé : Par le roy, le sire du Lau present. Le Prevost. — Visa. Contentor. J. Duban.

MCCCLXV Mai 1462

Permission à Jacques Rataut, écuyer, seigneur de Curzay, d'ériger des fourches patibulaires audit lieu de Curzay.

AN JJ. 198, n° 429, fol. 387 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de nostre cher et bien amé Jacques Ratault, escuier, seigneur de Curray (sic), contenant que il a plusieurs belles terres et seigneuries situées et assises en nostre seneschaucée de Poictou, et entre les autres il est seigneur de ladicte terre et seigneurie de Curray, à cause de laquelle il a plusieurs hommes et subgectz et toute haulte justice et juridicion, moienne et basse, et tous les droiz qui en deppendent ou puent deppendre, fors seullement forches patibulaires, lesquelles ledit suppliant nous a presentement requis que lui voulsissions octroyer, pour l'augmentacion et acroissement de sadicte seigneurie, justice et juridicion, et sur ce lui impartir nostre grace. Nous, les choses dessus dictes considerées, inclinans favorablement à la requeste dudit Jacques Ratault, auquel, par noz autres lettres avons donné congié de clorre et fortiffier sa place dudit lieu de Curray, à icellui, pour consideracion des bons et continuelz services que lui et les siens ont faiz à feu nostre très chier seigneur et père, que Dieu absoille, et aussi à nous, à icellui, de nostre certaine science, grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, avons octroyé et octroyons, voulons et nous plaist qu'il puisse et lui loise faire, dresser et eslever, construire et ediffier en sadicte terre et seigneurie forches patibulairesBertrand Rataut, chevalier, sr de Curzay, père de Jacques, avait déjà obtenu de Charles vu la permission d'ériger des fourches patibulaires à deux piliers en ce lieu de Curzay, en même temps qu'il lui octroyait la haute justice de ladite seigneurie, par lettres patentes du 23 mai 1442, qui sont imprimées dans notre tome VIII, p. 138. Les lettres de mai 1462 furent présentées au Parlement par Jacques, qui en requérait l'entérinement, le 26 juillet 1463 ; il fut fait droit à sa requête le 2 août suivant. (Arch. nat., X2a 32, aux dates.) Elles furent enregistrées aussi à la Chambre des comptes, anc. mémorial M, acte non reconstitué (Mention d'inventaire, Bibl. nat., ms. fr. 21405, p. 151), et à la Cour des aides, (Id., Arch, nat., U. 446, fol. 108.) pour l'execution de sadicte haulte, moienne et basse justice, et qu'il en puisse joir et user tout ainsi et par la manière que ont acoustumé de faire les autres [ayans fourchesMots omis par le copiste.] patibulaires. Si donnons en mandement, par ces dictes presentes, à noz amez et feaulx conseilliers les gens tenans et qui tiendront nostre Parlement et gens de noz comptes et tresoriers à Paris, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d'eulx, si comme à lui appartiendra, que de nostre presente grace, octroy et voulenté facent, seuffrent et laissent ledit suppliant joir et user plainement et paisiblement, sans lui mettre ou donner, ne souffrir estre mis ou donné aucun destourbier ou empeschement au contraire. Et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l'autruy en toutes. Donné à Lezignen, ou moys de may l'an de grace mil cccc. soixante et deux, et de nostre règne le premier.

Ainsi signé : Par le roy, le sire du Lau present. Le Prevost. — Visa. Contentor. J. Duban.

MCCCLXVI 4 juin 1462

Rémission octroyée à Louis de Lestang et à Louis Torin, de la châtellenie de Mirebeau, coupables du meurtre de Guillaume Sicault, dans une discussion que ce dernier avait eue avec la dame de la Bournalière, femme de Floridas Frotier, qu'ils accompagnaient.

AN JJ. 198, n° 385, fol. 351.)     P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France, à tous ceulx qui ces presentes lettres verront, salut. L'umble supplicacion de Loys de LestangLouis de Lestang était le second fils d'Héliot de Lestang, écuyer, seigneur de Ry, et de Perrette Fouchier. Héliot avait partagé, le 11 février 1448, avec Mathurin de Montléon, son beau-frère, les biens de sa mère, Perrette, aliàs Françoise de Ry, qui avait apporté l'hôtel de Ry à son second mari, Guillaume de Lestang. Ce fief, qui en 1434 était dans les mains de Jean de Montléon, premier époux de ladite Perrette, se composait alors de la forteresse de Ry avec ses clôture, fossés, fuie, garenne à conils, des moulins de Ry, de Chaudour et de bois et terres valant 20 livres environ, de l'hôtel de Vilaines, valant 20 livres, de l'hébergement du Breuil, paroisse de Blalai, valant 15 livres, de l'hôtel des Touches, paroisse de Varennes, valant dix livres. Après le second mariage de Perrette de Ry, ce domaine fut démembré et l'hôtel du Breuil ainsi que celui de Vilaines furent tenus en parage par les filles et gendres de son fils Héliot : Béatrix de Lestang, femme de Pierre de Montléon, seigneur de Massoignes; Perrette, mariée à Renaud du Vergier; Jeanne, épouse de Jean Baudouin, écuyer, et Marie, femme de Pierre de la Touzay, écuyer, toutes mentionnées, avec Bertrand de Lestang, écuyer, fils aîné d'Héliot, qui fut seigneur de Ry après son père, et Louis le cadet, dans l'acte de partage de la succession de leurs père et mère, le 4 février 1466 n. s. (È. de Fouchier, La baronnie de Mirebeau, etc., p. 241 ; Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 1er édit., t. II, p. 295.) natif de la chastellenie de Mirebeau, et Loys Torin, demourant en ladicte chastellenie, avons receue, contenant que, le venredy xviiie jour de septembre derenier passé devers le soir, ung nommé Jehan Paen

Nous avons cité précédemment (ci-dessus p. 306, note) l'arrentement d'un hébergement à Seuilly, fait en 1459 à Jean Payen, bourgeois de Mirebeau, par Jean Mourraut, conservateur des privilèges royaux de l'Université de Poitiers. (Arch. de la Vienne, G. 1213.) Ce nom, dans les actes dont nous allons parler, est écrit tantôt Paen, tantôt Paien. Ce même Jean Payen, demeurant à Mirebeau, avait porté plainte au Parlement contre le procureur et les autres officiers du roi de Sicile, duc d'Anjou,) audit lieu. Il disait que pour se venger d'un procès qu'il avait dû leur intenter, Jean de Hurnay (aliàs Vivray), Antoine Delafont, Jean Valette, Jean Thomas, Colin Haquet, Jean Cholet, Jean Chatart et Christophe Maunourry, André Brunet et Thibaut Pignart (tels sont les noms de ces officiers), l'avaient menacé et le menaçaient encore de le frapper et de le mutiler, de sorte que sa femme, ses enfants et lui n'osaient plus demeurer à Mirebeau. La cour les prit sous sa sauvegarde par lettres du 11 mars 1466 n. s. Le 27 mars, Jean Payen vint à Paris avec ce sauf-conduit et obtint mainlevée des biens que ses adversaires avaient fait saisir, moyennant qu'il s'engagea à bailler caution de 1000 livres et à se présenter, le 15 mai suivant, devant le sénéchal de Poitou ou 1e conservateur des privilèges de l'Université. Bien qu'il eût rempli toutes les formalités requises, les officiers de Mirebeau, sous des prétextes futiles, ne voulurent pas consentir à la délivrance de ses biens. Le Parlement ordonna au premier huissier de les lui faire délivrer, par arrêts des 13 mai et 19 août 1466. Malgré tout, André Brunet, Thibaut Pignart, Jean de Hurnay et autres, qui avaient pris ou détenaient lesdits biens, refusèrent plus que jamais de les restituer. Le 20 juillet 1467, Jean Payen n'ayant toujours rien pu obtenir, la cour délivra contre ses principaux adversaires un mandat de prise de corps, ordonnant, si on ne pouvait s'emparer de leurs personnes, de les ajourner à son de trompe et cri public, sous peine de confiscation et de bannissement. (Arch. nat., X2a 34, fol. 182 v°, 186 v°, 201 v°, 227 v° et 336.)

, receveur dudit lieu de Mirebeau pour nostre très chier et très amé oncle le roy de Jherusalem et de Secile, duc d'AnjouRené d'Anjou, duc d'Anjou, de Lorraine et de Bar, comte de Provence, roi de Sicile et de Jérusalem, né à Angers le 16 janvier 1409, mort à Aix en Provence, le 10 juillet 1480., se transporta en l'ostel de Ry près ledit lieu de Mirebeau, appartenant au père dudit Loys, suppliant, et requist et pria par pluseurs foiz ledit Loys qu'il lui pleust aller le landemain d'icellui jour avec luy, pour acompaigner la dame de la Bournalière, femme de Floridas Frotier

La dame de la Bournalière était Marguerite Beslon, fille de Guillaume, seigneur de Ringère, qui avait en effet épousé, le 26 juin 1450, Floridas Frotier, deuxième fils de Colin Frotier, chevalier, seigneur de la Messelière et de Chamousseau, et d'Isabelle d'Usseau. A la mort de son père (1447), celui-ci fut placé sous la tutelle de Guy, son frère aîné. Le Dict. des familles du Poitou (nouv, édit., t. III, p. 614) dit que Guy, seigneur de la Messelière, mari de Jeanne de Maillé, se voyant sans enfants et sans doute mécontent de son frère Floridas, par amitié pour son cousin Prégent Frotier, baron de Preuilly, fit don à ce dernier de tous ses biens, le 4 janvier 1466 ; mais, après la mort de Guy (qui d'ailleurs vivait encore dix ans après cette date), le baron de Preuilly renonça à cette succession en faveur de Geoffroy, fils de Floridas. L'on y voit aussi que ce Floridas transigeait, le 4 mai 1482, avec Jeanne de Maillé, veuve de son frère. Cette transaction se rattaché sans doute au procès relatif à la possession de la seigneurie d'Empuré, que Guy Frotier et sa femme soutenaient depuis de longues années contre Geoffroy Taveau, baron de Mortemer et de Lussac, procès que nous avons amplement exposé dans la notice sur ledit Geoffroy (ci-dessus, p. 230). Nous avons vu en cet endroit que cette affaire compliquée fut reprise, après la mort de Guy, par Floridas, qualifié écuyer, sr de la Messelière, ou plutôt en son nom, par son fils Geoffroy, qui lui avait été donné comme curateur par autorité de justice, parce qu'il était « simple, sans grant sens et entendement ». Geoffroy, qui fut seigneur de la Messelière, Chamousseau, Queau, Chambonneau, sans conteste après que, le 24 janvier 1489, le baron de Preuilly eut renoncé, en sa faveur, à la succession de Guy Frotier, avait épousé Jeanne, fille d'Antoine de Lezay, seigneur de l'Isle-Jourdain en partie.

, à aler querir du blé au lieu du Vergier de Marconnay assis en ladicte chastellenie de Mirebeau, et qu'il menast avecques lui ledit Guillaume Torin, suppliant, portier dudit hostel de Ry, et le varlet du sire de RocheffortGuillaume Gouffier, seigneur de Bonnivet, était encore, à la date de ces lettres, seigneur de Rochefort en Mirebalais. Cette terre et seigneurie, avec le château, après avoir appartenu à la famille d'Argenton, était en 1449 en possession de Jean de Xaincoins. Confisquée sur ce financier, le 17 décembre de la même année, avec celles de Champigny-le-Sec et du Roignon, Charles VII en fit don à Guillaume Gouffier, son ancien gouverneur. Ce ne fut qu'en 1464 ou 1465 que celui-ci vendit Rochefort à Jean de Moulins, notaire et secrétaire du roi, maire de Poitiers, sur lequel cf. ci-dessus, p. 216, note. (E. de Fouchier, La baronnie de Mirebeau du XIe au XVIIe siècle, p. 230, 231.). Lequel Loys de Lestang suppliant, qui ne savoit qui esmouvoit ledit Paen à lui requerir ce que dit est, par pluseurs foiz lui dist qu'il avoit ailleurs à besongner et qu'il ne yroit point ; mais ledit Paen, qui avoit desir que ledit Loys suppliant obeist à sa voulenté et requeste, par parolles blandines le duisy à conscentir ce dont il l'avoit requis, et ne l'osareffuser ledit Loys, tant parce que ledit Paen avoit grant amour et aliance avec sondit père, comme aussi parce qu'il creoit que ledit Paen, qui est notables homs, ne le requeroit de ce que dit est que pour tout bien ; et conclurent illec lesdiz Paen et Loys, suppliant, que le landemain d'icelluy jour ilz yroient audit lieu de la Bournalière. Et celluy jour de vendredi, ung nommé Phelippon Rousseau estoit venu audit hostel de Ry pour certains ses affaires ; auquel lieu de Ry ledit Loys de Lestang, Rousseau, Torin et ledit varlet dudit sire de Rocheffort deliberèrent, en l'absence dudit Paen, d'aler ledit landemain avec luy, et de fait ledit landemain bien matin, iceulx Loys, Rousseau, Torin et varlet se partirent dudit hostel de Ry et s'en alèrent audit lieu de la Bournalière, où ledit Paen et Denis, nostre sergent, se trouvèrent. Et quant il furent audit lieu, ladicte dame de la Bournalière fist habiller sa charrette et print des sacs; et pour ce que ladicte dame veoit que sa charrette ne pourroit souffire à charroier ledit blé, commanda audit Denis André aler au lieu de la Bournalière pourchacer du chasroy, et ledit Paen de soy se delibera d'aler au lieu de Poix faire provision de charrettes pour ledit blé faire charroyer. Et lors ladite dame de la Bournalière monta en sadicte charrette et ledit Torin suppliant avec elle, qui avoit une arbalaistre et du trait, laquelle arbalaistre il avoit continuellement acoustumé porter, et eulx acheminèrentpour aller audit lieu du Vergier de Marconnay; et avec eulx allèrent ledit Loys de Lestang suppliant, qui avoit à sa sainture ung cousteau ou bistorie que par avant tousjours il portoit, ledit Rousseau qui avoit ung cousteau et ledit varlet une petite javeline et une dague; et eulx estans ou chemin public, devant l'ostel de feu Guillaume Ciquault, trouvèrent des mestiviers qui bastoient du blé, et illec incontinant qu'ilz y furent arrivez, demandèrent les aucuns à ladicte dame si c'estoit illec qu'ilz devoient chargier, et elle leur fist response que oy. Et adonc ledit Rousseau descendi à pié de dessus son cheval et ledit Torin de ladicte charrette, et tous illec se arrestèrent, cuidans que ledit blé fust à ladicte dame ; et vouldrent lesdiz Rousseau et Torin commancer à mesurer et misdrent en ung boisseau. Et incontinant Medart Sicault, filz dudit feu Guillaume Sicault, dist à ladicte dame qu'elle n'avoit riens oudit blé et qu'elle n'en auroit point, et elle lui fist response que si auroit et qu'elle ne vouloit riens du sien, et que icellui blé lui appartenoit. Et tantost ledit Medart tant qu'il peut s'en alla en son hostel et y print une fourche de fer, et impetueusement et malicieusement vint contre les dessus nommez, et ledit feu Guillaume Sicault sortit ou chemin où l'en ventoit ledit blé par dessus ung mur et commança en grant arrogance à parler à ladicte dame malicieusement, en lui disant que ledit blé estoit sien et qu'il l'avoit achapté, et elle lui dist qu'il se dépportast et qu'elle né savoit qui lui avoit vendu et qu'il estoit sien, et qu'elle ne mourroit pas de fain. Et ledit feu Guillaume Sicault se despoilla et se mist en chemise, et print des pierres en ses mains et commança à jurer à grans seremens qu'il ne souffreroit point que ladicte dame de la Bournalière eust aucune chose dudit blé et que avant il morroit en la place ; et malicieusement et par forme de invazion vint contre lesdiz Loys, Rousseau et varlet dudit sire de Rocheffort, disant que, s'ilz se prenoient audit blé, quil les mettroit à mort ou qu'ilz lui nietteroient, en appellant son dit filz qui jà avoit ladicte fourche de fer, en lui disant telles parolles : « Laisserons nous ainsi mauvaisement emmener nostre blé ? » Et ce voyant, ledit Loys de Lestang, qui n'avoit aucune intencion de faire aucun mal audit feu Guillaume Sicault, lui dist doulcement qu'il ne fist point de noise. Mais ledit Sicault n'en tint conte et vint droit à luy, tout esmeu et eschauffé ; et quant ledit Loys vit qu'il ne se vouloit cesser, tira son dit cousteau et dist audit Sicault que s'il se approchoit de luy, qu'il le frapperoit, et dist aux dessus nommez qu'ilz se deffendissent chascun en droit soy. Et tantost ledit Sicault dist à son dit filz ces parolles : « Et me laisseras tu mourir? » Et combien que ledit feu Guillaume Sicault fust adverty par ladicte dame et autres de sa compaigniée de soy depporter de faire noise, ce neantmoins ledit Medart, son filz, vint contre ledit Loys, suppliant, qui n'avoit point frappé ledit feu ne lui, et de ladicte fourche de fer lui donna de toute sa puissance ung cop sur le bras tellement qu'il fit cheoir à terre ledit cousteau qu'il tenoit, lequel ledit feu Sicault recueilly et leva de terre, et avec icellui impetueusement vint contre les dessusdiz pour les oultrager, et de fait se efforça de ainsi le faire, et en combatant avec eulx, il cheut contre terre et lui donna ledit Rousseau sur le dos ung cop du plat de sondit cousteau, sans le blecier, et ledit Loys suppliant, qui est jeune homme de l'aage de xx. ans ou environ, ce voyant, descendit de dessus son cheval et print en sa main ladicte javeline que avoit ledit varlet dudit sire de Rocheffort, et vint contre ledit feu Sicault en lui demandant son cousteau, et pour occasion de la reddicion dudit cousteau se meurent entre eulx plusieurs parolles injurieuses ; et ainsi qu'ilz se desbatoient, ledit feu Guillaume Sicault fut frappé par ledit varlet dudit sire de Rocheffort d'un baston non ferré ; et après ledit feu Guillaume rendit audit Loys son cousteau, lequel lui fist promesse de non l'en frapper. Et si tost que ledit Loys eut sondit cousteau, dist audit feu Sicault qu'il se tirast arrière, mais ledit Sicault ne le voult croire et vint droit ausdiz Rousseau et varlet de Rocheffort, tout esmeu, et ainsi qu'il s'aprocha, l'un d'eulx le frappa du baston de ladicte javeline tellement qu'il rompit en deux pièces, et ledit filz d'icelluy feu Sicault haulsa le manche de ladicte fourche qu'il tenoit et d'icellui s'efforça frapper ledit varlet de Rocheffort sur la teste, mais il mist sa dague au devant du cop et le receut, dont il cheut presque à terre. Et ce voyant ledit feu Sicault, qui estoit saisy d'un gros baston, vint contre ledit varlet, lequel varlet qui avoit sadicte dague nue en sa main, quant ledit Sicault fut joingnant de lui, ou conflict et à la chaulde lui donna de sadicte dague ung seul cop par le cousté, dont ledit feu Guillaume Sicault cheut, à terre tout mort. Pour occasion duquel cas lesdiz supplians, doubtans rigueur de justice, se sont abscentez du païs et n'y oseroient jamais retourner ne converser, se nostre grace et misericorde ne leur estoit sur ce impartie, humblement requerant que, attendu ce que dit est, et mesmement que ledit feu Sicault et sondit filz furent agresséurs dudit debat, et que lesdiz supplians n'aloient pas avec ladicte dame en entencion de faire aucun mal, mais seulement pour l'acompaigner, pour ce qu'elle est noble femme et leur voisine, et aussi que en tous autres cas ilz ont esté de bonne et honneste conversacion, etc., et que pour ledit cas ainsi advenu que dit est ledit varlet dudit sire de Rocheffort, qui en est principalement tenu, ait obtenu de nous remission, nous leur vueillons impartir icelles. Pour quoy nous, etc., ausdiz supplians ou cas dessus dit avons quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à nostre bailly de Touraine, des ressors et exempcions d'Anjou et du Maine, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chastelleraud, le quatriesme jour de jung l'an de grace mil cccc. soixante et deux, et de nostre règne le premier.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Le Prevost.

MCCCLXVII 12 juin 1462

Confirmation du traité conclu entre Charles VII et Jean Harpedenne, seigneur de Belleville, le 3 mai 1433, pour le mariage de Jean de Belleville, fils aîné dudit Jean Harpedenne, avec Marguerite de Valois, fille naturelle de Charles VI.

AN JJ. 198, n° 359, fol. 315 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir veu les lettres de confirmacion de certains traictez, voulentez et appoinctemens faiz, consentiz et accordez par feu Jehan HarpedenneJean II Harpedenne, seigneur de Belleville, décédé le 8 ou le 9 juillet 1434, sur lequel nos précédents volumes fournissent beaucoup de renseignements. (Voy. t. V (XXI des Arch. hist.), p. 205-206 ; t. VI (XXIV des Arch. hist.), p. 290 ; t. VII (XXVI des Arch. hist.), p. 106 et 187, et t. VIII (XXIX), p. 282., en son vivant chevalier, sire de Belleville et de Montagu, données et octroiées par feu nostre très chier seigneur et père, que Dieu absoille, à nostre amé et feal chevalier Jehan sire de BellevilleJean III, sire de Belleville, qui avait renoncé à son nom patronymique Harpedenne, était fils aîné du précédent et de Jovine de Mussidan. Nous lui avons consacré dans notre huitième volume (p. 45, n.) une assez longue notice, à laquelle nous ajouterons ici quelques mots au sujet de poursuites dont il fut l'objet, ainsi que trois de ses fils, de la part de Jean Le Breton, fils d'autre Jean, seigneurs de la Frairière et autres fiefs, pour lesquels ledit Le Breton était son vassal. La Frairière, mouvant de Montaigu, avait appartenu d'abord à Jean Morin, puis à la nièce de celui-ci, Assete Morin, mariée d'abord à Jacques d'Assigny, puis à Jean Le Breton, le père. Le 1er mai 1460, Louis, Jean et Antoine de Belleville, fils de Jean III, sire de Belleville, Gabriel Fortin, Pierre Vincendeau et autres leurs complices avaient pénétré de vive force dans cette résidence, s'étaient emparés de la personne et des biens de Jean Le Breton, qu'ils détinrent prisonnier, et s'étaient rendus coupables de plusieurs autres excès à son préjudice. Celui-ci ayant porté plainte au Parlement, la cour, par mandement du 29 janvier 1461 n. s., ordonna au sénéchal de Poitou et au bailli de Touraine de le remettre tout d'abord en possession de ses héritages. L'affaire suivit son cours et fut plaidée les 29 mai, 9 et 12 juin 1461 ; on trouve dans ces plaidoiries et dans deux autres mandements des 18 et 20 juin tous les détails relatifs aux faits criminels qui motivèrent ces poursuites. (Arch. nat., X2a 28, aux dates des 29 mai, enreg. entre le 2 et le 5 juin, 9 et 12 juin ; X2a 30, fol. 26 v°, 30, 48 v°, 49.) Jean III de Belleville avait eu de Marguerite de Valois cinq fils (et non quatre, comme il a été dit) : Louis, seigneur de Belleville après son père, Jean, Antoine, Jacques et Gilles, s»1 de Cosnac-sur-Gironde, et une fille, Marie, femme de Bertrand Larchevêque, sr de Soubise. Ils sont nommés, suivant cet ordre, dans l'acte de cession de Montaigu à Louis XI, le 4 août 1473. (Arch. nat., J. 183, n° 159.) filz aisné dudit feu Jehan de Harpedenne, seellées en laz de soye et cire vert, desquelles la teneur s'ensuit : Charles, par la grace de Dieu, etc...Donné à Tours, le septiesme jour d'octobre l'an de grace mil cccc. trente troys, et de nostre règne le onziesmeSuit le contrat du 3 mai, inséré dans les lettres de ratification de Charles VII, en date du 7 octobre 1433, actes qui ont été publiés dans notre tome VIII (Arch. hist. du Poitou, t. XXIX), p. 44-51..

Lesquelles lettres, ensemble le contenu en icelles, dont icellui seigneur de Belleville a joy paisiblement, il nous a semblablement supplié et requis que semblablement lui vueillons confermer. Pour quoy nous, considerans les causes pour lesquelles nostredit feu seigneur et père fut meu de faire et octroyer ladicte confir- macion, et inclinans à la supplicacion à nous sur ce faicte, pour ces causes et pour les bons et agreables services que icellui de Belleville et ses predecesseurs ont faiz à nostredit feu seigneur et père et à nous, tant ou fait des guerres que autrement, lesdictes lettres, traictez, accords et appoinctemens faiz et passez, comme dit est, par ledit feu Jehan de Harpedenne et tout le contenu en icelles avons louées, approuvées, ratiffiées et confermées, louons, approuvons, ratifiions et confermons, voulans et decernans de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, que, nonobstant quelxconques usaiges et coustumes de païs, elles sortissent leur effect selon et ainsi que nostre dit feu seigneur Y a voulu et ordonné par cesdictes lettres de confirmacion. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx conseilliers les gens de nostre Parlement, les maistres des requestes de nostre hostel et de nostre palais à Paris, aux seneschaulx de Poictou et de Xantonge, au gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d'eulx, si comme à lui appartiendra, que de nosdictes voulenté et grace facent, seuffrent et laissent ledit seigneur de Belleville et ses successeurs joir et user plainement et paisiblement, sans les empescher ne souffrir estre empeschez aucunement au contraire, et à nostre procureur general, qui à present est et qui pour le temps avenir sera, que, se aucun venoit ou s'efforçoit venir à rencontre, que il se constitue partie contre lui et se adjoigne avec icellui seigneur de Belleville et ses diz successeurs. Et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes, aux vidimus desquelles, faiz soubz seaulx auctenticques, voulons foy estre adjoustée comme à l'original. Donné à Chinon, le xiie jour de jung l'an de grace mil cccc. soixante et deux, et de nostre règne le premier. Ainsi signé: Par le roy, les sires de MontaubanJean de Montauban, chevalier, d'une ancienne famille bretonne, chambellan et conseiller de Charles VII, maréchal de Bretagne, bailli de Cotentin (1450), grand maître des eaux et forêts (1461) et amiral de France, né vers 1412, décédé à Tours en mai 1466. de la VarennePierre II de Brézé, seigneur de la Varenne et de Brissac, comte de Maulévrier, ancien sénéchal de Poitou, tué à la bataille de Montlhéry (16 juillet 1465). Voir notre t. VIII, p. 178, où se trouve une notice biographique développée sur ce personnage célèbre comme conseiller de Charles VII., du LauAntoine de Châteauneuf, seigneur du Lau. (Cf. ci-dessus, p. 299, note.), le bailly d'EvreuxRobert de Floques, dit Floquet, bailli d'Evreux, bien connu pour les services militaires qu'il rendit à Charles VII, aurait été tué, suivant certains auteurs, à la bataille de Montlhéry (16 juillet 1465). Mais M. de Beaucourt fixe la date de sa mort au 17 décembre 1461. (Chronique de Mathieu d'Escouchy, t. II, table.) Dans les provisions dudit office de bailli d'Evreux, données par Louis XI à Mons, le 22 novembre 1473, en faveur de Jean de Hangest, chevalier, sr de Genlis, il est dit que c'est en remplacement de Jean de L'Esprevier. (Bibl. nat., pièces orig., vol. 1474, doss. Hangest 33409, n° 83.) N'ayant pas retrouvé la date de nomination de ce Jean de L'Esprevier, nous ne saurions dire s'il fut le successeur immédiat de Robert de Floques. et autres presens. O. Le Roux. — Visa. Contentor. J. Duban.

MCCCLXVIII 12 juin 1462

Confirmation et vidimus, en faveur de Jean, seigneur de Belleville et de Montaigu, chevalier, chambellan du roi, des lettres de Charles VI datées de Paris, le 24 janvier 1398 n. s., portant de nouveau donation à Jean Harpedenne, chevalier, père dudit sr de Belleville, en récompense de ses services au fait des guerres, des château et châtellenie de Montendre en SaintongeMontendre avait été donné une première fois à Jean Harpedenne parle roi Charles VI, à une date inconnue, mais antérieure au 26 avril 1391. Ces lettres ayant été perdues au château de Josselin, lors de la prise de possession de cette place par le duc de Bretagne, le 1er juillet 1393, le roi les renouvela par celles du 24 janvier 1398, dont le texte est reproduit dans la confirmation de Louis XI. (Cf. notre t. VI, XXIV des Arch. hist, du Poitou, p. 289.) Jean Harpedenne a été l'objet, dans notre Ve vol., p. 205, d'une notice biographique qui a été complétée en différents- endroits des vol. suivants, indiqués ci-dessus, p. 366, note., qui avaient été confisqués sur le Soudan de Latrau, rebelle et partisan des Anglais. « Donné à Chinon, le xiime jour de juing l'an de grace mil iiiic soixante deux, et de nostre règne le premier. — Ainsi signé : Par le roy, l'admiral, le sire du Lau, le bailli d'Evreux et autres presens. » O. Le Roux. — Visa.

P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

MCCCLXIX Juin 1462

Rémission donnée en faveur de Gillet Savaton, marchand, demeurant à Germigny-Iès-Faye, qui, conduisant du sel à Thouars, avait frappé mortellement un nommé Pierre David ; celui-ci, se prétendant receveur du quart du sel, avait voulu le rançonner, sous prétexte qu'il n'avait pas d'acquit de cette taxe.

AN JJ. 198, n° 357, fol. 313 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, parla grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Gilet Savaton, marchant, demourant en la ville de Germigny lez Faye, contenant que, ou moys de octobre mil cccc. soixante et ung derrenier passé, ledit suppliant avecques ung sien compaignon sur le fait d'aucunes marchandises d'uyles s'estoient transportez à Thouars, pour illec vendre leursdictes marchandises à certain jour de marchié, lesquelles pour lors ilz ne peurent totalement vendre ; pour quoy, pour mieulx avoir argent, se transportèrent en la ville de Mallevrier, pour illeques vendre leursdictes marchandises. Après la vendicion desquelles, ledit suppliant et son dit compaignon se transportèrent à Clisson, pour illecques acheter du sel pour le porter vendre audit lieu de Thouars, à la foyre qui y escheoit le jour saint Luc derrenier passé. Auquel lieu de Clisson ilz achetèrent la charge de quatre bestes de sel, et en eulx alant audit lieu de Thouars, sur le chemin ilz s'enquirent où ilz pourroient trouver des bresvetz pour l'acquict du quart dudit sel qu'ilz vouloient faire, ainsi qu'il estoit acoustumé de faire oudit païs. Et pour ceste cause se transportèrent à la Capinnière où est hostellerie publicque, à une lieue près dudit lieu de Thouars, pour ce qu'ilz n'avoient point trouvez lesdiz bresvetz au Sercuz, par où ilz avoient passez, qui peut estre environ six lieues près dudit Thouars. Et ainsi que ledit suppliant et son compaignon furent arrivez à ladicte Capinière, environ l'eure de six à sept heures après midi, le samedi prochain devant ladicte feste de saint Luc, qui est le xviiie jour dudit moys d'octobre, eulxestans en l'ostellerie dudit Capinière, en l'ostel de Jehan Dehut, après soupper, environ neuf heures de nuyt, survint ung nommé Pierre David, lequel se disoit commis pour lever l'argent du quart dudit sel, lequel demanda audit suppliant et à sondit compaignon où estoit le bresvet de l'acquit du quart dudit sel. Lesquelz respondirent que ilz n'en avoient point, mais qu'ilz estoient venuz à ladicte Capinière pour l'avoir, pour ce qu'ilz n'en avoient point trouvé audit Sercuz. Après lesquelles parolles, ledit David dist à l'oste dessus dit qu'il lui bailloit en garde les bestes dudit suppliant et de son compaignon et qu'il lui en rendroit compte. Sur quoy icellui suppliant et son compaignon lui respondirent qu'il se desistast de bailler lesdictes bestes en garde, car ilz estoient contens et vouloient bien paier l'acquit dudit quart de sel, en baillant par ledit David ledit brevet ; dont ledit David ne voult riens faire, et s'en ala ledit David en son hostellerie où il estoit logié, et ledit suppliant et son compaignon s'en allèrent coucher, parce que leurdit hoste leur dist que se ledit David survenoit, que il appoincteroit avecques lui pour eulx. Et ung peu après ledit suppliant estant en son lit avec son compaignon, vint à eulx leurdit hoste, environ heure de menuyt, lequel leur dist que depuis n'avoit peu appoincter avec ledit David et que pour ce, se ilz le creoient, ilz s'en yroient. Et lors ledit suppliant et sondit compaignon se levèrent de leur lit et s'apprestèrent pour eulx en aler. Et ainsi qu'ilz eurent mis leurs bestes hors de ladicte hostellerie, pour eulx en aler, ilz virent ledit David, acompaigné de troys ou quatre compaignons, lesquelz ledit suppliant et sondit compaignon ne congnoissent, qui avoient desjà chargé et emmenoient le sel d'icellui suppliant et sondit compaignon. Lequel sel n'avoit pas par icelluy suppliant et son compaignon esté deschargé en leurdicte hostellerie, mais l'avoient deschargé et mis en ung pré près d'illec, pour ce que on leur avoit dit que ledit David faisoit desplaisir à tous les compaignons qu'il ne congnoissoit et qu'il les rançonnoit. Et ainsi que ledit suppliant et son compaignon virent ledit David mener ledit sel et tenir en sa main une grande espée, si prindrent chascun d'eulx deux ou troys pierres et baston, comme une fourche par laquelle on bouté le boys au four, pour ce qu'ilz ne savoient quelles gens estoient lesdiz compaignons estans avecques ledit David, et aussi pour eulx deffendre, se ilz ne leur vouloient restituer ledit sel. Si s'en allèrent à eulx et dirent par telle manière : « Qui est là? » Sur quoy ledit David s'efforça de frapper de sadicte espée ledit suppliant et dist que, s'il y avoit homme qui s'aprochast, qu'il le tueroit, et commença à crier : « A l'aide au roy ! » Et quant iceulx suppliant et son compaignon virent que ledit David les avoit voulu et vouloit frapper de sadicte espée, si lui baillèrent ung cop de l'un de leurs bastons ou d'une pierre tant qu'il cheut ; et incontinant se departit icellui suppliant, pour s'en aler à leurs bestes, lesquelles il avoit laissées pour fouyr après ledit David. Pour laquelle bateure ledit David, assez tost après, ala de vie à trespassement. A l'occasion duquel cas ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s'est abscenté du païs et n'y oseroit jamais retourner, converser ne demourer, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu ce que dit est, que ledit suppliant fist diligence au long du chemin de paier l'acquit pour ledit quart et de trouver aucune personne pour en avoir bresvet, ce qu'il ne trouva pas, et que à ceste cause il fut [allé] audit [lieu] de Clisson pour paier ledit acquit, et qu'il offry audit David, quant il vint à lui, de lui paier ledit acquit en luibaillant ledit bresvet, ce que ne voult pas faire ledit David, et que ce qui fist lever ledit suppliant et sondit compaignon pour « eulx en aler, affin que ledit David ne les trouvast pas, fut parce que leurdit hosteleur dist qu'il avoit acoustumé de faire desplaisir aux compaignons passans, quant il ne les congnoissoit, pour les rançonner, et que ledit suppliant ne frappast ledit David que doubtant que ledit David le voulsist tuer, parce qu'il avoit son espée toute nue, il nous plaise luy octroyer nosdictes grace et misericorde. Pour quoy nous, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous nos autres justiciers, etc. Donné à Champigny, ou moys de jung l'an de grace mil cccc. soixante deux, et de nostre règne le premier.

Ainsi signé: Par le roy, le sire du Lau present. Le

Prevost. — Visa. Contentor. J. Duban.

MCCCLXX Juillet 1462

Rémission en faveur de Jean Pasquier, natif de Poitiers, cordonnier à Niort, sous le coup de poursuites pour avoir volé à sa tante une somme d'or très importante.

