Recueil des documents concernant le Poitou contenus dans les registres de la Chancellerie de France École nationale des chartes Mathilde Henriquet 2015 — encodage 2015 http://elec.enc.sorbonne.fr/actesroyauxdupoitou/ École nationale des chartes
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Éditions en ligne de l'École des chartes http://elec.enc.sorbonne.fr Paul Guérin (éd.) Paul Guérin, Recueil des documents concernant le Poitou contenus dans les registres de la Chancellerie de France, t. XII : 1475-1483, Paris, 1919 (Archives historiques du Poitou, 41).

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Création du fichier
Recueil des documents concernant le Poitou contenus dans les registres de la Chancellerie de France publiés par Paul Guérin, archiviste aux archives nationales, XII, (1475-1483) Actes royaux du Poitou, t. 12 (1475-1483) MDXLVIII Janvier 1475, n.s.

Rémission obtenue par Guillaume Regnault, charpentier de Deuil, détenu prisonnier audit lieu. Trois compagnons, se prétendant hommes de guerre, ayant perdu tout leur avoir et venus dans le pays pour un vœu à Notre-Dame de Celles, quêtaient en menaçant ceux qui refusaient de leur donner, puis avaient envahi la maison dudit Regnault qui, obligé de se défendre contre eux, frappa l’un d’un coup de fourche dont il mourut au bout de dix-huit jours.

AN JJ. 195, n° 1293, fol. 284 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 1-4

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Guillaume Regnault, povre homme, charpentier, demourant à Deul, chargé de femme et de mesnaige, contenant que, le mardy xxvie jour de septembre derrenier passé à heure de vespres, ledit suppliant estant en sa maison, survindrent illec troys compaignons, dont l’un estoit en estat de homme de guerre et les autres en estat de coquins, dont l’un se disoit maistre des autres et se faisoit appeller Artus de La Guerre et l’autre Marquis et l’autre Charles ; lesquelz se disoient estre gens de guerre et avoient tout perdu le leur. Et à ceste cause et aussi pour ce qu’ilz se disoient avoir esté prisonniers en Bourgoigne, ilz s’estoient vouez à Nostre Dame de Celles et estoient venus en ce païs pour faire leurs voyaiges, et pour ce qu’ilz n’avoient de quoy voyager, s’estoient mis à quester et aloient par le villaige de Deul, querant et amassant du blé, et en ce faisant menassoient ceulx qui ne leur vouloient donner, en disant que devant qu’il fust xv jours qu’ilz en auroient et prendroient à leurs guises. Et ledit jour demandèrent audit suppliant, heure susdite, s’ilz pourroient bien mettre leur blé qu’ilz avoient questé en sa maison, et que ilz questeroient. Lequel suppliant leur fit response que oy, mais que il ne pourroit loiger leurs personnes ; et atant les dessusdiz vuydèrent leur blé en une rondelle que ledit suppliant leur bailla en sadicte maison, et s’en alèrent quester. Et après soleil couché dudit jour, l’un desdiz compaignons, nommé Marquis, retourna en la maison dudit suppliant et demoura près de demy heure avec ledit suppliant, le regardant faire son mestier, et tost après vindrent les autres deux, ledit Artus demanda audit Marquis s’il avoit fait habiller à soupper ; lequel Marquis respondit que non et que ledit suppliant luy avoit dit qu’il ne leur habilleroit point à soupper et ne loigeroient point à sa maison. Et adonc ledit Artus, qui depuis s’est nommé Jehan de La Brosse jura le corps de Dieu que tantost il luy en feroit bien habiller, et incontinent icelluy Artus vint au varlet de ladite maison et luy dist qu’il luy habillast à soupper, et ledit suppliant, illec present, respondit qu’il n’avoit de quoy et aussi n’avoit loigis pour les loiger et qu’ilz ne loigeroient point en sadicte maison. Et adoncques ledit Artus se despoilla et jura et regnya le nom de Dieu qu’il loigeroit en ladicte maison et luy feroit bien aprester le soupper, et print une coignée en ses mains, et ledit Charles une reigle de boys longue de cinq piez. Et ce voyant ledit suppliant, voulant obvier que les dessusdiz ne lui faissent aucun mal, issit hors de sa maison par une petite porte ; mais lesdiz Artus et Charles le suyvirent et mirent ledit suppliant en fuyte et en s’en fuyant rencontra une forche de fer à troys doiz, dont en relieve le femier, et ledit Charles, qui suyvoit pié à pié ledit suppliant, le vouloit fraper de ladite reigle de boys sur la teste ; mais icelluy suppliant leva ladicte forche et sur icelle receupt ledit cop, combien que d’icelluy cop il fut actaint sur les doiz de sa main et en fut blecié à sang et playe. Et ledit Artus, qui avoit ladicte coignée s’efforça fraper d’icelle ledit suppliant, mais de sa dicte fourche il receupt ledit cop et d’icelle fourche icelluy suppliant frapa ledit Charles sur la teste tellement qu’il tomba à terre. Et ce fait lesdiz Artus et Marquis s’en alèrent, et ledit suppliant fist penser ledit Charles et envoya jusques en la ville de Mausis

Sic pour Mauzé.

, querir des barbiers et cirurgiens, et le fist penser, nourrir et entretenir l’espace de xviii. jours qu’il estoit presque guery et s’en vouloit aler après ses compaignons, s’il eust eu robe et habillement, et durans lesdiz xviii. jours aloit et venoit, disant qu’il estoit guery et ne vouloit croire son barbier qui le pensoit, tellement qu’il tumba en une maladie de fièvre, à l’occasion de laquelle ou dudit cop, au bout desdiz xviii. jours, il est alé de vie à trespassement. A l’occasion duquel cas ledit suppliant a esté fait et constitué prisonnier par la justice dudit lieu de Deul

La justice appartenait au prieuré de Notre-Dame de Dœuil, qui faisait partie du diocèse de Maillezais et avait droit de présentation aux cures des paroisses de Sansais, de Saint-Étienne la Cigogne et de Rançon, trois bénéfices à la collation de l’évêque de Saintes (Beauchet-Filleau, Pouillé du diocèse de Poitiers, in-4°, p. 367, 403, 410). Nous avons vu que le prieuré fortifié de Dœuil avait été pris d’assaut et pillé par Antoine de Vivonne, décapité le 8 mai 1431. (Archives hist. du Poitou, t. XXIX, introduction, p. xxviii.)

et ses biens meubles inventoriés et mis en main de justice, et dobte, etc., se notre grace, etc. Pour quoy etc., audit suppliant avons quicté, etc. les fait et cas dessusdit avec toute peine, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, etc. Donné à Paris, ou moys de janvier l’an de grace mil cccc. soixante quatorze, et de nostre règne le xiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil.

MDXLIX Février 1475, n.s.

Lettres permettant à Guillaume d’Appelvoisin, écuyer d’écurie du roi, d’instituer une foire annuelle, le jour de la saint Pierre, à Pugny dont il était seigneur.

AN JJ. 195, n° 1094, fol. 248 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 4-6

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre chier et bien amé escuier d’escuierie, Guillaume d’Appellevoisin, seigneur de Pugny

La terre et seigneurie de Pugny appartenait, dès les premières années du xive siècle, à la branche aînée de la famille de Coloigne. Perceval, chevalier, seigneur de Pugny, le Breuil-Bernard, Pierrefitte, etc., sénéchal de Poitou en 1374-1375, dont nous avons parlé longuement (Arch. hist. du Poitou, t. XIX, p. 200 note et aliàs), étant décédé sans enfants de Jeanne de la Grisille, sa femme, laissa une partie de ses biens, dont la terre de Pugny, à sa sœur Héliette de Coloigne, femme de Jean, autrement dit Guillaume, d’Appelvoisin, chevalier, seigneur de la Girardière, Chaligné, etc., ou à leurs enfants. Ce Guillaume d’Appelvoisin, qui obtint de Louis XI l’institution d’une foire et la permission d’édifier une maison forte à Pugny, était l’arrière-petit-fils d’Héliette. Fils aîné de Jacques d’Appelvoisin, chevalier, seigneur de la Guiraire, Pugny et Chaligné, et de Jeanne de la Jumelière, il se maria, par contrat du 29 janvier 1478, avec Iseult de Liniers, fille de Michel, baron d’Airvault. et de Marie Rousseau.

Louis de Beaumont, seigneur de la Forêt-sur-Sèvre, pour se venger d’un procès que lui avait intenté Jacques d’Appelvoisin et, qu’après la mort de celui-ci, son fils Guillaume avait repris, s’attaqua aux habitants de la Guiraire (cne de Boismé, Deux-Sèvres), seigneurie qui appartenait, avec la haute, moyenne et basse justice, au sr de Pugny : il voulut leur imposer contre tous droit et coutume, de faire le guet et garde au château de la Forêt-sur-Sèvre, et, pour les y contraindre, ses officiers leur enlevèrent leurs biens et les soumirent à un régime de vexations et de voies de fait. Révoltés de ces mauvais traitements et soutenus par leur seigneur, Mathurin Drillault, Simon Raynier, dit Charron, Sebastien Bobin et André Noirault, en leur nom et comme syndics et procureurs des autres habitants de la Guiraire, portèrent plainte en justice. L’affaire vint en appel au Parlement, qui condamna les officiers de Louis de Beaumont à la restitution de ce qu’ils avaient pris et à l’amende en réparation des autres excès par eux commis. Ceux-ci ayant refusé d’obéir à l’arrêt et continuant à user de violences contre les sujets de Guillaume d’Appelvoisin, la cour, par un mandement du 8 août 1468, enjoignit au sénéchal de Poitou ou à son lieutenant, de faire exécuter l’arrêt sans aucun retard, et d’exercer de nouvelles poursuites contre les coupables. (Arch. nat., X2a 36, fol. 127 v°). Dans les premiers mois de l’année 1471, le seigneur de Pugny adressa à Louis XI une requête pour être maintenu en jouissance de la pension que lui servait le duc Jean de Calabre (mort le 16 décembre 1470) sur les revenus des terres de La Chaize-le-Vicomte et d’Olonne, et de la capitainerie dudit lieu de La Chaize. (Bibl. nat., ms. fr. 20495, fol. 40.) Guillaume d’Appelvoisin fut député de la noblesse de Poitou aux États généraux assemblés à Tours en 1484, et fit son testament, le 18 avril 1490, laissant pour douaire à sa femme la terre de Chaligné, fondant une chapellenie en l’église de Pugny et y élisant sa sépulture. Il n’eut que deux filles : Anne, dame de Pugny, mariée à Léon II de Sainte-Maure, et Guyonne, autrement Hardouine, qui épousa, en 1504, Antoine Eschalart, seigneur de la Boulaye. (Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., t. I, p. 87-88.)

, contenant que sadicte terre et seigneurie de Pugny, laquelle il tient en arrerefief de nous, est située et assise eu païs fertil et bien peuplé et ou affluent plusieurs marchans du païs d’environ, pour laquelle cause ledit suppliant feroit voulentiers tenir audit lieu de Pugny une foyre chacun an, au jour de saint Pierre, se nostre plaisir estoit luy donner et octroyer sur ce noz congié et licence, ainsi qu’il dit, en nous humblemment requerant iceulx. Pour quoy nous, ces choses considerées et mesmement qu’il n’y a aucunes autres foyres à quatre lieues à la ronde dudit Pugny, qui se tiengnent ledit jour de saint Pierre, et que ladicte foyre ne sera aucunement nuysable ne prejudiciable à quelsconques autres foyres, comme ledit suppliant nous a fait dire et remonstrer, à icelluy, pour ces causes et mesmement en faveur des bons et agreables services qu’il nous a par cy devant faitz, fait chacun jour et esperons que encores face le temps advenir, avons octroyé et octroyons, voulons et nous plaist, de grace especial, pleine puissance et auctorité royal par ces presentes, qu’il puisse et luy loise faire tenir audit lieu de Pugny ladicte foyre chacun an ledit jour de saint Pierre, et icelle foyre faire cryer et publier ès foyres, marchiés et assemblées et bonnes villes, bourgades et places marchandes du païs d’environ et partout ailleurs ou mestier sera, pour estre tenue audit jour et en joyr et user doresenavant perpetuelment par ledit seigneur de Pugny suppliant et les siens, à telz et semblables previleiges, droiz, coustumes truaiges, estallaiges, fenestraiges, forfaitures, vuidanges et depry que font et ont acoustumé faire les autres ayans foyres ou païs d’environ. Si donnons en mandement par cesdictes presentes, à noz amez et feaulx les gens de noz comptes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chacun d’eulx, si comme à luy appartiendra, que de noz presens grace, congié, licence et octroy ilz facent, seuffrent et laissent ledit suppliant et sesdiz successeurs joyr et user plainement et paisiblement, sans ce que aucun destourbier ou empeschement luy puisse estre fait, mis ou donné ores ne pour le temps advenir en ladicte foyre, ne aux marchans suyvans et frequentans icelle, en quelque manière que ce soit. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tous jours, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, ou moys de fevrier l’an de grace mil cccc. soixante quatorze, et de nostre règne le xiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, le sire d’Argenton

C’est-à-dire Philippe de Commines ; l’on a vu, dans le précédent volume, comment il devint seigneur d’Argenton (p. 376 note, 442, note).

et autres presens. Tilhart. — Visa.

MDL Février 1475, n.s.

Autorisation à Guillaume d’Appelvoisin, écuyer d’écurie du roi, de faire édifier en sa terre et seigneurie de Pugny une maison et place fortifiée.

AN JJ. 195, n° 1095, fol. 249 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 7-8

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre chier et bien amé escuier d’escuierie, Guillaume d’Appellevoisin, seigneur de Pugny en nostre païs et conté de Poictou, contenant que, pour le decorement et exaulcement de sadicte seigneurie de Pugny, qui est tenue en arrière fief de nous à cause de nostre dicte conté de Poictou, il feroit voulentiers bastir, construire et édiffier en icelle, ou lieu le plus propre et avantageux une maison et place fort et icelle fortiffier et emparer, mais il ne l’oseroit ne vouldroit faire, sans avoir sur ce noz congié et licence, humblement requerant que, attendu que le seigneur de Bressuire

Jacques de Beaumont, seigneur de Bressuire, dont il est parlé dans notre volume précédent, p. 235, note, 315, note et passim.

, de qui ladicte seigneurie est tenue et mouvant, s’est consenty à ce, il nous plaise luy octroyer lesdiz congié et licence, et sur ce luy impartir nostre grace. Pour quoy nous, ces choses considerées, inclinans favorablement à la supplicacion et requeste dudit suppliant, en faveur des bons et agreables services qu’il nous a par cy devant faitz fait chacun jour à l’entour de nostre personne et autrement en plusieurs manières, et esperons que encores face, à icelluy, pour ces causes et autres à ce nous mouvans, avons donné et octroyé et par ces presentes, de grace especial, pleine puissance, certaine science et auctorité royal, donnons et octroyons congié et licence de faire bastir, construire et ediffier en sadicte seigneurie de Pugny, ou lieu le plus propre et avantageux d’icelle que faire se pourra et bon luy semblera, une maison et place fort et icelle faire fortiffier et emparer de tours, murailles, barbecanes, portes, portaulx, pont levis, boulevars, douves, foussez, faulses brayes et autres fortifficacions et emparemens nécessaires et convenables à maison et place forte, pourveu toutesvoys que les manans, habitans et subgetz d’icelle seigneurie ne seront point tenus de faire aucun guet et garde en ladicte place forte, ainsi le feront où ilz ont acoustumé, et aussi que le seigneur de qui ladicte seigneurie est tenue et mouvant se soit consenty ou consente à ce. Si donnons en mandement par cesdictes presentes, à nos amez et feaulx conseillers les gens de nostre Parlement et de noz comptes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chacun d’eulx, si comme à luy appartiendra, que de nostre presente grace, congié et licence ilz facent, seuffrent et laissent ledit suppliant joyr et user plainement et paisiblement, sans luy faire, mettre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun destourbier ou empeschement au contraire. Et afin que ce soit chose ferme et estable à toujours, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes, Donné Paris, ou moys de février, l’an de grace mil cccc. soixante quatorze, et de nostre règne le xiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, le sire d’Argenton et autres presens. Tilhart. — Visa.

MDLI Février 1475, n.s.

Lettres de naturalisation en faveur de Georges Bannanchin, seigneur de Pinaudon et de Villenouvelle, écuyer d’écurie du roi, natif d’Écosse.

AN JJ. 195, n° 1102, fol. 250 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 8-11

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre bien amé Georges Bannanehyn

L’orthographe de ce nom est bien incertaine. Pour le paléographe le plus exercé, l’e peut être à la rigueur un c ou même un t. A cette époque, on trouve sur la liste des archives de la garde écossaise un « Loys Banentin », peut-être « Banencin ». (Compte de Pierre Parent, commis au payement de la garde écossaise, Arch. nat., KK. 67. — « Jorge Bannantin » figure parmi les seigneurs écossais dont Berry rapporta les armoiries, sur l’ordre de Charles VII. (F. Michel, Les Écossais en France, t. I, p. 228). [L.C.].

, nostre escuier d’escuierie, seigneur de Pinaudon et de Villenouvelle, natif du royaume d’Escoce, contenant que dès son jeune aage, il fut admené en nostre royaume et incontinent fut mis en l’ostel de nostre très chier seigneur et père, que Dieu absoille, ou aucun temps après il fut retenu homme d’armes de sa garde et après fut lieutenant de sadicte garde et eust la charge de porter son enseigne, et servy longuement nostre dit feu seigneur et père et jusques à son trespas ; tantost après lequel trespas, nous le retenismes audit office d’escuier d’escuierie, où il nous a semblablement servy par bien longtemps, pendent lequel, tant du vivant de nostredit feu seigneur et père que aussi depuis que sommes venus à la couronne, il a acquis des biens en nostre dit royaume et entre autres lesdictes terres et seigneuries de Pinaudon et de Villenouvelle et autres biens meubles et immeubles situez et assi en nostredit (sic) païs de Poictou et ailleurs et se y est marié en entencion de finir ses jours en nostredit royaume. Mais à l’occasion de ce qu’il n’est pas natif de nostredit royaume, il dobte que après son decès on voulsist mettre empeschement en sesdiz biens et les prendre comme biens aubeins et l’en frustrer, et semblablement sa femme et autres ses heritiers, s’aucuns en avoit, s’il n’estoit par nous habilité à povoir tester et disposer de sesdiz biens, requerant, etc. Pour ce est-il que nous, ces choses considérées, à icelluy suppliant, pour ces causes et consideracions et autres à ce nous mouvans, et mesmement en faveur desdiz services qu’il nous a par long temps faitz à la garde de nostredit corps, avons octroyé et octroyons, de grace especial, pleine puissance et auctorité royal, par ces presentes, voulons et nous plaist qu’il puisse et luy loise acquerir en nostredit royaume telz biens meubles et immeubles qu’il y pourra licitement acquerir, et d’iceulx biens, ensemble de iceulx qu’il y a ja acquis, ordonner et disposer par son testement ou autrement, ainsi que bon luy semblera, et que sadicte femme et autres ses heritiers qu’il a à present ou qu’il pourra avoir au temps avenir luy puissent succeder et apprehender sadicte succession, tout ainsi et par la forme et manière que se luy et sesdiz hoirs estoient natifz de nostredit royaume, et lesquelz quant à ce nous avons habilitez et habilitons de nostre grace et auctorité, par ces presentes, sans ce que aucun empeschement leur soit ou puisse estre mis ou donné, ores ou pour le temps avenir en aucune manière, au contraire, ne pour ce qu’il soit ou puisse estre tenu nous en payer aucune finance, et laquelle, à quelque somme qu’elle puisse monter, nous, en faveur desdiz services, luy avons donnée et quictée, donnons et quictions de nostredicte grace especial, par cesdictes presentes signées de nostre main. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx les gens de noz comptes et tresoriers, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers etc., que ledit Georges Bannanehyn, ensemble ses hoirs et ayans cause ilz facent, souffrent et laissent joyr et user de noz presens grace, don, congié, licence et octroy paisiblement et à plein, sans pour ce leur faire ne souffrir estre fait aucun destourbier, etc. ; lequel, se fait, mis ou donné leur avoit esté ou estoit, ores ou pour le temps avenir, le ostent, etc. Car ainsi, etc., nonobstant que ladicte finance ne soit cy déclarée ne tauxée par lesdiz gens de noz comptes, que descharge n’en soit levée par le changeur de nostre tresor, et quelxconques autres ordonnances, restrictions, mandemens ou defenses à ce contraires. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Paris, ou moys de fevrier, l’an de grace mil cccc. soixants quatorze et de nostre règne le xiiiie.

Ainsi signé soubz le reploy : Loys, et au dessus dudit reploy : Par le roy. Legouz. — Visa.

MDLII Février 1475, n.s.

Rémission en faveur de Denis et Jean Bouffinière, père et fils, demeurant au village du Verger en Poitou, coupables du meurtre de Denis Du Vergier avec lequel, étant en discussion d’intérêt, ils en étaient venus aux mains.

AN JJ. 195, n° 1358, fol. 296 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 11-13

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc. Nous avoir receu l’umble supplicacion de Denis Bouffinère et Jehan Bouffinère, son filz, povres gens de labour, demourans au villaige du Vergier ou païs de Poictou, chargez de femmes et plusieurs petis enfans, contenant que ilz sont demourans oudit villaige du Vergier et, comme biens tenans en icelluy

M. Guérin avait ajouté ici un (sic) [L.C.]

, en communaulté avecques ung nommé Symon du Vergier, aussi habitant en icelluy lieu, sont seigneurs d’un certain mas de terre, appelée la Chaulme du Queyrouer, duquel mas est la communaulté dudit villaige du Vergier jusques à la montance de cent boissellées de terres ou environ, ledit Symon du Vergier et Denis du Vergier, son filz, ont cloz et fermé et appliqué à leur prouffit. Et pour ce que lesdiz supplians avoient autel droit, partie et porcion èsdictes communaultez comme ledit du Vergier, ilz se transportèrent, le mardy vigille saint Thomas appostre, derrenier passé, esdictes chaulmes du Quayrouer et se prindrent à labourer jusques à la moytié de cinq à six boisselées de terre. Et combien que ledit Denis du Vergier eust prins plus largement desdictes communaultez que lesdiz Bouffinères neammoins le lendemain feste dudit saint Thomas, ledit Denis s’en ala en ladicte chaulme et par dessus le labouraige desdiz supplians laboura tout ledit jour ; et lesquelz supplians le lendemain qui fut venredy devant Noel s’en alèrent de rechief labourer lesdiz six ou sept boissellées de terre, et, ainsi qu’ilz labouroient, survint ledit Denis du Vergier avecques ses beufz, charue et areau et de fait se print à trencher le labouraige desdiz supplians. Et pour empescher que icelluy Denis ne trenchast ledit labouraige et ne labourast en ladicte terre, ledit Denis Bouffinère suppliant se mist avecques une aguillée devant les beufz dudit Denis du Vergier, et pour ce que icelluy du Vergier s’efforçoit de faire tirer avant sesdiz beufz, ledit Denis Bouffinére frapa plusieurs cops sur les beufz dudit du Vergier, les deshastella et d’une sarpe qu’il avoit rompit la perche de la charue et ladicte charue gecta contre les jambes dudit du Vergier tellement que du bout de ladicte perche il frapa contre la cuisse dudit du Vergier et luy fist une petite playe. Et lors ledit du Vergier et ledit Jehan Bouffinère se prindrent l’un l’autre à la chevessaille ou par le collet et se soufflèrent (sic) et agratignèrent l’un l’autre des ongles par les olz, colz et visaiges et ainsi qu’il se tenoient l’un l’autre, ledit Denis du Vergier d’une sarpe qu’il avoit frappa ledit Jehan Bouffinière sur le viz et luy fist playe à effusion de sang. Lequel Denis Bouffinère, voyant que sondit filz et ledit Denis du Vergier se entrebatoient, se print à les vouloir departir et soy mettre entre deux, après qu’ilz eurent lasché l’un l’autre ledit Jehan tira une aguillée qui illec estoit et d’icelle frapa ledit Denis du Vergier sur la teste ung seul cop, dont il tomba à terre et en tombant cheut sur le bout de la perche de ladicte charue et se frapa soubz les costes, et à l’occasion de ce, par faulte de gouvernement ou autrement, ledit Denis du Vergier ung jour après ala de vie à trespas. A l’occasion duquel cas, iceulx supplians de sont absentez, etc., en nous humblement requerant, etc. Pour quoy nous, etc., ausdiz supplians avons quicté, etc. les fait et cas dessusdiz, avec toute peine, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, etc. Donné à Paris, ou moys de fevrier l’an de grace mil cccc. soixante quatorze, et de nostre règne le xiiiie.

MDLIII Mars 1475 (n.s., avant le 26)

Lettres plaçant le prieuré d’Aquitaine, de l’ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem, et le grand prieur, sous la sauvegarde royale et leur accordant le droit de committimus de leurs causes aux Requêtes du Palais à Paris. Datum Parisiis in mense marcio

Pâques tomba le 26 mars en l’année 1475. [L.C.]

anno Domini M° CCCCmo septuagesimo quarto, et regni nostri decimo quarto. — Sic signatum : Per regem in suo consilio. De Villechartre. Visa. Contentor. Picart

Il suffit de mentionner ici pour mémoire ce texte, qui ne s’applique pas particulièrement au grand prieuré d’Aquitaine, mais aussi bien aux prieurés de France, d’Auvergne, de Champagne, de Toulouse et de Saint-Gilles, c’est-à-dire à tous les prieurés de l’ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem dans le royaume, et qui, d’ailleurs, a été publié par Des Clozeaux, aliàs d’Escluseaux, Privilèges des papes, empereurs, rois et princes de la chrétienté en faveur de l’ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem … 3e édit., Paris, 1700, in-fol., p. 19, et dans le grand recueil des Ordonnances des Rois de France, in-fol., t. XVIII, p. 101. — Jean de Francières, d’une famille noble de l’Île-de-France, chevalier de l’ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem du prieuré de France, fut grand prieur d’Aquitaine entre 1468 et 1488 environ. (Liste des grands prieurs d’Aquitaine donnée par MM. Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., t. II, p. 780.)

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AN JJ. 195, n° 1404, fol. 306 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 13

MDLIV Mars 1475 (n.s., avant le 26)

Rémission octroyée à Louis Mathé, gentilhomme demeurant à Thollet, qui, s’étant pris de querelle audit lieu avec Raulin Thébault, écuyer, et en étant venu aux mains, l’avait frappé d’un coup de dague dont il était mort.

AN JJ. 195, n° 1375, fol. 300 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 13-16

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Loys Mathé, povre simple gentilhomme, chargé de femme et enfans, de la paroisse de Tollet ou bailliage de Saint-Benoist-du-Sault, contenant que, ou moys de fevrier l’an mil cccc.lxxiiii, qui fut le dimanche de Oculi, ledit suppliant se trouva à vespres en l’eglise dudit Tollet, et après vespres se trouva en la place commune au devant de la porte de la fortifficacion dudit lieu, où il trouva feu Robin Thébault

Ce nom de Thébault est commun à plusieurs familles poitevines ; les frères Raulin et Pierre, nommés dans cet acte, habitaient la région de La Trimouille ; quelques années plus tôt, on trouve un autre Pierre Thibault et sa femme Jeanne de Voulon possessionnés dans la châtellenie de Saint-Maixent et en contestation avec Aimery de Sazay. (Bibl. nat., ms. fr. 29143, pièces orig., vol. 2659, n° 3) ; d’autres personnages de ce nom vivaient à la même époque aux environs de Montaigu, etc. Un Pierre Thébault, dont le lieu d’origine n’est pas indiqué, était poursuivi au Parlement « en cas d’excès », avec Jacques Charlet et Jean Jaubert, par Me Jean Yver et le Procureur général ; mais la Cour, par arrêt du 31 décembre 1454, se dessaisit de l’affaire par devant le sénéchal de Poitou en son siège à Poitiers. (Arch. nat., X2a 27, fol. 17.)

, en son vivant escuier, qui avoit ung petit baston ferré, avecques plusieurs autres. Lequel suppliant dist à Jehan Savary, dit Dalée, qu’il failloit envoyer querir le procureur du seigneur de La Tremoïlle

C’était alors Louis Ier de la Trémoïlle, comte de Guines et de Benon, prince de Talmont, baron de Sully, etc., né vers l’an 1431, fils du célèbre ministre de Charles VII, mort en 1484, dont la femme Marguerite d’Amboise était l’héritière de la vicomté de Thouars.

, seigneur justicier en partie dudit Tollet, pour faire informacions de certains cas qui avaient esté commis pas aucuns audit Tollet ; auquel suppliant ledit Jehan Savary respondit que ce seroit bien fait. Après lesquelles parolles ledit feu Raoulin Thebault, ayant ledit baston ferré, se leva et approucha dudit suppliant en disant : « Nous ne sommes point de ceulx qui conseillent à rompre les maisons de nuyt. » Et ledit suppliant respondit que oncques n’en avoit donné conseil ; et dist oultre ledit suppliant que le breviaire de la parroisse avoit esté robé et prins cheux le curé dudit Tollet, et que qui sauroit le larron, que ce seroit bien fait de le prendre, et que son oppinion estoit bien à l’aide de Messieurs de le prendre. Et lors ledit feu Raoulin dist audit suppliant qu’il n’avoit pas si grant puissance ; et au moyen desdictes parolles et autres plusieurs se desmentirent l’un l’autre. Et tantost après ledit Raoulin s’approucha dudit suppliant et luy donna d’estoc dudit espiot parmy la cuisse et le navra à grant effusion de sang. Lequel suppliant qui avoit une longue robe vestue, tira sa dague pour soy defendre, mais les presens se mirent entre eulx et les departirent, et par ce moyen remist ledist suppliant sadicte dague en son fourreau ; mais il appella à tesmoings les assistens en disant que ledit feu Rolin l’avoit frapé sur la seureté qu’il avoit eue de luy à Montmorillon. Et ce fait ledit Rolin fist semblant de s’en aler et dist audit suppliant : « Vien-t’en aux champs et là verrons qui en aura ». Lequel suppliant respondit qu’il estoit content, mais qu’il eust baston comme luy, et marcha ung pou après ledit Roulin. Et tost après s’arresta en disant qu’il estoit bien simple de soy amuser à luy, et lors encores derechief s’entreprindrent de parolles l’un contre l’autre, pendens lesquelles ung nommé Pierre Thebaud, frère dudit feu Roulin, vint avecques ung espiot et d’icelluy voult fraper à deux mains sur la teste dudit suppliant ; auquel cop ledit suppliant evada, mettant la main au devant, en laquelle main il fut fort blécié, et si n’eussent esté plusieurs personnes qui survindrent, il eust tué et meurtry ledit suppliant. Lequel suppliant qui avoit sa dague tirée, en soy reculant marcha sur la queue de sa robe tellement qu’il cheut en arrière et se redreça au mieulx qu’il put. Et [ce] voyant ledit feu Roulin Thebaud et sondit frère, s’esmeurent plus que devant contre ledit suppliant, et s’efforça ledit Raoulin de luy bailler ung cop d’estoc de sondit espiot contre la poitrine ou ventre ; mais ledit suppliant desvoya ledit cop de sa main et print icelluy Raoulin à la chevessaille et au coulet, et de l’autre main tira sa dague, de laquelle il luy bailla ung cop seulement parmy le cousté dont icelluy Roulin cheut à terre. Au moyen duquel cop ledit Raoulin une heure après ala de vie à trespas. Pour occasion duquel cas ledit suppliant s’est absenté, etc., en nous humblement requerant, etc. Pourquoy, etc., audit suppliant avons quicté, etc. les fait et cas dessusdiz, avec toute peine, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, etc. Donné à Paris, ou moys de mars, l’an de grace mil cccc. soixante quatorze et de nostre règne le xiiiime.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. De Villebresme.

MDLV Mai 1475

Rémission octroyée à Jean de La Courtière le jeune, demeurant à Allonne, qui, étant détenu prisonnier à Parthenay, sous l’accusation d’avoir, avec quatre jeunes compagnons, fait violence à Jeanne Girard, connue pour être la maîtresse d’un prêtre nommé Antoine Gonu, dudit lieu d’Allonne, avait trouvé moyen de s’évader et était allé faire le service qu’il devait au roi dans la compagnie de Jean Raymond, capitaine du Coudray-Salbart.

AN JJ. 195, n° 1449, fol. 330 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 16-21

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan de la Courtière le jeune, aagé de vingt deux ans ou environ, fils de Jehan de la Courtière

Cette famille de la Gâtine est connue, bien que l’on ne possède sur son compte que fort peu de renseignements. (Cf. Beauchet-Filleau, Dict. dés familles du Poitou, nouv. édit., t. II, p. 695.) Jean de La Courtière est mentionné dans le procès-verbal d’information et prisée de la valeur et du revenu annuel des terres, seigneuries et châtellenies de Secondigny, de Béceleuf et du Coudray-Salbart, fait par Guillaume Ripaut, clerc de la Chambre des Comptes, en vertu des lettres de commission à lui adressées le 14 juin 1460, parmi ceux qui accompagnèrent dans sa visite des lieux, le commissaire du roi. (Arch. nat., R1 207, reg. non folioté.)

l’ainsné, demourant ou bourg et parroisse d’Alonne ou conté de Poictou, contenant que ledit suppliant est homme doulx et paisible, bien famé et renommé oudit païs de ses voisins et de tous ceulx qui de lui ont eu et ont congnoissance, et lequel nous a bien et dessemant servy en noz derrenières guerres et affaires, soubz la charge et en la compaignie de nostre bien amé Jehan Raymond, escuier, seigneur de Riberoix, cappitaine du Cousdroys Sallebart

Le registre cité dans la note précédente ne donne pas le nom du capitaine du château du Coudray-Salbart. D’ailleurs, un acte publié dans notre t. XI (Arch. hist. du Poitou, t. XXXVIII, p. 31) nous apprend qu’en 1465, et antérieurement, le capitaine était Louis Chasteigner. Jean Raymond, écuyer, seigneur de « Riberoix » (sans doute Riberay ou Ribray, paroisse de Saint-Liguaire), était, par conséquent, le successeur de celui-ci. Sur ce personnage et sa famille, nous en sommes réduits aux conjectures. Était-il fils ou parent à un autre degré de Jean Raymond, écuyer, capitaine de Frontenay-l’Abattu en 1435, panetier du dauphin Louis, l’un des fauteurs de la Praguerie en Poitou, complice de Guy de La Rochefoucauld, sr de Verteuil, dans sa rébellion, qui obtint des lettres d’abolition au mois d’avril 1446. (Cf. notre t. VIII, Arch. hist. du Poitou, t. XXIX, p. 328, 367,) Vraisemblablement, il était de la même famille que Jean Raymond, écuyer, seigneur de l’Etortière (psse de Soudan), qui rendit aveu et hommage au seigneur de la Barre-Pouvreau, le 8 mars 1449, et en 1457 à cause de Marguerite Pouvreau, sa femme, pour l’hôtel de la Territière, près Coutières (A. Richard, Arch. du château de la Barre, t. II, p. 97 et 250). Le procès-verbal de Guillaume Ripaut constate que, depuis plusieurs années, les capitaines du Coudray-Salbart percevaient les revenus de la châtellenie, et il donne une curieuse description de cet important château féodal et de ses dix-huit tours, « dont les magnifiques ruines, dit M. Ledain, qui reproduit cette description, se dressent encore sur les bords de la Sèvre ». (La Gâtine historique, Paris, Claye, gr. in-4°, 1876, p. 92 et suiv.)

, l’un des commissaires à recevoir les monstres des gens de guerre estans de nostre ordonnance ; et il soit ainsy que ung jeune prebstre, nommé Anthoine Gonu, demourant audit lieu d’Alonne, lequel a esté et est notoirement famé et renommé de soy estre maintenu charnellement avecques une nommée Jehanne Girarde, demourant au Puys près et en la parroisse dudit lieu d’Alonne, laquelle s’est dèspieça abandonnée au péché de la char, tant avec ledit Gonu, prebstre, que autres plusieurs du païs d’environ, comme de tout ce est voix, fame publicque et commune renommée en ladicte parroisse dudit lieu d’Alonne et païs d’environ. De laquelle Jehanne Girarde, environ la feste Saint Michel l’an soixante treize, yssit et fut née une fille d’elle et dudit Anthoine Gonu, prebstre. Et pour ce qu’il a esté et est très grant scandalle au païs, en ladicte parroisse dudit lieu d’Alonne que ledit prebstre se maintenoit avecques ladicte Jehanne Girarde qui estoit et est encores demourant avec sa mère oudit villaige du Puys près et en ladicte parroisse dudit lieu d’Alonne, et que souventes foiz il alloit jour et nuyt devers elle audit lieu du Puys, et que environ la Toussains derrenièrement passée eust trois ans, on rapporta audit suppliant et à quatre autres jeunes compaignons, eulx estans au lieu de la Cordinière en la parroisse d’Adillé près ledit lieu d’Alonne que ledit prebstre devoit la nuyt aller audit lieu du Puys couscher avec ladicte Jehanne Girarde, icellui suppliant et lesdiz quatre compaignons, dont l’un n’avoit que l’aage de seize ans ou environ, se transportèrent, environ neuf heures devers le soir, audit lieu du Puys, cuidans et esperans y trouver ledit prebstre cousché avecques ladicte Girarde. Et si tost que ledit suppliant et lesdiz compaignons se approucherent dudit lieu du Puys, et furent à demy quart de lieue ou environ, ledit suppliant se arresta illec et lesdiz autres compaignons se transportèrent audit lieu du Puys en l’absence dudit suppliant, entrèrent en l’ostel desdictes Girarde et sa mère, où il parlèrent à ladicte Girarde et après l’amenèrent au lieu où ilz avoient laissé ledit suppliant et illec deux desdiz quatre compaignons la prièrent, en la presence dudit suppliant, d’avoir sa compaignie, dont elle fut contente, ce qu’ilz eurent et leur obeyt, ce qu’elle ne voult faire audit suppliant combien qu’il [l’] en requist, et se mist en son devoir pour le cuider et vouloir faire. Et incontinant après ce, ladicte Girarde s’en retourna audit lieu du Puys vers l’ostel ouquel elle et sadicte mère font leur demourance, et ledit suppliant et sesdiz compaignons s’en retournèrent chacun son chemin, et mesmement ledit suppliant audit lieu d’Alonne, en l’ostel de sondit père. Lesquelles choses tantost après venues à la notice et congnoissance dudit prebstre, icellui prebstre, tant pour soustenir et tousjours entretenir ladicte Jehanne Girarde, que en haynne de grans et divers procès que ledit prebstre et Jehan Gonu, aussi prebstre, curé dudit lieu d’Alonne et oncle dudit Anthoine ont à l’encontre dudit de la Courtière, père dudit suppliant, tant au lieu de Poictiers que autre part, se trahy et transporta au lieu de Partenay, où illec il donna ou fist donner à entendre aux officiers de nostre très-cher et amé cousin le conte de Dunois, seigneur dudit Partenay

François d’Orléans, comte de Dunois et de Longueville, fils de l’illustre bâtard d’Orléans et de Marie d’Harcourt, sa seconde femme, était entré en possession de la baronnie de Parthenay à la mort de son père (28 novembre 1468) qui en avait obtenu le don après le décès du connétable de Richemont. (Cf. notre t. X, Arch. hist. du Poitou, t. XXXV, p. 78-79.) Il avait épousé, en 1466, Agnès de Savoie, belle-sœur de Louis XI. En considération de cette parenté, le roi, par lettres du 30 novembre 1468, avait fait remise à François d’Orléans de tous les droits de rachat de ses baronnies de Gâtine, auxquels la mort de Dunois avait donné ouverture au profit de la couronne. (Arch. nat., R1 188.) Rappelons que, pour le punir de l’ardeur avec laquelle il soutint la cause de Louis, duc d’Orléans, révolté contre l’autorité de Charles VIII, ce prince confisqua tous les domaines du comte et fit démanteler par le maréchal de Gyé les fortifications de Parthenay. Rentré en grâce, François d’Orléans attacha son nom aux négociations du mariage du roi avec Anne de Bretagne, quelques jours avant la célébration duquel il mourut subitement (25 novembre 1491).

, que ledit suppliant seullement avoit fait violence et force publicque audit lieu du Puys, congneu et fait congnoistre charnellement ladicte Girarde et fait à elle et à sadicte mère plusieurs violences, excès, delitz et mallefices, et pourchaça et fist pourchacer lesdiz officiers de Partenay tellement qu’ilz firent convenir et adjourner ledit suppliant par devant le chastellain dudit lieu ou son lieutenant à certain jour jà pieça passé, à estre et comparoir en personne envers le procureur de nostredit cousin, pour occasion des cas dessusdiz et les deppendances d’iceulx. Et depuis fut ladicte cause evocquée par devant le bailli dudit lieu de Partenay ou son lieutenant à ses grans assises dudit lieu de Partenay, qui commancèrent à tenir environ Quasimodo derrenièrement passé ot trois ans ; ausquelles assises ledit suppliant obeyt et comparut en sa personne, et ladicte comparucion faicte par ledit suppliant, ledit lieutenant dist et ordonna, à l’issue desdictes grandes assises et avent que aller disner, que ledit suppliant seroit mis ès prisons closes dudit lieu de Partenay et commanda à Loys Baudet et autres sergens dudit lieu de Partenay illec presens, de le mettre èsdictes prisons, ce qui fut fait. Esquelles prisons il demoura l’espace de cinq jours bien fort malade, et ce pendant il souvint à icellui suppliant qu’il devoit aller à nostredit service soubz et en la compaignie dudit Jehan Raymond, commissaire susdit en nosdictes guerres, qui alors commancèrent tant ès marches et païs de Bretaigne que de Bourgoingne et à ceste cause ledit suppliant trouva moyen de rompre lesdictes prisons et porte par dessoubz et s’en yssit de nuyt. Et desdictes prisons s’en alla en la halle de ladicte ville de Partenay, estant devant icelles prisons, en laquelle halle il trouva une corde, laquelle il porta avec lui jusques aux murailles de ladicte ville de Partenay, par dessoubz et au bas desquelles il descendit moyennant ladicte corde et se mist hors desdictes prisons et ville de Partenay, sans le sceu et congié des officiers et gens de justice dudit lieu. Et d’illec s’en alla incontinant audit lieu du Cousdroys-Salebart, par devers ledit Jehan Raymond, son maistre, avec lequel il se mist en nostredit service en nosdictes guerres sur les marches et païs de Bretaigne où il a continuelment demouré à grans fraiz, mises et despences, jusques au departement de ladicte guerre. Pendant lequel temps que ledit suppliant a esté en nostredit service et depuis qu’il en est retourné, lesdiz officiers et gens de justice de ladicte ville de Partenay ont fait adjourner par cry publicque fait audit lieu de Partenay ou autrement ledit suppliant, à estre et comparoir en personne, sur peine de bannissement, de confiscacion de corps et de biens, pour occasion des cas et choses dont dessus est faicte mencion, pour respondre audit procureur dudit lieu à tout ce qu’il lui vouldra demander et contre lui proposer, fournir et requerir, à certains divers jours et assignacions, ausquelx ledit suppliant n’a peu obeir et comparoir en personne, tant pour l’occuppacion de nostre dit service et autrement, que aussi pour ce que lesdiz adjournemens n’ont esté faiz ne baillez à lui ne à personne capable de iceulx recevoir pour lui. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant doubtant rigueur de justice s’est absenté du païs auquel il n’oseroit jamais retourner, converser ne demourer, se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartie, si comme il dit, requerant humblement que, attendu qu’il est jeune homme dudit aage de vingt deux ans ou environ et qu’il s’est tousjours bien et doulcement gouverné, sans jamais avoir esté actaint d’aucun villain cas, blasme ou reprouche et qu’il nous a bien et loyauent servy en nosdictes guerres et affaires, nous lui vueillons impartir nostre dicte grace et misericorde. Pour quoy, etc., audit suppliant avons ou cas dessusdit quicté, etc., avec toute peine, etc., ensemble tous deffaulx, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous nos autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou mois de may l’an de grace mil cccc. soixante quinze, et de nostre règne le quatorzeiesme.

Ainsi signé : Par le conseil. J. de Villebresme

Les Villebresme, originaires de Blois, étaient de père en fils serviteurs et secrétaires des ducs d’Orléans. Plusieurs aussi, entre autres un Jean et un Guillaume, furent secrétaires des rois Charles VII et Louis XI. (Cf. les renseignements réunis sur cette famille par R. de Maulde, Histoire de Louis XII. Paris, 1889, in-8°, t. Ier, p. 346, note.)

. — Visa. Contentor. J. Picart.

MDLVI Juillet 1475 (avant le 22)

Rémission accordée à Jacques Blanchart, mercier de Triaize, près Luçon. En fauchant, il avait blessé involontairement d’un coup de faulx son jeune cousin Simon Blanchart, qui presque aussitôt avait succombé à une hémorragie.

AN JJ. 195, n° 1483, fol. 345 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 21-24

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jaques Blanchart l’ainsné, pouvre marchant mercier demeurant au bourg de Triayse ès marois près Luçon, chargé de femme et de quatre petiz enffans, contenant que la vigille de la feste de la Nativité Saint Jehan Baptiste derrenière passée, ledit suppliant et Simon Blanchart son filz, Jaques Blanchart le jeune, cousin germain d’icellui suppliant se transportèrent ès prez et maroiz près dudit lieu de Triaize, pour faner et mettre en mullon le foin qui estoit faulché en leur pré, mareschaz, botz

Le mot bot avait la signification de digue ou bord surélevé d’un canal d’écoulement des eaux, digue qui servait de chemin. Sur cette expression et les autres employées dans ce texte pour désigner des particularités propres aux pays de marais, on peut consulter le glossaire que M. Etienne Clouzot a joint à son savant travail intitulé : les Marais de la Sèvre niortaise et du Lay, du Xe à la fin du XVIe siècle. Paris, Niort, 1904, in-8°. Cet ouvrage fournit d’ailleurs quelques renseignements sur l’état, à diverses époques, des marais de Triaize et du Vignaud. (Voy. notamment p. 58, 64, 122, 170, 171.)

ou maratez. Lesquelx suppliant et Simon Blanchart se arrestèrent en ung pré situé entre la maison appelée les Vignaulx et ledit lieu de Triaise, et estoit environ deux heures après midy, firent ung mulon de foing en faisant grant chere ensemble. Et quant ilz eurent pareschevé, se partirent dudit pré et s’en allèrent tous deux ensemble, et en passant parmy les prez, trouvèrent ung nommé Crespin Marant, lequel Marant estoit en ung pré où il avoit faulché, et estoit avec lui Estienne Marant, son nepveu, lesquelx estoient couchez et repousoient contre une vieille

Suivant Fr. Godefroy, Dictionnaire de l’ancienne langue française, le mot vieille, vielle ou veille avait, à lui seul, le sens de meule de foin ou de paille, particulièrement dans l’Aunis et le haut Maine.

de foing, lequel Crespin avoit laissé sa faulx assez loing de lui et de ladicte vieille de foing, laquelle faulx ledit Simon, qui estoit jeune homme actif, trouva et d’icelle se print à faulcher. Et ainsi que icellui Blanchart et suppliant parloient ensemble, ledit Crespin se reveilla et regarda ledit Simon qui faulchoit de sa faulx, auquel il dist que il la laissast et qu’il estoit bien jeune et n’estoit pas son mestier à faulcher, car il romproit sa faulx. Et lors ledit suppliant qui estoit sur ung bot nommé le Bot du prebstre, autrement dit marates ou mareschatz, dist audit Simon qu’il lui baillast ladicte faulx et qu’il faulcheroit de la jonchée pour la feste de saint Jehan qui estoit le lendemain, en l’onneur duquel, quoy que soit saint Jehan Envangeliste, ladicte esglise de Triaise est fondée ; ce que ledit Simon fist. Et incontinant icellui suppliant se print à faulcher, et en faulchant dist audit Simon qu’il se tirast en arrière et qu’il estoit trop près ; et lors ledit suppliant cuidant que ledit Simon, sondit cousin

Au début du texte, c’est le fils du suppliant qui est appelé Simon, et son cousin Jacques le jeune [L.C.]

, se feust assez tiré en arrière pour ce qu’il ne le veoit pas, parce qu’il estoit sur la main senestre dudit suppliant et le regardoit faulcher. Et en faulchant et ramenant son coup par derrière, ainsi que font tous aultres faulcheurs, de force et de tout son povoir, et sans ce qu’il pensast à aucun mal faire audit Simon, son cousin, rencontra icellui Simon de la poincte de sadicte faulx en la cuysse senestre à l’endroit de la souriz et le blessa tellement que de ladicte playe yssit grant effusion de sang et incontinant ledit Simon se escria à haulte voix : « Je suis mort. » Voyant ledit suppliant que sondit cousin estoit ainsi blecé, fut moult esbahy, cuidant qu’il ne fust pas si près de lui, appella lesdiz Marans et autres qui estoient illec environ, qu’ilz viensissent à son aide, print icellui suppliant du couston et autres draps pour mettre sur ladicte plaie, les pria et requist qu’ilz le gardassent jusques à ce qu’il feust allé audit lieu de Triaise pour avoir de l’aubin, de l’euf et des estoupes et autres choses à le sublever et aider. Lequel suppliant fist dilligence de apporter lesdictes chose et si tost qu’il fut arrivé oudit pré ledit Simon avoit ja perdu presque tout son sang, mais pour quelque choses qu’ilz peussent faire, ne le peurent estancher ; et lors fut advisé entre eulx de le porter audit lieu de Triaise, distant d’illec de deux traiz d’arc ou environ. Et ainsi qu’ilz le vouldrent prandre, ledit Simon alla de vie à trespas. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant doubtant rigueur de justice, s’est absenté du païs et ne oseroit jamais retourner, converser ne demourer, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, si comme il dit, en nous humblement requerant que, attendu que ledit suppliant ne l’a fait par malice et que, pour preserver et garder ledit feu Simon il a fait ce que possible lui a esté et est ung cas fortuit, et que icellui suppliant a tousjours esté de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans oncques avoir esté actaint ne convaincu d’aucun autre villain cas, blasme on reprouche, nous lui vueillons sur ce impartir nostredicte grace et misericorde. Pourquoy, etc. voulans, etc., audit suppliant avons ou cas dessusdit, de nostre grace especial, plaine puissance, etc., quicté, etc., quictons, etc. le fait et cas dessus-dit, avec toute peine, etc., en quoy, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous, etc., que de noz presens grace, etc. facent, etc., sans lui faire, etc., ainçois se son corps, etc. Donné à Paris, ou mois de juillet l’an de grace mil cccc. soixante quinze, et de nostre règne le quatorzeiesme.

Ainsi signé : Par le conseil, d’Asnières. — Visa. Contentor. J. Picart.

MDLVII Juillet 1475 (avant le 22)

Rémission en faveur de Barthélemy Moele, fauconnier du roi, natif du pays de Liége, demeurant à Benassay, coupable du meurtre d’un nommé Guillemin, cordonnier, avec lequel il s’était querellé, puis battu, parce qu’il accusait la femme de celui-ci de lui avoir volé un écu.

AN JJ. 195, n° 1509, fol. 359 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 25-27

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Berthelemy Moele, nostre faulconnier, natif du païs de Liége, aagé de trente-six ans ou environ, chargé de femme et enffans, contenant que le lundi xixe jour de ce present mois de juing, ledit suppliant qui demeure en la parroisse de Benessay à cinq lieues de Poictiers, eut volenté d’aller et de fait alla veoir une sienne fille dont sa femme estoit encores en gesine, laquelle il avoit fait mettre à nourrice audit lieu de Benessay. Et lui arrivé en l’ostel de ladicte nourrice, il trouva une nommée Matheline Guillonne, femme d’un nommé Guillemin, cordouanier, natif de la Rochelle, et après ce qu’il eut veue sadicte fille, il vit passer sa chambrière et en allant vers elle, il lui cheut ung escu d’or qu’il tenoit en sa main, lequel escu ladicte Matheline Guillonne leva. Et après ce qu’il eut parlé à sadicte chambrière pour savoir si sa femme vouloit riens, il s’en retourna, et lui retourné en ladicte maison, n’y trouva pas ladicte Matheline, et à ceste cause il s’en alla en la maison d’un nommé Forget, hostellier, où il trouva ladicte Matheline, à laquelle il demanda son escu ; laquelle lui respondit qu’elle ne l’avoit pas. Et lors ledit suppliant la print par la robbe vers l’espaulle en disant : « Paillarde, vous me rendrez mon escu, et ne partirez point hors de mes mains jusques à ce que le m’aurez rendu. » Et ladicte nourrice ce oyant vint par devers ledit suppliant en lui disant : « Laissez-la, car je sçay bien où est l’escu. » Et lors ledit suppliant laissa aller icelle Matheline, laquelle en soy en allant dist à haulte voix que ledit suppliant n’estoit que ung paillart et que il lui avoit baillé ledit escu en entencion d’avoir sa compaignie charnelle, en disant oultre que le matin il lui avoit à ceste fin voulu bailler une verge d’or. A laquelle ledit suppliant respondit qu’elle estoit mauvaise garse de ce dire et qu’elle avoit menty. Laquelle pour sur ce couvrir son honneur envers son mary, lui donna à entendre que ledit suppliant l’avoit requise de deshonneur, et tellement que ledit Guillemin, son mary, conceut grant haynne à l’encontre dudit suppliant, et en voulant sadicte haine mettre à effect et excecucion, le mardi xxe jour de ce present mois de juing, ainsi que ledit suppliant, lequel estoit en la maison d’un sien cousturier qui est demourant près dudit Guillemain, afin de lui faire reffaire ung pourpoint, il fut adverty par ledit cousturier que ledit Guillemin l’avoit menassé de batre. Et lors ledit suppliant print deux pierres en sa main, en disant à ladicte Matheline, femme dudit Guillemain, laquelle estoit devant son huys sur la rue : « J’ay entendu que ton mary me menasse de batre et tuer. Se je le savoie, je l’en garderoye bien et feroye bien tant que la nuyt il ne coucheroit point leans. » Et lors ledit Guillemin vint à l’entrée de son huys avec une javeline, en disant audit suppliant : « Vien ça. Vien. » Et lors ledit suppliant entra en sa court et lui gecta deux pierres, sans le assener ne frapper. Et lors ledit Guillemin entra en son hostel et ledit suppliant retourna sur la rue, disant audit Guillemin telles parolles : « Je te garderoy bien que tu ne couscheras pas aujourd’uy en ta maison, puisque tu me veulx batre et tuer. » Auquel suppliant ladicte Matheline respondit et dist telles parolles ou semblables : « Tu feras tes fièvres quartaines, coquin paillart que tu es. » Et à ceste cause ledit suppliant, soy voyant ainsi oultragé, print ung baston qu’il trouva en la rue et lui en donna deux ou trois coups sur la teste, tellement qu’il y eut sang. Et incontinent ledit Guillemin

Le texte porte par erreur au lieu de Guillemin « ledit suppliant ».

saillit hors sur la rue avec une arbaleste tendue, en disant audit suppliant : « Ribault, tu es mort. » Ce voyant ledit suppliant, doubtant que ledit Guillemin ne tirast contre lui, print une pierre en sa main et la gecta audit Guillemin, lequel dessarra lors ladicte arbaleste, pour en cuider tuer ledit suppliant. Et ce fait, ledit Guillemin gecta sadicte arbaleste, et lui, ladicte Matheline, sa femme et la mère de sadicte femme vindrent courir sus audit suppliant et l’abatirent à terre sur ung genoul, lequel suppliant fist tant qu’il se releva, et voyant que ledit Guillemin vouloit recouvrer sondit baston, doubtant qu’il ne le frappast, tira ung bracquemart qu’il avoit et s’approucha de chaulde colle dudit Guillemin et lui donna dudit bracquemart trois coups, l’un ou cousté, l’autre en l’aigne et l’autre vers les espaulles. A cause desquelx coups, après ce qu’il eut receu le sacrement de confession, par faulte de gouvernement ou autrement, tantost après ala de vie à trespas. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du païs, etc., humblement requerant que, attendu qu’il nous a longuement servy et que en tous ses autres faitz il s’est tousjours bien gouverné, etc., nous lui vueillons sur ce impartir nosdictes grace et misericorde. Pourquoy, etc., audit suppliant ou cas dessusdit avons quicté, etc., le fait et cas dessusdit, avec toute peine, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou mois de juillet, l’an de grace mil cccc soixante quinze, et de nostre règne le quatorzeiesme.

Ainsi signé : Par le conseil. J. Pouffé. — Visa. Contentor. J. Picart.

MDLVIII Juillet 1475 (après le 22)

Rémission obtenue par Georges Charonton, franc archer de Benassay, et Hilaire Charonton, son frère, laboureur audit lieu, coupables du meurtre de Pierre Guillon, franc-archer révoqué, qui leur avait cherché querelle et avec lequel ils en étaient venus aux voies de fait.

AN JJ. 195, n° 1480, fol. 344 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 28-32

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de George Charonton, franc archer et quinzennier

Un texte contemporain définit ainsi le quinzenier : « Antoine Le Boin, nostre archier de retenue de la ville de Dury, quinzenier, et avoit charge de quatorze hommes. » (JJ. 201, ne 180, pièce citée par Fr. Godefroy, Dict. de l’anc. langue française.) Ce groupement des francs-archers par compagnies de quinze hommes, y compris l’officier subalterne placé à leur tête, remontait sans doute à la création de cette milice. Dans les ordonnances des 12 janvier et 30 mars 1475 n.s., relatives aux francs-archers, il est mentionné comme existant antérieurement. « Pour ayder à porter leurs armes et habillemens, lit-on dans la seconde, ainsi que autres fois a esté ordonné, lesdiz francs archers, quant ilz yront dehors en guerre, auront pour les quinze une charrette ferrée et atelée de trois chevaulx, qui, pour cette premiere fois, seront fourniz et payez sur les deniers qui ont esté cueilliz pour ceste cause, et après ladicte charrette sera entretenue aux despens des habitans qui feront lesdiz francs archers, et baillée en garde à telle personne que les habitans qui l’auront fournie adviseront. » Quant aux chevaux destinés à ce chariot, ils étaient mis à la charge des hommes, ainsi que les colliers, traits et autre harnachement. (Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XVIII, p. 73 et 111.)

, et Hilairet Charonton, laboureur, frères, de la parroisse de Bennassay, près nostre ville de Poictiers, contenant que ilz sont natifz dud. Bennassay, ouquel lieu ilz ont tousjours fait leur continuelle résidence et demourance, fors que depuis deux ans ença ou environ que ledit George Charonton a esté mis en nostre service et fait franc archer on lieu de Jehannin Charonton, son frère, lequel par vieillesse ne povoit plus servir ou fait de noz guerres ; auquel lieu de Bennassay et en nostre service ledit George et aussi ledit Hilairet Charonton, frères, chacun d’eulx en son estat, se sont tousjours bien et honnestement gouvernez et ont esté de bon gouvernement, bonne honneste vie, renommée et conversacion, sans jamais avoir meffait ne mesdit à personne quelconque et fait ou commis aucun villain cas, blasme ou reprouche, ne esté actains ne convaincuz de chose digne de reprehencion, et jusques à ce que, le xxie jour de fevrier l’an mil cccc. soixante treize, que ledit George Charonton, suppliant, ung nommé Pierre Girault [et] Guillaume Manceau, aussi francs archiers, s’en allerent après soupper passer temps et pour eulx esbatre et jouer en l’ostel d’un nommé Jehan Fourchét, marchant, demourant audit lieu de Bennassay, qui a acoustumé tenir pain et vin à vendre ; et quant il furent en dedans dudit hostel, trouvèrent ledit Forget (sic), ung nommé Pierre Guillon, Guillaume Delanohe et leurs femmes, et ledit Hilairet Charonton, frère dudit George, suppliant, qui beuvoient et faisoient grant chère et estoient assis à table devant le feu. Et quant lesdiz George suppliant et autres estans en sa compaignie virent ladicte table de devant le feu pleine, ilz se misdrent à part à une autre table et firent venir du pain et du vin et commandèrent à faire bonne chère. Et eulx estans ainsi à table, vint la femme dudit Pierre Guillon en disant audit George suppliant telles parolles ou semblables. « Au moins, messeigneurs, convoyez à boire vostre compaignon », en disant et parlant de son mary, qui avoit esté pareillement franc archier. Et lors ledit George, suppliant, incontinant presenta le vin audit Pierre Guillon et le convoya à boyre, mais ledit Guillon fist responce qu’il ne beuroit point avecques gens qui lui vouloient mal, et ledit George suppliant lui dist qu’il ne lui vouloit point de mal. Et aussi fist responce ledit Guillon que ne faisoit il audit suppliant, et en ce disant ledit Manceau demanda audit Guillon si c’estoit point à lui à qui il vouloit mal ; lequel Guillon fist responce que oy, pour ce qu’il l’avoit fait mettre hors d’estre franc archer et avoit fait mettre en son lieu ung ladre et qui pis estoit poacre

Ou pouacre, synonyme de galeux.

, et que lesdiz George suppliant et Manceau aymoient mieulx la compaignie dudit pouacre que la sienne, et aussi lui devoit de l’argent qu’il ne lui vouloit paier. Lequel Manceau fist responce audit Guillon qu’il ne lui devoit riens, mais que au regard de l’avoir fait mettre dehors d’estre franc archer, qu’il estoit bien vray qu’il n’y avoit pas neu

Sic pour « nui ».

et ne l’en flateroit point ; mais au regard de la compaignie d’un pouacre, que le cappitaine des francs [archers] n’eust point receu ledit Girault, s’il eust esté pouacre. Et lors ledit Guillon fist responce en jurant et detestant le sang Dieu que ledit Manceau avoit menty, et appellant lesdiz George et Manceau « villains excommeniez », et ledit Girault « villain pouacre ». Lequel George suppliant dist audit Guillon qu’il avoit menty et qu’il s’en allast, et ne leur fist point de responce ne de noise en despendant leur argent et qu’ilz ne lui demandoient riens. Lequel Guillon et sa femme ne se vouldrent taire, mais les injurioient incessamment, et à ceste cause lesdiz George suppliant et autres en sa compaignie se levèrent de ladicte table ; et dist icelluy George audit Guillon qu’il s’en allast, autrement qu’ilz le mettroient dehors. Lequel Guillon mist lors la main à ung cousteau qu’il avoit au cousté soubz sa robbe, et aussi ledit George mist la main sur sa dague qu’il avoit et mist la main sur le couteau dudit Guillon, que ledit Guillon tiroit, et en voulant empescher que ledit Guillon ne le tirast. Ce voyant, ledit Hilairet suppliant cuidant empescher que ledit Guillon ne blessast sondit frère, print ung chandellier qui estoit sur la table et en bailla un coup sur l’asse

Sic. Le mot asse ne figure pas dans les lexiques. Il s’emploie aujourd’hui parfois pour aisselle. Toutefois, à raison du caractère apparent que le contexte suppose à la blessure M.A. Richard me suggère la correction usse, partie du crâne où se trouve le sourcil. La lettre a pour u proviendrait alors d’une confusion de scribe [L.C.].

dudit Guillon tellement qu’il en yssy du sang ; et aussi ledit George suppliant tira sa dague et cuidant frapper ledit Guillon par la cuisse seullement, sans avoir entencion de le tuer, lui mist ladicte dague par la penillière

Bas-ventre.

et en celle challeur, donna ung autre coup sur la teste audit Guillon et le blessa jusques à grand effusion de sang. Et atant s’en yssirent hors dudit hostel, et incontinant ledit Guillon dist audit George qu’il estoit affollé et qu’il lui aidast à le retourner en ladicte maison, afin qu’il se fist penser, ce que fist ledit George, suppliant, et lui aida jusques à l’uys et atant s’en allèrent et laissèrent ledit Guillon. Et depuis ledit Guillon, congnoissant avoir tort, a pardonné ausdiz supplians et fait appointement avecques eulx pour raison desdiz coups et bateure. A l’occasion desquelz coups, par mauvais gouvernement et faulte de soy estre fait penser et habiller ou autrement, certain temps après, ledit Guillon est allé de vie à trespassement. Pour raison desquelles choses, durant le vivant dudit Guillon, ont, comme dit est, finé et composé avecques lui et depuis satisfait comme il appartient, mais ce non obstant à l’occasion dudit cas lesdiz supplians, doubtans rigueur de justice se sont absentez desdiz lieux et n’oseroient bonnement converser, demourer ne eulx tenir au païs, se nostre grace et miséricorde ne leur estoient sur ce imparties, humblement requerans que, attendu ce que dit est et mesmement la manière dudit cas avenu et que ledit George n’a riens fait fors en son corps deffendant, ne ledit Hilairet fors pour secourir sondit frère et empescher que ledit Guillon ne l’occist et tuast, et que par cy devant ilz ont, comme dit est, tousjours esté de bonne vie, renommée, etc., que ledit Guillon fut agresseur, les injuria et mist le premier la main audit cousteau, et aussi que lesdiz supplians sont jeunes enffans, c’est assavoir ledit George de l’aage de trente trois ans, chargé de femme et d’enffans, et ledit Hilairet, son frère de vingt huit ans ou environ, et s’est ledit George, depuis qu’il est franc archer, employé en nostre service au mieulx qu’il a peu, etc., nous leur vueillons, etc. Pourquoy nous, etc., ausdiz supplians et à chacun d’eulx avons quicté, etc., le fait et cas dessusdit avec toute peine, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou mois de juillet, l’an de grace mil cccc. soixante quinze, et de nostre règne le quinzeiesme.

Ainsi signé : Par le conseil. Anthonys. — Visa. Contentor. J. Picart.

MDLIX Juillet 1475 (après le 22)

Rémission accordée à Jean Galdereau, de Saint-Varent en la châtellenie de Thouars, détenu prisonnier à Thouars pour le meurtre d’un nommé Guillaume Mosnier qui, après lui avoir causé du dommage en son verger, l’avait encore injurié et menacé.

AN JJ. 195, n° 1518, fol. 363 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 32-34

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir, etc., nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amys charnelz de Jehan Galdereau, pouvre homme de labour de bras, chargé de femme et de petiz enffans, demourans en la parroisse de Saint-Varent

Le texte porte par erreur en cet endroit : « Saint-Vincent ».

en la chastellenie de Thouars, contenant que, le huitiesme jour du mois d’avril derrenier passé, ledit Jehan Galdereau alla en ung vergier ou lieu appellé Cheneveau

Corr. Charruau ; le Dict. topogr. des Deux-Sèvres dit Moulin Charruault, commune de Saint-Varent.

à lui appartenant, situé et assis près ledit lieu de Saint-Varent, ouquel vergier il laboura et bescha cedit jour, par certaine espace de temps, en intencion de y semer du lin, et jusques environ l’eure d’entre douze et une heure après midi, que ung nommé Guillaume Mosnier, aussi laboureur, entra au vergier dudit Galdereau, pour aller en ung autre vergier, tenant une jument en sa main et en l’autre main quatre ou cinq rameaux pour ramer du lin, et en passant gasta le vergier dudit Galdereau, dont ledit Galdereau fut courroucé et marry, et lui dist qu’il povoit bien passer par ailleurs, sans lui faire dommaige et qu’il avoit mal fait de ainsi habiller son lin. Et sur ce meurent plusieurs parolles ; mais non content ledit Mosnier, tenant en sa main une serpe, dist audit Galdereau : « Se tu approuches de moy, je te fendray la teste de ceste serpe jusques aux dens ! Larron, tu as gaingné à estre pendu passé a dix ans ! » Auquel-ledit Galdereau dist : « Tu as menty. Je ne gaingne oncques a estre pendu. » Et adonc ledit Mosnier, tenant ladicte serpe, dist audit Galdereau : « Si tu approuches de moy, je te fendray la teste de ceste serpe jusques aux dens. » Lequel Galdereau, voyant le mauvais et félon courage dudit Mosnier, aussi les injures qu’il lui disoit et qu’il le menassoit de lui fendre la teste, comme dit est, doubtant sa personne, esmeu et courroucé, frappa ledit Mosnier sur l’espaulle ung coup d’un pic dont il labouroit en sondit vergier, et le poussa arrière de luy et en le poussant et recullant, icellui Mosnier entra d’une jambe en une rese

Espace de terre laissé in culte. Cf. du Cange sous Riesa. [L.C.].

de terre basse et cheut à terre sur ung costé sur sadicte serpe, laquelle en cheant luy entra en l’ayne et de l’autre costé en la cuisse. Et ce fait, s’en alla ledit Galdereau labourer sondit vergier comme devant, cuydant n’avoir aucunement blecié ledit Mosnier ; mais cedit jour, à l’occacion desdictes bleceures, ledit Mosnier alla de vie à trespas. A l’occasion duquel cas, ledit Galdereau a esté prins et constitué prisonnier ès prisons dudit lieu de Thouars, èsquelles prisons il est en voye de miserablement finer ses jours, se nostre grace ne lui estoit et est sur ce impartie, si comme lesdiz supplians dient, humblement requerans que, attendu que ledit cas lui est avenu par challeur et sans aucune precogitacion ne haine qu’il eust avec ledit Mosnier, mais à l’occasion desdictes injures, que ledit Mosnier estoit homme despiteux et injurieux plus que autre du païs, que icellui Galdereau, qui est chargé de femme et de petits enffans s’est tousjours bien et honnestement gouverné sans avoir commis aucun villain cas, blasme ou reprouche, nous lui vueillons sur ce impartir nostre dicte grace. Pour quoy, etc., voulans misericorde, etc., nous audit Jehan Galdereau suppliant ou cas dessus dit avons quicté, etc., et par la teneur des presentes quictons, etc., le fait et cas dessus dit avec toute peine, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous, etc., que de noz presens grace, etc. Donné à Paris, ou mois de juillet, l’an de grace mil cccc. soixante quinze, et de nostre règne le quinzeiesme.

Ainsi signé : Par le conseil. De Wignacourt. — Visa. Contentor. J. Picart.

MDLX Août 1475

Rémission octroyée à Méry Gargot, qui, ne pouvant se faire rembourser une somme de onze écus qu’il avait prêtée en toute confiance à Catherine Blanchart, et celle-ci niant sa dette, avait fait fabriquer par un notaire de Poitiers une fausse reconnaissance.

AN JJ. 195, n° 1521, fol. 364 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 34-36

Loys, etc. Savoir, etc., nous avoir receue l’umble supplicacion de Mery Gargot, pouvre homme, laboureur, chargé de femme et mesnaige, aagé de quarante ans ou environ, contenant que une nommée Katherine Blancharde estoit tenue audit suppliant à cause de prest à elle fait par ledit suppliant et sa grant necessité eu la somme de unze escuz, c’est assavoir neuf escuz en or et cinquante et cinq solz tournois en monnaye, pour laquelle somme paier par plusieurs et diverses foiz ladicte Katherine ait esté par ledit suppliant semonce et requise, dont elle n’a tenu compte ; et à ceste cause icellui suppliant l’a fait convenir à certain et compectant jour par devant l’official de Poictiers, par devant lequel entre lesdites parties comparans fut tant procedé que, après ce que ledit suppliant eut fait de demander desdictes sommes de deniers à ladicte Katherine, icelle Katherine contre raison luy nya sadicte demande. Pour laquelle cause ledit suppliant est encouru en grans despens, lesquelz paier il ne pourroit bonnement, obstant la grant pouvreté en quoy il est. Et pour ce que véritablement ladicte Katherine lui devoit lesdictes sommes de deniers et que doulcement et amiablement il les lui avoit prestées à sa nécessité, et dont il n’avoit prins aucune congnoissance, soy confiant en la conscience d’icelle Katherine, ledit suppliant, soy voyant ainsi trompé et deceu pour bien faire et dont il lui venoit mal, pour soy conseiller sur ce, se tira et transporta par devers ung nommé Jehan Lucas, qui se dit estre notaire audit lieu ; et narracion à lui faicte de ce que dit est, luy pria et requist que, se il estoit possible que il lui peust faire aucune congnoissance et obligacion desdictes sommes à lui deues que dit est par ladicte Katherine, il le contenteroit bien. Lequel notaire lui respondit que voulentiers il le feroit ; laquelle chose il fist et contre signa ladicte obligacion d’un seing manuel d’autre notaire, et icelle faicte et signée, ledit suppliant la porta pour sceller au promoteur dudit lieu ; lequel, après ce qu’il eut veue et visitée, il retint par devers lui, en disant qu’elle estoit faulce et faulcement faicte. Et combien que ledit suppliant, qui est pouvre simple homme de labour, non congnoissant en telles matières, ignorant et fort hors de son entendement, pour les griefz qui lui estoient faiz pour faire plaisir et courtoisie à ladicte Katherine, supposoit et lui estoit advis que ledit notaire eust puissance de ce faire, doubtant rigueur de justice s’est absenté du païs, auquel il n’oseroit doresenavant converser ny habiter se noz grace et misericorde ne lui estoient imparties, humblement requerant que, attendu qu’il n’a receu aucune chose du contenu en ladicte obligacion, qu’il s’est tousjours bien et honnestement gouverné sans reprouche, qu’il est agé de soixante ans

Dans les premières lignes de cette rémission, Méry Gargot est dit âgé d’environ quarante ans.

ou environ et fort debille de son corps, sens et entendement, il nous plaise sur ce lui impartir nostre grace. Pour quoy nous, etc., audit suppliant pour les causes dessus dictes, avons quicté, etc., quictons, etc., le fait et cas dessusdit, avec toute peine, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou mois d’aoust, l’an de grace mil cccc. soixante quinze, et de nostre règne le quinzeiesme.

Ainsi signé : Par le conseil. Ja. de Wignacourt. — Visa. Contentor. J. Picart.

MDLXI Octobre 1475

Lettres d’amortissement, en faveur de Pierre Paen, écuyer, seigneur de Chauray, d’une rente annuelle de quarante livres destinée à la dotation de deux chapelles qu’il se propose de fonder.

AN JJ. 204, n° 62, fol. 39 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 36-40

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre bien amé Pierre Paen, escuyer, seigneur de Chaurray

Pierre Paën ou Payen, était l’un des fils d’Itier Payen, marchand de Saint-Maixent, et de Jeanne de Launaye, frère puîné de Philippe Payen, bourgeois de cette ville, anobli par lettres patentes de Charles VII du 18 novembre 1451. (Cf. notre neuvième volume t. XXXII des Archives historiques, p. 244, où ont été réunis quelques renseignements sur cette famille notable originaire de Saint-Maixent.) Pierre Payen avait acquis, antérieurement à l’année 1455, de Jacques de Lespinatz, cessionnaire du fameux Gilles de Raiz, la seigneurie de Chauray, près Niort, dont ses descendants ont toujours porté le titre. Ses armoiries étaient d’azur à trois besants d’or. (A. Richard, Charles de Danzay, ambassadeur de France en Danemark. Poitiers, 1910, in-8°, p. 226, note.) L’an 1461, à la requête de Pierre Payen, écuyer, sr de Chauray, fut saisi l’hôtel de Faye-sur-Ardin sur Briant de Quercy, écuyer, Annette Rataut, sa femme, et Huguet Rataut, frère de celle-ci, en payement d’arrérages d’une rente de vingt écus d’or constituée audit Pierre par Jean Rataut, écuyer, seigneur de Faye, qui depuis, étant entré dans l’ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem, à Rhodes, avait abandonné ses biens à Huguet et à Annette Rataut (A. Richard, Archives du château de la Barre, t. II, p. 299). Pierre laissa au moins un fils, Guillaume, après lui seigneur de Chauray, et une fille, Marguerite, mariée à Olivier Le Roux, comme on l’apprend quelques lignes plus loin. Guillaume, qui avait épousé Perrette Tutaud, eut aussi entre autres enfants Pierre, sr de Chauray, sénéchal de la baronnie de Saint-Maixent, en 1511, et Jeanne Payen, femme (vers 1512) de Jean Suyreau dit Quissarme, sr de Danzay, père et mère de l’ambassadeur en Danemark, personnage à peu près inconnu jusqu’ici, du moins en France, auquel M.A. Richard a consacré récemment une étude substantielle qui renouvelle complètement l’histoire de la diplomatie française dans les pays du Nord de l’Europe au xvie siècle.

, contenant que il a entencion de brief faire construire et ediffier, pour sa devocion, deux chappelles isquelles il est deliberé de fonder et ordonner certaines messes et autre service divin pour le salut et remède de l’ame de lui et de ses parens, amys et bienffaicteurs, et pour l’entretenement et continuacion dudit service divin est deliberé de donner et aulmosner à ceulx qui le feront et celebreront jusques à la somme de quarante livres de rente, tant de son heritage comme de ce qu’il pourra acquerir cy après pour ce faire. Maiz il doubte que, quant il auroit baillé et delivré ladicte rente pour la fondacion dudit divin service aux gens d’église qui le feront et continueront, noz gens, officiers et commissaires, ou autres ou temps avenir leur y voulsissent mettre et donner empeschement et les contraindre à en vuyder leurs mains, se ladicte rente n’estoit par nous admortie, comme nous a fait dire ledit exposant, en nous humblement requerant sur ce noz grace et liberalité lui estre imparties. Pour ce est il que nous, ce consideré, inclinans liberalement à la requeste à nous sur ce faicte par nostre ami et feal conseiller et maistre de noz comptes, maistre Olivier Le Roux

Cet Olivier Le Roux avait effectivement rendu beaucoup de services à Louis XI avant même son avènement à la couronne. Huit jours après la mort de Charles VII, il obtint de son successeur des provisions de l’office de notaire et secrétaire du roi, par lettres données à Avesnes, le 1er août 1461 ; son nom figure en cette qualité en bas de bon nombre d’actes de la grande Chancellerie des années 1462 à 1464. Il fut aussi vicomte de Valogne, comme on le voit par une procuration passée devant son lieutenant, le 25 décembre 1483. L’année suivante, le 24 novembre, Olivier Le Roux fut reçu conseiller maître à la Chambre des comptes, en remplacement de Henri Cœur, doyen de Limoges ; il fut confirmé, par ordonnance du 24 octobre 1483, dans cet office qu’il exerça jusqu’au 30 novembre 1500. Ses armes étaient d’azur au chevron d’argent, accompagné de trois têtes de léopard d’or. (Constant d’Yanville, la Chambre des comptes, in-fol., p. 481.) Par ces fonctions, et surtout par les missions diplomatiques importantes que lui confia Louis XI, Olivier Le Roux fut un personnage marquant du règne. Le Journal de Jean de Roye, connu sous le nom de Chronique scandaleuse, dit qu’il avait été envoyé en Angleterre, au mois d’avril 1466, avec Louis Bâtard de Bourbon, comte de Roussillon, amiral de France, Jean de Popaincourt, président au Parlement, l’évêque de Langres et le sr de La Barde. Au mois de juin 1467, il y retourna, en cette même qualité d’ambassadeur, avec Antoine du Bec-Crespin, archevêque de Narbonne, l’amiral de France, le président de Popaincourt, etc. En février 1468, il était en mission à la cour de Rome, suivant des lettres de Louis XI, datées de ce mois. Le 5 octobre 1470, il était désigné par le roi, en même temps que le cardinal d’Albi et Jean d’Estouteville, sr de Torcy, pour négocier les garanties à accorder à Jean Pacheco, marquis de Vollena, grand-maître de l’ordre de Saint-Jacques, s’il venait à être compromis pour son zèle à traiter le mariage du duc de Guyenne avec la princesse de Castille. On connaît une lettre très curieuse d’Olivier Le Roux au roi, datée de Saint-Sever, le 11 avril 1471, rendant compte d’une mission de surveillance auprès du même duc de Guyenne et annonçant l’envoi de fragments des missives suspectes, déchirées en morceaux, touchant les agissements du frère de Louis XI. Le 10 mars 1472, le même personnage était encore envoyé, avec le sire de Craon et Pierre Doriole, vers le duc de Bourgogne, pour conclure la paix, et Jean de Roye signale le retour des ambassadeurs au mois de mai de cette année. En 1474, une commission lui fut adressée, ainsi qu’à Jean Bonne et à Jean de Moulins, notaire et secrétaire du roi, pour approvisionner de blé la ville de Bordeaux. Enfin une lettre de Louis XI à Alfonse, roi de Portugal, annonce à ce prince l’envoi d’Olivier Le Roux en qualité d’ambassadeur ; les instructions qui lui furent données à son départ (avril 1475) ont été publiées. Il y est qualifié conseiller et maître des comptes du roi et son notaire et secrétaire. (Vaësen, Lettres missives de Louis XI, t. III, p. 158 ; t. IV, p. 263, 355 et suiv. ; t. V, p. 318, 348, 349, 388-394.) Olivier Le Roux, entre autres possessions dans le Poitou, était seigneur de la moitié par indivis de la terre de Grissais, près Frontenay-le-Comte, dont il rendit aveu le 8 octobre 1490 et fit hommage au roi le 22 du même mois. (Arch. nat. P. 5542, cotes iiiicvi et iiiicvi.)

Son fils, Artus Le Roux, avait été reçu maître lai à sa survivance, par lettre du 26 août 1466, mais n’exerça point, sans doute parce qu’il mourut avant son père (Constant d’Yanville, op. cit., p. 610.) Jacques Le Roux, seigneur de Saint-Ouenne, qui fut l’un des protecteurs de Charles de Danzay, son parent, (A. Richard, Charles de Danzay, p. 15), autre fils (ou plutôt petit-fils) d’Olivier et de Marguerite Payen, fut pourvu d’un office de conseiller au Parlement de Paris, le 18 novembre 1500, et décéda le 2 août 1555. (Blanchard, Catalogue de tous les conseillers au Parlement, in-fol., p. 40.) De ce personnage on possède aussi, aux dates des 14 juin et 6 août 1502, un hommage et un aveu pour moitié par indivis du fief de Grissais. (Arch. nat., P 5551, cotes iiiic iiiixx viibis et ix.) Citons encore un Geoffroy Le Roux, portant les mêmes armes, reçu correcteur des comptes le 1er décembre 1580. (Constant d’Yanville, op. cit., p. 664.)

Dom Fonteneau mentionne deux personnages du même nom, au xve siècle, mais qui paraissent d’une famille différente : Hardy Le Roux, écuyer, marié, le 1er septembre 1402, à Renée de La Jaille, puis, le 6 août 1424, à Marie Odart, et Louis Le Roux, écuyer, sr de Montaigu, son fils, qui épousa, le 7 janvier 1445, Jeanne d’Aubigné, et partagea, le 5 février 1457, les successions de son beau-père et de sa belle-mère. (Voy. Rédet, Table des manuscrits de dom Fonteneau, à ces dates). Hardy Le Roux mourut en 1457 et fut enterré dans l’église de Coron, en Anjou, où étaient ses armoiries. Un nommé Gilles de La Roche ayant entrepris de les détruire, vint pour cet effet à Coron, à la tête de vingt hommes armés, Louis Le Roux, dit alors seigneur de La Roche-des-Aubiers (paroisse de Coron), s’y opposa par la force, et dans le conflit tua Gilles de La Roche. Il obtint pour ce meurtre des lettres de rémission, datées de Tours, le 5 mars 1467, n.s. (JJ. 194, n° 237, fol. 131.) Nous ne les avons pas publiées dans notre recueil, pensant que ce personnage appartenait à l’Anjou plutôt qu’au Poitou.

, lequel a espousé la fille dudit exposant, pour consideracion des bons, grans, notables et continuelz services qu’il nous a jà par long temps faiz et fait chacun jour en plusieurs manières, à icellui suppliant, pour ces causes et autres consideracions à ce nous mouvans, avons octroyé et octroyons qu’il puisse acquerir en nostre pays de Poictou, soit en fief, en censive ou autre part où licitement faire le pourra jusques à ladicte somme de quarante livres de rente ou revenue, ou autres heritages et possessions à la valleur, et iceulx rentes ou heritages jà par lui acquis ou qu’il acquerra et pourra acquerir, comme dit est, à la valleur, bailler, delivrer et donner à ceulx qui seront ordonnez à faire ledit divin service esdictes chappelles et que lesdiz gens d’eglise et leurs successeurs chappellains d’icelles chappelles les puissent tenir, posséder et en joir paisiblement et perpétuellement, comme admorties et à Dieu dediées, c’est assavoir en chacune desdictes chappelles telle somme que par ledit exposant leur sera ordonnée et departie. Et laquelle somme de quarante livres tournois de rente et revenue ainsi par lui acquise ou à acquerir, nous dès maintenant pour lors avons admortie et admortissons de grace especial, par ces presentes, plaine puissance et auctorité royal, sans ce que lesdiz gens d’eglise ne leursdiz successeurs èsdictes chappellenies soient tenus icelles rentes ou héritaiges mettre hors de leurs mains ne pour ce paier aucune finance ou indempnité, à nous ne aux nostres, pour quelque cause ne en quelque manière que ce soit. Et laquelle finance, quelle qu’elle soit et à quelque somme qu’elle puisse monter, nous avons audit suppliant en faveur de nostredit conseiller, son beau filz, donnée et quictée, donnons et quictons de nostre plus ample grace, par cesdictes presentes signées de nostre main. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes à noz amez et feaulxgens de noz comptes et tresoriers, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieutenans, presens et avenir, est à chacun d’eulx, si comme à lui appartendra, que ledit suppliant et lesdiz chappelains qui feront et continueront ledit divin service èsdictes chappelles et chacun d’eulx ilz facent, seuffrent et laissent joir et user paisiblement de noz presens grace, admortissement, don, quictance et octroy ; et s’aucun empeschement leur estoit en ce mis ou donné, au contraire, si l’ostent ou facent oster et mettre sans delay au premier estat et deu. Et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours nous avons fait mettre nostre scel à cesdictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à la Victoire près Senlis, ou moys de octobre, l’an de grace mil cccc. soixante quinze, et de nostre règne le xve.

Ainsi signé dessoubz le reply desdictes lettres : Loys, et dessus : Par le roy, Avrillot. — Visa. Contentor. Rolant.

MDLXII Octobre 1475

Lettres d’abolition en faveur de Charles d’Anjou, duc de Calabre, comte du Maine et vicomte de Châtellerault, pour les machinations et conspirations contre le roi auxquelles il avait pris part.

AN JJ. 204, n° 65, fol. 41 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 41-52

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion à nous presentée par nostre très cher et très amé cousin Charles, duc de Calabre, conte du Maine, de Mortain et de Gien, et viconte de Chastelleraud

Charles II d’Anjou, comte du Maine et de Mortain, vicomte de Châtellerault, etc., fils de Charles Ier mort le 10 avril 1473 et d’Isabelle de Luxembourg, seconde fille de Pierre Ier de Luxembourg, comte de Saint-Pol et de Brienne. Son oncle, le roi René, après le décès de son petit-fils, Nicolas d’Anjou, duc de Lorraine, de Bar et de Calabre (24 juillet 1473, cf. vol. précédent, p. 250, note), l’ayant institué son héritier au royaume de Naples, il prit le titre de duc de Calabre, sous lequel il est le plus souvent désigné dans les textes de l’époque. On le trouve qualifié aussi, après la mort de son oncle Charles IV, roi de Naples, de Sicile et de Jérusalem. C’est au mois de juillet 1480 que Charles II, comte du Maine, succéda aux états et seigneuries du roi René ; le 10 décembre 1481, à Marseille, il fit son testament par lequel il instituait Louis XI son héritier universel, et il mourut le lendemain, âgé de trente-cinq ans, sans postérité de Jeanne de Lorraine, fille aînée de Ferry II de Lorraine, comte de Vaudémont, qu’il avait épousée par contrat passé à Troyes, le 21 janvier 1473.

Ce personnage nous intéresse spécialement à cause de ses possessions poitevines, la vicomté de Châtellerault, les baronnies de Civray, Melle, Saint-Maixent, Chizé, etc. Cependant il convient de reconnaître que les faits relatés dans les présentes lettres d’abolition relèvent plutôt de l’histoire générale et que, par suite, on n’aurait pu nous savoir mauvais gré de ne pas les comprendre dans notre publication. Ce qui nous décide à en donner le texte, c’est que plusieurs gentilshommes de la maison ou de l’entourage du duc de Calabre, appartenant à des familles du Poitou, furent compromis dans les machinations, les menées et les intrigues reprochées à ce prince. Deux sont nommés dans ces lettres d’octobre 1475 : Renaud de Velort et Guillaume de Verruyes. Un autre, Pierre de Dercé, obtint personnellement des lettres d’abolition, le 21 juin 1476, dans lesquelles il est question aussi des agissements de Joachim Rouault, maréchal de France, et de la condamnation à mort du même Renaud de Velort. Or, les lettres d’octobre 1475 et celles du 21 juin 1476 s’éclairent ou se complètent l’une par l’autre, et il est bon d’avoir toute facilité de se reporter du premier texte au second, ou du second au premier, surtout quand il s’agit, comme c’est ici le cas, d’intrigues fort compliquées entre de multiples personnages, dont les intérêts ne sont pas toujours complètement identiques, et qu’il y a lieu de dissiper bien des obscurités.

Il n’est pas inutile non plus de rappeler ici très brièvement dans quelles circonstances se produisirent les menées imputées au duc de Calabre, de concert avec son oncle le roi René. Celui-ci venait, par son troisième testament, rédigé à Marseille le 22 juillet 1474, de léguer l’Anjou et la Provence à son neveu Charles, comte du Maine, comme seul descendant mâle des fils du duc Louis II. Mécontent de n’être point au nombre des héritiers. Louis XI se saisit de la ville d’Angers, de l’Anjou et des revenus du domaine de tout le duché. « Malgré toute sa philosophie, le vieux duc René en conçut un violent dépit. Il paraît avoir écouté alors, dit son historien, les suggestions de quelques amis intéressés, qui l’engagèrent à se rejeter du côté du duc de Bourgogne, seul prince capable de la protéger, et à lui léguer le comté de Provence. On n’a pas la preuve formelle du fait ; mais Commines, ordinairement assez impartial, malgré l’intimité qui l’unissait à son maître, raconte qu’il en était question à l’époque de la bataille de Granson … Selon d’autres contemporains, ce projet en faveur de Charles de Bourgogne n’était qu’une appréhension ou même qu’une invention du roi. » Cette dernière interprétation est beaucoup plus vraisemblable ; autrement le comte du Maine n’aurait plus eu de raison de prendre fait et cause pour son oncle qui l’aurait dépossédé d’un legs important comme celui du comté de Provence, pour en faire bénéficier Charles le Téméraire. Les ducs de Bourgogne et de Bretagne, et les autres ennemis de Louis XI, ne pouvaient qu’être enchantés de voir entrer dans leur alliance contre le roi deux princes éminents comme le roi de Sicile et le comte du Maine, et, aux ouvertures que ceux-ci leur firent, ils ne purent que répondre favorablement sans leur demander de gages. Ils trouvèrent même qu’ils n’entraient pas assez avant dans leurs machinations. C’est sans doute par ce que Louis XI jugea de la même façon et qu’il ne considérait pas l’oncle et le neveu comme des adversaires bien dangereux, l’un trop vieux, l’autre jeune, il est vrai, mais de faible complexion et de santé débile, qu’il s’arrangea avec eux, moyennant certaines promesses. Toutefois, avant de traiter, pour frapper les esprits, et intimider le roi de Sicile, il le fit mettre en accusation au Parlement, le 6 mars 1475, le chargeant, entre autres, d’avoir impliqué le comte du Maine dans les conspirations du connétable de Saint-Pol, condamné récemment pour félonie. L’accord entre les deux rois fut signé le 25 mai suivant. (Voy. Lecoy de la Marche, le Roi René, 2 vol. in-8°, Paris, 1875 ; Louis XI et la succession de Provence, in-8°, tirage à part de la Revue des questions historiques.) On peut voir, en outre, dans le recueil des lettres missives de Louis XI, pour l’année 1476, différentes allusions aux intrigues et menées dévoilées dans les lettres d’abolition en faveur du duc de Calabre. (Edit. Vaësen, in-8°, t. VI, p. 45, 47, 62, etc.) ; ces dernières ont été publiées dans la table des documents mis au jour par M. le duc de La Trémoïlle, sous le titre : Archives d’un serviteur de Louis XI, Nantes, 1888, in-4°, p. 161 et suiv.

, contenant que, durant les derrenières divisions qui ont eu cours en nostre royaume, pendant lesquelles aucuns des seigneurs de nostre sang se sont eslevez en rebellion et desobeissance contre nous, et aucuns autres seduitz et divertiz pour adherer ausdictes rebellions et mesmement en l’année derrenière passée, icellui nostre cousin suppliant, qui lors estoit allé en pays de Prouvence devers nostre très cher et très amé oncle et cousin le roy de Sicille, après ce que, pour aucunes choses dont avions esté advertiz et pour certaines causes qui à ce nous mouvoient, nous eusmes fait prendre et mettre en nostre main les ville et chastel d’Angiers

La ville d’Angers et le duché d’Anjou furent mis sous la main du roi peu de temps après qu’il eut connaissance du récent testament du roi René. Il nomma capitaine du château d’Angers Antoine de Sourches, sire de Maigné, que nous retrouverons ailleurs dans le présent volume, et afin de mieux assurer la garde de la forteresse, il lui adjoignit deux écuyers, les frères de Grany. Dès le mois de décembre 1474, avant l’établissement régulier de la municipalité, un maire et des échevins étaient en fonctions dans la ville et donnaient des ordres au nom du roi. (Lecoy de la Marche, le Roi René, etc., t. I, p. 395.)

, nostre dit oncle en parla à nostre dit cousin de Calabre, suppliant, en lui demandant qu’il lui sembloit qu’il avoit à faire. Lequel nostre cousin suppliant lui dist qu’il convenoit envoyer devers le connestable conte de Saint Pol

Louis de Luxembourg, comte de Saint-Pol, que Louis, en 1465, avait nommé connétable de France dans l’espoir de le détacher de la ligue des princes mécontents. Il n’est pas nécessaire de rappeler ici les principaux événements auxquels prit part ce personnage et les nombreuses trahisons dont il se rendit coupable. On sait qu’elles lui valurent une condamnation à mort, prononcée par le Parlement, le 19 décembre 1475, et exécutée le même jour.

, son oncle, pour savoir qu’ilz avoient à faire. Et lors y envoyèrent Françoys de Lusembourg

François de Luxembourg, 5e fils de Thibaud, seigneur de Fiennes, frère cadet du connétable, et de Philippe de Melun, était attaché à la personne et aux intérêts de Charles d’Anjou comte du Maine, duc de Calabre, dont il était cousin. Celui-ci, en reconnaissance, lui fit don par son testament (Marseille, 10 décembre 1481) de la vicomté de Martigues en Provence dont il porta désormais le titre. Ambassadeur en Angleterre (1488), gouverneur et grand sénéchal de Provence (1491), il accompagna Charles VIII à la conquête du royaume de Naples. (Le P. Anselme, Hist. généalogique, in-fol., t. III, p. 737.)

, nepveu dudit conte de Saint Pol, et avant qu’il fut retourné, s’en parti nostredit cousin dudit pays de Prouvence pour venir devers nous, et en s’en venant rencontra ledit Françoys près de Roussillon ou Daulphiné ; lequel lui dist qu’il avoit charge de par ledit connestable s’il le trouvoit encores en Prouvence, lui dire qu’il n’en partist point et qu’il estoit en danger de sa personne, s’il venoit devers nous. Et avec ce lui dist seul à seul que les seigneurs de nostre royaume devoient envoyer en ung certain lieu, en Savoye ou en Bresse, chacun leur scellé et que, s’il vouloit y envoyer le sien, qu’il y envoyast audit jour. Et lors ledit suppliant lui dist qu’il s’en allast devers sondit oncle le roy de Secille lui dire lesdictes choses et que au regard de lui il ne envoyeroit point audit lieu, maiz que sondit oncle avoit puissance de tout faire pour lui ce qui lui plaisoit. Et lui semble que ledit Françoys lui dist que Hector de Lescluze

Hector de L’Écluse, qualifié simplement écuyer, ayant été au service de feu Louis de Luxembourg, comte de Saint-Pol, connétable de France, obtint lui-même des lettres d’abolition, à Lyon, le 26 mars 1476, n.s., adressées au Parlement, au Prévôt de Paris et aux baillis de Vermandois et d’Amiens. Par commandement de son maître, il avait accompli plusieurs missions auprès de différents seigneurs du royaume. Les faits visés dans ces lettres se rapportent plus particulièrement aux machinations du connétable avec Charles le Téméraire, et sont présentés avec toute la précision désirable. (JJ. 204, n° 38, fol. 15 v°.) Hector de L’Écluse était seigneur du Mas en Bourbonnais et devint, au mois d’août 1477, écuyer d’écurie de Louis XI. (Cf. sur ce personnage une note de B. de Mandrot, Journal de Jean de Roger, in-8°, t. Ier, p. 363.)

estoit jà audit lieu de Savoye ou de Bresse de par ledit connestable, pour attendre les autres, et que les gens du duc de Bourgongne y estoient ou se y trouveroient de brief, et aussi qu’il avoit passé par Molins et qu’il avoit dit toutes ces choses à nostre très cher et très amé frère le duc de Bourbonnois, et d’Auvergne

Jean II le Bon, duc de Bourbonnais et d’Auvergne, né en 1426, fils aîné de Charles Ier auquel il succéda en 1456, était alors (1475) lieutenant général pour le roi dans le Lyonnais. Pendant la minorité de Charles VIII, bien qu’il eût été nommé connétable de France et lieutenant général du royaume, il prit part à la révolte du duc d’Orléans. Il mourut à Moulins, sans postérité légitime, le 1er avril 1488, et eut pour successeur dans le duché de Bourbon, son frère Pierre, connu jusque-là sous le nom de sire de Beaujeu.

de par ledit connestable. Et lors s’en parti ledit Françoys et ne le vit depuis nostredit cousin suppliant. Et depuis ce, et nostre cousin suppliant estant ès marches de par deça, nostre dit oncle de Secille lui manda qu’il lui envoyast troys blancz scellez, pour en faire ce qu’il adviseroit ; ce que nostre dit cousin suppliant fist et les lui envoya, desquelz il n’a depuis esté adverti par sondit oncle ne autres qu’il a esté fait desdiz scellez. Et au passer par Molins par nostredit cousin suppliant, parla audit duc de Bourbon des choses dessusdictes, auquel il prya qu’il obliast toutes les questions du temps passé et qu’ilz feussent dès lors en avant amys et aliez, en lui offrant son scellé. A quoy ledit duc de Bourbon respondi qu’il estoit content et qu’il envoyeroit ung homme après lui ; dont depuis il ne oyt parler et que ledit connestable avoit bien mandé à nostredit cousin suppliant que le duc de Nemours

Jacques d’Armagnac, duc de Nemours, comte de Pardiac, etc., fils de Bernard, comte de Pardiac, et d’Eléonore de Bourbon, fille de Jacques, comte de la Marche. Convaincu d’intelligence, avec le roi d’Angleterre, le duc de Bourgogne et le connétable de Saint-Pol, il fut condamné à mort par arrêt du Parlement et décapité aux Halles de Paris, le 4 août 1477. (Cf. notre volume précédent, p. 276, note, et B. de Mandrot, Jacques d’Armagnac, duc de Nemours. Paris, 1890, in-8°, extrait de la Revue historique.)

estoit de la bande des autres, maiz que jamaiz n’a rien escryt ne fait savoir audit duc de Nemours ne ledit duc de Nemours à lui. Et avec ce ledit connestable fist savoir à nostredit cousin suppliant, lui estant derrenièrement à Paris, par devers nous, qu’il se retirast en ses pays et qu’il estoit en danger de sa personne, s’il séjournoit par devers nous ; et à ceste cause, s’en parti à haste de devers nous, combien qu’il eust charge expresse de par nostre dit oncle de Secille de nous servir, et suivir, obeir et complaire plus que jamaiz n’avoit fait, et de poursuir les besongnes de nostredit oncle envers nous ; et que en oultre, nostredit cousin retourné en sondit pays du Maine, ledit connestable lui fist savoir par plusieurs foiz qu’il se donnast garde de sa personne et qu’il fist reparer ses places et les gardast bien, et que avant qu’il feust peu de temps, nous arions à besongner de lui, combien que icellui nostredit cousin fust deliberé venir par devers nous, nonobstant toutes les choses dessusdictes et les rigueurs que on lui tenoit pour le fait de Guillaume de Roquemeaure et la prinse de sa nef à la Rochelle, et le soustenement des habitans de Mortaing à l’encontre de lui. Et tantost après se parti du Mans icellui nostre cousin suppliant, et s’en ala à Sablé ; ouquel lieu lui fut rapporté que nous transportions au Mont-Saint-Michel et à Nostre-Dame de Behuart, et que faisions mener avec nous sept ou huit cent lances pour le prendre et toutes ses places. Pour laquelle cause et aussi que ledit connestable lui avoit mandé qu’il envoyast en Bretaigne, delibera de y envoyer Regnault de Velort

Il sera question plus longuement de ce Renaud de Velort dans l’abolition octroyée, le 21 juin 1476, à Pierre de Dercé (Voy. ci-dessous.)

, pour sentir le duc de Bretaigne qui lors estoit en guerre avec nous, s’il le recueilleroit en son pays, quant en auroit mestier, et s’il le secourroit, quant en auroit à besongner, lui offrant lui et ses places, pour le doubte qu’il avoit de sa personne. Et lors ledit de Velort envoya son homme devers Gilbert de Grassay

Gilbert de Grassay (ou plutôt Graçay), seigneur de Champeroux, chambellan de Louis XI, membre du conseil de Charles VIII, connu surtout pour le rôle important qu’il joua pendant la guerre de Bretagne, où il commanda une compagnie de cent hommes d’armes et tomba entre les mains des Bretons, le 3 mars 1488, lors de la capitulation de Vannes. (Le duc de La Trémoïlle, Correspondance de Charles VIII avec Louis II de La Trémoïlle, pendant la guerre de Bretagne en 1488 Paris, 1875, in-8°, passim ; A. Dupuy, Hist. de la réunion de la Bretagne à la France t. II, p. 65.)

, à Nantes, et lui escripvi qu’il vouloit bien parler à lui et qu’il lui fist savoir où il le pourroit trouver ; et se rendirent à Martigny. Et ce pendant nostredit cousin suppliant s’en alla à Mayenne en attendant la response dudit Regnaut ; lequel lui dist, à son retour audit Mayenne, que Gilbert de Grassay se faisoit fort de faire telle aliance avec ledit duc de Bretaigne qu’il vouldroit. Et après ce que ledit de Velort et son homme eurent esté par plusieurs foiz par devers ledit duc de Bretaigne, fut appoincté de bailler leurs seellez l’un à l’autre, c’est assavoir nostredit cousin suppliant audit duc et ledit duc à nostredit cousin. Et avant que lesdiz seellez feussent baillez, nostre dit cousin suppliant lui escripvi de sa main comme il estoit bien joyeulx de ce qu’il lui offroit le recueillir et lui aider en ce qu’il pourroit et ledit duc pareillement ; et tantost après fut fait le seellé, promettant l’un à l’autre aider et secourir de leurs gens et de leurs places. Et pour ce que ledit seellé contenoit comprins amys et alyez, nostredit cousin suppliant deist expressement audit Regnault, pour dire aux gens du duc qu’il entendoit excepter les Bourgoignons et Anglois, qu’il ne vouloit estre bourgoignon ne anglois. Et après plusieurs debatz sur ce euz entre eulz et les gens dudit duc, se acordèrent et fust dit que nostredit cousin n’aroit que faire que au duc, et non point à ses amys, bienvueillans ne alliez. Et aussi pour ce qu’il y avoit audit seellé ung mot qui disoit nomméement contre nous, nostre dit cousin de Calabre commanda au chappellain messire Pierre, qui escryvoit, que ce mot fust osté, et qu’il ne sut se depuis il fut osté ou non. Et au regard du seellé dudit duc, nosdit cousin suppliant et ledit de Velort le brulèrent, nostredit cousin estanst à Aluye ; et quant ledit duc de Bretaigne sceut que nostredit cousin suppliant venoit par devers nous, ledit duc de Bretaigne lui manda audit lieu de Mayenne, qu’il faisoit bien de venir devers nous et qu’il le quictoit et lui envoya ung brevet non signé, lequel nostredit cousin suppliant a muscé, lequel il monstrera quant nostre plaisir sera. Et après ce, vint par devers nostredit cousin suppliant ung nommé Jehan Le Verrier pendant ce que le bastard du Maine

Louis, bâtard du Maine, seigneur de Mézières-en-Brenne, Sainte-Néomaye, Thuré, etc., fils naturel de Charles Ier d’Anjou, comte du Maine, et, par conséquent, frère de Charles, duc de Calabre, sur lequel cf. notre précédent volume, t. XXXVIII des Archives historiques, p. 118, et note.

et le bastart de Harecourt

Jean, bâtard d’Harcourt, fils naturel de Jean VII d’Harcourt, et de Philippe Noëlle, avait été légitimé par lettres de 1470. Seigneur de Gironde en 1475, conseiller et premier chambellan de Charles II, comte du Maine, vicomte de Châtellerault, gouverneur pour ce prince et capitaine de Saint-Maixent, sénéchal du Maine en 1481, il laissa la terre de Gironde à Charlotte d’Argouges. (Le P. Anselme, Hist. généalogique, t. V, p. 134.) Charles d’Anjou, par son testament dans lequel il constituait le roi de France son héritier universel (10 déc. 1481) avait recommandé particulièrement le bâtard d’Harcourt à Louis XI qui en fit l’un de ses chambellans. Le 6 avril 1482, il mandait au Parlement de juger promptement un procès soutenu par ce personnage contre le sire de Richebourg, au sujet de la seigneurie d’Alluye donnée par le roi audit de Richebourg, malgré l’assignation précédemment faite par Charles d’Anjou au bâtard d’Harcourt, en garantie d’une somme de 10.000 écus d’or qu’il lui avait promise. (Vaësen, Lettres de Louis XI, t. IX, p. 196.)

estoient par devers nous à Compiengnc, lequel Verrier dit à nostredit cousin suppliant que les Angloix estoient à Dorlans, et que lui mandions qu’il estoit temps qu’il vensist devers nous pour nous servir, et que avions commandé à maistre Girault et aux Rousseletz qu’ilz feissent ce que nostre dit cousin suppliant lui commanderoit et qu’il estoit le grant maistre du mestier, dont icellui nostre cousin fut despit pour ce qu’on lui offrist la maistrise de nostre artillerie, se lui sembloit ; à quoy il respondit qu’il n’avoit point d’argent et plusieurs autres paroles mal sonnantes qu’il ne devoit pas dire, desquelles il n’est à present recors ; et que semblablement ung nommé Marbery

Robert de Marbery (aliàs Marburi) était avec Hector de L’Écluze l’un des serviteurs et agents du connétable de Saint-Pol.

vint par deux foiz par devers nostredit cousin, et que à l’une des foiz il apporta lettres de par ledit connestable par lesquelles il lui mandoit ledit Marbery pour le mettre en son hostel combien qu’il vensist pour lui apporter lettres de par ledit connestable ; et lui dist à telle foiz comme les Angloix sans point de faulte venoient, et que pour en savoir encores mieulx, s’en alloit en Normandie et de là en Bretaigne, devers le duc, pour lui dire les nouvelles dudit connestable et desdiz Angloix, et qu’il rappasseroit par devers nostredit cousin suppliant, pour savoir s’il vouloit riens mander audit connestable. Pour ce que nostre dit cousin ne se fioit pas trop dudit Marbery, ne manda aucune chose par lui, fors qu’il se recommandoit à lui et qu’il lui prioit qu’il lui fist savoir tousjours des nouvelles. Et depuis par plusieurs foiz ledit connestable a fait savoir audit suppliant que, s’il vouloit qu’il meist de ses gens d’armes en sa place de Guise et qu’il la lui garderoit bien et qu’elle n’estoit pas seurement et qu’il doubtoit que la preinssions, ce que nostredit cousin suppliant lui a tousjours acordé. Maiz ce neantmoins a toujours differé de ce faire et n’y a voulu mettre autres gens que les siens, et que par plusieurs foiz il a fait savoir par Le Picart audit connestable comme il se fyait en lui et que, s’il avoit à besongner de gens pour Guyse, il prendroit des siens et lui prioit qu’il lui fist savoir tousjours des nouvelles. Et aussi manda à Guillaume de Verues

Sans doute de Verruyes ; nous n’avons rien trouvé de particulier relativement à ce personnage, mais précédemment nous avons donné une notice sur sa famille, possessionnée aux xive et xve siècles, dans la Gâtine (Arch. hist. du Poitou, t. XXI, p. 96.)

qu’il allast souvent devers ledit connestable pour savoir des nouvelles et lui en faire savoir, et que à une autre foiz et entre les autres, ledit connestable manda à nostredit cousin suppliant par ledit Picart qu’il estoit force qu’il print de troys parti l’un et fut devant que les Angloix vinsissent en nostre royaume : l’un qu’il faignit se tirer par devers nous et qu’il tirast tout à coup à Saint Quentin ou à Guyse et que de ses gens d’armes et de ce qu’il avoit, il seroit aussi bien maistre que lui ; l’autre, qu’il tirast devers ledit duc de Bourbon et de là s’en entrast en la Bourgongne et en Prouvence ; et l’autre qu’il s’en tirast en Bretaigne et qu’il fust seur du duc, et que là il lui feroit savoir de ses nouvelles et qu’il lui envoyeroit sauf conduit des Angloix et des Bourgoignons, et deux gallées dudit duc de Bourgongne, pour le mener en Flandre, pour de là se tirer par devers ledit connestable. Et avec ce manda ledit connestable à icellui nostre cousin suppliant, par ledit Picart, qu’il sentist se le duc seroit bon pour eulx ou s’il prendroit parti avec nous, et que après qu’il eust senty par ceulx qui mennoyoient

Sic, Corr. « moyennoient ».

les traictez desdiz scellez fist savoir audit connestable par ledit Picart, qu’il pensoit que oy. Et que en tant que touche le chastel d’Angiers, que icellui nostre cousin suppliant a bien fait venir aucuns du pays du Maine, lesquelz il ne congnoist, et que on disoit qu’ilz avoient des parens audit chastel d’Angiers, et leur demanda s’il y avoit remède de faire parler à eulx, et leur dit qu’ilz feissent des promesses de par lui ; lesquelz y allerent et depuis leur firent responce qu’ilz n’avoient riens peu faire, et que à ceste cause nostredit cousin suppliant ne fist depuis autre poursuite. Et en tant que touche le duc de Millan

Galéas-Marie Sforza, duc de Milan depuis le 8 mars 1466, assassiné, le 26 décembre 1476, dans l’église de Saint-Étienne de Milan.

et la duchesse de Savoye

Blanche Marie, fille de Galéas-Marie Sforza, duc de Milan, femme de Philibert Ier, duc de Savoie (1472-1482), se remaria depuis à l’empereur Maximilien Ier.

, que icellui nostre cousin suppliant a bien eu parolles à eulx et a esté requis de par eulx de s’entre aider l’un à l’autre à garder leurs pays, maiz de seellé n’en a point esté baillé par nostre dit cousin suppliant.

A l’occasion desquelz cas dessus declairez, ainsi faiz et commis par nostredit cousin suppliant et autres dont il n’est à present memoratif, ainsi advenus durant ledit temps desdictes divisions, icellui nostre cousin suppliant doubtant qu’il en feust on temps avenir reprouché par nous ou autres, nous a humblement fait supplier et requerir que, attendu les moyens dessus declairez par le moien desquelz il les a ainsi commis et perpetrez et son jeune aage, qui est de xxviie à xxviiie ans, en quoy il est encores à present constitué et que il a bon vouloir de nous desormaiz obeir, servir et complaire en toute obeissance, humilité et amour, il nous plaise sur ce lui impartir noz grace, pardon et abolicion de tous lesdiz cas et autres, ainsi par lui commis durant le temps desdictes divisions et jusques à present, humblement requerant iceulx. Pour quoy nous, ces choses considérées et mesmement la proximité du lignage en quoy nous attient nostredit cousin suppliant et ledit jeune aage en quoy il est encores à present constitué, comme dit est, à icellui, pour ces causes et consideracions et autres à ce nous mouvans, avons quicté, remis, pardonné et aboli, remettons, quictons, pardonnons et abolissons, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, les faiz et cas dessus declairez, ensemble tous autres que pourroit avoir faiz et commis icellui nostre cousin suppliant à l’encontre de nous et de nostre auctorité et magesté royal, et lesquels nous tenons cy pour expressement declairez, avec toute peine, amende et offence corporelle, criminelle et civile en quoy, à l’occasion d’iceulx et de chacun d’iceulx il pourroit estre encouru envers nous, nostredicte auctorité et justice. Et l’avons restitué et restituons à sa bonne fame et renommée en nostre dit royaume et à ses biens, honneurs, terres et seignouries, et quant à ce imposé et imposons silence perpetuel à nostre procureur general et à tous autres, en mettant au neant tous procès, deffaulx, ban et appeaulx, s’aucuns s’en sont ou estoient pour ce ensuiz. Si donnons en mandement par cesdictes presentes, à nostre amé et feal chancellier, à noz amez et feaulx conseillers les gens de nostre court de Parlement à Paris et à tous noz autres justiciers et officiers ou à leurs lieuxtenans ou commis, presens et avenir et à chacun d’eulx, si comme à lui appartendra et que requis en sera que de noz presens grace, quictance, remission, pardon et abolicion facent et seuffrent nostredit cousin suppliant joir et user plainement et paisiblement, sans pour ce le traveiller ou molester ne souffrir estre traveillé ou molesté, ores ne pour le temps avenir, en corps ne en biens en aucune manière en contraire ; mais se son corps ou aucuns de sesdiz biens, terres et seigneuries sont ou estoient pour ce prinses, saisies, arrestées ou empeschées, les lui mettent ou facent mettre sans delay à plaine delivrance et un premier estat et deu. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Sauf toutes voyes en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à la Victoire près Senliz, ou moys d’octobre, l’an de grace mil cccc. soixante quinze, et de nostre règne le xvme.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil, ouquel vous, l’evesque d’Evreux

A cette date, l’évêque d’Évreux était Jean Héberge (1474-1479).

, les sires du Lude

Jean de Daillon, seigneur du Lude, gouverneur du Dauphiné, chambellan du roi. (Cf. vol. précédent, p. 186, note.)

, gouverneur du Dauphiné, d’Argenton

Philippe de Commines, seigneur d’Argenton.

et autres estoient. — J. Maure.

MDLXIII Décembre 1475

Rémission en faveur de François d’Arnac

La nouvelle édition du Dict. des familles du Poitou distingue deux familles d’Arnac venues en Poitou, « la première qui tire probablement son origine de la paroisse de Darnac, autrefois du diocèse de Poitiers, archiprêtré de Montmorillon, auj. département de la Haute-Vienne, canton du Dorat … ; la seconde, originaire du Berry, qui a possédé en Gâtine les deux importantes châtellenies de Châteauneuf. » (V. t. I, p. 106.) François d’Arnac appartenait vraisemblablement à l’une de ces deux familles, quoiqu’il soit dit, dans ce texte, « natif de Touraine » ; mais la généalogie n’en est connue qu’à partir du xvie siècle, et pour la période antérieure on n’a pu relever que quelques « noms isolés », parmi lesquels ne figure pas celui du capitaine de Brégançon.

, écuyer, natif de Touraine, archer de l’ordonnance de la compagnie de Charles, duc de Calabre, comte du Maine

Sur Charles II d’Anjou, comte du Maine, duc de Calabre, vicomte de Châtellerault, etc., voir la pièce précédente [L.C.].

, commis par celui-ci à la garde du château de « Berganson » (Bregançon) en Provence, coupable, étant audit lieu, du meurtre d’un de ses soudoyers, nommé Jacques Girard, natif du Poitou, qui l’avait appelé traître. Mandement aux baillis de Touraine, Berry et Saint-Pierre-le-Moutier, et aux sénéchaux de Poitou et de Limousin. Donné à Tours, ou moys de décembre mil iiiic lxxv et de nostre règne le xve.

AN JJ. 204, n° 141, fol. 86 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 52-53

MDLXIV Janvier 1476 (n.s.)

Rémission octroyée à Colas Lebloy, homme de labour, demeurant au village de Martinet en la seigneurie de Saint-Mesmin, détenu prisonnier pour le meurtre de Jean Bachelot, avec lequel il s’était pris de querelle et battu.

AN JJ. 204, n° 67, fol. 43 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 53-57

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Colas Lebloy, povre homme de labour demourant ou village de Martinet en la seigneurie de Saint-Mesmin, à present de tenu prisonnier audit Saint-Mesmin en Poictou, chargé de femme grosse et de dix petis enfans, contenant que ledit village de Martinet est tenu et chargé envers le seigneur dudit Saint-Mesmin de plusieurs biains

Biain, bian, bean, biein, etc. : corvée due particulièrement pour la récolte des fruits de la terre. « Quant aucun fons est tenu rousturierement d’aucun seigneur de fief à cens, rentes, biayns ou autres devors, et ilz sont plusieurs teneurs, le seigneur peut demander son devoir, et conmander lesditz biayns à chascun des teneurs pour le tout, car chascune partie du fief est chargée du tout » (Coustumier du Poitou, 1499, ch. : 68, 72.) Ce mot est aussi employé, en Poitou, dans le sens de : jour de marché.

de beulz, mesmement à aller querir on pays de Thouarçoys les vins dudit seigneur de Saint-Mesmin

Guy de Montfaucon, chevalier, était alors seigneur de Saint-Mesmin, relevant de la baronnie de Parthenay à cause de Secondigny. Un siècle auparavant, son aïeul, Pierre de Montfaucon, avait eu des démêlés avec son suzerain, Guillaume Larchevêque, sr de Parthenay, qui lui contestait ses droits de justice, avait fait démolir les fortifications du château de Saint-Mesmin, y avait établi un sergent, etc. Il a été question du procès qui résulta de ces actes de violence, de 1377 à 1380, dans l’un de nos précédents volumes. (Arch. hist., t. XXI, p. 11, note). Pierre mourut le dimanche avant la Saint-Denis 1391. (Arch. nat., R. 1* 199, fol. 9.) Son fils Jean de Montfaucon, marié à Jeanne de Beaussais, possédait du chef de sa femme les fiefs et hébergements de la Gralière, mouvant de Lusignan, du Champ-Saint-Paul, relevant de Saint-Maixent, de la Touche de Villiers, sis en la châtellenie de Melle, une maison dans cette ville, une partie de l’hébergement de Baussais, dans la mouvance de la même châtellenie, dont il rendit hommage et fit plusieurs aveux aux comtes de Poitou, en 1402, 1404, 1407, 1418 et 1420. (Arch. nat., R1* 2171, p. 306 ; R1* 2173, p. 1704, 1706 ; R1* 190, fol. 119 et 276 ; P 1144, fol. 22 v°, 33, 53 v°, 54 ; P 1145, fol. 46, 67 v°, 113.) Sa fille Marguerite avait épousé, avant 1420, Jean de Rochechouart. Jean de Montfaucon, chevalier, seigneur de Saint-Mesmin, d’Aubigny, de la Lionnière et de la Fosse, cette dernière relevant de Vouvant, se maria en secondes noces à Marie de Beaumont, fille de Guy, sire de Bressuire, et mourut le 29 novembre 1453. Son fils aîné, Guy de Montfaucon, bailla alors au sire de Parthenay, de Vouvant et de Mervent (à cette époque le connétable de Richemont), l’état des revenus de la terre de la Fosse (cne de Mouilleron, con de la Châtaigneraye) pour en payer le droit de rachat. (R1 203, carton). Le procès-verbal de visite faite en 1460 par Guillaume Ripaut, clerc des comptes des baronnies de Secondigny, Béceleuf, le Coudray-Salbart et de leurs dépendances, estime à 360 livres le revenu annuel de Saint-Mesmin, alors que, l’an 1452, Jean de Boismoreau, curé de la Forêt-sur-Sèvre, témoin produit par Jean de Montfaucon, dans une enquête, l’évaluait à 1.700 ou 1.800 livres de rente. (Arch. des Deux-Sèvres, chartrier de Saint-Loup, E 1225), et il fournit un état complet des arrière-fiefs relevant de cette seigneurie et de celle de la Lionnière, et de leurs possesseurs qui en devaient faire aveu à Guy de Montfaucon, (R1* 207, non folioté.) Celui-ci avait épousé Anne, fille de Jean Sauvestre, et, en 1459, il contestait, ainsi que sa femme, à Joachim Rouault, sr de Boisménart, la possession de la terre de la Chaize-le-Vicomte, que lui avait vendue Louis d’Amboise, vicomte de Thouars (coll. dom Fonteneau, t. XXVI, p. 423). Il vivait encore le 1er octobre 1484, date d’un aveu à lui rendu, en qualité de seigneur d’Aubigny, par Jean de Ferrières, sr de Champigny-le-Sec, de son fief de Fondechien. (A. Richard, Arch. du château de la Barre, t. I, p. 78.) Son décès arriva entre le 1er octobre 1484 et le 8 août 1485. Un arrêt du Parlement de ce jour renvoie devant le sénéchal de Poitou un procès d’Anne Sauvestre, veuve de Guy de Montfaucon, chevalier, contre les religieux de Saint-Laon de Thouars (X1a 4826, fol. 287 v°.)

par chacun an, à sa semonce, et les amener audit lieu de Saint-Mesmin. Et à ceste cause, on moys de novembre derrenier passé, iceluy suppliant et plusieurs autres biannaux dudit seigneur de Saint-Mesmin furent semons par Françoys Ferrand, sergent dudit lieu de Saint-Mesmin pour aller querir des vins oudit pays de Thouarçoys et les amener audit lieu de Saint-Mesmin. Et pour ce faire, iceluy suppliant, Jehan Joyron, Colas Maroleau, Jehan Symonneau et autres biannaux dudit seigneur de Saint-Mesmin jusques au nombre de six et en leur compaignée ledit Ferrand, sergent susdit, se assemblerent au pont de la Branle estant sur la rivière de la Seyvre, près la chappelle de Nostre-Dame de Beauchesne, avecques deux charretes atellées chacune de huit beufz, et s’en allèrent au giste au lieu de Mouster, près Argenton le Chastel, le lundi xiiie jour de novembre derrenier passé, et le mardi lendemain ensuivant xiiiie jour dudit moys iceluy suppliant et autres dessus nommez se departirent dudit lieu de Mouster ainsi que la lune levoit, qui estoit deux ou troys heures avant jour, pour aller au lieu de Sainte-Verge charger le vin dudit seigneur de Saint-Mesmin. Lesquelz suppliant et autres dessusdiz arriverent environ l’aube du jour en ung village estant près le bourg de Ligron, duquel village iceluy suppliant ne savoit le nom, fors que depuis il a oy dire que c’estoit le village de la Thibaudière, près duquel village ilz trouvèrent une haye faicte de fagotz d’espines sèches, dont ledit Jehan Joyron, l’un desdiz biennaux prinst ung fagot et le mist en la charrète dudit suppliant à son desceu pour chaufer luy et les autres biennaux qui avoient très grant froit, avant que charger ledit vin audit lieu de Sainte Verge. Auquel lieu les dessus-diz biennaux ne peurent recouvrer feu et ainsi ne peurent faire bruler ledit boys ne se chauffer, mais chargerent ledit vin au mieulx qu’ilz peurent et remistrent lesdiz suppliant et Joyron ledit fagot des espines en leur charrete, esperans eulx en chauffer à leur prouchaine repue qu’ilz feroient à leur retour. Et eulx ainsi chargez dudin vin, en s’en retournant passèrent par ledit village de la Thibaudière, environ deux ou troys heures après mydi ; ouquel vindrent sur eulx deux hommes, desquelz ledit suppliant ne savoit les noms, fors que depuis il a oy dire que l’un d’eulx avoit nom Jehan Bachelot, qui estoit illecques près ès champs dudit village où il chaumoit et avoit ung gros baston forchu de plain poing et long d’une brasse et plus, vulgaument appelle paufour ou fourche en sa main, et l’autre desdiz deux hommes avoit ung grant faucillon en sa main, duquel on a acoustumé chaumer ; avecques lequel paufour ou fourche ledit Bachelot vouloit oster ledit fagot d’espines de ladite charrete dudit suppliant. Ce que ledit suppliant empescha doulcement avecques son petit aguillon dont il gouvernoit sesdiz beufz et charroy, et sans faire aucun mal audit Bachelot. Mais ledit Bachelot, non contant de ce, frappa ledit suppliant dudit paufour sur les braz ; lequel suppliant en voulant resister avecques sondit aguillon audit cop que luy avoit donné ledit Bachelot, frappa ledit Bachelot de sondit aguillon tellement qu’il cheut à terre, et incontinant se releva et alla de rechief chaumer ou champ où il chaumoit paravant, ouquel il chauma et fist ung fès de chaume qu’il emporta sur son coul avecques ledit paufour à sa maison. Et ledit suppliant et autres dessus nommez sesdiz compaignons s’en alloient avecques leurdit charroy vers ledit lieu de Mouster où ilz couchèrent pour celle nuyt. Et le landemain au matin, sourvint sur ledit suppliant et sesdiz compaignons ung nommé Pierre Belot, soy disant sergent d’Argenton ; lequel acompaigné jusques au nombre de dix hommes embastonnez de gros bastons print au corps ledit suppliant et lesdiz Joyron, Maroleau et Symonneau, biennaux susdiz, supposant ledit sergent et autres qui estoient avecques luy que ledit Bachelot estoit allé de vie à trespas au moien dudit cop que luy avoit donné ledit suppliant, qui n’est pas vraysemblable, veu que depuis il avoit fait euvre de homme sain et que ledit suppliant n’avoit eu entencion ne courage de lui faire mal, au moins dont il peust ne deust moins valoir. Et avecques ce prinstrent et arrestèrent lesdiz beufz et charretes et vin estans en icelles, et les mistrent en garde soubz la main de ladicte court d’Argenton on village de Migaudon estans près ledit lieu de Mouster en ladicte seigneurie d’Argenton. Et lesquelz suppliant, Joyron, Maroleau et Symonneau, et mesmement ledit suppliant menèrent ès prisons dudit lieu d’Argenton, où ilz furent detenuz par aucun temps, et depuis ont esté renduz audit seigneur de Saint-Mesmin, comme leur seigneur naturel, es prisons duquel ledit suppliant est encore detenu prisonnier en grant misère et povreté et en danger de miserablement finir ses jours, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties. En nous humblement requerant, etc. Au seneschal de Poictou, etc. Donné à Tours, ou moys de janvier, l’an de grace mil cccc. soixante quinze, et de nostre règne le quinziesme.

Ainsi signé : Par le conseil. Texier. — Visa. Contentor.

MDLXV Février 1476 (n.s.)

Rémission accordée à Jacques Alaire, fils de Louis Alaire et de feu Renée Guy, de Montaigu, qui, pendant le carême de l’année 1471, étant alors âgé de quatorze ans, avait, en se défendant, frappé d’un coup de couteau Guillaume Pichaut, dont mort s’ensuivit au bout de quelques jours.

AN JJ. 224, n° 19, fol. 23 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 57-61

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jacques Alaire, jeune enfant, filz de Loys Alaire et de feue Regnée Guye, de l’aage de dix-neuf ans ou environ, demourant en nostre ville de Montagu en nostre pays et conté de Poictou, contenant que dès son jeune aage il a vesquu bien doulcement et honnestement entre ses voisins et autres qui de lui ont eu congnoissance, sans jamais avoir esté reprins, convaincu ne actaint d’avoir fait, commis ne commandé à faire aucunes bateries, force, violences ne oultrages à personne qui soit, ne autres cas, mais que ce neantmoins à l’occasion de ce que ledit suppliant, le premier jeudi de karesme mil cccc. soixante dix, lui estant soubz l’aage de quatorze ans ou environ, soy transporta en une pièce de vigne appartenant à sondit père, assise près le lieu de Rochecervière, en laquelle vigne il trouva grant quantité de brebis sans garde, lesquelles gastoient et endomagoient ladicte vigne, jaçoit ce que ce fust en la saison que les vignes ont acoustumé de gecter et bouter leurs fruiz hors, lequel suppliant, voyant ledit gasteys et doumaige, soy voulant aydier de la provision et remède de justice necessaire et pertinent en tel cas, ainsi que leu et permis luy estoit licitement, voult prendre et enmener ès prisons du seigneur de Rochecervière

Maurice de Volvire, chevalier, seigneur de Rocheservière, Chaveil, Saint-Gervais, Nieul-sur-l’Autize, Châteauneuf en Thouarsais, mentionné à plusieurs reprises dans nos trois précédents volumes, était le fils puîné de Nicolas de Volvire, chevalier, baron de Ruffec, et de Marie de Bazoges. Le 9 juin 1455, il obtint de Louis de Beaumont, sire de La Forêt, sénéchal de Poitou, la mise à exécution des lettres de Charles VII du 29 octobre 1454, lui permettant de rétablir à Nieul les foires et marchés qui s’y tenaient avant les guerres. (Coll. dom Fonteneau, t. VIII, p. 187.) La pièce suivante (p. 189) du même recueil donne la copie de lettres royaux autorisant les poursuites entreprises par Maurice de Volvire contre Alain Drouart et les religieux de l’abbaye de Nieul-sur-l’Autize, qui avaient cessé de célébrer le service fondé dans la chapelle des Chabots par les seigneurs de ce nom, autrefois seigneurs de Nieul, et dans celle de la Vaudieu, presque tombée en ruine par la négligence ou la malice des religieux. Il a été question assez longuement, dans une note de notre t. XI (Arch. hist., t. XXXVIII, p. 102), du procès soutenu, de 1460 à 1467 au moins, par le seigneur de Rocheservière contre Alain IX et Jean II de Rohan, et Louis de Rezay, leur capitaine de la Garnache, procès dont l’origine était l’assiette d’une rente de 120 écus qu’Alain VIII, seigneur de la Garnache, s’était engagé à payer à Nicolas, sr de Ruffec, père de Joachim et de Maurice de Volvire. Ce dernier avait eu à souffrir, dans sa personne et ses biens, des excès de violences de Louis de Rezay et des autres officiers de Rohan à la Garnache. Dans un acte du 1er septembre 1467, il est qualifié conseiller et chambellan de Louis XI. (Coll. dom Fonteneau, t. VIII, p. 215.) Maurice de Volvire vivait encore le 12 septembre 1488, date d’une transaction qu’il passa au nom de son frère Renaud, seigneur de Champrignault, avec son neveu Jean de Volvire, baron de Ruffec, Catherine de Coëtivy, veuve d’Antoine de Chourses et autres, au sujet des terres et seigneuries de Saint-Maxire, la Saussaye et la Meilleraie, dont Jeanne de Volvire, dame de ces lieux, avait fait transport audit Renaud, son frère. (Id., ibid., p. 243.)

lesdictes bestes belines, afin que sondit pere en peust avoir telle reparacion que par justice en eust esté ordonné ; et de fait desplassa lesdictes bestes de ladicte vigne et icelles mist hors d’icelle et les mena jusques à l’endroit du village de la Dagoignerie près dudit lieu de Rochecervière. A l’endroit duquel village survindrent Agnesse Huppée, femme de Jehan Du Chiron, Colas Pichaut, filz de ladicte Agnesse, Guillaume Pichault et Denise Du Chiron, femme de feu Eutrope Pichaut, demourans tous ensemble au village de Soulete, ausquelz lesdictes bestes estoient. Lesquelz, incontinant qu’ilz furent arrivez devant ledit village de la Dagoignierie, lesdictes berbiz se prindrent à serrer ensemble et se misdrent au devant d’icelles, et estoient garniz et embastonnez de gros bastons et disdrent audit suppliant qu’il ne emmeneroit point lesdictes berbiz. Lequel suppliant, en parlant gracieusement à eulx, leur dist que si feroit et que se il leur faisoit tort ne grief, il menoit lesdictes berbiz es prisons dudit seigneur de Rochecervière, lequel ou ses officiers dudit lieu estoit bien gens souffisans de leur faire droit et raison, et aussi à sondit père. Mais ce non obstant les dessus nommez, en forçant ledit suppliant, luy ostèrent lesdictes brebiz bien enormeement et oultrageusement, en luy disant que s’il se mestoit au devant, ilz le batroient. Et ce voyant, ledit suppliant print l’une desdictes brebiz entre ses bratz et icelle brebiz voult emporter et mener esdictes prisons de Rochecervière. Laquelle chose voyans, lesdictes Agnaisse et Denise et lesdiz Pichaux se prindrent tous au corps dudit suppliant et luy ostèrent ladicte brebiz, et, non contans de ce, le firent tumber par terre et luy donnèrent plusieurs coups de leurs bastons qu’ilz avoient, mesmement ledit Guillaume Pichaut, lequel avoit ung gros aguillon, duquel il frappa ledit suppliant par plusieurs foiz et luy donna plusieurs coups ; et pour lesdiz coups ledit suppliant se escria par trois foiz en disant telles parolles : « A la force du roy ! à l’ayde du roy ! » A quoy ne sourvint aucunes gens pour le secourir et ayder, et ne sceut ledit suppliant comment evader ne eschapper des mains desdiz Pichaux et desdictes femmes, sans grant dangier et peril de mort. Et pour y obvier, tyra ung petit cousteau qu’il avoit et duquel il tranchoit son pain et d’icellui frappa en une espaule ledit Guillaume Pichaut pour une foiz seulement, et, ce fait, trouva moyen de se departir et evader des mains desdiz Pichaux et desdictes femmes et s’en alla à l’ostel de sondit père. Et combien que ledit Guillaume Pichaut incontinant après au moins par l’espace de douze ou treize jours vaccast à ses negoces et affaires et fist euvre de homme sain, comme il avoit acoustumé faire, tant au fait de son labouraige que autrement, sans soy doloyr d’avoir esté blessé par ledit suppliant, au moins qu’il en fut en peril et dangier de mort, toutesfoiz depuis, par deffault de bien avoir esté pensé et gouverné, ou que que soit par autre accident de maladie, ledit Pichaut alla de vie à trespassement. Et à cette cause, le procureur du seigneur dudit lieu de Rochecervière fist adjourner à comparoir en personne et sur peine de bannissement ledit suppliant par devant le seneschal de Rochecervière et es assises dudit lieu ; esquelles, après aucuns deffaulx faiz par ledit suppliant, il obey et sur ledit cas fut oy et mis en recreance de ladicte court, à certaines caucions et peines. Et depuis ledit suppliant ou aucuns de ses parens et amys se sont traiz par devers la mère et autres parens dudit feu Guillaume Pichaut, lesquelz, congnoissans l’agression telle que dessus avoir esté de leur part, en tant que leur touche ont quicté ledit suppliant dudit cas et de toutes actions qu’ilz pourroient avoir contre luy pour ledit cas. Mais ce non obstant, ledit suppliant doubte que au moyen de certaine informacion faicte par ledit procureur de Rochecervière avec les parents dudit deffunct, ledit seneschal vueille proceder à le mettre en question ou autrement contre luy conclurre et le mettre en grosses amendes arbitraires ou le tenir en grant involucion de procès et perdicion de ses biens, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties, humblement requerant, etc., que il nous plaise luy octroyer. Pour quoy nous, etc., audit suppliant avons oudit cas remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres officiers, etc., que de noz presens grace, quictance, remision et pardon facent, seuffrent et laissent ledit suppliant joyr et user, etc. Donné à Tours, ou moys de fevrier, l’an de grace mil cccclxxv, et de nostre regne le quatorziesme

Il n’y a pas concordance entre le millésime et l’année du règne : il faudrait corriger l’un ou l’autre, « mcccclxxiv » au lieu de : « mcccclxxv » ou : « de nostre règne le quinziesme » au lieu de : « quatorziesme ». Cette seconde correction est seule conforme à l’Itinéraire (Vaësen, de Mandrot, t. XI, p. 148 et 158) qui signale le roi à Paris pendant tout le mois de février 1475, n.s., et au Plessis du Parc pendant presque tout le mois de février 1476, n.s. [L.C.].

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Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. A. Gontier. — Visa. Contentor. Rolant.

MDLXVI Février 1476, n.s.

Confirmation des privilèges de l’abbaye de Charroux et plus particulièrement du committimus de ses causes et procès au sénéchal du Poitou, ou, si le Poitou venait à être séparé de la couronne, au juge royal le plus proche.

AN JJ. 204, n° 47, fol. 30 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 61-65

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de noz bien amez les religieux, abbé et couvent de l’abbaye de Charroux, de l’ordre de Saint-Benoist, ou diocèse de Poictiers, contenant que lesdiz supplians, tant en chief que en membres à cause de leurdit moustier et abbaye qui est de fondacion royal, fondée par feu nostre predecesseur, de bonne mémoire, roy de France, monseigneur saint Charlemaigne, lequel dotta et fonda ladicte abbaye de plusieurs grans et notables previlèges, qui depuis leur ont esté augmentez et confirmez par les roys de France, ses successeurs, et entre autres privileges leur a esté donné et concedé qu’ilz puissent et leur soit loisible avoir ung juge royal par ressort, qui puisse congnoistre et decider de toutes leurs causes et querelles, tant en demandant que en deffendant, et tant en chief que en membres. Et en usant desdiz previlèges, iceulx supplians ont aucune foiz eu leur juge par ressort en nostre ville de Limoges, le juge du parage illec ordonné, autrefoiz à Chinon, le juge des exemps par ressort, et en plusieurs autres lieux de nostre royaume, et encores de present et de tous temps et depuis que le conté de Poictou a esté et est reuny et rejoinct à la couronne de France, et que aucuns de noz predecesseurs et nous l’avons tenu en noz mains, iceulx supplians ont eu leur juge par ressort nostre seneschal de Poictou ou son lieutenant à son siège ordinaire de nostre Palaiz de Poictiers. Et ainsi le leur a esté concedé par privilège à eulx donné par feu nostre très cher seigneur et père

Les lettres patentes de Charles VII, visées ici, n’ont pu être retrouvées. Elles n’ont été enregistrées ni à la Grande Chancellerie, ni au Parlement, ni à la Chambre des comptes ; elles ne sont ni publiées ni signalées dans la grande collection des Ordonnances des Rois de France, non plus que dans le recueil, édité avec tant de soin par le R.P. de Monsabert, Chartes et documents pour servir à l’histoire de l’abbaye de Charroux (Arch. hist. du Poitou, t. XXXIX, 1910).

, que Dieu absoille. Par quoy en joyssant d’icellui don et previlege, iceulx supplians tant en chef que en membres n’ont esté par cy devant et ne sont tenus plaider ailleurs que par devant leurdit juge de ressort, et de ce sans contradicion quelconque ont joy jusques à present. Maiz ilz doubtent que au moien de ce qu’ilz n’ont obtenu de nous confirmacion ou nouvel octroy de ce, que aucuns les vueillent empescher et en ce les troubler et faire perdre leur joyssance, humblement requerant sur ce leur impartir noz grace, confirmacion et octroy. Pour quoy nous, inclinans à leur requeste et voulans ensuir les notables actes et gestes de nosdiz predecesseurs et progeniteurs, attendu que ladicte abbaye est de fondacion royal et que ledit saint Charlemaigne en est premier fondateur, envers lequel nous avons singullière devocion, et à ce que nous soyons tousjours de plus en plus participans es oraisons, prières et bienfaiz de ladicte abbaye et eglise d’icelle et pour plusieurs autres causes et consideracions à ce nous mouvans, à iceulx supplians religieux, abbé et couvent, tant en chief que en membres, avons confirmé, loué, aprouvé et ratiffié, et par ces presentes, confermons, louons, aprouvons et ratiffions les previleges et choses dessusdictes et en tant que mestier est et seroit, leur avons de nouvel octroyé et octroyons, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal par cesdictes presentes, que nostre dit seneschal de Poictou ou son lieutenant present et avenir, soit et puisse estre leur juge par ressort, à sondit siège ordinaire de nostre dit Palaiz de Poictiers, tant que ladicte conté de Poictou sera entre noz mains ou de noz successeurs roys ; et lequel seneschal ou sondit lieutenant, present et avenir, nous avons ordonné et depputé, ordonnons et depputons juge par ressort de toutes et chacunes les causes et querelles, tant en chief que en membres, desdiz supplians. Et interdisons et deffendons à tous autres juges toute court et congnoissance d’icelles ; et se aucuns sont ou estoient pendans par devant eulx, voulons et nous plaist que, incontinent que, par vertu de ces presentes, ilz en seront requis, ilz les renvoyent, en quelque estat qu’elles soient, avec les parties adjournées à certain et competent jour, par devant nostredit seneschal ou sondit lieutenant à sondit siège de Poictiers, sans plus en tenir aucune court, juridicion ne congnoissance. Et pour ce que nostredit conté de Poictou pourroit estre et escheoir par le temps avenir en autres mains que de nous ou noz successeurs roys, par quoy la congnoissance et decision des causes desdiz supplians ne saroit plus par devant nostredit seneschal de Poictou, qui est juge royal ou par devant sondit lieutenant, voulons et nous plaist, de nostre plus ample grace, et ausdiz supplians, tant en chief que en membres l’avons octroyé et octroyons, de nosdictes puissance et auctorité royal que pour leur juge de ressort ilz aient et puissent avoir le plus prouchain nostre juge royal des seneschaussées ou bailliages voisins et prouchains de leur dicte abbaye et moustier. Et lequel dès à present pour lors, tant pour nous que pour noz successeurs roys nous leur y avons pour ce ordonné, commis et depputé, ordonnons, commettons et depputons par cesdictes presentes. Par lesquelles donnons en mandement à noz amez et feaulx conseillers les gens tenans et qui tiendront nostre Parlement, à Paris, Tholose et Bourdeaux, et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir et à chacun d’eulx, si comme à lui appartendra que de noz presens grace, don, confirmacion et octroy, ilz et chacun d’eulx endroit soy, facent, seuffrent et laissent joir et user lesdiz religieux, abbé et couvent et leurs successeurs en ladicte abbaye et moustier, tant en chef comme en membres, paisiblement et perpetuellement, sans leur faire, mettre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun destourbier ou empeschement au contraire ; ainçoys se fait, mis ou donné leur avoit esté ou estoit, si l’ostent, reparent et remettent, ou facent oster, reparer et remettre, tantost et sans delay, au premier estat et deu, en faisant les renvoy et adjournemens dessusdiz par ceulx d’entre eulx qu’il appartiendra, par devant ledit seneschal de Poictou ou sondit lieutenant en la manière dessusdicte. Et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné au Pleissis du Parc lez Tours, ou moys de fevrier, l’an de grace mil cccc. soixante quinze, et de nostre règne le quinziesme

Le texte de ces lettres a été imprimé, d’après la même source, dans le Recueil des Ordonnances des Rois de France, in-fol., t. XVIII, p. 178.

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Ainsi signé : Par le roy, le sire de Craon

Georges de La Trémoïlle, sire de Craon, de l’Isle-Bouchard, de Rochefort, de Jonvelle, etc., second fils du premier ministre de Charles VII et de Catherine de l’Isle-Bouchard, sa seconde femme, alors lieutenant général du roi en Champagne, depuis gouverneur de Bourgogne, mort en 1481. (Cf. vol. précédent, p. 55, note 4).

, le gouverneur du Dauphiné

Jean de Daillon, sire du Lude (ci-dessus, p. 52).

, le sire du Bouchage

Imbert de Batarnay, seigneur du Bouchage, successivement conseiller des rois Louis XI, Charles VIII, Louis XII et François Ier pour lesquels il accomplit d’innombrables missions, né vers 1438 au château de Batarnay, en Dauphiné mort le 12 mai 1523, au château de Montrésor, en Touraine. (B. de Mandrot, Ymbert de Batarnay, seigneur du Bouchage, Paris, 1886, in-8°.)

et autres presens. De Cerisay. — Visa. Contentor. Duban.

MDLXVII Février 1476 (n.s.)

Rémission obtenue par Guillaume Martin, marchand du bourg d’Antigny, qui craignait d’être inquiété pour n’avoir pas révélé tout de suite à la justice que son compère, Amaury Ellof, ancien facteur des Donne, père et fils, négociants de La Rochelle, ayant fait de mauvaises affaires, était venu à Réaumur fabriquer de la fausse monnaie, ledit Martin, en outre, l’ayant aidé sans le vouloir, en lui prêtant l’argent nécessaire pour acheter les matières premières.

AN JJ. 195, n° 1533, fol. 369 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 65-68

Loys, etc. Savoir, etc., nous avoir receue l’umble supplicacion de Guillaume Martin, marchant demourant au bourg d’Antigné en Poictou, contenant que il print jà pieça congnoissance avec ung nommé Amaurry Ellof, natif du pays d’Anjou, facteur et entremetteur des besongnes, marchandises et affaires de feu Pierre Donne et Martin Donne

On pourrait lire tout aussi bien Douve. On voit dans l’Histoire de La Rochelle d’Amos Barbot que l’an 1479, l’élection du maire ayant donné lieu à contestation et des commissaires ayant été envoyés par le roi pour faire une enquête, en attendant leur décision, la ville fut administrée par un nommé « Guillaume de Douves, qui exerça la mairie par commission jusques au mois de septembre de cette année » (Edit. Denys d’Aussy, Arch. hist., de la Saintonge et de l’Aunis, t. XIV, p. 432). En l’absence d’autres documents, il n’y a d’ailleurs aucune conclusion à tirer de ce rapprochement.

, son filz, marchans demourans à la Rochelle, et, en exerçant lesdictes marchandises desdiz deffunctz, ledit Ellof print congnoissance avec ledit Martin, suppliant, tellement que ledit Ellof se fist compère dudit suppliant et lui nomma une sienne fille sur les fons ung an et demi a ou environ, et au moyen de ladicte affinité ledit Ellof emprunta certaine somme de deniers dudit suppliant, son compère, et jusques à la somme de xxii. escuz. Et depuis ledit Ellof s’est si piteusement gouverné qu’il a perdu grant quantité d’argent, lui estant facteur desdiz Donne. Et depuis se tira devers ledit suppliant son compère à Reaumur en Poictou, lequel il envoya querir à Antigné distant dudit lieu de Reaumur de une lieue ou environ ; et creoit ledit suppliant que ledit Ellof l’envoyast querir pour luy bailler ladicte somme qu’il lui devoit. Et incontinant que ledit suppliant fut audit lieu de Reaumur, lui demanda s’il l’avoit envoyé querir pour luy bailler ladicte somme qu’il lui devoit, et ledit Ellof lui respondit que pour lors ne le pourroit paier. Mais ledit Ellof requist et pria ledit suppliant qu’il luy fist encores ung plaisir et que à bref de temps il lui payeroit ladicte somme et aussi le plaisir qu’il lui feroit, en luy disant telles parolles ou en effect semblables : « Mon compère, il fault que vous me queriés douze livres de vieilles poelles et six livres d’estaing, pour cinq solz de bourras et pour cinq solz de litarge, car j’ay aprins une science dont je vous feray bon argent ; en lui disant oultre que, si on lui demandoit que c’estoit à faire d’icelle metaille qu’il dixit (sic), que c’estoit à faire ung mortier à batre espice, et lesdiz bourras et litarge pour guerir chevaulx. Ét tantost après lui envoya ledit suppliant par ung homme qui ne savoit que c’estoit lesdictes drogueries jusques audit lieu à Reaumur, et ne vit ledit suppliant ledit Amaury, son compère, qu’il ne feust cinq ou six sepmaines, que ledit Ellof l’envoya quérir à ung village par ung homme dudit village en la parroisse de Chenesoye. Et incontinant icellui suppliant parla audit Ellof, son compère, et lui demanda qu’il lui vouloit, et icellui Ellof le tira à part desdictes gens de village et lui dist telles parolles : « Vecy l’argent que vous avoye dit que feroye. » Et incontinant ledit Ellof print de l’argent en ung petit sac et luy en monstra trois ou quatre pièces dont il y en avoit une de Bretaigne et les autres du coing du Roy, bien povrement marquées. Et incontinant ledit suppliant lui respondit telles parolles : « Vous estez mauvais homme d’avoir fait cecy, car vous m’aviez dit que vous feriez bon argent et me payeriez bien, et que mauldicte soit l’eure que je vous congneu oncques, ne l’eure que je vous vis oncques. » Et lors ledit Ellof lui dist : « Je n’ai denier ne maille pour m’en aller. » Et ledit suppliant lui dist telles ou semblables parolles : « Se vous me voulez promettre que jamais vous ne ferez telles folliez, je vous presteray six francs et que vous en aliez devers vostre père, pour querir vostre remede. » Lequel Ellof promit audit suppliant que jamais n’en useroit et que ce qu’il avoit fait qu’il bruleroit. Et ledit Ellof luy dist : « J’ay advisé pour vous paier de l’argent que je vous doy. J’ay sept camellos, quatre aulnes de satin et quatre aulnes de damas, qui sont à Nantes, que j’ay engagé pour la somme de xxix escus, xxvii escus en or et les deux en monnoye », et lui dist : « Envoyez-y ung homme pour savoir s’ilz valent plus que la somme que j’ay prins. » Lequel suppliant y envoya ung homme nommé Jehan Aleaume et luy dist ledit marchant de Nantes que les draps de soye n’avoyent point d’arrest, mais que luy baillast son argent et qu’il n’en bailleroit riens d’avantaige. Et après ce lui dist ledit suppliant, quant son homme fut venu de Nantes : « Allez-vous-en à Montournoy, là où vous envoyeré de l’argent pour aller querir vostre remedde », et icellui suppliant, son compère, lui porta la somme de six francs et lui donna son espée et print congié de luy et luy dist : « Mon compère, gouvernez-vous bien mieulx que n’avez acoustumé, et si vous ne vous amendez, je prie Dieu que jamais ne vous puisse veoir. » Et oncques puis ledit suppliant ne le vit ne oyt parler de luy. Et doubte ledit suppliant que parce que lors il ne adverty la justice dudit cas et aussi qu’il presta l’argent audit Ellof pour achetter lesdictes drogues, ainsi et par la manière que dit est, que l’en le voulsist au temps, advenir reprendre ou apprehender de ce que dit est, en nous humblement requerant que, attendu qu’il a tousjours esté de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans avoir esté actaint ne convaincu d’aucun villain cas, blasme ou reprouche, nous lui veuillons impartir nostre grace et misericorde. Pour quoy nous, etc., audit suppliant avons le fait et cas dessus declaré quicté, etc., avec toute peine, etc. Si donnons en mandement, par cesdictes presentes, aux prevost de Paris, seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou mois de fevrier, l’an de grace mil cccc. soixante quinze, et de nostre regne le quinzeiesme.

MDLXVIII Avril 1476 (après le 27)

Lettres de grâce et mise en liberté accordées par le roi, à l’occasion de sa première entrée en la ville de Brignais, à Renaud Bonneau, franc-archer de la paroisse Saint-André de Niort, prisonnier audit Brignais pour le meurtre d’un de ses compagnons d’armes avec lequel il s’était pris de querelle, pendant une expédition à la frontière d’Espagne, où les francs-archers de Poitou étaient commandés par le sire du Fou

AN JJ. 204, n° 46, fol. 30 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 68-71

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Regnault Bonneau, povre homme aagé de vingt sept ans ou environ, franc archer de la paroisse de Saint André [de Niort

La suite du récit autorise cette addition au texte.

] en Poictou, à present prisonnier detenu ès prisons de ceste ville de Breignés, contenant que deux mois a ou environ, comme il s’en alloit ou voyage que l’en faisoit par nostre ordonnance ès Espaignes, avec et en la compaignie de ses autres compaignons et archers estans soubz la charge et bende de nostre amé et feal conseiller et chambellan le sire du Fou

Yves du Fou a été l’objet dans notre volume précédent d’une longue notice (Arch. hist., t. XXXVIII, p. 103 à 107), complétée dans l’Introduction, p. xxxii-xxxiv. Il nous suffira de signaler ici deux autres lettres de ce personnage à Louis XI. La plus intéressante, datée de Lusignan, le 3 novembre, sans indication de millésime, se rapporte à la période pendant laquelle Yves du Fou, curateur de Charles, comte d’Angoulême, mineur, prit part au nom du roi, auprès de la comtesse douairière, Marguerite de Rohan, au gouvernement de l’Angoumois (1467-1476). Le roi avait demandé le jeune comte, pour le faire élever auprès de lui. Chargé d’obtenir de la mère son consentement à cette séparation, Yves écrit qu’il est tout à fait d’avis que Charles d’Angoulême serait mieux avec le roi que là où il est, mais la comtesse pressentie sur ses intentions a répondu « tout court » qu’elle ne baillerait pas son fils. Depuis, cependant, ajoute-t-il, elle paraît moins intransigeante ; elle a, du reste, refusant sa créance à du Fou, écrit directement au roi à ce sujet. D’autre part, le seigneur de La Rochefoucauld, gouverneur du jeune prince, a promis de l’amener au roi, si celui-ci lui en donne l’ordre. L’autre lettre, datée « de vostre maison du Fou, le 30 octobre » (aussi sans indication d’année) est moins importante, il y est question de la garde de la place de Blois. (Bibl. nat., ms. fr. 20428, nos 64 et 65.)

, ledit suppliant estant avec ceulx de sa compaignie vindrent et arriverent en une parroisse dont il ne scet le nom, assez près de Saint-Jehan-de-Lutz et Bayonne, où illec ilz furent par l’espace de troys jours logez. Pendant lequel temps, pour raison et à cause de ce que ung nommé Jehan Rouzay, franc archer de ladicte quinzaine, tenoit et menoit avec lui une jeune femme nommé Mag[da]l[ain]e, laquelle il avoit prinse et enlevée d’avec ses amys, et que aussi il estoit jeune, fort, noisif et tost meu à ire et qui continuellement prenoit noise, question et debat à diverses personnes, fut conclud et deliberé par Guillaume de Saint-Legier, lieutenant de nostredit conseillier, que iceluy Jehan Rouzay seroit mis et osté hors de ladicte compagnie tant pour raison de ce que contre son gré il menoit avec luy ladicte Magdalaine que pour les debatz, et commanda que l’on luy fist commandement de soy departir de ladicte compaignie, pour eschever à divers maulx qui par son moien se pourroient ensuir. Lesquelles choses venues à la congnoissance dudit Jehan Rouzay, comme assez tost après ladicte conclusion prinse, lui estant en la compaignie de ung nommé Jehan Mardeau, leur quinzinier, dudit Nyort, Jehan Deshaies, Marsault Texier, Bertrand, Jehan et Regnault Bonneau, tous francs archiers, en ung logeiz en ladicte parroisse, desvestit et mist jus de soy ses brigandines qu’il avoit vestues, en faisant plusieurs grans juremens et regniemens de sains et saintes de paradis, que, en despit des paillars villains dudit Nyort, que jamaiz il ne rapporteroit lesdictes brigandines et ne renteroient (sic) jamais audit Nyort, en faisant autres grans et detestables seremens, et soy eschauffant fort comme surprins de vins et de viandes, et continuoit tousjours de plus en plus à oultrager et dire mal de ceulx dudit Nyort. A laquelle cause ledit Regnault Bonneau, qui est simple homme, qui pour lors n’avoit beu ne mengié, maiz jeunoit et estoit couché en terre, commença à remonstrer bien et doulcement audit Jehan Rouzay qu’il faisoit mal de ainsi oultrager ne dire mal de ceulx dudit Nyort, soubz qui ilz vivoient, lui priant qu’il s’en voulsist depporter. Lequel Jehan Rouzay, esmeu de plus en plus et perceverant tousjours en sa fureur, dist et respondit par plusieurs foiz audit suppliant qu’il avoit menti et que lesdiz de Nyort n’estoient tous que villains paillars, et lui mesmes qui en parloit. Desquelles parolles ledit suppliant ne fut pas content, ains se leva de terre où il estoit couché et respondit audit Jehan de Rouzay que ce n’estoit pas bien fait à lui et qu’il en avoit menti. Et alors ledit Jehan Rouzay, perceverant et continuant tousjours en son mauvaiz et dampné propos, tira sa dague qu’il avoit pendant à sa sainture, et d’icelle s’efforça frapper ledit suppliant, tellement qu’il convint audit suppliant, pour obvier au danger de sa personne, tirer sa daigue qu’il avoit pendant à sa sainture, et d’icelle frappa ledit Jehan Rouzay ung cop par le costé, par le moien duquel coup icellui Rouzay tantost après, par faulte de mauvaiz gouvernement et (sic) autrement est allé de vie à trespas. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant ainsi detenu prisonnier, comme dit est, nous a fait dire et remonstrer que à nostre joyeux et premier advènement et entrée en ceste ville de Bregnez, où il est detenu prisonnier, attendu qu’il est de la condicion dessusdicte, il nous plaise, etc. Pourquoy, etc. Aux seneschaulx de Poictou et des Lannes, gouverneur de la Rochelle et à tous, etc. Donné audit lieu de Breignaiz

Le roi est encore à Saint-Romain-lès-Vienne le 26 avril ; il est signalé le 29 à Brignais (Itinéraire, dans Vaësen et de Mandrot, t. XI, p. 161). [L.C.].

, ou moys d’avril, l’an de grace mil cccc. soixante seize, et de nostre regne le xvme.

Ainsi signé : Par le roy, l’evesque d’Evreux

Sur Jean Héberge, évêque d’Évreux, voy. ci-dessus, p. 52 [L.C.].

et autres presens. Robineau. — Visa. Contentor. Duban.

MDLXIX 21 Juin 1476

Lettres d’abolition octroyées à Pierre de Dercé, écuyer, de toutes les menées et machinations contre le roi auxquelles il a pris part, à condition qu’il prêtera serment sur la vraie croix qu’il ne sait rien de plus que le contenu desdites lettres et que, si quelque chose de préjudiciable au roi vient à sa connaissance, il le révélera.

AN JJ. 224, n° 5, fol. 8 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 71-78

Loy, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Pierre de Dercé

Pierre de Dercé, écuyer, était le fils puîné de Jacques de Dercé, seigneur de Saint-Loup, Dercé, Lourdines, etc., et de Catherine Rouault. Joachim Rouault, sr de Boisménart et de Gamaches, maréchal de France, dans la compagnie duquel il servait, était, par conséquent, son parent ; les généalogies de cette famille sont trop imparfaites pour que l’on puisse préciser à quel degré. L’on possède plus de renseignements sur le frère aîné de Pierre, Jean de Dercé, chevalier, seigneur de Saint-Loup, nommé quelques lignes plus bas, qui paraît avoir entraîné son cadet dans les conspirations contre Louis XI, dans lesquelles il avait joué un rôle plus actif. On ne sait si ce dernier obtint aussi son pardon à cette époque, ce qui est probable ; toujours est-il que le 14 janvier 1476, le roi, dans une lettre à Jacques de Beaumont, sire de Bressuire, lui reprochait vivement d’avoir laissé échapper une bonne occasion de mettre Jean de Dercé en état d’arrestation. « Monseigneur de Bressuire, lui écrit-il, j’ay esté adverty que monseigneur de Saint-Lou est allé devers vous, pour se conseiller à vous de ce qu’il avoit à faire, et m’esbahy bien de ce que ne l’avez pris, veu la grande trahison et mauvaistié qu’il a fait à l’encontre de moy. Et pour ce, si vous voulez que jamais j’aye fiance en vous et s’il est en lieu où vous le puissiez recouvrer, faictes-le prendre incontinent, car ce m’est chose fort à cuer que ne m’ayez adverty de son allée, je vous prie que m’en faictes scavoir ce qui en est. Escript au Plessis du Parc, le seiziesme jour de janvier ». Signé : « Loys » et au-dessous : « de Chaumont ». (J. Vaësen, Lettres de Louis XI, t. VI, p. 38. L’éditeur n’a point su quel était ce « seigneur de Saint-Lou ».) Nous donnons dans ce volume le texte de lettres de l’année 1480 instituant des foires à Saint-Loup, ce qui implique qu’à cette date il avait recouvré la faveur royale. Le 10 décembre de l’année précédente il avait vendu à Louis XI, au profit de l’église du Puy-Notre-Dame, en Anjou, le fief, terre et seigneurie du Vivier à Bouillé-Saint-Paul (Mis de L’Estourbeillon, Inventaire des archives du château de Sainte-Verge, in-8°, 1895, nos xxv et 191.) Jean de Dercé avait épousé, vers 1460, Catherine de Velort, qui devait être fille, disent MM. Beauchet-Filleau, de Joachim, écuyer, sr de La Chapelle-Bellouin, et de Catherine de Léon (corr. Lévis). Elle était sa veuve dès 1499 et fit aveu à Loudun, en 1505, pour la terre de Dercé. (Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. III, p. 75.) Catherine de Velort n’était certainement pas fille de Joachim, dont le mariage avec Catherine de Lévis n’eut lieu que postérieurement à l’année 1461, date de la mort de son premier mari, Antoine de Clermont, sr de Surgères. (Cf. notre précédent volume, p. 121, note ; p. 257, note.) Elle devait être plutôt sa sœur, de sorte que Jean de Dercé, sr de Saint-Loup, et Renaud de Velort dont il est question ci-dessous auraient été beaux-frères.

, escuyer, contenant que luy estant en nostre ordonnance soubz la charge et conduicte de Joachin Rouault, chevalier, il a esté anciennement adverty de plusieurs pratiques, menées et trafficques faictes à l’encontre de nous, nostre royaume et la chose publique d’icellui par plusieurs noz malveillans, rebelles et desobeyssans subgectz, et mesmement en ce que Jehan de Dercé, son frère, luy a dit autresfoiz qu’il emmeneroit au service du duc de Calabre

Charles II d’Anjou, comte du Maine, duc de Calabre, vicomte de Châtellerault. (Voy. sur ce personnage, ci-dessus, p. 41 note.)

douze ou treize hommes d’armes de la compaignie du seigneur du Fou et sembloit audit suppliant que s’estoient ceulx qui avoient delaissé la compaignie dudit Joachin Rouault

On trouvera dans l’un de nos précédents volumes (Arch. hist. du Poitou, t. XXIX, p. 344, note) divers faits de la biographie du maréchal Rouault. Nous n’y reviendrons pas ici, sinon en ce qui concerne les poursuites criminelles, dirigées vers cette époque contre lui. Elles auraient eu pour origine, suivant certains auteurs, des griefs recueillis dans les interrogatoires du connétable de Saint-Pol, qui l’avait accusé d’avoir entretenu des liaisons trop étroites avec la maison d’Anjou. Nous ne savons si cette assertion est bien fondée. Toujours est-il que le maréchal comparut devant une commission présidée par Bernard Lauret, premier président du Parlement de Toulouse, et que dans l’arrêt rendu par celle-ci, le 16 mai 1476, en l’auditoire royal de Tours, il n’est pas question de machinations politiques, ou du moins elles n’y sont pas spécifiées. Il n’y a de précisé dans cet arrêt que plusieurs exactions, concussions, faux rôles de gens de sa compagnie de cent lances, « lesquels il a fait emplir de noms et personnes supposées », pour en appliquer la solde à son profit ; « et autrement aussi pour les bleds achetez par l’ordonnance et des denrées du roy, la somme de 1.250 livres tournois ou environ et mis au lieu de Dieppe (dont il était capitaine), pour l’avitaillement d’iceluy, peu de temps avant la dernière retraite des Anglois en ce royaume, lesquels bleds ledit messire Joachim a prins et fait vendre « pour son compte », dépourvoyant ladite place, sans le sceu et congé du roy, luy estant à Beauvais après la descente des Anglois, etc. » Outre la restitution des sommes ainsi détournées, le maréchal fut condamné à vingt mille livres d’amende envers le roi et à tenir prison fermée jusqu’au parfait payement. Mais le texte ajoute : « Et au surplus, tant pour lesd. cas que pour plusieurs grandes causes, crimes, offenses, excès et delitz par luy faits, commis et perpetrez allancontre du roy, de la couronne et de toute la chose publique, dont plus à plein est faite mention esdits procès et confession dudit messire Joachim Rouault, il est privé de tous offices royaux et charges publiques et condamné au bannissement perpétuel et à la confiscation du restant de ses biens. Le texte de cet arrêt a été publié par Lenglet du Fresnoy, dans son édition des Mémoires de Philippe de Comines, 4 vol. in-4°, t. III, p. 482. La seconde partie de cet arrêt ne fut d’ailleurs pas exécutée : Joachim Rouault, seigneur de Boiménart et de Gamaches, mourut deux ans plus tard, le 7 août 1478, dans son pays et en possession de ses biens, dont il avait disposé par testament la veille de son décès. Il avait épousé Françoise de Volvire, fille de Joachim, baron de Ruffec, et de Marguerite Harpedenne de Belleville.

. Aussi luy dist sondit frère qu’il trouvast façon et manière de gaigner le plus de gens d’armes qu’il pourroit dudit Joachin pour les mener ou service dudit duc de Calabre ; à quoy ledit suppliant s’accorda et dist à sondit frère qu’il feroit ce qu’il luy conseilleroit, mais il n’en a parlé à aucuns gens d’armes, pour ce que, huit ou dix jours après, l’appoinctement d’entre nous et les Angloix fut faict et conclud. Aussi en ce que sondit frère luy dist au voyage de Saint-Quentin, en chevaulchant ensemble : que mauldiz feussent les Angloys, dont ilz s’en estoient si tost retournez, car il croyoit que beaucoup de gens en auroient à faire et qu’ilz devoient plus avant entrer ou royaume, et que ledit duc de Calabre se devoist aller joindre avec le duc de Bretaigne, et ne devoient point appoincter lesdiz Angloys sans ledit duc ne beaucoup d’autres. Et deffendit icellui Jehan de Dercé audit suppliant qu’il n’en parlast point ; et pareillement luy dist icellui Jehan de Dercé à Bar-le-Duc qu’il savoit bien pour quelle cause Regnaut de Velourt

Renaud ou Regnault de Velort, écuyer, ici nommé, était très vraisemblablement le fils cadet de Renaud de Velort, seigneur de La Chapelle-Bellouin, Meulles, etc., et de Simone Tison, et, par conséquent, le frère puîné de Joachim de Velort, sr de La Chapelle-Bellouin, auquel une notice a été consacrée dans le précédent volume (p. 121, note ; cf. aussi Arch. hist. du Poitou, t. XXIX, p. 61, 62, 138). Il figure en 1469-1470 sur les états de la maison de Louis XI, en qualité d’échanson, aux gages de 303 livres tournois par an. (Arch. nat., KK 62, fol. 61 v°.) M. de Mandrot dit qu’il avait fait partie des cent gentilshommes de la garde du roi, et qu’il prit ensuite du service auprès de Charles, duc de Calabre, comte du Maine, qui fit de lui son chambellan, puis le capitaine de ses archers. Regnault de Velort, ajoute le savant éditeur de la Chronique scandaleuse, « fut accusé d’avoir joué un rôle dans la grande conspiration de 1475, dont le connétable avait été l’instigateur, et qui avait pour objet de saisir la personne du roi et de lui enlever la direction du gouvernement. Le rôle joué auprès du duc de Calabre par les émissaires du comte de Saint-Pol, Hector de L’Écluse et Robert de Marbury, fut identique à celui que les agents du connétable avaient joué auprès du duc de Nemours : annoncer le débarquement des Anglais, l’appointement du duc de Bourgogne avec l’Empereur, inquiéter le prince sur les projets du roi à son égard … » On peut voir dans les lettres d’abolition octroyées au duc de Calabre (ci-dessus, p. 41) une partie des agissements de notre personnage, et il en sera encore question dans celles de Jean Gaudit, valet de chambre du prince, datées de décembre 1476 (ci-dessous). « Velort fut donc accusé d’avoir poussé son maître à écouter les propositions du connétable, de n’avoir point ignoré qu’il y avait eu entre eux échange de scellés ; de s’être à plusieurs reprises, pendant l’été de 1475, dissimulé aux environs du château d’Angers, pour en épier les défenses et examiner le moyen de l’arracher au roi ; enfin d’avoir servi d’intermédiaire pour la conclusion entre le duc de Bretagne et le duc de Calabre d’une alliance défensive contre Louis XI, voire même d’un traité d’alliance offensive qui recevrait son exécution dès que les Anglo-Bourguignons tiendraient la campagne. L’accusé fut interrogé par les commissaires du roi, en présence de Philippe de Commynes et d’Ymbert de Batarnay, et, malgré ses réserves et ses dénégations, il fut condamné à mort pour crime de lèse-majesté. » (Bibl. nat., fragment d’interrogatoire, ms. fr. 18442, fol. 130 à 143 v°.)

Voici maintenant le récit du supplice de Renaud de Velort, tel que le rapporte Jean de Roye : « Et le lundi xxe jour de novembre audit an lxxv, fut mené escarteler aux hales de Paris, par arrest de la court du Parlement (nous avons vainement cherché cet arrêt dans les registres criminels de la cour), ung gentilhomme natif de Poictou, nommé Regnault de Veloux, serviteur et fort famillier de Monseigneur du Maine, pour occasion de ce que ledit Regnault avoir fait plusieurs voyages par devers divers seigneurs de ce royaume et conseillé de faire plusieurs traictiez et porté plusieurs scellez contre et au préjudice du roy, dud. royaume et de la chose publique. Et fut ledit Regnault, par l’ordonnance de lad. court, fort secouru pour le fait de son ame et conscience, car il lui fut baillé le curé de la Magdaleine, penancier de Paris et moult notable clerc, docteur en théologie, et deux grans clercs de l’ordre des Cordeliers ; et furent pendus ses membres aux quatre portes de Paris et le corps d’icellui au gibet. — Et led. jour de samedi (23 décembre 1475), par la permission du roy, furent alez querir et assemblez le corps qui pendu estoit au gibet de Paris de Regnault de Veloux, et la teste qui mise estoit au bout d’une lance ès halles de Paris, avecques ses membres atachez à quatre potences aux portes de Paris. Et tout assemblé ensemble, furent portez inhumer et enterrer au couvent desd. Cordeliers de Paris, auquel lieu lui fut fait son service bien et honorablement pour le salut et remède de son âme, tout aux coustz, mises et despens des parens et amis dud. defunct Regnault de Veloux. » (B. de Mandrot, Journal de Jean de Roye ou Chronique scandaleuse, 2 vol. in-8°, t. I, p. 348, 349 ; t. II, p. 2.)

avoit esté executé et que c’estoit pour ce qu’il avoit porté le scellé dudit duc de Calabre au duc de Bretaigne. Et en ce que ledit Jehan de Dercé dist audit suppliant que le duc de Calabre avoit de grans aliances avec le roy de Secille, les ducs de Bretaigne et de Bourgoingne et avec le feu connetable, en luy disant aussi que les Angloys estoient descenduz et estoient avec lesdiz duc de Bourgoingne et connetable. Et semblablement en ce que ledit Joachin Rouault manda audit suppliant, luy estant en la ville d’Eu, qu’il ne mist point le feu en ladicte ville, combien que le roy luy eust mandé, maiz neantmoins il luy meist. Et avecques ce, que à son retour de ladicte ville d’Eu, il trouva à Dieppe ung nommé Ernoulet, faulconnier dudit Jehan de Dercé, son frère, et luy demanda dont il venoit, qui luy dist qu’il venoit de Bretaigne porter des oyseaulx au chancellier de par ledit Joachin Rouault, et plusieurs autres semblables choses asteues

Godefroy sous esteue donne un exemple de ce mot dans un sens voisin : piperie, fraude. [L.C.]

ledit suppliant, dont il n’est à presens recors. Et combien que ledit suppliant sceust, entendist apperceust et congneust aucunement que lesdictes praticques, menées et trafficques feussent et tournassent à grant prejudice et dommaige à nous, nostre royaume et la chose publicque, et qu’il nous en deust avoir adverty, comme bon et loyal subgect et serviteur, neantmoins il ne l’a pas fait, mais l’a teu et celé en grandement mesprenant et delinquant envers nous

Le scribe a omis ici tout un membre de phrase.

… à justice en nous humblement requerant que, attendu qu’il nous a [fidelement

Le registre répète ici « humblement » au lieu de « fidèlement ».

] servy en noz guerres et autrement au mieulx qu’il a peu, et aussi ses (sic) predecesseurs, et fera encores, s’il nous plaist le y employer et est très fort dollant, courroussé et desplaisant dont il a failly envers nous et que jamais n’a entencion le faire, maiz nous sera bon et loyal subgect, il nous plaise luy quicter et pardonner les faiz et cas dessusdiz et autres deppendans d’iceulx, et sur ce luy octroyer et impartir noz grace et misericorde. Pourquoy nous, ce consideré et en faveur d’anciens nos especiaulx officiers et serviteurs prouchains parens dudit suppliant, nous les faiz et cas dessus declairez et autres deppendans d’iceulx, avons audit suppliant quicté, remis, pardonné et aboly, et, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal quictons, remettons, pardonnons et abolissons par ces presentes, avec toute peine, [offence

Le registre porte en cet endroit « obéissance », par erreur au lieu de « offence ».

] et amende corporelle, criminelle et civille, en quoy, pour occasion desdiz cas, il pourroit estre encouru envers nous et justice. Et l’avons remis et restitué, remettons et restituons à sa bonne fame et renommée et à ses biens non confisquez. Et sur ce imposons silence perpetuel à nostre procureur, present et advenir. Si donnons en mandement par ces presentes, à noz amez et feaulx conseillers les commissaires par nous ordonnez à faire et parfaire les procès dudit Joachin Rouault et autres prisonniers estans à Tours, au bailli de Touraine, au juge des ressors et exempcions d’Anjou et du Maine et à tous noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans et à chacun d’eulx, si comme à luy appartiendra, que de noz presens grace, quictance et pardon ilz facent, seuffrent et laissent, et chacun d’eulx en droit soy, ledit suppliant joyr et user plainement et paisiblement, sans luy faire, mettre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné, ores ne pour le temps avenir, aucun arrest, destourbier ou empeschement en corps ni en biens, en aucune manière ; maiz se son corps ou aucuns de sesdiz biens sont ou estoient pour ce prins, saisiz, arrestez ou autrement empeschez, qu’ilz et chacun d’eulx le luy mettent ou facent mettre, incontinant et sans delay, à plaine delivrance. Car ainsi nous plaist il estre fait. Pourveu toutesvoyes que ledit suppliant sera tenu faire serment solempnel sur la vraye Croix monsieur Saint Lou, en la touchant manuellement, qu’il n’a sceu autres choses, à nous et nostre royaume prejudiciables, que les choses dessusdictes, et que s’il luy vient en memoire d’en avoir aucune autre chose sceu, qu’il nous en advertira et que doresenavant il nous sera tel comme bon et loyal subgect doit estre à son souverain seigneur. En tesmoing de ce, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Donné à Lyon sur le Rosne, le xxie jour de juing, l’an de grace mil cccc.lxxvi, et de nostre règne le xvme.

Ainsi signé : Par le roy, les sires de Gyé

Pierre de Rohan, sire de Gyé, seigneur engagiste de Fontenay-le-Comte (cf. vol. précédent, p. 303, note ; 382, note), maréchal de France en 1475, lieutenant général en Bretagne pour Louis XII, gouverneur du comte d’Angoulême, depuis François Ier, roi de France. Ayant encouru la colère d’Anne de Bretagne, il fut privé de ses dignités à la suite d’un long procès (1505) et détenu cinq ans au château de Dreux. Il mourut le 22 avril 1513.

, d’Argenton

Philippe de Commines, seigneur d’Argenton.

, du Lude

Jean de Daillon, sr du Lude (ci-dessus, p. 52).

, gouverneurs (sic) du Daulphiné, les sires de Saint-Pierre

Jean Blosset, chevalier, seigneur de Saint-Pierre et de Carrouge, bailli de Rouen pour Charles de France à la fin de 1465, demeura constamment au service de ce prince qui le créa son chambellan, maître des requêtes de son hôtel, capitaine de Talmont-sur-Gironde, etc. Louis XI lui conserva cette dernière charge, et par lettre du 18 avril 1475, lui donna le commandement de cent lances. Il fut aussi capitaine de Falaise et d’Avranches et vivait encore le 1er mars 1497. (Voy. J. Vaësen, Lettres de Louis XI, t. X, p. 23.)

, du Bouchaige

Imbert de Batarnay, sr du Bouchage (ci-dessus, p. 65).

et autres presens, J. Berriau.

MDLXX Juin 1476 (ou 1477)

Rémission accordée à Guillaume Morin, marchand de Saint-Maixent, recherché pour le meurtre de Denis Barré, pionnier, demeurant à Poitiers, qui, hébergé à crédit par ledit Morin, avait abusé de sa confiance en lui dérobant divers objets.

AN JJ. 206, n° 1088, fol. 235 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 78-80

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Guillaume Morin, marchant, demourant à Saint-Maixent, aagé de cinquante six ans ou environ, contenant que le jour de l’Ascension Nostre Seigneur derrenierement passée, feu Denis Barré, en son vivant pyonnier, demourant à Poictiers, qui tout son temps a esté de très petit gouvernement, se transporta en l’ostel dudit suppliant, qui lors vendoit vin et luy demanda s’il luy presteroit son escot et ce qu’il despendroit à son hostel ; lequel suppliant luy respondy que oy et, se mestier estoit, le luy donneroit. Lequel Barré depuis ladicte heure se tint par tout le jour audit hostel et y souppa et coucha sans en paier aucune chose. Et le lendemain au matin, environ six heures, se partit et dist audit suppliant qu’il aloit parler à ung armeurier dudit Saint-Maixent, mais que tantost il reviendroit boyre avec lui. Lequel suppliant dès lors se partit de son hostel pour aler à l’église et laissa en sondit hostel ledit Barré. Et après ce que icelluy suppliant ot oy messe, s’en retourna en sondit hostel ouquel il trouva Lyete Bonninge, sa femme, à laquelle il demanda se ledit Barré estoit retourné ainsi qu’il luy avoit dit ; laquelle Lyete, fort esmeue et courroucée de ce que ledit Barré avoit ce pendent ravy et emblé oudit hostel grant quantité de leurs biens meubles, luy dist que ledit Barré n’estoit point retourné et que c’estoit ung larron et ung « va luy dire ». A l’occasion desquelles parolles ledit suppliant fut fort esmeu et croyant que ledit Barré l’eust desrobé de sa chevance, print, comme desplaisant de ce, une javeline et un braquemart, et s’en ala après ledit Barré, et tellement le poursuyvit qu’il l’atteignyt à ung quart de lieue près du bourg de Cursay, distant dudit Saint-Maixent de cinq lieues ou environ, et, luy arrivé audit Barré, luy dist le plus gracieusement qu’il peut, qu’il luy voulsist rendre ce qu’il avoit prins du sien en son hostel ; et en disant ces parolles, ledit suppliant apperçust que ledit Barré avoit une paire de souliers qu’il avoit prins en sondit hostel. Lequel Barré luy respondy bien arrogamment qu’il n’avoit riens du sien, et de fait et de force luy voult oster ladicte javeline en soy efforçant de le vouloir fraper. Et doubtant icelluy suppliant que ledit Barré, qui avoit autresfoiz suyvy la guerre, le voulust oultrager en son corps, tira sondit braquemart et en résistant à la force d’icelluy Barré, luy en donna ung cop sur la teste et un autre cop par la jambe senestre, et atant se départyt ledit suppliant d’avecques ledit Barré et le laissa au chemin et s’en retourna vers ladicte ville de Saint-Maixent, et en soy en retournant, trouva aucuns qui luy demandèrent s’il avoit trouvé ledit Barré. A quoy il respondit que oy, et en leur monstrant sondit braquemart, leur dist qu’il l’avoit bien chastié de ce qu’il luy avoit fait, combien qu’il ne pensoit point l’avoir batu jusques à mort ; aussi n’eust-il oncques voulenté de ce faire. Et ce mesmes jour ledit Barré fut mené en ung hostel près d’illec, et fut trouvé saisy de ladicte paire de souliers et d’un marteau de maçon qu’il avoit mal prins et emblé en l’ostel dudit suppliant. Et depuis aucuns jours après fut mené à Poictiers en son hostel ouquel a depuis esté jusques au second jour de ce present moys de juing que, par faulte de gouvernement ou autrement, il est alé de vie à trespas. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant s’est absenté, etc., requerant, etc. Pourquoy nous, etc., audit suppliant avons quicté, etc. les faits et cas dessusdiz, avec toute peine, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, etc. Donné à Paris, ou moys de juing, l’an de grace mil cccc. soixante seize, et de nostre règne le xvime

Il y a contradiction entre l’année du règne et le millésime ; l’un de ces deux termes est, par conséquent, erroné. Si le millésime 1476 est exact, il faut corriger de notre règne le xve, au lieu de xvie ; si ce dernier, au contraire, doit être maintenu, le millésime deviendra 1477, au lieu de 1476, la seizième année du règne de Louis allant du 22 juillet 1476 au 21 juillet 1477. Les données chronologiques fournies par le texte même des lettres de rémission ne suffisent pas à résoudre le problème. L’on y dit que le meurtre fut commis le lendemain de l’Ascension et que Denis Barré vécut jusqu’au 2 juin. En 1476, l’Ascension tomba le 23 mai, et en 1477 le 15 mai. Quant au lieu de la date : Paris, l’itinéraire de Louis XI montre que le roi ne séjourna en juin, dans cette ville ni en 1476 ni en 1477, d’où il résulte ou bien que lesdites lettres n’émanent pas de la grande chancellerie (qui suivait la cour dans ses déplacements) mais d’une chancellerie de cour souveraine, ou bien qu’une section de la grande chancellerie demeurait parfois sédentaire à Paris.

.

Ainsi signé : Par le Conseil, de Wignacourt. — Visa. Contentor. Picart.

MDLXXI Août 1476

Rémission accordée à Thomas Suyre, laboureur, demeurant en la vicomté de Châtellerault, commis par le roi et le vicomte à l’administration des biens saisis de Méry Bloteau et autres qui, en exécutant sa commission, pour défendre son fils attaqué par Jean Patarin, avait porté à celui-ci des coups, à la suite desquels il était mort.

AN JJ. 201, n° 74, fol. 58 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 81-84

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir, etc., nous, etc., des parens et amis charnelz de Thomas Surye

Sic. Il est écrit plus bas Suyre, nom préférable, parce qu’il appartient à plusieurs familles poitevines. Nous l’avons déjà rencontré plusieurs fois.

, homme de labour, demorant ou vicomté de Castelleraud, contenant que le lundi xxxixe jour de juillet derrenier passé, lui estant commissaire de par nous et aussi de par nostre très chier et très amé cousin le duc de Calabre, conte du Maine et viconte de Chastelleraud

Voyez ci-dessus, p. 41, note.

, à traicter, regir et gouverner les dommaines et heritaiges avec les fruiz d’iceulx appartenans à Mery Bloteau, Grand Jean Bloteau, Jehan Bloteau le clerc et plusieurs autres, et estans commissaires aussi, avec ledit Thomas Suyre, Jehan Giraudeau et Jehan Degenes, icelles commissions mises et apposées sur lesdiz heritaiges tant à la requeste de maistre Jehan Lucas que autres, icelluy Thomas Suyre, par vertu desdites commissions et pour les mettre à execution de par nous se transporta en et sur une pièce de terre estant près de Boisson en la parroisse d’Availle audit conté de Chastelleraud, appartenant icelle terre audit Mery Bloteau, laquelle estoit semée en avoine, en entencion de prendre et en lever les gerbes qui estoient en ladite terre, comme commissaire susdit, et pour ce faire et luy aider avoit mené avec luy Jehan et Guillaume Suyre, ses enffans, qui avoient menées leurs charretes pour amener lesdites gerbes. Et quant ledit Thomas et sesdiz enffans furent arrivez en ladite pièce de terre, trouvèrent ledit Mery Bloteau, qui avoit ung gros pal ou paubort en la main. Lequel dit incontinent audit Thomas et à sesdiz enffans qu’ilz ne emmeneroient point lesdites gerbes. A quoy ledit Thomas respondit que si feroit. Et ce veant, ledit Guillaume Surye, filz dudit Thomas, doubtant que ledit Bloteau les voulsist frapper dudit paubort, luy osta icelluy paubort sans l’en frapper ne luy faire mal. Et ce fait, ledit Thomas et sesdiz enffans chargèrent lesdites gerbes d’avoine jusques au nombre de sept ou de huit ; et en ce faisant, survint illec en ladite pièce de terre feu Jehan Patarin, qui demanda audit Thomas et à sesdiz enffans que c’estoit qu’ilz vouloient faire. Et lors ledit Thomas respondit qui vouloit enmener lesdites gerbes et qu’il estoit commissaire de par nous et de par nostredit cousin du Maine à ce faire, ayans de ce expresses commissions. Et lors ledit Jehan Patarin commença à jurer par le sang Nostre-Seigneur que non feroit et qu’il n’en auroit ne gerbe ne demye. A quoy ledit Thomas dit que si feroit. Et après ce, icellui feu Jehan Patarin demanda sa dixme, et ledit Thomas respondit que à sa dixme il ne mettoit point d’empeschement, mais que encores il n’avoit prins guères de gerbes que environ sept ou huit. Et en ce conflit et débat, ledit Jehan Patarin se print à l’esguillon de quoy ledit Thomas touschoit ses beufz, en entencion de l’empescher de enmener lesdites gerbes ; et ce veant, ledit Thomas tira ung cousteau qu’il avoit, qui estoit environ de deux piez, et en bailla du plat audit feu Jehan Patarin deux cops sur les épaulles, sans le blecier et luy fist laisser ledit esguillon ; et lors se départirent de ensemble, sans blecier l’un l’autre. Et incontinent s’en retourna ledit Thomas avec sesdiz enffans charger lesdites gerbes en ladite pièce de terre. Et aucun temps après, ainsi qu’ils les chargoient, ledit feu Jehan Patarin retourna de rechief sur eulx, en s’adreçant audit Guillaume Suyre, fils dudit Thomas, auquel il bailla du poing sur la teste, tellement qu’il luy fist très fort plesser

Ancien verbe que l’on trouve écrit aussi « plaissier, plausser plassier, plaixer », etc., et qui signifie courber, ployer. (F. Godefroy Dict. de l’anc. langue française, t. vi, v° Plaissier.)

le coul ; et ce veant, ledit Guillaume, qui estoit seul et à part de sesdiz père et frère, se print à crier en disant : « Aydez moy, aydez moy ! car il m’afolle ». Et incontinent ledit Jehan Suyre, frère dudit Guillaume et fils dudit Thomas, luy estant en la charrète où il chargeoit lesdites gerbes avec sondit père, sorty à terre de ladite charrète pour aler secourir sondit frère. Et tantost que icelluy Jehan Suyre fut descendu à terre et que ledit Patarin le vit, se print à fouyr, et lors ledit Thomas et sesdiz enffans commencèrent à aler après, et mesmement ledit Thomas, qui passa sesdiz enffans, et lesquelz ne le suyvirent pas jusques à la fin. Mais ainsi que ledit Thomas suyvoit ledit feu Patarin, icelluy feu Jehan Patarin cheut par trois foiz à terre et à la derrenière foiz saulta ung petit mur, où il y avoit du buisson, et en ce faisant cheut à terre ; et tantost ledit Thomas ala à luy et luy donna du plat de sondit cousteau sur la teste deux ou trois cops, sans lui faire aucune bleceure ne effusion de sang, et le laissa ilec en la place. Mais icellui Patarin en saultant ledit mur se rompit la jambe, et tellement que, à l’occasion de ladite rompture et de ce qu’il s’estoit eschauffé, et aussi que c’estoit devers le soir, à volée d’assee

Vol de bécasse, expression pour désigner le crépuscule. Cf. du Cange sous Volatus. [L.C.].

, que par faulte de ce qu’il ne fut pensé ni habillé et de bon gouvernement, ou autrement, il ala, deux ou troys jours après, de vie à trespassement. A l’occasion duquel cas, ledit Thomas doubtant rigueur de justice, s’est absenté du pays ou mis en franchise, et n’oseroit jamais retourner ni seurement converser au pays, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu que ledit Thomas estoit commissaire de par nous à regir et gouverner les fruiz de ladite terre et que ce qu’il en fist estoit pour garder nostre auctorité et celle de nostre dit cousin et en excerçant justice, et que ledit feu Patarin feust agresseur de fait et de parolle, et n’y eut de la part dudit Thomas aucune mutilacion ni effusion de sang, par quoy est vray semblable à presumer que plus par le moyen de ladite rompture de jambe et par deffaut destre pensé et aussi qu’il demoura longuement sur la place et de eschaufoison icellui feu Patarin ala de vie à trespas, que pour lesdiz copz que luy bailla ledit Thomas, et que en autre cas icellui Thomas est très famé et renommé, il nous plaise luy impartir icelles. Pour quoy nous, ces choses considérées, etc., audit Thomas Suyre avons quicté, remis et pardonné, etc., avec toute peine, amende et offense, etc. Si donnons en mandement, par cesdites présentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz justiciers, etc., que ledit Thomas Suyre de noz presens grace, quictance, remission et pardon, facent, seuffrent et laissent joïr, etc. Donné à Tours, ou moys d’aoust, l’an de grace mil iiiic lxxvi, et de nostre règne le xvime, soubz nostre seel ordonné en l’absence du grant.

Ainsi signé : Par le Conseil. Ja Picart. — Visa. Contentor. J. Duban.

MDLXXII Août 1476

Rémission donnée en faveur de Marsault Bresson, franc-archer de Jaunay, qui, en route pour l’expédition de Roussillon, s’était rendu coupable d’un meurtre dans un conflit avec des charretiers qui refusaient de laisser piller le vin qu’ils étaient chargés de conduire.

AN JJ. 201, n° 84, fol. 67 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 85-87

Loys, etc. Savoir, etc., nous, etc., des parens et amiz charnelz de Marsault Bresson, aagé de trente ans ou environ, contenant que, puis deux ans ença ou environ, il fut constitué et mis en l’estat et charge de franc archier de la paroisse de Jaunay, après lequel est[at] par lui prins, il lui convint aller avecques les francs archiers du pays de Poictou ès pays de Roussillon, où nous les envoyasmes certain nombre de francz archiers soubz la charge de nostre amé et feal conseiller Yvon du [Fou]

Le scribe a écrit par erreur « du Four ». On peut voir, dans l’introduction de notre précédent volume (p. xxxiii), quelques renseignements sur l’expédition de Roussillon en 1475 et le rôle qu’y joua Yves du Fou.

. Et quant ledit suppliant, accompaigné dez autres francs archiers furent partiz dudit pays de Poictou pour aller oudit pays de Roussillon et eurent tant cheminé qu’ilz arrivèrent ou pays de Rouergue au lieu appellé Parlant, à ung jour de venredi ou moys d’octobre derrenier passé, auquel lieu se logèrent tous laz, mors de fain, de soefz et fort travailliez. Et incontinant qu’ilz furent arrivés audit lieu et qu’ilz eurent prins logis, dirent à leur hoste : « Nostre hoste, nostre amy, que nous ayons du vin. » Lequel leur respondit qu’il n’en avoit point. Et tantoust survint illec, en parlant dudit vin, ung jeune enfant, aagé de xv. à xvi. ans ou environ, lequel leur dist telles parolles : « Messieurs, vous est moyen d’avoir du vin. J’ay veu passer par ce chemin (ouquel il povait avoir ung tret d’arc de leur logis ou environ) quinze ou seize charrestes toutes chargeez de vin. Couré après et que vous en ayez se bon vous semble. » Et incontinant Lyonnet Gauterneau et Guillaume Dubart, compaignons dudit suppliant, sans dire autre chose, coururent après les diz charrestiers et leurs dirent : « Que nous ayons du vin » et les charrestiers dirent que non auroient et que le vin n’estoit pas à eulx. Et adonc, iceulx compaignons, pour voulloir avoir dudit vin, arrestèrent les bestes et chevaulx, et iceulx charrestiers frappèrent sur eulx. Et ce voyant par ledit suppliant qui estoit assez loing d’ilec, en la compaignie d’un serviteur d’un des gentilzhommes dudit pays, lequel estoit illecques venu pour faire suporter les hommes subgez de son maistre, et il vit que l’on oultragoit ses compaignons, print son espée soubz son braz et s’en alla vers eulx pour les cuider reppaiser. Et incontinent qu’il fut arrivé là où ilz estoient, les diz charrestiers frappèrent sur lui plusieurs copz et tellement qu’ilz le gectèrent à terre. Et quant ledit suppliant se vit ainsi oultragé et que s’il ne se deffandoit, il estoit bien en dangier de mort, tira une espée du foureau et en cuida donner ung copt à ung des diz chartiers par la cuisse, mes par sa fortune et avanture, ledit copt eschut à venir au ventre dudit charrestier. A l’occasion duquel cas ainsi fortunement advenu, ledit charretier tantoust après alla de vie à trespas. A l’occasion duquel cas ledit suppliant doubtant rigueur de justice, s’est absenté, etc. et n’oseroit jamès, etc. se noz grace et miséricorde, etc. ; humblement requerant, etc. Pourquoy nous, attendu ce que dit est et le cas est advenu de fortune, etc., avons audit suppliant quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, aux seneschaulx de Poictou et Rouergue et à tous noz autres, etc. Donné à Tours, ou moys d’aoust, l’an de grace mil iiiic lxxvi, et de nostre règne le xvie.

Ainsi signé : Par le Conseil. Jure. — Visa. Contentor. J. Duban.

MDLXXIII Août 1476

Rémission, moyennant une aumône de cent sols et un pèlerinage à N.-D. de Celles accordée à Berthomé Bedart, dit Bersuire, chaussetier de Poitiers, recherché pour le meurtre d’Huguet Pasquier. Celui-ci lui ayant cherché querelle, l’ayant injurié et menacé, il lui avait, en le repoussant, porté un coup de poignard, auquel ledit Pasquier avait succombé au bout de huit jours.

AN JJ. 201, n° 85, fol. 67 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 87-90

Loys, etc. Savoir, etc., nous, etc., de Berthomier Bedard, dit Bersuyre, chaussestier, demorant à Poictiers, aagé de xxvi. ans ou environ, contenant que, le jour de la Penthecoustre derreniere passée, ledit suppliant, Jehan Dumas, Laurant Richart, Jehan Gauvain, André Gautié et plusieurs autres compaignons tous ensemble, se trouvèrent en la grant rue Saint-Ladre dudit Poictiers, en une maison dont il ne set le non, et illec burent ensemble sans avoir discencion les ungs avecques les autres, et s’en allèrent ensemble jusques au cemistère Saint-Cibart ; et quant il y furent, ledit Guillaume demenda s’il y avoit aucun qui voulsist entreprandre de geter la boulle depuis le coing de la maison de Janolhac en xiiii. copz, icellui suppliant respondi que il la lui bailleroit en xiii. depuis ledit coing jusques à Sacheignes

Sic, par interversion de lettres, pour Chassaigne, lieu dit en la ville de Poitiers, sur les bords du Clain, où étaient des moulins.

, ce que ledit suppliant print a geter en xiii, copz parmy ce qu’il suivroit sa boulle, mes que, s’il la mettoit aux vigniez, il perdroit. Et ledit Guillaume adonc geta deux grans blans à terre pour la misallie

Pour « misaille », gageure, pari, enjeu, mot encore en usage, avec cette signification dans tout le Poitou et dans la Saintonge, dit F. Godefroy. (Dict. de l’anc. langue française, t. V, v° Misaille.)

, ce que ledit suppliant en mist autant. Et print feu Huguet Pasquier les gages d’ung cousté et d’autre, et ledit suppliant bailla en garde ses robes, chappeau et cornette à ung nommé Georget, varlet d’ung nommé Copeau, patissier ; en laquelle cornette y avoit cinq grans blans, et desnoua ledit deffunct Pasquier ladicte cornette, et ledit suppliant lui dict : « Huguet, quant vous aurez fait, appellez-moi. » Et ledit Huguet bailla ladicte cornette toute desliée, en disant : « Regardez si j’ay rien prins. » Et ledit suppliant dist : « Je ne me deffie point de vous. » Et assez près de là, une nommée Simonne lui osta sa cornette et chappeau du col, et il lui dist : « Laissez cela », et la lui rendit sans rien prendre. Et il regarda en sa dicte cornette, et desdiz cinq grans blans, n’en trouva que ung. Et ledit Huguet dist que il n’en savoit riens et qu’il ne l’avoit pas, et ledit suppliant respondit qu’il ne l’en chargoit point, mes qu’il les avoit perduz ; et ledit varlet dist audit suppliant : « J’ay veu desnoyer vostre cornette à Huguet, mais je ne sçay s’il y a rien prins. » Et une heure après, le dit pastissier appella ledit suppliant et lui demanda s’il voulloit souper avecques lui, et il lui respondit : « Grant mercy » et qu’il estoit marry de son argent. Et illec survint ledit Huguet ; ledit supliant et autres estoient au carrefour Saint-Hilaire veoir jouer les jeux, et puis s’en allèrent hors ladite ville, pour estre à une repetition de certain jeu qu’ilz voulloient jouer de la Sainte Hostie

Il s’agit très vraisemblablement du mystère de l’hostie transpercée par un juif, qui ne put arriver à la détruire et ne réussit qu à en faire jaillir du sang. Dénoncé, le sacrilège fut saisi, jugé et brûlé. Le miracle de l’hostie ensanglantée passait pour avoir eu lieu à Paris, au xiiie siècle, et l’église des Carmes, dites les Billettes, aurait été fondée en mémoire de cet événement. Petit de Julleville donne l’analyse de ce drame et en indique deux anciennes éditions et une réimpression de l’année 1817. (Histoire du théâtre en France. Les Mystères, Paris, Hachette, 1880, 2 vol. in-8°, t. II, p. 574.)

, où ledit suppliant receut ung rolle pour estre du jeu. Et le dit Huguet lui demanda s’il le souppessonoit de son argent. A quoy ledit suppliant respondit : « Vous denouastes ma cornette ; pour ce je vous souppessonoye. » Et sur ce eurent plusieurs grosses parolles, et puis s’en alla souper en l’ostel de ladite Simonne et illec mangèrent d’un pasté, et en soupant lui furent randus cesdiz quatre grans blans par ung …

Sic. Un mot passé, sans doute « compagnon ».

, de la dite Simonne, qui disoit les avoir trouvez. Et peu de temps après, ledit suppliant vit ledit Huguet et le appella et lui dit : « Huguet, mon amy, je vous prie que me veulliez pardonner de ce que vous ay souppessonné de mon argent ; il m’a esté rendu » ; et il lui respondit : « J’en suis joyeulx et ne vous en veulx point de mal. » Et atant s’en alla ledit feu Huguet. Et ce dit jour, survint ledit feu Huguet, mout esmeu, et dist audit suppliant : « Tu as, Dieu mercy, trouvé ton argent. » Lequel luy respondit : « Sy, mon » (sic). Et lors ledit Huguet lui dist plusieurs parolles injurieuses et mauvaises, en l’apellant païlliart, coquin, truant, ruffian et autres injures mal sonnantes, en disant : « Tu ne vaulx rien, tu mourras à l’Ostel-Dieu. » Et lors Jehan Gaultier, coureieur, estant assis près dudit Huguet [lui dit] qu’il estoit un meschant homme de dire tant de injures audit suppliant. A quoy ledit Huguet respondit : « Va, pailliart, ruffian, de quoy te mesle-tu ? Tu le soustiens par ce qu’il est ruffian comme toy », et en lui disant parolles injurieuses, très mal sonnans, et qu’il n’y avoit ribaude en Poictiers de quoy il ne tirast argent et qu’il n’avoit chouses roges d’autre chose (sic). A quoy ledit suppliant respondit qu’il avoit manti ; et lui dist ledit Huguet plusieurs autres parolles injurieuses et leva le poing pour le cuider frapper ; lequel retint le copt du bras et tira ung petit poignart qu’il avoit à sa sainture et de copt de malavanture lui en bailla ung copt soubz le braz droit, dont ledit Huguet se escria, disant qu’il estoit mort. Et lors ledit suppliant, pour éviter le dangier, s’en alla en franchise. Et huit jours après est allé ledit Huguet de vie à trespas. A l’occasion duquel cas, ledit suppliant est encores en ladite franchise, dont il n’oseroit, etc., se noz grace, etc., humblement requerant, etc. Pour ce est-il que nous, considéré ce que dit est, etc., avons audit suppliant quicté, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, etc., que de noz dictes grace, etc., il facent, seuffrent et laissent joïr, etc., pourveu que ledit suppliant sera tenu bailler, premièrement et avant toute euvre en l’église où le corps dudit deffunct a esté ensepulturé la somme de cent solz tournois pour convertir pour faire prier Dieu pour l’ame d’icellui deffunct. Et aussi sera tenu faire ung voyage et pellerinage a Nostre-Dame de Selles pour pénitence salutaire et en rapporter certifficacion souffisante dedans quinze jours après la presentacion de ces presentes. Et affin, etc. Donné à Tours, ou moys d’aoust, l’an de grace mil iiiic lxxvi, et de nostre règne le xvie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion des gens de son grant Conseil. Sacierges

Pierre de Sacierges, qui devint évêque de Luçon en 1495. (Cf. le vol. précédent, p. 365, note 2.)

. — Visa. Contentor. J. Duban.

MDLXXIV Août 1476

Rémission pour François Simonneau, jeune valet à la verrerie de Bichat, coupable d’homicide par imprudence.

AN JJ. 201, n° 91, fol. 74 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 90-91

Loys, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receue l’umble supplicacion de Francoys Simonneau, contenant que huit ans a ou environ, ledit suppliant aagé de xiii à xiiii ans ou environ, estant serviteur et valet à la vairrerie de Bichat, de Estienne Fouet

Le Dictionnaire des familles du Poitou donne quelques renseignements sur quatre membres d’une famille Fouet, possédant le fief de Toucheronde, qui habitait Poitiers au xive siècle. (Nouv. édit., t. III, p. 527.)

, et serviteur au four de ladite voirrerie, de jour et de nuyt, luy servant audit four, advint que ung jour entre les autres duquel il n’est recors, environ l’eure de prime, ledit suppliant, serviteur à ladite voirrerie, en portant une grosse pièce de boys pour faire le feu au four de ladite voirrerie, icelle pièce de boys par fortune cheut sur la teste d’un nommé Marquis Musset, qui dormoit emprès ledit four de ladite voirrerie dont deux jours après ensuivans la mort s’en est ensuye. A l’occasion duquel cas, combien qu’il soit venu par accident et fortune et que ledit suppliant en ait chevy et compose tellement que partie est contante et satisfaite de tout, icellui suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du pays et n’y oseroit jamais bonnement ne seurement retourner ne converser, se noz grace, etc. Pourquoy, etc., voulans, etc. audit suppliant, etc. Et l’avons restitué, etc., satisfacion faicte à partie, etc. En mettant au neant tous bans, banissemens, etc. Et sur ce imposons silence perpetuel à nostre procureur, etc. Si donnons en mandement au bailly de Touraine

Il n’y a pas lieu, croyons-nous, de tirer de cette adresse la conclusion que la Verrerie de Bichat (auj. la Verrerie, Cne d’Archigny, Con de Vouneuil-sur-Vienne) faisait alors partie du bailliage de Touraine, mais simplement que François Simonneau, lors de l’obtention de sa rémission, habitait dans une localité de cette province.

et à tous noz autres justiciers, etc. que de nostre presente grace, etc., sans lui faire, mettre ou donner, etc., ainçoys se son corps, etc. Et afin que, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, ou moys d’aoust, l’an de grace mil cccc.lxxvi, et de nostre règne le xvime.

Ainsi signé : Par le roy, à la rellacion du Conseil. Texier. — Visa. Contentor. Duban.

MDLXXV Août 1476

Rémission obtenue par André Trollet et Jean Bureau, laboureurs, qui, pour secourir plusieurs de leurs parents et compagnons, attaqués par Guillaume Boivineau (alias Bonneau et ses deux fils), avaient frappé à coup de fourche ledit Guillaume, qui était mort de ses blessures.

AN JJ. 201, n° 94, fol. 76 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 92-94

Loys, par la grace de Dieu, etc. Savoir faisons, etc. de André Trollet et Jehan Bureau, pouvres gens de labour, demorans ou pays de Poictou, avoir receu … contenant que Jehan Boivineau, Tiphaine Boivinelle, femme Jehan Martin, Pierre Martin son filz, Mathurin Massay et autres sont héritiers, propriétaires et possesseurs, et à eulx compecte et appartient une piece de terre par quatriesmes, assise près le village des Barillières en la paroisse Saint-André, comme héritiers de feu Guillaume Boivineau, leur grant père, et de ce ont joy par bien longtemps au veu et sceu de tous ceulx qui l’ont voullu veoir et savoir. Or est il que le venredi d’après la Feste Dieu, les dessusdiz et suplians oyrent dire que ung nommé Guillaume Boivineau, leur oncle, se ventoit d’aller lever et cueillir le blé ou orge, qui en icelle pièce de terre avoit esté semé, et avoit entencion de faire perdre aux dessusdiz ce qui justement leur appartenoit. Et ce venu à leur congnoissance, parlèrent ensemble et dirent que mieulx-vauldroit qu’ilz allassent cuillir chascun sa part dudit orge, que le laissassent perdre et emporter aux autres, et que, s’ilz y alloient durant que ledit Guillaume y seroit, il ne se pouroit faire qu’il n’y eut noyse, pour ce qu’il estoit homme noisif. Et ce dit jour, chascun d’eulx print sa faucillie, une fourche de fer et troys ou quatre de boys pour charger les gerbes, menèrent leur charroy, prindrent paulx, bastons et autres choses à eux servans pour mener ledit orge, et se mirent à chemin ; et près de ladite pièce de terre rencontrèrent ledit Guillaume, leur oncle, qui estoit fort despité contre eulx, et leur dit telz moz : « Où allez-vous, gens d’armes », et lesdiz suplians lui respondirent : « Nous ne sommes point gens d’armes, mais sommes mestiviers, qui allons cuillir nostre orge qui est icy près. » Lequel ne leur dist mot et s’en alla, tout anflé contre eulx, droit à sa maison. Et quant ilz furent en ladite pièce de terre, survint Honnoré Bonneau

Sic. Le nom Boivineau est remplacé, dans la seconde partie de l’acte, par Bonneau et même par Bruneau.

, filz dudit Guillaume, lequel Honnoré avoit une arbaleste d’assier bandée, ung trait dessus ferré et d’autres à sa sainture, avecques ung grant cousteau, et disant et jurant la mort Dieu plusieurs foys qu’il mettroit les diz suplians hors du champt et que, s’ilz ne s’en sortoyent, qu’il en turoit ung. Et quant lesdiz suplians virent ledit Honnoré ainsi eschaufé contre eulx, creigniant le trait et pour eviter plus grant noise, saillirent hors du champt criant au meurtre, fors ledit Jehan Bonneau, lequel demoura seul dedans le champ avecques ledit Honnoré qui tousjours le poursuivoit, ladite arbaleste bandée ; et quant ledit Jehan Bonneau se vit seul et que les dessusdiz s’en estoient sortiz dudit champt et qu’il estoit en dangier de mort, se escrya à l’ayde, en appellant les diz suplians, lesquelz quant ilz le oyrent ainsi cryer, retornèrent oudit champt, se mirent entour ledit Honnoré pour lui oster son arbaleste et obvier qu’il ne tuast ne blessast aucun d’eulx, en le priant doulcement qu’il voulsit laisser ladicte arbaleste, dont il ne voult riens faire, et perseverant tous jours de pis en piz, juroit et regnioit Dieu qu’il en turoit ung, et eurent plusieurs parolles, tellement que les dessusdiz lui donnèrent deuz ou troys copz de forche et lui ostèrent son arbaleste et sondit grant cousteau. Auquel debat survint ledit Guillaume Bruneau (sic), leur oncle, et Jehan Bruneau, son filz, qui portoit à son col ung baston, appellé ung vollant, lequel ledit Guillaume print en sa main, en regniant Dieu qu’il en turoit ung, et à tour de bras en donna sur la teste de Jehan Martin, l’un desdiz suplians, tellement qu’il se enclina, mes il ne cheut point à terre, mais fut fort blessé jusques à grant effusion de sanc. Et ce voyant lesdiz suplians leur parent et compagnion, et que ledit Guillaume se efforsoit frapper ledit Andreu l’un desdiz compaignons, et supliant, et ledit Guillaume lui voulloit courir sus oultrageusement, lui donna ung copt d’une forche de fer qu’il tenoit, duquel lieu n’est recors, sans lui faire aucune blessure ne mutillacion, duquel copt ne se doult, mais illec vint Mathurin Massay avec une forche de boys qui en donna audit Guillaume ung autre copt entre les espaules et la teste, et ledit Jehan Bonneau, son nepveu, ung copt d’ung pal qu’il avoit par la teste, duquel copt il cheut à terre ; et puis s’en retournèrent audit champt et illec bien toust après oyrent dire que ledit Guillaume Bonneau au moyen desdiz copz estoit allé de vie à trespassement. A l’occasion de ce, lesdiz supplians se sont absentez du pays, etc., humblement requerant, etc., noz grace et miséricorde. Pourquoy nous, ces choses considérées, etc. ausdiz supplians avons quicté, remis et pardonné, etc., avecques toute peine, etc. Si donnons en mandement, par ces dictes presentes, au seneschal de Poictou, etc., que de noz presens grace, quictance, etc., les diz supplians facent, seuffrent et laissent joïr, etc. Donné à Tours, ou moys d’aoust, l’an de grace mil iiii lxxvi, et de nostre règne le xvie, soubz nostre seel ordonné en l’absence du grant.

Ainsi signé : Par le Conseil. Ponchier. — Visa. Contentor. J. Duban.

MDLXXVI 26 août 1476

Rémission octroyée à Colas de Maulévrier, écuyer, prévôt de Poitiers, commis à la garde du château d’Aunay, détenu prisonnier à Niort pour plusieurs exactions et abus de pouvoir dont il s’était rendu coupable dans cette charge et dans d’autres.

AN JJ. 201, n° 90, fol. 72 V° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 95-101

Loys, par la grace de Dieu roy de France. A tous ceulx qui ces presentes lettres verront, salut. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Colas de Maulevrier

Nicolas, alias Colas, qualifié bâtard de Maulévrier, panetier du roi, fils naturel comme il est dit ci-dessous dans les présentes lettres de rémission de François de Montbron, vicomte d’Aunay, baron de Maulévrier, avait reçu de Louis XI, par lettres datées de Paris, le 26 février 1472, l’office de prévôt de Poitiers. Ses provisions lui furent renouvelées à Paris, le 26 juin 1473, et furent enregistrées, ainsi que les premières, à la Chambre des comptes, où elles étaient transcrites sur l’ancien mémorial coté O, fol. 66 et 80 v°. (Bibl. nat., ms. fr. 21405, p. 174 et 177.) Il était seigneur de Nogeret et de Champerambault et rendit hommage à Charles II d’Anjou, comte du Maine, de cette dernière terre, mouvant de Civray, le 29 novembre 1476. Dans cet acte, il prend encore le titre de prévôt de Poitiers. (Arch. nat., P 1134, n° 37.) Cependant l’inventaire de l’ancien mémorial P. de la Chambre des comptes porte que la prévôté de cette ville fut baillée, le 29 avril 1476, à Alexis Robertet, secrétaire du roi. (Ms. fr. 21405, p. 196.) On retrouve Colas, bâtard de Maulévrier, sieur de « Chasteau-Rabain », député par Jacques de Beaumont, sire de Bressuire, sénéchal du Poitou, à recevoir la montre des nobles de l’arrière-ban du ressort de Montmorillon, qui eut lieu en cette ville le 2 décembre 1491. (Roolles des bans et arrière-bans de la province de Poictou, Poitiers, 1667, in-4°, réimpr. de 1883, p. 47.)

, escuier, contenant que dès le temps de sa jeunesse il s’est entremis, entretenu et employé en nostre service, tant ou fait de noz guerres que autrement, en estat d’omme d’armes, bien et loyaument, sans y faire faulte, et mesmement durant les guerres, divisions et differences qui par ci devant ont esté en nostre royaume ; et à ces causes le retensismes de nostre hostel par bien long temps, ou semblablement il nous a bien et loyaument servy et s’i est entretenu sans y avoir fait ne commis chose digne de reprehencion, et tellement que dès pieça lui donnasmes et octroyasmes la prevosté de Poictiers ; ouquel estat de prevost il s’est bien et honnestement conduit et gouverné sans reprehencion aucune. Et aussi ou vivant de nostre feu frère, le duc de Guienne

Charles de France, duc de Guyenne, frère de Louis XI, sur lequel cf. notre volume précédent, 172, note et passim.

, et durant les differences et divisions, fut icellui suppliant commis de par nous à la garde du chasteau d’Aunay, qui estoit et est joignant du costé de Xanctonge et de la frontière d’icellui, où icellui escuier s’est gouverné à nostre prouffit et entencion, sans y avoir fait faulte, au mieulx de son povoir, combien que audit temps il avoit desir d’avoir à mariage une des filles de Pierre [du] Fouilloux

Le texte porte en cet endroit « Fouilloix. » On ne peut douter cependant qu’il ne s’agisse d’un membre de la famille du Fouilloux, bien qu’il ne figure pas dans la trop courte généalogie qui en a été publiée.

, escuier, seigneur de Cogniou, et pour mieulx y cuider parvenir, pour ce que aucun lui dist que ledit Fouilloux disoit et publioit que les gens, habitans de la viconté d’Aunay, que ledit suppliant avoit fait mettre en habillement de guerre, ne devoient point porter la croix blanche sur leurs hocquetons ou pays de Xanctonge, que icellui suppliant leur avoit ordonné porter, comme ayant le gouvernement dudit chasteau et viconté de par nous. A ceste cause, icellui suppliant, et aussi pour ce qu’on disoit [que] ledit du Fouilloux faisoit et disoit plusieurs autres choses et exploiz en soy monstrant rebelle et desobeissant à nous, et tenant le parti de nostre feu frère, le print et emprisonna oudit chasteau d’Aunay ; et quant il luy tînt, luy mist à sus qu’il estoit Guiennoys et qui luy bailleroit sa fille en mariage ou deux cens escuz pour sa rençon. Lequel de Fouilloux ayma mieulx se mettre à rençon envers ledit suppliant à la somme de deux cens escuz que lui bailler sadite fille. Et toutesfoiz ledit suppliant, en luy montrant qu’il ne vouloit pas prendre de lui à la rigueur ce que lors il eust bien peu, le quicta desdiz deux cens escuz pour cent escuz moyennant et parmy ce qu’il lui fist serement de tenir nostre party et autrement, comme ayant la garde du chasteau et viconté dessusdiz, comme en tel cas appartenoit et est acoustumé. Laquelle somme de cent escuz ledit de Fouilloux a depuis et longtemps après paiée, ou autre, pour et ou nom de lui, audit suppliant. Et depuis icellui de Fouilloux et suppliant, en ont appoincté ensemblement, et luy a satisfait ledit suppliant, tellement que ledit de Fouilloux lui a promis de jamais ne l’en pourchasser. Et avec ce ledit suppliant, durant lesdites differences, cuidant que ung nommé Jehan Maignan, qui estoit escollier estudiant à Poictiers, demourant en ladite (sic) ville de Saint-Jehan d’Angely et tenant le party de nostredit feu frère, pour ce qu’il en estoit yssu, le print et fist prendre et mettre oudit chasteau, où lequel Maignan se mist à rençon envers lui à la somme de cent escuz. Et aucun temps après, ainsi que noz gens alloient au siège à Mathas, qui nous estoit desobéissant, vint audit lieu d’Aunay le sire de Bressuyre

Jacques de Beaumont, sire de Bressuire, lieutenant, général en Poitou, Saintonge et Aunis, dont il est fréquemment question dans notre précédent volume. (Voy. notamment p. 235, note, 816, note.)

, qui ordonna que ledit Maignan paieroit audit suppliant seullement la somme de vingt flourins de quinze solz tournois la pièce, qu’il eut par la main dudit sire de Bressuyre. Et, en oultre, pour ce que depuis deux ans ença ledit suppliant fut assavanté que ung nommé Phelippes de La Tour

Sic, ou de La Tousche, comme il est dit quelques lignes plus bas.

, prebstre, avoit dit et proféré de nous et contre nostre personne aucunes parolles, disant que c’estoit grant follie à nous de faire la guerre en Roussillon et que la conté d’icellui pays de Roussillon n’estoit point en nostre royaume, mais appartenoit aux Juifz, et que c’estoit grant dommaige de faire faire les charrettes que lors on faisoit pour la conduicte des francs archiers, disant que c’estoit la destruction de nostre royaume, ledit suppliant qui, comme dit est, avoit le gouvernement desdiz chastel et viconté d’Aunay, fist prendre au corps ledit Philippes de La Tousche, prebstre, et le mettre, oudit chasteau d’Aunay, et, à ce appellez les juge, procureur et autres officiers de ladite viconté, eut de luy, pour ceste cause, la somme de cincquante escuz. Auquel Philippes de La Tousche, prebstre, depuis ledit suppliant a satisfait tellement que ledit prebstre a promis de jamais ne lui en faire faire aucune action, question ou demande. Et il advint que, en l’an mil iiiic. lxxiiii, ledit suppliant fut commis par les commissaires commis et ordonnez de par nous à faire lever et amasser certaines quantitez de blez ès chastellenies d’Aulnay, Chevoultonne et autres pour l’avitaillement des gens de guerre logez et mis en garnison de par nous en la ville de Bourdeaulx et aillieurs ou pays de Guienne, pour le doubte qui estoit lors de la descente des Angloys, nos antiens ennemis ; en laquelle charge et commission ledit suppliant se gouverna bien et honnestement et fist fournir les quantitez de blez à lui ordonnez faire fournir. A laquelle chose faire, lui a convenu faire plusieurs grans mises et despenses. Ouquel temps et en ce faisant, ledit suppliant receut du curé d’Aunay

Louis Poitevin, prêtre, curé de Saint-Pierre d’Aunay, poursuivait au Parlement, avec l’appui du Procureur général, Placide de Montbron, second fils d’Eustache, vicomte d’Aunay, protonotaire du Saint-Siège, pour excès, attentats, rebellions, etc. Le Parlement, par arrêt du 14 août 1495, condamna le protonotaire à 1.000 livres parisis d’amende et autres réparations. (Arch. nat., X2a 56, fol. 341 v°.) Rien n’indique que ce curé d’Aunay fût déjà en fonctions en 1476.

la somme de quatre escuz qu’il employa ès fraiz et despences de sadicte commission, que ledit curé receut du vicaire d’Anges, affin qu’il ne baillast point de blez, et dit on que ledit curé en eut deux pour luy, qui furent six escuz. Et qui plus est, pour ce que ung nommé Morice Guyton, soy disant commissaire à lever et regir les fruiz de ladite terre d’Aunay, à ung certain jour duquel autrement n’est recordz, voult entrer oudit chasteau d’Aunay, ou quel estoit le viconte dudit lieu d’Aunay

François II de Montbron, vicomte d’Aunay, baron de Maulévrier, seigneur de Mortagne et de Matha, etc., fils aîné de François Ier (décédé en 1470, fort âgé), et de Louise de Clermont, fille unique et héritière de Jean de Clermont, vicomte d’Aunay, qu’il avait épousée le 23 mai 1404. Jusqu’à la mort de son père, François II fut connu sous le nom de seigneur de Mortagne et de Matha, titre qui lui est donné dans son contrat de mariage avec Jeanne de Vendôme, fille unique de Pierre de Vendôme, seigneur de Segré et du Lude, veuve avant 1440 de Robert de Fontaines. En 1443, il était chambellan du dauphin Louis. Par le partage des biens de ses père et mère, fait le 28 novembre 1468, les terres d’Aunay, de Montbron, de Maulévrier et de Matha lui demeurèrent : il en fit hommage au roi le 11 octobre 1469 ; le vicomte d’Aunay fit quelques poursuites, mais inutilement, pour retirer la terre du Lude que Pierre de Vendôme avait engagée à Jean de Daillon, et aliéna celle de Montbron, le 16 septembre 1471, à Marguerite de Rohan, comtesse d’Angoulême, ce qui occasionna depuis de grands procès. Il mourut le 31 octobre 1476. (Le P. Anselme, Hist. généal., t. VII, p. 19.)

Les enfants légitimes de François II, vicomte d’Aunay, furent Eustache de Montbron, qui lui succéda, et Jeanne, qui fut mariée trois fois : 1° avec Martin Henriquez de Castille ; 2° avec Louis Chabot, sr de Jarnac ; 3° avec Louis Larchevêque, sr de Soubise. On peut voir dans notre tome X (Arch. hist., t. XXXV, p. 466, note) un exposé des procès que celle-ci et ses deux derniers maris soutinrent, de 1475 à 1482, contre François II, puis contre Eustache, vicomte d’Aunay, au sujet de sa dot assignée en partie sur les revenus de la seigneurie de Matha. On trouve aussi beaucoup d’actes, testaments, titres de propriété, constitutions de rente, touchant ces deux personnages, dans les papiers de l’ancienne Chambre des comptes d’Angoulême, au milieu de pièces de procédure relatives à l’engagement et au retrait de la vicomté d’Aunay, qui était devenue possession de Louise de Savoie, comtesse d’Angoulême. (Arch. nat., P. 14071 et 2, P. 14093.)

, père dudit suppliant, qui estoit et est viel et ancien, et dormoit et se repousoit, ledit suppliant frappa et baty ledit Morice Guyton, pour le garder d’entrer oudit chasteau. Ouquel chasteau, ce fait, ledit suppliant s’en entra et ala en la chambre où dormoit ledit viconte d’Aunay, son père, et quant il vit que sondit père dormoit, il s’en yssit hors dudit chasteau et s’en vint au bourg dudit lieu, devant la maison de Guischart Fromentin, où il trouva ledit Morice Guyton, lequel il print aux cheveux et le baty de rechief, dont ledit Guyton requist acte à ung nommé Beaudieu, comme notaire. Lequel suppliant print ledit acte et le brisa et gecta au feu et mist ledit [Guyton]

Le texte porte par erreur « le dit suppliant ». Ces mots doivent être remplacés par Guyton ou Beaudieu.

en prison. Et fist aussi dès pieça ledit suppliant convenir et adjourner par devant noz amez et feaulx conseillers les gens tenant les Requestes de nostre Palais à Paris, Jehan Perot, dit Cail, et Huguet Gaultereau, pour cause de certaine quantité de boys que lesdiz Cail et Gaultereau avoient prins en certain boys appartenant audit suppliant, affin d’en avoir restitucion ; lesquelz Cail et Gaultereau deffaillirent au jour à eulx assigné, et après composèrent avec ledit suppliant, tant pour ledit boys que pour les despens des fraiz et mises dudit suppliant à la somme de xii escuz qu’il eut et receut. Et tellement est advenu que, à l’occasion des cas et choses dessusdiz et aussi d’avoir prins par ledit suppliant certaines menues despences pour le vivre de lui et de ses gens, en exerçant sadite commission desdiz blez, ledit suppliant a esté et est constitué et detenu prisonnier en noz prisons de Nyort, ès quelles il est en voye d’y miserablement finer ses jours, se nostre grace ne lui est sur ce impartie. En nous humblement requerant que, attendu que en autres choses il a toujours esté bien famé et renommé, de honneste vie et conversacion, et ne fut jamais actaint et convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, mesmes que touchant nostre service ne affaires principaulx de nostre royaume, jamais ne nous fist faulte, mais tousjours [a] esté bon et loyal envers nous et la couronne de France, il nous plaise sur ce luy impartir nostredite grace. Pour ce est-il que nous, ces choses considérées, voulans grace preferer à rigueur de justice, audit suppliant les faiz et cas dessusdiz avons quicté et pardonné, quictons et pardonnons, de nostre grace especial, pleine puissance et auctorité royal, avec toute peine, offence et amende corporelle, criminelle et civille, en quoy, pour occasion d’iceulx cas, il pourroit estre encouru envers nous, ensemble tous appeaux, bans ou deffaulx, s’aucuns en estoient contre lui ensuiz. Et de nostre plus ample grace, l’avons restitué, etc., satisfacion faicte à partie, etc., et elle y eschiet. Et quant à ce imposons silence perpetuel à nostre procureur, etc. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieustenans, presens et advenir, et à chacun d’eulx, etc., que de nostre presente grace, quictance et pardon, ilz facent, etc., joir, etc., sans pour occasion desdiz cas ou des deppendances d’iceulx luy faire mettre ou donner ne souffrir, etc., ains sondit corps, jà prins et arresté en nosdites prisons, comme dit est, et sesdiz biens meubles, immeubles et heritaiges, s’aucunement sont ou estoient à ceste cause prins, etc., les luy mettent ou facent mettre incontinent et sans delay à pleine delivrance et au premier estat et deu. En tesmoing desquelles choses, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Donné à Tours, le xxvie jour d’aoust, l’an de grace mil iiiic lxxvi et de nostre règne le seiziesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Chambon.

MDLXXVII Août 1476

Rémission en faveur de Louis Challot, bâtier de Niort, poursuivi en justice pour le meurtre de Jeanne Herbert, femme de mauvaise vie, avec laquelle il s’était pris de querelle et qui avait insulté sa sœur.

AN JJ. 204, n° 173, fol. 108 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 101-104

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Loys Challot, bastier de nostre ville de Nyort, aagé de xxii ans ou environ, contenant que deux ans a ou environ, ledit suppliant estant en la compaignie d’un nommé Bardin Legrant, en une maison où l’on vendoit du vin, assise en ladicte ville de Nyort, près la porte Saint-Gelais, et ainsi qu’ilz estoient en ladicte maison, passa une femme nommée Jehanne Herberte, femme de Colas Boucher, et la menoient deux paillars. Lesquelz Bardin et suppliant disdrent : « Vella ses deux paillars qui enmenent ceste femme. Alons après, nous ne faudrons point à les trouver ensemble hors la ville, et gaignerons les robes, car lesdiz paillars sont mariez. » Et lesquelz Bardin et suppliant sortirent hors ladicte maison pour aller après ladicte femme, et ledit Bardin, appell[a] ung nommé Estienne Pinsonneau et son varlet, et ledit suppliant alla en l’ostel de son père à la compaignie desdiz Bardin, Pinsonneau et sondit varlet, lesquelz tous ensemble

Sic, mots passés ; il faut suppléer, sans doute, « rejoignirent lesdits paillars ».

… et mesmement disrent lesdiz suppliant et Bardin, Pinsonneau et sondit varlet ausdiz pailliars qu’ilz estoient mariez et que à eulx n’appartenoit pas de mener une telle femme. Et en disant lesdictes parolles et autres, s’en vindrent tous ensemble en ladicte ville de Nyort, et ainsi qu’ilz alloient en ladicte ville, ledit suppliant dist à ladicte Herberte : « Par le sang Dieu, ribaulde, vous avez laissé vostre mary plusieurs foiz et l’avez laissé et robé. Maiz à ce coup, vous serez menée au bourdeau. » Et ladicte Herberte dist audit suppliant : « Va, va, paillart, va y mener ta seur. » Et quant ilz furent à l’entrée de la porte de ladicte ville, ledit Pinssoneau et sondit varlet prindrent ladicte Herberte soubz le bras et ledit suppliant en leur compaignie en disant ledit suppliant à ladicte Herberte : « A ce coup tu seras menée au bourdeau et seras baillée entre les mains de maistre Denis, comme les autres ribaudes ! » Et ladicte Herberte dist audit Challot : « Va, va, paillart, va querir ta seur et la mène comme moy. » Et quant ledit Challot oyt telles parolles, voyant que sa seur estoit bonne femme, de bon gouvernement et sans avoir aucun reprouche ni blasme, icellui suppliant dist à ladicte Herberte qu’elle mentoit par la gorge. Et en ce disant tira ung cousteau qu’il avoit, et cuidant lui bailler par les cuisses, lui donna dudit cousteau deux cops par le ventre. Et tantost après elle fut menée en l’ostel d’aucuns barbiers et fut abillée par lesdiz barbiers, et pour ce qu’elle estoit incogneue en ladicte ville et n’avoit gens qui la feissent penser comme il appartenoit, quinze jours après ou environ elle alla de vie à trespas. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant doubtant rigueur de justice se absenta dudit pays, et à ceste cause fut adjourné à ban, et pour ce qu’il ne comparut aucunement en personne, il a esté banni et ses biens declairez à nous confisquez ; par quoy il ne oseroit ne … ailleurs en nostre royaume jamaiz converser, demourer ne repairer, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce impartiz, en nous humblement requerant que, attendu le jeune aage dudit suppliant, et que par challeur il a fait ledit cas, non cuidant le faire ainsi qu’il est advenu et en est très fort dolent et courroussé, et que en tous ses autres faiz il s’est tousjours bien et honnestement gouverné, sans avoir esté actaint ne convaincu d’aucun autre vilain cas, blasme ou reprouche, nous lui vueillons sur ce impartir nosdictes grace et miséricorde. Pour quoy nous, ce considéré, audit suppliant ou cas dessusdit avons quicté, remis et pardonné, et par ces presentes, de grace especial, etc., quictons, remettons et pardonnons le fait et cas dessus declaré, etc. Si donnons en mandement, par cesdictes presentes, au seneschal de Poictou et à tous, etc. Donné au Pleissis du Parc, ou moys d’aoust, l’an de grace mil cccc soixante seize, et de nostre règne le xvime.

Ainsi signé : Par le roy, le sire de Chaumont

Charles d’Amboise, sire de Chaumont, chevalier, gouverneur de Champagne, reçut en don du roi, par lettres données au Plessis-du-Parc, au mois de janvier 1476, n.s. le comté de Brienne, les terres et seigneuries de Bourdenay, la Villeneuve-au-Chemin, etc., confisqués sur Louis de Luxembourg, comte de Saint-Pol, connétable, exécuté pour crime de lèse-majesté. (JJ. 204, n° 155, fol. 95 v°.) Nous avons dit, ailleurs, qu’il fut, au moins nominalement, d’avril 1475 au 24 novembre 1476, sénéchal de Poitou, office qu’exerçait alors par commission Jean Chambon, conseiller au Parlement. (Vol. précédent, Introduction, p. xxxiv, et p. 381, note.)

, du Lude

Jean de Daillon, sr du Lude, gouverneur du Dauphiné. (Ci-dessus, p. 51).

, de Maigne

Sur ce personnage, voy. ci-dessous.

et plusieurs autres presens. J. de Chaumont. — Visa.

MDLXXVIII Septembre 1476

Rémission accordée à Pierre Michelon, bachelier en lois, étudiant à l’Université de Poitiers, détenu prisonnier à la Conciergerie du Palais de cette ville pour meurtre commis dans une rixe d’étudiants.

AN JJ. 195, n° 1665, fol. 434 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 104-108

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de maistre Pierre Michelon, bachelier en loix, escollier, aagé de xxiiii. ans ou environ, escollier estudiant en l’Université de Poictiers, avons receue (sic), contenant que, le venredi vie jour de ce present [mois] de septembre, environ vii heures de nuyt, ledit maistre Pierre Michelon, maistre Clement Beranger et Jehan de La Fontanille, escolliers, demourans ensemble en ladicte ville de Poictiers, en la maison des Chastelliers, allèrent à l’esbat au Marché vieil où communement ont acoustumé aller les escolliers de ladicte Université, et prindrent lesdiz Michelon et Berenger chacun une espée soubz leurs robbes, et avecques ce ledit Michelon ung cor de terre en sa main. Et quant ilz furent oudit Marchié, ledit Michelon dist audit Beranger et Fontanille que, s’ilz voulloient, il feroient assembler grant nombre de chiens au son de son cornet. Et ainsi que ledit Michelon cornoit, oyrent ung breton, demourant oudit Marchié qui cornoit semblablement d’un autre cor, et icelui Michelon deist ausdit Beranger et Fontanille : « Allons à celui qui corne pour accorder noz cornetz ensemble », et s’en allèrent vers ledit breton, que trouvèrent à la porte de sa maison, auquel ledit Michelon demanda où estoit sondit cor, en lui priant qu’il en cornast pour l’accorder avec le sien. Et ainsi qu’ilz disoient lesdictes parolles, virent venir de divers les Jacobins sept ou huit escolliers avec grans bastons ferrez qui traversoient ledit Marché Vieil, et si tost qu’ilz s’approuchèrent, icelui Michelon marcha en avant jusques auprès du chemin où lesdiz sept ou huit portans ces longs bastons passoient, et se mist sur ung bors pour regarder se lesdiz escolliers avoient point de femme avec eulx, sans leur dire ne leur voulloir faire aucun mal ne desplaisir. Incontinant ung desdiz escolliers, dont ledit Michelon ne scet le nom, meu de mauvais couraige et desplaisant de ce que ledit Michelon les regardoit, s’efforça de voulloir frapper icelui Michelon d’un espié ou baston ferré, et se ledit Michelon n’eust levé les mains pour retenir le coup, ledit escollier l’eust fort blecié et navré, mais, au moien de ce que ledit Michelon se reculla, ne ataignit que les mains seullement. Et ce fait, lesdiz Michelon, Beranger et Fontanille, voyans que ledit Michelon avoit esté oultragé et pensans que iceulx escolliers eussent la dicte femme, allèrent en leurdit logeis pour querir leurs bastons, et en passant par devant la maison d’un nommé Bourguignon, cordouannier, où demeuroit ung nommé Mery Michelon, frère dudit Pierre Michelon, appellèrent ledit Mery pour le mener avec eulx, et tous ensemble allèrent à leurdit logis et prindrent chacun ung baston ferré, c’est assavoir ledit Pierre Michelon une partizanne et ledit [Mery] Michelon son frère une autre, et ledit Beranger ung espiot ferré et ledit Fontanille une espée emanchée ; et ce fait, sans aucun arrest et de chaude colle s’en allèrent vers la maison d’une …

Mot en blanc au registre.

près dudit Marchié, pour cuider trouver lesdiz sept ou huit escolliers qui, à leur avis, menoient ladicte femme, et tout court s’en retournèrent dudit Marchié en poursuivant et courant après lesdiz escolliers, et remontèrent entre le colleige de la Sezaine (sic) et la maison du Mouston

Il est déjà question de l’hôtellerie du Mouton dans des lettres de rémission du 30 mars 1464, en faveur de Jacques de Belleville, pour le meurtre d’un fermier de la prévôté de Poitiers. (Arch. hist., t. XXXV, p. 456, 459.)

, et eulx assemblez, d’une part et d’autre, ledit Michelon dist à ses compaignons : « Dessus, dessus », en commançant à frapper sur lesdiz escolliers, ouquel conflict lesdiz escolliers frappèrent sur la pertizanne dudit Pierre Michelon tellement que le bois rompit auprès du fer et tumba en la rue. Et lors voyant ledit Michelon lui estre desgarni de baston pour eviter que lesdiz escolliers ne le oultragassent, se retira devers sesdiz compaignons, et lesdiz escolliers frappèrent sur ledit Michelon et le recullèrent jusques deça la traverse qui va vers Nostre-Dame de la Chandellière dudit Poitiers, et illecques se combatirent les ungs aux autres en une espasse de temps et jusques à ce que ung desdiz escolliers nommé maistre Guillaume de Dromo s’estoit departi tout seul d’avecques sesdiz compaignons et tout seul avoit tiré en la grant rue qui va à la porte de la Trenchée dudit Poitiers ; ouquel lieu il apperceut ledit Pierre Michelon estre fort empesché contre sesdiz compaignons, vint contre lui avecques son baston tandu, en le cuidant enferrer. Mais ce voyant, ledit Mery Michelon voulant secourir sondit frère mist son baston au devant et ledit feu Dromo se vint estorquer et enferrer dedens et cria à haulte voiz qu’il estoit mort. Et ce voyant les compaignons dudit feu Dromo s’enfouyrent et recullèrent et lesdiz Aymery et [Pierre] Michelons, Beranger et Fontanille les suivirent jusques à l’église de Nostre-Dame de la Chandellière, et lesdiz escolliers s’en allerent vers l’église Saint-Yllaire le Grant de Poitiers. Et atant lesdiz Aymery et ses compaignons s’en allèrent le long de la rue au long des vignes derrière les Augustins et gectèrent lesdiz Beranger et Fontanille et Pierre Michelon et Mery son frere, leursdiz bastons en une vigne derrière lesdiz Augustins et s’en allèrent coucher en leurdicte maison ; et en allant, ledit Mery Michelon dist à sesdiz compaignons que l’un desdiz escolliers s’estoit frappé et enferré dedens sondit baston. Et eulx arrivez en leurdit logeis se couchèrent, et dix heures après (sic) mynuit ou environ, lesdiz Michelon et sesdiz compaignons se relevèrent et avecques une torche allumée allèrent au lieu où avoit esté frappé ledit Dromo, cuidant trouver le fer de la pertizanne dudit Michelon, lequel ilz ne peuvent trouver ; et après s’en retournèrent iceulx Michelons et leursdiz compaignons en leurdit logeis, et en passant prindrent leurs bastons qu’ilz avoient mucez en ladicte vigne. Et le lendemain, heure de sept heures de matin, une femme nommée Jehanne Limosine, lavandière, vint dire audit maistre Pierre Michelon et à sesdiz compaignons que, auprès de l’ostellerie dudit Mouton, avoit la nuit esté tué ung escollier. Lesquelles choses oyes, ledit maistre Pierre Michelon dist à sesdiz compaignons qu’ilz feissent bonne contenance et qu’ilz ne s’en fuissent point ; et panssèrent en eulx mesmes que c’estoit celui qui disoit que ledit Mery l’avoit frappé. Et doubtans qu’ilz ne fussent trouvez saisiz desdiz bastons, les geterent ès retraiz dudit ostel ; et tantost après, ainsi que lesdiz maistre Pierre Michelon et Beranger aloient aux Augustins pour ouir messe, furent prins par Colas Godart et autres nos sergens, et menez prisonniers en la Conciergerie de nostre Palais à Poitiers. Et depuis, pour ce que ledit Pierre Michelon estoit clerc, a esté par nostre seneschal de Poitou ou son lieutenant rendu et mené prisonnier ès prisons de nostre amé et féal conseiller l’evesque de Poitiers

Alors Jean VI Du Bellay, cinquième fils de Hugues Du Bellay, tué à Azincourt ; fut abbé de Saint-Florent de Saumur (1431), évêque de Fréjus (novembre 1455), puis évêque de Poitiers de 1461 au 3 septembre 1479, date de sa mort. (Gallia christ., t. II, col. 1201.) — Le Dict. des familles du Poitou (2e édit., t. I, p. 423) dit 1478. [L.C.]

, ausquelles il est en voye de finer miserablement ses jours, se nostre grace, etc., en nous humblement requerant que, attendu qu’il n’a pas fait lesdiz cops et que ledit deffunct et ses compaignons estoient agresseurs, qu’il a tousjours esté de bonne vie, renommée, et l’avoient frappé comme dit est, et que jamais ne leur avoit fait ne dit aucune chose dont ilz deussent estre mal contens, et est de bonne vie et honneste conversacion, sans jamais avoir esté actaint ou convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, nous lui vueillons sur ce impartir nostre grace et misericorde. Pourquoy nous, etc., audit suppliant ou cas dessus dit avons quicté, remis et pardonné, et de nostre plus ample grace, etc., quictons, remettons et pardonnons ledit fait et cas dessus declairé, avec toute peine, etc., et l’avons restitué, etc., satisfacion, etc., et sur ce imposons scillence perpetuel à nostre procureur, present et avenir. Si donnons en mandement, par ces presentes, à nostre seneschal de Poictou, etc. Donné à Paris, ou mois de septembre, l’an de grace mil cccc. soixante seize et de nostre regne le xvie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil, E pet (sic). — Visa. Contentor. Picart.

MDLXXIX Octobre 1476

Permission à Louis Tindo, écuyer, sénéchal de Thouars, d’exercer la justice dans ses terres et seigneuries de la Brosse-Guillegaut, fiefs de Vieuxpont, de Grifferoux, de Juigné, Fief Bonneau, etc., d’y tenir assises, et d’y commettre sénéchal, juges, sergens et autres officiers à ce nécessaires.

AN JJ. 201, n° 153, fol. 118 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 109-111

Loys, etc. Savoir, etc., nous avoir receu l’umble suplicacion de nostre amé et féal maistre Loys Tindo

Nous n’avons rien à ajouter à la notice sur Louis Tindo, sénéchal de Thouars, puis premier président au Parlement de Bordeaux, insérée dans notre volume précédent, p. 244-245, sinon la mention de deux pièces de comptabilité ou mandements du roi pour lui faire payer, en qualité de secrétaire des finances, par le 1er, daté du 15 octobre 1478, 198 livres 18 sols 4 deniers, en remboursement de cette somme qu’il avait baillée comptant au roi, « pour faire ses plaisirs et voulentez » ; et par le 2e d’avril 1479, une somme de 64 livres 3 sols 4 deniers, qu’il avait avancée à Me Etienne Rouffe, envoyé par le roi, « pour anciennes affaires devers les anciennes ligues des haultes Allemaignes. » (Arch. nat., KK 64, fol. 13 v°, 36.)

, escuier, seneschal de Thouars, contenant qu’il est seigneur de l’ostel, terre et seigneurie de la Brosse Guillegaut, des fiefz de Vielpont, de Grifferoux, de Juigny, du fief Bonneau assis à Jaye et environ, et aussi d’une maison assise à Thouars, tenue de la seigneurie de Chevennes, et en laquelle terre, seignorie et fiefz dessus declarés, il a plusieurs beaulx droiz, prerogatives et preminances sur les hommes et subgez demourans en iceulx et y a toute justice et juridicion fonciere, laquelle par la coustume du pays de Thouarcis, il ne peut faire executer en sadite terre et fiefz, mais lui convient poursuir ses hommes par devant les officiers du seigneur surezain (sic), dont ladite terre, seigneurie et fiefz sont tenus et mouvans, qui est en très grant diminucion de ses fiefz, terres et seigneurie. Et à ceste cause nous a humblement suplié et requis qu’il nous plaise pour l’aumantacion de sesdiz droiz lui octroyer l’excercice de ladite justice et juridicion souveraine en sadite terre et seigneurie de la Brosse et fiefz dessus declarez et sur ce lui impartir nostre grace. Pour quoy nous, ce considéré, inclinans à la suplicacion et requeste dudit supliant, en faveur des grans et recommandables services qu’il nous a par cy devant faiz, fait et continue chacun jour, et esperons que encores face on temps advenir, à icellui maistre Loys, pour ces causes et autres à ce nous mouvans, avons donné et octroyé, donnons et octroyons de grace especial, par ces presentes, congé et licence de faire, tenir et exercer en sesdiz fiefz, terres et seigneuries de la Brosse Gallegan (sic), de Vielpont de Grifferoux, de Jugni, ou fief Bruneau (sic) et sa maison et apartenances de Thouars, lesdites justice et jurisdicion foncière avec tout droit d’assise sur sesdiz hommes et subgez, demorans en sesdites terres et fiefz dessus declarez, doresenavant et à tousjours, et pour d’icelle justice, juridicion et assise tenir et excercer, y commettre seneschal, juge, sergens et tous autres officiers ainsi qu’il est acoustumé faire en tel cas. Si donnons en mandement, par cesdites presentes, au seneschal de Poitou ou à son lieutenant, et à tous noz autres, etc., que, appellé nostre procureur et tous autres qui pour ce seront à appeller, ilz facent, seuffrent et laissent ledit supliant et ses hoirs, sucesseurs et ayant cause ou temps advenir joir et user plainement et paisiblement de noz presens grace, don, congé, licence et octroy, sans leur faire mettre ou donner, ne souffrir estre fait raison donné, ores ne pour le temps advenir, aucun destorbier ou empeschement au contraire, en quelque manière que ce soit. Car ainsi, etc., nonobstant que par cy devant n’ait acoustumé esdiz fiefz, terre et seigneurie de la Brosse et autres ci-dessus declarés avoir le droit d’assise, et n’y estre tenu et excercé aucune justice et juridicion, ladite coustume d’icellui pays de Thouarçoys et quelzconques ordonnances, mandemens ou deffances à ce contraires. Et affin que ce soit, etc., nous, etc. Sauf, etc. Donné à Saint-Martin de Candé, ou moys d’octobre, l’an de grace mil iiiic lxxvi, et de nostre règne le xvie.

Ainsi signé : Par le roy, les sires d’Argenton, de Bressuire, de Segré

Jacques d’Espinay (ou d’Épinay), chevalier, seigneur de Segré, chambellan de Louis XI, qui lui fit don, par lettres de mai 1478, de la terre et seigneurie de Reugny en Touraine, qu’il avait récemment acquise par échange du comté de Tancarville. (Enreg. au Parl., le 3 juillet 1478 ; Arch. nat., X1a 8607, fol. 146.) La terre de Segré avait été achetée, en 1461, de François II de Montbron, depuis vicomte d’Aunay, qui le tenait de sa femme. (Cf. ci-dessus, p. 99 note. C. Port, Dict. de Maine-et-Loire, t. III, v° Segré.) Jacques d’Épinay était aussi capitaine du château de Saint-Macaire pour le roi, charges que lui confirmèrent Charles VIII, par lettres données à Amboise, le 15 octobre 1483, et Louis XII, par lettres datées de Blois, le 23 décembre 1500. (Vaësen, Lettres de Louis XI, t. VII, p. 88, note.)

et autres presens : De Chaumont. — Visa. Contentor. J. Duban.

MDLXXX Novembre 1476

Rémission octroyée à René de Beauvau, écuyer, familier du duc de Calabre, comte du Maine et vicomte de Châtellerault, demeurant avec lui à Châtellerault, à la suite du meurtre d’Antoine Gazeau, qui faisait partie aussi de la maison du duc. Ils se battaient ensemble à coup de dague, après une violente altercation, et Gazeau était déjà blessé, quand le valet de Beauvau survint et lui asséna sur la tête un coup d’épée à deux mains, dont il mourut sur la place.

AN JJ. 204, n° 175, fol. 109 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 111-115

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de René de Beauvau

René de Beauvau seigneur du Rivau et de la Bessière, fils de Pierre, mort en 1453 des suites des blessures qu’il avait reçues à la bataille de Castillon, et d’Anne de Fontenay, fut aussi, à cause de sa mère, baron de Saint-Cassien en Loudunais. Écuyer de Charles II du Maine, duc de Calabre, capitaine pour ce prince de la ville de Mayenne, il avait épousé en secondes noces Alix de Beauvau sa parente, seconde fille de Louis de Beauvau, seigneur de Champigny et de la Roche-sur-Yon, dont il eut huit enfants. Il mourut le 25 mars 1510. (La Chesnaye-Desbois, Dict. de la noblesse, t. II, p. 749.)

, escuier, aagé de trente et ung an ou environ, contenant que puis aucun temps ença ledit suppliant est demourant avec nostre très chier et amé cousin le duc de Calabre, conte du Maine et seigneur de Chastellerault

Sur Charles II d’Anjou, duc de Calabre, comte de Mortain, vicomte de Châtellerault, etc. Cf. ci-dessus, 41, note.

, et pareillement est demourant avec nostredit cousin feu Anthoine Gazeau

Ce personnage ne semble pas pouvoir être rattaché à la famille Gazeau du bas Poitou dont onze branches sont connues par la généalogie qui en a été publiée récemment par MM. Beauchet-Filleau (Dict. des familles du Poitou, t. IV, p. 15-26). Il y eut d’ailleurs d’autres familles du même nom en Poitou et nous en avons cité plusieurs membres dans notre tome X. (Arch. hist., t. XXXV, p. 89.)

. Entre lequel suppliant et ledit feu Gazeau dès le commencement de leur demeure ont eu tousjours parolles riouteuses et aucunes questions et divisions emsamble, et à cause de ce ou autrement, icellui feu Gazeau et icellui suppliant ont, durant leurdicte demeure, consceu entre eulx hayne et malveillance, et tellement que, le jour et feste monsieur saint Lucas derrenierement passé, entre six et sept heures devers le seoir, ledit suppliant et un nommé Anthoine Valory

Famille originaire de Florence, dont une branche vint s’établir en France dans les dernières années du xive siècle ; elle eut pour auteur Gabriel Valori, attaché à l’hôtel de Louis de France, duc d’Anjou, roi de Naples, dont les descendants restèrent au service de la maison d’Anjou. Antoine, nommé dans le présent acte, était le second fils de Louis Valori, écuyer de Charles Ier, comte du Maine et de Mortain, frère de Louis III, duc d’Anjou, qui fut ensuite maître d’hôtel de ce prince et écuyer de Charles VII et de Catherine de Brisay, d’une famille poitevine. Il épousa Isabeau de Montalembert. Son frère aîné, Georges, était capitaine du château de Melle pour le duc de Calabre en 1473. (Dict. de la noblesse, t. XIX, p. 464.)

, lesquelz se pourmenoyent emsemble en une salle en la maison et hostel appartenant à nostredit cousin audit lieu de Chastellerault, survint en ladicte sale ledit feu Gazeau, qui commança à dire audit suppliant qu’il avoit dit et publié que ses parens estoient mauvais gens d’armes. A quoy respondit icellui suppliant que non avoit, maiz pourroit avoir dit qu’il l’avoit oy dire qu’ilz estoient mauvaiz gens d’armes. Adonc demanda ledit Gazeau qu’ilz estoient. Dont lors ledit suppliant ne lui volut respondre qu’ilz estoient et lui dit qu’il n’en sauroit riens. Et pour cuyder eviter noise, ledit suppliant se mist hors de sa voye et se mist sur le banc de ladicte sale, cuydant à son pouvoir fouyr sa fureur et ire dont il monstroit estre remply. Ce neantmoins icellui feu Gazeau se transporta vers ledit suppliant audit banc, au vis et contre la face duquel il meist par deux ou trois foiz le doy en lui disant qu’ils s’entrebatroyent. Auquel ledit suppliant respondit quant il vouldroit. Et en demonstrant ledit feu Gazeau sa fureur et ire, dist tout incontinent audit suppliant : « A ceste heure. » Maiz lui fut respondu cedit (sic) par icellui suppliant qu’il n’avoit point de dague, et s’il en avoit une comme lui, il feroit ce qu’il vouldroit ; et de fait voulu laisser sa dague et aller où ledit suppliant vouldroit pour avoir discuscion avec ledit suppliant et le oultrager, si possible lui estoit, et en lui disant qu’il ne le craignoit ne sa lignée. Lequel suppliant ausdictes menasses et parolles ne respondit riens ; maiz lui, tout courroussé, despit et esmeu en challeur pour occasion d’icelles, derechef se assist sur le banc de ladicte salle, où il ne fut guyères et d’ilec s’en alla soubz et ès alles dudit lieu de Chastellerault assises près la porte des court et entrée de l’hostel et maison dudit lieu, esquelles seul il se pourmena l’espace de demye heure ou environ. Et ce pendent survint èsdictes halles ung nommé Guillaume, tailleur de robbes et habillemens de nostredit cousin le conte du Maine, auquel il raconta lesdites paroles et menasses et que ledit feu Gazeau l’avoit menassé à batre, maiz qu’il sauroit s’il le batroit ou non. A quoy ledit tailleur lui dit qu’il ne lui feist aucune chose et que l’en cuyde aucunesfoiz batre qui l’en tue. Et ledit suppliant lui respondit qu’il n’avoit point de dague et qu’il ne lui feroit ja mal, s’il ne lui en faisoit. Après lesquelles parolles et ainsi que ledit suppliant se pourmenoit, survint devant l’ostel de Harcourt, près lesdictes porte et halles, Guillemin Frogier, serviteur dudit suppliant, auquel il demanda dont il venoit ; lequel lui respondit qu’il venoit de soupper en certain lieu de la ville, ouquel le page dudit Anthoine Valory lui avoit dit que ledit feu Gazeau [et suppliant] avoient eu noize ensemble et que icellui feu Gazeau l’avait volu tuer et oultraiger. Et après ledit suppliant lui demanda sa dague, laquelle il lui bailla, et la print icellui suppliant, en disant à sondit serviteur qu’il s’en allas, ce qu’il fist, et en quel lieu ledit suppliant ne sut, jaçoit ce que ledit Guillemin lui demanda où il yroit, par ce qu’il lui dit ces motz ou autres semblables : « Là, je ne scay où », sans autres parolles lui dire. Et derechef, après ce que ledit suppliant se commança à pourmener seul comme par avant par lesdictes alles, èsquelles il fut bien une heure ou environ tout esmeu en son couraige. Et tantost après ledit feu Gazeau, acompaigné du maistre d’ostel de nostredit cousin et de Briart de Videux et autres issit hors de[s] hostelz d’icellui nostre cousin le conte du Maine, en allant tout droit audit hostel de Harcourt. Et alors l’apperceust ledit suppliant et incontinent s’en issist hors de dessoubz lesdictes hales, en tirant sa dague du fourreau, et rencontra ledit Gazeau à deux ou trois pas de la porte dudit hostel de Harcourt, de laquelle il lui bailla et donna ung cop par l’un des coustez soubz la memelle, eticellui donné, dist audit Gazeau : « Deffent toy, ribault ! » Lequel Gazeau adonc marcha contre ledit suppliant et tira sa dague, et d’icelle le voult frapper et oultraiger, maiz ledit suppliant se couvrit de sadicte dague, sur laquelle icellui Gazeau frappa tellement qu’il la lui rompit, et celle dudit Gazeau cheut à terre, ne scest ledit suppliant s’il l’en bleça à la main ledit Gazeau. Et pendant ce qu’ilz s’entrebatoient survint et arriva ledit Frogier, serviteur dudit suppliant, dont il venoit riens n’en savoit, avec une espée à deux mains, dont tout esmeu il frappa ledit Gazeau sur la teste tellement qu’il cheut à terre presque mort. Neantmoins il se releva, maiz desdiz cops il est décédé incontinent ou peu de temps après. Et parellement frappa ung autre copt ledit varlet dudit suppliant sur le serviteur dudit feu Gazeau de sadicte espée, dont il lui avalla l’espaule ; toutes-voyes il en est guery ou du moings en espouer de guerison et n’y a plus de dangier en son cas. Pour occasion desquelz cas ledit suppliant est en franchise audit lieu de Chastellerault, où il est en voye de n’en bouger et y finir durement et miserablement ses jours, se noz grace et misericorde ne lui estoyent sur ce imparties, si comme il dit, en nous humblement requerant que, attendu que ledit feu Gazeau a esté premier agresseur, et aussi que de tout son temps il a esté de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans oncques maiz avoir esté actaint d’aucun villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise lui quicter, pardonner et remettre ledit cas et sur ce lui impartir nostre grace et misericorde. Pour quoy nous, ce consideré, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, etc. Aux seneschal de Poictou, bailli de Touraine, des ressors exempcions d’Anjou et du Maine et à tous, etc. Donné au Plessis du Parc lez Tours, ou moys de novembre, l’an de grace mil iiiic soixante seize, et de nostre regne le seziesme.

Ainsi signé : Par le roy, Ja. Beriseau. — Visa. Contentor. Duban.

MDLXXXI Novembre 1476

Rémission accordée à Guillemin Frogier, serviteur de René de Beauvau, écuyer à Châtellerault, qui s’étant porté au secours de son maître, alors aux prises avec un nommé Gazeau, avait, d’une épée à deux mains, frappé celui-ci mortellement et blessé grièvement son serviteur.

AN JJ. 204, n° 171, fol. 107 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 115-118

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Guillemin Frogier, serviteur de René de Beauvau, escuier, contenant que le jour et feste monsieur saint Lucas, derrenier passé, lui estant en la ville de Chastellerault, appartenant à notre très cher et amé cousin le duc de Calabre, conte du Maine et seigneur dudit Chastellerault, ou service dudit de Beauvau, son maistre, lui fut rapporté et dit par le page de ung nommé Anthoine Valori telles parolles ou autres semblables en substance : « Que faites-vous là ? Vostre maistre est en la salle, qui n’a verge ne baston, et Gazeau le veult occire et tuer. » Ausquelles parolles ledit suppliant qui amoist son maistre et de long temps l’avoit servy et lui estoit bon et loyal serviteur, incontinent s’en partit dudit lieu où il souppoit et s’en vint en l’ostel et maison de nostredit cousin audit lieu de Chastellerault, cuidant trouver sondit maistre et se aisséa monter en la salle dudit hostel, en laquelle il ne monta point, obstant que l’un des pages lui dist et demanda où il alloit, et que sondit maistre n’estoit plus lassus en ladicte salle et s’estoit descendu. Adonc ledit suppliant s’en retourna et alla droit en l’ostel près ladicte maison appelé Harcourt, et lui arrivé à la porte dudit hostel, ledit de Beauvau, son maistre, qui seul se pourmenoit en la halle dudit lieu de Chastellerault et près ladicte maison et hostel de Harcourt, l’aperceust et l’appella en lui disant : « Que me voullez-vous ? » Lequel suppliant dist et raconta à sondit maistre les parolles et ce que lui avoit dit et rapporté le page dudit Anthoine Valori, c’est assavoir que ledit feu Gazeau l’avoit voulu occire et tuer. Et lors lui demanda sa dague, laquelle il lui bailla et incontinent d’ilec s’en alla seoir sur ung siege, devant la porte de la maison de nostredit cousin, disant au page de sondit maistre qu’il alast dire au Poictevin qui lui envoyast la dague qui lui avoit promise, ce que fit ledit paige. Et lui apporta icellui paige une dague autre que celle que ledit Poictevin lui avoit promise, laquelle il donna audit paige. Maiz en apportant icelle, ledit paige passa par le logiz de sondit maistre, auquel il print et apporta à icellui suppliant son espée à deux mains, laquelle il print et s’en alla raassoir audit siège devant ladicte porte ; et après ce, porta sadicte espée en l’estable de l’escuierie de notre très chère et amée cousine la duchesse de Calabre

Jeanne de Lorraine, fille aînée de Ferry II de Lorraine, comte de Vaudémont, et d’Yolande d’Anjou, reine de Naples, Sicile et Jérusalem, mariée à Charles II d’Anjou, comte du Maine, duc de Calabre, par contrat passé à Troyes, le 21 janvier 1473, fit son testament à Aix, le 22 janvier 1480, léguant tous ses biens à son mari, et mourut le 25 du même mois. (Le P. Anselme, Hist. généal., t. I, p. 234.)

, femme de nostredit cousin, et d’ilec s’en retourna audit siège, auquel il ne arresta gueres, et ala querir sadicte espée en ladicte estable, de paour qu’elle ne lui fut amblée, et de rechief se vint rasseoir en icellui siège au devant ladicte porte. Et si tost qu’il fut assis, passa ledit feu Gazeau et autres venans de l’ostel de nostredit cousin par ladicte porte devant ledit siège. Lequel feu Gazeau s’en ala tout droit oudit hostel de Harcourt, auquel feu Gazeau ledit suppliant alors n’avoit aucun vouloir de lui meffaire ni le oultrager en sa personne. Et lui passé, aucun peu d’espace de temps après, icellui suppliant oyt au devant de ladicte porte et dudit siège le bruit dudit feu Gazeau et de ung sien certain serviteur qui se entrebatoient avec sondit maistre et donnoient l’un à l’autre des coups de leurs dagues près ladicte halle ou illec environ. Ledit suppliant d’ilec, tout esmeu à cause de ce, se partist et s’en alla audit bruit ; et lui ainsi esmeu aperceult et vist que la dague de sondit maistre estoit rompue. A ceste occasion et pour le grant esmeuvement dont il estoit féru et surprins, non meditant en autre chose, donna de sadicte espée audit feu Gazeau sur la teste ung coup tant qu’il peut, tellement que dudit cop la lui fendit et cheut à terre tout mort, ou guères ne s’en failloit. Et tantost après donna ledit suppliant de sadicte espée ung autre cop au serviteur d’icellui feu Gazeau sur l’espaule, laquelle d’icellui cop il lui avala, maiz il en est guery ou en espoir de garison. A l’occasion duquel cas ledit suppliant est en franchise, où il est en voye de non bouger et y finir durement et miserablement ses jours, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, etc. Pour quoy, etc., audit Guillemin Frogier avons quicté, remis et pardonné, etc. Aux seneschal de Poictou, bailli de Touraine, des ressors et exempcions d’Anjou et du Maine, et à tous, etc. Donné au Plessis du Parc lez Tours, ou moys de novembre, l’an de grace mil cccc. soixante et seize, et de nostre règne le seiziesme.

Ainsi signé : Par le roy. Ja. Berizeau.

Sic ; corr. « Berziau ». On trouve le nom de Jacques Berziau, notaire et secrétaire du roi, au bas de plusieurs actes de la chancellerie des années 1476 à 1479.

— Visa, Contentor. Duban.

MDLXXXII 1476 (novembre ou décembre)

Rémission octroyée à Etienne Maubec, de la paroisse de Maillé. Emprisonné à Maillezais pour avoir volé neuf écus d’or en l’église de Maillé, au préjudice du fabricien, Jean Maréchal, il avait été relâché après avoir restitué la somme, donné satisfaction à partie et payé les dépens, puis il s’était fait absoudre du sacrilège par l’official de Maillezais. Ayant été malgré tout repris par la justice royale dudit lieu, il avait trouvé moyen de rompre sa prison et de s’évader.

AN JJ. 204, n° 183, fol. 114 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 118-120

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Estienne Maubec, povre homme, chargé de femme et enfans, de la perroisse de Maillé, contenent que, ou moys d’aoûst derrenier passé, il avoit ung procès à l’encontre d’un nommé Jehan Rousseau pour la somme de quinze solz tournoiz, lesquelz il devoit audit Rousseau. Lequel Rousseau ne pouvoit bonnement prouver à l’encontre dudit suppliant, sinon par ung nommé Jehan Mareschal, fabrisseur de ladicte perroisse de Maillé. Lequel Mareschal rencontra ung jour ledit suppliant et lui dit telles parolles : « Viença, tu sces bien que tu doiz à Jehan Rousseau quinze soulz, que ne les lui paiez-tu ? Si tu ne les lui payes, je te feray perdre ta cause. » A quoy ledit suppliant respondit audit Mareschal autres telles parolles : « Si tu la me faiz perdre, tu te perjureras. » A cause desquelles parolles ainsi dictes entre eulx, ledit suppliant, desplaisant d’icelles, sachant que ledit Mareschal, qui estoit, comme dit est, fabriceur de ladicte perroisse, avoit les clefz de l’eglise d’icelle, s’en alla ce jour mesmes en la maison dudit Mareschal, en laquelle il desjeuna avé plusieurs autres gens d’ilec environ, et en desjunant pensoit en lui-mesmes, pour soy venger dudit Mareschal, commant il pourroit veoir les clez de ladicte eglize et fit tant qu’il les trouva ; lesquelles il print, et, quant il en fut saisi, attendit qu’il fut nuyt, et la nuyt venue, s’en alla en ladicte esglize, et d’icelles clez ouvrit la porte et entra dedans ladicte eglize. Et quant il fut dedans, il rencontra ung couffre ouquel estoit l’a[r]gent de la fabrice de ladicte eglize, lequel il trouva façon de l’ouvrir et l’ouvrit, et en icellui coffre trouva la somme de neuf escuz d’or, lesquelz il print et empourta. Et ce fait, refferma ladicte eglise et s’en alla vers la maison dudit Mareschal, gecta lesdictes clez de ladicte eglize et s’en alla chez lui. Et le lendemain ledit suppliant rencontra l’ung de ses voysins, auquel il dit : « Le Mareschal me menassa yer de faire perdre ma cause contre Jehan Rousseau, maiz si je la pers, ce sera à ses despens, car j’ay neuf escuz d’or de lui, que j’ay prins en ung couffre dedans l’eglize, qui sont de la fabrice, lesquelz il faudra bien qu’il rende. » Lesquelles parolles oyes par sondit voysin cedit jour mesme, se tira devers ledit Mareschal et luy compta tout le cas comme ledit suppliant lui avoir compté. Lequel Mareschal de ce adverty, se tira par devers la justice du lieu et cellui jour mesmes le fit prendre et constituer prisonnier ès prisons de Mallezais, et illecques le fit tenir prisonnier bien l’espace de deux moys ou environ et ne saillit hors jusques à ce qu’il eust fait satisfacion de ladicte somme de neufs escuz d’or, ce qu’il fit dès le jour qu’il fut prins et paya tous les fraiz de justice, dont les officiers dudit lieu leur baillèrent leurs quitances. et puis le misdrent hors desdictes prisons. Et ce fait fut absoulz de l’official dudit lieu de Mallezays, à cause de ce qu’il avoit prins ladicte somme dedans ladicte eglize comme sacrileige. Maiz cellui jour mesmes vint ung de noz sergens dudit lieu, lequel le fit prisonnier par auctorité de justice èsdictes prisons de Maillezaiz et illec fut detenu prisonnier par l’espace d’ung moys ou environ, dedans lesquelles il mouroit de fain et de soif et y estoit durement traité, pour ce qu’il n’y avoit personne qui lui pourchassast, obstant sa pouvreté, et n’en tenoit justice compte. Par quoy voyant ce, il a trouvé façon de briser lesdictes prisons et de soy eschapper d’icelles et s’en est fouy on ne scet où. A l’occasion desquelz cas et choses dessusdictes, doubtant rigueur de justice, il ne s’ozeroit jamaiz trouver au pays ne y converser avec sa pouvre femme et enfans, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, si comme il dit, en nous humblement requerant que, attendu ce que dit est, mesmement qu’il a satisfait à partie et a été absolz comme dit est et qu’il ne fut jamaiz actaint ne convaincu d’aucun villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise sur ce nosdictes grace et misericorde lui impartir. Pourquoy, etc. Au seneschal de Poictou ou à son lieutenant et à tous autres, etc. Donné

Sic. Le scribe s’est arrêté là et a omis la date et les signatures de ces lettres de rémission. Les autres actes enregistrés dans le voisinage immédiat de celui-ci étant de la fin de l’année 1476, on peut lui attribuer la date de novembre ou de décembre 1476.

MDLXXXIII Décembre 1476

Lettres données à la requête d’Itier Beslon, écuyer d’écurie du roi, amortissant en faveur du chapitre de Saint-Hilaire-le-Grand une rente annuelle de cent livres, acquise ou à acquérir.