AN JJ. 198, n° 370, fol. 337 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de Jehan Pasquier, contenant que par aucun temps il, qui est jeune homme de l'aage devint et deux ans ou environ, natif de la ville de Poictiers, a demouré en la ville de Nyort, où ilec il a gaigné sa vie et entretenu son estat en faisant et excercant son mestier de cordouanerie au mielx qu'il a peu. En laquelle ville de Nyort il a une ante nommée Jacquète de La Lande, laquelle est mariée avec ung nommé Guillaume Goues, marchant demourant en icelle ville de Nyort. Laquelle Jacquète Delalande mena icellui suppliant, son nepveu, avecques elle en la ville de Poictiers, à la saint Jehan Baptiste derrenière passée, au pardon qui est en l'eglise monsieur Saint Hylaire, pour l'acompaigner, auquel lieu de Poictiers sadicte ante le laissa, sans lui bailler ne laisser denier ne maille pour s'en retourner en ladicte ville de Nyort, combien qu'il feust allé en ladicte ville de Poictiers à la requeste d'elle et pour luy tenir compaignie ; et convint audit suppliant s'en retourner dudit lieu de Poictiers audit Nyort à grant povreté et misère, à l'aide et aumosne des bonnes gens. Et luy retourné en ladicte ville de Nyort, ladicte Jacquète, son ante, n'en tenoit compte et ne lui challoit de luy et de son avancement et entretenement, et se servoit de luy en tant qu'elle povoit. Et ce voiant et considerant ledit suppliant que ladicte Jacquète, son ante, lui avoit tenu et tenoit les termes de rigueur dont dessus est faicte mencion, se mezencolia et disposa en soy de s'en aller hors de ladicte ville de Nyort, et pour ce qu'il estoit et est pouvre compaignon et n'avoit de quoy vivre ne pour s'en aller, pensa en soy d'avoir de l'argent de ladicte Jacquète, son ante, et lui estant en icelle mezencolie, le dimanche gras derrenier passé, sur l'eure de vespres qui estoit heure de abiller à soupper, icellui suppliant en allant querir ung trancheur sur le dressouer estant en la maison de sadicte ante, trouva et print les clefz d'icelle son ante, qui estoient de certains ses coffres et maisons ; et ce fait, icellui suppliant ne voult soupper avec sadicte ante, mais s'en alla soupper en l'ostel de Jehan Boutin, cordouanier, demourant en ladicte ville de Nyort. Et après icellui suppliant ala achapterune chandelle de suif pour soy esclarer, laquelle il aluma et, ce fait, se transporta en une maison située et assise en ladicte ville de Nyort, qui estoit et appartient à sadicte ante. Et quant ledit suppliant fut en ladicte maison, il cercha et trouva xxviii. escuz en ung petit boursault, dont il en print les huit et douze solz six deniers en monnoye. Et quant il fut près l'uys de ladicte maison, en soy retournant, regarda au pié d'un coffre et illec trouva ung pot ouquel avoit six cens cinquante pièces d'or...Ici quelques mots omis parle scribe, et qu'il est difficile de suppléer., dessus declarée, il print et emporta en une bougète en laquelle il les mist, et s'en ala à deux lieues près d'Angiers, en la maison d'un nommé Alain du Haultbrueil qui tient hostelerie, en laquelle il loga et bailla sadicte bougète où estoit ladicte somme et quantité d'or en garde à l'ostesse de ladicte hostellerie. En laquelle hostellerie devers le soir survindrent loger deux compaignons, l'un desquielx estoit d'Orléans, clerc d'un marchant demourant audit lieu à la porte du pont, et l'autre compaignon estoit de Lamballe. Et quant ledit suppliant fut couché, dist ladicte hostesse de nuyt à son mary, en la presence dudit compaignon de Lamballe, telles paroles ou semblables : « Cest homme qui est logé seans m'a baillé ung doublier ouquel a un bougète tant pesante que merveilles ». Adonc lesdiz hoste, hostesse et compaignon de Lamballe rompirent ladicte bougète, l'ouvrirent et regardèrent qu'il y avoit dedans, et quant ilz eurent veu et apperceu qu'il y avoit la finance dessus dicte, ne disdrent mot jusques au matin, et ledit matin venu, icellui suppliant demanda à ladicte hostesse son doublier, sadicte bougette et ses besoingnes qu'il luy avoit baillées en garde. A quoy lesdiz compaignons d'Orléans et de Lamballe deffendirent ausdiz hoste et hostesse qu'ilz ne lui en baillassent riens. Et voiant icellui suppliant qu'il n'en povoit riens avoir, leur dist et declaira la verité du cas et comme il avoit prins et desrobé ladicte somme à ladicte Jacquète, son ante. Et lors les dessus nommez disdrent audit suppliant qu'il n'auroit nul desplaisir. Et après ce icellui suppliant, lesdiz hoste, hostesse [et compaignons] despartirent ladicte somme d'or en la manière qui s'ensuit, c'est assavoir audit suppliant pour sa part deux cens pièces d'or ; audit compaignon d'Orleans cent pièces, audit compaignon de Lamballe cent pièces, audit hoste cent pièces d'or et à ladicte hostessé cinquante pièces, et cinquante autres pièces qu'elle avoit paravant prises en ladicte bougète, qui sont en somme tant à son mary que à elle deux cens pièces d'or. De partie de laquelle somme ladicte Jacquèle a eu par ledit suppliant restitucion. A l'occasion duquel cas ainsi commis, fait et perpetré par ledit suppliant, icellui n'ose et n'oseroit aller ne converser en ladicte ville de Nyort ne ailleurs oudit pays de Poictou, doubtant rigueur de justice et d'estre pugny corporellement, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant, etc. Pour ce est il que nous, les choses dessus dictes considerées, voulans misericorde préferer à rigueur de justice, audit suppliant avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chartres, ou moys de juillet lan de grace mil cccc. soixante deux, et de nostre règne le premier.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. A. Gontier. — Visa. Contentor. Chaligault.

MCCCLXXI Septembre 1462

Lettres d'amortissement d'une rente annuelle de cent livres tournois consacrée à la dotation d'une chapellenie fondée par Louis d'Amboise, vicomte de Thouars, en l'abbaye de Talmont.

AN JJ. 198, n° 562, fol. 511 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de nostre très cher et amé cousin Loys d'Amboise, viconte de ThouarsLouis d'Amboise, vicomte de Thouars, comte de Benon, etc. (Voir notre tome VIII, p. 60, note 3, et ci-dessus p. 330, note.) prince de Thalemond et seigneur d'Olonne, contenant que puis naguières il a esleu sa sepulture en l'eglise de l'abbaye et monastaire de Thalemond, en la chapelle de Nostre Dame estant hors le cueur en la croisée de ladicte eglise, et pour le salut et remède de son ame a fondé, pour luy, ses hoirs et successeurs et qui de lui auront cause, en ladicte eglise et abbaye de ThalemondL'abbé de Sainte-Croix de Talmont était alors François Ier du Puydu-Fou ; déjà mentionné en cette qualité l'an 1455, il mourut très âgé, après avoir résigné cette dignité au profit de son neveu, Guillaume VI Meschin, vers 1474. Ce dernier était encore abbé de Talmont en 1494. On trouve quelques renseignements relatifs à cette transmission dans un procès entre frère Guillaume Racodet et ledit Meschin, au sujet delà possession d'un prieuré à la collation de l'abbé, dont Racodet s'était fait pourvoir en cour de Rome et qu'il revendiquait, procès plaidé en Parlement les 5 et 9 juin 1478. (Arch. nat., X2a 42, aux dates.) Le prédécesseur de François du Puy-du-Fou, que la Gallia christiana nomme Jean III et mentionne aux années 1445, 1447, sans autre renseignement, fut Jean Pison, qui était en procès au Parlement de Poitiers, le 5 septembre 1436, contre Jean Fleury, évêque de Luçon. (Id., X1a 9194, fol. 147 v°.) Voy. aussi Gallia christ., t. II, col. 1424., et en ladicte chappelle où il a ainsi esleu sadicte sepulture, en l'onneur et reverance de la benoiste Trinité et de toute la court celestial de Paradis, et en especial de la glorieuse Vierge Marie, le divin service qui se fait, c'est assavoir par chacun jour de l'an perpetuellement, vigilles de mors à note de neuf seaumes, èsquelz sera dit « In te, Domine, speravi » et neuf lecçons, à la coustume et ordinaire dudit jour de l'an oudit moustier et abbaye, avecques les laudes, et le derrenier respond sera « Libera mey Domine, de morte eterna », avecques les versilles « Dies illa » « Tremens factus sum » et « Creator omnium » ; et après lesdictes vigilles une messe à note et à la fin d'icelle « Ne recorderis » et l'oroison des mors, sur la fosse où nostredit cousin suppliant sera ensepulturé ; laquelle messe sera dicte au dimanche, de la Trinité, au lundi, des anges, au mardi, de saint Jehan l'Euvangelistre, au mercredi, des mors, au jeudi, du saint Esperit, au vendredi, de la Croix, et au samedi, de Nostre Dame ; et aussi vespres de mors à note, et quatre anniversaires à quatre jours par chacun an, c'est assavoir l'un le mardi après Pasques, l'autre le second mardi après la Pentecoste, le tiers le landemain saint Michiel et le quart aujour saint Jehan l'Euvangelistre. Et seront tenuz les religieux de ladicte abbaye de dire, aux jours desdiz anniversaires, la messe à note, à diacre et soubzdiacre, avecques lesdictes vigilles, vespres, messe de mors, et, pendant le temps qu'ilz diront lesdiz anniversaires, tiendront six sierges ardans, c'est assavoir deux sur l'autier et quatre sur ladicte sepulture de nostre dit cousin suppliant, et les autres jours deux sierges seulement sur ledit autier ; et commanceront lesdictes vigilles entre six, sept ouhuict heures, et se continuera ledit service sans aucune intervalle jusques à la fin d'icellui. Et seront sonnées perpetuellement lesdictes vigilles, avant que les commancer, à ung clas de toutes les cloches de ladicte eglise, et durant les laudes d'icelles vigilles, ladicte messe sera sonnée de l'une des plus grosses cloches d'icelle eglise par troys foiz et intervalles ; et pareillement lesdictes vespres seront dictes comme dit est et se commanceront lesdictes vigilles avant les vespres ordinaires de ladicte abbaye. Lequel service lesdiz religieux, abbé et convent de ladicte abbaye de Thalemond ont promis et se sont obligiez, tant pour eulx que pour leurs successeurs, de dire et celebrer perpetuelment, par la manière et ainsi qu'il est cy dessus declairé. Et pour et en rescompense de ce et afin que ledit service soit continué et entretenu à perpetuité, nostredit cousin suppliant a donné, cedé, transporté et delaissé pour luy, sesdiz hoirs et successeurs et qui de lui auront cause, ausdiz religieux, abbé et convent et à leursdiz successeurs, la somme de cent livres tournois de rente, qui leur a assise et assignée sur les choses et en la manière qui s'ensuit : c'est assavoir le droit que nostredit cousin suppliant a ès complans et foulaiges des petiz fiefz assis près le chasteau d'Olonne, aveques les gardes et recepz d'iceulx, pour cinquante solz de rente ; item, demy marc d'argent en masse deu par ledit abbé de Thalemond à la recepte dudit lieu, à chascune feste de Toussains, pour raison des choses qu'il a ou bourg de la Chaume d'Olonne et environ, pour quatre livres tournoys de rente, sur lesquelles choses de la Chaume icellui nostredit cousin suppliant a donné ausdiz religieux, abbé et convent juridicion et droit d'assise, pour leur sensif demander seulement sur leurs hommes qui leur y doivent cens nobles ; item, trois mines de froment de rente deues par lesdiz religieux, abbé et convent à ladicte recepte de Thalemont, à chascune feste de my aoust, pour raison des jaloignesMesures de grains. de Saint Vincent de Jart, pour soixante solz tournois ele rente ; item, trois moutons ou girezBéliers, dans le dialecte poitevin. coulleiz et thoisonnages deuz à ladicte seigneurie de Thalemond, à chascune feste d'Ascension Nostre Seigneur, sur la reille (sic) pour cinquante solz de rente ; item, le droit que nostredit cousin suppliant a et prent ou fief Cantain assis en la guarenne de Thalemont, tant en terraige de blez que complans de vins, pour cent solz ; item, vint solz tournois de rente que doit et a acoustumé paier à ladicte recepte d'Olonne...Sic. Le copiste a omis ici un ou plusieurs membres de phrase, auxquels il n'est pas possible de suppléer., appellé le pré de la Barbotinière et pour quarante solz de rente ; item, quatre solz de tailles deuz à ladicte recepte de Thalemond sur certains massicaulxPéages levés sur les vins. assis ou villaige de la Broullère. Et la recepteSic. Sans doute devrait-on lire « reste » au lieu de « recepte ». desdictes cent livres de rente, montant quatre vings livres tournois ou environ nostredit cousin suppliant l'a assise et assignée ausdiz religieux, abbé et convent sur ses receptes dudit lieu de Thalemond et de et sur chacune d'icelles par telle condicion que, quelque paiement qu'il en ait esté faict ausdiz religieux, sur l'une desdictes receptes, et ilz sont aucunement empeschez, ilz se pourront faire paier sur l'autre recepte par les quatre quarterons de l'an, qui sera par chacun quartier vint livres tournois. Et affin que la fondacion ait lieu et que icelluy nostre cousin ne soit fraudé de son entencion, il nous a humblement supplié et requis qu'il nous plaise avoir agreables lesdiz don, cession et transport desdietes cent livres de rente. Et d'abondant voulons que iceulx religieux, abbé et convent et leursdiz successeurs aient et preignent lesdictes cent livres tournois de rente et les tiengnent et possident comme admorties et à Dieu dediées,et icelles avons admorties et admortissons de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par cesdictes presentes, sans ce qu'ilz puissent estre contrains, ores ne pour le temps avenir à les mettre hors de leurs mains ne à en paier aucune finance, laquelle, à la requeste et en faveur d'icelluy nostre cousin suppliant, nous leurs avons donnée et quictée, donnons et quictons par ces mesmes presentes. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d'eulx, si comme à luy appartendra, que de nostre presente ratifficacion, admortissement et don facent, seuffrent et laissent lesdiz religieux, abbé et convent de ladicte abbaye de Thalemond et leursdiz successeurs joir et user à tousjours perpetuellement, plainement et paisiblement, sans leur faire ne donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun destourbier ou empeschement au contraire ; et par rapportant ces presentes, signées de nostre main, ou vidimus d'icelles fait soubz seel royal, pour une foiz seulement, et recongnoissant desdiz religieux, abbé et convent sur ce souffisant, nous voulons le changeur de nostre tresor estre tenu quicte et deschargé de ladicte finance en ses comptes, nonobstant quelconques mandemens ou deffences à ce contraires. Et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l'autruy en toutes. Donné à Tours, ou moys de septembre l'an de grace mil cccc. soixante et deux, et de nostre règne le secondA la même date de septembre 1462, Louis d'Amboise vendit à Louis XI la vicomté de Thouars et les seigneuries de Berrie et de Mauléon. (Voy. ci-dessus, p. 330, note.). Ainsi signé : Par le roy, le sire du Lau et autres presens.

Bourré. — Visa. Contentor. J. Du Ban.

MCCCLXXII 22 septembre 1462

Permission à Jean de Montournois, chevalier, seigneur de Puymorin, de fortifier ledit lieu de Puymorin, avec droit de guet et garde.

AN JJ. 198, n° 403, fol. 368 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, parla grace de Dieu roy de France, à tous ceulx qui ces presentes lettres verront, salut. L'umble supplicacion de nostre amé et feal Jehan de Montournoys, chevalier, seigneur de Puymorin en la chastellenie de BerceureLe registre donne la leçon fautive « Berceville »., avons receue, contenant que puis aucun temps ença le seigneur dudit lieu de Bersure a donné et octroyé audit suppliant congié et licence de fortifier et emparer ledit lieu et place de Puymorin, et avecques ce, pour la garde et seurté de lui, lui a donné le droit de guet, garde et repparacion qu'il avoit, pouvoit et devoit avoir sur les hommes et subgectz dudit suppliant, à cause de sadicte terre de PuymorinC'est en 1453 que Jacques de Beaumont, seigneur de Bressuire, concéda ses droits a Jean de Montournois. (Cf. ci-dessus, p. 122, note.), pour dès lors en avant faire le guet, garde et repparacion en ladicte place de Puymorin. Depuis lesquelz dons et octroiz ledit suppliant a obtenu de feu nostre très chier seigneur et père, que Dieu absoille, ses lettres de congié et licence de fortiffier et emparer ledit lieu et place de PuymorinLettres datées de Razilly, mai 1459, publiées dans le présent volume, n° MCCCVI, p. 121 et suiv. Il y est question des services rendus au roi, aux conquêtes de Normandie et de Guyenne, par Jean de Montournois, sr de Puymorin, ses frères, enfants et neveux. En l'absence d'une généalogie complète, il est difficile de savoir quels étaient les parents ainsi désignés. Nous avons donné, à l'occasion de ces lettres de mai 1459, quelques renseignements sur divers membres de cette famille. On peut en citer encore trois ou quatre autres. Pierre de Montournois, écuyer, seigneur du Bois-Lambert, qui vivait à cette époque, était sans doute ie frère de Jean, sr de Puymorin. Le 29 octobre 1459, il fit don à Etienne Letaut, écuyer, sr de Semaigne, en récompense des services qu'il en avait reçus le temps passé et de ceux qu'il en espérait à l'avenir, de deux pièces de terre contenant quatre boisselées en tout, touchant aux terres de la gagnerie de Semaigne, à celles du sr de la Chauvelière et à celles de François Letaut, sr de Claveau. (À. Richard, Arch. du château de la Barre, t. II, p. 431.) Le même rendit aveu au roi, le 28 avril 1462, du Fief-le-Roi, mouvant de Fontenay-le-Comte. (Arch. nat., P. 1145, fol. 41.) Pierre, sr du Bois-Lambert, vivait encore le 22 octobre 1475. Entre les années 1477 et 1480, Miles, Jean et Giles de Montournois, écuyers (fils de Jean ou de Pierre), étaient poursuivis au Parlement comme complices de Jean de Brosse, seigneur de Laigle et de Châteaumur, et d'Aleran de Saint-Georges, son maître d'hôtel, par Jacques de Surgères, seigneur de la Flocelière, qui les accusait d'avoir chassé sur ses terres, de l'avoir diffamé dans des libelles et de s'être livrés à d'autres excès sur sa personne, en enfreignant le sauf-conduit qui lui avait été délivré par la cour. (Arch. nat., X2a 41, aux dates des 22 mai, 28 juillet, 11 et 15 décembre 1477 ; X1a 42, dates du ler décembre 1477, 19 janvier, 5 mars, 3 avril, 28 mai 1478 ; 43, 13 mai 1479, et X2a 44, date du 4 janvier 1480 n. s.). Mais ce non obstant, ledit suppliant doubte que noz officiers ou autres lui vueillent, ores ou pour le temps avenir, empescher en la fortifficacion d'iceulx lieu et place de Puymorin et en la joissance dudit droit de guet, garde et repparacion à lui ainsi donné sur ses diz hommes et subgectz de sa dicte terre et seigneurie de Puymorin par ledit seigneur de Berceure, sans avoir sur ce noz lettres de confirmacion et auctorizacion desdietes choses, humblement requerant icelles. Savoir faisons que nous, ce que dit est consideré et les bons et agreables services que ledit suppliant nous a faiz, à nostre dit feu seigneur et père et à nous, tant ou fait des guerres que autrement, en plusieurs manières, et esperons que encores plus nous face le temps avenir, voulans en faveur desdiz services et pour certaines autres causes à ce nous mouvans, incliner favorablement à la requeste dudit suppliant, à icellui avons octroyé et octroyons, de grace especial, par ces presentes, que lui, ses heritiers et successeurs, seigneurs de ladicte terre et seigneurie de Puymorin, joissent et usent des diz don et octroiz ainsi faiz audit suppliant, tant par nostredit feu seigneur et père que par ledit seigneur de Berceure, touchant ladicte fortifficacion et emparement de ladicte place de Puymorin, et droit desdiz guet, garde et repparacion dont dessus est faicte mencion, selon le contenu des lettres que icellui nostredit feu seigneur et père et ledit seigneur de Berceure lui en ont baillées, et lesquelz dons et octroiz nous avons de nostre plus ample grace, en tant que mestier est, auctorizé et auctorizons par cesdictes presentes. Et pareillement voulons que, en cas de reffuz de faire lesdiz guetz, garde et repparacion en ladicte place de Puymorin, ledit suppliant et sesdiz heritiers et successeurs y puissent contraindre leursdiz subgectz, habitans et demourans en icelle terre et seigneurie de Puymorin, tout ainsi que ledit seigneur de Berceure les eust peu contraindre audit lieu de Berceure, par avant ledit don qu'il en a ainsi fait, comme dit est, sans ce que nostre procureur ou autre puissent troubler ou empescher ledit suppliant et sesdiz heritiers et successeurs, en aucune manière, au contraire. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d'eulx, si comme à lui appartiendra, que de noz presente grace, auctorizacion, voulenté et octroy facent, souffrent et laissent joir et user plainement et paisiblement, par la manière et ainsi que dessus est dit, sans leur faire, mettre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun destourbier ou empeschement au contraire. Car ainsi nous plaist il et voulons estre fait. En tesmoing de ce, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Donné à Thouars, le xxiime jour de septembre l'an de grace mil cccc. soixante et deux, et de nostre règne le deuxiesmeDans la collection dom Fonteneau, t. VIII, p. 205, se trouve une autre copie de ces lettres, extraite des archives du château de la Flocelière.    .

Ainsi signé : Par le roy, le sire du Lau et autres presens. J. Bourré.

MCCCLXXIII Septembre 1462

Lettres d'anoblissement en faveur de Jean Malescot, licencié ès lois, poitevin.

AN JJ. 198, n° 397, fol. 362 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Ludovicus, Dei gracia Francorum rex, ad perpetuam rei memoriam. Probitatis merita, nobiles actus gestusque laudabiles et virtutum insignia quibus persone decorantur et ornantur merito nos inducunt ut eis juxta opera propria, Creatoris exemplo, tribuamus et eos eorumque posteritatem favoribus congruis et nobilium honoribus, ut nomen rei consonet, attollamus, quatinus ipsi hujusmodi prerogativa letentur ceterique ad agenda que bona sunt ardencius aspirent et ad honores, suffragantibus virtutum bonorumque operum meritis, adipiscendos alliciantur et advolent. Notum igitur facimus quod, attentis vita laudabili, morum honestate fidelitateque et aliis quamplurimis virtutum generibus que in dilecto nostro magistro Johanne Malescoti, in legibus licenciato, nonnullorum fidedignorum testimonio noscuntur suffragari, pro quibus non inmerito nobis se gratum reddidit et acceptum, nos ipsius personam honorare volentes sic quod sibi et toti posteritati sue ac proli perpetuum cedere valeat ad honorem, eundem magistrum Johannem Malescoti cum tota ejus posteritate et prole utriusque sexus, in legitimo matrimonio procreata seu procreanda, et eorum quemlibet, de nostre regie potestatis plenitudine et speciali gratia, nobili- tavimus et nobilitamus per presentes, nobilesque facimus et habiles reddimus ad omnia et singula quibus ceteri nobiles regni nostri utuntur et uti possunt et consueverunt, ita quod ipse magister Johannes Malescoti ejusque proles et posteritas masculina, in legitimo matrimonio procreata et procreanda, quandocunque et à quocunque milite voluerint, cingulo milicie valeant decorari. Concedentes eidem magistro Johanni Malescoti universeque posteritati sue et proli ex ipso in legitimo matrimonio procreate et procreande, quod ipse et eorum quilibet in omnibus et singulis suis actibus, locis et rebus, in judicio et extra, pro nobilibus et ut nobiles ab omnibus de cetero teneantur et imperpetuum pociantur, et quod ipse magister Johannes Malescoti quibuslibet nobilitatibus et juribus universis, previllegiis, prerogativis, franchisiis, honoribus ac libertatibus et juribus universis et singulis, quibus ceteri nobiles dicti regni nostri uti et gaudere possunt, utantur pacifice, libere et quiete et imperpetuum pociantur ; et quod ipse Johannes Malescoti ejusque posteritas et proles, de legitimo matrimonio procreata et procreanda, feuda, retrofeuda nobilia alieque possessiones nobiles, quecunque sint et quacunque prefulgeant auctoritate, libere tenere et possidere acquisita et jam habita per eum ejusque posteritatem et prolem, ac eciam acquirenda et habenda perpetuo retinere et habere licite valeant atque possint, ac si fuissent vel essent ab antiquo originaliter nobiles et à personis nobilibus ex utroque latere procreati, absque quod ea vel eas aut aliqua eorum in parte vel in toto vendere seu extra manum suam ponere, nunc vel quomodolibet in futurum, cogantur nec propter hoc aliqualem financiam nobis solvere teneantur ; quam financiam eidem Johanni Malescoti, in favorem plurimorum serviciorum per ipsum et suos nobis impensorum, dedimus et quictavimus, damusque et quictamus per presentes. Quocirea dilectis et fidelibus gentibus compotorum nostrorum et thesaurariis, seneseallo Pictavensi ceterisque justiciariis et officiariis nostris, vel eorum locatenentibus, presentibus et futuris, aut eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, harum serie damus in mandatis quathinus nostris presentibus gracia, nobilitacione, quictacione et gracia (sic) dictum Johannem Maleseoti et ejus posteritatem utriusque sexus in legitimo matrimonio procreatos et procreandos (sic) uti et gaudere plenarie, paciffice et quiete perpetuo faciant et permittant, omni impedimento amoto, ordinacionibus, statutis, editis, inhibicionibus, revocacionibus, mandatis aut deffensionibus, [in contrarium] factis aut fiendis, nonobstantibus quibuscunque. Quod ut perpetuam obtineant firmitatem, has nostras litteras sigilli nostri fecimus apensione communiri. Salvo in aliis jure nostro et in omnibus quolibet alieno. Datum apud Thouarcium, in mense septembris anno Domini millesimo cccc. sexagesimo secundo, et regni nostri secundo.

Sic signatum : Per regem, domino du LauAntoine de Châteauneuf, seigneur du Lau (ci-dessus, p. 299, note 2), remplissait, à la date de ces lettres, les fonctions de grand sénéchal de Guyenne. et aliis presentibus. J. Bourré. — Visa. Contentor. J. Du Ban.

MCCCLXXIV Septembre 1462

Rémission octroyée à Guillaume Rouil, dit Chabot, demeurant à Ménigoute, coupable du meurtre de Guillaume Barbier, qui avait séduit sa femme.

AN JJ. 198, n° 401, fol. 366 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Guillaume Rouil, dit Chabot, pouvre homme de labour, demourant en la parroisse de Menigouste, chargé de femme et troys petiz enfans, contenant que, huit ans a ou environ, ledit suppliant fut conjoinct par mariage avecques Fransoise Dernaude. Tantost après lequel mariaige consommé, feu Guillaume Barbier, en son vivant cousturier, trouva façon de ceduire ladicte Françoise tellement qu'il la congneut charnellement par plusieurs foiz. Et depuis ce, c'est assavoir deux ans a ou environ, ledit feu Barbier fortrahy ladicte Françoise dudit suppliant son mary et la mena où bon lui sembla, et la tint avecques lui l'espace de deux moys ou environ ; et ce fait, ledit feu Barbier, voiant qu'il ne povoit plus entretenir ladicte Françoise, par ce qu'il n'avoit riens et aussi qu'elle s'en vouloit retourner à son mesnaige, icelle Françoise ramena audit lieu de Menigouste et la bailla audit suppliant, son mary, lequel la receut et lui pardonna, et aussi audit feu Barbier, l'injure qu'ilz lui avoient faicte, en leur suppliant que d'illec en avant ilz se gouvernassent honnestement, ce qu'ilz ne firent. Car ledit feu Barbier est tousjours depuis ledit temps alé et venu en l'ostel dudit suppliant et alentour d'icellui, pour avoir la compaignie de ladicte Françoise et l'a congneue charnellement par plusieurs foiz. Et avec ce ledit Barbier, voulant tousjours perseverer de mal en pis, le lundi douziesme jour du moys de juillet derrenier passé, se transporta en la maison dudit suppliant, lequel n'y estoit pas, mais estoit lui, sadicte femme, une nommée Marion Motelle et ung homme qui estoit à ses journées en ung champ, cuillant seigle, et ne trouva ledit Barbier oudit hostel que la chamberière dudit suppliant et ses troys petiz enfans. Et icellui jour, environ midi, ledit suppliant dist à sadicte femme qu'elle alast en son hostel querir à disner pour lui et les autres dessus nommez, ce qu'elle fist, et ala avecques elle ladicte Marion Motelle ; et quant elles furent ou grant chemin de Saint Maixent, elles se arrestèrent à Tendroit d'un quarrefour estant entre le chemin par où l'en va de Sanxay à Saint Maixent et le chemin par où l'en va de la Millefière à Malespine. Et alors ledit suppliant, voyant ce que dit est et pensant en lui mesmes que ledit feu Barbier estoit par plusieurs foiz jacté et vanté qu'il tueroit ledit suppliant et qu'il emmeneroit sadicte femme, doubtant que ledit feu Barbier et sadicte femme feussent ensemble et qu'ilz feissent leur entreprise pour eulx en aler, pour ce que lesdictes femmes s'estoient arrestées oudit quarrefour, et qu'ilz le voulsissent desrober, laissa de cueillir ledit seigle et s'en vint en chemise à travers les champs, pour aler en sa maison, sans ce qu'il eust avecques lui aucun baston de deffense ne autre. Et ainsi que ledit suppliant fut près du quarrefour de la Croix de la Barrye, en traversant ung champ pour abreger son chemin, il raencontra ledit feu Barbier qui avoit des pierres en sa main, lequel en gecta l'une contre ledit suppliant, en disant telles parolles ou semblables : « Villain, tu me viens espier ! Je regnie Dieu, se je ne te tué ». Et alors ledit suppliant se retourna et d'une palice qui estoit près de ladicte place print ung baston, duquel il voult frapper ledit feu Barbier, mais pour doubte des pierres que avoit ledit Barbier, il ne se osa aprocher dudit Barbier. Et lors ledit feu Barbier se approucha dudit suppliant et se prindrent au corps l'un l'autre, tellement que ledit suppliant mist icellui feu Barbier soubz lui ; et quant ledit feu Barbier fut dessoubz icellui suppliant, il tira de son sain ung petit poinson appartenant à cousturiers pour faire pertuiz, et dudit poinsson voult frapper par troys ou quatre foiz icellui suppliant en la poictrine ; mais ledit suppliant pour l'empescher mist la main au devant, tellement que ledit feu Barbier lui persa la main en troys ou quatre lieux et pareillement le corps. Et alors ledit suppliant, doubtant que ledit feu Barbier le navrast enormeement dudit poinson, osta audit feu Barbier ledit poinson ; et ce voiant, ledit feu Barbier print ledit suppliant aux génitoires et tellement qu'il compressa qu'il convint audit suppliant frapper ledit feu Barbier dudit poinson sur le col et le prendre à la gorge, lequel ledit suppliant lui estraignit tellement qu'il le laissa aler, et adonc se levèrent bras à bras, et laissa ledit suppliant ledit feu Barbier et print sondit baston, doubtant que ledit feu Barbier lui voulsist faire desplaisir de sa personne, et dudit baston frappa ung cop par my le front tellement qu'il rompit ledit baston en troys pièces, pour ce qu'il estoit poury ; duquel cop ledit feu Barbier cheut à terre, et depuis mort s'en ensuit. Après lequel cop ainsi baillé par ledit suppliant audit feu Barbier, doubtant que ledit feu Barbier se relevast et qu'il alast après lui, s'en retourna à son dit champ de seigle, sans aucunement regarder se ledit Barbier estoit blecié à mort ou non. Et pour ce que ledit jour au soir, les bergiers disoient avoir veu ung homme mort aux champs, ledit suppliant se retourna, le lendemain au matin, au lieu où il avoit frappé ledit feu Barbier, lequel il trouva mort, et lors l'osta du lieu où il estoit et le mist en ung buisson distant dudit lieu de deux lieues près ou environ. A l'occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s'est abscenté du païs et n'y oseroit jamais retourner ne y converser, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant, etc. Pourquoy nous, etc., à icelluy suppliant avonsquicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par cesdictes presentes, au seneschal de Poictou, etc. Donné à Saumur, ou moys de septembre l'an de grace mil cccc. soixante et deux, et de nostre règne le deuxiesme.

Ainsi signé : Par Ie roy, à la relacion du conseil. J. Dorchère. — Visa. Contentor. J. Du Ban.

MCCCLXXV Octobre 1462

Lettres d'anoblissement en faveur d'Hélionnet Vidalvin, poitevin.

AN JJ. 198, n° 416, fol. 378 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Ludovicus, Dei gracia Francorum rex. Probitatis merita nobilesque actus gestusque laudabiles et virtutum insignia quibus persone decorantur et ornantur merito nos inducunt ut eis juxta opera, proprio Creatoris exemplo, tribuamus et eos eorumque posteritatem favoribus congruis et nobilium honoribus, ut nomen rei consonet, attolamus, quatinus ipsi hujusmodi prerogativa letentur ceterique ad agenda que bona sunt ardencius aspirent et ad honores, suffragantibus virtutum bonorumque operum meritis, adipiscendos alliciantur et advolent. Notum igitur facimus quod nos, attendentes vitam laudabilem, morum honestatem fidelitatemque et alia quamplurima virtutum genera que in dilecto nostro Helioneto Vidalvin, nonnullorum fidedignorum testimonio noscuntur suffragari, pro quibus non inmerito gratum et acceptum apud nos se reddidit. Nos ipsius personam honorare volentes sic quod sibi et posteritati sue ac proli perpetuum cedere valeat ad honorem, eundem Helyonetum Vidalvin cum tota ejus posteritate et prole utriusque sexus, in legitimo matrimonio procreata seu procreanda, et eorum quemlibet, de nostre regie potestatis plenitudine et speciali gracia nobilitavimus et nobilitamus per presentes, nobilesque facimus et habiles reddimus ad omnia et singula quibus ceteri nobiles regni nostri utuntur ac uti possunt seu consueverunt, ita quod ipse Helionetus ejusque proles et posteritas masculina, in legitimo matrimonio procreata et procreanda, a quocunque milite voluerint cingulo milicie valeant decorari. Concedentes eidem Helioneto universeque sue posteritati et proli ex ipso in legitimo matrimonio procreate et procreande, quod ipse et eorum singuli in omnibus et singulis suis actibus, locis et rebus, in judicio et extra, non ignobiles seu plebei sed pro nobilibus et ut nobiles ab omnibus de cetero teneantur et imperpetuum pociantur, quibuslibetque nobilitatibus, previllegiis, prerogativis, franchisiis, honoribus, libertatibus et juribus universis et singulis quibus ceteri nobiles dicti regni nostri gaudere possunt ac utuntur pacifice, libere et quiete, et quod ipse Helionetus ejusque posteritas et proles, de legitimo matrimonio procreata et pro- ' creanda, feuda, retrofeuda nobilia aliasque possessiones nobiles, quecunque sint et quacunque prefulgeant auctoritate, acquisita et jam habita per eum et ejus posteritatem et prolem, ac eciam in futurum acquirenda et habenda, perpetuo retinere, habere et possidere licite valeant atque possint, acsi fuisssent vel essent ab antiquo originaliter nobiles et à personis nobilibus ex utroque latere procreati, absque eo quod ea vel eas aut aliqua eorum, in parte vel in toto, vendere seu extra manum eorum ponere [coganturLe mot placé entre crochets avait été omis par le scribe.] , nunc vel quomodolibet in futurum, mediante certa financia per dictum Helyonetum in manibus nostris tradita, et de qua financia eum quictavimus et quictamus per presentes, manu nostra signatas. Quapropter dilectis et fidelibus gentibus compotorum nostrorum ac thesaurariis, senescallo Pictavensi ac ceteris justiciariis et officiariis nostris, aut eorum loca tenentibus, et eorum cuilibet, presentibus et futuris, tenore presentium damus in mandatis quatinus eundem Helionetum et ejus posteritatem et prolem utriusque sexus, in legitimo matrimonio procreatam seu procreandam, nostra presente nobilitacione et gracia uti et gaudere faciant et permittant pacifice et quiete, nec ipsos aut eorum aliquem, contra presentium tenorem, ullathenus inquietent aut molestent, nunc vel quomodolibet in futurum, ordinacionibus, statutis, editis, inhibicionibus, mandatis, deffensionibus, in contrarium factis vel fiendis, nonobstantibus quibuscunque. Quod ut firmum et stabile permaneat in futurum, nostrum presentibus litteris fecimus apponi sigillum. Salvo in aliis jure nostro et in omnibus quolibet alieno. Datum Molierne, mense octobris anno Domini mille- simo cccc. sexagesimo secundo, et regni nostri secundo.