AN JJ. 204, n° 18, fol. 9 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 121-124

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre chier et bien amé escuier d’escuyrie Ythier Beslon

Cette famille, depuis longtemps éteinte, était probablement d’origine anglaise, disent MM. Beauchet-Filleau, et l’on cite plusieurs de ses membres parmi les vassaux de la baronnie de Mirebeau, dès avant 1356. Itier Beslon, écuyer, seigneur de Boisfirmin, écuyer d’écurie de Louis XI, obtint du roi des lettres, lui permettant d’entourer son hôtel de fortifications. Marié à N. de La Touche, il en eut Geoffroy, qui lui succéda dans la terre de Boisfirmin, et Françoise, femme d’Yves de Conflans. Il vivait encore le 18 novembre 1483, date d’un arrêt de défaut rendu au Parlement dans un procès civil qu’il y avait intenté, comme appelant d’une sentence du conservateur des privilèges de l’Université de Poitiers, contre Antoine Frétart, écuyer, et Perrette de Billy, sa femme. (Arch. nat., X1a 4.825, fol. 7.) Itier était le troisième fils de Guillaume Beslon, chevalier, seigneur de Ringères, dont il fit aveu au chapitre de Saint-Hilaire-le-Grand, le 10 septembre 1422. Son frère aîné, nommé aussi Guillaume, sr de Ringères, avait épousé Louise de Montejean, mais décéda sans enfants en 1474. Jean Beslon, écuyer, sr de la Poupardière, était le second fils de Guillaume Ier ; il mourut avant le 27 mars 1470, laissant un fils et deux filles de Mathurine Vigeron, sa femme, fille de Jean, écuyer, sr de Chiré, et de Charlotte de Marconnay, qu’il avait épousée le 12 août 1457. (Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. I, p. 505.) Ce Jean étant en procès avec le chapitre de Saint-Hilaire-le-Grand au sujet du droit de pêche dans l’Ausance à Quinçay. (Arch. de la Vienne, G. 390), et ayant fait assassiner le meunier de ce lieu, Pierre Chevalier, avait obtenu des lettres de rémission en 1468. Nous n’en avons pas trouvé le texte dans les registres du Trésor des chartes, mais leur enregistrement donna lieu au Parlement de Paris à une vive opposition de la part des parents de la victime et des officiers de la sénéchaussée. Le décès du meurtrier arriva au cours du procès, dont nous avons rapporté les phases, à propos de Guillaume Macé, fermier de la prévôté de Poitiers, envoyé pour le prendre au corps et contre lequel il s’était mis en état de rébellion. (Voy. notre vol. précédent, p. 159, note.)

contenant que, puis aucun temps ença, feu Guillaume Beslon, son père en son vivant, pour aucuns ses grans et urgens affaires vendi et transporta à noz chiers et bien amez les doyen, tresorier et chappitre de Saint Illaire le Grant de Poictiers la somme de dix sept escuz d’or et cinq solz tournois de rente annuelle et perpetuelle, laquelle somme il leur assist et assigna sur tous ses biens a partir (sic) d’iceulx et dont ilz ont tousjours deppuis joy et usé. Et pour ce que ledit suppliant deschargeroit volontiers de ladicte rente les biens de la succession de sondit feu père qu’il tient et possède de present, il s’est deppuis tiré par devers lesdiz doyen, tresorier et chappitre, et leur a supplié et requis instamment qu’ilz voulsissent reprandre de lui le fort

Sic pour « sort principal ».

principal qu’ilz payèrent et baillèrent de ladicte rente et les arrerages qui en estoyent deuz et d’icelle le descharger. Lesquelz, en obtemperant à sadicte requeste, ont esté contens et d’accord et lui ont promis de ce faire, moiennent toutesvoyes que ledit suppliant feroit tant envers nous que nous leur admortirions d’autres rentes et revenues qu’ilz ont acquises ou qu’ilz pourront acquerir jusques à la somme de cent livres tournois par an. Et pour ce nous a ledit suppliant très humblement supplié et requis qu’il nous plaise sur ce impartir noz grace et liberté. Pour ce est-il que nous, desirans traiter favorablement les nobles de nostre royaume et les relever et descharger de rentes et de charges, inclinans liberalement à la supplicacion et requeste dudit Ytier Beslon, suppliant, en faveur et consideracion des bons et agreables services qu’il nous a faiz par cy devant, par bien long temps ou fait de noz guerres et autrement en plusieurs manières, et esperons que encores face ou temps avenir, desirans aussi le divin office de nostre mere saincte eglize estre de bien en mieulx fait et continué et augmenté, mesmement en ladicte eglise, qui est de fondacion royal, et de laquelle sommes protecteur et garde et deffenseur, et affin que lesdiz doyen, tresorier et chappitre soient tousjours plus enclins de prier Dieu pour nous, nostre posterité et lignée et la bonne union, paix et transquilité de nostre royaume, ausdiz doyen, tresorier et chappitre de ladicte eglise Monsieur Saint Illaire de Poictiers avons octroyé et octroyons de grace especial par ces presentes, voulons et nous plaist qu’ilz puissent et leur loysse, oultre et par dessus les autres rentes, heritaiges, revenues et possessions qu’ilz tiennent et possèdent, qui leur ont esté par noz predecesseurs ou par nous admorties, en deschargeant toutesvoyes ledit suppliant desdiz dix sept escuz d’or et cinq solz tournois de rente, tenir et posséder d’autres rentes, heritaiges et revenues et possessions qu’ilz ont acquises par cy devant ou qu’ilz pourront acquerir, jusques à la valleur et estimacion de cent livres tournois de rentes ou revenu par chacun an, comme amorties et à Dieu et à la dicte eglize dediés (sic), sans ce que, ores ne pour le temps avenir, ilz soient ne puissent estre tenuz ou contraings de les mettre ou vuyder hors de leurs mains, ne pour ce payer à nous ne à noz successeurs roys de France aucune finance ou indempnité, et laquelle finance nous pourroit estre pour ce deue, nous, en faveur et consideracion que dessus, à quelque somme ou estimacion qu’elle soit et puisse monter, leur avons donnée et quictée, donnons et quictons, de nostre plus ample grace, par cesdictes presentes, signées de nostre main. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers, aux senneschaulx de Poictou et de Xaintonge et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leur lieuxtenens ou commis, presens et avenir, et à chacun d’eulx, si comme à lui appartiendra, que de noz presens, grace, octroy et admortissement et choses dessusdictes, et à chacune d’icelles ilz facent, seuffrent et laissent lesdiz doyen, tresorier et chappitre de Saint Illaire de Poictiers et leurs successeurs joyr et user perpetuellement, plainement et paisiblement sans leur faire mettre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun destorbier ou empeschement ; ainsois se fait, mis ou donné leur estoit, le mettent ou facent mettre tantost et sans delay à plaine delivrance et au premier estat et deu. Car ainsi nous plaist-il estre fait, nonobstant que la valleur de ladicte finance ou indempnité ne soit cy autrement speciffiée et declairée, que de ce descharge ne soit levée par nostre Tresor, et quelzconques autres ordonnances, restrinctions ou deffences à ce contraires. Et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit, et l’autruy en toutes. Donné au Plesseys du Parc lez Tours, ou moys de decembre, l’an de grace mil cccc. soixante seize, et de nostre règne le seziesme.

Escript au marge : Par le roy, le sire du Lude, gouverneur du Dauphiné et autres presens. Ainsi signé : M. Picot. — Visa. Contentor. Duban.

MDLXXXIV Décembre 1476

Lettres d’amortissement des rentes acquises par l’abbaye de Charroux des deniers qu’elle tenait du roi en reconnaissance du don qu’elle lui avait fait d’un fragment de la vraie Croix, présent de Charlemagne à ladite abbaye.

AN JJ. 204, n° 23, fol. 15 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 124-129

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir nous avoir receu l’umble supplicacion de noz chers et bien amez les religieux, abbé, couvent et officiers de l’abbaye de Charroz

L’abbé de Charroux était alors Louis Fresneau, neveu et successeur de Jean Chaperon, avant le 12 mars 1474, n.s., qui était en même temps prieur commendataire de Montilliers en Anjou, et décéda le mercredi des cendres 21 février 1504. (D. P. de Monsabert, Chartes et documents pour servir à l’hist. de l’abbaye de Charroux, t. XXXIX des Arch. hist. du Poitou. Introduction, p. xliii.) Nos lettres d’amortissement de décembre 1476 ne se trouvent pas dans cet important recueil. A la date du 13 janvier 1480, n.s., il contient le procès-verbal de la remise entre les mains des religieux de Charroux de six lampes d’argent, destinées à être suspendues et entretenues à perpétuité devant le Saint-Vœu, données par Louis XI à l’abbaye, par l’intermédiaire des maire et échevins de Poitiers. (Lettres du roi à ceux-ci, datée du Plessis-du-Parc, le 7 janvier précédent, publiée : 1° par Thibaudeau, Hist. du Poitou, t. I, p. 251 ; 2° dans les Mémoires de la Société des Antiquaires de l’Ouest, t. I, 1836, p. 258 ; 3° par B. Ledain, Arch. hist. du Poitou, t. I, p. 185 ; 4° par J. Vaësen, Lettres de Louis XI, t. VIII, p. 106.) Nous pouvons ajouter que l’on conservait dans les layettes du Trésor des chartes deux actes scellés, l’un de quatre sceaux, l’autre de deux, émanant de l’abbé et du couvent de Charroux ; par le premier ils reconnaissaient avoir reçu les six lampes en question, « lesquelles sont du poix de six cens vingt six marcs quatre onces d’argent » et s’engageaient à ne jamais les aliéner ; par le second, ils déclaraient avoir déposé dans leur trésor les lettres de don du roi, aux conditions duquel ils promettaient de se conformer. La place des deux actes, aujourd’hui en déficit, serait le carton J. 389, nos 12 et 13 ; on ne les connaît que par la mention de l’inventaire de Dupuy.

Nous citerons, à cause de leur intérêt spécial, deux procès criminels soutenus, en même temps, par Louis Fresneau, abbé de Charroux. Dans le premier, il accusait Jean Bonnin, dit Messignac, et Jean Laurent, tous deux écuyers, hommes d’armes de l’ordonnance, de la compagnie de Louis de Beaumont, sr de la Forêt, puis de celle du maréchal de Loheac, d’avoir pris par surprise le château de Mauprevoir, appartenant à l’abbaye, de l’avoir mis à sac et d’avoir frappé et grièvement blessé le capitaine, et de plus d’avoir maltraité, battu et pillé les pauvres habitants du village. C’était en 1473, disaient les inculpés, lors d’une expédition dans le comté d’Armagnac, à laquelle ils devaient prendre part avec le sr de la Forêt ; leurs gens ayant été logés à Mauprevoir avaient été victimes des mauvais traitements de ceux du château, qui avaient voulu les faire déguerpir de force et les avaient assaillis au cri de : « Vive la Marche ! Sus à ces traîtres qui vont sur les Armignais ! » C’était en se défendant et par représaille qu’ils avaient commis les excès qu’on leur reprochait, en les exagérant. Bonnin et Laurent prétendaient, d’ailleurs, qu’ils n’étaient pas présents à ces violences. Ajournés, après information, devant le sénéchal de Poitou, ils avaient fait défaut et relevé appel au Parlement. (Actes du 28 avril 1478, du 1er décembre 1478, plaidoiries du 12 mai 1480 ; Arch. nat., X2a 42, 43 et 44, aux dates.) Dans le second procès, Louis Fresneau poursuivait, en matière d’ « excès et attentats », Pierre de Montfriant, châtelain de Charroux, Jean de Lavau, assesseur du sénéchal de la Marche, et plusieurs autres officiers de Pierre de Beaujeu, comte de la Marche, qui avaient enfreint les privilèges et droits de l’abbaye, battu ses sujets, pris leurs biens, etc. (Plaidoiries des 6 et 9 août 1479 ; X2a 43.)

en Poictou, estant de fondacion royal, contenant que puis aucun temps ença nous leur avons donné, aumosné et fait bailler et delivrer certaine somme de deniers pour convertir et employer en l’achapt et acquisition de rentes et revenues au prouffit et augmentacion d’icelle abbaye, et ce pour recongnoissance et recompensacion de certaine grant partie du fust de la vraye et digne croix Nostre Seigneur Jhesu Crist, que feu de bonne memoire monseigneur saint Charlemaigne, nostre predecesseur roy de France, premier et principal fondateur de ladicte eglise et abbaye, avoit donnée et laissée à icelle abbaye, et laquelle, lui vivant, il portoit sur lui toutes et quantes foiz qu’il alloit en bataille contre les mescreans ou autres ses adversaires, pour la conservacion de sa personne, et par les vertu et merites de laquelle il fut en sondit vivant tousjours preservé et gardé de sesdiz ennemys et adversaires, et à l’encontre d’eulx fist plusieurs grans et belles conquestes et eust de grans victoires dignes de perpetuelle memoire ; laquelle vraye Croix nous avons à nostre devocion voulu avoir et la tenons continuellement près de nous pour la conservation de nostre personne. Lesquelz supplians, pour obeir à nostre bon vouloir et plaisir nous l’ont voulentiers et liberalement baillée et delivrée, et de ladicte somme que leur avons fait bailler et delivrer ont acquis et achepté certaines rentes et revenues assises en aucuns lieux près ledit lieu de Charroz et mesmement en la ville et chastellenie dudit Charrotz, de Jaques d’Armaignac, duc de Nemours et conte de la Marche

Jacques d’Armagnac, duc de Nemours, comte de la Marche, de Pardiac, etc. (Cf. notre volume précédent, p. 276.) A la date de ces lettres, il était détenu et son procès s’instruisait. On sait que déclaré coupable de lèse-majesté, il eut la tête tranchée aux Halles de Paris, le 4 août 1477. Tous ses domaines ayant été confisqués. Louis XI disposa du comté de Basse-Marche en faveur de son gendre Pierre de Bourbon, sire de Beaujeu.

, certaines rentes et revenues qui se montent et peuvent valloir chacun an la somme de cent livres tournois ou environ. Et aussi ont acquis des deniers de ladicte abbaye aucunes autres rentes, revenues et heritages et ont encores entencion d’en acquerir d’autres ; maiz ilz doubtent que, si lesdictes rentes, revenues et heritages par eulx acquises ou qu’ilz pourront acquerir ne leur estoient par nous admorties, que on les voulsist ou temps avenir contraindre à les mettre et vuyder hors de leurs mains ; et pour ce nous ont fait supplier et requerir nostre grace et provision convenable leur estre sur ce faicte et impartie, très humblement requerant icelle. Pourquoy nous, les choses dessusdictes considerées, qui sommes protecteur, garde et deffenseur de ladicte eglise et abbaye, qui, comme dit est, est de fondacion royal et fondée par ledit saint Charlemaigne, nostre predecesseur roy de France, desirans par ce le bien augmentacion et acroissement d’icelle, afin que le divin service soit de mieulx en mieulx continué en ladicte eglise et que lesdiz religieux, abbé, couvent et officiers aient mieulx de quoy vivre honnestement ou temps advenir et pour certaines autres grans, justes et raisonnables causes et consideracions à ce nous mouvans, et mesmement pour la grant, singuliere et entière devocion que nous avons tousjours eue et avons à la saincte et digne Circoncision et au saint veu et aux autres beaulx et dignes reliquières qui sont en ladicte eglise, ausdiz supplians avons octroyé et octroyons de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, voulons et nous plaist, par ces presentes, qu’ilz puissent et leur loise tenir et posséder lesdiz heritages, cens, rentes et revenues par eulx acquis dudit Jacques d’Armagnac, assis audit lieu de Charroz et es environs jusques à la valleur et estimacion de cent livres tournois par an, et oultre et par dessus iceulx d’autres heritages, rentes et revenues, tant de ceulx qu’ilz ont jà acquis par cy devant que d’autres qu’ilz pourront acquerir ou temps avenir, quelque part qu’ilz soient situez et assis en nostre royaume, à la valeur et estimacion de troys cents livres tournois, qui sont ensemble iiiic livres tournois de rente par chacun an oultre et par dessus les autres heritages, cens, rentes et revenues qu’ils tenoient et possédoient par cy devant, et lesquelz leur avoient esté admortiz par noz predecesseurs et nous, et lesquelz heritages, cens, rentes et revenues quelz conques ainsi par eulx acquis ou qu’ilz pourront acquerir jusques à ladicte valleur de iiiic livres tournois par an, nous leur avons dès à present comme alors admorties et admortissons, à Dieu et à nostre dicte eglise et abbaye dediées et dedions par cesdictes presentes, sans ce que eulx ne leurs successeurs soient ne puissent estre contrains, ores ne pour le temps avenir, à les mettre ne vuider hors de leurs mains, soubz couleur des ordonnances royaulx faites sur le fait des francs fiefz et nouveaulx acquestz ne autrement, pour quelque cause ou occasion que ce soit ou puisse estre, ne que ilz soient, ores ou pour le temps avenir, pour iceulx tenuz paier à nous ne à noz successeurs roys de France aucune finance ou indempnité, et laquelle finance, à quelque somme qu’elle soit ou puisse monter, nous leur avons, en faveur et consideracion que dessus, donnée, quictée et aumosnée, donnons, quictons et aumosnons par ces presentes signées de nostre main. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx les gens de noz comptes et tresoriers, aux seneschaux de Poictou, Xaintonge, Limosin, gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans ou commis, presens et advenir, et à chacun d’eulx, si comme à lui appartendra que de noz presens grace, voulenté, admortissement, don, quictance et choses dessusdictes et chacune d’icelles ilz facent, seuffrent et laissent lesdiz supplians et leurs successeurs oudit couvent joir et user perpetuellement, plainement et paisiblement, sans leur faire, mettre ou donner, ne souffrir estre fait mis ou donné, ores ne pour le temps avenir, aucun arrest, destourbier ou empeschement, ainçoys, se fait, mis ou donné leur estoit, le mettent ou facent mettre à plaine delivrance et au premier estat et deu, incontinent et sans delay. Car ainsi nous plaist il estre fait, non obstant quelzconques ordonnances, restrincions, mandemens ou deffenses à ce contraires. Et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours maiz, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné au Pleissis du Parc lez Tours, ou moys de decembre, l’an de grace mil cccc. soixante et seize, et de nostre règne le xvime.

Ainsi signé dessoubz le reply desdictes lettres : loys, et dessus ledit reply : Par le roy. M. Picot. — Visa. Contentor. Rolant.

MDLXXXV Décembre 1476

Lettres d’abolition en faveur de Jean Gaudit, valet de chambre du duc de Calabre, qui avait pris part, avec son maître et Renaud de Velort, à diverses conspirations contre le roi.

AN JJ. 204, n° 28, fol. 18 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 129-134

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Gaudit, naguyeres serviteur et varlet de chambre de nostre cousin le duc de Calabre

Charles II d’Anjou, comte du Maine et de Mortain, duc de Calabre, vicomte de Châtellerault, sur lequel voy. ci-dessus, p. 41 et note.

, contenant que, durant le temps qu’il estoit ou service de nostredit cousin, il lui a bien voulu obeyr et complaire en toutes les manières qu’il lui estoit possible, sans y espargner personne, et tellement que en ce faisant il nous a cuydé pourter dommaige et inconvenient, et pensant que icellui nostre cousin lui deust faire les biens qu’il lui avoit promis et deliberé en ce faisant de le servir, a fait et commis envers nous plusieurs maulx, crimes, delitz et malefices dont les principaulx et la plus grant partie est cy dedans declairé. C’est assavoir que icellui nostre cousin, ung jour entre autres, lui commanda bailler à lui et à Regnault de Velourt

Il est question de ce personnage dans les lettres d’abolition en faveur du duc de Calabre, et dans celles octroyées à Pierre de Dercé (ci-dessus, p. 74.)

les seaulx dont il avoit acoustumé de seeller, lesquelz ledit suppliant gardoit ; ce que ledit suppliant fit par deux ou trois fois. Toutesvoyes ne savoit il lors pourquoy c’estoit à faire. Maiz une foiz ledit Regnault de Velourt lui dit qu’il failloit qu’il serchast du parchemin et de la cire, et lui dit nostredit cousin qu’il fît tout ce que ledit de Velourt lui commanderoit, ce qu’il fit, et bailla du parchemin et de la cire ; et lors apperceut bien que c’estoit pour faire les seelez de Bretaigne contre nous. Et incontinent s’en vint à ung nommé Castillon et lui demanda s’il y avoit long temps que ceste matière se demenoit et il lui dit que ouy et que icellui nostre cousin devoit estre grant seigneur et que le duc de Bretaigne lui devoit aider et sceut de vray que nostredit cousin avoit baillé son seellé audit duc de Bretaigne, et que ledit duc de Bretaigne lui avoit baillé le sien ; et dit icellui nostre cousin audit suppliant que les Anglois descendroient de brief et que nous aurions beaucoup d’affaires. Et lui dit nostredit cousin qu’il ne se soussiast de riens et que une foiz le feroit d’or

Sic. Le scribe a peut-être omis ici quelques mots.

 ; maiz pour ce qu’il se doubtoit lui pria qu’il le servist bien et qu’il se donnast bien garde de sa personne et qu’il secouast bien le crevechief (sic) et autres linge, quant il le lui bailleroit. Ce que ledit suppliant promist et jura faire ; et toust après ledit Regnault de Velourt, qui ne serchoit que de l’asseurer et affermer à mal faire, lui demanda se nostredit cousin alloit en Bretaigne, s’il yroit ; à quoy il lui respondit que oy. Et commencèrent à dire l’un à l’autre plusieurs parolles mal sonnans, en disant, entre autres choses, que qui le vouldroit veoir, ne nous ne autre, nostredit cousin de Calabre auroit Angiers, et que nous aurions, avant qu’il fust guères de temps, beaucoup à souffrir et que les Angloix descendroient et que pour lors par sang Dieu, il y en avoit qui vouloient brouller leur maistre envers nous, et que s’ilz estoient congneuz et ilz estoient estrappés, les testes en seigneroient. Et à ce faire et toutes autres choses estoit ledit suppliant deliberé de servir nostredit cousin contre nous et tout autre, et sceut bien que Poncet de Rivière

Poncet de Rivière a été l’objet de deux notices développées, dans notre t. X (Arch. hist., XXXII), p. 104, et dans notre dernier volume, p. 264 et suiv. ; elles seront complétées ci-dessous, à l’occasion des lettres de Louis XI, de mars 1478, lui permettant de relever les fortifications de Château-Larcher.

et Gilbert de Graçay

Sur Gilbert de Graçay, cf. ci-dessus, p. 46, note.

menoyent les trafiques desdiz seelez d’entre nostredit cousin et ledit duc de Bretaigne, et que pour ce faire ilz escripvoient des lettres l’un à l’autre, bien souvent en petitz pelotons de cire gros comme une noix. Aussi sceut bien que ung nommé Brabant alloit souvent en Prouvence devers nostredit oncle le roy de Cecille ; toutesvoyes ne sceut point les causes.

Pareillement seut que, du temps que ledit Regnault de Velourt estoit prisonnier, ledit Brabant eust intelligence avec aucuns des archers de nostre garde, maiz ne sceut point si c’estoit pour faire eschapper icellui Regnault ou pour quoy faire. Sceut bien aussi que ledit Castillon faisoit les voyages, allées et venues devers nostredit cousin le duc de Bretaigne, et le lui disoit icellui Castillon ; et oyt dire ung jour à icellui nostre cousin, lui estant à Sablé, que les Bretons devoient sortir à une Nostre Dame, maiz ne sceut quelque part, si aucun qu’il doubtoit que ce fust vers Angers, pour ce que ledit Castillon lui avoit dit que l’artillerie desdiz Bretons estoit chargée et qu’elle tenoit plus de deux lieues et que Gilbert de Graçay devoit venir avec dix ou quinze mille hommes ès lieux où nostredit cousin de Calabre pourroit avoir à besongner. Savoit bien aussi que ung nommé Gilbert de Verue

Le personnage paraît être le même que celui qui est nommé Guillaume de Verrue, dans l’abolition octroyée au duc de Calabre (ci-dessus, p. 49).

envoyoit aucunes foiz devers icellui nostre cousin, et doubtoit que ce feust de par feu le connestable. Aussi vit des Jacobins qui vindrent de Prouvence devers nostredit cousin, lesquelz se adressèrent audit suppliant et en fit parler l’un à icellui nostre cousin le long d’un buisson, maiz ne sceut riens de leurs parolles, sinon que depuis nostredit cousin lui dist qu’ilz alloient devers nostre frère le duc de Bourbonnois

Jean le Bon, duc de Bourbon et d’Auvergne (ci-dessus, p. 44, note.)

, pour faire l’appoinctement d’icellui nostre cousin de par nostredit oncle le roy de Secille. Et depuis retournèrent iceulx Jacobins et disoient qu’ilz revenoient de par nostre dit frère le duc de Bourbon et disdrent à icellui suppliant qu’il dist à nostredit cousin de Calabre qu’il confessast au roy le seellé de Bretaigne, s’il estoit vray, et que le roy le savoit bien, ou s’il n’estoit vray, qu’il dist que s’il y avoit homme qui voulsist dire qu’il l’eust baillé, qu’il le combatroit, toutesfoiz s’il estoit vray, qu’il le confessastet qu’il feroit son appoinctement devers nous, et qu’il se fiast ausdiz Jacobins, aux enseignes que quant nostredit cousin de Calabre venoit de Provence et qu’il passa par nostredit frère de Bourbon, qu’ilz se entre offrirent les seellez l’un de l’autre et que Françoys de Saint-Pol

C’est-à-dire François de Luxembourg, sr de Fiennes, frère cadet de comte de Saint-Pol, connétable de France (ci-dessus, p. 43).

dist que à une Pasques fleuries, ung homme dudit feu connestable devoit porter en Savoye les seellez de plusieurs des seigneurs de nostre royaume. Aussi sceut par ung nommé Toreau qu’il y avoit ung homme qui avoit parlé à nostredit cousin de Calabre en la ville du Mans en ung jardin et que c’estoit pour faire une entreprinse sur le chasteau d’Angiers et que ledit Toreau lui avoit dit que ladicte entreprinse estoit faillie et que l’omme y avoit failli ; si y avoit il essayé. Oultre plus nostre dit cousin ung jour lui dist que si nous allions de vie à trespas il lui donneroit cinq ou six confiscacions de ceulx qui s’estoient meslez du fait de la mairerie d’Angiers

Peu de temps après avoir mis sous sa main l’Anjou, pour se venger de l’attitude du roi René, Louis XI avait octroyé à la ville d’Angers une charte municipale (février 1475), qui, malgré ses dispositions libérales, ne donna pas satisfaction aux habitants et suscita même des troubles par suite des agissements de Guillaume de Cerisay, maire nommé par le roi. (Sur cette affaire, voy. C. Port, Dict. de Maine-et-Loire, au mot Angers ; Lecoy de la Marche, le Roi René, t. I, p. 394 à 400 ; H. Sée, Louis XI et les villes, p. 259 et suiv., et surtout le procès intenté après la mort de Louis XI par plusieurs habitants d’Angers, contre Guillaume de Cerisay, François de Pontbriant, Adam Fumée, etc. Arch. nat. X2a 48, aux 16 février 1848, n.s., 30 août 1485 ; X2a 49, 26 février 1484, n.s. ; X2a 52, 13 et 20 juin 1485, plaidoiries).

, et lui dist qu’il ne les oubliast pas en son memoire et que selon le cours de nature, ilz ne lui povoient eschapper ni fouyr et qu’il le feroit si riche qu’il auroit assez, et que une foiz il se serviroit de lui, se le temps venoit à son avantaige, en le chargant qu’il le louast et mist en bon bruit envers les nobles et le peuple, et lui disant que le temps ne dureroit pas tousjours tel et que ung jour il fauldroit hacher en pièces ses malveillans, ce que ledit suppliant lui accorda et lui dist que jamaiz ne serviroit que nostredit cousin ou lui mesmes, et qu’il estoit deliberé ainsi le faire envers et contre tous, en lui tenant bons termes par lui nostre cousin de Calabre. A l’occasion desquelz cas, ledit suppliant congnoissant avoir mal fait envers nous, s’est tiré par devers nous, en nous humblement requerant qu’il nous plaise iceulx maux et delitz et autres qu’il peut par sy devant avoir faiz et commis à l’encontre de nous, lui quicter, remettre, pardonner et abolir et sur ce lui impartir notre grace. Pour quoy nous, ces choses considérées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant pour ces causes et autres à ce nous mouvens, tous et chacuns les cas, crimes et delitz dessusdiz et generalement tous autres qu’il pourroit avoir commis et perpetrez à l’encontre de nous, en quelque manière que ce soit, soit de crime de lèze-majesté ou autrement, nonobstant qu’ilz ne soient cy specifiez et declairez, et lesquelz nous les y tenons pour specifiez, avons quictez, remis, pardonnez et aboliz, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au bailli de Touraine, juge des ressors et exempcions d’Anjou et du Maine et à tous noz autres justiciers et officiers, etc., que de noz presens grace, quictance, remission, abolicion et pardon ilz facent, seuffrent et laissent ledit suppliant joir et user plainement et paisiblement à tousjours, etc. Donné au Plessis du Parc lez Tours, ou moys de decembre, l’an de grace mil iiiic lxxvi et de nostre regne le xvime.

Ainsi signé : Par le roy, monseigneur de Beaujeu, les sires de Gyé, mareschal de France, du Lude

Sur les sires de Beaujeu, de Gyé et du Lude, cf. ci-dessus, p. 52 et 78.

, gouverneur du Dauphiné, et autres presens. Robineau. — Visa.

MDLXXXVI Décembre 1476

Rémission accordée à Pierre Baudin et à Pierre Fradineau, son beau-père, de Limalonges, le premier en fuite, le second détenu prisonnier à cause du meurtre de Martin Launay, neveu de Jean Launay. Ils avaient dû entrer en lutte, pour défendre leur vie, contre ce dernier, accompagné de plusieurs membres de sa famille, qui voulait les expulser d’un champ qu’ils avaient pris à ferme du sr de Chémerault, et sur lequel ledit Launay prétendait avoir droit.

AN JJ. 204, n° 29, fol. 19 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 134-138

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Pierre Baudin

Aux personnages de ce nom, énumérés dans la nouv. édit. du Dictionnaire des familles du Poitou (t. I, p. 334), nous pouvons ajouter Jean Baudin, qui était appelant au Parlement d’une sentence rendue en faveur de Julien Manceau par le lieutenant du sénéchal de Poitou à Niort ; par son arrêt du 28 juillet 1485, la cour renvoya les parties par devant le sénéchal en son siège à Poitiers. (Arch. nat., X2a 48, à la date.)

et Pierre Fradineau, parroissiens de Lymalonges en la conté de Poictou, contenant que, puis ung an ença ou environ, ledit Pierre Fradineau, l’un desdiz supplians, a prins une pièce de terre à rente à certain devoir annuel du seigneur de Chemeraut

Il ne s’agit pas ici de la terre et seigneurie de Chémerault (commune de Brux, canton de Couhé) qui entra dans la maison de Barbezières par le mariage de Jean, sr de Saint-Mary et de Vitrac, avec Jacquette de la Rivaudière, le 1er octobre 1506, et donne son nom à une branche de cette famille, mais de celle de Chémerault en Limalonges. A. Du Chesne indique cette terre parmi les possessions des Chasteigners, mais nulle part il ne fait savoir à quelle époque, ni par quel moyen, ni à quel membre de cette famille elle échut. Nous avons trouvé quatre hommages et deux aveux de la seigneurie de Chémerault en Limalonges mouvant de Civray, rendus à Charles Ier d’Anjou, comte du Maine, à la duchesse d’Angoulême, puis au roi, successivement seigneurs de Civray. Voici comment est mentionné le plus ancien (1er juin 1444), dans un inventaire dressé au mois de juin 1520 par Clément Valant, greffier de la baronnie de Civray, appartenant alors à Louise de Savoie : « Item, ung autre hommage lige, à dix solz de devoir, à muance de seigneur et des hommes et aux droites aydes, fait et rendu par Jehanne de Velluyre, dame de Chasteautizon (veuve de Briand de Varèze, chevalier), comme ayant le bail et administracion de François, vallet, son filz, à monsr Charles d’Anjou, comte du Maine, à cause de son chasteau de Civray, pour raison de l’oustel et herbregement appelé Chemerault, assis à Lymalonges en la chastellenie dudit Civray, plus à plain mencionné par ledit hommage, qui est en datte du premier jour de jung l’an mil iiiic xliiii, sellé à simple queuhe en cere rouge de seel de lad. dame. » (Arch. nat., P. 1134, n° 104.) Briand de Varèze, décédé peu avant cette date, était fils de Jean de Varèze, chevalier, seigneur de Châteautizon, capitaine de Civray, mort vers 1420, et de Jeanne Chasteigner, fille et héritière pour le tout (ses deux frères étant morts avant elle sans postérité) de Simon, seigneur de la Meilleraye, Magné, Échiré, etc., qui vécut jusqu’en 1461 ; Briand avait deux sœurs : 1° Andrée, femme de Jean de Vivonne, sr d’Aubigny, puis de Guy de Chourses, sr de Malicorne ; 2° Jeanne, mariée à Frontenay-l’Abattu, le 20 mars 1443, avec Pierre Chasteigner, sr de la Rochepozay, de Saint-Georges de Rexe, etc. Notre second hommage de Chémerault en Limalonges fut rendu au même comte du Maine par François de Varèze, écuyer, fils de Briand, le 10 décembre 1459. (P. 1134, n° 290.) Seigneur de Châteautizon, Magné, Échiré, La Meilleraye, etc., François de Varèze mourut sans avoir été marié, en 1474, âgé seulement de vingt ou vingt-six ans, dit A. Du Chesne (Hist. généal. de la maison des Chasteigners, in fol., p. 178). On fera remarquer que, si la date 1474 est exacte, François devait avoir environ trente-cinq ans. Par son décès, tous les biens de la maison de Varèze échurent à ses tantes, Andrée et Jeanne, les deux filles de Jean de Varèze. Jeanne, femme de Pierre Chasteigner, eut pour sa part la Meilleraye. Châteautizon, Arsay en Saintonge, et autres seigneuries parmi lesquelles Chémerault, comme on va le voir.

Le seigneur de Chémerault en Limalonges, dont il est question dans ces lettres de démission de décembre 1476, était donc Pierre Chasteigner, sr de la Rochepozay et de Saint-Georges de Rexe, à cause de sa femme. Le troisième hommage de cette terre que nous connaissions émane de « Jeanne de Varèze, dame de Chasteautizon », sans autre désignation, mais on peut y ajouter, sans crainte de se tromper, veuve de Pierre Chasteigner. Cette absence d’autres titres et qualités peut, d’ailleurs, être considéré comme une preuve que Chémerault lui appartenait bien en propre. L’acte est daté du 19 mars 1501, et non 1520, comme la mention d’inventaire le porte par suite d’une erreur manifeste. (P. 1194, n° 221.) Le fils aîné de Jeanne de Varèze, Guy Chasteigner, trouva cette terre dans l’héritage de sa mère, comme le montre clairement notre quatrième hommage, rendu, le 2 mai 1507, à la duchesse d’Angoulême, par « Magdeleine du Puy, vefve de feu messire Guys Chasteigner, en son vivant, seigneur de la Roche de Pousay et de Chemerault ». (Id., n° 307.) Citons enfin deux aveux, l’un du 28 février 1536, l’autre du 14 février 1547 rendus au roi par Françoise Chasteigner (de la branche du Verger), veuve alors de Pierre de Cavalen, sr de Montenault (Monteneau, psse de Véniers), pour la terre et seigneurie de Chémerault en Limalonges, qu’elle avait acquise, sans doute, de Jean III, sr de la Rochepozay, fils du Guy et de Madeleine du Puy. (Arch. nat., P. 5562, n° 793 ; P. 5592, n° 1466.)

, en laquelle pièce de terre Jehan Laun ayse disoit avoir droit ; au moien de laquelle prinse ledit Launay a conceu une très grant hayne contre lesdiz Fradineau et Baudin, gendre dudit Fradineau suppliant, tellement que par diverses foiz et en plusieurs lieux ledit Launay s’est vanté que s’il trouvoit ledit Baudin en ladicte pièce de terre qu’il le tueroit, et ne morroit d’autres mains que des siennes, et par plusieurs foiz s’est essayé de l’outrager. Et soit ainsi que le quatriesme jour du present moys de desambre derrenierement passé, ledit Pierre Fradineau suppliant estant en ladicte pièce de terre, arrachant des espines pour la convertir en labourage, et estoit avec lui ledit Pierre Baudin, son gendre, aussi suppliant, Laurens Fradineau, filz dudit Pierre Fradineau, lesquelz Baudin, suppliant, et Laurens Fradineau avoient chacun deux beufz et vouloient labourer en icelle pièce de terre, ainsi qu’ilz avoient fait les mardi et mercredi precedens cellui jour ; et après ce qu’ilz [eurent] esté certaine espace de temps oudit champ, seurvindrent ledit Jehan Launay avec lui feu Martin Launay, son neveu, et deux compaignons varletz dudit Launay, et deux femmes, l’une femme dudit Jehan Launay et l’autre femme de Perot Launay, frère dudit Jehan Launay, et aussi y estoit ledit Perot Launay en personne, lesquelz estoient embastonnez, c’est assavoir ledit Jehan Launay d’une fourche ferrée à deux beusailz et ledit feu Martin d’une sarpe enmanchée, appellée en comun langaige volant. Tous lesquelz hommes et femmes venoient de propous deliberé pour courir sus audit Fradineau et Baudin suppliant. Et quand ledit Launay fut près desdiz Fradineau et Baudin supplians, et Laurens Fradineau, il se print à dire tout hault audit feu Martin, son nepveu : « Apporte-moy ce volant », ce que ledit feu Martin fit. Et après que ledit Launay eust ladicte sarpe ou voulant, s’aproucha desdiz Fradineau et Baudin, suppliant, disant audit Baudin : « Va-t’en hors de mon champ » ; et ledit suppliant lui dit : « Jehan Launay, ne me touche point » ; nonobstant lesquelles parolles ledit Launay, meu de mauvais vouloir et voulans icellui mettre à execucion, commança à frapper sur le bressouer dudit Baudin, suppliant et couppa la chaine dudit bressouer et la cheville, disant audit Baudin suppliant : « Je respondré de toy et de ton bressouer », et se combati longuement ledit Launay avec ledit Baudin suppliant, le voulant frapper de sadicte sarpe ou volant. Et ledit Baudin se deffendoit au mieulx qu’il pouvoit d’une sarpe ou voulant pareille à celle dudit Launay, pour obvier à la mauvaise volonté et entreprise d’icellui Launay, dont il se doubtoit pour les parolles et menasses qu’il avoit ouparavant dictes de lui par plusieurs fois et à plusieurs personnes et en divers lieux, c’est assavoir que s’il le trouvoit il le tueroit. Et tant advint que ledit Launay, desirant murtrir et occire ledit Baudin, ramena sur lui le cop de ladicte sarpe dicte voulant, l’en cuidant assigner et frapper sur la teste, maiz ledit Baudin soudainement flechy au cop et tellement qu’il lui tumba sur l’espaule, et soy sentant ledit Baudin frappé, et voyant qu’il ne pouvoit eschapper à la fureur dudit Launay sans mort ou mutillacion de son corps, s’il ne se deffendoit, commença à prendre couraige comme cellui qui est oultraigé et à venir vers ledit Launay. Ce que voyant ledit feu Martin Launay, nepveu dudit Jehan Launay, vint aiant une fourche de fer entre ses mains contre ledit Baudin, suppliant, de laquelle en s’approuchant de lui s’efforça de le frapper de ladicte fourche. Et voyant icellui Baudin le dangier en quoy il estoit des dessusdiz qui s’efforçoient chacun d’eulx de le tuer ou murtrir, tourna son cop sur ledit Martin, lequel, en son corps deffendant il frappa sur la teste de ladicte sarpe ou volant qu’il tenoit, tellement que, au moyen d’icellui cop et par deffault de bon pensement, gouvernement ou autrement, sept ou huit heures après, il alla de vie à trespas. Pour occasion duquel cop, ledit Fradineau est detenu prisonnier et ledit Baudin s’est absenté du pays, auquel ne ailleurs en nostre royaume ilz n’oseroient jamaiz seulement resider ne converser, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce préallablement imparties, humblement requerant, etc. Pour ce est-il que nous, les choses dessusdictes considerées, etc., ausdiz supplians avons quicté, etc. Si donnons mandement, par ces presentes, au seneschal du Poictou et à tous nos autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou moys de décembre, l’an de grace mil cccc. soixante-seize, et de nostre règne le seziesme.

Ainsi signé : Par le Conseil. R. Gontier, scriptor. — Visa.

MDLXXXVII Décembre 1476

Rémission accordée à Georges Hervéron et Jean Brejon, jeunes hommes de labour, de la paroisse de Gizay, poursuivis en justice pour le meurtre de Jean Fauconnier, qui avait attaqué sans raison et menaçait de tuer Jean Hervéron, leur père et beau-père, au secours duquel ils étaient venus à temps.

AN JJ. 204, n° 170, fol. 106 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 139-143

Loys, par la grâce de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de George Herveron et Jehan Brejon, povres jeunes hommes de labour, demourans en la parroisse de Gizay en Poictou

On connaît le curé de Gizay à cette époque. Il se nommait Jean Vincent, et le chapitre de Notre-Dame-la-Grande de Poitiers lui fit cession, en 1480, de la dîme des Herbert moyennant une redevance annuelle de huit setiers de froment, qu’il se refusa plus tard à payer, parce que les religieuses de la Trinité prétendaient aux deux tiers de cette dîme. (Arch. de la Vienne, G. 1227.) Dans un registre du Parlement, à la date de février 1484 n.s., se trouve un appointement entre Marguerite d’Amboise, veuve de Jean de Rochechouart-Mortemart, d’une part, et Jean Vincent, curé de Gizay. (Arch. nat., X1a 4825, fol. 118 v°).

, contenant que lesdiz supplians qui sont jeunes enfans, nouvellement mariez, depuis leur jeune age et congnoissance, se sont tousjours bien et honnestement gouvernez, convercé doulcement entre leurs voisins et congnoissans, sans que jamaiz ils aient esté actains ne convaincus d’aucun vilain cas, blasme ou reprouche digne de reprehension, combien que, le xxviie jour de juing derrenier passé, Jehan Herveron, père dudit George suppliant ou de la femme dudit Jehan Brejon, aussi suppliant, se transporta, après disner, en ung sien pré estant près son hostel appellé les Chanières, pour tirer des chardons du foing qu’il avoit fauché en icellui pré avecques une fourche de bois, en laquelle chose faisant, environ vespres basses dudit jour, ung nommé Jehan Fauconnier, son voisin, se transporta vers ledit pré dudit Jehan Herveron père, aiant ung grant cousteau ou penart en sa saincture. Et quant il fut oudit pré, il dit audit Jehan Herveron : « Ton filz me voulut arseoir batre, maiz je le galloupperay bien. » Lequel Jehan Herveron lui fit responce tout en riant que s’il s’en pouvoit passer, qu’il lui feroit ung grand plaisir, cuidant que ledit Fauconnier ne se fit que bourder ou jouer avecques lui. Et à ceste cause lui demanda qu’il lui avoit fait. Auquel ledit Fauconnier dit que ses enfans avoient batu les siens ; lequel Jehan Herveron lui dit que non avoient. Et toutesfoiz ledit Fauconnier, sans autre chose dire, se reculla arrière dudit Jehan Herveron de six pas ou environ, faignant s’en aller vers la maison d’icellui Jehan Herveron, et incontinent se retourna vers ledit Jehan Herveron, et en ce faisant tira son dit cousteau en braquemart hors de la gueyne et lui dit : « Ha ! paysans, je vous galleray bien à ceste heure. » Et ainsi qu’il s’approchoit de lui pour l’oultraiger, comme il estoit vraissemblable, Mathurine Brejonne, femme dudit George suppliant, qui estoit ou villaige de Ferrières, prez dudit pré, courut tant qu’elle peut au devant dudit Fauconnier en s’escryant et lui disant qu’il ne battist pas le sire, qui estoit ledit Jehan Herveron. Maiz toutesfoiz ledit Fauconnier s’efforça par plusieurs foiz le frapper et estocquer dudit penart ou cousteau dont il l’eust blessé et navré, se n’eust esté ladicte Berjonne qui se mist au devant pour l’empescher en sa fureur et malice. Et à celle heure ledit George Herveron, suppliant, qui estoit en l’ostel dudit Jehan Herveron, son père, joignant dudit pré, oy sur ce le cry de sadicte femme, par quoy incontinent s’en alla courant oudit pré, sans avoir aucun baston ; et quant il y fut arrivé, il trouva ledit Fauconnier ayant ledit penart tout nu en sa main, qui s’efforçoit frapper sondit père. Et qui plus est, quant il vit ledit George suppliant, il s’adressa par plusieurs foys contre lui pour l’oultraiger ; lequel George suppliant, qui ne demandoit point de noise, lui dit par plusieurs foys en soy recullant : « Ne me frappe pas, car je n’ay de quoy me deffendre » ; de laquelle chose faire il ne voulu cesser. Et ce voyant ledit Georges et la fureur dudit Fauconnier qui le vouloit tousjours ainsi oultrager et estoucquer dudit penart, en soy reculant et pour deffendre et garder son corps, s’approucha de sondit père, auquel il osta ladicte fourche de boys qu’il avoit, et après en soy deffendent dudit Fauconnier d’icelle fourche, se reculla de lui et se deppertirent et esloignerent de la longueur de deux lances ou environ. Et neantmoins ledit Fauconnier, sans plus mot dire, s’en courut contre ledit Georges suppliant, le cuydant tousjours estocquer dudit penart, ce qu’il eust fait ; maiz sadicte femme se mist entre deux pour en ce l’empescher et tellement que, ainsi que ladicte femme estoit au devant, ledit Fauconnier estoucqua dudit penart ledit George suppliant par plusieurs foiz, en s’efforçant l’endommaiger et blesser, dont ledit Georges suppliant fut et se trouva en grand doubte et dangier de sa personne. Pour laquelle conserver de peril et de mort, et voyant qu’il n’y avoit remède que de soy deffrendre, frappa du doz de ladicte fourche de boys en cest conflict et debat ledit Fauconnier sur la teste, dont il tumbà à terre. Et à cest debat et cry survint ledit Jehan Brejon suppliant, gendre dudit Jehan Herveron, qui gardoit les beufz assez près d’illec. Lequel, voyant que ledit Fauconnier avoit encore ledit penart en sa main, pour les oultraiger, et qu’il se relevoit, frappa d’un baston de boys qu’il avoit sur la teste dudit Fauconnier, et le retumba dudit coupt et autres qu’il luy bailla sur les jambes et aillieurs. Et tumba en ce faisant audit Fauconnier sondit cousteau à terre ; lequel ledit George suppliant amassa. Et incontinent après illec arrivèrent Jehan de Laffa et Jehanne Herveronne, sa femme, la femme dudit Fauconnier et autres qui emportèrent ledit Fauconnier en son hostel ; et la nuyt ensuyvant, pour occasion desdiz coups, par faulte de bon gouvernement et autrement, alla ledit Faulconnier de vie à trespassement. Et est depuis sa femme convollée à secondes nopces. Et combien que ledit Fauconnier ait esté agresseur et non lesdiz supplians, que ledit cas ait esté commis et perpétré en deffendant et ledit Herveron, leur père, et que ledit Fauconnier ledit jour se fut venté que il batroit ledit Herveron ou de ses enfans avant qu’il dormist, et que par ce soit en coulpe, et non lesdiz supplians ne leurdit père, veu et considéré qu’ilz ne pouvoient evader la fureur dudit Fauconnier, embastonné dudit penart, et que lesdiz supplians n’avoient que simples bastons de boys et par ce soient excusables, toutesvoyes lesdiz supplians, doubtans rigueur de justice, se sont absentez du pays et contre eulx ont esté faiz plusieurs adjournemens personnelz par la justice de Genezay

La châtellenie de Gençay, dont faisait partie la paroisse de Gizay, avait alors pour seigneur Louis Ier de la Trémoille, comte de Benon et de Guines, dont les enfants étaient héritiers de la vicomté de Thouars, à cause de Marguerite d’Amboise, leur mère. Les seigneurs de l’Isle-Bouchard avaient possédé Gençay de temps immémorial, mais en avaient été dépouillés après le traité de Brétigny par les occupants anglais, et ensuite par le duc de Berry qui se l’était fait donner, sous prétexte qu’il l’avait reconquis. Catherine de l’Isle-Bouchard, au moment d’épouser Georges de la Trémoille, le célèbre ministre, en avait obtenu la restitution (1425). Plus tard, sur lettres données aux Montils-lès-Tours, le 10 mars 1467, n.s., Louis XI la confirma dans cette possession. (Arch. nat., X1a 8606, fol. 134.) Les ville, terre et châtellenie de Gençay passèrent ainsi au fils aîné de cette dame, Louis de la Trémoille, puis au troisième fils de celui-ci, Jacques, sr de Mauléon.

en la chastellenie et juridicion duquel ilz sont demourans et manans et subgetz, et contre eulx ont esté donné plusieurs deffaulx ; par quoy, n’y oseroient jamaiz converser ne repairer, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, si comme ils dient, en nous humblement requerant, que, attendu ce que dit est, il nous plaise sur ce impartir ausdiz supplians nosdictes grace et misericorde. Pour quoy nous, ces choses considérées, voulans misericorde, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours ou moys de décembre l’an de grace mil quatre cens soixante seize et de nostre règne le seziesme.

Ainsi signé : Par le conseil. Henon. — Visa. Contentor. J. Duban.

MDLXXXVIII 1476

Fragment de lettres de rémission en faveur de Guillaume de La Barde, écuyer, seigneur de la Croix, où se trouve relaté le commencement d’un conflit entre des gentilshommes poitevins revenant de la frontière d’Espagne et rentrant dans leurs foyers, Guillaume de La Barde et Guillaume de Saint-Martin, d’une part, Mathelin Foucher et Pierre de Rechignevoisin, d’autre.

AN JJ. 204, n° 186, fol. 116 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 143-147

Loys, par la grâce de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Guillaume de la Barde, escuyer

Ce personnage doit, semble-t-il, être identifié avec Guillaume, fils de Nérigné ou Négon de La Barde, écuyer, seigneur dudit lieu, situé paroisse de Journet, et d’Antoinette Du Plessis. Il épousa, avant le mois de décembre 1491, Marguerite de Moussy, fille de Jean de Moussy, seigneur de la Contour (cf. notre volume précédent, p. 282, note) et d’Antoinette Gavarret, sa première femme. Il eut avec son beau-père un long procès, qu’il perdit, suivant le Dict. des familles du Poitou, t. I, p. 281. Dans la montre du ban et de l’arrière-ban du ressort de Montmorillon, reçue en cette ville le 2 décembre 1491, on lit : « Monsieur de la Contour excuse Guillaume de La Barde, son gendre, lequel il dit estre en la Cour de Parlement et qu’il ne sçait rien de ces presentes montres. Enjoint audit de La Barde incontinent de retourner et se tenir dans huit jours auprès dud. sieur le seneschal faire serment à peine de deffaut. » (Roolles des bans et arrière bans de la province de Poictou, Xaintonge et Angoumois, Poictiers, 1667, petit in-4° ; réimpr. de 1883, p. 50.) On verra, dans la note de la p. 147 ci-dessous, qu’au mois de février 1477 n.s., notre Guillaume de La Barde était en procès au Parlement contre Louis de Rechignevoisin, père de Perot ou Pierre, nommé dans le présent acte, et qui avait succombé à la blessure reçue dans cette rencontre, au sujet précisément de l’entérinement de ces lettres de rémission, lesquelles avaient été présentées d’abord au sénéchal de Poitou, à qui elles étaient adressées. Aux quelques membres de la famille de La Barde, mentionnées dans le Dict. des familles du Poitou, on peut joindre Jacques de La Barde, écuyer, qui, dans un procès devant la Cour « en cas d’excès et nouvelleté », demandait l’infirmation d’une sentence du même sénéchal donnée au profit des trois frères, Blaise, Aubert et Philippe de Bridiers, le premier qualifié chevalier, et obtint sa mise en liberté par mandement du 1er décembre 1479. (Arch. nat., X2a 38, fol. 43.)

, seigneur de la Croix, homme d’armes soubz la charge et compaignie de nostre amé et feal conseiller et chambellan le sire de Maigny

Antoine de Chourses, seigneur de Magné, près Niort, sera l’objet d’une note dans un acte de mars 1479, imprimé ci-dessous.

, contenant que, le septiesme jour de novembre derrenier passé, il se party de Bayonne par le congé de son cappitaine pour venir en sa maison qui est en Poictou, près de Broce, acompaigné de deux de ses serviteurs, pour ce que long temps il n’y estoit venu. Et avec lui estoit Guillaume de Saint-Martin

Guillaume de Saint-Martin fut impliqué, quelques années plus tard, dans un procès criminel entre deux compétiteurs à la possession de l’abbaye de Sainte-Croix-d’Angle, Aimery Morin et Hervé Ysoré, qui se prétendaient l’un et l’autre élus abbés et s’accusaient réciproquement d’avoir usé des pires violences et fait occuper l’abbaye par des bandes armées. Saint-Martin était des partisans du premier, dont deux avaient été tués par les complices d’Ysoré. Il sera question plus longuement, dans un autre endroit du présent volume, de ce curieux procès dont les phases se déroulèrent de mai 1485 à janvier 1488.

, escuyer, acompaigné d’un sien serviteur. Et ainsi qu’ilz s’en venoyent ensemble, trouvèrent sur leur chemin Mathelin Foschier et Peyrot de Rechignevoisin

Pierre ou Perrot était le fils unique de Louis de Rechignevoisin et devait être fort jeune, car il avait encore son grand-père, qui lui survécut sept ans, Pierre, écuyer, seigneur de Rechignevoisin et de Guron. Celui-ci rendit hommage au roi de son hébergement de Guron, mouvant de Lusignan, qui lui venait de sa mère, Catherine Martin, les 2 décembre 1422, 20 novembre 1434, 31 mai 1461 ; on a de lui encore deux aveux du même fief, l’un du 23 avril 1422, après la mort de son père (qui vivait encore le 16 décembre 1418) et l’autre du 12 avril 1462. (Arch. nat., P. 1145, fol. 68 v°, 70, 122 v°). Il assistait comme témoin, le 19 mars 1444 n.s., à un traité passé entre Jean Coussot, abbé de Valence, et ses religieux, d’une part, et Jean de Mortemer, seigneur de Couhé d’autre, au sujet des droits de moyenne et basse justice et autres prétendus par l’abbaye. (Coll. dom Fonteneau, t. XXVII, p. 741.) Le 27 août 1455, Pierre de Rechignevoisin donnait à bail le moulin de Guron et était mort avant le 22 avril 1482 ; il avait testé, le 4 septembre 1481, léguant ses domaines à ses enfants issus de son union avec Jeanne de La Celle. Il laissait trois fils : 1° Louis, le père de la victime de Guillaume de La Barde, qui, ayant eu pour sa part l’hôtel de Guron, l’échangea contre la terre de Rechignevoisin avec son frère cadet ; 2° Jean, qui, étant appelant du sénéchal de Poitou au Parlement contre Jean Jousselin et Jean Hillairin, fut renvoyé devant son premier juge par arrêt du 8 août 1488. (Arch. nat., X2a 57) ; 3° Antoine, qui fut aussi seigneur de Guron ; et deux filles : Marguerite ou Marie, qui épousa, le 20 janvier 1456, Antoine de Bisdon, sr d’Oiré, et Catherine ou Louise, mariée à Louis Du Fay. D’Hozier, Armorial général (IVe reg., p. 431-480) a donné une longue généalogie de la famille de Rechignevoisin ; il cite le procès dont il est question dans la note suivante et donne à la victime de Guillaume de La Barde le prénom de « Poton ». Voy. aussi H. Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 1re édit., t. II, p. 592.

, en la ville d’Angolesme, accompaignez chacun de leurs serviteurs, lesquelz estoient partiz dudit lieu de Bayonne deux ou trois jours plus tost que ledit suppliant. Et au partement dudit lieu d’Angolesme, chacun print son chemin ; et le lendemain, qui fut jour de mercredi se trouvèrent tous les dessusdiz au disner au lieu de Confollent, où ilz furent logez en une hostellerie, chacun en sa chambre et estable appart. Et parlèrent emsemble lesdiz suppliant et Fouchier. Et au partement dudit Fochier et Rechignevoisin, icellui Fouchier dit et pria ledit suppliant, qui estoit en une fenestre, qu’ilz ne les suyvissent point, et pareillement pria et dit à l’ostesse qu’elle leur dit, quant ilz partiroient dudit logeiz, qu’ilz ne les suyvissent point et qu’ilz ne allassent point leur chemin ; ce que ladicte hostesse feist. Et lors se partirent d’icellui logeiz lesdiz Peyrot de Rechignevoisin et Mathelin Fouchier, tirant leur chemin, et pour ce que ledit Mathelin Fochier avait dit ausdiz suppliant et de Saint-Martin qu’ilz ne les suyvissent, et paraillement ladicte hostesse, se retardèrent de partir de une demye heure ou environ, et après montèrent à cheval pour tirer à leurs maisons, cuidans ne trouver aucun empeschement. Et quant il furent à une demy lieue ou environ dudit Confollent, en chevauchant, veirent devant eulx sur le chemin lesdiz de Rechignevoisin et Fouchier, lesquelz ne alloyent pas fort, et lors commencèrent à dire lesdiz suppliant et de Saint-Martin ensemblement : « Ces gens ne vont pas tost. Nous creons que leurs chevaulx sont laz, on nous attendent pour nous courir sus, veu les parolles que nous ont dit lesdiz Fochier et hostesse au partir. » Et incontinent après dirent ensemble : « Picquons et chevauchons devant, car nous gaignerons le logeiz plus tost que eulx, puisqu’ils ne chevauchent autrement, et après nous mettrons en une hostellerie et eulx en une autre. » Et quant lesdiz suppliant et de Saint-Martin furent près d’eulx d’ung grant giest de pierre ou environ, ledit Mathelin Fouchier qui avoit une fleuste en sa main, feist signe trois ou quatre foiz ausdiz suppliant et de Saint-Martin d’icelle fleuste ; et lors va dire icellui de Saint-Martin audit suppliant que ledit Fouchier leur faisoit signe et qu’il y regardast ; lequel veist qu’il leur faisoit encores signe. Et lors va demander ledit suppliant audit de Saint Martin qu’il estoit de faire ; lequel de Saint-Martin lui dit qu’ilz les laissassent aller et qu’ilz ne feussent point agresseurs, et aussi que ledit de Rechignevoisin avoit prins une javeline et croioit qu’il estoit deliberé de le assaillir et qu’il savoit bien qu’il ne l’aimoit point et de long temps, en lui disant qu’il le prioit de aviser ung autre chemin, pour éviter à la mauvaise volunpté dudit Rechignevoisin et affin que aucun inconveniant n’en advensist, et qu’il se montrast le plus saige, car il voyoit bien et lui sembloit aux signes et parolles que avoit fait ledit Fochier que, s’ilz passoient, qu’il estoit deliberé de le assaillir. Et lors se descendirent audit chemin lesdiz suppliant et de Saint-Martin, faignant de vouloir pisser, pour éviter à l’inconvenient qui en pourroit avenir et au mauvaiz et dampnable propoux dudit de Rechignevoisin, et prindrent un autre chemin et se torfirent de bien deux lieues ou environ, tellement qu’il fut noire nuyt avant qu’ils peussent trouver logeiz, affin de eviter qu’ilz ne se trouvassent là où le dit de Rechignevoisin et Fouchier alloient lougier. Et se logèrent au lieu de Saint-Barbant, et le lendemain au matin se partirent dudit Saint-Barbant et vindrent louger au Dorat à l’hostellerie du Signe, en laquelle ledit Fouchier alla parler ausdiz suppliant et Saint-Martin et leur dit qu’il leur savoit bon gré de ce qu’ilz ne allèrent point hier leur chemin, « car seurement Perrot de Rechignevoisin estoit deliberé de vous assaillir et de vous laisser passer devant, et quant vous eussiez esté passé, il estoit deliberé de vous donner ung cop de javeline en travers du corps ou aillieurs. Et puis s’en feust allé ; car il lui sembloit qu’il avoit meilleur cheval que vous ». Et lors respondit ledit suppliant que il ne lui demandoit rien et que s’il l’assailloit, il estoit deliberé de soy deffendre, puisque ainsi il estoit deliberé ; maiz que au regard de lui, jamaiz ne lui [feroit] desplaisir, ne ne vouldroit, et qu’ilz estoient cousins. Et quant ung

Le registre JJ. 204 finit ainsi au fol. 116 v°, et il y manque, par conséquent, au moins un feuillet sur lequel était transcrit la suite de ces lettres de rémission. Il est précédé d’une table dont l’écriture est du commencement du xvie siècle, indiquant comme dernière pièce enregistrée précisément la lettre de rémission en faveur de Guillaume de La Barde ; mais on n’en peut induire que le feuillet qui en contenait la fin manquât déjà à cette époque.

Le fragment que nous publions ne nous fait pas connaître l’issue du conflit entre Guillaume de La Barde et Perrot de Rechignevoisin. Mais on en peut compléter le récit à l’aide d’un registre criminel du Parlement. Les lettres de rémission étant adressées au sénéchal de Poitou ou à son lieutenant furent présentées d’abord au lieutenant du sénéchal à Montmorillon ; mais celui-ci, Jean Prévost, était, paraît-il, cousin de l’impétrant. C’était une cause légitime de récusation ; aussi les opposants à l’entérinement, à la tête desquels était Louis de Rechignevoisin, père de Perrot, obtinrent facilement que l’affaire fût renvoyée au siège de Poitiers. Là ils demandèrent un délai pour produire leurs causes d’opposition ; le sénéchal le leur accorda et en même temps prononça l’élargissement de Guillaume de La Barde. Louis de Rechignevoisin releva appel de cette sentence au Parlement de Paris, qui retint l’affaire, au fond ; Guillaume de La Barde vint se constituer prisonnier à la Conciergerie, comme il était d’usage pour les porteurs de rémissions contestées. La première mention de cette affaire que l’on rencontre sur les registres de la Cour est ainsi conçue : « Entre Loys de Rechignevoisin et le procureur du roy, appellans du seneschal de Poictou ou de son lieutenant, et intimez, d’une part, et Guillaume de La Barde, escuier, homme d’armes de l’ordonnance du roy, prisonnier en la Conciergerie du Palais, intimé et aussi appelant de Colas Godart, sergent royal, d’autre part, après que la court a tenu l’appel interjecté par ledit de La Barde pour bien et deuement relevé, appoincté est que … ledit de La Barde requerra l’enterinement de ses lettres de rémission et provision de sa personne en la court de ceans et lesd. de Rechignevoisin et procureur du roy pourront dire, au contraire, ce que bon leur semblera. » Le 11 du même mois, la Cour, sur requête de La Barde qui demandait sa mise en liberté, ordonna que le vendredi suivant Rechignevoisin viendrait « defendre et impugner ladicte rémission », faute de quoi le demandeur serait élargi. Le vendredi 21 février, en effet, on plaida. Le demandeur, d’abord, expose les faits tels qu’ils sont rapportés dans notre texte ; nous n’en retiendrons que ce qui peut servir à le compléter. « Après que Foucher fut party, le demandeur aussi partit pour aler à son hostel estant près de quatre lieues d’ilec, et tantost qu’il fut aux champs, vit venir sur luy le defunct tenant une javeline de laquelle il s’efforça l’enferrer ; mais le demandeur destourna le cop. Néanmoins il s’efforça encores le fraper et l’atteignit au visage. Par ce le demandeur lui bailla ung cop d’estoc, en soy defendant ; mais ledit defunct descendi à pié et dist à ung de ses archers : « Prend mon cheval et le va tuer ; je le te donne ». Et sur ce s’en ala le demandeur en son hostel. Depuis ledit deffunct est trespassé, et à son trespas a déclaré qu’il estoit cause de sa mort, la pardonnoit au demandeur et defendoit que pour ce il ne fust aucunement inquiété. » La Barde ayant obtenu sa rémission, la présenta au lieutenant du sénéchal de Poitou à Montmorillon, en requérant l’entérinement. « Depuis, la cause a esté renvoyée au siège de Poictiers où a esté interjecté une appellation, qui a esté mise au néant. »

L’avocat de la partie adverse dit que Louis de Rechignevoisin, père de la victime, homme noble et de bonne maison, était bien fondé à s’opposer à l’entérinement, car les faits ne s’étaient point du tout passé comme La Barde le donnait à entendre dans ses lettres. C’est lui qui avait été l’agresseur ; il avait suivi sa victime d’étape en étape depuis la frontière, attendant l’occasion propice de la tuer. En partant du Dorat, La Barde prit de l’avance, guetta son ennemi par les champs, et aussitôt qu’il le vit lui courut sus. Perrot de Rechignevoisin pensa lui échapper grâce à la vitesse de son cheval, mais La Barde le poursuivit, finit par le joindre et le frappa par derrière d’un coup d’épée qui pénétra dans les reins et ressortit au-dessous de la mamelle. Déjà antérieurement à l’expédition d’Espagne, Guillaume de La Barde avait eu des démêlés avec la famille de Rechignevoisin ; il avait rompu un vivier appartenant au père et à la mère de Perrot, avait frappé celle-ci et l’avait jetée à terre et fait piétiner par son cheval, parce qu’elle lui reprochait son action. Depuis cette époque, et surtout à la suite du procès auquel sa violence donna lieu, La Barde voua une haine mortelle à toute cette famille ; et il s’était bien gardé d’en parler dans la requête qu’il présenta pour obtenir sa rémission. Le Procureur général, de son côté, prononça un réquisitoire sévère concluant au rejet de l’entérinement, à la condamnation de Guillaume de La Barde au bannissement à perpétuité, et à la confiscation de ses biens, à l’amende honorable, et à une réparation pécuniaire de 6.000 livres envers les parents de sa victime, à la fondation d’une chapelle dotée de 40 livres de rente pour la célébration d’un service quotidien dans l’église où le défunt est inhumé, etc., etc. (Arch. nat., X2a 41, aux dates des 4, 11 et 21 février 1477 n.s.) L’arrêt de la Cour n’a pas été retrouvé.

MDLXXXIX Février 1477 (n.s.)

Rémission en faveur de Pierre et Julien Barbin, père et fils, de Cheffois, et de Jean Bégault, leur voisin, qui, pour sauvegarder l’honneur de Marguerite Barbin, fille de Pierre et sœur de Julien, avaient exposé et abandonné un soir sous l’auvent de l’Aumônerie de Pouzauges un enfant qu’elle avait eu quoique non mariée, lequel enfant avait été trouvé mort le lendemain.

AN JJ. 206, n° 1063, fol. 229 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 148-150

Loys, par la grâce de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Pierre Barbin, filasseur, Julien Barbin, son filz, et Jehan Begault, tous povres gens mechaniques et demourans au bourg de Chauffaye en Poictou, contenant que la vigile de la Purificacion Nostre-Dame, l’an mil cccc. lxxiiii, Marguerite Barbine, fille dudit Pierre Barbin et de Jehanne Morine, lors sa femme, acoucha d’un enfant masle environ le point du jour et ne volt oncques nommer celluy qui luy avoit fait ledit enfant. Après lequel acouchement, lesdiz Pierre et Julien Barbins et ladite feue Morine, qui lors vivoit, pour cuider couvrir l’onneur de ladicte fille, qui ne avoit point esté mariée, baptisèrent ledit enfant en une poesle à leur dit hostel et le tindrent et recelerent en icelluy jusques environ huit ou neuf heures de nuyt et delibererent entre eulz de porter ledit enfant secretement en l’Aumonerie de Pousauges, qui distoit de leurdit hostel de deux lieues ou environ, et pour ce faire lesdiz supplians prindrent ledit enfant et icelluy envoloperent bien et convenablement en bons draps. Et ce fait, ledit Julien ala querir ledit Begault qui estoit son voisin, luy declara ledit cas et le requist qu’il les voulsist acompaigner jusques à ladicte Aumosnerie, ce qu’il consentit. Et pour ce, Begault venu en l’ostel dudit Barbin, lesdiz suppliant prindrent ledit enfant et le portèrent à ladicte Aumosnerie ou Hostel-Dieu, et illec le laissèrent en ung ballet ou ouvrouer estant devant ladicte Aumosnerie, bien envolopé, cuidant qu’il fust sain et en grant vie, et ne cognoissoient en luy aucun signe de maladie ne de mort. Mais le lendemain au matin fut ledit enfant trouvé audit balet tout mort, et fut enterré en ladicte Aumosnerie. Et depuis fut ledit cas denoncé aux chastellain et procureur de la seigneurie de [Vouvent]

Le scribe du registre a défiguré ce nom en « Bruvent ». Deux lignes plus loin, il a bien écrit « Vouvent », de sorte que la rectification ne pouvait être douteuse.

, en la chastellenie desquelz demeurent lesdiz supplians. Par quoy informacion faicte dudit cas par la justice dudit Vouvent furent constituez prisonniers audit lieu de Vouvent lesdiz Julien et Begault. Et au regard dudit Pierre Barbin, le père, qui avoit donné ledit conseil de porter ledit enfant, il se absenta. Et depuis furent lesdiz Julien et Begault eslargis jusques à certain temps et par caucion. Et depuis ont esté lesdiz Barbins père et filz mis esdictes prisons ; et au regard dudit Begault, il s’est absenté et n’a comparu au jour à luy assigné. Et combien que lesdiz supplians en faisant ladicte deliberacion de porter ledit enfant à ladicte Aumosnerie et Hostel-Dieu ne pensassent faire aucun mal et le faisoient seulement pour couvrir l’onneur de la dicte jeune fille, néanmoins ilz dobtent que, à l’occasion de ce ilz fussent longuement detenuz prisonniers et que l’en les voulsist traiter par rigueur de justice, se nostre grace, etc., requerans, etc. Pourquoy nous, etc. ausdiz supplians avons quicté, etc., les fait et cas dessusdiz, avec toute peine, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, etc. Donné à Paris, ou moys de fevrier, l’an de grace mil cccc. soixante seize et de nostre règne le xvime.

Ainsi signé : Par le conseil. Brulart. — Visa. Contentor. Le Clerc.

MDXC Mars 1477 (n.s.)

Rémission octroyée à Mathurin Gougon, coupable du meurtre d’un compagnon charpentier, sur le chemin entre Lussac-les-Eglises et Mondon. En réponse à une demande courtoise dudit Gougon, ce compagnon l’avait injurié et menacé de sa cognée.

AN JJ. 195, n° 1629, fol. 413 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 150-153

Loys, etc. Savoir, etc., nous avoir receue l’umble supplicacion de Mathelin Gougon

Nous avons rencontré, à cent ans de distance, dans les registres du Parlement, deux membres de cette famille : Pierre Gougon, capitaine de Rais pour la dame du lieu, qui était en procès contre Béthis Rouault, chevalier, le 8 avril 1376 et le 12 mars 1378 (Arch. nat., X2a 10, fol. 16 et 67) ; et Jean Gougon, seigneur en partie du Puymacé, appelant de Gillet Corbeau, sergent royal à Thouars, contre Alexis Yongue, écuyer, en matière d’excès et attentats. (Plaidoirie du 28 mai 1462, après-dîner, X2a 32.)

, jeune compaignon de l’aage de vingt-cinq à vingt-six ans ou environ, contenant que, environ le xxiiie jour de fevrier derrenier passé, Jehan Rigault, Estienne, frère dudit Anthoine

Sic. Ce passage paraît être tronqué. Le texte de ces lettres de rémission a d’ailleurs été transcrit avec une grande négligence.

Rigault

Un arrêt criminel du Parlement, portant la date du 14 mars 1487, nous fournit quelques renseignements sur Jean et Antoine Rigault. En 1468, ou au commencement de 1469, ce dernier avait pris pour femme Annette de Brayghemet, damoiselle, alors veuve de Jean Le Vacher, en son vivant seigneur de Bagneux et du Teillis, et mère d’une fille nommée Madeleine, qui était âgée de trois ou quatre ans à la mort de son père. Mécontent de cette union, Gilbert Le Vacher (sans doute le frère du défunt) envahit, en l’absence d’Antoine Rigault, l’hôtel fortifié de Teillis où demeuraient Annette et sa fille, à la tête de douze ou quinze hommes armés ses parents ou alliés, en brisa les portes et les fenêtres, mit la maison au pillage, emmena la mère et la fille et les sequestra. Le 24 mai 1469, Antoine Rigault et sa femme obtinrent des lettres pour informer de ces violences et en ajourner l’auteur personnellement devant le sénéchal du Poitou. Gilbert non seulement n’obéit pas à cette assignation, mais il trouva moyen de se faire délivrer un décret de prise de corps contre son adversaire, autrement de faire traîner les poursuites en longueur. Dans l’intervalle, Jean Rigault, frère d’Antoine, devint l’époux de Madeleine Le Vacher, ce qui mit de nouveau en fureur Gilbert, lequel renouvela ses premiers exploits, s’empara par la force du Teillis et y prit les meubles et les approvisionnements. D’où nouvelles informations, assignations, procédures dilatoires, si bien que l’affaire dura dix-huit ans. Satisfait apparemment de ce résultat, Gilbert se laissa condamner cinq fois par défaut. La date du dernier arrêt est du 14 mars 1487. (Arch. nat., X2a 56, fol. 14.)

, escuier et homme d’armes de nostre ordonnance soubz la charge du sire de Saint-Pierre

Jean Blosset, seigneur de Saint-Pierre et de Carrouge, capitaine d’une compagnie de cent lances. (Cf. ci-dessus, p. 78, note.)

, lui estant ès marches de par deça en nostre service, comme encores est, envoya Adam Palateau en l’ostel d’un mareschal d’icelle ville, pour illec querir et amener ung cheval de poil rouen, qui appartenoit à Daulphin Rigault, son frère, que ledit Daulphin y avoit laissé pour le faire penser et guérir d’une maladie. Et en y allant, ainsi que ledit suppliant fut entre Lussac-les Eglises et Mondon, et comme au millieu du chemin desdiz lieux, ledit suppliant rencontra deux ou trois charpentiers et deux autres hommes et une femme, desquelx charpentiers estoit feu … …

En cet endroit du registre, six à huit mots ont été laissés en blanc.

ausquelx tous ensemblement ledit suppliant requist tout gracieusement qu’il leur pleust de lui monstrer le chemin qui lui convenoit tenir pour aller au Chezeau où il lui estoit de necessité passer. A quoy lui fut par aucuns desdiz charpentiers ou autres de leur dicte compaignie respondu arrogamment, en eulx mocquant dudit suppliant, qu’il allast toujours ou autres tels et semblables motz en effect et substance. Pour laquelle cause ledit suppliant, qui bonnement ne sçavoit quel chemin il devoit aller, en leur disant qu’ilz estoient bien fiers et de grant orgueil, se approucha pour prandre ung jeune filz qui estoit de leur dicte compaignie par la main, en leur disant oultre que ledit jeune enfant lui monstreroit sondit chemin. Sur lesquelles parolles ledit deffunct tres furieusement et ayant sa coyngnée en sa main, en s’aprouchant dudit suppliant et faisant manière de le vouloir frapper de ladicte coyngnée, lui dit qu’il n’y entreroit jà. Et ce voyant ledit suppliant, et pour obvier à la fureur dudit deffunct et à ce qu’il ne le meurtrist, bleçast ou occist de sadicte coyngnée, se tira arrière de lui en tournant le bois de sa javeline, pour en vouloir frapper ledit deffunct, mais il advint en ce faisant, par chaude colle et pour ce que tousjours icellui deffunct agressoit ledit suppliant en le poursuyvant et parceverant de le vouloir frapper de sadicte coyngnée, que icellui suppliant tourna sadicte javeline devers le fer, de laquelle il frappa ledit deffunct par la teste, dont il rompy le bois de sadicte javeline, et le fer d’icelle sailly de l’autre cousté, et atant se departy d’illec ledit suppliant et s’en alla son chemin le mieulx qu’il peut. Et au regard dudit deffunct, il s’en retourna où bon lui sembla. Et toutesfoiz ledit suppliant a esté adverty que ledit deffunct, à l’occasion dudit coup, deux jours après est allé de vie à trespas. Pour occasion de laquelle chose, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est mis en franchise, dont il n’oseroit jamais partir et seroit en voye de miserablement y finir ses jours, se nostre grace et misericorde ne lui estoit et est sur ce impartie, si comme il dit, en nous humblement requerant que, attendu que ledit cas, duquel ledit suppliant est très desplaisant, est advenu par cas d’avanture et chaude colle, et ne cuydoit ne avoit icellui suppliant intencion de frapper ledit deffunct en manière qu’il en mourust, mais seullement pour résister et obvier à ce qu’il ne le frappast de sadicte coyngnée, et aussi qu’il ne fut jamais actaint ne convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, ains en autres choses a tousjours esté bien famé et renommé, il nous plaise sur ce impartir audit suppliant nostre dicte grace et miséricorde. Pourquoy, etc., audit suppliant le fait et cas dessus dit, avons quicté, remis et pardonné, quictons, etc. avec toute peine, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous, etc. Donné à Arras ou mois de mars, l’an de grace mil cccc. soixante seize, et de nostre règne le seizeiesme.

Ainsi signé : Par le roy, le duc de Calabre

Charles II d’Anjou, duc de Calabre, comte du Maine, vicomte de Châtellerault, etc. (Cf. ci-dessus, p. 41 note.)

, le sire de Nerbonne

Jean de Foix, vicomte de Narbonne, puis d’Étampes, par don de Louis XI en 1748, depuis gouverneur du Dauphiné et du Milanais, second fils de Gaston de Foix et d’Eléonore d’Aragon. Après la mort de son neveu, en 1483, il prétendit succéder à la couronne de Navarre, à la souveraineté de Béarn et aux comtés de Foix et de Bigorre, ce qui excita de grands troubles dans le Béarn. Il accompagna Charles VIII à la conquête du royaume de Naples et mourut à la fin de l’année 1500. Il avait épousé Marie d’Orléans, sœur de Louis XII. (Le P. Anselme, Hist. généal., t. III, p. 377.)

et autres presens. Garreau. — Visa. Contentor. J. de Moulins.

MDXCI Mars 1477 (n.s.)

Rémission octroyée à Marsault Guyot, fils d’un maréchal de Châtain, pour un homicide involontaire. Contraint de prêter aide à Jean Jourdain, prieur de Roignac, qui voulait enlever une femme ayant suivi autrefois les gens d’armes et alors mariée à Bastien Charpentier, de Benest, il avait, dans la nuit, par mégarde, heurté de sa javeline Jean Charpentier, frère de celui-ci et lui avait fait une blessure à la gorge dont il était mort.

AN JJ. 206, n° 1080, fol. 233 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 154-157

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Marsault Guyot, aagé de xxi ans ou environ, filz de Jourdain Guyot, mareschal, demourant à Chastaign, contenant que, le samedy avant la feste de Monsieur saint Jehan Baptiste derrenier passée, ledit suppliant audit Chastaign, Jehan Jourdain, prieur de Roignac, luy dist qu’il y avoit au lieu de Benais une femme mariée avecques Bastien Charpentier, qui avoit autresfoiz suyvy les gens d’armes, laquelle luy avoit promis de s’en aler avecques luy, en luy priant qu’il luy voulsist aider à prendre et enmener ladicte femme. Et pour ce que ledit suppliant se tenoit estre tenu audit prieur, pour ce qu’il avoit autresfoiz servy son frère, ne lui osa refuser, ains luy accorda que pour ce faire il se rendroit, le samedy ensuivant ou le lendemain, au lieu de Traslebost, à l’eure de vespres. Et pour ce que ledit suppliant ne se trouva pas à ladicte heure, ains s’estoit couché à l’ostel de son père, en entencion de n’y aler point, ledit prieur, à l’eure de dix heures de nuyt, vint appeller à la porte du père dudit suppliant par plusieurs foiz icelluy suppliant, et pour savoir que c’estoit, le père dudit suppliant se leva et issi hors et trouva ledit prieur, auquel il demanda qu’il vouloit. Lequel prieur luy dist qu’il demandoit ledit suppliant ; et pour ce que les père et mère d’icelluy suppliant dirent audit prieur que leurdit filz estoit couché et n’estoit pas heure, ledit prieur frapa ledit père d’une espée sur la teste jusqu’a grant effusion de sang. Et oyant ledit suppliant le bruit, se leva, et voyant que ledit prieur estoit fort mal meu, dobtant que plus grand inconvenient n’advint, se tira devers ledit prieur. Lequel prieur tout incontinent le print par le colet et le tira hors de la compaignie et luy parla d’aler prendre ladicte femme. A quoy ledit suppliant se excusa très fort, mais ledit prieur luy dit que s’il n’aloit avecques luy, il feroit raser la maison dudit suppliant. Pour dobte desquelles menasses et aussi pour obvier que ledit prieur qui est homme de mauvaix couraige ne procedast plus à batre sesdiz père et mère s’en ala avecques luy audit lieu de Traslebost. Auquel lieu ilz trouverent ung nommé Bilot, verrier, Morice, serviteur du seigneur de Benays

Il y avait, à Benest, un prieuré dont le prieur était peut-être seigneur du lieu. M. J.-M. Michon donne le texte d’une inscription gravée dans la nef de l’église de Benest, mentionnant des franchises octroyées aux habitants, l’an 1517, par le roi François Ier, en souvenir d’une défaite des Sarrasins en cette localité même, par Charlemagne. (Statistique monumentale de la Charente, Paris et Angoulême, in-fol. 1844, p. 64.) Les lettres de François Ier ne paraissent pas s’être conservées, mais on en connaît une confirmation donnée par Henri IV, à Chartres, au mois d’octobre 1593, qui font remonter ces franchises à Charlemagne lui-même et font supposer qu’elles furent à plusieurs reprises confirmées déjà par les prédécesseurs de François Ier. Elle est ainsi analysée dans un inventaire des enregistrements de la Cour des aides : « Lettres patentes de Henri IV portant confirmation aux habitans de Benay en Poitou de l’exemption de toutes tailles, aydes et subsides, suivant les lettres patentes à eux accordées par Charlemagne, en mémoire de la grande victoire qu’il remporta contre les Sarrazins, ayant fait bastir une belle église audit lieu de Benay et des tombeaux aux grands officiers de son armée tués en ladite bataille, pour lesquels lesdits habitans sont tenus tous les ans de faire celebrer à leurs frais un service solempnel, etc. » (Arch. nat., JJ. 666, à la date du 17 décembre 1593, qui est celle de l’enregistrement, et au 20 décembre 1602.)

et ung nommé Rateau, et eulx illec assemblez, se partirent et alerent audit lieu de Benays, embastonnez, c’est assavoir ledit prieur d’une espée, ledit Bilot d’une espée, ledit Morice d’une javeline, ledit Rateau d’une espée et d’une javeline, et ledit suppliant d’une espée et d’une javeline, que luy avoit baillé ledit prieur. Et eulx arrivez audit lieu de Benays environ mynuyt alèrent à la porte de la maison dudit (sic) Martin Charpentier qui estoit fermée ; laquelle ledit Morice ouvry et entra dedans en disant : « Qui est céans ? » et tous ensemble entrèrent dans ladicte maison et menèrent assez grant bruit. Auquel bruit ledit Martin et sa femme se levèrent et demandèrent que c’estoit. A quoy ledit prieur respondit qu’ilz demandoient ladicte femme dudit Bastien. Et lors ledit Martin leur dist qu’elle n’y estoit pas. En disant lesquelles parolles, icellui prieur secrètement dist audit suppliant qu’il alast devant la porte de ladicte maison pour garder que aucuns gens de guerre qui disoient estre accoinctés de ladicte femme ne empeschassent de l’enmener, et que ledit Morice s’en alast vers la rue dudit Benays. Lequel suppliant qui est jeune, simple et ignorant, se mist devant ladicte porte, où il se tint droit par aucun peu de temps, pendant lequel ayant le visage vers la rue et ne povoit riens veoir pour la nuyt qui estoit fort obscure, oyt bruit d’une personne qui venoit par derrière et luy dist soubdainement : « Qu’est-ce là ? Qu’est-ce là ? » Et lors ledit suppliant, qui ne s’estoit jamais trouvé en telz besoignes, pour la paour et frayeur qu’il eust, se retourna soubdainement et, en soy retournant, le fer de ladicte aveline qu’il tenoit toucha celluy qui estoit illecques survenu, duquel touchement il ne s’apperceut comme point, et si n’avoit point entencion de fraper personne. Et doubtant que ce fussent gens qui fussent illec survenus, s’en entra en ladicte maison et dist audit prieur et autres qu’ilz s’en alassent et qu’il avoit oy bruit de gens ; et atant s’en issirent hors de ladicte maison, et en eulx en alant, oyrent la femme de feu Jehan Charpentier, filz dudit Martin, qui crya à haulte voix que son mary estoit blecié et mort. Et lors ledit prieur et autres dirent audit suppliant qu’ilz se dobtoient qu’il eust blecié ledit feu Jehan Charpentier. Lequel respondit que non avoit, au moins qu’il sceust. Et depuis ledit suppliant a oy dire que ledit feu Jehan fut celuy qui vint à lui à ladicte porte et qu’il avoit ung petit pertuis à la gorge, dont saillit grant effusion de sang, et que, par faulte de gouvernement ou autrement, une heure après, il ala de vie à trespas. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant s’est absenté, etc. ; requerant, etc. Pourquoy nous, etc., audit suppliant avons quicté, etc. les fait et cas dessus diz, avec toute peine, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, etc. Donné à Paris, ou moys de mars, l’an de grace mil cccc. soixante seize, et de nostre regne le xvie.

Ainsi signé : Par le conseil, de Villechartre. — Visa. Contentor. Picart.

MDXCII Avril 1477 (n.s., avant le 6)

Rémission en faveur de Louis Gaulteron, homme de labour, demeurant en Poitou, coupable du meurtre de son frère Pierre, mauvais sujet et ivrogne, qui l’avait injurié et le menaçait d’un bâton, ce qui le força à frapper pour se défendre.

AN JJ. 206, n° 1092, fol. 236 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 157-159

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Loys Gaulteron, homme de labour, demourant en Poictou, contenant que Jehan Gaulteron son père jà pieça maria ledit suppliant et feu Pierre Gaulteron, ses enfans, lesquelz ont tousjours depuis demouré avecques luy par l’espace de huit ou dix ans, pendent lequel temps ledit feu Pierre Gaulteron a esté de vie dissolue et tavernier sans vouloir entendre au labeur, ainsi que faisoient ledit suppliant et sondit père, dont souvantes foiz estoit reprins par leurdit père, mais il ne s’en vouloit chastier, ains prenoit souvant les biens de l’ostel, quant il en povoit trouver aucuns, et quant il n’en povoit avoir, levoit souvantesfoiz les serrures, rompoit les huys et faisoit plusieurs dommaiges à l’ostel de sondit père, et souvantes foiz injurioit sondit père et vouloist batre et tuer ledit suppliant, son frère, quant il luy remonstroit ses faultes. Et encores puis Noël ença, icelluy Pierre Gaulteron qui s’estoit mis en aguet pour faire desplaisir à sondit père, le trouva en chemin venant de la messe, le print au colet et le trayna jusques sur le bort de la rivière et le vouloit gecter dedans, si n’eussent esté troys femmes qui le luy rescoyrent et ostèrent. Et quant il vist qu’il n’estoit pas le plus fort, il mist la main au sein de sondit père et luy arracha sa bourse et l’emporta avec l’argent qui y estoit. Dont ledit suppliant, quant il sceut ledit cas fut très desplaisant et en reprint ledit son frère ; mais il n’en tint compte, ains le injuria et menassa de batre et tuer d’une dague qu’il avoit. Mais les femmes desdiz Gaulterons apaisèrent ledit debat. Et en continuant ledit Pierre Gaulteron lesdictes tavernes, quant il en retournoit faisoit plusieurs noises et debatz, parce qu’il estoit très souvant yvre et continuoit tousjours en sa meschante vie, tellement que tous ceulx de l’ostel en estoient mal contens. Et puis naguières ledit Pierre Gaulteron, qui estoit tout yvre, venant de la taverne, entra en la vigne de sondit père, où il trouva ledit suppliant qui tailloit ladicte vigne, et se print à rompre et extirper les seps d’icelle vigne ; ce que voyant ledit suppliant son frère luy dist par plusieurs foiz bien doulcement qu’il s’en alast et qu’il gastoit tout, dont ledit [Pierre] Gaulteron ne fut pas content et le voult oultrager, en gectant des pierres et bastons contre luy, tellement que pour obvier à sa malice, ledit suppliant fut contrainct de soy oster d’illec et delaisser sa compaignie. Et tantost après ledit Pierre Gaulteron, aussi yvre qu’il estoit, s’en ala à l’ostel de sondit père et entra au celier, ouquel avoit certaines pièces de vin et osta le bondon de la meilleur pièce de vin qui y fust et se print à boyre ledit vin avec ung grant chalumeau qu’il avoit ; en quoy faisant, ledit suppliant survint illec et luy remonstra qu’il faisoit mal de gaster, boyre et esvanter ledit vin, qui estoit le meilleur vaisseau de vin qui fust céans et dont ilz povoient avoir le plus d’argent pour paier leurs tailles. Dont ledit Pierre Gaulteron ne fut pas content, mais en regnyant le nom de Dieu et jurant la char Dieu, dist audit suppliant que en despit de son visaige il en buroit à sa voulenté ; et print une grosse courge ou baston de quoy on va quérir l’eau et s’efforça d’en bailler sur la teste audit suppliant, son frère. Lequel, pour obvier audit cop se recula, mais ledit Pierre le suyvoit, tousjours cuidant le fraper, et ainsi que ledit suppliant se reculoit pour évader lesdiz cops de son dit frère, qui le suyvoit tousjours, le baston tout hault levé, icelluy suppliant rencontra audit celier ung baston ferré, lequel il print pour obvier à ce que son dit frère ne le frapast, et en soy défendant frapa ledit Pierre, son frère, en la cuisse et luy fist une playe d’environ deux doiz. A cause de quoy ledit feu Pierre Gaulteron, dedans cinq ou six jours après, ala de vie à trespas. Et saichans le père dudit suppliant et la femme du trespassé que ledit cas estoit advenu sans malice precogitée par ledit suppliant, et dont il estoit et est très desplaisant, luy ont pardonné ledit cas. Mais neanmoins il dobte, etc., se nostre grace, etc. Pour quoy nous, etc., audit suppliant avons quicté, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, etc. Donné à Paris, ou moys d’avril, l’an de grace mil cccc. soixante et seize avant Pasques, et de nostre règne le xvime.

Ainsi signé : Par le conseil. Puygirault. — Visa. Contentor. Picart.

MDXCIII Juin 1477

Rémission en faveur de Jean Embasmat

La nouvelle édit. du Dict. des familles du Poitou mentionne quelques membres de la famille Ambasmat ou Embasmat, qui habitait sur les confins du Poitou et de la Basse Marche ; mais Jean, écuyer, sr des « Vestisons » n’y figure pas.

, écuyer, seigneur des Vestisons en Angoumois, possédant entre autres domaines, avec « tout droit de dismes et mesmement d’aigneaulx naissans », la seigneurie du Breuil en la paroisse de Benest

Ce personnage paraît bien être le même que Jean Gerbault, seigneur de Bregeons, cne de Nérignac (Vienne), qui périt, en 1494, assassiné par sa femme, Marie de Saint-Savin et ses deux fils Louis et Guillaume Gerbault, avec la complicité de son beau-père Galehaut de Saint-Savin, écuyer, sr de la Tour-aux-Cognons. Il a été question de cette affaire dans le vol. précédent (Arch. hist., t. XXXVIII), p. 310, note.

. S’étant querellé avec Jean Gerbault

L’on a vu ci-dessus (p. 155 note) que Benest était compris dans les limites de la sénéchaussée de Poitou.

, qui lui contestait ses droits et l’injuriait, « tout esmeu il luy donna de son espée sur la teste tellement que le sang en sortit » oubliant qu’il « avoit autresfoiz eu de luy asseureté par devant nostre seneschal de Poictou ou son lieutenant … Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, etc. Donné à Paris, ou moys de juing l’an de grace mil cccc. soixante dix sept, et de nostre règne le xvime ».

AN JJ. 206, n° 1114, fol. 241 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 160

MDXCIV Juin 1477

Rémission accordée à Jean Forgnet, meunier de Montrevault, qui revenant de prendre livraison de grain à l’Hermenault et passant par Saint-Christophe-sur-Sèvre, avait été attaqué, ainsi que ses compagnons, par Léger Challet, conduisant une troupe armée de bâtons, et en se défendant avait frappé à mort ledit Challet.

AN JJ. 206, n° 1123, fol. 243 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 160-162

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Jehan Forgnet, moulnier demourant à Montreveau, contenant que, le mardy tiers jour de ce moys ledit Forgnet, Michiel Bousseraille, Jehan Gerault, Loys Boitleau et Perrin Ressoul, en s’en retournant de l’Ermenault en Poictou, où ilz estoient alez querir du moulaige pour leurs moulins, se arrestèrent à repaistre, eulx et leurs bestes, en la parroisse de Saint-Christofle-sur-Seivre

Sic. On ne trouve point de paroisse de ce nom ; peut-être s’agit-il de Saint-Christophe-du-Bois, quoique cette localité soit sur la Moine et non sur la Sèvre.

, à heure de jour clouant et eulx estans arrestez au grant chemin royal, vint à eulx ung nommé Ligier Challet et avecques luy six ou sept autres embastonnez, qui les voulurent chasser d’ilec à force et ne queroient que occasion de prendre noyse et debat avecques eulx, et leur usèrent ledit Challet et ses complices de grosses parolles et rudes, disant icelluy Challet qu’il ne tenoit de roy ne de rot, et que s’il avoit tué ledit Forgnet et tous ceulx qui estoient avec luy, qu’il n’en donneroit riens et que jamaiz n’en seroit autre chose. Et ledit Forgnet et ceulx qui estoient avecques luy luy firent response que justice estoit ouverte pour eulx et pour luy, et luy offrirent à boyre et à manger oudit chemin où ilz estoient assis pour repaistre. Mais ledit Challet leur fist response qu’il ne demandoit justice que celle qu’il et ceulx qui estoient avecques luy en feroient, et ne cessa de les menacer à batre, et de fait, sans ce qu’ilz luy meffeissent en riens, icelluy Challet et ses complices se prindrent à batre et mutiler ledit Forgnet et les autres dessus nommez, tellement qu’ilz en gectèrent deux ou troys par terre, et y fut ledit Forgnet gecté par deux foiz et après se print à fouyr, et en fuyant ledit Challet dist telles parolles : « Demeure, demeure, ribault, tu es mort. » Et ainsi qu’il fuyoit, voyant par ledit Forgnet qu’il estoit suyvy de si près et qu’il estoit en dangier de sa personne, il se retourna vers ledit Challet qui le chassoit, et en se défendant frapa deux ou troys cops d’un penart qu’il avoit icelluy Challet. A l’occasion desquelz ledit Challet, deux ou troys heures après, ala de vie à trespas. A l’occasion duquel cas ledit Forgnet s’est absenté, requerant, etc. Pour quoy nous, etc., audit Jehan Forgnet, suppliant, avons quicté, etc. Si donnons en mandement au bailly de Touraine, etc. Donné à Paris, ou moys de juing, l’an de grace mill cccc. soixante dix sept, et de nostre règne le xvime.

Ainsi signé : Par le Conseil. De Wignacourt.

MDXCV Juillet 1477 (avant le 22)

Rémission accordée à Mathurin Audebaut, écuyer, âgé de vingt-six ans, coupable du meurtre de Jean Payneau, laboureur, qui lui avait cherché querelle et dont le frère Thénot l’avait assailli à coups d’aiguillon, ce qui l’avait contraint à se servir de sa dague contre eux.

AN JJ. 206, n° 1134, fol. 245 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 162-164

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Mathurin Audebaut, jeune escuier, aagé de xxvi. ans ou environ, contenant que puis xv. moys ença, feu Guiart Audebaut

Guyard Audebaut, écuyer, seigneur de la Péronnière et de Villegay, fils aîné de Pierre Audebaut et de Marie d’Appelvoisin, servit au ban de 1467 comme homme d’armes du sr de la Grève, et hérita l’année suivante de sa sœur, veuve de Nicolas Massé, sr de Villegay. Marié, vers 1430, à Catherine Aménart, fille de Jean, écuyer, sr des Noyers, il en eut plusieurs enfants, entre autres René, écuyer, seigneur de la Péronnière et Villegay, qui épousa Guillemine d’Oiron et testa le 17 septembre 1483 ; Mathurin, écuyer, qui fut seigneur de la Péronnière après son frère aîné, par droit de viage ; Jacques, que l’on trouve qualifié seigneur de la Chavelière en 1471. On ne sait si ces deux derniers eurent postérité. (Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. Ier, p. 163).

, son père, en son vivant seigneur de la Perronnière, est alé de vie à trespas, délaissez entre autres ses enfans, René Audebault, son filz aisné, et ledit suppliant, et par ledit trespas a ledit René, comme filz aisné, recuilly toute la succession dudit Guyart Audebaut, leur père, sur laquelle, selon la coustume du païs de Poictou, il est tenu faire et bailler audit suppliant provision en attendant le retour de ladicte succession ; sur laquelle provision il luy a baillé certains héritaiges estans en la parroisse de Aubiers, et pour son loigiz luy a donné une maison et jardin assise au villaige de la Galière. Et pour ce que ladicte maison estoit fort ruyneuse, icelluy suppliant a naguières entreprins de faire démolir ladicte maison, pour icelle reedifier et l’eslargir sur une saillie estant contre ladicte maison. Et le lendemain [de la feste] Saint Jehan-Baptiste derrenièrement passée, se transporta ledit suppliant audit lieu de la Galière et y fist aler quatre ou cinq hommes, laboureurs de bras, lesquelz abatirent ladicte maison, et [a] la relevée dudit jour, ainsi que lesdiz hommes prenoient leur repas, se partit d’avec eulx ledit suppliant et ala regarder la manière de faire sondit édiffice. Et luy estant illec, survint ung nommé Jehan Payneau l’aisné, laboureur, demourant audit lieu de la Galière ; lequel s’arresta illec et dist audit suppliant qu’il ne souffriroit point à icelluy suppliant qu’il édifiast ou accreust sondit édifice en manière que le chemin qui estoit illec près fust empesché. Dont ledit suppliant, qui est noble homme, voyant l’entreprinse ou empeschement que ledit Peyneau se vantoit luy faire, fut desplaisant, et à ceste cause se meurent parolles entre eulx, tellement que ledit suppliant tira sa dague et du plat d’icelle frapa sur les espaules dudit Peyneau quatre ou six cops sans le blecier ou mutiler ; et après remist icelluy suppliant sadicte dague en son fourreau, considerant qu’il n’auroit point de honneur à le batre, pour ce qu’il estoit viel et ancien, et atant se departyt d’illec ledit Peyneau. Mais incontinent accourut à son secours ung nommé Thenot Peyneau, son frère, et d’un grant aguillon fort et poisant dont il touchoit ses beufz, frapa ung cop ou deux icelluy suppliant sur la teste, par quoy ledit suppliant soy voyant ainsi batu et oultraigé, dobtant que lesdiz Jehan et Thenot Peyneaulx le voulsissent encores plus batre, tira derechief sadicte dague, et trouva moyen de oster ledit aguillon audit Jehan

Il y a lieu de penser que Thenot avait passé l’aiguillon à son frère pendant la lutte. [L.C.]

Peyneau, lequel en ce faisant se print à ladicte dague et se bleça ung peu en deux des doiz de sa main, et en la retirant ledit suppliant en frapa troys ou quatre cops du plat icelluy Jehan Payneau par la teste et par l’eschine, tellement que ladicte dague luy sailly hors la main et cheut à terre. Et ainsi que ledit suppliant amassoit à terre sadicte dague, ledit Jehan Payneau qui avoit prins une grosse pierre en son poing, luy donna de ladicte pierre ung cop par la teste tellement qu’il luy abatit son chapeau et son bonnet, et non content de ce le print aux cheveux à deux mains et lui bailla la jambe pour le cuider abatre, tellement que icelluy suppliant, sentent le mal que luy faisoit ledit Payneau, frapa icelluy Payneau du taillant de ladicte dague par l’eschine et luy couppa son vestement sans autrement le blecier ; mais delà ledit suppliant recouvra et frapa ung autre cop de sadicte dague au droit du jarret icelluy Jehan Payneau, tellement qu’il en issist sang. Et ce fait s’en ala ledit Payneau en sa maison, où le lendemain ensuivant, par faulte de gouvernement ou autrement, il ala de vie à trespas. A l’occasion duquel cas ledit suppliant s’est absenté, etc., requerant, etc. Pourquoy, etc., à icelluy suppliant avons quicté, etc. Si donnons en mandement au seneschal du Poictou, etc. Donné à Paris, ou moys de juillet, l’an de grace mil cccc. soixante dix sept et de nostre règne le xvime.

Ainsi signé : Par le Conseil. De Villechartre. — Visa. Contentor. Picart.

MDXCVI Août 1477

Rémission en faveur de Jean Bertaut, receveur à Blaslay des possessions du chapitre de Saint-Martin de Tours, de Jean Vesquaut et Jean Brun, ses serviteurs, qui, requis par le prévôt de Blaslay, d’enlever la moisson d’un champ appartenant audit chapitre et usurpé par Mathurin Guerin et André Quenault, avaient dû en venir aux mains avec ceux-ci et avaient frappé mortellement le premier.

AN JJ. 206, n° 1131, fol. 245 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 164-166

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Jehan Vesquaut, Jehan Brun et Jehan Bruet, povres gens de labour, chargez de femmes et mesnaige, et de Jehan Bertaut le jeune, demourans au Vergier-Saint-Martin, contenant que ledit Jehan Bertault est receveur de noz chiers et bien amez les doyen, tresorier et chapitre de l’église Monsieur Saint-Martin de Tours

Le chapitre de Saint-Martin de Tours possédait, dans le Mirebalais, l’église de Blaslay, l’église de Doussay, l’église de Varennes, et les terres du Verger-Saint-Martin.

et du prevost de Blalay en ladicte église sur leur terre et revenue qu’ilz ont audit lieu de Blalay et environs près Mirebeau ; pour raison de laquelle terre lesdiz de Saint-Martin et mesmement ledit prevost se dient estre seigneur d’une piece de terre assise en la Voye parfonde au-dessus du Gué de Blelay, c’est assavoir ledit prevost du fons et les diz doyen et chapitre de la disme des fruitz croissans en icelle ; et laquelle terre Mathurin Guerin et André Quenault ont, contre le vouloir desdiz de Saint-Martin et prevost, labourée et emblavée ceste presente année ; ce que ledit Bertaut le jeune fist savoir ausdiz de Saint-Martin et prevost. Lequel prevost, de ce adverty, donna charge audit Bertaut de lever ledit blé. Et à ceste cause icellui Bertaut, le jeudy viie jour de ce present moys d’aoust, pour ce qu’il fut adverty que lesdiz Guerin et Quenault avoient cuilly et enlevé presque tout ledit blé, sans y avoir laissé disme ne recognoissance de seigneurie, il delibera qu’il iroit en ladicte terre pour lever le remanant dudit blé, et environ huit ou neuf heures au soir dudit jour, commanda ausdiz Vesquault et Brun, ses serviteurs, qu’ilz alassent en ladicte terre, ce qu’ilz firent et ilecques trouvèrent lesdiz Guerin et Quenault et la femme d’icelluy Quenault, ausquelz iceulx serviteurs dirent qu’ilz n’enmeneroient pas lesdictes gerbes. A quoy iceulx Quenault et sa femme respondirent que si feroient, et ledit Vesquault dist que non et qu’il les en garderoit, s’il povoit. En disant lesquelles parolles, ledit Guerin se print par derriere au colet dudit Vesquault et s’efforça le faire tumber à terre, ce qu’il ne pot faire, ains icelluy Vesquault se evada de luy et luy dist que plus ne luy touchast, autrement luy monstreroit comment luy en desplaisoit. Après lesquelles parolles, ledit Guerin se départit d’illec et ledit Vesquault dist audit Brun, present lesdiz Quenault et sa femme, qu’il alast dire audit Bertaut, leur maistre, qu’il menast ou feist mener illec, sa charrete, ce qu’il fist, et tout incontinent lesdiz Brun, Bertaut et Bruet se transportèrent avec une charrete et deux mules en ladicte terre et se mirent à lyer et mettre en gerbe partie dudit remanant de blé. En quoy faisant, survindrent lesdiz Guerin, Quenault, Hillaire Quenault, Jehan Bruet (sic), la femme de Jehan Quenault et autres, lesquelz dirent telles parolles : « Estes-vous là, Bertaut ? » Et il leur respondit : « Oy » ; et lors ledit Guerin luy dist : « Vous en voulez mener mes gerbes, mais vous ne les en menrrez pas », et en ce disant, d’un pal de charrète qu’il avoit, frapa ledit Bertault sur la teste tel cop qui le fist cheoir à terre et perdre la parolle ; et se gectèrent icelluy Guerin et la femme dudit André Quenault sur icelluy Bertault et s’efforçoient de l’estrangler et faire illecques mourir. Et ce voyant ledit Vesquault, serviteur dudit Bertaut, print ung pal de charrete, duquel il frapa sur ledit Guerin ung cop ou deux, ne scet sur quelle partie de son corps. Au moyen desquels cops ledit Guerin, deux ou troys jours après, ala de vie à trespas. Au moyen duquel cas lesdiz supplians se sont absentez, etc., requerans, etc. Pour quoy nous, etc., ausdiz supplians avons quicté, etc., les faiz et cas dessusdiz, avec toute peine, etc. Si donnons en mandement au bailly de Touraine, etc. Donné à Paris, ou moys d’aoust, l’an de grace mil cccc. soixante dix sept, et de nostre règne le xviime.

Ainsi signé : Par le conseil. De Villebresme. — Visa.

MDXCVII Octobre 1477

Rémission accordée à Toussaint Serin, sacristain de l’abbaye de la Réau, considéré comme complice du meurtre d’un nommé Mathurin Desbordes, qui ayant attaqué, avec plusieurs autres, les gens de l’abbaye occupés à faire la récolte des noix sur une terre appartenant à celle-ci, y avait été frappé mortellement.

AN JJ. 206, n° 1179, fol. 255 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 167-170

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de frere Toussains Serin

Toussaint Serin, sacristain de l’abbaye de Notre-Dame de la Réau, chargé par l’abbé, parce qu’il était « bon administrateur, de recueillir les moyssons de lad. abbaye et autres fruictz croissans ès héritages d’icelle », fut poursuivi au criminel, devant le sénéchal de Poitou, par Colas et Simon Grégoire, qui, d’une part, se prétendaient légitimes possesseurs de la terre de « Chauvetain » alias « Rochevatrain » et de plus de cinquante noyers dont elle était plantée, et d’autre part avaient dans le conflit subi les mauvais traitements des moines, particulièrement Simon qui avait reçu une blessure tellement grave qu’on l’avait tenu pour mort. Serin était accusé d’avoir donné le signal de l’attaque, en disant : « Qui aura courage, si frappe » ; il conduisait deux moines et une douzaine de gens de labour armés et « embastonnés », sachant bien que les noix ne leur appartenaient pas et qu’ils seraient peut-être empêchés de les abattre et de les récolter. D’ailleurs la contestation de propriété entre l’abbaye et les plaignants avait valu à ceux-ci une haine non dissimulée de la part des moines, au point qu’ils s’étaient munis de lettres de sauvegarde, dans le but de se mettre à l’abri des entreprises des religieux. Quand Desbordes et les autres virent arriver les hommes armés du sacristain, ils allèrent, non pas chercher du renfort pour les combattre comme le prétendaient les agresseurs, mais les sergents de la justice du lieu, pour leur défendre de donner suite à leur entreprise, sous peine d’enfreindre la sauvegarde royale. Leur attaque violente, la mort de Desbordes, les blessures de plusieurs autres étaient d’autant plus répréhensibles. Ajournés à trois brefs jours devant le sénéchal, Serin ne comparut point et fut condamné par contumace à l’amende envers le roi et envers partie. Il releva appel au Parlement où l’affaire fut plaidée le 29 mai 1478. Quoique non coupable, déclara-t-il, ses adversaires l’avaient fait citer d’abord devant l’official de Poitiers (les plaignants le niaient absolument), qui l’avait renvoyé absous, puis, sachant qu’il était à Paris et ne pourrait être averti en temps utile, ils l’avaient fait ajourner devant le lieutenant du sénéchal de Poitou, qui l’avait condamné par défaut, en quoi ils avaient eu deux fois tort, d’abord parce que l’accusé était dans l’impossibilité de se rendre à un ajournement qu’il ne connaissait même pas, ensuite parce qu’il ne relevait pas d’un juge séculier. Il prétendait, en outre, que la terre de Chauvreteau appartenait bien légitimement à l’abbaye de la Réau. La cour donna gain de cause à Colas et Simon Grégoire, confirma la sentence du sénéchal, ordonnant qu’elle serait exécutée selon sa forme et teneur, et condamna Toussaint Serin, outre les amendes au roi et à la partie adverse, aux frais de la cause d’appel ; mais cet arrêt définitif fut rendu seulement le 22 mars 1486, n.s. ! (Arch. nat., X2a 42, à la date du 29 mai 1478 ; X2a 45, date du 22 mars 1486 ; et X2a 51, date du 14 mars 1486).

, religieux et secretaire de l’abbaye de Nostre-Dame de la Reau

La Gallia christiana, dans sa liste très incomplète des abbés de N.-D. de La Réau, passe de Guillaume (1434) à André des Herbiers, dernier abbé régulier, mentionné dans des chartes de 1493, 1512 et nov. 1514. (T. II, col. 1364.) On en connaît un autre, dans l’intervalle, Robert de la Goupillère, qui, le 3 février 1445 nov., traite avec la dame de Mauprevoir au sujet des bois de l’abbaye. (Coll. Dom Fonteneau, t. IV, p. 483) ; il est peu probable qu’il fût encore à la tête de ce monastère en 1477.

, de l’ordre Saint-Augustin, contenant que le ixe jour de septembre derrenier passé par l’ordonnance et deliberacion des prieur et convent de ladicte abbaye, ledit suppliant et deux autres religieux d’icelle abbaye et aucuns laboureurs avecques eulx alèrent au lieu de Rechauvetau

Dans les registres du Parlement qui viennent d’être cités, ce nom de lieu est écrit tantôt « Rochevatrain », tantôt Chauvetain. M. Redet, dans son Dict. topogr. de la Vienne, l’a recueilli sous la forme « Chauvreteau » (cne de Millac), avec la variante « Rechauvretau ».

appartenant à ladicte abbaye pour cuillir et amasser des noix, qui estoient en plusieurs noyers des appartenances d’icelluy lieu. Et eulx arrivez ausdiz noyers, ils y trouvèrent Mathurin Desbordes et autres, et les salua ledit suppliant en leur demandant qui les avoit illec mis en l’eritaige de l’abbaye. Lequel Mathurin luy respondit que c’estoit au sien et incontinent s’en ala sans dire mot ; et se print ledit suppliant et ceulx qui estoient avecques luy à abatre et faire abatre les noix et les mettre ès sacs. Et lors ung nommé Guillaume Serault, qui illec se trouva, dist audit suppliant et à ceulx qui estoient avecques luy que ledit Mathurin aloit quérir des gens, pour les oultrager et que ilz se donnassent garde. Et lors l’un desdiz autres religieux dist telles parolles : « Ces gens sont de mauvaise afaire, ayons des bastons ; car baston acquiert paix. S’ilz nous voyent desgarnis, ilz nous oultrageront. » Et ce pendant vint ledit Mathurin, qui avoit une grande forche de fer, accompaigné de Jehan et Symon Dommeteaulx, Jacques Dommeteau et de Grant Jehan Dommeteau, Jehan Gregoire et autres jusques au nombre de douze ou plus, armez de fer d’espées, et de grans couteaulx, et se mirent à vuider les sacs où estoient lesdictes noix. Et ce voyant, ledit suppliant, pour éviter à debat, leur dist gracieusement qu’il estoit content d’en croire gens de bien et leur nomma des gens de pratique ; maiz ilz n’en vouldrent riens faire, combien qu’il leur dist qu’il estoit content que lesdictes noix demourassent en main tierce. Et ainsi qu’il disoit lesdictes parolles, ung des gens dudit Mathurin d’un gros baston qu’il avoit se print à fraper sur ledit Macias qui avoit une arbaleste. Lequel se couvrit de sadicte arbaleste, sans en tirer. Et non content de ce, ledit Mathurin print aux cheveux ledit Guillaume Avril, mestayer de ladicte abbaye, et à l’occasion de ce se sourdit ung bruit entre eulx, ou quel, ainsi que ledit suppliant a depuis oy dire, lesdiz Pruilly et Colas

Sic au registre, bien qu’il n’ait pas été question encore de ces deux religieux. On verra par les lettres de rémission, datées de novembre 1477, qu’ils obtinrent personnellement de la grande Chancellerie, qu’il s’agit de Jean de Preuilly et de Colas du Breuil-Helion (n° MDC ci-dessous).

, religieux de ladicte abbaye, en defendent eulx et ceulx de leur compaignie, fraperent sur ledit Mathurin, qui avoit prins ledit mestoyer aux cheveux, tellement qu’il cheut à terre. Lequel Mathurin fut emporté et mené au lieu de Rechauveteau, auquel lieu il fut par l’espace de xv. jours, et disoit-on qu’il estoit guery, mais depuis, par ce qu’il fut remué de lieu en autre sur une charrete, son sang se esmeut, dont il rencheut, tellement que, par mauvais gouvernement ou autrement, deux ou troys jours après, il ala de vie à trespas. Et pour ce que ledit suppliant estoit present quant ledit cas advint, il dobte que on le voulsist apprehender en justice, se nostre grace, etc., requerant, etc. Pourquoy, etc., audit suppliant avons quicté les fait et cas dessusdiz, avec tout peine, etc. Si donnons en mandement à nostre seneschal de Poictou, etc. Donné à Paris, ou moys d’octobre, l’an de grace mil cccc. soixante dix sept, et de nostre règne le xviime.

MDXCVIII [Octobre 1477]

Rémission accordée à Guillaume Avril, métayer de l’abbaye de la Réau, à Mathias Petit et à Jean Martin, gens de labour, impliqués dans la même affaire.

AN JJ. 206, n° 992, fol. 210 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 170-171

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc. Nous avoir receue l’umble supplicacion de Guillaume Avril, mestayer de l’abbaye de la Reau, de l’ordre Saint-Augustin, au diocèse de Poictiers, Matias Petit et Jehan Martin, gens de labour, contenant que le xie jour de septembre derrenier passé, le procureur et deux autres religieux de ladicte abbaye menèrent lesdiz supplians ès terres du lieu de Rechauvetau, estans des appartenances de ladicte abbaye, pour cuillir et amasser des noix en plusieurs noyers où il avait grant quantité de noix. Et quant ilz furent au lieu où estoient lesdiz noyers, ils y trouvèrent ung nommé Mathurin Desbordes et autres, lesquelz ilz saluèrent. Et leur demanda gracieusement ledit procureur qui les avoit illecques mis en l’eritaige de ladicte abbaye. Lequel Mathurin respondit que c’estoit au sien et s’en ala sans mot dire. Et se prindrent ledit suppliant et autres que ledit procureur avoit amenez à abatre et amasser les noix et les mettre ès sacs. Et ainsi qu’ilz les abatoient, ung nommé Guillaume Serault dist audit procureur et à ceulx qui estoient avecques luy que ledit Mathurin aloit querir des gens pour les oultrager. Et lors l’un des diz religieux dist : « Ces gens sont de mauvaiz afaire, ayons des bastons ; car baston acquiert paix. S’ilz nous voyent despourveuz, ilz nous oultrageront. » Et lors ledit Matias, l’un desdiz supplians, ala au molin de Sales, près d’illec, et apporta une arbaleste. Et ce pendent vint ledit Mathurin Desbordes atout une grant forche de fer, acompaigné de Symon et Jehan Dommeteaulx, Jaquet Dommeteau et du grant Jehan Dommeteau, Jehan Gregoire et de plusieurs autres jusques au nombre de xii, armez de forches de fer, d’espées et de grans cousteaulx et coignées, et impetueusement se print ledit Mathurin à vuider les sacs où estoient lesdictes noix. Ce voyant ledit procureur, pour obvier qu’il n’y eust noyse, dist gracieusement audit Mathurin et à ceulx qui estoient avec luy qu’ilz n’eussent point de debat et qu’il estoit content d’en croire gens de bien, et leur nomma des gens de pratique, s’ilz les en vouloient croyre, et qu’il estoit content que lesdictes noix demourassent en main tierce. Mais ainsi qu’il disoit lesdictes parolles, ung des gens dudit Mathurin et des diz Dommeteaulx d’un gros baston qu’il avoit frapa sur ledit Matias suppliant, et s’il ne se fust couvert de l’arbaleste qu’il avoit, il estoit en dangier de sa personne. Et non content de ce, ledit Mathurin print aux cheveulx ledit Guillaume Avril. Ce voyans, lesdiz deux religieux et ung nommé Jehan Petit qui estoit avecques eulx, et que ledit Mathurin et ses gens frapoient sur eulx, frapèrent sur ledit Mathurin, lequel, d’un cop que luy donna l’un desdiz religieux, cheut à terre et fut emporté et quinze jours après, par faulte de gouvernement ou autrement, il ala de vie à trespas. A l’occasion duquel cas, lesdiz supplians dobtent, etc., se nostre grace, etc., requerant, etc. Pourquoy, etc., audiz supplians avons quicté etc. …

La transcription est ainsi inachevée sur le registre. En rapprochant cet acte de celui qui précède immédiatement, on peut sans hésitation leur attribuer la même date (octobre 1477). Le registre qui les contient ne donne guère que des lettres émanant de la petite chancellerie ; c’est pourquoi elles sont datées de Paris, alors que le roi, sa cour et la grande chancellerie, au retour d’Arras, avaient regagné les bords de la Loire. L’affaire relatée dans cet acte et le précédent est plus détaillée dans la rémission octroyée, au mois de novembre de la même année, à Jean de Preuilly et à Colas du Breuil-Hélion (ci-dessous, n° MDC).

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MDXCIX Novembre 1477

Rémission en faveur de Jean Barthélemy, curé de Brèdes, au diocèse de Maillezais, qui avait déjà obtenu absolution du Pape, pour le meurtre commis, en sa présence et à son occasion, par un homme à son service, sur la personne du frère Jean Bertran, qui, avec d’autres religieux Augustins du prieuré du Coudray, avait voulu enlever de force les gerbes faisant partie d’une dîme appartenant audit curé de Brèdes.

AN JJ. 203, n° 11, fol. 6 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 172-176

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre bien amé Jehan Berthelemy, prebstre, curé de l’église parrochial de Bresde ou diocèse de Maillezays, contenant que, à l’occasion de certaine question que les religieux et prieur de Saint-Jacques du Couldray, de Saint-Augustin ou diocèse de Maillezays

Dans le « Compte de Jacques Mesnager, conseiller au Parlement de Paris, commis à la recette d’une taxe d’un décime levée en l’évêché de Maillezais pour l’année 1516 » (Arch. nat., J. 1037, n° 8), document qui donne une liste complète des abbayes, prieurés, cures, chapelles, etc. du diocèse, par doyennés, on ne trouve qu’un seul « prieuré du Couldray », sans indication du saint patron, situé dans le doyenné de « Viers » (Vihiers), dont faisaient partie les Echaubrognes ; mais le curé de Brèdes ne figure pas dans ce doyenné.

, et ledit suppliant, curé susdit, avoient eu pour percepcion des dixmes de gerbes de blé en certaines pièces de terres estans en et au dedans de ladicte parroisse, et lesquelles appartiennent audit curé, sans ce que lesdiz religieux en eussent eu jamais possession ne saisine, eulx religieux du Couldray, en temps de mestives de l’année mil cccc. soixante dix sept derrenière ou environ, de leur voulenté indeue et desordonnée, se transportèrent en une pièce de terre estant en ladicte parroisse du Couldray, qui estoit en et au dedans de ladicte disme d’icellui suppliant curé susdit, pour en lever le blé lors creu en une pièce de terre ; lequel suppliant estant lors en ladicte pièce de terre, pour faire lever sondit droit de disme et garder sadicte possession, respondy gracieusement ausdiz religieux que ladicte disme lui appartenoit et qu’il en estoit en possession, mais que ce non obstant qu’il estoit content que lui et lesdiz religieux levassent et perceussent ledit droit de disme d’icelle pièce et qu’il fust mis en garde et depposé en une tierce personne digne de foy, jusques à ce qu’il fust décidé par justice ou autrement à qui il appartiendroit. Maiz nonobstant les dictes responce gracieuse et offre raisonnable, lesdiz religieux, entre lesquelz estoit feu frère Jehan Bertran, prebstre religieux dudit ordre de Saint-Augustin, en blasphement le nom de Dieu et des Sains, disdrent qu’ilz emporteroient lesdictes gerbes de disme, voulsist ou non ledit suppliant curé susdit. Et après ce que lesdiz religieux furent derechef venuz à prandre et lever ledit droit de disme de ladicte pièce de terre, en laquelle estoit lors ledit suppliant curé susdit, qui y avoit trois hommes amenez, desquelz l’un prenoit et percevoit ledit droit de disme d’icellui curé et les austres deulx estoient venuz pour l’accompaigner sans aucunes armeures invasibles ne vouloir invader ne oultrager ledit feu Bertran ne autres, maiz seulement pour acompaigner ledit curé, ledit feu frère Bertran en grant fureur esmeu se adressa à l’un des hommes estans en la compaignie dudit curé, lui demandant par grant arrogance pourquoy il estoit illec venu. Et lesdictes parolles dictes, sans ce que ledit homme respondist aucune chose audit feu Bertran, icellui Bertran, avec ung groz baston qu’il tenoit en sa main, en bailla et donna deux grans coups sur la teste tant qu’il peut et tellement que desdiz coups il l’abaty à terre. Et par après icellui compaignon, congnoissant que le plus de la douleur dudit coup lui estoit passée, se releva et recouvra ledit baston, duquel il en bailla semblablement deux coups audit religieux, l’un par la teste et l’autre par le braz, tellement que icellui deffunct en cheut à terre, combien que lesdiz coups ne feussent pas mortels, et lesquelz icellui compaignon ne donna pas du consentement, commandement ne adveu dudit curé suppliant, ne par sa participacion, maiz de sa voulenté, car il estoit illec venu pour la conservacion de sondit droit de disme seulement. Et depuis à l’occasion desquelz coups de baston, certain jour après ensuivant, ledit Bertran, qui estoit de dissolue vie, par faulte de bon gouvernement ou autrement, ala de vie à trespas. Et combien que de la mort dudit feu frère Bertran ledit suppliant curé dessusdit ne fust et ne soit autrement en riens consentant, cause ne coulpable, ains en ait esté bien dolent, néantmoins, pour occasion de sa présence ou autrement que ledit cas est advenu pour le debat desdictes dismes, dont il faisoit deffences pour son droit, comme faire le devoit et lui estoit permis, doubtant que on lui voulsist obvier qu’il feust encouru en aucune irregularité et ès sentences ou censures et peines eclesiastiques, par le moyen dudit cas ou coulpe de mort, il en a obtenu de nostre saint père le Pape provision, par laquelle il a esté et est absoubz dudit cas et tout ce en quoy il pourroit estre encouru pour occasion d’icellui. Et avec ce en a eu pénitence secrète à luy enjoincte soubz le secret de confession, à lui imposée, ainsi qu’il appert par ces lettres appostoliques et procès executoire sur icelles, fait oultre ladicte pénitence secrète, laquelle ne se doit reveler. Mais ce non obstant, il est venu à la congnoissance dudit suppliant curé susdit que ses temporel et biens meubles ont esté prins et saisiz en nostre main à la requeste de nostre procureur et du procureur general de l’Université d’Angiers, pour ce que ledit deffunct se disoit escollier de ladicte Université, et pareillement à la requeste de frère Hélye du Boys

Hélie du Boys (de la famille Du Bois de Saint-Mandé), second fils de Paonnet Du Boys, écuyer, seigneur du Port, et de Marguerite de Toutessans, dame des Portes, était chevalier, commandeur de Beauvais, de Baigneux, de Saint-Jean du Port de la Rochelle et de Thévalle, en 1465, dit le Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. I, p. 584. Est-ce le même qui était aussi prieur de Saint-Jacques du Coudray, de l’ordre de Saint-Augustin ?

, soy disant prieur du prieuré dudit lieu du Couldray, par vertu des lettres obtenues du Conservateur de ladicte Université, et semblablement de Jacques Turpin, escuier, seigneur de Vihiers

La seigneurie de Vihiers fut apportée par Marie de Rochefort, fille de Thibault, chevalier, baron de Rochefort et de Vihiers, à Guy V Turpin de Crissé, qu’elle épousa en 1367, et dont la descendance la possédait encore à la fin du xviie siècle. (C. Port, Dict. hist. et géogr. de Maine-et-Loire, t. III, 718.) Jacques Turpin, chevalier, chambellan de Louis XI, était le fils aîné d’Antoine, chambellan des rois Charles VI et Charles VII et de Jeanne de La Grésille. François Ier le créa chevalier de son ordre en 1516. Il épousa Louise de Blanchefort, fille de Jean, chevalier, seigneur de Saint-Janvrin, et d’Andrée de Noroy, dont il eut deux fils et trois filles.

, ou son procureur audit lieu, en la chastellenie duquel ledit cas est advenu, et tellement que ledit suppliant demeure entièrement empesché en sesdiz biens meubles et temporel de sadicte cure. Pour laquelle cause icellui suppliant curé susdit, doubtant estre encouru envers nous et justice en aucune amende ou offence, nous a humblement fait supplier et requerir que, en tant que mestier est ou seroit, il nous plaisoit lui quicter et pardonner l’offence, peine et admende en quoy il peut ou pourroit estre encouru envers nous et justice à l’occasion dudit cas, et sur ce lui impartir noz grace et misericorde, humblement requerant que, attendu que ledit cas est advenu en sa presence seulement, sans ce qu’il en ait esté autrement consentant et qu’il en ait obtenu de nostredit saint père des lettres d’absolucion, et de tout ce en quoy il pourroit estre encouru pour occasion dudit cas, il nous plaise sur ce lui impartir icelles. Pourquoy nous, etc., avons, en tant que mestier est ou seroit, quicté, remis, etc. et l’avons restitué, etc., satisfacion faicte à partie, etc. ; en mettant au néant tous procès, etc. Et quant à ce imposons, etc. Si donnons en mandement, par ces dictes presentes, à nostre bailli de Touraine, etc., sans pour ce le molester, etc. Et afin que ce soit chose ferme, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, ou moins de novembre, l’an de grace mil cccc. soixante dix sept, et de nostre règne le xviime.

Ainsi signé : Par le conseil. A. Rolant. — Visa. Contentor. J. Duban.

MDC Novembre 1477

Rémission donnée en faveur des frères Jean de Preuilly et Colas du Breuil-Hélion, religieux de l’abbaye de La Réau, Jean et Mathias Petit et Guillaume Avril, coupables du meurtre de Mathurin Desbordes. Ce dernier voyant les gens de l’abbaye occupés à cueillir des noix en une pièce de terre, et prétendant qu’elle lui appartenait, alla chercher douze hommes armés de fourches, épées et couteaux avec lesquels il attaqua Jean de Preuilly et ses compagnons. Dans le combat, il reçut une blessure dont il mourut quinze jours plus tard.

AN JJ. 203, n° 17, fol. 9 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 176-179

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de frères Jehan de Pruilly et Colas du Brueil-Hélion

Dans les plaidoiries qui ont été citées ci-dessus (p. 167 note) entre Toussaint Serin, sacristain de l’abbaye de la Réau, d’une part, et Colas et Simon Grégoire, victimes du conflit relaté dans la présente rémission, ce moine est dit fils du seigneur de Combes. Ythier du Breuil-Hélion, écuyer, était alors un possesseur de ce fief, mouvant de la châtellenie de l’Isle-Jourdain, dont il rendit aveu en 1456 et le 3 octobre 1479. La nouv. édit. du Dict. des familles du Poitou, qui donne la généalogie de cette famille, dit qu’Ythier, sr de Combes, épousa, vers 1440, Ayde de Chastenet, et fut père de quatre fils, dont les deux derniers, Robert et Antoine, embrassèrent l’état ecclésiastique (t. Ier, p. 758). D’après cette désignation du registre du Parlement (X2a 42, à la date du 29 mai 1478), on semble fondé à ajouter à la liste de ses enfants le nom de Colas du Breuil-Hélion, religieux de l’abbaye de la Réau.

, religieux de l’abbaye de la Reau, Jehan Petit, Matias Petit, Guillaume Avril, povres gens de labour, et Jehan Martin, clerc, contenant que le ixe jour de septembre derrenier passé, lesdiz supplians alèrent avec le procureur et gouverneur de ladicte abbaïe et autres gens de labour que ledit procureur mena ès terres du lieu de la Rechauvetau, appartenant à ladicte abbaïe pour cueillir et amasser les noiz de certaine quantité de noyers. Et quant ilz furent au lieu où estoient lesdiz noyers, ilz y trouvèrent ung nommé Mathurin des Bordes et autres qui estoient avec lui ; lesquelz ils saluèrent, et leur demanda ledit procureur gracieusement qui les avoit illec amenez en l’eritage de ladicte abbaïe. Lequel Mathurin leur respondit que c’estoit ou sien, et s’en alla ledit des Bordes sans mot dire. Et se prindrent lesdiz supplians et les autres gens que ledit procureur avoit illec amenez, à abatre, cueillir et amasser les noiz et les mettre en sacs. Et seurvint illec ung nommé Guillaume Sorault qui leur dist que ledit Mathurin aloit querir des gens pour les oultrager et qu’ilz se donnassent garde. Et ce voiant ledit procureur de ladicte abbaïe, il receut ledit Sorault pour aider à cueillir les noiz et aussi à leur donner secours, si on leur vouloit faire oultrage ; et ledit de Pruilly, l’un desdiz supplians, dist telles parolles : « Ces gens sont de mauvaiz afaire ; aions des bastons ! car ung baston porte paix. S’ils nous voient desgarniz, ilz nous oultraigeront. » Et alors ledit Macias, l’un desdiz supplians, voiant qu’il n’avoit point de baston, doubtant estre oultragé, par ce que les gens de ladicte abbaïe n’avoient que fourchez de fer et serpes longues pour nectoier et faulcher soubz les noyers pour mieulx amasser les noiz, avec ung espiot et javeline seulement, ala au molin de Sales, près d’ilec, et apporta une arbaleste. Et ce pendant vint ledit Mathurin des Bordes qui avoit une grant fourche de fer, acompaigné de Simon, Jehan et Jacquet Dommeteaux et de grand Jehan Dommeteau, Jehan Gregoire et de plusieurs autres jusques au nombre de douze ou environ, armez et embastonnez de fourchez de fer, d’espées, de grans cousteaulx et de congnées. Et impétueusement se mist ledit Mathurin à vuider les sacs où estoient lesdictes noiz, et combien que le procureur de ladicte abbaïe, pour éviter qu’il n’y eust noise ne debat, requist gracieusement audit Mathurin et à ceulx qui estoient avec lui qu’ilz n’eussent point de débat, en leur disant en oultre que s’ilz y pretendoient aucune chose, qu’ilz estoient contens d’en croire gens de bien et leur nomma des gens de pratique, s’ilz les en vouloient croire, dont ilz ne tindrent compte, jasoit ce qu’il leur dist encores qu’ilz estoient contens que lesdictes noiz demourassent en main tierce. Mais ce pendant qu’il disoit lesdictes parrolles, la femme dudit des Bordes osta le trait de dessus l’arbaleste que ledit Macias tenoit bandée et de rechief ledit Marcias (sic) remist ung autre trait par dessus ladicte arbaleste, mais l’un des gens dudit Mathurin et desdiz Dommeteaux se print à frapper d’un groz baston qu’il avoit sur ladicte arbaleste, tellement qu’elle se desbanda et s’en alla le trait à la volée, sans toucher à personne ; et s’il ne se fust couvert de sadicte arbaleste, il en estoit en dangier de sa personne. Et non content de ce, icellui Mathurin print aux cheveulx ledit Guillaume Avril, l’un desdiz supplians, et après vint frapper ledit Jehan Petit, aussi suppliant, d’une fourche de fer, et s’efforcèrent lesdiz Mathurin et ses complices de vouloir plus oultraiger lesdiz supplians et ceulx qui estoient avecques eulx. Et adonc, voians iceulx supplians l’oultrage que on leur faisoit, pour y résister et en eulx deffendant, lesdiz Jehan Petit, de Pruilly et du Brueil-Hélion, supplians, frappèrent sur ledit Mathurin, qui ainsi faisoit lesdiz excès et oultrages, de leurs bastons qu’ilz avoient, et entre autres frappa ledit de Pruilly d’une serpe à long manche du costé du saz

Du côté de la lamé cf. du Cange sous Saxa. [L.C.].

où avoit ung crochet, sur la teste, tant que ledit Mathurin tumba à terre fort blecié, jusques à grant effusion de sang. Et depuis en fut emporté et mené audit lieu de la Rechauvetan où il fut par l’espace de quinze jours ou environ, et disoit on qu’il estoit guery et faisoit bonne chère. Mais aucuns le firent remuer de la maison où il estoit et le mener en une charrète a beufz jusques en un autre village près d’illec, et pour les secousses qu’il eut en ladicte charrète en alant par les montaignes et valées d’entre les deulx lieux, le sang lui esmeut tellement que, par deffault de bon gouvernement ou autrement, deux ou trois jours après il ala de vie à trespas. A l’occasion duquel cas, lesdiz supplians, doubtans rigueur de justice, se sont absentez du païs et n’y oseroient jamais bonnement converser, se noz grace et provision ne leur estoient sur ce imparties, en nous humblement requérant lesdiz supplians, attendu que le cas n’est advenu de guet apensé ne propoz deliberé, mais en leur corps deffendant que en tous leurs autres affaires ilz se sont bien et honnestement gouvernez, sans jamais avoir esté actains ne convaincuz d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise leur impartir, nosdictes grace et miséricorde. Pour quoy, etc., ausdiz supplians avons quicté, remis et pardonné, etc., satisfacion faicte, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, aux seneschaulx de Poictou et de Limosin et bailly de Berry et à tous nos autres justiciers, etc., que de nostre presente grace ilz facent, seuffrent et laissent lesdiz supplians joir et user, etc. Donné à Tours, ou mois de novembre, l’an de grace mil cccc. soixante dix sept, et de nostre règne le dix septiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. Texier.

MDCI Novembre 1477

Rémission en faveur de François et Jean de Vaucelles, écuyers, et de Pierre Delatouche, leur serviteur, pour le meurtre de Jehannin Millaud, chez qui ils s’étaient rendus, pour lui faire réparer le tort qu’il avait causé à un de leurs hommes, son neveu Macé Millaud, et avec lequel ils avaient été obligés d’engager la lutte, parce qu’il les avait accueillis à coups de bâton.

AN JJ. 203, n° 22, fol. 12 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 179-185

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de François et Jehan de Vaucelles

Dans la courte notice généalogique sur cette maison, donnée par M. Beauchet-Filleau (Dict. des familles du Poitou, 1re édit., t. II, 778) et reproduite en partie par l’abbé Lalanne, à propos des seigneurs de la Citière (Hist. de Châtelleraud, t. Ier, p. 384), on ne trouve point, à l’époque où nous sommes arrivés, deux frères portant les noms de François et Jean. Cependant François pourrait être le fils aîné, mort jeune et sans postérité, de Simon de Vaucelles, seigneur de la Citière, qui, d’après le savant généalogiste, épousa, le 6 mai 1455, Jeanne, fille de Nicolas-Joseph de La Touche d’Avrigny et eut pour fils Jean, chevalier, sr de la Citière, Biazay, etc., marié, le 16 septembre 1480, à Catherine de Signy, et Charles, qui aurait été tué à Marignan.

, frères, escuiers, aagez de vingt-cinq et vingt-six ans ou environ, et Pierre Delatouche, leur serviteur, aagé de xxii. ans ou environ, contenant que, le jeudi au soir qui fut le xiiime jour de ce present mois de novembre, le filz d’un nommé Jehan Aumur, métayer de la Roullure, et ung jeune enffant aagé de dix à douze ans, varlet et serviteur des métayers du lieu des Vigneaulx en Anjou, appartenant ausdiz de Vauselles, supplians, chargèrent certain bois pour ung nommé Macé Millaud et en charroyant, eulx estans ou grant chemin tendant du lieu où ils avoient chargé ledit boys à la maison dudit Macé Millaud, rencontrèrent feu Jehannin Millaud, oncle dudit Macé Millaud, lequel demanda audit varlet des Vigneaulx, qu’il rencontra le premier, pour qui il charroyoit. Lequel luy respondit que s’estoit pour ledit Macé Millaud, son nepveu. Et tantost après vint (le filz dudit Jehan Aumur, soubz couleur de ce qu’il disoit qu’il avoit passé par sa terre, qui n’estoit vray, mais avoit passé seulement)

Sic. Bien qu’il n’y ait pas de blanc au registre en cet endroit, il est évident que le scribe par distraction a omis tout un membre de phrase, sinon plusieurs phrases. Le membre de phrase entre (), qui est répété un peu plus loin, à sa vraie place, doit avoir été écrit, par erreur, au lieu d’un membre de phrase, qu’exigerait le sens, sur la réplique de Jehannin Millaud [L.C.].

qu’il avoit et portoit à sondit nepveu ou autrement, de sa mauvaise voulenté, commença à jurer et regnier Dieu en disant qu’il tueroit le filz dudit Aumour (sic), soubz couleur de ce qu’il disoit qu’il avoit passé par sa terre, qui n’estoit vray, mais avoit passé seulement par le grant chemin. Et lequel feu Jehannin, sans plus dire, impétueusement et par force se print aux beufz et charrestes où estoit ledit bois chargé, et deslya lesdiz beufz oultre le gré et voulenté desdiz enffans ; et pour ce que lesdiz enffans vouldrent empescher ledit feu Jehannin de deslyer lesdiz beufs, leur dist en maulgréant le nom de Dieu, que s’ilz se mettoient au devant de luy, qu’il les tueroit ou les mettroit en exoine de leurs corps ; et leur dist que si les beufz de ladicte mestayrie des Vigneaulx y eussent esté, qu’il leur eust couppé les jarrectz ; et en persistant et persévérant en sa fureur, de félon courage rompit les escoubles de la charreste dudit Aumur et emporta les juylles dont lesdiz beufz estoient lyez, en jurant et despitant que s’il les eust trouvez charroyant par le lieu où ilz avoient passé, qu’il eust tué lesdiz enffans charrestiers. Et tantost après le filz dudit Aumur trouva ledit Macé Millaud, à qui estoit ledit boys et luy dist et récita en plourant que ledit feu Jehannin avoit emporté lesdictes juilles de ses beufz, et fait les oultrages dessusdiz et lui pria qu’il lui fist rendre lesdites juilles audit feu Jehannin, ad ce qu’il peust charroyer le lendemain. Et lors ledit Macé Millaud et ledit filz dudit Aumur allèrent par devers ledit feu Jehannin et lui prièrent qu’il rendist lesdictes juilles. Lequel fist responce qu’ilz ne les auroient jamès. A quoy ledit Macé respondit que ce n’estoit pas bien fait à lui d’avoir fait lesdiz excès et oultrages ausdiz enffans, ou grant chemin du roy et de retenir lesdictes juilles. A ceste cause ledit Macé s’en vint audit lieu des Vigneaulx, pour se plaindre ausdiz de Vauselles supplians, des excès que ledit feu Jehannin lui avoit faiz et qu’il lui faisoit tous les jours ; où il trouva lesdiz de Vauselles, supplians, qui vouloient aler soupper ; ausquelz il récita les excès et oultraiges que ledit feu Jehannin lui avoit faiz et ausdiz enffans, et les requist qu’il leur pleust lui faire rendre sesdictes juilles de ses beufz par ledit feu Jehannin et lui faire donner pacience par lui, ou autrement qu’il leur quicteroit leur heritage qu’il tenoit d’eulx à cause dudit lieu des Vigneaulx et laisseroit le pays. Lesquelz de Vauselles de prime face ne vouldrent croire le dire et rapport dudit Macé Millaud. Et dist ledit Jehan de Vauselles audit Macé qu’il feist adjourner ledit feu Jehannin pour lui donner seureté ; et pour ce que ledit Macé se complaignoit toujours dudit feu Jehannin, son oncle, envoyerent querir lesdiz enffans qui avoient charroyé ledit bois, qui leur rapporterent et confirmèrent que ledit feu Jehannin Millaud avoit fait les oultrages dessusdiz et qu’il avoit emporté lesdictes juilles et lesquelles il n’avoit depuis voulu rendre, combien qu’ilz lui eussent demandées, ce que lesdiz de Vauselles supplians ne vouldrent encores croire. Et pour faire rendre lesdictes juilles, lesdiz de Vauselles supplians envoyèrent par deux foiz par devers ledit feu Jehannin qui ne les voult rendre. Et comme le messaigé s’en retournoit droit audit lieu des Vigneaulx, trouva lesdiz de Vauselles et Delatouche, supplians, qui venoient pour savoir si ledit feu Jehannin avoit rendu lesdictes juilles, lequel messaigé leur dist que ledit feu Jehannin avoit juré qu’il ne les rendroit point. Et lors lesdiz de Vauselles supplians allèrent près la maison dudit feu Jehannin et ledit Macé avecques eulx, et de rechief fisdrent demander lesdictes juilles audit feu Jehannin, qui respondit en effect comme dessus. Et de rechief ledit Macé Millaud dist audit feu Jehannin qu’il rendist ou fist rendre lesdictes juilles à celle fin qu’il n’en fust point de noise. Lequel respondit en rigoureuses parolles et en jurant la mort Dieu que, s’il sortoit dehors de sa maison, qu’il les feroit bien en aller, et qu’il venoit querir à son huys ; et de rechief luy dist que s’il aloit a luy, il lui bailleroit tant de coups qu’il ne s’en sauroit aler. Lequel Macé courroussé et indigné des menasses dudit feu Jehannin et du tort qu’il luy faisoit, print ung groz bout de boys et en frappa contre l’uys de la maison dudit feu Jehannin tellement qu’il ouvrit ledit huys. Et après lesdiz supplians entrèrent au dedans de l’uysserie de ladicte maison, et en entrant, ledit Jehan de Vauselles demanda s’il auroit point lesdictes juilles. Et lors ung des filz dudit feu Jehannin qui estoit caché derrière ledit huys, cuida frapper ledit François sur la teste d’un groz levier ou baston qu’il tenoit, ce qu’il eust fait, si ledit François n’eust fouy au coup et luy tumba ledit baston à terre, et fut prins ledit levyer ou baston par ledit Jehan de Vauselles pour garder que ledit filz dudit feu Jehannin ne le reprint pour en frapper. Lequel feu Jehannin Millaud, qui estoit pareillement caché derrière ledit huys vint audit Françoys et s’efforça le frapper de poulz d’une eschalle à rollons qu’il tenoit. Lequel François mist au devant du coup une javeline qu’il tenoit et ne scet si ledit feu Jehannin se blessa à ladicte javeline ou comment, par ce qu’il estoit nuyt et ne veoit gueres cler. Lequel feu Jehannin print ladicte javeline et pour ce qu’il ne la vouloit lacher, ledit Pierre Delatousche frappa sur ledit feu Jehannin Millaud, tellement qu’il luy feist lascher ladicte javeline, le tumba à terre et se mist sur luy. Et sortit ledit François hors de ladicte maison et vit que le fer de sadicte javeline estoit sanglant, et adonc il dist audit Pierre Delatousche qu’il laissast ledit feu Jehannin et que à son advis il s’estoit blessié ; ce que fist ledit Delatousche. Et alors ledit feu Jehannin dist qu’il estoit blessié, et incontinent lesdiz supplians, de ce desplaisans, vindrent audit feu Jehannin et apperceurent qu’il avoit une plaie en la cuisse par où il perdroit son sang et envoyèrent quérir par ledit Macé Millaud une brebiz dont ilz prindrent de la layne avec de l’uyle et habillèrent ledit feu Jehannin au mieulx qu’ilz peurent. Et ce fait, ledit Jehan de Vauselles mist la main dessus pour garder qu’il ne perdist son sang, et envoyèrent ledit Delatousche chez un nommé Peutin, pour habiller ledit feu Jehannin Millaud. Et ainsi lesdiz de Vauselles supplians s’en sortirent en disant à la femme dudit feu Jehannin qu’elle tensist tousjours l’emplastre avecques la main sur la plaie. Et depuis, par deffault que on ne peut lors trouver ne recouvrer aucun sirurgien ne estancher ledit feu Jehannin, il perdit tout son sang et, la nuyt mesmes, par deffault de bon gouvernement ou autrement, il alla de vie à trespas. Pour l’occasion duquel cas lesdiz supplians, doubtans rigueur de justice, se sont absentez et n’oseroient jamais converser ne retourner ou pays, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, humblement requérans que, attendu que ledit cas est advenu sans deliberacion et par mesgarde et [sans la] coulpe desdiz supplians, et que jamais n’avoient eu question ou debat audit feu Jehannin, et que lesdiz supplians en tous autres cas sont bien famez et renommez, sans jamais avoir esté actains ne convaincuz d’aucun vilain cas, blasme ou reprouche, nous leur vueillons sur ce impartir nosdictes grace et misericorde. Pour quoy, etc., en mettant au néant, etc., et les avons restituez, satisfacion faicte, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, aux baillifz de Touraine, Saint-Pere le Moustier, seneschal de Poictou, ou à leurs lieuxtenans, etc., sans leur faire, mettre ou donner, etc., ainçoys se leurs corps, etc. Et afin que ce soit chose ferme, etc. Donné au Plesseis du Parc, ou mois de novembre, l’an de grace mil cccc. soixante dix sept, et de nostre règne le dix septiesme.

Ainsi signé, par dessus le reply desdictes lettres : Par le roy en son Conseil, ouquel estoient l’evesque d’Alby

Louis d’Amboise, l’un des nombreux fils de Pierre d’Amboise, seigneur de Chaumont, et de Jeanne de Bueil, promu, le 24 janvier 1474 au siège épiscopal d’Albi, qu’il occupa jusqu’au mois de mai 1497, siégeait au conseil de Louis XI depuis l’année 1471.

, le sire du Lude

Jean de Daillon, sr du Lude. (Cf. ci-dessus, p. 52.)

, Me Raoul Pichon

Raoul Pichon avait été reçu conseiller au Parlement le 10 mai 1454 et résigna cette charge, l’an 1491, en faveur de Nicolas Pichon, son fils. (Blanchard, Catalogue de tous les conseillers en Parlement, p. 24.) Louis XI l’employa souvent à ses plus secrètes affaires ; il l’avait chargé entre autres, en 1474, d’une mission auprès de sa sœur la princesse de Viane, et l’avait nommé, par lettres du 22 septembre 1476, l’un des juges du duc de Nemours. Cf. une note de J. Vaësen sur ce personnage. (Lettres de Louis XI, t. VII, p. 222.)

et autres presens. Petit. — Visa.

MDCII Décembre 1477

Rémission octroyée à Rémy Carret, de Limoges, détenu dans les prisons de la justice séculière de l’Hôtel-Dieu de Montmorillon, pour le vol d’un calice qu’il avait dérobé en l’église dudit Hôtel-Dieu et ensuite restitué ou aidé à retrouver

AN JJ. 203, n° 23, fol. 13 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 185-187

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amy charnelz de Remy Carret, povre jeune homme, demourant à Limoges, chargé de femme et de quatre enfans, à présent détenu prisonnier ès prisons de la justice séculière des religieux, prieur et frères de l’Ostel Dieu de Montmorillon, contenant que, puis la feste Saint Michel derrenièrement passée, ung jour d’un dimanche qui estoit le landemain d’une belle foire appellée la foire de la Confrairie, il s’en ala au matin en l’église dudit Hostel Dieu de Montmorillon, en entencion de oyr messe ; il estoit ung peu avant la première messe, que lesdiz religieulx, prieur et frères avoint dictes matines. Lequel Remy est povre homme et n’a de quoy vivre, chargé de femme et de quatre enfans, se voyant seul en ladicte église, vit que sur le grant haustel d’icelle église avoit plusieurs callices d’argent, et, comme lors tanté de l’ennemy, print l’un et l’emporta musser et cacher à neuf ou dix traictz d’arc d’illec, lequel il cacha en ung buisson, et, ce fait, eut regret de l’avoir ainsi prins et emblé, et l’eust voulentiers retourné où il avoit prins, mais il n’osa, pour doubte de justice. Et quant il eut ledit calice caché oudit buisson, s’en alla oultre et jusque au villaige de Plaisance ; et ce jour ou autre après, cuidant s’en aller plus avant en cheminant la nuyt, le print et se trouva près ledit lieu de Montmorillon, et demanda où il estoit, et on lui dist qu’il estoit audit lieu de Montmorillon, dont il fut bien esbay et s’en alla musser en ung boys près du buisson où il avoit caché ledit calice, où il fut, ou illec près, par aucun temps et demandoit à chacun qu’il veoit passer si lesdiz religieulx, prieur et frères avoient point trouvé leur calice qui leur avoit esté emblé. Les aucuns desquelz à qui il avoit ainsi demandé si ledit calice avoit esté trouvé, dirent ausdiz religieulx ou aucuns d’eulx qu’ilz avoient trouvé ung homme près d’illec qui leur avoit demandé si ledit calice avoit point esté trouvé ; par quoy fut par iceulx religieulx envoyé aucun des officiers de leur justice séculière après ledit Remy ; lequel fut trouvé et prins, et incontinent qu’il fut prins, dist qui savoit bien où estoit ledit calice et qu’il les meneroit au lieu où il avoit caché, où il fut mené. Lequel ne peut assigner au lieu où il avoit mis, et d’illec fut mené prisonnier ès prisons où il est encores détenu. Lequel calice, certain temps après, pour ce qu’il avoit monstré le circuit du lieu où il avoit caché, a esté quis, trouvé et restitué ausdiz religieux, prieur et frères, qui s’en tiennent contans. Pour occasion duquel cas, icelluy Remy Carret est tousjours détenu prisonnier èsdictes prisons en danger de brief finer ses jours, se noz grace et misericorde ne lui estoient par nous sur ce imparties, si comme il dit, en nous humblement requerant que, attendu ce que dit est, mesmement que ledit callice à esté rendu ausdiz religieulx, prieur et frères, qu’il a confessé ledit cas et montré le circuit où il avoit ledit calice caché, liberallement, sans gehainne ou contrainte de justice, qu’il est chargé de femme et de quatre enfans, et que en tous autres cas il est bien famé et renommé et ne fut jamais actaint ne convaincu d’aucun autre larrecin ou villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise nosdictes grace et misericorde lui impartir sur ce. Pour ce est il que nous, ce consideré, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, inclinans à la requeste de sesdiz parens et amys, audit Remy Carret, en faveur de sesdiz femme et enfans, avons le fait et cas dessus declairé quicté, remys et pardonné, etc., satisfacion faicte à partie civillement tant seullement, se faicte n’est, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou ou à son lieutenant audit lieu de Montmorillon et à tous noz autres justiciers, etc. que de noz presens grace quictance, remission et pardon ilz facent, seuffrent et laissent ledit Remy joyr et user plainement et paisiblement, etc., ainçoys, son corps ainsi pour ce détenu prisonnier, ensemble ses biens, s’aucuns sont pour ce prins, saisiz, arrestez ou empeschez lui mettent ou facent mettre tantost et sans delay à plaine delivrance. Et afin que ce soit chose ferme, etc. Sauf en autres choses, etc. Donné à Tours, ou moys de decembre, l’an de grace mil cccc. soixante dix sept et de nostre règne le dix septiesme.

Ainsi signé par dessus le reply desdictes lettres. Par le roy, à la relacion du Conseil. Triboulet, scriptor. — Visa.

MDCIII Décembre 1477

Rémission octroyée à Jacques Seguin, exerçant le métier de maréchal à Luçon, appelant d’une sentence capitale prononcée contre lui par le sénéchal de l’évêque et détenu dans les prisons royales de Fontenay-le-Comte, parce que lui et plusieurs autres compagnons menuisiers et couturiers avaient fait violence à une femme venant de La Rochelle, logée chez un tavernier de Luçon, et avaient abusé d’elle, sous prétexte qu’elle passait pour être femme publique.

AN JJ. 203, n° 18, fol. 10 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 187-192

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Jaques Seguin, mareschal, natif de la Caille

Quoiqu’il y ait un hameau de ce nom près de Chef-Boutonne, nous pensons que le scribe a omis l’abréviation de er et qu’il convient d’y suppléer et de lire la Caillère (cne de Sainte-Hermine, arr. de Fontenay-le-Comte).

ou païs et conté de Poictou, à present detenu prisonnier en noz prisons de Fontenay le Conte, contenant que ledit suppliant, demourant en la ville de Luçon, oudit païs de Poictou, en faisant sondit mestier de mareschal, ung certain jour du mois de may derrenier passé, icellui suppliant et ung nommé Dorleans, menusier, à la promocion et instigacion de deux cousturiers valetz et serviteurs dudit mestier de cousturier, qui avoient dit aux dessusdiz qu’il y avoit en l’ostel de Colas Giraudeau, aussi cousturier, tenant taverne publique, une femme publique, se transportèrent les dessusdiz suppliant, menusier et cousturiers, par deliberacion faicte entre eulx, à l’ostel et maison dudit tavernier querir ladicte femme. Et quant ilz furent devant ledit hostel, distrent et deliberèrent entre eulx que lesdiz suppliant et menusier entreroient en ladicte maison pour querir ladicte femme, disans lesdiz cousturiers qu’ilz n’y entreroient point et qu’ilz demoureroient au dehors, parce que ledit tavernier estoit de leur mestier, doubtans qu’il fust mal content d’eulx. Et après ces parolles dictes, frappèrent lesdiz suppliant et menusier contre l’uys dudit tavernier avec la main et appellèrent que on leur vint ouvrir, ce que feist une chambrière demourant oudit hostel, et quant ilz furent entrez, ils trouvèrent en ladicte maison ledit tavernier et sa femme qui estoient couchez au lit ; et aussi trouvèrent ladicte femme, qu’on disoit estre femme mariée, de la ville de la Rochelle, qui estoit toute seule audit lieu de Luçon, où elle estoit venue pour produire à la court ecclésiastique dudit Luçon certain procès qu’elle y avoit à l’occasion de certains heritages, comme l’on disoit. Aussi estoient en ladicte maison dudit tavernier le varlet èt ladicte chambrière, et estoient ladicte femme et lesdiz varlet et chambrière au feu et ladicte femme en sa cotte, qui s’en vouloit aller coucher. Et quant lesdiz suppliant et menusier furent dedans ladicte maison, ilz demandèrent à boire, ausquelz on en apporta et vouloient faire boire ladicte femme ; et eut ledit menusier plusieurs parolles avecques elle. Et après lui dist qu’il convenoit s’en vint avec lui. A quoy elle fist responce que non feroit et qu’elle n’estoit pas telle comme il pensoit. Et ce veant, ledit menusier la print par le braz pour la tirer et mettre hors ladicte maison. A quoy elle fist resistence, en disant qu’ilz ne la meneroient point et qu’ilz faisoient mal, en criant « à l’aide » et se print à ladicte chambrière. Maiz ce non obstant, ledit menusier la mist hors de ladicte maison, et par ce qu’elle resistoit lui donna ung soufflet ou deux de la main, et par ce qu’elle recusoit aller et sortir hors et s’estoit prinse à ladicte chambrière, la poussa par derrière ledit suppliant et estoit present à tout ce que faisoit ledit menusier. Et quant ladicte femme fut hors de la porte de la dicte maison, ledit suppliant tourna querir les robbes et habillemens de ladicte femme et les lui bailla. Et se assemblerent lesdiz cousturiers et ung barbier avec eulx ; lesquels menèrent tous ensemble ladicte femme en une rue fouraine en ladicte ville de Luçon, et quant ilz furent en ladicte rue, ledit menusier voult congnoistre ladicte femme charnellement ; à quoy la voult resister et par ce lui donna ledit menusier deux ou trois souffletz de la main, et de fait la congneut, comme croit ledit suppliant. Et incontinent après, croyant ledit suppliant que ce fust une femme publique, tant par ce qu’elle estoit seulle logée en ladicte taverne que aussi par ce que lui en avoient dit lesdiz cousturiers, la congneut aussi charnellement une foiz. A quoy elle ne fist point de resistence. Et ce fait, menèrent les dessusdiz ladicte femme chez ung barbier en ladicte ville de Luçon, où illec se trouvèrent jusques au nombre de dix ou de douze, qui la congneurent et en firent à leur voulenté et la congneut derechief ledit suppliant par une autres foiz. Et quant se vint devers le matin sur le point du jour, ilz renvoièrent ladicte femme, laquelle le lendemain se rendy plaintive à la justice temporelle de Luçon pour nostre amé et feal conseiller l’evesque dudit lieu

Nicolas Boutaud fut évêque de Luçon du 14 février 1462 au 27 décembre 1490. On trouvera une notice sur ce personnage dans nos deux précédents volumes. (Arch. hist. du Poitou, t. XXXV, p. 455, t. XXXVIII, p. 119.)

, en la seigneurie duquel elle avoit esté prise, et furent lesdiz menusier et suppliant prins au corps ; et fut oy et interrogué ledit suppliant par le seneschal dudit Luçon pour ledit evesque, auquel ledit suppliant confessa ce que dit est. Et veues par ledit seneschal ladicte confession, charges et informacions faictes à l’encontre dudit Jaques Seguin touchant ledit cas, a esté condempné par ledit seneschal à souffrir mort et estre pendu et estranglé à la justice patibulaire dudit Luçon pour ledit evesque. Dont ledit Jaques Seguin a appellé ; mais ce non obstant, il a tousjours depuis esté detenu prisonnier audit lieu de Luçon, sans relever sondit appel, parce qu’il n’avoit parens qui eussent de quoy le faire, que ung sien frère, franc archier, qui estoit pour lors ès païs de Flandres et de Picardie en nostre service. Par quoy les trois mois ordonnez pour ledit appel relever ont esté passez. Et après par vertu de certaines noz lettres impetrées par le procureur de la justice laye dudit evesque, ledit Jacques Seguin a esté mené prisonnier en nosdictes prisons audit lieu de Fontenoy le Conte, où illec est encore de present detenu. Et pendant l’espedicion desdictes grans assises dudit Fontenoy le Conte, il vint à la notice et congnoissance du père dudit Jaques Seguin, que ledit procureur dudit evesque avoit obtenu lesdictes lettres royaulx et icelles presentées à nostre seneschal de Poictou ou à son lieutenant tenant et expediant lesdictes assises, et aussi par ce que audit père dudit Jaques Seguin appartenoit et appartient par raison la poursuite et deffence de sondit filz detenu prisonnier comme dit est, requist icellui père audit lieutenant qu’il lui baillast et discernast coppie desdictes lettres. Et pour ce qu’il en fut reffusant ou delaiant, ledit suppliant en appella. Et combien que depuis ledit cas ainsi avenu, ledit Jaques Seguin ait appoincté à ladicte femme pour son interest à la somme de quarente livres, dont elle ait esté contente, et que à ceste cause ledit Jaques ne soit plus detenu que pour l’interest criminel de justice, neantmoins il a doubté que s’il n’avoit sur ce noz grace et misericorde, qu’il demourast tousjours prisonnier ou que l’en le vouloit faire executer selon ladicte sentence. Et pour ce nous a humblement fait supplier et requerir que, attendu qu’il ait satisfait à ladicte femme pour l’interest de partie et qu’il n’y a plus que celluy de justice, le long temps qu’il a esté detenu prisonnier, et que en autres cas il est bien famé et renommé, il nous plaise sur ce lui impartir nostredicte grace et misericorde. Pour ce est-il que nous, voulans misericorde, etc., et par la teneur de ces presentes, etc., et sur ce imposons silence, etc., satisfacion faicte, etc., en mettant au neant, etc. Si donnons en mandement, par cesdictes presentes, à nostre seneschal de Poictou, etc., sans pour ce le molester, etc. Et afin que ce soit, etc. Sauf toutesvoies, etc. Donné au Plesseis du Parc, ou mois de decembre, l’an de grace mil cccc. soixante dix sept, et de nostre règne le dix septiesme.

Ainsi signé, par dessus le reply desdictes lettres : Par le roy, l’evesque d’Alby, le gouverneur de Daulphiné, le sire d’Argenton

Louis d’Amboise, évêque d’Albi, Jean de Daillon, sr du Lude, gouverneur de Dauphiné, et Philippe de Commynes, sr d’Argenton. (Cf. ci-dessus, p. 52).

et autres presens. Disome

Antoine Disome ou d’Isome, notaire et secrétaire du roi, dont on trouve la signature au bas de lettres de Louis XI, de 1465 à 1481, résigna sa charge en faveur de Martin Le Picard, son gendre.

. — Visa.

MDCIV Décembre 1477

Lettres de franchise et exemption de toutes tailles et impositions accordées aux habitants de la châtellenie de la Roche-sur-Yon.

AN JJ. 203, n° 29, fol. 16 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 192-195

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre très cher et très amé oncle et cousin le roy de Jherusalem et de Cecile, duc d’Anjou et seigneur de la Roche sur Oyon, contenant que, combien que, à l’occasion de ce que la terre, chastellenye et seigneurie de la Roche sur Oyon, qui est en marche des pays d’Anjou, Bretaigne et Poictou et de toute la chose publique

Sic. Il doit y avoir avant ces mots « et de toute la chose publique » une assez forte lacune. Nous avons vainement cherché, dans le but de la combler, un autre enregistrement de cet acte au Parlement et à la Chambre des comptes.

en nostre royaulme, laquelle seigneurie autrement feust demourée deserte et inhabitée de toute et ancienneté (sic) et mesmement depuis le temps que ladicte terre, seigneurie et chastellenie de la Roche sur Oyon fut par noz predecesseurs baillée aux predecesseurs de nostre dit oncle pour supploiement et partie de leur appanage

La seigneurie de la Roche-sur-Yon faisait partie du duché d’Anjou, tel qu’il fut donné en apanage, l’an 1356, par le roi Jean le Bon à son second fils Louis, car ce dernier, par son traité de mariage (Saumur, août 1360) avec Marie de Blois, fille de Charles, duc de Bretagne, a baillé à sa femme, « pour asseoir son douaire, les chastel, baronnie et chastellenie de Chasteau du Loir, les chastel, ville et chastellenie de la Roche sur Yon, avec leurs droits, profis et émolumens, etc. » (Arch. nat., PP. 33, fol. 113 v°.) Après la reprise de la Roche-sur-Yon sur les Anglais, à laquelle Olivier de Clisson avait puissamment contribué, Louis II, duc d’Anjou, en échange d’une somme de 12.000 livres qu’il reconnaissait lui devoir, lui engagea la ville et la châtellenie jusqu’au payement de cette somme. Clisson en resta seigneur jusqu’à sa mort (1407). Sa fille aînée, Marguerite, comtesse de Penthièvre, vicomtesse de Limoges et dame de Clisson, fut confirmée comme dame engagiste par la duchesse d’Anjou, douairière. Puis le duc Louis II lui ayant versé les 12.000 livres, elle lui en donna quittance, le 8 août 1414, et la Roche-sur-Yon fit retour au domaine d’Anjou (id., P. 1340, n° 504), où elle demeura jusqu’à la mort de Charles II, comte du Maine (1481), qui avait fait son testament en faveur de Louis XI. Elle fut donc à cette date réunie à la couronne avec les autres possessions du neveu et héritier du roi René ; mais dès le mois de décembre de la même année, par lettres données à Thouars, le roi en fit don à Louis de Joyeuse, à l’occasion de son mariage avec Jeanne de Bourbon-Vendôme. (Copie du xvie siècle, id., P. 2098.)

, les habitans en ladicte terre, seigneurie et chastellenie aient esté tousjours tenuz francs, quictes et exemps des impostz qui ont esté mis de par noz predecesseurs et nous, tant pour l’entretenement des gens de guerre que autrement. Neantmoins puis aucun temps ença les esluz sur le fait de noz aides et tailles en l’élection et conté de Poictou se sont efforcez [les mettre et imposer] et de fait les ont mis et imposez à nosdictes tailles et impostz, et les ont contrains à en paier certaine grant somme de deniers, en venant directement contre l’exemption, immunité et franchise dont les diz habitans ont joy, comme dit est, et en leur grant interestz, grief, prejudice et dommage et aussi de nostredit oncle, ainsi qu’il nous a plus à plain fait dire et remonstrer très humblement, nous requerant sur ce nostre provision. Pourquoy nous, les choses dessus dictes considerées, inclinant liberalement a la supplicacion de nostredit oncle et cousin, en faveur de la proximité du lignage dont il nous attient, aussi pour l’entretenement de ladicte seigneurie et icelle faire peupler, habiter et augmenter, à icellui nostredit oncle et cousin avons octroyé et octroyons, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, voulons et nous plaist que les manans et habitans de sa dicte terre, seigneurie et chastellenie de la Roche sur Oyon, par don, privillege et especial octroy, par nous à eulx et leurs successeurs fait, soient et demeurent francs, quictes et exemps de toutes tailles et impostz qui seront mis sur de par nous et noz successeurs, soit pour le fait et entretenement de noz gens de guerre ou autrement, pour quelque cause ou occasion que ce soit ou puisse estre, et de ce les avons affranchiz et exemptez, affranchissons et exemptons par cesdictes presentes, moyennant et parmy ce que iceulx habitans seront tenuz paier et bailler pour une foys en ceste presente année, en acquit de nous, à nostre amé et feal conseiller et chambellan Guy de Laval, chevalier, seigneur de Loué

Guy II de Laval, seigneur de Loué, de Benais, etc., fils aîné de Thibault, sr de Loué, et de Jeanne de Maillé, chambellan de Charles VII en 1436, s’attacha ensuite à René, roi de Sicile, duc d’Anjou et de Lorraine, comte de Provence, dont il fut chambellan et grand veneur (1445), maître des eaux et forêts, puis sénéchal d’Anjou, par lettres du 16 février 1472, et qui le fit aussi chevalier de son ordre du Croissant en 1448, mourut le 16 décembre 1484 et fut enterré dans l’église de Benais. (Voy. le P. Anselme, Hist. généal., t. III, p. 636.)

, la somme de quinze cens livres tournois, laquelle [somme]

Le texte porte « cause » au lieu de somme.

, pour certaines grans causes et consideracions autres à ce nous mouvans, nous lui avons ordonnée et ordonnons par ces presentes. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx gens de noz comptes et generaulx conseillers sur le fait et gouvernement de toutes noz finances, aux esluz sur le fait desdictes aides oudit pays de Poictou, et à tous noz autres justiciers ou officiers, ou à leurs lieuxtenans ou commis, presens et advenir, et à chacun d’eulx, si comme à luy appartiendra, que de noz presens grace, affranchissement et choses dessus dictes ilz facent, seuffrent et laissent lesdiz manans et habitans de ladicte seigneurie et chastellenie de la Roche sur Oyon joïr et user plainement et paisiblement, sans leur faire ne souffrir estre fait aucun destourbier ou empeschement au contraire ; ainçois se fait leur estoit, le mettent ou facent mettre sans delay à plaine delivrance et au premier estat et deu. Car ainsi nous plaist il estre fait non obstant que par les mandemens et commissions qui sont et seront octroyées pour imposer et mettre sus nosdictes tailles, soit mandé imposer à icelles toutes manières de gens, exemps et non exemps, privillegiez et non privillegiez, affranchiz et non affranchiz, en quoy ne voulons les diz manans et habitans de ladicte seigneurie et chastellenie de la Roche sur Oyon estre compris ne entenduz en aucune manière, et quelzconques autres lettres, mandemens ou ordonnances à ce contraires, ne que pour ce il soit besoing ausdiz habitans en obtenir ne impetrer aucunes autres lettres que ces presentes. Et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné au Plessis du Parc lez Tours, ou moys de decembre, l’an de grace mil cccc. soixante dix sept et de nostre règne le dix septieme.

Ainsi signé sur le reply : Par le roy, le sire du Lude, gouverneur du Dauphiné et autres presens, Picot

Les présentes lettres patentes ont été publiées d’après la même source (JJ. 203, n° 29) dans le grand recueil des Ordonnances des rois de France, t. XVIII, p. 322. Les éditeurs n’ont pas paru remarquer la lacune que nous signalons au commencement de l’acte.

.

MDCV Décembre 1477

Rémission accordée à Jean Goudebon, natif de Parthenay, poursuivi pour fabrication et émission de fausse monnaie en divers lieux du royaume.

AN JJ. 203, n° 32, fol. 18 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 195-197

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Goudebon, natif de la ville de Parthenay en Poictou, contenant que, puis cinq ou six ans ença ledit Jehan a par convoitise desordonnée faictes et forgées plusieurs monnoyes faulces, comme gros de ii solz x deniers tournois, des escuz à noz coing et armes et des flurins au chat et d’Almaigne, et aussi roingnez des escuz d’or et vendu bas or, et icelles faulces monnoyes employées en plusieurs lieux de nostre royaume, ou grant préjudice de la chose publique d’icellui. A l’occasion duquel cas, puis aucun temps ença, ledit Jehan Goudebon a été par aucuns de noz officiers constitué prisonnier ès prisons de nostre ville de Lisieux, et depuis est venu en nostre ville de Tours, où il nous a fait supplier et requerir que, attendu qu’il a esté par cy devant de bonne vie et de honneste conversacion, sans jamais avoir esté actaint ne convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche et que doresenavant il a entencion de vivre bien et honnestement, sans plus commettre les cas dessusdiz, il nous plaise lui pardonner et remettre lesdis cas et crimes et sur ce lui impartir et eslargir nosdictes grace et misericorde. Pour quoy nous, les choses dessus dictes considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, à icellui Jehan Goudebon avons quicté, remis et pardonné et, par la teneur de ces presentes, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, quictons, remettons et pardonnons les faiz, cas et crimes dessusdiz, en quelque forme et manière qu’il les ait commis et perpétrés avec toute la peine, offense, amende corporelle, criminelle et civille en quoy pour occasion dudit cas il pourroit estre encouru envers nous et justice, etc., satisfacion faicte à partie intéressée en ce faisant, civilement tant seulement, se faicte n’est, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes à noz amez et feaulx conseillers les gens tenans et qui tiendront nostre Parlement, nostre prouchain exhiquier de Normandie, au prevost de Paris, bailliz de Berry, de Touraine, Saint Pierre-le-Moustier et à tous noz autres justiciers, etc., que ledit suppliant ilz facent, seuffrent et laissent joyr et user plainement et paisiblement de noz presens grace, remission, quictance et pardon, etc., et se son corps ou aucuns de ses biens sont ou estoient pour ce prins, saisiz, arrestez, etc., mettre sans delay à plaine delivrance, etc. Donné au Plessis du Parc lez Tours, ou moys de decembre l’an de grace mil cccc. soixante dix sept, et de nostre règne le dix septiesme.

Ainsi signé : Par le roy, l’evesque d’Alby

Louis d’Amboise, évêque d’Albi (ci-dessus, p. 184 note).

, le grant seneschal de Normandie

Jacques de Brezé, comte de Maulévrier, maréchal et grand sénéchal de Normandie, fils de Pierre II de Brezé, tué à la bataille de Montlhéry, et de Jeanne Crespin, dame du Bec-Crespin. (Cf. le vol. précédent, p. 210, note.)

, les sires de Montagu

Louis Malet, seigneur de Graville et de Montaigu, qui devint amiral de France en 1487. (Voy. Michel Perrot, Louis Malet de Graville, Paris, Picard, 1882.)

, d’Argenton

Philippe de Commynes, seigneur d’Argenton. (Vol. précédent. p. 181 note, p. 256, note, etc.)

et autres presens. L. Tindo. — Visa. Contentor. A. Rolant.

MDCVI Décembre 1477

Lettres instituant quatre foires par an et rétablissant le marché le mardi de chaque semaine au bourg de l’Hermenault, en faveur de l’évêque de Maillezais.

AN JJ. 203, n° 48, fol. 28 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 197-200

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, comme les lieu, place et bourg de L’Ermenault en Poictou appartenant à nostre cher et feal cousin et conseiller l’evesque de Maillesais

Jean d’Amboise, second fils de Pierre d’Amboise, seigneur de Chaumont, et de Jeanne de Bueil, abbé de Bonnecombe au diocèse de Rodez et de Saint-Jean d’Angély, dont il était en possession en 1474 et qu’il n’avait plus en 1479, devait être dès cette époque évêque de Maillezais. On ne sait à quelle date exactement il fut placé à la tête de cette église. Son prédécesseur, Louis Rouault, qui était en même temps abbé commendataire de Saint-Pierre de Bourgueil, mourut le 13 mars 1477, quelques années après avoir abdiqué. (Voy. la notice consacrée à ce prélat dans notre tome X, Arch. hist. du Poitou, XXXV, p. 324.) La Gallia christiana ne dit pas s’il quitta le siège épiscopal de Maillezais en même temps que l’abbaye de Bourgueil ; le dernier acte qui le mentionne en qualité d’évêque est du 9 novembre 1472. (Tome II, col. 1374 ; t. XIV, col. 664.) Toujours est-il que Jean d’Amboise ne lui avait pas succédé encore au mois de février 1475 ; il est nommé dans trois lettres de Louis XI des mois de janvier et février de cette année et y prend seulement les titres de protonotaire du Saint-Siège et de maître des requêtes de l’hôtel du roi. (J. Vaësen, Lettres de Louis XI, t. V, p. 307, 319, 321.) MM. de Sainte-Marthe, tout en constatant que le nom de Jean d’Amboise se trouve dans la liste des évêques de Maillezais, affirment qu’il n’y a aucun acte de lui dans les registres de cette église et que son épitaphe ne dit point qu’il ait eu cet évêché. Aucun doute cependant ne peut subsister à cet égard. Dans un procès au Parlement au sujet de la possession de ce siège entre Frédéric de Saint-Séverin, nommé par le pape, et Guillaume Le Roy élu par le chapitre, le premier déclare qu’il y a été promu, medio translationis Johannis de Ambasia, Malleacensis episcopi, ad episcopatum Lingonensem. Arrêt interlocutoire du 12 mars 1485, n.s. (Arch. nat., X2a 119, fol. 15.) — [Jean d’Amboise s’obligea envers la Chambre apostolique, pour son évêché de Maillezais, le 31 juillet 1475 — Eubel, t. II, p. 204, L.C.]

C’est en 1481 que Jean d’Amboise, devenu évêque, duc de Langres, pair de France, fit son entrée solennelle dans cette ville, et son rôle dans cette nouvelle dignité est mieux connu. Institué par Louis XI lieutenant général en Bourgogne, il continua à exercer cette charge sous Charles VIII. Il rétablit les lieux dépendant de sa mense épiscopale, fit entourer de fossés et de murailles la petite ville de Mussy où il fit bâtir un beau château pour la demeure de ses successeurs, puis se démit, l’an 1497, de son évêché en faveur de son neveu, nommé aussi Jean d’Amboise, et se retira à Dijon où il mourut le 28 mai 1498. (Gall. christ., t. II, col. 1374 ; t. IV, col. 630 ; le P. Anselme, Hist. généal., t. II, p. 221.) L’évêque de Maillezais et de Langres eut pour frère Louis d’Amboise, évêque d’Albi (ci-dessus, p. 184 note), Pierre d’Amboise, évêque de Poitiers (21 nov. 1481 au 1er sept. 1505) et le fameux Georges d’Amboise, cardinal archevêque de Rouen et ministre de Louis XII.

, soit assis en païs fertil et de grant passaige et fort frequenté de marchans passans et rappassans chacun jour par iceulx et qui audit lieu y ait eu anciennement marché le mardi de chacune sepmaine et halle pour le tenir, et jusque puis certain temps que ladicte halle est tombée en ruyne et le marché discontinu à cause des guerres et divisions qui ont eu cours en nostre royaulme ; et soit ainsi que nostredit cousin nous ait remonstré, que, pour la decoracion et melioracion dudit bourg et lieu, il feist voulentiers doresenavant tenir et continuer audit jour de mardi de chacune sepmaine ledit marché en icellui lieu et bourg de l’Ermenault et aussi foire à quatre jours de chacune année, l’une le jour saint Blaise, tiers de fevrier, l’autre le jour saint Jehan Porte latin, sixiesme jour de may, l’autre le jour des octaves de l’Assumption de Nostre Dame, xxiie jour d’aoust, et la quarte le ixe jour de decembre, lendemain de la feste Nostre Dame oudit moys, esquelz jour[s] n’a aucunes foires à troys lieues à la ronde dudit lieu de L’Ermenault, s’il nous plaisoit lui octroyer lesdictes foires et continuacion dudit marché. Pour quoy nous, les choses [dessus dictes] considerées et mesmement que audit bourg y a d’ancienneté eu marché audit jour, desirans singulierement l’entrecours de marchandise en nostredit royaulme et inclinans en ceste partie à la requeste de nostredit cousin et autres, et pour autres causes à ce nous mouvans, avons à icellui nostredit cousin, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, octroyé et octroyons par cesdictes presentes que audit lieu de l’Ermenault y ait et soient tenuz doresenavant et à tousjours marché le jour du mardi de chacune sepmaine, ainsi qu’il a esté par cy devant, et lesdictes foires aux quatre jours de l’an dessus declairez, sauf que, se lesdictes foires advenoient au jour du dimanche, elles seront pour celles foiz renvoiez au lendemain ; et icelles foires avons audit lieu, ensemble ledit marché, de nouvel, en tant que mestier seroit, creez, ordonnez, instituez et establiz, creons, ordonnons, instituons et establissons, par cesdictes presentes. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou ou à son lieutenant et à tous noz autres justiciers, où à leurs lieuxtenans, presens et advenir, et à chacun d’eulx sur ce requis et comme à luy appartiendra, que en faisant, souffrant et laissant nostredit cousin et ces predecesseurs

Sic. Distraction du scribe pour « successeurs ».

joir et user plainement et paisiblement de nostredit octroy, creacion et establissement, ilz facent publier lesdictes foires et marché par tout où il appartiendra, et icelles tenir et entretenir doresenavant comme les autres foires et marchez du pays d’environ, en contraignant à ce faire et souffrir tous ceulx qui pour ce seront à contraindre, par toutes voyes et manieres deues et raisonnables, et sans faire, mettre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné à nostredit cousin ne sesdiz successeurs aucun empeschement au contraire, ores ne pour le temps advenir, en quelque maniere que ce soit ; lequel, se fait, mis ou donné leur avoit esté ou estoit, mettent ou facent mettre sans delay à plaine delivrance. Pourveu toutes voyes que, comme dit est, n’y ait ausdiz jours aucunes foires à troys lieues à la ronde dudit lieu de l’Ermenault, ausquelles puissent prejudicier. Et affin que ce soit chose ferme et estable à toujours, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné au Plessis du Parc, ou moys de decembre, l’an de grace mil iiiic lxxvii, et de nostre règne le xviie

Ces lettres patentes sont imprimées, d’après la même source, dans la collection des Ordonnances des Rois de France, in-fol., t. XVIII, p. 423.

.

Ainsi signé sur le reply : Par le roy, l’evesque d’Alby et maistre Raoul Pichon

Pour Louis d’Amboise, évêque d’Albi et Raoul Pichon, conseiller au Parlement, cf. ci-dessus, p. 184 et 185.

, presens, Disome. — Visa.

MDCVII Décembre 1477

Lettres d’anoblissement en faveur de Guichard Pignonneau, habitant du Poitou.

AN JJ. 203, n° 49, fol. 28 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 200-203

Ludovicus, Dei gracia Francorum rex. Probitatis merita, nobiles actus gestusque laudabiles ac virtutum insignia quibus persone decorantur et ornantur merito nos inducunt ut eis juxta opera, proprio Creatoris exemplo, tribuamus, et hos eorumque posteritatem favoribus congruis et nobilium honoribus, ut nomen rei consonet, atollamus et ipsi hujusmodi prerogativa letentur, ceterique ad agenda que bona sunt ardentius aspirent et ad honores, suffragantibus virtutum bonorumque operum meritis, adipiscendos alicientur et advolent. Notum igitur facimus universis, presentibus et futuris, quod nos, attendentes vitam laudabilem, morum honestatem fidelitatemque ac alia quamplurima virtutum merita, que in dilecto nostro Guischardo Pignonneau

Quelques années plus tard, Guichard Pignonneau, qualifié licencié en lois et juge d’Angle, était en procès au Parlement contre Itier Voulsy, qui l’accusait d’avoir détourné à son profit certaines choses litigieuses entre eux, sans qu’il y ait eu un jugement l’y autorisant. Ajourné à comparaître en personne et détenu à la Conciergerie, il requit et obtint son élargissement à certaines conditions, par arrêt du 3 juin 1484. « Lad. court a elargy et elargist partout quousque led. Pignonneau, en faisant les submissions en tel cas accoustumées, moyennant et parmy ce qu’il sera tenu d’aporter ou envoyer certifficacion en forme deue et vallable par devers lad. court, dedans la Magdaleine prouchaine venant. comment il aura ou a deuement restably, ès mains des commissaires à ce commis, ce qu’il a prins et levé des choses contencieuses en matière de complainte entre luy et led. Ytier Voulsy, selon le contenu de la sentence sur ce donnée par les gens tenans les requestes du Palais à Paris ; autrement, en cas de default de ce faire, après led. jour de la Magdaleine passé, sera tenu de comparoir, en personne en lad. court. En ensuivant lequel appointement, led. Pignonneau a promis et juré, soubz les peines et submissions en telz cas accoustumées, retourner et comparoir en personne pour ester à droit, toutes et quantesfois que la court l’ordonnera, etc. Et pour faire contre luy tous adjournement et autres exploiz à ce nécessaires, à eleu son domicile à Paris en l’hostel de M. Pierre Desargy, lequel il a fait et constitué son procureur. » (Arch. nat., X2a 48, à la date du 3 juin 1484 ; le même arrêt est transcrit de nouveau au 4 juin.) On retrouve le même Guichard Pignonneau, comparant en archer à la montre, faite à Poitiers le 26 novembre 1491, par devant Guillaume Arembert, procureur du roi, de l’arrière-ban du Poitou, par ordre du roi et mandement de Jacques de Beaumont, sénéchal. Sur le rôle, on lit : Chastelleraut, Guichard Pignonneau, archer (Roolles des bans et arrière-bans de la province de Poictou, Xaintonge et Angoumois, Poitiers, 1667, pet. in-4°, p. 46, Réimpression Nantes, 1883.)

, habitatore in patria nostra Pictavensi, nonnullorum fidedignorum testimonio novimus suffragari, pro quibus non immerito gratum apud nos se reddidit et acceptum, nos personam et prolem ipsinus honorare volentes, ut sibi et posteritati sue ac proli perpetuum cedere valeat ad honorem, eundem Guischardum, cum tota ejus posteritate et prole utriusque sexus, in legitimo matrimonio procreata et procreanda, et eorum quemlibet de nostre regie potestatis plenitudine, auctoritate et speciali gracia nobilitavimus et nobilitamus per presentes, nobiles que facimus et reddimus ad omnia et singula quibus ceteri nobiles regni nostre utuntur ac uti possunt et consueverunt, ita quod ipse Guischardus ejusque posteritas et proles masculina in legitimo matrimonio procreata et procreanda â quocunque milite voluerint singulo

Sic, au lieu de cingulo.

milicie valeant decorari. Concedentes insuper eidem Guischardo universeque posteritati sue ac proli ex legitimo matrimonio procreate et procreande quod ipsi, in judicio et extra, pro nobilibus et ut nobiles ab omnibus de cetero teneantur et imperpetuum pacientur quibuscunque nobilitatibus, privilegiis, franchisiis honoribus, libertatibus et juribus, quibus ceteri nobiles dicti regni nostri gaudere conseverunt et utuntur, paciffice, libere et quiete utantur et gaudeant, et quod ipse Guischardus ejusque posteritas et proles, ex legitimo matrimonio procreata et procreanda, feuda et retrofeuda nobilia aliasque possessiones nobiles quecunque sint et quacunque prefulgeant auctoritate [acquirere possint, acquisitaque et jam habita] per eum ejusque posteritatem et prolem, ac in futurum acquirenda et habenda perpetuo habere et possidere licite valeant et que possint, ac si fuissent vel essent ab antiquo originaliter nobiles et a personis nobilibus ex utroque latere procreati, absque eo quod ea vel eas aut aliqua earum in parte vel in toto vendere nec extra manus suas ponere minime vel quomodolibet in futurum cogantur. Et hoc mediante certa pecunia quam dictus Guischardus nobis realiter tradidit pro quibusdam nostris negociis adimplendis et mediante qua summa dictum Guischardum ab omni financia quam propter hoc nobis debere potest quictavimus et quictamus, de nostra ampliori gracia per presentes, manu nostra signatas, non obstante quod summa ad quam dicta financia ascendere posset non fuerit hic aliter designata et specifficata. Quocirca dilectis et fidelibus gentibus compotorum nostrorum et thesaurariis, senescalloque nostro Pictavensi ceterisque justiciaris nostris aut eorum loca tenentibus, presentibus et futuris, tenore presentium damus in mandatis, quatinus eundem Guischardum ac ejus posteritatem et prolem utriusque sexus, in legitimo matrimonio procreatam et procreandam nostris presentibus nobilitacione, concessione, dono, quictancia et gracia uti et gaudere faciant et permittant pacifice et quiete, nec ipsos aut aliquem contra presentium tenorem, ullathenus inquietant aut molestent minime vel quomodolibet in futurum. Quod ut firmum et stabile perpetuo perseveret, nostrum presentibus jussimus apponi sigillum. Nostro tamen in ceteris et alieno in omnibus juribus semper salvis. Datum apud Plesseyacum de Parco prope Turonis, in mense decembri aunno Domini millesimo quadringentesimo septuagesimo septimo, et regni nostri decimo septimo.

Sic signatum : Loys. Per regem, gubernatore Delphinatus, magno senescallo Normannie, domino Montisacuti

C’est-à-dire Jean de Daillon, sr du Lude, gouverneur du Dauphiné, Jacques de Brézé, comte de Maulévrier, grand sénéchal de Normandie, et Louis Malet, seigneur de Graville et de Montaigu.

et aliis presentibus. L. Tindo. — Visa. Contentor. Rolant.

MDCVIII Janvier 1478 (n.s.)

Rémission octroyée à Pierre de Tongrelou, châtelain de Chauvigny pour l’évêque de Poitiers, et à Aimery du Pressoir, archer de la garde du corps, son neveu, coupables du meurtre de Marsault de Sarbonne qui leur avait cherché querelle.

AN JJ. 205, n° 45, fol. 26 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 203-207

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Pierre de Tongrelou

Pierre de Tongrelou (M. Babinet l’appelle par erreur Pierre Tongrelou), châtelain de Chauvigny pour l’évêque de Poitiers dès l’année 1474, seigneur de Saint-Martin-la-Rivière près de cette ville, était en même temps échevin de Poitiers depuis l’année 1459. Menacé de radiation, en 1492, et même remplacé, pour cause de non-résidence, il obtint un arrêt qui le rétablissait dans ses fonctions municipales, mais à la charge de résider désormais. Il mourut le 16 août 1496 et fut remplacé par Hilaire Boylesve, maître de la Monnaie de Poitiers. (C. Babinet, les Échevins de Poitiers de 1372 à 1625, brochure in-8°, 1896, p. 16 et 20. Extrait du t. XIX, 2e série, des Mémoires de la Société des Antiquaires de l’Ouest.) L’inventaire des Archives de la ville de Poitiers par M. Redet mentionne trois actes relatifs à ce personnage : 1° contrat d’échange par lequel Jean Audouyn cède à Pierre de Tongrelou, châtelain de Chauvigny, deux setiers de froment, mesure de Poitiers, et deux chapons de rente, plus douze deniers de cens dus sur une maison en la paroisse de Pouzioux, pour une rente d’onze boisseaux de froment mesure de Chauvigny, 18 août 1474. (F. 85.) 2° Retrait de la dîme de Thurageau fait au profit de la ville de Poitiers par noble homme Pierre de Tongrelou, bourgeois et échevin, seigneur de Saint-Martin-la-Rivière. La ville avait vendu à réméré ladite dîme et une rente de neuf setiers de froment, mesure de Poitiers, et de vingt chefs de poulaille pour le prix de 4.000 écus d’or à Jean de Moulins, seigneur de Rochefort, notaire et secrétaire du roi. 24 mai 1485 (Id., F. 89.) 3° Don par Pierre de Tongrelou, échevin, à la ville de Poitiers de la rente de deux setiers de froment à Pouzioux, près Chauvigny, pour remplir un engagement qu’il avait contracté en entrant dans l’échevinage, 28 juillet 1489. (Id., F. 85.)

En raison du meurtre de Marsault de Sarbonne, Louise Goyon, sa veuve, et leurs enfants avaient poursuivi Pierre de Tongrelou et Aimery Du Pressoir, d’abord devant le sénéchal du Poitou, puis en appel au Parlement de Paris. Les registres criminels de la cour contiennent seulement sur cette affaire, qui fut sans doute interrompue par l’entérinement des lettres de rémission, un arrêt interlocutoire du jeudi 18 juin 1478, dont voici la teneur : « Sur ce que damoiselle Loyse Goyonne, vefve de feu de Marsault de Sarbonne, en son vivant escuier, tant en son nom que comme ayant le bail, gouvernement et administracion des enfans mineurs d’ans dud. deffunt et d’elle, appellant du seneschal de Poictou ou de M. Jehan Prevost son lieutenant, demanderesse en cas d’excès, et le procureur général du roy adjoint avec elle au regard desd. excès, ont requis deffault leur estre donné à l’encontre d’Aimery Du Pressouer et Pierre de Tongrelou, deffendeurs oud. cas d’excès et adjournez à comparoir ceans en personne, sur peine de bannissement de ce royaume et de confiscation de corps et de biens et d’estre actains et convaincus des cas a eulx imposez » ; mais le procureur des intimés présentait des lettres les dispensant de la présence personnelle et les autorisant à se faire représenter en justice dans le procès en cours et en demandait l’entérinement. « Appoincté est que la court verra lesd. lettres, informacions et exploiz, et au Conseil en ordonnera comme de raison sera. » (Arch. nat., X2a 42, à la date du 19 juin 1478.)

On rencontre dans les textes de l’époque deux autres membres de cette famille Tongrelou Lyonnet de Tongrelou était appelant au Parlement, en 1485, de Jean Audouin et de Jean Doulcet, sergents royaux en Poitou contre les chantres, chanoines et chapitre de l’église collégiale de Saint-Pierre de Chauvigny. La cour, par appointement du 10 mai, convertit ses appellations en oppositions sans amende et sans despens et renvoya les parties, à six semaines, par devant le séneschal de Poitou ou son lieutenant à Poitiers, pour procéder sur le principal ainsi qu’il appartiendra par raison (Arch. nat., X1a 4826, fol. 183). Louis Tongrelou, de Chauvigny, se présenta en archer, le 20 septembre 1491, à la convocation du ban et de l’arrière-ban de Poitou ; insuffisamment armé, il lui fut « enjoint d’avoir vouge, hallebarde ou javeline ». Le 26 novembre suivant, il figura à la montre passée en la ville de Poitiers, par-devant Guillaume Arembert, procureur du roi (Roolles des bans et arrière-bans de la province de Poictou, Xaintonge et Angoumois, pet. in-4°, 1667, réimpr. de 1885, p. 46 et 74).

, chastellain de Chauvigny pour nostre ami et feal conseiller l’evesque de Poictiers

Jean VI de Bellay, évêque de Poitiers de 1451 au 13 septembre 1479, date de sa mort.

, chargé de femme et d’enffans, et de Aymery du Pressouer, dit Grant Jehan, archer de la garde de nostre corps de la nacion de France, contenant que, le premier jour de decembre derrenier passé, après ce que lesdiz supplians eurent disné ensemble en l’ostel dudit Pierre de Tongrelou, qui est oncle dudit Aymery à cause de sa niepce que icellui Aymery a espousée, ilz se partirent dudit hostel environ une heure après mydy pour aler veoir la foire qui estoit audit lieu de Chauvigny, et ainsi qu’ilz furent ou cemetière de Saint-Pierre dudit lieu, rencontrèrent ung nommé Guillaume Bizot, vicaire de Pouzoux, auquel ledit de Tongrelou dist qu’il faisoit coupper les boys de nostredit conseiller l’evesque de Poictiers son maistre et qu’il ne luy en prandroit ja bien. Lequel Bizot respondit à icellui de Tongrelou qu’il ne laisseroit point à faire coupper desdiz boys et qu’il avoit aussi bon maistre que luy, et après plusieurs autres parolles, se departirent ledit Bizot et ledit de Tongrelou. Et incontinant après, ainsi que lesdiz supplians s’en aloient ensemble à ladicte foire, eulx tenans par les braz, feu Marsault de Sarbonne survint hastivement vers lesdiz supplians, en adreçant des parolles qui estoient très rigoureuses audit de Tongrelou, que, par vertu d’un mandement qu’il avoit obtenu ou nom dudit evesque de Poictiers, il avoit fait faire deffenses, à paine de mil livres, qu’on ne fist adjourner ne convenir les hommes et subgectz dudit evesque de Poictiers audit (sic) lieu de Montmorillon, en jurant le sang de Nostre Seigneur et haulsant le poing sur son visaige, faisant semblant de le frapper, lui dist qu’il en paieroit bien. Et lors ledit de Tongrelou qui n’avoit aucun baston pour evader et fouir à la chaleur et mauvaise voulenté qu’il veoit que ledit de Sarbonne avoit contre luy, dist audit feu de Sarbonne que ledit evesque de Poictiers, son maistre, estoit appellant, tant pour lui que pour sesdiz hommes et subgectz, du juge et officiers dudit lieu de Montmorillon, et s’il faisoit aucune chose contre ledit appel, que le Parlement y pourverroit. Et icellui de Sarbonne en jurant tousjours le sang de Nostre Seigneur, deist de rechief audit de Tongrelou que en brief temps il s’en paieroit bien. Et ce voyant, ledit de Pressouer, nepveu dudit de Tongrelou, comme dit est, et que ledit de Sarbonne s’efforçoit de vouloir oultrager ledit de Tongrelou, son oncle, lequel il tenoit par dessoubz le braz, dist audit de Sarbonne qu’il ne soufferroit point qu’il oultrageast sondit oncle en sa presence, et qu’il n’estoit point homme à oultrager. A quoy icellui de Sarbonne respondy en jurant de rechief le sang de Nostre Seigneur que si feroit, en tirant ung bracquemart ou dague qu’il avoit à sa sainture, comme demy pié hors de son forreau pour fraper ledit de Tongrelou, suppliant. Et ce voyant, ledit du Pressouer aussi suppliant et que ledit de Sarbonne tiroit sondit bracquemart ou dague, doubtant que il en frapast luy et ledit de Tongrelou, son oncle, tira ung autre bracquemart qu’il avoit à sa saincture et en donna ung seul coup sur la teste dudit de Sarbonne. Et ce fait, se deppartirent d’ensemble, et s’en alla ledit de Sarbonne se faire abiller à barbiers et cirurgiens. Mais ce neantmoins, cinq sepmaines après ou environ, ledit de Sarbonne, par faulte de bon gouvernement ou autrement ala de vie à trespassement. A l’occasion duquel cas, lesdiz supplians doubtans rigueur de justice, nous ont humblement fait supplier et requerir noz grace et provision leur estre sur ce imparties, en nous humblement requerant que, attendu que ledit cas advint de chaude colle et que en autres cas iceulx supplians sont bien famez et renommez et de bonne vie et honneste conversacion, sans jamais avoir esté actains ne convaincus d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, nous leur vueillons sur ce impartir noz grace et misericorde. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, ausdiz Pierre de Tongrelou et Aymery du Pressouer avons remis, quicté et pardonné, etc., avec toute peine, amende et offense corporelle, criminelle et civile, etc., satisfaction faicte à partie civillement tant seullement, se faicte n’est, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. que de noz presens grace, quictance, remission et pardon facent, seuffrent et laissent lesdiz supplians et chacun d’eulx en droit soy joir et user plainement et paisiblement, etc. Donné au Plessis du Parc lez Tours, ou moys de janvier l’an de grace mil iiiiclxxvii, et de nostre règne le xviime.

Ainsi signé sur le reply : Par le roy, l’evesque d’Alby, le grant seneschal de Normandie, le sire d’Argenton et autres presens. L. Tindo. — Visa.

MDCIX Mars 1478 (n.s., avant le 22)

Permission à Poncet de Rivière, chevalier, de relever les fortifications de Château-Larcher que le roi avait fait raser, parce que ledit Poncet servait contre lui les ducs de Bourgogne et de Bretagne.

AN JJ. 203, n° 73, fol. 43 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 207-209

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Poncet de Rivière, chevalier, seigneur du Bourg[-Archambaut] et de Chasteau Lascher

Nous nous sommes occupés très longuement de cet intéressant personnage dans nos deux précédentes volumes (Arch. hist., t. XXXVI, p. 104-107, 232 ; t. XXXVIII, p. 264). tant au point de vue de son rôle politique que de ses possessions en Poitou. On voit par le présent texte que malgré la grâce et l’abolition que Louis XI lui avait octroyées par lettres du 31 octobre 1477, Poncet de Rivière était resté au service de François II, duc de Bretagne. Quoiqu’il lui eut pardonné officiellement, à la prière de ce dernier, sa défection et ses trahisons, le roi n’était pas homme à oublier et à lui rendre sa confiance et les charges et états qu’il avait remplis autrefois auprès de lui. Ce ne fut qu’au début de règne de Charles VIII, que Poncet rentra définitivement en grâce. A cette époque et dès le 27 décembre 1483, il était membre du Conseil royal : son nom figure en cette qualité au bas des lettres patentes délivrées au Conseil (voir Ordonnances du roi de France, XIX, p. 223) et dans les Procès-verbaux des séances du Conseil de régence de Charles VIII, d’août 1484 à janvier 1485 (Edit. A. Bernier, Coll. des Documents inédits, in-4° 1836 ; N. Valois, Bibl. de l’École des chartes, t. XLIII, 1882, p. 603.) Il vivait encore le 12 juin 1487, témoin cet extrait d’un registre du Parlement de cette date : « La cause d’appel d’entre messire Poncet de Rivière, chevalier, appellant de Colas Bouchardière, sergent royal, d’une part, et messire Geofroy Taveau, chevalier, seigneur de Mortemer intimé, d’autre, relevée ceans omisso medio du seneschal de Poictou, est renvoié à six sepmaines par devant le seneschal de Poictou, ou son lieutenant à son siège ordinaire de Poictiers, pour procéder comme de raison. » (Arch. nat., X1a 4828, fol. 275 v°.) — Signalons, pour finir, un abbé de Redon en Bretagne, de 1474 à 1492, nommé Odet de Rivière. M. Hauréau ne fournit aucun renseignement sur sa famille, mais il était certainement, sinon le fils du moins un très proche parent de notre Poncet de Rivière. (Voy. Gallia christiana, t. XIV, col. 956.)

, contenant que de tout temps et ancienneté esdictes terres et seigneuries du Bourg et de Chasteau Lascher et en chacune d’icelles a eu et a acoustumé d’avoir places et maisons fortes ; mais à cause de ce que ledit suppliant se mit et retira jà pieça ou service tant de feu le duc de Bourgogne que de nostre très cher et très amé cousin et nepveu le duc de Bretaigne, où il est encores de present et les a servis en armes à l’encontre de nous, nous avons fait demolir et abatre lesdictes places et maisons, lesquelles ledit suppliant feroit de present voulentiers bastir, construire et rediffier ; mais il n’oseroit ce faire, sans avoir sur ce noz congié et licence, humblement requerant iceulx. Pour quoy nous, les choses dessus dictes considerées, confians que ledit suppliant sera doresenavant bon et loyal envers nous et nous servira bien et loyaument, à icellui, pour ces causes et autres à ce nous mouvans, avons donné et octroyé, donnons et octroyons de grace especiale par ces presentes, congié et licence de faire construire, bastir et édiffier lesdictes places et maisons fortes du Bourg et de Chasteau Lascher ou lieu où elles estoient d’ancienneté ou ailleurs, en tel lieu à ce propre et convenable que bon luy semblera, et y faire et faire faire foussez, murailles, tours, tournelles, garites, ponslevys et toutes manières de fortifficacions qu’il y vouldra faire faire et qui à ce seront necessaires. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes aux seneschaux de Poictou et de Limosin et à tous noz autres justiciers et officiers ou à leurs lieuxtenans presens et advenir, et à chacun d’eulx, si comme à luy appartiendra que de noz presens grace, etc., sans luy faire, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné au Plessis du Parc, ou moys de mars, l’an de grace mil iiiiclxxvii et de nostre règne le xviime.

Ainsi signé : Par le roy, le sire d’Argenton et autres presens. Mesmes. — Visa.

MDCX Mars 1478 (n.s., avant le 22)

Rémission en faveur de Pierre Micheau, mercier, natif de Charroux, qui avait frappé mortellement un mendiant ivre, nommé Olivier Farsy, contre lequel il avait été contraint de se défendre, parce que celui-ci, après lui avoir d’abord cherché noise, l’avait assailli à coups de bâton.

AN JJ. 203, n° 77, fol. 46 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 209-212

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Pierre Micheau mercier, natif de la ville de Charroux, contenant que, en l’an mil cccc.lxxv ou moys d’aoust, autrement du jour n’est records, ledit suppliant, environ l’eure de vespres, s’en ala à l’ouvrouer d’un nommé Jehan Thenot, cordouannier, lors demourant en ladicte ville, pour lui commander à faire pour lui une paire de souliers, et lui estant sur ledit ouvrouer où il parloit audit cordoannier, survint illec feu Olivier Farsy, povre homme mendiant qui venoit de la taverne de l’ostel d’un nommé Jehan Bonnet, le jeune, fort yvre et ambeu ainsi qu’il avoit de coustume, et aussitôt qu’il fut près dudit suppliant, pour ce qu’il avoit mal en une jambe, luy commença à dire qu’il estoit plain de loups et de parolle en parolle lui dist plusieurs injures, et à ceste cause ledit suppliant lui dist qu’il s’en allast ailleurs espandre son vin et qu’il n’avoit que faire à luy. Dont ledit Farsy ne voult riens faire, ainsi de plus en plus le suyvoit et insistoit de parolles contencieuses et noyseuses. Par quoy ledit suppliant luy dist de rechief qu’il se ostast d’illec et qu’il alast ailleurs espandre son vin, et qu’il estoit yvre. Sur lesquelles parolles ledit feu Farsy dist audit suppliant qu’il avoit menty et pour chose que ledit suppliant lui dist, il ne s’en voult aller, mais de plus en plus ledit feu Farsy, qui estoit injurieux, brigueux, noyseux et yvroigne le suivy et oppressa de parolles tellement que ledit suppliant lui dist que, s’il ne s’en alloit de là, qu’il le frapperoit de l’une des formes dudit courdoannier, combien que à la verité il n’eust entencion de le frapper ne endommager, et le disoit seulement pour luy faire aler. Et toutesfoiz ledit feu Farsy après lesdictes parolles, vint sur ledit suppliant et leva ung groz baston qu’il avoit ou poing et lui couru sus en s’efforçant de frapper ledit suppliant de son baston sur sa teste, ce qu’il eust fait s’il n’eust receu le coup de son bras qu’il mist au devant, sur lequel bras il le frappa deux ou trois coups, et eust encores plus fait se ledit suppliant n’eust prins ledit baston dudit Farsy, et le saisy à travers du corps, en laquelle chose faisant il le gecta à terre et mist soubz lui, où il le frappa seulement du poing deux ou trois coups sur la teste, et atant se leva ledit suppliant de dessus ledit Farsy, qui se releva tout incontinent, mal esmeu et avec sondit baston commença à suivre ledit suppliant qui s’en aloit et fuyoit chez lui, pour obvier à la malice et fureur dudit Farsy, qui estoit fort yvre et dangereux, comme dit est. Et combien que ledit suppliant en s’enfuiant dist plusieurs foiz audit feu Farsy qu’il ne le suivist point et qu’il ne lui demandoit riens, toutes voyes ledit feu Farsy poursuivy plus fort que devant ledit suppliant avec sondit baston levé pour l’en cuider assommer, et tellement que les voisins qui ce voyerent, crioient au dit suppliant telles parolles : « Fuyez, fuyez. » Et de fait ledit feu Farsy suivoit si tost et de près ledit suppliant que, pour obvier à sa fureur, il ne peut gaigner son logeis, et fut contraint pour ce faire de s’en entrer en la maison de Pierre Micheau, son oncle ; mais il n’y peut si tost estre que ledit feu Farsy ne feust à la porte d’icelle maison, s’efforçant de vouloir entrer en icelle après ledit suppliant, pour le vouloir battre et oultrager. Et ce voyant, ledit suppliant, et qu’il ne povoit autrement fuyr ne evader à la fureur dudit Farsy, print une pelle de bois qu’il trouva à l’entrée de ladicte porte et se mist au devant dudit feu Farsy, pour le garder d’entrer en icelle maison. Et en ce faisant, de rechief ledit feu Farsy frappa ledit suppliant de sondit baston et eust plus encores fait se ledit suppliant ne se feust couvert de ladicte pelle et tellement fort que ledit suppliant, voiant que ledit feu Farsy ne vouloit cesser, mais perseveroit tousjours de vouloir frapper dudit baston et que de plus en plus il s’eschaufoit et esmouvoit contre lui, et que, si n’y remedioit, il estoit en danger de sa vie, d’icelle pelle de bois qu’il avoit frappa ledit fou Farsy sur la teste ung coup tant seulement, dont il le bleça à sang courant et playe ouverte, et tellement que au moien dudit coup ledit feu Farsy tumba à terre, dont il ne se peut ressoudre et convint que aucuns qui estoient illec près l’enlevassent. Et depuis fut mené à l’Ospital et aumosnerie dudit lieu de Charroux [où] il demoura malade per quatre ou cinq jours, après lesquelz, pour occasion d’icelluy coup, par faulte de bon gouvernement ou autrement il ala de vie à trespassement. Et combien [que] dudit cas, ainsi advenu que dit est, ledit suppliant feust et soit très [des]plaisant, et que en autres choses il ait tousjours esté bien famé et renommé sans avoir esté actaint d’aucun villain cas, blasme ou reprouche, neantmoins doubtant rigueur de justice il s’est absenté du pays et n’y oseroit jamais bonnement converser ne repairer, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requérant icelles. Pourquoy nous, etc., avons quicté, etc., avec toute peine, etc., en mettant au neant tous, etc. Et les restituons, etc. Et sur ce imposons, etc. Satisfacion, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou, et à tous, etc., que de nostre presente grace, etc. Et afin que ce soit, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, ou moys de mars l’an de grace mil cccc. soixante dix sept, et de nostre règne le xviie.

Ainsi signé par dessus le reply desdictes lettres : Par le roy, à la relacion du Conseil. R. Dubrueil. — Visa.

MDCXI Mars 1478 (n.s., avant le 22)

Rémission accordée à Armand de Goulart

Nous mentionnons cet acte comme intéressant une famille dont presque toutes les branches étaient fixées dans le Poitou. Le nom d’Armand Goulart ne figure pas dans la généalogie qui en a été donnée par M. Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 1re édit., t. II, p. 833 à 852.

, âgé de vingt-deux ans, du pays de Maransin, homme d’armes de l’ordonnance, qui, dix ans auparavant, avait, dans une rixe à Saint-Julien de Bort (Bords), et pour venger son parent, Etienne de Courtiau, qui venait d’être blessé d’un trait d’arbalète, frappé mortellement de deux coups d’épée Etienne de Lospitau, frère de Pierre de Lospitau, prêtre, avec lequel ledit de Goulart avait eu déjà quelques jours plus tôt une violente querelle. « Si donnons en mandement au seneschal de Xantonge, etc. Donné à Paris, ou moys de mars, l’an de grace mil cccc. soixante dix sept, et de nostre règne le xviime. »

AN JJ. 206, n° 198, fol. 45 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 212

MDCXII Juillet 1478 (avant le 22)

Rémission octroyée à Jacques de Sainte-Flaive, écuyer, pour le meurtre de Jean Maynner, avec lequel il s’était d’abord querellé parce qu’après lui avoir vendu un domaine à Saint-Laurent-de-la-Salle, ledit Maynner l’empêchait d’emprunter dessus une somme dont il avait besoin, pour s’équiper et se mettre en état de se présenter à la convocation de l’arrière-ban de Poitou.

AN JJ. 206, n° 22, fol. 5 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 213-215

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre bien amé Jaques de Saincte Flayve

Dans les précédents volumes, nous avons rencontré les noms de plusieurs membres de cette maison du Bas-Poitou, dont nous ne connaissons pas de généalogie. Le chef de la famille à cette époque paraît avoir été Guy de Sainte-Flaive, seigneur dudit lieu et de Languillier, chevalier, qui, dans un acte donné à Mauléon, le 27 septembre 1475, se qualifie capitaine des gens d’armes et de trait des nobles du pays de Poitou. (D’Hozier, Armorial général, in-fol., t. II, p. 461.) Il vivait encore en 1486, et était ajourné le 6 juin de cette année au Parlement de Paris, pour excès, forces et violences, avec plusieurs autres, par Hugues Prévost, écuyer. (Arch. nat., X2a 51, à la date.) Citons encore un aveu et dénombrement très détaillé de la terre et seigneurie de Sainte-Flaive et de ses dépendances, mouvant de la Roche-sur-Yon, rendu en 1417, par Jean de Sainte-Flaive à Louis duc d’Anjou, roi de Sicile et de Jérusalem, seigneur de la Roche-sur-Yon, dont l’original est conservé dans les archives de la Chambre des comptes. (Arch. nat., P. 2099), et la ratification, en 1432, par Jean de Sainte-Flaive, chevalier, des conventions matrimoniales conclues, en son nom, par Jean Jousseaume, sr de la Geffardière, entre Philibert de Sainte-Flaive, son fils, et Françoise de Beaumont, fille de Guy, sire de Bressuire, avec reconnaissance par ledit de Sainte-Flaive de la donation qu’il a faite à son fils de la terre et de l’hôtel de Saint-Martin-l’Ars en la châtellenie de Vouvent, estimés 200 livres de rente. (Arch. des Deux-Sèvres, chartrier de Saint-Loup, E. 1253, orig.)

, escuier, contenant que pour ce que, ou moys de mars derrenier passé, il oyt crier l’arrière-ban des nobles du païs et conté de Poictou et que lesdiz nobles fussent prestz à certain jour, montez et armez, ledit suppliant qui est nobles homs et qui a acoustumé de frequenter noz guerres, pour soy mettre sus, armer et monter, en esperance d’aler en nostre service, le cinquiesme jour d’avril derrenier passé, se transporta au lieu de Chastenay, pour empruncter de l’argent ou engaiger certain heritaige que autresfois il a acquis de feu Jehan Maynner. Et le lendemain vie jour dudit moys, ledit suppliant s’en ala au lieu de Saint Laurens de la Sale en la parroisse où est assis ledit heritaige parler à certaines gens ausquelz il esperoit bailler ledit heritage et recevoir de l’argent pour l’employer en ce qu’il avoit à faire pour nostre dit service ; et ainsi que ledit suppliant faisoit diligence de recouvrer ledit argent, luy fut dit que ledit Jehan Maynner, qui luy avoit vendu ledit heritaige y mettoit empeschement et que jà il avoit fait courir l’eaue par les prés dudit heritaige, et que ledit Maynner avoit achapté la partie d’aucunes personnes qui y avoient droit. Et lors ledit suppliant commença à dire telz motz : « C’est ung mauvais homme de ainsi faire en mon absence ; car je l’ay bien payé et il est obligé de le me garentir, et fait bien mal de ainsi se prendre au mien, quant je ne y suis pas. » Et tantost après à l’yssue de vespres ledit suppliant et le vicaire de l’eglise dudit lieu de Saint Laurens, parlans ensemble d’aucuns leurs affaires et eulx promenans par la rue, passa d’aventure par devant eulx ledit Maynner, et ainsi que ledit suppliant l’advisa, il luy dist telles parolles : « Maynner, pourquoy vous prenez-vous au dommaine que vous m’avez vendu ? Ne vous ai-je pas bien payé. » Lequel Maynner luy respondit qu’il ne se y prenoit pas et ledit suppliant luy dist que sy faisoit et qu’il faisoit courir l’eaue par dedans lesdiz prés comme s’ilz fussent encores siens, et que il le faisoit pour en prendre tousjours possession. Et lors ledit Maynner va respondre certaines grosses parolles arrogantes et non servans au cas ; et sembla audit suppliant que lesdictes parolles dictes par ledit Maynner estoient par manière de derrision et moquerie. Et à ceste cause ledit suppliant qui avoit ung braquemart pendu à sa seinture, desplaisant de ladicte response et qu’il n’avoit lors chose dont il peust faire argent pour soy monter et mettre sus, senon dudit heritaige, donna de chaulde cole audit Maynner sept ou huit cops de sa main seulement, en disant : « Villain, tu te mocques de moy ! » et en ce faisant, eschappa ledit Maynner audit suppliant et s’enfouyt ; et ainsi qu’il s’en fuyoit, ledit suppliant print une pierre non pas pour le vouloir fraper, mais pour luy faire paour. Et ainsi que ledit suppliant gecta ladicte pierre, ledit Maynner fist ung faulx pas et arriva de male adventure ladicte pierre contre la teste dudit Maynner et ne luy rompit que la peau. Mais ledit Maynner dudit cop ou autrement cheut de l’estomac et du visaige sur de grosses pierres qui estoient en la rue, tellement que cinq jours après ou environ, par faulte de gouvernement ou autrement, il est alé de vie à trespas. Pour occasion duquel cas, dont ledit suppliant est très desplaisant et a cheuy à partie, icelluy suppliant s’est absenté, etc. Pour quoy nous, etc., audit suppliant avons quicté, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, etc. Donné à Paris, ou moys de juillet l’an de grace mil cccc. soixante dix huit et de nostre règne le xviime.

MDCXIII Juillet 1478 (avant le 22)

Rémission en faveur de Jacques Gillier et d’Etienne Le Ferron, écuyers considérés comme responsables de la mort de Millet Moreau. Celui-ci ayant été surpris avec un de ses compagnons en train de pêcher dans des eaux appartenant audit Gillier, ce dernier, voulant les prendre prisonniers, s’était rendu avec Le Ferron, Guillaume Blanchart son serviteur et plusieurs autres à Sales ; et fouillant de son épée un tas de bourre dans lequel Milet s’était caché, ledit Blanchard l’avait blessé mortellement.

AN JJ. 206, n° 17, fol. 4 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 215-219

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de noz chiers et bien amez maistre Jaques Gilier

Jacques Gillier, fils aîné de Jean, seigneur de la Villedieu-de-Comblé (sur lequel voy. notre avant-dernier vol. Arch. hist. du Poitou, t. XXXV, p. 206) et de Françoise Mehée, licencié ès lois, fut aussi, après la mort de son père qui vivait encore à la date de la présente rémission, seigneur de la Villedieu et de Saint-Georges. Le 18 décembre 1463, par lettres patentes données à Saint-Riquier, il avait été pourvu, à la requête d’Etienne Gillier, sr des Rosiers, son grand-père, et sur la présentation de la reine douairière Marie d’Anjou, comtesse de Saintonge, de l’office de procureur du roi en Saintonge et au gouvernement de la Rochelle, en remplacement de sondit aïeul et nonobstant la nomination d’un nommé Méry Rabeau, d’ailleurs révoqué. (Bibl. nat., ms. fr. 27808, Pièces orig. 1324, n° 35.) Les numéros 37 à 39 du même volume sont des quittances de gages dudit office scellées des armes dudit Jacques Gillier, des 12 mai 1464, 10 juillet 1466 et 19 janvier 1467 n.s., gages qui s’élevaient à 50 livres par an. Louis XI, après la mort de son frère le duc de Guyenne, confirma Jacques dans la jouissance de cet office (lettres datées de La Rochelle, le 25 mai 1472, qui sont accompagnées de deux autres quittances de gages, l’une du 11 juillet 1474, l’autre du 3 décembre 1480). (Id., ibid., nos 42, 43, 44.) Le 14 décembre 1484, alors seigneur de la Villedieu-de-Comblé, Jacques Gillier rendit aveu au roi de l’office fieffé de clerc du greffe des présentations du Poitou. (Arch. nat., P. 1145, fol. 144), dont Charles VIII, le 20 août 1485, lui confirma le don qui avait été fait à son bisaïeul Denis Gillier et à ses héritiers par Jean duc de Berry, comte de Poitou. (Arch. de la Vienne, E2 253.) De Marie Le Ferron, dame de Petousse, sa femme, il eut deux fils et sept filles et décéda avant le 15 février 1489, date d’un nouvel aveu de l’office de clerc des présentations, fait par sa veuve, au nom de ses fils mineurs. (Cf. Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. IV, p. 140.) Marie Le Ferron lui survécut près de cinquante ans ; le 15 février 1537 n.s., elle rendait aveu au roi, en qualité de tutrice de ses petits-enfants mineurs, Joachim, Marie et Renée Gillier, fils et filles de feu François Gillier, sr de Saint-Georges de Longuepierre et de Louise de la Rochandry, du fief de Saugé à Bagnault, mouvant de Lusignan. (Arch. nat., P. 5562, n° 781.)

, escuier, et de Estienne Le Ferron

Etienne Le Ferron, écuyer, était sans doute un frère de la femme de Jacques Gillier, fils non mentionné d’Yves Le Ferron, écuyer, seigneur de Petousse (Exoudun, Deux-Sèvres), qui fut maire de La Rochelle en 1458 et de Marie de La Lande ou de Perrette Massicot qui était sa veuve en 1473. Ses sœurs connues, disent MM. Beauchet-Filleau (ce doit être une erreur, puisque nous venons de voir qu’elle vivait encore en 1537), étaient Marie, mariée vers 1460 au seigneur de la Villedieu-de-Comblé, et Perrette qui épousa Antoine de Montbron. (Dict. des familles du Poitou, t. III, p. 409.)

, aussi escuier, contenant que, le samedi xie jour de ce present moys de juilliet, environ l’eure de sept heures devers le soir, lesdiz supplians estans au lieu de la Villedieu, ledit Gilier dist à Guillaume et Jaquet Blanchars, frères, serviteurs de Guillaume Gilier

Guillaume Gillier, chef de la branche des seigneurs de Salles, était le quatrième fils de Jean, sr de la Villedieu et de Françoise Mehée ; marié le 19 juillet 1473 à Jeanne Jousseaume, il décéda avant 1504, laissant deux fils et quatre filles. (Id., t. IV, p. 144.) Guillaume Gillier est dit seigneur de Gastebourse, du ressort de la Mothe-Sainte-Héraye, au ban de nov.-déc. 1491, où il figure pour lui et pour la veuve de son frère Jacques, représentée par un homme d’armes et deux archers. (Roolles des bans et arrière-bans de la province du Poitou, Xaintonge et Angoumois, 1667, p. 88.)

, escuier, son frère, que l’un d’eulx après soupper alast au lieu de Sales faire lascher les escluses des moulins dudit lieu, pour arrouser certains prés appellez les Preaulx ; et peu de temps après lesdiz supplians s’en alerent esbatre et passer temps avec autres en la prearie appellée Motihoye

Ce nom est dit la prée Mothoyse dans les lettres pour G. Blanchart. (Acte qui suit immédiatement celui-ci.)

, et eulx illec estant, survint ledit Guillaume Blanchart fort esmeu, et dist ausdiz supplians que en alant audit lieu de Sales pour faire lascher lesdictes escluses, il avoit trouvé es eaues et pescheries dudit lieu de Sales, qui sont eaues defendues, deux pescheurs qu’il disoit estre des gens d’un nommé Thabouril, peschans esdictes eaues et que, pour ce qu’il s’estoit efforcé de prendre leurs engins, lesdiz pescheurs l’avoient batu et très fort oultragé, et puis l’avoient gecté soubz l’eaue. Oyant laquelle plainte par ledit Gilier, desplaisant dudit oultrage, delibera de aler prendre prisonniers lesdiz pescheurs et les faire punir par justice, et demanda audit Le Ferron s’il vouloit aler avec luy. Lequel luy dist qu’il estoit content. Et à ceste cause, commanda à Guillaume Charbonnier, sergent de ladicte terre de Sales, illec present, qu’il appelast avecques luy deux ou troys de ses serviteurs pour les acompaigner. Et ce fait, marchèrent au lieu où ledit Blanchart disoit avoir trouvé lesdiz pescheurs ; mais pour ce qu’ilz s’en estoient jà fouyz en la maison dudit Thabouril, ainsi que ledit Blanchart disoit, alèrent à ladicte maison, et pour ce que on ne leur vouloit faire ouverture, trouvèrent manière de entrer dedans. Et dist ledit Gilier audit Thabouril : « C’est mal fait à vous d’avoir batu cest homme et de faire pescher en mes eaues, èsquelles vous n’avez riens. Et quant vous m’eussiez demandé du poisson, je vous en eusse bien donné, sans le me desrober. » Ausquelles parolles ledit Thabouril ne respondit aucune chose. Et ce fait, sans riens prendre ne emporter dudit hostel ne faire desplaisir à personne, firent sercher par ledit hostel, auquel ilz ne trouverent aucun desdiz pescheurs. Et ainsi qu’ilz s’en retournoient audit lieu de la Villedieu, ledit Guillaume Blanchart, qui estoit demouré derrière, revint à eulx et leur dist que lesdiz pescheurs estoient en une autre maison près celle dudit Thabouril. Et à ceste cause retournèrent lesdiz supplians et ceulx de leur compaignie, et alèrent à icelluy hostel, auquel ledit Blanchart appella, en disant : « Ouvrez, ouvrez. » Et après aucun refuz à eulx fait par aucun temps, une femme estant oudit hostel leur ouvrit l’uys, et entrèrent tous au bas de ladicte maison avec deux torches alumées, et pour trouver et prendre lesdiz pescheurs, en quoy faisant lesdiz Guillaume et Jaquet Blanchars, frères, et ledit Roulet avec eulx montèrent au solier de ladicte maison, ouquel solier avoit ung grant monceau de bourre de draps soubz lequel estoit mucé ung nommé Milet Moreau. Et tost après oyrent lesdiz supplians que ledit Guillaume Blanchart cryoit : « A l’aide ! à l’aide ! veez les cy, veez les cy. » Auquel cry ledit Ferron, suppliant, monta audit solier par une eschelle, et ledit Gilier qui vouloit monter après ledit Ferron, dit à haulte voix audit Blanchart : « Ne frapez pas, ne frapés pas. » Et quant ledit Ferron fut monté audit planchier, il apperceut ledit Milet Moreau, qui se leva de dessoubz ladicte bourre, sans parler ne dire qu’il fust blecié ne autre chose. Lequel ledit Jaquet Blanchart tenoit par l’un des bras, non saichant qu’il fust blecié, ledit Le Ferron le print par l’autre bras, en luy disant : « Venez vous en en prison. » Et ce pendant, monta ledit Gilier audit solier tenant une torche alumée en sa main ; lequel aussi ne sçavoit pas que ledit Milet eust été blecié, et luy monté dist audit Milet : « Descends à bas » ; ce que ledit Millet fist. Et quant il fut descendu, il s’adreça audit Gilier en luy disant : « Monseigneur, que je parle à vous. Je suis blecié à mort. Que j’aye confession. » Et en ce disant, ledit Milet leva sa chemise par derrière et monstra comment il estoit blecié. Et quant ledit Gilier apperceut qu’il saignoit, il en fut très desplaisant et courroussé, et aussi fut ledit Le Ferron. Et incontinent saillirent hors de ladicte maison pour eulx en retourner audit lieu de la Villedieu. Et quant ilz furent hors, la femme dudit Milet vint au devant dudit Gilier et luy dist qu’il alast veoir ledit Milet. A laquelle ledit Gilier dist : « M’amye, je ne le sçauroye veoir », et appella ledit Charbonnier, auquel il commanda qu’il pensast bien [la bleceure] dudit Milet, et puis se mirent lesdiz supplians à chemin, et ainsi qu’ilz s’en aloient, vint après eulx ledit Guillaume Blanchart, auquel ilz demanderent qui avoit aussi blecié ledit Milet. Lequel leur respondit que en serchant en ladicte bourre, il avoit actaint ledit Milet de son espée, et lors ledit Gilier luy dist qu’il estoit bien paillart de l’avoir ainsi blecié, et ledit Guillaume luy respondit qu’il n’en povoit maiz et et qu’il en estoit fort marry, et qu’il ne le savoit pas en ladicte bourre. Et depuis ont esté lesdiz supplians adverty que ledit Milet, à l’occasion de ladicte bleceure, est alé de vie à trespas, etc. Pour quoy nous, etc., ausdiz supplians avons quicté, etc. Si donnons en mandement aus seneschal de Pontieu

Sic, corr. « Poictou ».

, etc. Donné à Paris, ou moys de juillet l’an de grace mil cccc. soixante dix huit et de nostre règne le xviie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil : Pouffé.

MDCXIV Juillet 1478 (après le 22)

Rémission accordée à Guillaume Blanchart, serviteur de Guillaume Gillier, écuyer, coupable du meurtre de Millet Moreau.

AN JJ. 206, n° 28, fol. 6 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 220-222

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Guillaume Blanchart aagé de xxii ans ou environ, serviteur de Guillaume Gilier, escuier, contenant que le xie jour de ce moys de juillet, ledit suppliant par le commandement de Jaques Gilier, frère dudit Guillaume, son maistre, se partit après soupper du lieu de la Villedieu et s’en ala au lieu de Sales pour faire courir certaines eaues pour arrouser certains prés appartenans à sesditz maistres, et en passant par lesdiz prés trouva peschant esdictes eaues Milet Moreau et le gendre d’un nommé Thabouril. Et alors ledit suppliant leur demanda qui leur avoit donné congié de pescher ausdictes eaues, qui estoient defendues et appartenoient à sondit maistre. Et ledit Milet respondy qu’ilz ne laisseroient pas à pescher pour luy ne pour sondit maistre. Et ledit suppliant dist que si feroient. Et à ceste cause s’efforça de leur oster leurs engins, mais ils y resisterent en eulz efforçant de le vouloir fraper et batre. Et à ceste cause s’en retourna audit lieu de la Villedieu querir Jaquet Blanchart, son frère, print son espée et d’illec s’en alla en la prée Mothoise dire audit Jaques Gilier qu’il avoit trouvé lesdiz pescheurs en leurs eaues, et afin qu’il fust plus enclin de les aler prendre, luy rapporta qu’ilz l’avoient batu, pour ce qu’il leur avoit voulu oster leurs engins. Pour laquelle cause ledit Gillier dist qu’il y falloit aler pour les prendre et de fait ledit Jaques Gilier, accompaigné d’Estienne Le Ferron, Jehan Matignon et dudit suppliant et aussi Guillaume Charbonnier, ung nommé Denis avec le paige dudit Gilier, et alèrent au lieu ou estoient lesdiz pescheurs, mais ne les trouverent point ; et pour ce ledit suppliant et ledit Matignon se mirent devant pour querir lesdiz pescheurs et en alant trouverent ledit Jaquet Blanchart, frère dudit suppliant, et lui demandèrent s’il avoit point veu lesdiz pescheurs, qui leur respondit que non. Et à ceste cause, lesdiz suppliant et Matignon s’en alèrent au long de la riviere et oyrent en une solaye près d’illec, comme il leur sembla, aucunes gens. Et lors ledit suppliant crya ausdiz Gilier et Ferron qui venoient derriere : « Véez les cy, véez les cy », et cuidant qu’ilz y fussent se mist en l’eaue pour les prendre, mais ne les peut trouver. Voyant laquelle chose ledit suppliant dist ausdiz Gilier et Ferron que lesdiz pescheurs s’en estoient fouy à la maison dudit Thabouril. Pour laquelle cause, tous les dessusdiz alerent à ladicte maison, à laquelle dit supplians hurta deux ou troys cops contre la sarreure de l’huys du pommeau de son espée, en disant : « Ouvrez, ouvrez » et pour ce qu’il fut respondu par ledit Thabouril qu’ilz n’y entreroient jà et qu’ilz cuydoient que lesdiz pescheurs feussent dedans, trouvèrent manière d’y entrer, etc. …

La suite, à peu de chose près, comme dans l’acte qui précède.

s’estoit mucé ledit Milet Moreau. Et ignorant ledit suppliant qu’il n’y eust personne, frapa deux cops de son espée nue en ladicte bourre, esquelz deux cops il ne rencontra riens, et derechief frapa ung autre cop en ladicte bourre et senty qu’il avoit rencontré quelque chose, mais ne savoit quoy, pour ce que ledit Milet ne donnoit mot …

La suite, à peu de chose près, comme dans l’acte qui précède.

Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, etc. Donné à Paris, ou moys de juillet l’an de grace mil cccc. soixante dix huit, et de nostre règne le xviiime

Les lettres de rémission en faveur de Jacques Gillier et d’Etienne Le Ferron sont de même date, sauf l’année du règne qui est la XVIIe, tandis qu’ici c’est la XVIIIe. La 18e année de Louis XI ayant commencé le 22 juillet, les présentes sont postérieures et les précédentes antérieures à ce quantième.

.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. De Villebresme. — Visa. Contentor. Picart.

MDCXV Juillet 1478 (après le 22)

Rémission accordée à Jacques Blanchart, Guillaume Charbonnier, sergent, Jean Matignon et Denis, charretier, serviteurs et familiers de l’hôtel de la Villedieu, compromis dans la même affaire de meurtre.

AN JJ. 206, n° 29, fol. 7 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 222-223

Loys, par la grace, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receue l’umble supplicacion de Jacquet Blanchart, jeune fils de l’aage de xxi ans ou environ, Guillaume Charbonnier, barbier, sergent des lieux et seigneuries de Sales et de la Villedieu, Jehan Matignon et ung nommé Denis …

Blanc au registre.

, charretiers, serviteurs et familiers de l’ostel de la Villedieu, contenant que le xie jour de ce present moys de juillet, lesdiz supplians estans oudit lieu de la Villedieu, Guillaume Blanchart, frère dudit Jaquet Blanchart, survint oudit lieu et trouva Jaquet Blanchart, auquel il dist qu’il venoit des eaues de Sales et que illec il avoit trouvé des pescheurs qui peschoient ausdictes eaues auprès du moulin Thabouril, lesquelz l’avoient voulu batre et gecter en l’eaue, et demandant où estoit Monseigneur. Et incontinent se departy de luy et entra en la maison pour aler prendre son espée. Et lors ledit Jaquet, desplaisant de l’oultrage que ledit Guillaume son frère disoit lui avoit esté faicte par lesdiz pescheurs, print son espée, une arbaleste avec une vire et ala seul au lieu ou sondit frère luy avoit dit que lesdiz pescheurs estoient, mais ne les trouva point, et d’illec sans bender son arbaleste ne autre chose faire, ala jusques près la chaussée dudit moulin, et en escoutant oyt aucunes gens qui parloient sur ladicte chaussée, mais pour ce qu’il estoit presque nuyt, ne pot cognoistre quelz gens ce estoient. Et ce pendant ledit Guillaume son frère s’en ala par devers ledit Jaques Gilier qui estoit alé esbatre à la prée Mothoyse avec Estienne Le Ferron et autres, pour luy adnoncer qu’il avoit trouvé lesdiz pescheurs ausdictes eaues de Sales. Et trouva lesdiz Gilier et Ferron, lesquelz par le moyen du rapport que leur fist ledit Guillaume Blanchart de ce qu’il avoit esté batu par lesdiz pescheurs et gecté en l’eaue, s’en vindrent audit lieu de la Villedieu, ledit Ferron tenans une forche de fer, et ledit Gilier n’avoit aucun baston. Et dist ledit Gilier audit Charbonnier : « Il fault aler prendre ces pescheurs ; que on appelle deux ou troys de noz gens. » Et incontinent ledit Charbonnier, appella lesdiz Jehan Matignon, Denis …

Blanc au registre.

et le paige dudit Ferron, nommé Aubert, et prist iceluy Denis suppliant une javeline et ledit Matignon ung braquemart et alèrent jusques au plus près dulieu où ledit Blanchart disoit avoir trouvé lesdiz pescheurs, etc., (ut in precedentibus, mutatis mutandis). Donné ou moys de juillet l’an de grace mil cccc. soixante dix huit, et de nostre règne le xviiime.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. De Villebresme. — Visa. Contentor. Picart.

MDCXVI Juillet 1478 (après le 22)

Rémission donnée en faveur d’Etienne Assally, dit Trédat, archer de l’ordonnance résidant à Poitiers, qui, dans une querelle de jeu, avait frappé mortellement un de ses compagnons de deux coups de dague.

AN JJ. 201, n° 197, fol. 150, v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 223-225

Loys, etc. Savoir, etc., nous, etc., de Estienne Assally, dit Tredat, archier de nostre retenue, contenant que, ou moys de fevrier derrenier passé, ledit supliant s’en alla en ung chenevreau

Chenevral, chenevreau, cheneverau, lieu où l’on cultive ordinairement le chanvre. Dans les textes poitevins, ce nom s’écrit aussi chenebau (chen’bau) ou chen’evault. (Cf. F. Godefroy, Dict. de l’anc. langue fr., t. II, v° Chenevral.)

près nostre ville de Poictiers, avec ung nommé Meriache et autres compaignons estans audit chenevreau, lesquelz jouoient aux quilles, et illec se print à jouer avec eulx. Et ainsi qu’ilz jouoient, y arriva Guillot Varlet, qui pareillement se print à jouer, et ainsi qu’ilz eurent getez leurs copz, ils furent parelz en jeu, tellement qu’il y eut rapeau

Ou « rapel », signifiant renvoi au jeu, recommencement du jeu, la partie étant nulle. (Id., t. VI, p. 597.)

et lors midrent tous chacun ung denier en jeu, pour ledit rapeau, fors ledit Varlet, qui n’en avoit point, comme il disoit ; auquel fut dit par ceulx qui jouoient comme lui qu’il mist son denier comme les autres, ou sinon qu’il quitast ledit jeu, et mesmement lui dist ledit supliant, mes il ne volut, disant qu’il n’en avoit point. Et à ceste cause prindrent ledit supliant et Varlet de grosses parolles, et tellement que ledit Varlet se efforça, d’une quille qu’il tenoit en sa main, en frapper icellui supliant par plusieurs foys. Et lors ledit supliant lui dist qui si feroit et pour soy deffendre, print la boule dont ilz jouoient et la geta audit Guillot Varlet, et ne le toucha point. Ce neantmoins ledit [Varlet] en perceverant de mal en piz, se efforsoit joindre audit supliant, dont lui dist ledit supliant, en soy reculant, et tira une dague, telles parolles ou semblables : « Se tu ne te reculles, je te frapperay. » Et ce fait, ledit Valet joingnit audit supliant et l’empognia aux cheveulx. Et à ceste cause, ledit supliant dist par plusieurs foys qu’il le laissast ou sinon qu’il le despescheroit ; lequel ne le voult lascher. Et ce voyant, ledit supliant, fort esmeu, doubtant qu’il ne lui fist quelque grant desplaisir, le frappa deux copz d’estoc de sa dague et de taille jusques à grant effusion de sang. Et lors ledit Valet le laissa. A l’occasion desqueulx copz ledit Valet, ung jour ou deux [après] est allé de vie à trespassement. Pour laquelle cause, ledit supliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté, etc., requerant, etc. Pour quoy nous, etc., audit supliant avons le fait et cas dessus declaré remis, quicté et pardonné, etc., avec toute peine, etc., et l’avons restitué, etc., satisfacion faicte à partie, etc. Si donnons en mandement, par cesdites presentes, au seneschal de Poictou et à tous, etc., que de nos presens grace, ledit supliant, etc., facent, laissent et souffrent joir, etc. Donné à Arras, ou moys de juillet l’an de grace mil iiiic lxxviii, et de nostre règne le xviiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. P. Burdelot. — Visa. Contentor. J. Duban.

MDCXVII Août 1478

Rémission en faveur d’Alexandre Heuzé, écuyer, fils de feu Pierre Heuzé, archer de l’ordonnance sous la charge de Jean du Fou, sr de Nouâtre

Jean Du Fou, chevalier, seigneur de Rustrenan, frère aîné d’Yvon du Fou, sénéchal de Poitou, fut chambellan de Louis XI, bailli et gouverneur de Touraine. La seigneurie de Nouâtre lui venait de sa femme, Jeanne de la Rochefoucauld. (Cf. notre volume précédent, p. 107, note, 395, note.) C’est parce qu’il faisait partie de la compagnie d’ordonnance de Jean du Fou, que nous mentionnons cette rémission accordée à Alexandre Heuzé, qui paraît d’ailleurs étranger au Poitou.

, conseiller et chambellan du roi, à la suite du meurtre de Pierre Malerbe, chapelain de l’une des cures de Martragny au bailliage de Caen, qui vivait en concubinage avec sa mère. « Donné à Paris, ou moys d’août l’an de grace mil cccc. soixante dix huit, et de nostre regne le xviiime. »

AN JJ. 206, n° 32, fol. 7 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 225

MDCXVIII [Vers août] 1478 (après le 22 juillet)

Rémission donnée en faveur de Jacques Bibart, Pierre Bourdault, Guillaume Berchelière et autres bacheliers ou jeunes gens à marier de la paroisse de Saint-Mars de la Reorthe, qui, à leur assemblée annuelle, le lundi de la Pentecôte, s’étant pris de querelle et en étant venus aux mains avec ceux des Épesses, avaient frappé à mort l’un d’eux nommé Jean Cotereau.

AN JJ. 205, n° 27, fol. 13 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 225-228

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jaques Bibart, Guillaume Berchelière, Pierre Bourdault et autres jeunes compaignons bachelliers et enfans de la parroisse de Saint Mars de la Reorte, ou bas pays de Poictou, de l’age de xii à xxiii ans ou environ, contenant que par les parroisses dudit bas pays de Poictou les jeunes compaignons que on appelle bachelliers à marier ont acoustumé tous les ans, à chacune feste de Penthecoustes, eulx assembler joyeusement et faire entre eulx, par election en chacune parroisse et assemblée ung roy de bachelliers, qui a la charge, gouvernement et administracion du cierge et luminaire desdiz bachelliers. En ensuivant laquelle coustume et usance lesdiz supplians de ladite parroisse de Saint Mars et aussi ceulx de la parroisse des Espoisses qui ont acoustumé eulx assembler comme dit est et s’esbatent et dancent avecques menestriers, et boivent et menjeussent ensemble chacun en sadite parroisse, le lundi landemain de la Penthecouste derrenière passée, après la première messe du matin, allèrent avec leurs menestriers et estandart qu’ilz font d’une serviette ou couvrechief, querir le may ainsi qu’il est de coustume, c’est assavoir lesdiz supplians ou boys appellé de Jarrie où ilz doivent pour devoir une espaule de mouton, et ceulx de la parroisse des Espoisses ou boys du Pié du Fou, où ils doivent deux solz tournois pour le devoir dudit may. Et d’illec s’assemblent en une place commune ou carrefour d’entre lesdites deux parroisses, qui s’appelle la place des bachelliers et y dancent tous ensemble, et après s’en vont à la grant messe. Et advient voulentiers par chacun an qu’ilz ont question et debat ensemble à qui mieulx dance. Et de fait en ceste dicte derrenière année, ainsi que lesdiz supplians et ceulx des Espoisses faisoient leur assemblée, comme il est acoustumé oudit carrefour et place commune, et que ceulx de ladite parroisse des Espoisses, qui estoient venuz les premiers desmarchoient jà pour eulx en retourner, ils apperceurent lesdiz supplians et retournèrent vers eulx et s’entresaluèrent. Et après lesdiz des Espoisses avec lesquelz avoit plusieurs autres gens de mestier et incongneuz, demandèrent ausdiz supplians s’ilz vouloient dancer avec eulx. Lesquelz respondirent que non, parce qu’ilz s’en vouloient aller à leur grant messe, et que leur curé les attendoit, aussi qu’ilz veoient que ceulx de ladite parroisse des Espoisses estoient en plus grant nombre que eulx et les doubtoient s’ilz venoient en quelque débat par ce qu’ilz estoient embastonnez et les avoient menassez dès devant la feste que s’ilz se rendoient en la place qu’il y en demoureroit, et en les moquant leur avoient dit qu’ilz se armassent bien par derrière. Et dirent lesdiz des Espoisses ausdiz supplians : « Si ferez ; vous dancerez », et firent sonner leurs menestriers. Et lesdiz supplians dirent de rechief qu’ilz ne danceroient point, et qu’ilz s’en vouloient aller. Et lors l’un de ceulx des Espoisses leur dit qu’ilz s’en allassent donc. Et commencèrent lesdiz supplians à eulx en aller en disant : « Adieu, adieu. » Et adonc l’un des compaignons des Espoisses frappa d’un gros baston l’un desdiz supplians tant qu’il le tumba à terre comme s’il fust mort, en criant : « Tuez, tuez », dont fut grant bruyt entre eulx. Et advint que Pierre Bourdault, l’un desdiz supplians, apperceut que ung nommé Jehan Cotereau, de ceulx des Espoisses, avoit dague dont il vouloit frapper l’un desdiz supplians, et pour resister à son entreprinse iceluy Bourdault, Jaques Bibar et Guillaume Barchelière supplians frappèrent sur luy tant qu’il cheut à terre. Et après se departirent et s’en allèrent de ladite place d’un cousté et d’autre. Et au regard dudit, Cotereau, il fut emmené audit lieu des Espoisses et le jeudi ensuivant, pour les coups et bastons qu’il eu, par deffault de bon gouvernement ou autrement, alla de vie à trespas. Dont lesdiz supplians ont despuis chevy à partie. A l’occasion duquel cas, lesdiz supplians qui sont tous jeunes enffans et n’eurent jamais intencion que à ladite assemblée se deubst quelque mal faire, doubtant que on voulsist contre eulx ou aucuns d’eulx procéder par rigueur de justice, se noz grace, etc. Pourquoy, etc., à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieux tenans, presens et avenir, et à chacun d’eulx, etc. Donné à (blanc), ou moys de (blanc) l’an de grace mil cccc. soixante dix huit, et de nostre règne le dix huitiesme

L’acte qui précède ces lettres dans le registre JJ. 205 est du mois d’août 1478 et les deux suivants d’octobre et novembre de la même année.

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MDCXIX [Vers octobre] 1478 (après le 22 juillet)

Rémission accordée à Jean Ripault, marchand de Saint-Maxire, détenu prisonnier à Niort et poursuivi pour avoir fait fabriquer un double d’un contrat de vente avec majoration du prix, dans le but d’obtenir de Jean de Limoges, prêtre, dont il avait été l’intermédiaire, une commission plus élevée.

AN JJ. 205, n° 22, fol. 11 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 228-233

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, à tous, presens et advenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Jehan Ripault

Cf. trois actes signalés par M.A. Richard, le premier du 14 avril 1458 relatif à Jean Ripault, fils de Jean, dit de la Passelière, les deux autres du 18 mai 1504 et du 22 août 1507, se rapportant à Jean Ripault le jeune. (Archives du château de la Barre, t. II, p. 116, 281, 335.)

, pouvre marchant, demourant à Saint Maxire près de Nyort, chargé de femme et d’enfans, mesmement de troys filles aagées et prestes à marier, nous a esté humblement exposé que, environ le moys de juing derrenier passé eut ung an, Guillaume de Limoges, prebstre, qui avoit grant desir et affection d’avoir et acquerir certains dommaines et heritaiges que Nycolas Pelet, prebstre, demourant ès parties du Languedoc devers Tholouse, avoit au lieu et moulins de Salebeuf près dudit Nyort et ailleurs ou pays de Poictou, saichant que ledit suppliant avoit grant amitié et congnoissance audit Pelet et que souventes foiz il aloit oudit pays de Languedoc vers Thoulouse pour le fait de sa marchandise et autres affaires, pria et requist iceluy suppliant, qu’il voulsist trouver et traicter moien pour luy d’auoir et acquerir dudit Pelet sesdiz dommaines et heritages au meilleur marché qu’il se pourroit avoir et en faire avoir pour lui mesme, qu’il paieroit et contenteroit très bien de ses peines, vacations et despenses, mesmement luy promist deux ou troys escuz pour ce faire. Lequel suppliant print de ce le faiz et charge et pour servir et complaire audit de Limoges, fut par devers ledit Pelet au lieu de Lavaur distant de cinq lieues ou environ de nostre ville et cité de Thoulouse, pour traicter d’avoir et achepter sesdiz dommaines et heritages. Mais de prime face ledit Pelet ne voult entendre, en disant qu’il n’estoit point deliberé de vendre son heritage mais finablement par traict de temps, traictez et remonstrances, ledit Pelet fut content, en faveur d’icellui suppliant et de l’amour et congnoissance qui estoit entre eulx, de luy vendre et transporter et de fait luy vendy et transporta tous et chacuns des heritages qu’il avoit audit pays de Poictou pour le pris et somme de vingt cinq escuz au prix et valeur de xxvii solz vi. deniers tournois pour chacune pièce, et de ce furent faictes et passées lettres et contractz par ung nommé Sabatier, notaire public, moiennant ce que ledit suppliant convenança et promist, hors le contenu audit contrast, de conduire et mener dudit lieu et païs de Poictou par devers ledit Pelet, audit lieu de Lavaur, une sienne nyepce nommée Philippe Dardinelle aux despens d’icelluy suppliant. Et après ce ledit suppliant, considerant qu’il avait eu grant marché desdites choses, qui valoient ou pourroient valoir quarente cinq escuz ou environ, et que en sa faveur ledit de Lavaur Pelet le lui avoit delaissé à mendre pris et que seulement ledit de Lymoges lui avoit promis deux ou troys escuz pour ses peines, despens et labours dessus diz, doubtant qu’il ne luy voulsit autrement satisfaire ou recompenser ou lui bailler la juste valeur desdites choses, considerant aussi iceluy suppliant qu’il estoit et est chargé de mesnage et avoit et a lesdites troys filles prestes et bonnes à marier et qu’il n’avoit et n’a pas bonnement de quoy les marier et appoincter, et qu’il avoit bien et prouffitablement conduit les negoces dudit de Limoges et que, s’il y eust esté en personne, il eust bien autant mis et despencé pour avoir lesdites choses, fist doubler en parchemin par ung jeune clerc dudit lieu de Thoulouse les lettres de ladite acquisicion selon leur forme et teneur, sans y mettre ne addicionner aucune chose fors seulement en lieu desdiz xxv escuz du pris dessus dit fut mise et escripte ladite somme de xlv escuz d’or, et fist signer ladicte coppie en forme d’original du semblable seing manuel dudit Sabatier, en esperance seulement de la monstrer audit de Lymoges, afin d’avoir et recouvrer de luy ladicte somme de xlv escuz d’or, et lui monstra ladite lettre en coppie ainsi faicte et signée par ledit jeune clerc ou non dudit Sabatier, et aussi luy remonstra comment il avoit longuement séjourné et avoit fait de grans fraiz et despens pour ce faire. Dont ledit de Limoges fut content et pour toutes choses chevy et appoincta audit suppliant, pour avoir de lui lesdiz heritages, à la somme de cinquante escuz, et pour ce qu’il n’eut argent content pour iceulx paier audit suppliant, il lui constitua et assigna pour l’arrentement perpetuel d’iceulx cinquante boesseaulx de froment de rente, subgectz à retraict, sur lesquelz il avoit et a eu d’iceluy de Limoges la somme de quarante escuz, dont il lui avoit baillé sa cedulle et recongnoissance pour cause de prest. Et bien ung an après ou environ s’est meu procès et question entre ledit de Limoges d’une part, et ledit suppliant, d’autre, à l’occasion de ladicte acquisicion et de ce que ledit de Limoges vouloit et tendoit avoir la lettre de ladite acquisicion faicte par ledit suppliant dudit Pelet de ses diz dommaines et heritages, pour ledit pris de xlv escuz, dont estoit apparu par ladite coppie de lettre supposée et signée ou nom dudit Sabatier ; laquelle lettre ledit suppliant avoit promis bailler et exiber audit de Limoges toutes foiz et quantes qu’il en seroit requis. Lequel suppliant ne voult bailler ne exiber ladite lettre supposée, faisant mencion de ladite somme de xlv escuz, en manière que icelluy suppliant, ledit de Limoges ne autres s’en puissent aider en jugement ne, soubz couleurs d’icelle, endommager les lignages dudit Pelet, qui vouldraient pretendre en demander lesdites choses par retraict ne autres quelzconques, mais exiba, rendi et bailla audit de Limoges juridiquement la vraye lettre et contract de ladite acquisicion par luy faicte dudit Pelet de ses diz heritages pour ledit pris de xxv. escuz. Et pour ce que ledit de Limoges ne s’en voult contenter, et attendant avoir ladite lettre faisant mencion desdiz xlv escuz, ou luy estre deduyt ou rabatu de ladite rente selon la mendre valeur ou quantité desdites sommes pour ce baillées, s’est assis procès entre lesdites parties et ledit suppliant constitué et arresté prisonnier en noz prisons dudit lieu de Nyort, à la requeste de nostre procureur audit lieu, en lui supposant qu’il avoit monstré et exibé divers contractz et de diverses sommes d’un mesme jour et pour raison d’une mesme chose et qu’il avoit esté commis faulceté ou abuz en la matière. Et sur ce ledit suppliant a esté ouy et interrogué par plusieurs foiz. Lequel suppliant, pour cuider eviter qu’il ne fust reprins par justice d’avoir faict et consenty les choses dessus dictes et que par ce moien sesdites filles fussent retardées en leur bon mariage et avencement, a dit et confessé que veritablement il avoit contracté par deux foiz avec ledit Pelet, c’est assavoir à la première foiz oudit moys de juing derrenierement passé eut ung an, pour ledit pris et somme de xlv. escuz, moiennant ce que ledit Pelet lui avoit donné son gré et loysir de prandre ou laisser lesdiz heritages pour lesdiz pris jusques à certain temps ensuivant, et en avoient esté passées lettres par ung nommé Salvadour, lesquelles il avoit monstrées audit de Lymoges et avoit contracté avec lui par la forme dessus dicte, et certain temps après s’estoit de rechief transporté audit lieu de Lavaur par devers ledit Pelet, auquel il avoit dit et remonstré que sesdiz heritages ne valoient ledit pris et avoit trouvé moien de leur faire rabastre et relascher ledit pris de xlv. escuz à ladite somme de xxv. escuz ; et sur ce auroient esté faictes et passées lettres et contract par ledit Sabatier du jour et date desdites premières lettres passées oudit moys de juing derrenierement passé eut ung an, du consentement de luy et dudit Pelet, et que ainsi avoit esté adresé par ung nommé Guillaume de Lavaulx, qui avoit esté present audit premier contract ; lequel premier contract estoit demouré de par de là, comme de nul effect et depuis ne l’avoit veu. Et combien que ledit contract par ledit suppliant exibé et presenté en jugement, faisant mencion comme il a acquis lesdiz heritaiges dudit Pelet pour ledit pris de xxv. escuz, passé et signé par ledit Sabatier oudit moys de juing derrenier passé eut ung an soit veritable et veritablement passé et expedié sans contenir en soy quelque faulceté ou mauvaistié et que icelluy [suppliant] n’eust fait faire ladite coppie et exemplaire de lettres supposées escripte et signée par la manière dessusdicte, en espérance d’en faire apporter fraude, dommage et interest à personne quelconque ne à autre fin que pour estre paié ou sattisfait dudit de Lymoges de ladite somme de xlv escuz et fraiz dessusdiz pour luy transporter lesdiz heritages, ne cuidant en ce faisant mesprendre ou offendre aucunement, consideré mesmement tant pour la valeur desdiz heritages que pour ses dites peines, vacacions et labours il pensoit et creoit veritablement pour avoir et recouvrer licitement dudit de Lymoges la somme, fraiz et despens dessusdiz, aussi que ledit de Lymoges en avoit esté et est contrainct, et de ce s’estoient et sont convenuz et acordez ensemble, et que contre autres quelzconques ne s’en vouloit ne estoit aidé, fors seulement dudit contract par luy rendu et exibé qui est le vray contract. passé et accordé entre luy et ledit Pelet, et que aucun dommage ne interestz en la façon et exibicion de ladite coppie ou lettre supposée n’a esté, fors seulement audit de Lymoges, lequel il a pour ce sattisfait et contenté et dont il est tenu et tient pour content, toutes foiz il doubte que, pour occasion des choses dessusdictes ou qui en despend, nostredit procureur audit lieu de Nyort vueille prandre aucunes grans conclusions à l’encontre de lui et que, sans avoir regard à ce que dit est mesmement à son estat, simplesse et ignorence et à ce qui l’a meu aux choses dessusdites et au grant retardement d’avancement et mariage de sesdites filles et autres inconveniens qui leur pourroient avenir, s’il estoit pour ce pugny, mis ou multé en amende selon la rigueur des droiz, on vueille rigoureusement procéder à l’encontre de luy, si comme il dit, humblement requerant que, attendu ce que dit est et que en toutes autres choses il a tousjours esté bien famé et renommé, il nous plaise sur ce lui impartir nostre grace et misericorde. Pour quoy nous, ces choses considerées, etc., au seneschal de Poictou ou à son lieutenant audit Nyort et à tous noz autres justiciers, ou à leurs lieutenans, etc. Donné à (blanc) ou moys (blanc), l’an de grace mil cccc. soixante dix huit et de nostre règne le dix huitiesme

L’acte qui précède immédiatement sur le registre du Trésor des chartes est de septembre et le suivant d’octobre 1478.

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MDCXX Novembre 1478

Lettres de légitimation accordées à Jean d’Estissac

Nous mentionnons ces lettres de légitimation, parce que, d’après le récent généalogiste de la maison de Madaillan, M. Maurice Campagne, le personnage en faveur duquel elles sont données n’est autre que Jean de Madaillan d’Estissac, écuyer, qui hérita vers 1460, de son oncle Amaury d’Estissac, seigneur de Coulonges-les-Royaux, le Bois-Pouvreau, Cherveux, etc., en Poitou, sénéchal de Saintonge, décédé sans enfants, dont il prit le nom et les armes, auquel d’ailleurs nous avons consacré une notice biographique dans notre précédent volume, p. 337. Il serait né avant le mariage de son père Lancelot de Madaillan, seigneur de Lesparre, avec Jeanne d’Estissac, veuve de Bertrand de Goth, seigneur de Puyguilhem. M. Campagne n’admet pas cette interprétation du texte de la légitimation ; il ne se l’explique pas et y voit quelque chose de mystérieux. Jean d’Estissac fit son testament le 19 juillet 1482, au château de Lauzun, chez son neveu Jean de Caumont. Dans cet acte il nomme ses deux femmes : Françoise de La Brousse ou de La Brosse et Jeanne de Vivonne ; il mourut peu après, car avant la fin de l’année, son fils Geoffroy était sous la tutelle de son cousin Jean de Caumont, vicomte de Montbahus et seigneur de Lauzun. (Histoire de la maison de Madaillan de 1076 à 1900, Bergerac, 1900, in-4°, p. 222 à 225.)

. « Dilectus noster Johannis de Lesparre, alias d’Estissac, filius naturalis Lanceloti de Lesparre et Johanne d’Estissac in illegitima copula de soluto et soluta, dictur traxisse originem … Quocirca dilectis et fidelibus gentibus compotorum nostrorum et thesaurariis, senescallo nostro Petragoricensi, ceterisque justiciariis, etc. mandamus, etc. Datum apud Plesseyacum de Parco in mense novembri anno Domini millesimo quadringentesimo septuagesimo octavo et regni nostri decimo octavo. Sic signatum. Per regem, M. Picot. Visa. Contentor. De Molins. »

AN JJ. 205, n° 57, fol. 28 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 234

MDCXXI Décembre 1478

Rémission en faveur de Jean Gabillon, le jeune, de Moutiers en la châtellenie d’Argenton, coupable du meurtre de Laurent Bertin, son beau-frère, en défendant son père, que celui-ci menaçait de tuer.

AN JJ. 205, n° 87, fol. 44 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 234-237

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Jehan Gabillon

Le Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., dit qu’une famille du nom de Gabillon habitait Thouars au commencement du xviie siècle. On voit ici que, bien antérieurement à cette époque, elle était déjà fixée dans la région.

le jeune, pouvre jeune homme, chargé de jeune femme et de deux petis enfans, contenant que le dimanche prouchain devant la feste madame Saincte Katherine, vingt deuxiesme jour de novembre derrenier passé, devers le soir, pou après que ledit suppliant fut couché avec sadicte femme en l’ostel de Jehan Gabillon l’aisné, son père, assis ou bourg de Moustier en la chastellenie d’Argenton en nostre pays de Poictou, ouquel hostel ledit suppliant a tousjours demouré et demeure avec ledit Jehan Gabillon l’aisné son père, survint en la chambre où ledit suppliant estoit couché ung nommé Thomas Mestoier, serviteur de Jehan Lidat, curé dudit lieu de Moustier, lequel ledit soir avoit souppé oudit hostel dudit père dudit suppliant et y devoit coucher, qui print icelluy suppliant à l’un des braz, en luy disant : « Lève toy, Laurens Bertin tue ton père ! » Lequel suppliant qui savoit que ledit Bertin, qui estoit jeune homme et fort, estoit yvre, respondy audit Thomas : « Je te pry, va le deffendre car j’ay paour que nous ayons noise. » Lequel Thomas replicqua à icelluy suppliant : « Je n’iray point, car il me tueroit. » Et lors ledit suppliant pria derechef ledit Thomas qu’il y allast. Lequel luy respondy qu’il n’y yroit point, en disant à icelluy suppliant : « Veulx-tu laisser tuer ton père ? » Ce que oy, ledit suppliant, meu d’amour filialle et aussi que en une autre chambre en laquelle ledit Gabillon l’aisné et sa femme, père et mère dudit suppliant, ledit Laurens Bertin et Marguerite Gabillonne, sa femme, seur d’icelluy suppliant, couchoient et avoient acoustumé coucher, et qui estoit près et joignant de la chambre où estoit couché ledit suppliant, il oyt grant bruyt et tumulte et entendy ledit Jehan Gabillon l’aisné, son père, qui disoit tout hault : « Laisse-moy, laisse-moy », se leva soudainement de sondit lit en chemise et trouva ung petit baston blanc en la cheminée de la grousseur d’une verge de fleau ou environ qu’il print en sa main, entra en ladite chambre où il avoit oy ledit bruyt, et trouva ledit Bertin qui tenoit ledit Jehan Gabillon, son père, au corps contre le lit de sondit père. Auquel Bertin, ledit suppliant dist : « Lasche mon père », et incontinant ledit Bertin se retourna impetueusement contre icelluy suppliant pour se prandre à luy et le vouloir oultrager. Quoy voyant, ledit suppliant, pour ce empescher, leva sondit baston et d’icelluy frappa ledit Bertin deux ou trois coups par l’espaule ou sur l’un des braz, ne scet lequel, pour ce que lors il faisoit noir en ladicte chambre et n’y avoit aucune chandelle alumée ne autre clarté fors seulement en la lueur d’un pou de paille que on avoit nagueres gecté ou feu. Lequel Bertin incontinant laissa ledit Gabillon et voult poursuir ledit suppliant qui atant fouy de sa voye et s’en retourna coucher en sadicte chambre, et laissa ledit Bertin qui semblablement s’alla mettre contre son lit et commença à crier au meurtre, en disant : « Gabillon m’a battu. » Et tantost après se coucha ledit Bertin en sondit lit, duquel, comme une heure après ou environ, ainsi qu’on dit, il se voult lever, et ainsi qu’il se cuidoit lever, cheut du hault du lit, tout nu en sa chemise, à terre où il demoura jusques à ce que ledit Gabillon l’aisné fist lever sa chamberière qui aluma de la chandelle et icelle alumée relevèrent ledit Bertin qui se coucha derechef en sondit lit avec sadicte femme ; laquelle le lendemain au matin, environ l’aube du jour, ainsi qu’elle a voult lever, aperceu que ledit Bertin qui avoit ung pou vomy par la bouche qu’il avoit toute plaine d’apoustume, estoit allé de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est abscenté du pays et n’y oseroit jamais converser ne demourer, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties, comme il dit, en nous humblement requerant que, attendu qu’il a tousjours esté de bonne vie, renommée et honneste conversacion, et en tous ses autres faiz s’est doulcement et paisiblement gouverné, etc., et que ledit cas est avenu par meschief et chaulde colle, par mocion d’amour filialle et est plus présumpcion que ledit Bertin soit estaint par le vin dont il estoit enbeu et yvre que pour lesdiz coups que ledit suppliant luy bailla, il nous plaise luy impartir sur ce nostre grace et misericorde. Pour quoy, etc., au seneschal de Poictou, gouverneur de Thouars, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou moys de decembre l’an de grace mil cccc. soixante dix huit, et de nostre règne le dix-huitiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. Foulet. — Visa. Contentor. De Molins.

MDCXXII Décembre 1478

Lettres d’anoblissement en faveur de Jean de Poitou, homme d’armes de l’ordonnance.

AN JJ. 205, n° 112, fol. 58 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 237-240

Ludovicus Dei gracia Francorum rex. Probitatis merita, nobiles actus gestusque laudabiles et virtutum insignia quibus persone decorantur et ornantur merito nos inducunt ut eis juxta opera, proprio Creatoris exemplo, tribuamus et eos eorumque posteritatem et prolem favoribus congruis et nobilium honoribus, ut nomen rei consonet, attolamus, ut ipsi hujusmodi prerogativa letentur, ceterique ad agenda que bona sunt ardencius aspirent et ad honores, suffragantibus virtutum bonorum[que] operum meritis, adipiscendos alicientur et advollent. Notum igitur facimus universis, presentibus et futuris, quod nos, attendentes vitam laudabilem, morum honestatem fidelitatemque et alia quamplurimum merita, que in dilecto nostro Johanne de Poictou

Il y a lieu de supposer que le bénéficiaire de cet anoblissement était, sinon le fils, du moins un proche parent d’un autre Jean de Poitou que nous avons rencontré précédemment dans nos textes. D’après une montre reçue à Ruffec, le 28 décembre 1418, il servait alors sous les ordres de Jean Barbâtre, écuyer (Bibl. nat., Pièces orig., vol. 187, nos 2 et 4.) Un mandement du dauphin Charles, daté de Poitiers, le 4 octobre 1422, ordonnait aux commissaires des aides octroyées nouvellement de faire payer à Geoffroy de Mareuil, sénéchal de Saintonge, à Jean de Poitou, capitaine de gens d’armes, et à Pierre Cheurre, capitaine de gens de trait, 500 livres au premier et 250 à chacun des deux autres, pour leurs frais d’une expédition en Angoumois dont ils avaient été chargés ; il s’agissait de reprendre aux Anglais le château et forteresse de la Tour-Blanche, dont la ville seule avait été récemment remise en l’obéissance du régent. (Id., ms fr. 28333, Pièces orig. 1849, dossier Mareuil, n° 22.) La Tour-Blanche appartenait à Jean de La Rochefoucauld, sr de Barbezieux, depuis sénéchal dans la compagnie duquel Jean de Poitou s’enrôla et bénéficia de l’abolition octroyée à son chef par lettres du 9 avril 1431, imprimées dans l’un de nos précédents volumes. Nous avons publié aussi une rémission accordée à Jean Charles, sergent du roi, et à Huguet Goyn, archer de l’ordonnance, son beau-frère, de Pamproux, coupables, en 1448, du meurtre de Jean Poitou (que nous estimons être le même personnage), qui les avait attaqués dans leur propre maison, accompagné d’autres gens armés (Arch. hist. du Poitou, t. XXIX, p. 13 ; t. XXXII, p. 110.)

, homine armorum ordinacionis nostre, sub carga dilecti et fidelis consiliarii et cambellani nostri Gastoni Du Lyon

Gaston Du Lyon, natif de Béarn, fut d’abord, en 1446, chambellan du dauphin Louis, au nom duquel il conclut un traité avec le duc de Milan en 1460. Nommé sénéchal de Saintonge, le 12 août 1461, il fut mis en possession de la compagnie d’ordonnance et des capitaineries d’Olivier de Coëtivy, comme on l’apprend d’un document non daté, ainsi conçu : « Plaise au roy commander pour G. Du Lyon, sénéchal de Saintonge, les mandemens des choses qui s’ensuivent : Mise de Tailebourg en la main du roy. Logement de 50 lances qui furent de la compagnie d’Olivier de Coëtivy, données aud. Du Lyon. Decharges pour ledit de Coëtivy des capitaineries qu’il tenait : Taillebourg, Saint-Jean d’Angely, Montargis, le pont et la tour de Saintes, toutes transportées audit Du Lyon. Mandements pour le payement desd. capitaineries et de la compagnie de cinquante lances, au prix de 15 livres tournois pour lances. » (Bibl. nat., ms fr. 20428, fol. 108.) Gaston du Lyon devint ensuite sénéchal de Guyenne par lettres du 27 août 1468, et de Toulouse, par provisions du 13 novembre 1469. Des lettres de naturalisation qu’il obtint, en 1478, le qualifient chevalier, chambellan du roy, sénéchal de Toulouse, natif de Béarn. (Texte incomplet, Arch. nat., JJ 205, n° 35, fol. 16 vol.) La dernière pièce relative à ce personnage contenue dans son dossier, porte la date du 22 février 1490. (Bibl. nat., Pièces orig., vol. 782.)

, senescali Tholose, nonnullorum fide dignorum testimonio novimus suffragari, pro quibus non immerito gratum apud nos se reddidit et acceptum, nos personam et prolem ipsius honorare volentes, sic quod sibi ac posteritati sue et proli perpetuum cedere valeat ad honorem, eumdem Johannem de Poictou cum tota ejus posteritate et prole in legitimo matrimonio procreata et procreanda, et eorum quemlibet, de nostre regie potestatis plenitudine et speciali gracia nobilitavimus et nobilitamus per presentes, nobilesque facimus et habiles reddimus ad omnia et singula quibus ceteri nobiles regni nostri utuntur ac uti possunt et consueverunt, ita quod ipse Johannes de Poictou ejusque proles et posteritas masculina in legitimo matrimonio procreata et procreanda, a quocumque milite voluerint, cingulo milicie valeant decorari. Concedentes eidem Johanni de Poictou universeque posteritati sue et proli ex legitimo matrimonio procreata et procreanda, quod ipsi in judicio et extra pro nobilibus et ut nobiles ab omnibus de cetero teneantur et in perpetuum pociantur quibuscunque nobilitatibus, privilegiis, prerogativis, franchisiis, honoribus, libertatibus et juribus universis quibus ceteri nobiles regni nostri gaudere possunt et utuntur pacifice, libere et quiete utantur et gaudeant ; et quod ipse Johannes de Poictou nec sui propter hoc aliquam financiam nobis seu nostris nunc vel quomodolibet in futurum solvere teneantur, et quam quidem financiam, quecumque sit, nos eidem Johanni de Poictou, intuitu et in favorem plurimorum serviciorum nobis per eum, in facto guerrarum nostrarum et alias multimode factorum, de nostra ampliori gracia, dedimus et quictavimus damusque et quictamus per presentes, manu nostra signatas. Quocirca dilectis et fidelibus gentibus compotorum nostrorum, et thesaurariis, baillivo Turonensi, senescallo Pictavie ac ceteris justiciariis nostri aut eorum loca tenentibus, presentibus et futuris, tenore presentium damus in mandatis, quatinus eumdem Johannem de Poictou et ejus posteritatem et prolem utriusque sexus in legitimo matrimonio procreatam et procreandam nostris presentibus nobilitacione, concessione, dono, quictacione et gracia uti et gaudere faciant et permittant pacifice et quiete, nec ipsos aut eorum aliquem contra tenorem presentium ullatenus inquietent aut molestent nunc vel quomodolibet in futurum. Quod ut firmum et stabile perpetuo perseveret in futurum, nostrum presentibus duximus apponi sigillum. Salvo in aliis jure nostro et in omnibus quolibet alieno, Datum apud locum de Praelles in mense decembris anno Domini millesimo quatercentesimo septuagesimo octavo, et regni nostri decimo octavo.

Ainsi signé dessus le repli desdites lettres : Per Regem. M. Picot. — Visa. Contentor. De Molins.

MDCXXIII Janvier 1479 (n.s.)

Rémission octroyée à Mauricette Moriceau, native de Louin, près Saint-Loup-sur-Thouet, qui, séduite par un religieux d’Airvault, avait, pour cacher son déshonneur, tué et enterré l’enfant né de leurs relations.

AN JJ. 205, n° 114, fol. 59 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 240-241

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir reçeue l’umble supplicacion des parens et amys charnelz de Mauricete Moricelle jeune fille native du bourg de Louyn, près Saint Lou en Poictou, contenant qu’il a ung an et demi ou environ que ladicte Moricelle s’en alla demourer avec Vincent Moriceau, prestre, son oncle, durant lequel temps ung jeune religieux de l’abbaye d’Oyrevau qui conversoit souventes foiz à l’ostel dudit Moriceau, l’a deceue et seduite par longue poursuite et importunité tellement, qu’il s’est acointé d’elle et l’a angroissée. Et après qu’elle a eu son fruit, elle, doubtant le deshonneur du monde, l’a enterré sans ce qu’il fut baptizé, dont elle a esté aprehendée en justice par les officiers de Cremilles, et constituée prisonnière ès prisons de Partenay, èsquelles elle est encores detenue en grant dangier de miserablement y finer ses jours, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties. En nous humblement requerant que, attendu que en tous ses autres faiz elle est de bonne vie, renommée et honneste conversacion, il nous plaise lui impartir nostdictes grace et misericorde. Pourquoy, etc., voulans misericorde preferer à rigueur de justice, et pourra estre que doresenavant elle se gouvernera très bien et sera bonne femme, à icelle Mauricète, pour ces causes et autres à ce nous mouvans, avons quicté, remis et pardonné, etc., au seneschal de Poictou ou à son lieutenant et à tous, etc. Donné à Touars, ou moys de janvier l’an de grace mil cccc. soixante dix huit, et de nostre règne le xviiie.