Sic signatum : Per regem, domino du LauSur le sr du Lau, voy.-ci-dessus, p. 299, note 2., Guillelmo de BarieGuillaume de Barie ou plutôt de Varie, aliàs Varye, était alors général des finances de Languedoc. (Vaësen, Lettres de Louis XI, t. II, p. 125, 136, note.) et aliis presentibus. Bourré. — Visa. Contentor, J. Duban.

MCCCLXXVI Octobre 1462

Rémission en faveur de Jean de la Rochefaton, écuyer, meurtrier de sa femme, Françoise Chapperon, et de son frère, Alexandre de la Rochefaton, qu'il avait surpris couchés ensemble.

AN JJ. 198, n° 474, fol. 426 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Jehan de la Rochefaton

M. Beauchet-Filleau (Dict. des familles du Poitou, 1re édit., t. II, p. 627) a donné, d'après Du Chesne, un fragment de la généalogie de la famille de la Rochefaton, où l'on trouve les renseignements suivants. Jacques de la Rochefaton, écuyer, seigneur de Saveilies, Montalembert, etc., chambellan du roi Charles VII et fort aimé de ce prince, épousa en 1442 (la date de ce mariage doit être antérieure de quelques années) Marie Foucher, fille de Jean, seigneur des Herbiers, et de Marie Samin. Il vivait encore en 1445 et eut pour enfants Jean et Alexandre. Jean de la Rochefaton, seigneur de Saveilies, la Gosselinière, etc., vivant en 1455 et 1469, marié à Françoise Chaperon, fut père de Jacques, seigneur de Saveilies, etc. D'autre part, la nouv. Édit. du Dict, des familles du Poitou dit que Françoise Chaperon (dont la filiation n'est pas indiquée), dame de la Chaperonnière et de Bernay, était en 1485 et encore en 1489 qualifiée épouse de Jean de la Rochefaton, sr de Saveilies (t. II, p. 243). Celui-ci, qui ne nous est d'ailleurs pas connu autrement que par le meurtre de son frère, obtint par lettres de Louis XI, données à Beaugency au mois d'avril 1466, une nouvelle rémission de ce fratricide, parce que, avant d'avoir fait entériner celle d'octobre 1462, il était parti pour Rome, sur le conseil de son confesseur, avait voyagé sur mer et dans une tempête avait perdu cette première rémission, qu'il avait emportée avec lui. Le texte des secondes lettres est plus explicite. Il nous apprend que Jean de la Rochefaton n'ayait que quatorze ou quinze ans et Françoise Chaperon dix ou onze seulement, quand ils furent unis parle mariage. Le jeune époux fit ensuite partie pendant quelque temps de l'hôtel du comte du Maine, où ses compagnons excitèrent sa jalousie par des plaisanteries qu'il prit au sérieux, bien que Françoise continuât à demeurer avec sa mère. Le tragique événement de l'hôtel de Montalembert n'eut lieu cependant que plusieurs années après, car sa femme l'avait déjà rendu père de deux enfants, lorsqu'il frappa mortellement son frère Alexandre et grièvement Françoise Chaperon. Il n'est plus question, dans les lettres de 1466, de la fuite d'Alexandre et de sa chute d'un échafaudage. (JJ. 202, n° 36, fol. 24.) Nous n'insisterons pas davantage sur cette seconde version, puisque le texte en sera probablement imprimé.

, escuier, sei- gneur de Saveilles ou païs d'Arigolmois, contenant que, puis aucun temps ença, ledit suppliant a esté conjoinct par mariage avecques une nommée Françoise Chapperonne, damoiselle ; depuis lequel mariage Alexandre de la Rochefaton, escuier, frère dudit suppliant, aagé de vingt à vingt et deux ans ou environ, a fait sa demourance avecques icellui suppliant et sadicte femme, et l'entretenoit et amoit ledit suppliant comme son frère charnel. Et pour ce que icellui suppliant, qui a plusieurs maisons situées en divers lieux, aloit souvent dehors, tant en sesdictes maisons que ailleurs en ses afaires, et que ce pendant ses diz femme et frère demouroient en sa maison, il fut adverti par aucuns de ses amis que sondit frère maintenoit sadicte femme, dont il fut fort esbahy et n'en voult riens croire. Et neantmoins en parla à sondit frère à toute doulceur et par gracieuse forme ; lequel lui nya le cas et fist de grans seremens que jamais il n'avoit pensé et tellement lui en respondit que icellui suppliant se osta du doubte qu'il y avoit et tint pour certain qu'il n'en estoit riens. Après lesquelles choses et puis naguières ledit suppliant, qui venoit d'une sienne maison qu'il a en la viconté de Thouars, arriva de nuyt et assez tart en ung son hostel nommé Montalembert, ouquel hostel il entra et trouva en sa chambre sondit frère et sadicte femme couchez ensemble, dont il fut moult dolent. Et lors il lui souvint de ce que autres foiz il avoit esté adverty du cas de sesdiz frère et femme, et à celle mesme heure il, esmeu de grande fureur et chaleur, comme forcené et hors du sens, tira son espée qu'il avoit sainte au cousté et en donna plusieurs coups à sesdiz femme et frère ; lequel frère, ainsi navré et blecié, s'en cuida fouyr hors de ladicte maison en ung chauffault de maçon qui estoit joignant de ladicte maison, mais il tomba d'icellui chauffault à terre, et tant à l'occasion de ladicte cheute que desdiz coups que ledit suppliant lui avoit baillez il est alé de vie à trespassement. Et au regard de ladicte femme, on y espère plus la mort que la vie. Et doubte ledit suppliant que, se elle aloit de vie à trespassement, qu'on voulsist proceder à l'encontre de lui, pour occasion de la mort d'elle et de sondit frère, à pugnicion corporelle, se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartie, si comme il dit, en nous humblement requerant que, attendu ce que dit est et que ledit cas est advenu de très grant desplaisance dudit suppliant et lui estant en fureur et chaleur, comme forcené et hors du sens, que en tous autres cas il s'est gouverné bien et honnestement, sans jamais avoir esté actaint ne convaincu d'aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise sur ce lui impartir nostredicte grace. Pour quoy nous, eu consideracion aux choses dessus dictes, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant le fait et cas dessus déclaré, ensemble la mort de sadicte femme, ou cas qu'elle seroit ou pourroit estre advenue ou adviendroit pour raison desdiz coups, qui jà lui ont esté donnez par ledit suppliant, ainsi que dessus est dit, avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par cesdictes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Moliherne, ou moys d'octobre l'an de grace mil cccc. lxii, et ele nostre règne le deuxiesme.

Ainsi signé : Par le roy, les sires du Lau, de BeauvoirCe personnage paraît être Jean de Montespedon, dit Houaste, seigneur de Beauvoir et de Bazoches, chambellan du roi ; il avait été nommé, vers le mois de juillet de cette même année 1462, bailli de Rouen en remplacement de Guillaume Cousinot. (Vaësen, Lettres de Louis XI, t. II, p. 46.) Guillaume de BarieMieux de Varie, général des finances en Languedoc. et autres presens. Bourré. — Visa. Contentor. J. Duban.

MCCCLXXVII Octobre 1462

Rémission accordée à Pierre Girault, marchand et alchimiste, demeurant à Poitiers, poursuivi pour avoir fait faire et mis en vente des tasses et des cuillers d'argent dont le titre était inférieur à la marque.

AN JJ. 198, n° 409, fol. 371 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Pierre GiraultIl a été question de ce personnage ci-dessus, p. 279, note 3., marchant, demourant à Poictiers, aagé de quarante et sept ans ou environ, chargé de femme et de troys petiz enfans, contenant que, deux ans a ou environ, ung nommé Guillaume, du seurnom duquel n'est de present recors, et lequel se entremettoit comme lui du fait et science d'arquemie, vint loger en son hostel, où il demoura par bien peu de temps, et s'en ala d'ilec loger à l'ostel de la Jordanière appartenant à ung appellé Grant Jehan, et lui estant en icellui hostel, manda audit suppliant qu'il lui envoyast ou portast six mares d'argent fin et il lui en rendroit douze, qui seroient de bon argent à tous essays et esperimens. Lequel suppliant, qui avoit oy dire qu'il besongnoit bien oudit fait et science d'arquemie, desirans, comme font povres gens qui sont chargiez de mesnaige, à prouffiter pour la substantacion et aliment de leurdit mesnaige, et croyans aussi que icellui Guillaume fist chose valable en son dit fait d'arquemie, ala par devers ledit Guillaume et lui porta lesdiz six mares d'argent fin. Lequel Guillaume, dedans deux ou troys jours, bailla audit suppliant onze mares d'argent ou environ et lui dist qu'il en fist faire des tasses ou autre euvre tel que bon lui sembleroit, lui affermant que ledit argent estoit bon. Et depuis ledit suppliant monstra ledit argent à aucuns orfevres de ladicte ville de Poictiers, pour lui en faire des tasses, lesquelz lui dirent que leur mestier estoit juré en ladicte ville de Poictiers et qu'ilz n'oseroient faire tasses d'argent qu'elles ne fussent de fin argent, par ce qu'il les convenoit marquer. Et depuis ledit, suppliant, estant en la ville d'Angolesme, bailla à ung nommé Boutu ledit argent pour faire lesdictes tasses, lequel Boutu lui en fist jusques au nombre de huit ou de neuf, lesquelles ledit suppliant fist depuis marquer audit Grant Jehan, et les bailla à Jehan Guillonnet, son gendre, pour les vendre et employer en marchandise ou en faire ainsi que bon lui sembleroit. Lequel Guillonnet les a depuis vendues à certains Espaignolz, comme l'en dit. Aussi fist faire certain nombre decueilliers dudit argent, et pour ce que lesdictes tasses et cueilliers ont esté trouvées, ou les aucunes d'icelles, faulses, elles ont esté saisies et baillées en la garde de André Chaillé

André Chaillé, maire de Poitiers en cette année 1462, était le second fils d'un autre André Chaillé et de Marie Boylesve. Son grandpère paraît avoir porté aussi le prénom d'André ; du moins un André Chaillé était garde du sceau aux contrats de la ville de Poitiers le 25 janvier 1396 et rendit aveu de son hébergement de la Bordellière, près Béruges, relevant de Montreuil-Bonnin, à Jean duc de Berry, comte de Poitou, le 7 mars 1405 n. s. Aux renseignements que l'on trouve sur le père et le fils dans un article de M. A. Richard, L'inscription des Chaillé aux Cordeliers de Poitiers (Bulletin de la Soc. des Antiquaires de l'Ouest, année 1887, p. 295) et dans le Dict. des familles du Poitou (2° édit., t. Il, p. 210) nous en joindrons quelques autres. André Chaillé est qualifié procureur de la commune de Poitiers dans un acte du 20 janvier 1417 n. s. (Arch. de la ville, G. 10.) En 1418, il fit hommage de son hôtel de la Bordellière à Charles dauphin, comte de Poitou. (Arch. nat., P. 1144, fol. 19.) Maître de la Monnaie de Poitiers, il avait été déchargé de son office et remplacé par Jean de Beloisel. A sa requête, le Parlement s'opposa à l'exécution des lettres de bail présentées par ce dernier et maintint Chaillé en possession (acte du 13 mai 1427 et plaidoiries du 2 juin suivant. Arch. nat. X1a 9198, fol. 267 v°. 273 v°). Le 12 avril 1430, il était en procès devant la même cour contre André de Savigny, marchand de la Souterraine. (X1a 9192, fol. 181.) On peut citer encore un arrêt du Parlement du 10 juillet 1436 rendu en faveur d'André Chaillé, qualifié marchand de Poitiers; le 11 mars 1423 n. s., Gautier Pradel, maître particulier de la Monnaie, avait reçu de Guillaume Le Tur, conseiller du roi, professeur de droit, une décharge de 200 livres, sur laquelle somme il n'avait baillé que 100 livres, et s'était engagé par une contre-crédule à payer le reste. Pradel, ayant fait de mauvaises affaires, se retira avant de s'être acquitté, et fut remplacé par André Chaillé. Le Tur réclama à ce dernier les 100 livres qui lui restaient dues et, sur son refus, le poursuivit devant les maîtres des requêtes de l'hôtel en leur auditoire à Poitiers. Mais la cour considéra la somme réclamée comme une dette personnelle de Pradel, que son successeur n'était pas tenu de payer, et rejeta les conclusions de Le Tur. Dans cet arrêt du 10 juillet 1436, il est question des opérations et des périodes de chômage de la Monnaie de Poitiers. (X1a 9193, fol. 154.) André Chaillé, le père, vivait encore en 1459, de sorte que l'on ne saurait dire si une lettre curieuse, adressée au dauphin Louis, le 12 avril 1454, est de lui ou de son fils ; elle avait pour but de demander le remboursement de 1000 écus payés au nom dudit dauphin aux héritiers de feu M. de Poitiers (s'agitii de Guillaume Gouge de Charpaignes, évêque de Poitiers, mort vers 1450 ?) et une avancé de 1000 autres écus sur ce qui est dû, tant à lui qu'à son frère. Une autre requête fut adressée par André Chaillé (le fils, sans doute) à Louis XI, de Poitiers, le 18 décembre 1467, pour obtenir le paiement de ce qui restait dû aux héritiers de feu Casin Chaillé (qui paraît être le frère d'André, le père), en vertu d'un mandat du roi daté de Saumur et remontant à deux ans environ. (Bibl. nat., ms. fr. 20485, fol. 60 et 61.) Des actes de la municipalité des 16 avril 1467, 9 décembre 1475 et 27 décembre 1477, qualifient André Chaillé receveur de la ville de Poitiers. (Arch. municip., D. 16, L. 3 et L. 6.) Il vécut jusqu'à la fin de 1485 ou au commencement de 1486 ; car le 6 mai 1486, sa veuve, Jeanne Rideau, dame de Bernay, partageait sa succession avec Pierre Chaillé, co-seigneur de Béruges, frère dudit André. En 1489, Jeanne Rideau bailla à ferme, au nom de Marie Chaillé, sa fille mineure (depuis, mariée à Joachim Tudert, lieutenant particulier de la sénéchaussée de Poitiers, vers 1494), à Lucien Lambert et à Pierre Bardeau, le jardin de Mouillebec, sis hors du pont Joubert, « tenant aux dubes de Puypaneau et au chemin du pont Joubert à la fontaine au Pape ». (Arch. de la Vienne, G. 1364.)

, maire de nostre dicte ville de Poictiers. Et combien que ledit suppliant n'entendist avoir aucunement mespris d'avoir baillé ledit argent pour faire ledit fait d'arquemie, ne aussi fait faire les tasses d'icellui argent, et cuidoit certainement que icellui argent fust bon et d'essay, toutesvoyes pour occasion dudit cas et que lesdictes tasses ont esté trouvées faulses, nostre procureur a voulu faire prandre ledit suppliant au corps. Lequel, doubtant rigueur de justice, s'est abscenté et mis en franchise, dont il n'oseroit partir, se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce prealablement impartie, humblement requerant icelle. Pour ce est il que nous, etc., audit suppliant avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Poictou et tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou moys d'octobre l'an de grace mil cccc. soixante et deux, et de nostre règne le deuxiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Castel. — Visa. Contentor. J. Duban.

MCCCLXXVIII Octobre 1462

Rémission octroyée à Jean Guillonnet, marchand de Poitiers, prisonnier dans cette ville parce que de prétendus alchimistes qu'il avait recueillis et aidés, et qui depuis avaient été exécutés par justice comme voleurs et faux monnayeurs, l'avaient accusé de complicité, alors qu'il avait été plutôt leur victime.

AN JJ. 198, n° 470, fol. 421 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Jehan Guillonnet, marchant, demourant à Poictiers, aagé de xxvii. ans ou environ, chargé de femme et de trois petiz enffens mineurs d'ans, dont le plus grant n'a que de quatre à cinq ans, et aussi chargé de sa mère qui est aveugle et n'a de quoy vivre, contenant que, ou moys de juillet derrenier passé, certains compaignons qui se nommoient l'un maistre Loys le Gallant, l'autre Pierre Martin et le derrenier Guidier Regn[ault], qui se disoit nepveu dudit maistre Loys le Gallant, vindrent loger ès fauxbours dudit Poictiers, vers la porte Saint Ladre, en l'ostel d'un nommé Henry Fourest, hostellier, et eulx logez, demanda ledit maistre Loys à la femme d'un appellé Pierre Girault, père et mère de la femme dudit suppliant, où estoit ledit Girault, son mary ; laquelle lui respondy qu'il n'estoit pas en ladicte ville de Poictiers, mais qu'il vendroit trois ou quatre jours après. Et le lendemain ou le jour après ensuivant, retourna icellui maistre Loys devers ladicte femme et lui demanda se ledit Girault, son mary, estoit encores point venu ; laquelle lui dist que non. Et ce fait, ladicte femme dist audit suppliant, son gendre, que ung homme avoit demandé son mary, lui priant qu'il alast chez ledit Fourest veoir que icelluy Loys demandoit à sondit mary. Lequel suppliant dist que voulentiers yroit, et de fait se transporta par devers icellui maistre Loys en ladicte hostellerie et luy demanda qu'il vouloit audit Girault, son beau père. Lequel maistre Loys tira à part ledit suppliant à une fenestre et lui dist que ung nommé Girart, allement, lui avoit dit qu'il avoit autresfoiz eu congnoissance avecques ledit Girault, son sire, touchant le fait et science d'arquemie ; lequel suppliant luy respondy que ledit Girault n'avoit jamès eu congnoissance avecques ledit Girart, mais que c'estoit lui qui y avoit eu congnoissance et que autresfois ledit Girart, alement, lui avoit dit que ledit maistre Loys lui avoit monstré certains poins en et sur ledit fait d'arquemie. A quoy icelluy maistre Loys respondy qu'il estoit verité et que ledit Girart ne tenoit de ladicte science que de luy, mais encores ne luy avoit il donné vraye perfection d'icelle. Et pour ce que icelluy maistre Loys oy par parlez, comme il disoit, dudit suppliant qu'il ne savoit si s'estoit ledit Girault, son beau père, ledit suppliant respondy que ledit Girault, son beau père, n'estoit point clerc et ne s'entendoit en telles matières. Et en oultre luy dist qu'il avoit oy dire audit Girault, son beau père, que deux hommes eulx meslans dudit fait d'arequemie l'avoient desrobbé et fait de grans dommaiges, par quoi il lui sembloit que se ledit maistre Loys demandoit ledit Girault, en entencion de besongner dudit fait d'arcequemie, que ledit Girault, son beau père n'y despendroit aucune chose. Et alors ledit maistre Loys commança à dire audit suppliant que, s'il lui vouloit bailler une chambre garnie de lit, pour besongner, qu'il lui monstreroit à faire de cuivre fin argent à tous essaiz, examens et jugemens quelxconques, et seroit fait en xv. jours, en disant en oultre à icelluy suppliant qu'il ne lui demandoit riens du sien, fors son aide seullement, et qu'il paieroit sa despense par chascun jour. Après lesquelles parolles oyes, ledit suppliant se departi dudit maistre Loys et le convya à menger d'un pasté au landemain au matin, qui estoit jour de lundi. Lequel maistre Loys y alla et cedit jour envoia ledit Guidier Regnault, qu'il disoit estre son nepveu, en Bretaigne par devers sa femme pour querir de l'argent, comme il disoit. Et tantost après ledit suppliant monstra audit maistre Loys et Pierre Martin, son compaignon, une chambre en une maison distant de la demourance dudit suppliant et de son beau père d'un giect de pierre ou environ. Lequel maistre Loys, veue par lui ladicte chambre, dist qu'elle estoit bonne, en priant ledit suppliant qu'il leur fist provision de terre et carreaux pour faire deux fourneaux, et aussi des matières propices et convenables pour faire ledit fait d'arquemie, et qu'il paieroit tout, quant sondit nepveu seroit venu de Bretaigne.

Lequel suppliant, cuidant que les dessusdiz maistre Loys et Martin lui deissent verité, bailla de l'argent pour avoir lesdictes matières, les quelles icellui Martin ala en ladicte ville les achater cheez les appoticaires. Et fist et composa ledit maistre Loys oudit hostel sesdiz fourneaulx ; aussi fist desdictes matières achatées cheez lesdiz appoticquaires des eaues par luy composées. Et à ce faire ledit suppliant lui aida, ainsi que ledit maistre Loys lui monstroit. Lequel maistre Loys fist tantost après une pouldre desdictes matières qu'il avoit composées et fist fondre du cuivre franc sur six onces dudit feurare (sic), [dans lequel cuivreMots omis par le scribe, nécessaires au sens de la phrase.] franc fondu jecta une once de ladicte pouldre, et incontinant ledit cuyvre se transmua blanc en espesse d'argent à dix deniers d'aloy ou plus. Laquelle chose ledit maistre Loys fist par quatre foiz ainsi, et après gecta en lingotz ledit cuyvre ainsi transmué, comme dit est, et l'un desdiz lingotz ledit maistre Loys couppa par la moictié et demanda audit suppliant demye once d'argent pour mettre dedens. Lequel suppliant lui bailla quatre grox d'argent, et fist ledit maistre Loys fondre ladicte moictié dudit lingot et faigny [en] icellui mettre lesdiz quatre grotz d'argent, ce qu'il ne fist point, * mays les retint par devers lui, ainsi que depuis luy rapporta ledit maistre Loys en la ville de Saint Maixent. Et après ledit suppliant, au desceu des dessusdiz maistre Loys et Martin, prist pour deux grox desdiz lingotz et en fist ung essay, pour savoir si ledit argent tendroit son jugement, lequel n'y demoura point et ne tenoit nul aloy. Et ce voiant icellui suppliant, et que de ce que ledit maistre Loys et Martin faisoient ce n'estoit que abutz et tromperie, dist audit Pierre Martin et aussi audit Guidier Regnault, lequel estoit venu le jour precedent dudit païs de Bretaigne, qu'ilz deissent audit maistre Loys ce que ledit suppliant leur avoit dit. Lequel maistre Loys faigny au soir estre moult courroucé et se mist ou lit. Et ledit suppliant vint parler à luy et luy dist que sadicte dame demandoit del'argent pour leur despence et que, s'il ne faisoit ou faisoit faire autre chose que ce qu'il avoit fait,qu'il trouvast façon de paier et de s'en aller; car ce qu'il avoit fait ne valloit riens. Et aussi dist audit Pierre Martin qu'il luy avoit promis faire des coulevrines dont il n'avoit riens fait, lui priant qu'il les feist. Lequel Martin respondit qu'il les feroit quant il voudroit et qu'il paieroit au landemain ce qu'il devoit, et ne seroit plus oudit hostel ; car il veoit bien que tout ne valoit riens. En disant lesdictes parolles et en parlant ensemble, ledit maistre Loys commança à dire que, quant il vouldroit il auroit tantost payé la despence qu'il devoit et de l'autre. Et ledit suppliant lui demanda comment, et il luy dist qu'il lui feroit tant de grox d'Angleterre et de France qu'il en auroit assez. A quoy ledit suppliant respondy que à Dieu ne pleust qu'il feist chose qui nous touchast ne le bien publique de nostre royaulme, et que Dieu n'en seroit pas bien content, en disant à icellui maistre Loys qu'il estoit escript en la Saincte Escripture ces motz, et l'avoit Dieu dit aux Juifz : Reddite que sunt Cesaris Cesari et que sunt Dei Deo, en lui remonstrant qu'il [avoit] sa femme, son mesnaige, sa conscience et sa personne à garder, et que de ce il ne feroit riens, en lui disant que chascun se pourveust ; et atant se departy ledit suppliant et s'en ala à son hostel. Et le landemain au matin, ala en ladicte chambre et ne trouva que ledit maistre Loys, lequel en parlant audit suppliant l'exorta très fort à se consentir qu'il feist delà monnoie dessusdicte. Lequel suppliant luy respondy comme dessus qu'il n'en feroit riens. Et oye la dicte responce dudit suppliant, les dessusdiz maistre Loys, Martin et Guidier proposèrent d'eulx en aller sans dire adieu. Et le jour precedent, ariva ung nommé Jehan Pineau, auquel les dessusdiz avoient congnoissance, et cedit jour desrobèrent en l'ostel dudit suppliant ung pot, trois platz et deux escuelles d'estain, une chemise et plusieurs couvrechiefz lequel estain ilz fondirent en leurdicte chambre, ainsi que ledit suppliant et ledit maistre Loys desjunoient en ladicte maison dudit suppliant et de sondit beau père, qui estoit distant de ladicte chambre où les dessusdiz besoignoient d'ung get de pierre ou environ, comme dessus est dit. Et entrèrent les dessusdiz en ladicte chambre par le dessus d'icelle, et emportèrent toutes les choses que ledit maistre Loys avoit faictes et plusieurs autres choses et biens estans en icelle chambre. Et ce fait, s'en vint ledit Guidier à la dame dudit suppliant et luy aporta ung gectouer pu contouer en forme de monnoye, qui estoit à vint (?), et lui dist que c'estoit ce que ledit maistre Loyset ledit, suppliant, son gendre, faisoient. Laquelle incontinant envoia querir sondit gendre et ledit maistre Loys ; lesquelx vindrent et demandèrent audit Guidier qu'il disoit, et il leur respondy qu'il avoit osté ladicte pièce de monnoie audit-Martin, lequel se ventoit qu'il feroit destruire ledit suppliant et sadicte dame ; lequel gectouer ou contouer il ne voult monstrer audit suppliant. Lesquelles choses ilz avoient faictes à cautelle, à l'occasion de ce que ladicte dame dudit suppliant les acusoit qu'ilz lui avoient desrobbé ladicte vesselle et linge dessusdit, dont ilz avoient eu grant debat ensemble, en nyant lesdiz cas, mais lesdiz Martin et Guidier dirent audit suppliant et confessèrent qu'ilz l'avoient fait. Et lors ladicte femme leur dist qu'ilz trouvassent façon de paier et d'eulx en aller, et qu'elle rié leur bailleroit plus riens. Lesquielx voians ce et doubtans que ledit suppliant feist contre eulx poursuite, ledit Martin s'enfouy et lesdiz suppliant, maistre Loys et Guidier le poursivirent et en le poursuivant et querant, ledit Guidier s'enfouy aussi par le derrière dudit hostel ; et firent tant lesdiz suppliant et maistre Loys qu'ilz trouvèrent ledit Martin, lequel dist audit suppliant qu'il ne savoit riens de la besoigne, en la présence dudit maistre Loys et de Jehan Pineas Et en ces parolles se despartirent d'ensemble. Et depuis s'en ala ledit maistre Loys seul en sa chambre où il fut par aucune espasse de temps, et après ledit suppliant ala en ladicte chambre, où il trouva deux moles à monnoye et appersceut bien que ledit maistre Loys s'estoit essayé gecter et faire de la monnoye en iceulx ; lesquelz moles qui estoient de verre ledit suppliant print, rompy et gecta ès aisemeris dudit hostel, et dist audit maistre Loys qui s'en allast et que ce n'estoit pas ce qu'il lui avoit dit et promis. Lequel maistre Loys luy dist qu'il luy queist des groz d'Angleterre et qui lui en feroit. A quoy ledit suppliant dist qu'il n'en-feroit riens, et ce fait, se departy ledit suppliant et s'en alla coucher. Et le landemain, les dessus diz s'en allèrent sans dire adieu ne compter à leur hoste de leur despence en aucune manière, combien qu'ilz eussent promis sur leur foy, serement et bautesme qu'il paieroient avant que partir.

Et advint que, sept jours après ou environ, ledit suppliant ala à Saint Maixent pour certains ses affaires, et illec trouva les dessus diz qui faignoient ne savoir riens Tun de l'autre. Et quant ledit Martin vit et apperceut ledit suppliant, doubtant qui les descouvrist des larrecins qu'ilz avoient faiz en l'ostel de luy et de son beau père, ainsi que dessus est dit, et qu'ilz s'en estoient despartiz sans paier riens, icellui Martin qui est dudit païs, dist audit suppliant, en la presence dudit maistre Loys et Pineau telles parolles : « Jehan Guillonet, ne me blasmés point plus queles autres, car sur ma Redempcion tout quanque qu'il y a esté feit de mal en vostre hostel, maistre Loys l'a fait faire et proposé, et pretendoit ledit Loys que si vous fussez conscenty à faire ce quil disoit, qu'il eust fait pis la moictié ; et savoit bien ledit Loys qu'il n'estoit point possible de gecter monnoie en verre ; aussi veritablement n'est il ». Et pareillement dist ledit Guidier audit maistre Loys telles parolles : « Vous vous dictes estre mon oncle, mais non estes, et ce que j'ay fait vous le m'avez faict faire » Et dirent audit suppliant qu'il ne creust pas icellui maistre Loys et qu'il avoit trompé plusieurs gens et qu'il louast Dieu dont il ne lui avoit fait pis. A quoy ledit maistre Loys respondy qu'il n'en estoit riens, et ledit suppliant dist au contraire et que ce que lesdiz Martin et Guidier disoient estoit verité ; car, comme ledit suppliant disoit et remonstroit, icelluy maistre Loys avoit promis faire ledit fait d'arequemie bon et vray. Dist après audit suppliant qui louast Dieu de ce qu'il estoit yssu si net des dessus nommez, et qu'ilz ne tendoient sinon à lui faire plus grant mal. Et demourèrent les dessus diz maistre Loys, Pierre Martin, Guidier, Regnault et Jehan Pineau ès forsbours dudit lieu de Saint Maixent, où ilz se cuidèrent celle nuit tuer, comme l'en dit, et le landemain ou tantost après, s'en allèrent les dessus diz Martin, Guidier et Pineau, comme l'en dit, à Partenay, où ilz desrobèrent, par le moyen de certains croichez qu'ilz firent faire, certaine grant quantité de vaiselle d'estain. Lequel cas vint à congnoissance et furent prins au corps et menez prisonniers en nostre dicte ville de Poictiers, où ilz furent interrogez sur icellui cas, et en les interrogant, par haine et malveillance qu'ilz avoient audit suppliant et à l'ostel de son dit beau père, cuidant fermemant que icellui Girault, beau père d'icellui suppliant, les eust fait prandre au moyen du larressin qu'ilz avoient, ainsi comme dessus est dit, fait et perpetré en sondit hostel, et aussi qu'ilz s'en estoient aliez de sondit hostel sans paier leurs despens, dirent que ledit suppliant avoit voulu et s'estoit efforcé faire de la monnoye, mais qu'ilz n'en avoient point fait ; et aussi confessèrent lesdiz larrecins et aussi les crocheteries et plusieurs mauvais et dampnables cas, par le moien desquelz ilz ont esté depuis executez par justice. Et combien que ledit suppliant ne se soit jamès essayé à faire ladicte monnoye, et que quant il eust esté confronté devant les dessus diz criminelz, ce qu'il n'a pas esté, il eust bien sceu que leur respondre et s'en fust bien justiffié, toutesvoies pour ledit cas il a esté constitué et mis prisonnier en nostre Palays à Poictiers, où il est encores detenu en grant durté et misère, et doubte que pour occasion dudit cas, jasoit ce qu'il n'ait fait ou fait faire monnoie, ne sceu qu'il en ait esté fait en la chambre desclerée, que ce neantmoins, pour ce qu'il n'a revelé à justice que les dessus diz avoient desrobbé l'ostel delui et de son dit beau père et avoient usé en sa dicte chambre dudit fait d'arequemie, et qu'il ne desclara qu'il avoit trouvé en ladicte chambre lesdiz deux molles de verre à faire et gecter monnoie, on veuille contre lui proceder à pugnicion corporelle. Aussi doubte que, pour occasion de ce que le- dit Pierre Girault, son beau père, [avoit fait faire], depuis deux ans ença certain nombre de tasses marquées et de queillers qui estoient faulses, pour vendre, lesquelles il vendi à certains Espaignolz comme bonnes, dont il savoit bien le contraire, nostre procureur voulsist semblablement tendre pour ledit cas à sa destruction totalle, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant, etc. Pour ce est il que nous, ces choses considerées, voullans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant, en faveur et pour pitié de ses pouvres femme, enffens et mère, avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou moys d'octobre l'an de grace mil cccc. soixante et deux, et de nostre règne le deuxiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Castel — Visa. Contentor. Duban.

MCCCLXXIX 2 janvier 1463

Lettres d'anoblissement octroyées à Guillaume Chauvin, licencié en lois.

AN JJ. 198, n° 511, fol. 456.) P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Ludovicus, Dei gracia Francorum rex. Ad perpetuam rei memoriam. Decens et juri consonum arbitramur illos nobilitatibus et aliis prerogativis muniri, quos probos et fideles, vita laudabili, morum honestate aliisque virtutum insigniis decoratos adinvenit regia: magestas. Sane, licet dilectus noster magister Guillermus Chauvin, in legibus licenciatus

Le titre de licencié en lois donné à ce Guillaume Chauvin peut faire supposer, avec quelque apparence de raison, que c'est le même personnage qui fut lieutenant, du bailli de Gâtine, Jacques Rataut, dont il est question dans un procès au Parlement de l'an 1473, cité ci-dessus, p. 356, note 3. Nous avons vu aussi, dans un autre acte du 13 avril decette même année, que Perrette de Conzay, l'une des filles d'Hugues de Conzay, lieutenant général du sénéchal de Poitou, avait épousé un Guillaume Chauvin. (Ci-dessus, p. 276, note.) Un personnage du même nom, qui avait été receveur, puis châtelain de Talmont, était appelant au Parlement et demandeur en réparation d'excès, attentats, enfreinte de sauvegarde, etc., contre Louis d'Amboise, vicomte de Thouars, Jean Guymar, sénéchal de Talmont, le capitaine de cette place, Etienne Bricet, et autres officiers du vicomte audit lieu, aux dates des 5 et 8, juin 1469. (Arch. nat., X2a 35.) Le Dict. des familles du Poitou cite un Guillaume Chauvin, écuyer, sr du Teil, de la Rembourgère, de la Monnerie, etc. qui fit aveu au Bois-Chapeleau pour la Rembourgère, le 20 février 1455, et au seigneur de Parthenay pour la Cottinière, le 24 mars suivant, servit comme brigandinier au ban de 1467, sous le seigneur de Belleville, etc., « Ailleurs, ajoute cet ouvrage, on le trouve qualifié lieutenant général du bailli de Gâtine, en 1473 », et il donne sa filiation. (Nouv. édit., t. II, p. 359.) Nous mentionnons ces extraits à titre d'indications, sans nous porter garant que le Guillaume Chauvin, licencié ès lois, anobli par lettres du 2 janvier 1463 n. s., et celui ou ceux qui viennent d'être cités un seul et même personnage.

libere condicionis et de legitimo matri- monio ex plebeis parentibus sumpserit originem, vita tamen laudabilis, morum honestas alieque plurime virtutes quibus persona ejus insignitur, vera eciam ipsius apud nos fidelitas ipsum nobilem in suis actibus reddunt et nos merito inducunt ut erga eum reddamur ad graciam liberales. Notum igitur facimus universis, presentibus et futuris, quod nos, premissorum consideracione nec non gratuitorum servitiorum nobis per ipsum magistrum Guillermum Chauvin multimode impensorum, ipsum et ejus posteritatem et prolem, masculinam et femininam, in legitimo matrimonio procreatam et procreandam, nobilitamus et, ex nostra certa scientia et gratia speciali auctoritateque regia ; nobiles facimus et creamus per presentes. Expresse concedentes ut ipse ejusque posteritas et proles predicta, nata et nascitura, in omnibus suis actibus, in judicio et extra, ab omnibus pro nobilibus reputentur, habeantur et perpetuo censeantur, et habiles reddimus ut ipsi universis et singulis previllegiis prerogativis, libertatibus et aliis juribus quibus ceteri nobiles regni nostri, ex nobili stirpe et genere procreati, uti et gaudere consueverant, utantur et gaudeant pacifice ac fruantur, ipsum aliorum regni nostri nobilium ex nobili prosapia natorùm, numero et cetui agregantes, licet ipse magister Guil- lermus Chauvin ex nobili genere ortum [non] habuerit. Volentes insuper et concedentes eidem ut ipse et dicta ejus proles et posteritas masculina, dum et quociens eis placuerit, a quocunque milite cingulum milicie valeant adipisci, et feoda, retrofeoda ac res nobiles à nobilibus et quibuscunque aliis acquirere, et jam acquisitas necnon et acquirendas retinere et possidere pacifice, absque eo quod ea vel eas nunc vel futuro tempore, innobilitatis occasione, extra manum suam ponere vel alienare cogantur ; solvendo nobis ea vice financiam moderatam. Quocirca dilectis et fidelibus nostris thesaurariis Francie necnon senescallo Pictavensi et ceteris justiciariis et officiariis nostris aut eorum locatenentibus, presentibus et futuris, et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, tenore presentium mandamus quatinus nostris presentibus nobilitacione, concessione et gracia dictum magistrum Guillermum Chauvin et ejus posteritatem masculinam et femininam, in legitimo matrimonio natamet nascituram, uti et gaudere faciant et permittant, absque quovis impedimento. Quod ut firmum et stabile perpetuo perseveret, nostrum presentibus jussimus apponi sigillum. Nostro tamen in ceteris et alieno in omnibus juribus semper salvis. Datum...Le lieu de la date est resté en blanc., secunda die mensis januarii anno Domini millesimo cccc. lxiido, et regni nostri secundo.