Ainsi signé : Par le roy, le sire de Bersuire

Jacques de Beaumont, sire de Bressuire, sur lequel cf. notre précédent volume, p. 235, note, et 316, note.

et autres presens. J. Du Ban. — Visa. Contentor. De Molins.

MDCXXIV Janvier 1479 (n.s.)

Rémission donnée en faveur de François Giren, serviteur d’André de La Trémoille, seigneur de Fontmorant

La branche de Fontmorant remontait à Amiel de La Trémoille, second fils de Guy IV, seigneur de Château-Guillaume, Vazois, etc. et, d’Alix de Vouhet, dont le père était seigneur de Fontmorant, ledit Guy décédé le 14 octobre 1360. Les recueils généalogiques ne donnent que des renseignements sans précision sur cette branche, dont les titres viennent de rentrer aux archives départementales de la Vienne. En ce qui concerne André particulièrement, ils disent seulement qu’il paraît être le second fils d’Amé de La Trémoille, et d’Anne de Mortemart, et citent un acte de l’évêché de Poitiers, de l’an 1480, dans lequel il est désigné comme cousin de Louis de La Trémoille, comte de Benon. André de La Trémoille, seigneur de Fontmorant, et François Giren (dont le nom est parfois écrit Giron), son serviteur, étaient, l’an 1483, appelants au Parlement de Paris d’une sentence du sénéchal de Poitou et d’un exploit de Guillaume Martin, sergent royal, contre Jeanne Saunier, veuve de Martin Courant, Michel Courant prêtre, Guillaume et Pierre Courant, etc., appel qui, après diverses procédures, fut mis à néant avec renvoi des parties devant le sénéchal de Poitou au 8 janvier 1484, n.s. (Arch. nat., Actes des 17 et 20 nov. 1483, X2a 45, non folioté, et X2a 49, fol. 1.) Trois ans plus tard, le même seigneur de Fontmorant, qualifié écuyer, homme d’armes de la compagnie du sénéchal d’Agenais, était encore en procès au parlement contre Guillaume Courant, qui, cette fois était appelant d’une sentence de prévôt des maréchaux. Le 14 février 1486, la Cour déclara réserver toute décision jusqu’à ce qu’elle ait vu les lettres royaux, les informations et autres pièces de l’affaire ; le 22 du même mois, elle donna congé à André de La Trémoille, qui l’en avait requis, et enfin, par arrêt du 14 avril suivant, elle renvoya encore une fois les parties devant le sénéchal de Poitou. (X2a 51, daté du 22 février 1486, n.s., X2a 54 aux 14 février et 14 avril 1486 ; l’acte du 4 février est transcrit à la fin du registre.)

, qui, un jeudi soir du mois de décembre précédent, s’était trouvé dans une rixe où il y avait eu mort d’homme, à Bourg-de-Déols, lieu auquel ledit Fontmorant s’était rencontré avec son parent le seigneur de La Trémoille

Louis Ier de La Trémoille, comte de Benon et de Guines, vicomte de Thouars, prince de Talmont, etc., chef de la maison, fils aîné de Georges, le ministre de Charles VII, et de Catherine de l’Isle-Bouchard, né vers 1431, mort au commencement de l’année 1484, à son retour des États généraux tenus à Tours.

. Ce dernier venait « de ses terres et seigneuries dudit lieu de la Trémoille et d’illec environ, s’en alant au lieu de Bomiers, auquel lieu de Bomiers il tient sa plus continuelle demourance. Et le voult ledit sr de Fontmorant, maistre dudit suppliant, acompaigner jusques audit lieu de Bomiers. Et eulx « estaient » logez en ladicte ville de Bourg de Déolz, c’est assavoir ledit seigneur de La Trémoille en l’ostellerie des Troys Roys, ledit seigneur de Fontmorant en l’ostel de la Corne de Cerf et avec luy ung nommé Gilles de Rasines

Cette famille était possessionnée dans le ressort de Civray. Le 22 octobre 1473, Briand de Razine, écuyer, rendait hommage à Charles II d’Anjou, comte du Maine, vicomte de Châtellerault, « à cause de son chastel de Civray, pour tous ses herbergemens de Maigné et toutes les appartenances, assis jouxte l’erbergement qui fut Robert Moisseron et jouxte la Rochiere. » (Arch. nat., P. 1134, n° 93.)

et les autres de la compaignie en l’ostellerie de l’Image Nostre-Dame et en plusieurs autres lieux de ladicte ville, pour ce que tous ne peuvent logier oudit hostel des Troys Roys … [Sy donnons en mandement] aux bailliz de Berry et de Touraine, seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou moys de janvier l’an de grace mil cccc. soixante dix huit, et de nostre règne le dix huitiesme ».

AN JJ. 305, n° 150, fol. 79 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 241-242

MDCXXV Février 1479 (n.s.)

Rémission obtenue par Pierre Brillouet, de Luçon, coupable, audit lieu, du meurtre de Jean Caillaud, le jeune, avec lequel il s’était d’abord querellé, l’accusant de lui avoir dérobé deux fagots ; puis il l’avait mortellement frappé d’un bâton, pour se venger d’un coup de pierre.

AN JJ. 205, n° 120, fol. 63 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 242-244

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Pierre Brillouet, povre jeune homme, chargé de femme et enfans, habitant de la ville de Luçon en Poictou, contenant que le xxe jour du moys de janvier derrenier passé, ledit suppliant et ung nommé Jehan Caillaud le jeune, demourant audit Luçon, eurent noyse et debatz ensemble à l’occasion de certains fagotz d’auberoyes

Saules.

 ; et dist ledit suppliant audit Caillaud telz motz ou semblables : « Vien ça, Caillaud, tu m’as emblé deux fagotz en mon auberoye

Aubarée, lieu planté en saules.

. Pourquoy l’as-tu fait ? Tu ne sçauroye pas bon gré que on le te fist ? » Et ledit Caillaud luy respondit : « Tu as menty, de par tous les deables. Je ne l’ay pas fait, villain que tu es. » Et ledit suppliant luy dist qu’il l’avoit fait vrayement. Et ledit Caillaud par plusieurs foiz le desmenti. Et après lesdictes parolles iceluy Caillaud, plain de felon courage, print par grant fureur deux pierres sur ung mur en chacune main une, et vint contre ledit suppliant et, en alant, luy en gecta une. Et lors ledit suppliant soy voyant ainsi oultraigé, pour résister, frappa ledit Caillaud d’un baston blanc qu’il avoit sur l’oreille, tellement qu’il cheut à terre et luy yssit sang par le neys et par l’oraille, dont ledit suppliant fut fort esbahy et s’absenta pour doubte que ledit Caillaud fust mort. Et après survindrent des gens qui leverent ledit Caillaud et l’emmenerent en l’ostel d’un nommé Clericeau où il fut chauffé, et dist qu’il s’en iroit bien à sa maison ; et de fait s’en y ala, mais on le tenoit par dessoubz l’aisselle, ung baston en sa main. Et quant il fut à sa maison, il cheut au lit malade et, le tiers jour ensuivant, ala de vie à trespas. A l’occasion duquel cas, ledit suppliant doubte que on voulsist contre luy proceder par rigueur de justice, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties. Humblement requerant icelles. Pour quoy, etc. Sy donnons en mandement par ces presentes à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours ou moys de fevrier, l’an de grace mil cccc lxxviii et le nostre règne le xviiime

Ainsi signé : Par le Roy à la relacion du Conseil. F. Texier. — Visa. Contentor. De Molins.

MDCXXVI Février 1479 (n.s.)

Rémission obtenue par Colas Sicart, auteur d’un meurtre, commis, cinq ans auparavant, à Laspois. près Argenton-Château, où il demeurait alors avec son père, sur la personne de Macé Audigier, avec lequel il s’était querellé, puis battu, parce qu’il l’avait surpris emportant des brandes d’un champ appartenant à sondit père.

AN JJ. 205, n° 147, fol. 77 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 244-246

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Colas Sicart, povre homme de labour, chargé de jeune femme et de deux petitz enfans, contenant que ung jour de samedi, ou moys de decembre l’an mil cccc soixante treze, ledit suppliant, qui lors demouroit ou village de la Cepaie près Argenton le chastel en nostre pays de Poictou, en communité de biens avecques Jehan Sicart, son père, demourant audit lieu, ung pou devant vespres d’icelluy jour, ainsi qu’il eut laissé de faire sa besongne comme les autres de son estat ont acoustumé faire, print soubz son braz à l’ostel de sondit pere cinq ou six ripoisses

Le Dict. de l’anc. langue française de F. Godefroy cite ce mot d’après le présent texte, et n’en donne point d’autres exemples.

à prendre oyseaulx et s’en alla droit à certaines brandes appartenans à sondit père et ses freres cheurs, assises comme à trois traiz ou gectz d’arc dudit lieu de la Cepaie, près autres brandes appellées les brandes communaulx, pour veoir s’il trouveroit point de repaire d’assées ou becaces, pour illec y tendre lesdiz ripoisses. Et quant il eut ung pou cheminé, apperceut que [dans] les brandes de sondit père avoit ung homme et une femme qui les cueilloient ; au moien de quoy icelluy suppliant se hasta ung pou de cheminer, pour savoir qui s’estoit, et avant qu’il y peust estre arrivé, lesdiz homme et femme eurent fait chacun son faiz desdictes brandes qu’ilz chargèrent à leur coul et les emportoient et venoient contre ledit suppliant. Par quoy icelluy suppliant s’arresta et les attendy à venir droit à luy ; et si tost qu’ilz aprouchèrent de luy, aperceut que c’estoit Macé Audigier et Jehanne Audigière, sa fille. Ausquelz et mesmement audit Audigier ledit suppliant dist et remonstra tout gracieusement que c’estoit mal fait à luy de prendre et ainsi emporter la brande de son père, et que la laissast. Lequel Audigier luy respondi bien arrogamment que non feroit pas pour luy. Et lors ledit suppliant luy repplicqua que si feroit et que s’il ne le laissoit, qu’il savoit bien que sondit père le feroit adjourner et l’en mettroit en justice, et luy feroit reparer. En hayne de quoy ledit Audigier deschargea à terre ledit faiz de brande qu’il avoit à son coul et tira d’icelluy ung grant pal fourché dont il le portoit, duquel en courant impetueusement contre icelluy suppliant, il le voult frapper d’estoc, mais ledit suppliant se destourna dudit cop, et en faisant print ledit pal fourché par le bout dont ledit Audigier l’en vouloit estoquer, et par ce moien empescha que icelluy Audigier ne l’en frapast. Ce que veoiant icelluy Audigier, desplaisant et courroucé qu’il ne povoit executer sa mauvaise voulenté, tira de sa puissance ledit pal fourché et s’efforça par plusieurs foyz l’oster audit suppliant, pour l’en vouloir oultraiger ; mais icelluy suppliant le tint si fort que icelluy Audigier ne luy peut oster. Et ainsi qu’ilz tiroient d’une part et d’autre ledit pal fourché et le demenoient chacun de sa part, en se combatant à qu’il demoureroit, il advint par meschief que ledit suppliant en frappa ung cop seulement par la teste dudit feu Audigier, au dessus de l’oreille du costé senestre, au moien duquel cop ysseit grant effusion de sang, et ledit Audigier, qui tout le temps d’esté paravant prouchain passé avoit esté malade et n’avoit gueres estoit venu à convalescence, cheut à terre. Ce que voyant, ledit suppliant, courroucé et desplaisant dudit cas advenu, se party d’illec et y laissa ledit Audigier et sadicte fille, laquelle incontinant s’en courru droit au bourg de Moustier où icelluy Audigier demouroit. Et tantost après la femme dudit Audigier et autres alèrent, comme on dit, au lieu où icelluy Audigier estoit cheu et l’en enmenerent en son hostel audit lieu de Moustier. Auquel lieu, le lundi ou mardi ensuivant, par mauvais gouvernement, faulte de myre ou autrement, ledit Audigier ala de vie a trespassement. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, dès lors se absenta de pays et depuis n’y osa regner (sic) ne converser et ne feroit encores de present, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, si comme il dit, en nous humblement requerant que, attendu qu’il a tousjours esté de bonne et honneste vie et conversacion en tous ses autres faiz et affaires et s’est doulcement et paisiblement gouverné, sans jamais avoir esté noté ne actaint d’aucun autre villain cas ou blasme reprehensible, et que ledit cas est avenu par meschief et avanture, il nous plaise sur ce luy impartir nosdiz grace et pardon. Pourquoy, etc., au seneschal en Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou moys de fevrier, l’an de grace mil cccc. soixante dix huit, et de nostre règne le xviiime.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. Foulet. — Visa.

MDCXXVII Février 1479 (n.s.)

Lettres d’anoblissement d’André Gendrot, habitant de Thouars, moyennant cent écus d’or

AN JJ. 205, n° 129, fol. 68 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 247-250

Ludovicus, Dei gracia Francorum rex. Probitatis merita, nobiles actus gestusque laudabiles et virtutum insignia quibus persone decorantur et ornantur merito nos inducunt ut eis juxta opera, proprio creatoris exemplo, tribuamus ac eos eorumque posteritatem et prolem favoribus congruis et nobilium honoribus, ut nomen rei consonet, attolamus, ut ipsi hujusmodi prerogativa letentur, ceterique ad agenda que bona sunt ardencius aspirent et ad honores, suffragantibus virtutum bonorumque operum meritis, adipiscendos alicientur et advollent. Notum igitur facimus universis, presentibus et futuris, quod nos, attendentes vitam laudabilem, morum honestatem fidelitatemque et alia quamplurimum virtutum merita, que in dilecto nostro Andrea Gendrot

Dans notre tome IX, nous avons publié des lettres d’abolition de septembre 1448, en faveur de Jean Gendrot, marchand de Thouars, qui, étant commis du receveur des aides de Poitou dans le pays thouarsais, avait mis en circulation trente ou quarante mille mailles du pays de Liège, qu’il avait achetées en bloc et revendues avec bénéfice. A cette occasion, nous avons donné quelques renseignements sur plusieurs membres de cette famille notable de la vicomté de Thouars. (Arch. hist. du Poitou, t. XXXII, p. 90 à 94.) André Gendrot, anobli au mois de février 1479, était le fils de ce Jean et de Guillemine Flamand. Il avait épousé Catherine Exarton, à cause de laquelle il rendit aveu le 16 juin 1454 du fief de La Thimarière à Jean Le Mastin (Arch. de la Vienne, E2 631, n° 8). Cette famille possédait aussi la seigneurie de Bilazais, tenue d’abord de l’abbaye de Sainte-Croix de Poitiers, puis de la vicomté de Thouars ; son père en fit aveu à l’abbaye, et son fils, Colin ou Nicolas au vicomte. André Gendrot, qualifié commis du receveur des aides de Poitou au siège de Thouars, figure avec Simon Blandin, receveur, et plusieurs autres officiers de finances de Poitou, demandeurs, dans un procès jugé en 1468 et 1469 par la Cour des aides, dont il a été question dans notre précédent volume à propos de Simon Blandin (p. 64, note). Nous verrons, dans des lettres de rémission de mars 1481, le récit d’une rixe survenue entre gentilshommes du ban de Poitou, et dans laquelle le fils aîné d’André, Nicolas Gendrot, frappa mortellement Gilles Le Bascle.

in villa nostra Thouarcii commorante, nonnullorum fidedignorum testimonio novimus suffragari, pro quibus non immerito apud nos se reddidit gratum et acceptum, nos personam et prolem ipsius honorare volentes sic quod sibi et posteritati sue ac proli perpetuum cedere valeat ad honorem, eundem Andream Gendrot cum tota ejus posteritate et prole et eorum quemlibet, de nostre regie potestatis plenitudine et speciali gracia, nobilitavimus et nobilitamus per presentes, nobilesque facimus et abiles reddimus ad omnia et singula quibus ceteri nobiles regni nostri utuntur ac uti possunt et consueverunt, ita quod ipse Andreas Gendrot ejusque posteritas et proles masculina, in legitimo matrimonio procreata et procreanda, a quocumque milite voluerint cingulo milicie valeant decorari. Concedentes, eidem Gendrot universeque posteritati sue et proli ex legitimo matrimonio procreate et procreande, quod ipsi et eorum quemlibet utriusque sexus, in omnibus et singulis suis causis, actibus, locis et rebus motis et movendis in judicio et extra pro nobilibus et ut nobiles ab omnibus de cetero teneantur, habeantur et imperpetuum ponantur (sic) quibuscumque nobilitatibus, privilegiis, prerogativis, franchisiis, honoribus, libertatibus et juribus universis et singulis quibus ceteri nobiles dicti regni nostri gaudere possunt et utuntur, paciffice, libere et quiete utantur et gaudeant, et quod ipse ejusque posteritas et proles, de legitimo matrimonio procreata et procreanda, feuda, retrofeuda nobilia aliasque possessiones nobiles, quecunque sint et quacunque prefulgeant auctoritate, acquirere possint acquisitaque et jam habita per eum ejusdemque posteritatem et prolem, ac in futurum acquirenda et habenda perpetuo retinere, habere et possidere licite valeant atque possint, ac si fuissent vel essent ab antiquo originaliter nobiles, et a personis nobilibus, ex utroque latere procreati, absque eo quod ea vel eas aut aliqua earum in parte vel in toto vendere seu extra manum eorum ponere nunc vel quomodolibet in futurum cogantur. Et hoc mediante summa centum scutorum auri, quibus (sic) dictus Andreas Gendrot nobis realiter tradidit pro in quibusdam nostris negociis implicando, et mediante qua summa dictum Andream Gendrot ab omni financia, quam nobis propter hoc debere potest, quictavimus et quictamus de nostra ampliori gracia per presentes, manu nostra signatas, non obstante quod summa ad quam dicta financia ascendere posset non sit hic aliter designata et specificata. Quocirca dilectis et fidelibus gentibus compotorum nostrorum et thesaurariis

C’est, sans doute, parsuite d’une distraction du scribe que l’adresse au sénéchal du Poitou est omise dans cet acte.

ac ceteris justiciariis et officiariis nostris et eorum cuilibet, presentibus et futuris, tenore presentium damus in mandatis quatinus eundem Andream Gendrot et ejus posteritatem et prolem utriusque, sexus in legitimo matrimonio procreatam et procreandam nostra presenti nobilitacione, gracia, quictacione et aliis premissis uti ac gaudere faciant et permittant pacifice et quiete, nec ipsos aut eorum aliquem contra presentium tenorem ullatenus inquietent aut molestent, nec inquietari aut molestari permittant nunc nec quomodolibet in futurum. Quod ut firmum et stabile perpetuo perseveret, nostrum presentibus duximus apponi sigillum. Salvo in aliis jure nostro et in omnibus quolibet alieno. Datum apud locum de Forgis prope Caynonem, in mense februarii, anno Domini millesimo quadragentesimo septuagesimo octavo, et regni nostri decimo octavo.

Sic signatum : Loys. Per regem, comite de Marle

Il s’agit de Pierre de Rohan, seigneur de Gyé, créé maréchal de France en 1475, plus connu sous le nom de maréchal de Gyé. Il était seigneur de Parhoet, du Verger, comte de Marle et de Porcien, etc., engagiste de la seigneurie de Fontenay-le-Comte (Cf. notre vol. précédent, Introduction, p. xxxvii), mort le 22 avril 1513.

Marescalo Francie, Gubernatore Delphinatus, domino de Argentonio et aliis presentibus, L. Tinto. — Visa, Contentor. Rolant.

MDCXXVIII Mars 1479 (n.s.)

Rémission accordée à Jean Du Mas, homme d’armes de la compagnie du sr de Maigné, prisonnier à Chinon pour la part qu’il avait prise au meurtre de Geoffroy Janvret, à Chizé. Ayant été chargé de négocier le mariage de Catherine Duval, demeurant en cette ville, avec Guillaume des Couts, et ledit Janvret, compère de cette damoiselle, y étant opposé, ils avaient eu ensemble plusieurs altercations, puis dans une dernière rencontre à main armée entre les partisans de l’un et de l’autre adversaire, le second avait été mortellement frappé.

AN JJ. 205, n° 38, fol. 18 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 250-259

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amys charnelz de nostre bien amé Jehan Du Mas, homme d’armes de nostre ordonnance, soubz la charge et compaignie de nostre amé et feal conseiller et chambellan le sire de Maigné

Antoine de Chourses, chevalier, second fils de Guy, seigneur de Malicorne et d’Andrée de Varèze, sa seconde femme, avait hérité de sa mère les terres et seigneuries de Magné près Niort et d’Échiré. Il avait été l’un des plus intimes et les plus en vue parmi les familiers de Charles, duc de Guyenne, frère de Louis XI. Commynes le nomme le second des seigneurs qui accompagnaient ce prince, le 8 septembre 1469, lors de son entrevue avec le roi, près de Coulonges-les-Royaux. C’est au château de Magné, chez Antoine de Chourses, qu’à la suite de cette conférence, Louis XI régla les limites de l’apanage qu’il donnerait à son frère en Guyenne. Après la mort de son maître, le sire de Magné sut aussi gagner la confiance et la faveur du roi, qui faisait grand cas de ses talents militaires, lui fit épouser sa nièce, Catherine de Coëtivy, fille d’Olivier, seigneur de Taillebourg, et de Marie de Valois, fille naturelle de Charles VII et d’Agnès Sorel, et lui fit de nombreux dons de terres, entre autres des seigneuries d’Antraigues, Donzenac et Roussi, confisquées sur le duc de Nemours, et du droit de châtellenie dans sa terre de Magné. Antoine de Chourses était capitaine de la ville et du château d’Angers quand il mourut, entre le 24 mars et le 8 avril 1484, laissant un fils unique. Antoine, et une veuve âgée de moins de trente ans. Celle-ci devint héritière de tous les biens de son mari, Antoine, leur fils étant décédé à l’âge de quatorze ans. Sous le titre : Louis XI, M. de Taillebourg et M. de Magné, Paul Marchegay a publié, en 1855, dix-sept lettres missives (onze de Louis XI, une d’Olivier de Coëtivy, une de Marie de Valois, une d’Ant. de Chourses, deux de Jean Chambon, lieutenant de Poitou, et une d’une dame inconnue) précédées d’un très intéressant commentaire. Il y est question des rapports du sr de Magné avec Louis XI et des négociations de son mariage avec Catherine de Coëtivy. (Bibl. de l’École des chartes, t. XVI, 1855, p. 1 à 27. — Voy. aussi J. Vaësen, Lettres de Louis XI, t. VI, p. 257, t. VII, p. 197, 218, 235.)

, contenant que puis la feste de Noël derrenière passée, ledit Du Mas suppliant fut médiatur avec ung sien compaignon nommé Mery Garderaz, aussi de nostredicte ordonnance soubz la charge de nostre ami et feal conseiller et chambellan Jehan Chenu

Dans d’autres lettres de rémission du mois d’avril 1479, données en faveur d’un archer de sa compagnie d’ordonnance, nommé Jean Fleuret, dit Cherbourg, à la suite d’un meurtre commis à Vendôme, ce Jean Chenu est qualifié « escuier, du nombre des gentilzhommes de nostre hostel ». (JJ. 205, n° 9, fol. 3 v°.)

, de marier et conjoindre par mariage Guillaume Decoustz, demourant à Mastaz avec damoiselle Catherine Duval. Et pour contracter ledit mariage et icelluy consommer par parolle de [futur]

Le texte porte facteur. [L.C.]

, vindrent lesdiz suppliant et Garderatz, pour ceste cause au lieu de Chizé où ladite damoiselle estoit demourant. Auquel lieu, le jour des Roys ou le lendemain ensuivant, se assemblèrent icelles parties, tant d’un costé que d’autre, et après ce qu’ils eurent eu plusieurs parolles ensemble touchant ledit mariage, ledit Guillaume Descoustz fut content et promist à ladite damoiselle simplement en la main et presence dudit suppliant de non avoir jamais autre femme et espouse qu’elle, et semblablement ladite damoiselle autre mary et espoux que luy. Lesquelles promesses ainsi faictes l’un à l’autre, ladite damoiselle, pour ce qu’on la requeroit de faire promesse solempnelle audit Descoustz et consummer ledit mariage de tous points, ainsi que en tel cas est acoustumé de faire, elle dist et déclaira que, sans le vouloir et consentement de ses parens et amys, elle n’oseroit ce faire bonnement. A quoy ledit suppliant print par la main ladite damoiselle et en parlant à elle de la matière elle se consentit ; mais pour ce qu’elle vouloit que ledit mariage feust tenu secret, luy dist qu’elle vouldroit bien que ung nommé Geuffroy Janvret

Ce particulier appartenait peut-être à la famille Janvre, des seigneurs de la Bouchetière, paroisse de Saint-Lin en Gâtine ; la présence de François Chauvereau et de Jean Gaignart rend cette attribution plausible : On trouve aussi un Raymond Janvret qui fait hommage à Artus de Richemont de certaines maisons et bois assis à Appelvoisin, près Saint-Laieu. (Arch. nat. R1 190, fol. 11.) [L.C.]

, qui lors estoit en la chambre où ils estoient, feust hors de ladite chambre, par ce que ledit Janvret, comme elle disoit, estoit homme pour dire et publier par toute la ville ledit traicté de mariage. Et lors ledit suppliant demanda à ladite damoiselle de quoy elle le craingnoist et s’il estoit son parent, ne s’il luy tenoit en riens. Auquel elle répondit que non et que pour ceste cause ilz n’en lairoient riens à faire. Et ce fait, icelluy suppliant print de rechef ladite damoiselle par la main et appela ledit Guillaume Descoustz, lequel il print semblablement par la main pour leur faire faire et acomplir la promesse dessus dicte ; mais, ainsi qu’ilz furent prestz et appareillez de ce faire, ledit Janvret leur demanda qu’ilz vouloient faire. Auquel ledit suppliant respondit qu’il n’en avoit que faire. Et alors ledit Janvret luy dist que si avoit et qu’il estoit compère d’icelle damoiselle ; auquel ledit suppliant dist que luy et les autres qui estoient avecques luy vouloient plus de bien à ladite damoiselle que luy mesmes et que en ce qu’ilz vouloient faire n’y avoit que tout honneur. Et ledit Janvret respondit à icelluy suppliant que c’estoit ung tour de villain. Lequel suppliant luy dist qu’il avoit menty et de celle heure, icelluy suppliant print ledit Janvret au collet et le tira hors de ladite chambre jusques environ la moitié d’icelle, auquel lieu il le laissa sans le frapper. Et incontinent qu’il eut lasché ledit Janvret, icelluy Garderastz luy dist qu’il s’en alast, et de fait le mist du tout hors de ladite chambre. Et alors icelluy Janvret s’en ala devers le chasteau dudit lieu de Chizé, à heure de neuf heures de nuyt ou environ. Et après ce que icelluy suppliant s’en sortit hors de ladite maison, à cause de reffuz que ladite damoiselle faisoit de faire et acomplir ledit mariage et en s’en sortant, vit ledit Janvret, et ainsi que icelluy suppliant s’en aloit hors d’icelle maison, fut rappellé par ladite damoiselle ou autre de par elle et retourna en ladite maison et, luy retourné, dist à ladite damoiselle qu’elle se moquoit d’eulx et qu’il ne se mesleroit plus dudit mariage. Mais toutesfoys ledit Garderatz entreprint et fist tant envers ladite damoiselle et des Coustz qu’il fist faire et acomplir les promisses dessus dictes. Et après ce, lesdiz suppliant, Garderatz et autres leurs compaignons firent bonne chère ensemble et s’en allèrent coucher en l’ostellerie où ils estoient logez et eulx estans couchez en leur dit logeys, une heure après ce fait ou environ, vindrent à la porte d’icelluy logeys ledit Geuffroy Janvret, Françoys Chavereau

Ce nom est écrit Chauvereau à la page suivante. Peut-être ce personnage appartenait-il à la famille noble établie dans la Gâtine. Un Jean Chauvereau était seigneur du lieu, tour et hébergement de Pamplie près de l’église dudit lieu. (Aveu du 1er décembre 1445, Arch. nat., R1 190, fol. 200, 245 v°, 259, 262, 275 v°.)

, Jehan Gangnart

Un Charles Gaignart, ignoré des auteurs de la Gallia christiana, était abbé de Nieul-sur-l’Autise en mars et en juin 1470. (X2a 31, fol. 57 v° ; X2a 36, fol. 281 à 287, 346 v°, 366.)

et plusieurs autres leurs aliez et complices, desquelz ledit suppliant ne scet les noms, tous embastonnez d’arbalestes, javelines et autres bastons invasibles. Et quant ilz furent près de la porte d’icelluy logeys, ils demandèrent : ceulx qui les avoient voulu oultrager et où ilz estoient, en disant semblables motz : « Sortez, sortez dehors. » Et ces parolles oyes par ung nommé Loys Dieu, icelluy Loys vint à une funestre dudit logeys et vit deux des dessusdiz embastonnez, dont l’un avoit une arbaleste bandée et l’autre une espée toute nue en sa main, ausquelz il demanda s’il estoit heure d’aller ainsi de nuyt, faisant tel bruyt, et s’ilz estoient en pays de conqueste. Et oultre icelluy Loys dist à l’ostesse dudit logeys qu’elle ouvrist l’uys aux dessusdiz embastonnez et qu’elle leur donnast à boire. Auquel ilz respondirent qu’ilz avoient aussi bien ung pot de vin comme luy et sesdiz compaignons. Et en perceverant de mal en pis par les dessusdiz embastonnez, ung quidem, soy disant nostre sergent et officier dudit lieu de Chizé, qui estoit avec eulx à ladite heure indeue, bailla en garde les chevaulx appartenans ausdiz supplians à leur hostesse. Et le lendemain en suivant lesdiz suppliant et Garderatz demandèrent à leur dicte hostesse leur diz chevaulx pour eulx en aller, ausquelz elle respondit qu’ilz estoient arrestez de par le seigneur dudit lieu de Chizé

C’était alors Charles II d’Anjou, comte du Maine, duc de Calabre, vicomte de Châtellerault, etc. (cf. ci-dessus, p. 41) Chizé avait été donné à son père Charles I, comte du Maine, avec Civray, Melle, Saint-Maixent. Sainte-Néomaye, par lettres patentes de Charles VII, datées de Montauban, février 1443 n.s. (Publ. dans notre t. VIII, Arch. hist. du Poitou, t. XXIX, p. 146 à 152.)

et que, sans avoir congié d’icelluy, elle ne les oseroit delivrer. Pour lequel reffuz ils se transportèrent par devers le bailly dudit lieu, lequel, après la requeste par eulx à luy faicte, leur delivra leurs diz chevaulx, moiennant et parmy ce que leur dit hoste seroit et demoureroit pleige pour certaine amende qu’on leur demandoit à cause des choses dessusdictes. Et en oultre requisdrent audit bailly qu’il fist faire informacion sur les oultraiges et excès qui leur avoient esté faiz par les dessusdiz embastonnez. Et ce fait, parfirent lesdites fiançailles, pour lesquelles ils estoient illec assemblez, et puis s’en alèrent chacun en ses negoces et affaires. Et quinze jours après ou environ, icelluy suppliant manda audit bailly par lettres missives, qu’il eust à soy deporter de certain adjournement fait à la personne de son hoste, comme pleige et caucion de ladite amende par provision et jusques au lendemain, qui estoit le jeudi ensuivant, de ladicte rescripcion, et aussi qu’il voulsist faire faire ladite informacion des excès dessusdiz, dont autresfoiz luy avoit fait requeste et que audit jour de jeudi se rendroit audit lieu de Chizé et feroit toute raison : ce qu’il fist et amena avec luy lesdiz damoiselle et Garderatz et autres leurs parens et amys. Auquel lieu ilz arrivèrent environ l’eure de quatre heures après mydy et eulx arrivez, envoyèrent querir leurs voisins et amys, lesquelz ilz avaient convoyez passé a quatre jours, pour les acompaigner et soupper avec eulx. Après lequel soupper, ilz se prindrent à dancer, et dist icelluy suppliant à ses serviteurs qu’ilz allassent penser les chevaulx et qu’ilz n’arretassent guères. Lesquelz en alant penser lesdiz chevaulz, rencontrèrent lesdiz Janvret, Chauvreau et autres dont il ne scet les noms, ausquelz ung nommé Jehannin, serviteur dudit Garderatz, demanda qu’ilz faisoient là, et ilz luy respondirent qu’ilz n’en avoient que faire. Et alors ledit Jehan (sic) leur dist qu’il croyoit qu’ilz estoient ceulx qui vouloient courir sus à leurs maistres et lesdiz Janvret, Chauvreau et autres estans en leur compagnie disdrent que oyl, et qu’ilz en vouloient dire ; et en disant ce ledit Chauvreau se reculla cuidant bander une arbaleste qu’il tenoit ; et adonc le serviteur d’icelluy suppliant se avança sur icelluy Chauvreau et luy osta ladicte arbaleste et une espée qu’il avoist et aux autres leurs baston qu’ilz avoient. Et ce fait, ung nommé Jacques Duval, qui estoit avec lesdiz serviteurs, apporta lesdiz arbaleste et bastons en la chambre de ladite Katherine, en laquelle estoient icelluy suppliant, Garderatz et plusieurs autres qui dançoient, ausquelz ilz dient que leur diz serviteurs les avoient ostez ausdiz Gouffroy Janvret et autres estans en leur compaignie et que iceulx et Janvret et serviteurs estoient encores en la rue, où ilz avoient debat et question l’un contre l’autre. Et incontinant après icelluy suppliant, Garderatz, Pierre Mathieu, Guillaume et Jehan Des Coutsz frères, et plusieurs autres, dont les aucuns desquelz estoient leurs serviteurs, saillirent hors de ladite maison où ilz estoient et alèrent où ce faisoit ledit debat, et y alant icelluy suppliant rencontra ung nommé Anthoine de France auquel il demanda quelle noise il venoit là faire. Lequel respondit qu’il n’en venoit point faire Et aussi semblablement ledit suppliant luy dist que non faisoit-il. Et alors icelluy suppliant, voyant sondit serviteur et ledit Janvret qui estoient prestz à eulx entrepoigner, pour eulx oultrager l’un l’autre, vint audit Janvret et luy bailla de la hance de sa javeline sur l’estomac, tellement qu’il tomba la main à terre, en luy demandant pourquoy il leur venoit faire ces noises et que, au regard d’eulx, ilz n’estoient allez en ladite ville de Chizé que pour faire bonne chère. Auquel ledit Janvret respondit que non estoit il pas. Et après ce, icelluy suppliant s’en retourna, emmena tous ses gens, fors ledit Gaderatz (sic) qui demoura ung petit derrière, lequel pria Anthoine de France qu’il alast boire avec eulx. Et ladite noise apaisée, ung quart d’eure après, icelluy suppliant dist de rechef aus diz serviteurs, qu’ilz allassent penser leursdiz chevaulx, lesquelz en y alant, oyrent et virent ledit Gangnart qui avoit ung espiot, et commença à dire à sesdiz compaignons : « Veez en la ung à cestuy cy. » Lesquelz tous ensemble se tirèrent en l’estable où estoient leurs diz chevaulx ; et ledit Gangnart et autres sesdiz compaignons coururent après eulx, aians bastons invasibles et les poursuyvirent jusques bien avant en ladicte estable. Et en ce faisant l’un desdiz serviteurs trouva ung baston non ferré, duquel il se deffendoit et garda la porte de ladite estable contre les dessus diz tellement qu’ilz obviérent à la mauvaise entreprinse desdiz Gangnart et autres ses compaignons. Pendant lequel debat l’un d’iceulx serviteurs trouva moyen de soy enfuyr et evader par devers ledit suppliant, auquel il dist et rapporta que l’on tuoit sondit serviteur et emmenoit on leurs diz chevaulx. Pour laquelle cause, icelluy suppliant et autres, ses compaignons sortirent hors de ladicte maison, pour aller veoir quel debat c’estoit, et y alant, rencontrèrent deux ou trois hommes non embastonnez, auxquelz il demanda quel bruit c’estoit dont il avoit oy parler. Lesquelz luy respondirent que ce n’estoient pas eulx et qu’ilz ne luy demandoient riens ; et il leur dist que non faisoit il pas à eulx et passa oultre avec sesdiz complices et compaignons. Et quant ilz furent au coing de la rue où ilz estoient, demandèrent à cinq ou six hommes qu’ilz trouvèrent illec, desquelz ledit Du Mas ne scet leurs noms, qui estoient ceulx qui les aloient ainsi oultrager ; de laquelle leur responce n’est recors ; mais fist semblant de les frapper, en leur disant qu’ilz se retirassent en leurs maisons, et passa oultre icelluy suppliant avec sesdiz compaignons. Et quant ils furent plus avant, ils trouvèrent ung autre quidem, dont semblablement ne savoit le nom, lequel donna d’un pal sur la main dudit Gaderatz son compaignon, lequel Gaderatz en soy deffendant rompit son espée, et ainsi qu’ilz se batoient l’un l’autre, ledit Du Mas passa oultre, et ne scet et n’est recors, pour occasion de ladicte noise dont il estoit troublé, si en passant il donna du retour de sadicte javeline ung coup audit Janvret, ou non ; mais scet bien qu’il ne luy presenta point le fer de ladicte javeline. Et oyt bien dire ledit Du Mas que ung nommé Rochier, son serviteur, ainsi que ledit Janvret luy vouloit courir sus, luy donna ung cop ou plusieurs, ne scet lequel ne qui bailla le coup audit Janvret dont il est alé de vie à trespas. Et après ce Garderatz s’en vint criant envers ledit suppliant, parce que ledit Gangnart l’avoit frappé d’un espieu et duquel il estoit très fort poursuyvy, en luy disant : « Mon cousin, à cestuy cy ! » Et ce voyant, ledit suppliant tourna sur icelluy Gangnart et d’une javeline qu’il tenoit en ses mains, luy bailla ung coup ou deux en la cuisse gauche et s’en passa oultre après d’autres qui s’en fuyoient devant luy ; et en s’enfuyant, rencontra la femme dudit Janvret qui s’en venoit, criant à haulte voix : « Aux meurtriers ! » A laquelle il bailla de la hance de sa javeline ung coup seulement, en luy disant qu’il l’envoyroit bien crier ailleurs. Et incontinant après, en s’en revenant en sondit logeys, il rencontra aussi ledit Gangnart, qu’il s’en aloit tout blessé, auquel il dist qu’en (sic) s’en allast penser et qu’il en avoit assez et qu’il ne leur feroit aucun faire mal pour ce jour, et ce fait, ala en sondit logeys et luy arrivé en icelluy, commanda à sesdiz serviteurs qu’ilz vuidassent hastivement leurs chevaulx, pour eulx en aller ; et ainsi qu’on habillait iceulx chevaulx, icelluy suppliant parla longtemps à aucuns de ladicte ville de Chizé, qui estoient aux fenestres de leurs maisons, en leur disant qu’ilz ne firent longtemps avoit si grant folie que d’avoir entreprins sur eulx et qu’ilz estoient à nous et de nostre ordonnance et que pour les extorcions dessusdictes ilz se plaindroient d’eulx à nostre prevost des mareschaulx. Auquel suppliant ilz respondirent qu’il se allast chier et qu’ilz ne craignoient en riens nostre dit prevost. Et en disant ces parolles, aucuns dudit Chizé disdrent aux autres dudit lieu telles parolles ou semblables : « Ralions nous ! Fault-il que les gens de M. de Calabre

C’est-à-dire de Charles d’Anjou, comte du Maine, duc de Calabre, vicomte de Châtellerault, seigneur de Chizé.

soient ainsi oultragez ? Tuons ces ribaulx meurtriers ! » A quoy icelluy suppliant et sesdiz compaignons respondirent aux dessus diz qu’ilz estoient à nous et qu’ilz avoient meilleur maistre que eulx. Et tantost après que les chevaulx desdiz supplians et ses compaignons furent amenez pour eulx en aller, et ainsi qu’ilz vouloient partir, lesdiz de Chizé les virent monter à cheval et tous embastonnez leur vindrent courir sus en leur disans de grans menasses, tellement qu’ilz laissèrent illec ladicte demoiselle et pour icelle renvoyer querir, revindrent passer la rivière ou lieu de Saint-Servain et entrèrent par ung autre costé que celuy par où ilz s’en estoient alez dudit lieu de Chizé ; et arrivez audit lieu, montèrent ladicte damoiselle à cheval et l’en emmenèrent au lieu de Mastas. Au moien desquelz coups, bateures et mutilacions ledit Geuffroy Janvret, par faulte de bon gouvernement ou autrement, ala incontinant de vie à trespas. Pour occasion duquel cas est à present ledit Du Mas detenu prisonnier en noz prisons de Chinon, ès mains de nostre dit prevost des mareschaulx, où il est en grand pouvreté et misère et en danger d’y finir miserablement ses jours, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties, ainsi que ledit suppliant nous a fait dire et remonstrer, en nous humblement requerant que, attendu ce que dessus est dit et qu’il ne scet qui c’est qui a frappé le coup, pour lequel est alé de vie à trespas ledit deffunct Janvret, et que en ses autres faiz il a esté tousjours de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans jamais avoir esté actaint ne convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise sur ce luy impartir nosdictes grace et misericorde. Pour quoy, etc. Si donnons en mandement à nostre dit prevost des mareschaulx et à tous noz autres justiciers, etc. Donné aux Forges lez Chinon, ou moys de mars, l’an de grace mil cccc. soixante dix huit et de nostre règne le xviiie.

Ainsi signé : Par le roy, le conte de Marle

Pierre de Rohan, sire de Gyé. (Cf. ci-dessus, p. 249 note.)

, mareschal de France, le sire de Maigné et autres presens. Le Mareschal. — Visa. Contentor. De Moulins.

MDCXXIX Mars 1479 (n.s.)

Lettres permettant à Etienne Taveau

Il y a beaucoup d’apparence que ce personnage appartenait à la famille des barons de Mortemer du nom de Taveau ; mais la généalogie qui en a été publiée par M. Beauchet-Filleau ne permet pas de l’y rattacher avec certitude. (Dict. des familles du Poitou, 1re édit., 1840-1854, t. II, p. 694.) La Gallia christiana est à peu près muette sur Etienne Taveau ; elle le mentionne purement et simplement dans le catalogue des abbés de Notre-Dame de la Vernusse ou de Grosbois, au diocèse de Bourges, d’après un acte de 1489, et dans celui des abbés de Saint-Benoît de Quinçay près Poitiers, on lit : Stephanus Taveau, 1485, 86, 87 et 1491 Vide in Vernucia, et c’est tout. (Tome II, col. 192 et 129.) A propos du prieuré de Puy-Notre-Dame, qui dépendait de l’abbaye de Montierneuf de Poitiers, M.C. Port le cite en ces termes : « Etienne Thaveau, abbé de la Vernisse et de Saint Benoît de Quinçay, 1438 (sic), 1492. Il avait obtenu du pape Innocent [VIII] en novembre 1489 la réunion de la cure à son bénéfice, acte que l’évêque contestait comme illicite et qu’une bulle nouvelle d’Alexandre VI du 28 décembre 1495 approuva, quoiqu’elle n’ait pas été maintenue. » (Dict. hist. et géogr. du Maine-et-Loire, t. III, p. 203.)

Etienne Taveau, alors étudiant à l’Université de Poitiers et comme tel placé en la sauvegarde spéciale du roi, était déjà en 1462 prieur du Puy-Notre-Dame. L’église du lieu avait été fortifiée pendant les guerres et sur tout le pourtour des murs extérieurs, entre les piliers, des petits édifices avaient été construits pour mettre à l’abri les habitants de la ville et leurs biens. La paix revenue, la plupart de ces bâtisses avaient été abandonnées et détruites. Il en restait cinq ou six que le curé, la fabrique et les paroissiens, d’un commun accord, avaient résolu de faire disparaître. Mais le prieur, qui percevait un cens sur ces petites maisons, était opposé à leur destruction. Dans la nuit du 18 mai 1462, cent ou deux cents habitants réunis dans l’église, munis d’outils et armés, entreprirent la démolition projetée. Dans leur ardeur à raser les maisonnettes, ils firent trois larges brèches aux murs de clôture du prieuré dont ils empêchaient les moines de sortir en les menaçant de mort, et commirent encore d’autres excès et dégâts. Le prieur, en réparation de ces excès, les fit assigner devant le sénéchal de Poitou. Le procès dura longtemps. Le 28 avril 1467, les habitants du Puy-Notre-Dame obtinrent des lettres de rémission, que le sénéchal de Poitou entérina tout en accordant au demandeur des dommages intérêts. Et Etienne, Taveau, jugeant ceux-ci insuffisants, releva appel au Parlement. La cour, par un arrêt très explicite et congrument motivé, du 23 février 1469, confirma la sentence du sénéchal en ce qui concernait l’entérinement des lettres de rémission et condamna les défendeurs à deux cents livres envers le premier et aux frais de la cause principale. (Arch. nat., X2a 36, fol. 151 ; voy. aussi des mandements touchant l’exécution de cet arrêt, datés des 28 février et 6 juillet de la même année, id., fol. 203 r° et v°, 239.) Nous compléterons cette notice par les renseignements contenus dans la première édition, devenue rare, du Dictionnaire des familles du Poitou : « Etienne Taveau prieur du Puy-Notre-Dame, transigeait, le 10 novembre 1486, avec les fabriqueurs de ce prieuré au sujet de sept chapellenies qu’il y avait fondées, et dont il se prétendait collateur. Il était aussi abbé de Saint-Benoît de Quinçay en 1490, lorsque, par une bulle du 27 juin de la même année, le pape confirma un traité qu’il avait passé avec le curé et les fabriqueurs du Puy-Notre-Dame. Nous le voyons ajourné par lettres du conservateur des privilèges royaux de l’Université de Poitiers, en date du 16 août 1490, à la requête de Mathurin de Dercé, doyen de Luçon, qui prétendait être propriétaire de la cure du Puy-Notre-Dame, dont Etienne s’était emparé, et, le 7 septembre 1491, il traitait avec Pierre d’Amboise, évêque de Poitiers, qui prétendait illicite et nuisible à des intérêts l’union qu’Etienne avait fait faire par le pape de la cure ou vicairie perpétuelle du Puy-Notre-Dame à son prieuré. » (Tome II, p. 694.)

, abbé de Notre-Dame de la Vernusse, prieur de Barbezieux et du Puy-Notre-Dame, d’établir une garenne à lapins dans les terres dont il est seigneur comme prieur du Puy-Notre-Dame ou qui lui appartiennent en propre, savoir « une pièce de terre qui est en bois et tailliz, tenant d’une part au chemin par où l’on va dudit lieu du Puy au Auzières, d’autre au chemin, par lequel l’en va dudit Puy à Monstreul Belay, d’autre au chemin par lequel on va de Chavannes ès fontaines, et d’autre part aux terres dudit suppliant ; et aussi luy appartient une autre pièce de terre que on appelle les Perrières Billart, esquelz lieux ou en partie d’iceulx a plusieurs repaires de connilz … Si donnons en mandement par ces presentes, au bailly de Touraine, juge des ressors et exempcions d’Anjou et du Maine et à tous noz autres justiciers, etc. Donné audit lieu du Puy Nostre Dame, ou moys de mars l’an de grace mil IIIIs soixante dix huit, et de nostre règne le dix huitiesme. — Ainsi signé. Par le roy, le comte de Marle, mareschal de France, les sires de Curssay

Jacques Odart, seigneur baron de Cursay, de Sammarçolles, Messay, Maulevrier, le Moulin-de-Celles, en Loudunois, chambellan du roi, grand fauconnier, puis grand panetier de France. On trouvera plus loin quelques renseignements complémentaires, à l’occasion de lettres de Louis XI de septembre 1480, données en sa faveur.

, de la Roche Tisson

François Lucas, écuyer, valet de chambre puis chambellan de Louis XI, avait reçu en don du roi, par lettres patentes données à Amboise, au mois d’octobre 192, la terre et seigneurie de la Roche-Tesson en la vicomté de Coutances, récemment rentrée au domaine par le décès de Guillaume de Valée, écuyer, à qui elle avait été octroyée par le même roi, en octobre 1461 parce qu’elle avait appartenu jadis aux ancêtres d’Isabeau Tesson, femme dudit Guillaume. (Arch. nat., X1a 8605, fol. 265 v° et 266 ; X1a 8606, fol. 277 ; Vaësen, Lettres de Louis XI, t. X, p. 173.) Le Dict. des hommages et aveux de Normandie par Brussel mentionne trois lettres de souffrance d’aveu accordées à François Lucas pour la terre de La Roche-Tesson (13 mars 1473, 6 juin et septembre 1476).

et plusieurs autres presens. J. de Chaumont. — Visa. Contentor. De Moulins.

AN JJ. 205, n° 160, fol. 85 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 259-261

MDCXXX Mars 1479 (n.s.)

Confirmation des privilèges et exemptions accordés par les rois Charles VI et Charles VII au prieuré de Saint-Philibert et aux habitants de l’île de Noirmoutier.

AN JJ. 224, n° 70, fol. 11 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 261-266

Loys, par la grace de Dieu roy de France, savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de noz chiers et bien amez frère Guillaume Ysoré

Guillaume Ysoré, l’un des fils puînés de Jean, chevalier, seigneur de Pleumartin, se qualifiait dans un acte du 2 janvier 1469 n.s., prieur de Deuil, dépendant de l’abbaye de Saint-Cyprien de Poitiers. (Arch. nat., X2a 35, à la date.) Il était, dès le 18 février 1471 n.s., à la tête du prieuré de Saint-Philibert de Noirmoutier, pour lequel il était en procès à cette date et les 18 mars, 22 avril et 25 mai de la même année. (X1a 4812, fol. 83, 112 v°, 332, 353.) Le 6 mai 1484, Macé ou Mathieu Gavigneau, notaire et secrétaire du roi, lui en disputait encore la possession. (X1a 4825, fol. 218 v°.) L’année suivante les deux compétiteurs plaidaient encore, se reprochant mutuellement des violences. (X1a 119, fol. 339.) A cette même époque, Guillaume Ysoré se prétendait aussi commandeur de Sainte-Catherine de Beauvoir-sur-Mer, prieuré conventuel de l’ordre de la Sainte Trinité pour la Rédemption des captifs, bénéfice que lui contestait Alexis Siméon, soutenu par Robert Gaguin, général des Trinitaires. Nous avons dit quelques mots de ce procès dans notre précédent volume, p. 81, note. Ysoré paraît avoir obtenu gain de cause ; du moins son adversaire fut déclaré « forclos de produire », par deux arrêts du 8 février et du 16 mars 1485 n.s. Voy. aussi d’autres actes des 4 et 26 janvier, 25 et 28 février de la même année. (X1a 1492, fol. 27 v°, 49 r° et v°, 57 v°, 70° et 89 ; X2a 45, acte du 28 février transcrit à la fin du registre.)

Le prieur de Saint-Philibert de Noirmoutier fut impliqué avec son père, ses frères et un grand nombre d’autres complices dans un procès criminel beaucoup plus grave, dont on suit les traces sur les registres du Parlement depuis le 2 mai 1485 jusqu’au 31 mars 1492 n.s., et que nous allons résumer le plus succinctement que possible. Pierre Morin, abbé de Sainte-Croix d’Angle, peu de temps avant sa mort, avait résigné l’abbaye en faveur d’Aimery Morin, son neveu, et les religieux (ou du moins la majorité) ratifiant ce choix, firent élection d’Aimery. Cependant Jean Ysoré, seigneur de Pleumartin, qui avait jeté son dévolu sur ce bénéfice, pour en faire jouir un autre de ses fils, Hervé, attaqua l’abbaye à la tête de cinq cents hommes armés et y pénétra de vive force, après avoir tué deux des serviteurs d’Aimery Morin. Une fois maître de la place, il en chassa les partisans de l’abbé régulièrement élu et y installa d’autres moines auxquels il fit procéder à l’élection de son fils. Pierre d’Amboise, évêque de Poitiers, reçut, en qualité de seigneur temporel d’Angle, la plainte de l’abbé ainsi dépossédé par la violence et commença d’instruire l’affaire, puis sur appel le sénéchal de Poitou en fut saisi, et enfin le Parlement, auquel avait été soumis par les inculpés un incident de procédure de la Cour du sénéchal, décida de la juger au fond. Les demandeurs devant la cour suprême étaient l’évêque de Poitiers, Aimery Morin, abbé élu, les religieux, prieur et couvent d’Angle et Etiennette, veuve d’Hingeret Remordeau, l’un des deux hommes tués à l’attaque de l’abbaye. Le nombre des intimes, nommément poursuivis, dépassait cinquante, dont voici les principaux : Jean Ysoré, chevalier, sr de Pleumartin, Jacques Ysoré, son fils aîné, Hervé Ysoré, se prétendant abbé d’Angle, Guillaume Ysoré, prieur de Saint-Philibert de Noirmoutier, Antoine Du Puy, seigneur d’Essarteaux, Hilairet de Bourgdevie (porteur de lettres de rémission), Jean de Lairault, Guillaume Ferron, Louis Blanchet, Pierre de Cavaleu, Jacques sgr de la Chastelinière, Aymar Chastaigner, Guillaume de Combes, Grisegonelle Frotier, fils du seigneur de Preuilly, Jean d’Argenses, sr de la Tour d’Oyré, le bâtard de Preuilly, les Besdons, Antoine de Cluys, sr d’Issoudun, Jean de Rives, etc. Ceux-ci, de leur côté par une plainte reconventionnelle, entamèrent des poursuites contre leurs adversaires. Ils prétendaient que, avant même que Pierre Morin, le précédent abbé, fût mort, Aimery avait fait occuper l’abbaye par des gens d’armes. C’était à la requête des religieux, outrés de cette façon de procéder, que le seigneur de Pleumartin y avait envoyé son fils et ses hommes, qui avaient été victimes d’excès et de voies de fait de la part des partisans de Morin, Guillaume de Saint-Martin (sur lequel cf. ci-dessus, p. 144, note), Louis de Salignac, curé d’Aventon, Jean Coigne, Antoine Morin, François Gerry, Jean Ribier et autres. Hervé Ysoré trouva moyen de compliquer encore l’affaire en intentant, de concert avec frères Helie Dubreuil, prieur du cloître, Guillaume Girard et Pierre Cacault, moines, une action spéciale contre Antoine de Graille, capitaine d’Angle pour l’évêque de Poitiers, messire Pierre Fresneau, prêtre et autres leurs complices. Un des premiers actes du Parlement, le 6 mai 1485, fut d’ordonner aux hommes d’armes qui occupaient l’abbaye d’Angle de l’évacuer immédiatement ; puis le 11 juillet, Jacques Ysoré, Antoine Du Puy, sr d’Essarteaux et les plus compromis furent décrétés de prise du corps et les autres ajournés personnellement. Robert de Guitéville, conseiller de la cour, fut commis à faire une enquête approfondie sur les faits et le greffier criminel Jean de Livre lui fut adjoint, le 7 août 1486. Il serait beaucoup trop long et peu intéressant de retracer toutes les phases d’une procédure qui dura au moins sept ans, et dont nous n’avons point trouvé la conclusion, du moins en ce qui concerne les principaux accusés. Un arrêt du 31 mars 1492 n.s. condamna quelques complices par défaut à payer 400 livres de dommages-intérêts à Aimery Morin, une amende de même somme au roi, et au bannissement et à la confiscation. (Arch. nat., X2 56, fol. 220 v° et 222 v°.) Les autres registres où il est question de ce procès sont : X2a 45, sub fine, acte du 7 mai 1485 ; X2a 48, aux 6 mai, 11 juillet et 2 septembre 1485 ; X2a 51, aux 11 mai, 7 août et 7 septembre 1486, 22 juin et 27 août 1487 ; X2a 52, 2 mai et 11 août 1485 ; X2a 54, aux 16, 19 et 29 décembre 1485, 9 janvier 1486 n.s., 29 mai et 26 juin 1486 ; X2a 57, aux 18 janvier 1487 n.s. et 8 janvier 1488 n.s., Plaidoiries, X1a 4826, fol. 221 v° et 307 v°, 16 juin et 17 septembre 1485 ; X1a 4827, fol. 54 et 87 v°, 29 décembre 1485 et 31 janvier 1486 n.s.

, prieur du monastaire de Saint Phillebert en l’église de Nermoustier, assise en nostre bas pays de Poictou sur les extrémitez de la mer, ou diocèse de Luçon, et des manans et habitans dudit ysle de Nermoustier, contenant que jà pieçà et dès le dixiesme jour de may l’an mil cccc. trente et ung furent obtenuz certains privilleges de feu nostre tres chier seigneur et père, que Dieu absoille, esquelz sont incorporez autres previlleges de feu nostre ayeul son père, faisans mencion des exempcions octroyées à iceulx supplians par nosdiz ayeul et père, desquelles et de la verifcacion et espedicion d’icelles la teneur s’ensuit :

Charles, par la grace de Dieu roy de France, etc. Donné à Poictiers, le dixiesme jour de may l’an de grace mil quatre cens trente et ung et de nostre regne le neufiesme. — Par le roy, Christophe de Harecourt, les seigneurs de Gaucourt et de Mortemar et maistre Jehan Rabateau, presens. Signé Cotereau

Les lettres de Charles VII du 10 mai 1431 en faveur des habitants de l’île de Noirmoutier sont imprimées dans le tome VIII des actes extraits des registres de la grande chancellerie (Arch. hist. du Poitou, t. XXIX, p. 28), et celles de Charles VI, datées de Paris, le 25 octobre 1392, qui y sont incorporées, vidimées et confirmées, dans notre tome VI (XXIV des Arch. hist. du Poitou, p. 88).

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Desquelz previleges dont cy dessus est faicte mencion, iceulx supplians ont depuis joy plainement et paisiblement bien et deument et jusques naguères que les esleuz en Poictou et les collecteurs des tailles ès parroisses d’environ ladicte ysle ou aucuns d’eulx ont imposé ou se sont efforcez imposer iceulx supplians habitans ou dit ysle ou les aucuns d’eulx à nosdictes tailles et impost, combien que ès autres ysles voisines de ladicte yle de Noirmoustier, estans oudit pays de Poictou et en pareille frontière comme elle est n’ont esté aucunement contrains ausdictes tailles et subvencions. Pour laquelle cause et aussi que iceulx previlleiges n’ont encores par nous esté confirmez, iceulx supplians se sont traiz par devers nous, en nous humblement requerant que nostre plaisir soit leur confirmer lesdiz previlleiges et le contenu en iceulx, et sur ce leur impartir noz grace et provisions. Pour quoy nous, ces choses considérées et mesmement le bel et notable service acoustumé estre fait jour et nuyt oudit monastaire et aussi pour l’entretenement et garde de la dicte ysle et chastel, iceulx previlleiges et le contenu en iceulx avons louez, ratiffiez, confermez et approuvez, louons, ratiffions, confermons et approuvons de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, parces presentes, et voulons que iceulx supplians en joyssent à tousjours de point en point, selon leur forme et teneur et tout ainsi que justement et raisonnablement ilz en ont joy et usé par cy devant, plainement et paisiblement. Si donnons en mandement, par ces dictes presentes, à noz amez et feaulx les generaulx conseilliers, par nous ordonnez sur le fait et gouvernement de toutes noz finances, et aux esleuz et autres commis et depputez sur le fait de noz tailles et aides oudit pays de Poictou et à chacun d’eulx, si comme à luy appartiendra, que lesdiz supplians et chacun d’eulx facent, souffrent et laissent joyr et user plainement et paisiblement de noz presens grace, confirmacion et octroy, sans pour ce les molester ou travailler, ne souffrir estre molestez, travaillez ne empeschez en aucune manière, mais tout ce que auroit esté ou seroit fait au contraire, le ramenent et mettent ou facent ramener et mettre sans delay au premier estat et deu. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné au Plessiz du Parc, ou moys de mars l’an de grace mil cccc. soixante dix huit, et de nostre règne le dix septiesme

Sic. Le mois de mars 1478 a.s. se trouvait dans la dix-huitième année du règne de Louis XI. Il y a, par conséquent, une erreur, soit dans le millésime, qu’il faudrait corriger en 1477, si l’indication de l’année du règne est exacte, soit dans cette dernière, qui deviendrait dix-huitième au lieu de dix-septième, si le millésime 1478 doit être maintenu. Le lieu de la date ne peut pas aider à résoudre la difficulté ; car on trouve des lettres du roi données au Plessis-du-Parc en mars 1478 n.s. aussi bien qu’en mars 1479 n.s. Mais il existe une autre copie des lettres patentes de Louis XI en faveur des habitants de Noirmoutier, reproduites en vidimus dans une nouvelle confirmation donnée par Charles VIII à Gien-sur-Loire, au mois de décembre 1484. (JJ. 216, n° 79, vol. 64.) Or, dans cette seconde transcription, les éléments de la date ne sont pas contradictoires ; on y lit : « ou mois de mars l’an de grace mil cccc. soixante dix huit et de nostre règne le dix huictiesme, avant Pasques. » Aucun doute ne peut donc subsister. Les lettres de Louis XI sont bien de mars 1479 n.s.

, avant Pasques

Le texte de ces lettres de confirmation a été publié, d’après la même source, dans le grand recueil des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XVIII, p. 459, dont les éditeurs n’ont pas remarqué l’erreur évidente de l’un des éléments de la date.

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Ainsi signé : Par le roy, le gouverneur du Daulphiné, maistre Raoul Pichon

Raoul Pichon, conseiller au Parlement de Paris. (Cf. ci-dessus, p. 185, note.)

, Jaques Louet

Jacques Louet, conseiller du roi et général de la justice des aides à Paris, comme il s’intitule lui-même dans une quittance de pension par lui donnée le 23 mars 1483. Dans d’autres actes des 20 mars et 23 juillet 1491, 1er janvier 1494 et 26 mars 1496, il est qualifié conseiller ordinaire du roy en son grand conseil, trésorier de ses chartes et général sur le fait de sa justice des aides à Paris. (J. Vaësen, Lettres de Louis XI, t. IX, p. 268, note.)

et autres presens. J. Duban. — Visa. Contentor. Rolant.

MDCXXXI Mars 1479 (n.s.)

Création de trois foires par an et d’un marché chaque semaine à Mondion en faveur de Pierre L’Hermite, écuyer, seigneur dudit lieu et de Beauvais.

AN JJ. 205, n° 130, fol. 68 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 266-269

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre cher et bien amé pannetier ordinaire Pierre L’Ermite, escuier, seigneur de Beauvais et de Montdion

Pierre L’Hermite, seigneur de Moulins, de Mondion, de Beauvais et du Bouchet, panetier de Louis XI et l’un des cent gentilshommes de sa maison, était fils de Tristan, le grand prévôt du roi, comme on le rappelle quelques lignes plus loin, et de Guillemette de Mondion, qui avait apporté à son mari et transmis à son fils aîné cette terre et seigneurie du Châtelleraudais. Il fit don au couvent des Cordeliers de Châtellerault, dans l’église duquel il est enterré, du droit qui lui appartenait au Port-de-Piles et vivait encore le 10 juillet 1498. A cette date, il fit hommage au roi de sa terre et seigneurie du Bouchet mouvant du château de Niort. (Arch. nat., P. 5543, cote iiiclvi bis.) De sa première femme, Marguerite Goulart, dame de Loussenay, il eut Louis, qui lui succéda dans les seigneuries de Moulins, Mondion et Beauvais et épousa Jeanne de Châteaupers, dame de la Chevalerie, fille de Jean de Châteaupers, sr de Massigné et d’une autre Marguerite Goulart (voy. notre dixième vol., Arch. hist., t. XXXV, p. 6, note) ; et la seconde, Jeanne du Fau, fille de Jean, seigneur du Fau en Touraine (l’abbé Lalanne dit du Sau, Hist. de Châtellerault, t. I, p. 448) lui donna trois filles. (Voy. le P. Anselme, Hist. généal., t. VIII, p. 136.)

, contenant que, entre ses autres terres et seigneuries, il est seigneur dudit lieu de Montdion, qui est ung beau bourg et village, situé et assis en nostre pays et duché de Touraine, et ung très bon lieu et fertil et ouquel demeurent et sont residens plusieurs gens, et aussi y passent, frequentent et conversent chacun jour plusieurs marchans et autres gens qui vont et viennent tant par ledit pays de Touraine, Poictou que Anjou, de lieu en autre, ès foyres et marchez qui y sont ; à laquelle cause ledit suppliant et afin que ou temps avenir ledit lieu, bourg et village de Montdion ne se depopule et viengne à ruyne et desolacion par faulte d’estre frequenté et habité tant par ceulx qui à present y sont residens et demourans que autres qui chacun jour y pourroient repairer ou temps avenir, s’il y avoit aucunes foires et marchez, nous a supplié et requis que nostre plaisir et vouloir feust, pour à ce obvier, de luy donner et octroyer doresenavant, par chacun an, audit lieu de Montdion trois foyres et ung marché, pour y estre tenuz doresenavant perpetuellement et à tousjours, c’est assavoir lesdictes trois foyres aux jours saint Sebastian, la première, saint Siste, la seconde, et saincte Ragonde, la tierce, et ledit marché au jour de mardi chacune sepmaine, depuis le premier mardi de Caresme jusques au mardi devant la saint Martin d’iver. Pour ce est-il que nous, inclinans favorablement à la supplicacion et requeste dudit suppliant, recors et memoratifz de plusieurs grans services à nous faiz, tant par feu Tristan L’Hermite

Le fameux grand prévôt de Louis XI eut pour père Jean L’Hermite, seigneur de Moulins-sur-Charente, et pour mère Marguerite Sigonneau, dame du Bouchet près le Blanc en Berry, si l’on en croit le P. Anselme (loc. cit.). Peut-être Jean fut-il marié deux fois, mais ce qui est établi par deux actes authentiques c’est qu’il était seigneur du Bouchet, mouvant de Niort, à cause de Catherine Corgnol, sa femme. Il en fit aveu à Jean, duc de Berry, comte de Poitou, le 22 novembre 1405, et le renouvela à Charles dauphin alors comte de Poitou en 1418. (Arch. nat., P. 1144, fol. 44 v° ; R1* 2172, p. 1073.) Quant à Tristan, on connaît mieux sa carrière et les charges qu’il remplit ; conseiller et chambellan du roi, commis par le connétable de Richemont à l’office de maître de l’artillerie de France, il s’en démit au bout de peu de temps, se réservant celui de prévôt des maréchaux qu’il exerça, sous Charles VII et, on sait avec quel crédit, sous Louis XI. Il avait été fait chevalier par Dunois à la prise de Fronsac (1451). Le 25 mai 1436, Jean de La Rivière, maître en médecine, se disant légitime possesseur de la maison forte de « Ramonat » (sans doute Remonet) en la vicomté de Châtellerault, poursuivait au Parlement de Poitiers Tristan L’Hermite, qui s’en était emparé sans aucun droit, affirmait le demandeur. (Arch. nat., X1a 9193, fol. 138 v° ; X1a 9194, fol. 135.) Tristan avait épousé Guillemette, dame de Mondion, fille de Renaud de Mondion, seigneur de Beauvais, dont il eut deux fils : Pierre, qui fait l’objet de la note précédente et Jean qui, son neveu Louis étant décédé sans enfants, devint le chef de la famille. On ignore la date de la mort de Tristan L’Hermite. L’acte le plus récent émanant de lui cité par le généalogiste (op. cit.) est du 17 juin 1475, et l’on voit ici qu’il avait cessé de vivre avant le mois de mars 1479 n.s.

, chevalier, en son vivant nostre prevost des mareschaux, son père, que par ledit suppliant et autres ses parens, ou fait de noz guerres et ailleurs, font continuellement chacun jour et esperons que encores plus facent ou temps avenir, et en remuneracion et recompense d’iceulx, et que à quatre lieues à la ronde dudit lieu de Montdion n’a aucunes foires audit jour, à qui elles puissent prejudicier, mais est le bien de nous, de la chose publicque et dudit suppliant ; pour ces causes et autres à ce nous mouvans, et aussi en faveur desdiz services, avons octroyé et octroyons de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, voulons et nous plaist que audit lieu de Montdion ait et se tiengnent doresenavant à tousjours mais perpetuellement par chacun an lesdictes trois foyres et la marché chacune sepmaine et ausdiz jours saint Sebastian première, saint Sist la seconde et sainte Ragonde la derrenière et ledit marché ledit jour de mardi chacune sepmaine à commancer audit premier mardi de karesme entrant jusques audit mardi devant la saint Martin d’iver après ensuivant. Et lesquelles foyres et marché nous y avons de nostredicte grace et auctorité royal crées (sic) et erigées, de nouvel creons et erigeons par ces mesmes presentes, pourveu toutesvoies que ausdiz jours n’ait aucunes foyres à quatre lieues à la ronde dudit lieu de Montdion, et que lesdictes foyres et marché ne soient prejudiciables à nous ne à la chose publicque ne que noz droiz et devoirs n’en soient ne puissent aucunement estre diminuez. Si donnons en mandement par cesdictes presentes aux bailly de Touraine, [juge] des ressors et exempcions d’Anjou et du Maine, seneschaulx de Poictou, Xantonge, gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieuxtenans et à chacun d’eulx, si comme à luy appartiendra et que requis en sera, que icelluy suppliant et ses hoirs et successeurs et qui de lui auront cause et habitans dudit lieu de Montdion ilz facent, seuffrent et laissent doresenavant joyr et user de noz presens grace et octroy, ainsi et en la forme et manière que font autres ayans semblables foyres et marchez, en faisant lesdites foires et marché crier et publier audit lieu de Montdion et ailleurs ou mestier sera et les facent entretenir doresenevant à tousjours, sans faire ne souffrir aucune chose estre faicte au contraire. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours mais, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Sauf toutesvoyes en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné au Plesseiz du Parc près Tours, ou moys de mars, l’an de grace mil cccc. soixante dix huit et de nostre règne le xviiie, avant Pasques.

Ainsi signé : Par le roy, le gouverneur de Daulphiné, Mes Raoul Pichon, Jacques Louet

Sur Raoul Pichon et Jacques Louet, cf. ci-dessus, p. 185 et 266, notes.

et autres presens. J. Duban. — Visa. Contentor. Rolant.

MDCXXXII Mars 1479 (n.s.)

Permission à Antoine Morelon, écuyer, seigneur du Fresne et de la Roche de Bousset, de fortifier son hôtel de Bousset.

AN JJ. 205, n° 41, fol. 20 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 269-272

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre cher et bien amé panetier, Anthoine Morelon, escuier, seigneur de Fraigne

Au Frène (cne de Douadic) a été bâtie, en 1848, une élégante maison de maître sur les ruines d’un vieux manoir du xve siècle, avec fenêtres à meneaux et tours à meurtrières. C’était un ancien fief relevant du Blanc, appartenant en 1435 à Guillaume Morelon. (E. Hubert, Dict. hist. géogr. et statistique de l’Indre. Châteauroux, Paris, 1889, in-8°, p. 81.) Ce Guillaume était sans doute le père d’Antoine Morelon, écuyer, panetier de Louis XI, qui obtient la permission de fortifier son hôtel de Bousset. Nous pouvons citer ici quelques membres de cette famille, vivant au xve siècle. Déjà précédemment nous avons eu à citer un registre de compte de Pierre Morelon, receveur de Poitou, de la Saint-Jean 1419, où sont transcrits les aveux rendus à Charles VII, alors dauphin et régent, en qualité de comte de Poitou. (Arch. nat., P. 1144.) Un Bertrand Morelon était poursuivi au Parlement pour excès et voies de fait par Jean Courjault et sa femme, le Procureur général joint aux demandeurs. Par arrêt du 4 mai 1487, la Cour renvoya les parties devant le sénéchal de Poitou ou son lieutenant à Poitiers. (Id., X2a 51, à la date.) Jean Morelon, élu sur le fait des aides en Poitou, obtint de Charles VIII à Amboise, le 2 mars 1491, des lettres le confirmant en cet office. (X1a 8609, fol. 210 v°.) Sur le rôle de l’arrière-ban de Poitou, montre du ressort de Montmorillon, reçue en cette ville le 2 décembre 1491, on lit que Pierre Morlon, en archer de Poitiers, a excusé Antoine Morelon (du ressort du Blanc), élu en Poitou, pour maladie. Il fut appointé que ledit Antoine viendrait « dans la monstre de Noël, à peine de deffaut ». Deux autres membres de la famille sont nommés dans le rôle du ban et de l’arrière-ban de Poitou, de novembre décembre 1491 : « Charles Morlon, sieur de Fraygne (sans doute le fils de notre Antoine), en archer (ressort de Montmorillon). Enjoint d’avoir hallebarde et gantelets, » — « Abel Morlon pour son père, sieur des Granges, en archer (ressort du Blanc). Enjoint d’avoir hallebarde et vouge. » (Roolles des bans et arrière-bans de la province de Poictou, Poictiers, 1667, in-4°, réimpr. de 1883, p. 49, 69, col. 1 et 2.)

et de la Roche de Bousset

Il y a dans la commune de Douadic un lieudit la Roche-Morlon, qui doit être la Roche de Bousset désignée ici. [L.C.]

, contenant qu’il fait de present construire, bastir et édifier en sadicte terre et seigneurie de Bousset ung bel hostel et ediffice, en entencion d’y faire partie du temps sa demourance. Toutesfois pour la seureté de sa personne et de son mesnage, il feroit voulentiers clore sadicte maison et la fortifieroit de fossez et murailles, mais il ne l’oseroit faire ne vouldroit, sans avoir sur ce noz congé et licence, ainsi qu’il nous a fait dire et remonstrer très humblement, nous requerant iceulx. Pourquoy nous, les choses dessusdictes considerées, inclinans liberalement à la supplicacion et requeste de nostredit pannetier suppliant, en faveur aussi d’aucuns noz especiaulx serviteurs qui de ce nous ont supplié est requis et pour certaines autres causes qui à ce nous ont meu et meuvent, à icelluy Anthoine Morelon suppliant avons octroyé et octroyons de grace especial par ces presentes, voulons et nous plaist qu’il puisse et luy loise, quant bon luy semblera et faire le vouldra, faire clorre et fortiffier et environner sadicte place et maison de ladicte Roche du Bousset, en telle estandue qu’il verra estre propice et convenable, de foussez, murailles, tours, portaulx, barbacanes et autres choses pertinens à la fortificacion, sans ce que on luy en puisse ne aux siens, ores ne pour le temps avenir aucune chose imputer ne demander, pourveu toutesvoyes que les habitans dudit lieu, terre et seigneurie de la Roche du Bousset soient et seront tenuz de faire le guet au lieu où ils ont acoustumé de faire d’anciennetté, que ce ne prejudicie aucunement à nous ne au fait de la chose publicque du pays d’environ, et qu’il ait sur ce le consentement du seigneur chastellain de la seigneurie du Blanc en Berry, en laquelle ladicte maison et seigneurie est située et assise. Si donnons en mandement par cesdictes presentes au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers ou à leurs lieutenans ou commis, presens et avenir, et à chacun d’eulx, si comme à luy appartiendra, que ledit Anthoine Morelon, nostre panetier, suppliant, et les successeurs, seigneurs dudit lieu de la Roche, ilz facent, seuffrent et laissent joyr et user perpetuellement, plainement et paisiblement, soubz les conditions et en la manière dessus déclarée, sans leur faire ne souffrir estre fait aucun empeschement au contraire ; mais se fait leur estoient, le mettent et facent mettre à plaine delivrance et au premier estat et deu. Car ainsi nous plaist-il estre fait, non obtant quelzconques ordonnances, restrinctions, mandemens ou deffences à ce contraires. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre notre seel à cesdictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné au Plessis du Parc, ou moys de mars, l’an de grace mil iiiic soixante dix huit, et de nostre règne le xviiie.

Ainsi signé : Par le roy, le gouverneur du Daulphiné, maistres Raoul Pichon, Jaques Louet

Jean de Daillon, sr du Lude, gouverneur de Dauphiné ; Raoul Pichon, conseiller au Parlement ; Jacques Louet, général des aides. (Cf. ci-dessus, p. 52, 185 et 266, notes.)

et autres presens. Du Ban. — Visa. Contentor. De Moulins.

MDCXXXIII Mars 1479 (n.s.)

Rémission octroyée à Hardouin Chardon, détenu dans les prisons de Niort pour avoir tué d’un coup de dague Geoffroy Galemit, qui, dans une querelle, s’était livré à des voies de fait contre lui.

AN JJ. 205, n° 154, fol. 81 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 272-275

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion des parens et amys charnetz de Hardouyn Chardon, aagé de vingt trois ans ou environ, à present prisonnier en noz prisons de Nyort, contenant que puis naguères ledit Hardouyn Chardon entra en l’ostel de Jehan Fournier en la ville de Nyort et y trouva Gabriel Chardon, son frère, Pierre Goupil, dit Pignoquet et Huguet Pelerin, qui jouoient aux cartes, et joua avecques eulx. Et quant ilz eurent certain temps joué, ledit Hardouyn Chardon dist audit Gabriel, son frère, qu’il laissast le jeu et s’en allast soupper avecques luy ; mais ledit Fournier, en la maison duquel ilz estoient, respondit qu’il avoit habillé à soupper pour eulx, et atant se departy ledit Hardouyn et s’en retourna en son hostel. Et quant son soupper fust prest, il le fist porter en l’ostel d’une nommée la Danielle où il souppa, et porta avec luy une espée et une petite dague à sa sainture pour la seureté et deffence de sa personne. Et quant il eut mangé, il dit à ladicte Danielle qu’elle s’en allast de son hostel et que tantost se rendroit après elle, mais qu’il aloit premierement veoir s’il trouveroit point son frère. Et s’en ala veoir chez ledit Fournier s’il y estoit et le trouva en la compaignie desdiz Goupil, Pelerin, Laurens Bardon

Laurent Bardon, notaire juré de l’official de Niort, était pair de la commune de cette ville en 1491. (Mémoires de la Société de statistique des Deux-Sèvres, année 1865, p. 77.)

, prebstre, Geuffroy Galemit

C’était une famille notable de Niort. Jean Galemit, qui avait été maire de cette ville vers 1444, échevin en 1451, est nommé parmi les membres de l’échevinage anoblis par les lettres patentes de Louis XI, données à Amboise au mois de novembre 1461. (Publ. dans notre t. X., Arch. hist., XXXV, p. 301.) Etienne et Pierre Galemit étaient pairs l’un et l’autre en 1454 et remplirent, les années suivantes, d’autres charges municipales. On ne retrouve plus cette famille après le xve siècle. (Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. III, p. 675.)

et autres ; et avoient presque souppé. Et ledit Galemit presenta à boire audit Hardouyn, lequel beut et après dist à son frère, Gabriel Chardon, qu’il devoit bien estre appellé Monsieur de Reims, car il n’avoit plus riens et qu’on lui avoit apportée une creacion d’office pour une chamberière qu’il tenoit, qui estoit mariée. Sur quoy ledit Galemit dist audit Hardouyn rigoreusement que la chamberière n’estoit pas à son frère, mais à luy et la tiendroit quel que le voulsist veoir, en luy disant qu’il estoit bien paillart et que ledit Gabriel, son frère, estoit plus homme de bien et avoit mieulx de quoy que luy et plusieurs autres parolles oultrageuses, et qu’il n’oseroit regarder les gens ou visage. Et à ceste cause, ledit Hardouyn, esmeu et courroucé, deist audit Galemit qu’il avoit meulx et que luy mesmes n’estoit que larron, et sur ce eurent ensemble plusieurs parolles que ceulx de la compaignie apaisèrent par aucun temps. Et tantost après ledit Hardouyn, Pinoquet et Pelerin entreprindrent de jouer aux cartes, et ledit Galemit dist qu’il joueroit avec eulx, mais ledit Hardouyn Chardon respondit qu’il n’y joueroit point avecques luy, pour ce qu’ilz avoient jà eu parolles ensemble ; mais icelluy Galemit dist qu’il y joueroit et mesmement contre ledit Hardouyn. A quoi icelluy Hardouyn deist audit Galemit qu’il ne demandoit que noise et occasion de se courrousser pour prandre debat ; mais ledit Galemit ne cessoit point et tiroit et boutoit contre Hardouyn la table et le chandellier qui estoit dessus. Et ce voyant ledit Hardouyn se leva d’illec pour s’en aller en la chambre dudit Fournier, et ainsi qu’il passoit par derrière ledit Galemit, icelluy Galemit se leva et vint à l’encontre dudit Hardouyn en le regardant furieusement et le menassant. Sur quoy ilz eurent de rechef ensemble plusieurs parolles de menasses et rigoreuses ; et ainsi qu’ilz parloient, ledit Galemit print au corps ledit Hardouyn et le gecta de si grant roydeur contre les banc et table de ladicte chambre qu’ilz tumbèrent par terre et ledit Hardouyn dessus, et le tenoit icelluy Galemit et luy tiroit les cheveux et le esgratignoit le visage. Et ce voyant, ceulx qui estoient presens ostèrent ledit Galemit de dessus ledit Hardouyn, mais ledit Galemit suivoit tousjours ledit Hardouyn et le récula jusques environ ung lit. Et ainsi que ledit Galemit s’aproucha de luy, pour doubte qu’il le voulsist oultraiger et obvier à l’inconvénient de sa personne, tira la dague qu’il avoit et en se revanchant de l’oultraige que luy avoit fait ledit Galemit, de sang esmeu et de chaude colle, frappa ledit Galemit d’un revers de sadicte dague ung coup en la poictrine ; et tantost aucuns de la compaignie dirent audit Galemit qu’il estoit blessé, et quant il apperceut son sang, il tumba par terre et ne demoura guères qu’il n’alast de vie à trespas. Pour occasion duquel cas ledit Hardouyn Chardon a esté prins et constitué prisonnier èsdictes prisons de Nyort, où il est encore detenu en grant pouvreté et misère et en dangier d’y finer miserablement ses jours, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties ; en nous humblement requerant que, attendu ce que dit est et que le cas ainsi commis par ledit Hardouyn a esté en chaude colle et en soy revanchant, il nous plaise icelluy cas remettre, quicter et pardonner audit Hardouyn et sur ce luy impartir nosdictes grace et misericorde. Pourquoy, etc., au seneschal de Poictou et à tous, etc. Donné à Tours, ou moys de mars l’an de grace mil cccc. soixante dix huit, et de nostre règne le xviiime.

Ainsi signé (Blanc au registre).

MDCXXXIV Mars 1479 (n.s.)

Rémission accordée à Jean Moulin, pâtissier de Poitiers, coupable du meurtre du chapelain de l’archidiacre de Blanchefort, qui, en compagnie dudit archidiacre et d’autres écoliers, l’avait injurié et frappé.

AN JJ. 205, n° 156, fol. 83 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 275-277

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amys charnelz de Jehan Moulin, pouvre pastissier de la ville de Poictiers, aagé de soixante ans ou environ, chargé de femme, contenant que trois ou quatre jours avant la feste de la Chandeleur derrenière passée au soir, environ sept ou huit heures devers le soir, ainsi que ledit Moulin et son varlet alloient criant les oblies par ladicte ville de Poictiers, comme il et autres pasticiers de ladicte ville ont acoustumé faire, eulx estans en la rue des Tables, près la maison de maistre Jehan Françoys, quatre compaignons en robbes longues, comme escolliers, qu’il ne saroit nommer, appuyez contre l’ouvrouer de la maison d’un nommé Arabi, dit Trompette, cordouanier, disdrent audit Moulin qu’il passast oultre, et en ce disant l’un d’eulx luy mist la main sur l’espaule et luy disdrent de rechef qu’il passast oultre ou qu’ilz luy gecteroient despierres, dont il eut paour et passa oultre il et sondit varlet ; et quant ilz furent passez, lesdiz escolliers leur gecterent deux ou trois pierres et ne le frappèrent point. Et lors ledit Moulin leur dist qu’ilz faisoient mal de leur gecter lesdites pierres et que, s’il avoit son gouet

Diminutif de « goi », dit F. Godefroy, sorte de serpe assez forte pour tailler les paisseaux, faire les fagots. (Dict. de l’anc. langue française, t. IV, p. 317.)

, qui estoit en sa maison, qu’ilz ne luy feroient point ce qu’ilz luy faisoient. Et ledit jour de Chandeleur à ladicte heure ou environ, ainsi que ledit Moulin aloit crier sesdites oblies par ladicte rue des Tables et qu’il fut près ladicte maison dudit maistre Jehan Françoys où demourent des escolliers, il commença à crier sesdictes oblies et illec rencontra cinq personnes, vestus de robes longues, comme escolliers qu’ils ne congnoissoient, lesquelz l’appelèrent oblieux et il leur respondit : « Qu’est là ? » et encore de rechef luy disdrent, mesmement l’un d’eulx : « Es tu oblieux ? » lequel respondit : « Oy, Monsieur. » Et lors luy demanderent comme il avoit nom, et il respondit : « Monsieur, j’é nom Moulin, à vostre commandement. » Et lors l’un d’eulx que on dit estre, ainsi que on luy a depuis dit, l’archediacre de Blanchefort

L’archidiacre de Blanchefort n’est pas mentionné, du moins en cette qualité, dans les généalogies imprimées de cette famille originaire du Rouergue. Cependant il semble bien qu’il fut parent de Jean de Blanchefort, chevalier, seigneur de Saint-Clément, de Sainte-Sévère, de Saint-Janvrin, etc., écuyer d’écurie, puis chambellan du roi, maire et gouverneur perpétuel de Bordeaux, maréchal général des logis de France, et de Louise de Blanchefort, abbesse de la Trinité de Poitiers, personnage dont il sera question dans la suite du présent volume.

, dist audit Moulin : « Vien ça, tu as parlé de moy » ; lequel Moulin luy fist responce que, sauve sa grace, jamais il n’avoit parlé de luy et qu’il estoit son serviteur, s’il luy plaisoit. Et lors commanda ledit archediacre à ung des presens qu’il baillast audit Moulin ung soufflet, lequel luy fist responce qu’il n’en feroit riens. Et adoncques ledit qu’on dit estre ledit archediacre, en jurant et en détestant le nom de Dieu, dist qu’il [luy bailleroit luy mesmes

Mots suppléés.

] et en ce disant frappa ledit Moulin sur la joue tellement qu’il le gecta à terre et luy fist cheoir son chappeau d’un costé et son bonnet de l’autre ; et luy estant à terre luy fut baillé ung autre coup d’une torche sur la main senestre, dont il fut mutillé et grandement blessé en ladicte main. Et alors ledit Moulin se releva tout estourdy du coup qu’il avoit eu et laissa en la place sondit chappeau et bonnet, et tira ung grant cousteau ou bracquemart qu’il portoit communement, pour doubte desdiz escolliers et autres qui aucunes foys batent les obliers, et tout eschauffé et esmeu, suyvit lesdiz escolliers jusques devant la maison dudit maistre Jehan Françoys estant près, où ilz demouroient, et illec, pour douleur desdiz coups qu’il avoit euz, frappa le premier qu’il trouva du dit cousteau par la teste ung coup tant seulement, cuidant que ce feust celuy qui l’avoit frappé, qu’il ne povoit congnoistre par ce qu’il estoit nuyt. Et depuis a esté adverty que c’estoit ung nommé Pierre …

Le nom a été laissé en blanc sur le registre.

, chappellain dudit Blanchefort, archediacre dessusdit ; lequel chappellain, à l’occasion dudit coup, par faulte de bon gouvernement ou autrement, dix jours après ou environ est alé de vie à trespassement. Et combien que oudit cas ledit Moulin ne feust aggresseur et que en autres choses il se soit tousjours bien et honnestement gouverné, sans blasme ou reprouche, neantmoins, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du pays et n’y oseroit converser ne repairer, se nostre grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties, humblement requerans iceulx. Pour quoy, etc., au seneschal de Poictou, etc. Donné à Tours, ou moys de mars l’an de grace mil cccc. soixante dix huit, et de nostre règne le xviiime.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. Foucher. — Visa. Contentor. De Moulins.

MDCXXXV [Vendredi saint 9] avril 1479 (n.s.)

Rémission donnée en faveur de Jean d’Oiseaumesle (Eaux-Melles), bâtard de Razilly, poursuivi pour avoir, à l’instigation du sr de Villiers, dirigé une expédition ayant pour but de vendanger une vigne litigieuse entre Chardon Pinain et David Chamber, écossais, et d’où résulta un conflit armé dans lequel deux partisans dudit Chamber furent tués et un blessé.

AN JJ. 205, n° 431, fol. 245 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 278-284

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan d’Oyseaumesle, bastard de Rasillé, aagé de trente cincq ans ou environ, natif de la parroisse du Ruffé, contenant que, ou moys de septembre derrenier passé, en la saison de vendanges, à ung jour de mercredi, Thomas Le Dar, archier de retenue soubz la charge et compaignée de nostre amé et féal cousin, conseiller et chambellan, le sire de Loheac

André de Laval, seigneur de Lohéac, amiral, puis maréchal de France ; il était aussi seigneur de Rais par son mariage avec Marie, fille unique de Gilles de Rais et de Catherine de Thouars, dame de Pouzauges, et vivait encore en 1484. (Cf. notre neuvième vol., t. XXXII des Arch. hist., p. 398, note, et notre volume précédent, t. XXXVIII des Arch. hist., p. 97, note.)

, mareschal de France, vint et arriva au lieu d’Oyseaumesle

Aujourd’hui les Eaux-Melles, hameau de la commune de Roiffé (Vienne), était un ancien fief relevant du château de Loudun. On trouve aussi ce nom de lieu sous la forme les Aumesles.

, où il trouva ledit suppliant et Jehan Bascher et leur dist que, le dimenche precedent, Jehan de Rasillé

Jean de Razilly, chevalier, seigneur du lieu, était fils d’un autre Jean et frère de Marguerite, femme d’Antoine d’Argenton. (Voy. notre vol. précédent, p. 374, note 2.) Jean de Razilly, le père, avait obtenu de Charles VII des lettres patentes, datées d’Angers, le 17 décembre 1439, lui permettant de fortifier son château de Razilly, et la reine Marie d’Anjou, par autres lettres données aux Montils, près Tours, le 9 août 1440, acquiesça, en ce qui la concernait, à cette décision. Louis XI dans un séjour qu’il fit à Razilly, au mois de janvier 1465 n.s., accorda à son tour, au personnage ici mentionné, l’autorisation de chasser dans une étendue de quatre arpents faisant partie de la garenne royale dans la forêt de Chinon, autorisation confirmée par d’autres lettres de Charles VIII, audit lieu de Razilly, au mois de mars 1489, en faveur du même Jean, qui mourut l’année suivante. M. Carré de Busserolle a publié ces quatre actes royaux dans son Dict. géographique, hist. et biogr. d’Indre-et-Loire, t. V, p. 263 et suiv.

, chevalier, seigneur dudit lieu d’Oyseaumesle, venant de Montpensier où il estoit allé et retournant en sa maison dudit lieu d’Oyseaumesle, rencontra en son chemin, près le lieu de Villiers, ung nommé Chardon Pinan, qui salua ledit seigneur de Rasillé ; et demanda audit Chardon où estoit le seigneur de Villiers

Entre Montpensier et les Eaux-Mêles, points très rapprochés d’ailleurs, on ne trouve qu’une localité de ce nom. C’est Villiers-Boivin, dont était seigneur Aymar Le Brun, à cause de sa femme Françoise, fille aînée d’Eustache Boivin. Du moins il est ainsi qualifié dans un acte du 27 août 1476. Comme ils n’eurent pas d’enfants, la seigneurie passa, on ne dit point à quelle date, à Simonne Boivin, sœur de Françoise, et à Jean du Rivau, son mari. (Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. I, p. 597.)

. Auquel ledit Chardon respondit qu’il n’estoit pas loing et qu’il avoit grant desir de parler à luy. Et en disant ces parolles, ledit seigneur de Villiers arriva oudit chemin devant ledit sr de Rasillé, et s’entresaluèrent. Et après ce, ledit seigneur de Villiers dist audit seigneur de Rasillé telles parolles ou semblables : « Je vous prie que me vueillez prester deux ou troys de voz gens pour vendanger une vigne. » Lequel seigneur de Rasillé luy dist que ce qu’il avoit estoit à son commandement. Et le mercredi ensuyvant, ainsi que ledit seigneur de Rasillé s’en alloit dudit lieu de Montpansier audit lieu d’Oyseaumesle, acompaigné dudit Thomas Le Dar, en passant près dudit lieu de Villiers, rencontra de rechief ledit seigneur de Villiers, qui luy accorda bailler et prester ses gens, comme il avoit fait le dimenche precedent. Et ces parolles dictes, pour ce que ledit seigneur de Rasillé avoit oy les chiens dudit seigneur de Villiers, qui chassoient, passa oultre et se departy dudit seigneur de Villiers, en la compaignie duquel ledit Thomas Le Dar estoit, qui avoit demandé audit de Villiers, en l’absence dudit de Rasillé, où ledit Chardon voulloit mener les gens dudit de Rasillé, lequel de Villiers luy dist que c’estoit pour vendanger une vigne que David Chambre

Ce David Chambers, non plus que Joch Mailly et Gobin, autres archers écossais nommés dans le présent acte, ne figure plus ou ne figure pas encore sur les états du personnel de la garde écossaise fournis par les comptes de Pierre Parent, commis au payement de ses gages, pour les années 1475 et 1476. (Arch. nat., KK. 67.) Il appartenait évidemment à la même famille que Nicole Chambers, dit de la Chambre, seigneur de la Guerche, de Villeneuve-la-Comtesse et de Champagne-Mouton, capitaine de la garde écossaise de Charles VII, qui a été l’objet de notices dans deux de nos précédents volumes (Arch. hist. du Poitou, t. XXXII, p. 366 ; t. XXXV, p. 10), quoiqu’il ne soit pas mentionné dans le fragment de généalogie de cette famille publié dans la nouvelle édition du Dictionnaire des familles du Poitou, t. II, p. 226. M. Francisque Michel, parlant de notre personnage ou d’un homonyme, dit : « En 1458, David et Jean Chambers servaient également comme archers du corps du roi dans la garde écossaise. Ce dernier fut naturalisé français sous Louis XI, par lettres du 12 juin 1462, en même temps que Robert Vernon, Thomas Aigue et Jean Nesbut. Quant à David Chambers, tout ce que nous en pouvons dire, c’est qu’il faut soigneusement le distinguer de son homonyme venu en France environ dix ans après. » (Les Écossais en France et les Français en Écosse, in-8°, t. I, p. 231.)

empeschoit audit Chardon. Et après ces parrolles, s’estoient departiz ledit de Villiers et Le Dar, et s’en estoit venu apprès eulx ledit seigneur de Rasillé audit lieu d’Oyseaumesle

Il y a évidemment ici une lacune dans le texte [L.C.].

… Et qu’il leur falloit incontinent aller audit seigneur de Villiers, pour vendangier ladite vigne ; auquel Le Dar ledit suppliant demanda où il falloit aller et contre qui, et qu’il n’yroit point si ne savoit contre qui et où s’estoit. Lequel Thomas Le Dar luy respondit que c’estoit contre David Chambre, pour aider à Chardon Pinain à vendanger une pièce de vigne. Et en après, environ vii. heures de nuyt, icelluy suppliant, lesdiz Thomas Le Dar et Jehan Baschier se departirent dudit lieu d’Oyseaumesle an deceu dudit seigneur de Rasillé qui estoit couchié et s’en allèrent en l’austel de Regnault Boulleau

Ou Boulliau, famille loudunaise illustrée au xviie siècle par Ismaël Boulliau, astronome, géomètre, érudit.

au lieu de Chalmon, et après en l’austel de Jehan Leroy et de Pierre Gaudin au bourg de Bournan, lesquelz ilz menèrent avec eulx, et de là allèrent audit lieu de Villiers et appellèrent à la porte ; et vint parler à eulx ledit Chardon, et luy demandèrent où estoit ledit seigneur de Villiers ; lequel respondit qu’il estoit couchié. Et oultre leur dist icelluy Chardon qu’ilz entrassent et allassent tous parler à luy, ce qu’ilz firent. Et eulx entrez, ledit suppliant demanda audit seigneur de Villiers où ilz devoient aller et qu’il avoit amené des gens, mais qu’il voulloit bien savoir qui les garantiroit. Lequel de Villiers dist que ledit Chardon avoit bien de quoy les garantir et qu’il les garentiroit. Et alors ledit suppliant dist audit sr de Villiers que pour ledit Chardon ilz ne yroient point, mais finablement, après plusieurs parolles, ilz s’acordèrent d’aller avec ledit Chardon. Et avant leur partement, ledit suppliant dist audit seigneur de Villiers ces parolles : « Si on nous assault, nous laisserons-nous tuer ? » Lequel de Villiers respondit : « Vous vous pouvez bien deffendre, et ne vous laissez point oultragier. » Et les fist boire et mangier, et print ledit Chardon deux arbalestes en l’ostel dudit seigneur de Villiers, dont il en bailla l’une audit suppliant et retint l’autre et si leur bailla le traict de mesme, en leur disant : « Si l’on nous assault, voyez cy pour nous deffendre » ; et ce fait, prindrent congié et se departirent. Et les mena en une vigne assise près Saint-Jehan de Tissay, où ilz furent sans riens faire jusques au jour ; et au poing du jour, ledit Chardon commanda aux serviteurs dudit seigneur de Villiers, à icelluy suppliant et audit Ledar et Barchier qu’ilz vendangeassent ladite vigne ; et en vendangeant, une heure après soulleil levant ou environ, arriva illec Joch Maigny, acompaigné d’un nommé Gobin, Escossois, et autres garniz d’une arbaleste ares flenches

Sic. Il faut voir ici, sans doute, une faute de lecture, et remplacer ce mot par « avec flèches ».

et autres bastons invasibles. Et incontinent, sans riens dire, tirèrent huit ou dix fleiches contre ledit suppliant et autres estans en sa compaignie et en blessèrent ung. Et lors ledit suppliant et ses diz compaignons s’écrièrent en leur disant : « Messieurs, que voulez-vous faire, ne tirez point. Se vous voyez que vous faisons tort, nous voulons prandre droit par justice et offrons d’y obeyr. » En disant lesquelles parolles, lesdiz Joch Maigny et ses alliez et complices s’approuchèrent tellement dudit suppliant et de sesdiz compaignons qu’ilz estoient près à joindre ensemble. Et se avança le premier ledit Joch devant les autres ses complices, ayant ung arc tout tendu en ses mains et une fleiche enfoncée dedans ledit arc prest de tirer, ledit Thomas Ledar aiant aussi une arbaleste bandée en sa main, ung trait dessus ; lequel Ledar, doubtant que ledit Joch tirast contre luy ladite fleiche dont il l’eust peu tuer, tira le premier contre ledit Joch et le frappa par l’estomag. Et incontinent que ledit Joch fut frappé, tira une grant dague qu’il avoit et vint contre ledit Thomas Ledar qui s’enfuioit, pour le tuer. Et après que ledit Joch eut ainsi suyvy ledit Thomas, acompaigné de deux autres ses aliez et complices, ledit Thomas passa par dessus la haye de ladite vigne et ledit Joch cheut illec comme mort à terre. Et incontinent ledit Dar, tout esmeu de chaude colle, banda de rechief son arbaleste et retourna vers les autres compaignons, et en s’en retournant trouva ledit Joch qui estoit en ladite vigne, et dist ledit Thomas Le Dar audit Gobin, qui avoit son arc tendu et sa fleiche dedans enfoncée : « Lasche ton arc, ne tire point, ou je te tueray » ; dont il ne voulut riens faire. Et à ceste cause ledit Ledar, doubtant et cuidant que ledit Gobin voulsist laschier sadicte fleiche sur luy, pour obvier au coup, desbanda sadicte arbaleste et frappa dudit traict parmy le coul ledit Gobin, lequel incontinent qu’il se sentit blessé, gecta à terre sondit arc et tira son espée. Et ledit Thomas tira aussi la sienne et joignirent ensemble, tellement que ledit Ledar frappa icelluy Gobin en manière que la mort s’en ensuyvit. Et ce fait ledit Ledar et les autres s’en allèrent tantoust après et emportèrent une espée, une dague et deux arcs ; et demourerent lesdiz Joch et Gobin mors et ung autre blessé, et les autres leurs complices s’enfuirent. A l’occasion duquel cas, le dit suppliant s’est absenté du pays, pendant laquelle abscence, à la requeste de nostre procureur ou baillyage de Touraine, icelluy suppliant a esté adjourné par plusieurs termes et cry public, comme l’en dit, à comparoir en personne au siège royal dudit baillyage en nostre ville de Chinon sur peine de confiscation de corps et de biens et d’estre actaint et convaincu des cas dessusdiz. Ausquelz jours et assignacions il n’a osé comparoir ne obeir pour doubte de choir en danger de sa personne, et par ce a esté mis en plusieurs deffaulx. Au moien desquelz deffaulx ou autrement il a esté déclaré contumax et banny dudit baillyage de Touraine et ses biens declairez confisquez. Pour lesquelles causes ledit suppliant n’oseroit plus retourner, demourer ne converser ou pays, doubtant rigueur de justice, se noz grace et miséricorde ne luy estoient sur ce imparties. En nous humblement requerant que, attendu que ledit Joch Maigny et ses gens et complices furent premiers agresseurs et tirerent plusieurs fleiches contre ledit suppliant et sesdiz compaignons, ainçois qu’ilz tirassent aucun trait ne feissent aucune resistance et qu’ilz s’efforcèrent par parolles amiables faire cesser ledit Joch et offrirent mettre leur cas et debat en justice ; aussi que en tous ses autres cas ledit suppliant a toujours esté de bonne vie et renommée, selon son estat, sans avoir esté actaint ne convaincu d’aucun autre vilain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise sur ce luy impartir nosdites grace et misericorde. Pour quoy nous, considéré ce que dit est, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant ou cas dessus dit, en l’onneur et revevance de la passion de nostre Sauveur Jhesu Crist, qui à tel jour qu’il est aujourd’uy, souffrit mort et passion pour nous, avons quicté, remis et pardonné, et par la teneur de ces presentes, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, quictons, remetons et pardonnons le fait et cas dessus dit, avec toute peine, offence et amande corporelle, criminelle et civile en quoy, pour l’occasion dudit cas, il peut ou pourroit estre encouru, envers nous et justice. Et l’avons restitué et restituons à sa bonne fasme et renommée, au pays et à ses biens non confisquez, en mettant au neant tous appeaulx à ban, deffaulx et adjournemens, coutumaces, sentences, banissemens, declaracions et tout ce que, au moien desdiz deffaulx, s’en est ou pourroit estre contre luy ensuy. Satisfacion faicte à partie civillement tant seullement, se faicte n’est. Et sur ce imposons sillence perpetuel à nostre procureur, present et avenir, et à tous autres. Si donnons en mandement, par cesdictes presentes, au bailly de Touraine et des ressors et exempcions d’Anjou et du Maine, et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieutenans, presens et advenir, et à chacun d’eulx, si comme à luy appartiendra, etc. Donné au Plessis du Parc lès Tours, au moys d’avril, l’an de grace mil iiiic soixante dix huit, avant Pasques, et de nostre règne le dix-huitiesme.

Ainsi signé : Par le roy tenant ses requestes. J. Duban. — Visa. Contentor. F. Texier.

MDCXXXVI Avril 1479

Rémission en faveur de Michau Furée et de Pierre Bongontays, laboureur de Pamprou, qui avaient involontairement été cause de la mort d’une petite fille de dix-huit mois, écrasée par les roues de leur charrette.

AN JJ. 224, n° 17, fol. 21 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 284-286

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Micheau Furée, aagé de vingt cinq ans ou environ, et Pierre Bongontoys, jeune enfant de seize à dix huit ans ou environ, contenant que ilz sont bien famez et renommez, vivans de l’estat de laboureur ; en faisant l’exercice duquel estat de laboureur, iceulx supplians, le tiers jour de ce presens moys d’avril, et chacun d’eulx charroyoient avec leurs beufz et charrètes chacun une charretée de boys à quatre beufz, qu’ils menoient à Pampro près leur demeure, à l’ostel d’un nommé Jehan Charretier demourant audit lieu de Pampron. Et quand iceulx supplians eurent deschargé ledit boys à l’ostel dudit charretier, ilz se misdrent chacun d’eulx en sa charrète pour eulx retourner à leursdiz hostelz ; eulx estans encores oudit bourg de Pampron en une rue appellée la Bouduerye, à l’endroit d’un nommé Pierre Lorty ou de son hostel, et de l’autre desdiz costez à l’endroit de ladicte rue devant l’ostel dudit Lorty y avoit ung jeune enffant. Et ce veans lesdiz supplians qui estoient en leursdictes charretes, comme dit est, se amusèrent ensemble, en regardant tousjours ledit enffant, pour le faire oster ou desvoyer, et pourveoir à ce que lesdiz beufz et charretiers ne luy mesfeissent ; et ce pendant leursdiz beufz et charretiers aloyent tousjours. Et pour ce que de l’autre costé de ladicte rue, à l’endroit de ladicte maison dudit Lorty, soy trouva une petite fille de l’aage d’un an et demy ou environ, que l’on dit estre fille de Jehan Bontat, laboureur, laquelle fille lesdiz supplians ne voyoient et ne appercevoient, pour ce qu’ilz se donnoient garde de l’autre enffant, qui estoit de l’autre costé de ladicte rue. Et ainsi que lesdiz beufz ou charrète de l’un desdites supplians ou les deux aloyent tousjours, iceulx beufz feirent cheoir la dicte fille fille et passa l’une rohes des dictes charretes par dessus la teste de ladicte fille ; et après qu’ilz feurent passez, aucuns les advertirent que lesdiz beufz ou charretes avoient blecé ladite petite fille, laquelle, une heure ou environ après, par faulte de bon gouvernement ou autrement, ala de vie à trespassement. A l’occasion duquel cas, lesdiz supplians doubtant rigueur de justice, ne se oseroyent seurement tenir ne converser au pays, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, humblement requerans, etc. icelles. Pour quoy nous, ce considéré, etc., ausdiz Micheau et Pierre supplians et à chacun d’eulx avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par cesdictes presentes, à nostre seneschal de Poictou, etc. et à tous noz autres justiciers, etc., que lesdiz supplians et chacun d’eux facent, seuffrent et laissent joyr et user de noz presens grace, quictance, remission et pardon, etc. Donné à …, ou moys de

Ces blancs sont au registre. Comme il est dit dans l’acte que l’accident en question se produisit le « tiers de ce present moys d’avril », nous lui donnons cette date d’avril, tout en reconnaissant que l’argument est discutable. Les rémissions reproduisant le plus souvent le texte même de la requête du solliciteur, les mots « le 3 du présent mois d’avril » peuvent se rapporter à la date de ladite requête et ne pas concorder avec celle de l’acte royal. En tout cas, nos lettres ne peuvent être postérieures au 21 juillet 1479, dernier jour de la dix-huitième année du règne.

…, l’an de grace mil cccc. soixante dix neuf, et de nostre règne le dix huitiesme.

Visa.

MDCXXXVII Mai 1479

Rémission en faveur de Guillaume Delacroix, dit Larbalétrier, prisonnier à Châtellerault pour le meurtre de Hardy de Montours, qui l’avait attaqué et frappé le premier.

AN JJ. 205, n° 209, fol. 115 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 286-289

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Guillaume Delacroix, dit l’Arbalestier, aagé de quarante cinq à cinquante ans ou environ, demourant en la ville de Chasteaulerault, contenant que le derrenier jour d’avril derrenièrement passé, ledit Guillaume Delacroix se transporta en la maison du curé de Chenevelles, en la viconté de Chasteaulerault, avec ung nommé Michau Chevalier, dit Pellegret, hostellier dudit lieu, lequel Pellegret avoit requis, le jour précedent, ledit Guillaume qu’il lui pleust aler avec lui audit lieu de Chenevelles, pour ce qu’il portoit de l’argent au curé dudit lieu. Et ainsi comme ledit Pellegret comptoit l’argent audit curé, ledit Guillaume Delacroix s’en sortit et alla hors de ladicte maison et s’en alla en l’ostel d’un nommé Pierre Ledoulx, hostellier de Chenevelles, et là fut par l’espace d’un quart d’eure, et tantost après s’en retourna vers la porte dudit curé, et en s’en retournant, encontra deux jeunes paiges qui lui demandèrent qui estoit logé chez ledit curé ; lequel Guillaume respondit que Monsieur de la Bessière y devoit loger, et l’un desdiz paiges lui demanda : « Esse pas vous qui avez nom Guillaume l’Arbalestier ? » Ausquelz ledit Guillaume : « Ouy, à vostre commandement. » Et incontinant après arrivèrent deux hommes à cheval, desquelz l’un se nommoit Hardy de Montours

Hardy de Montours était seigneur du Puy-Jourdain et du fief de la Vaugrolière, mouvant de Mauléon, « à lui venuz et escheuz par le décès de ses prédecesseurs, et d’iceulx en a joy paisiblement jusques à son trespas, par lequel trespas lesdictes seigneuries du Puy-Jourdain et de la Vaugrolière ont competé et appartenu à feu Sauvage Jourdain, père du demandeur ». Ce renseignement est tiré d’une plaidoirie du 16 juin 1485, en faveur de Guillaume Jourdain, sr du Puy-Jourdain, qui poursuivait Mathurin Petit, Jean Gauvaing, René Mesnard et Hugues de Puyguyon, écuyer, accusés d’avoir, à la tête d’une bande armée, envahi la Vaugrolière, frappé et blessé Pierre Jourdain, frère de Guillaume, et plusieurs de ses serviteurs, et de s’être emparés de force et d’avoir mis à sac l’hôtel appartenant audit Guillaume. Mathurin Petit et ses frères prétendaient avoir acheté de Hardy de Montours ladite seigneurie et ses appartenances et n’avoir fait autre chose que de se remettre en possession d’un bien qui leur appartenait légitimement et que Guillaume Jourdain détenait indûment. (Arch. nat., X2a 52, aux 18 janvier et 16 juin 1485.) Nous ne savons d’ailleurs quel était le père de Hardy de Montours et à quel titre Sauvage Jourdain lui avait succédé dans les terres du Puy-Jourdain et de la Vaugrolière. Les registres du Parlement fournissent un certain nombre de renseignements sur cette famille de Montours, dont une branche, la branche aînée sans doute, possédait, dès le xive siècle, la seigneurie de Saint-Clémentin. Michel de Montours (de Monte Ursi), sr de Saint-Clémentin, et les principaux habitants de cette ville, étaient en procès, le 10 juin 1356, contre le sire d’Argenton, Jean Sauvin, son capitaine et autres complices, accusés de violences sur les personnes et biens desdits habitants. (X2a 6, fol. 283, v°.) Nous trouvons ensuite, à partir de l’année 1378, Jean de Montours, chevalier, sr de Saint-Clémentin, qui fut père de Clément, Aimery et Berthelot. Prisonnier à la Conciergerie à la requête de Guy d’Argenton et du Procureur du roi, la cour le remit en liberté par arrêt du 29 mai 1378. (X2a 10, fol. 65.) Le 5 mars 1380, il poursuivait à son tour, pour excès, le même Guy d’Argenton, Jean, bâtard de Surgères, Nicolas Broutet, etc. (X2a 9, fol. 190 v°.) Un autre litige que Jean de Montours avait avec ce seigneur d’Argenton touchant le péage du pont de Voultegon et le droit de nomination du châtelain de Saint-Clémentin fut réglé par un accord amiable, homologué par la cour, le 19 nov. 1380. (X1c 41, à la date.) De 1392 à 1398, on retrouve notre personnage en contestation avec Yolande du Retail, veuve de Jean d’Erillé, chevalier, au sujet des terres de la Cigogne, du Coudray et autres. (X1a 39, fol. 15, 30 v°, 175 v° ; X1a 40, fol. 71 ; X1a 45, fol. 106.) Le 21 juillet 1402, autre acte de procédure civile entre Jean de Montours, chevalier, et Bertrand Giraudeau, écuyer. (X1a 49, fol. 164 v°.) Jacques de la Gaubertière, prieur de Saint-Clémentin, avait porté plainte, dès le 4 avril 1405 contre Jean de Montours et ses fils, Clément, Aimery et Berthelot, pour excès, injures et sévices. Cette affaire ne fut jugée que le 18 janvier 1416 n.s. Après la mort de Jean. (X2a 14, fol. 240 ; X2a 15, fol. 13 v° ; X1a 59, fol. 302 v° ; X1a 61, fol. 161 v°.) Ce dernier vivait encore le 14 février 1411 n.s., date d’un arrêt entre lui et son fils Aimery, d’une part, et Etienne Langlois, d’autre, touchant une redevance de sept setiers de blé, etc. (X1a 58, fol. 113.) Quant à Aimery de Montours, il était pour son compte, dès le 1er mars 1385 n.s., demandeur en matière criminelle, ainsi que Robert et Antoine de Sauzay, écuyer, et Geoffroy Talebot, contre Guy, seigneur d’Argenton. (X2a 10, fol. 198 v°.) Postérieurement à ces dates, nous retrouvons un autre Jean de Montours, chevalier, que l’on ne qualifie pas seigneur de Saint-Clémentin, ajourné au Parlement, à la requête du Procureur du roi, de Guillaume, seigneur d’Argenton, et de la veuve de Jean Bertran. (X2a 21, acte du 6 septembre 1436.) Le 7 septembre 1447, le même personnage obtenait de la Cour un ordre d’enquête sur des excès et violences qu’il reprochait à Guillaume, sr d’Argenton, chevalier, et à François de Beaumont. (X2a 23, fol. 337.)

, qui demanderent audit Guillaume : « Esse pas toy qui es sergent qui garde la porte du curé ? « Ausquelz respondit ledit Guillaume que nenny et qu’il n’estoit point sergent, et qui le demandassent au paige qui le congnoissoit bien. Et adonc dist ledit Hardy de Montours qu’il avoit menty et lui demanda à qui il estoit, et ledit Guillaume respondit qu’il estoit à Monsr de Calabre

C’est-à-dire Charles II d’Anjou, comte du Maine, duc de Calabre, vicomte de Châtellerault, etc., sur lequel cf. ci-dessus, p. 41, note.

. Et incontinant lui dit ledit Hardy que non estoit, et dessendit de dessus son cheval, et sans mot dire bailla ung soufflet audit Guillaume, lequel n’en fit compte et n’en dit mot. Et ledit Hardy, non content de ce, lui donna de taille de son espée sur la teste tant qu’il peut, tellement qu’il fit cheoir le chapeau dudit Guillaume à terre ; et après ce fait, ledit Hardy encores derechief lui bailla ung autre cop, duquel, si ledit Guillaume n’eust mis son bras sur sa teste ledit Hardy l’eust griefvement blecé, et lui coppa dudit cop, la manche de sa robe et prepoint et le bleça ung peu au braz, en renoyant Dieu qu’il tueroit tout roidde ledit Guillaume. Et ce voyant icellui Guillaume, fort troublé et esmeu de ainsi estre persécuté, doubtant la fureur dudit Hardy, en soy deffendant, tira une bistoire de dessoubz sa robe et donna audit Hardy ung cop d’estoc parmy la penillière et s’en fouyt, et ledit Hardy après, son espée nue. Lequel Hardy depuis, gisant au lit pour ledit cop, dist qu’il mouroit par sa faulte et qu’il avoit tort d’avoir frappé ledit Guillaume, et ne vouloit qu’il en eust aucun mal, priant à tous ses amys qu’ilz n’en fissent aucun desplaisir au curé de Chenevelles ne autres. Et au moien duquel cop, par faulte de bon gouvernement ou autrement, ledit Hardy de Montours, deux ou trois jours après, est allé de vie à trespassement. Pour lequel cas ainsi avenu ledit Guillaume Delacroix

Le texte du registre porte par erreur en cet endroit « de Montours » au lieu de de Delacroix.

est à present détenu ès prisons de Chasteaulerault en grant misere et povreté et dangier de miserablement finer ses jours, se noz grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartiz ; humblement requerant, etc. Pour quoy nous, etc. Si donnons en mandement à nostre seneschal de Poictou ou à son lieutenant et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Nemours, ou moys de may, l’an de grace mil cccc. soixante dix neuf, et de nostre règne le dix huitiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. Villebresme. Visa. Contentor. De Moulins. — Registrata.

MDCXXXVIII Juin 1479

Rémission obtenue par Jean Gadart, hôtelier à Saint-Mars de la Réorthe, qui voulant s’opposer au vol d’un cheval appartenant à un marchand logé chez lui et obligé d’en venir aux mains avec Pierre Nourrisson, franc archer, pour défendre sa propre vie, l’avait tué d’un coup de pelle sur la tête.

AN JJ. 205, n° 282, fol. 160 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 289-293

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Gadart, hostellier, demourant à Saint Mars de la Rouerte ou diocèse de Luçon et en la viconté de Thouars, contenant que, le dimanche xxve jour du moys d’avril derrenier passé, ledit suppliant estant en sa maison à souper et en sa compaignie ung nommé Medart Bridonneau et ung brigandinier duquel il ne scet le nom, sur la fin de son souper survindrent ung nommé Pierre Norrisson, dit Caffart, lors franc archer, demourant au village de Lespau en la parroisse de Saint Michiel de Montmarcus, et Jehan Denis, dit de Bretaigne, cousturier, lesquels se misdrent à la table, beurent et mengèrent de ce qui y estoit, et de ladite table se leva ledit suppliant qui avoit souppé, pour s’en aller esbatre en son jardin estant en derrière de sa maison et laissa lesdiz franc archer et Jehan Denis dit de Bretaigne et autres à ladite table. Et quant ilz eurent soupé, se tindrent devant et auprès d’icelle maison jusques environ jour couché : pendant lequel temps ung marchant, nommé Pierre Duchesne, du lieu de Mauleon, survint et se logea et ung cheval à poil rouge et une jument fauve audit hostel ; sur lequel cheval ledit franc archer, oultre le gré et voulenté d’icellui Duchesne, monta et le fist troter au long la rue et ailleurs oudit bourg, en disant telles parolles ou semblables en substance : « Par le sang Dieu, s’est ce qu’il me fault pour mener à la guerre ; je luy meneray qui que la veuille veoir. » Et incontinent qu’il fut descendu, icellui Duchesne, marchant, la prinst et mist en l’estable dudit suppliant et l’atacha près ladite jument, et ce fait, s’en alla soupper. Et ce voyant par ledit franc archer que icellui Duchesne qui avoit laissé en l’uys de l’estable la clef et qu’il souppoit, ferma ledit huys de ladite estable à la clef, en laquelle ledit cheval estoit et print icelle clef en sa main et se tinst tousjours auprès de ladite maison. Et ce pendant ung nommé Guillaume Bernier, serviteur dudit suppliant, ainsi qu’il venoit des champs de mener paistre les bestes appartenans audit suppliant, pour venir oudit hostel rencontra au chemin Perrine Girondelle, voisine dudit suppliant, qui lui dit qu’elle avoit veu que ledit Norrisson, franc archer, avoit fermé l’estable de sondit maistre à la clef et icelle clef avoit vers lui et avoit oy regnier Dieu qu’il enmeneroit ledit cheval et que le premier qui se mettroit au devant pour l’empescher qu’il le tueroit. Lequel serviteur, lui arrivé en l’ostel dudit suppliant son maistre, recita ce que dit est à Jaquette Marronne, sa maistresse et femme dudit suppliant, l’advertissant qu’elle s’en donnast garde. Et incontinent icelle sa maistresse demanda à Perrine Gardate, sa niepce, par fixion et pour recouvrer la clef d’icelle estable que icellui franc archer avoit ainsi prinse, s’elle avoit mis ou toit les oisons, qui lui respondit que non. Et allors y alla, en sa compaignie lesdiz Duchesne et Bernier et prinst les clefz que ledit franc archer avoit ainsi prinses et ouvry l’estable en laquelle elle mist les diz oysons en ung petit toit ouquel ilz avoient acoustumé estre mis. En laquelle estable icellui franc archer entra et s’efforça de vouloir oster à icelle Perrine lesdites clefz, à quoy, par le moien d’iceulx Bernier et Duchesne elle resista, et pour ce qu’il ne vouloit ystre d’icelle estable, icelle Perrine

Sic, au lieu de Jacquette.

, femme dudit suppliant, tira l’uys à elle et en ferma icellui franc archer, Duchesne et Bernier, son serviteur. Et ce voyant ledit franc archer destacha ledit cheval et s’efforça le mettre hors de ladite estable pour le cuider enmener, ce que ledit Duchesne marchant, qui avoit amené ledit cheval, empescha et prinst pareillement audit collier et tirèrent les ungs contre les autres, et pour ce qu’il vit qu’il ne le pouvoit mettre hors pour l’empeschement que les diz marchant et Bernier luy faisoient, icelluy franc archer tira ung grant cousteau qu’il avoit pendu au costé, duquel il bailla audit marchant plusieurs coups du plat tellement qu’il fut contrainct de lascher sa prinse et le fist tumber, au moien desdiz coups, à terre, et ledit Bernier, serviteur dudit suppliant, quant il vit tumber ledit marchant, s’en fouy mucer ou foing. Et ce fait, se tira ledit franc archer droit à la porte, pour cuider ystre, tenant en une main ledit cheval et en l’autre sondit cousteau ; laquelle porte la femme dudit suppliant tenoit au baroil par dehors, pour empescher qu’il ne mist hors ledit cheval. Pour laquelle resistance se meut grant bruyt, parce qu’il s’efforçoit rompre l’uys de ladite estable, et tellement que icellui suppliant qui estoit en sa maison où il n’y avoit pas grant distance jusques à son estable, oy sadicte femme qui s’escrie et à ce cry print ou foyer une palle de fer enmanchée de boys et s’en party pour aller à l’estable et trouva sadite femme tenant le varroil, à laquelle il demanda tout eschauffé qu’il y avoit. A quoy elle luy respondit que c’estoit ledit Nourrisson franc archer, qui vouloit enmener le cheval dudit marchant, leur hoste, et qu’il l’avoit moult batu et oultragé de son penart ; lequel suppliant dist à sadite femme qu’elle laissast le verroul, ce qu’elle fist. Et incontinant icellui franc archer sortit, aiant sondit cousteau ou poing en renyant Dieu comme dessus qu’il enmeneroit ledit cheval, et si ledit suppliant, se mettoit au devant pour le vouloir empescher qu’il le tueroit. A quoy icelluy suppliant, tenant en sa main ladite palle de fer, luy dist qu’il ne l’enmeneroit point et qu’il n’avoit nulle cause pour ce faire. Et en ce disant, ledit franc archer s’avança contre icelluy suppliant et luy cuyda donner dudit grant cousteau à travers du corps d’un estoc qu’il luy rua et l’eust tué, se n’eust esté la femme dudit suppliant qui se geta sur ledit franc archer et le print au bras et au collet. Et non content de ce, poursuyvy encores icelluy suppliant pour le vouloir tuer ; voyant laquelle poursuicte, doubtant par ledit suppliant que icelluy qui estoit mal famé et renommé et dangereux de frapper, se mist en deffence et luy rua ung coup sur la teste de ladite palle du costé senestre tellement qu’il tumba à terre. Et à ce fait ledit suppliant s’en ala en sa maison et ledit franc archer fut enmené par la femme dudit suppliant et Jehan Denis en l’ostel dudit Denis, ouquel il demoura pour celle nuyt et coucha tout vestu, sans vouloir se faire penser. Et luy estant oudit hostel, fut confessé et pardonna audit suppliant et environ dix heures du matin ala de vie à trespas. Pour occasion duquel cas ainsi advenu que dit est, ledit suppliant doubtant rigueur de justice s’est absenté de sa maison et n’y oseroit aller ne converser, en nous humblement requerant que, attendu ce que dit est et que ledit suppliant ne fut jamais actaint ne convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche et que ledit deffunct a esté aggresseur, il nous plaise luy impartir sur ce nostre grace et misericorde. Pour quoy, etc., au seneschal de Poictou, à son siège de Thouars, etc. Donné à Nemours, ou moys de juing l’an de grace mil cccc. lxxix, et de nostre regne le xviiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. Forlet. — Visa. Contentor. — Registrata.

MDCXXXIX Juillet 1479 (avant le 22)

Rémission obtenue par Jean Petit Ganaud, de Champetit, qui craignait d’être poursuivi comme complice d’un meurtre commis quatre ans auparavant, lui présent, par un de ses parsonniers, dans un conflit armé provoqué par les trois frères Le Couturier du Chaslar, qui revendiquaient la possession d’un champ appartenant audit Petit Ganaud et à ses copropriétaires.

AN JJ. 205, n° 433, fol. 247 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 293-295

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Petit Ganaud de Champety, parroissien de Saint-Julien près Laront

Un bailliage royal ou prévôté, relevant de la sénéchaussée de Poitiers, avait été créé à Laron, centre d’une importante enclave poitevine en plein Limousin, quelques années après la réunion des états d’Alfonse à la couronne. M.L. Guibert estime que sa durée ne dépassa pas l’année 1332. Lors de l’établissement du bailliage de Bourganeuf avant 1454, les principales localités qui composaient le ressort de celui de Laron lui furent rattachées, telles que Peyrat-le-Château, Pontarion, Laron, la Pérusse. On voit par l’adresse de la présente rémission que la circonscription de Laron faisait toujours partie de la sénéchaussée de Poitou. Des renseignements intéressants sur la géographie féodale et administration de cette enclave sont consignées dans l’opuscule intitulé : Les enclaves poitevines du diocèse de Limoges. L’enclave de Bourganeuf et de Peyrat-le-Château, le bailliage de Laron et la ville franche de Masléon, par Louis Guibert. Limoges, 1886, 31 pages in-18 ; Extrait de l’Almanach limousin pour 1886.

, contenant que ledit suppliant avec ses autres procureurs, habitans dudit Champeti, sont vraiz seigneurs ratilz propriétaires et possesseurs des lieux nommez de Champeti et du Pont, et toutes les appartenances et deppendances, et entre autres appartenances et deppendances des diz lieux est et a acoustumé d’estre ung champ nommé de la Varnhola situé et posé entre le Puys Radeau d’une part et le Pont de la Chaulm, tirant le grant chemin de Saint Léonard, d’autre part, et tenant au Puy Fromenteau. Et est avenu que le dimanche devant la Nostre Dame d’aougst, à heure de vespres, quatre ans a ou environ, ledit suppliant et ses autres parsonniers de Champeti faisoient garder et pasturer leur bestail groz et menuz oudit champ, et lors survindrent illec Liénard, Pierre et Jehan Le Cousturier du Chaslar, frères, enfans de Pierre Petit du Chaslar, parrochiens du Peyrat, mal meuz et embastonnez chacun d’un baston, lesquelz malicieusement et de couraige courroucié avec leursdiz bastons viroient et chassoient le bestail desdiz champs, et entre aultres ledit Liénard du Chaslar, et sur ce se meut bruit et debat entre lesdiz du Chaslar assaillans et lesdiz de Champeti à l’occasion dudit champ et deboutement dudit bestail, et frapèrent les ungs sur les autres tellement que par chaleur et oudit conflit et debat, ung nommé Pierre Goudré dudit Champeti, en la compaignie duquel ledit suppliant estoit, gardant et deffendant ledit bestail, frappa d’un baston de boys de chassanli, en soy deffendant, ledit Lienard du Chaslar l’un desdiz assaillans et agresseurs, et l’ataigny sur la teste, tellement qu’il tomba à terre, fut emporté d’illec et le lendemain, par deffault de bon gouvernement ou autrement, il alla de vie à trespassement. Depuis lequel cas avenu, enquestes ont esté faictes par justice, à qui appartenoit ledit champ et par icelles a esté trouvé qu’il appartenoit audit (sic) de Champeti. A l’occasion duquel cas, que ledit suppliant n’a pas commis ne frappé le coup, mais il estoit en la compaignie, il n’ouse seurement converser ne repairer ou pays, doubtant rigueur de justice, et pour ce nous a humblement fait supplier et requerir noz grace et misericorde luy estre sur ce imparties, humblement requerant icelles. Pour quoy, nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, etc. Si donnons en mandement, par cesdictes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieuxtenans, presens et advenir, et à chacun d’eulx, si comme à luy appartiendra, etc. Donné à Larchant, ou moys de juillet, l’an de grace mil cccc. soixante dix neuf, et de nostre regne le dix huitiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. De Villechartre. — Visa. Contentor. F. Texier.

MDCXL Septembre 1479

Rémission octroyée à Laurent Poupignon, laboureur, paroissien de Douadic « en la seneschaucée de Poictou », âgé de vingt deux ans, chargé de femme et d’une petite fille, coupable de meurtre sur la personne de son oncle, Mathurin Choteron, de ladite paroisse. Dans un partage fait avec les membres de sa famille et de celle de sa, femme, Philippon Popignon, père dudit Laurent, et Clémence Choteron, sa mère, avaient eu, entre autres biens, un verger sis au village des Vaux, paroisse de Douadic, « devant l’uys de l’ostel dudit Phelippon ». Son beau-frère Mathurin Choteron, prétendant qu’il lui appartenait, allait y récolter des choux et les emportait chez lui. Sa sœur et son beau-frère ayant voulu s’y opposer, il en résulta une dispute qui dégénéra bientôt en voies de fait, et Laurent Poupignon, venant au secours de son père, porta audit Mathurin un coup d’un pieu ferré, dont il mourut quelques jours après, pardonnant au meurtrier et « confessant qu’il avait eu tort oudit debat et baterie, et qu’il avoit esté invaseur et agresseur … Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Vendosme, ou moys de septembre, l’an de grace mil cccc. soixante dix neuf, et de nostre règne le xixe ».

AN JJ. 205, n° 307, fol. 175 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 295-296

MDCXLI Septembre 1479

Rémission octroyée à Jamette Bizot, pauvre fille de vingt ans, détenue en prison à Persac, pour infanticide. Sur le conseil de son séducteur, qui l’avait rendue quatre fois mère, elle avait noyé son dernier né.

AN JJ. 205, n° 319, fol. 181 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 296-297

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Jamette Bizote, povre jeune fille aagée de vingt ans ou environ, fille de Jehan Bizot et de Marguerite, sa femme, povres simples gens de labour, demourans en la parroisse de Peressac, contenant que despuis quatre ans ou environ elle fust tellement poursuyvye d’ung nommé Simon Pynaud, demourant en ladite parroisse, lequel par ses subtilz moiens et blandisses parolles se consenty (sic) a soy et eust sa compaigniée par plusieurs foiz. Au moien de quoy elle eust deux enffans d’une ventrée ; et despuys ledit Pynaud perseverant tousjours en son propos et obstinacion, trouva façon d’avoir encores la compaignée de ladite Jamette, et tellement qu’il l’engroissa par une autresfoiz ; lequel voyant qu’elle estoit grosse, l’a soubztraict d’entre les mains desdiz père et mère et la tint celeement par long temps, jusques à ce qu’elle eust en delivrance de sa portée, laquelle après, elle toute seulle porta (?) sur ledit Pynaud et le laissa, et après s’en retourna en l’ostel de sesdiz père et mère. Et non contens encores de ce que dit est, ledit Simon Pynaud, en perseverant tousjours en son propos, trouva façon d’avoir la compaignée de ladite Jamette, laquelle il a engroissé de rechief, et affin de eviter … couvrit et cella ledit cas. Ledit Pynaud, qui doubtoit en estre pugny par justice, a trouvé moien de la faire aller acoucher en une vigne ou près d’icelle et de l’ostel de sesdiz père et mère, ost ung autre enffant, lequel par l’ennortement dudit Pynaud, cuidant celler ledit cas et eviter la pugnicion de justice, aussi par la temptacion de l’ennemy, gecta ledit enffant en une rivière près d’illec, et icelluy precipita mort. Au moien de quoy ladite Jamete est à present detenue prisonnière ès prisons des seigneurs de Peressac en la Marche par les officiers dudit lieu, où elle est en voye de miserablement finer ses jours, se noz grace et misericorde, etc. Pour quoy, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou ou à son lieutenant à Montmorillion et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Saint-Martin de Candé, ou moys de septembre, l’an de grace mil cccc. soixante dix neuf, et de nostre règne le dix neufviesme.

Ainsi signé : Par le roy. Mareschal. — Visa. Contentor. Texier.

MDCXLII Septembre 1479

Rémission accordée à Pierre des Noyers, écuyer, meurtrier de Jean Caignault qui, avec son frère Pierre et autres leurs complices, avait commencé à vendanger un fief de vignes nommé le Plessis, en la paroisse de Saint-Mars de la Réorte, dont étaient seigneurs par indivis ledit des Noyers et Sauvage Jourdain, sans la permission de ceux-ci, et avait répondu outrageusement à ses justes observations.

AN JJ. 205, n° 317, fol. 181 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 297-301

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amys charnelz de Pierre des Noyers

Les lettres de rémission obtenues par Pierre des Noyers, coseigneur de Saint-Mars-la-Réorthe, pour le meurtre de Jean Caignault, n’étaient pas encore entérinées le 20 avril 1480, à cause de l’opposition de Jeanne, veuve, et de Colas, fils de la victime, opposition qui fut portée en appel au Parlement. Un ajournement fut prononcé ce jour-là (Arch. nat., X2a 44, à la date), et depuis on perd la trace de cette affaire dans les registres de la cour.

, escuier, aagé de cinquante ans ou environ, contenant qu’il est seigneur de la moitié par indivis d’ung fief de vignes appellé le fief du Plessis assis en la parroisse de Saint-Mars de la Rorte en nostre pays et conté de Poictou, partant ledit fief par indivis avec Sauvaige Jordain

Sauvage Jourdain, écuyer, était aussi seigneur du Puy-Jourdain et de la Vaugrolière, par héritage de Hardy de Montours, comme on l’a vu quelques pages plus haut, p. 287, note. Il figure au ban de 1467 en qualité de brigandinier de Jean de Brosse, seigneur de L’Aigle, et fut chargé de procuration pour rendre aveu au vicomte de Thouars de l’hôtel de la Flocellière, sis au bourg de Sainte-Verge, le 14 novembre 1476. (Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 1re édit., t. II, p. 257.) Sauvage était mort avant le 17 août 1483, date d’un hommage rendu à Nicole de Bretagne, par son fils Guillaume Jourdain, écuyer, qualifié seigneur du Puy-Jourdain pour le fief du Coudray-Granbigneau. (Coll. dom Fonteneau, t. IX, p. 383.)

, escuier, cousin dudit suppliant, ouquel fief a plusieurs hommes tenens, qui tiennent en particulier sur droit de complant, devoir feodal et auquel des fruiz croissans oudit fief dudit suppliant et dudit Jordain. Et combien que selon la sence

Sic : ne faut-il pas corriger l’usance ? [L.C.].

et coustume de nostredit pays de Poictou et mesmement du pays où ledit fief de vigne est situé et assis il ne soit permis ne loisible à aucuns teneurs dudit fief icellui ouvrir ne vendanger sans le congé, permission ou licence desdiz suppliant et Jourdain, seigneurs dudit fief, ce non-obstant, le xviie jour de ce present moys de septembre mil iiiiclxxix, Jehan et Pierre Caignault, frères, et autres teneurs dudit fief, leurs adherans et complices, de leur auctorité privée et au desceu desdiz suppliant et Jourdain, seigneurs dudit fief, se transportèrent oudit fief et icellui ouvrirent et vandangèrent par avant qu’on eust fait ouvrir ledit fief, ainsi qu’il estoit de coustume ès années et vendanges precedans et par l’usaige dudit pays de Poictou où est situé et assis ledit fief de vigne, dont ledit suppliant, quant il arriva oudit fief ledit jour, environ sept ou huit heures devers le matin, fut mal content et desplaisant, et sur ce eut grosses parolles entre luy et ledit Jehan Caignault ; lequel Caignault tantost après que icelluy suppliant fut au pas ou entrée dudit fief, s’en yssit hors d’icellui fief avec une jument qu’il trouva chargée de une somme de vendange et par dessus ladite somme ung panier ou corbillon plain de raisins, couvers et mucé d’une vielle robbe ; lequel corbeillon et raisins ledit suppliant prinst en disant audit Caignault, qui dès le bien matin estoit entré oudit fief et en avoit emmené une autre somme de vandange, qu’il ne luy appartenoit aucunement de ouvrir ledit fief et en enmener la vandange d’icellui ne aussi ledit panier ou corbillon de raisins ainsi furtivement au desceu dudit suppliant et dudit Jourdain, seigneurs dudit fief. Et quant icelluy suppliant eust ainsi prins ledit corbillon et raisins, dist audit Caignault qu’il s’en allast et frappa icelluy suppliant d’une verge ou petit baston qu’il tenoit en sa main ung petit coupt sur la courpe de la jument dudit Caignault, laquelle se prinst ung pou à trotter et tumba ung pou de raisins du comble de ladite somme, par quoy ledit Caignault reprist ladite jument et la voulut ramener oudit fief, en jurant le sang de la mort de Nostre Seigneur qu’il y retourneroit et y referoit ladite somme aux despens dudit suppliant, combien que la vandange qui en estoit tumbée n’estoit pas de la valeur d’une pinte de vin ; ce que voulut empescher ledit suppliant, en disant audit Caignault qu’il s’en allast et qu’il ne retourneroit point oudit fief, mais ledit Jehan Caignault, lequel estoit fort oultrageulx, dist audit suppliant en jurant le sang et la mort de Nostre Seigneur, soy approuchant d’icellui suppliant, comme pour le vouloir oultrager et en appellant à haulte voix ung sien frère, nommé Pierre Caignault, lequel estoit au dedens dudit fief de vignes, qui bientoust et tout incontinent se rendist à luy avec ung gros baston en sa main ; et dist audit suppliant que en despit de luy et voulsist ou non, il referoit sadite somme de vandange, et luy disoit par grant rigueur plusieurs autres grosses parolles injurieuses, par quoy ledit suppliant qui est noble homme et seigneur dudit fief, soy voyant ainsi oultragé, sourprins de ire et de courage et en chaulde colle, considerant la malice desdiz Jehan et Pierre Caignault, qui sont gens de labour, subgetz et teneurs dudit fief, par lesqueulx il doubtoit estre oultragé, veu les grosses parolles et menasses qu’il luy donnoient de ce faire et le baston que avoit ledit Pierre Cagnault, frère dudit Jehan, icelluy suppliant tira ung penart ou grant cousteau qu’il avoit à sa sainture, et par ce que ledit Jehan Caignault, en jurant le sang et la mort de Nostre Seigneur, comme dit est, continuoit et par grant ire et fureur s’adreçoit contre ledit suppliant qui estoit descendu à pié de dessus son cheval, doubtant estre enclos entre lesdiz Jehan et Pierre Caignault en ung estroit chemin ouquel estoit ledit Jehan Caignault et sadicte jument et par eulx estre oultragé et envillenné en sa personne, pour à ce obvier et seulement pour le cuider faire reculer, toucha ledit Jehan Caignault ung pou avecques la pointe de sondit cousteau ou penart sur le devant, du costé senestre, et croyant ledit suppliant ne l’avoir aucunement blécié et n’avoir que seullement touché à sa robbe, dist par plusieurs foiz audit Caignault qu’il s’en allast ; lequel Caignault de prime face ne faisoit semblant d’estre aucunement blécie, ains alloit et venoit le long dudit chemin estroit, et tousjours donnoit de grandes menaces audit supliant, en luy disant et jurant comme dessus que, s’il le trouvoit audit lieu de Saint-Marcs, qu’il se trouveroit batu. Et lequel Jehan Caignault en usant desdiz grans seremens et grosses parolles en détestant le nom de Dieu, ainsi qu’il aloit et venoit le long dudit chemin estroit et sans ce que ledit suppliant luy touchast ou donnast plus aucun autre coupt, icelluy Jehan Caignault tumba à terre et tantost après, par son oultrage et courroux, ou par deffault d’avoir esté pensé et bien gouverné, alla de vie à trespassement. A l’occasion duquel cas ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du pays, etc. Pour quoy, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou à son siège ordinaire de Thouars et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou moys de septembre, l’an de grace mil cccc. soixante diz neuf, et de nostre règne le xixe.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. F. Texier. — Visa. Contentor. F. Texier. — Registrata.

MDCXLIII Octobre 1479

Rémission obtenue par André Cornu, de Beauvoir-sur-Mer, coupable du meurtre de Colinet Rousseau, dans une taverne du lieu, à la suite d’une querelle de jeu.

AN JJ. 205, n° 329, fol. 187 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 301-303

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amys charnelz de André Cornu, povre homme de labour, aagé de xxiiii. ans ou environ, chargé de jeune femme et mesnage, demourant en la parroisse de Beauvoir-sur Mer en Poictou, contenant que à ung jour de mercredi sixiesme de ce present moys d’octobre, ledit André se transporta, environ deux heures après midi, en l’ostel d’un nommé Thomas Julienne, tavernier, demourant audit lieu en la compaignie de feu Colinet Rousseau, barbier, de Fabien Thomasset et autres, pour illec eulx esbatre et passer temps, et quant ilz y furent ilz se misdrent, lesdiz André Cornu et deffunct à jouer l’un contre l’autre aux quartes pour ung quart de vin vallant troys deniers et maille tournois, en une chambre haulte dudit hostel, lequel quart de vin ledit André Cornu perdit et pour le paier mist une targe sur la table, laquelle targe ledit deffunct et print en sa main et en après se prinst à jouer icellui André Cornu avec ledit Fabien Thomasset pour ung autre quart de vin, lequel pareillement il perdit et pour ce dist audit deffunct ses parolles ou semblables : « Colinet, baillez moi ma targe, pour paier mon escopt. » A quoi ledit deffunsct respondit gracieusement telz motz ou semblables : « Tu n’en auras ja point. » — « Et pourquoy, dist ledit André Cornu, ne me baillerez-vous mon argent ? » — « Par le sang Dieu, dist ledit deffunct, tu n’en auras ja point, et se tu me fay haster, je te batray bien. » Après lesquelles parolles dictes, ledit André se dessendit de ladite chambre haulte et dudit hostel et vint à baz parler à l’oste et lui dist telz parolles : « Colinet me detient mon argent. Vous estez l’oste, faictes le moy rendre, autrement il y aura noise ; il me menace. » A quoy ledit hoste respondit qu’ilz n’estoient que yvrognes et qu’ilz le laissassent en paix. Et alors ledit André Cornu remonsta en ladicte chambre haulte et dit derechief audit deffunct qu’il lui rendist son argent ou qu’il le garderoit de sortir de ladicte chambre et se mist contre la porte d’icelle chambre. Et tantost, après ledit deffunct se leva du lieu où il estoit assis et dist : « Ha ! paillart, par la mort Dieu, je t’en paieray bien », et tira une dague qu’il avoit à sa sainture et en bailla à icellui André deux ou troys coups sur la teste, tellement qui le blessa jusques à grant effusion de sang, et ce fait se dessendit ledit deffunct de ladite chambre haulte et s’en ala en la chambre de l’oste où estoient Jehan Grasmouton

Jean Grasmouton est le nom d’un sergent royal en Poitou, qui, en 1460, exerçait son office dans cette région. (Cf. Arch. hist. du Poitou, t. XXXV, p. 166, note.) On trouve aussi, à cette époque, un Jean de Grasmouton, écuyer, sr dudit lieu près Clisson, qui avait épousé Jeanne, fille de Jean de La Brunetière, écuyer, sr du Plessis-Gesté. (Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. II, p. 59.)

et Jehan Lombart, qui jouoient aux quartes, disant par ledit deffunct comme tout effrayé telz parolles : « Est-il advis à ce truant qu’il doit estre mon maistre ? Par la mort Dieu ! je l’en garderay bien. » En disant lesquelles parolles, ledit André entra en ladite chambre de l’oste et en la presence dudit deffunct, dist aux assistans illec ces parolles : « Hee ! Messieurs, regardés en quel point il m’a mis, et me detient mon argent. » Et dist en oultre audit deffunct : « Tu m’as blecé et batu et me detiens mon argent ; je le te rendray. Rens moy mon argent, et tu ne feras que sage. Rens le moy ou tu t’en repentiras. » Dont ledit deffunct ne tint conte et ne fist que secouer la teste et se mocquoit dudit André Cornu. Par quoy voyant ledit André que ledit deffunct l’avoit ainsi batu et injurié et qu’il lui detenoit son argent et se mocquoit de lui, lui esmeu de chault couraige, tira ung petit cousteau dont il tailloit son pain et en frappa ledit deffunct ung coup environ la gorge ; au moyen duquel coupt mort s’est ensuie en la personne dudit deffunct. Pour lequel cas ledit André Cornu a esté prins et constitué prisonnier par la justice dudit lieu et en est encores detenu en estroite et miserable prison, en danger de sa personne, se notre grace ne lui estoit sur ce impartie, si comme dient sesdiz parens et amys charnelz, suppliants, en nous humblement requerant icelle. Pourquoy, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieuxtenans et à chacun d’eulx, si comme à lui appartiendra, etc. Donné à Tours, ou moys d’octobre, l’an de grace mil cccc. soixante dix neuf, et de nostre règne le xivme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. Audé. — Visa. Contentor, Burdelot. — Registrata.

MDCXLIV Novembre 1479

Lettres d’anoblissement de Bouchard Gerart, de la châtellenie de Mallièvre en Poitou.

AN JJ. 205, n° 351, fol. 196 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 304-306

Ludovicus, Dei gracia Francorum rex. Probitatis merita, nobiles actus gestus que laudabiles et virtutum insignia quibus persone decorantur et ornantur merito nos inducunt ut eis juxta opera, proprio Creatoris exemplo, tribuamus et eos eorumque posteritatem et prolem favoribus congruis et nobilium honoribus, ut nomen rei consonet, attolamus, et ipse hujusmodi prerogativa letentur ceterique ad agenda que bona sunt ardencius aspirent et ad honores, suffragantibus virtutum bonorum operum meritis, adhipiscendos alicientur et advolent. Notum igitur facimus universis, presentibus et futuris, quod nos, attendentes vitam laudabilem, morum honestatem fidelitatemque et alia quamplurima virtutum merita, que in dilecto nostro Bouchardo Gerart

Ce nom est écrit six fois dans l’acte d’anoblissement et toujours avec l’abréviation ḡart, que l’on ne peut traduire que par Gérart ou Gréart. Cependant ce personnage est inscrit sous la forme Bouchard Girard sur le rôle du ban et de l’arrière-ban du Poitou, convoqué le 26 novembre 1491 par le sénéchal, Jacques de Beaumont, sr de Bressuire, parmi « ceux qui sont en garnison à Mortaigne, frontière de Bretaigne ». (Roolles des bans et arrière-bans de la province de Poictou, Xaintonge et Angoumois. Poictiers, 1667, in-4°. Réimpr. Nantes, 1883 p. 59).

, in castellanea de Malelievre patrie Pictavensis commorantem, novimus experiencia suffragari, pro quibus non inmerito gratum apud nos se reddidit et acceptum, nos personam et prolem ipsius honorare voulentes, sic quod sibi et posteritati sue ac proli perpetuum cedere valeat ad honorem, eumdem Bouchart Gerart cum tota ejus posteritate et prole utriusque sexus in legitimo matrimonio procreata et procreanda, et eorum quemlibet, de nostre regie potestatis plenitudine, speciali gracia et auctoritate regia nobilitavimus et nobilitamus per presentes ; nobilesque facimus et habiles reddimus ad omnia et singula, quibus ceteri nobiles regni nostri utuntur ac uti possunt et consueverunt, ita quod ipse Bouchart Gerart ejusque proles et posteritas masculina in legitimo matrimonio procreata et procreanda, a quocumque milite voluerint singulo milicie valeant decorari. Concedentes insuper eidem Bochart Gerart universeque posteritati sue et proli, ex legitimo matrimonio procreata et procreanda, quod ipsi in judicio et extra pro nobilibus et ut nobiles ab omnibus de ceteri teneantur et imperpetuum pociantur et utantur quibuslibet nobilitatibus, privilegiis, prerogativis, franchisiis, honoribus libertatibus, et juribus universis quibus ceteri nobiles dicti regni nostri uti consueverunt, utantur et gaudeant, ipsum Bouchart Gerart aliorum nobilium regni nostri numero agregantes, eidemque et sue jamdicte posteritati et proli in legitimo matrimonio procreate et procreande concedentes ut feoda, retrofeoda nobilia aliasque possessiones nobiles, quecunque sint et quacunque prefulgeant auctoritate, acquirere possint, acquisitaque et habenda postea retinere, habere et possidere licite valeant atque possint ac si fuissent vel essent ab antiquo originaliter nobiles et a personis nobilibus ex utroque latere procreati, absque eo quod ea vel eas aut aliqua earum, in parte vel in toto vendere seu extra manum eorum ponere, nunc vel quomodolibet in futurum, cogantur. Et hoc mediante certa peccunie summa quem de eo realiter recepi facimus, pro in quibusdam secretis negociis nostris inplicando, et mediante qua summa, dictum Bouchart Gerart ab omni financia, quam nobis propter hoc debere potest et debet, ad cujuscunque valoris sit et ascendat, quictavimus et quictamus de nostra ampliori gratia per presentes, manu nostra signatas. Quocirca dilectis et fidelibus nostris, gentibus compotorum nostrorum et thesaurariis, baillivo …

Sic, blanc de plusieurs mots : quatre ou cinq.

et aliis justiciariis et officiariis nostris, aut eorum loca tenentibus, presentibus et futuris, tenore presentium damus in mandatis quatinus dictum Bourchart Gerart, ejus posteritatem et prolem nostris presentibus nobilitacione, concessione, dono, quictacione et gracia uti et gaudere faciant et permittant paciffice et quiete, nec ipsos aut eorum aliquem contra presentium tenorem ullathenus molestant aut inquietant nunc vel quomodolibet-in futurum. Quod ut firmum et stabile perpetuo perseveret, nostrum presentibus duximus apponi sigillum, salvo in aliis jure nostro et in omnibus quolibet alieno. Datum apud Plessium de Parcu, in mense novembris, anno Domini millesimo quater centesimo septuagesimo nono, et regni nostri decimo nono.

Sic signatum : Loys, et supra : Per regem, domino de Bochage

Imbert de Batarnay, seigneur du Bouchage, conseiller des rois Louis XI, Charles VIII, Louis XII et François Ier, décédé en 1523. (Cf. ci-dessus, p. 65, note.)

et aliis presentibus. De Marle. — Visa. Contentor. Burdelot.

MDCXLV Novembre 1479

Rémission en faveur de Pierre Andrieu, « povre homme de labour, du lieu de Compnhac en Poictou

Ce « Compnhac en Poictou » paraît être Cognac, localité qui faisait partie de l’élection de Confolens, auj. arr. de Rochechouart, con de Saint-Laurent-sur-Gorre.

, chargié de femme et enfants », à condition qu’il tiendra prison fermée un mois au pain et à l’eau. Se trouvant, le jour de saint Michel précédent, devant une muraille qu’il faisait bâtir en dehors de la forteresse dudit lieu, Jean Truffet, prêtre de l’ordre de saint Jean de Jérusalem, vint lui chercher querelle, lui disant qu’il était excommunié et que s’il venait à la messe, il le ferait jeter hors de l’église. Les injures dégénérèrent en voies de fait, et dans la rixe ledit Truffet reçut un coup de couteau dans la poitrine, dont il mourut presque aussitôt. « Si donnons en mandement au seneschal de Poitou, etc. Donné à Paris, ou moys de novembre l’an de grace mille cccc. soixante dix neuf, et de nostre règne le xixme. »

AN JJ. 206, n° 289, fol. 64 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 306

MDCXLVI Janvier 1480 (n.s.)

Rémission donnée en faveur de Guillaume Goyet, brigandinier et fourbisseur, détenu prisonnier à Thouars pour le meurtre de Thomas Fauconnier, qui lui avait cherché querelle et lui avait porté les premiers coups.

AN JJ. 205, n° 417, fol. 237 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 307-309

Loys, par la grace de Dieu roy de France, savoir faisons à tous presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Guillaume Goyet, brigandinier et fourbisseur, natif de Chasteaugontier, aagé de xxx. ans ou environ, à présent estant prisonnier en noz prisons de Thouars, contenant que, le xvime jour de decembre derrenier passé, luy estant en ladite ville de Thouars, en l’ostel et ouvrouer d’un nommé René Roulleau, aussi brigandinier et fourbisseur, où il besongnoit de sondit mestier comme varlet aloué, survint à luy ung nommé Thomas Faulconnier, lequel luy dist qu’il estoit venu ung maistre de leur mestier nommé Jaques Nyeau en luy priant qui le allassent veoir et boire ensemble. Auquel ledit suppliant respondit qu’il ne yroit point, pour ce que ledit Regné, son maistre, n’estoit pas à l’ostel et qu’il ne pouvoit laisser l’ouvrouer sans garde. Et incontinent que ledit Regné, son maistre, fut venu, ledit suppliant s’en alla, par le congié de sondit maistre en l’ouvrouer d’un autre ouvrier dudit mestier nommé Petit Jehan, brigandinier aussi, maistre dudit Thomas Faulconnier, ouquel ouvrouer il trouva lesdiz Petit Jehan, le maistre, et Thomas son varlet ; auquel Petit Jehan icellui suppliant demanda se ledit Denyeau estoit venu, lequel luy dist que non. Et alors ledit Thomas, varlet dudit Petit Jehan, print les parolles et respondit que par la mort Dieu si estoit et luy faisoit habiller une carpe pour son soupper en l’ostel de la Mervaulde, priant audit suppliant qu’ilz y alassent boire. Lequel suppliant luy respondit qu’il n’yroit point, pour ce qu’il n’avoit point d’argent. Et adonc ledit Thomas dist audit suppliant : « Ne te souffre, je paieray pour toy », et le print par dessoubz le braz et le contraignit y aller. Et quant ilz furent oudit hostel de ladite Mervaulde, beurent illec pinte de vin, et après qu’ilz eurent beu, ledit suppliant s’en voult retourner et dist audit Thomas qu’il paiast, comme il luy avoit promis. Lequel Thomas luy dist qu’il n’en feroit riens. A quoy ledit suppliant respondit : « Je savoye bien que ainsi m’en prendroit. » Sur lesquelles parolles survint ledit Petit Jehan, maistre dudit Thomas, auquel ledit suppliant pria et requist qu’il paiast pour luy ou qu’il en repondist à leur hostesse, ce que ledit Petit Jehan fist voulentiers. Et après plusieurs parolles, non obstant que ledit Thomas contraignist tousjours ledit suppliant à demourer oudit hostel, se departit icelluy suppliant d’illec et s’en ala à l’ostel dudit René Roulleau son maistre, où il se print à besongner comme il avoit acoustumé et illec besongna jusques environ l’eure de six heures au soir, à laquelle heure ledit Thomas vint en l’ouvrouer d’icelluy Regné et le salua, en luy requerant qu’il luy baillast à besongner ; ce que ledit Regné fist. Et fist bailler audit suppliant qui besongnoit ses houstilz audit Thomas ; lequel Thomas se assist et besongna deux ou trois traiz sur une espée qui estoit sur le hastellier, et après la laissa incontinent et dist audit suppliant qu’ilz alassent soupper en l’ostel de ladite Mervaulde. Lequel suppliant luy dist qu’il ne yroit point. Et lors ledit Thomas en yssant dudit ouvrouer et en s’en alant, regnia Dieu que si feroit et jura les vertuz Dieu que, s’il n’y aloit avant qu’il dormist, il s’en repentiroit. Et incontinent après retourna, ung bracquemart tout nu en son poing, et entra dedans ledit ouvrouer et lança dudit bracquemart deux ou trois coups du plat sur ledit suppliant et s’efforça de le frapper d’estoc ; mais ledit suppliant se couvrit d’un baston dont il fourbissoit, et l’eust blecié dudit estoc, se n’eust esté ledit Regné, son maistre, qui se mist entre eulx deulx et les departit. Et lors ledit suppliant dist le plus doulcement qu’il peut par plusieurs foys audit Thomas qu’il s’en alast et qu’il ne luy demandoit riens. Lequel Thomas respondit qu’il n’ystroit dudit ouvrouer pour luy ne pour son maistre. Et pour ce que ledit René apperceut que ledit Thomas estoit esmeu, trouva moien de le mettre hors, en luy disant qu’il s’en alast, mais ledit Thomas s’efforça tousjours rentrer en icelluy ouvrouer. Ce que voyant, ledit suppliant, doubtant que icelluy Thomas, qui estoit fort esmeu et tenoit tousjours ledit bracquemart nu en son poing, luy fist desplaisir et pour le cuider garder d’entrer oudit ouvrouer, print une espée nue qui estoit en icelluy ouvrouer et se mist à l’endroit de la porte dudit ouvrouer où il poussa et mist ladite espée, qu’il tenoit nue en son poing, comme à demy hors de ladite porte, sans avoir intencion ne vouloir de frapper ledit Thomas, mais le faisoit pour cuider evitter à plus grant inconvenient ; contre la poincte de laquelle espée ledit Thomas, qui estoit eschauffé et avoit beu, en soy perforçant entrer oudit ouvrouer, pour courir sus audit suppliant et le vouloir frapper dudit bracquemart, se hurta et frappa luy mesmes parmy le ventre tellement qu’il cria qu’il estoit blecié et s’en alla d’illec. Et le lendemain de ladicte blessure ala de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas ledit suppliant a esté constitué prisonnier en noz prisons de Thouars, où il est en voye d’y miserablement finer ses jours, se par nous ne luy estoient imparties noz grace et misericorde, humblement requerant icelles. Pour quoy, etc., au seneschal de Poictou ou à son lieutenant audit Thouars et à tous, etc. Donné à Tours, ou moys de janvier, l’an de grace mil cccc. soixante dix neuf, et de nostre regne le dix neufviesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil Texier. — Visa. Contentor. Rolant. — Registrata.

MDCXLVII Février 1480 (n.s.)

Rémission octroyée à Perrin Sceteau, Claude Genicot et Mathurin Bobinet, de Nouaillé, qui, revenant un soir des bois, rencontrèrent deux inconnus dont l’un portait une arbalète bandée ; les prenant pour des guetteurs des chemins et se croyant menacés, ils se jetèrent sur le porteur d’arbalète, la lui enlevèrent et le frappèrent d’un coup de bâton dont il mourut trente-quatre jours après.

AN JJ. 205, n° 391, fol. 220 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 310-312

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Perrin Sceteau, Glaude Genicot et Mathurin Bobinet, povres gens de braz demourans en la parroisse de Noailhé près Poictiers, contenant que le derrenier jour de novembre derrenier passé lesdiz supplians, acompaignez de Laurens Bocardeau, Huguet Piet et Jehan Girault, en eulx retournant du boys et forest que l’on appelle le boys du Cheners estant entre Mortemer et Lussac, pour aller en leurs maisons, passèrent par ung villaige appellé Deux Molinez en la parroisse de Loumaisé en Poictou, et comme ilz estoient entre ledit village et la parroisse de Disné à l’entrée des boys, à soleil couchant, trouverent deux hommes, c’est assavoir feu Jehan Chartier aussi homme de braz, lequel tenoit une arbaleste bandée et du traict ferré dessus, et un autre dont ilz ne surent le nom. Auquel feu Charretier ledit Guillaume

Sic. Le copiste a écrit par distraction « Guillaume », au lieu de « Glaude ».

demanda : « Qui estes-vous ? » Et lors ledit feu Jehan qui portoit ladicte arbaleste bandée luy respondit bien rigoreusement : « Qu’en avez-vous à faire ? » et en jurant le sang Dieu, luy dist telles parolles : « Si vous approuchez de moy, je vous tueray. » Oyans lesquelles parolles, lesdiz supplians furent fort espoventez et esmeuz, cuidans que ce feussent guecteurs de chemins qui leur voulsissent faire desplaisir, attendu le parler dudit feu Jehan, l’eure et le lieu, qui estoient fort suspectz. Et pour ce que ledit Glaude apperceut que ledit feu Charretier destournoit sadicte arbaleste, icelluy Glaude s’approucha de luy, et doubtant qu’il le voulsist frapper d’icelle pour le tuer, le saisist au corps, le mist à terre et luy debanda sadite arbaleste. Et tantost qu’elle fut debandée, ledit Mathurin Bobinet s’aproucha d’eulx, et eulx deulx ensemblerment luy ostèrent ladite arbaleste, sans luy vouloir faire aucun desplaisir. En faisant lesquelles choses, ledit Perrin Sceteau, qui près d’ilec estoit, survint, qui d’un baton ferré qu’il avait, voyant les dessusdiz meslez ensemble et cuidant que ledit Charretier oultrageast lesdiz Genicot et Bobinet, et pour les cuider deffendre et empescher que ledit Charretier ne leur fist mal, donna audit feu Charretier ung coup dudit baston sur la teste seulement, et après fist tant qu’il les departit. Et sans luy faire autre chose, se departirent les ungs des autres et s’en alèrent chacun leur chemin, et ne cuidoit point ledit Perrin Sceteau avoir blecié ledit feu Chartier. Au moien duquel coup lesdiz supplians ont esté advertiz que ledit feu Chartier, qui depuis ledit coup a fait grant chière et vescu par l’espace de trente quatre jours ou environ, par faulte de bon gouvernement ou autrement est allé de vie à trespassement. Et à ceste cause lesdiz supplians, doulbtans rigueur de justice, se sont absentez du pays, ouquel ne en nostre royaume ilz n’oseroient jamais retourner, converser ne demourer, se nostre grace et misericorde ne leur estoit sur ce impartie, si comme ilz dient en nous humblement requerant que, attendu que toujours ilz ont esté de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans jamais avoir esté actains ne convaincus d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, nous leur veuillons sur ce impartir nostre grace et misericorde. Pourquoy, etc. au seneschal de Poictou ou à son lieutenant, etc. Donné à Tours, ou moys de février, l’an de grace mil cccc. soixante dix neuf, et de nostre règne le xixme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. T. Foulet. — Visa. Contentor. Rolant. — Registrata.

MDCXLVIII Mars 1480 (n.s.)

Confirmation des lettres de rémission délivrées par Charles de Savoie, lors de son passage à Lande, près Blois, en faveur de Jean Baillon, de la Ménardière en la châtellenie de Champigny-sur-Veude, coupable du meurtre de sa femme, de complicité avec la femme de Pierre Berengier, sa maîtresse.

AN JJ. 205, n° 462, fol. 262 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 312-316

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Baillon, povre homme de labour, du lieu de la Menardière en la parroisse de Lièzes en la chastellenie de Champigny-sur-Veude, contenant que le xxviiie jour de decembre derrenier passé, nostre très cher et très amé nepveu Charles de Savoye

Ce jeune prince, né à Carignan, le 29 mars 1468, était le fils puîné d’Amédée IX, duc de Savoie, et d’Yolande de France, fille de Charles VII, mariés en 1452. Il était donc doublement neveu de Louis XI, d’abord par sa mère, puis par Charlotte de Savoie, sa tante, reine de France ; il l’était aussi du duc de Milan, Galéas-Marie Sforza, qui avait épousé son autre tante, Bonne de Savoie. Charles était d’ailleurs élevé en France par les soins du comte de Dunois auquel le roi l’avait confié. Son frère aîné Philibert Ier étant mort à l’âge de dix-sept ans, sans enfants, le 22 avril 1482, il lui succéda en qualité de duc de Savoie, sous la tutelle de Louis XI, et mourut lui-même âgé de vingt et un ans seulement, à Pignerol, le 13 mars 1489, laissant cependant de Blanche, fille de Guillaume, marquis de Montferrat, qu’il avait épousée l’an 1485, un fils Charles II, qui lui succéda, et une fille Louise-Yolande, qui devint femme de Philibert de Savoie. (Art de vérifier les dates, in-fol., t. III, p. 623.)

, estant en la terre et seigneurie de Lande lez Bloys, où jamais n’avoit esté, ès prisons duquel lieu il trouva detenu prisonnier ledit suppliant pour le cas contenu en ses lettres cy après incorporées, desquelles prisons nostredit nepveu, en usant des droiz, prerogatives et preminences, dont ont acoustumé joyr et user ses semblables et predeccesseurs du sang et linaige de la maison de France, ait à sa première venue et entrée en ladite terre et seigneurie de Lande, delivré et mis hors desdites prisons icelluy suppliant et quicté, remis et pardonné le cas pour lequel il estoit detenu prisonnier, lequel cas est à plain declairé et contenu ès dites lettres de nostre dit nepveu, desquelles la teneur s’ensuit :

Charles de Savoye, à tous presens et avenir, salut. Savoir faisons que, comme à nostre première entrée et joyeux advenement en chacune des villes et justices du royaume de France, en usant des droiz, prerogatives et preeminences que ont acoustumé joyr et user ceulx du sang et lignaige de la maison de France, nous soit loisible et appartiengne de delivrer et mettre ou faire delivrer et mettre hors des prisons tous et chacuns prisonniers detenuz en icelles, pour quelque cas que ce soit, et leur remettre, quicter et pardonner à plain, à tousjourmais, tous les faiz, cas et crimes par eulx commis et perpetrez et par quoy ilz sont detenuz prisonniers, avecques toute peine, amende et offense corporelles, criminelles et civiles qu’ilz pevent et doivent pour ce estre encouruz, et soit ainsi que nous soions venuz en la terre et seigneurie de la Lande lez Bloys où oncques mais n’avions esté ; ouquel lieu avons trouvé prisonnier ung nommé Jehan Baillon, de la Menardière en la parroisse de Lièzes en la chastellenie de Champigny sur Veude, lequel nous a fait dire et confesser estre vray que le derrenier dimanche du moys d’avril l’an mil iiiiclxxvii, après qu’il eut disné avecques ung nommé Pierre Barengier et Julienne, sa femme, en leur maison en la parroisse de la Tour Saint Gelin, et s’en ala chez luy, et bien tost après retourna chez ledit Berenger où il trouva ladite Julianne, laquelle il maintenoit et avoit maintenue six ou sept ans et eulx d’eux s’en alèrent derriere ladite maison entreprendre de faire mourir la femme d’icelluy Baillon, pour ce qu’ilz n’en povoient pas faire à leur voulenté, en disant par ladite Juliane : « Se nous ne la faisons mourir, elle vous fera mourir vous mesmes. Vous savez que mes frères vous ont menacé et cuidé tuer par plusieurs foys par le langaige d’elle ; car elle dit de nous tout le piz qu’elle peut. Et quant elle sera morte, je trouveroi bien façon après de faire mourir mon mary, et puis serons mariez ensemble. » Ausquelles choses ledit Baillon se consentit. Et après ce luy dist ladite Julianne : « Vous reviendrez au soir icy et direz à mon mary que je aille querir du blé en vostre maison et que vous nous en presterez. » Ce que fist ledit Baillon et de là s’en alla soupper chez son père, et après retourna en sa maison où il trouva sa femme qui n’estoit pas encores couchée, et attendant qu’elle se couchast, saillit hors de la maison et aussi pour venir au devant de ladicte Julianne, laquelle arriva bientost après avecques ung sien enfant aagé de cinq à six ans qu’elle mist dedans du rouzeau que ledit Baillon avoit amassé pour faire une maison. Adonc demanda ladite Julianne audit Baillon : « Que fait vostre femme ? » Luy respondit : « Elle dort. » Dist ladite Julianne : « Alons la tuer ! » Respondy ledit Baillon : « Je n’y entreray jà, je n’oseroye ; vous le ferez bien toute seulle. Elle n’a force plus que ung enfant. » Et incontinent entra dedans la maison ladite Julianne et trouva la femme dudit Baillon endormie, la print à la gorge et l’estrangla. Après saillit hors la maison et vint audit Baillon qui l’attendoit dehors ; lequel luy demanda : « Est-elle morte ? » Respondit ladite Julianne : « Oy. » Adonc entrerent eulx deux jusques à l’uys de ladite maison, et luy dist ledit Baillon : « Elle n’est pas morte, je l’ay oye crier. Retournez la achever ; car si elle demouroit ainsi, nous serions diffamez et encusez. » Ce que fist ladite Julianne, et après sortit dehors et dist audit Baillon : « Elle est maintenant toute morte. » Lequel s’écria et dist : « Nostre Dame que ferons-nous ? » Dist ladite Juliane : « Avez-vous paour ? Je feray bien qu’on cuidera qu’elle soit morte tout par elle. » Adonc entrerent dedans ladite maison et aluma ladite Julianne une chandelle de cire qu’elle avoit apportée de sa maison et la bailla à tenir audit Baillon ; puis print de la mye de pain

Par distraction, le copiste du registre a écrit « main » au lieu de « pain ».

et ung euf, puis les batit ensemble et mist sur le visaige de ladite Jehanne. Et cela fait, s’en partirent et alla ledit Baillon chez une sienne seur et luy dist : « Je cuide que ma femme est morte ! » Adonc alèrent eulx deulx en la maison dudit Baillon et la trouvèrent toute morte. Luy dist ledit Baillon : « Dictes qu’elle n’est pas achevée de mourir, quant nous sommes venuz. » Et de là alèrent ledit Baillon et sadite seur chez leur père et luy dirent que la femme dudit Baillon estoit morte. Duquel cas ledit suppliant, doubtant estre actaint et convaincu en justice …

Il y a ici une omission évidente du registre [L.C.].

se nostre bonne grace et misericorde ne luy estoit sur ce impartie. En nous humblement requerant icelle. Pour quoy nous, considerans ce que dit est, voulans misericorde estre preferée à rigueur de justice, et en usant des droiz, prerogatives, preeminences et choses dessus dictes, à icelluy suppliant avons, ou cas cy dessus, delivré, remis, quicté et pardonné, delivrons, remettons, quictons et pardonnons, de grace especial, par ces presentes, le cas et crime dessus declaré, avecques toute peine, amende et offense corporelle, criminelle et civile, en quoy pour occasion dudit cas il pourroit estre encouru envers justice, et le restituons à sa bonne fame et renommée, au pays et à ses biens non confisquez. Satisfacion faicte à partie civilement, se faicte n’est. Et sur ce imposons sillence perpetuel au procureur dudit lieu de Lande et à tous autres du royaume de France, presens et avenir. Si donnons en mandement au bailly et prevost dudit lieu de Lande, ou à leurs lieuxtenans et à tous autres justiciers et officiers de cedit royaume, ou à leurs lieuxtenans, et à chacun d’eulx, si comme à luy appartiendra, que ledit suppliant facent, seuffrent et laissent joyr et user de nostre presente grace, quictance, remission et pardon, sans le molester ou empescher, ne souffrir estre molesté ou empesché en aucune manière au contraire. Car tel est nostre plaisir et voulons ainsi estre fait. Et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours mais, nous avons signé ces presentes de nostre main et fait signer à nostre secretaire. Faict et donné audit lieu de Lande, en l’absence de nolz seaulx, le mardei xxviiie jour de decembre l’an mil iiiiclxxix.

Ainsi signé : Charles de Savoye et P. Duboys, son secretaire.

Au moien desquelles lettres ledit suppliant a esté mis hors et delivré desdites prisons, mais il doubte que, sans avoir sur ce de nous lettres de grace, quictance, pardon et remission dudit cas, confirmatoires desdites lettres de nostredit nepveu, que noz justiciers et officiers ou les aucuns d’iceulx luy voulsissent mettre et donner empeschement en la joyssance, effect et entérrinement desdites lettres et que par ce elles luy feussent illusoires et de nulle valeur et effect, si comme il dit, requerant humblement icelles noz lettres de confirmacion, quictance, pardon et remission. Pour quoy, etc. au bailly de Touraine et à tous, etc. Donné au Pleysseis du Parc, ou moys de mars, l’an de grace mil iiiiclxxix et de nostre règne le xixe avant Pasques.

Ainsi signé : Par le roy, maistre Jehan de la Vacquerie

Jean de La Vacquerie, chevalier, reçu conseiller au Parlement le 12 novembre 1479, quatrième président après la mort de Jean de Popincourt, le 30 mai 1480, remplaça en qualité de premier président Jean Le Boulanger, décédé le 24 février 1482, et après avoir exercé cet office pendant environ seize ans, il mourut à Paris au mois de juillet 1497. (L’Hermite-Souliers et Blanchard, Les éloges des premiers présidents du Parlement de Paris. Paris, 1645, in-fol., p. 43.)

et autres presens. Parent. — Visa. Contentor. Rolant. — Registrata.

MDCXLIX Mars 1480 (n.s.)

Confirmation de la rémission précédemment accordée à Gaspar Guillot, de Saint Hilaire-des-Bois, qui, huit ans auparavant, ayant été attaqué furieusement et blessé grièvement par Jean Robin, avait, en se défendant, frappé son agresseur de deux coups de bâton sur la tête dont il était mort quelque temps après.

AN JJ. 206, n° 432, fol. 99 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 317-320

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Gaspar Guillot, povre homme de labour, natif de la parroisse de Saint Ylaire du Boys en païs de Poictou, contenant que, huit ans a ou environ, ledit suppliant en la parroisse de la Gaudouynière, en l’ostel d’un nommé Mery Rayneau où il buvoit, survint illec ung nommé Jehan Robin, auquel ledit suppliant presenta à boyre, mais ledit Robin ne volt point boyre. Et après que ledit suppliant eut beu, il s’en ala en ung villaige nommé le Chasteau, auquel lieu on luy dist que, en la maison d’un nommé Jacques Grelier, où ne demouroit personne, y avoit une jeune fille de joye qui y estoit mussée. Et lors ledit suppliant se transporta en ladite maison en laquelle il trouva ladicte jeune fille, à laquelle il parla et demanda si elle vouloit aler avec luy. Laquelle luy respondit qu’elle en estoit bien contente et bailla audit suppliant ung sien chappelon et ung cuevrechief. Et ce fait, s’en alèrent en une vielle maison près d’illec, en laquelle ledit suppliant entra, cuidant que ladicte fille le suyvist, mais elle s’enfouyt et ala autre part. Et en s’en alant rencontra ledit Jehan Robin, qui la tenoit audit hostel. Et quant ledit suppliant, qui n’estoit point embastonné, issit de ladicte maison, il apperceut ledit Jehan Robin avec ladicte fille, embastonné d’une hache et d’une dague, il s’enfouyt dedans le boys de la Bresilière près d’illec, où lesdiz Robin et fille acourceurent ledit suppliant, auquel ledit Robin dist : « Demeure, ribault, car tu es mort. » Et en ce disant, ledit suppliant dist audit Robin qu’il ne luy voulsist faire aucun desplaisir. Mais néanmoins ledit Robin tira sa dicte dague et en volt fraper ledit suppliant par la poictrine ou par le ventre. Mais ledit suppliant recula, par quoy ledit Robin ne le pot fraper, se non en une cuisse où ladicte dague demoura toute une nuyt. Et non content de ce, ledit Robin bailla plusieurs cops de la dicte hache sur le visaige dudit suppliant, luy fendy toute une joue et bleça très enormement, tellement que ledit suppliant ne povoit eschapper que ledit Robin ne l’eust tué, si non que en soy reculant il trouva ung baston de chastaignier, duquel en soy defendant, il donna deux cops sur la teste dudit Robin, dont icelluy Robin cheut à terre ; aussi fist ledit suppliant qui demoura audit lieu jusques au lendemain, que ung nommé Colas Tallereau le trouva tumbé à terre, et avoit encores la dicte dague par my la cuisse. Lequel Tallereau fist tant qu’il envoya ledit suppliant en ung villaige appellé Boys Joly, en l’ostel de Loys Rason, auquel il demoura jusques à ce qu’il fut guery. Pendent lequel temps, vindrent en l’ostel dudit Rason Mathé et Guillaume Robins et ung nommé Gasches, acompaignez de troys autres qui avoient des brigandines et autres bastons invasibles, feignans estre sergens, et disoient avoir commission de prendre ledit suppliant ; et l’eussent prins, mais il trouva façon d’eschapper. Mais ilz prindrent une sienne bourse en laquelle avoit dix escus, son pourpoint, ses chausses et chappeau, et aussi emportèrent deux boysseaulx de froment, une couverte de lit et ung pot de beurre. Et après que ledit suppliant fut guery, il s’en ala demourer avec le seigneur de la Chasteigneroye

Germain de Vivonne, sr de Faye, Anville, Saint-Martin-du-Plain, etc., fils de Renaud, sr d’Aubigny et des Essarts, et de Marie de Matha, était devenu seigneur de la Châtaigneraie et d’Ardelay par son mariage avec Marguerite de Brosse, fille de Jean, seigneur de Boussac et de Sainte-Sévère, et de Jeanne de Naillac. Il rendit aveu de cette terre de la Châtaigneraie, mouvant de Mervent, au connétable de Richemont, le 16 novembre 1446 (Arch. nat., R1* 204, fol. 42) et de la moitié de la seigneurie de Grassay, terre du roi, le 28 avril 1462 (P. 1145, fol. 41 v°). Germain de Vivonne avait pris part, en mai 1451, à l’expédition de Guyenne (JJ. 185, n° 279, fol. 195) et, sur le rôle du ban de 1467 où il servit dans la compagnie du sr de Laigle, il est qualifié de messire et chevalier. Au mois de septembre 1434, il était en procès au Parlement de Poitiers avec Jean Eschalart, chevalier, et Catherine Eschalart, sa fille, au sujet de terres restées indivises entre lui et feu son frère aîné Jean de Vivonne, sr d’Aubigny, terres qui avaient été saisies sur ce dernier, lors de sa condamnation comme complice de l’enlèvement de ladite Catherine par Hector, bâtard des Essarts, en 1429. Comme argument pour obtenir la restitution de ce qui lui appartenait de ces terres, il fit valoir qu’il était âgé de douze ans seulement lors de l’enlèvement et qu’il ne pouvait être accusé d’y avoir pris part, ce qui fait remonter sa naissance à l’année 1417 environ. (X1a 9201, fol. 147 v°, 151 v°, 152 v°.) Le 25 avril 1485, plus de cinquante ans après, le sr de la Châtaigneraie était en instance pour faire contraindre les habitants de la paroisse Notre-Dame du bourg des Herbiers à faire le guet et garde au château d’Ardelay. (X1a 1492, fol. 124.) A la fin de l’année suivante, il était demandeur en cas d’excès et attentats contre Jean Vrignault, Jean Gaillard et Jean Sicard, dit le Breton. Cette affaire paraît se rattacher aux différends causés par les exigences des seigneurs qui avaient donné des terres à défricher. (X2a 51, aux 29 novembre 1486 et 30 mars 1487 ; X2a 57, 27 nov. 1486 et 15 février 1487.) Germain de Vivonne vivait encore le 31 mai 1491.

, avec lequel il demoura l’espace de troys ans. Pendent lequel temps l’en rapporta à icelluy suppliant que ledit Jehan Robin estoit alé de vie à trespas au moyen des cops qu’il luy avoit baillez en soy defendant. Duquel cas, combien que ledit suppliant ait jà pieça de nous obtenu lettres en forme de pardon, neanmoins à l’occasion de ce qu’elles ont esté perdues par ung des serviteurs de André de Vivonne

André de Vivonne, fils et héritier du précédent, fut seigneur de la Châtaigneraie, de la Mothe-Saint-Héraye, etc., conseiller et chambellan du roi et sénéchal de Poitou pendant quarante ans. Né en 1452, il mourut le 31 juillet 1532, laissant de Louise de Daillon, sa femme, fille de Jean, sire du Lude, et de Marie de Laval, quatre fils et deux filles. Nous ne citerons, relativement à ce personnage, que les actes officiels concernant son institution en qualité de sénéchal de Poitou. Le 6 mars 1492, le sr de La Châtaigneraie, ayant été pourvu de cet office en survivance de Jacques de Beaumont, sire de Bressuire (décédé le 15 avril suivant), requit le Parlement de le recevoir et de lui faire prêter serment. Mais le sr d’Argenton (Philippe de Commynes) s’y opposa, se prétendant le véritable titulaire de cet office auquel Louis XI l’avait nommé en 1476 et Charles VIII confirmé, en 1483. Il est vrai, ajoute son avocat, qu’Yvon du Fou avait obtenu subrepticement des lettres de provisions, mais devant les protestations de Commynes, il n’avait jamais pu obtenir d’être régulièrement institué, et il avait dû, ce qui était contre toutes les règles et coutumes, se faire instituer par le bailli de Touraine. Yvon du Fou étant mort, le sr de Bressuire s’était fait pourvoir à sa place sous des conditions toutes semblables. Le sr d’Argenton avait renouvelé ses protestations et le nouveau pourvu n’avait jamais été reçu au Parlement. Le Procureur du roi convient qu’un sénéchal doit, pour exercer légalement son office, être d’abord institué par la Cour et y prêter serment. Après que l’avocat du sr de La Châtaigneraie eut expliqué assez longuement la déchéance de Commynes attribuée aux condamnations qu’il avait subies et aux intrigues qu’il avait ourdies contre les princes, la Cour décida qu’avant de se prononcer les parties devront produire leurs provisions. (X1a 4832, fol. 306-309.) Les choses paraissent être restées en l’état plusieurs années. Peu après son avènement Louis XII, par lettres données à Compiègne le 9 juin 1498, confirma André de Vivonne en l’office de sénéchal de Poitou. Ces lettres furent entérinées à la Chambre des comptes le 11 septembre 1504. (Anc. mémorial X, fol. 62 v°. Bibl. nat., ms. fr. 21405, p. 248.) Enfin, le 10 décembre suivant, le Parlement donne acte au sr de La Châtaigneraie de l’octroi par le roi de nouvelles lettres (qui ne doivent être autres que celles du 9 juin 1498), par lesquelles il le confirme dans sa charge de sénéchal et au besoin l’en pourvoit de nouveau, le reçoit en cette qualité et lui fait prêter le serment accoutumé. (Arch. nat., X1a 4846, fol. 40.)

, qui les portoit par devers la justice de Poictiers, pour en avoir l’enterinement, et aussi pour ce que, pour raison dudit cas, ung nommé Pierre Robin, frère dudit feu Jehan, ès vendenges dernières, se rendit partie civile par emprisonnement à l’encontre dudit suppliant et icelluy fist mettre prisonnier ès prisons de nostre ville de la Rochelle, où il a tousjours demouré enferré et encores y est de present. Et dobte, etc. se nostre grace, etc., requérant, etc. Pour quoy nous, etc., audit suppliant avons quicté, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, etc. Donné à Paris, ou moys de mars, l’an de grace mil cccc. soixante dix neuf, et de nostre règne le xixme, avant Pasques.

Ainsi signé : Par le conseil. Amys. — Visa. Contentor. D’Asnières.

MDCL Avril 1480 (après le 2)

Rémission octroyée à Gabriel de Saint-Savin, écuyer, meurtrier de Pierre Chevalier, dit le Menuisier, braconnier, qui malgré toutes les défenses et les menaces, s’obstinait à chasser dans les garennes et à pêcher dans l’étang de la Grange-Saint-Savin, appartenant au père dudit Gabriel. Celui-ci voulant le punir et lui infliger une correction sérieuse, mais non le tuer, se fit accompagner de trois hommes armés de bâtons ferrés, et ayant surpris Chevalier, ils le battirent de telle façon qu’il en mourut.

AN JJ. 205, n° 262, fol. 146 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 320-326

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Gabriel de Saint-Savin, jeune escuier de l’aage de xxv. ans ou environ, filz aisné de Jehan de Saint Savin, chevalier, seigneur de la Grange Saint Savin

On trouvera en plusieurs endroits de nos précédents volumes des notes relatives à cette famille de Saint-Savin et sur deux des personnages mentionnés dans les présentes lettres de rémission. (Voy., en particulier, Arch. hist. du Poitou, t. XXIX, p. 299 et 341, 342 et 427 ; t. XXXVIII, p. 310, 371.) M. le baron d’Huart a donné un tableau généalogique de la branche des seigneurs de la Tour-aux-Cognons. (Persac et la châtellenie de Calais. Mémoire de la Société des Antiquaires de l’Ouest, 2e série, t. X, 1887. Poitiers, 1888, in-8°, p. 153 et 434.) Le Jean de Saint-Savin, chevalier, seigneur de la Grange, qui fut pourvu par lettres données à Paris, le 24 juillet 1418, des offices de sénéchal de Limousin et de capitaine d’Esse (t. XXIX, p. 299, note) devait être le grand-père de Jean, sr de la Grange Saint-Savin, nommé ici. Quant à ce dernier, nous n’avons sur son compte que le renseignement suivant : le 8 mars 1453 n.s., il rendit aveu à Charles Ier d’Anjou, comte du Maine, vicomte de Châtellerault, seigneur de Saint-Maixent, Melle, Civray, Chizé, Sainte-Néomaye, etc., de l’hôtel et hébergement de la Gascognolière, mouvant de Sainte-Néomaye, que lui avait apporté sa femme, Marie de « Ligners » (lisez de Liniers) qu’il avait épousée le 14 septembre 1449. Dans cet acte, il est qualifié écuyer, seigneur de la Grange, de Puy-Laurent et de la Gascognolière. (Arch. nat., P 5193, cote 1476.)

, et de Charlot Chalen, Jaquet Leclerc, et Petit Jehan Richier, contenant que ledit Gabriel de Saint Savin suppliant, qui est, comme dit est, jeune et extraict de noble et ancienne lignée, depuis qu’il a peu porter harnoys, nous a serviz en noz armées et guerres, et mesmement au recouvrement d’Arras

Au mois de mars 1477. Après la mort de Charles le Téméraire, Louis XI obligea Arras à recevoir une garnison française jusqu’à ce que Marie de Bourgogne lui eût fait hommage ; les excès commis, au nom du roi, par Olivier Le Dain pendant cette occupation exaspérèrent la population qui se souleva et chassa la garnison. La ville, assiégée par le roi, fut emportée d’assaut et ses murailles furent rasées. On sait combien durement le roi traita les bourgeois d’Arras ; il les déporta sur plusieurs points de la France et leur substitua des familles de « ménagers » de Paris, Rouen, Reims, Orléans, Tours, Poitiers, etc. Le nom même de la ville fut changé et remplacé par celui de Franchise.

où il print les fievres qui luy ont duré deux ans ou environ. Et aussi nous ont ses predecesseurs bien et honnestement servy, comme Galand de Saint Savin, chevalier, son ayeul, qui fut tué au siège d’Arfleur

Ce personnage qu’il ne faut pas confondre avec Galehaut de Saint-Savin, seigneur de la Tour-aux-Cognons, dont il est question dans notre précédent volume (p. 310, note) était le fils aîné de Jean, sénéchal de Limousin (cf. la note précédente) : nous avons signalé ailleurs plusieurs actes le concernant. (Arch. hist. du Poitou, t. XXIX, p. 299, note.) Le siège d’Harfleur, où l’on voit ici qu’il périt, était dirigé par Dunois et fut suivi de la prise de cette ville au mois de décembre 1449. A propos du mariage de son fils aîné, on lit ce qui suit dans la généalogie de la famille de Liniers : « Marie, aliàs Jeanne (4e enfant de Jean de Liniers, dit Maubruny, seigneur de la Meilleraye), épousa, le 14 septembre 1449, Jean de Saint-Savin, le même jour que Galland de Saint-Savin, chevalier, père de son époux, épousait Sibille Taveau, veuve de Jean de Liniers, son frère. » (Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 1re édit., 1840-1854, t. II, p. 304.)

, au recouvrement du pays de Normandie ; et aussi ledit Gabriel suppliant et ses predecesseurs ont esté et sont d’ancienneté très bien famez et renommez et gens de grant renom et auctorité, très fort aliez et apparantez ès pays de Poictou, la Marche, Limosin et autres pays voisins, et si ont tousjours vescuz bien et honnorablement et pacifiquement, sans ce qu’ilz aient esté rioteux ne noiseux ne avoir fait ni commis aucun villain cas, blasme, crime ne reprouche ne chose digne de reprehencion. Or est-il que ledit Jehan de Saint Savin, père dudit Gabriel suppliant, est seigneur dudit hostel noble de la Grange Saint Savin, qui est près du Dorat d’un quart de lieue ou environ, et en icellui hostel fait sa residence ; aussi a en icellui hostel une très belle garenne ancienne de grande et longue estandue. Et en ladite ville du Dorat avoit naguères ung compaignon de mestier, qui estoit d’estrange pays et du pays, ainsi que on dit, de Bretaigne, nommé Pierre Chevalier, dit le Menusier, lequel s’estoit marié en la ville du Dorat et y avoit femme et enfans, et besongnoit d’ouvrage de charpenterie et menuserie, et estoit icellui Chevalier, dit le Menusier, ung grant chasseur et par especial à l’arbaleste, et souventes fois aloit chasser à l’arbaleste et autrement dedans et à l’entour de ladite garenne et hostel de la Grange, et avoit perseveré en ladicte chasse bien l’espace de quinze ans ou environ, et estoit ung destructeur de garennes et hayronnières du pays et n’estoit gibier qu’il ne gastast à l’arbaleste, tellement que c’estoit à desplaisance quasi de tous les gentilzhommes du pays, mesmement du père dudit Gabriel, suppliant ; lequel par plusieurs foiz avoit fait dire et remonstrer audit Pierre le Menusier qu’il n’alast plus chasser à l’arbaleste en ses garennes et dangiers de la Grange, autrement qu’il luy en feroit desplaisir, s’il le y trouvoit chassant et n’en tenoit compte. Ains non obstant ladite remonstrance et par plusieurs foiz durant le temps que dessus il, comme orguileux, plain de fierté et oultrecuidance, en perseverant tousjours de mal en pis, ne voult lesser de chasser, et mesmement, le jour du mardi gras derrenier passé, ledit Gabriel suppliant estant oudit hostel de la Grange, et sondit père à Poictiers, à la poursuicte de certains procès qu’il a contre le seigneur de Sors, son frère, luy fut rapporté par l’un des serviteurs dudit hostel que ledit Pierre le Menusier estoit allé prandre ung lievre avec l’arbaleste soubz les fenestres dudit hostel de la Grange, en ung pré dudit hostel qui est quasi joignant d’icellui hostel, lequel lievre il emportoit. Et lors ledit Gabriel suppliant sortit hors dudit hostel et se mist à suivre à pié ledit Pierre le Menusier, pour luy oster ledit lièvre et pour le batre de l’outraige de villennie qu’il leur faisoit ; mais ledit Pierre le Menusier s’en fouyt par les vignes, en façon qu’il emporta ledit lièvre, et le jour mesmes le porta vendre aux bans où l’on vent la chair au Dorat. Et considerant ledit Gabriel suppliant les inhibicions et deffences par nous faictes et aussi par le sire de Beaujeu en son pays et conté de la Marche

Les lettres patentes de Louis XI portant don à son gendre Pierre de Bourbon, sire de Beaujeu, et aux héritiers de celui-ci du comté de la Marche et de la seigneurie de Montaigut en Combrailles, confisqués sur Jacques d’Armagnac, duc de Nemours, sont datées d’Arras, septembre 1477. Elles furent enregistrées au Parlement le 20 février suivant. (Arch. nat., X1a 8607, fol. 109 v°.)

, par lesquelles la chasse est deffendue à toutes personnes, mesmement à l’arbaleste, à peine de la hart, se courroussa très fort contre ledit Pierre le Menuysier et delibera en soy que, s’il le trouvoit, il luy osteroit l’arbaleste et le bateroit en façon qu’il auroit une autresfoiz paour d’aller chasser si près dudit hostel. Et afin qu’il s’en taisast et ne vint plus entour ledit hostel de la Grange, ledit Gabriel suppliant dist à plusieurs personnes que ledit Menusier leur faisoit de grans oultraiges, mais que s’il le faisoit entour la Grange, il le paieroit bien. Lesquelles menaces furent dictes et rapportées audit Pierre le Menusier, et ce par plusieurs gens de bien et par ses aliez mesmes ; mais de tout ce ledit Menusier qui estoit fier et arrogant, comme dit est, ne tint compte, ains dist que pour le père dudit suppliant ne pour icellui suppliant, il ne se tiendroit point d’y aller et ne craignoit homme. Et en entretenant tousjours son mauvais couraige, neuf jours après et le second mercredi de kareme derrenier passé, il print une gesarme en ses mains et se vint mettre et pousser pour pescher ung estans attenant dudit hostel de la Grange à ung traict d’arc et par devant la porte dudit hostel, combien que, comme dit est dessus, plusieurs luy eussent dit que ledit Gabriel suppliant le menaçoit. Et voyant ledit Gabriel la fierté et oultrecuidance dudit Pierre le Menusier et que de sesdites menaces il ne tenoit compte et s’estoit venu pousser par devant la porte dudit hostel, delibera en soy de saillir et le battre non le voulant tuer et convoqua avec luy lesdiz Chaleu, Leclerc et Richier supplians et les pria l’accompaigner pour batre ung homme qui luy avoit fait desplaisir. Et tous quatre ensemble, embastonnez de chacun ung baston ferré dont ledit Gabriel suppliant n’avoit fors que ung bracquemart à la sainture, s’en alèrent audit estang, les ungs deçà et les autres delà afin qu’il ne s’en feust. Et illec ledit Pierre le Menusier print sa gisarme et s’en voulut fouyr. Et quand ledit Gabriel suppliant vit qu’il s’en fuyoit, il dist : « Tuez le » et le firent retourner et remettre dedans ledit estang bien avant en la bourbe et illec se mist en deffence. Et alors ledit Gabriel [dit] à ses gens telles parolles : « Gardez l’estoc », et ce fait s’aproucha dudit le Menusier et luy bailla trois ou quatre coups du plat de sondit bracquemart par le visaige, et après le bleça ung peu au bras, duquel il tenoit sa gisarme ; aussi fut blecié par dessus le genoil. Et quant il se vit blecié, il requist mercy audit Gabriel suppliant, qui incontinant [ordonna] que l’on ne luy touchast plus. Et tantost après ledit le Menusier tomba en ladicte bourbe et le lessèrent lesdiz supplians avec sa femme et plusieurs autres. Et est advenu que, combien qu’il n’eust que deux playes, c’est assavoir celle du bras qui estoit petite auprès du poing, du travers d’un doy, et l’autre sur le genoil, longue de quatre doiz ou environ, qui n’estoient aucunement playes mortelles ; toutefoiz par faulte d’être bien pensé et gouverné et qu’il perdit son sang en l’eau, il mourut illec sans plus parler à personne. A l’occasion duquel cas lesdiz supplians doubtans rigueur de justice, se sont absentez du pays et n’y oseroient jamais seurement retourner, converser ne repairer, se noz grace, etc. …, que attendu l’estat et aage dudit suppliant et les oultraiges dudit Pierre le Menusier, et que ledit Gabriel suppliant en tous autres actes a vescu bien et honnestement et nous a servy en noz guerres et armées, qu’il nous plaise sur ce luy octroyer et ausdiz autres supplians nosdictes grace et misericorde. Pour quoy, etc., à nostre seneschal de Poictou et à tous, etc. Donné au Plesseiz du Parc les Tours, ou moys d’avril, l’an de grace mil iiiic iiiixx et de nostre règne le xixe, après Pasques.

Ainsi signé : Par le roy, le conte de Castres

Boffile de Juge, aventurier et homme politique, dont les premières années sont mal connues, mort en août 1502 ; il appartenait à la famille del Giudice d’Amalfi Entré au service de Louis XI en 1472, et devenu chambellan du roi dès l’année suivante, ce prince l’employa à diverses missions politiques et militaires. Après avoir pris une part prépondérante avec Yvon du Fou et le sr de Lude à la guerre de Roussillon, Boffile de Juge fut créé, en mai 1495, lieutenant général du pays, charge dont il demeura investi jusqu’en 1491. Louis XI, pour le récompenser de son zèle dans le procès de l’infortuné duc de Nemours, lui avait fait don du comté de Castres et de la seigneurie de Lézignan, confisqués sur le prince condamné, par lettres datées de Thérouanne, août 1477, enreg. au Parlement le 29 mai 1478. (Arch. nat., X1a 8607, fol. 128 v°.) Le comte de Castres trouva moyen d’épouser une sœur d’Alain d’Albret et le mariage fut célébré le 23 avril 1480. (Cf. O.-M. Perret, Boffile de Juge, comte de Castres, et la république de Venise, dans Annales du Midi, t. III, avril 1891.)

, Me Raoul Pichon et autres presens. Du Banc. — Visa. Contentor. Rolant. — Registrata.

MDCLI Avril 1480 (après le 2)

Rémission accordée à Olivier et Jean de Maussons, frères, coupables du meurtre de Salmon Bourgine, qui avait apporté à Braye, leur paroisse, une sentence d’excommunication obtenue contre ledit Olivier par Pierre Mesmeau avec lequel il était en débat.

AN JJ. 205, n° 269, fol. 151 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 326-331

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplication de Olivier et Jehan de Maussons

M.E. de Fouchier, à propos du fief de la tour de Mausson, en la paroisse de Braye-sous-Faye, et des devoirs dus par les seigneurs du lieu aux barons de Mirebeau, donne une liste des membres de la famille de Mausson qui ont possédé cette seigneurie de 1198 à 1534. Olivier n’y figure pas, mais on y trouve un Jean qualifié seigneur de la Tour de Mausson, en 1454, 1459 et 1508. (La baronnie de Mirebeau du XIe au XVIIe siècle, in-8°, p. 256-258.)

, frères, contenant que, environ la feste monsieur saint Jehan Baptiste derrenièrement passé, ledit Olivier suppliant en s’en retournant de la ville de Poictiers où il estoit alé gaigner le pardon en son hostel, qui est chacun an le jour de la Translacion monsieur Saint Hillaire audit Poictiers, passa, lui estant fort malade de fievres quartes, qui auparavant l’avoient tenu par bien longtemps, par devant l’ostel

Sic ; mots omis au registre. On voit par la suite du texte qu’il s’agit du lieu de Puygarreau : peut-être convient-il de compléter ainsi « l’ostel de [Pierre Gillier à Puygarreau] », la seigneurie appartenant alors à ce personnage, ou simplement « l’ostel [de Puygarreau] ». Pierre Gillier était seigneur de Puygarreau, comme héritier de sa tante Françoise Gillier, veuve de Jean Barbin, à laquelle celui-ci l’avait légué. Il en avait rendu hommage, le 20 octobre 1478, à Jean, bâtard d’Harcourt, seigneur de Gironde.

… Et en passant par ledit lieu, eut ung chien qui lui vint faire feste et le suivy l’espace d’une lieue ou environ ; et quant il s’apperceut qu’il le suivoit, dist à une femme estant près ledit lieu de Puigerreau, qu’elle retenist ledit chien, ad ce qu’il ne le suivist plus, et qu’il ne entendoit point l’enmener afin que celui à qui il estoit ne le perdist, et autant en dist à autres qu’il trouva en son chemin. Et peu de temps après, ledit Olivier suppliant fut eslongné dudit lieu de Puygerreau d’une lieue ou environ, ung nommé Pierre Mesmeau et un autre, dont icelui Olivier suppliant ne scet le nom, le aconsceurent et lesquelz estoient venuz à course de cheval après luy, et lesquelz luy commancerent à dire qui leur avoit emblé ledit chien, en l’appellant villain larron et lui disant plusieurs autres parolles injurieuses. Ausquelz il respondit qu’il n’estoit point villain, et sur ce se meut debat entre eulx et tellement que ledit Mesmeau et sondit compaignon poursuivoient iceluy Olivier suppliant tellement qu’ilz le contraignoient descendre de cheval à terre et soy enfouyr et mettre en une maison ou village de Sarrigny. Et lequel Olivier suppliant, soy voyant oultragé et ainsi poursuivy que dit est par le dit Mesmeau et sondit compaignon, et pour obvier à leur fureur, resister au danger de sa personne, print oudit hostel une broche de fer de laquelle il frappa en son corps deffendant ledit Mesmeau en l’un de ses bras. A l’occasion de laquelle blesseure ledit Mesmeau depuis procura tant, combien qu’il eust tort, qu’il obtint une amonicion ou nom du promoteur de l’official de nostre amé et feal conseiller l’evesque de Poictiers contre ceulx qui l’avoient blecié, qui estoit causée qu’il estoit clerc et qu’on l’avoit blecié et oultragé en terre sainte. Et laquelle amonicion il fist publier en l’église parrochial de Braye et autres parroisses voisines ; ce que venu à la notice et congnoissance dudit Olivier suppliant, il se transporta par devers ledit official de Poictiers et de lui obtint lettres d’absolucion cum retencione et jusques à ce qu’il eust partie formelle contre lui. Et depuis ledit Olivier de Maussons n’en ouyt parler ; aussi n’en fist ledit Mesmeau aucune poursuite contre lui, sachant qu’il avoit tort et que ledit Olivier l’avoit blecié en corps deffendant, et jusques à ce que le derrenier jour de mars derrenier passé, ledit Mesmeau envoya ung nommé Salmon Bourgyne, homme de bras, parroissien de Saint Jehan de Souzay, aporter au curé de ladicte église parrochial de Braye dont lesdiz Olivier et Jehan de Maussons, supplians, sont parroissiens … pour icelle publier le lendemain en ladicte église. Et laquelle excomminge ou double d’icelle fut baillée audit curé, combien que ledit Olivier suppliant eust esté absolz, comme dit est. Lequel curé, ledit derrenier jour de mars bien matin, le fist assavoir audit Olivier, suppliant, et qu’il alast parler à luy. Lequel Olivier et ledit Jehan de Maussons, frères, supplians, eulx estans encores au lit où ilz avoient jeu icelle nuyt, se levèrent, alèrent audit lieu de Braye, distant de la demeure de leur père et d’eulx de demy quart de lieue ou environ, pour savoir qui estoit celui qui avoit apportée ladicte amonicion ou le double d’icelles, afin d’empescher qu’elle ne fust publiée ; et aussi avant (sic) qu’ilz alassent demander audit curé où estoit celui qui avoit apporté ledit excomminge (sic), lequel leur respondit qu’il s’en estoit alé et povoit bien estre à deux lieues de là. Et pour ce que lesdiz Olivier et Jehan de Maussons pensèrent que ledit Salmon mesnager portast ledit excomminge audit (sic) lieu de Faye où il y avoit grant assemblée de peuple celui jour, ils alèrent après ledit Salmon et le aconsceurent en chemin à ung quart de lieue dudit Braye ou environ. Et incontinant que ledit Jehan de Mausson fut arrivé le premier, pour ce qu’il chevauchoit devant, il se descendit de cheval et dist audit Salmon : « Demeure. » Auquel ledit Salmon respondit : « Pourquoy demoureray-je ? » En hayne de laquelle responce ledit Jehan de Mausson suppliant bailla audit Salmon ung cop du plat de son espée sur l’espaule, sans lui faire aucun mal, mais seulement pour le faire demourer, afin de recouvrer de lui ladicte excomminge afin qu’elle ne fust plus publiée, pour ce qu’il estoit près de la feste de Pasques et eviter le scandalle. Et après lequel cop de plat d’espée ainsi baillée audit Salmon, icelui Salmon s’efforça ferir ledit Jehan suppliant à tour de bras d’un gros baston qu’il avoit, mais ledit Jehan de Mausson l’empescha ou son espée au mieulx qu’il peut, et en resistant icelui Jehan, soy voyant oultragé, bailla ung cop de taille de sadicte espée sur les espaulles dudit Salmon, duquel ledit Jehan de Mausson luy coupa son baston sans le blecier autrement que sur l’espaulle. Et auquel cop ferir vint ledit Olivier de Mausson, frère aissé (sic) dudit Jehan, pour lui secourir et aider à son povoir, et dist qu’il lui convenoit bailler une taille sur le geret de la jambe, afin qu’il ne s’en fouyst pour publier ledit excomminge. Ce que oy par ledit Salmon, incontinant s’en fouyt. Et quant lesdiz Jehan et Olivier de Maussons supplians virent fouyr ledit Salmon, icelui Olivier suppliant estant tout à cheval suyvit ledit Salmon et lui donna ung cop ou deux sur les espaules du plat d’un costeau appelé penart, qu’il a accoustumé porter à sa saincture, sans lui faire aucune incision ne blesseure. Et pour ce que ledit Salmon leur disoit, en s’en alant et fuyant tant qu’il povoit pour gaigner le bois, qu’ilz ne le tenoient pas encores, cuidans certainement iceulx supplians qu’il le fist pour faire denoncer et publier ladicte excomminge audit lieu de Faye, ou autrefoiz il l’avoit portée pour ce faire, comme l’en dit, ledit Jehan de Mausson, poursuyvit ledit Salmon tellement qu’il le fist passer ung fossé, et en ce faisant lui bailla ung cop du plommeau de sadicte espée par l’estomac ; ce que voyant ledit Salmon se retourna et s’efforça de prendre ledit Jehan de Mausson au corps pour le cuider tomber audit fossé soubz luy, pour le oultrager et occire, mais ledit Jehan de Mausson, qui fut le plus legier, y resista, et pour eviter le peril de sa personne et à ce que ledit Salmon ne l’oultrageast et qu’il n’alast publier ladite excomminge audit lieu de Faye, luy bailla un cop du taillant de son espée au costé de l’une des jambes, au dessus de la cheville du pié, comme deux doiz ou environ. Et ce fait, lesdiz Jehan et Olivier de Maussons supplians se departirent d’illec et s’en retournerent en la maison de leur père, où ilz sont demourans. Et depuis ledit Salmon se achemina et ala près de demy traict d’arc, où illec il demoura par aucune espace de temps, et depuis fut emporté en un maison près d’illec, moillé de l’eaue dudit fossé où il estoit passé, sans avoir esté habillé ne estanché du sang, ne gouverné par cirurgiens ne barbiers, quoy que soit, à heure ne à temps, par le moien desdiz coupz ou par default dudit bon pensement, gouvernement ne autrement, peu de temps après il ala de vie à trespas. A l’occasion duquel cas, lesdiz supplians, doubtans rigueur de justice, se sont absentez de ce païs et n’y oseroient jamais retourner, demourer ne soy tenir ailleurs seurement en nostre royaume, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, en nous humblement requerant icelle. Pour quoy, etc., au bailli de Touraine et des ressors et exempcions d’Anjou et du Maine, ou a son lieutenant et à tous, etc. Donné au Plesseys du Parc lez Tours, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. quatre vingts, et de notre règne le dix neufiesme.

Ainsi signé : Par le roy, le conte de Marle, les sires du Bouchage, de Segré

Pierre de Rohan, sire de Gyé, comte de Marle : Ymbert de Batarnay, sr du Bouchage, et Jacques d’Espinay, sr de Segré. (Cf. ci-dessus, p. 65, 78 et 111 et notes.)

et autres presens. Le Mareschal. — Visa. Contentor. Rolant.

MDCLII Mai 1480

Rémission en faveur de Mathurin Bernard, jeune laboureur de dix-sept ans, qui, en revenant de porter du bois à Bressuire, avait été cause de la mort accidentelle d’un enfant de quatre ans, écrasé, dans une rue de la ville, par la roue d’une des charrettes qu’il conduisait.

AN JJ. 207, n° 75, fol. 36 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 331-332

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Mathurin Bernard, filz de Marquis Bernard, povre simple homme de labour, aagé de xvii. ans ou environ, contenant que, le samedi xxiie jour du moys d’avril derrenier passé, ledit suppliant, qui est laboureur à beufz et coustumier de conduire et mener les beufs et charète de sondit père, ala en la ville de Bressuire avec sondit père et autres charretiers qui ledit jour y charroyerent et menèrent plusieurs charrètes de boys, lesquels charrètes ilz descendirent et deschargèrent en la maison de Jehan Beauchaire, marchant de ladite ville, en laquelle maison ledit suppliant laissa sondit père ; et en s’en retournant d’icelle maison, trouva, en la rue estant près et devant les halles dudit lieu de Bressuyre, la charète de Jacques Greslier, mary de la sœur dudit suppliant, vuyde et deschargée dudit boys, laquelle charrete ledit suppliant, sans le commandement dudit Greslier ne de sondit père et en leurs absences, pour faire plaisir audit Greslier, il fist charroyer et tirer avecques lesdiz beufz, pour la conduire et mener hors de ladicte ville de Bressuire et la lui mener en sa maison. Et en conduisant icelle charrete avec lesdiz beufz, quant iceulx beufz furent en ung carrefour de la rue appellée la rue de la Pasrie en ladicte ville de Bressuire, de peur qu’ilz eurent d’aucuns passans par ladicte rue ou autrement, se destournèrent de la rue et chemin par ou ledit suppliant les convoioit oultre son gré et voulenté, et par cas fortuit la rue de ladicte charrète rencontra et print au coing de ladicte rue, encontre la muraille d’un jardin ou maison, entre elle et ledit mur ung jeune enfant de l’aage de quatre ans ou environ, filz de Benoist Audet, demourant audit lieu de Bressuire, sans ce que ledit suppliant l’eust veu ne apperceu auparavant en ladicte rue ; à cause de laquelle prinse ledit enfant fut tellement froissé et murdry que peu de temps après il alla de vie à trespas. A l’occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté, etc. Pour quoy, etc. Au seneschal de Poictou ou à son lieutenant et à tous, etc. Donné à Estampes, ou moys de may, l’an de grace mil cccc. quatre vings, et de nostre règne le xixe.

MDCLIII Mai 1480

Rémission accordée à Pierre Dupuy, laboureur, meurtrier de Pierre Du Solier. Celui-ci et ses frères ayant abattu la clôture d’un héritage appartenant audit Dupuy et à ses frères et cousins, il en résulta entre les deux familles une violente querelle qui dégénéra en mêlée générale, dans laquelle Pierre Du Solier fut mortellement frappé.

AN JJ. 206, n° 463, fol. 107 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 332-335

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Pierre Dupuy, laboureur, aagé de xxxv. ans ou environ, chargé de femme et enfans, contenant que luy et ses coheritiers à cause de certain heritaige à eulx appartenant ont autres fois tractié et appoincté à Jehan dit Johannet, Marcial, Jehan dit Gaillard, feu Pierre et l’autre Pierre dit Garrige du Solier, frères, de faire certaine cloison, oultre laquelle iceulx du Solier ne seroient tenus de passer pour venir audit heritaige audit suppliant appartenant et à ses consors, sans leur congié et licence. Mais ce non obstant iceulx du Solier, de leur auctorité privée et en venant contre ledit appoinctement, ont fait plusieurs entreprinses sur ledit heritaige en rompant ladicte cloison et couppant certain chesne, audit suppliant et à ses consors appartenans, et à l’occasion de ce sont meues certaines noises et debatz entre lesdictes parties, et tellement que, ainsi que Jehan, Marcial et Leonard Dupuy, enfans de Symon Dupuy, consors dudit suppliant, charioient atout leurs beufz et charrète certaines pièces qu’ilz avoient prinses de leurdit heritaige, survint à eulx ledit Marcial du Solier atout une sarpe emmanchée, et print noise et question à eulx et leur dist entre autres choses qu’ilz seroient galez, et tout courant retourna vers sa maison querir sesdiz freres. Et ce voyant, lesdiz Jehan, Marcial et Leonard Dupuy, craignans la fureur desdiz du Solier, lesquelz ou les aucuns d’eulx avoient jà autresfoiz batu ledit Marcial Dupuy et aussi ledit suppliant en plusieurs parties de son corps, deslyèrent leurs beufz et les mirent en leurdit heritaige ainsi cloz. Et cependant ledit Jehan Dupuy ala [à la] maison le dire oudit Symon Dupuy, son père, et à ses autres frères. Et lors icelluy Symon avec ledit Jehan son fils s’en alèrent vers ledit cloz où ilz trouvèrent lesditz du Soulier qui jà avoient rompu et abatu ledit cloz ; ausquelz ledit Symon Dupuy dist gracieusement qu’ilz faisoient mal de luy abatre ledit cloz, mais lesditz du Solier respondirent qu’ilz le romproient, voulsist il ou non, et en despit de son visaige. Et lors survint Thomas Dupuy, frere dudit Symon, qui dist ausdiz du Soulier que c’estoit mal fait et qu’ilz leur faisoient grant tort et qu’ilz se deportassent et s’en alassent ; mais ledit Jehan du Solier, respondit qu’il ne s’en iroit pas pour luy, et en ce disant, ledit Pierre du Solier d’une coignée s’efforça de fraper ledit Jean, filz dudit Symon Dupuy, mais Agnès du Solier, sa sœur, et Marguerite, femme dudit Marcial du Solier l’en gardèrent. Auquel bruit survint ledit Pierre Dupuy, suppliant, filz de Michau Dupuy, lequel leur dist telles parolles : « Hé ! chenaille, nous voulez vous tuer ? » Lors lesdiz du Solier dirent à une voix telles parolles : « A cestuy, à cestuy ! » et en ce disant, le voulurent charger et batre. Lequel suppliant ce voyant, en soy defendent frapa ung cop d’une furche qu’il avoit en sa main sur la teste de Jehan dit Gaillard du Soulier, et aussi ledit Jehan, filz dudit Symon Dupuy, pour descharger ledit suppliant, gecta une pierre contre ledit Garrige du Solier, mais ne l’en frappa point. Et en ce faisant, soubdainement lesdiz du Solier se gecterent sur lesdiz Dupuy et se meslèrent les ungs entre les autres tellement que, ainsi que ledit Pierre du Solier vouloit fraper ledit Marcial Dupuy d’une coignée sur la teste, ledit Marcial mist un baston de couldre qu’il tenoit au devant et destourna ledit cop. Lequel Pierre du Solier print ledit Marcial Dupuy et à grans cops de poing se print à le fraper sur la teste, en s’efforçant le gecter à terre. Et lors ledit Lyenard Dupuy, pour descharger ledit Marcial, son cousin, frapa d’une barre ledit Pierre du Solier ung cop sur les reins, et par ce moyen ledit Pierre du Solier lascha ledit Marcial et cheut à terre ; et ainsi qu’il se relevoit, ledit Jehan Dupuy, filz dudit Symon, donna deux cops audit Pierre du Solier d’un baston de couldre, ung sur le bras et l’autre sur la cuisse, et en ce conflict ledit Pierre Dupuy, suppliant, ainsi que ledit Pierre du Solier se relevoit et comme il estoit assis, luy donna deux cops d’une fourche de boys sur la teste dont il recheut d’assis à terre couché. Au moyen desquelz cops ledit Pierre, par faulte de gouvernement ou aultrement, le lendemain, ala de vie à trespas. A l’occasion duquel cas ledit suppliant s’est absenté, requerant, etc. Pour quoy nous, etc., audit suppliant avons quicté, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, etc. Donné à Paris, ou moys de may, l’an de grace mil cccc. quatre vings, et de notre règne le xixme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. Rolant. — Visa. Contentor. Le Clerc.

MDCLIV Août 1480

Rémission octroyée à Pierre Aymar et Huguet, son neveu, fils de Jean Aymar, pour leur participation au meurtre de Martin Mousnier, couturier, qui, avec Pierre Barrière, avait rompu les murailles d’une masure leur appartenant à Champagné, et, non content de cela, usait de violence pour les empêcher de réparer les dégâts.

AN JJ. 206, n° 556, fol. 128 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 335-336

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Pierre Aymar, Huguet Aymar, son nepveu, filz de Jehan Aymar, contenant que ausdiz Pierre Aymar suppliant et à Jehan Aymar et à leurs parsonniers appartient une masure assise en la grant rue Saint-Michel de Champaigné, et de laquelle ilz ont joy et leurs predecesseurs par l’espace de lx. ans et plus sans contredit ; et ce non obstant, le xiiiie jour de juillet derrenier passé, feu Martin Mousnier, cousturier, et Pierre Barrière rompirent les murailles de ladicte masure, et le lundy xvie jour dudit moys au matin, lesdiz supplians s’en alèrent besoigner dans ladicte masure et la rebastir desdits murailles. Et ainsi qu’ilz y besoignoient, y survint ledit Jehan Aymar, père dudit Huguet, qui semblablement y besoigna, et print la trenche dudit Huguet son filz, pour en besoigner. Et tost après y survindrent ledit feu Martin Mousnier et Pierre Barrière, lequel feu Mousnier de felon courage entra dans ladicte masure sans mot dire et rompit le mur par où il passa, et au regard dudit Barrière, il demeura dehors. Et se prindrent lesdiz Mousnier et Barrière à rompre lesdictes murailles et en abatirent partie, en disant ausdiz supplians et Jehan Aymar qu’ilz besoignoient en leurs heritaiges. Lesquelz firent response que lesdiz heritaiges leur appartenoient, et non ausdiz Mousnier et Barrière. Mais ce non obstant, lesdiz Mousnier et Barrière firent pis que devant de rompre lesdictes murailles. Laquelle chose, voyant, ledit Jehan Aymar dist audit feu Martin Mousnier qu’il ne faisoit pas bien de rompre lesdictes murailles et qu’il sortist du lieu où il estoit. Lequel feu Mousnier respondit qu’il n’en feroit riens, et sur ce eurent plusieurs parolles, en disant lesquelles ledit Huguet suppliant qui besoignoit du cousté où estoit ledit feu Martin Mousnier et Barrière, se tira devers ledit Jehan Aymar, son père. Et voyant ledit Jehan Aymar que ledit feu Mousnier estoit homme noyseux et dangereux de fraper, et ne demandoit que noyse, doubtant la fureur dudit feu Mousnier, icelluy Jehan Aymar d’une trenche dont il besoignoit le frapa sur la teste ung cop ou deux, dont icelluy feu Mousnier cheut à terre et incontinent fut emporté en sa maison, et huit jours après, par faulte de gouvernement ou autrement, est alé de vie à trespas. A l’occasion duquel cas lesdiz suppliant se sont absentez, requerans, etc. Pour quoy nous, etc., ausdiz supplians avons quicté, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, etc. Donné à Paris, ou moys d’aoust l’an de grace mil cccc. quatre vings, et de nostre règne le xxme

Cf. ci-dessous une autre rémission du même cas, donnée en faveur de Jean Aymar le père, au mois d’avril 1481, avant Pâques, et dont le commencement est plus explicite.

.

Ainsi signé : Par le roy, a la relacion du Conseil. — Visa. Contentor. D’Asnières.

MDCLV Août 1480

Rémission accordée à Nicolas Gendrot, écuyer, qui, se trouvant, avec le ban et arrière-ban de Poitou, logé à Arnay en Bourgogne, avait eu une querelle avec Gilles Le Bâcle, et celui-ci l’ayant attaqué et contraint à se défendre, il l’avait tué d’un coup de javeline.

AN JJ. 206, n° 626, fol. 143 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 336-340

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Nicolas Gendrot

Fils aîné d’André Gendrot récemment anobli (lettres patentes de février 1479, n.s., imprimées ci-dessus, p. 247) et de Catherine Exarton, Nicolas, alias Colin, rendit aveu du fief de la Thimarière à Jean Le Martin, le 24 mai 1471. (Arch. de la Vienne, En 631, n° 8.) Le 13 octobre 1483, il fit hommage du fief de Bilazais, mouvant de la vicomté de Thouars, et servit comme homme d’armes à l’arrière-ban du Poitou en 1488. (Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. IV, p. 46.) On le retrouve trois ans plus tard, qualifié chevalier, habitant dans la châtellenie de Mauléon, parmi les nobles du ressort de la vicomté de Thouars, dont la montre fut reçue, le 12 décembre 1491, par Jean de Beaumont, seigneur de Glenay, « commis, député et ordonné pour ce faire » par le sire de Bressuire, chambellan du roi et sénéchal de Poitou, chargé par le roi de la convocation de l’arrière-ban. (Roolles des bans et arrière-bans de la province de Poictou, Xaintonge et Angoumois. Poictiers, in-4°, 1667. Réimpr. à Nantes, 1883, p. 55.) Un récit beaucoup plus circonstancié de l’affaire dont il est question dans le présent acte est narré dans d’autres lettres de rémission données en faveur de Louis Ojart, écuyer, au mois de mai 1481, dont le texte est publié ci-dessous (n° MDCLXXX). Le 8 juin 1487, Nicolas Gendrot était ajourné en personne au Parlement, sous peine de bannissement et de confiscation, ainsi que Jean Chaudrier, par Nicolas Boneron, curé de Noirterre, qui les accusait de « crimes, excès et maléfices, non autrement spécifiés ». (Arch. nat., X2a 51, à la date.)

, escuier [contenant] que, après le ban et arrière ban crié de par nous en ceste presente année au païs de Poictou, ledit suppliant comme noble dudit païs fut receu par nostre amé et feal conseiller le sire de Bressuyre

Jacques de Beaumont, sire de Bressuire, sur lequel cf. le vol. précédent, p. 316, note.

, cappitaine desdiz nobles et pour nous, servir et aler en noz guerres, se trouva avec aucuns autres nobles, ou moys d’avril derrenier passé au villaige d’Arnay soubz Vitteaux en Bourgoigne ; entre lesquelz estoit audit villaige ung nommé Gilles Le Bacle

Ce Gilles n’est même pas mentionné dans les notes généalogiques sur la famille Le Bâcle de Touraine, publiées par L’Hermite Souliers (Inventaire de l’histoire généalogique de la noblesse de Touraine, in-fol., p. 342 et s.), reproduites en partie par MM. Beauchet-Filleau. Ce nom ne se trouve pas non plus dans le fragment de généalogie de l’autre famille Le Bascle de Thouarsais, donné aussi par le Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. Ier, p. 315.

. Et avoient esté ledit suppliant et autres loigiez audit villaige par fourrier, et avoit esté dit et ordonné que nul desditz loigiez ne fourrageroit point le loigiz de l’autre, maiz ce non obstant ledit Gilles Le Bacle par aucun de ses gens fist prendre à l’une des hostesses dudit suppliant neuf poulles, qui estoit tant qu’elle en avoit ; et avec ce fist destrousser le varlet de son hoste et luy oster sa bourse et son argent. Par quoy lesdiz hoste et hostesse vindrent devers ledit suppliant et ceulx de sa chambre et leur requirent que, puis qu’ilz les fournissoient et qu’ilz leur avoyent esté baillez par tele condicion que nul autre ne le deust fourracher ne piller, qu’il leur pleust de leur faire rendre lesdictes polles et argent. Et à ceste cause, ledit suppliant et ses compaignons furent meuz d’envoyer devers ledit Le Bacle, afin de ravoir lesdiz biens. Sur quoy ledit Le Bacle fist response que, mes que ses gens fussent venus de fourraige où ilz estoient alez, que il feroit tout rendre. Par quoy ledit suppliant et ses compaignons furent contens par celle foiz, esperans que ledit Le Bacle feist rendre lesdiz biens ainsi que promis l’avoit ; dont toutesfois il ne fist riens. Et à ceste cause, ladicte hostesse revint devers ledit suppliant et sesdiz compaignons plourant, disant qu’elle ne povoit ravoir sesdictes gellines et que pour Dieu ilz les luy feissent rendre, ainsi que tenus y estoient. Par quoy ledit suppliant fut meu d’aler parler audit Le Bacle et luy remonstrer gracieusement le tort que sesdiz gens faisoient à sesdiz hoste et hostesse ; et luy arrivé devers ledit Le Bacle, pour ce que icelluy Le Bacle disoit, avec aucuns autres, qu’ilz iroient prendre des canetons sauvaiges, ledit suppliant, par manière de joyeuseté, dist telles parolles audit Le Bacle : « Se vous saviez aussi bien prendre les canetons sauvaiges comme les poulles, il n’en demourroit nulz en ce quartier. » Et tout incontinent ces parolles dictes [icellui Le Bacle] et troys ou quatre autres ses aliez, armez et embastonnez vindrent contre ledit suppliant, disant par ledit Le Bacle : « Que voulez-vous dire des polles ? » Et ledit suppliant respondit gracieusement que ce n’estoit pas bien fait de les avoir prinses, veu que la femme à qui elles estoient, luy estoit demourée pour le fournir et pourveoir en partie des vivres de luy et de ses compaignons. Et lors ledit Le Bacle et sesdiz aliez passèrent soubdainement vers ledit suppliant en luy demandant par grant arrogance qu’il vouloit dire des poulles, tenant leurs espées et faisant semblant de les tirer. Et ledit suppliant, voyant leur fureur, se print à reculer en leur disant qu’ilz n’approuchassent point de luy, et que qui le assauldroit, il se défendroit. Ce non obstant ledit Le Bacle et ses aliez le poursuyvirent, regnyant Dieu qu’ilz le tueroient et cryans à haulte voix : « Dessus, dessus ce ribault, tuons le ! » Lors ledit suppliant se print à fouyr et se bouta dans une grenche ; et ainsi qu’il entroit en ladicte grenche, luy fut baillé d’une javeline ung cop d’estoc par le cousté, dont il eust esté tué, n’eust esté qu’il avoit ses brigandines. Et quant il fut en ladicte grenche, fut contrainct a garder l’uysset, afin que ledit Le Bacle ne ses gens n’y entrassent, qui continuellement le agressoient et regnyoient Dieu qu’ilz le tueroient. En quoy faisant, ledit Le Bacle couppa de son espée presque le baston de la javeline dudit suppliant, et par ce moyen ledit Le Bacle cuida entrer en ladicte grenge. Et quant ledit suppliant vist qu’il ne povoit plus fouyr qu’il ne fust meurtry, frapa ledit Le Bacle de sa javeline ung cop au cousté dextre, dont il fut contraint se retirer arrière dudit huisset, tenant tousjours son espée nue, en frapant sur ung nommé Luylier, compaignon dudit suppliant, qui estoit hors de ladicte grenge, tellement qu’il le bleça et mutila très enormement. Et une heure après, par faulte de gouvernement ou autrement, ledit Le Bacle ala de vie à trespas. Pour occasion duquel cas ledit suppliant s’est absenté, requerant, etc. Pour quoy nous, etc., audit suppliant avons quicté, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, etc. Donné à Paris, ou moys d’aoust l’an de grace mil cccc. quatre vings, et de nostre règne le xxme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. Villechartre. — Visa. Contentor. Le Clerc.

MDCLVI Août 1480

Rémission en faveur de Jean Peraton, meunier, et de quatre autres habitants de Neuvy, qui, chargés de recueillir les dîmes du curé de ladite paroisse, avaient été obligés de s’armer pour repousser l’agression d’une troupe envoyée par Michel Esteau, dans le but de s’opposer à leur récolte ; dans la lutte, outre de nombreux blessés de part et d’autre, deux des agresseurs avaient été tués sur place.

AN JJ. 206, n° 627, fol. 143 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 340-342

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Jehan Peraton, musnier, Gillet Servant, boucher, Guillaume Coillebault, François Yllairet, tanneurs, et André Gaubert, dit Verrier, laboureur, povres gens, contenant que, le mardy xie jour de juillet derrenier passé, ainsi qu’ilz disnoient au presbitaire de Neuvy au païs de Poictou, où ilz estoient alez pour aider à recueillir les dismes de ladicte cure, leur fut dit que les gens de maistre Michel Esteau

Ce personnage, quoiqu’on ne lui donne pas ici son titre, paraît devoir être identifié avec Michel Esteau, bachelier en lois, qui, dès le 22 octobre 1472, était châtelain ou juge de la châtellenie de Parthenay, pour le comte de Dunois, et exerça cet office jusqu’en 1495, dit M. Ledain (la Gâtine historique, p. 361), jusqu’en 1500 au moins, suivant la nouv. édit. du Dictionnaire des familles du Poitou (t. III, p. 312, 313). M. Richard mentionne une sentence de juillet 1484 rendue par ledit Esteau, en cette qualité, condamnant le fermier de Lasterie à payer certaines rentes à Jean Aymeri comme administrateur de ses deux filles (Archives du château de la Barre, t. II, p. 384). Michel Esteau servit comme brigandinier à l’arrière-ban de Poitou de 1488. De Catherine Boutin, sa femme, il eut trois fils, dont l’aîné, Aimery, fut chanoine et chantre de Sainte-Croix de Parthenay.

chargoient en la grenge du curé de ladicte cure les gerbes estans en icelle grenche. Et pour ce que lesdiz supplians avoient sceu que le jour precedent ledit Esteau et Colas Baignon, accompaignez d’autres en grant nombre, armez et embastonnez, s’estoient transportez audit presbitaire, cuidans trouver ledit curé et ses gens pour les oultrager, et que pour ce qu’ilz ne les trouvèrent, s’en estoient alez usans de grans menasses, lesdiz supplians craignans leurs personnes, et afin qu’ilz ne fussent oultragez, prindrent c’est assavoir ledit Servant ung espieu et demy manches de cotte de maille, ledit Coillebault unes brigandines qui estoient en l’ostel dudit curé avec une demy lance, ledit Yllairet unes autres brigandines qui estoient audit hostel, et aussi luy et ledit Peraton chacun une javeline avecques une espée, et ledit Gaubert ung braquemart, et tous ensemble saillirent hors dudit presbitaire, et eulx estans ainsi dehors virent ung nommé Jehan le Puissant l’aisné et Jehan le Puissant le jeune, frères, et autres jusques au nombre de xv. ou xvi. personnes armez et embastonnez d’arbalestes, vouges, espieux, espées, javelines et autres bastons invasibles, aliez et complices dudit maistre Michiel Esteau, ausquelz lesdiz supplians demandèrent que ilz demandoient. Et lors ledit le Puissant l’aisné commença à cryer sur lesdiz supplians : « Tuez, tuez, desbendez ! » et de fait ledit Puissant d’un arc qu’il tenoit tira une flèche contre lesdiz supplians, dont ledit servant suppliant fut actaint, et ung autre de la compaignie frapa d’une forche de fer ledit Coillebault suppliant en la poictrine et ung autre frapa d’un trait d’abaleste ledit Yllairet suppliant et n’eussent esté lesdictes brigandines qu’il avoit vestues, il eust esté tué. Pareillement ledit Puissant le jeune bleça au bras ledit André Gaubert suppliant d’un vouge qu’il avoit. Et voyans lesdiz supplians qu’ilz estoient ainsi agressez et oultragez sans cause et en grant dangier de leurs personnes furent contrainctz eulx mettre en defense, en quoy faisant y ot plusieurs cops ruez, tant d’un cousté que d’aultre, tellement que audit conflict ledit Jehan le Puissant l’aisné et Jehan le Puissant le jeune, frères, si furent tuez en la place ; et au regard des autres, tant d’un cousté que d’autre, il y en ot plusieurs de bleciez et navrez. Et combien que ledit cas ait esté commis par lesdiz supplians en leurs corps defendant et que lesdiz defunctz et leurs aliez fussent agresseurs, neanmoins ilz dobtent, etc., se nostre grace, etc., requerans, etc. Pourquoy nous, etc., ausdiz supplians avons quicté, etc. Si donnons en mandement au senechal de Poictou, etc. Donné à Paris, au moys d’aoust l’an de grace mil cccc. quatre vings, et de nostre regne le xxme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. Villechartre. — Visa. Contentor. D’Asnières.

MDCLVII Août 1480

Rémission accordée à Henry de La Salle, écuyer, homme d’armes de la compagnie d’ordonnance du capitaine François de La Sauvagère, qui avait frappé d’un coup d’épée mortel, à Verneuil, Jean Grelot, dit des Monceaux, homme de labour, son débiteur, parce que celui-ci, prié de payer ce qu’il lui devait, avait répondu arrogamment et par un démenti.

AN JJ. 209, n° 167, fol. 97 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 342-344

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre ami Henry de La Salle

On ne saurait dire si ce personnage appartenait à la famille du célèbre Gadifer de La Salle, chevalier poitevin qui fit la conquête des îles Canaries avec Jean de Béthencourt, ni même s’il convient de l’identifier avec Henry de La Salle, écuyer, qui, en 1477, faisait partie de la compagnie de Morice du Mené, au service du duc de Bretagne (compte de Guillaume de La Croix de cette année, publié par dom Morice, Hist. de Bretagne, Preuves, t. III, col. 326). Toujours est-il que dès avant le 12 décembre 1479, notre Henry de La Salle servait en qualité d’homme d’armes, sous le seigneur de la Sauvagère. (Cf. la note qui suit.)

, escuier, homme d’armes de nostre ordonnance soubz la charge de nostre amé et feal cappitaine Françoys de La Sauvagiere

On conserve aux Archives nationales l’original d’une « monstre et reveue faicte devant Bethune le xie décembre mil quatre cens soixante dix neuf de quatre vingt seize hommes d’armes et deux cens archers du nombre des cent lances fournies de l’ordonnance du roy, estans soubz la charge et conduicte de François de La Sauvagère, conseiller et chambellan d’icelluy seigneur, par nous, Jehan, seigneur de Baudricourt, aussy conseiller et chambellan dudit seigneur, bailly de Chaumont et son lieutenant en la ville de Franchise et pays d’Artois … » (K 72, n° 33.)

, contenant que, pour appaiser certain procès meu entre ledit suppliant, d’une part, et deffunct Jehan Grelot, dit des Monceaux, laboureur, demourant en la parroisse de Vernueil, d’autre part, fut, par le moyen d’aucuns leurs amys, accordé et appointé que, pour les fraiz euz et soustenuz audit procès par ledit suppliant, ledit des Monceaux paieroit audit suppliant la somme de cent escuz, et en ce faisant le principal dont il estoit question entre eulx demourroit audit des Monceaux ou aux siens ; desquelz cent escuz lui en furent lors payez contant dix huit, et le reste desdiz cent escuz lui en fut promis payer par lesdiz des Monceaux dedans certain temps lors avenir, comme par lettres sur ce faictes et passées par devant notaire, en presence de tesmoings, peut apparoir. Or est il ainsi que, le mercredi devant la feste [saincte] Marie Magdalene derrenierement passée, ainsi que ledit suppliant revenoit à cheval de ses affaires, rencontra d’avanture, ou bourg dudit lieu de Vernueil, ledit des Monceaux, auquel ledit suppliant demanda gracieusement le reste qu’il lui devoit desdiz cent escuz ; à quoy ledit des Monceaux, qui n’estoit que ung homme de labour, respondy fièrement et orguilleusement qu’il ne lui devoit riens. Et ce oyant icelui suppliant, lui dist tout doulcement qu’il savoit bien que si faisoit ; mais ledit des Monceaux respondy de rechef arroganment audit suppliant qu’il avoit menty. Et se voyant par ledit suppliant, qui est homme noble, ainsi dementy, villipendé et oultragé par ledit des Monceaux, homme rural, pour demander le sien, fut fort esmeu et courroucé, et desplaisant desdictes parolles, descendit de dessus son cheval et se mist à pié. Et pour ce que ledit des Monceaux persistoit tousjours en ses oultrageuses et villaines parolles, ledit suppliant tira son espée et ainsi qu’il cuidoit frapper du plat d’icelle ledit des Monceaux sur la teste ladite espée lui tourna en la main, tellement qu’il le blessa. A l’occasion de quoy, ledit des Monceaulx, par deffault de bon gouvernement et d’estre bien pensé ou autrement, est allé de vie à trespas. Pour raison duquel cas, iceluy suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du pays et n’y oseroit, etc., se noz grace, etc., humblement requerant que, attendu que tout son temps, il nous a bien et loyaument servy ou fait de noz guerres, et depuis ung an ença a esté prins prisonnier par noz rebelles et desobeysans [subjects, et] lui a convenu payer grant finance pour ses delivrances, qu’il n’avoit aucune intencion de tuer ledit deffunct, que de sa mort ledit suppliant a esté et est fort desplaisant, marry et courroucé, et que en tous autres cas, etc., nous lui vueillons sur ce impartir nosdictes grace et misericorde. Pourquoy nous, etc., audit François

Sic : pour Henri [L.C.].

de la Salle avons quicté, remis, etc., et par ces presentes, etc., quictons, remettons et pardonnons le fait et cas dessus dit, avec toute peine et amende, etc., en mettant au neant, etc. Et l’avons restitué, etc. Satisfacion, etc. Et sur ce imposons silence, etc. Si donnons en mandement par cesdictes presentes au seneschal de Poictou et à tous, etc. que de noz presens grace, etc., sans, etc., ainçois, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Vendosme ou mois d’aoust l’an de grace mil cccc. quatre vings, et de nostre règne le vintiesme.

Ainsi signé : Par le Conseil. Chambon. — Visa. Contentor. Budé.

MDCLVIII Août 1480

Rémission accordée à Jean Mercier, prêtre, demeurant à Saint-Sauvant, des peines qu’il avait encourues pour le meurtre de Guillaume Cabon, laboureur dudit lieu, celui-ci l’ayant d’abord injurié, puis menacé d’un couteau, meurtre pour lequel il avait obtenu déjà des lettres de pardon du Pape.

AN JJ. 208, n° 89, fol. 48 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 345-346

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Mercier prebstre, demourant à Saint-Sauvent près Poitiers, contenant que le cinquiesme jour du mois de juillet l’an mil cccc.iiiixx et derrenier passé, heure de huit heures sur le soir, ledit suppliant sortit de son hostel et s’en alla pour passer temps et soy esbatre après soupper devant la maison d’un nommé Laurens Braconnier, prebstre, et illec en sa presence et de plusieurs autres prebstres qui parloient de plusieurs besongnes et affaires, survint ung appellé Guillaume Cabon, laboureur, lequel de prime face, luy estant assez loing, dist audit suppliant telles parolles ou semblables : « Ribault, prestre, murdrier et excommunié, te fault il parler de telles choses ! » Et ledit suppliant, soy voyant ainsi injurié, luy dist : « Et faut il que tu me die telles parolles ? Vien les moy dire ça. » Et il respondit : « Ve, paillart, je ne daigneroye, mais vien à moy toy mesmes, et je les te diray. » Et après, ainsi que ledit suppliant fut desmarché, ledit feu Cabon le print au collet et luy rompit sa robbe ; et non content de ce, le voult frapper d’un grant cousteau qu’il avoit ; mais ledit suppliant s’en sauva et d’un autre cousteau qu’il avoit frappa ledit Cabon deux ou trois coups et entre autres sur la teste et sur le bras, pour lesquelz coups, huit jours ou après ou environ, alla de vie à trespas. A l’occasion duquel cas ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du pays et s’est tiré devers nostre sainct Père le Pape, duquel il a obtenu pardon et rabilitacion dudit cas, mais neantmoins il n’oseroit jamais seurement retourner, converser ne demourer au païs, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu que ledit suppliant n’a fait ledit cas de guit apansé ne de propos deliberé, mais de chaude colle, pour les injures que on luy faisoit et pour eviter aux oultraiges dudit Cabon, et que en tous autres cas et affaires, il s’est bien et honnestement gouverné sans aucun blasme ou reprouche, nous luy vueillons sur ce impartir nosdictes grace et misericorde. Pourquoy nous, etc., voulans, etc., audit suppliant ou cas dessus dit avons remis, quicté et pardonné et par la teneur, etc. quictons, remettons et pardonnons le fait et cas dessusditz avec toute peine, etc., en mettant au neant, etc. Et l’avons restitué, etc. Et sur ce imposons, etc., satisfacion, etc. Si donnons en mandement, etc., au seneschal de Poitou et à tous nos autres, etc., que de noz presens grâce, etc., ils facent, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, ou mois d’aoust, l’an de grace mil cccc. quatre vings et de nostre regne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, en son Conseil. Texier. — Visa. Contentor. Budé.

MDCLIX Septembre 1480

Rémission donnée en faveur d’Antoine Du Selier, écuyer, coupable d’un meurtre à Mondion, le jour de S. Laurent, fête du pays. Survenant au moment où son ami et voisin Simon Du Val, sr de la Chaume, venait d’être frappé à mort, et voyant penché sur lui un homme, nommé Jean Boncoignée, qui voulait l’aider à se relever, il le prit pour l’auteur de l’agression et lui porta à la tête un coup de braquemart, dont il mourut huit jours après.

AN JJ. 208, n° 99, fol. 54 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 346-348

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Anthoine du Selier

Dans les deux notes qu’il a recueillies sur la famille Du Sellier ou Du Cellier, du Châtelleraudais, le Dict. des familles du Poitou dit qu’Antoine Du Sellier transigea, le 20 novembre 1483, avec Olivier de Mausson, écuyer, seigneur de la Bonnière et de la Cassine. (Nouv. édit., t. III, p. 262.)

, escuier, chargé de femme et d’enffans, contenant que, le dixiesme jour d’aoust, feste saint Laurens derrenier passé, environ souleil couschant, ledit suppliant se trouva ou villaige de Mondyon où illec avoit assemblée et feste, ainsi que l’en a acoustumé faire audit jour et feste dudit saint Laurent, où illec plusieurs gens se trouvent pour faire ladite feste et aussi pour le voyaige qui y est, et y avoit plusieurs gentilzhommes d’illec environ et entre autres ung nommé Simon Du Val, seigneur de la Chaume

Sans doute l’hôtel noble de la Chaume-en-Poitou, paroisse de Doussais, mouvant de la baronnie de Puygarreau, à laquelle il devait hommage lige et une redevance de dix sous à muance de seigneur. (L’abbé Lalanne, Hist. de Châtelleraud, 2 vol. in-8°, t. I, p. 457.)

, qui eut plusieurs grosses parolles avecques ung nommé Etienne Ferron, qui estoit acompaigné de son père et autres ses frères. Et pour raison et à cause desdictes grosses parolles et sans dire quelque chose que ce soit, ledit Estienne Ferron se baissa et print une pierre ou son poing et la gecta contre ledit Simon Du Val, de laquelle il en assena auprès de l’oreille, dont il tumba a terre presque mort, et de fait morut du coup de ladicte pierre gectée par ledit Etienne Ferron, environ l’heure de mynuit. Et ce pendant que ledit Simon Du Val, seigneur de la Chaulme, estoit ainsi abatu à terre et paravant sondit trespas, illec survint ung nommé Jehan Boncoignée qui se gecta sur luy pour luy cuider relever la teste, luy cuidant aider à lever. Et alors les gens qui illec estoient commancèrent à crier à haulte voix : « Monseigneur de la Chaume est mort. » Ledit suppliant estant assez loing de là, oyant ledit cry, tout esmeu et eschauffé et aussi que ledit Simon Du Val estoit son grant amy et prouchain voisin, vint par devers luy et trouva ledit Jehan Boncoignée qui estoit sur luy et cuidoit de fait que ce feust celluy qui avoit donné ledit coup de pierre et qu’il vouloit tousjour poursuir ledit de la Chaume pour le vouloir eschever de tuer, tira ledit suppliant son braquemart et en donna ung coup de chaude colle sur la testée audit Boncoignée au dessus du front, non le cuidant le tuer. Et alors voyant ledit suppliant qu’avoit ainsi blecé ledit Boncoignée fut fort doulant et marry, car jamais n’avoit eu noise ne debat à luy. Et environ sept ou huit jours après, pour raison dudit coup, par faulte de bon gouvernement ou autrement, ledit Boncoignée alla de vie à trespas, et à la fin de ses jours pardonna sa mort audit suppliant. Pour occasion duquel cas ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté hors du païs, où il n’oseroit jamais bonnement converser ne demourer, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce imparties, ainsi qu’il nous a fait dire et remonstrer, en nous humblement requerant icelles. Pour quoy nous, etc., etc., audit suppliant ou cas dessusdit avons quicté, remis et pardonné, et par la teneur, etc., quictons, remettons et pardonnons le fait et cas dessus dit, avec toute peine, etc., en mettant en neant, etc. Et l’avons restitué, etc. Et sur ce imposons, etc. Si donnons en mandement, etc., au seneschal de Poitou ou à son lieutenant, etc., que de noz presens grace, etc. Sauf, etc. Donné à Chinon, ou mois de septembre, l’an de grace mil cccc. quatre vings, et de nostre règne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le Conseil. Budé. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLX Septembre 1480

Rémission octroyée à Guillaume et Jean Gendre, dits Limousins, de Vouillé, coupables d’un meurtre. Voyant leur père attaqué, maltraité et battu par des francs archers, ils s’étaient portés à son secours et en s’efforçant de le soustraire aux coups de ses agresseurs, ils avaient mortellement frappé l’un d’eux, nommé Robin Pineau.

AN JJ. 208, n° 115, fol. 69 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 348-352

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Guillaume et Jehan Gendres, diz Limosins, frères, pouvres gens de labour, chargez de femmes et de plusieurs enfants, demourans en la paroisse et villaige de Vouilhé, contenant que, le dimanche dixiesme jour de ce present mois de septembre derrenier passé, Jehan Gendre, dit Limosin, leur père, aagé de lx. ans ou environ, aussi demourant audit Vouilhé, s’en alla dudit Vouilhé à une sienne maison hors ledit villaige et distant d’icellui d’un demi quart de lieue ou environ, pour veoir de son bestail qu’il tient en ladicte maison pour faire son labouraige, et lui arrivé en la court de ladicte maison, qui estoit environ l’eure de trois heures après midy dudit jour, arrivèrent illecques trois francarchiers à lui incongneuz, dont l’ung d’eulx entra en ladicte court et dist audit Jehan Gendre père qu’il lui voulsist ouvrir sondit huys de sadicte maison ; lequel luy respondit qu’il le feroit voulentiers, et pour ce faire alla illecques près, où luy et ses gens avoient acoustumé cacher la clef de ladicte maison, la y cuidant trouver, ce qu’il ne fist pas. Et ce pendant qu’il cerchoit ladicte clef, ledit franc archer qui estoit entré en ladicte maison

Sic. Distraction du scribe, pour « court ».

d’icelle maison, tenant en sa main ung gros baston blanc de poignée, frappa du pié une foiz ou deulx contre la porte de ladicte maison, la cuidant rompre et ouvrir. Et ce voyant, ledit Jehan Gendre, père desdiz supplians, dist audict franc archer qu’il ne povoit trouver la clef de ladicte maison, qu’il luy pleust ne lui faire aucun desplaisir et que voulentiers, il luy donneroit du pain et du vin ; et se sortit de ladicte court ou chemin par où passoient iceulx francs archers, duquel estoit sorti ledit franc archer qui estoit ainsi entré en ladicte court avec les deux autres. Et adonc icellui franc archer dist audit Jehan Gendre père que doncques il lui voulsist bailler du pain et du vin. A quoy il lui respondit que illec il n’avoit ne pain ne vin, parce qu’il n’y faisoit pas sa demourance et n’y tenoit que son bestail et labouraige, et que s’il luy plaisoit ung peu attendre, que voulentiers il luy en yroit querir audit villaige, ou que, s’il leur plaisoit aller avecques lui, qu’il leur en bailleroit et feroit delivrer. A cause desquelles parolles ledit franc archer, qui ainsi estoit entré en ladicte court et avoit ledit baston en la main, se tira devers ledit Jehan Gendre et lui donna ung soufflet, tellement que d’icelluy il luy fist cheoir son chapperon et son bonnet à terre. Et ainsi que icelluy Jehan le Gendre, ainsi aagé comme dit est, vouloit amasser ses diz chapperon et bonnet, ledit franc archer, non content de ce, lui donna dudit baston blanc sur les espaulles si grant coup qu’il le fist cheoir à terre, et après lui et sesdiz compaignons le batirent et frappèrent par la teste tant dudit baston que de javelines et espées tant que d’icelli ilz lui firent yssir le sang par trois ou quatre lieux et lui donnèrent avec ce plusieurs autres coups et collées sur les espaulles, bras et autres parties de son corps tant qu’il cheut à terre, le visaige et la teste tous ensanglantez, comme mort. Et en ce faisant arrivèrent aucuns autres francarchers, compaignons desdiz trois dessus nommez, qui jà estoient passez devant et s’en retournèrent, tellement qu’ilz furent jusques au nombre de huit. Pendans lesquelles choses, Jehan Gendre, frère desdiz supplians et filz dudit Jehan Gendre, leur père, qui estoit derriere ladicte maison, ouyt le bruit, auquel il accourut et voyant les excès que on faisoit à sondit père et que lesdiz francs archers l’avoient ainsi abattu et aterré tellement qu’il ne povoit parler, s’escria, disant : « Mon père est mort ! mon père est mort ! » Et adonc deux desdiz francs archiers qui avoient ainsi blecié ledit Jehan Gendre père, tenans l’un une espée toute nue et l’autre une javeline, s’adressèrent audit Jehan Gendre le jeune, pour le vouloir frapper. Et ce voyant, pour eviter leur fureur et oultrage, s’en fouyt vers ledit villaige en criant que sondit père estoit mort. Auquel cry ledit Jehan Gendre suppliant, qui estoit près d’un trait d’arc d’illec ou environ, alla audit cry, et en passant par le derrière de leur dicte maison, en trouva en son chemin, contre le pallier ou mur d’icelle une fourche de fer à deux fourchons, laquelle il print en sa main, et tantost qu’il fut arrivé, apperceut sondit père, lequel lesdiz francarchiers avoient abatu à terre à force de cops, le visaige et le col tous sanglans, et cuidant qu’il feust mort, dist ausdiz francs archiers qui estoient jusques à huit : « Ha ! ribaulx, vous avez tué mon père ! » et en ce disant, desplaisant de l’oultrage fait à sondit père, frappa ung coup de ladicte fourche sur le bras de l’un desdiz francs archiers, duquel coup il lui feist cheoir une espée qu’il tenoit toute nue en sa main. Et incontinant ledit Guillaume Gendre, son frère, suppliant, qui semblablement avoit ouy ledit cry d’un tornet

Sic. Tornet signifie dévidoir. Peut-être faut-il lire cornet.

près de ladicte maison où il estoit, arriva audit conflict, et voyant sondit père ainsi navré et mutilé que dit est et que lesdiz francs archers vouloient encores oultrager et tuer ledit Jehan, son frère, et desbander une arbaleste sur luy, pour secourir sondit frère, tira une espée nue qu’il avoit esté querir en l’ostel de sondit père et se mist à revancher sondit frère. Et lors arrivèrent sur eulx plusieurs autres desdiz francs archers qui jà estoient passez devant et s’en estoient retournez pour aider à ceulx qui avoient ainsi batu et navré sondit père ; lesquelz commencèrent vouloir oultrager de plus en plus lesdiz supplians, eulx efforçans de les batre et tuer, tellement qu’il convint ausdiz supplians eulx mettre en deffense, et en eulx combatant les ungs contre les autres, ledit Guillaume suppliant, tout esmeu de chaude colle et desplaisant de l’oultraige fait à sondit père, frappa de sadicte espée l’un d’eulx par le nombril, lequel, comme il a depuis ouy dire, s’appelloit Robin Pineau et estoit celluy qui premièrement avoit batu et frappé dudit baston blanc ledit Jehan Gendre, son père. Après lequel coup, lesdiz supplians, doubtans la fureur desdiz francs archiers, se misdrent à fouir de devant eulx ; lesquelz, pour les vouloir tuer, gectèrent après eulx pierres et les suivirent avecques lesdictes pierres, arbalestes et espées et javelines jusques audit Vouilhé et les pressèrent tellement que s’ilz ne se feussent evadez d’eulx, ilz les eussent tuez ou griefment bleciez et mutillez. Tantost après lequel coup et au moien d’iceluy ledit Pineau alla de vie à trespas. Pour occasion duquel cas lesdiz supplians, doubtans rigueur de justice, se sont absentez du païs, ouquel ne en nostre royaume ilz ne oseroient, etc., se noz grace, etc. Attendu ce que dit est et qu’ilz ont toujours esté de bonne vie, etc., nous leur vueillons sur ce impartir nosdictes grace et misericorde. Pour quoy nous, etc., voulans, etc., ausdiz supplians et à chacun d’eulx ou cas dessusdit avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessus declaré, avec toute peine, etc., en mettant au neant, etc. Et les avons restituez, etc., et sur ce imposons silence, etc. Si donnons en mandement, etc., au seneschal de Poitou et à tous noz autres, etc., que de noz presens grace, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, au mois de septembre l’an de grace mil ccc. quatre vings, et de nostre regne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. Villebresme. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXI Septembre 1480

Lettres données en faveur de Jacques Odart, écuyer, chambellan du roi, seigneur de Curçay, de Maulévrier et du Moulin de Celle, portant qu’à l’avenir ces trois seigneuries n’en formeront qu’une, tenue envers le roi, comme relevant de Loudun, à un seul hommage.

AN JJ. 208, n° 67, fol. 37 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 353-359

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre amé et feal conseiller et chambellan, Jacques Odart, escuier, seigneur de Cursay, Maulevrier et du Molin de Celle

Jacques Odart, baron de Curçay, seigneur de Sammarçolle, Messay, Maulévrier, le Moulin de Celles, etc., était fils puîné de Guillaume, seigneur de Verrières, et de Jeanne d’Ausseurre, sa seconde femme. Attaché dès son enfance à Marie d’Anjou, femme de Charles VII, il la servit en qualité de panetier et d’écuyer d’écurie. Après la mort de la reine, sa mère, Louis XI l’attacha à la grande écurie, ainsi qu’on l’apprend de cet extrait d’un registre de comptes de l’année 1464 : « A Jacques Odart, escuier, seigneur de Curçay, escuier d’escuierie du roy nostre sire et naguères escuier d’escuierie de feue la reyne mère du roy laquelle Dieu absoille ; la somme de xli. livres v. solz tournois en trente escuz d’or, dont mémoire est faicte au vie roolle, pour le paiement d’un mulet de poil fauve qui fut à ladicte dame, lequel ledit seigneur a fait prendre et acheter de luy oudit mois de mars, pour ce, por sa quictance escripte le xxe jour dud. mois de mars cccc.lxiii cy rendue. — Mis en l’escuierie du roy pour servir à sa personne, comme il peut apparoir par ledit vie roolle et lad. certiffication. » (Arch. nat., KK 65, fol. 91 v°.) Ses gages, qui étaient de 600 livres, furent portés à 1.000 livres en 1472. Une somme de 600 livres à prendre sur le grenier à sel de Chinon lui fut accordée par mandement de Louis XI aux généraux des finances, l’an 1467. (Bibl. nat., ms. fr. 20496, fol. 77.) Jacques Odart fit hommage au roi pour ses terres relevant de la couronne, le 24 octobre 1476, et le 8 janvier suivant, il acquit de Guillaume de Clermont, seigneur de Chavaignes, la terre et seigneurie de Maulévrier en Loudunais. Le roi lui fit remise des lods et ventes qu’il devait pour cette acquisition et le nomma son conseiller et chambellan par lettres datées de Dijon, août 1479, et grand fauconnier de France à la fin de l’année suivante. Charles VIII le créa grand panetier en 1483 et capitaine de Civray. Il obtint du Parlement, le 2 mai 1485, un arrêt lui permettant d’user de la petite justice sur les boulangers de Paris et de prendre et exercer sur eux les droits dont le grand panetier de France avait coutume de jouir d’ancienneté. (Arch. nat., X1a 1492, fol. 129 v°.) On le trouve qualifié aussi, dans des actes de 1475, 1483, 1484 et 12 mars 1490 n.s., capitaine, gouverneur et bailli de Montargis ; il vivait encore le 22 juin 1491. Jacques Odart avait épousé Charlotte de Preuilly, dont il eut Louis, baron de Curçay ; Marie, femme de Bertrand de Maumont, seigneur de Tonnay-Boutonne, et deux autres files. (Cf. le P. Anselme, Hist. généal., t. VIII, p. 671, et Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 1re édit., t. II, p. 458.)

, contenant que, ou mois d’avril avant Pasques mil cccc. cinquante et six, feu nostre oncle René, en son vivant roy de Secille, duc d’Anjou et seigneur de Lodun, naguères décédé, donna et octroya audit suppliant à temps perpetuel et à tousjours mais par heritaige, à lui, ses hoirs, successeurs et ayans cause la quantité de quarante trois sextiers neuf boisseaux de froment de rente annuelle et perpetuelle, avec le cens usual qui est de deux deniers tournois pour chacun sextier, partie du nombre de soixante dix sextiers, de froment de rente avecques le cens usual à la raison dessus dicte pour chacun sextier, qui estoient deuz par chacun an de rente à feu Charles d’Artois, chevalier, et à Jehanne de Baussay

Jeanne de Bauçay, fille unique et héritière de Hugues VI de Bauçay et de Marie d’Archiale ; mariée : 1° à Geoffroy de Beaumont, seigneur de Lude, décédé sans enfants avant 1355 ; 2° en 1356 à Charles d’Artois, comte de Longueville. Beaucoup de renseignements ont été donnés sur cette dame et son second mari dans les trois premiers volumes de notre collection. (Arch. hist. du Poitou, t. XI, p. 114, note ; t. XIII, p. 327 ; t. XVII, p. 360.) Il est d’autant moins utile d’y revenir ici, que depuis notre confrère M.H. Moranvillé a publié une étude très documentée et complète sur Charles d’Artois. (Bibliothèque de l’École des Chartes, t. LXVIII, année 1907, p. 433 et suiv.)

, sa femme, ainsi que venduz et transportez leur avoient esté par feu Huet de Cursay

Huet de Cursay, ou mieux de Curçay, dernier représentant mâle de cette famille du Loudunais, fit rebâtir son château dont il rendit hommage au duc d’Anjou, seigneur de Loudun en 1384 et 1387. Nous avons vu que le 16 janvier 1395, il était poursuivi au Parlement par Jean Rabasté, chevalier, seigneur de la Roche-Rabaté, qui l’accusait d’avoir incendié et détruit son manoir du Vivier, sis en la paroisse même de Curçay. (Arch. hist. du Poitou, t. XXIV, p. 410, note.) Huet ou Hugues de Curçay eut pour fille et unique héritière Jeanne, mariée à Aymar Odart, chevalier, seigneur de Verrières. (Dict. des familles du Poitou, 2e éd., t. II, p. 777.)

, en son vivant seigneur du chastel et chastellenie de Cursay, pour la necessité et indigence que ledit feu Huet de Cursay eut pour la deffense qui lui convenit faire pour tenir la frontière ou païs de Loudunois, ouquel ledit chastel est situé et assis, à l’encontre des Anglois, noz anciens ennemys, qui pour lors tenoient et occupoient noz païs et duchié de Guienne. Et pour ce que ledit Charles d’Artois après ledit acquist fait dudit Huet de Cursay, commist crime de desobeissance envers feu nostre très cher seigneur et père

Sic. Les mots « feu nostre tres cher seigneur et père » sont encore répétés plus bas, quoiqu’il s’agisse du roi Charles V, bisaïeul de Louis XI.

que Dieu absoille, par quoy après le trespas dudit feu Charles d’Artois ladicte quantité de quarante trois sextiers et neuf boisseaux de froment de rente et ledit cens usual pour partie dudit nombre de soixante dix sextiers de froment de rente avecques ledit cens usual sont advenuz et ont esté acquis et declarez par justice confisquez et appartenans par droit de confiscacion à feu nostre dit oncle comme seigneur dudit lieu de Lodun. Et à ceste cause, pour ce que ledit feu Huet de Cursay avoit tenu ladicte frontiere contre lesdiz Anglois pour la tuission du royaume et où il avoit fait plusieurs fraiz et despenses et comme bon et loyal subget et vassal de feu nostre dit seigneur et père et de la couronne avoit resisté ausdiz Anglois, feu nostre dit oncle, auquel lesdictes choses furent remonstrées par ledit suppliant, et aussi en contemplacion de feu nostre très chère dame et mère, que Dieu absoille, dont icellui suppliant estoit et a esté serviteur ordinaire et commensal par long temps et l’a servie jusques à son trespas, icellui nostre dit feu oncle lui fist don et octroy desdictes choses, ainsi que ledit suppliant dit à plain apparoir par les lettres de nostre dit oncle données oudit mois d’avril, ou vidimus d’icelles fait soubz les seaulz de ses contratz. Et soit ainsi que par le trespas de nostre dit feu oncle ladicte terre et seigneurie de Lodun nous est naguères advenue et escheue, en laquelle ladicte quantité de quarante trois sextiers de froment neuf boisseaulx de froment de rente et ledit cens usual sont situez et assis, deppendans de ladicte terre et seigneurie de Cursay par quoy nostre dit conseiller et chambellan nous a humblement supplié et requis que pour la seureté de ses hoirs et aians cause nostre plaisir soit confermer et approuver ledit don et octroy et, en tant que mestier est ou pourroit estre, lui en faire nouvel don et octroy, à lui, ses hoirs, successeurs et aians cause ; et avecques ce, pour ce que lesdictes terres et seigneuries de Cursay, de Maulevrier et du Molin de Celle, leurs appartenances et deppendances, sont situées et assises, tenues et mouvans de nostredicte seigneurie de Loudun et que pour chacune d’icelles desdictes terres et seigneuries nous est tenu faire foy et hommaige lige, que nostre plaisir soit joindre et unir ladicte terre de Maulevrier et le Moulin dudit Celle ausdiz chastel et chastellenie de Cursay et que de tout il et ses successeurs ne nous soient tenuz ne à autres noz successeurs en ladicte seigneurie de Loudun, faire que une foy et hommaige lige à muance d’omme seullement, et sur ce lui impartir nostre grace, declaracion, liberalité et voulenté. Pour quoy nous, ces choses considérées, inclinans liberallement à la supplicacion et requeste de nostre dit conseiller et chambellan, à icelui nostre dit conseiller et chambellan, ses hoirs, successeurs et aians cause, tant pour recongnoissance des tres grans, bons, loyaulx, continuelz, agreables et recommandables services qu’il a par longtemps faiz à feu nostredicte dame et mère jusques à sondit trespas, et à nous, et encore fait et continue chacun jour à l’entour de nostre personne et autrement en très grant soing, cure et dilligence et esperons que face ou temps avenir, pour ces causes et autres à ce nous mouvans, avons confermé, ratiffié, loué et approuvé, confermons, ratiffions, louons et approuvons de grace especial par ces presentes ledit don et octroy fait audit suppliant par feu nostre dit oncle desdiz quarante trois sextiers neuf boisseaulx de froment de rente avecques ledit cens usual, comme dit est ; et de nostre plus ample grace avons à icellui nostre conseiller et chambellan, suppliant, à sesdiz hoirs, successeurs et aians cause donné, cedé, transporté et delaissé, donnons, cedons, transportons et delaissons à tousjours mais perpetuellement pour heritaige dès à present et pour le temps avenir lesdiz quarante trois sextiers neuf boisseaulx de froment de rente avecques ledit cens usual, comme dessus est dit, pour les avoir, tenir, posséder, esploicter et en joir et user par nostre dit conseiller et chambellan, suppliant, sesditz hoirs, successeurs et aians cause dores en avant perpetuellement à tousjours mais, et autrement en faire et disposer comme de leur propre heritaige, sans aucune chose en reserver ne retenir pour nous ne pour les nostres successeurs, fors seullement les ressorts et souveraineté avecques ung espervier garny de longes et canpannes, que ledit seigneur de Cursay, ses successeurs et aians cause sera ou seront tenuz rendre et payer à nostre renpte de Louddun à muance d’omme seullement. Et de nostre dicte grace, plaine puissance et autorité royal lesdiz trois foiz et hommaiges liges que nostre dit conseiller et chambellan nous est tenu faire, et lesquelles il a faictes en noz mains, à cause de nostredit chastel et chastellenie de Loudun, pour raison de sesdictes terres et seigneuries de Cursay, Maulevrier et du Molin de Celle, leurs appartenances et appendances, avons joinctes, unies, assemblées et ennexées, joignons, unissons, assemblons et annexons par cesdictes presentes à une foy et hommaige lige seullement, pour lesquelles voulons et nous plaist que nostredit conseiller et chambellan, ses hoirs, successeurs et aians cause ne soient tenuz ne contrains à nous en faire ni à noz successeurs, seigneurs de Loudun dores en avant et au temps avenir que ladicte seulle foy et seul hommaige lige à nuance d’omme tant seullement, sans ce que au temps avenir on leur en puisse faire ou demander autre droit ou devoir, fors les ressort, souveraineté, foy et hommaige lige à muance d’omme, comme dessus est dit. Si donnons en mandement, par cesdictes presentes, à nos amez et feaulx conseillers les gens de nostre Parlement, de nostre Chambre des comptes à Paris, et tresoriers de France, aux seneschaux d’Anjou et de Lodun et à tous noz autres justiciers et officiers ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chacun d’eulx, si comme à lui appartiendra, que ledit Jacques Odart, nostredit conseiller et chambellan, ses hoirs, successeurs et aians cause, ils facent, seuffrent et laissent joir et user plainement et paisiblement de noz presens grace, confirmacion, ratifficacion, approbacion, don, cession, quictance, unyon et transport, sans en ce leur faire, mettre ne souffrir estre fait, mis ou donné, ores ne pour le temps avenir, aucun destourbier ou empeschement au contraire. Et par rapportant ces dictes presentes signées de nostre main ou vidimus d’icelles fait soubz scel royal, avecques cognoissance sur ce suffisant de nostre dit conseiller et chambellan, nous voulons nostre receveur ordinaire de Loudun, present et avenir, et tous autres à qui ce pourra toucher, en estre et demourer quictes et deschargez par nosdiz gens des comptes et partout ailleurs où il appartiendra, sans difficulté, non obstant que la valleur desdictes choses ne soit par cesdictes presentes autrement declairée, que descharge n’en soit levée par le changeur de nostre tresor, present et avenir, et quelzconques ordonnances faictes ou à faire par nous et nosdiz successeurs sur le fait de nostre domaine et de nos finances, mandemens ou deffenses à ce contraire. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre scel à cesdictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autry en toutes. Donné au Plesseys du Parc lez Tours, ou

Ces lettres avaient été enregistrées aussi, le 27 novembre 1480, au Parlement de Paris. (Arch. nat., X1a 8607, fol. 250 v°.)

mois de septembre l’an de grace mil cccc quatre vings, et de nostre règne le vingtième.

Ainsi signé : Loys. Par le roy, de Marle.

MDCLXII Septembre 1480

Lettres patentes données à la requête de Louis de La Trémoille, seigneur de Sully et comte de Benon, portant union des seigneuries de l’île de Ré et de Marans

Marguerite d’Amboise, femme de Louis Ier de La Trémoïlle, avait par un premier contrat échangé avec Louis XI la vicomté de Thouars contre l’île de Ré et la terre des Marans, et par un second rendu au roi lesdites île et terre contre les seigneuries de Vierzon et de Sancoins en Berry. Quoique ces deux actes, imposés par le roi, eussent été confirmés par lettres patentes données à Amboise au mois de mai 1470, et enregistrées au Parlement le 28 janvier 1471. (Arch. nat., X1a 8606, fol. 233), on voit que la seconde de ces transactions au moins n’avait pas eu d’effet.

au comté de Benon sous un seul et unique hommage au lieu de trois auxquels ledit seigneur était jusqu’alors tenu envers le roi, lesdites comté, terres et seigneuries mouvant du château de la Rochelle. « Si donnons en mandement par ces presentes à nos amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers … Donné au Plessays du Parc, ou mois de septembre l’an de grace mil cccc. quatre vings, et de nostre règne le vingtiesme. — Ainsi signé : Loys. Par le roy, G. de Marle : Visa. Contentor. Texier. »

AN JJ. 208, n° 132, fol. 78 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 359

MDCLXIII Octobre 1480

Lettres portant confirmation de François, seigneur de La Rochefoucauld, dans la possession des château, châtellenie, terre et seigneurie de Montendre qui lui venaient de sa mère, Marguerite de La Roche, fille et seule héritière de feu Jean de La Roche, sénéchal de Poitou, auquel Charles VII en avait fait don, parce qu’il avait conquis sur les Anglais « à force et puissance d’armes », ladite place forte de Montendre.