Sic signatum: Per regem. — Visa. Contentor. J. Duban.

MCCCLXXX 7 janvier 1463

Rémission en faveur de Thomas Jaladeau, qui s'était occupé d'alchimie et avait procuré à deux associés les moyens matériels de fabriquer de l'argent et de la fausse monnaie, et en avait bénéficié luimême.

AN JJ. 198, n° 512, fol. 456 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, parla grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de maistre Thomas JaladeauDeux proches parents de Thomas Jaladeau, Guillaume Jaladeau, son neveu, et Daniel Jaladeau, son cousin germain, compromis dans cette affaire, parce qu'ils avaient fourni le charbon nécessaire aux opérations des prétendus alchimistes, faux monnayeurs, obtinrent aussi des lettres de rémission données à Tours, en avril 1465. (JJ. 199, n° 538, fol. 338.) Nous n'en publierons pas le texte, qui n'apprend rien de plus que celui-ci. Nous y relèverons seulement cette phrase : a Thomas a esté ung puissant homme jusques à ce que, pour cuider devenir plus riche, il s'est meslé de faire or d'arquemie ». C'est lui qui avait engagé son cousin et son neveu à fuir et à se cacher, jusqu'à ce que l'affaire fût arrangée. chargé de jeune femme de l'aage de dix huit ans ou environ, contenant que, environ la feste de la Nativité Nostre Dame derrenière passée a eu ung an, que ledit suppliant qui encores n'estoit marié, se complaignit à ung nommé frère Simon, cordellier de l'observance, de sa pouvreté et des debtes qu'il devoit, lequel cordelier lui dist qu'il lui conseilleroit ou apprendroit à faire l'argent d'arquemie, dont il paieroit ses credicteurs et s'en pourroit enrichir. De laquelle chose icellui suppliant, qui ne pensoit en nul mal, fut content et après ce a besongné audit fait d'arquemie par l'espace de troys mois ou environ et fist dix ou douze mares d'argent, et pour ce qu'il ne le pouvoit convertir en argent fin ne mettre en manière qu'il en peust recouvrer ce qu'il y avoit mis et frayé, en parla à plusieurs personnes et mesmement à ung nommé Jehan Agenault, lequel lui dist qu'il savoit bien homme qui le lui mettroit bien en façon qu'il s'en aideroit et le lui feroit venir quant il vouldroit, dont ledit suppliant fut content. Et dix ou douze jours après, ledit Jehan Agenault l'amena avec ung autre en l'ostel dudit suppliant ; ausquelz icellui suppliant con la son cas et ilz lui dirent qu'ilz feroient bien sa besongne, mais qu'il leur baillast hostel secret et gens secretz et des paisles d'arain, et aussi ledit argent d'arquemie. Et lors ledit suppliant leur dist qu'ilz le povoient bien faire en sa maison mieulx que en hostel de la ville, et que pour ce qu'il éstoit juge de ladicte ville, personne ne venoit en sa maison. Après ce leur baillà gens et paisles d'arain et ledit argent d'arquémie lesquelz peu après rompirent lesdictes paisles et en firent des paisles (sic) qu'ilz rondirent et blanchirérit et en firent des targesMonnaie de Bretagne. en ung coing que grava l'un de ceulx que ledit Jehan Agenault avoit amenez [et en firent] certaine quantité en l'ostel dudit suppliant, lequel par plusieurs foiz à ce faire les regarda, mais il n'y besongna point. Desquelles targes il en eut èn sa part x. livres tournois ou environ lesquelles il a depuis emploiées et baillées ainsi qu'il s'énsuit : c'est assavoir a ung appellé Saulteron pour ix. [solz] qu'il lui devoit et c. solz ou vi. livres à Josselin Mignot, qui savoit bien qu'elles estoient faulses, parce qu'il avoit esté à les faire; pour icelles targes emploier, lesquelz c. solz ou vi. livres ledit Josselin n'a aucunement emploiées. Desquelles targes icellui suppliant donna [aucunes] à une sienne niepce et le demourant n'a point emploié. Depuis lesquelles choses cellui qui avoit faictès lesdictes targes manda audit suppliant qu'il lui envoyast son cheval et qu'il yroit parachever le demourant desdites targes, ce que ledit suppliant fist, et son manteau aussi, par son clerc qu'il garda avant que venir, depuis karesme prenant derrenier passé jusques à Pasques ensuivant ou environ, qu'il vint et se rendit en la maison dudit suppliant, pour parachever de faire le demourant desdictes targes. Lequel suppliant à celle heure ne voult à ce faire besongner et lui baillast le surplus des targes qui lui estoient demourées. Lequel ouvrier, après ce qu'il eut icelles targes, s'èn ala et promist audit suppliant de retourner, ce qu'il n'a fait, et ne le vit oncques puis icellui suppliant. À l'occasion duquel cas, ledit, suppliant, doubtant rigueur de justice, s'est absenté du païs et a delaissé Marie Cospete, sa femme, qui est de bonne maison; et n'oseroit audit païs plus retourner, converser, né repairer, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce par nous imparties, si comme ladicte Marie, sa femme, nous a fait dire et remonstrer, en nous humblement requerant icelle Marie que, attendu que en tous autres cas sondit mary, suppliant, est bien famé et renommé et ne fut jamais actainct ne convaincu d'aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, et aussi qu'elle est jeune femme et de bonne maison et nouvelle mariée, il nous plaise nosdictes grace et misericorde lui impartir. Pour ce est il que nous, ce consideré, inclinans à la supplicacion et requeste de ladicte femme, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, à icellui suppliant, en faveur de sadicte femme, avons le fait et cas dessus declairé aboly, quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, aux seneschaulx de Poictou et de Limosin et à tous noz autres justiciers, etc.

Donné à Celles en Poictou, le viie jour de janvier l'an de grace mil cccc. soixante et deux, et de nostre règne le deuxiesme.

Ainsi signé : Par le roy, les sires du Lau, de LandesCharles de Melun, baron des Landes. (Cf. ci-dessus, p. 356, note 2.), de BeauvoirCf. ci-dessus, p. 394, note., maistre Estienne Chevalier et plusieurs autres presens. Rolant. — Visa. Çontentor. J. Duban.

MCCCLXXXI Janvier 1463

Lettres portant don en faveur de Mathurin Arembert, seigneur de Sepvret, de la haute justice dudit lieu.

AN JJ. 199, n° 171, fol. 106 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de nostre amé et feal conseiller, maistre Mathurin ArembertMathurin était fils de Jean Arembert, déjà seigneur de Sepvret et procureur du roi en la sénéchaussée de Poitou. C'est en cette qualité qu'il fut chargé, après la mort de Jean II Larchevêque, 1427, de prendre possession de Parthenay au nom du roi (cf. notre tome VIII, p. 95-96, note) et assista en 1431 à l'installation de l'Université de Poitiers. Il est ainsi qualifié dans le contrat de mariage (passé à Saint-Maixent, le 5 juillet 1434) de Maurice Claveurier, lieutenant général du sénéchal du Poitou, avec Louise Eschalart, fille de Simon, sr de Maillé, et de Jeanne Dixmier, auquel il fut présent comme témoin. (Arch. du château de la Barre, par A. Richard, t. I, p. 13.) Le 26 mai 1436, le Parlement de Poitiers lui enjoignit, ainsi qu'à Jean Baconnet, son collègue, aussi procureur du roi en Poitou, d'exercer des poursuites contre les seigneurs de Châteaularcher, de Brisay et autres pillards. (Arch. nat. X2a 21, à la date.) Jean Arembert rendit aveu à Charles vu, le 13 mars 1441 n. s , de son hôtel et place forte de Sepvret, mouvant de la châtellenie de Lusignan, que sans doute il avait acquis récemment (Id., P. 1145, fol. 70 v°), et le 7 août 1448, au seigneur de Melle, Charles d'Anjou, comte du Maine, de son lieu, terre et juridiction de la Revêtizon et autres terres, sis en la paroisse de Celles. (Id., P. 5203, fol. 41 v°.) Mathurin Arembert succéda à son père en l'office de procureur du roi en Poitou, nous ne savons à quelle date exactement. Le Dict. des familles du Poitou dit qu'il l'exerça de 1437 à 1467 (nouv. édit., t. I, p. 97). Quoi qu'il en soit, le 26 avril et le 24 mai 1436, on le trouve en procès au Parlement au sujet de l'office de procureur du roi sur le fait des fiefs en Poitou, qu'il disputait à Guillaume Rouillé ; il s'était porté appelant d'une sentence du lieutenant du sénéchal à Saint-Maixent, qui était alors Hugues de Conzay. (Arch. nat., X1a 9194, fol. 131 v° ; X2a 20, fol. 93 ; X2a 21, à la date du 24 mai 1436.) C'est sans doute le même Mathurin Arembert qui était en 1446 sénéchal de Civray (coll. dom Fonteneau), et le 10 juillet 1455, sénéchal de la Saisine. (Arch. du château de la Barre, t. Il, p. 193.) On peut citer encore une affaire criminelle portée au Parlement, le 20 décembre 1453, par Jean Brunet, appelant du sénéchal de Poitou et de Colin Autier, sergent royal, contre Mathurin Arembert, en sa qualité de procureur du roi en Poitou. (X2a 25, à la date.) En 1457, étant maire de Poitiers, Mathurin fit publier les statuts des corroyeurs de cette ville, et il assista, comme procureur du roi, l'an 1467, au ban des nobles du Poitou. ll avait épousé Louise Parthenay et en eut deux fils : Guillaume, sr de Sepvret, et Etienne, sr de Teillé. Nous publierons, à leur date, des lettres du même roi Louis XI, instituant en sa faveur deux foires à Sepvret, le 19 mars 1473 n. s. (JJ. 197, n° 405, fol. 214.), seigneur de Cevret en nostre païs de Poictou, contenant qu'il est seigneur dudit lieu de Cevret, qui est une belle, notable et ancienne place, bien emparée, bastie et ediffiée de belles tours, garites, eschiffes, foussez, pont leveis et donnant, basse court et dangeon et autres fortifficacions et emparemens neccessaires pour la garde de ladicte place et de ceulx qui y ont leur retraite et reffuge. Et est icelle place assise en bon et fertil païs, en nostre chastellenie, terre et baronnie de Lezignen, dont elle est mouvant et tenue à foy et hommage lige de nous, à cent solz de devoir à muance d'omme, quant le cas y avient. Et pour ce que audit lieu, terre et seigneurie de Cevret ledit suppliant n'a seullement que basse justice, qui lui semble peu de chose, veu la grandeur et estandue de sadicte seigneurie, il nous a humblement requis que en icelle lerre et seigneurie de Cevret nostre plaisir feust de lui donner les haulte et moyenne justice, que à nous y appartient, et sur ce lui impartir nostre grace. Pour ce est il que nous, consideré l'assiète de ladicte place, en laquelle nous avons puis naguères et par aucuns jours, pour nostre plaisir, habité, et les bons et agreables services que ledit suppliant et feu maistre Jehan Arambert, son père, ont par longtemps faiz à feu nostre très cher seigneur et père que Dieu absoille, et à nous en maintes manières, fait encores et continué chacun jour ledit suppliant, et esperons que plus nous face ou temps advenir, à icellui suppliant, pour ces causes et consideracions et autres à ce nous mouvans, avons, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, pour l'exaltacion et acroissement de sadicte terre et seigneurie de Cevret, donné et octroyé, donnons et octroyons, par ces presentes, que [en] icelle terre et seigneurie de Cevret et ès appartenances et appendences d'icelle il ait tout droit de justice et juridicion, haulte et moienne avec la basse qu'il y avoit par avant, et tous les droiz qui en deppendent et pevent deppendre, pour en joir et user par lui et ses hoirs et aians cause, seigneurs dudit lieu, terre et seigneurie de Cevret, à tousjours mès perpetuelment. Et voulons et nous plaist que icelle haulte justice et moienne soit tenue par ledit suppliant et sesdiz hoirs et aians cause soubz les foy et hommage lige et à tel et semblable devoir seullement que d'ancienneté on nous estoit tenu de faire pour cause d'icelle terre et seigneurie, sans aucun autre acroissement de charge ou redevance ; reservé à nous toutesvoyes le ressort et sou- veraineté. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers, etc., au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieux tenans, presens et advenir, et à chascun d'eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre grace, volenté, don et octroy ilz facent, seuffrent et laissent ledit suppliant et ses successeurs, seigneurs dudit lieu de Cevret, joir et user plainement et paisiblement, sans lui mettre ou donner, ne souffrir estre mis ou donné aucun destourner ou empeschement. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous [avons] fait mettre nostre seel à ces dictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l'autruy en toutes. Donné audit lieu de Cevret, ou mois de janvier l'an de grace mil cccc. soixante et deux, et de nostre règne le deuxiesme.

Ainsi signé : Par le roy, les sires du Lau, de Beauvoir, de Bressure, le bailly de Sens et autres-presens. B. Meurin. — Visa.

MCCCLXXXII Janvier 1463

Rémission accordée à Guillaume Sarregoule, de Fors, marchand de drap, détenu dans les prisons dudit lieu parce qu'il avait acheté d'un inconnu des étoffes volées à Tristan Vauguion.

AN JJ. 198, n° 548, fol. 499 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Guillaume Sarregoule, demourant à Fors en Poictou, contenant que, ou moys de may derrenier passé ou environ, ledit suppliant estant à Beauvoir sur Nyort où il vendoit des draps, vint par devers lui ung homme, que ledit suppliant avoit oncques congneu ne veu, et lui demanda s'il vouloit acheter des draps, lequel lui respondy que oy, mais qu'il les vist ; lequel homme lui dist qu'il ne les pouvoit veoir jusques au lendemain qui estoit jour de dimenche, et pour ce faire il convenoit qu'il se rendist à lui environ menuyt en ung certain lieu, qu'il lui declaira, dont ledit suppliant qui desiroit gaigner, fut content, et de fait en alant audit lieu entrepris, il rencontra en uns carreffour ledit homme qui leramena audit lieu de

Beauvoir, en lui disant, que les draps estoient chez ung nommé Toussains, dont il lui monstra la maison et qu'il convenoit qu'il lui aidast à les oster dudit hostel ; lequel suppliant dist que non feroit et ne lui aideroit point, mais que s'il les lui vouloit apporter jusques audit carrefour où ilz s'estoient, trouvez, il seroit content de les attendre, et s'en retourna à icellui carrefour ; et quant il eut esté par aucun temps, ledit homme apporta certaine quantité de draps où ledit suppliant l'attendoit et gardant ceulx qu'il avoit apportez. Et après ledit homme lui dist qu'il mist à part tous ceulx qu'il vouldroit avoir et achetter, ce qu'il feist ; et après lui demanda-combien ilz lui cousteroient, et ledit homme lui dist qu'il lui en vouloit faire bon marchié et qu'il les lui donneroit pour vint escus. Lequel suppliant lui dist qu'il n'avoit que douze livres dix solz tournois et les bailla audit homme, qui lui dist que s'il eust plus largement d'argent,.il lui eust baillé le demeurant desdiz draps ; lequel demeurant il emporta ou en fist ce que bon lui sembla, et dist audit suppliant qu'il s'en aloit à Xaintes. Et ledit suppliant emporta ceulx qu'il avoit acheté. Et depuis Tristan Vauguion, auquel appartenoient lesdiz draps, a fait grant diligence de les recouvrer, et a trouvé que ledit suppliant en estoit coulpable, et s'en plaigny à justice. Et à ceste cause fut icellui suppliant constitué prisonnier ès prisons de Fors

Le seigneur de Fors était alors Thomas de Vivonne, fils ainé de Hugues, seigneur dudit lieu, de Saiut-Gouard, etc., et de Marie de Vivonne, fille de Guillaume, sr de la Tour-Chabot. Il avait épousé Denise, fille de Jean Rabateau, président au Parlement, qui lui apporta les seigneuries d'Auzance, de Cloué et autres, pour lesquelles il rendit divers hommages et aveux au roi, les 11 et 30 novembre 1451 et le 15 janvier 1462 n. s. Il fit aussi les aveux de la seigneurie de Fors, le 25 janvier 1462 n. s., et de celle de Venours, à la même date. (Arch. nat., P. 5661, cotes 2810, 2811 et 2819 ; P. 1145, fol. 89 v°, 121 v°, 122, 142 v°.) Voy. aussi l'hôte de Jeanne d'Arc à Poitiers, maître Jean Rabateau, par H. Daniel-Lacombe, in-8°, 1895, p. 164 et suiv.

dont il est subgect, et peu de temps après, nostre procureur en nostre païs de Poictou ou son substitut, adverty dudit cas, obtint certaines lettres de nostre seneschal de Poictou ou son lieutenant, par vertu desquelles et informacions precedens il fist convenir et adjourner ledit suppliant à comparoir en personne, sur peine de bannissement, par devant icellui nostre seneschal ou son lieutenant, et avec ce l'executeur desdietes lettres voult proceder à mettre [en nostre] main les biens du père d'icellui suppliant avecques ceulx dudit suppliant, dont icellui père appella une foiz ou plusieurs, tant pour lui que pour sondit filz ; lesquelles appellacions n'ont encores aucunement esté relevées. Toutesvoyes ledit suppliant doubte que, soubz umbre dudit cas, on vueille proceder contre lui à pugnicion corporelle, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, en nous humblement requerant que, attendu que, alors que ledit homme qu'il ne congnoissoit et encores ne congnoist, vint par devers lui, il cuidoit qu'il eust des draps à vendre, ainsi que marchans ont acoustumé d'avoir et qu'il ne fut point en la maison dudit Toussains où estoient iceulx draps et ne fist seulement queles garder, quant ledit homme les apportoit, que depuis il a satisfait à partie au moins en manière qu'il est content de lui, et que en tous autres cas, etc., il nous plaise nostre dicte grace et misericorde lui impartir. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant ou cas dessusdit avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Xaintes, ou moys de janvier l'an de grace mil cccc. soixante et deux, et de nostre règne le deuxiesme. Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Bouton. — Visa. Contentor. J. Duban.

MCCCLXXXIII Mai 1463

Vidimus et confirmation de lettres patentes des comtés de Poitou et rois de France, particulièrement de Charles VII, accordant des privilèges, libertés et franchises à la ville de PoitiersCes textes divers ont été publiés dans le recueil des Ordonnances des Rois de France, in-fol., t. XV, p. 673-682..

AN JJ. 199, n° 252, fol. 145 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Ludovicus, Dei gracia Francorum rex. Notum facimus universis, presentibus et futuris, quod ad supplicacionem dilectorum nostrorum majoris, scabinorum, consiliariorum et burgensium nostre ville et civitatis Pictavie, visis et perspectis litteris quorumdam predecessorum nostrorum regum Francorum ac eciam Pictavie comitum, et maxime deffuncti karissimi progenitoris nostri, quorum tenores sequntur :

Karolus, Dei gracia, etc. Datum Parisius, in castro nostro de Lupara, anno Domini millesimo tricentesimo septuagesimo secundo et regni nostri nono, mense decembrisLettres patentes de Charles v reproduisant celles du duc de Berry (même date), qui confirmaient elles-mêmes deux diplômes de Philippe-Auguste, le premier donné à Dixmont en novembre 1204. le second à Anet en 1222. Ces quatre documents sont imprimés dans notre t. IV (XIX des Arch. hist.), p. 221-229, avec des notes bibliographiques..

Item. Edward, ainsné filz du roy de France et d'Angleterre, prince d'Aquitaine et de Gales, etc. Donné en nostre chastel de Comphnac, le xviie jour d'octobre l'an de grace mil ccc. soixante et neufCes lettres du prince de Galles sont imprimées dans notre t. VII (XXVI des Arch. hist.), p. 415..

Item. Charles, par la grace de Dieu, etc. Donné à Paris, en nostre chastel du Louvre, l'an de grace mil ccc. soixante et douze, et de nostre règne le neufiesme, ou mois de decembreLettres conférant la noblesse aux maire et échevins de Poitiers, dont le texte est publié dans notre t. IV, p. 233-236..

Item. Karolus, Dei gratia Francorum rex, etc. Datum Cainone, die xvia mensis marcii anno Domini millesimo quadringentesimo trieesimo primo, et regni nostri decimoConfirmation par Charles VII, le 16 mars 1432 n. s., de la création de l'Université de Poitiers, imprimée dans notre t. VIII (XXIX des Arch. hist.) p. 36-43..

Item. Charles, par la grace de Dieu, etc. Donné en nostre ville de Tours, ou mois d'aoust mil cccc. trente six, et de nostre règne le xiiiimeUnion à perpétuité au domaine de la couronne de la ville de Poitiers, texte publié dans notre t. VIII, p. 100-105..

Item. Charles, par la grace de Dieu, etc. Donné à Selles en Berry, le dixiesme (corr. dix septiesme) jour de mars l'an de grace mil cccc. vint et trois, et de nostre règne le secondLettres confirmant la sauvegarde accordée par Charles V, en décembre 1372, aux habitants de Poitiers. Ces lettres sont imprimées dans notre t., IV, p. 229-232, et la confirmation de Charles VII, dans notre t. VII, p. 413..

Easdem litteras supradictas, unà cum previllegiis, franchisiis et libertatibus in eisdem descriptis, et per deffunctum dominum progenitorem nostrum ac ejus et nostri predecessores ipsis majori, scabinis, consiliariis, burgensibus et communitati predicte nostre ville et civitatis Pictavensis, ut supra concessis et confirmatis, nos auctoritate nostra plenaque potestate regia, causis ibidem insertis, approbavimus, laudavimus, concessimus et confirmavimus, approbamusque, laudamus, concedimus et confirmamus per presentes, in quantum majores, scabini et habitatores predicte ville nostre Pictavensis rite et juste usi et gavisi fuerunt. Mandantes, tenore presentium, senescallo nostro Pictavensi ceterisque justiciariis et officiariis nostris, presentibus et futuris, aut eorum loca tenentibus, quathinus dictos majorem, scabinos et habitatores et alios quorum intererit nostra presenti gracia, approbacione et confirmacione uti et gaudere paciffice et quiete faciant et permittant, nil in contrarium attemptari permittendo. Volentes insuper et concedentes transcripto seu vidimus presentium, sub sigillo regio confecto, adhibeatur fides, sicut presenti originali. Et ut hec omnia valitudine perpetua roborentur, presentibus litteris sigillum nostrum duximus apponendum. Datum Tholose, in mense maii anno Domini millesimo ccccmo sexagesimo tercio, et regni nostri secundo.

Ainsi signé : Per regem, dominus du Lau, de BellovisuLes seigneurs du Lau et de Beauvoir (voy. ci-dessus, p. 299, note 2, et 394, note 1). et pluribus aliis presentibus. A. Rolant. — Collation faicte. Contemptor (sic). Visa.

MCCCLXXXIV Juillet 1463 (avant le 22)

Rémission donnée en faveur de Micheau Charles, de la paroisse de Dangé près Châtellerault, coupable du meurtre de Raymond Gaudin qui lui avait cherché querelle.

AN JJ. 199, n° 160, fol. 97 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Micheau Charles, pouvre laboureur, naguères demourant avec son père en la parroisse de Dangé près Chastellerault, aagé de xxv. ans ou environ, contenant que, le xxiiiie jour de septembre l'an mil cccc. soixante et ung, ung nommé Raymond Gaudin, en venant de Bussières, se transporta devant l'ostel d'un nommé Macé Pageart près ledit lieu de Bussières, en ladicte parroisse de Dangé, et illec ledit Gaudin demanda qui estoit audit hostel. A quoy la femme dudit Pageart respondy que ledit suppliant y estoit. Et lors ledit Gaudin, qui entra dedens ledit hostel, demanda audit suppliant s'il s'en vouloit aler, lequel res- pondy que non. Adonc icellui Gaudin ala jusques à partie du chemin de sa maison et retourna en ladicte maison dudit Pageart, où estoit ledit suppliant, par deux foiz, en lui disant qu'il s'en allast et qu'il l'atendroit. Et ce voyant, ledit suppliant fut content de s'en aler, et alèrent ensemble jusques au carroy de feu Roux ; et illec ledit suppliant print congié dudit Gaudin, en lui disant qu'il s'en aloit chez sondit père. Mais icellui Raymond lui dist telles parolles ou semblables : « Demeure, tu t'en viendras soupper avecques moy ». Et quant ilz furent à la maison dudit Gaudin, ledit suppliant demanda qui y estoit. A quoi ledit Gaudin dist qu'il n'y avoit que André et Lucas Gaudins, ses enfans, et leurs femmes qui dormoient. Adonc ledit suppliant lui dist qu'il aloit veoir s'ilz dormoient, dont icellui Gaudin fut content, disant qu'il aloit mettre la nappe pour soupper. Et incontinent après, retourna ledit Gaudin ung baston en son poing et commança à frapper sur ses diz enffans, ledit suppliant non saichant pourquoy ; lequel, à ceste cause, dist audit Gaudin qu'il faisoit mal et qu'il sembloit que ce fust pour despit de lui. Lequel Gaudin jura Dieu que aussi frapperoit il sur lui et de fait le frappa sur la teste dudit baston. Lequel suppliant ce voyant, lui osta ledit baston. Et lors ledit Gaudin se print audit suppliant et regnia Dieu par plusieurs foiz, en disant telles parolles ou semblables : « Tu me tueras ou je te tueray », et appella ung sien filz et lui dist : « Viens à moy, et apporté le cousteau, et le tuerons ». Et lors ledit suppliant, qui estoit bien esbahy, dist audit Gaudin par plusieurs foiz qu'il le laissast aler, ce qu'il ne voult faire. Et ce voyant ledit suppliant et que sondit filz lui apportoit ledit cousteau, dist audit Gaudin qu'il le laissast ou qu'il le frapperoit, ce que ledit Gaudin ne voult faire, ains meu de mauvaise voulenté et perseverant en son mauvais et dampnable propos, lui couroit tousjours [sus] pour le oultrager et villenner, en attendant le cousteau que son- dit filz lui apportoit. Et pour obvier à ce et à la fureur dudit Gaudin, icellui suppliant lui bailla d'un sien cousteau, qu'il tira alors, sur le bras par deux foiz en lui disant : « Laisse moy » ; de quoy ledit Gaudin ne voult riens faire, perseverant tousjours en sa dampnable [voulenté] de le tuer. A quoy ledit suppliant, pressé dudit Gaudin, lui bailla soubz l'oreille de son cousteau dessus dit, dont icellui Gaudin cheut à terre ; et tantost après, par faulte de bon gouvernement ou autrement, ala de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s'est absenté du païs et n'y oseroit jamais retourner, converser ne reppairer, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, si comme il dit, humblement requerant icelles. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou ou à son lieutenant et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou moys de juillet l'an de grace mil cccc. soixante et troys, et de nostre règne le deuxiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Gauvigneau. — Visa. Gontentor. J. Duban.

MCCCLXXXV Juillet 1463

Rémission octroyée à Benoît Albert, geôlier des prisons du palais à Poitiers, qui avait par négligence laissé évader une prisonnière.

AN JJ. 199, n° 360, fol. 222 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Benoist Albert, geolier ou garde des prisons du palays de Poictiers, contenant que il a dix ans ou environ qu'il a la garde desdictes prisons, en laquelle il s'est tousjours bien et honnestement gouverné et les a gar- dées à son pouvoir, tellement que puis ledit temps, par sa faulte ou coulpe, ne sont yssuz aucuns prisonniers desdictes prisons, et jusques au vme jour de ce present mois de juillet ou environ que, pour aucuns ses affaires il estoit alé en ladicte ville de Poictiers et avoit laissié les clefs en garde à Gervaise Davye, sa femme, laquelle par inadvertance et oubliance laissa lesdictes clefs en certain lieu de la cuisine desdictes prisons, une jeune fille nommée Jehanne Richarde, de Montaigu, laquelle estoit detenue prisonnière èsdictes prisons, pour avoir occis et fait mourir sans batesme une scienne fille, et avoit illec esté admenée par appel fait de la justice dudit lieu de Montaigu, et [de la justice] dudit lieu de Poictiers avoit appellé à Paris, par subtilz moiens trouva lesdictes clefs et par le moien d'icelles s'en est yssue desdictes prisons et s'en est fuye et mise en franchise en Nostre Dame la Petite. Par quoy ledit suppliant doubte que de ce nostre procureur ou autres luy vueille imputer la faulte et proceder contre lui rigoreusement, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu ce que dit est et que tousjours il s'est bien et doulcement gouverné en ladicte garde desdictes prisons, et que ladicte prisonnière est yssue desdictes prisons, parce que la femme dudit suppliant avoit oublié lesdictes clefs et non pas par la coulpe dudit suppliant, etc., nous lui vueillons sur ce impartir nostre grace. Pour quoy nous, ces choses considerées, audit suppliant ou cas dessus dit avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces dictes presentes, au seneschal de Poictou ou à son lieutenant et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou mois de juillet l'an de grace mil cccc. soixante et trois, et de nostre règne le secondC'est-à-dire avant le 22 juillet, à cette date commençant la troisième année du règne de Louis XI..

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Gouldel. — Visa. Contentor. J. Duban.

MCCCLXXXVI Juillet 1463

Rémission accordée à Regnaut Bérault, emprisonné à Mervent, comme complice du meurtre d'un nommé Jean Melon, qui l'avait injurié et frappé, ainsi que les compagnons dudit Bérault, de telle sorte qu'ils avaient été obligés de repousser par la force son agression.

AN JJ. 190, n° 177, fol. 110 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receue l'umble supplicacion des parens et amis charnelz de Regnault Bérault, contenant que, le jour et feste Saint George derrenierement passé, se transporta à Fontenay le Conte pour achapter des provisions et autres choses neccessaires pour sa maison, et quant il eut achetté ce que bon lui sembla, se mist au chemin pour retourner en sa maison, ala jusques à ung village nommé l'Orberie, qui est ou chemin dudit Fontenay le Conte, pour aler au lieu de Mervent, chès ung nommé Jehan Joulart, qui vendoit vin, pour prendre sa refeetion, en la compagnie de Jame Maindron, Pierre BouetUn Pierre Bouet, collecteur des aides en la paroisse de Saint-Jean, châtellenie de la Chaise-le-Vicomte, fut taxé à 30 sous d'amende en 1439, par Adam Hodon, notaire et secrétaire du roi, commissaire en Poitou pour la recherche des abus et malversations. Il avait été convaincu d'avoir « levé aucunes sommes de deniers sur plusieurs personnes qui n'estoient contenues en son rolle ». (Bibl. nat., ms. fr. 24160, fol. 40 v°.), Jamet Cappitaine, Pierre Reynart, Paul de Lassoy, Jehan Hemery, [Jehan] Challou et plusieurs autres, des noms desquelx il ne se recorde. Et ainsi qu'ilz beuvoient et mengoient et qu'ilz prenoient leur reffection, survint en ladicte maison ou vergier d'icelle ung nommé Jehan Melon, lequel salua la compaignie, et après ce dist ledit Melon à Jehan Chaillou qu'il ne lui avoit pas voulu prester ung sien asne, et incontinent jura icellui Melon la char Dieu que s'il trouvoit ledit asne en aucune chose qui lui appartensist, qu'il lui coperoit les jambes. Lequel Chaillou ne tint pas de ce grant compte et dist audit Melon quil ne lui feroit que raison et que justice, et aussi que s'il faisoit chose qui ne feust bien à point, qui lui feroit bien reparer par justice. Lequel Meslon, ce voiant, se commença à esmouvoir contre ledit Chaillou et de rechief jura deux ou trois foiz la char de Nostre Seigneur qui copperoit la gorge audit asne. Lequel Berault, voyant que icellui Melon juroit le nom de Dieu si terriblement, luy dist bien amiablement que ce n'estoit pas bien fait de jurer ainsi la char et le nom de Dieu, et que qui lui feroit raison que l'on le mettroit en bonne prison. Lequel Melon qui estoit homme fier et orguilleux, en despit de ce que icellui Berault lui remonstroit le mal qu'il faisoit, il s'adressa à lui auquel il donna ung coup sur l'ueil senestre, duquel coup il lui fist très grant mal. Lequel Berault dist audit Melon qu'il n'y tournast plus, car s'il y tournoit, qu'il lui monstreroit qu'il lui en desplairoit. Lequel Meslon, en perseverant tousjours de mal en pis, tira une dague qu'il avoit à son costé, de laquelle dague il s'efforça frapper icellui Berault en la poitrine, mais pour ce empescher ledit Berault mist le braz au devant et recust audit braz le coup ; duquel coup il lui coppa le braz jusques à l'os et lui fist grant plaie, de laquelle yssit grant effusion de sang ; et non content de ce, s'efforça derechief frapper icellui Berault, et de fait l'eust tué ou oultrageusement blessié, se n'eussent esté les dessusdiz qui beuvoient et mengoient avec ledit Berault, lesqueulx se misdrent au devant et ne purent avecques tant resister que ledit Meslon ne frappast icellui Berault sur la teste de ladicte dague et qu'il ne luy feist une autre grant plaie, de laquelle yssit une autre grant effusion de sang. Lesquelles choses voyant, icelluy Berault et que ledit Mesloit s'efforçoit tousjours de le vouloir tuer ou blesser, de ce très fort desplaisant et courroucé, pour obvier à sa fureur et qu'il ne le occist, prist une pierre assez grosse qui gecta audit Melon, de laquelle il le frappa et attaingny par la teste, et d'icelle lui fist une plaie dont yssit sang. Et après icellui Meslop de rechief s'efforça de frapper de ladicte dague ledit Berault, ce qu'il eust fait, se n'eussent esté les dessus nommez qui estoient presens, lesquieulx se misdrent encores au devant, et mesmement ung homme de Marent, du nom duquel icellui Berault n'est recors, qui prist et osta la dague audit Meslon et la bailla en garde à l'ostesse qui vendoit le vin ; et ledit Meslon estant hors dudit hostel, ceulx qui illec estoient presens firent tant qu'il entra en icellui, et quant il y fut, [fut] très fort blasmé de l'oultraige qu'il avoit fait audit Berault et aussi des grandes atestacions et injures qu'il avoit faiz et faisoit encores ; lequel Meslon qui estoit vindicatif et furieus, qui ne vouloit en riens estre corrigé par les dessus nommez, mais estoit très fort courroussié et esmeu dont on le corrigeoit ou vouloit corriger, adressa ses parolles à ung nommé Regnart, en lui disant telles parolles ou semblables en effect ou substance : « A ! villain, vous en faut il parler ? Par la char Dieu, avant que je m'en aille de seans, j'en turay ung ». Et sans autres motz ne parolles dire, ledit Meslon mist la main au fourreau de sadicte dague, auquel fourreau avoit deux petiz cousteaulx, et de l'un frappa ledit Renart au braz senestre et lui fist une playe dont yssit grant effusion de sang. Et de ce non content, icellui Meslon se print au corps dudit Regnart et s'efforça en tant qu'il peut de le vouloir oultrager, mais pour ce qu'il avoit aidé audit Beraut en la compaignie des autres assistans, ledit suppliant aida audit Regnartafïin de garder que ledit Meslon, qui estoit fort esmeu et comme tout furieux et enragé, ne l'occist ; lequel Melon, voyant qu'il ne povoit blesser ou occirre lesdiz Regnart et Berault et qu'il ne povoit parvenir à sa mauvaise entencion, se print au corps d'un appellé Jamet Cappitaine et le print aux génitoires, tellement que ledit Jamet Cappitaine fist ung grant cry, disant que ledit Lorrain (sic) l'oultrageoit et lui faisoit tel mal qu'il ne le povoit plus endurer. Lequel Berault, voiant l'ostinacion dudit Meslon, voulut secourir ledit Jamet Cappitaine, qui semblablement l'avoit secouru de Impression que ledit Meslon lui avoit faicte, et le print au corps. Lesquieulx Berault et Cappitaine gectèrent à terre ledit Meslon, et quant il fut à terre, ledit Cappitaine, qui avoit ainsy esté oultrage par ledit Meslon, print une busche assez grosse, de laquelle il donna audit Meslon par la teste trois coups, tellement qu'il perdist la parolle ; desquieulx coups, par mauvais gouvernement ou autrement, icellui Meslon tantost après ala de vie à trespassement. A l'occasion duquel cas ledit Berault a esté prins et constitué prisonnier ès prisons de Mervant, èsquelles il est encores detenu en dangier de finer ses jours, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur se imparties, si comme lesdiz supplians dient, humblement requerans que, attendu ce que dit est, qu'il n'a pas fait le coup et qu'il ne fut jamais actaint, etc., il nous plaise nosdictes grace et misericorde lui impartir sur ce. Pour ce est il que nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit Regnault Berault le fait et cas dessus dit avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou ou à son lieutenant et à tous autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou mois de juillet l'an de grace mil cccc. soixante trois, et de nostre règne le troisiesmeLa troisième année du règne de Louis XI commençant le 23 juillet 1463, ces lettres sont postérieures au 22..