AN JJ. 208, n° 64, fol. 35 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 359-364

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre cher et bien amé François seigneur de la Rochefoucault, filz et heritier de feu Jehan, en son vivant seigneur de La Rochefoucault, chevalier, et de Marguerite de La Roche

Jean, seigneur de La Rochefoucauld, Montignac, Marcillac, Blanzac, etc., fils de Foucaud III et de Jeanne de Rochechouart, fut chambellan des rois Charles VII et Louis XI, capitaine gouverneur de Bayonne en 1453, sénéchal de Périgord, gouverneur de Charles d’Orléans, comte d’Angoulême en 1467. Il testa le 2 décembre 1471 et mourut peu après. Il avait épousé, par contrat du 27 février 1446, Marguerite, fille unique et héritière de Jean de La Rochefoucauld, sr de Barbezieux, le fameux sénéchal de Poitou dont nous nous sommes occupé longuement dans l’introduction et en divers endroits du tome VIII de cette publication, et de Jeanne Sanglier. Leur fils aîné, François de La Rochefoucauld, était marié à Louise de Crussol, fille de Louis, grand panetier de France et sénéchal de Poitou. C’est en sa faveur que le roi François Ier, dont il était le parrain, érigea la seigneurie de La Rochefoucauld en comté, y incorporant la baronnie de Marthon et les châtellenies de Blanzac, de Martignac, de Verteuil, de Saint-Laurent-de-Ceris et de Cellefrouin, par lettres patentes données à Anet, au mois d’avril 1528, enregistrées au Parlement le 13 août suivant. (Arch. nat., X1a 8612, fol. 110 v°.)

à présent femme du sire de Maillé

Hardouin IX, baron de Maillé, seigneur de la Rochecorbon, de la Haye, etc., chambellan du roi, sénéchal de Saintonge, capitaine de Mantes, vivant encore en 1487, avait épousé en premières noces, le 26 novembre 1458, Antoinette de Chauvigny, vicomtesse de Brobac, qui mourut le 20 février 1473. De sa seconde union avec Marguerite de La Rochefoucauld, dame de Barbezieux et de Verteuil, il n’eut point de postérité.

, fille et heritière seulle et pour le tout de feu Jehan de La Roche, en son vivant seneschal de Poictou, contenant que feu nostre très cher seigneur et père, que Dieu absoille, saichant et recongnoissant les grans, louaibles et recommandables services que ledit feu Jehan de La Roche lui avoit faiz et à toute la chose publicque de nostre royaume on fait de noz guerres, mesmement au païs d’Agennoys

Sic. Il faut corriger Angoumois. On sait que Jean de La Rochefoucauld, sr de Barbezieux, fut commis au gouvernement de ce comté pendant la longue captivité en Angleterre de Jean d’Orléans, comte d’Angoulême.

dont il avoit le gouvernement, et aussi ès païs de Guienne et de Xantonge que les Anglois, anciens ennemys de la couronne de France, tenoient et occuppoient, à l’encontre desquelz il resista et sur eulx fist plusieurs entreprises et conquestes, et entres autres places conquist sur eulx et à forcent par puissances d’armes le chastel et place forte de Montandre

Quoique concernant plutôt la Saintonge, les présentes lettres sont publiées ici à cause des renseignements rétrospectifs qu’elles fournissent sur Jean de La Rochefoucauld, sénéchal de Poitou. Dans les lettres d’abolition que celui-ci obtint le 9 avril 1431, Montendre est compté déjà parmi les terres et seigneuries qui lui appartenaient. (Arch. hist. du Poitou, t. XXIX, p. 8-20.) La reprise de cette place sur les Anglais et le don qui en fut la conséquence étaient, par conséquent, antérieurs à cette date. Montendre, confisquée sur le Soudan de Latrau, partisan de l’Angleterre, après la conquête de la Saintonge par Du Guesclin, avait été donnée par Charles VI, avant le 26 octobre 1391, à Jean Harpedenne, et la possession en fut confirmée au même par lettres patentes du 24 janvier 1398. Aussi son fils, le seigneur de Belleville, frustré de son bien, protesta contre la donation faite au seigneur de Barbezieux et finit par obtenir de Louis XI, le 12 juin 1462, la reconnaissance de son droit antérieur. Les lettres de cette date sont une confirmation pure, absolue, complète, sans réserve ni restriction et « nonobstant toutes ordonnances contraires », de la possession des château et châtellenie de Montendre par le sire de Belleville et ses descendants, tels que son père les avait tenus. (Arch. nat., JJ. 199, n° 269, fol. 156. Voy. Arch. hist. du Poitou, t. XXIV, p. 289 ; t. XXXV, p. 369.) Aussi l’on peut s’étonner que dans les présentes lettres en faveur du seigneur de La Rochefoucauld, il ne soit pas même fait allusion à celles du 12 juin 1462, avec lesquelles elles sont en complète contradiction. D’autre part, suivant le P. Anselme, Jean de La Rochefoucauld, père de François, s’était opposé, dès le 22 juin 1468, au don nouveau que le seigneur de Belleville avait obtenu de la terre de Montendre. (Hist. généal., in-fol., t. IV, p. 425.)

, que longtemps paravant avoit esté detenu et occupé par lesdiz Anglois, et laquelle place il fortiffia et empara et en icelle mist plusieurs gens de guerre, qu’il entretint et souldoya, pour tenir et faire frontière ausdiz Anglois, et autrement en plusieurs manieres, lui donna, ceda et transporta ladicte place, chastel, chastellenie, terre et seigneurie de Montandre, pour en joir par lui, ses hoirs, successeurs et aiant cause, au moien duquel don icellui de La Roche en joyt paisiblement et jusques à aucun peu de temps avant son trespas, que, par testament ou autrement, il donna et transporta à feu Guy de La Roche

Sur Guy de La Rochefoucauld, seigneur de Verteuil, frère du sénéchal de Poitou, cf. Arch. hist. du Poitou, t. XXIX, p. 17, note ; t. XXXII, introduction, p. x et suiv.

, son frère, et à ses hoirs procreez de sa char seullement icelle terre et seigneurie de Montandre, soubz condicion que, se icellui Guy, son frere, alloit de vie à trespassement sans hoirs procrez de sa char en loyal mariage, icelle terre et seigneurie retourneroit à ses enfans et heritiers. Au moien duquel don et transport ledit feu Guy de La Roche joist desdiz chastel, terre et seigneurie de Montandre jusques à son trespas, et pour ce qu’il ne delaissa aucuns enfants, icelle terre retourna de plain droit audit feu Jehan de La Rochefoucault et Marguerite de La Roche, fille et heritière dudit feu Jehan de La Roche, père et mère dudit suppliant. Et pour ce que après le trespas dudit feu Guy, leur fut par noz officiers fait et donné aucun empeschement en la jouissance de ladicte seigneurie de Montandre, ilz se tirèrent devers nous, et par noz autres lettres pattentes en forme de chartre

Les lettres visées ici n’ont pas été retrouvées dans les mémoriaux reconstitués de la Chambre des comptes ; elles n’ont pas été transcrites parmi les ordonnances enregistrées au Parlement.

et pour les causes contenues en icelles, leur fismes delivrance de ladicte terre et seigneurie, et en tant que besoing estoit, la leur donnasmes, cedasmes et transportasmes de rechief, de nouvel et d’abondant. Au moien et par vertu desquelles noz lettres, qui bien et deuement ont esté veriffiées par noz amez et feaulx gens de noz comptes, les père et mère dudit suppliant ont tousjours depuis joy desdiz chastel, terre et seigneurie de Montandre, et encores en joist de present ledit suppliant. Toutesfoiz, pour plus grant seureté du temps avenir, il nous a humblement supplié et requis que nostre plaisir soit lui confermer lesdiz don et octroy, et sur ce lui octroyer noz lettres et provision convenable. Pour quoy nous, les choses dessus dictes considerées, qui sommes bien records et memoratifz desdiz don, transport et confirmacion ainsi par nous faiz desdiz chastel, chastellenie, terre et seigneurie de Montandre ausdiz feu Jehan de La Rochefoucault et Marguerite de La Roche, père et mère dudit suppliant, iceulz avons louez, greez, confermez, ratiffiez et approuvez, louons, greons, confermons ratiffions et approuvons, et en tant que besoing est ou seroit, avons audit François de La Rochefoucault, comme filz et heritier desdiz Jehan de La Rochefoucauld et Marguerite de La Roche, lesdiz chastel, terre et seigneurie de Montandre, appartenances et appendances d’iceulx, en tant que besoing est ou seroit, de rechief, de nouvel et d’abondant donnez, cedez, transportez et delaissez, donnons, cedons, transportons et delaissons de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, pour les avoir, tenir et posseder par ledit François de La Rochefoucauld, sesdiz hoirs, successeurs et aians cause perpetuellement et a tousjours et en prandre, parcevoir, cuillir, lever et recevoir les fruiz, prouffiz, revenues, esmolumens et autrement en faire et disposer à son plaisir et voulenté, comme de leur propre chose et ancien heritaige, à quelque valleur et estimacion qu’elles soient ou puissent estre, sans aucune chose en reserver ne retenir à nous ne aux nostres, fors seullement les foy et hommaige lige et le ressort de juridiction et souveraineté, en faisant et paiant toutesvoyes les charges, droiz et devoirs deubz et accoustumez estre paiez sur iceulx d’ancienneté, où et ainsi qu’il appartiendra. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx les gens de nosdiz comptes et tresoriers à Paris, aux seneschaulx de Guienne et de Xanctonge et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieutenans ou commis et à chacun d’eulx, si comme à lui appartiendra, que de noz present ratifficacion, confirmacion, aprobacion, don, transport et choses dessus dictes et chacune d’icelles ilz facent, seuffrent et laissent ledit François seigneur de La Rochefoucault, sesdiz hoirs, successeurs et aians cause joir et user perpetuellement, plainement et paisiblement, sans leur faire ne souffrir estre fait, ores ne pour le temps avenir, aucun empeschement au contraire, mais se fait leur estoit, le reparent et facent incontinant reparer. Car ainsi nous plaist il estre fait, nonobstant quelsconques ordonnances, restrincions, mandemens ou deffenses à ce contraires. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons signées ces presentes de nostre main et à icelles fait mettre nostre seel. Sauf en autres choses nostre droit et l’aultruy en toutes. Donné au Plesseys du Parc lez Tours, ou mois d’octobre l’an de grace mil cccc. quatre vingts et de nostre règne le vingtiesme.

Ainsi signé : Loys, et sur le reply desdictes lettres : Par le roy, G. Briçonnet. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXIV Octobre 1480

Rémission octroyée à Eustache des Granges, meurtrier, dix ans auparavant, de Jean Mallon, sr de la Lionière, vassal de son père, qui l’avait injurié et outragé, lui et sa famille, puis l’avait attaqué à main armée.

AN JJ. 208, n° 137, fol. 80 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 364-368

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Eustasses des Granges

Eustache Des Granges était le fils aîné de six frères et sœurs, de Louis Des Granges, écuyer seigneur de Cerveau dans la région de Châtillon-sur-Sèvre et de Montfermier à la Chapelle-Gaudin, et de Marguerite de Courdault, fille d’Eustache, écuyer, seigneur de Courdault, et de Perrette Regnon, dame du Plessis-Regnon. Eustache de Courdault était décédé avant le 23 septembre 1454, époque où sa veuve donna sa procuration à leur fils Jean, pour rendre un hommage au seigneur de Sainte-Flaive. Le partage de sa succession entre son fils, père alors de deux enfants, François et Marguerite, et sa fille Marguerite, femme de Louis Des Granges, donna lieu à des difficultés, des excès et des violences qui mirent aux prises le père et ses deux enfants, d’une part, la sœur et son mari, d’autre part, d’abord devant le sénéchal de Poitou, puis en appel au Parlement de Paris. (Voy. mandement du 1er juin 1464 et plaidoiries du même jour, Arch. nat., X2a 30, fol. 381 v°, et X2a 32, à la date.)

Quant à la victime d’Eustache Des Granges, Jean Maslon (son nom est ainsi écrit sur les registres du Parlement), il était écuyer, seigneur de la Lionnière, paroisse de la Chapelle-Gaudin, à cause de sa femme, Georgette Fouchier, « noble damoiselle, extraite de dame et de chevalier ». D’un premier mari, elle avait eu six enfants, et de Jean Maslon, elle n’avait qu’une fille. Ces renseignements et la plupart de ceux qui précèdent sur Louis Desgranges, sa femme et ses enfants sont extraits des pièces du procès dont il va être question. Pour avoir réparation de l’assassinat de son mari et de la grave mutilation dont elle avait été la victime, Georgette Fouchier porta plainte au sénéchal de Poitou. Eustache Des Granges et son serviteur, Mathurin Goury (alias Gorry), qui avait pris part au meurtre, étant en fuite et n’ayant pu être appréhendés, son père et sa mère furent mis en cause pour complicité morale. Ajournés en personne, Louis Des Granges et Marguerite de Courdault se présentèrent à l’assignation ; le premier fut mis en prison au Palais et la seconde sous la garde du prévôt de Poitiers, son parent, en l’hôtel de celui-ci, et l’affaire fut instruite. Leurs serviteurs, interrogés, avouèrent qu’après le crime, Eustache était resté trois semaines auprès de ses parents qui l’avaient caché d’abord à Monfermier, puis à Cerveau, et ensuite lui avaient donné trois cents écus pour faciliter sa fuite. Louis et sa femme nièrent tout d’abord, mais finirent par confesser que c’était la vérité. Néanmoins le lieutenant du sénéchal appointa que les serviteurs seraient récolés par le prévôt de Poitiers ; ceux-ci alors se rétractèrent, et le lieutenant élargit les deux prisonniers.

La veuve de Jean Maslon releva appel de cette décision au Parlement et demanda que la cour retînt la connaissance du principal. Des plaidoiries furent prononcées le 30 août 1473, dont il est intéressant de donner quelques extraits. Nanterre, avocat de l’appelante, dit que son mari et elle étaient venus, à la Noël précédente, demeurer en la paroisse de la Chapelle-Gaudin, dont ses ancêtres étaient les fondateurs, et ils y vécurent paisiblement jusqu’à la Pentecôte suivante, « que certaine haine se meut entre eux et les intimez pour deux causes » : 1° parce que les intimés, qui faisaient construire, transportaient leurs matériaux par des chemins appartenant à l’appelante et à son mari ; 2° parce que ledit jour de la Pentecôte, « eux estans tous ensemble à l’église, lad. appellante estoit allée la première à l’offrande, dont Eustache Des Granges se monstrant desplaisant dist à l’appelante qu’il ne luy appartenoyt point de monter si haut ». En pleine église des paroles injurieuses et des menaces furent échangées entre Eustache et Maslon, si bien que le service religieux en fut interrompu. Après la cérémonie, la noise recommença dehors. Eustache réitéra ses injures, en présence de son père et de sa mère. Loin d’y mettre un terme, Louis Des Granges dit à Maslon : « Eh bien, je voisineray ; vous avez dit des paroles qui ne chierront jamais de mon cœur. » Le mercredi suivant au soir, Eustache, prenant deux chevaux dans l’écurie de son père, vint se mettre en embuscade avec Mathurin Gourry, son serviteur, dans la garenne de la Lionnière. Après souper, Maslon et sa femme, sans armes et ne se doutant de rien, sortirent pour se promener aux environs de leur hôtel. Alors Gourry, déguisé et porteur d’une javeline, traversa avec ostentation la garenne, et comme Maslon voulait lui en interdire l’accès, il répondit qu’il y passerait quand même. Puis Eustache survint par derrière, tira son braquemart et en frappa Malon d’un coup sur la tête, qui le renversa à terre ; il redoubla avec la même arme d’estoc et de taille, quoique sa victime lui demandât grâce, et Georgette, en voulant protéger son mari, eut la main complètement tranchée. Gourry, de son côté, s’approcha du malheureux et lui plongea cinq ou six fois sa javeline dans le corps, si bien qu’il expira sous leurs yeux. Quand ils le virent bien mort, les deux meurtriers s’éloignèrent un peu, puis, se ravisant, revinrent sur leurs pas pour achever leur seconde victime. Celle-ci heureusement eut le temps de se réfugier dans une maison voisine ; « ce que voyant, Eustache et Gorry prindrent la main de l’appelante et la gectèrent et firent manger aux chiens en leur présence. » Après quoi, ils rentrèrent à Monfermier où Louis Des Granges et sa femme, informés de ce qui s’était passé, en furent très joyeux, particulièrement Marguerite de Courdault, qui avait dit auparavant à Eustache qu’elle le reniait pour fils, s’il ne la vengeait de Maslon et de sa femme, et pour bien montrer qu’ils avaient le fait pour agréable, elle et son mari envoyèrent Eustache et son complice à Cerveau, leur résidence principale, où ceux-ci furent longuement. Craignant cependant d’être découverts, ils s’éloignèrent du pays, bien montés et la bourse garnie.

L’avocat des intimés, chose à noter, ne contredit point cette version de l’assassinat de Jean Maslon. Les intimés, dit-il, sont extraits de noble et ancienne génération, ont toujours bien vécu sans répréhension, ont sept enfants et plusieurs belles terres et seigneuries et entre autres Cerveau, où ils résident habituellement, et Monfermier où ils étaient venus demeurer momentanément « pour occasion de la pestilence. Eux estans aud. lieu, Eustache et Maslon eurent debat ensemble, et s’efforça Maslon de lui bailler du poing sur le visage, dont Eustache fut fort deplaisant. Et depuis l’a trouvé et batu, dont il est mort. » Il ne raconta pas autrement la scène du meurtre, et s’attacha seulement à disculper Louis Des Granges et sa femme. Lors même, conclut-il, qu’ils auraient recueilli leur fils après le crime et lui auraient procuré les moyens de fuir, cela est tellement naturel à des parents, que l’appel de partie adverse ne peut être recevable. (X2a 39, fol. du 30 août 1473.) Cependant, par son arrêt du 10 septembre suivant, la cour annula la procédure du premier juge et retint la connaissance du fonds de l’affaire. (X2a 40, fol. 89 v°.) Toutefois comme Jacques Fouchier frère de Georgette, prenant fait et cause pour sa sœur et voulant la venger, avait fait envahir par ses gens et mettre au pillage l’hôtel et le domaine de Cerveau, le Parlement, à la requête de Louis Des Granges et de Marguerite de Courdault, leur accorda, le lendemain 11 septembre, des lettres de sauvegarde. (Id., fol. 91.) Ils étaient d’ailleurs ajournés à nouveau pour le 1er décembre suivant, aux fins de répondre aux accusations de la veuve de Jean Maslon. Entre ces deux dates, Louis Des Granges mourut et un délai de quarante jours fut accordé à Marguerite de Courdault pour déclarer si ses enfants reprenaient ou abandonnaient le procès. D’autre part, Eustache Des Granges, toujours absent, condamné comme contumace par le sénéchal de Poitou, héritait de son père. Georgette Fouchier fit saisir les biens qui lui revenaient de cette succession et en poursuivit la vente aux enchères publiques. Marguerite de Courdault naturellement s’y opposa, d’où un nouveau procès, que la cour évoqua à elle par acte du 7 juillet 1474. (Id., fol. 160.) Le 19 mai 1475, on retrouve la veuve de Jean Maslon en présence de Marguerite de Courdault et de Gilles, Etienne, Jeanne et Françoise Des Granges, ses enfants mineurs qui ont accepté de reprendre le procès engagé contre leur père, et le mardi 13 juin suivant, après dîner, la grande chambre appointa que la demanderesse baillerait dans huitaine ses conclusions par écrit. (X2a 41, à ces dates.)

Depuis ce jour jusqu’au 21 janvier 1482, les registres criminels sont complètement muets sur les suites du procès. A cette dernière date, Eustache Des Granges avait obtenu les lettres de rémission dont nous donnons le texte ; leur entérinement est combattu par la veuve de Jean Maslon et par sa fille Jeanne Maslon, alors mariée à Jean de Molières (aliàs Mondières), écuyer, et Eustache, qui persistait à ne pas se montrer, se fait mettre en défaut. (X2a 46, au 21 janvier 1482 n.s.) Le 30 du même mois, à la suite de nouvelles informations, décret de prise de corps fut rendu contre Marguerite de Courdault, avec ordre de l’amener prisonnière à la Conciergerie du Palais, sous peine de bannissement et de confiscation. En même temps, défense était faite au sénéchal du Poitou ou à son lieutenant de s’entremettre de l’entérinement de la rémission d’Eustache. (X2a 45, date du 30 janvier.) Enfin l’affaire fut plaidée derechef, le 14 mai suivant : les avocats ne font point connaître de particularités nouvelles. Celui de Jean de Modière et de Jeanne Maslon, après avoir énuméré les réparations, dommages et intérêts, etc., réclamés par ses clients, y ajouta le demande que ladite Marguerite « soit contrainte de rendre et exhiber son filz en la Conciergerie de céans, lequel a obtenu lettres de rémission et présentées à Thoars, et défense qu’il ne poursuive ne [se] pourvoye ailleurs que ceans ». (X2a 46, in-14 mai 1482.) Et dès lors le silence se fait de nouveau dans le registre.

En rapprochant les données fournies par la généalogie imprimée de la famille Foucher ou Fouchier du bas Poitou (seigneurs des Herbiers, de l’Esmentruère, de Brandois, etc. Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. III, p. 514) des renseignements contenus dans les actes mentionnés ci-dessus sur Georgette Fouchier et son frère Jacques, on peut les identifier exactement. Jacques est qualifié, dans cette généalogie, chevalier, seigneur de la Barrouère, du Gué-Sainte-Flaive et de l’Esmentruère, chambellan de Louis XI en 1463, décédé en 1486, fils aîné de Jean, écuyer, seigneur de l’Esmentruère et de la Barrouère (Longeville, Vendée) et de Marguerite de Bouillé. Quant à sa sœur Georgette, il y est dit qu’elle épousa Jean Simon (sans doute Simes), écuyer, et l’on n’y parle point de son second mari, Jean Maslon, sr de la Lionnière, que nous font connaître les registres du Parlement.

, clerc, aagé de trente ans ou environ, contenant que, dix ans a ou environ et ung jour entre les autres feu Jehan Mallon, seigneur de la Lyonerie et vassal du père dudit suppliant, qui par plusieurs foiz avoit injurié et oultragé icelui suppliant et ses père et mère et leurs subgetz, ainsi que ledit suppliant venoit d’aucuns ses affaires et lui estant près de la maison dudit Jehan Mallon, sans lui meffaire ne mesdire, icellui Jehan Mallon en continuant de mal en pis, vint illec au devant d’icellui suppliant garni et embastonné d’une longue javeline et d’une espée et de fait assaillit icellui suppliant en soy efforçant de le frapper de ladicte javeline parmi le corps et le cuidant tuer et occirre ; mais ledit suppliant y obvia tellement qu’il ne fut point blecié dudit coup, et voyant la fureur dudit Jehan Mallon et tout esmeu et eschauffé de ce que icelluy Jehan Mallon l’avoit ainsi voulu oultrager, tuer et murtrir de ladicte javeline et afin de obvier qui ne le tuast et occist, tira son espée qu’il avoit avecques lui et lui en bailla certains coups de chaude colle et en son corps deffendant, et en ce faisant couppa ung bras à la femme dudit Jehan Mallon qui estoit entre deux et bleça icellui Jehan Mallon, son mary, tellement que depuis par sa coulpe et faulte de bon gouvernement ou autrement, il est, comme l’en dit, allé de vie à trespas. A l’occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, dès lors se absenta du païs et de nostre royaume et s’en alla à Saint-Jacques, à Romme et ailleurs, et depuis a tousjours esté absent d’icellui pays et de nostredit royaume, et n’y oseroit jamais retourner converser ne repairer, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, si comme il dit, en nous humblement requerant que, attendu ce que dit est et mesmement que ledit Jehan Mallon a esté agresseur et non ledit suppliant, et est ledit cas advenu de chaude colle et en son corps deffendant, comme dit est, icellui suppliant qui est jeune clerc à marier et gentilhomme, ne fut plus jamais actainct, convaincu ne condampné d’aucun autre vilain cas, blasme ou reprouche, et aussi qu’il a sur ce finé et composé à partie et fait satisfacion, et ne reste plus que l’interest de justice, il nous plaise lui impartir nosdictes graces et misericorde. Pour quoy nous, etc., voulans, etc., audit suppliant ou cas dessus dit avons quicté, remis et pardonné, et par la teneur, etc., quictons, remettons et pardonnons le fait et cas dessusdit, avec toute peine, etc. Et l’avons restitué, etc., en mettant au neant, etc. Et sur ce imposons, etc. Si donnons en mandement, etc., au seneschal du Poictou et à tous, etc., que de noz presens grace, etc., ilz facent, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, ou mois d’octobre l’an de grace mil cccc. quatre vingts, et de nostre règne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. Chambon. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXV Octobre 1480

Rémission obtenue par Yvon Fraigneau, pelletier, demeurant à Poitiers, meurtrier de son frère Jean, qu’il avait frappé mortellement à la suite d’une dispute qui s’était élevée entre eux, parce que Jean déservait et calomniait Yvon auprès de leur père, dans le but d’obtenir toute sa succession et d’en frustrer son frère.

AN JJ. 208, n° 140, fol. 82 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 369-372

Loys, par la grace, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Yvon Fraigneau, jeune homme, pelletier, chargé de jeune femme grosse d’enfant, filz de Loys Fraigneau

On ne sait si l’on doit rattacher ces Fraigneau, pelletiers de Poitiers, à la famille du même nom anciennement établie à Saint-Maixent et dans le Niortais. (Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. III, p. 562.)

, aagé de soixante quinze ans ou environ, aussi pelletier, demourans en nostre ville de Poitiers, contenant que ledit Loys Fraigneau, qui toute sa vie a esté et est bon marchand a vescu honnestement de son dit mestier, avoit deux filz, c’est assavoir feu Jehan Fraigneau et ledit suppliant. Et pour ce que ledit Jehan Fraigneau avoit dès sa jeunesse esté et estoit fort noyseux et de petit gouvernement et que puis aucun temps ença en haine et desplaisant de ce que sondit père et sa mère, à ung jour et feste de Pasques, que chacun chrestien doit estre en bon estat, lui voulurent remonstrer ses faultes et mauvaise vie, en lui priant que dès lors en avant il se voulaist abstenir de mal faire et bien vivre, il avoit frappé et batu sondit père, lesdiz père et mère l’esloingnèrent d’eulx et prindrent à demourer avesques eulx ledit suppliant et sa dicte femme, lesquelz y ont toujours demouré et servi, et entretenu leurdit père au mieulx et le plus doulcement qu’ilz ont peu, jusques à puis aucun temps ença que ledit feu Jehan Fraigneau, envieulx de ce que ledit suppliant et sadicte femme demouroient et gouvernoient leurdit père, a conceu grant hayne contre ledit suppliant et dit à sondit père par plusieurs foiz que ledit suppliant disoit par ladicte ville à ung chascun qu’il estoit tourné en enfance, en l’exortant et induisant par soultiz moiens qu’il lui voulsist donner tous ses biens et en frustrer ledit suppliant. Dont ledit suppliant, congnoissant que lui et sadicte femme avoient si bien servy et entretenu leurdit père et qu’ilz avoient esté et estoient cause de l’entretenement de sa maison, fut moult de desplaisant et courroussé contre sondit feu frère ; et à ceste cause se meut aucunes questions et debatz entre lesdiz deux frères. A l’occasion desquelz debatz ledit feu Jehan Fresnau se fist donner asseurement dudit suppliant. Et depuis, c’est assavoir le premier jour d’octobre derrenier passé, ledit suppliant se alla, ainsi qu’il avoit de coustume, esbatre a jouer de l’arc ou Pré l’Abbesse en nostre dicte ville de Poitiers, avec Anthoine Dalemaigne

Ce personnage ne paraît pas appartenir à la famille d’ancienne chevalerie, dont le principal établissement en Poitou était à Nalliers, près de Saint-Savin, quoiqu’à cette époque vécut un Antoine d’Allemagne, père de deux filles du nom de Marie, dont la première épousa Gamaliel de Moussy, sr de La Contour, et la seconde, le 8 octobre 1493, Antoine de Moussy. (Id., t. Ier, p. 45.)

, Robinet Vinart, artiller, et plusieurs autres gens de bien de ladicte ville. Et au retour dudit Pré, icellui suppliant s’en alla soupper avec ledit Dalemeigne et après soupper se esbatirent et firent bonne chère en l’ostel dudit Dalmaigne jusques environ l’eure de neuf heures de nuyt que ledit suppliant s’en alla en l’ostel de sondit père, et vit que sondit père et ledit feu Jean Fraigneau estoient assis l’un auprès de l’autre sur le banc et oyt que ledit deffunct disoit à sondit père que ledit suppliant disoit et semoit par la ville que sondit père estoit tourné en enfance ; lequel suppliant, oyant lesdictes parolles et recors que ledit deffunct avoit tousjours tendu et tendoit de le mettre en la malegrace de sondit père, pour lui faire prendre ses biens et succession, entra en ladicte chambre et demanda à sondit feu frère qui l’avoit illec amené et qui le mouvoit de parler ainsi de lui, et le mettre en la malegrace de sondit père. A quoy ledit deffunct lui respondit bien rigoreusement de courage courroussé : « Mais toy, yvroigne ! » Et lors ledit suppliant courroussé et desplaisant desdictes choses, dist audit deffunct qu’il n’estoit point yvroigne et qu’il saillist et allast hors ; et voyant ledit suppliant que ledit deffunct estoist fort arrogant et ne s’en voulloit aller, monta en sa chambre et apporta son espée. Et ainsi qu’il retourna en la chambre, vit sondit feu frère tout debout, et qu’il tenoit en sa main une paelle de fer ou atirefeu, de laquelle, sitost qu’il vit entrer ledit suppliant en ladicte chambre, il se efforça de l’en vouloir frapper. Et ledit suppliant, congnoissant que sondit feu frère estoit mal meu et de mauvais vouloir à l’encontre de lui, tira sadicte espée du fourreau et en donna ung estoc audit deffunct au cousté seneste ; lequel deffunct saisit et print la lamelle de ladicte espée des deux mains et pour ce que ledit suppliant ne la lui peut oster, print ung chandellier sur la table où il y avoit une chandelle ardant et lui en donna deux ou trois coups sur les mains pour lui faire lascher icelle espée. Et voyant ledit suppliant que ledit deffunct ne la vouloit lascher, le lessa et s’en alla hors de ladicte chambre. Et tantost après ledit deffunct, à l’occasion desdiz cops alla de vie à trespas. Pour occasion duquel cas ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du païs, où il n’oseroit jamais retourner, converser ne demourer, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant icelles. Pour quoy nous, voulans, etc., audit suppliant ou cas dessus dit avons quicté, remis et pardonné, et par la teneur, etc., quictons, remettons et pardonnons le fait et cas dessus dit, avec toute peine, etc., en mettant au neant, etc. Satisfacion, etc. Et l’avons restitué, etc. Si donnons en mandement, etc., au seneschal de Poitou ou à son lieutenant, etc., et à tous noz autres, etc., que de noz presens grace, etc., ilz facent, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, ou mois d’octobre l’an de grace mil cccc. quatre vings, et de nostre règne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, maistres Jehan Chambon

Jean de Chambon, alors maître des requêtes après avoir exercé pendant plusieurs années, par commission, les fonctions de sénéchal de Poitou, a été l’objet d’une longue notice dans notre précédent volume, p. 380-383.

, Thibault Baillet

Thibaut Baillet, reçu conseiller au Parlement entre 1462 et 1469, nommé maître des requêtes de l’hôtel en 1472 et président à mortier le 9 janvier 1485 au lieu de Guillaume de Corbie, fut l’un des commissaires désignés, le 22 septembre 1476, pour juger le duc de Nemours. Louis XI et Charles VIII lui confièrent fréquemment des missions diplomatiques. Il mourut le 19 novembre 1525. (Blanchard, Les presidens au mortier du Parlement de Paris. In.-fol., p. 119.)

, Pierre Deladehors

Pierre Deladehors était lieutenant criminel de la Prévôté de Paris.

et autres presens. Du Ban. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXVI Novembre 1480

Rémission octroyée à Jean Merle, laboureur, demeurant à Notre-Dame-de-Plaisance, coupable du meurtre de son frère puîné, Pierre Merle, qu’il avait frappé mortellement en se défendant et sans intention de le tuer. Ledit Pierre avait attaqué son aîné à coup de pierres, parce que celui-ci lui reprochait d’avoir maltraité et battu l’un de ses enfants.

AN JJ. 208, n° 63, fol. 35 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 372-375

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Merle, laboureur, demourant ès faulxbourgs et parroisse de la ville de Nostre Dame de Plaisance en Poictou, aagé de quarante et cinq ans ou environ, chargé de femme, enfans et mesnaige, contenant que le vendredi vingt septiesme jour d’octobre l’an mil iiiic quatre vings, environ huit ou neuf heures devers le matin, ledit suppliant, estant en son hostel, envoya un sien filz, nommé Jehan Merle, de l’aage de quatorze à quinze ans ou environ, pour mener et faire pasturer ses pourceaulx aux champs, et, au regard dudit suppliant, tantost après il se parti de sondit hostel après ses bœufs pour en aller labourer aux champs ; et quand il fut ou cimetière dudit lieu de Plaisance, il oy crier sondit filz en une terre où il paissoit sesditz pourceaulx, et y avoit eu icellui suppliant en l’année presente les rabes et icelle terre labourée au droit de terraige qu’il en avoit paié à feu Pierre Merle son frère, lequel suppliant fut fort esmeu de oyr crier ainsi sondit filz qui naguères avoit esté très fort malade et n’estoit pas bien encores guery. A ceste cause, meu d’amour et affection paternelle, se transporta le plus tost qu’il peut en ladicte terre où il avoit ouy crier sondit filz, et en y allant, parce qu’il ne savoit la cause pour laquelle sondit filz crioit ainsi, à la tuicion et deffense de son corps et de sondit filz, en passant une haye, en arracha ung pal, et quand il fut arrivé en ladicte terre il apperceut sondit fils qui s’en fuyoit d’auprès ledit feu Pierre Merle, qui estoit en ladicte terre ou auprès d’icelle. Auquel sondit filz, pour ceste cause, icellui suppliant demanda tout chauldement qu’il avoit et pour ce qu’il l’avoit ainsi ouy crier, lequel lui dist que ledit feu Pierre Merle l’avoit batu d’une aiguillade du quoy il touchoit les bœufs, prins par la gorge et gecté à terre. Lequel suppliant à ceste cause dist audit feu Pierre Merle, qui estoit son frère puisné, qu’il estoit bien paillart d’avoir ainsi batu sondit filz qui ne lui demandoit riens et ne lui avoit fait aucun dommaige. Lequel feu Pierre Merle, qui estoit fort rigoreux et de petite conduite et gouvernement, dist audit suppliant qu’il n’y avoit paillart que lui, et, non contant de ce, ledit feu Pierre Merle et tout soudainement en disant lesdictes parolles, print et amassa une grosse pierre, et en s’aprouchant dudit suppliant, la lui gecta pour l’en cuider meurtrir, ce qu’il eust fait, comme il fut vraysemblable, car se ledit suppliant ne se feust destourné, il l’en eust actaint par la teste, et par le destour que fist audit coup ledit suppliant, icellui Pierre Merle ne le pust actaindre de ladicte pierre que par les espaulles, dont il lui donna ung si grant coup qu’il l’en cuida gecter par terre ; et qui plus est, ledit feu Pierre Merle, perseverant tousjours en sa malice de vouloir oultrager ledit suppliant de son corps, print et amassa encore deux autres grosses pierres en marchant à l’encontre dudit suppliant pour les y ruer lesdictes pierres, sans s’en vouloir depporter jaçoit ce que ung sien jeune filz, nommé Sauvestre Merle, criast et dist audit feu Pierre Merle, son père, qu’il se deportast et laissast en paix ledit suppliant, ce qu’il ne voult faire, mais le poursuivoit tousjours pour lui gecter lesdictes pierres. Ce que voyant ledit suppliant et qu’il ne voulloit cesser, doubtant que desdites pierres il le tuast, meurtrist ou occist, et pour deffendre son corps, fut meu de frapper icellui feu Pierre Merle dudit pal sur le bras afin de lui faire tumber lesdictes pierres à terre en manière qu’il ne les lui peust gecter et que icellui suppliant peust eviter à sa fureur : mais il advint que, par cas de fortune, ledit coup s’adressa sur la teste dudit feu Pierre Merle, au dessus ou environ l’oreille, dont il tumba à terre et en fut emporté en son hostel par aucuns gens qui illec survindrent. Et au regard dudit suppliant, s’en alla en sondit labouraige, non pensant avoir fait chose audit feu Pierre dont il deust encourir en aucun danger de sa personne. Et toutesvoyes le lendemain, environ souleil levant, ledit feu Pierre Merle, par faulte d’avoir esté bien pensé et gouverné ou aultrement, à l’occasion dudit coup alla de vie à trespassement. Et combien que dudit cas ainsi avenu que dit est ledit suppliant feust et soit très desplaisant et que en autres choses et ait été bien famé et renommé, sans avoir esté actainct d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, neantmoins doubtant rigueur de justice s’est absenté dudit païs, où il n’oseroit jamais converser ne repairer, se nostre grace et misericorde ne lui estoit impartie humblement requerant icelle. Pour ce est il que nous, etc., voulans, etc., audit suppliant ou cas dessus dit avons quicté, remis et pardonné et par la teneur, etc., quictons, remettons et pardonnons le fait et cas dessus declairé, avec toute peine, etc., en mettant au neant, etc. Satisfacion, etc. ; et l’avons restitué, etc. Et sur ce imposons, etc. Si donnons en mandement, etc., au seneschal de Poitou ou à son lieutenant et à tous, etc., que de noz presens grace, etc., ilz facent, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, ou mois de novembre l’an de grâce mil cccc. quatre vings, et de nostre règne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. R. du Breuil. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXVII Novembre 1480

Rémission accordée à Jehannot de Puyreau, charpentier, chargé de jeune femme et de quatre petits enfants, demeurant au village des Pérelles, « en la paroisse de Chaillac

Chaillac, près de l’Anglin, faisait partie de l’élection du Blanc, et était par suite compris dans la sénéchaussée de Poitou, comme le confirme l’adresse des présentes lettres de rémission.

, ou pays et conté de Poictou, coupable de meurtre sur la personne de son oncle Simon de Puyreau ». Celui-ci, qui prétendait avoir un droit de passage dans un pré appartenant à son neveu, avait, le 22 octobre précédent, commencé à démolir la clôture de ce champ, quand ledit Jehannot survint et voulut l’en empêcher ; il s’ensuivit une discussion, puis des voies de fait, et Simon ayant frappé son neveu avec un pieu, celui-ci d’un coup de sa cognée lui fit une grave blessure au ventre, dont il mourut la nuit suivante. « Si donnons en mandement au seneschal de Poictou ou à son lieuxtenant à Montmorillon, etc. Donné à Tours, ou mois de novembre l’an de grace mil cccc. quatre vings et de nostre règne le vingtiesme ».

AN JJ. 208, n° 66, fol. 36 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 375

MDCLXVIII Novembre 1480

Rémission accordée à Louis Voyer, chevalier, seigneur du Breuil et de l’Ayraudière en Bas Poitou, qui, irrité des refus répétés d’obéissance de Jacques Minault, son serviteur, l’ayant congédié et celui-ci s’obstinant, malgré toutes les sommations, à demeurer en son hôtel, diffamant et insultant ledit Voyer et sa femme, enfin poussé à bout, l’avait frappé de trois ou quatre coups d’épée.

AN JJ. 208, n° 143, fol. 85 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 375-381

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre amé et feal Loys Voyer, chevalier, seigneur du Brueil et de l’Ayraudière

Nous avons rencontré dans un de nos précédents volumes un Louis Voyer (alias Le Voyer), chevalier, propriétaire du moulin à vent de Chinon en la châtellenie de Palluau, mentionné dans un acte de juin 1455. (Arch. hist. du Poitou, t. XXXII, p. 407.) C’était, suivant toute vraisemblance, le père de ce seigneur du Breuil et de l’Ayraudière. Ces personnages ne sont pas mentionnés sur les généalogies imprimées de la famille de Voyer, illustrée aux xviie et xviiie siècles par les marquis de Paulmy et les comtes d’Argenson. Appartenaient-ils à une branche ignorée de cette maison ou étaient-ils d’une famille différente ? Le nom de la femme de Louis Voyer, Françoise Poussard, cité plus bas, ne peut servir à une identification plus exacte, cette dame ne figurant pas non plus sur la généalogie de cette famille. (Dict. des familles du Poitou, 1re édit., t. II, p. 546 et suiv.) Dans des lettres de rémission données en mars 1481, au profit de Louis Ojart (ci-dessous n° MDCLXXX), relatant un épisode de cette expédition de Bourgogne et de Luxembourg, à laquelle prit part l’arrière-ban de Poitou, dont il est question dans les présentes lettres, notre personnage est nommé Louis Le Voyer, chevalier. Sur les rôles du ban et de l’arrière-ban convoqué, au mois de décembre 1491, sur l’ordre de Charles VIII, par Jacques de Beaumont, sr de Bressuire, sénéchal de Poitou, on lit : « Châtellenie d’Aizenay ; Messire Louis Voyer, chevalier, en homme d’armes » parmi « ceux qui sont dans la garnison de Tyfauges et ordonnez eux y tenir par cy-devant, qui est frontière, lesquelz ont deuement fait la monstre audit lieu ». (Roolles des bans et arrière-bans de la province de Poictou, Xaintonge et Angoumois, Poictiers, 1667. Réimpr. Rouen, 1883, in-4°, p. 64.)

ou bas païs de Poitou, aagé de vingt six ans ou environ, contenant que ledit suppliant, qui est noble et extraict de noble lignée et de bonne et notable maison, en ensuivant ses predecesseurs, qui tousjours se sont vertueusement exposez ou fait de noz guerres et à la deffense de nostre royaume, dès son jeune aage est allé ou saint voyage de Jherusalem, auquel voiage il a prins l’ordre de chevalerie. Depuis lequel temps et jusques à present il nous a bien et loyaument servy ou fait de noz guerres, toutes foiz et quantes que avons mandé les autres nobles dudit pays à noz ban et arrièreban et mesmement ès voyages puis naguères faiz ès païs et duchié de Bourgongne et de Luxembourg

D’avril à juin 1480. Le 2 juin de cette année, Louis écrivait de Corbeil aux officiers de la ville de Reims, pour les remercier de leur empressement à fournir des vivres à l’armée de Bourgogne et leur demander d’en envoyer aussi à son armée du Luxembourg. (Vaësen, Lettres de Louis XI, t. VIII, p. 211.) Dans cette expédition, il s’agissait notamment de reprendre Virton, qui, l’année précédente, avait été occupé par le comte de Chimay, lieutenant général de Maximilien, et qui fut, en effet, reconquis par le seigneur de Chaumont, gouverneur de Champagne, à la tête d’une armée de vingt à vingt-quatre mille hommes, « environ la Pentecouste », qui tombait cette année-là le 21 mai. (Molinet, Chronique, ch. lxxi, t. II, p. 239.)

en l’estat d’homme d’armes et en sa personne, accompaigné de feu Jacques Mynault, son serviteur, jeune homme de l’aage de xxviii. à xxx. ans ; lequel Laurens (sic) Mynault avoit promis servir ledit suppliant, son maistre, bien et loyaument et de lui obeir. Pendant lequel voyage et lors que ledit suppliant estoit oudit païs de Luxembourg, considerant qu’il n’auroit assez argent pour s’entretenir oudit voiage et armée, envoya ledit Mynault dudit lieu de Luxembourg en sa maison oudit païs de Poictou, pour querir certaine somme de deniers laquelle il lui chargea apporter. Lequel Mynault de ce ne tint compte, ainçois, sans consideracion du serment par lui fait audit suppliant de le servir et obeir ainsi que serviteur doit faire à son maistre, se tint audit lieu de l’Ayraudière, faisant grant chière, sans soy socier de la peine et travail et de la pauvreté et misère où estoit ledit suppliant en ladicte armée, par deffault d’avoir son dit argent, et tellement que à cause de ce il convint audit suppliant avoir et porter de grans pertes souffertes et neccessitez ; desquelles choses ledit suppliant ne tint compte et les porta le plus paciemment qu’il peut, sans en faire autre chose audit Mynault, son serviteur, fors tant seullement qu’il lui dist que c’estoit mal fait à lui de ainsi se estre mocqué de lui. Et depuis, et tantost après que ledit suppliant fut retourné en sa maison dudit voyage de Luxembourg, pour ce que mandasmes les nobles dudit païs pour aller en nostre ville de Bourleaulx et duché de Guienne, pour aucunes choses touchant le bien de nostredit pays, icellui suppliant, voiant qu’il lui convenoit hastivement partir selon nostre mandement, dist audit Mynault qu’il se preparast pour le servir et l’acompaigner, ainsi qu’il avoit par cy devant [fait] pour aller en nostredit païs de Guienne ; ce que ledit Mynault ne voult faire, disant qu’il estoit malade et ne povoit aller audit voyage, dont ledit suppliant fut fort desplaisant. Et pour ce qu’il fut adverti de son mauvais vouloir et qu’il ne vouloit demourer que pour lui faire desplaisir, lui dist qu’il le tenoit pour suspect, sans autrement vouloir declairer la cause de la suspection, et lui deffendi sur peine d’encourir son indignacion et de lui faire desplaisir en sa personne qu’il vuidast sondit hostel et qu’il ne le trouvast plus en cesdiz hostelz, et convint audit suppliant querir autres serviteurs pour aller oudit voyaige. Et depuis, adverti que lediz Mynault estoit encores en sondit hostel de Brueil, par le conseil d’aucuns ses amis, lui manda et fit faire commendement par ung de ses serviteurs qu’il vuidast d’icellui, autrement s’il ne le faisoit qu’il lui feroit desplaisir. Duquel commandement ledit Mynault qui estoit ung homme fier, courageux et plain de grant orgueil, ne tint compte, ains en contempnant ledit suppliant son maistre, et sondit commendement, respondit audit messaiger qu’il ne s’en partiroit point et que ledit suppliant ne l’oseroit assaillir et que, s’il lui touchoit en aucune manière, il le tueroit tout roidde. Et voiant par ledit suppliant l’obstinacion dudit Mynault, manda à Françoise Poussarde, sa femme, qu’elle le fist vuider de sondit hostel, autrement qu’il ne seroit contant d’elle et oultrageroit ledit Mynault, s’il le y trouvoit plus oudit hostel ; ce que ladicte Françoise dist audit Minault, en le priant que s’en voulsist aller. Mais, quelque remonstrance qu’elle lui sceust faire, icelui Mynault ne voult s’en departir, disant que maulgré icellui suppliant il y demourrait, et que, s’il s’essayoit à lui faire mal, qu’il le tueroit. Lesquelles [parolles] et responses furent rapportées audit suppliant estant sur sondit partement, qui pour hastiveté dudit voyaige ne peut retourner en sondit hostel du Breuil, pour faire vuider ledit Mynault. Et en cet estat lui convint partir très courroussé à l’encontre dudit Mynault à cause desdictes parolles. Et tantost après en faisant ledit voyaige et qu’il fut auprès de Sainct Jehan d’Angely, lui fut dit et rapporté que icelui Mynault en persistant en son mauvais vouloir et pour iujurier et diffamer ledit suppliant et sadicte femme s’estoit vanté et vantoit publicquement qu’il n’avoit tenu que à luy qu’il n’avoit deshonnoré et fait son plaisir de la femme dudit suppliant, sa maistresse, qui est bonne et notable femme et qui tousjours s’est bien et honnestement gouvernée, et de fait qu’il avoit eu sa compaignie charnelle, et qui pis est, comme ung mençongier et desloyal, et pour mettre division entre ledit suppliant et sadicte femme, avoit dit et proferé publicquement que ledit suppliant avoit fait de grans donnes à plusieurs jeunes filles, pour avoir leur compaignie, contre verité. Lesquelles parolles et injures ainsi dictes et proferées par ledit Mynault, ledit suppliant a portées en son couraige le plus doulcement et paciemment qu’il a peu, sans à cause d’icelles faire mal, desplaisir ne dommaige audit Mynault, lequel, quelques prohibitions et deffenses qui lui eussent esté faictes de ne se trouver ès hostelz dudit suppliant, se y tenoit ou ès environs oultre son gré et voulunté, en disant et soustenant que si ledit suppliant l’assaillast, il le mettroit à mort. Depuis lesquelles choses et le xviie jour d’octobre derrenier passé, ledit suppliant qui estoit allé aux champs pour voller, sans penser audit Mynault, qui, quinze jours ou trois sepmaines par avant estoit malade de fièvres, lesquelles lui estoient survenues, ainsi qu’on dit, à cause de ce que en alant courant après ung oyseau il s’estoit avallé le boyau et grevé l’un des genitoires, tellement qu’il estoit beaucoup plus gros que l’autre, le rencontra ou villaige de la Carrebiere en ladicte chastellenie de la Roche Guion (sic) près ledit hostel de l’Ayauldiere (sic). Et incontinant que icellui Mynault eut apperceu ledit suppliant, non content des injures ou oultrageuses parolles ainsi par lui dictes et proferées de la personne dudit suppliant et sadicte femme, en les vituperant et chargant sans cause de leur honneur et bonne vie et renommée, qui sont nobles gens, notables et de bonne vie et renommée, s’efforca de rechief injurier ledit suppliant, son maistre, en sa presence, en lui disant plusieurs grans obprobres, lesquelz ledit suppliant qui, comme dit est, est chevalier, ne peut lors dissimuller et de chaude colle et tout mal meu, tira son épée et en donna trois ou quatre coups audit Mynault tant sur la teste et bras que autres parties de son corps. Depuis lesquelz coups ainsi baillez, icellui Minault qui

Sic. Ce mot est à supprimer.

, à cause desdictes fièvres et boyau rompu, ainsi qu’il est vraysemblable, douze jours après ou environ, par faulte de bon gouvernement ou autrement, est allé de vie à trespas. A l’occasion duquel cas et coups dessusdiz, combien que icellui Mynault, avant son trespas ait dit qu’il ne mouroit à cause desdiz coups, ainçois desdictes fièvres et dudit boyau, ledit suppliant, doubtant en estre aprehendé par justice, s’est absenté du païs, ouquel ne ailleurs en nostre royaume il n’oseroit jamais converser, repairer ni demourer, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, si comme il dit, en nous humblement requerant icelles. Pour quoy nous, etc., voulans, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné et par la teneur, etc., quictons, remettons et pardonnons le fait et cas dessusdiz avec toute peine, etc. En mettant au neant, etc. Satisfacion, etc. Et l’avons restitué, etc. Et sur ce imposons silence, etc. Si donnons en mandement, etc. au seneschal de Poitou, à son siège de Fontenay le Conte et à tous noz autres, etc., que de noz presens grace, etc., ilz facent, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, ou mois de novembre l’an de grace mil cccc. quatre vings, et de nostre règne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, a la relacion du Conseil. J. de Moulins. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXIX Décembre 1480

Rémission donnée en faveur de Thomas Maynier, prévôt fermier de la vicomté d’Aunay, qui, le 20 juillet 1479, revenant d’une tournée d’informations et d’exploits avec Philippon Meslier, sergent de ladite vicomté, qui l’avait accompagné, avait frappé celui-ci mortellement à la suite d’une rixe qu’il avait provoquée.

AN JJ. 209, n° 93, fol. 55 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 381-389

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir reçeue l’umble supplicacion de Thomas Maynier, pouvre homme, chargé de femme et d’enfans, natif d’Aulnay le viconte en nostre pays et conté de Poictou, aaigé de xl. ans ou environ, contenant que le dimanche xxe jour de juillet mil cccc soixante dix neuf, ledit suppliant se tira par devers et aux personnes de Jehan Meslier, clerc greffier dudit lieu d’Aulnay, Phelippom Meslier son frère, et Pierre Noble, sergens pour le viconte dudit lieu, et leur dist qui leur convenoit aler avecques luy, le landemain grant matin, qui estoit le lundi ensuivant, ou lieu de Charbonnieres pour illec faire certaines informacions et execucions à l’encontre de aucunes personnes selon le contenu des roolles, deffaulx et amendes dudit suppliant, car en ladicte année il estoit prevost fermier de ladicte viconté d’Aulnay. Et dist ausdiz sergens icelluy suppliant qu’il leur convenoit passer au lieu de Grant Fief, pour ce que la femme de maistre Bertrand Brun, dame dudit Grand Fief, luy avoit mandé qu’il allast parler à elle. Lesquelz Phelippom Meslier et Pierre Noble, sergens dessusdiz, respondirent qu’ils estoient contens d’aler avec luy ; aussi fist ledit greffier, mais qu’il luy convenoit premier aller aux Touches de Perigny, en disant qu’il se leveroit de si grant matin qu’il seroit à heure de disner audit lieu de Charbonnières et que ledit suppliant fist bien appareiller à disner ; et ce pendant fist diligence de trouver les tesmoings qu’il entendoit faire examiner. Et le lundi, qui estoit le landemain, ledit suppliant s’en alla du grant matin oyr messe à Nostre Dame des Carmes et luy, oye messe, se rendit à son hostel ; aussi fist ledit Noble, et attendirent illec ensemble grant piece ledit Phelippon Meslier, pensant qu’il fust allé à la messe à l’église parrochialle, pour ce qu’ilz ne l’avoient veu à celle de Nostre Dame des Carmes. Et voyant ledit suppliant que ledit Phelippon Meslier ne venoit point, il l’envoya querir par deux foiz et tant que ledit Phelippom Meslier luy manda qu’ils s’en allassent devant, et qu’il luy convenoit pensser la jambe de Pierre Charpentier, procureur dudit lieu d’Aulnay, premier que partir. Et alors voyans par ledit suppliant la response dudit Phelippom, luy et ledit Noble se mirent à chemin pour aler audit lieu de Charbonnières. Et quand il furent entre le Brueil et ledit lieu de Charbonnières, ils virent une mulle dedans les avoynes de Estienne Godet, laquelle mulle qui appartenoit à ung appelé Jehan Nault de Limosin, dudit lieu de Charbonnières, ledit suppliant fist prendre par ledit Pierre le Noble sergent dudit lieu, et la fist amener en prison en l’ostel dudit Limosin, comme ceulx qui ne savoient pas qu’elle fust sienne et la bailla ledit sergent en garde, soubz la main dudit viconte, à la fille ou bruz dudit Limosin, laquelle leur dist que ladicte mulle estoit leur, et à laquelle ledit suppliant respondy qu’elle estoit mieulx tenue de la garder. Et ce fait, lesdiz suppliant et Noble s’en allèrent audit lieu de Grand Fief où illec ilz desjeunèrent, et se plaingny ladicte dame dudit Grand Fief audit suppliant, comme prévost fermier dessus dit, de aucuns qui luy couppoient et robboient ses boys. Et ainsi que ledit suppliant et Noble estoient à table desjunant, comme dit est, survint ledit Phelippom Meslier, ayant une espée soubz son braz, lequel leur dist telles parolles ou semblables en effect et substance : « Y sont ilz ou ils n’y sont pas ? » A quel propoz il le disoit ne scet ledit suppliant. Et, en ce faisant, ladicte dame dudit Grant Fief lui dist qu’il se mist à table et qu’il desjunast avec ledit suppliant et Noble, ce qu’il fist. Et après ce qu’ilz eurent prins leur reffection, prindrent congié de ladicte dame dudit Grant Fief et s’en allèrent tous troys ensemble audit lieu de Charbonnières, en l’ostel d’un appelé Michel Regnault, et dist ledit suppliant à l’ostesse qu’elle leur appareillast à disner et qu’elle leur mist des poullez, si elle en avoit. Laquelle luy dist qu’elle n’en avoit point, mais qu’elle avoit bien ung aigneau. Et lors ledit suppliant lui dist qu’elle en mist la moictié au feu ; en disant oultre par ledit suppliant audit Phelippom qu’il allast veoir par le villaige s’il trouveroint point de poullez à vendre, pour l’amour dudit greffier, son frère, qui devoit venir, comme dit est. Lequel Phelippon fist semblant d’aler oudit village sercher desdiz poulez ; mais il n’y ala point, ainsi que disoit ladicte hostesse, ains en tua ung de ceulx de ladicte hostesse, comme elle disoit en soy courossant très fort contre ledit Phelippom, et tant que ledit suppliant, qui dormoit sur une arche, se reveilla du bruit que ladicte hostesse faisoit, et demanda que c’estoit. Et ladicte hostesse luy dist et respondy que ledit Phelippom avoit tué une de ses poulles et se doubtoit bien qu’il en eust tué plus largement. Et lequel suppliant dist à ladicte hostesse qu’elle ne criast plus et que ledit Phelippom la paieroit bien, et sur ce ladicte hostesse se apaisa. Et après ce, lesdiz suppliant, Noble et Phelippom, et aussi Colin Porret, sergent dudit lieu qui la estoit survenu, attendirent grant piece ledit greffier pour veoir s’il viendroit ou non ; lequel ne vint point. Et ilz voyans qu’il ne venoit point et qu’il estoit comme sur le passement de mydy, ledit suppliant dist à la dicte hostesse que elle mist la nappe ; laquelle mise, se mirent à table ledit suppliant, Colin Porret, Pierre Noble et Loys Nault, prebstre, frère dudit Nault à qui estoit ladicte mulle ; et ledit Phelippom Meslier estoit lors alé oudit villaige et ne vint jusques à ce qu’ilz eurent presque à demy disné, et luy avoit l’en fait sa souppe, dont il ne voult menger, mais en fist faire d’autre en ung plat. Et quant les dessus diz eurent disné et que ledit suppliant eut conté à lostesse, ledit Loys Nault, prebstre, dist audit suppliant qu’il paieroit le disner, en lui requerant qui lui pleust donner l’amende de ladicte mulle à son dit frère. Lequel suppliant dist lors qu’il n’en feroit riens. A quoy les dessus diz sergens, Porret et Phelippom et Noble, luy dirent qu’il luy devoit donner, parce que c’estoient les hommes qui plus faisoient de biens aux officiers d’Aulnay que nulz autres de la viconté. Et ledit suppliant leur respondy qu’il estoit content, mais que unes foiz il auroit cinq soulz en sa main et qu’il avoit serement pour aucuns debatz que luy avoit fait le nepveu dudit prestre, mais qu’il feroit bien qu’il seroit content de luy. Et alors ledit prebstre gecta devant ledit suppliant dix onzains, comme celluy qui se pensoit que ledit suppliant ne luy en voulsist rien donner. Et ledit suppliant print lesdiz onzains et les bailla audit prestre et luy dist qu’il payast ledit escot et ledit Noble, sergent dessus dit, de la prinse qu’il avoit faicte de ladicte mulle ; lequel sergent dist lors qu’il n’en demandoit riens, pour l’amour dudit prestre, qui paya lors ledit escot à ladicte hostesse. Combien il y avoit en ladicte somme n’est recors ledit suppliant.

Et incontinant ladite hostesse payée, ledit Porret monta à cheval et dist qu’il s’en allait besoigner pour les besoignes de la vicontesse

Jeanne de Vendôme, fille unique de Pierre de Vendôme, chevalier, seigneur de Segré, et de Marie d’Acigné, avait épousé vers 1440, étant veuve de Robert, seigneur de Fontaines, François II de Montbron, vicomte d’Aunay, baron de Maulévrier et de Matha, sur lequel cf. ci-dessus, p. 99, note.

 ; car le viconte n’estoit pas pour lors au pays. Et si toust qu’il fut party, lesdiz suppliant, Phelippom et Noble se misdrent à chemin pour eulx en aler audit lieu d’Aulnay tous troys ensemble, et ledit Loys Nault les conduisit jusques oultre le ponthoreau dudit lieu de Charbonnières et print congié d’eulx et ledit suppliant noble et Phelippom entreprindrent entre eulx qu’ilz passeroient par le villaige du Brueil ; et quant ilz furent au carrefour qui tourne pour aller dudit lieu de Charbonnières audit lieu d’Aulnay et audit lieu du Brueil, ledit Noble dist audit suppliant qui estoit devant luy, telz motz ou semblables en effect et substance : « Monsieur le Prevost, vous me devez douze deniers de la prinse de la mulle. » Lequel suppliant luy respondy qu’il ne luy devoit riens et qui les avoit donnez au dessus dit Loys Nault, prebstre. Et sur ce, ledit Phelippom Mestier, voulant entreprendre la parolle et noyse contre ledit suppliant, dist oultragement audit suppliant telles parolles en effect et substance : « Vous luy devez sa prinse de par le dyable ? » Auquel respondy ledit suppliant telz motz ou semblables : « Je croy que vous estes foulx ou yvres tous deux ! Vous savez bien que vous m’avez fait donner mon amende à messire Loys Nault, et aussi vous, Noble, lui avez donné vostre prinse. » Lequel Phelippom respondy et dist de rechief oultrageusement audit suppliant : « Nous ne sommes foulx ne yvres. Mais vous ne voulez jamays payer chose que vous devez. » Et lors ledit suppliant luy respondy qui ne lui devoit riens ou que, s’il luy devoit, que c’estoit bien pou de chose. Et ledit Phelippom luy dist que si faisoit cinq ou six journées pour avoir esté avec luy prendre une femme, laquelle il avoir fait exécuter. Lequel suppliant dist audit Phelippom qu’il s’en estoit bien payé et qu’il en avoit eu ung sac où il y avoit une nappe et pluseurs autres bagues, et aussi qu’il avoit prins de deux houmes des Oulmes ou de la Bournaire, pour leurs chevaulx et jumens qu’il avoit prins en meffect, de chacun d’eulx, deux onzains ainsi qu’on avoit dit et rapporté audit suppliant. Et en ce disant, ledit Phelippom, plain de mauvays et felon couraige, tira son espée du fourreau et en frappa du plat ledit suppliant tel coup par la teste, sur l’ouye du cousté senestre qu’il l’estourdit et en tumba à terre, et luy fist cheoir dehors de la teste son chappeau et bonnet et luy bailla ung tel coup que ladicte espée ploya dudit cop. Lequel suppliant ainsi tombé à terre se leva après au mieulx qu’il peut et amassa son chappeau et bonnet et en soy levant trouva une pierre grosse comme le pain d’un denier ou environ, laquelle il gecta vers ledit Phelippom ; mais ne scet s’il luy attaigny ou non. Et lors ledit Phelippom, non content de ce, mais en perseverant tousjours en son maulvays vouloir, se efforça de rechief de frapper ledit suppliant d’estoc de ladicte espée. A quoy il failly, parce que icellui suppliant se evada et sailly hors du chemin et dist audit Noble, qui est sergent comme dit est, qu’il prensist ledit Phelippom. Mais tout ce non obstant, icelluy Phelippom de rechief et perseverant tousjours de pis en pis et tendant à tuer et meurtrir ledit suppliant, haulsa de rechief son espée, dont il se efforça donner sur la teste dudit suppliant, en jurant et blasphemant le nom de Dieu qu’il le tueroit, et ne mourroit d’autres mains que des syennes. Et lors ledit Noble dist audit Phelippom que il en avoit ja trop fait et que la vicontesse et le procureur dudit Aulnay n’en seroient pas contens. A quoy ledit Phelippom respondy et dist audit Noble telles parolles : « Je scay bien que le procureur m’en a dit, et quant je luy ay pencé sa jambe. Par la terre Dieu ! Quant je l’auroye tué, je ne m’en lairroye ja à aller soupper à ma maison », en venant de rechief et d’abondant contre ledit suppliant à toute l’espée nue, luy voulant tousjours donner sur la teste. Et lors ledit suppliant, voyant la cruaulté, malice et mauvays courage dudit Phelippom qui s’efforçoit de le tuer, tira une petite espée de Castille qu’il avoit soubz sa robbe, qui estoit dessaincte, de laquelle il rabaty le coup que ledit Phelippom lui vouloit donner, et en icellui rabatant, gecta en travers sadicte espée, de laquelle il ataigny icellui Phelippom au travers de la bouche et luy fendy les deux joues. Et lors ledit Phelippom, soy sentant blecié, retourna de grant force contre ledit suppliant o toute sadicte espée nue, soy efforçant de tousjours luy en fendre la teste. Et ledit suppliant, en gardant que le coup ne tumbast sur luy, gecta ung revers en montant et rencontra la main dudit Phelippom, de quoy il tenoit l’espée et luy couppa dudit cop les troys doiz et tellement que ladicte espée luy tumba à terre ; laquelle print lors ledit Pierre Noble. Et non contans de ce, icelluy Phelippom, voyant qu’il n’avoit point de baston, se recula et en reculant tumba à terre, et en ce faisant se efforça de amasser des pierres et menassant tousjours ledit suppliant de le tuer. Lequel suppliant, comme celluy qui estoit moult esmeu pour les coups que luy avoit donné ledit Phelippom et menasses qu’il luy faisoit de le tuer, donna à icelluy Phelippom, par chaulde colle et sang esmeu de sadicte espée deux ou troys coups sur les braz ou sur la teste, et n’est pas bonnement recors où. Et ce fait le laissa et alla audit Noble qui avoit l’espée d’icellui Phelippom doubtant qu’il voulsit estre contre luy, pour ce qu’il n’avoit voulu prendre icelluy Phelippom, à la requeste dudit suppliant, quelque requeste qu’il luy en eust fait, et auquel ledit suppliant dist qu’il luy baillast ladicte espée, dont il fist grant reffus de premiere face. Mais luy voyant que ledit suppliant estoit fort esmeu, la luy bailla. Et lors ledit suppliant mist le pié senestre dessus icelle espée, la voulant rompre, mais il ne peut, ains la ploya seulement. Et ledit Phelippom dist lors audit suppliant : « Traytre, paillart, comment me amenderas tu ce que m’as fait ? Regarde, tu m’as osté les troys doiz de la main ! » en lui monstrant sa main ; de laquelle main n’avoit entier que le pousse et le doy d’amprès. Lequel suppliant, voyant ledit Phelippom ainsi navré, fut fort esbay et regarda alentour de luy et vit une herbe appelée nyssolée et en cuillit et en frota entre ses mains et la voult bailler audit Noble et luy dist qui la mist sur les playes dudit Phelippom. Lequel Noble lui respondit qu’il n’y mettroit jà la main. Et alors ledit suppliant dist audit Noble, ainsi qu’ilz aloient tous troys ensemble, qu’il appellast les fauscheus et faneurs qui la estoient près, pour luy venir ayder à le pensser. Et dist en oultre ledit suppliant audit Noble qu’il dist à sa femme qu’elle ostast sa boete, pour ce qu’il y avoit des cedules signées du viconte et de la vicontesse dudit Aulnay et de leur procureur, tant des affaires qu’il avoit eu oudit viconte que de ladicte prevosté et qu’il luy dist qu’il n’yroit point audre Aulnay jusques à ce qu’il sceust que ledit Phelippom fust guery, et que pour Dieu on fist bien pensser de lui. Et ce dit, s’en alla ledit suppliant hors dudit pays et conté de Poictou. Et neantmoins, au moyen desdiz coups ainsi par ledit suppliant baillez, en son corps deffendant, audit Phelippom, icellui Phelippom, par le moyen d’iceulx ou par deffault de bon pencement et gouvernement, ala, le landemain, comme l’en dit après, de vie à trespas. Pour occasion duquel cas ainsi advenu que dit est, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté dudit pays, ouquel il n’oseroit ne ailleurs en nostre royaume, seurement resider et converser, se noz grace et misericorde ne luy estoient sur ce prealablement imparties, en nous humblement requerant que, attendu les choses dessus dictes et que ledit suppliant ne fust aucunement premier agresseur, mais le fut ledit deffunct non pas par une foiz mais par plusieurs, tendant à tousjours navrer et murtrir ledit suppliant, lequel a esté toujours de bonne vie, renommée et honneste conversacion, etc., il nous plaise sur ce lui impartir nosdictes grace et misericorde. Pour ce est-il, etc., audit suppliant avons remis, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous, etc. Donné à Bonne Aventure, prez Chinon, ou moys de decembre l’an de grace mil cccc, iiiixx et de nostre règne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, le sire de Saint Florentin

Jean Wisse de Gerbéviller bailli d’Allemagne, reçut, après la mort de Jacques d’Armagnac, les seigneuries de Saint-Florentin et d’Ervy-le-Châtel (Mandrot, Jacques d’Armagnac, extrait de la Revue historique, 1890, p. 111) qui avaient fait partie du duché de Nemours, lors de sa constitution définitive au profit de Charles III de Navarre, en 1407. (Arch. nat., P. 139, fol. XIV.) [L.C.]

, maistre Jehan de la Vacquerie

Jean de la Vacquerie, chevalier, alors président à mortier au Parlement de Paris. (Cf. ci-dessus, p. 316 note.)

, president, Jehan Chambon, Charles de Pontaulx

Charles des Potots fils de Léonard, maître des requêtes de l’hôtel, originaire de Franche-Comté, nommé en 1480 conseiller lai au Parlement de Dijon et maître des requêtes ordinaires, le 12 août 1482, tant par la résignation de son père que par le décès de Georges Havart, sr de la Rozière. Il mourut en 1522. (Blanchard, Les généalogies des maistres des requestes, 1670 in-fol. p. 214.)

et autres presens. J. Duban. — Visa. Contentor.

MDCLXX Décembre 1480

Lettres de création de quatre foires par an à Saint-Loup, en faveur de Jean de Dercé, chambellan du roi, seigneur du lieu.

AN JJ. 207, n° 18, fol. 9 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 389-392

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre amé et feal conseiller et chambellan Jehan de Dercé, chevalier, seigneur de Saint-Loup et dudit Dercé

Jean de Dercé, seigneur de Saint-Loup, a été l’objet d’une notice biographique. (Ci-dessus, p. 72.)

, contenant que entre ses autres terres et seigneuries il est seigneur de ladicte terre, seigneurie et chastellenie dudit Saint-Loup, assise en nostre païs et conté de Poictou, où il a plusieurs beaulx droiz et marché ancien chacun jour de samedy de l’an, et y resident et communiquent plusieurs marchans rusaulx

C’est-à-dire ruraux ; l’emploi de l’s pour l’r est fréquent dans les textes de cette époque.

, mecaniques et autres de divers estatz et condicions, pour ce que le païs est fort fertil et fondé en blez et vins ; laquelle terre et chastellenie au moien des guerres et divisions qui ont esté en nostre royaume, a esté et est fort depopulée, et seroit convenable, utille et prouffitable, pour le bien de nous et de la chose publicque du païs et des subgetz d’icelle chastellenie, y avoit et tenir foires, comme ès autres chastellenies d’icelui païs. Et à ceste cause nostre dit conseiller, qui a grant désir et affection de repopuler, accroistre et augmenter sadicte chastellenie de Saint-Loup et entretenir les subgetz et habitans d’icelle, nous a supplié et requis qu’il nous plaise y faire et creer quatre foires l’an et sur ce lui impartir noz grace et provision. Pour quoy nous, les choses dessus dictes considérées et les bons et agreables services que nostre dit conseiller nous a par cy devant faiz et fait encores presentement en court de Romme où l’avons envoyé en ambassade par devers nostre Sainct Pere pour aucuns noz affaires, et esperons que encores face ou temps avenir, inclinans par ce liberallement à sadicte requeste, et aussi afin qu’il puisse augmenter et acroistre sadicte terre et chastellenie, à icellui nostre conseiller, pour ces causes et autres à ce nous mouvans, avons fait et créé, faisons et creons, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, dores en avant, à tousjours més perpetuellement, audit lieu et chastellenie de Sainct-Loup quatre foires par chacun an, c’est assavoir l’une le jour et feste de sainct Ylaire ou mois de janvier, l’autre le lendemain de la feste Sainct Bernabé ou mois de juing, l’autre le dixiesme jour de septembre, et l’autre le jour saincte Katherine ou mois de novembre, pour y estre tenues et continuées ainsi que les autres foires des autres chastellenies et lieux de nostre païs de Poictou, et en joïr et user par nostredit conseiller et ses successeurs à tousjours mais à telz et semblables privilleiges, droiz, coustumes, travers, estellaiges, fenestraiges, forfaictures, vuidanges et despry que font et ont acoustumé faire les autres ayans foires ou païs d’environ, pourveu que à quatre lieues à la ronde dudit lieu de Sainct Loup n’y ait autres foires ausdiz jours et festes et que noz denrées n’en soient aucunement diminuez. Si donnons en mandement, par cesdictes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chacun d’eulx, si comme à lui appartiendra, que lesdictes foires ilz facent crier et publier ès villes, burgades, places marchandes, foires, marchez et assemblées du païs d’environ et partout ailleurs où il appartiendra, et dès nostre presente creacion seuffrent et laissent nostredit conseiller et sesdiz successeurs et aians cause joïr et user plainement et paisiblement, sans ce que aucun destousbier ou empeschement leur puisse estre mis ou donné ores ne pour le temps avenir esdictes foires ne aux marchans suivans et frequentans icelles, en quelque manière que ce soit, et baillant et delivrant estaulx et sièges ausdiz marchans ou et ainsi qu’ilz verront au cas appartenir, car ainsi nous plaist il estre fait, non obstant quelzconques ordonnances, mandemens ou deffences à ce contraires. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre scel à cesdictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné au Plesseys du Parc lez Tours, ou mois de décembre l’an de grace mil cccc. quatre vings, et de nostre règne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, l’evesque d’Albye

Louis d’Amboise, évêque d’Albi du 24 janvier 1474 au mois de mai 1497. (Cf. ci-dessus, p. 184 note.)

et autres presens, M. Courtin. — Visa. Contentor. Texier

Une copie de ces lettres patentes créant quatre foires par an à Saint-Loup est conservée dans le chartrier de Saint-Loup. (Arch. des Deux-Sèvres, E. 1937.)

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MDCLXXI 15 janvier 1481 (n.s.)

Lettres d’affranchissement et exemption, en faveur des coutres de l’église collégiale de Saint-Hilaire-le-Grand de Poitiers, de la taille et de tous les autres impôts.

AN JJ. 219, n° 111, fol. 69 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 392-395

Loys, par la grace de Dieu roy de France, au seneschal de Poictou, esleuz ou commissaires sur le fait des aydes ordonnez pour la guerre oudit païs de Poictou et Anjou, ou à leurs lieuxtenans ou commis, salut. L’umble supplicacion des coultres de l’église seculière et collegialle de Monsieur Sainct Hilaire le Grant de Poictiers avons receue, contenant que, à cause de leurs offices ou charges de coultres, ilz sont du corps et collège de ladicte eglise, clercs tonsurez et portans tousjours les draps et habitz ecclesiastiques, deputez au divin service et residans jour et nuyt en ladicte eglise, pour la garde des sainctes reliques, aornemans et tresor d’icelle ; pour laquelle cause et par previlleges anciens, dont ilz et leurs predecesseurs coultres de ladicte eglise ont joy et usé par tel et si long temps qu’il n’est memoire du contraire, et mesmement depuis le temps qu’ilz furent fondez et instituez sur ladicte eglise, ilz ont esté tenuz laissez et repputez francs, quictes et exemps de paier et contribuer à aucunes noz tailles, subsides, impostz et autres subvencions quelconques

Déjà par lettres données à Poitiers au mois d’avril 1431, les coutres du chapitre de l’église cathédrale avaient obtenu une exemption de toutes les impositions, ainsi que du guet et de la garde des portes de la ville, exemption confirmée par Louis XI, au mois de février 1465. Le texte en a été publié dans cette collection. (Arch. hist. du Poitou, t. XXIX, p. 20-23, et t. XXXVIII, p. 13-15.)

, mises et fait mettre sus de par nous et autrement en nostre royaume, et mesmement en nostre pays et conté de Poictou et Anjou où lesdiz coultres sont demourans, tout ainsi que sont les chanoines et autres du cueur et collège de ladicte eglise. Et de ce ont obtenu lesdiz supplians plusieurs sentences et appointemens à leur prouffit, tant en la court de vous, seneschal de Poictou, que des commissaires ou refformateurs par nous ordonnez oudit païs sur le fait des exemps, que de vous, esleuz, ou aucuns de vous, quant aucun empeschement leur estoit fait. Ce non obstant les habitans ou collecteurs des tailles des parroisses où lesdiz supplians font leurs demourances ou autres ont, aucunes années passées, tausez, assis et imposez lesdiz supplians ou les aucuns d’eulx en nosdictes tailles et autres subsides, et d’eulx exigé et encores s’efforcent exiger chacun jour grant somme de deniers, et de ce les ont tenuz et tiennent en grant involucion de procès, en venant directement contre leurs libertez et franchises, et en leur très grant grief, prejudice et dommaige ; et plus pourroit estre, si par nous ne leur estoit sur ce pourveu de nostre grace et remedde convenable, humblement requerant iceulx.

Pour quoy nous, ces choses considérées, qui sommes protecteur et garde des eglises de nostre royaume et des suppostz d’icelles, et mesmement de ladicte eglise Monsieur Sainct Hillaire qui est de fondacion royal et dont nous sommes chief, voulans par ce entretenir lesdiz supplians ou leursdictes libertez et franchises, nous mandons et commettons, par ces presentes, et à chascun de vous sur ce requis et comme à lui appartiendra, que, s’il vous est apparu ou appert que lesdiz coultres supplians soient du corps et suppostz de ladicte eglise Sainct Hillaire et que par previlleges, libertez et franchises dont ilz ont, comme dit est, aucunement jouy, ilz aient acoustumé estre francs, quictes et exemps desdictes tailles et autres impostz mis ou fait mettre sus de par nous, et que de ce, quant on les a voulu empescher en leursdictes franchises, ilz aient obtenu plusieurs sentences à leur prouffit, comme dit est, vous oudit cas tenez ou faictes tenir quictes lesdiz supplians et chacun d’eulx francs, quictes et exemps de contribuer à nosdictes tailles et autres impostz mis et à mettre sus de par nous en nostredit royaume, et ensuivant leurs dictes franchises et sentences sur ce par eulx obtenues, et tout ainsi que leurs predecesseurs en ont jouy et usé, et s’ilz ou aucuns d’eulx, leurs biens meubles ou immeubles ou sommes de deniers sont ou estoient pour ces prins, saisiz, arrestez ou autrement empeschez, et eulx enregistrez ès papiers et rolles [desdiztes parroisses

Mots effacés.

] où lesdiz supplians font leursdictes demourances, faictes leur rendre et restituer leurs diz deniers et biens meubles qui, pour ce auroient esté prins et exigez et leur mettez ou faictes mettre tantost et sans delay à plaine delivrance, et d’iceulx papiers, rolles et registres rayer et oster comme francs, quictes et exemps desdictes tailles et subsides, sans doresnavant les plus souffrir moulester ne empescher en leurs dictes libertez et franchises. Et à ce faire et souffrir contraingnez ou faites contraindre tous ceulx qu’il appartiendra et qui pour ce feront à contraindre par toutes voyes et manières deues et en tel cas requises. Car ainsi nous plaist il estre fait, non obstant oppositions, appellacions et quelzconques ordonnances, restrinctions, mandemens, deffenses et lettres subreptices, impetrées ou à impetrer à ce contraires. Mandons et commandons à tous noz justiciers, officiers et subgectz que à vous et à chacun de vous en ce faisant obéissent et entendent dilligemment.

Donné à Poictiers, le quinziesme jour de janvier l’an de grace mil cccc. quatre vings, et de nostre règne le vingtième

Le texte de ces lettres patentes a été reproduit et conservé dans une confirmation de Charles VIII, datée de Tours du mois d’avril 1488 (JJ. 219, n° 111, fol. 69 v°.) Celle-ci donne les noms des coutres alors en exercice et précise les cas d’exemption : « Lesd. coultres jour et nuyt vaquent et sont subgectz et occupez chacun en son tour pour donner les cloches en ladicte église et icelle garder … Et pour ce que lesd. coultres denommez èsd. lettres (les noms ne figurent pas dans les lettres de Louis XI) on auscuns d’iceulx sont, depuis l’octroy d’icelles lettres, allez de vie à trespas, et que de present ont esté et son en leur lieu pour coultres d’icelle église : Thomas Sauveau, Estienne Julien, Bry (sic) Garin, Jean Guyonneau, Jehan Vau, Jehan Maudroux, Jehan Garin, Jehan Godu, Jehan Triboullart, Jehan Boutineau. Jean Moyne, Jean Garni (sic une seconde fois), Colin Bigot, Jehan Pain et Thomas Mousnier, d’iceulx coultres et chacun d’eulx et autres qui seront en leurs lieux ou temps avenir, avons, en tant que mestier est ou seroit, de nostre grace, puissance et auctorité affranchiz, exemptez et eximez, affranchissons, exemptons et eximons, par cesdictes presentes, de toutes lesd. tailles, de guet et de garde de porte, et de tous autres aides et subvencions quelconques, mises et à mettre sus, pour quelque cause que ce soit, èsdiz pays de Poictou et d’Anjou … »

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Ainsi signé : Par le roy, maistres Jehan de La Vaquerie, president, Jehan Chambon, Thibault Baillet

Pour Jean de La Vacquerie, président au Parlement, Jean Chambon et Thibaut Baillet, cf. ci-dessus, pp. 316 et 372 notes.

et autres presens. J. Duban.

MDCLXXII Janvier 1481 (n.s.)

Rémission octroyée à Richard Roland, jeune ouvrier serrurier de la Roche-sur-Yon, qui, voulant s’établir à son compte et ayant réclamé ses outils à son ancien patron, Jean Papin, fut obligé de se défendre contre lui, parce qu’au refus qu’il lui opposa il joignit des voies de fait, et dans la lutte il le tua d’un coup de dague.

AN JJ. 207, n° 3, fol. 100 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 395-397

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Richard Rolant, jeune enfant de l’aage de xx ans ou environ, du mestier de serrurerie, detenu prisonnier ès prisons de la Roche sur Yon

Le texte du registre porte par erreur « la Rocheguion ».

en nostre bas pays de Poictou, contenant que dès environ la feste de sainct Michel derrenierement passée, ledit suppliant pour besoingner on fait de sondit mestier, s’aloua à ung nommé Jehan Papin, dit Janicot, serrurier demourant audit lieu de la Roche sur Yon, lequel, pour ce qu’il sceut que icellui supliant estoit et est très bon ouvrier dudit mestier, lui pria qu’il demourast avecques lui, pour lui aider à faire de l’ouvraige. Ce que ledit suppliant fist liberallement et demoura avecques icellui Papin, comme son serviteur, jusques environ le xiie jour de ce present mois de janvier, que icellui suppliant se delibera de besoingner à part lui de sondit mestier, en entencion de demourer, en priant ledit Papin qu’il lui donnast congé et le paiast de ce qu’il lui devoit. Et s’asemblèrent en la maison de Colas Blasme, hostellier demourant audit lieu de la Roche, où ilz comptèrent ensemble. Et après ce que ledit Papin eut paié icellui suppliant de ce qu’il lui devoit, s’entre quictèrent l’un l’autre en presence de plusieurs gens de bien, beurent et mengèrent ensemble et se departirent l’un de l’autre gracieusement. Et ledit jour, environ l’eure de vespres, ledit suppliant se transporta devers icellui Papin, le priant qu’il lui rendist demie douzaine de petites limes et autres besoingnes qu’il avoit aportées en sa maison, en quoy ledit Papin, qui jà estoit envieuz dudit suppliant et de quoy il avoit delibéré besoingner à part de sondit mestier, respondit en jurant et blasphemant le sang et la mort de Nostre Seigneur, que ledit suppliant n’auroit point sesdictes limes et qu’il s’estoit assez servy de celles dudit Papin. Et lors ledit suppliant lui remonstra gracieusement qu’il faisoit mal de lui retenir sesdictes limes et que sans icelles il ne se pourroit entretenir ne gangner sa vie, et qu’il auroit sesdictes limes par justice, quelque vouloir qu’il en eust. Et lors icellui Papin, tout mal meu, sans ce que icellui suppliant lui meffeist, print une pelle de laquelle il bailla ung coup sur la teste dudit suppliant. Lequel suppliant dist qu’il ne le frapast point et qu’il n’estoit plus son serviteur ; mais ce non obstant ledit Papin bailla de rechief ung coup de ladicte pelle sur la teste dudit suppliant, tellement que pour lesdiz deux cops il eut la teste enflée en deux lieux ; mais encores ledit Papin non obstant lesdictz (sic), voulut frapper de ladicte pelle sur la teste dudit suppliant. Lequel suppliant, ce voiant, tira une petite dague qu’il avoit tousjours acoustumé de porter, laquelle il couscha sur son braz et en rabati le coup par manière que la poignée de sadicte dague fut presque rompue et lui fist grant douleur ou bras. Et soy voiant ainsi oultraigé, tout mal meu et en chaude colle, donna de sadicte dague une taille sur la teste dudit Papin qui incontinant print ledit suppliant aux cheveulx et au collet, et lui print le bras dont il tenoit ladicte dague, laquelle il lui voulu oster et s’efforça de rompre le braz dudit suppliant, qui questoit de lui oster sadicte dague, et ainsi qu’ilz s’entretenoient l’un l’autre, ledit suppliant donna de ladicte dague ung estoc en la mamelle dudit Papin. Et lors se departirent, et ainsi que icellui Papin voulu courir après ledit suppliant qui jà s’en fuyoit, chey à terre tout mort. A l’occasion de quoy ledit suppliant doubtant rigueur de justice, se mist en franchise et depuis a esté constitué prisonnier ès prisons dudit lieu de la Roche sur Yon, et où il est de present detenu en grant povreté et misère et en dangier de miserablement finir ses jours, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant icelles, etc. Pour quoy nous, etc., voulans, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessus ditz avecques toute peine, etc., et l’avons restitué, etc., satisfacion, etc. Et sur ce imposons, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, à son siège de Poictiers et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Nyort, ou mois de janvier l’an de grace mil cccc. quatre vings, et de nostre règne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Texier. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXXIII Janvier 1481 (n.s.)

Lettres de grâce données en faveur de Guillaume Garenjon, homme de labour de la paroisse de Saint-Eanne, qui avait été condamné par contumace par la justice de Lezay à être pendu, pour le meurtre de Jean Gendre, dit Grugeau, advenu dans une rixe sept ans auparavant.

AN JJ. 207, n° 209, fol. 97 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 398-400

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Guillaume Garenjon, povre homme de labour, aage de vingt cinq à vingt six ans ou environ, chargé de femme et enfans, demourant en la paroisse de Sainct Eanne en nostre païs et conté de Poictou, contenant que, le seziesme jour de mars l’an mil cccc. soixante treize ou environ, ung jour de dimanche au soir, environ jour couchant, il alloit pour lever certains bourignons ou engins d’ouzils

D’après le Dict. de l’anc. langue fr. de F. Godefroy, v° Oisil, ce mot signifie osier. Quant au mot bourégnon, il ne cite que l’exemple emprunté au présent texte et l’interprète : filet à mailles serrées et propre à prendre des petits poissons (t. VIII, Complément).

à prandre poisson, à lui appartenans, comme loches et vairons ou autre menuyse qu’il avoit tenduz cedit jour en l’eaue ou rivière appellée la Chevaleresse, qui decourt près le villaige de la Rivière en ladicte parroisse de Sainct Eane. Et après que ledit suppliant eut levé deux d’iceulx engins, il monta au long de la dicte eaue pour lever le tiers qu’il avoit tendu en icelle à l’endroit du champ de l’Aumosnier de Trenantheuil, et trouva ledit suppliant où estoit ledit engin tendu ung nommé Jehan Gendre, dit Grugeau, et Pierre Gendre, son frère, enfans de Jehan Gendre, demourant audit villaige de la dicte Rivière en la dicte parroisse, et apperceut icellui suppliant que ledit Pierre Gendre levoit ledit bourignon ou engin qui lui appartenoit et le mist soulz son bras. Auquel Pierre Gendre dist telles ou semblables parolles : « Lasche mon bourignon » ; lequel Pierre Gendre dist que non feroit. Et en proferant ces parolles, ledit suppliant, cuidant recouvrer sondit engin et bourignon, dist qu’il l’auroit, et en le voulant oster audit Pierre, vint vers lui ledit Jehan Gendre, dit Grugeau, son frère, qui tenoit une palle ferrée, appellée palle basse, de laquelle il vouloit assigner et bailler sur la teste dudit suppliant. Lequel veant que ledit coup descendoit sur sa teste, voulant repeller et obvier audit coup et au mauvais et dampnable vouloir dudit Grugeau, mist icellui suppliant ung baston appellé boulouer

Dans le même ouvrage, ce nom n’est indiqué qu’avec le sens de jeu de boules.

au devant de ladicte pelle pour la faire virer et tourner à part, non voulant ne cuidant frapper ledit Grugeau, mais seullement pour destourner et faire virer ledit coup ; et en ce faisant, ledit baston ou boulouer dudit suppliant alla contre ladicte pelle basse et esluyda tellement qu’il cheut contre la tenple ou teste dudit Grugeau ou autrement ne sut pas bien en quelle partie de sa teste, parce qu’il faisoit fort noir et obscur et qu’il estoit nuyt, quoy que soit, pour occasion duquel coup ledit Gendre dit Grugeau, par faulte de bon gouvernement ou autrement, est allé de vie à trespas. Et combien que ledit suppliant ait fait satisfacion aux parties dudit deffunct civillement, et qu’il feust bien son amy et affin, et n’avoit que entencion de soy couvrir et repulser au coup que lui vouloit bailler ledit deffunct, et ne le vouloit occire ne mourdrir, ce neantmoins pour occasion duquel cas ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du païs et a esté appellé a ban par la justice de Lezay

La seigneurie de Lezay appartenait alors à Jacques de Beaumont, sire de Bressuire. (Cf. le volume précédent, p. 235, n. 3, et p. 315, n. 1.)

, de laquelle il est justiciable, et a esté procédé tellement contre lui qu’il a esté condampné en son absence a estre pendu et estranglé et ses biens confisquez. Par quoy icelluy suppliant n’oseroit jamais converser ne repairer audit païs, se noz grace, quictance, rémission et pardon ne lui estoient sur ce imparties, si comme il dit, en nous humblement requerant iceulx, et mesmement que, attendu que ledit cas n’est avenu de guet apensé ne propos délibéré et que pour icellui ledit suppliant a fait satisfacion aux parties, et que en tous ses autres cas et affaires il a tousjours esté de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans jamais avoir esté acteint ne convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, nous lui vueillons sur ce impartir nostre grace et misericorde. Pour quoy nous, etc., voulans, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessus déclaré, avecques toute peine, etc. En mettant au néant, etc. Et l’avons restitué, etc., satisfacion, etc. Et sur ce imposons, etc. Si donnons en mandement, etc., au seneschal de Poictou ou à son lieutenant à son siège de Nyort, et à tous, etc., que de noz presens grace, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Azay le Brulé, ou mois de janvier l’an de grace mil cccc. quatre vings, et de nostre règne le vingtiesme

Ces mêmes lettres sont enregistrées une seconde fois, sans le moindre changement au texte, dans JJ. 208, n° 45, fol. 24 v°.

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Ainsi signé : Par le conseil, Disome. — Visa, Contentor, Budé.

MDCLXXIV Février 1481 (n.s.)

Rémission obtenue par Pierre Guinefolleau, bachelier ou jeune homme à marier de la Petite-Boissière, poursuivi en justice, parce que lui et les autres bacheliers de ladite paroisse, qui recueillaient, suivant la coutume, de paroisse en paroisse, les dons et aumônes dits aguil’anneuf, destinés à entretenir une lampe en l’église de la Boissière, ayant été assaillis par les bacheliers de Rorthais, en étaient venus aux mains avec ceux-ci, et avaient tué l’un d’eux, nommé René Gaudin.

AN JJ. 207, n° 5, fol. 3 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 400-403

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Pierre Guynefolleau, pouvre jeune homme de labour, aagé de xxiii ans ou environ, contenant que pour l’entretennement des affaires et necessitez de l’eglise parroichialle de Sainct Honnoré de la Petite Boessière, dont ledit suppliant est parroissien, que est une très pouvre église, petitement et pouvrement fondée, les jeunes enfans à marier d’icelle parroisse, autrement appellez les bacheliers ou varletz à marier ont de coustume ancienne d’aller par la dicte parroisse et autres circonvoisines par chacun an, les vigille et jour de la feste de la Circoncision Nostre Seigneur, amasser les aulmosnes que donnent les parroissiens des dites parroisses ausdiz varletz à marier, dont ilz entretiennent en ladicte eglise une lampe ardente avecques grant quantité de lamperons davant l’image du Crucefix, ainsi que font les autres varletz à marier des autres parroisses du Bas-pays de Poictou, et pour ce faire ledit suppliant, Jehan et Colas les Baudriz, Jehan Rouault, Mery Texier, Jehan Marchandeau, Gilles de Lavau et Jehan Brisseteau, taborin, se assemblèrent la vigille de la feste de la Circoncision Nostre Seigneur, derrenière passée, pour aller querir et amasser les dites aumosnes que on appelle aguilanneuf, par ladicte parroisse de la Boessière et autres parroisses circonvoisines, et y amasserent plusieurs aulmosnes, comme oreilles et autres pièces de pourceau, pour les vendre et adenerer au plus offrant et derrenier encherisseur, pour les deniers qui en ystroient mettre et emploier à l’entretiennement desdiz lampe, lamperons et autres affaires de ladicte église. Et mesmement se transportèrent les dessus diz au lieu du Sordoys estant de la paroisse de Sainct Jouyn de Mauleon, pour demander au seigneur et dame dudit lieu ledit aguilanneuf, qui voulontiers le leur donnèrent. Et combien que en ce faisant ilz ne feissent aucune injure ne desplaisir à Mathurin Asserin, autrement appellé bastard Vincent Moreau, soy disant un des varletz à marier ou bacheliers de ladicte parroisse de Rorretoys, Estienne Marineau, Colas Chessé et autres varlez à marier d’icelle parroisse et que au moien de ce ilz deussent avoir conceu haine et ne deussent avoir insidié, guecté ni porté nuysance ausdiz varletz de la Boessière ce neantmoins les dessusdiz de la parroisse de Rorretoys, ladite vigille de Circoncision Nostre Seigneur derrenière passée, saichans que les dessus diz varletz à marier de ladite Petite Boessière au département qu’ilz faisoient ou lieu du Sourdeys pour eulx en aller en leur parroisse, passèrent par ung petit pas ou ruisseau d’eaue, vulgaument appellé le pas du Fonteneau, guectèrent et attendirent venir lesdiz varlez de la Petite Boissière dudit lieu du Sordeys, et quant les diz varletz ou bacheliers à marier de la Petite Boissière furent audit pas du Fonteneau, lesdiz varletz ou bacheliers dudit lieu du Rorretoys jusques au nombre de quinze ou environ, embastonnez, chacun d’eulx d’un gros baston, saillirent sur les ditz varletz ou bacheliers à marier de ladicte Petite Boessière. Et incontinant lediz Charron, dit bastart, adroissa ses parolles ausdiz bacheliers de la Petite Boessière ensemble, et des autres compaignons qui voulurent contraindre lesdiz bacheliers de la Petite Boessière leur donner aguillanneuf de leurs dictes rilles, oreilles et aulmones qu’ilz avoient ainsi eu assez pour la cause dessus dicte ; ce que ne voulurent faire lesdiz bacheliers de la Petite Boessière, au moien de quoy ledit bastard, d’un grant et gros baston qu’il avoit frappa ledit Brisseteau, taborin, sur la teste ung grant coup. Lequel suppliant, voyant lui et sesdiz compaignons ainsi guectez, insidiez et injuriez par lesdiz bastart et bacheliers de Rorretoys et ledit Brusseteau ainsi frappé par ledit bastard et que encores ledit bastart s’efforçoit batre et courir sus audit suppliant, icellui suppliant, en voulant resister à la mallice des dessus diz, frappa dudit baston qu’il avoit ledit bastart et le fist tomber à terre, qui incontinant se releva et de rechief frappa ledit Brisseteau. Durant lesquelles questions d’entre lesdiz suppliant, Brisseteau et bastart, avoit grans question entre feu René Gaudin, bachelier de ladicte parroisse de Rorretoys, Jehan Baudry, compaignon dudit supliant que ledit Gaudin et ses compaignons vouloient oultrager, batre et occire, dont ledit suppliant fut dolent et courroucé, ou moien de quoy icellui supliant, en deffendant lui et ses compaignons qui estoient ainsi assailliz sans cause, dudit baston qu’il avoit frappa ledit René Gaudin sur la teste tellement qu’il cheut à terre, et derechief lui donna dudit baston sur la teste à l’endroit de la temple ; desquelz coups ledit Gaudin, dedans ung jour naturel, par faulte de bon gouvernement ou autrement ala de vie à trespassement. A l’occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du païs, et depuis a esté adjourné à comparoir en personne par devant le seneschal de Mauleon et contre luy donnez certains deffaulz, et doubte que on vueille proceder contre lui par rigueur de justice, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, en nous humblement requerant que, attendu que en tous ses autres faiz il a tousjours esté homme de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans avoir jamais este actaint ne convaincu d’aucun villain cas, blasme ou reprouche, nous plaise lui impartir nos dictes grace et misericorde. Pour quoy nous, etc., audit supliant avons quicté, remis et pardonné, le fait et cas dessus dit avec toute peine, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous, etc., que de noz presens grace, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, ou mois de février l’an de grace mil cccc. quatre vings, et de nostre regne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. De Villechartre. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXXV Février 1481 (n.s.)

Rémission accordée à Jean Baudry le jeune, de la paroisse de la Petite-Boissière, poursuivi devant le sénéchal de Mauléon pour les mêmes faits.

AN JJ. 207, n° 4, fol. 2 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 404-407

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Baudry le jeune, aagé de xxiiii ans ou environ, filz de feu Jehan Baudry, contenant que, le derrenier jour de decembre, qui est la vigille de la Circoncision Nostre Seigneur, ledit suppliant en la compaignie de Jehan Rouault, Colas Baudry, Pierre Guynefolleau, Mery Texier, Loys Marchandeau et Gillet Delavau, bacheliers de la parroisse de la Petite Boissière, aussi en la compaignie de Jehan Boischeteau

Ce nom est écrit plus bas « Brecheteau », et dans l’acte suivant « Brisseteau ».

, menestrier, fut par les villages de ladicte parroisse et autres illec près, mesmement ès villaiges de la Brahayère, parroisse de Saint Amand de la Fay, parroisse de Sainct Jehan de Combray, de deux ou trois autres villaiges estans en la parroisse de Rorretoys, pour prandre et recevoir les ausmones des bonnes gens qu’ilz ont acoustumé donner pour l’entretiennement d’une lampe et de seize lamperons, ainsi que de coustume est de faire de tout temps la vigille de l’an neuf, et s’apellent les diz dons aguillanneuf. Lesquelles lampe et lamperons sont pendans en l’eglise dudit lieu de la Petite Boissière devant l’image du Crucefix, et ont acoustumé estre alumées, c’est assavoir ladite lampe seulle ès jours des dimenches et les festes annuelles, devant que on fait le divin service, et lesdiz lamperons et lampe ensemble ès festes annuelles, lesquelx sont et ont acoustumé estre entretenuz des dons et aulmosnes, vendues publicquement après vespres audit lieu de la Petite Boissière, au plus offrant et derrenier encherisseur pour l’entretennement desquelles lampes ledit suppliant, en la compaignie des dessusdiz, fu ledit derrenier jour, par lesdictes parroisses. Et quant ilz furent près du rousseau de Fonteneau, il vit les bacheliers de Rorretois jusques au nombre de xiiii ou quinze, aussi ung menestrier en leur compaignie, et avoient en leurs mains de grans et gros bastons ; entre lesquelx estoient ung nommé Mathurin Charron, qui est marié et est appellé le bastard, lesquelx firent grant bruit et clameur en allant contre les dessusdiz bacheliers de la Boissière. Et quant lesdiz bacheliers de Rorretroys aprouchèrent d’eulx, l’un d’entre eulx nommé Vincent Moreau, qui se disoit roy desdiz bacheliers de Rorretoys, par grant rigueur demanda aux dessusdiz bacheliers de la Boissière qu’ilz leur baillassent aguilanneuf, et à quoy fut respondu par les compaignons dudit suppliant et par lui aux aucuns d’eulx que ce qu’ilz avoient ilz l’avoient amassé d’aumosnes, pour entretenir lesdictes lampes et lamperons et autres affaires de ladite parroisse de la Petite Boissière et qu’ilz ne leur en bailleroient riens. Et de rechief ledit Moreau, roy d’iceulx bacheliers et les autres de sa compagnie dirent qu’ilz leur osteroient les dons et aulmosnes qu’ilz avoient sinon qu’ilz leur donnassent aguilanneuf. Et estoient lesdiz dons rilles ou oreilles de porceaux et autres pièces de char qu’ilz avoient en une broche de bois dont les autres dessusdiz vouloient avoir partie. Et pour ce que ceulx de la compaignie dudit suppliant ne leur vouloient bailler ce qu’ilz demandoient, lesdiz bacheliers de Rorretois s’esmeurent très fort contre eulx, et entre autres ledit bastard avecques ung gros baston s’efforçat donner dudit baston sur la teste dudit Boicheteau, menestrier, et leva ledit baston pour frapper ledit Brecheteau, combien que les dessusdiz bacheliers de la Boissière par plusieurs foiz requirent ausdiz bacheliers de Rorretoys de les laisser aller sans leur faire aucun desplaisir, ce qu’ilz ne voulurent faire. Et parce que ledit Baudry suppliant vit les agressions dessusdictes et emocions faictes par lesdiz bacheliers de Rorretoys et que Regné Gaudin, l’un desdiz bacheliers de Rorretoys, qui avoit une grosse massue en la main frappa Loys Marchandeau, de la compaignie dudit suppliant, doubtant que aussi il ne le voulsist batre et frapper, d’un baston qu’il avoit en sa main donna sur l’espaulle ou braz dudit Regné, duquel coup il rompit son baston à ung pié et demi de sa main ; mais ledit Régné, qui estoit entallenté de mal faire, perseverant tousjours en son mauvais couraige, donna audit supliant de sadicte massue ung grant coup sur les rains ou autre partie de son corps. A ceste cause ledit suppliant, pour obvier au dangier de sa personne, print ledit Regner au collet de ses robbes et pourpoint et aussi à la gorge, et ainsi qu’il le tenoit, Pierre Guynefolleau, l’un des bacheliers de la compaignie dudit suppliant, donna d’un baston qu’il avoit sur la teste dudit Regné, dont il tomba à terre, et le residu du baston qu’il avoit en la main, le gecta en soy departant de ladicte assemblée et debat. Duquel coup ledit Regné dedans ung jour naturel alla de vie à trespassement. A l’occasion duquel cas, ledit suppliant a esté adjourné à comparoir en personne par devant le seneschal de Mauléon ou son lieutenant et doubte que on vueille procéder contre lui à rigueur de justice, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant iceulx. Pourquoy nous, etc., voulons, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessusdit, avecques toute peine, etc., en mettant au neant, etc. Et l’avons restitué ; etc., satisfacion, etc. Et sur ce imposons, etc. Si donnons en mandement, etc., au seneschal de Poictou à tous noz autres, etc., que de noz presens grace, etc., ilz facent, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Chinon, ou mois de fevrier l’an de grace mil cccc quatre vings, et de nostre règne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. Villechartre. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXXVI Février 1481 (n.s.)

Rémission accordée à Jean Rouaud et à Jean Brisseteau, jeunes gens de la paroisse de la Petite Boissière poursuivis devant le sénéchal de Mauléon pour les mêmes faits.

AN JJ. 207, n° 9, fol. 5 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 407-410

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Rouaud et Jehan Brisseteau, hommes de braz, demourans en la paroisse de la Petite Boissière, contenant que le derrenier jour de decembre derrenier passé se assemblèrent ledit Jehan Rouaud, supliant, bachelier de ladicte parroisse de ladicte Petite Boissière et non marié, avecques les autres bacheliers d’icelle parroisse en la maison on grange du prieur de la Petite Boissière, pour aller par les villaiges de ladicte parroisse et autres illecques près, pour congregier et amasser les aulmosnez et dons des demourans ès diz villaiges, lequel don on appelle aguylanneuf. Et fut ladicte assemblée des bacheliers faicte jusques au nombre de sept jeunes gens, dans aucun mauvaix propoux ne machinacion de mal faire à personne ; a laquelle assemblée ledit Jehan Brisseteau, qui avoit esté requis par lesdiz bacheliers d’aller audit aguylanneuf avec ung menestrier. Lesquelx supplians et leurs compaignons, après desjeuner et dès le matin, accompaignez dudit menestrier, allèrent par laditte parroisse et villaiges estans illec près. Et pour ce que les bacheliers de la parroisse de Rorretoys, qui est une autre parroisse à part avoient acoustumé les oultrager, en faisant ladicte queste, pour obvier qu’ilz ne feussent batuz et pour eux deffendre ou cas qu’ilz feussent assailliz, chacun des bacheliers de la Petite Boissière prindrent en leurs mains ung baston. Et quant ilz furent près d’un russeau appellé Fonteneau, ilz virent venir contre eulx les bacheliers dudit Rorretoys, qui estoient en nombre de xiii. ou xv. qui avoient avecques eulx ung menestrier et avoient chacun d’eulx en leurs mains ung gros baston ; lesquelz bacheliers dudit Rorretoys, quant ilz eurent veu et apperceu les bacheliers de la Petite Boissière firent grant criz et à haulte voix et allèrent contre lesdiz supplians et ses compaignons, avecques lesquelz estoit Mathurin Asserin, autrement dit le bastard, qui est homme marié et non pas du nombre et estat des bacheliers, lequel avoit en sa main ung gros baston. Tous lesquelx bacheliers de Rorretoys et ledit bastard à haulte voix et impetueusement demanderent aux bacheliers de la Petite Boissière : « Donnez-nous aguilanneuf ; » mais pour ce que lesdiz aguilanneuf et aulmosnes ont acoustumé estre vendues et livrées au plus offrant et derrenier encherisseur par les bacheliers de la Petite Boissière et que les deniers de la vendicion ont acoustumé estre employez à l’entretennement d’une lampe et xv ou xvi lamperons estans en ladicte eglise de la Petite Boissière, lesquelz sont allumez et ardent à chacune feste sollennelle, aussi ladicte lampe tous les dimenches, les bacheliers de ladicte Petite Boissière reffusèrent leur bailler aguillanneuf par eulx demandé. Et à ceste cause ledit bastard qui est plain de son couraige, dist que se lesdiz bacheliers de la Petite Boissière ne leur bailloient aguilanneuf, qu’ilz prandroient et osteroient des rilles, oreilles de porceau et autres pièces de char que lesdiz bacheliers de la Boissière avoient en une broche de bois et estoient les aulmones et aguilanneuf donnez par les bonnes gens, demandez et amassez par lesdiz bacheliers ; et pour ce qu’ilz furent de ce faire reffusans, ledit bastard s’efforça de leur oster et d’un baston qu’il avoit en sa main donna sur la teste dudit Brisseteau, à quoy ledit Brisseteau obvia et se tira arrière ; mais incontinant André Chapperon, l’un desdiz bacheliers de Rorretoys s’efforça frapper ledit Brisseteau d’un baston qu’il avoit en sa main, gros comme une verge de fleau, qu’il avoit prins entre les mains de Gillet Delavau et lui en donna sur les espaulles.

Et de rechef ledit bastard leva ung baston et en donna sur la teste dudit suppliant tellement qu’il le tumba à terre ; mais il se releva et en soy relevant donna la resource du baston qu’il avoit sur la teste dudit bastard, dont il tomba à terre et d’icellui coup lui fist sang et playe, ainsi chaudement et comme fort esmeu et desplaisant du coup qu’il avoit eu, frappe dudit baston incontinent Vincent Moreau sur la teste, dont il tumba à terre, lui fist sang et playe. Desquelles basteures les dessusdiz bastard et Moreau, aussi ledit Chapperon n’eurent aucune mutillacion au moins dangereuse de mort et sont leurs playes garies. Entre lesquelz bacheliers de la Petite Boissière, comme dit est, estoit ledit Rouaud, auquel pendant lesdictes questions esmeues par lesdiz bastard et bacheliers dudit Rorretoys et qu’ilz eussent commancé à frapper, fut donné d’un baston sur la teste, tellement qu’il tumba à terre ; et lui redresé, de la broche de bois qu’il avoit en sa main, en laquelle estoient lesdictes villes, frappa sur la teste d’un des enfans de Jehan Bonny, duquel autrement ne scet le nom ; et ce fait, Vincent Moreau, l’un desdiz bacheliers dudit Rorretois, donna d’un gros baston qu’il avoit sur la teste dudit suppliant tellement qu’il tumba à terre, cuidant estre mort, mais il se redressa et derechief de ladite broche donna sur la teste dudit Moreau, tellement qu’il tumba à terre. Ausquelles questions et debatz estoit present Regné Gaudin, lequel lesdiz supplians ne frappèrent ne batirent, et ne donnèrent conseil, confort ne aide de le frapper ne batre ; aussi ne le virent frapper par aucuns des bacheliers de la Petite Boissière ; bien le virent mutillé très fort [a] la teste, de laquelle blesseure et mutillacion, dedans ung jour naturel il alla de vie à trespassement. A l’occasion duquel cas lesdiz supplians se sont absentez, après ont esté adjournez à comparoir en personne par devant le seneschal de Mauleon ou son lieutenant, et illecques ont deffailli de trois assignacions on adjournemens à eulx baillez ; et a le procureur de la cour dudit lieu fait saisir et mettre en la main de le comte de Mauleon tous et chacuns les biens desdiz suplians et iceulx fait mettre en inventoires. Et n’oseroient jamais iceulx supplians converser ne repairer au païs, pour doubte de justice, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, humblement requerant iceulx. Pourquoy nous, etc., voulans, etc., auxdiz supplians avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessusdit, avec toute peine, etc. Et les avons restituez, etc., satisfacion, etc. Et sur ce imposons, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Chinon, ou mois de fevrier l’an mil cccc quatre vings, et de nostre règne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. Villechartre. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXXVII Février 1481 (n.s.)

Lettres d’anoblissement en faveur de Thomas Quisarme, médecin ordinaire du roi, demeurant à Saint-Maixent

Thomas Suyreau, dit Quissarme (surnom sous lequel il était plus connu, comme on le voit ici), sr de la Grenatière et de Surin, dans la châtellenie de Civray, d’une famille poitevine connue dès la fin du xive siècle, était établi à Châtellerault en mai 1459 et Civray pour son hôtel noble de la Grenatière et pour plusieurs seigneuries secondaires, le 6 février 1459 n.s. Attaché tout d’abord à Charles Ier d’Anjou, comte du Maine, vicomte de Châtellerault, seigneur, par don de Charles VII daté de février 1443 n.s., de Civray, Saint-Maixent, Melle, Chizé et Sainte-Néomaye (Arch. hist. du Poitou, t. XXIX, p. 146-152), ce prince le pourvut de la charge d’aumônier de la Vieille-Aumônerie des femmes et filles trouvées de Saint-Maixent, puis de celle de juge de la prévôté du lieu. Après le 10 avril 1473 n.s., date de la mort de Charles d’Anjou, Thomas Quissarme entra au service de Louis XI, dont il devint le médecin ordinaire. Fixé définitivement à Saint-Maixent par son mariage avec Marguerite Minet, fille d’un riche bourgeois de cette ville, il se constitua un important domaine dans la région, où il acquit entre autres Danzay, arrière-fief de l’abbaye de Saint-Maixent, sous le nom duquel furent connus ses descendants. Il avait cessé de vivre avant le 16 juin 1485. M.A. Richard a tracé la biographie de ce personnage (nous la résumons ici, n’ayant rien à y ajouter) dans le beau volume qu’il a consacré à l’un des arrière-petits-fils du médecin de Louis XI. (Un diplomate poitevin de XVIe siècle, Charles de Danzay, ambassadeur de France en Danemark. Poitiers, 1910, in-8°. Mémoires de la Société des Antiquaires de l’Ouest, troisième série, t. III, année 1909.)

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AN JJ. 207, n° 31, fol. 15° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 410-413

Ludovicus, Dei gracia Francorum rex. Probitatis merita, nobiles actus gestusque laudabiles et virtutum insignia quibus persone decorantur et ornantur merito nos inducunt ut eis justa oppera, proprio Creatoris exemplo, tribuamus et eos eorumque posteritatem et prolem favoribus congruis et nobilium honoribus, ut nomen rei consonet, attolamus ut ipsi hujusmodi prerogativa letentur ceterique ad agenda que bona sunt ardencius aspirant et ad honores suffragantibus virtutum, bonorum operum meritis adipiscendis allicientur et advollent. Notum igitur facimus universis, presentibus et futuris, quod nos, attendentes vitam laudabilem, morum honnestatem fidelitatemque et alia quamplurimum virtutum merita, que in dilecto et fideli medico nostro ordinario, magistro Thoma Quissarme, in medicina doctore, commorante in loco Sancti Maxencii senescallie Pictavensis, nonnullorum fide dignorum testimonio novimus suffragari, pro quibus non inmerito gratum apud nos se reddit et acceptum, nos personam et prolem ipsius honorare volentes sic quod sibi et posteritati sue ac proli perpetuum cedere (?) valeat ad honorem, eumdem magistrum Thomam Quissarme, causis premissis necnon ecciam intuitu laudabilium et gratorum serviciorum per ipsum nobis, in dicto statu et officio medicine et aliis priscis temporibus impensorum speramusque quod ad huc faciat in futurum, cum tota ejus posteritate et prole utriusque sexus in legitimo matrimonio procreata et procranda et eorum quemlibet de nostre regie potestatis plenitudine et speciali gracia nobilitamus per presentes nobilesque facimus et habiles redimus ad omnia et singula quibus ceteri nobiles nostri regni utuntur et uti possunt et consueverunt, ita quod ipse magister Thomas ejusque posteritas et proles masculina in legitimo matrimonio procreata et procreanda a quocumque milite voluerint singulo milicie valeant decorari. Concedentes eidem magistro Thome Quissarme universeque posteritati sue ac proli, ex legitimo matrimonio procreate et procreande quod ipsi et eorum quilibet in omnibus et singulis suis causis, actibus, locis et rebus in judicio et extra, pro nobilibus et ut nobiles ab omnibus de cetero teneantur et in perpetuum ponentur, quibuscumque nobilitatibus, privillegiis, prerogativis, franchisiis, honoribus, libertatibus et juribus universis et singulis ; quibus ceteri nobiles dicti regni nostri gaudere possunt et utuntur paciffice, libere ac quiete utantur et gaudeant et quod ipse [Thomas] Quissarme ejusque posteritas et proles de legitimo matrimonio procreata et procreanda, feuda, retrofeuda nobilia aliasque possessiones nobiles, quecumque sint et quacunque prefulgeant auctoritate, acquirere possint acquisitaque et jam habita per eum ejusque posteritatem et prolem, ac in futurum acquirenda et habenda, perpetuo retinere, habere, possidere licite valeant atque possint ac si fuissent vel essent ab antiquo originaliter nobiles et à personis nobilibus ex utroque latere procreati, absque eo quod ea veleas aut aliqua earum in parte vel in toto vendere seu extra manum eorum ponere nunc vel quandolibet in futurum, cogantur nec quod dictus magister Johannes (sic) Quissarme nec sui aliquam financiam propter hoc nobis seu nostris nunc nec quomodolibet in futurum, solvere teneantur ; et quam quidem financiam, quecumque sit, eidem magistno Thome sueque posteritati et proli, nate et nasciture, premissorum consideracione aliisque de causis ad hoc nos moventibus, donavimus et quictavimus, de nostra ampliori gracia, per presentes, manu nostra signatas. Quo circa a dilectis et fidelibus gentibus compotorum nostrorum et thesaurariis, senescallo Pictavensi ac ceteris justiciariis et officiariis nostris, presentibus et futuris, prout ad eum pertinuerit, tenore presentium damus in mandatis quatenus dictum magistrum Thomam Quissarme et ejus posteritatem et prolem utriusque sexus, in legitimo matrimonio procreatam et procreandam, nostris presentibus nobilitacione, dono, quictacione et gracia uti et gaudere faciant et permittant paciffice et quiete, nec ipsos aut eorum aliquem contra presentium tenorem ullatenus inquietant aut molestant nunc nec quomodolibet in futurum, non obstantibus quod summa ad quam financia dicta ascendere potest non sit hic aliter designata, ordinacionibus, deffensionibus et mandatis ad hoc contrariis non obstantibus quibuscumque. Quod ut firmum et stabile perpetuo perseveret in futurum, nostrum presentibus duximus aponi sigillum. Salvo in aliis jure nostro et in omnibus alieno. Datum apud locum des Forges, in mense februarii anno Domini millesimo ccccmo octuagesimo et regni nostri vicesimo

Par une lettre missive datée de Bonaventure-lès-Chinon, le 4 mars 1481 n.s., Louis XI notifia à la Chambre des comptes l’octroi à Thomas Quissarme et à sa postérité légitime de ces lettres d’anoblissement, « et luy avons donné, ajoute-t-il, la finance qui nous en pourroit estre pour ce deue, en faveur des bons, grans et continuelz services qu’il nous a faiz et fait chascun jour, tant en son dit office et estat de médecin que autrement en plusieurs manières ». (J. Vaësen, Lettres de Louis XI, t. IX, p. 10.)

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Sic signatum : Loys. Per regem, G. de Marle. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXXVIII Février 1481 (n.s.)

Rémission octroyée à Pierre Soteau, marchand de Bressuire, coupable d’un meurtre. Obligé de se défendre contre Jehan et Olivier de La Brunetière, frères, qui avaient envahi son hôtel de la Chamacrière et voulaient le tuer, parce que ledit hôtel avait été saisi à sa requête sur Guyard de La Brunetière, leur oncle, et vendu sur décret, il avait été aidé par un prêtre, nommé Jacques Chausson, qui d’un trait d’arbalète avait tué ledit Olivier.

AN JJ. 208, n° 155, fol. 93 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 413-418

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Pierre Soteau

Le chartrier de Saint-Loup renferme plusieurs actes relatifs à Pierre Soteau, de Bressuire. Nous en citerons quelques-uns. En 1454, étant procureur de la fabrique de la paroisse Saint-Jean, il passa avec le curé une transaction pour les indemnités de certains dons et legs faits audit curé et à la fabrique. (Arch. des Deux-Sèvres, E. 1747, fol. 44.) Jacques de Beaumont le nomma en 1456, receveur de Bressuire (Original, id., E. 1296.) Deux registres de ses comptes montrent qu’il remplissait déjà ses fonctions en 1452 ; le premier comprend les années 1452-1455, et le second les années 1455 à 1458. Le registre suivant est de 1467 à 1470 ; le receveur n’est plus alors Pierre Soteau, mais Guillaume Bordin (id., E. 1782 à 1784), ce dernier le fut sans interruption jusqu’en 1483. Après avoir été poursuivi à Thouars pour le meurtre d’Olivier de La Brunetière, Pierre Soteau releva appel au Parlement touchant l’entérinement de ses lettres de rémission, combattu par Milet de La Brunetière, fils de la victime. On ne trouve sur cette affaire que deux mandements de la cour, l’un du 14 décembre 1481, le second du 14 mai 1485, prescrivant de procéder à une enquête. (Arch. nat., X2a 45, aux dates ; le second est transcrit à la fin du registre.)

, marchant demourant à Bressuire, aagé de soixante cinq ans ou environ, contenant que ledit suppliant, entre ses autres domaines et heritaiges, est seigneur de l’ostel de la Chamacrière et de ses appartenances, auquel lieu et hostel il a acoustumé aller, venir, converser, couscher et lever souventesfoiz pour besoingner en ses affaires touchant le revenu dudit hostel, tellement que, le mercredi xxiiiie jour de janvier derrenierement passé, ledit suppliant estant allé de ladicte ville de Bersuire audit lieu de la Chamacrière en entencion d’aller besoingner en ses affaires, demoura et coucha la nuyt dudit jour en sadicte maison de la Chamacrière. Et l’endemain jour de jeudi xxve dudit mois, lui estant en sondit hostel, environ l’eure de onze heures du matin, survindrent en icellui à son desceu Jehan et Olivier de la Brunetière

Il a été question dans un de nos volumes précédents (Arch. hist. du Poitou, t. XXIX, p. 352, note) de Jean de La Brunetière le jeune, compromis gravement dans l’affaire de François de Montcatin, capitaine de la Roche-sur-Yon, contre Geoffroy Ferron, trésorier de France. Le fragment de généalogie de cette famille qui se trouve dans le Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. II, p. 58, n’est pas assez complet et assez sûr pour que l’on puisse dire si ce Jean et le frère d’Olivier, victime de Pierre Soteau, sont un seul et même personnage. Guyard de La Brunetière, leur oncle, n’est pas nommé dans cette généalogie, non plus que Milet, fils d’Olivier. Mais le Jean mentionné dans les présentes lettres doit, semble-t-il, être identifié avec Jean de La Brunetière, écuyer, prisonnier à la Conciergerie du Palais à Paris, le 22 mai 1469, appelant d’une sentence du sénéchal du Poitou, qui l’avait condamné a 50 livres parisis d’amende envers le roi, à 50 livres aussi envers sa partie et à tenir prison jusqu’au payement, parce qu’il était convaincu d’avoir usé de contrainte, de menace et de violence contre un nommé Jean Champtefain pour lui extorquer un acte de renonciation à une rente de 240 écus et de 16 charges de seigle, qu’il lui devait. L’arrêt de la cour, rendu le 23 juin suivant, éleva les amendes de 50 à 60 livres parisis. (Arch. nat., X2a 35, date du 14 mai 1469 ; X2a 36, fol. 161 v°). Le 3 juillet 1471, le même Jean de La Brunetière avait été condamné à une autre amende de 100 livres parisis envers le roi et ses biens avaient été saisis pour le payement. (X2a 38, fol. 76.)

, frères, qui estoient incongneuz audit suppliant, mesmement ledit Olivier qui avoit vestu sa teste d’un petit chapperon qui lui covroit son visage ; c’est assavoir ledit Jean de la Brunetière à l’uys devant ledit hostel disant par plusieurs foiz telles ou semblables parolles : « Hau, Monsieur du Puy Caffier, ouvrez, ouvrez ; ce sont voz amis les sergens de Pousauges qui veullent parler à vous, pour vostre grant bien. » Et ce pendant qu’il admusoit ledit supliant desdictes parolles, ledit Olivier entra par derrière, devers le jardin, en ladicte maison, en laquelle estoit lors ledit suppliant, Jacques Chausson, prebstre, et cinq autres personnes qui avoient disné ledit jour en ladicte maison avec ledit suppliant, qui est homme doulx, paisible, bien vivant, conversant et frequentant avecques ses voisins et congnoissans, estant en nostre protection et sauvegarde especial deuement publiée et signiffiée, tellement que lesdiz Jehan et Olivier de la Brunetière, frères, n’en povoient pretendre cause d’ignorance. Ausquelz il n’avoit meffait ne mesdit ; mais lui estant en reffuge paisible en sadicte maison, ledit Olivier qui premier entra en icelle et ayant une espée nue et desgaignée en sa main, vint courir sus audit suppliant en l’agressant et assaillant, en intencion, comme il montroit par effect, de le vouloir tuer et occir, de quoy faire s’efforça de tout son povoir ledit Olivier, en jurant et blasphemant le nom de Dieu qu’il tueroit ledit suppliant ; ce qu’il eust fait, ce n’eust esté que ledit suppliant, doubtant la fureur dudit Olivier, se retira de l’alée de ladicte maison où il estoit en l’estable d’icelle. Et ce pendant, ledit Olivier ouvrist l’uys [de] devant d’icelle maison audit Jehan de la Brunetière son frère, et fut contrainct ledit suppliant des prandre ung levier ou barre de fer qu’il trouva derrière l’uys de l’estable, pour soy deffendre et resister aux coups que lui donnoit icellui Olivier de la Brunetière, ou autrement il l’eust murdry de son espée. Et incontinant ledit Jehan de la Brunetière entra en ladicte maison une epée nue en sa main, et tous deulx ensemblement et soudannement vindrent courir sus audit suppliant et illec l’eussent tué, se ne feust ledit Jacques Chausson prebstre, lequel print une javeline qu’il trouva en la dicte maison, pour secourir, deffendre et aider audit suppliant et empescher lesdiz de la Brunetière qu’ilz ne l’occissent. Laquelle javeline rompit par force des coups d’espée que bailla ledit Jehan de la Brunetière, entre les mains dudit prebstre, et s’efforçoient de tout leur povoir de murdrir et occir icellui prebstre et ledit suppliant, tellement que à grant peine peurent sauver leurs vies et resister à leurs fureurs et violences. Et en les reboutant et eulx retirant hors de ladicte maison, disoient lesdiz frères que lesdiz suppliant et prebstre ne mourroient d’autres mains que des leurs et qu’ilz mettroient le feu en ladite maison et les fesoient bruler en icelle et les menassoient toujours qu’ilz les tueroient. Aussi s’estoient ilz vantez et jactez paravant ladicte agression tant ou lieu de Montnomblet que ailleurs, par plusieurs foiz, mesmement ung jour ou deulx devant, batre, murdrir et occir ledit suppliant, en haine de ce que à icellui puis aucun temps ença avoit esté adjugé par arrest de la court de Parlement ledit hostel de la Chamacrière et ses appartenances, pour raison de certaine rente qu’il avoit sur ledit hostel, lequel par avant l’adjudication dudit decret, avoit appartenu à Guyard de la Brunetière, oncle paternel desdiz Jehan et Olivier de la Brunetière. Et voyant ledit Chausson prebstre que lesdiz frères perseveroient tousjours en leur mauvaise voulenté et qu’ilz retournoient vers ledit hostel, print une arbaleste qui estoit en icellui, laquelle il banda et par dessus mit ung raillon ou trait ferré et suyvy lesdiz de la Brunetière jusques sur la chaussée d’un petit estang qui est des appartenances dudit hostel distant d’icellui d’un giect de pierre ou environ, afin qu’ilz ne retournassent. Et oyant ledit suppliant les parolles et noises qui estoient entre lesdiz de la Brunetière et prebstre, doubtant qu’il n’y eust murdre, yssit hors de sadicte maison tenant en sa main une espée nue pour la deffense de sa personne, et alla près dudit estang, pour faire retirer ledit prebstre auquel il dist qu’il s’en retournast et qu’il ne leur meffeist aucunement ; ce que ne voult faire ledit prebstre, mais desbenda ladicte arbaleste et dudit raillon ou traict, ainsi que dit est ainsi qu’elle estoit chargée, frappa ledit Olivier ung coup en l’ung de ses coustez, duquel coup icellui Olivier, ung jour ou deux après, par deffault de bon gouvernement et d’estre bien pensé et habillé ou autrement, alla de vie à trespassement. A l’occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du païs et n’y oseroit jamais retourner ne converser, mais seroit en voie de s’en aller en estranger païs finer miserablement ses jours, se nostre grace ne lui est sur ce impartie. Humblement suppliant que, attendu ce que dit est, mesmement que lesdiz de la Brunetière, ausquelz il ne deist ne meffeist oncques d’aucune chose, mais pensoit estre seur et paisible en sa maison, furent agresseurs et par force et violence entrerent en son hostel, en entencion, comme il apperceut, de le vouloir tuer et murdrir, ce qu’ilz eussent fait se ledit prebstre ne l’eust secouru et aidé à les rebouter par force contre force, ainsi qu’il est permis, pour sauver leurs vies et corps deffendans, les grans menasses dont lesdiz de la Brunetière usoient, que ledit suppliant suivy ledit prebstre pour le faire retirer, et ne fut jamais d’entencion ne de vouloir, dès que lesdiz de la Brunetière furent hors de son hostel, de leur faire aucun dommaige ou desplaisir, et ce que ledit prebstre debenda ladicte arbaleste contre ledit Olivier fut contre la deffense que ledit suppliant lui avoit sur ce faicte, qu’il a tousjours esté de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans jamais avoir esté actainct, ne convaincu d’aucun villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise lui impartir sur ce nostre grace et misericorde. Pour quoy nous, etc., voulans, etc., audit suppliant, avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessus ditz avecques toute peine, etc. En mettant au néant, etc., satisfacion, etc. Et sur ce imposons silence, etc. Et l’avons restitué, etc. Si donnons en mandement, etc., au seneschal du Poictou ou à son lieutenant et accesseur à sa court ordinaire de Thouars, et à tous, etc., que de noz presens, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, ou mois de février l’an de grace mil cccc quatre vings, et de nostre règne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Disome. Visa. Contentor, Texier.

MDCLXXIX Mars 1481 (n.s.)

Rémission donnée en faveur de Jean Regeault, jeune clerc de Bressuire, âgé de vingt-deux ans, récemment promu diacre, coupable du meurtre d’un nommé Antoine Parroissien, valet cordonnier de ladite ville, qui, avec d’autres compagnons armés, l’avait attaqué lui et une jeune fille qu’il fréquentait.

AN JJ. 207, n° 43, fol. 21 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 418-420

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Regeault, jeune filz de l’aage de XXII ans ou environ naguères proveu ès ordres de diacre, contenant que ledit suppliant depuis dix ans en ça s’est tousjours tenu et a demouré en la ville de Bressuyre pour estudyer et aprandre son service, en esperance d’estre homme d’église. Durant lesquel et puis peu de temps en ça, il s’est acointé d’une jeune fille nommée …

Blanc de cinq ou six mots sur le registre.

, avecques laquelle il s’est par plusieurs fois trouvé et frequenté en l’ostel de Phelippot de Baillon, demourant en ladicte ville de Bressuyre. Et pour ce que, le quinziesme jour de ce present mois de mars, ledit suppliant fut adverty que feu Anthoine Parroissien, varlet cordouannier, le menassoit de tuer, et que luy et austres compaignons de ladicte ville de Bressuyre avoient entreprins de ribler ladicte jeune femme, icellui suppliant la transporta en ung hostel de ladicte ville ouquel demeure Brachain (sic) Touay, poullailler pour illec la tenir en seureté. Et ledit jour, environ l’eure de XI heures de nuyt, ledit feu Parroissien et ses compaignons, armez et embastonnez d’espées et autres bastons invasibles, se transportèrent en l’ostel dudit Abrahan, ausquel ilz entrèrent par force et violence, faisant grant bruit et tumulte, mesmement ledit Parroissien, lequel juroit et regnioit le nom de Dieu, nostre createur, qu’il tueroit ledit suppliant ; auquel bruit ledit suppliant qui estoit en sa chambre ouvrit l’uys d’icelle qui estoit pour veoir quelz gens s’estoient. Et si tost qu’il l’eust ouverte, apperceut ledit Parroissien qui montoit jà en l’eschelle ou degré de la chambre dudit suppliant, aiant une espée nue en sa main et une pierre en l’autre, pour vouloir batre et oultrager ledit suppliant. Et lors ledit suppliant, pour éviter sa fureur, se voult retirer en sadicte chambre. Et ce voyant, ledit feu Parroissien tout esmeu lui deist : « Ha ! ribault, traistre, c’est toy que je quiers, » et en disant ces parolles, gecta contre ledit suppliant ladicte pierre qu’il tenoit, cuidant l’en frapper par la teste ; pour ce que ledit suppliant gauchist au coup, il l’actaingnit seullement par le cousté, duquel coup il le blessa très griefvement. Et adonc ledit suppliant, considérant l’oultrage à lui fait et les menasses dudit Parroissien, et qu’il s’efforçoit monter en sa dicte chambre pour obvier à sa fureur, print ladicte pierre dont il l’avoit frappé ou autre qu’il trouva près de lui et en repulsant l’oultrage à lui fait, la gecta à l’encontre dudit feu Parroissien, de laquelle par cas d’avanture, il l’actaingnit par la teste, a cause duquel coup il tomba à terre, tellement qu’il la convint emporter chex le barbier, et comme on l’abilloit, dist que ledit suppliant avoit fait que saige de l’avoir frappé de ladicte pierre, et que s’il ne l’eust frappé, il l’eust tué. Et depuis en perceverant en son mauvais vouloir, estant au lit malade, retira et dit par plusieur foiz lesdictes parolles et, s’il pouvoit guerir, que jamais ledit suppliant ne mourroit que par ses mains. A l’occasion duquel coup, par faulte de bon gouvernement ou autrement, ledit feu Parroissien, trois jours après, est allé de vie à trespas. Pour l’occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur, etc. Pourquoy nous, etc., voulans, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessus dits avecques toute peine, etc., en mettant au neant, etc. ; et l’avons restitué, etc., satisfacion, etc. Et sur ce imposons, etc. Si donnons en mandement, etc., au senechal de Poictou ou à son lieuxtenant à Touars, et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, au mois de mars, l’an de grace mil cccc. quatre vings, et de nostre regne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. De Moulins. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXXX Mars 1481 (n.s.)

Rémission donnée en faveur de Louis Ojart, écuyer, remplaçant son père au ban et l’arrière-ban du Poitou sous le commandement du sr de Bressuire qui avait assisté sinon pris part à une rixe entre deux de ses compagnons d’armes, Gilles Le Bascle et Nicolas Gendrot, à Arnay en Bourgogne où avaient été envoyés les nobles du Poitou, rixe qui se termina par la mort dudit Le Bascle.

AN JJ. 207, n° 63, fol. 30 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 421-428

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Loys Ojart

Nous avons rencontré précédemment plusieurs membres de la famille Ojart ou Oujart (parfois même Ogeard, comme on va le voir), dont le plus ancien à notre connaissance est Jean Ojart, membre du conseil du sire de Parthenay dès 1360, sénéchal de Thouars en 1377. (Arch. hist. du Poitou, t. XXIV, p. 94 note.) Simon Ojart, mort en 1430, se qualifiait chevalier, seigneur du Bois-aux-Ojars. Il ne nous est pas possible de déterminer le lien de parenté qui existait certainement entre ce dernier et Louis Ojart, écuyer, dont le père était, suivant toute vraisemblance, Guillaume Ojart, capitaine de Thouars à la fin de l’année 1491, qui se fit remplacer au ban du Poitou, réuni sur l’ordre du roi, par Jacques de Beaumont, sire de Bressuire, aux mois de novembre et décembre de cette année par son autre fils « Pierre Ogeard ». Quant à Louis, il est inscrit aussi sur les rôles de cette convocation, en qualité d’homme d’armes, remplaçant Jean Rouault, de la Rousselière, « qui est de fort ancien âge » (Roolles des bans et arrière-bans de la province du Poictou, Xaintonge et Angoumois, Poictiers, 1667, in-4°. Réimpr. Nantes, 1883, p. 65 et 71).