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Rolant. — Visa. Contentor. D'Orchère.

MCCCLXXXVII Juillet 1463 (après le 22)

Confirmation, en faveur du chapitre de l'église collégiale de Saint-Hilaire-le-Grand de Poitiers, des lettres d'amortissement qu'il avait obtenues, en août 1405, de Jean duc de Berry, pour des biens acquis ou à acquérir pouvant s'élever jusqu'à deux cents livres de revenu annuelL'original de la confirmation donnée par Louis XI avec le vidimus des lettres de donation au chapitre de Saint-Hilaire-le-Grand par Jean de France, duc de Berry, comte de Poitou, est conservé dans le fonds de Saint-Hilaire (Arch. de la Vienne, G. 501), et il s'en trouve une copie dans la collection de dom Fonteneau, t. XII, p. 107..

AN JJ. 199, n° 176, fol. 109 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Ludovicus, Dei gracia Francorum rex. Notum facimus universis, presentibus et futuris, nos supplicacionem dilectorum nostrorum thesaurarii, decani et cappituli ecclesie collegialis Beatissimi [Hilarii] Majoris Pictavensis recepisse, continentem quod ipsi seu eorum predecessores à deffuncto quondam avunculo nostro Johanne, quondam duce Bituricensi et Alvernie, litteras obtinuerunt quarum tenor sequitur et est talis :

Johannes, regis quondam Francorum filius, dux Bituricensis et Alvernie, comesque Pictavensis, Stamparum, Bolonie et Alvernie. Dignum et meritorum opus agere credimus, necnon gratum Regi Regum, per quem vivimus, impendere famulatum, si piis peticionibus que pro divini cultus augmento fiunt benigniter inclinantes, ad hoc nos liberaliter extendamus quodque, si erga alios nostra liberalitas se inclinat, multomagis exuberare teneamur ad ea que nostre predecessorumque et successorum nostrorum salutem prospiciuntanimarum. Cum itaque nos jamdiu considerantes divinum servicium, quod in ecclesia collegiata Beatissimi Ylarii Majoris nostre ville Pictavensis die nocteque continué celebratur, et qualiter inibi per thesaurarium, decanum et capitulum ac alias personas ecclesiasticas ipsius ecclesie Domino devotissime famulatur, hiis aliisque causis multiplicibus nostro in animo excitati, pro nostre nostrorumque predecessorum et successorum animarum salute, ordinaverimus die prima cujuslibet mensis unam missam solemnem alta voce, nec non cunctis aliis diebus submissa voce ; per alterumcanonicorum,cappellanorum, vicariorum aut aliorum in eadem ecclesia servientium celebrandam, et pro hujusmodi fundacione misse, eisdem thesaurario, decano et capitulo, necnon dicte ecclesie dedissemus et assignassemus certos redditus et terrasCf. des lettres d'amortissement par Charles VI de la seigneurie de Visay et autres terres, maisons, prés, vignes, sis en divers lieux, qui avaient été donnés par le duc de Berry au chapitre de Saint-Hilaire, pour y fonder une messe quotidienne datées du 27 décembre 1407, qui ont été imprimées dans notre tome VII (Arch. hist. du Poitou, t. XXVI), p. 107-112. sub valore et precio centum librarum Turonensium vel circiterannui et perpetui redditus ; que quidem terre fuerunt postmodum, ex auctoritate nostra et consensu, in aliis manibus assignate, eisdem thesaurario, decano et capitulo mille libris semel dumtaxat, in recompensacionem dictorum reddituum, solummodo traditis et ad opus ipsius ecclesie persolutis ; unde ipsi thesaurariis, decanus et capitulum tam paucos redditus de hujusmodi summa reperire potuerunt, quod inde misse hujusmodi perpetuari non possent, voluntasque nec ordinacio nostra in hac suum sortiretur effectum, prout dicunt prefati thesaurarius, decanus et capitulum, humiliter supplicantes quatinus in debitam recompensacionem premissorum, cum ipsi acquisierint et de die in diem acquirent et acquirere intendant, pro augmentacione divini servicii in dicta ecclesia, plures possessiones, redditus atque terras, nos usque ad valorem ducentarum librarum Turonensium et ad opus predictum admortisare dignaremur.

Notum igitur facimus [universis], tam presentibus quam futuris, quod nos divini cultus augmentum zelantes et ut ordinacio nostraque voluntas perpetuo compleantur, nosque predecessores et successores precium et oracionum, que in dicta ecclesia et alibi per ipsos thesaurarium, decanum et capitulum fieri contigerit in futurum, participes fieri mereamur, eorum supplicacionibus favorabiliter inclinati, redditus, terras ac possessiones usque ad predictum valorem ducentarum librarum Turonensium annui et perpetui redditus, acquisitas et acquirendas, ubicumque ipsas aut partem ipsarum, in nostro comitatu Pictavensi aut alibi in aliis patriis nostris, emere et acquirere per eos contigerit, absque tamen feodo et justicia, de nostra liberalitate, certa sciencia et speciali gracia, ad opus predictum, amortisavimus et amortisamus per presentes. Volentes et concedentes quod dicti thesaurarius, decanus et capitulum et eorum successores, presentes et posteri, dictas ducentum libras Turonensium annui et perpetui redditus, acquisitas vel acquirendas, et per nos, ut premittitur, admortizatas tenere et possidere perpetuo pacifice et quiete valeant atque possint, absque eo quod ipsas aut aliquam partem ipsarum extra manum suam ponere, vendere aut alienare per nos aut successores vel officiarios nostros, presentes aut posteros, quoscunque et cujuscunque auctoritatis vel eminencie extiterint, aliquatenus cogantur seu compellantur aut compelli possint, ac eciam absque eo quod vobis nostrisque successoribus et officiariis, presentibus vel futuris, aliquam propter hoc financiam solvere teneantur aut ad solvendum compellantur, quam financiam et quodcumque aliud debitum, quam et quod nobis, occasione premissorum, deberi posset quoquo modo, quictamus et eisdem thesaurario, decano et capitulo remittimus per presentes. Volumus tamen quod, premissis mediantibus, ipsi thesaurarius, decanus et capitulum teneantur predictas missas perpetuo facere celebrari et nostram super hoc ordinacionem inviolabiliter observare, absque quod aliam recompensacionem à nobis seu nostris successoribus requirere valeant sive possint. Quapropter dilectis et fidelibus gentibus compotorum nostrorum, senescallo Pictavie ceterisque justiciariis et officiariis nostris, et eorum loca tenentibus, presentibus et futuris, et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, mandamus districtius injungendo quatinus dictos thesaurarium, decanum et capitulum eorumque in dicta ecclesia successores, nostris presentibus gracia et amortisacione uti et gaudere paciffice faciant et permittant, constitucionibus, ordinacionibus et statutis, factis vel faciendis in contrarium, non obstantibus quibuscunque. Quod ut firmum et stabile permaneat in futurum, presentes litteras nostri sigilli appensione fecimus roborari. Salvo in aliis jure nostro et in omnibus quolibet alieno. Datum Parisius, mense augusti anno Domini m° ccccmo quinto. — Per dominum ducem. Ebrart

Expedita in Camera compotorum Bicturis dicti domini ducis Bicturicensis, ex ordinacione reverendi patris domini episcopi PictavensisItier de Martreuil, évêque du Puy et ensuite de Poitiers (1395 à 1405), chancelier de Jean duc de Berry. (Gallia christ., t. II, col. 1197.), cancellarii ipsius domini ducis et in dicta camera presidentis, et dominorum compotorum ibi, sine financia, de consensu thesaurarii, et in eadem registrata in libro Memorialium hujus temporis, folio xxxii°, die decima julii m° ccccmo vito. Viaut.

Et licet ipsi supplicantes, virtute litterarum prescriptarum, possessionibus, redditibus et aliis rebus prefatum avunculum nostrum ducem Bicturie, eisdem concessis et admortisatis, usi fuerint et gavisi paciffice per longum temporis spacium, nichilominus quidam commissarii et officiarii carissimi quondam domini genitoris nostri voluerunt possessiones predictas ad manum regiam, tamquam non admortisatas, ponere et a dictis supplicantibus financiam propter hoc exigere, dubitantque in futurum in eisdem ampliusturbari, nisi per nos de nostra speciali gracia eisdem benigne succurratur, prout dicunt supplicantes predicti, illam a nobis humiliter requirendo. Quocirca nos, pre- missis considerans, eorum supplicacioni annuere cupientes, prefatis thesaurario, decano et capitulo dicte ecclesie Beatissimi Hilarii Majoris Pictavensis, et eorum successoribus, causis predictis et eciam ut nos, necnon predecessores et successores nostri, precium et oracionum, que in dicta ecclesia fieri contigerit in futurum, participes fieri mereamur, concessimus et concedimus quatinus redditus, terras et possessiones, per ipsos acquisitas seu acquirendas, extra feodum et justiciam, usque ad valorem ducentarum librarum Turonensium annui redditus, ad opus predictum, perpetuo tenere et possidere valeant atque possint paciffice et quiete, tamquam admortisatas et Deo dedicatas, prout et quemadmodum per prefatum avunculum nostrum eisdem fuit concessum ; et ipsas, in quantum opus est, eisdem admortisavimus et amortisamus, de gracia speciali, plena potestate et auctoritate regia, per presentes, absque eo quod eas extra manus suas ponere nec propter hoc nobis nec successoribus nostris aliquam financiam solvere cogantur quoquo modo, et quam financiam nos, causis predictis, eisdem supplicantibus donavimus et quictavimus, damusque et quictamus de nostra ampliori gracia per presentes ; ordinacionibus ad hoc contrariis non obstantibus quibuscunque. Earum serie, dilectis et fidelibus gentibus compotorum nostrorum et thesaurariis Parisius, senescallus Pictavensi et Xantonensi ceterisque justiciariis et officiariis nostris, seu eorum loca tenentibus, presentibus et futuris, et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, damus in mandatis quatinus prefatos supplicantes et eorum successores in dicta ecclesia nostris presentibus concessione, admortisacione et gracia uti et gaudere paciffice faciant et permittant, nil in contrarium fieri permittendo, sed secus facta, si que sint aut fient, ad statum pristinum reducendo seu reduci faciendo indilate. Et ut premissa perpetua stabilitate perdurent, presentes manu nostra signavimus et eisdem sigillum nostrum apponi fecimus. Jure nostro in ceteris et in omnibus quolibet alieno semper salvis. Datum Ambasie, in mense julii anno Domini m° ccccmo lxiii°, et regni nostri tercio.

Ainsi signé : Loys. Per regem, comite BolonieBertrand VI de La Tour, comte d'Auvergne et de Boulogne, servit Charles VII au siège de Pontoise en 1441, le suivit en Gascogne l'année suivante, participa à la prise de Tartas, puis au siège de Châtèau-Gaillard en Normandie, à la bataille de Formigny, le 15 avril 1450, à la prise de Caen et à celle de Cherbourg, aux mois de juin et de juillet de la même année. Il fut lieutenant du duc de Bourbon en 1468, fît hommage en 1477 à Louis XI pour le comté de Boulogne, qu'il lui céda depuis, en échange du comté de Lauragais. Il mourut, le 26 septembre 1494, au château de Saint-Saturnin. (Le P. Anselme, Hist. généal., etc., t. IV, p. 530.) dominis Du Lau et de BellovisuLes seigneurs du Lau et de Beauvoir, cf. ci-dessus, p. 299, note 2, et 394, note 1., magistro Roberto PoitevinRobert Poitevin, conseiller et médecin de Charles VII, trésorier du chapitre de Saint-Hilaire-le-Grand, né vers 1390, mort le 26 juillet 1474. Voir la notice qui lui a été consacrée, dans notre précédent volume, p. 126, note. et aliis presentibus. De La Loère. — Visa.

MCCCLXXXVIII Décembre 1463

Lettres portant exemption, en faveur des vingt-cinq échevins nobles de Poitiers, de tout service militaire en dehors de ladite ville.

AN JJ. 199, n° 121, fol. 73 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de noz chers et bien amez les vingt cinq eschevins nobles de nostre ville et cité de Poictiers, contenant que nostre maire de ladicte ville, qui est l'un d'eulx, [et] eulx avec luy sont tenuz et obligez de faire le guet et garde chascun jour par toute ladicte ville, et de eulx armer et avoir la garde d'icelle toutes et quantes foiz que besoing en est, en quoy faisant ilz exposent leurs corps et biens comme les autres nobles de nostre royaume, et jasoit ce que à ceste cause ilz soient et doyent estre en ce faisant raisonnablement francs, quictes et exemps el deschargez de aller et suyvir les guerres autre part et de eulx trouver à icelles comme les autres nobles de nostredit royaume, à ce mandez par noz bans et arrière bans, et non obstant ilz doubtent que, à l'occasion de ce que aucuns d'eulx se y sont trouvez le temps passé et s'i sont armez et ont suy les guerres, comme les autres nobles de nostredit royaume, que s ilz n'y aloient doresenavant, armoient et ne se trouvoient à noz bans et arrière bans, que nostre procureur ou autres voulsissent ou temps avenir pretendre contre eulx avoir forfaiz leurs fiefz ou biens, ou qu'ilz ne joissent de leur previllège de noblesse à eulx octroié par noz predecesseurs roys de France et par nous confirméLes lettres conférant la noblesse aux maires et échevins de Poitiers remontent à Charles V et portent la date du 9 décembre 1372 ; elles sont, imprimées dans notre tome IV (XIX des Arch. hist, du Poitou), p. 233-236. Elles ont été confirmées à chaque renouvellement de règne; la ratification de Louis XI est du mois de mai 1463. (Cf. ci-dessus, p. 417.) ou autre grant prouflit ou avantaige à l'encontre d'eulx, se nostre grace ne leur estoit sur ce impartie ; en nous humblement requerant que, attendu qu'ilz sont continuellement occuppez à la garde de nostre dicte ville el cité, qui est l'une des principalles villes de nostredit royaume, et que en ce faisant ilz sont tousjours en nostre service, il nous plaise les exempter à tousjours de aler ne envoier en nosdictes guerres et de eulx armer ne trouver à noz bans et arrière bans, et sur ce leur impartir nostredicte grace. Pour quoy nous, ces choses considerées, ausdiz supplians, pour ces causes et consideracions et autres à ce nous mouvans, avons octroié et octroyons, voulons et nous plaist qu'ilz soient et demeurent à tousjours mès, pour eulx et leurs successeurs, exemps, quictes et deschargez de aler et envoyer à noz guerres et armées et de eulx trouver et obeir à noz bans et arrière bans, par nous et nosdiz successeurs roys de France faiz et à faire, pour quelconque cause ou occasion que ce soit, et lesquelz nous en avons à tousjours exemptez et deschargez, exemptons et deschargeons, pour nous et nosdiz successeurs roys de France, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces pré sentes, et de eulx armer hors nostredicte ville et cité de Poictiers, fors pour la garde et seureté de ladicte ville et des habitans en icelle. Et quant à ce imposons scillence perpetuel à nostre procureur et à tous autres, presens et advenir. Si donnons en mandement, par cesdictes presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans ou commis, presens et avenir, et à chascun d'eulx, si comme à lui appartendra, que lesdiz supplians et chascun d'eulx facent, seuffrent et laissent joir et user plainement et paisiblement de noz presens grace, exempcion et octroy, sans pour ce les molester ou travailler ne souffrir estre [molestez] ou travaillez, ores ne pour le temps avenir, en corps ne en biens, en aucune manière ; mais se leurs corps ou biens sont ou estoient pour ce prins ou empeschez, si les mettent ou facent mettre incontinent et sans delay à plaine delivrance. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Sauf toutesvoyes en autres choses nostre droit et l'autruy en toutes. Donné à Eu, ou mois de decembre l'an de grace mil iiiie lxiii, et de nostre règne le tiersL'original de ces lettres est conservé aux Archives de la ville de Poitiers, A 26 ; le texte en a été imprimé dans le grand recueil des Ordonnances des Rois de France, in-fol., t. XVI, p. 153..

Ainsi signé : Par le roy, les sires du Lau et de Bazoges

Nous ne savons si Renaud Girard, seigneur de Bazoges-en-Pareds, conseiller, maître d'hôtel et ambassadeur de Charles VII, qui a été l'objet d'une notice développée dans notre précédent volume (p. 218219, note), vivait encore à cette époque, ou s'il s'agit de son successeur à la seigneurie de Bazoges, Jean Girard. Ce dernier est beaucoup moins connu et à défaut de généalogie de cette famille, on ne peut savoir avec certitude s'il était fils de Renaud, ce qui est toutefois vraisemblable. Jean Girard, écuyer, seigneur de Bazoges, réclamait en 1473 la seigneurie de Ciré, les port et passage du Gué-Charraut, les cens et revenus de la Jarrie, qui avaient été adjugés à feu son père, sur Jean de Peyré et ses héritiers. Pendant le procès, Jean de Peyré fut victime d'un meurtre, dont furent reconnus coupables Jean Béchet, sr de Genouillé, Savary Girard, écuyer, et deux autres. Ceux-ci obtinrent des lettres de rémission de Charles duc de Guyenne et les présentèrent au gouverneur de la Rochelle, pour les faire entériner ; puis appel dudit gouverneur fut relevé aux Grands Jours de Guyenne. Le frère du roi étant mort et la Guyenne réunie à la couronne, l'appel fut dévolu au Parlement. Les quatre filles de Jean de Peyré étaient opposantes à l'exécution desdites lettres ; l'ainée Jeanne était mariée à Guillaume Acquelet (aliàs Achlet, Acquet) ; les trois autres, Marguerite, Annette et Catherine étaient célibataires. En attendant qu'il fût statué sur la rémission, le seigneur de Bazoges, qui ne paraît pas avoir trempé dans le meurtre, obtint de la cour un mandement prescrivant à Jean Burdelot, conseiller, de faire reprendre les fruits et revenus de Ciré et autres ci-dessus aux héritiers de Peyré, qui s'en étaient emparés en usant de violence, et de les restituer aux commissaires chargés d'administrer les biens litigieux mis sous la main du roi, le 18 juin 1473. (Arch. nat., X2a 39, aux dates des 8 avril, 25 mai, 3 et 22 juin, 13 juillet 1473; et X2a 40, fol. 65.) Le 16 mai 1481, le seigneur de Bazoges, Moricq, Chevehon, etc., était Joachim Girard; l'on a de lui, à cette date, un aveu rendu au roi pour la terre et seigneurie d'Anguitart, la tour et les moulins de Chasseneuil. (Id., P. 1145, fol. 157 v°.)

et autres presens. Toustain. — Visa. Contentor. J. Duban.

MCCCLXXXIX 19 décembre 1463

Lettres d'abolition accordées, moyennant douze mille écus d'or, à Jean Barbin, sr de Puygarreau, détenu prisonnier et poursuivi judiciairement pour avoir commis des abus de pouvoir en sa charge d'avocat général au Parlement, et tenu des propos injurieux contre le roi.

AN JJ. 199, n° 74, fol. 46 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion des parens et amys charnelz de maistre Jehan Barbin, licencié en loix, seigneur de Puygarreau

Jean Barbin, seigneur de Puygarreau, avocat du roi au Parlement, mari de Françoise Gillier, né en 1406, mort en 1469. Aux renseignements relatifs à ce personnage qui se trouvent dans notre précédent volume (p. 288, note), on peut en ajouter deux ou trois autres, dont le premier intéresse surtout un autre personnage dont il est aussi question par deux fois dans ledit volume (p. 296 et s., 355 et s.). C'est un mandement du Parlement au sénéchal de Poitou, daté du 20 novembre 1464, donné à la requête de Guillaume Siet, des environs de Châtellerault, de sa femme et de ses enfants. Ce Guillaume était laboureur, quand, vingt ans auparavant, des revers de fortune lui firent perdre tous ses biens et le contraignirent de quitter le pays. Depuis un an il était venu demeurer à Poitiers, où il obtint l'office de héraut crieur de la ville. Plusieurs de ses créanciers le menaçant chaque jour de le faire emprisonner, il leur abandonna, par acte passé devant le sénéchal, tout ce qu'il pouvait avoir encore en sa possession, et fit notifler cette cession et l'inventaire qui l'accompagnait à tous ceux auxquels il était redevable, particulièrement à Jean Barbin. Néanmoins Jean Pompon, receveur des exploits et amendes du Parlement, avait fait enfermer dans les prisons de Poitiers ledit Siet, pour une amende à laquelle il avait été condamné par arrêt de la cour. Depuis, en considération de sa pauvreté, remise entière lui avait été faite de cette amende, et il aurait été remis en liberté, si Barbin n'avait fait opposition à son élargissement. Le sénéchal renvoya au Parlement la connaissance de l'affaire et maintint Siet en prison jusqu'au jugement. C'est alors que la cour manda à celui-ci de lui rendre la liberté, après s être assuré qu'il était poursuivi au civil seulement et qu'il avait réellement fait cession de tout son avoir à ses créanciers. (Arch. nat., X2a 34, fol. 56.) Après la mort de Jean Barbin, Françoise Gillier, sa veuve, conclut avec les chanoines de Saint-Hilaire de Poitiers un accord en vertu duquel elle paya 50 écus d'or pour droits de lods et vente de l'hôtel du Dognon, dépendant de la seigneurie d'Ouzilly, que son mari avait acquis de Pierre Mestivier. Puis Joachim Gillier, seigneur du Puygarreau, vendit cet hôtel à Nicole Bourgeau, femme de Jean Goeslard, marchand et bourgeois de Poitiers. (Arch. de la Vienne, fonds du chapitre de Saint-Hilaire, G. 927.)

, contenant que puis certain temps ença, à la requeste de nostre procureur, certaines informacions ont esté faictes à rencontre dudit Barbin, au moien desquelles l'on l'a chargé de plusieurs choses et mesmes que, soubz umbre de ce qu'il a longtemps esté conseiller et advocat general de feu nostre très chier seigneur et père, que Dieux absouille, en sa court de Parlement, et par le moyen de l'auctorité, port et faveur qu'il avoit, tant entour nostredit feu seigneur et père que à cause de sondit office d'avocat, il a faictes plusieurs acquisicions de droiz cessez à luy faiz de diverses personnes, moyennant lesquelz droiz cessez il avoit donné plusieurs grandes et indeues vexacions et travaulx à plusieurs de noz subgez et les tenoit longuement en procès, et tellement que par ces moyens il est venu à ses fins, et autrement en plusieurs et diverses manières il a donné plusieurs troubles et fait de grans tors à nosdiz subgez, semblablement avoit fait plusieurs contractz usuraires, frauduleulx et deceptifz, aussi soubz umbre de sondit office avoit fait plusieurs abuz de justice en diverses manières, prins de ceulx qui avoient eu à besongner à luy plusieurs dons que l'on pourroit dire corrumpables, et fait plusieurs autres choses que nostre procureur dit estre frauduleuses et deceptives, et en icelles faisant ledit Barbin avoit commis graves crimez et deliz. En oultre a l'on chargé ledit Barbin que depuis nostre nouvel advenement à la couronne, à l'occasion de la desplaisance qu'il avoit dont avions disposé de sondit office, il a par legiereté de courage ou autrement dictes et proferées certaines parolles à nostre charge et desplaisance, et que mesmes, avant que venissons à la couronne, il en avoit dictes les aucunes. A l'occasion desquelles choses et au moyen desdietes informacions sur ce faictes par certains noz commissaires sur ce depputez, tous les biens, tant meubles que immeubles, dudit Barbin ont esté prins et mis en nostre main et sa personne constituée et detenue en prison fermée, et sont tous ses diz biens, tant meubles que immeubles, traictez et gouvernez soubz nostre dicte main par divers commissaires ; lesquelz biens, pour ce que au gouvernement et administracion d'iceulx n'y est pas, comme l'on dit, quant ad ce garde, se pourroient consumer et gaster. Pour laquelle cause nous aient iceulx supplians humblement supplié et requis qu'il nous plaise avoir consideration au fait dudit maistre Jehan Barbin et à son ancien aage, à la foiblesse et indisposition de sa personne, et en ce faisant lui quicter, pardonner et abolir tout ce qu'il pourroit avoir offencé envers nous et justice, en nous offrant par aucuns desdiz supplians paier la somme de douze mil escus d'or à present aians cours, pour ledit Barbin, au lieu de l'amende en laquelle il pourroit estre condampné envers nous par la fin dudit procès, s'il tiroit oultre, et sur ce lui begnignement impartir nostre grace. Pour ce est il que nous, ces choses considerées et que par la longueur dudit procès lesdiz biens dudit maistre Jehan Barbin se pourroient consumer et gaster, sans ce qu'ilz tournassent à prouffit à nous et à luy, aians aussi consideracion à sa viellesse et à l'indisposicion de sa personne, voulans en ceste partie user de benignité et grace envers luy, et misericorde estre preferée à rigueur de justice, audit maistre Jehan Barbin, inclinans à la supplicacion et requeste de sesdiz parens et amis, et moyennant ladicte somme de xiim escuz d'or courans à present, à laquelle somme sesdis parens et amis ont composé avec nous, et de laquelle somme sommes deuement asseurez [et] tenons pour contens ; pour ces causes et consideracions et autres ad ce nous mouvans, avons quicté, remis, pardonné et aboli et par la teneur de ces presentes, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, quictons, remettons, pardonnons et abolissons entierement tout ce qu'il a et peult avoir mesprins envers nous et justice, tant pour avoir acquis lesdiz droiz cessez, prins dons corrumpables, soubz umbre et coulleur de justice et autrement, comme pour avoir dictes et proferées lesdictes parolles à nostre charge et desplaisance, et generallement tous autres maulx, crimes, maleficez et deliz qu'il a et peut avoir faiz, diz, commis et perpétrés, en quelque manière ne pour quelque cause ou occasion que ce soit, et de quelque qualité ou gravité qu'ilz soient, ensemble toute paine, offence corporelle, criminelle et civile en laquelle il pourroit pour occasion de ce estre encouru envers nous et justice, de tout le temps passé jusques à present, excepté murdre d'aguet apensé, forcement de femmes, boutement de feu et sacrelege, tout ainsi que si lesdiz cas estoient nommement desclarez et exprimez en cesdictes presentes, en metant au neant tous procès sur ce faiz contre ledit Barbin, ensemble les appeaulx que ledit Barbin, sa femme ou autres ses procureurs ou entremeteurs pourroient avoir sur ce faiz et interjectez, avec tous autres explois qui pourroient avoir esté faiz pour occasion des choses dessusdictes et leurs deppendances, lesquelz nous y avons mis et metons du tout [au neant], en tant que touche l'interest de nous et de justice, par cesdictes presentes. Sy donnons en mandement, par cesdictes presentes, à noz amez et feaulx conseillers les gens de nostre Parlement, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc., que ledit maistre Jehan Barbin ilz facent, etc., joir et user, etc., sa personne et sesdiz biens luy mettent ou facent mettre sans delay à plaine delivrance, et aussi à luy rendre compte et reliqua de l'administration de ses diz biens, contraignent ou facent contraindre ceulx qui ont esté commis au gouvernement, leurs gaiges ou sallaires raisonnables premierement deduiz, etc. Donné à Saint Riquier en PoitouSic. Le scribe par distraction a écrit « Poitou » au lieu de « Ponthieu »., le dix neufviesme jour de decembre l'an mil iiiie lxiii, et de nostre règne le troisiesme.

Par le roy, messire Charles de MelunCharles de Melun, chevalier, seigneur de la Borde, Nantouillet, ele., baron de Landes, chambellan du roi, bailli de Sens, capitaine de Vincennes et gouverneur de la BastilIe. Il jouit pendant quelques années de toute la faveur de Louis XI, qui érigea sa terre de Landes en baronnie, au mois de juin 1462 (anc. mém. m. de la Chambre des comptes, fol. 16), lui donna, en août 1463, la confiscation des biens du comte de Dammartin, le fit son lieutenant général dans le royaume et grand maître de France, en 1465 ; il eut pour un temps l'autorité sur toutes les armées de France, et il ne lui manquait que le titre de connétable, dont il faisait les fonctions. Cette faveur ne fut pas de longue durée. Charles de Melun, accusé d'intelligence avec les ennemis du roi, tomba en disgrâce ; son procès aboutit a une condamnation capitale et il eut la tête tranchée sur le marché d'Andely, le 20 août 1468. (Le P. Anselme, Hist. généal., t. VIII, p. 381.) et autres presens. J. de La Loère. — Visa. Contentor. J. Duban.

MCCCXC Décembre 1463

Rémission octroyée à Guyon de Vaucelles, écuyer, meurtrier de frère Vincent Fèvre, prieur de Soudun. Ils s'étaient pris de querelle au sujet d'une femme mariée dont ils partageaient les faveurs.

AN JJ. 199, 11° 69, fol. 43 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de Guyon de VaucellesParmi les membres de la famille de Vaucelles vivants au XVe siècle, on n'en trouve point qui ait porté le prénom de Guy ou Guyon, dans la généalogie publiée par M. Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou. 1re édit., t. II. p. 777-779. D'Hozier donne aussi la filiation de deux familles du même nom, dont l'une fixée dans le Loudunais, mais il ne la fait commencer qu'au XVIe siècle. (Armorial général., in-fol., reg. 1er et Ve.) On voit plus bas que le père de Guyon était possesseur de l'hôtel de « la Sixtière », la Citière, fief mouvant du marquisat de Clairvaux. L'abbé Lalanne a imprimé une liste des seigneurs de cet hôtel, qui de 1309 à 1537 ne cessa d'appartenir aux Vaucelles, suivant laquelle Guyon ne pouvait être qu'un puîné de Simonde Vaucelles, auquel Jean d'Harcourt, vicomte de Châtellerault, permit en 1438 de fortifier la Citière, et qui avait épousé Jeanne de La Tousche, fille de Nicolas-Joseph, seigneur de la Tousche-d'Avrigny, la Varenne, etc., et de Louise de Mauroy. (Hist. de Châtelleraud et du Châtelleraudais, in-8°, 1859, t. I, p. 384.) escuier, aagié de xxiii. ans ou environ, contenant que, le samedi troisiesme jour de ce present moys de decembre, ledit suppliant et frère Vincent Fèvre, prieur de la chappelle de Soudain en la parroisse de Saint Pierre de Savigné soubz Faye la Vyneuse, diacre de l'ordre de Saint Benoist, eurent noize, debat et discencion ensemble, pour occasion de Polite, femme espouze d'un nommé Jehan Brochart, avec laquelle femme ledit suppliant trouva ledit prieur, le samedi troisiesme jour dudit moys, en une roche ou cave estant au bout des vignes d'icelluy Brochart, laquelle femme ledit suppliant frappa et luy dist qu'elle s'en alast. Et ce voyant, ledit prieur dist audit suppliant qu'il estoit villain de ravoir espié et guecté et qu'il n'avoit pas fait comme gentilhomme ; et ouquel lieu ilz eurent plusieurs parolles injurieuses et noizeuses. Et ce nonobstant, se departirent sans faire autres griefz. Et le landemain quatriesme jour dudit moys, environ dix heures, ledit prieur et ung nommé Jehan Belin, prebstreEst-ce ce Jean Belin qui devint chanoine de Saint-Jean de Ménigoute et qui est nommé dans un acte d'échange conclu, le 28 août 1467, entre le chapitre et Jean Tudert, président au Parlement de Bordeaux? (A. Richard, Invent. des arch. du château de La Barre, t. II, p. 418.) serviteur de ladicte chappelle et prieuré, alèrent en l'ostel dudit Brochart, et illec trouvèrent icelui suppliant au dedans de ladicte maison, en laquelle ledit chappelain entra le premier, et après luy ledit prieur. Et quant ilz furent entrez, ilz trouvèrent ledit suppliant qui tenoit en sa main ung grant couteau tout nu, lequel incontinant, sans riens demander audit chappelain, prinst ledit prieur au collet de sa robe et en le lenant il jura qu'il l'occiroit. Et lors ledit prieur se recula hors ladicte maison et dist audit suppliant qu'il le laissast et qu'il ne luy demandoit riens. Et illec eurent plusieurs parolles injurieuses, et après entra ledit prieur de rechief au dedans de la maison dudit Brochart, et ledit suppliant entra après luy, tenant sondit couteau en sa main tout nu, en disant qu'il occiroit ledit prieur. Et adonc iceluy prieur tira ung grant couteau qu'il avoit soubz sa robe et print une petite celle de boys en sa main et dist qu'il se deffendroit. Et pour celle heure, par le moyen dudit chappelain, se departirent sans frapper. Et au departir de la dicte maison dudit Brochart, iceluy prieur et ledit chappelain, se mirent au chemin, par lequel l'en va de ladicte maison à Avrigné, et comme ilz eurent cheminé l'espace de deux getz de pierre ou environ, ledit suppliant chemina et ala après eulx, et eurent lesdiz suppliant et prieur de rechief plusieurs parolles et moult injurieuses ensemble, et de rechief ledit chappelain les departy sans autres griefz. Et lors ledit suppliant et chappelain allèrent à l'ostel de la Sixtière, appartenant au père dudit suppliant, et illec dignèrent ; et ledit prieur s'en retourna et ala où bon luy sembla. Et incontinant après digner, icelui suppliant et ung jeune homme aagié de xxv. ans ou environ, natif du païs de Normandie, lequel icelui suppliant advouoit son parent, se departirent dudit hostel de la Sixtière, disant qu'ilz aloient à l'esbat aux lièvres. Et s'en ala ledit chappelain tantost après eulx et les trouva ou chemin ; et se mist ledit chappelain ou chemin le premier devant eulx. Et allèrent ledit suppliant et sondit parent après ledit chappellain, et avec eulx alla ung jeune enfant, aagié de xv. à xvi. ans ou environ, nommé Simonnet de VaucellesLe jeune Simonnet de Vaucelles obtint aussi, à la même date, des lettres de rémission. (JJ. 199, n° 68, fol. 42.) Les faits y sont exposés exactement dans les mêmes termes qu'ici, de sorte qu'il suffit de publier l'un de ces deux textes., frère dudit suppliant, disant qu'il alloist après eulx à la chasse, et allèrent jusques devant la porte dudit prieuré, touchant au chemin. Et illec ledit chappellain trouva ung petit enfant, son neveu, auquel il demanda les clefz dudit prieuré, et ledit enfant lui dist que ledit prieur les avoit et qu'il estoit chieux ung nommé Regnaut Alain ; lequel suppliant et son dit parent, oyans les parolles dudit enfant, incontinant allèrent chex ledit Regnaut Alain, et ledit Simonnet après eulx, et aussi ledit chappelain, où ilz trouvèrent ledit prieur. Et lesdiz prieur et chappellain tantost se departirent de l'ostel dudit Alain, pour aller oudit prieuré, et lesdiz suppliant et son parent allèrent après eulx jusques à la porte dudit prieuré de dehors, ledit Simonnet allant après eulx. Et ledit prieur s'appuya contre ladicte porte et n'y fut guères, car ledit chappellain le mena jusques soubz le portal de l'entrée de la chappelle dudit prieuré, et ledit suppliant et sondit parent poursuirent ledit prieur, ledit Simonnet estant hors ladicte porte ou chemin, jouant avec ledit petit enfant, neveu dudit chappellain. Et audit lieu, près ledit portal, eurent de rechief lesdiz suppliant et prieur plusieurs parolles rigoreuses et injurieuses ; auquel lieu ledit suppliant dist audit prieur telz mots en substance : « Tu m'as injurié et appellé vilain. Veulz tu maintenir les parolles que tu as dictes de moy ? » Et ledit prieur lui dist qu'il n'avoit riens dit qui ne fust bien dit, et en disant lesdictes parolles, icelui suppliant tira sondit couteau et ledit prieur tira semblablement le sien. Et en ce faisant, le parent dudit suppliant s'approcha d'eulx, tenant une gaulle blanche en sa main, convenable à chasser auxlièvres, pour aider audit suppliant, et frappa ledit prieur de ladicte gaule. Et lors s'en sailli ledit prieur hors ladicte porte, tenant en sa main sondit couteau, lequel prieur lesdiz suppliant et son parent poursuirent. Et voyant icelui prieur qu'ilz le poursuioient, il print une pierre et la gecta contre eulx, et ilz en gectèrent semblablement une aultre ou deux. Et adonc ledit prieur fouyt, cuydant entrer en la roche et clemourance d'un nommé Gillet Alain, mais en fuyant il cheut envers, tenant sondit couteau en sa main. Et tantost ledit suppliant et sondit parent se gectèrent dessus ledit prieur ; et aussi ledit Simonnet courut comme son frère et son parent, sans ce qu'il eust baton ne glaive ; et à icelui prieur ainssi cheu disoient les dessusdiz : « Moygne, baille le cousteau », et illec se debatirent et s'efforcèrent d'avoir le cousteau dudit prieur. Et en ce faisant, ledit suppliant tenoit tousjours son cousteau en sa main, et pareillement ledit prieur tenoit le sien, et illec en ce conflit, ledit prieur eut ung cop mortel en la cuysse senestre, trois dois au dessus du genoil, par le dedans tout au travers de ladicte cuisse. Et ledit Simonnet dist à ceulx qui alloient audit debat qu'ilz les laissassent faire et qu'ilz n'en approchassent point, pour doubte qu'ilz ne voulsissent nuyre à sondit frère. Duquel cop ainsi baillé audit prieur, aucuns jours après il est allé de vie à trespas. A l'occasion duquel cas ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s'est absenté du païs et n'y oseroit jamais converser ne repperer, se nostre grace et misericorde ne luy estoit sur ce impartie. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice,audit suppliant avons quicté, remis et pardonné, etc. Sy donnons en mandement, par cesd ictes presentes, aux seneschal de Poictou et bailli de Touraine, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Abbeville, ou mois de decembre l'an de grace mil iiiie lxiii, et de nostre règne le troisiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la rellacion du conseil. De Villechartre. — Visa. Contentor. J. Duban.

MCCCXCI 26 décembre 1463

Lettres portant cession en toute propriété à Jean Mourraut, conseiller du roi, du Bois de la Marche en la châtellenie de Lusignan, en échange de sa maison de Poitiers qu'il louait jusque-là à la Monnaie établie dans ladite ville.

AN JJ. 199, n° 254, fol. 149 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Lois, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, que comme puis aucun temps ença nostre amé et feal conseiller maistre Jehan MourrautSur ce personnage, voy, ci-dessus, p. 305, note. licencié en loiz, bourgois de nostre ville de Poictiers, nous eust très instamment requis que nostre plaisir feust lui rendre et mettre au delivre certaine maison à lui appartenant, scituée et assise en nostre ville de Poictiers, en laquelle, dès longtemps a, nostre MonnoyeLe 8 mars 1425 n. s., fut mise en vente aux enchères publiques, à Poitiers, la maison de la Vieille Monnaie, sise rue de la Coutellerie, avec les vergers qui en dépendaient. Elle fut adjugée à Jean Godimeau, moyennant 66 sols tournois de rente, payable chaque année à la receue ordinaire de Poitiers. Au mois de mai 1426 l'acquéreur céda et transporta à Maurice Claveurier, lieutenant du sénéchal de Poitou, ses droits sur l'immeuble en question, et la Chambre des comptes, par arrêt du 19 novembre suivant, ratifia et enregistra cette transaction. Puis, par lettres patentes données à Poitiers, le 29 novembre 1427, Charles VII confirma tous les actes qui précèdent, y compris le procèsverbal d'adjudication, et permit à Maurice Claveurier d'installer dans la maison de la Vieille-Monnaie des étuves publiques, nonobstant qu'il fût ordonné par la sentence d'adjudication que l'adjudicataire serait tenu d'y faire aménager des logements propres «à exercer marchandise ». (Arch. nat., P. 1905 1 cote 5293.) C'est probablement depuis cette époque que l'atelier monétaire fut transféré dans la maison louée aux Mourraut, sur le Vieux-Marché. est tenue, batue et excercée, tant du vivant de feu nostre très chier seigneur et père, que Dieu absoille, que depuis nostre advenement à la couronne, et aussi que le voulsissions faire paier du louage de ladicte maison, qui lui est deu de plusieurs années, montant à la somme de vie escuz ou environ, ou que nostre plaisir feust le récompenser desdiz maison et louage. Et pour ce que dès lors nous eleusmes de bailler ladicte récompense à nostredit conseiller et de unir et joindre sadicte maison à nostre demaine de Poictou, certains articles furent faiz et accordez entre nous et icellui nostre dit conseiller touchant l'eschange de ladicte maisonPar lettres données à Pontoise, le 7 septembre 1463, Louis XI commit maître Mathurin Arembert, son procureur en Poitou, pour passer en son nom avec ledit Jean Mourraut l'acte d'échange visé ici, en la cour du sceau aux contrats établi à Poitiers. Cet acte qui est conservé au Trésor des chartes, avec la commission du procureur du roi, porte la date du 13 octobre suivant. Voici comment le bois cédé par le domaine royal en récompense de la maison de Mourraut et des 600 écus d'arrérages de loyer qui lui étaient dus, y est décrit : « Ung bois de menue taillé estant en la chastelenie de Lezignen, appartenant audit seigneur roy, appellé le Boys de la Marche, en toute sa grandeur, largeur et estandue, tenant par l'un des boutz aux terres de la Mothe [sur-Croutelles], les bonnes entre déulx, de l'autre part aux landes de la Tombe-Berart, et par l'un des coustez aux terres et boys de la Fontaine le Conte, d'autre part aux terres et boys de la Raynère (la Reinière) et du prieur de Ligugé, ainsi que le grant chemyn porte, qui va droit de Croustelles à l'estang de la Tombe-Berart, pour icelui boys avoir, tenir, possider, copper, vendre et explecter par ledit maistre Jehan Mourraut et les siens, en tout droit de justice et jurisdicion, haulte, moyenne et basse, sans riens y retenir ne reserver, fors le ressort et souveraineté en cas d'appel, et les foy et hommaige que ledit maistre Jehan Mourraut et les siens en feront au roy nostredit seigneur et à ses hoirs, par et soubz l'ommaige qu'ilz sont tenuz faire à cause et pour raison de son houstel et seigneurie de la Mothe, tenue dudit seigneur à cause de son chastel de Lezignen, etc. » (Original scellé, Arch. nat., J. 183, n°153.) L'acte d'échange du 7 septembre 1463 et les presentes lettres du 26 décembre 1463 furent enregistrées au Parlement, par arrêt du 7 juin 1464. (Arch. nat., X1a 8606, fol. 60 v°, 63.) par lequel eschange icelle maison, scituée et assise en nostredicte ville de Poictiers, ou lieu appellé le Viel Marché, tenant d'une part à la grant rue par où l'en va dudit Viel Marché à la porte de la Tranchée, et par derrière aux treilles du prieur de Saint Porchaire, avec les entrées, yssues, court et caves, jardins et une petite maison joignant à l'autre maison dessus dicte, ensemble toutes leurs appartenances et appendences quelzconques, franches et quictes de toutes charges, dont elles povoient estre chargées, nous devoient demourer pour nous et noz successeurs à tousjours perpetuelment et estre unies à nostredit demaine, et semblablement devions estre et demourer quictes de tout ce qui pouvoit estre deu desdictz louages. Et en récompense des- dictes choses, devions bailler, ceder, quicter, transporter et delaisserà nostredit conseiller ung bois demenue taillé à nous appartenant, situé et assis en nostre chastellenie de Luzignen, appellé le Bois de la Marche, en toute sa grandeur, largeur et estandue, plus à plain confronté et déclaré èsdiz articles, pour icellui bois avoir, tenir, possider, copper, vendre et exploicter par nostredit conseiller et les siens en tout droit de justice et juridicion haulte, moienne et basse, sans riens y retenir ne reserver, fors le ressort et souveraineté en cas d'appel et les foy et hommage que icellui nostre conseiller et les siens nous en feroient et à noz successeurs, par et soubz l'ommage que nostredit conseiller nous doit et est tenu de faire à cause et pour raison de son hostel et seigneurie de la MotheLa Mothe ou la Motte-sur-Croutelle, que Jean Mourraut avait obtenu la permission de fortifier, ci-dessus, p. 305. tenu de nous à cause de nostre chasteau de Luzignen. Et depuis, pour passer ledit eschange, pour nous et de nostre part, avecques icellui nostre conseiller et faire tout ce qui au cas appartenoit, eussions commis, ordonné et depputé, par noz autres lettres patentes, nostre amé et feal conseiller maistre Mathurin ArembertSur Mathurin Arembert et Jean, son père, voy. ci-dessus, p. 412, note., nostre procureur en nostredit païs de Poictou ; lequel Arembert, par vertu de ladicte commission et du povoir par nous à lui sur ce donné, ait [fait] et passé icelluy eschange avecques ledit maistre Jehan Mourraut, par la manière declarée ès diz articles, dont dessus est faicte mencion, et ainsi qu'il est plus à plain contenu ès lettres sur ce faictes et passées soubz le seel aux contractz de nostre dicte ville de Poictiers, ataichées à ces presentes, soubz le contreseel de nostre chancellerie ; lesquelles lettres nous aient esté présentées de la part dudit Mourraut, en nous requerant que voulsissions ratiffier le contenu en icelles. Et à ceste cause les avons fait veoir et visiter, et après ce que avons esté à plain informez que icellui eschange, dont dessus est faicte [mention, a esté faictMots omis par le scribe, suppléés par l'éditeur.] et passé selon le contenu èsdiz articles que avions premierement accordez ; nous, pour ces causes et autres à ce nous mouvans, avons eu et avons icellui eschange, ainsi qu'il est speciffié, contenu et declairé èsdictes lettres cy attachées, agreable et, de nostre certaine science, l'avons loué, approuvé, ratiffié et confermé, louons, approuvons, ratiffions et confermons par ces presentes. Si donnons en mandement, par ces dictes presentes, à noz amez et feaulx conseillers les gens tenans et qui tendront nostre court de Parlement, les gens de noz comptes et tresoriers, au seneschal de PoictouLe copiste par distraction a écrit « Pontieu» au lieu de Poitou. et à tous noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans, presens et advenir, et à chascun d'eulx, si comme à lui appartendra, que ledit eschange cy dessus declairé et lesdictes lettres qui en ont esté faictes et passées, ensemble ceste presente ratifficacion ilz entretiennent et gardent, et facent entretenir et garder de point en point, en faisant joir ledit maistre Jehan Mouraut et ses hoirs, successeurs et ayans cause plainement et paisiblement, à tousjours perpetuellement, dudit boys, par la manière et ainsi qu'il est contenu èsdictes lettres d'eschange, sans lui faire, mettre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné, ores ne pour le temps avenir, aucun destourbier ou empeschement au contraire. Car ainsi, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Abbeville, le xxvie jour de decembre l'an de grace mil iiiie lxiii, et de nostre règne le iiie.

Ainsi signé : Par le roy, le sire du Lau et autres presens. Bourré. — Visa. Contentor. D'Orchière.

MCCCXCII 30 décembre 1463

RémissionLe texte de ces lettres est très développé ; il suffit d'en donner la substance, d'autant que le mandement pour leur exécution est adressé aux sénéchaux de Limousin et de Saintonge, ce qui indiqué que Jean de Pérusse des Cars n'était pas établi en Poitou. octroyée à Jean de Pérusse, dit des Cars, écuyer, âgé de vingt-un à vingt-deux ans, fils d'Audouin de Pérusse, chevalier, et d'Aliénor de RoquefeuilleLa femme d'Audouin IV de Pérusse des Cars, sr de Saint-Bonnet, Saint-Ibars, Chambon,etc., est nommée par les généalogistes Hélène, et non Aliénor, de Roquefeuille. Jean était leur second fils et fut chef de la branche de Saint-Bonnet ; il devint sénéchal de Périgord et fut marié à Catherine de Lévis, fille d'Eustache, comte de Caylus. dont il eut un fils et deux filles. (Dict. des familles du Poitou, 1re édit., t. II, p. 505, 514.). Après avoir été échanson de la reine Marie d'Anjou, puis homme d'armes des ordonnances de la compagnie de SaintraillesPoton de Saintrailles, maréchal de France, mourut ie 7 octobre 1461., où il servit jusqu'à la mort de Charles vii, époque où le comte de ComingesJean bâtard d'Armagnac, surnommé de Lescun, comte de Cominges et de Briançonnais, maréchal de France, gouverneur du Dauphiné, lieutenant général du duché de Guyenne, premier chambellan de Louis XI, avait gagné les bonnes grâces de ce prince, lorsqu'il était encore dauphin. Par lettres du 4 octobre 1454, il en obtint l'office de maréchal de Dauphiné, puis, le 24 janvier 1457, la charge de gouverneur de cette province, au lieu de Louis de Laval, seigneur de Châtillon. Après la mort de Charles VII, le nouveau roi le pourvut de l'office de maréchal de France, par lettres du 3 août 1461, et le même jour, lui fit don du comté de Cominges. Dans cet acte, il est qualifié bâtard d'Armagnac, maréchal de France, gouverneur et lieutenant général du pays et duché de Guyenne. On conserve une lettre du maréchal de Cominges à Louis XI sur les opérations des troupes françaises en Navarre, datée de Pampelune, le 4 mars 1462. (Bibl. nat., ms. fr. 20485, fol. 91.) Il mourut en 1473, après le 1er juin. (Voy. le P. Anselme, Hist. généal., t. VII, p. 94.), maréchal de France, fut mis par le nouveau roi à la tête de cette compagnie, il était sous ce dernier capitaine à l'armée de CatalogneIl s'agit de l'armée de secours que Louis XI avait envoyée à Jean II, roi d'Aragon et de Navarre, dans sa lutte contre Henri IV, roi de Castille, en conséquence du traité d'alliance conclu à Sauveterre, par lequel le roi d'Aragon engagea à la France lo Roussillon et la Cerdagne pour la somme de 300.000 écus., au mois de septembre 1463, quand un gentilhomme de ses parents et amis, Guillot de Giraing, dit de Linars, homme d'armes de la compagnie du sire d'OrvalArnaud Amanieu d'Albret, sire d'Orval, troisième fils de Charles II d'Albret. (Voy. ci-dessus, p. 104, note 3.), fut assassiné par un archer de la compagnie du sire de Grussol, sénéchal de Poitou, nommé Grandjean. Emu et courroucé du meurtre de son ami, il frappa d'un coup d'épée le meurtrier, bien que celui-ci fût prisonnier, désarmé et sur le point d'être jugé pour ce crime. Le maréchal de Cominges, indigné de cette action, se porta l'épée haute sur Jean de Pérusse et l'en voulut frapper à son tour. Celuici para ce premier coup, mais ensuite il fut blessé à la tête, sans chercher à se défendre, pour ne pas manquer à la discipline. Mais, à la suite, il changea de compagnie et se mit sous l'enseigne du comte de FoixGaston IV, comte de Foix et de Bigorre, vicomte de Béarn. (Cidessus, p. 289, note 2.) espérant qu'un accord pourrait être ménagé entre son ancien chef et lui, ce qu'il ne put obtenir. Alors il quitta l'année, du congé du comte de Foix, et retourna auprès de la reine Marie, qu'il accompagna à Saint-Jacques de Compostelle et servit jusqu'au jour de sa mortMarie d'Anjou, femme de Charles VII, mourut dans l'abbaye des Châtelliers, le 29 novembre 1463.. Le maréchal de Cominges ne lui avait pas pardonné. Lorsque Jean de Pérusse fut privé de sa protectrice, il le fit ajourner par-devant lui et voulut le faire prendre au corps. Alors celui-ci adressa sa requête au roi et au conseil et obtint la rémission des cas ci-dessus déclarés. Abbeville en Ponthieu, le 30 décembre 1463.

AN JJ. 199, n° 234, fol. 137 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

MCCCXCIII Mars 1464

Lettres de légitimation données en faveur de Louis Perceval, homme d'armes de l'ordonnance dans la compagnie du sire de Crussol, sénéchal de Poitou, fils naturel de feu Olivier Perceval.

AN JJ. 199, n° 149, fol. 90 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Ludovicus, etc. Ad futuram rei memoriam. Regie liberalitatis clemenciam ad illos libenter extendimus et statum eorum liberali promovemus affectu, qui virtutum adjuti suffragiis digne sibi vendicant premia meritorum. Notum igitur facimus universis, presentibus et futuris, quod cum benè dilectus noster Ludovicus Perceval, vir armorum de ordinancia nostra sub conduetu et onere dilecti et fidelis consiliarii et cambellani nostri, domini de Crussol, senescalli Pictavensis

Louis, seigneur de Crussol et de Beaudiner, chevalier, fils de Géraud Bastet, seigneur de Crussol, et d'Alix de Lastic, était déjà en 1447 attaché à la personne du dauphin, fils de Charles VII, en qualité d'écuyer d'écurie ; il ne tarda pas à devenir conseiller et chambellan du même prince, qui lui fit épouser, par contrat du 22 juillet 1452, Jeanne de Lévis, dame de Florensac, fille unique de Philippe de Lévis et d'Isabeau de Poitiers. Possesseur d'une grande fortune, il prêta au dauphin une somme considérable pour payer une partie des frais de deux expéditions de Louis, l'une en Italie pour faciliter l'entrée de ce pays à l'année de son oncle René d'Anjou, l'autre en Bresse et en Bugey, pour contraindre le duc de Savoie, son beau-père, à renoncer à l'hommage du marquis de Saluces. En paiement de la somme de 16.360 écus qu'il devait à Louis de Crussol, le dauphin lui inféoda, par acte du 23 février 1455 n. s., la terre d'Etoile, qu'il venait de recouvrer sur le seigneur de Saint-Vallier. Il dut accompagner son maître dans sa retraité en Flandre, car le 31 octobre 1459 celui-ci ordonna de lui payer 200 écus, montant de divers prêts et de rachat de deux chevaux.

En récompense de ses nombreux services, Louis de Crussol devint, aussitôt après l'avènement de Louis XI au trône, grand panetier de France et bailli de Chartres, puis, peu de temps après, sénéchal de Poitou, capitaine des châteaux de Poitiers et de Niort, et gouverneur de Marans. M. Ledain dit qu'il succéda à Louis de Beaumont comme sénéchal du Poitou au mois de mars 1462 (Hist. de Bressuire, p. 306) ; mais l'on va voir que cette date doit être avancée de cinq mois, et, d'autre part, il semble que Joachim Rouault doive prendre place entre Louis de Beaumont et Louis de Crussol, et qu'il exerça les fonctions de sénéchal de Poitou pendant quelques mois seulement, bien qu'on ne puisse invoquer qu'un seul témoignage à l'appui de cette assertion. C'est un recueil d'analyses et extraits des anciens mémoriaux de la Chambre des comptes, où l'on voit qu'à l'avènement de Louis XI, ledit Rouault était de novo senescallus Pictavensis (anc. mém. L, fol. 165), et en même temps que Crussol fut nommé ou confirmé en qualité de bailli de Chartres (août 1461, id. fol 164). Puis, au fol. 167 du même mémorial, qui nous reporte au mois de novembre de la même année, on trouve le don à François de Surienne dit l'Aragonais de l'office de bailli de Chartres. (Bibl. nat., ms. fr. 21405 ) Les mêmes mentions sont reproduites, sans plus de précision, sur tous les anciens répertoires des mémoriaux de la Chambre des comptes (voy. notamment Arch. nat., PP. 110, 118 et 135). On en peut conclure avec une quasi-certitude que, en même temps que Surienne prenait la place de Crussol au bailliage de Chartres, ce dernier était nommé en Poitou au lieu de Joachim Rouault. D'autre part, le plus ancien acte daté que l'on connaisse où Louis de Crussol figure avec son titre de sénéchal de Poitou est du 11 novembre 1461; ce sont des lettres patentes de Louis XI, données à Montrichart, lui permettant de nommer ou présenter « telles personnes souffisans et ydoines que bon lui semblera aux offices royaux dudit pays et conté du Poictou qui doresenavant y seront vacans,... lesquelz offices à ladicte nomination ou presentacion nous donnerons et confermerons à ceulx qu'il nous aura ainsi nommez ou presentez » Ces lettres sont transcrites dans un vidimus daté de Niort, le 9 mars 1474 n. s., avec des lettres dudit de Crussoi nommant en conséquence Jean Rousseau, bourgeois de Niort, à l'office de procureur du roi dans cette ville (15 mai 1468), dans lesquelles, visant les lettres du roi du 11 novembre 1461, il déclare qu'elles lui furent octroyées « tantost après » qu'il eut été pourvu de l'office de sénéchal de Poitou (Bibl. nat , ms. fr., 27432, Crussol, 21); viennent ensuite, dans l'ordre chronologique, l'acte de vente à Louis xi par Louis d'Amboise de la vicomté de Thouars, où Louis de Crussol figure en cette qualité, (P. 2299, p. 284) puis une commission du 2 mars 1462 n. s., par laquelle il ordonné le renvoi par-devant lui ou ses lieutenants de causes dont certains juges se sont attribué la connaissance, au préjudice des privilèges et exemptions de Tabbayede Sainte-Croix de Poitiers (Invent. de lad. abbaye, Arch. nat., F2 I. 350.) ; un mandement du 2 septembre suivant, pour le paiement des frais d un voyage à Bordeaux de Michau Dauron, valet de chambre du roi et receveur en Poitou, chargé de prendre des informations sur une expédition delà flotte d'Angleterre. (Bibl. nat., ms. fr. 20436, fol. 4.) Par lettres du Pont-de-l'Arche du 10 janvier 1465, Louis XI fit don à Louis de Crussol, son chambellan et sénéchal de Poitou, de la garenne appelée « le Pied Peleu » (anc. mém M., fol. 309 v°). Une quittance de gages du 22 novembre 1466, scellée de son sceau, se trouve dans la collection Clairambault à la Bibl. nat. (reg. 156, pièce 4143). Il s'intitule Louis, seigneur de Crussol et de Florensac, chambellan du roi, grand panetier de France, sénéchal de Poitou, dans un mandement daté de Poitiers, le 5 octobre 1467, adressé à Michel Dauron, receveur ordinaire pour le roi en Poitou, lui ordonnant de payer ll livres tournois à Richard Thibault, Pierre de Cherzay, Pierre de La Roche et Jean de La Croix, sergents du roi, pour les indemniser des frais qu'ils ont eus en allant faire afficher les assignations des montres des nobles de Poitou, qui devaient avoir lieu audit mois d'octobre, savoir : le premier dans toutes les localités du siège de Poitiers, le deuxième à Niort et partout le siège, le troisième à Fontenay-le-Comte et dans la circonscription, et le quatrième partout le siège de Thouars. (Bibl. nat., ms. fr. 27692, Pièces orig. 1208, n0 3.) Le roi lui fit don de la terre et seigneurie de Bouzon, confisquée sur le comte d'Armagnac, par lettres datées des Montils-lès-Tours, octobre 1470, enreg. au Parlement (Arch. nat., X1a 8606,fol. 245) et à la Chambre des comptes (anc. mém. N, fol. 275 v°, ms. fr. 21405, p. 168). Citons encore une curieuse lettre qu'il écrivit de La Rochefoucauld, le 9 janvier 1472, à Louis XI, au sujet de la guerre contre Charles, duc de Guyenne, et de la maladie de ce prince. (Bibl. nat., ms. fr. 20428, fol. 36.)

L'acte le plus récent donné par Louis de Crussol, en qualité de sénéchal de Poitou est un mandement du 29 avril 1473, adressé à Etienne de Bonney, receveur ordinaire du roi en Poitou, pour payer à Pierre Ragot, Jean Delacroix et Bertrand Gaillard, sergents royaux dans le comté, cent sols à chacun, pour voyages dans les principales localités de la sénéchaussée, tant pour convoquer le ban et l'arrièreban, que pour prendre certaine quantité de blé et de farines, destinés à l'avitaillement de l'année du roi étant alors à Ancenis, etc. (Bibl. nat., ms. fr. 27432, pièces orig. 948, n° 17.) Nous n'en connaissons pas de postérieur.

Crussol, qui avait servi en 1462-63 dans la guerre de Roussillon, comme en témoigne l'acte précédent (MCCCXCII), fut en 1472 l'un des défenseurs de la ville de Beauvais. Grand maître de l'artillerie par lettres données au Plessis du-Parc, le 9 mars 1473, il fut enfin pourvu du gouvernement du Dauphiné, le 15 juin 1473, en remplacement de Jean, bâtard d'Armagnac, comte de Comminges, décédé. C'est-à ce moment-là, croyons-nous, bien que nous n'en ayons pas la preuve, que Charles d'Amboise, seigneur de Chaumont, succéda comme sénéchal de Poitou à Louis de Crussol, qui, avant d'avoir pu prendre possession du gouvernement de Dauphiné, mourut le 21 août de la même année, près de Vezins (Aveyron), alors qu'il se rendait à la tête d'une armée dans le Roussillon, pour y réprimer une révolte et y faire le siège de Perpignan. Son corps rapporté en Dauphiné fut inhumé dans l'église des Cordeliers de Valence. (Pilot de Thorey, Catalogue des actes du dauphin Louis II, 1899, 2vol. in-8°, passim, notamment t. I, p. 435.)

, ex illicita copula quondam Oli- vera ParcevalIl a été question, dans notre tome VIII, de cet Olivier Perceval qui, ayant pris part aux excès de la bande commandée par Jean de La Rochefoucauld, puis à la rébellion de Guy, seigneur de Verteuil, avait, ainsi que plusieurs autres, ses complices, été condamné au bannissement et à la confiscation, par arrêt du 24 janvier 1442 n. s., et depuis s'était fait comprendre nominalement dans les lettres d'abolition octroyées, en juin 1446, au chef des rebelles et à une douzaine de ses compagnons (p. 364-378). Dans une note du même volume, nous avons établi que Perceval est un autre nom de la famille de Monferaut ou Montferaut, qui habitait la région de Melle, et que Guillaume Perceval, écuyer d'écurie de Charles VII en 1446, et Guillaume de Montferaut, seigneur de Lusseray, en 1459, étaient un seul et même personnage (p. 253-254, note). Depuis, nous avons trouvé un aveu du 5 août 1443, rendu au seigneur de Melle, alors Charles d'Anjou, comte du Maine, par Guillaume « de Montferault », écuyer, pour son lieu et hôtel vulgairement appelé la « Cour de Lusseray ». (Arch. nat., P. 5203, fol. 35 v°.) Un bâtard de ce Guillaume, désigné ainsi dans le texte latin : « Leo de Monteferraudo, aliàs Perceval », obtint à son tour de Louis XI des lettres de légitimation, datées de l'abbaye de la Victoire près Senlis, juin 1474. (JJ. 204, n° 79.) Ajoutons que trois métayers d'Olivier Perceval, écuyer : Guillaume Béraut, de son hôtel de Champraimbault, paroisse de Sainte-Soline, Guillaume Bauçoy, de Saint-Léger, et Simon Marchant, de la Charrière, furent taxés à dix, vingt et trente sous en 1438, par Pierre de Tuillières, conseiller au Parlement, commissaire et réformateur « sur le fait de plusieurs exemptions, faultes et abuz faiz par aucuns des habitans du pays de Poictou ». (Bibl. nat., ms. fr. 24160, fol. 13, 15 et 28.) et Margarite Souteraine traxisse dicitur originem, nos, attendentes quod ipse ad imitanda proborum vestigia ferventer intendere studuit et sic de bono in melius ad virtutum opera est intentus, quod in ipso geniture maculam nititur abstergere, prout multorum fidedignorum relacione didiscimus, eas ob res dictum Ludovicum Parceval, ex predicta copula genitum, illius supplicacioni nobis super hoc facte benigniter annuentes, de nostre potestatis plenitudine, certa sciencia et gracia speciali, legitimavimus et legitimanus ac legitimacionis titulo decoramus per presentes, et ipsum in judicio et extra a modo pro legitimo censeri volumus reputarique et haberi. Concedentes ac cum eo dispensantes ut ipse, quanquam de dampnato traxerit originem, bona mobilia et inmobilia quecumque acquirere et jam forsan acquisita possidere valeat et tenere, ac de eisdem inter vivos et mortuos in testamento disponere, ad sue libitum voluntatis, ad successionem eciam patris et matris suorum ceterorumque parentum et amicorum carnalium et aliorum quorumlibet, ex testamento vel ab intestato, devenire, dummodo de eorum processerit voluntate et nisi alteri jus foret jam quesitum ; insuper ad quoscunque honores, officia et alios actus legitimos admittatur, ac si esset in et de legitimo matrimonio procreatus ; quod propterea ejus liberi, si quos in futurum habeat, totaque ejus posteritas de legitimo matrimonio procreanda in bonis suis quibuscunque eidem jure hereditario succedant et succedere valeant, nisi aliud quam deffectus hujusmodi natalium repugnet, predicto deffectu quem prorsus abolemus, jure, consuetudine, statuto, lege, edito, usu generali vel locali regni nostri, ad hoc contrariis, nonobstantibus quibuscunque, absque eo quod propterea dictus Ludovicus nobis aliquam financiam solvere teneatur, quam, premissorum intuitu ac eciam serviciorum nobis per eum superioribus annis prestitorum in guerris nostris, queque dietim prestare non desinit, concessimus et donavimus ac concedimus et donamus de uberiori gratia, per presentes, manu nostra signatas. Quocirca dilectis et fidelibus nostris gentibus compotorum ac thesaurariis nostris Parisius, senes callo Pictavensi ceterisque justiciariis et officiariis nostris, aut eorum locatenentibus, presentibus et futuris, et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, tenore earumdem presentium, mandamus quatinus prefatum Ludovicum Parceval nostris presentibus legitimacione, concessione et gracia uti et gaudere pacifice faciant et permittant, absque quovis impedimento, quod, si factum fuerit, revocent et ad statum pristinum et debitum reducant aut reduci faciant in- dilate, ordinacionibus super facto financiarum nostrarum, editis vel edendis, quodque dicta financia, hujus causa nobis debita, hic minime declaretur, et de illa deschargia nostri thesauri, secundum stillum financiarum nostrarum, levata non exstiterit, que dicto Ludovico nullatenus prejudicari volumus, nonobstantibus quibuscunque. Quod ut firmum et stabile perpetuo perseveret, nostrum presentibus litteris fecimus apponi sigillum ; nostro in aliis et alieno in omnibus jure semper salvo. Datum apud Nogent le Roy, mense marcii anno Domini m° cccc° lxiii°, et regni nostri tercio.

Sic signatum : Per regem, domino de Crussolio et aliis presentibus. Bourré. — Visa. Contentor. D'Orcières.

MCCCXCIV 30 mars 1464

Rémission donnée en faveur de Jacques de Belleville, écuyer, à condition d'aller combattre les infidèles. Se trouvant à Poitiers pour soutenir un procès, il avait tué le fermier de la Prévôté de cette ville et un de ses valets, qui étaient venus à onze heures du soir, en l'hôtellerie du Mouton, où il logeait, pour le mettre en état d'arrestation.

AN JJ. 499, n° 379, fol. 234 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Jacques de Belleville

Jacques de Belleville était l'un des cinq fils de Jean III Harpedenne, seigneur de Belleville, et de Marguerite de Valois, fille naturelle de Charles VI et d'Odettede Champdivers, le quatrième suivant l'ordre dans lequel ils sont nommés dans l'acte de cession à Louis XI de Montaigu, en échange du comté de Dreux (ci-dessus, p. 367. note 1). « Ses niens furent confisqués, nous ne savons à quel sujet, dit M. Beauchet-Filleau, par l'ombrageux Louis XI et donnés, par lettres d'avril 1479, à Marguerite de Culant, veuve de Louis, son frère ainé. » (Dict. des familles du Poitou, 1re édit., t. II, p. 206.) Girard Chrétien, écuyer, lieutenant du duc d'Anjou à la Roche-sur-Yon, poursuivit au Parlement Jacques de Belleville qui l'avait frappé d'un coup de dague et obtint contre lui deux mandements d'ajournement, les 7 et 18 février 1472 n.s. Arch. nat., X2a 38, fol. 148 v°, 151.) Jacques rendit hommage au roi de les terres et seigneuries d'Andilly et du Petit Fief-le-Roi, mouvant du château de la Rochelle, le 17 juillet 1489. [Id., P. 5543, cote iiiie iiixx xvi.) Nous supposons que c'est le même personnage, parce que le tiers de cette seigneurie d'Andilly avait appartenu à Louis de Belleville, son frère ; la veuve de celui-ci, Marguerite de Culant, agissant au nom de ses enfants mineurs, vendit ladite portion, moyennant 500 écus d'or, à Jean Mérichon, sr du Breuil-Bertin et d'Auzance près Poitiers, chambellan du roi, gouverneur de la Rochelle, par acte passée à Migré, le 16 juin 1478. (Bibl. nat., Pièces orig., vol. 279, n° 18.)

escuier, aagé de vingt cinq ans ou environ, contenant que, ou mois d'octobre l'an mil iiiie soixante deux, il se transporta en nostre ville de Poictiers, pour la poursuite de certain procès qu'il avoit avecques nostre amé et feal conseillier l'evesque de LuçonNicolas Boutaud, d'une ancienne famille poitevine, était archiprêtre de Pareds et vicaire général d'André de La Roche, évêque de Luçon, son oncle, quand celui-ci se démit en sa faveur, le 14 février 1461 (anc. ou nouveau style ?). Sa famille posséda pendant plusieurs siècles la seigneurie de Laubonnière-des-Champs, paroisse de Sainte-Pexine. Le nouvel évêque de Luçon était fils de Pierre Boutaud, valet, bachelier ès lois, seigneur de Laubonnière, et de Catherine de La Roche, sœur d'André. Nicolas obtint du pape Paul III, en 1468, la sécularisation du chapitre de Luçon. Il habitait ordinairement Sainte-Hermine et mourut le 27 décembre 1490 (L'abbé Aillery, Pouillé du diocèse de Luçon, 1860, in-4°, p. XVIII ; Recherches hist. sur la famille poitevine Maynard-Mesnard. Fontenay, Robuchon, 1857, in-8°, p. 86 et 97.) Nous savons, d'autre source, que Nicolas Boutaud était en procès avec le seigneur de Belleville ses enfants et Georges de Villiers. Un jugé du Parlement, en date du 3 juin 1462, l'indique en ces termes : « Constitué devant nous en Parlement l'évêque de Luçon, demandeuren cas d'excès, d'une part, et Georges de Villers, écuyer, défendeur, d'autre, tout considéré, la cour renvoie les parties devant le sénéchal de Saintonge ou son lieutenant à Saint-Jean-d'Angély, le lendemain de la Madeleine prochain venant, pour procéder sur lesdits excès ; lequel jour ledit de Villers sera tenu de comparaître personnellement devant ledit sénéchal ou son lieutenant, sous peine d'être convaincu des cas à lui imposés, et il a promis et juré d'ainsi le faire, moyennant quoi la cour l'élargit et lui fait recréance de ses chevaux et autres biens saisis à Paris et placés en main de justice, jusqu'à ce que par ledit sénéchal autrement en soit décidé. Ladicte cour met l'évêque de Luçon, ses religieux, officiers et sujets en la sauvegarde et sauf-conduit du roi et fait défense audit Georges de Villers, et aussi au seigneur de Belleville et à ses enfants et serviteurs, de forfaire audit évêque, ses religieux et sujets, en corps ni en biens, mandant au premier huissiersur ce requis de notifier le sauf-conduit auxdits srs de Belleville ». (Arch. nat., X2a 30, fol 124 v°.) Nous n'avons point d'autres renseignements sur le procès en question. pardevant le conservateur des privillèges royaulx de l'Université dudit lieu. Et ainsi qu'il faisoit la poursuite dudit procès, nostre procureur en Poictou, aux pourchaz et instance d'un nommé Fortin de Partenay, qui est homme de pratique et fort aliez des advocatz et praticiens du païs, fist arester ledit suppliant en ladicte ville de Poictiers, pour ce qu'il disoit qu'il avoit gecté une espée nue contre ledit Fortin et avoit prins certains blez et foings qu'il disoit lui appartenir. Et pour ce que ledit suppliant dist et proposa que lesdiz blez et foings lui appartenoient, comme creuz en certain village appellé la Bourgueille en la parroisse d'Aslonne, duquel ou de la pluspart il estoit seigneur, et qu'il en estoit procès pendant par devant le seneschal de Poictou ou son lieutenant à Nyort, entre lui et ledit Fortin, par quoy de raison il ne povoit estre convenu ne arresté en nostre court ne auditoire, fut dit qu'il seroit receu à ses justificacions et deffenses. Et à l'occasion desdiz deux procès, estoit encores ledit suppliant, le jour de saint Luc oudit an, en ladicte ville, et icellui jour, environ unze heures de nuyt, entrèrent secretement en l'ostellerie du Mouton, où estoit logé ledit suppliant et, en la chambre où il estoit couché, avoit une grant eschielle et degré à monter, et en icelle chambre avoit ung peu de chandelle ardant sur la table, ung nommé Hilleret Tondeur, soy disant fermier ou commis du prevost de nostre dicte ville de Poictiers, lequel avoit une grant dague, et en sa compaignie deux varlez en manteaulx tenans chacun ung grant cousteau ou braequemart nuz, et aussi maistre Jehan de BellevilleJean de Belleville est le moins connu des cinq fils de Jean Harpedenne, seigneur de Belleville, et de Marguerite de Valois, et même les généalogies imprimées le passent complètement sous silence. Il paraît être le second dans l'ordre de primogéniture. Jean était poursuivi, en 1461, avec ses frères Louis et Antoine et leur père, par Jean Le Breton, qui les accusait d'avoir pénétré de force dans sa résidence de la Frairière et d'avoir commis divers actes de violence sur sa personne et ses biens. (Voy. ci-dessus, p. 367, note.) Il est de nouveau mentionné dans un acte du Parlement du 6 juillet 1469, ainsi que son autre frère Gilles. En qualité d'exécuteurs du testament de leur feu père, ils se firent donner défaut, à cette date, contre un nommé Jean Panageau, soidisant appelant du sénéchal de Poitou, et déserteur dudit appel. (X2a 35, à la date.) frère dudit suppliant et deux jeunes enffans. Et incontinant ledit Hilleret dist audit suppliant : « Jacques, vous me faictes bien souvent vous venir veoir ». Lequel suppliant, qui fut soubzdainement fort espoventé, dist audit Hilleret qu'il ne l'avoit point envoyé querir et qu'il n'estoit heure de faire aucuns exploiz de justice, et que s'il vouloit aucune chose exploicter sur lui, qu'il appelloit de lui. Lequel Hilleret dist audit suppliant que ses chevaulx estoient arrestez, et ledit suppliant lui demanda qui estoit sa partie et s'il y avoit pleiges et ledit Hilleret dist qu'il n'en y avoit point, dont ledit suppliant appella derechief, en adherant à son premier appel. Et lors ledit suppliant dist audit Hilleret telles parolles ou semblables : « Hilleret le chaussetier, il ne vous appartient de me venir à present scandalizer ». Lequel Hillairet le desmenty en luy disant qu'il n'estoit point chaussetier, et parce que ledit suppliant luy dist qu'il estoit doncques tondeur, il le demanty de rechief en disant qu'il estoit prevost de ladicte ville et qu'il le feroit trayner par les cheveux jusques à la prevosté. Lequel suppliant fut fort effrayé desdictes parolles et se leva, assis ou lit en sa chemise qu'il avoit seulement vestue, et dist qu'il n'avoit point desservy d'estre trayné. Et lors ledit Hilleret mist la main sur sa dague et la senestre sur ledit suppliant, lequel voiant que ledit Hilleret estoit fort esmeu et doubtant sa personne, sailli en la place, esperant s'en aler et fouir ; mais lesdiz deux varletz, qui avoient lesdiz grans cousteaulx, se misdrent au devant et recullèrent ledit suppliant contre le coing de la cheminée, et illec lesdiz Hilleret et varletz le blecièrent très fort ou faulx du bras et sur une espaulle, dont il yssi grant quantité de sang. Après les- quelles choses, ledit suppliant trouva moien, parce que la chandelle estoit presque achevée de ardoir et qu'il faisoit assez brun en ladicte chambre, d'eschapper de leurs mains, et en querant l'eschielle et degré pour s'enfouir, trouva une lanterne en son chemin, avecques laquelle il arresta ledit Hilleret et sesdiz varlez en ce qu'il peut, et entra en l'eschielle de ladicte chambre. Et en descendant, pour l'effusion du sang qu'il perdoit, il cria « au meurtre et à l'aide du roy ». Et au bout de ladicte eschielle où il faisoit très fort noir et n'y avoit aucune lumière, il trouva d'aventure l'uys de la chambre à l'ostesse ouvert, en laquelle chambre il entra et n'y avoit aucune clarté, et se complaigny de l'oultraige qui lui avoit esté fait. Et par ce qu'il oy ledit Hilleret et autres murmurer en luy donnant menasses et descendans par ladicte eschielle, il s'efforça de fermer sur luy l'uys de ladicte chambre de ladicte hostesse, ce qu'il ne peut faire parce que une haste de fer cheut au travers de l'uys et l'empescha ; laquelle haste ledit suppliant trouva à grant peine et se mist en deffense de ladicte haste oudit huys. Et parce qu'il doubta que les dessusdiz entrassent en ladicte chambre, il dist à haulte voix : « Je appelle de vous ! N'entrez point et vous guetez ou donnez garde. Je ne voy goute. » Et passoit souvent ladicte haste de fer par ledit huys, en cryant tousjours qu'ilz n'entrassent point et qu'ilz se gardassent. Et en ce bruit, ledit suppliant oy ledit Hilleret qui dist : « Jhesus ! ribault traitre, tu m'as tué ! » combien que ledit suppliant ne le veist point, car il n'y avoit chandelle ne lumière, et s'il le frappa dudit haste, ce fut d'aventure et sans propos deliberé, et en resistant à la force dudit Hilleret. Et lors ledit suppliant dist qu'il n'estoit point traictre, et disoit tousjours qu'on ne entrast point sur lui. Et en celui mouvement, l'un desdiz varlez s'efforça entrer sur ledit suppliant, non obstant qu'il lui dist qu'il n'entrast point, pour laquelle cause ledit suppliant, en gectant ung estoc dudit haste, frappa ledit varlet par la cuisse. Et incontinent, pour la grant quantité du sang que perdoit ledit suppliant et pour le froit qu'il avoit, il fut comme esvanouy et lui cheut ladicte haste des mains. Et lors lesdiz varlez entrèrent sur lui et le blecèrent grandement, et après s'enfouyrent lesdiz varlez. Lequel suppliant fut prins et pensé, et celle nuyt fut en grant danger de mourir. Et par ce qu'il se revint ung peu le lendemain et qu'il oyt dire ledit Hilleret, lequel on disoit avoir esté blecié au droit de l'estommac, estre alé de vie à trespas, doubtant la rigueur de justice, s'en ala ledit suppliant tout malade en franchise, au mieulx qu'il peut, en l'eglise de Saint Hillaire le Grant dudit lieu de Poictiers, en laquelle il demoura par quatre ou cinq jours ou environ, et depuis s'en yssy et s'en ala d'ilec en franchise en l'eglise de Saint Cyprien hors les murs de ladicte ville. Et pendant ce qu'il estoit en ladicte eglise Saint Hillaire, ung sergent dudit lieu de Poictiers, incongneu audit suppliant lui notiffia qu'il estoit adjourné à comparoir en personne, sur peine de bannissement de nostre royaume, par devant nostre seneschal de PoictouIci encore une distraction du clerc de la chancellerie lui a fait écrire « Pontieu » au lieu de « Poictou »., ou son lieutenant. Et pour ce que, au jour dudit adjournement, ledit suppliant n'eust peu comparoir pour la maladie qu'il avoit et souffroit à cause desdictes plaies, aussi qu'il ne l'eust osé faire, doubtant rigueur de justice, il envoya faire dire son exoine de maladie, et avecques ce fist proposer par ung sien procureur qu'il estoit exempt de nostre dit seneschal ou sondit lieutenant, et qu'il se doubtoit vehementemènt de lui en ceste cause et matière ; car il avoit porté et favorisé ses parties adverses en plusieurs manières, et avoit sans cause consceue haine contre lui. Et ce fait, yssit ledit suppliant de ladicte eglise et franchise de Saint Cyprien, et a sceu que, non obstant l'exempcion par lui faicte de nostredit seneschal ou sondit lieutenant, nostre procureur en nostredit païs de Poictou l'a fait adjourner par diverses foiz par cry publicque audit lieu de Poictiers, auquel n'est son domicille ne résidence, et s'est venté que, au moien desdiz deffaulx, il avoit obtenu et obtiendroit contre lui sentence par contumace, par laquelle il le feroit bannir de nostredit païs de Poictou et nostre royaume, et confisquer ses biens. Et combien que en ceste matière ledit suppliant n'ait esté agresseur et n'ait esté le cas par lui commis fait de guet apensé et propos deliberé, mais en son corps deffendant et resistant à la force et viollence dudit Hilleret et de sesdiz varlez, neantmoins il doubte que, par ce que ledit Hilleret estoit fermier de ladicte prevosté de nostredicte ville de Poictiers, et de ce qu'il s'estoit absenté pour ledit cas, et aussi que, pour cause desdiz adjournemens et deffaulx, sentence s'est ensuye ou pourroit ensuir, et qu'il n'a aucunement relevé les appellacions faictes dudit Hilleret et de nostredit seneschal ou sondit lieutenant, on voulsist contre lui rigoreusement proceder et que par ce il feust en dangier de sa personne, se nostre grace et misericorde ne luy estoit sur ce impartie, humblement requerant que, en l'onneur de nostre Sauveur et Redempteur Jhesu Crist, qui à tel jour qu'il est le jour d'uy, pour nous tous rachapter, souffrit mort et passion en l'abre de la croix, il nous plaise nosdictes grace et misericorde lui impartir. Pour quoy, etc., voulans, etc., audit suppliant, en l'onneur de nostredit Sauveur et Redempteur Jhesu Crist, avons remis, quicté et pardonné, ete. Si donnons en mandement aux seneschal de Xantonge et gouverneur de la Rochelle et à tous, etc., pourveu que ledit Jacques de Belleville suppliant sera tenu aler en armes, dedans la feste de Noël prouchainement venant, à rencontre desinfidelez pour la deffence de la foy catholique. Et afin que, etc. Sauf, etc. Donné à Nogent le Roy, ou mois de mars l'an de grace mil cccc. lxiiii (sic), et de nostre règne le iiie avant PasquesIl y a contradiction entre le millésime et l'année du règne ; la 3e de Louis XI s'étend du 23 juillet 1463 au 22 juillet 1464. Pâques étant tombé le 1er avril en 1464, il faut lire mil cccc lxiii (1464 n. s.) et non mil cccc lxiiii (1465 n. s.). D'ailleurs on possède d'autres lettres de ce roi, datées de Nogent-le-Hoi, les 19 et 21 mars 1464 n. s.. Ainsi signé : Par le roy en ses requestes, où estoient le comte de CommingeJean bâtard d'Armagnac, comte de Comioges, maréchal de France. (Cf. ci-dessus, p. 447, note.) l'admiralJean sire de Montauban exerçait alors l'office d'amiral de France., les sires du LauAntoine de Châteauneuf, seigneur du Lau. (Cf. ci-dessus, p. 299, note 2.) de la RousièreGeorges Havart, chevalier, sr de la Rosière au Perche, vicomte de Dreux, maître des requêtes et membre du conseil du roi. (Voy. notre vol. précédent, p. 297, note.) et autres. J. de Moulins. — Visa. Contentor. J. Du Ban.

MCCCXCV Avril 1464

Rémission en faveur de Guillaume Porchet, jeune marchand ambulant, qui, au village d'Éports, paroisse de Brigueil-le-Chantre, en la seigneurie de Fleix, en s'escrimant du couteau, pour jouer, avec Amaury Chaignon, l'un de ses compagnons, l'avait blessé mortellement.

AN JJ. 499, n° 599, fol. 379 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Lois, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receue l'umble supplicacion de Guillaume Porchet, marchant, jeune homme de l'aage de xviii. à xx. ans, de la parroisse de Lalhé ou diocèse de Nantes en Bretaigne, contenant qu'il est marchant conduisant chevaulx à vestureLe mot est ainsi écrit ici et neuf lignes plus bas; il a évidemment le sens de « voiture »., tant de draps que autres marchandises, ès parties de Bretaigne, Poictou, Limosin, la Marche, Auvergne et en plusieurs autres parties de ce royaume, et en faisant le fait de sondit mestier de marchandise est advenu que, environ karesme prenant derrenier passé, il se partit dudit païs de Bretaigne, en la compaignie de plusieurs autres marchans voisturiers dudit païs, ses voisins, et avoit ledit Guillaume de six à sept chevaulx chargez de draps qu'il conduisoit à vesture lesques ès parties d'Auvergne et de Lion sur le Rosne. Lequel suppliant, au retour dudit païs d'Auvergne, si revint et amena sesdiz chevaulx, chargez d'autres marchandises, en la compaignie de plusieurs autres marchans voisturiers en grant nombre, pour s'en retourner oudit païs de Bretaigne ; et eulx arrivez en la ville de Guerret en la Marche, à leur retour, le xvie jour du mois de mars derrenierement passé, si trouvèrent en ladicte ville Amourry Chaignon, marchant, conduisant quatre charges de voirre des parties dudit païs d'Auvergne, tirant à la Rochelle ; lequel Amourry Chaignon, filz de Pierre Chaignon, marchant demourant à la Rochelle, soy acompaigna avecques ledit suppliant et les autres marchans voisturiers de sa compaignie, pour s'en aller ès parties de la Rochelle. Lesquelx partirent ensemble dudit lieu de Guerrect et journeèrent jusques en la ville de la Souterraine en Limosin, et d'ilecques, le dimenche avant Pasques fleuries, après qu'ilz eurent oy la messe et desjuné, en continuant leur compaignie, s'en alèrent ensemble jusques au lieu et vilage de l'Esport en la parroisse de Briguelz, terre et justice du chastel de Fliet en la conté de Poictou, appartenant ledit chastel de Fliet au conte de PenthèvreJean de Brosse, sr de Sainte-Sévère et de Boussac, comte de Penthièvre par son mariage avec Nicole de Blois, dite de Bretagne. (Voy. ci-dessus, p. 38, note.) La terre et le château de Fleix lui appartenaient en propre. Ils avaient fait partie des biens d'Eliette de Prie, donnés par celle-ci à Louis de Malval, dont la fille Marguerite avait épousé l'aïeul du comte de Penthièvre. (Voy. Arch. hist. du Poitou, t. XIX, p. 93, note.), et illecques logèrent tous en une hostellerie, et y arrivèrent de soir. Lesquelz Amourry Chaignon [et] suppliant, qui estoient comme d'un aage, dès le lieu de Guerect que fut leur assemblée, si prindrent entre eulx grant congnoissance et amour et aloyent ensemble sur chemin communement, et pour l'amour singulière qu'ilz avoient prins ensemble, ledit suppliant print plaisir en ung coustel poignant, nommé bistorit, que avoit ledit Amourry, qui le vendit audit suppliant le pris de xii. solz vi. deniers tournois, en ladicte ville de Gueret. Et voyant ledit Amourry que point n'avoit de coustel, si en achepta ung autre grant coustel de son hoste de la Souterraine, et, comme dit est, s'en alèrent ledit jour de dimenche, après disner, de ladicte ville de la Sousterraine audit lieu d'Esport, et illecques arrivez de grant heure, logèrent tous ensemble en l'ostellerye dudit lieu. Et après ce qu'ilz eurent establez leurs chevaulx, soupèrent tous ensemble et firent grant chère, et après souper alèrent ensemble penser leurs chevaulx ; et après qu'ilz les eurent pensez, yssirent de l'estable, faisans grant chère et joyeuse. Et illecques, par devant ledit estable, avoit partie des charges desdiz marchans. Lequel suppliant s'assist sur une bale de marchandises et ledit Amourry estoit debout, lequel dist audit suppliant: « Lève toy, jouons ». Lequel Amorry eschassa et tira son coustel et joet les tours d'escrime à rencontre dudit suppliant par esbat, sans malice, et vint frapper du plat dudit coustel ledit suppliant en disant telles parolles ou semblables en effect: « Comme se j'eusse voulu, vous feussiez mort », et en faisant tousjours les tours d'escrime, si dist audit suppliant : « Deffendez vous, croysés », et incita ledit suppliant de soy lever. Lequel suppliant soy leva pour complaire audit Amourry et eschassa son coustel, en faisant ensemble les tours d'escrime, ainsi qu'ilz le savoyent faire, et frappa ledit Amourry de son coustel sur le coustel dudit suppliant, et le luy fit besser encontre bas, et fist ung pas contre ledit suppliant et rencontra son coustel et soy blessa en la cuisse ; et incontinant la plaie se mist à vuider le sang à grant boulhon. Et lors ledit Amourry dist audit suppliant: « Je suis blecié en la cuisse », et ledit suppliant pour le secourir, le prist et le fist seoir et puis coucher sur une des halles de leursdictes marchandises, et voulut arrester le sang, ce qu'il ne peut faire. Et à ceste cause, entra prestement en l'ostel et sonna l'ostesse et autres de l'ostel, et prisdrent ledit Amorry et le portèrent en l'ostel et le misdrent ou lit, et firent toute diligence d'arrester le sang, mais ilz ne peurent tant faire que ledit Amourry, demye heure après ala de vie à trespas. A l'occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, n'oseroit jamais seurement converser ne repairer en nostre royaume, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, si comme il dit, humblement requerant, etc. Pourquoy, etc., voulans, etc., audit suppliant ou cas dessus dit avons quicté, remis et pardonné. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou ou à son lieutenant et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chartres, ou mois d'avril l'an de grace mil iiiie lxiiii, et de nostre règne le iiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Reynaut. — Visa. Contentor. Daniel.

MCCCXCVI Mai 1464

Rémission octroyée à Renaud Chabot, sire de Jarnac, à Louis son fils, à Jacques Goulart et à plusieurs de leurs serviteurs, les uns prisonniers à Châtellerault, les autres en fuite, à cause du meurtre de Gilles de Quatrebarbe qu'ils avaient commis à Clairvaux, dans une rixe provoquée par celui-ci et autres gens du sr de La Tour-Landry, co-seigneur avec Renaud Chabot dudit lieu de Clairvaux.

AN JJ. 199, n° 42, fol. 29 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Regnault Chabot

Regnaut ou Renaud Chabot, chevalier, seigneur de Jarnac, Apremont, Brion et Clairvaux en partie, était le deuxième fils de Louis Chabot, seigneur de la Grève, el de Marie de Craon. Nous avons vu qu'il fut l'un des lieutenants de la fameuse compagnie de Jean de La Roche (La Rochefoucauld), son beau-frère, et fut compris dans les lettres d'abolition qui furent octroyées à celui-ci, le 9 avril 1431 (t. VIII de notre collection ou XXIX des Arch. hist., p. 12). Il a été question aussi, dans notre précédent volume, du procès qu'il intenta, avec son frère Thibaut IX, sr de la Grève, à Jean Lorson, prieur-curé de Soullans (p. 233, note). Il épousa Françoise de La Rochefoucauld, fille de Guy, seigneur de Barbezieux, et de Rosine de Montaut, veuve de Gilles d'Appelvoisin, puis l'an 1437, en secondes noces, Isabelle de Rochechouart, fille unique de Jacques, seigneur.d'Apremont et de Brion, et de Jeanne de La Tour-Landry, dame de Clairvaux en partie. L'année même de son second mariage, Renaud, sr de Jarnac, ainsi que Jacques de La Roche[faton], seigneur de Saveille, Nicolas Goulart, capitaine du château de Saveille, et autres, varlets de la garnison dudit lieu, étaient ajournés à comparaître en personne au Parlement, sur peine de bannissement du royaume et de confiscation, à la requête de Nicolas de Volvire, chevalier, frère puîné et seul héritier de Maurice de Volvire, chevalier, seigneur de Ruffec, qui les accusait d'excès et violences à son préjudice. Ils ne se présentèrent point à l'assignation et deux défauts furent adjugés contre eux au demandeur, le 29 juillet 1437 et le 24 mars 1438 n. s. (Arch. nat., X2a 22, à ces dates.) Outre ses démêlés avec Christophe de La Tour-Landry, dont il sera question dans une note plus loin, le sire de Jarnac soutint un procès criminel contre le comte d'Angoulême et ses officiers, et un autre contre Jean de Vaux, écuyer, seigneur du lieu. Du premier nous ne connaissons que deux incidents: le 17 juillet 1461, à la requête de Renaud Chabot, la cour manda à son premier huissier de faire défense au comte et à ses officiers de ne rien entreprendre ni innover au préjudice du procès pendant entre eux, sub certis magnis penis, nobis applicandis (X2a 30, fol. 54) ; par un autre acte du 17 novembre suivant, on voit qu'il était poursuivi en cas d'excès, ainsi que Maurice Lanterneau et Jean Charrier, et qu'ils auraient dû comparaître personnellement, au lieu de se faire représenter par André Couraud, leur procureur. (X2a 32, à la date.) Le même cas se reproduisit dans l'affaire contre Jean de Vaux, écuyer, qui était demandeur, le procureur du roi joint avec lui, en cas d'attentats et violences dont il accusait le sr de Jarnac, Pierre Grenet, Jean Bidet et Colas Reau. (Demande de défaut du 22 novembre 1463, X2a 32.) Suivant Du Chesne, Renaud Chabot ne vivait plus en 1472.

chevalier, seigneur de Jarnac, Lois Chabot

Louis Chabot, chevalier, hérita de la seigneurie de Jarnac et succéda à sa mère, Isabelle de Rochechouart, dans celles d'Apremont et de Brion. En 1468, il prit part à la guerre contre le duc de Bretagne avec sa compagnie, qui se composait de neuf hommes d'armes et de quarante-un archers, et, durant l'année 1474, il était capitaine du ban et arrière-ban des nobles du Poitou. Il avait épousé, au mois d'avril 1466, Jeanne de Montbron, veuve de Martin Henriquez de Castille et fille de François, vicomte d'Aunay, et de Jeanne de Vendôme ; il n'en eut point d'enfants et mourut avant le 25 août 1481. Les habitants de Jarnac, ayant à se plaindre des vexations de Louis Chabot, et le comte d'Angoulême, qui se prétendait seigneur du château et de la cinquième partie de la seigneurie de Jarnac, lui intentèrent un procès au Parlement. Après la réduction des duchés de Guyenne et des pays occupés par les Anglais, les trois états de Saintonge, d'Angoumois et de Poitou, pour repeupler le pays et cultiver les terres demeurées en friche par suite des guerres, avaient fait appel aux laboureurs de bonne volonté et leur avaient concédé les terres abandonnées, à condition de les remettre en culture et de payer aux seigneurs, pour toute redevance, le neuvième de leur récolte, ou le dixième, suivant les lieux. Beaucoup de seigneurs ne respectèrent cet engagement que pendant les premières années ; dès que les terres furent en plein rapport, ils voulurent les reprendre ou exigèrent des impôts excessifs. C'était le cas du sr de Jarnac. On lui reprochait aussi de contraindre ses sujets à des corvées inaccoutumées, et en particulier à-des prestations pour la clôture de la ville. (Arch. nat., X2a 41, plaidoiries du 4 mars 1477 n. s.) Les contestations avec le comte d'Angoulême au sujet de la seigneurie de Jarnac avaient d'ailleurs pris naissance du vivant de Renaud Chabot, et elles continuèrent sous les successeurs de Louis. Plus de cent pièces diverses relatives à ce long procès se trouvent dans les papiers de l'ancienne Chambre des comptes d'Angoulême. (Arch. nat., P. 1406, 1 et 2, nos 609 et suiv.)

François de Montbron, vicomte d'Aunay, avait promis de payer à Louis Chabot, pour la dot de sa femme, une rente annuelle de 400 livres, et par acte notarié passé le 24 novembre 1472, à Saint-Jeand'Angély, il la lui avait assignée sur les fruits et revenus de la terre et seigneurie de Matha, dont il lui céda en même temps les droits de justice moyenne et basse, avec faculté d'y instituer les juges. Le vicomte d'Aunay s'y réservait le moulin des fossés, le droit de guet et garde, le ressort et la souveraineté, le droit de haute justice et un clos de vigne appelé Painsoury, y compris la faculté d'exercer par réméré le retrait de ce qu'il aliénait de ladite terre. En échange, sa fille et son gendre déclaraient se désister de tous les droits qu'ils pouvaient prétendre sur les terres et seigneuries de Cozes, Saujon, Gresac et Corme-Ecluse. (Arch. dép. de la Charente-inférieure, E. 251, chartrier de Matha.) L'exécution de ce contrat ne tarda pas à soulever des difficultés, et le sr de Jarnac ne put se faire payer les arrérages de la rente. Le Parlement, saisi de la contestation, donna gain de cause au sr de Jarnac. Le sergent royal chargé de l'exécution de l'arrêt fut emprisonné par Eustache de Montbron, fils du vicomte d'Aunay, qui se livra en outre à des violences sur divers officiers et serviteurs de Louis Chabot. La cour décerna contre lui un mandat de prise de corps et, comme on ne put le saisir, le fit ajourner personnellement, sous peine de bannissement et de confiscation, le 17 janvier 1475 n. s. (X2a 40, fol. 219 v°.) L'affaire, comme toujours, traîna en longueur; les plaidoiries n'eurent lieu que les 31 janvier et 4 février 1480 n. s. (X2a 44, à ces dates et au 17 avril 1480.) Louis Chabot vivait encore et Eustache de Montbron avait succédé à son père et était qualifié vicomte d'Aunay. Le 31 janvier 1482 n. s., on retrouve Jeanne de Montbron, alors veuve du sr de Jarnac et remariée à Louis Larchevêque, sr de Mouchamp (elle l'avait épousé par contrat du 25 août 1481 (Arch. de la Charente-Inférieure, E. 251), requérant le Parlement de lui accorder le bénéfice d'un défaut contre son frère, Eustache, vicomte d'Aunay. (X2a 46.) On peut citer encore un arrêt de procédure du 11 mars 1477 n. s. entre Louis Chabot, sr de Jarnac, Antoine Chabot, chevalier de Rhodes, François Chabot, abbé de Châtre, Jacques et Robert Chabot, écuyers, enfants de feu Renaud Chabot et d'Isabelle de Rochechouart, d'une part, et Christophe de La Tour-Landry, seigneur de Clairvaux en Poitou, et Jean Tibert, fils et héritier de feu Jean Tibert, dit Fausselion. Les Chabot sont dits appelants de Guillaume Leduc et Jean Chambellan, conseillers au Parlement; le procès qui y est déclaré en état d'être jugé paraît se rapporter à l'exécution de l'arrêt du 14 août 1475, dont il est question dans la note, p. 478 ciaprès, réglant la réparation civile due au sr de La Tour-Landry pour le meurtre de Gilles de Quatrebarbe. (X2a 41, à la date du 11 mars 1477 n. s.)

, son filz, Jacques Goulart

Jacques Goulard, écuyer, seigneur de la Ferté, Paizay-Naudouin, le Breuil-Milon, marié avant 1445 à Jeanne de Montalembert, dame de la Ferté et du Breuil-Milon, vivait encore en 1467, année où il comparut au ban comme brigandinier sous les ordres de sr de La Rochefoucauld. Jeanne de Montalembert était veuve le 24 décembre 1469. Leur fils puîné, chef de la branche de Beauvais et du Retail, se nommait aussi Jacques, et vraisemblablement c'est lui qui fut complice des Chabot dans le meurtre de Gilles de Quatrebarbe. Epoux de Marguerite Rousseau, il transigea le 24 avril 1474 et le 12 mars 1481, avec sa sœur Marquise, pour le douaire de cette dernière et le partage des biens de leurs père et mère. (Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 1re édit., t. II, p. 848, 849.) Un Jacques Goulard, notable écuyer, possédant plusieurs belles seigneuries et entre autres la Barre, plaidait au Parlement, le 29 avril 1477, contre Louis Erard, aussi écuyer, son vassal, qu'il accusait de félonie. Celui-ci tenait le fief de Brumefort (sic, peut-être Bonnefon) qui relevait de la seigneurie de la Barre, et avait « pris et osté par force le complant et les despoilles estans ès terres appartenans à son seigneur, en commettant félonie et rebellion ». Goulard le fit ajourner devant le sénéchal de Poitou, qui prescrivit une enquête. Erard, accompagné de huit ou dix personnes armées, vint attaquer le sergent royal, un notaire et autres qui procédaient à Information sur les lieux. Ceux-ci se réfugièrent dans l'hôtel et en fermèrent la porte, signifiant à leurs agresseurs qu'ils étaient en la sauvegarde du roi et besognaient par autorité de justice. Erard et ses complices, sans tenir compte de ces protestations, rompirent l'huis, pénétrèrent de force dans l'hôtel, battirent le sergent, tirèrent sur un parent de Goulard et finalement mirent le feu à la maison Ajournés devant le sénéchal à plusieurs reprises, les coupables firent constamment défaut et se pourvurent au Parlement contre cette procédure. La cour mit leur appel au néant et retint le fond de l'affaire. A la suite des plaidoiries du 29 avril 1477, les parties furent « appointées contraires » et invitées à produire leurs faits. (Arch. nat., X2a 41, à la date.) L'issue du procès n'a pas été retrouvée.

, Guillaume Le Maçon, dit le Morien, Gilles de Assigniers, Jehan Chaulme, Martin Binet, Pierre Lorin et ung nommé Colin Faulconnier, contenant que, le xvie jour d'avril derrenier passé, ledit sire de Jarnac ala au lieu de Clervaulx, dont la moitié luy appartient à cause de sa femme, en la viconté de Chastellerault, et mena avec lui lesdiz Goulart, d'Assigniers, Lorin et Colin, ses serviteurs, qu'il a acoustumé mener, et cinq ou six levriers et autres chiens, pour illec se esbatre et faire bonne chière, et loga en l'ostel de Guyon Yvon, son receveur audit lieu. Et quant ledit sire de Jarnac partit dudit lieu de Jarnac, pour aler audit lieu de Clervaulx, il ordonna Loys son fils, qui pour lors avoit à besongner aucunes choses et ne peut aler avecques lui, qu'il se rendist à lui audit lieu de Clervaulx le plus tost qu'il pourroit. Lequel Loys se rendyt à son dit père, audit lieu de Clervaulx, le mercredi ensuivant, qui fut le xviiie jour dudit mois; et avecques lui mena lesdiz Maçon, Martin et Chaulme, ses serviteurs, qui ont tousjours acoustumé chevaucher avecques luy. Et arriva ledit Loys audit lieu de Clervaulx, ledit mercredi devers le soir, pour ce qu'il estoit parti ledit jour d'une terre appellée Baussay près Melle, appartenant à sondit père, distant dudit lieu de Clervaulx de xvii. lieues en environ. Et quant ledit Lois fut arrivé audit lieu de Clervaulx, il descendit oudit hostel où estoit logé sondit père, et sesdiz serviteurs menèrent ses chevaulx loger en une grange que tient ung nommé Mathurin Thomes, de laquelle la moityé par indivis appartient audit sire de Jarnac, à cause de ladicte moictié de ladicte seigneurie de Clervaulx ; laquelle grange est près l'ostel dudit Thomes, lesquelz hostel et grange sont près dudit hostel, où estoit logé ledit sire de Jarnac et son dit filz avecques luy, et n'y a entre lesdiz houstelz que la roche entre deulx. Et après que lesdiz serviteurs dudit Loys eurent logé leursdiz chevaulx en ladicte grange, ilz distrent audit Thomes qu'il leur baillast une chambre en son hostel, pour mettre les besongnes de leurdit maistre et pour coucher. Lequel Thomes leur fist responce que les cuvsinier et pallefrenier du sire de La Tour en AnjouIl s'agit de Christophe, seigneur de La Tour-Landry, comme on le voit dans les procès qui eurent lieu au Parlement en conséquence du meurtre de Gilles de Quatrebarbe, son parent. M. l'abbé Lalanne ne le mentionne pas sur la liste des seigneurs de Clairvaux ; il nomme « Louis de La Tour-Landry comme héritier par les Rougéde Guillaume de La Haye », et immédiatement après « Hardouin X de Maillé, du chef de Jeanne de La Tour-Landry, fille du précédent ». (Hist. de Châtelleraud et du Châtelleraudais, t. I, p. 381.) C'est une omission qu'il convient de réparer. Louis, baron de La Tour-Landry, avait épousé vers 1400 Jeanne Quatrebarbe, fille de Gilles (ou Guillaume), seigneur d'Ampoigné, compagnon d'armes du maréchal Boucicaut, et en eut Christophe, co-seigneur de Clairvaux avec Renaud Chabot, sr de Jarnac. Celui-ci n'ayant pas eu d'enfants, Jeanne de La Tour-Landry, son héritière, porta sa part de la seigneurie de Clairvaux dans la maison de Maillé, qui l'avait possédée déjà au XIVe siècle par le mariage d'Hardouin V de Maillé avec Jeanne de Bauçay., qui lors estoit logé ou chastel dudit lieu de Clervaulx, couchoient en sondit hostel et qu'il ne leur pourroit bailler chambre. Et ledit Maçon leur dist qu'il estoit nuyt et qu'ilz ne sauroient pour l'eure trouver logeis et qu'ilz logeroient bien tous ensemble et quele lendemain ilz se pourvoyroient d'un autre logeis et qu'il croyoit que lesdiz palefrenier et cuysinier dudit sire de La Tour en seroient bien contens ; et prièrent le dit Thomes qu'il le leur feist savoir oudit chastel de Clervaulx, où il leur dist qu'ilz estoient avecques leurdit maistre, et que pour ladicte nuyt il leur pleust avoir pacience. Lequel Thomes feist responce audit Maçon qu'il ne le leur manderoit point et qu'il y envoyast qui que il vouldroit. Et lors ledit Maçon ala oudit hostel, où ledit sire de Jarnac estoit logé et son dit filz avecques luy, et envoya le varlet dudit hostel audit chastel de Clervaulx, devers lesdiz pallefrenier et cuisinier, les prier qu'il leur pleust que pour la nuyt ilz logassent ensemble oudit hostel dudit Thomes. Et ce pendant ledit Maçon retourna oudit hostel dudit Thomes, et meistrent luy, lesdiz Martin et Chaulme, leurs espées, manteaux et autres besongnes en ladicte chambre dudit Thomes. Lequel varlet dudit hostel, où estoit logé ledit sire de Jarnac, ala audit chastel de Clervaulx, devers lesdiz palefrenier et cuysinier dudit sire de la Tour, et leur dist ce que ledit Maçon lui avoit chargé de leur dire, en les priant que eulx et lesdiz serviteurs dudit Loys logassent pour ladicte nuytié ensemble oudit hostel dudit Thomes ; lesquelz palefrenier et cuisinier firent responce audit varlet que lesdiz serviteurs dudit Loys n'y logeroient point et que, se icellui Loys leur maistre y estoit, qu'ilz le feroient desloger à grant haste, et que si besoing estoit, qu'ilz yroient loger audit logeis où estoit logé ledit sire de Jarnac. Et atant s'en retourna ledit varlet devers lesdiz serviteurs dudit Lois, en l'ostel dudit Thomes où estoient ; et aussi avecques eulx estoient lesdiz Giles Lorin et Colin,serviteurs dudit sire de Jarnac, qui s'estoient aliez esbatre avecques eulx et les veoir, pour ce qu'ilz n'estoient que arrivez. Lequel varlet dudit Yvon ne fut pas si tost arrivé dudit chastel oudit hostel dudit Thomes, que lesdiz palefreniers et cuysinier furent comme luy oudit hostel, ouquel ilz trouvèrent lesdiz serviteurs dudit sire de Jarnac et son dit filz et les saluèrent, et aussi firent les diz serviteurs les dessus diz, et leur donna à boire aux ungs et aux autres ledit Thomes. Et quant ilz eurent beu, lesdiz pallefrenier et cuisinier distrent aux dessusdiz serviteurs desdiz sire de Jarnac et Loys, son fils, qu'ilz ne logeroient point oudit hostel et qu'ilz deslogeassent ; lesquelz leur firent responce qu'il leur pleust qu'ilz logeassent ensemble pour ladicte nuyt et qu'ilz ne savoient où aler, pour ce qu'il estoit nuyt, et que le lendemain ilz trouveroient moien pour loger ailleurs. Lesquieulx pallefrenier et cuysinier dudit de la Tour leur distrent qu'ilz n'en feroient riens et sur ce eurent noise ensemble, sans ce qu'il y eust aucuns coups frappez, et s'en allèrent lesdiz pallefrenier et cuysinier dudit de la Tour. Et incontinant qu'ilz furent hors dudit hostel et ne peussent avoir eu temps ne espace d'estre aliez dudit hostel audit chastel, lesdiz pallefrenier et cuisinier retournèrent et avec eulx ung nommé Gilles de Quatrebarbes

Ce Gilles de Quatrebarbe était âgé d'une vingtaine d'années seulement. Christophe de La Tour-Landry, cousin de son père, qui n'avait point d'enfants, l'avait pris à son service et lui destinait une part de sa succession, c'est-à-dire les biens provenant de Jeanne de Quatrebarbe, femme de Louis de La Tour-Landry, sa mère, comme il le dit dans une plaidoirie au Parlement, pour s'opposer à l'entérinement des présentes lettres de rémission, octroyées à Renaud et Louis Chabot. Il était fils de Gilles de Quatrebarbe, écuyer, seigneur de Bouillé, qui fonda en 1444 la chapelle de ce lieu, et de Catherine de Thorigné, et avait une sœur Jeanne, mariée vers 1468 à Aymar de Thévalles. (Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, Ire édit., t. II, p. 573.) Son père et sa mère poursivirent aussi, de leur côté, les meurtriers, s'opposèrent à l'entérinement des lettres de rémission et ne parvinrent qu'à obtenir une forte réparation pécuniaire par un arrêt de la cour du 1er février 1465, que nous n'avons pas retrouvé. Le 19 juillet 1464, à leur requête, les Chabot avaient été mis en défaut, la cour réservant toutefois de leur en adjuger le bénéfice jusqu'au 10 août suivant, si les porteurs delà rémission n'avaient pas eo m paru ce jour-là; mais en attendant elle « évoqua la connaissance du principal d'entre les parties ». (X2a 32, à la date.) Le 13 août, Renaud Chabot se fit essoiner, sous prétexte d'une blessure à la jambe,par Jacques Barré, prêtre. Le 2 octobre suivant, le bénéfice du défaut fut définitivement adjugé à Gilles de Quatrebarbe et à Catherine de Thorigné; puis, le 8 mai 1465, ils se firent délivrer une commission pour faire payer à Renaud Chabot, à son fils et à leurs complices le montant des frais du procès et procéder, s'il en était besoin, à la saisie et à la vente de leurs biens. (X2a 34, fol. 98 v°.) C'est dans ce dernier acte qu'est visé l'arrêt du 1er février précédent ; il est également rappelé dans un autre arrêt du 29 mars 1469 n.s.,rendu au profit de Jean de Quatrebarbe, licencié en lois,contre Pierre Lorin, l'un des complices du meurtre de Gilles, son neveu. Il s'agissait des dépens du procès dont ledit Lorin n'avait pas encore payé sa part, montant au neuvième. La cour le condamna à s'acquitter sans retard, et le même jour, 29 mars, adressa un mandement au premier huissier sur ce requis, pour l'exécution immédiate de cette décision. (Arch. nat., X2a 36, fol. 156 v° et 215.) L'intervention de Jean de Quatrebarbe, oncle de la victime (il se qualifié son « ayant droit »), semblé témoigner que les parents de Gilles étaient décédés à cette date.

et autres jusques au nombre de huit ou plus, lesquelz, comme l'on dit et aussi qu'il est à presumer, estoient près d'illec embuschez, et estoient embastonnez de espées, espiotz et autres armes invasibles, et allèrent tout droit audit hostel dudit Thomes et faisoient grand bruit oudit hostel, ouquel estoient les diz Maçon, Marin, Gilles et autres serviteurs desdiz sire de Jarnac et son dit filz dessus nommez. Lesquelz, quant il les oyrent venir, fermèrent Tuys de ladicte chambre où ilz estoient. Et incontinent que les dessusdiz [serviteurs] dudit de la Tour furent entrez en une court qui est fermée de murs de la haulteur d'un homme en environ, laquelle est en l'entrée dit hostel dudit Thomes, ilz fermèrent l'uys de ladicte court et crièrent à haulte voys telles parolles ou semblables : « Thuez, thuez ! A mort, à mort » ! faisant grans seremens, « nous y entrerons » ; et s'efforcèrent rompre la porte de la chambre où estoient les serviteurs desdiz sire de Jarnac et son dit fils ; et pour rompre ladicte porte, frappèrent plusieurs coups encontre, tellement qu'ilz levèrent une grant pièce de ladicte porte, et aussi gectèrent plusieurs grosses pierres contre la fenestre de ladicte chambre. Lequel bruit qui estoit grant, comme dit est, ouyrent ledit sire de Jarnac, sondit fils et ledit Goulart, qui estoit avecques eulx oudit logeis d'icellui sire de Jarnac qui est près, comme dit est, de l'ostel dudit Thomes, où estoit ledit bruit. Lequel sire de Jarnac dist à son dit filz et Goulart telles parolles : « Escoutez, velà grand bruyt » ; et adonc ilz escoutèrent et oyrent de rechief que l'ont crioit, et ledit sire de Jarnac dist : « Je croy que l'on bat noz gens ; allons veoir que c'est ». Et incontinent en icelle heure, qui estoit environ jour couchant, ledit sire de Jarnac print ung baston en sa main, et ne voult prandre son espée qui estoit en la chambre où il estoit ; ledit Loys, son filz, print son espée, et ledit Goulart avecques eulx qui n'avoit verge ne baston, et tous trois allèrent audit hostel dudit Thomes où estoit ledit bruit. Et quant ilz furent à la porte de ladicte court qui est en l'entrée dudit hostel, ilz la trpuvèrent fermée ; et estoient au dedans de ladicte court les dessusdiz serviteurs dudit de la Tour et ledit de Quatrebarbes, qui faisoient ledit bruyt et couroyent sus à leursdiz serviteurs, et s'efforçoient rompre la porte de ladicte chambre où ilz estoient. Et lors ledit Loys saillit par dessus le mur de ladicte court et entra au dedans pour savoir et veoir que c'estoit. Et incontinent les dessusdiz [serviteurs du sire] de la Tour prindrent ledit Loys et sadicte espée, laquelle estoit en fourreau, sans ce qu'il Teust tirée et luy misdrent deux ou trois espées toutes nues contre la poictrine, en jurant qu'il mourroit et le tueroient ; et le frappèrent sur la teste sans le blesser. Lequel seigneur de Jarnac, croyant sondit filz en danger et peril, deist audit Goulart qui estoit avecques luy au dehors de ladicte court : « Goulart, ilz thuent mon filz ! Entrez par dessus le mur et me ouvrez la porte ». Et incontinant ledit Goulart monta par dessus ledit mur et entra en ladicte cour et ouvrit la porte d'icelle audit sire de Jarnac, qui entra au dedans et vit comme les dessusdiz serviteurs dudit de la Tour couroient sus à son dit filz ; ausquelz il dist telles parolles : « Qu'est cecy ? Voulez vous tuer mes gens? » Et lors ledit Goulart print ung baston qu'il trouva en ladicte court, et incontinant ung grant homme des gens dudit de La Tour, qui estoit en pourpoint, duquel les dessusdiz n'avoient aucune congnoissance, mais depuis ont sceu que c'estoit ung nommé le Gros Pierre, se adressa audit sire de Jarnac et d'une espée toute nue qu'il avoit en sa main s'efforça plusieurs foiz le frapper par le corps, mais ledit sire de Jarnac y obvya et resista de sondit baston qu'il avoit. Et en ce faisant, icelluy sire de Jarnac vit sondit filz ou danger dessus dit et soy adressa à luy pour le secourir ; et quant il fut près, les dessusdiz qui courroient sus à sondit filz se deppartirent, escartèrent et laissèrent sondit filz, et en arivant, l'un des dessusdiz qui couroient sus à sondit filz frappa ledit seigneur de Jarnac d'un grand cousteau ou bracquemart ou espée ung peu au dessus de la paile du genoul de la jambe senestre, et le bleça bien fort. Et lors lesdiz Maçon et autres dessus nommez serviteurs desdiz sire de Jarnac et sondit filz, qui estoient en ladicte chambre, saillirent pour secourir leursdiz maistres, et avoient lesdiz Maçon, Giles et Colin chacun une espée toute nue en la main, et frappèrent sur lesdiz gens dudit de La Tour et ceulx dudit de La Tour sur eulx, tellement que en y eut plusieurs blecez d'une part et d'autre, et mesmement l'un des dessusdiz dudit de La Tour, lequel lors ilz ne congoissoient, mais depuis ont sceu que c'estoit ung nommé FaulselionJean Tibert ou Thibert, dit Fausselion. lequel soy adreça audit Maçon et d'une espée toute nue qu'il avoit voulut blecier ledit Maçon, lequel y resista ; et ledit sire de Jarnac, ce voyant, frappa dudit baston ledit Faulselion sur l'ueil tellement qu'il le tumba à terre. Et ce fait, le dessus dit qui avoit blecié ledit sire de Jarnac vint par derrière et derechief de ladicte espée ou grant cousteau qu'il avoit frappa ledit sire de Jarnac sur le gras de la jambe destre et le blessa très fort, dont il est très grandement malade et en danger d'estre perdus de ladicte jambe. Et lors ledit Giles, qui estoit près dudit sire de Jarnac, son maistre, lui dist telles parolles : « Monseigneur, vous estes blecié » ; et lors ledit seigneur de Jarnac deist audit Giles en lui tendant la main qu'il lui baillast son espée, ce que fist ledit Gilles, pour ce que le dessusdit qui l'avoit blecié luy couroit tousjours sus et s'efforçoit de le tuer ou blecier. Et incontinent que ledit sire de Jarnac eust ladicte espée, esmeu de ce que le dessusdit l'avoit blecié et lui couroit encores sus, il frappa le dessusdit, qui l'avoit blecié, de sadicte espée deux coups sur la teste, et semblablement ledit Maçon frappa le dessusdit de sa dicte espée ung coup ou deux, et aussi ledit Colin le frappa de sadicte espée deux coups, dont l'un estoit sur le derrière de la jambe et l'autre en autre partie de son corps ; au moien desquelz coups il tumba à terre. Et ne savoient lesdiz seigneur de Jarnac, Maçon et Colin qui estoit le dessus dit qu'ilz avoient blecié, mais ledit Thomes soy escrya, quant il le vit tumber, en disant : « Monseigneur, ne le tuez pas, c'est le cousin de monseigneur de La Tour ». Et lors ledit seigneur de Jarnac gecta son espée et à tant se departirent, sans ce qu'il y eust plus aucuns coups frappez, et lequel qui ainsi fut blecié par ledit seigneur de Jarnac, Maçon et Colin, s'en alla tout par luy hors de ladicte court et ne le congnoissoient, mais depuis ont sceu que c'estoit ledit de Quatrebarbes, lequel les autres, qui estoient avecques lui venuz, enmenèrent incontinent oudit chastel de Clervaux, où estoit ledit seigneur de la Tour, comme ilz ont ouy dire depuis. A l'occasion desquelz coups ou aucuns d'eulx, icelluy de Quatrebarbes, ladicte nuyt, ala de vie à trespas

En regard de la version rapportée dans ces lettres de rémission, qui rejette la responsabilité de la rixe sur les serviteurs du baron de La Tour-Landry, nous placerons ici celle des parents et amis de Gilles de Quatrebarbe. Elle explique l'origine et les motifs de l'animosité qui existait entre les deux co-seigneurs de Clairvaux. Christophe de La

Tour-Landry était, disait-il, le véritable seigneur de ce domaine. Il avait été partagé, il est vrai, entre son père et sa tante Jeanne de La Tour, qui avait épousé Jean de Rochechouart ; mais en qualité d'aîné, Louis de La Tour-Landry avait eu, selon la coutume, le château avec ses clôtures anciennes, le droit de recevoir les hommages et aveux, de créer et instituer les officiers chargés d'exercer la juridiction, en un mot tous les droits seigneuriaux, tandis que sa sœur ne possédait que sa part des revenus de la terre. Christophe avait hérité de tout ce qui avait appartenu légitimement à son père et en avait joui sans contestation pendant vingt ans. L'autre part était échue à Isabelle, fille unique de Jean de Rochechouart et de Jeanne de La Tour. Renaud Chabot, mediis quibusdam exquisitis et indebitis, s'était uni par mariage avec cette héritière, sans le consentement et contre la volonté de ses parents, et àcause d'elle il était entré en possession de l'autre portion du domaine de Clairvaux. C'était un homme querelleur et processif, et personne ne pouvait vivre en paix avec lui. Mécontent de son lot, il se fit délivrer par le sénéchal de Poitou litteras querimonie, afin d'exercer la justice dudit lieu, et les lit exécuter au préjudice de Christophe. Celui-ci, de son côté, obtint de la cour des lettres en vertu desquelles Jean Chambon, conseiller, après s'être assuré des droits appartenant aux La Tour-Landry, le maintint dans leur exercice, ce qui fut fait sans que le sr de Jarnac relevât appel. Néanmoins,au mépris du procès ainsi engagé et sans attendre le jugement définitif, il avait fait tenir à son profit par Louis Chèvredent les assises de la seigneurie de Clairvaux. Christophe de La Tour s'y opposa et se porta appelant au Parlement. Depuis il vint résider au château de Clairvaux, accompagné de plusieurs de ses serviteurs, parmi lesquels était un jeune ecuyer, Gilles de Quatrebarbe, son cousin, auquel, à défaut d'enfants, il se proposait de léguer les biens provenant de sa mère. Il avait fait annoncer l'ouverture des assises de ladite seigneurie pour le 24 avril suivant (1464). Renaud Chabot, l'ayant appris, avait déclaré publiquement qu'il saurait bien empêcher cette session et qu'il s y présenterait comme principal avocat ; un de ses serviteurs, Pierre Lorin, avait même ajouté que, si les assises se tenaient, il y aurait des bras et des jambes cassés, des visages ensanglantés.

Le sr de Jarnac avait en outre fait prier plusieurs hommes d'armes de se trouver, ledit jour 24 avril, au bourg de Clairvaux, et lui-même y arriva, le 16, avec Jacques Goulart, son capitaine, et plusieurs autres compagnons, armés de bâtons ferrés et autres instruments de guerre; ils y prirent logement. Le lendemain, au coucher du soleil. Louis Chabot, son fils, s'y présenta à son tour, en compagnie de Guillaume Le Maçon et de Martin Larcher. Le premier alla loger avec son père et les deux autres se rendirent chez Mathurin Thomes, lui demandant de les héberger. Thomes répondit qu'il n'était pas hôtelier et n'avait chez lui de place que pour sa famille, sauf une chambre déjà occupée par deux serviteurs du sr de La Tour-Landry, depuis que celui-ci était venu s'installer au château. Le Maçon lui déclara alors que, bon gré ou non, son compagnon et lui y demeureraient, lors même que La Tour-Landry s'y trouverait en personne, et que quant à ses deux serviteurs, ils pouvaient chercher à se loger ailleurs où bon leur semblerait, jurant que si Thomes disait un mot de plus, on lui enlèverait la tête des épaules. Et ainsi, malgré le maître du logis, Le Maçon et Morin s'introduisirent dans la pièce occupée parle queux et le palefrenier du sr de La Tour. Quand ceux-ci rentrèrent à l'heure habituelle après le dîner de leur maître, le palefrenier, qui était en tête, salua honnêtement les deux intrus. Le Maçon et Larcher, s'adressant alors à Thomes, lui demandèrent si ce galant était des gens du ditde La Tour, et sur la réponse affirmative qui leur fut faite, ils lui intimèrent aussitôt, sur un ton de colère, l'ordre de chercher un logement ailleurs. Louis Chabot, entendant le bruit des voix, appela un de ses serviteurs nommé Martin et lui remit deux épées pour les porter à Le Maçon et à Larcher et leur commander de sa part de se maintenir dans ladite maison et de n'en point sortir. Sans plus discuter, les deux serviteurs se saisirent des épées, les tirèrent du fourreau et en portèrent plusieurs coups au cuisinier et au palefrenier, en blasphémant et jurant que, s'ils ne quittaient le lieu sur-le-champ, ils leur tireraient l'âme du corps; ils les poursivirent jusqu'aux barrières du château de Clairvaux, puis retournérent à la maison de Thomes. Le tumulte et les cris firent sortir du château Gilles de Quatrebarbe et le nommé Fausselion, et comme les cuisinier et palefrenier lui rapportèrent les violences qu'ils venaient de subir, ils se dirigèrent vers ladite maison, pour apaiser le conflit et faire rendre la chambre. Quand ils furent arrivés dans la cour, Louis Chabot y pénétra de son côté en escaladant un mur, l'épée à la main, et se jeta impétueusement sur les gens du sr de La Tour-Landry ; mais eux, avec douceur et sans lui faire aucun mal, alors qu'il leur eût été facile de le blesser ou de le tuer, se contentèrent de le prendre au corps, s'efforçant de le maintenir en arrestation. A ce moment, survint le sr de Jarnac, tenant à la main un gros bâton carré de quatre ou cinq pieds de long, en compagnie d'autres hommes armés d'épées et de bâtons ferrés, et sans désemparer il frappa ledit Fausselion à grands coups sur le front et sur la main droite. Louis Chabot, de son côté, avait appelé ses deux serviteurs qui étaient rentrés dans la chambre ; ils en sortirent l'épée nue et se ruèrent, avec Jarnac et ses hommes, sur Quatrebarbe, Fausselion et quelques autres domestiques du sr de La Tour, qui étaient venus à la rescousse, et les frappèrent à coups redoublés. Le sr de Quatrebarbe reçut trois graves blessures à la tête, à la cuisse et à la jambe, auxquelles il succomba quatre heures plus tard.

Christophe de La Tour-Landry, le jour suivant, fit inhumer son malheureux parent et célébrer un service solennel pour le salut de son âme. Le même jour, Renaud Chabot avoua à Mathurin Thomes avoir frappé les coups qui avaient déterminé la mort de Gilles de Quatrebarbe, et blessé Jean Thibert, dit Fausselion. Le sr de La Tour porta plainte aux officiers du vicomte de Châtellerault, qui vinrent s'emparer des coupables et les retinrent prisonniers. En présence de ceux-ci, le sr de Jarnac déclara derechef, publiquement et arrogamment, que c'était lui qui avait frappé et ordonné de frapper. Néanmoins les officiers de Châtellerault rendirent la liberté aux prisonniers, quelques jours plus tard. (Arch. nat., X2a 40, fol. 198 v° et s.)

Renaud et Louis Chabot avaient obtenu promptement leur rémission, le meurtre ayant eu lieu le 18 avril 1464etles lettres étant datées de mai. Nous avons vu que le père et la mère de Gilles avaient exercé des poursuites contre les meurtriers et obtenu une forte réparation pécuniaire, le 1er février 1465 (ci-dessus, p. 470,note) ; cette condamnation des Chabot et de leurs complices « à payer une grosse somme de deniers » aux parents de leur victime, est rappelée encore dans l'arrêt du 14 août 1475, qui termina le long procès que, de son côté, leur avait intenté Christophe de La Tour, et dont nous allons examiner sommairement les différentes phases. Dès le mois de juin, sur sa plainte, le Parlement avait prescrit une enquête sur le meurtre et ses circonstances et ordonné avant tout d'amener prisonniers à la Conciergerie les deux Chabot et trois autres des plus coupables. Le Conservateur des privilèges de l'Université d'Angers, chargé de l'information, s'était rendu à Poitiers, où, comme il lui avait été rapporté, les meurtriers s'étaient constitués prisonniers et étaient en instance devant le sénéchal pour obtenir l'entérinement de leurs lettres de rémission ; mais quand il y arriva, le sénéchal de Poitou, qui était très favorable aux Chabot, les avait déjà remis en liberté, de sorte qu'il ne put accomplir son mandat et dut se contenter de les ajourner personnellement au Parlement de Paris, sous peine de bannissement et de confiscation. La cour, le 6 juillet suivant, adressa au lieutenant du bailli de Touraine à Chinon une autre commission, lui enjoignant de saisir les biens des coupables, par tous moyens de droit, et de les faire, administrer sous la main du roi, nonobstant l'opposition ou appel. (X2a 30, fol. 393 v°.) Ni les Chabot, ni Goulart, ni les autres complices ne se rendirent à l'assignation qu'ils avaient reçue pour le 19 juillet, et la cour rendit contre eux, ce jour-là, son premier jugement par défaut, qui fut confirmé le 13 août et le 2 octobre. (X2a 32, aux dates.) Quoique défaillants, les coupables ne désertaient pas le procès. Par requête ils avaient remontré à la cour que, n'ayant pas été les agresseurs, ils n'avaient demandé leur rémission que par excès de précaution et qu'ils auraient pu s'en passer, et puisqu'elle avait évoqué la cause devant elle, ils la priaient de faire entendre leurs témoins; cette requête fut accueillie, et un conseiller au Parlement reçut mission de faire secrètement une enquête, par mandement du 28 août 1464. (X2a 30, fol. 410 v°.) Le sr de Jarnac, son fils et leurs complices réussirent même à se faire délivrer des lettres de grande chancellerie, par lesquelles la connaissance de l'affaire était rendue au sénéchal de Poitou, avec liberté à celui-ci de donner mainlevée de la saisie. Christophe de La Tour-Landry protesta et obtint à son tour du Parlement un mandement adressé au premier conseiller requis, au bailli de Touraine et des ressorts et exemptions d'Anjou et du Maine, et au Conservateur des privilèges de l'Université d'Angers, portant défense au sénéchal de Poitou de connaître du principal et lui enjoignant de maintenir sous séquestre les biens des intimés. Cet acte porte la date du 10 octobre 1464. (Id., fol. 418.) Le 4 février 1465 n. s., nouvelle décision contradictoire : « Vu par la cour la requête à elle présentée par Renaud Chabot, chevalier, sr de Jarnac, contenant que, à l'occasion de la mort de Gilles de Quatrebarbe, Christophe de La Tour, écuyer, s'est porté demandeur au Parlement contre lui et plusieurs de ses serviteurs et, quoique le cas ne le touchât pas personnellement et qu'il n'y eût aucun intérêt, il se fit donner par ladite cour des lettres au moyen desquelles, et en vertu d'une information telle quelle, faite par Pierre Guyot et Jean Bernard, plusieurs terres, domaines et biens lui appartenant avaient été mis sous la main du roi, et Jacques de Vaucelles, Mathurin Thomes et autres serviteurs dudit de La Tour-Landry, nommés commissaires pour les administrer, ladite cour lui fait recréance desdites terres et biens et ordonné qu'ils lui soient délivrés sans délai et jusqu'à nouvel ordre ». (X2a 34, fol. 73 v°.) Puis, à la date du 16 juin 1466, on trouve une commission à Jean des Plantes et à Jean de Longueil, conseillers au Parlement, de faire une enquête contradictoire par interrogatoire de témoins sur les faits et articles que la cour leur transmet, entre Christophe de La Tour et les Chabot, Goulart et autres, et de renvoyer close et scellée avant le lendemain de la Saint-Martin d'hiver, jour où les parties viendront répondre. (Id., fol. 228 v°.) Entre cette date et le 14 août 1475, on ne trouve plus rien de cette affaire sur les registres criminels du Parlement, dont la collection d'ailleurs n'est pas complète. Il est probable que le sr de Jarnac parvint à faire saisir de nouveau le sénéchal de Poitou et s'ingénia à faire traîner les choses en longueur. Cependant le sr de La Tour-Landry, avec une tenacité que rien ne pouvait lasser, ne cessa pas de poursuivre la réparation civile qu'il prétendait lui être due; il s'adjoignit Jean Thibert, dit Fausselion. qui avait été blessé grièvement dans la bagarre, et sur un nouvel appel au Parlement, il finit par obtenir satisfaction. Près de douze ans après le meurtre de Gilles de Quatrebarbe, le 14 août 1475, la cour rendit son arrêt définitif, condamnant Renaud et Louis Chabot, chevaliers, à payer à Christophe de La Tour-Landry 400 livres parisis et 100 livres à Fausselion, et les' autres complices, c'est-à-dire Goulart, d'Assigniers,Le Maçon, Larcher, Lorin, Chaume et Fauconnier, chacun à 30 livres parisis envers le sr de La Tour. Sur les sommes adjugées à celui-ci, dont le total s'élevait à 610 livres parisis, 50 livres devaient être prélevées, savoir 30 livres pour la célébration d'un service et obit solennel en l'église et chapelle de Clairvaux, dans laquelle Gilles de Quatrebarbe avait été inhumé, et les autres 20 livres pour distribuer aux pauvres des localités voisines, à l'issue du service. Les Chabot et consorts furent en outre condamnés à acquitter tous les dépens. (X2a 40, fol. 198 v°, 200.)

. Et à ceste cause, ledit seigneur de Jarnac, sondit fils, Maçon, Lorin, d'Assigners, Binet et Chaulme sont à present detenuz prisonniers audit lieu de Chasteleraut, où ilz sont en voye de finer miserablement leurs jours, et lesdiz Goulart et Colin se sont absentez du païs et n'y oseroient jamais seurement converser ne reperer, se nostre grace et misericorde ne leur estoit sur ce impartie, si comme ilz dient, humblement requerant icelle. Pour quoy nous, etc., et mesmement les services que ledit sire de Jarnac a par long temps faiz à feu nostre très chier seigneur et père que Dieu absoille, ou fait des guerres, et pareillement que sondit filz nous a faiz ou derrenier voyage de Cathelongne, ledit Maçon estant en sa compaignie, voulans aussi misericorde preferer à rigueur de justice, ausdiz sire de Jarnac, sondit filz, Goulart, etc. avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par cesdictes presentes, au seneschal de Poictou et à tous, etc. Donné à Meslay, ou mois de may l'an de grace mil iiie lxiiii, et de nostre règne le iiie.

Ainsi signé : Par le roy, les contes du Maine et de Com- minge, les sires du Lau, de CrussolCharles d'Anjou, comte du Maine, Jean, bâtard Armagnac, comte de Cominges, Antoine de Châteauneuf, sr du Lau, et Louis de Crussol, sénéchal de Poitou. (Cf. ci-dessus, p. 269, 299, 448, 450, notes.), de la BardeJean d'Estuer, seigneur de La Barde, écuyer, officier du dauphin ; étant en 1452 sous les ordres du grand sénéchal de Normandie, il se retira en Dauphiné. Charles VII lui enjoignit, mais en vain, de revenir près de lui, d'après Mathieu d'Escouchy. Jean, sr de La Barde, devint plus tard conseiller et chambellan de Louis XI, sénéchal de Limousin, en 1463, bailli de Mâcon et sénéchal de Lyon, en 1475., de LendesCharles de Melun, sr de La Borde, baron de Landes, bailli de Sens. (Cf. ci-dessus, p. 439, note.), de BresseureJacques de Beaumont, chevalier, seigneur de Bressuire. (Cf. dessus, p. 123, note.) et autres presens. Toustain. — Visa. Contentor. J. Duban.

MCCCXCVII Septembre 1464

Rémission accordée à Pierre Person, archer, et à Jean Boutevillain, coutillier de la compagnie d'ordonnance de Joachim Rouault, maréchal de France, coupables du meurtre d'un meunier à Saint-Martin près Chauvigny.

AN JJ. 199, n° 433, fol. 272 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Pierre Person, natif de Lorraine, archier, et Jehan Boutevillain, natif de nostre païs de Normandie, coustilleur de la compaygnie et retenue de nostre amé et feal conseiller et chambellan, Jouachin RouaultJoachim Rouault, fils aîné de Jean, seigneur de Boisménart, et de Jeanne Du Bellay, dame du Colombier, a fait l'objet d'une notice biographique dans notre t. VIII, p. 344, et est mentionné à plusieurs reprises dans le précédent volume et dans celui-ci., mareschal de France, soubz nostre bien amé Loys de Marant

Ce personnage appartenait à une famille noble du Poitou qui possédait, aux XVe et XVIe siècles, la seigneurie des Ormes-Saint-Martin, relevant de la vicomté de Châtellerault, et dont le chef, en 1434 et encore à l'époque où nous sommes, était Guillaume de Marans, écuyer, mari d'Alix Esgret ou Aigret, qui lui avait apporté cette terre des Ormes. (L'abbé Lalanne, Histoire de Ckâtelleraud et du Châtelleraudais, t. 1, p. 442.) Guillaume de Marans est inscrit sur le livre des hommages et aveux dus au comte de Richemont, en qualité de seigneur de Parthenay, comme devant hommage plein pour une borderie de terre appelée la Mimaudière, sise en la paroisse de Mazières-en-Gâtine, et aussi pour une autre borderie dite le Pont et autres petits fiefs situés dans les paroisses de Verruye et de Mazières. (Arch. nat., R1* 490, fol. 255.) Ce Guillaume était aussi seigneur de Loubressay, paroisse de Bonnes, et aurait eu deux fils, suivant M. d'Argenson, Charles, seigneur des Ormes-Saint-Martin, et François. (Notice sur l'ancienne châtellenie des Ormes-Saint-Martin, dans les Mémoires de la Société des Antiquaires de l'Ouest, t. XXII, année 1856.) Louis de Marans était peut-être l'un de ses fils, ignoré des historiens. Les Marans étaient au XVIIe siècle seigneurs de Saint-Mars, de Landetrie, de la Chauvetière, du Tartre en l'élection de Châtellerault, et furent maintenus comme nobles et écuyers, le 29 juillet 1715, par Quentin de Richebourg, intendant de la généralité de Poitiers. (M. A. de la Bouralière, Maintenues de noblesse prononcées par MM. Quentin de Richebourg et Desgalois de La Tour, Arch. hist. du Poitou, t. XXIII, 1893, p. 129 et 150.)

, escuier, homme d'armes de ladicte compaignie, contenant que la veille de la feste des Roys derrenière passée, lesdiz supplians qui lors estoient de la compaignie de nostre amé et feal conseiller et chambellan le sire de La BardeJean d'Estuer, sr de La Barde. (Cf. ci-dessus, p. 479, note 2.) seneschal de Limosin, venoient de Normandie où ilz estoient en garnison et s'en aloient en Limosin au logeis de leur dit maistre, au lieu nommé le Bellat (sic), et en passant par une parroisse nommée Saint Martin près Chauvigny en Poictou, ledit Jehan Boutevillain descendi de son cheval et entra en ung moulin en ladicte parroisse et demanda à la femme du meusnier, qui là estoit, qu'elle luy donnast une poulle pour le soupper de luy et de son compaignon, à faire leur royaulté, et elle respondy qu'elle le feroit volentiers, mais qu'elle ne la pourroit prandre ; et lors il bailla son cheval à tenir audit Person et courust aprèz ladicte poulle, qui se bouta en une estable ou tet à oyes, et ledit Jehan entra après et y trouva une oye grasse et la prinst et emporta hors, et la bailla à sondit compaignon qui estoit encores à cheval. Et illec vint et arriva le mary d'icelle femme, qui emportoit deux tourtes sur sa teste, lequel les gecta à terre et print ledit Pierre Person par la bride de son cheval et le saisy au corps, en lui disant qu'il respondroit de lui avant qu'il luy eschappast, en luy demandant qu'il vouloit faire de celle oye, et il lui dist qu'il la vouloit menger à soupper pour faire les Roys. Pendant lequel debat, ladicte femme du meusnier apporta une poule qu'elle leur vouloit bailler pour ladicte oye ; mais ledit mary jura qu'ilz n'auroient ne poulle ne oye. Sur quoy lesdiz compaignons disdrent que sy auroient, et pour ce que ledit mary tenoit tousjours ledit Person et son cheval à la bride, ledit Pierre lui dist par plusieurs foiz qu'il le laissast, et il lui disoit tousjours que non feroit et qu'il respondoit de luy. Et adonc ledit Pierre, doubtant qu'il ne lui feist pis, tira sa dague et lui en donna ung coup du plat sur l'espaulle, et pour celle cause le cuida ledit meusnier renverser sur son cheval. Pour laquelle cause et qu'il vit que ledit meusnier luy faisoit force, luy donna ung autre coup d'icelle dague sur la teste, dont il yssy sang, et après ledit meusnier, soy voyant feru, laissa ledit Pierre. Et tantost après icellui Jehan Boutevillain monta à cheval et tira son espée, mais oncques n'en frappa coup. Et pour ce qu'ilz voyoient les gens mouvoir, s'en allèrent audit lieu de Belat, au logeis de leurdit maistre, lequel ilz ne trouvèrent pas, et pour ce laissèrent leurs habillement audit logeis et s'en alèrent à une abbaye nommée Mortemar, où ilz furent bien xv. jours, et de là ensuyte parmy le pays, pour ce qu'ilz oyrent dire que ledit meusnier estoit mort. A l'occasion duquel cas, lesdiz supplians doubtans, etc., ne se oseroient bonnement trouver nulle part, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, comme ilz dient, requerant humblement que, attendu que ladicte femme leur vouloit donner ladicte poulle et jà l'avoit prinse, se ne feust sondit mary, et que souvent luy dist amiablement qu'il le laissast, avant qu'il le frappast, et n'y eut que ung seul coup où il y eust sang, et ne le cuidoit si fort blecier, il nous plaise leur impartir icelles. Pourquoy nous, etc., voulans, etc., ausdiz Pierre Person et Jehan Boutevillain, supplians,avons ou cas dessus dit quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en man- dement aux seneschaulx de Poictou et de Limosin et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Abbeville, ou mois de septembre l'an de grace mil iiiie lxiiii, et de nostre règne le imme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. De La Loère. — Visa. Contentor. J. Duban.