, escuier, homme de guerre, contenant que après le ban et arrière-ban crié de par nous ceste présente année ou païs de Poictou, le père d’icellui Loys Ojart qui est homme noble, vivant noblement, né et extraict de noble lignée, fit mettre sus en habillement de guerre ledit Loys, son filz aisné, pour nous servir ou lieu de lui ou fait de nosdictes guerres, pour ce qu’il n’est pas homme qui de sa personne y peust servir. Lequel Loys Ojart fut receu par nostre ami et feal conseiller et chambellan le sire de Bressuyre, capitaine ou lieutenant general pour nous des nobles et autres dudit païs de Poictou qui ont acoustumé de servir esdictes guerres. Il s’en partit avec les autres nobles dudit païs de Poitou et se trouva ung jour de jeudi ou mois de avril derrenier passé, près le village d’Arnay soubz Viteau ou païs de Bourgogne, en la compaignie du Roy de Quanarie

Quel est le personnage désigné ainsi ? Nous avons pensé tout d’abord qu’il pouvait s’agir d’un descendant de Gadifer de la Salle, le conquérant, avec Jean de Bethencourt, des îles Canaries (Arch. hist. du Poitou, t. XXI, p. 141, 259), mais on ne sait même pas s’il laissa des héritiers de son nom et par qui fut recueillie sa succession. Ce ne serait donc qu’une hypothèse bien vague. D’autre part, on lit dans une histoire généalogique de la noblesse de Touraine : « Hardouin Le Bâcle, qui a continué la lignée, épousa par contrat du 20 novembre 1519, Jeanne de La Voirie, de maison illustre de Touraine, des seigneurs de Lavauguyon et du Petit-Thouars. Cette dame avoit pour frère un grand homme de mer, lequel se rendit maistre des isles de Canaries où il commanda en qualité de vice-roy, l’espace de plus de vingt ans ». (L’Hermite-Souliers, Inventaire de l’histoire généalogique de la noblesse de Touraine, in-fol., p. 344.) Nous donnons cette indication pour ce qu’elle vaut, sans dissimuler que si cette date de 1516 est exacte, il eût fallu une grande différence d’âge entre la sœur et le frère pour que celui ci pût déjà en 1480 être qualifié roi des Canaries. Nous ne connaissons pas d’ailleurs de généalogie de la famille de La Voirie, le prénom même de ce frère nous échappe. Sur les rôles du ban et de l’arrière-ban du Poitou, on trouve trois membres de cette famille. Louis de La Voyrie, de la châtellenie de Thouars, qui seroit son homme d’armes, Mathurin de La Voyrie, de la châtellenie de Parthenay et Jean de La Voyrie, de la châtellenie de Mortagne, tous deux en qualité d’archers. (Roolles des bans et arrière-bans de la province du Poictou, etc., Poictiers, 1667, in-4°, Réimpr. Nantes, 1883, p. 53, 65 et 71.) L’on connaît aussi un Rolland de La Voyrie, « seigneur de Thouars », auquel, en récompense de ses services de guerre. Louis XI, par lettres données à Mortagne, le 27 décembre 1472, fit don de quinze arpents de terre en pâturages, six entre le bourg de Lerné, le lieu de Montpensier, et Seuilly l’Abbaye en la châtellenie de Chinon. (Arch. nat., JJ. 197, n° 295, fol. 160 v° et 166).

qui avoit la charge de partie des nobles dudit pais de Poictou soulz ledit seigneur de Bersuire. Et quant ledit Roy de Quanarie fut près ledit villaige d’Arnay avecques sadicte compaignie, il les fit logier par fourriers et fut baillé ledit villaige d’Arnay pour trois bandes ou chambrées pour les logier et fournir de vivres tant qu’ilz seraient oudit villaige. L’une desquelles bandes ou chambrées estoit ung nommé Jacques de Montournois

Cf. les renseignements réunis sur différents membres de cette famille dans notre t. X. (Arch. hist. du Poitou, t. XXXV, p. 121-122, note, 382, note.) Quant à Jacques de Montournois, nommé ici, nous n’avons rien trouvé de particulier sur son compte.

, le seigneur des Bouchaulx et de la Riviere avec leurs serviteurs, qui povoient estre en nombre de neuf à dix chevaulx, l’autre bande ou chambrée estoit feu Gilles Le Bascle, les gens et serviteurs de Loys Le Voyer

Alias Voyer ; voy. ci-dessus, p. 376 et note.

, chevalier, qui povoient estre en nombre de dix à douze chevaulx ou environ. Et l’autre bande ou chambrée estoit Nicolas Gendrot

Nicolas Gendrot obtint personnellement des lettres de rémission pour ce meurtre au mois d’août 1480. Elles sont imprimées à leur date (p. 337 ci-dessus) avec quelques notes sur ce personnage.

, escuier, chief de ladicte chambre, Raffaël Garreau, son serviteur, Guillaume Luysler, Jehan Ganne

Jean et Colin Ganne, de la châtellenie du Blanc, se présentèrent au ban de novembre-décembre 1491, mais furent renvoyés dans leurs foyers « parce qu’ils sont pauvres ». (Roolles des bans et arrière-bans de Poictou, p. 75.)

, son nepveu, ledit suppliant et ung nommé Pierre Symon. Et tantost après que lesdictes trois bandes furent arrivées oudit villaige d’Arnay, ledit de Montournois, ledit feu Gilles Le Bascle, que que soit ses gens et aussi ceulx dudit Le Voyer, chevalier, se rendirent et trouvèrent au logis ouquel estoient descenduz lesdiz Gendrot et suppliant, et illec departirent ledit villaige avecques les manans et habitans d’icellui les plus egallement qu’ilz peurent, et tellement que chacun se tint pour contant de son logeys, et en ce faisant fut dit entre eulx que l’un d’eulx ne fourrageroit point le logis de l’autre en quelque manière que ce feust. Et le samedi emprès penultime jour dudit mois d’avril, environ heure de midy l’une des femmes et hostesse desdiz Gendrot et suppliant, qui leur estoit demourée, entre autres pour les fournir, se trahit par devers eulx, en eulx complaingnent et disant qu’elle les avoit fourniz et pourveuz, avec ceulx de leur chambrée, au mieulx qu’elle avoit peu, et que par ce moien ledit feu Le Bascle ne autres de sa compaignie ne la devoit point fourrager ne prandre aucune chose en sa maison, ainsi qu’il avoit esté apointé entre eulx, mais que ce non obstant icellui feu Le Bascle et autres de sa compaignie qui estoient logez au logeys Sainct Anthoine, estoient oudit villaige d’Arnay, desquelz elle ne savoit autrement les noms, avoient fourragé sa maison et avoient prins et emporté neuf poulles, qui estoit tout ce qu’elle en avoit, en priant et requerant iceulx Gendrot et suppliant et aussi leurs compaignons qu’ilz allassent et envoyassent par devers ledit Le Bascle pour lui faire rendre et restituer sesdictes poulles. Et le lendemain qui fut le derrenier jour dudit mois d’avril, vint derechief ladicte femme par devers lesdiz Gendrot et supliant, ainsi qu’ilz disnoient, pour les prier et requerir qu’ilz lui faissent rendre et restituer sesdictes poulles. Et tout incontinant survint illec le varlet de l’oste desdiz Gendrot et suppliant qui leur dist que les gens et serviteurs dudit feu Le Bascle lui avoient osté sa bourse en laquelle avoit de l’argent, et aussi sa sainture à laquelle estoit atachée ladicte bourse. Et en disant lesdictes parolles iceulx Gendrot et suppliant et leursdiz compaignons disdrent entre eulx que ledit Le Basle estoit fort oultrageux et qu’il les prisoit bien peu, et delibererent entre eulx d’aller par devers lui, pour le prier et requerir de rendre et restituer lesdictes poulles, sainctures et bourse. Et ce fait, ledit Guillaume Luysler dist ausdiz Gendrot et suppliant qu’il yroit voulentiers, et ledit suppliant dist audit Luysler qu’il yroit avecques lui, ce qu’ilz firent tout incontinant qu’ilz eurent disné et qu’ilz furent levez de table. Et en allant, passèrent par le logis dudit de Montournois, parlèrent à lui et lui dirent qu’ilz alloient veoir se ledit Le Bascle rendroit lesdictes poulles, bourse et saincture. Lequel de Montournois leur dist qu’il n’avoit pas fait son devoir d’avoir fait les choses dessus dictes. Et ce fait, lesdiz suppliant et Luysler se partirent du logeis dudit de Montournois et s’en allèrent au logeys d’icellui feu Le Bascle, où ilz le trouvèrent et avecques lui ung des gens de sa chambrée, lesquelz s’en venoient devers la porte pour sortir hors de leur logeys. Et incontinant que lesdiz suppliant et Luysler furent arrivez et qu’ilz eurent salué gracieusement icellui Le Bascle, icellui feu Le Bascle leur dist telles parolles ou semblables : « Dieu vous gard » ; et ce fait ledit suppliant dist audit feu Le Bascle qu’ils estoient venuz par devers lui, pour le requerir qu’il fust son plaisir de rendre ou faire rendre et restituer lesdictes poulles et que la bonne femme à qui elles estoient estoit venue par devers eulx plourant et soy complaindre de ce qu’on lui avoit prins et fourraigé ses dictes poulles, en disant oultre ce, qu’elle s’en plaindroit au capitaine. Et après ce, icellui feu Le Bascle fit responce audit suppliant qu’il en y avoit dessus illec pris soulz ung rouelyon d’abeilles et qu’il les avoit monstrées à ladicte bonne femme, mais qu’elle lui avoit dit qu’elles n’estoient pas des siennes. Et après plusieurs parolles gracieuses eues entre eulx, ledit feu Le Bascle doit ausdiz suppliant et Luysler qu’ilz estoient bien pour soupper et avoient des quanetons sauvaiges qu’il avoit prins et qu’il vouloit aller veoir s’il en pourroit encores prendre. Et tantost après lediz supliant et Luisler, et aussi icellui feu Le Bascle se departirent de la maison où estoient logez icelui feu Le Bascle et ses compaignons, et en descendant l’eschelle, ledit de Montournois estant devant ladicte maison, dist telles parolles ou semblables : s’ilz y tournoient veoir s’ilz trouveroient des quanetons sauvaiges ; lequel feu Le Bascle lui fit responce que oy et qu’il y failloit aller. Et lors ledit Gendrot, qui estoit illec survenu, dit audit feu Le Bascle, par manière de joyeuseté et esbatement, telles parolles ou semblables : « Si vous savez aussi bien prendre les quanetons sauvaiges comme les poulles, il n’en demourroit point après vous. » Et tout incontinant icellui feu Le Bascle et trois ou quatre autres de ses aliez et complices, armez et embastonnez de haches, espées à deux mains et javelines, vindrent impetueusement contre ledit Gendrot, en lui disant par icellui feu Le Bascle telles parolles ou semblables : « Que veulx tu faire ne dire des poulles ? » Lequel Gendrot lui fit response tout gracieusement que ce n’estoit pas bien fait de les avoir prinses, veu que la femme à qui elles estoient lui estoit demourée pour les fournir et pourveoir en porter des vivres qui leur estoient necessaires. Et souldainement icellui feu Le Bascle et sesdiz compaignons saillirent et passèrent ung russeau d’eaue qui estoit entre eulx et sortirent sur icellui Gendrot en lui disant par parolles rigoureuses en jurant et detestant le nom de Dieu qu’il feroit assavoir audit Gendrot s’il estoit poullailler ; et tenoit icellui feu Le Bascle son espée toute nue en sa main. Et lors icellui Gendrot, voiant que ledit feu Le Bascle et ses compaignons ainsi armez et embastonnez que dit est s’aprouchoient si fort de lui, commença à soy retirer et fouyr, en leur disant qu’ilz ne se approuchassent point et que s’ilz se essairoient à le oultrager ou batre, qu’il se deffendroit. Mes tout ce non obstant ledit feu Le Bascle et sesdiz compaignons suivirent tousjours plus fort que devant ledit Gendrot en renoyant et detestant le nom de Dieu qu’ilz le mettroient [à mort] avant que le jour departist, en criant à haulte voix : « Dessus ce ribault, tués le ! » Et alors ledit Gendrot se print à fuir et en fuyant trouva ledit Raffaël on chemin, qui avoit une javeline en sa main ; laquelle il print hativement et lui bailla son espée qu’il avoit et gecta son manteau, afin qu’il peust mieulx fouir et evader la fureur dudit feu Le Bascle et de sesdiz compaignons ; et de fait s’enfuyt jusques dedans une grange estant assez loing d’illec, qu’on dit appartenir à ung nommé Hugues Milot, oste dudit de Montournois. Et quant il fut presque entré en l’uisset de ladicte grange, l’un des compaignons dudit feu Le Bascle lui bailla ung estoc d’une grant javelline qu’il avoit en sa main par le cousté senestre, en telle maniere que si ledit Gendrot n’eust eu ses brigandaines, il l’eust tué. Et quant ledit Gendrot fut au dedans de ladicte grange, voyant que ledit feu Le Bascle et sesdiz compaignons le suivoient si fort, en renoyant et detestant le nom de Dieu qu’ilz le tueroient, fut contrainct pour doubte de sa vie, de garder l’uisset de ladicte granche, afin que icellui feu Le Bascle et sesdiz compaignons n’entrassent dedans et qu’ilz ne le tuassent. Et en ce faisant il vit que icellui feu Le Bascle et sesdiz compaignons, qui avoient espées toutes nues en leurs mains, javelines et haches s’efforçoient de tout leur povoir d’entrer en ladicte grange, pour laquelle il gecta ung estoc ou deux de sadicte javeline qu’il avoit en sa main par l’uisset de ladicte grange, pour cuider tousjours empescher que les dessusdiz n’y entrassent ; en quoy faisant icellui feu Le Bascle couppa presque tout à travers le manche de ladicte javeline. Et pour ce que icellui feu Le Bascle et sesdiz compaignons avoient ja rompu l’uysset de ladicte grange et que icellui Gendrot vit qu’il ne povoit plus fouir ne garder qu’ilz n’y entrassent et qu’il ne fust murtry et occis en icelle grange par icellui feu Le Bascle et sesdiz compaignons, dist par plusieurs foiz que, s’il y entroit, qu’il le blesseroit ; lequel feu Le Bascle s’efforçoit tousjours d’y entrer. Quoy voyant, ledit Gendrot, voulant tousjours garder icellui feu Le Bascle qu’il n’y entrast, gecta ung estoc ou deux, dont il frappe ung coup seullement de ladicte javeline ledit Le Bascle ou cousté dextre ; et incontinant icelui feu Le Bascle fit une grant roue de sadicte espée en l’entour de lui, en frappant sur ceulx qui estoient illec près et mesmement sur lesdiz suppliant et Luisler, tellement qu’il les blessa très henormement, c’est assavoir ledit suppliant en l’espaulle droite et icellui Luisler ou braz senestre et en plusieurs autres parties de son corps, tellement qu’il en est perdu et mutillé à jamès. Et incontinant que icellui Gendrot vit qu’il avoit blessé icellui feu Le Bascle, il s’en sortit de ladicte grange, et adonc en icelle icellui feu Le Bascle tenant sadicte espée toute nue en sa main, cuidant y trouver ledit Gendrot, et quant il vit qu’il ne le povoit trouver, s’en retourna frappant sur ceulx qu’il trouvoit illecques près, mesmement sur lesdiz suppliant et Luisler ; lequel suppliant s’enfouyt et osta d’illec le plus tost qu’il peut, sans aucunement frapper ne bailler aucuns coups ne collies à icellui feu Le Bascle ; mais une heure après ou environ ledit Le Bascle alla de vie à trespas du coup que lui avoit baillé ledit Gendrot, et ce par deffault d’estre pensé, gouverné ou autrement. Et combien que ledit suppliant ne fust aucunement cause du debat et noise qui fut entre ledit Gendrot et icellui feu Le Bascle, et qu’il ne se fust trouvé illec fors seullement pour paciffier lesdiz question et debat, et qu’il ne frappast aucunement icellui feu Le Bascle, et qu’il n’ait esté aucunement cause du cas advenu, et neantmoins icellui suppliant, doubtant rigueur de justice, se absenta parce qu’il estoit present audit cas, de ladicte armée et du païs, et n’y oseroit bonnement regner (sic) pour doubte que ou temps avenir ou lui voulist [faire] aucune question et demande, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce impartis, en nous humblement requerant que, attendu que ledit suppliant ne fut aucunement cause des question et debat, qu’il ne frappa aussi aucunement icellui feu Le Bascle, il nous plaise sur ce lui octroyer et impartir nosdictes grace et misericorde. Pour quoy nous, etc., voulons, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné et par la teneur des presentes, quictons, remettons et pardonnons le fait et cas dessus dit avec toute peine, etc., en mettant au neant, etc. Et l’avons restitué, etc. Et sur ce imposons, etc. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes au seneschal de Poictou à son siège de Thouars et à tous, etc., que de noz presens grace, etc., ilz facent, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, ou mois de mars, l’an de grace mil cccc. quatre vings et de nostre regne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. Disome. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXXXI Mars 1481 (n.s.)

Rémission accordée à Benoît Roy, archer de retenue de Lussais, prisonnier du prévôt des maréchaux, pour avoir violé, avec d’autres archers ses compagnons, la fille d’un habitant de Vaussais, chez qui ils étaient logés, à condition d’aller en pèlerinage à Notre-Dame du Puy.

AN JJ. 208, n° 37, fol. 20, v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 429-431

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Benoist Roy, nagueres archier de retenue pour la parroisse de Lussay en Poictou, à present detenu prisonnier entre les mains du prevost des mareschaulx de France, contenant que, ung mois a ou environ, ledit Benoist Roy et autres archiers de retenue, ses compaignons, logerent en la parroisse de Vausay ; lequel Benoist estant en son logeis, vindrent devers lui Pierre Buret, Jehan Douzil et autres en leur compaignie, auquel ils disdrent que s’il voulloit aller avecques eulx, qu’ilz auroient et emmeneroient la fille de leur hoste, qui estoit fille de joye et avoit longuement demouré avecques ung prebstre. A quoy ledit Benoist Roy et autres ses compaignons se consentirent et allerent, avec leurs espées, en la maison du père de ladicte fille, où elle estoit ; et quant ilz furent à ladite maison, prindrent ladicte fille nommée Olive et par force la misdrent et gectèrent hors d’icelle maison, jaçoit ce que ladicte Olive criast et plourast et fist de grans resistances et que son [père

Mot suppléé.

] s’efforçast d’empescher qu’ilz ne la menassent ; et oultre le gré et voulonté d’elle et de sondit père, l’emmenèrent au lieu de Lorigné, et en l’emmenant lui donnèrent de grans menasses ; et eurent lesdiz compaignons la compaignie de ladicte fille. Et après voyanlt (sic)

Quelques mots omis.

ledit Benoist Roy, en un buisson, assez près de l’ostel du père, s’efforça et essaya par deux foiz avoir sa compaignie, mais il ne peut. Et depuis ledit Benoist Roy et sesdiz compaignons gardèrent ladicte fille ung jour ou deux et après, par le commandement de leur cappitaine, la rendirent à son père et à ses amys. A l’occasion duquel cas ledit Benoist Roy et aucuns de ses compaignons ont été prins et constituez prisonniers ès mains dudit prevost des mareschaulx ou de son lieutenant, par la justice duquel l’un desdiz compaignons a esté puis naguères executé. Et [est] en voye ledit Benoist Roy d’estre pareillement exécuté ou de finir de brief miserablement ses jour, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, en nous humblement requerans lesdiz parens et amis que, attendu que ledit Benoist Roy a en tous autres cas esté tousjours de bonne vie et honneste conversacion, sans avoir esté actaint ne convaincu d’autre villain cas, blasme ou reprouche, et que ladicte fille avoit esté autresfoiz avecques autres et en leur compaignie comme fille de joye, et est ledit Roy jeune homme à marier, lequel une jeune fille demande à avoir en mariage, ce qu’il a entencion de faire et la prandre en mariage il nous plaise impartir nosdictes grace et miséricorde audit Benoist Roy. Pour quoy nous, etc., voulans, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessus dit, avecques toute peine, etc., et l’avons restitué, etc., satisfacion, etc. Et sur ce imposons, etc. Parmy ce toutes voyes que ledit Benoist Roy yra en voyaige à Nostre Dame du Puy en Auvergne, rendre graces à Dieu et à Nostre Dame de la grâce et miséricorde qui lui a esté faicte et y offrira ung cierge d’une livre de cire ; et apportera certifficacion du curé ou vicaire du lieu du voyage par lui fait et accomply. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, bailli de Touraine, prevost des mareschaulx et à tous noz autres, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné au Plessys du Parc lez Tours, ou mois de mars l’an de grace mil cccc. quatre vings et de nostre règne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, l’evesque d’Alby, maistre Jehan de la Vaquerie, président

Ces personnages ont été identifiés [L.C.]

, et autres presens. Duban. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXXXII Mars 1481 (n.s.)

Création d’une foire annuelle, le jour de S. Pierre en juin à Dissay, en faveur de l’évêque de Poitiers, seigneur temporel du lieu.

AN JJ. 209, n° 100, fol. 59 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 431-433

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre ami et feal conseiller Guillaume, evesque de Poictiers

Guillaume de Clugny ou de Cluny, d’origine bourguignonne, était fils de Henri, sr de Conforgien, et de Perrenette de Chalonge, dame de Ragny. D’abord official et archidiacre d’Avallon, au diocèse d’Autun, puis protonotaire du Saint-Siège, titre qui lui est encore donné dans des lettres de Louis XI du 26 mars et du 22 mai 1478 (Vaësen, Lettres de Louis XI, t. VII, p. 11 et 65), prévôt de Bethune et de Saint Léonard de Liége, abbé de Bourgueil-en-Vallée et évêque de Térouanne. Il fut, en outre, conseiller et maître des requêtes de l’hôtel du comte de Charolais et son receveur et garde des deniers de son épargne, d’après une quittance par lui donnée, le 25 juillet 1466, à Jean Fourment, receveur du domaine d’Amiens. (Bibl. nat., Pièces orig., vol. 791, dossier Clugny, n° 6), trésorier général commis par le duc de Bourgogne à recevoir tous les deniers de ses aides restes de comptes et autres parties extraordinaires, d’après une autre quittance du 14 mai 1470 (Id., n° 7). Après la mort de Charles le Téméraire, Guillaume de Clugny passa au service de Louis XI qui le nomma évêque de Poitiers au commencement de l’année 1479, et le chargea, l’année suivante, de négocier la cession par Jean de Brosse, comte de Penthièvre, et Nicole, sa femme, de leurs droits à la succession de Bretagne ; il travailla encore, la même année, à obtenir du roi René l’hommage du comté de Bar. La notice que consacre à cet évêque de Poitiers la Gallia Christiana, et que nous venons de résumer, ajoute qu’il mourut vers 1400, dit-on, mais sûrement après le 14 août, car elle cite des lettres de ce personnage portant cette date (t. II, col. 1201). On verra par les lettres de création de foires à Angle, imprimées plus loin, que Guillaume était toujours vivant et évêque de Poitiers au mois de juillet 1481. Son décès survint peu après, car Pierre d’Amboise, son successeur, fut élu le 21 novembre de cette année.

et seigneur temporel de Dissay en Poictou, à cause dudit eveschié, contenant que ledit lieu de Dissay est situé et assez en bon et fertil païs assez près de bonnes villes et villages, et y passent et frequentent plusieurs marchans et autres gens alans et venans d’un païs en autre, portant marchandises et autrement ; auquel lieu de Dissay, pour le bien, prouffit, utilité et augmentacion d’icellui et païs d’environ, seroit besoing à nostredit conseiller suppliant avoir une foire l’an, c’est assavoir au jour et feste de sainct Pierre ou moys de jung pour y estre [tenue] et continuée dores en avant et à tous jours, se nostre plaisir estoit icelle foire y establir et ordonner, ainsi qu’il nous a fait dire et remonstrer, en nous humblement requerant que, attendu ce que dit est et que à quatre lieues à la ronde près dudit lieu de Dissay n’a ville ne autre lieu où il y ait foire audit jour et feste, il nous plaise sur ce lui impartir nostre grace. Pourquoy nous, les choses dessus dictes considérées, desirans l’augmentacion des églises de nostre royaume, inclinans liberallement à la requeste de notredit conseiller, suppliant, et pour certaines autres causes et consideracions à ce nous mouvans, avons créé, ordonné et estably, et par la teneur de ces présentes, de grace especial, plaisne puissance et auctorité royal, créons, ordonnons et establissons audit lieu de Dissay ladicte foire, c’est assavoir audit jour et feste de saint Pierre en jung, pour y estre tenue, continuée et entretenue dores en avant et à tousjours perpetuellement, pourveu toutes voyes que audit jour et feste n’ait aucunes foires à quatre lieues à la ronde près dudit lieu de Dissay et que ladicte foire ne soit préjudiciable à nous ne à la chose publique, ne noz droiz et devoirs n’en soient aucunement diminuez. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou ou à son lieuxtenant et à tous noz autres justiciers, presens et avenir, et à chacun d’eux, si comme à lui appartiendra, que de noz presens grace, creacion et establissement, voulenté et octroy de foire ilz facent, souffrent et laissent nostre conseiller, suppliant, ses successeurs et habitans dudit lieu joyr et user plainement et paisiblement, tout ainsi que font et ont acoustumé de faire les autres villes et lieux du païs d’environ, où il y a foires, en faisant crier et publier ladicte foire audit jour, feste et lieu et y establir places, estaulx, loges et autres choses necessaires et ainsi qu’ilz verront au cas appartenir. Car ainsi nous plaict-il estre fait, nonobstant quelconques ordonnances, mandemens, restrinctions et deffenses à ce contraires. Et afin que ce soit chose ferme et estable a tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes, sauf en autres choses nostre droit et l’atruy en toutes. Donné au Plesseies du Parc lez Tours, ou moys de mars l’an de grace mil cccc quatre vings, et de nostre regne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, l’evesque d’Alby, le conte de Castres, maistre Jehan de la Vacquerie

Tous les personnages nommés ici ont été identifiés précédemment. (Cf. pp. 184 et 316.)

, president, et autres presens. J. Duban. — Visa. Contentor. F. Texier.

MDCLXXXIII Mars 1481 (n.s.)

Création de trois foires par an à Vendeuvre, en faveur de l’évêque de Poitiers, seigneur temporel du lieu.

AN JJ. 209, n° 101, fol. 59 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 433-435

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre amé et feal conseiller Guillaume evesque de Poictiers, seigneur temporel de Vendeuvre en Poictou, contenant que ledit

Ledit, ledict sont restitués autant que possible ; si non led.

lieu de Vendeuvre est situé et assis en bon païs et fertil, assez près de bonnes villes et villages, et y passent et frequantent plusieurs marchans et autres gens allans et venans d’un païs en autre, portans marchandises et autrement. Et auquel lieu de Vendeuvre, pour le bien, utilité, prouffit et augmentacion d’icellui et païs d’environ, seroit besoing à nostredit conseiller suppliant avoir trois foires l’an, c’est assavoir la premiere au jour et feste sainct Avantin ou mois de jung (sic), la seconde au jour et feste Ste Luce ou mois de decembre et la tierce au jour et feste sainct Mathieu ou mois de …

La date a été laissée en blanc. La Saint-Matthieu se fête le 21 septembre.

, pour y estre tennues et continuées d’ores en avant et à tousjours, se nostre plaisir estoit icelles foires y establir et ordonner, ainsi qu’il Nous a fait dire et remonstrer, en Nous humblement requerant que, actendu ce que dit est et que à quatre lieues à la ronde près dudit lieu de Vendeuvre n’a ville ne autre lieu où il y ait foires ausd. jours et festes, il Nous plaise sur ce lui impartir nostre grace. Pour quoy Nous, les choses dessusd. considerées, inclinans liberallement à la requeste de nostredit conseiller suppliant, et pour autres causes et consideracions à ce Nous mouvans, avons creé, ordonné et estably et par la teneur de ces presentes, de grace especial, plaine puissance et auctorité, creons, ordonnons et establissons audit lieu de Vendeuvre lesd. trois foires, c’est assavoir l’une audit jour et feste St Avantin en jung, la seconde audit jour et feste saincte Luce en décembre et la tierce audit jour et feste sainct Mathieu ou moys de …, pour y estre tenues, continuées et entretenues d’ores en avant et à tousjours perpetuellement, pourveu tesvoyes (sic) que ausd. jours et festes n’ait aucunes foires à quatre lieues à la ronde près dudit lieu de Vendeuvre et que lesd. foires ne soient préjudicables (sic) à Nous et à la chose publicque, ne que noz droiz et devoirs n’en soient aucunement diminuez. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes au seneschal de Poictou ou à son lieutenant, etc.

La suite du texte est la reproduction exacte des quinze dernières lignes des lettres qui précèdent immédiatement (création d’une foire à Dissay).

Donné au Plessis du Parc lez Tours, ou moys de mars l’an de grace mil cccc quatre vings, et de notre regne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, l’evesque d’Alby, le conte de Castres, maistre Jehan de la Vacquerie president, et autres presens, J. Duban. — Visa. Contentor. F. Texier.

MDCLXXXIV 20 avril 1481 (n.s.)

Lettres de rémission octroyées en l’honneur de la Passion à Grégoire Navarre, laboureur, demeurant en la paroisse de Saint-Pierre du Luc, complice de vols dans les églises des Essarts et de Saint-Denis de la Chevasse. Condamné au fouet et au bannissement par la justice de la Roche-sur-Yon, les officiers de ladite seigneurie lui avaient accordé que la sentence ne serait pas exécutée, à condition qu’il remplît les fonctions de bourreau. Les lettres du roi le relèvent en outre de cette obligation.

AN JJ. 209, n° 117, fol. 69 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 435-439

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de Gregoire Navarre, povre homme laboureur de braz, chargé de femme et enfans, demourant en la parroisse de Sainct Pierre du Lude

Corr. « Saint-Pierre-du-Lude. »

ou bas païs du Poictou, contenant que en l’an mil cccclxxviii, la vigille de l’Ascencion, Jehan Navarre, son frere aisné, demourant ou villaige de la Danyelliere, l’envoia querir à sa maison qui estoit ou villaige de la Merdonziere par ung leur nepveu nommé Simon Navarre ; lequel suppliant y alla, et environ deux heures après midy qu’il arriva par devers sondict frere, icellui son frere le mena à l’esbat hors ladicte maison et lui dist qu’il convenoit qu’il allast avecques lui aux Essars et qu’ilz trouveroient de l’argent en l’eglise dudict lieu ès coffres et arches des prebstres, et qu’il ouvreroit bien l’eglise. Oyes lesquelles [choses]

Les mots suppléés entre crochets ont été laissés en blanc sur le registre.

par ledit suppliant de sondict frere, lui fist plusieurs execusacions (sic) pour cuider empescher qu’il n’y allast. Toutesfois il consentit d’y aller moiennant cinq solz qu’il lui promist ; et y arriverent environ souleil couschant, et pour ce qu’il estoit encores trop grant jour, se demourerent jusques à la nuit noire en ung jardin et de là allerent à la grant eglise des Essars, de laquelle eglise icellui Jehan Navarre ouvrit le guischet avecques une clef ou autre chose qu’il avoit, qu’il ne voult monstrer à icellui suppliant, et entra dedans seul. Et d’icelle eglise apporta hors de la porte deux coffres ou arches, l’une desquelles il ouvrit et y print ung galice d’argent, deux pieces de satin noir et autres vestemens estans de ladicte [eglise] ; lequel galice et satin icellui Jehan Navarre bailla en garde à icellui suppliant. Et ce fait, [reporta] icelle arche dedans ladicte eglise et ferma ladicte porte après lui, et reprint l’autre arche et l’emporta en ung jardin assez loing d’icelle eglise. Et illec, en la presence d’icellui suppliant, parce qu’il ne la povoit ouvrir, la rompit et y trouva ung chapperon à usaige de prebstre qu’il print et y laissa plusieurs vestemens d’eglise. Et ce fait, alla en ladicte eglise (sic) par ledit Jehan Navarre de rechef et y rompit une autre arche où il ne trouva, comme il dist audit suppliant son frere, que vestement d’eglise et aucuns reliques enchasséz en argent, lesquelz il monstra à icellui suppliant, qui les lui fist remporter et remectre, en lui disant qu’il seroit dampné s’il ne les restituoit. Et n’entra icellui suppliant pour faire ce que dit est en icelle eglise, fors seullement qu’il y mist ung pié pour mectre hors l’une desd. arches. Et icelles choses ainsi faictes, icelle mesme nuit s’en allerent reposer près d’une verrerie, à une lieue dudit lieu des Essars, où ilz furent jusques au jour et entreprindrent que icellui suppliant promist de soy rendre à lui à la Danieliere ou à Sainct Supplice, le jour de l’Ascension Nostre Seigneur après disner, et sur ces parolles se departirent, et emporta icellui Jehan lesd. galice, chapperon et lesdictes deux pieces de satin. Et ce fait, icellui suppliant se rendit ledit jour de l’Ascension audit lieu de Sainct Supplice, ainsi que promis l’avoit, en la maison de Perrine Bonnet, hostelliere, et en y allant passa par la maison de Mathurin Herbert à Landevoye, lui priant qu’il se rendist ledit jour audit Sainct Supplice, ce qu’il lui accorda de faire, et lui recita comme sondit frere et lui avoient esté audit lieu des Essars où ilz avoient prins ledit galice et choses dessusdictes, qui estoient demourées à sondit frere. Auquel lieu de Sainct Supplice ne se rendit fors seullement ledit Jehan Navarre et suppliant qui beurent en l’ostel de ladicte Bonnete painte de vin en actendant la venue dudit Mathurin. Et ce pendant y survint le curé de Saint Suplice qui but avecques eulx. Et après qu’ilz eurent beu, voyans Jehan Navarre et son frere suppliant que ledit Mathurin ne venoit point, bailla ledit galice en garde à ladicte Bonnete et dist à icellui suppliant que, s’il en povoit recouvrer argent, qu’il en auroit sa part et aussi ledit Herbert. Et ce fait, cedit jour entreprindrent d’eux rendre, le samedi ensuivant, à Sainct Denis de la Chevesse, au bois de la Normendeliere, ce qu’ilz firent. Et illec se trouva Colas Barlon de l’Erbergament, et d’illec se partirent pour aller en l’eglise dudit Sainct Denis, où ledit Jehan, environ jour couché, entra et en tira une autre petite arche hors, et pour ce faire lui aida icellui suppliant, et dudit arche print icellui Jehan cinq escuelles et ung plat d’estain. Et à ung autre jour, qui estoit le jour de Sainct Pierre, icellui suppliant et icellui Jehan son frere allerent la nuit en l’ostel d’un nommé Jehan Cotin, et illec en son cellier prindrent une grande poesle et ung oyne (sic) de porceau, que ledit suppliant porta en l’ostel dudit Normandeau, où elles furent congneues par ledit Cotin. Et, pour occasion desd. cas, fut icellui suppliant prins et mis ès prisons de la Roche sur Ion, èsquelles il fut par longtemps ; et lui estant èsdictes prisons en la basse fosse, trouva façon de se eschapper et s’enfouyt ; et depuis fut reprins, et pour occasion des cas dessusd. fut par la justice dudit lieu de la Roche sur Yon condampné à estre par le bourreau dudit lieu batu de fouetz le leong (sic) du bourg d’icellui lieu du Luc et bany à jamais d’icelle seigneurie, ainsi que ces choses sont plus à plain contenues et declairées par ladicte sentence sur ce donnée et prononcée par ladicte justice, le XIIe jour d’aoust mil cccc. quatre vings. Et le dix septiesme jour dudit mois, le seneschal dudit lieu et autres officiers, à la requeste et priere des femme, enfans, parens et amis dudit suppliant, ladicte sentence dont cy dessus est faicte mencion fut revocquée et l’execucion d’icelle suspendue, moiennant et parmy ce que ledit suppliant excerceroit en ladicte seigneurie et ès environs l’office de la haulte justice vulgaument appellée l’office de bourreau, ce qu’il promist de faire pour yssir desdictes prisons. Pour occasion desquelles choses, ledit suppliant depuis, pour doubte que on lui voulsist faire excercer ledit office, s’est absenté d’icelle seigneurie et a abandonné ses femme et enfans et n’y oseroit aller ne converser pour doubte de rigueur de justice, et à ceste cause Nous a fait supplier et requerir que, en faveur de sesd. femme et pouvres enfans dont il est chargé en grant nombre, lui remettre et pardonner lesd. cas, sans ce qu’il soit jamais tenu ledit office de hault justicier excercer, et lui impartir sur ce nostre grace et misericorde. Pour quoy est-il, etc., que Nous, etc., audit suppliant, en faveur de sadicte femme et enfans, et pour l’onneur et reverence de Dieu et de sa benoiste passion qui a tel jour qui est aujourd’uy, souffrit mort et passion pour la redempcion de l’umain lignaige, et de sa benoiste mere, avons quicté, remis et pardonné tous les cas et crimes dessusd. avecques toute peine, etc., en mectant au neant, etc. Et l’avons restitué, etc. Satisfacion, etc. Et imposons, etc. Si donnons en mandement, en commectant par ces presentes au seneschal de Poictou ou à son lieutenant à son siege de Fontenay le Conte et à tous, etc., que de noz presens grace, etc. Et afin, etc. Sauf, etc., Donné au Plesseys du Parc lez Tours, ou mois d’avril, l’an de grace mil cccc. quatre vings avant Pasques, et de nostre regne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy tenant ses Requestes. C. Chambon. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXXXV 20 avril 1481 (n.s.)

Rémission obtenue par Jean Bernard, natif de l’Isle-Bouchard, détenu prisonnier à Tours comme faux saunier, s’approvisionnant à la Ferrière près Parthenay, et parce qu’il avait menacé de frapper les francs-archers qui l’avaient mis en arrestation.

AN JJ. 207, n° 224, fol. 105, v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 439-440

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Jehan Bernard, natif de l’Isle Bouschart, à present detenu prisonnier ou chasteau de Tours, contenant que puis deux ans ença ou environ et que octroyasmes remission et abollicion à tous faulx saulniers, ledit Jehan Bernard a esté querir du sel souventesfoiz à la Ferriere près Partenay et ailleurs ou païs de Poictou, et en a amené par plusieurs et diverses foiz sur bestes chargées, lequel il a vendu et distribué à plusieurs et diverses personnes, et mesmement à Mathelin Boutemye, à Petit Jehan Goujon de Saincte Katherine de Fierbois, à Thenot Lorrain, à ung nommé Grandin d’Azay le Bruslé, à Robin d’Albin de la ville de Tours et à plusieurs autres ; partie duquel seel qu’il amenoit, aucunes foiz qu’il lui a esté par les francs archiers qui le rencontroient menant ledit sel et lui en a esté emblé par aucunes personnes, qui l’ont trouvé caché en plusieurs lieux où il le mectoit afin qu’il ne fust apperceu. Et à l’une des foiz que lesd. francs archers le rencontrerent menant ledit sel, iceulx vouldrent prandre ses bestes et de fait les prindrent : et quant il vit qu’il les vouloient enmener, il print ung baston, en disant que à celle heure failloit jouer à quicte et à double, et se parforça et ingera de frapper lesdiz francs archiers. A l’occasion desquelz cas ledit Jehan Benard a esté constitué prisonnier èsdictes prisons de Tours, èsquelles il a desja esté par l’espace de trois sepmaines en grant pouvreté et misere et est en voye de y finer miserablement ses jours, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties ; en Nous humblement requerant iceulx … Pour quoy Nous, etc., voulans, etc., audit Jehan Bernard, en l’onneur et reverance de la Passion de nostre Sauveur Jhesu Crist qui a tel jour qu’il est aujourd’uy souffrit mort et passion pour la redempcion de l’umain lignaige, avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessusdit avecques toute peine, etc. Et l’avons restitué, etc., satisfacion, etc. Et sur ce imposons, etc. Si donnons en mandement au bailli de Touraine et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné au Plesseys du Parc lez Tours, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. quatre vings, et de nostre regne le vingtiesme, avant Pasques.

Ainsi signé : Par le roy tenant ses Requestes. J. Duban. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXXXVI Avril 1481 (n.s., avant le 22)

Rémission accordée à Jean Aymar ou Emar, de Champagne en Poitou, coupable du meurtre de Martin Mousnier, avec lequel il s’était pris de querelle et en était venu aux mains, parce qu’il l’avait surpris en train de démolir une masure lui appartenant.

AN JJ. 207, n° 242, fol. 111, v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 440-442

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Emar, povre homme de labour, demourant à Champaigne en Poictou, contenant que à lui et à ses parsonniers compecte et appartient une masure située et assise en la grant rue Sainct Michiel dudit Champaigne, et de laquelle masure ilz ont jouy et leurs predecesseurs par l’espace de soixante ans et plus à bon tiltre, sans aucun contredit ou empeschement, et jusques à ce que Guillaume Emar, frere dudit suppliant et l’un de ses parsonniers, le samedi XIIIIe jour du mois de juillet derrenier passé trouva feu Martin Mosnier cousturier, lequel estoit homme noiseux et felon, et Pierre Barriere, lesquelz rompouoeent (sic) les murailles de ladicte masure : ausquelz il dist pour quoy ilz se mectoient en ladicte masure et qu’elle n’estoit point à eulx, et qu’ilz faisoient mal de rompre ladicte masure, en lui disant qu’il le diroit à ses frere et parsonniers ; lesquelz respondirent qu’ilz n’en laisseroient rien à faire pour eulx, en usant de grosses et rigoreuses parolles. Oyant lesquelles, ledit Guillaume les laissa et s’en alla en son hostel. Et depuis, le dimenche quinzeiesme (sic) jour dudit mois ensuivant ledit jour de samedi, ledit feu Martin Mousnier se transporta au lieu de Benays, ouquel lieu il print noise, comme sa coustume estoit, à aucuns habitans dudit Benays, tellement qu’il y eut grant effusion de sang, et peut estre qu’il y fut batu. Et le lundi seizeiesme jour dudit mois ensuivant, environ heure de huit heures devers le matin, Pierre Aymar frere dudit supliant et Huguet Aymar filz d’icellui suppliant s’en allerent besoingner en ladicte masure pour amasser les pierres pour bastir, et, ainsi que ilz besoingnois (sic), une heure après ensuivant y survint ledit suppliant qui y besoigna semblablement. Et incontinant survindrent lesdiz Pierre Barriere et feu Martin Mousnier, cousturier, lesquelz avoient chascun une trave, et lequel feu Mousnier entra de felon couraige dedans lesdictes masures sans mot dire et rompit le mur par où il passa, et au regard dudit Pierre Barriere, n’entra point dedans. Et incontinant ledit Mosnier estant dedans et Barriere commancerent à rompre la muraille et abatre partie desdictes masures, en disant audit suppliant et à sesdiz frere et filz qu’ilz besoingnoient en leurs heritaiges,

La suite est la reproduction presque identique de la rémission donnée, au mois d’août précédent (ci-dessus p. 332) pour les mêmes faits, en faveur de Pierre et Huguet, frère et fils de Jean Aymar.

etc. … Si donnons en mandement etc., au seneschal de Poictou et à tous, etc., que de noz presens, etc., ilz facent, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné au Plesseys du Parc lez Tours, ou mois d’avril, l’an de grace mil cccc. quatre vings, et de nostre règne le vingtiesme, avant Pasques.

Ainsi signé : Par le roy tenant ses Requestes. J. Duban. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXXXVII Juin 1481

Rémission octroyée à Guidieu Gazeau, maréchal, demeurant à Breuilbon, coupable du meurtre d’Etienne Samin ou Savin, prêtre, qui cherchait à séduire sa femme et, surpris auprès d’elle par le mari, avait frappé traîtreusement celui-ci.

AN JJ. 208, n° 183, fol. 108, v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 442-444

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de Guydieu Gazeau, marchal, demourant ou villarge de Broillebon en la parroisse de Germont, chargé de femme et enfans, contenant que, le xxvie jour du mois de may derrenier passé, la femme dudit suppliant lui dist que ung nommé Estienne Samin, prebstre, demourant oudit villaige de Broillebon en ladicte parroisse, estoit tous les jours à la prescher et requerir de son deshonneur de son corps et qu’elle ne s’en povoit despescher de lui, combien que ledit suppliant lui eust autres foiz deffendu sa maison, et, en haine de ce que il lui avoit deffendu sadicte maison, le menassoit tous les jours à batre et tuer, et de fait l’avoit autres foiz voulu oultraiger. Et après plusieurs parolles, sadicte femme lui dist qu’il fist semblant d’aller au marché à Champdené et qu’il ne demourast guères, ce qu’il fist, et s’en alla jusques au fief du seigneur de Broillebon et incontinant s’en retourna en sa maison avecques une sienne seourge (sic) nommée Thoinete, et illec trouva ledit Estienne Savin

Sic. Ce nom est écrit précédemment « Samin ».

prebstre enfermé dedans ladicte maison avecques sadicte femme, à laquelle ladicte Thonete dist qu’elle ouvrist la porte. A quoy la femme dudit Gazeau, qui estoit enfermée avec ledit prebstre, dist : « Je vois », et de fait vint ouvrir la porte, et en ouvrant icelle ledit prebstre vint contre ledit Gazeau avecques ung grant braquemart en sa main, cuidant tuer icellui Gazeau, qui avoit trouvé une fourche de fer au chevet du lit et lui dist qu’il ne lui voulsist point faire de mal et qu’il la fiast. Lequel prebstre lui respondit qu’il la fioit, et après laquelle affiance, ledit Gazeau laissa sa fourche qu’il avoit et la mist à terre. Et quand ledit presbstre vit qu’il eut laissée sadicte fourche, vint frapper ledit Gazeau sur la teste, tellement qu’il le fist tumber à terre, et l’eust tué se ne feust sadicte femme et ladicte Thonete qui l’empescherent. Et tantost après se releva ledit Gazeau tout estourdi et vint prandre ledit prebstre à la gorge et le tumba à terre et d’un petit cousteau qu’il avoit lui couppa les jarretz, ainsi qu’il a depuis ouy dire, tellement que par faulte de bon gouvernement ou autrement il est allé de vie à trespas. Pour occasion duquel cas icellui suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du païs et n’y oseroit jamais bonnement retourner, se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartie ; en Nous humblement requerant que, actendu qu’il a tousjours esté homme de bonne vie, renommée et honneste conversacion sans oncques mès avoir esté actainct ne convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, Nous lui vueillons sur ce impartir nostredicte grace. Pour ce est-il que Nous, etc., voulans, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessusdit, avecques toute peine, etc., en mectant au neant, etc. Et l’avons restitué, etc., satisfacion, etc. Et sur ce imposons, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Chartres, ou mois de jung, l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre regne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Ja. Rolant. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXXXVIII Juillet 1481 (avant le 22)

Don de tout droit de château, châtellenie et haute justice en la seigneurie de Monts, mouvant du roi à cause de Loudun, en faveur de Pierre de Brillac, chevalier, chambellan du roi, seigneur dudit lieu.

AN JJ. 208, n° 179, fol. 106, v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 444-447

Loys, etc. Savoir faisons à tous presens et avenir que, pour consideracion et recongnoissance de plusieurs bons et agreables services que nostre amé et feal conseiller et chambellan Pierre de Brilhac, chevalier, seigneur de Mons et d’Argé

Pierre de Brillac, chevalier, seigneur de Monts en Loudunais et d’Argy en Berry, était le fils aîné de Pierre, seigneur d’Argy, et de Jeanne Odart, dame de Monts. On conserve de ce personnage qualifié alors écuyer « seigneur d’Argé et de Mons », sous la date du 19 mai 1449, trois aveux et dénombrements rendus à René duc d’Anjou, comme seigneur de Loudun : 1° pour le lieu de terre et appartenances du Bois-follet (auj. Bafollet, paroisse de Martaizé), « qui est demoly en ruyne et en mazerils depuis le temps des autres guerres » ; 2° pour son hôtel du petit Crouail (Crouailles, paroisse de Monts-sur-Guesnes) ; 3° pour plusieurs rentes de froment, chapons et gélines, « lesquelles rentes partirent ja piecza du fief de Roche-Rigaut. » (Arch. nat., P. 3412, fol. 34, 35, 37). Depuis le 16 mai 1461 jusqu’au 13 avril 1468, on le trouve engagé au Parlement dans un long procès contre Antoine de Prie, seigneur de Buzançais, ses officiers et autres complices, pour obtenir d’eux réparation des outrages et sévices dont ils s’étaient rendus coupables envers lui. Il serait peu intéressant d’entrer dans le détail de cette procédure ; aussi nous nous contenterons de citer les cotes des nombreux mandements, arrêts interlocutoires, plaidoiries, et autres actes, et de résumer l’arrêt définitif, du 13 avril 1468. Convaincu d’avoir à plusieurs reprises fait envahir par ses gens armés, conduits par son propre fils, le château d’Argy pour s’emparer de bois litigieux entre eux, d’avoir, lors de l’une de ces attaques, frappé et blessé grièvement Pierre de Brillac, à la tête, au cou et sur d’autres parties du corps, Antoine de Prie est condamné à reporter à Argy le bois dont il s’était indûment emparé, à payer 2.000 livres tournois à sa victime, à titre de dommages et intérêts, et deux autres mille livres d’amende au roi ; ses complices étaient tenus de faire amende honorable à Pierre de Brillac, tant au Palais à Paris qu’à Argy, à genoux, tête et pieds nus, tenant à la main chacun une torche de cire allumée du poids de quatre livres, à lui demander pardon et merci et à lui payer chacun cent livres d’amende et autant au roi. De plus Pierre de Brillac était délié de toute foi et hommage envers le seigneur de Buzançais, de qui avait relevé jusque-là la seigneurie d’Argy, et, soustrait lui et ses successeurs à toute juridiction que pourraient prétendre Antoine de Prie et ses descendants. (Arch. nat., X2a 36, fol. 21 v°. Voy. aussi X2a 21, aux dates des 7 mai et 16 juin 1461 ; X2a 30, fol. 46 v° 77 et 343 ; X2a 31, fol. 47 ; X2a 32, aux dates des 27 avril, 3 mai, 23 juillet et 19 août 1462, 25 janvier, et 10 février 1463 n.s., 17 et 20 avril et 6 septembre 1464 ; X2a 34, fol. 60 v° ; 168 v° ; X2a 36, fol. 182 v°.)

Marié à Anne de Tranchelion, fille de Guillaume, chevalier, seigneur de Paluau, et de Guillemette des Roches, Pierre de Brillac, devenu chambellan du roi, comme il est qualifié dans les présentes lettres, en eut trois fils : Charles, nommé plus tard, dans le présent acte, après lui seigneur d’Argy et de Monts, écuyer d’écurie du roi, capitaine du château de Loudun en 1490, mort à Milan en juin 1509 ; Christophe, qui fut abbé de Saint-Père de Chartres, évêque d’Orléans, en 1504, puis archevêque de Tours, en 1515 ; Jean, chef de la deuxième branche de Brillac ; et deux filles Madeleine et Marquise. (Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 2e éd., t. I, p. 777.)

, et autres ses prouchains parens et amis Nous ont faiz par cy devant en plusieurs manieres, font encores chascun jour et esperons que plus face cy après le temps avenir, à icellui Pierre de Brilhac, pour ces causes et consideracions et autres à ce Nous mouvans, et mesmement en faveur et à la requeste de nostre cher et bien amé Charles de Brilhac, escuier, filz ainsné dudit Pierre de Brilhac, qui sur ce Nous a humblement suplié et requis, avons, de nostre propre mouvement, certaine science, grace especial, plaine puissance et auctorité royal, donné, cedé, transporté et delaissé, donnons, cedons, transportons et delaissons par ces presentes, tout droit de chastel, chastellenie et haulte justice que Nous avons et qui Nous peut et doit appartenir en sadicte terre et seigneurie de Mons et ses appartenances et deppendances, tenue et mouvant (sic) de Nous à cause de nostre seigneurie de Lodun, en laquelle ledit Pierre de Brilhac avoit et a la justice et juridicion moienne et basse seullement, pour d’icellui droit de chastel, chastellenie et haulte justice et de tous les droiz, honneurs, prerogatives, preeminences, prouffiz et emolumens qui en deppendent et pevent deppendre, joir et user, ensemble et avecques lesdictes justice et juridicion moienne et basse, par ledit Pierre de Brilhac, ses hoirs, successeurs et ayans cause, seigneurs dudit lieu de Mons, joir et user d’ores en avant perpetuellement et à tousjours en ladicte terre et seigneurie de Mons, appartenances et appendances d’icelle, en leur donnant povoir, faculté et puissance et auctorité, pour l’excercice d’icelle haulte justice, de eriger ou faire eriger, tenir et avoir à perpetuité justices et fourches patibulaires et autres choses concernans et demonstrans les droiz de haulte justice, et de creer et establir en ladicte terre et seigneurie de Mons bailli, prevost, chastellain, gardes de seaulx, sergens et autres officiers requis et necessaires pour l’excercisse de ladicte haulte justice et droit de chastellenie, sans riens retenir ne reserver d’icelle haulte justice pour Nous et les nostres, fors seullement les foy et hommaige à Nous et à noz successeurs roys de France à cause de nostredicte seigneurie de Lodun et le ressort et souveraineté. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx les gens de noz comptes à Angiers, tresoriers de France, au bailli d’Anjou et à tous noz autres justiciers et officiers, que ledit Pierre de Brilhac et sesdiz hoirs, successeurs et ayans cause ilz facent seuffrent et laissent joïr et user plainement et paisiblement de noz presens don, grace, puissance, faculté, octroy et choses dessusdictes, sans leur faire ne souffrir estre fait aucun destourbier on empeschement au contraire. Et par rapportant ces presentes signées de nostre main ou vidimus d’icelles fait soubz seel royal et recongnoissance sur ce souffisant dudit Brilhac pour une foiz tant seullement, Nous voulons nostre receveur ordinaire de Lodun, present et advenir, en estre et demourer quicte et deschargé par nosdiz gens des comptes et partout ailleurs où il appartiendra ; ausquelz Nous mandons ainsi le faire sans dificulté. Car ainsi Nous plaist-il estre fait, nonobstant quelzconques ordonnances, restrinctions, mandemens ou deffences à ce contraires. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Vendosme, ou mois de juillet, l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre regne le vingtiesme

Les présentes lettres furent enregistrées aussi au Parlement de Paris, le 14 décembre 1481. (Arch. nat., X1a 8608, fol. 3), et à la Chambre des comptes sur l’ancien mémorial coté R, fol. 50. (Mention dans Bibl. nat., ms. fr. 21.405, fol. 223.)

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Ainsi signé : Par le roy. G. Briçonnet ; et au dedans de la marge, Loys. — Visa. Contentor. Texier.

MDCLXXXIX Juillet 1481 (avant le 22)

Rémission octroyée à Foucaut Guesdon, jeune cordonnier de l’âge de vingt ans, demeurant à Mauzé, condamné à être pendu (appelant de cette sentence au Parlement) pour le meurtre de Jean de Saint-Benoist, aussi cordonnier audit lieu, qui avait été l’agresseur.

AN JJ. 209, n° 51, fol. 27 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 447-449

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Foucault Guesdon, jeune enfant de l’aage de vingt ans ou environ, filz de Estienne Guesdon, demourant à Mausé en Xantonge ou gouvernement de la Rochelle, contenant que ou mois de may derrenier passé, à ung jour de dimenche après vespres, ledit Foucault Guesdon et feu Jehan de Sainct Benoist, tous deux courdouanniers, eurent en venant avecques autres en l’ostel de Huguet Meschinet audit Mausé, qui tenoit cedit jour vin à vendre, plusieurs parolles et noises ensemble, par le moien d’un nommé Loys Cousin, aussi cordouannier et maistre dudit Foucault Guesdon, pour envie que ledit feu Jehan de Sainct Benoist avoit sur ledit Cousin maistre dudit Guesdon, et tellement que icellui feu Jehan de Sainct Benoist, en hayne dudit maistre d’icellui Guesdon, baty et bleça au visaige ledit Guesdon. Et advint que le lundi ensuivant, ainsi que ledit Cousin et ledit Guesdon et deux apprentiz dudit Cousin tous ensemble se alloient esbatre hors la ville de Mausé et près le cimitiere dudit lieu, qui est hors icelle ville, où estoit ledit de Sainct Benoist, et sitost que icellui de Sainct Benoist les vit, il se caicha derierre ung buisson et tout incontinant après saillit hors dudit buisson et vint vers et contre ledit Guesdon, lequel, de felon et mauvais couraige, il poussa en arriere de ses deux poings, et non content de ce, lui donna d’un cousteau parmy la cuisse en telle maniere qu’il la lui persa jusques à effusion de sang, en jurant le sang Dieu qu’il le mectroit là où il en avoit mis d’autres. Et lequel se voiant ainsi blecié, navré et octragé par ledit de Sainct Benoist, de chaude colle et sang esmeu et en son corps deffendant, frappa d’un cousteau qu’il avoit sur ledit de Sainct Benoist sur la cuisse, dont il ne le entama point, comme l’en dit. Et pour ce que icellui de Sainct Benoist s’efforça de soy deffendre et frapper de son cousteau sur ledit Guesdon, icellui Guesdon, en soy revenchant et deffendant, donna de sondit cousteau par la poictrine audit feu Jehan de Sainct Benoist, au moien duquel coup icellui de Sainct Benoist tantost après alla de vie à trespas. Pour occasion duquel cas ledit Guesdon a esté prins et apprehendé par justice, et pour raison dudit cas a esté condampné à estre pendu et estranglié : dont il a appellé à Nous et à nostre court de Parlement à Paris. Et combien qu’il ait fait, commis et perpetré ledit cas en son corps deffendant et ait esté ledit deffunct tousjours agresseur, aussi ayent les parens et amis dudit Guesdon supplians pour raison dudit cas chemy pour l’interest civil aux parens et amis dudit deffunct, qui en son vivant estoit ung homme de mauvaise renommée et conversacion, renyeur de Dieu, et avoit autresfoiz tué ung homme en la ville de Poictiers : toutes voyes lesd. supplians doubtent que par rigueur de justice on voulsist proceder contre lui à pugnicion corporelle, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties

Dans le texte : humblement imparties.

, humblement requerant que, actendu les choses et aussi que icellui Foucault Guesdon a esté tousjours de bonne vie, renommée et honneste conversacion, doulx et paisible, sans mal faire à aultruy, et ne fut jamais actainct ne convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, il Nous plaise nosdites grace et misericorde lui impartir. Pour quoy Nous, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessusdit avec toute peine, etc., en mectant au neant, etc. Et l’avons restitué, etc., satisfacion, etc. Et imposons, etc. Si donnons en mandement, etc., au gouverneur de la Rochelle et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, ou mois de juillet, l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre regne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil, Gontier. — Visa. Contentor. Texier.

MDCXC Juillet 1481 (avant le 22)

Lettres portant création en faveur de Gautier de Pérusse, chevalier, seigneur des Cars

Fils aîné d’Audouin III de Pérusse, chevalier, et de Marguerite de Pompadour, Gautier fut seigneur des Cars, baron de Ségur, vicomte de La Vauguyon, seigneur de la Coussière et de Jaillac, propriétaire de l’hôtel de Pérusse à Paris, rue Saint-Antoine, conseiller et chambellan de Charles VII puis de Louis XI. De ses deux femmes, Jacquette de Saint-Marc et de la Rochette, et Andrée de Montbron, fille de François, vicomte d’Aunay, et de Louise de Clermont, il n’eut point d’enfants. (Dict. des familles du Poitou, 1re édit., t. II, p. 505.)

, chambellan du Roi, de quatre foires par an et d’un marché le jeudi de chaque semaine aux Cars en Limousin, afin que ledit lieu « qui a esté et est en grant ruyne et decadence par la fortune des guerres, se puisse mieulz et aisement reffaire, repopuler et habituer … Donné au Plesseys du Parc les Tours, ou mois de juillet, l’an de grâce mil CCCC quatre vings et ung, et de nostre regne le vingtiesme. — Ainsi signé : Par le roy, l’evesque d’Alby, le sire du Solyer et autres presens, Petit. Visa. Contentor. Texier. ».

AN JJ. 209, n° 123, fol. 70 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 449-450

MDCXCI Juillet 1481 (après le 22)

Rétablissement à Angle, en faveur de l’évêque de Poitiers, de deux foires chaque année et du marché le lundi de chaque semaine.

AN JJ. 209, n° 98, fol. 57 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 450-452

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre amé et feal conseiller Guillaume, evesque de Poictiers

Guillaume de Clugny (ou Cluny), évêque de Poitiers depuis le commencement de l’année 1479, décédé entre juillet et le 21 novembre 1481. (Cf. sa notice, ci-dessus, p. 431, note.)

, contenant que à cause de son evesché il est seigneur du lieu d’Angle où il y a chastel et place fort, situé et assis ou pays du Poictou en bon pays et fertil et assez près de bonnes et ville et villages, et y frequentent et passent souvant plusieurs marchans et autres gens allans et venans de pays en autre, portans marchandises et autrement, et auquel lieu anciennement avoit pluseurs habitans et gens demourans et ung marché chascune sepmaine au jour de lundi ; mais à l’occasion des guerres et divisions qui ont eu cours le temps passé, et mesmement du temps des Angloys qui tenoient et occupoient le pays de Guyenne et autres pays d’environ, ledit lieu d’Angle a esté fort depopulé et gasté, ledit marché laissé et discontinué ; et à ceste cause, pour le bien et utilité dudit lieu d’Angle et repopulacion d’icellui et du pays d’environ, seroit besoing à nostredit conseiller suppliant avoir audit lieu deux foires l’an et ung marché chascune sepmaine, pour y estre tenues et continuées d’ores en avant perpetuellement et à tousjours, c’est assavoir la premiere au jour et feste saint Mathias ou moys de fevrier et l’autre au jour et feste saint Jaques et saint Christofle ou moys de juillet, et le marché au jour de lundi, ainsi qu’il estoit acoustumé le temps passé, se nostre plaisir estoit icelles foyres et marché y establir et ordonner de nouvel, en Nous humblement requerant que, actendu ce que dit est, et que à quatre lieues à la ronde dudit lieu d’Angle n’a ville ne lieu où il y ait foires ne marché audit jour et festes, il Nous plaise sur ce luy impartir nostre grace. Pour quoy Nous, les choses dessusdictes considerées, inclinans liberalement à la requeste de nostredit conseiller etc. suppliant, et en faveur des bons et agreables services qu’il Nous a par cy devant faiz en plusieurs et diverses manieres, fait et continue chascun jour, et pour autres causes et consideracions à ce Nous mouvans, avons creé, ordonné et estably, et par la teneur de ces presentes, de nostre grace especial, plaine puissance et autorité royal, creons, ordonnons et establissons audit lieu d’Angle lesdites deux foires l’an, c’est assavoir la premiere au jour et feste saint Mathias ou moys de fevrier et l’autre au jour et feste saint Jaques et saint Christofle ou moys de juillet, et ledit marché au jour du lundi, pour y estre tenues et continuées d’ores en avant perpetuellement et à tousjours mais, pourveu toutesvoyes que ausd. jours et festes n’ait aucunes foires ne marché à quatre lieues à la ronde dudit lieu d’Angle et que lesdites foires et marché ne soient prejudiciables à Nous ne a la chose publique et que noz droiz et devoirs n’en soient aucunement diminuez. Si donnons en mandement par cesdites presentes au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers ou à leurs lieuxtenans presens et advenir et à chascun d’eulx, si comme à luy appartiendra, que nostredit conseiller suppliant, ses successeurs et habitans dudit lieu d’Angle ilz facent, souffrent et laissent d’ores en avant et à tousjours joyr et user de noz presens grace, creacion, octroy et establissement de foires et marché plainement et paisiblement, ainsi que font les autres lieux du pays d’environ où il y a foires et marché, en faisant ou faisant faire crier et publier lesdites foires et marché ausd. jours, festes et lieu, et y establir places, estaulx, loges et autres choses necessaires, ainsi qu’ilz verront au cas appartenir, car ainsi Nous plaist-t-il estre fait, non obstant quelzconques ordonnances, restrinctions, mandemens ou deffenses à ce contraires. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, Nous avons fait mectre nostre seel à ces presentes, sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné au Plesseis du Parc lez Tours, ou moys de juillet, l’an de grace mil cccc iiiixx et ung, et de nostre regne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Par le roy, l’evesque d’Albi, le conte de Castres, me Jehan de La Vacquerie

Louis d’Amboise, évêque d’Albi (voy. ci-dessus, p. 184, note), Boffile de Juge, comte de Castres (id., p. 326, note), et Jean de La Vacquerie, président au Parlement de Paris (id., p. 316, note).

president et autres presens, J. Duban. — Visa. Contentor. F. Texier.

MDCXCII Juillet 1481 (après le 22)

Rémission obtenue par Jean Montigné, marchand de Poitiers, détenu dans les prisons de cette ville et appelant d’une sentence du sénéchal de Poitou le condamnant à être pendu pour avoir acheté et recélé un grand nombre d’objets volés dans des églises.

AN JJ. 209, n° 151, fol. 84 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 452-456

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Montigné, povre marchant, demourant en nostre ville de Poictiers, chargé de femme et de plusieurs enfans, à present detenu prisonnier ès prisons de ladicte ville, contenant que ledit suppliant, qui par cy devant s’est bien et honnestement gouverné en son fait de marchandise, puis an et demi ença ou environ, se trouva en l’ostel d’un appellé Cinqsolz

Le 12 février 1444 n.s., un marchand de Poitiers, nommé Jean Cinqsols, obtint du maire et commun de la ville, des lettres d’exemption de rentes, péages, pavages, levages, travers et autres coutumes, conformément aux privilèges octroyés à la commune. (Original, signé P. Chenu, par mandement du maire, Arch. comm. de Poitiers, B. 4.)

en ladicte ville de Poictiers, lequel faisoit lors taverne, et illec se mist à boire avec ung nommé Micheau Jousset, qui se disoit estre d’amprès Ensenis, et ung autre appellé Pierre qui se disoit estre de la ville d’Angiers, et en devisant et parlant les ungs aux autres les dessusd. Jousset et Pierre demanderent audit Jehan Montigné s’il avoit point quelques belles bagues pour donner à jeunes filles et il leur dist qu’il n’avoit que des aguilliers de soye, desquelz il leur en vendit trois la somme de cinq solz tournois. Et après, les dessusd. congnoissans ledit Jehan Montigné estre ung povre marchant desirant de gaigner, lui demanderent s’il vouloit point avoir d’eulx d’autres bagues, et il leur dits que oy ; et lors ilz s’en allerent ensemble à l’ostel de la Croix Blanche, où lesd. Jousset et Pierre estoient logez, et illec lui monstrerent certain argent brisé sur le bout d’une table avecques certaines reliques et touailles d’aulcier, lesquelz ledit Montigné achapta d’eulx la somme de cent dix solz tournois. Et ce fait, se departirent d’ensemble, et au partir les dessusd. demanderent audit Montigné s’ilz retournoient une autres foiz et ilz apportoient autre chose, s’il les despescheroit, et il leur dist que oy. Et certain temps après, les dessusd. Jousset et Pierre retournerent vers ledit Montigné en ladite ville de Poictiers et lui apporterent une charuble (sic) de satin violet et deux aulnes de satin noir qu’il achepta d’eulx ; et lui demanderent s’il les dechargeroit une autres foiz s’ilz retournoient vers lui, et il leur respondit que oy. Et longtemps après, les dessusd. revindrent en ladite ville de Poictiers et apporterent certaine quantité de cire ouvrée en cierges et chandelles, laquelle ilz firent poiser au pois de l’eschevinage de ladite ville, laquelle ledit de Montigné achapta d’eulx la somme de trente livres tournois. Et à une autres foiz, lesd. Jousset et Pierre retournerent vers ledit Montigné et lui apporterent une custode de cuyvre dorée, ung galice d’estain, une demie pateyne d’argent, ung petit crucifix et ung signetz de cuivre dorez, vallans la piece trois solz quatre deniers tourn. Et pour ce que ledit Montigné congneut que c’estoient choses d’eglise, leur dist qu’il n’en vouloit point et qu’il faisoit conscience de les achapter. A quoy lesd. Jousset et Pierre lui remonst[re]rent qu’il ne lui devoit chaloir que ce feust, puisqu’il y avoit à gangner : et moiennant leurs persuasions et la temptacion de l’ennemy qui sans cesser mect peine d’enorter chascune personne à mal faire, et ledit Montigné inclinant par le moyen de sa povreté et plusieurs pertes et fortunes qu’il a eues, à ce ce conscendit à les achepter, et leur en bailla certaine somme de deniers. Et puis lui firent promectre qu’il ne les encuseroit point. Depuis lesquelles choses, c’est assavoir six sepmaines a ou environ, ledit Montigné estant en la ville de Chastellerault, esperant venir jusques en la ville de Tours pour recouvrer certain argent qui lui estoit deu, en soy promenant par le marché de ladite ville pour cuider trouver et achapter aucunes toilles fines pour porter en icelle ville de Tours rencontra d’avanture lesd. Jousset et Pierre, lesquelz lui dirent qu’ilz avoient de la cire qui estoit à Saint George près ladite ville de Poictiers et que, s’il vouloit achapter icelle cire, qu’ilz luy en feroient bon marché, pour ce qu’ilz s’en voulloient aller au Lendit à Paris : ce qu’il leur accorda, et sur ce point le firent retourner jusques audit Saint George. Et quant ilz furent près l’eglise dudit lieu, lui dirent qu’ilz (sic) les actendist en ung blé en faisant pestre son cheval jusques à ce qu’ilz eussent esté querir ladite cire : ce qu’il fist, et les actendit jusques à la nuit et se mist à dormir, et, comme il dormoit, l’un d’entre eulx l’esveilla et lui apporta deux gros cierges. Et lors ledit Montigné leur dist que c’estoient cierges d’eglise, et il luy dist qu’il estoit vray, mais pour ce qu’il ne lui en devoit chaloir, et laissèrent illec lesd. deux cierges auprès de son cheval et allerent jusques près de ladite eglise, derriere une haye où les dessusd. lui apporterent certaine quantité de cire ouvrée en cierges et le tout vendirent [audit] Montigné certaine somme de deniers, sur laquelle ledit Montigné leur bailla la somme de seize livres tournois ; et après le chargerent sur le cheval dudit Montigné et lui dirent qu’il s’en allast à Poictiers la faire pezer, et quant ilz retourneroient il leur paieroit le surplus de ce qu’elle vauldroit. Et adonc ledit Montigné suppliant et lesd. Michau Jousset et Pierre se departirent les ungs des autres, et s’en alla ledit Montigné à Savigné l’Evesquau, ouquel lieu il fut trouvé saisy de ladite cire, et depuis mené prisonnier èsdites prisons de Poictiers, èsquelles il a esté oy et interrogué (sic) sur les choses dessusdites par le seneschal de Poictou ou son lieutenant : lequel, pour raison desd. cas et choses dessusdites, par sa sentence l’a condampné a estre pandu et estranglé : de laquelle sentence il s’est porté pour appellant à Nous et à nostre court de Parlement. En laquelle, s’il vouloit soustenir et poursuir sondit appel, il doubte que à cause desd. cas il fust en dangier de sa vie, qui seroit la totalle destruission de sa povre femme et mesnaige ; en Nous humblement requerant qu’il Nous plaise en l’onneur et reverance de la Passion Nostre Seigneur

Il semble d’après ce passage que Jean Montigné ait présenté sa supplique quatre mois plus tôt, dans l’espoir de bénéficier des grâces accordées à l’occasion du Vendredi Saint, qui en 1481 tomba le 20 avril ; l’expression « six semaines » employée ci-dessus pour désigner l’époque du dernier fait du récit, se réfère sans aucun doute à la date de la supplique. [L.C.]

et de sa glorieuse mere, et en pitié de sadite femme et enfans, lesdites sentence et appellacion mectre au neant, et lui quicter, remectre et pardonner les cas et crimes dessusd. et sur ce lui impartir nostre grace et misericorde. Pour quoy Nous, etc., voulans, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessusdit, avecques toute peine, etc., en mectant au neant, etc. Et l’avons restitué, etc., satisfacion, etc. Et imposons, etc. Si donnons en mandement à nostre seneschal de Poictou ou à sondit lieutenant, et à tous, etc., que de noz presens, etc., etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné au Plesseys du Parc lez Tours, ou mois de juillet, l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre regne le vingt ungiesme.

Ainsi signé : Par le roy, l’evesque d’Alby

Louis d’Amboise, évêque d’Albi, du 24 janvier 1474 au mois de mai 1497. (Cf. ci-dessus, p. 184, note.)

, le gouverneur du Daulphiné, le maire de Bourdeaux

Jean de Blanchefort, chevalier, sr de Saint-Clément et de Sainte-Sevère, écuyer d’écurie puis chambellan de Louis XI, maire et gouverneur perpétuel de Bordeaux. (Ci-dessus, p. 276, note.)

, maistre Charles des Poutaulx

Charles des Pouteaux, ou mieux des Potots, maître des requêtes de l’hôtel. (Ci-dessus, p. 389, note.)

et autres presens, G. Luillier. — Visa, Contentor. Texier.

MDCXCIII Août 1481

Rémission octroyée à Louis de Pindray, écuyer, et à Jean Grosset, son serviteur, coupables du meurtre de Guillaume Bozier, laboureur, qu’ils avaient voulu, avec d’autres, leurs complices, empêcher par la force de moissonner un champ que ledit Pindray prétendait appartenir à lui et à ses frères et sœurs. Ledit Bozier, de son côté, avait réuni sept ou huit hommes pour résister à cette prétention, et les deux troupes en étaient venues aux mains.

AN JJ. 209, n° 25, fol. 13 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 456-460

Loys, par la grace de Dieu roy de France, savoir faisons à tous, presens et advenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de Loys de Pindray, escuier, et Jehan Grosset son serviteur, contenant que ledit Loys de Pindray est filz puisné dudit lieu de Pindray

La terre et seigneurie de Pindray était mouvante du roi à cause du château de Montmorillon. Après avoir appartenu à la famille de ce nom, sur laquelle nous n’avons pour ainsi dire point de renseignements, elle passa à celle de Marans qui lui était alliée, comme on le voit dans cet acte même. Le 21 juin 1404, Jean de Pindray qualifié valet, fit aveu à Jean de France duc de Berry, comte de Poitou, du château et de la terre de Pindray et de ses dépendances (Arch. nat., R1* 2171, p. 629) ; il le renouvela en 1418, au dauphin Charles (id., P. 1144, fol. 14 v°). Malheureusement, entre cette date et l’année 1537, les hommages et aveux de Poitou ne contiennent plus rien sur ce fief et ses seigneurs. Au 6 juillet 1537, on trouve un dénombrement de la maison noble de Pindray, de l’hôtel de Ferrières et appartenances, mouvant du châtel de Montmorillon, rendu par Jean de Marans (P. 5563, cote 883). Le 21 juillet 1548, le même Jean ou son fils en fit un nouvel aveu au roi (P 5622, cote 1721). Enfin on peut citer, au siècle suivant, un hommage de la seigneurie de Pindray, sise en Poitou mouvant de Montmorillon, rendu le 13 décembre 1633 par Florent Ferré, sr de Boiscommun (P 5671 cote 3.127).

et a son frere aisné, Anthoine de Pindray, seigneur dudit lieu de Pindray, qui tient et possede tant ledit lieu de Pindray et les appartenances que autres terres et seigneuries à eulx advennus par droit de succession de leurs feuz pere et mere et qui encores n’en a baillé ne fait partaige audit Loys ne autres ses freres et seurs, et sont lesdictes choses encores indivisées. Et entre autres choses de ladicte succession est ung fief appellé le fief des Bouchaulx et de la Forge, qui est fondé en doumaines de terre labourables et autres, assis en la paroisse de Pouzeaulx près Chauvigny et tenu dudit lieu de Chauvigny à foy et hommage, duquel fief du Bouchaulx et de la Forge est et meut une piece de terre labourable assise près lesd. lieux, qui contient troys ou quatre boissellées de semence ou environ : de laquelle ledit seigneur de Pindray et sesd. freres et seurs et leurs predecesseurs ont joy paisiblement et de toute ancienneté jusques à ceste presente année, que ung nommé Guillaume Bozier, laboureur de ladicte parroisse de Pouzeaulx et ses enffans, de leur volunté indeue, se sont intruiz et boutez en icelle et l’ont ensemencée en avoine. Laquelle chose venue à la notice et cognoissance dudit seigneur de Pindray et dudit Loys, son frere suppliant, ilz sont alez devers ledit Bouzier et lui ont remonstré qu’il leur avoit fait tort d’avoir labouré leurd. terre, en le priant qu’il le voulust reparer et qu’il cessast de plus y exploicter, autrement ils y pourvoiroient par raison et justice, et encores qu’ilz estoient contans que ladicte avoyne ainsi ensemencée en ladicte terre fust mise en main tierce, s’il y prétendoit droit, jusques à ce que austrement en fust ordonné : lequel Bouzier ne le voulut faire et leur dist qu’il leveroit ladite avoine, voulsissent ou non. Et a tant lors se departirent lesd. seigneur de Pindray et sondit frere, et depuys n’y eut riens pourveu. Et pour ce que le lundi jour et feste saincte Radegonde, ainsi qu’ilz estoient assemblez audit lieu de Pindray, ledit seigneur de Pindray, ledit Loys son frere, suppliant, Gilles et Anthoine de Marans et Denys de Besdon qui sont parens et affins desd. de Pindray, ainsi que iceulx de Marans

Plusieurs membres de la famille de Marans, vivant à la fin du xve siècle, ont été l’objet d’une notice dans notre tome X. (Arch. hist. du Poitou, t. XXXV, p. 479-480.) Gilles et Antoine nommés ici n’y figurent pas.

et de Besdon

Denis, dit aussi Louis, de Besdon était le troisième fils de Jean de Besdon, écuyer, seigneur d’Oyré et de Traversay, et de Marguerite d’Aloigny. Il est qualifié écuyer seigneur des Mousseaux et avait épousé, vers 1480, Marcelle de Pindray, dont il eut trois fils et une fille (Dict. des familles du Poitou, t. I, p. 503-504). Son père était mort avant le 12 octobre 1456. Dans un aveu de Traversay qu’elle rendit au roi à cette date. Marguerite d’Aloigny est dite sa veuve (Arch. nat., P. 1145, fol. 90), et c’est Mathurin de Besdon, autre fils sans doute de ladite dame et de Jean de Besdon, non nommé dans la généalogie imprimée, qui en était seigneur et en fit aveu, le 18 juillet 1485 (id., fol. 146 v°). D’après MM. Beauchet-Filleau (loc. cit.), le fils aîné de Jean de Besdon, Antoine, écuyer, sr d’Oyré, épousa Françoise d’Aloigny, et le second Jean, écuyer, seigneur d’Oyré après son frère, fut marié en 1493 à Guyonne de Marans, fille de Guy sr de Vaugodin et d’Antoinette de Pindray, et n’eut qu’une fille Anne, mariée à François du Tay, écuyer, sr de Lésigny.

, se departirent dudit lieu de Pindray pour eulx en aller à leurs maisons, leur fut dit que ledit Bouzier et sesd. enfans mestivoient ès terres appartenans audit seigneur de Pindray et à sesd. freres et seurs, ilz entreprindrent que ledit Loys de Pindray suppliant meneroit iceulx de Marans et de Besdon jusques audit lieu de Pouzioux et verroient ce que ledit Bouzier et leurs enffans exploicteroient en leursdictes terres. Et à la vérité, leur fut dit que ledit Bouzier et autres de ses frerescheurs avoient prins deux gerbes de froment en certaine porcion de l’une de leursdites terres. Et à ceste cause ledit Loys de Pindray amena avecques luy Guillaume de Latus, Jehan Bouchier, Mathurin Guinguant, Michau Chenu, André de Latus et André Thiou, laboureux, qu’il print audit lieu de Pindray, et lors fist prendre des faucilles pour soier ladite avoyne et des fourches pour la charger et emporter, ainsi qu’ilz l’auroient cuillie jusques à sa mestaierie dudit lieu des Bouchaux. Et incontinant qu’ilz furent arrivez en ladite terre ainsi semée en avoyne et qu’ilz commancerent à soier, arriverent sur ladite terre, Mathurin Bouzier, filz dudit Guillaume Bouzier, et sept ou huit hommes de labeur en sa compaignie, ses complices et adherans, qui s’efforcerent, mesmement ledit Mathurin, de empescher que lesd. laboureurs dudit de Pindray suppliant ne mestivassent ladite avoyne, et se print à une gerbe qui ja estoit liée, et dit que bon gré mal gré il emporteroit icelle gerbe et garderoit que ledit de Pindray ne sesd. gens y exploictassent plus ne enlevassent ladite avoyne. Et pour ce que ledit de Pindray suppliant vit l’assemblée de tant de gens de la part dudit Bouzier, il dit audit Grosset, son serviteur, aussi suppliant, que, se ledit Bouzier ou autres de sesd. complices s’efforçoient de frapper, qu’il frappast et qu’il fist en maniere qu’ilz fussent les plus fors ; et s’adreça audit Mathurin en lui disant qu’il laissast ladite gerbe. Lequel Mathurin avec une fourche de fer qu’il avoit, à grant arrogance se presenta droit audit Loys : lequel Loys, ce voyant et doubtant qu’il le frappast de ladite fourche, ainsi que autres foiz l’avoit voulu oultrager, tira son espée et, pour obvier qu’il ne le frappast, luy bailla de sadite espée sur la teste ung coup du taillant et ung autre sur la cuisse, mais il ne le blessa pas fort ; et incontinant arriva ledit Jehan Grosset son serviteur, qui doubtoit aussi que ledit Mathurin oultrageast ledit Loys son maistre, et avecques une fourche de fer qu’il avoit luy donna deux ou troys coups sur la teste, tellement qu’il le tumba à terre. Et à la verité du cas, des coups que ledit Loys de Pindray suppliant lui donna ne le mutillerent comme rien et ne s’en fust en riens doulu, mais les coups que bailla ledit Grosset furent bien durs et tellement que tantost après ledit Mathurin sur le champ alla de vie à trespas. A l’occasion duquel cas lesd. supplians, doubtans rigueur de justice, se sont absentez du pays et n’y ouseroient jamays converser ne repairer se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties : en Nous humblement requerans que, actendu que en tous leurs autres faiz ilz sont gens de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans jamays avoir esté actains ne convaincuz d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, Nous plaist leur impartir nosdites grace et misericorde. Pour quoy Nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, etc., ausd. supplians avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes au seneschal de Poictou ou à son lieutenant et à tous noz autres, etc. Donné à Tours, ou moys d’aoust, l’an de grace mil cccc.iiiixx et ung, et de nostre regne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Par le roy, l’evesque d’Albi et autres presens. Amys. — Visa. Contentor. F. Texier.

MDCXCIV 21 septembre 1481

Mandement au sénéchal de Poitou de procéder à l’entérinement de lettres de rémission rectifiées, obtenues par Louis de Pindray, écuyer, homme d’armes de l’ordonnance, pour le meurtre de Mathieu Bozier, avec lequel il était en contestation touchant la récolte d’une pièce de terre.

AN JJ. 207, n° 105, fol. 52 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 460-463

Loys, etc., au seneschal de Poictou ou à son lieuxtenant, salut. L’umble supplicacion de nostre bien amé Loys de Pindray, escuier, homme d’armes de nostre ordonnance soubz la charge de nostre cher et amé filz l’Admiral de France

Louis, bâtard de Bourbon, fils naturel de Charles Ier, duc de Bourbon, et de Jeanne de Bournan, comte de Roussillon en Dauphiné et de Ligny, avait été pourvu, en mai ou juin 1466, de la charge d’amiral de France, en remplacement de Jean, sire de Montauban, décédé ; il l’exerça jusqu’au 19 janvier 1487 n.s., date de sa mort. (Le P. Anselme. Hist. généal., t. I, p. 308 ; t. VI, p. 857.)

, avons receue, contenant que, dès le mois d’aoust derrenier passé, aucuns des parens et amis dudit suppliant, lui estant absent, ont obtenu, pour lui et Jehan Grosset son serviteur, lettre de remission, grace et pardon de la mort et obmicide par eulx commise en la personne de feu Mathieu Bozier, homme de labeur par le temps qu’il vivoit, à l’occasion de la percession des fruiz creuz et artemps. (sic)

Corr. actefiez ?

en certaine piece de terre audit suppliant et ses predecesseurs appartenans, par vertu desquelles et moiennant voz lettres executoires sur ce, les parens et amis charnelz dudit feu ont esté convenuz et adjournez par devant vous à certain brief jour à escheoir, pour icelles veoir enteriner ou les contredire et debouter, se mestier est. Mais au moien de ce que èsdictes lettres de remission a esté obmis que oudict conflict et acte contenu en icelles lettres, à la perception desdiz fruiz aucuns des varletz et serviteurs d’icellui suppliant avoient porté deux javelines et ung espiot, dont toutes voyes ne fut aucun frappé ne blecié, et aussi qu’il l’avoit fait pour ce que ledict feu Mathieu Bozier et icellui (ici une phrase omise) suppliant certain long temps paravant avoient en parolles rigoreuses, qui estoient en debat pour ledit champ, doubtant sa personne fist porter lesdiz batons, dont toutesvoyes ne fut batu ne frappé aucun, comme dit est ; aussi a esté adverti que aucuns qui ont veu et visité ledit feu ont voulu dire et supposer que ledit coup que ledit de Pindray, suppliant, donna en la cuisse dudit feu il estoit decedé, et que il avoit dit à sondit serviteur que s’aucun le vouloit oultrager ou prandre lesdiz fruiz, qu’il le tuast, ce qu’il n’est contenu en ladicte remission, ains seullement qui les frappast en maniere que la force lui en demourast ; et aussi par icelles lettres est contenu que ledit feu dist qu’il leveroit les fruiz dudit champ, voulcist icellui suppliant ou non, dont toutes voyes il n’est records qu’il dist « voulcist ou non », bien dist ledit feu qu’il emporteroit ledit blé. Et à ceste cause doubte ledit suppliant que pour ce on lui vueille impugner et contredire et debatre sesdictes lettres de remission et par ce moien lui empescher l’enterinement d’icelles, jaçoit ce que en tous les autres pointz elles soient vrayes, ainsi que ledit suppliant entend deuement monstrer et proceder par devant vous, humblement requerant sur ce nostre provision et remede de justice. Pour quoy Nous, ces choses considerées, que ne voulons, pour lesdictes obmissions l’effait de nosdictes lettres de remission estre empesché, mais icelles estre du tout en tout enterinées, selon leur forme et teneur, vous mandons et pour ce que ledit procès est introduit par devant vous et sont les parties de vostredicte seneschaucié, commectons que, parties presentes ou appellées, ou procureur pour elles, s’il vous appert du contenu èsdictes lettres de remission et joinctes les obmissions dessusdictes, procediez à l’enterinement d’icelles en recevant ledit suppliant à joindre et emploier les faiz dessus posez tout ainsi que s’il les eust donnez à entendre par lesdictes lettres de remission, en faisant au surplus aux parties oyes bon et brief droit. Car ainsi Nous plaist-il estre fait, et audit suppliant de grace especial l’avons octroyé et octroyons par ces presentes, nonobstant l’obmission des choses dessusdictes, pour lesquelles ne voulons l’effect de nosdictes lettres de remission estre aucunement retardé ne empesché, et quelzconques lettres subreptices impectrées ou à impectrer à ce contraires. Donné au Plesseys du Parc, le xxie jour de septembre l’an mil. iiiiciiiixxi, et de nostre regne le xxie.

Ainsi signé : Par le roy, l’evesque d’Alby

Louis d’Amboise, alors évêque d’Albi depuis le 24 janvier 1475. (Cf. ci-dessus, p. 184, note.)

, le prothonote (sic) d’Amboise

Parmi les nombreux enfants de Pierre d’Amboise, sire de Chaumont, et d’Anne de Bueil, qui suivirent des carrières d’église, plusieurs sont connus dans les textes du règne de Louis XI et sont mentionnés sous ce titre « le protonotaire d’Amboise », qu’ils portaient avant d’atteindre les plus hauts degrés de la hiérarchie (cinq devinrent évêques, archevêques ou cardinaux). A la date des présentes lettres « le protonotaire d’Amboise » ne pouvait être que le fameux Georges d’Amboise, le futur premier ministre de Louis XII. Successivement évêque de Montauban, en 1484, archevêque de Narbonne et de Rouen en 1493, créé cardinal par le pape Alexandre VI en 1498, et l’année suivante légat en France. Il mourut à Lyon le 25 mai 1510 à l’âge de cinquante ans. C’était le huitième des neuf fils de Pierre d’Amboise, sire de Chaumont, qui eut de plus huit filles. (Le P. Anselme, Hist. généal., t. VII, p. 124.)

, maistre Charles de La Vernade

Charles de La Vernade, chevalier, seigneur de la Vernade, maître des requêtes de l’hôtel, exerçait cet office depuis l’année 1472 jusqu’à sa mort survenue le 30 novembre 1504, fut inhumé, ainsi que sa femme Antoinette Spifame, dans une chapelle de l’église Saint-Antoine de Paris. (Blanchard, Les généalogies des Maistres des requêtes. In-fol., 1670, p. 206.)

et autres presens. Amys.

MDCXCV Septembre 1481

Confirmation en faveur du chapitre de Saint-Hilaire de Poitiers d’un ancien privilège portant défense aux officiers de cette ville de faire aucune exécution et même de faire passer aucun criminel condamné à mort ou à toute autre peine corporelle par le bourg de Saint-Hilaire, dont la justice et la police appartiennent audit chapitre

L’original de ces lettres patentes est conservé aux Archives départementales de la Vienne, accompagné d’un acte constatant l’exécution des prescriptions qu’elles contiennent, lorsque François de Belleville, écuyer, seigneur de la Mothe-Fremeau, condamné à être pendu, fut conduit au supplice (G. 640). Une copie s’en trouve dans la collection de dom Fonteneau, t. XII, p. 161. Elles sont transcrites en outre sur les registres du Parlement, à qui elles étaient adressées, avec l’arrêt d’enregistrement de la cour daté du 5 janvier 1482 n.s. (Arch. nat., X1a 8.608, fol. 5.) Les lettres patentes ont été imprimées dans la grande collection des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XVIII, p. 697, et dans le Recueil général des anciennes lois françaises d’Isambert, in-8°, t. X, p. 832.

.

AN JJ. 207, n° 97, fol. 48 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 463-467

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de noz chiers et bien amez les tresorier, doyen, chanoines et chappitre de l’eglise Monsr Sainct Ylaire le Grant de Poictiers, contenant que jà pieça, de longtemps et d’ancienneté, feux noz predecesseurs concederent et octroyerent à ladicte eglise plusieurs previlleiges touchans le bien, augmentacion et entretiennement d’icelle eglise, et entre autres pour l’onneur et reverence dudit glorieux corps sainct Monsr Sainct Ylaire et pour la singuliere devocion que nosd. predecesseurs avoient à ladicte eglise et audit glorieux corps sainct et autres estans et reposans en icelle eglise et au bel et notable service divin qui y est chascun jour continuellement fait et celebré, concederent et octroyerent ausdiz supplians et à leurs successeurs, lesquelz sont seigneurs de toute ancienneté du bourg dudit lieu de sainct Ylaire, que aucuns criminelz condempnez à mort ou autres peines et supplices corporelz ne feussent dès lors en avant menez ne conduiz pour souffrir lesdictes peines ou supplices corporelz et ne les passassent les executeurs de nostre justice par ledit bourg Monsieur sainct Ylaire, ains les passassent, conduisissent et menassent par autres lieux touchans les murailles et ailleurs où il y en y a plusieurs. Desquelz privilleiges iceulx supplians ont joy par bien long temps et de tel temps et d’ancienneté qu’il n’est memoire du contraire, et jusques puis aucun temps en ça que noz officiers audit Poitiers les troublerent et empescherent en ce. Pour laquelle cause iceulx supplians se trahirent par devers feu Thibault de Noviac, lors seneschal dudit Poictou

Le nom de ce sénéchal, pourvu sous l’administration d’Alfonse comte de Poitiers, est Théobaldus de Noviaco dans les textes latins et « Tiebauz de Neuvis » dans les actes en français. On conserve des comptes rendus par ce personnage en qualité de sénéchal de Poitou, du 1er novembre 1257 et du 1er novembre 1260. (Arch. nat., J. 192, nos 20 et 32.) On ne sait pas exactement à quelle date Thibaut de Neuvy cessa d’exercer cet office. D’après le présent texte (il y a deux cent seize ans), il aurait été encore en fonctions en 1265 ou environ, ce qui est fort possible. Le nom de ce sénéchal est mentionné à plusieurs reprises dans la Correspondance administrative d’Alfonse de Poitiers (publ. pour le Ministère de l’Instr. publ. par A. Molinier, 2 vol. in-4°) ; mais l’on n’y trouve pas d’autres éléments chronologiques, sinon que dans un acte du 5 septembre 1268, on lit : Sane nobis relatum extitit quod per Theobaldum de Noviaco, dum esset senescallus in Pictavia … (Tome I, p. 395.)

, qui fut deux cens seize ans a ou environ ; lequel, après ce qu’il fut informé desdiz previlleiges et joyssance sur ce par lesdiz supplians, dist et ordonna par sa sentence judiciaire, le conte dudit conté de Poictou present, que dès lors en avant lesdiz criminelz et condempnez ausdiz supplices corporelz seroient conduitz, passez et menez ausdiz supplices par le chemin bas ou voye par le dessoubz de l’eglise Sainct Gregoire, qui est près des murailles de ladicte ville, et non par la grant rue dudit bourg, ainsi appartenant ausdiz supplians. Au moien de laquelle sentence et condampnacion lesdiz supplians ont joy par long temps dudit previlleige, et jusques a puis aucun temps ença que noz officiers audit Poictiers ont aucunes foiz passez par ledit bourg lesdiz criminelx et condempnez, et fait faire des execucions criminelles en icellui, en venant directement contre lesdiz previlleiges et sentence ainsi donnez et octroyez au prouffit desdiz supplians. Au moien desquelz exploiz iceulx supplians se sont portez pour appellans en maintes manieres, et leurs appellacions ont relevées, et les aucunes d’icelles en nostre court de Parlement à Paris, où elles sont demourées indecises soubz umbre de ce que lesdiz supplians ont perduz ou adirez leursdiz previlleiges et sentence ainsi par eulx obtenuz, et avec ce sont cependant demourez empeschez en la joyssance d’iceulx, ou grant detriment et prejudice desdiz supplians et de ladicte eglise, et plus seroit, se par Nous ne leur estoit sur ce impartie nostre grace et provision convenable, ainsi qu’ilz Nous ont fait dire et remonstrer, requerans humblement iceulx. Pour quoy Nous, ces choses considerées, à iceulx supplians, pour les causes et consideracions devant dictes, et aussi pour la singuliere devocion et affection que avons à ladicte eglise. Monsr sainct Ylaire, de laquelle nous sommes chef et abbé, et audit glorieulx corps sainct et autres repposans en icelle, et aussi audit grant, bel et notable service divin qui y est fait, entretenu et continué chascun jour, avons octroyé et octroyons de grace especial, par ces presentes, voulons et Nous plaist qu’il joysse desdiz previlleiges et sentence et du contenu en iceulx, en la maniere devant dicte, sans ce que, ores ne pour le temps avenir, on leur puisse faire, mectre ou donner aucun destourbier ou empeschement au contraire, ne que d’ores en avant aucuns de noz officiers audit Poictiers ne autres quelzconques puissent passer ou faire passer, mener ou faire mener et conduire aucuns desdiz criminelz ou condempnez ausdiz supplices ou peines corporelles par ladicte grant rue dudit bourg, ne qu’ilz y puissent faire aucunes execucions criminelles en quelque maniere ne pour quelconque cause que ce soit ; ains en tant que mestier est ou seroit, leur avons derechef, de nouvel et d’abondant donné et octroyé, donnons et octroyons ledit previlleige, de nostredicte grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par cesdites presentes. Si voulons que eulx et leurs successeurs en joyssent à tousjours mais paisiblement, sans aucune difficulté au contraire. Si donnons en mandement, par cesdictes presentes, à noz amez et feaulx conseillers les gens de nostredicte court de Parlement, à nostredit seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers ou officiers, ou à leurs lieuxtenans ou commis, presens et avenir, et à chacun d’eulx, si comme à lui appartendra (sic) et qui requis en sera, que de noz presens grace, previlleige, concession et octroy facent, seuffrent et laissent lesdiz supplians et leurs successeurs en ladicte eglise, joir et user plainement et paisiblement, sans faire ne souffrir aucune chose estre faicte au contraire, ains tout ce que fait auroit esté ou seroit à l’encontre, reparent et remectent, ou facent reparer et remectre sans delay au premier estat et deu, en mectant au neant tous lesdiz appeaulx, procès et procedeures tant de ceulx qui sont meuz en nostredicte court de Parlement comme ailleurs, et lesquelz Nous y avons mis et mectons, de nostredicte grace et auctorité royal par ces mesmes presentes. Et imposons sur ce scillence perpetuel à nostre procureur present et avenir et à tous autres. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné au Plesseys du Parc, ou mois de septembre, l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre regne le vingt ungiesme.

Ainsi signé : Par le roy, l’evesque d’Alby, le prothonotaire d’Amboise, maistres Charles de Poutoz

Sur les personnages nommés ici, voyez ci-dessus pour le premier, p. 184, note pour le second, p. 79, note, et pour le troisième, p. 389, note.

et autres presens. Amys. — Visa. Contentor. Texier.

MDCXCVI Novembre 1481

Rémission en faveur de Jacques, bâtard de Saint-George, demeurant à Fresseix, et de Géry Auparcelier, de la paroisse de Mérignat, juridiction de Bourganeuf

Pour l’enclave poitevine de Bourganeuf et le dénombrement des paroisses qui en faisaient partie, voy. L. Guibert, Les Enclaves poitevines du diocèse de Limoges. Limoges, 1886, in-12. (Extrait de l’Almanach limousin pour 1886,) p. 13 et suiv.

, au ressort de Montmorillon « en notre païs de Poictou », poursuivis comme meurtriers de Philippe de Lascoux-Martin. Guillaume et Jean de Masgondon, métayers de Gabriel de Saint-George, écuyer, seigneur de Fresseix et de Mérignat

Gabriel de Saint-George était fils aîné de Jean, chevalier, seigneur de « Fraisse, Perissé et Vauzelles », et de Marguerite d’Aubusson. Marié à Marguerite de Mortemer, fille de Jean de Mortemer, écuyer, sr du Plessis, il en eut un fils prénommé Jean. (Beauchet-Filleau, Dict. des familles de l’ancien Poitou, 1re édit., t. II, p. 653.) Jacques et Méry, bâtard de Saint-George, nommés dans ces lettres de rémission étaient sans doute ses fils naturels.

, s’étant plaints à leur maître d’excès et empiétements qu’étaient en train de commettre à leur détriment ledit Philippe de Lascoux et ses gens, Gabriel de Saint-George y envoya les deux suppliants et « ung autre nommé Méry, aussi bastard dudit Saint-George, pour veoir et savoir que c’estoit ». Cette intervention motiva une violente querelle, dans laquelle on échangea des injures puis des coups, et ledit Philippe fut mortellement frappé. « Si donnons en mandement au seneschal de Poictou ou à son lieutenant à Montmorillon, etc. Donné à Thouars, au mois de novembre l’an de grace mil CCCC. quatre vings et ung, et de nostre règne le ving et ungiesme ».

AN JJ. 209, n° 160, fol. 89 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 467-468

MDCXCVII Novembre 1481

Rémission accordée à Michel Guichery, demeurant au Puy-Notre-Dame, poursuivi comme rogneur de monnaie.

AN JJ. 209, n° 156, fol. 86 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 468-469

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de Michel Guichery, aagé de soixante ans ou environ, chargé de femme et de huit enfans, demourant au Puy Nostre Dame en Anjou, contenant que, depuis trois sepmaines ença ou environ, icellui suppliant, pour subvenir à aucuns ses affaires (sic), il a rongné à plusieurs et diverses foiz le nombre et quantité de cent escuz d’or ou environ, la rongneure desquelz povoit bien volloir la somme de soixante solz ou environ, et est il ainsi que, depuis trois sepmaines ença, Gabriel Guichery, filz dudit suppliant, lui estant en la ville d’Angiers, fut trouvé saisi de dix escuz d’or dont les sept estoient rongnez : pour lequel cas icellui Gabriel fut constitué prisonnier ès prisons dudit lieu d’Angiers, ès quelles prisons il a dit et depposé que ledit suppliant, son pere, lui avoit enseigné à rongner lesd. escuz. Et à ceste [cause], à la requeste de nostre procureur audit lieu d’Angies (sic), ledit suppliant a esté adjourné à comparoir en personne par devant les maistres de noz monnoyes ou autres noz officiers audit lieu d’Angiers, pour illec respondre à nostredit procureur, et avecques [ce] ses biens meubles et heritaiges ont esté saisiz et mis en nostre main par inventoire et baillez à regir et gouverner à commissaires soubz nostredite main. Lequel suppliant n’a osé ne oseroit comparoir en personne audit lieu d’Angiers, doubtant que on voulsist rigoreusement proceder à l’encontre de sa personne, et aussi n’oseroit jamais converser, reppairer ne demourer au païs, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, si comme il dit, en Nous humblement suppliant que, actendu que en tous ses autres faiz, il s’est tousjours bien et honnestement gouverné, sans jamais avoir esté actaint ne convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, il Nous plaise sur ce lui impartir nosdites grace et misericorde. Pour quoy Nous, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessusdit, avecques toute peine, etc., en mectant au neant, etc. Et l’avons restitué, etc., satisfacion, etc. Et imposons, etc. Si donnons en mandement aux seneschaulx de Poictou ou à son (sic) lieuxtenant à son siege de Thouars, et seneschal d’Anjou et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Bonne Aventure, ou mois de novembre, l’an de grace mil iiiic quatre vings et ung, et de nostre regne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Par le roy, l’evesque d’Alby

Louis d’Amboise, évêque d’Albi. (Cf. ci-dessus, p. 184, note.)

, le sr du Solier

Ce personnage dont le nom est écrit ici du Solier et dans deux actes suivants, de Soliers ou de Solyers, paraît être Palamède de Forbin sr de Soliers, vicomte de Martigens, chevalier, d’abord conseiller et chambellan de Charles II d’Anjou comte du Maine, dernier comte de Provence, auquel il persuada de léguer son comté à Louis XI. Celui-ci l’en récompensa en le nommant son conseiller et chambellan, puis par lettres patentes du 19 décembre 1481, gouverneur général des comtés de Provence et de Forcalquier, et, par autres lettres du même jour, gouverneur de Dauphiné à la place du seigneur du Lude, décédé. Il mourut en 1508. (J. Voisin, Lettres de Louis XI, t. VIII, p. 276.)

, maistre Charles des Poutaux

Charles des Potots, maître des requêtes de l’hôtel. (Ci-dessus, p. 389, note.)

et autres presens. Vincent. — Visa. Contentor. Texier.

MDCXCVIII Novembre 1481

Rémission donnée en faveur de Patrice Calendar, Écossais, serviteur de Cleriadus de Saint-Mauris, chambellan du roi, qui se rendant de Tours à la mer, sur l’ordre de son maître, avait tué dans une rixe à Lusignan, Mathurin Pelletier, parent et valet de l’hôtelière de la Tête noire, avec lequel il avait eu maille à partir.

AN JJ. 209, n° 159, fol. 88 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 470-475

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de Patris Calendar, natif d’Escosse, contenant que, puis ung mois ença ou environ, lui estant en la ville de Tours en la maison d’une nommée Jabonnarde, demourant audict Tours, en la compaignie de nostre amé et feal conseiller et chambellan Cleriadus de Sainct Moris

Cleriadus de Saint-Moris était à cette époque capitaine de Beauvoir-sur-Mer et recevait de Louis XI une pension de 600 livres par an, pension qui lui fut diminuée de 63 livres pour l’année commencée en octobre 1480. (Bibl. nat., ms. fr. 2.900, fol. 9 ; 2.906, fol. 9 ; J. Vaësen, Lettres de Louis XI, t. VIII, p. 122.) Cette réduction fut peut-être le résultat du mécontentement qu’avait éprouvé le roi d’une révolte des habitants de Beauvoir-sur-Mer, qui justement avait éclaté au mois d’octobre 1480, à l’instigation d’un frère Bernardin nommé Jean Maillou, au sujet d’un supplément de deux sous par livre pour trois ans, à eux imposé en sus du quatrième denier jusque-là payé sur le sel. (B. de Mandrot, Ymbert de Baternay, p. 95 à 97 ; J. Vaisen, op. cit., t. VIII, p. 339.)

, son maistre, lequel Cleriadus l’envoya et ung nommé Estienne Bernard, page et serviteur de Raymonnet de Sainct Moris, son frere, à la mer, pour ce qu’ilz avoient esté mors d’un chien enragé, et leur ordonna y mener deux chiens qui pareillement avoient esté mors. Lesquelz se partirent de ladicte ville et allerent au giste à Chastellerault où ils couscherent une nuit. Et le lendemain allerent disner en l’ostellerie des Trois Pilliers à Poictiers, et d’illec se partirent après disner et trouverent en leur chemin ung marchant qui se disoit estre de Xaintes, et tous ensemble s’en allerent loger à l’enseigne de la Teste Noire en la basse ville de Lergnem

Sic. Corr. « Lezignem » pour « Lusignan ».

, auquel lieu ilz souppèrent. Et après qu’ilz eurent souppé et fait bonne chiere ensemble, ung nommé Mathurin Pelletier vint en chambre où ilz avoient souppé, pour les desservir ; et, tantost après qu’il fut arrivé en ladicte chambre, ledict Estienne Bernard deist audict Patris Calendar et autres qui estoient en ladicte chambre qu’ilz ne sonnassent mot. Et lors icellui Patris dist à ung barbier qui faisoit la barbe dudict marchant qu’il ne sonnast mot et qu’il les laissast faire. Lequel barbier dist qu’il ne diroit mot. Et incontinant ledict Estienne Bernard, qui avoit certaines clefs en ses mains, liées ensemble à une courroye de cuir, dist audict Mathurin Pelletier qu’il avoit trouvées lesdictes clefz, mais qu’il ne les povoit avoir de ladicte courroye, sans la coupper en desnoher ung noul qui estoit en icelle, et ledict Mathurin lui dist qu’il gaigeroit à lui qu’il les osteroit bien, sans coulper ou desnoher ladicte courroie. Et ledict Estienne Bernard dist qu’il mectroit à lui deux onzains que non feroit. Lequel Mathurin Pelletier fist responce qu’il n’avoit point d’argent. Et lors ledict Estienne Bernard dist audict Patris Calendar telles parolles ou semblables : « Patris, prestez lui deux onzains ! » Lequel Patris dist qu’il le vouloit bien, et incontinant les lui bailla. Et afin que ledict Patris ne se mefiast de lui, lui voult ledict Mathurin bailler son bonnet qu’il avoit en sa teste pour gaige desd. deux onzains, ce que ledict Patris ne voult faire, disant qu’il ne se meffioit point de lui et lui rendit sondict bonnet sans retenir de lui aucun gaige. Et après ce iceulx Estienne Bernard et Mathurin firent ensemble ladicte gaigeure desdictes clefs et courroye, et perdit ledict Mathurin lesd. deux onzains. Et après ce que ledict barbier s’en fust allé hors de ladicte chambre, ledict Patris dist audict Mathurin et autres qu’il ne congnoissoit point ledict Mathurin et qu’il vouloit savoir avecques l’ostesse dudict lieu si elle lui respondroit desd. deux onzains, ou si elle avoit point de congnoissance dudict Mathurin, pour ce que le lendemain il vouloit partir matin pour accomplir sondit voyage le plus tost qu’il pourroit. Lequel Patris, pour ce faire, se voult descendre en la chambre de ladicte hostesse par ung degré de bois estant en icelle hostellerie, sur lequel il trouva le vaslet dudit lieu, auquel il demanda si ladicte hostesse estoit couschée, lequel vaslet lui dist que oy. Et ce fait ledit Patris lui demanda si elle lui vouldroit bien respondre desd. deux onzains qu’il avoit prestez audit Mathurin. Lequel lui fist responce que sadicte maistresse lui avoit dit qu’elle en respondroit. Et après s’en plus en enquerir, s’en alla coucher. Et l’endemain au matin, après ce que lui et ledit Estienne Bernard furent housez et prestz de monter à cheval, ledit Patris appella ladicte hostesse pour venir compter avecques eulx ; laquelle vint en la chambre où ilz estoient. A laquelle incontinant qu’elle y fut arrivée, ledit Patris demanda c’elle lui rebatroit lesd. deux onzains, ainsi que lui avoit dit ledit varlet le soir devant ; auquel ladite hostesse fist responce que non et qu’elle n’en avoit jamais parlé audit varlet, et que ledit Mathurin estoit homme passant son chemin comme ledit Patris et que aucunement elle ne le congnoissoit point. Et oultre lui dist, en la presence desd. marchant et Estienne Bernard, que ledit Mathurin s’en estoit allé, dès trois heures après mynuit, le chemin de Sainct Maixant. Et ce fait, ledit Patris, doubtant que ladite hostesse ne lui dist verité, il la fist jurer et lever la main, en disant telles parolles ou semblables : « Par vostre foy, est-il point vostre parent ? » Et lors ladite hostesse lui fist responce que oy ung petit. Lequel Patris lui dist, comme il lui semble, qu’elle estoit bien povre femme de renoncier son parent pour deux onzains, en lui disant oultre que ledit Mathurin estoit en ladite hostellerie. Et a tant ladite hostesse se departit, sans autre chose lui dire. Et incontinant qu’elle s’en fut allée d’avecques ledit Patris de ladite chambre, le varlet dudit logis vint en icelle chambre, auquel ledit Patris dist qu’il estoit mauvais garson de lui avoir dit, le soir paravant, que ladicte hostesse lui respondroit desd. deux onzains, veu qu’elle ne les lui avoit voulu rabatre ne desduire sur son escot ; lequel varlet dist audit Patris qu’il cuidoit que ledit Mathurin les lui eust baillez. Lequel Patris menassa à batre ledit varlet pour les parolles qu’il lui avoit dictes, par quoy s’en alla de ladicte chambre pour soy latiter et mectre hors de la veue dudict Patris. Et ce fait ledict Patris descendit de ladicte chambre pour s’en aller, et tout droit s’en alla à l’estable où estoit son cheval ; lequel, si tost qu’il y fut venu, trouva adiré ung des etriers de la selle de sondict cheval. Et ce voiant, demanda à ladicte hostesse, qui estoit en la cuisine dudict logis, où estoit le varlet ; laquelle lui fist responce qu’elle ne congnoissoit ne savoit où il estoit et qu’il n’y avoit guères qu’elle estoit avecques elle (sic). Et incontinant ladicte hostesse et une de ses chamberieres appellerent à haulte voix ledict varlet, mais icellui varlet ne respondit point ; pour laquelle cause ladicte chamberiere, qui estoit en certaines galleries estans en ladicte hostellerie, appelloit tousjours ledict varlet, adreçant sa voix envers le fenil

Fenil, fœnile, ou fenière, grenier à foin.

dudict logis. Et ce voyant, semble audict Patris que ledict varlet fut monté audict fenil, par quoy il s’en alla où estoit ladicte chamberiere ; à laquelle ledict Patris bailla son manteau qu’il avoit jà prins et mis sur lui pour s’en aller, disant à ladicte chamberiere qu’il s’en alloit ou fenil estance illec près, ce qu’il fist, cuidant y trouver ledict varlet ; mais il ne le y peut trouver, et à ceste cause se voult descendre pour soy en aller, et en descendant et ainsi qu’il fut au droit de certaine porte estant au cousté dudict fenil, sur main senestre, vit au coing de ladicte porte ledict Mathurin le Pelletier, qui estoit tout debout. Et incontinant que ledict Patrix l’apperceut, lui dist : « Estes vous là, mon mignon ! Baillez moy l’argent que je vous presté assoir ; car par Dieu vous le paieraiz (sic). » Auquel ledict Mathurin dist en soy descendant dudict lieu où il estoit au bas de ladicte hostellerie : « Je feroy voz fievres quartaines ! Je ne vous doy rien ne ne vous baillee (sic) riens, et se vous vous approuchez de moy je vous donneré de la dague. » Et lors ledict Patris, voyant que ledict Mathurin avoit ladicte dague dont il l’avoit menassé, doubtant sa personne, s’en alla et descendi en ladicte chambre où il avoit cousché, prandre ung baston pour soy deffendre dudict Mathurin, en laquelle chambre il trouva ung braquemart ou espée, et il descendi (sic) en courant de ladicte chambre après ledict Mathurin ; et quant il fut au bas de ladicte maison, il trouva en son chemin ledict Estienne, auquel il demanda où estoit icellui Mathurin, lequel lui dist qu’il estoit illecques devant en la rue où il s’enfuyoit tant qu’il pouoit. Et lors ledict Patris, sans autre chose dire, se print à courir derechief après ledict Mathurin aiant ladicte espée avec le fourreau en sa main. Et quant il fut à deux brasses ou environ loing de ladicte hostellerie, tira ladicte espée hors dudict fourreau en courant ; et ainsi qu’il fut près dudict Mathurin, ladicte espée toute nue, dist à icellui Mathurin qu’il le paiast ; lequel se retourna devers lui, aiant ladicte dague en sa main hors du fourreau, en lui disant : « Se tu approuches, je te toucheré bien ! » Et lors ledict Patris le frappa de ladicte espée sur le bras, dont il se print à crier, et se aproucha dudict Patris, le voulant frapper d’estoc de ladicte dague. Lequel Patris fist ung pas en arriere et donna ung estoc par le cousté de ladicte espée audict Mathurin, duquel coup il est allé de vie au trespas, comme l’en dit. Pour lesquelz cas, crimes et delitz, ledict Patris a esté prins et constitué prisonnier en noz prisons de Lezignem et Poictiers où il est encores miserablement detenu. Et combien qu’il n’ait fait ne commis lesd. cas, deliz et crime que par les menasses dudict Mathurin et par sa simplesse et ignorance, et qu’il ait tousjours bien et honnestement vescu, sans avoir esté actaint ne convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, neantmoins il doubte que l’en vueille proceder contre lui et ses biens par rigueur de justice, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, etc. Pour quoy Nous, etc., voulans, etc., audict Patris Calendar avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessusdict, avecques toute peine, etc., en mectant au neant, etc. Et l’avons restitué, etc., satisfacion, etc. Et imposons, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à la commanderie de Praisles, ou mois de novembre, l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre regne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Par le roy, le conte de Marle

Pierre de Rohan, sr de Gyé, comte de Merles (Voy. ci-dessus p. 249, note).

, mareschal de France, le sire d’Ussé

M. Carré de Busserolle dit que la terre d’Ussé appartenait en 1477 à Antoine du Bueil, fils de Jean V, comte de Sancerre, du chef de sa mère Jeanne de Montejan, et qui la vendit le 12 novembre en 1485. (Dict. géogr. hist. d’Indre-et-Loire, t. VI, p. 338.) Le personnage désigné ici sous ce titre de sr d’Ussé serait donc Antoine de Bueil. Cependant nous avons vu que Jacques d’Espinay, qualifié sr de Segré, souscrivit plusieurs actes publiés dans le présent volume (p. 111, note, et p. 67.207 du ms.) ; il pourrait se faire qu’il s’agît encore de lui en cet endroit et que l’acquisition d’Ussé soit antérieure à la date imprimée dans le Dict. d’Indre-et-Loire.

et autres presens. Gassault. — Visa. Contentor. Texier.

MDCXCIX Décembre 1481

Permission accordée à Guillaume Gouffier, chevalier, seigneur de Boisy, la Mothe-Saint-Romain, Oiron, etc., chambellan du roi, d’établir une garenne en sa seigneurie d’Oiron.

AN JJ. 209, n° 195, fol. 108 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 475-477

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre amé et feal conseiller et chambellan, Guillaume Gouffier

Guillaume Gouffier, chevalier, seigneur de Boisy, de Bonnivet, d’Oiron, etc., a été l’objet déjà de notices dans deux de nos précédents volumes. (Arch. hist., t. XXXII, p. 295, t. XXXV, p. 362.) Ajoutons que Louis XI, par lettres données à la Victoire-lès-Senlis, au mois de septembre 1475, avait déjà octroyé à la seigneurie d’Oiron le droit de haute justice, en faveur de son chambellan, seigneur du lieu, lettres enregistrées au Parlement par arrêt du 4 janvier 1476 n.s. (Arch. nat., X1a 8607, fol. 35.) Au commencement de l’année suivante Guillaume Gouffier était en procès au criminel contre Édouard de La Madeleine, pour avoir réparation de graves excès dont il l’accusait et obtint contre lui un mandement d’ajournement au Parlement de Paris, le 5 mars 1482 n.s. (X2a 45 à la date. Dans ce reg. non folioté, les actes de janvier, février et mars 14815 à 5, sont transcrits après ceux de juillet 1482.)

, chevalier, seigneur de Boisy, de la Mothe Sainct Romain et d’Oyron, contenant que à lui compecte et appartient de tout temps ladicte terre et seigneurie d’Oyron, assise en nostre païs de Poictou, à une lieue et demie ou environ de nostre ville de Thouars, et est entre deux la rivière …

Sic. Deux mots en blanc qu’on ne peut rétablir ; car Thouars et Oiron se trouvent l’un et l’autre sur la rive droite du Thouet, et il n’y a point de rivière entre ces deux localités. Peut-être y avait-il sur la minute « sis entre deux rivières », et alors au lieu du blanc on restituerait : le Thouet et la Dive.

, tenue en foy et hommaige à cause de nostre viconté de Thouars ; en laquelle seigneurie il a toute justice et juridicion haulte, moienne et basse, des appartenances de laquelle sont d’ancienneté les pieces de bois qui s’ensuivent, c’est assavoir le bois Chomart, de la Roche, le Grant Bois, le Petit Bois et autres pieces de bois, contenans en tout quarante quatre sexterées de terre ou environ, lesquelles pieces de bois sont très fort disposés à faire garenne. A ceste cause ledit supliant avoit et a intencion de y faire faire et ediffier garenne et clappiers et autres repaires à connilz, mais il doubte que ou temps avenir aucuns noz officiers en ce lui voulsissent mectre ou donner destourbier et empeschement, s’il n’avoit sur ce noz permission, congié et licence, en Nous humblement requerant iceulx. Pour quoy, ce que dit est consideré, inclinans liberallement et favorablement à la supplicacion et requeste de nostredit conseiller, et en faveur de plusieurs grans, louables, agreables et continuelz services qu’il Nous a par cy devant faiz en plusieurs et maintes manieres, et esperons que encores plus face ou temps avenir, à icellui pour ces causes et autres à ce Nous mouvans, avons donné et octroyé, donnons et octroyons de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, congié et licence de faire ediffier et construire de nouvel garenne à connilz en sadicte terre et seigneurie d’Oyron, ès pieces de bois cy dessus declairées, estans des appartenances de ladicte seigneurie, faire terriers, clappiers, places, fossez et autres choses neccessaires et convenables à faire garenne à connilz et deffences necessaires et acoustumées à garenne deffensable, et icelle tenir, garder et deffendre comme garenne deffensable, d’ores en avant à tousjours, comme les autres garennes de nostre royaume. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes aux seneschal de Poictou, maistre et refformateur des Eaues et forestz oudit païs de Poictou et à tous, etc., que de noz presente grace, permission, congié et licence ilz facent, seuffrent et laissent ledit suppliant joïr et user plainement et paisiblement, sans pour ceste cause lui faire, mectre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun arrest, destourbier ou empeschement au contraire ; lequel, se fait, mis ou donné leur estoit, le repparent, revocquent et remectent ou facent repparer, revocquer et remectre tantost et sans delay au premier estat et deu. Car ainsi Nous plaist-il et voulons estre fait. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Argenton, ou mois de decembre, l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre regne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Par le roy, les evesques d’Alby

Louis d’Amboise, évêque d’Albi. (Cf. ci-dessus, p. 184, note.)

et de Chalon

André du Poupet fut évêque de Chalon-sur-Saône, du 14 juillet 1480 à l’année 1503.

, les sires de Bressuire et de Solyers

Sire Jacques de Beaumont, sire de Bressuire, et Palamède de Forbin, sr de Soliers, voy. ci-dessus, p. 7, note, et p. 97, n.

, et autres presens. Amys. — Visa. Contentor. Texier.

MDCC Décembre 1481

Création de deux foires par an à Oiron, la première le jour de Saint-Nicolas en mai, la seconde le 8 novembre, à la requête et en faveur de Guillaume Gouffier, chevalier, chambellan du roi, seigneur du lieu.

AN JJ. 209, n° 196, fol. 108 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 478-480

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre amé et feal conseiller et chambellan Guillaume Gouffier, chevalier, seigneur de Boisy, de la Mothe Sainct Romain et d’Oyron, contenant que en ladicte terre et seigneurie d’Oyron, qui est assise en Poictou, ledit supliant a toute justice et juridicion, haulte, moienne et basse, et est en beau païs et fertil, où viennent et groissent plusieurs biens, mais au moien des guerres et divisions qui par cy devant ont eu cours en nostre royaume il est devenu fort povre et depopulé, et ne pevent les habitans d’icelle terre et seigneurie faire argent des biens qui y croissent, ne paier les rentes et autres choses qu’ilz doivent et qu’ilz ont à paier et supporter. Et à ceste cause nostredit conseiller Nous a très humblement fait supplier et requerir que, actendu ce que dit est, nostre plaisir soit faire, creer et establir audit lieu d’Oyron deux foires l’an, c’est assavoir la premiere le jour sainct Nicolas en may, l’autre et seconde le huitiesme jour de novembre, jour des octaves de la feste de Toussains, pour icelles deux foires estre entretenues et excercées ou temps avenir audit lieu d’Oyron, et que sur les denrées et marchandises qu’illec ausd. jours seront vendues et distribuées il puisse joïr et user de toutes manieres de coustumes, poix, aulnages, previlleges, franchises, libertez, prerogatives, preeminances tout ainsi et par la forme et maniere que ung hault justicier, bas et moien peut et doit joir selon la coustume de nostre païs de Poictou, et sur ce lui impartir noz grace et provision. Pour quoy Nous, ce que dit est consideré, inclinans liberallement et favorablement à la supplicacion et requeste d’icellui nostre conseiller suppliant, et en faveur des bons, grans, louables et recommandables services qu’il Nous a par cy devant faiz en plusieurs et maintes manieres, tant autour de nostre personne que ailleurs, et esperons que encores plus face ou temps avenir, voulans aucunement les recongnoistre envers lui, et afin que tousjours de mieulx en mieulx il soit plus enclin Nous servir ; pour ces causes et autres à ce Nous mouvans, avons creé et estably, creons et establissons de nostre certaine science, propre mouvement, grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, deux foires chascun an audit lieu d’Oyron, c’est assavoir la premiere le jour sainct Nicolas en may et l’autre et seconde le huitiesme jour de novembre, jour des octaves de la feste de Toussains, pour d’ores en avant estre tenues et excercées audit lieu d’Oyron ; auxquelz jours l’en pourra vendre et achapter toutes manieres de marchandises licites et honnestes comme l’en fait ès autres foires et marchez de nostre royaume. Sur lesquelles denrées et marchandises Nous donnons povoir et auctorité, par cesdictes presentes, à nostredit conseiller suppliant, de avoir, joir et user de toutes manieres de coustumes, poix, aulnages, previlleges, franchises, libertez, prerogatives et preeminences, tout ainsi et par la forme et maniere que ung hault justicier, bas et moien peut et doit joir et user par raison, en ensuivant et selon la coustume de nostre païs de Poictou. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous etc., que de noz presente grace, et creacion ilz facent, etc., sans pour ceste cause ne aux marchans, etc. ; en faisant crier, etc. ; en y establissant, etc. En tenant ou faisant tenir en seureté, etc. Pourveu que ausd. jours, etc. Car ainsi, etc., nonobstant, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Argenton, ou mois de decembre, l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre regne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Par le roy, les evesques d’Alby et de Chalon, les sires de Bressuire et de Soliers

Tous ces noms sont identifiés au cours du volume [L.C.].

, et autres presens. Amys. — Visa. Contentor. Texier.

MDCCI Décembre 1481

Don à Louis du Fouilloux, seigneur du lieu, écuyer d’écurie du roi, de la haute et moyenne justice de la terre et seigneurie du Chillou, avec ressort immédiat par devant le sénéchal de Poitou ou son lieutenant.

AN JJ. 209, n° 200, fol. 110 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 480-482

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, que Nous, considerans les bons, grans et agreables services que nostre chier et bien amé escuier d’escuierie Loys du Foulloux, seigneur dudit lieu

Louis du Fouilloux, écuyer, seigneur du Fouilloux et du Chillou, écuyer d’écurie du roi, second fils de Jean et de Marguerite Bessonneau, avait succédé à son frère aîné décédé sans enfants, avant le 20 mars 1470 n.s. De cette date on possède un aveu de l’hôtel et forteresse du Chillou rendu au roi par Louis du Fouilloux. (Arch. nat., P. 1145, fol. 150 v°.) Avant d’être au service de Louis XI, il avait été écuyer d’écurie du roi René puis lieutenant général au duché d’Anjou, Maine et Bretagne. Grand-père de Jacques de Fouilloux le célèbre auteur des traités de la Vénerie, Louis avait lui aussi un équipage de chasse réputé, comme en témoigne cet extrait du compte d’André Briçonnet, maître de la Chambre aux deniers, pour l’année 1469-1470 : « A Perrin Barrot, dit Quinzerolz, [chevaucheur d’écurie], la somme de vi l. xvii s. vi d.t., que le roy nostre dit seigneur, par autre sa cedulle, signée de sa main, donnée à Montresor, le IXe jour dudit mois d’octobre [1469], lui a ordonnée pour deux voyages par lui faiz, l’un partant de Veloust près Chinon à Partenay, porter lettres de par ledit seigneur à Loys de Foulloux, pour amener certain nombre de chiens courans, dont icelluy seigneur lui avoit escript … » (KK 62, fol. 129 v°.) Notre personnage fut présent à la montre faite à Poitiers, le 26 novembre 1491, sur mandement de Jacques de Beaumont, sire de Bressuire, sénéchal de Poitou, par devant Guillaume de Arembert, procureur du roi, pour faire partie de l’arrière-ban convoqué à cette époque. (Roolles des bans et arrière-bans de la province de Poictou, Xaintonge et Angoumois. Poictiers, 1667, in-4° réimpr. à Nantes, 1883, p. 43) ; il était décédé avant le 23 juin 1498. De son mariage avec Jeanne de La Rochefoucauld, fille de Guillaume, Ec., sgr de Nouans, Melleran, etc., et de Marguerite de Torsay, Louis du Fouilloux laissait trois fils, dont l’aîné Antoine fut père de Jacques, et quatre filles (Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. III, p. 533). Voy. aussi M. Pressac, Recherches sur la vie et sur les ancêtres de Jacques du Fouilloux, gentilhomme poitevin, etc. Mémoires de la Société des Antiquaires de l’Ouest, année 1850, Poitiers, 1852, p. 381 et suiv.

, a par long temps et dès son jeune aage faiz tant a feu nostre très cher seigneur et pere (que Dieu absoille) en plusieurs ses affaires, que ès nostres depuis nostre advenement à la couronne, en sondit office et autrement, en plusieurs et maintes manieres : voulans à ceste cause les recongnoistre envers lui et les siens, et par ce les augmenter et eslever en honneurs, biens et prerogatives, à icelluy seigneur du Foulloux qui sur ce Nous a supplié et requis ; pour ces causes et consideracions et autres à ce Nous mouvans, avons donné, cedé, transporté et delaissé, donnons, cedons, transportons et delaissons, de grace especial, par ces presentes, la haulte et moienne justice que Nous avons et povons avoir en sa terre et seigneurie de Chilloux, assise ou païs de Poictou, dont il a la basse justice, ainsi qu’elle s’estend d’ancienneté, et tout ce qui en deppend et peut deppendre, avec le droit, nom, action, raison et poursuite que avons et qui Nous y peut compecter et appartenir à cause de nostre chastel de Poictiers ou autrement, et que le ressort immediat de toute ladicte haulte justice, moienne et basse desdiz droiz soit ressortissant par devant nostre seneschal de Poictou ou son lieuxtenant, pour icelle haulte justice, moienne et basse, prouffiz, prerogatives, emolumens et preheminances qui en deppendent et pevent deppendre, joir et user plainement et paisiblement, perpetuellement et à tousjours par ledit Loys du Foulloux, ses hoirs, successeurs et aians cause en ladicte terre et seigneurie de Chilloux. Et pour l’excercice d’icelle haulte justice, moienne et basse, lui avons en oultre donné et donnons, et à sesdiz hoirs, successeurs et aians cause en ladicte terre et seigneurie de Chilloux, de creer audit lieu de Chilloux fourches patibulaires et autres choses consernans et demonstranz les droiz de haulte justice, et de creer et establir audit lieu bailli, prevost, sergens et autres officiers convenables, requis et neccessaires pour l’excercice de ladicte haulte justice, moienne et basse, soubz le ressort de nostredicte seneschaucée de Poictou, et tout ainsi que usent et ont acoustumé de user les autres seigneurs aians haulte justice oudit païs de Poictou, sans riens y reserver ne retenir pour Nous ne pour les nostres, fors seullement ledit ressort par devant nostredit seneschal ou sondit lieutenant, comme dit est. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx conseillers les gens de nostre court de Parlement, gens de noz comptes et tresoriers à Paris, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers ou à leurs lieuxtenans, presens et advenir, et à chascun d’eulx, si comme a lui appartiendra, que ledit Loys du Foulloux, sesdiz hoirs, successeurs et aians cause, facent, seuffrent et laissent joir et user plainement et paisiblement de noz presens grace, don et octroy, sans leur faire, mectre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun destourbier ou empeschement au contraire, lequel se fait, mis ou donné lui estoit, le mectent ou facent mectre incontinant et sans delay à plaine delivrance. Car ainsi Nous plaist-il estre fait non obstant quelzconques ordonnances, mandemens ou deffenses à ce contraires. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Argenton, ou mois de decembre, l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre regne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Loys. Par le roy, les sires de Bressuyre, d’Estellan

Guillaume Picart ou le Picart, chevalier seigneur d’Esteban, Roscochard, Radeval, etc., chambellan du roi bailli et capitaine de Rouen, capitaine d’Abbeville, général des finances, fut en grand crédit auprès de Louis XI, qui lui fit d’importantes donations. Il avait été établi, par lettres datées du Plessis-du-Parc, le 3 octobre 1479, bailli de Rouen et commis au gouvernement de toute l’artillerie, après la mort de Jean Cholet, sr de la Choletière (Le P. Anselme, Hist. généal., t. VIII, p. 160).

, bailli de Rouen, et autres presens. Geuffroy. — Visa. Contentor. Texier.

MDCCII Janvier 1482 (n.s.)

Création de quatre foires par an à Thuré, en faveur de Louis bâtard du Maine, seigneur dudit lieu, de Sainte-Néomaye et de Mézière en Brenne auquel il est permis en outre de faire faire une garenne à lapins, lièvres, perdrix, dans sadite seigneurie de Thuré.

AN JJ. 209, n° 74, fol. 45 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 483-486

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre amé et feal cousin, Loys bastard du Maine

D’après le P. Anselme (Histoire généal. de la Maison de France, t. I, p. 235), Louis d’Anjou, bâtard du Maine, seigneur de Mézières en Brenne, Sainte-Néomaye, Prée, Seneché et Vilaine la Jutrel, sénéchal et gouverneur du Maine, était le fils naturel de Charles d’Anjou, comte du Maine (sur lequel v. ci-dessus, t. XXIX, p. 146, note). Il fut légitimé à Amboise en mai 1468. Il avait épousé en 1464 Anne, fille de Louis de la Trémouille ; il mourut vers 1484. Son petit-fils, Nicolas d’Anjou-Mézières, mourut sans héritier mâle, laissant seulement une fille, qui porta les biens et les titres de sa branche à la maison ducale de Montpensier par son mariage avec François de Bourbon, duc de Montpensier. Voir sur le Bâtard du Maine ci-dessus, t. XXXVIII, p. 118, note. [L.C.]

, seigneur de Masieres en Brenne, de Saincte Noumaye et de Thuré, assises en nostre païs de Poictou, contenant que ledit bien de Thuré est assis et situé en païs bon et fertil et ouquel et ès environs affluent et frequentent grant quantité de marchans en plusieurs saisons de l’année, et en y auroit encores plus s’ilz avoient lieu et temps determinez pour eulx assembler et communiquer ; et aussi est ladicte seigneurie de Thuré en ses dommaines de grant estandue, et y a lieux moult propres et convenables pour y faire garennes et repaires à connilz, lievres, perdriz et autres bestes, qui lui seroit, s’il y avoit ladicte garenne, chose moult prouffitable, et l’augmentacion de sadicte terre et seigneurie. Mais il ne l’oseroit ne vouldroit faire faire, sans avoir sur ce noz congié et licence. En Nous humblement requerant que, actendu ce que dit est, et que ledit lieu de Thuré est ung lieu moult propice et convenable pour l’assemblée desdiz marchans et y tenir quatre foires l’année à certains jours, il Nous plaise faire créer et establir audit lieu de Thuré quatre foires l’an (sic) par chascun an, c’est assavoir l’une et la premiere desdictes foires le jour de la feste de sainct Vincent, la seconde le jour de l’Invencion sainct Estienne, la tierce le jour de la feste sainct Bernabé, et la quarte le jour de la feste saint Thomas, xxie jour de decembre, et lui octroyer de faire faire ladicte garenne noz congie et licence, et sur ce lui impartir nostre grace et provision convenable. Pour quoy Nous, ces choses considerées, desirans le cours et marchandie (sic) estre multiplie en nostre royaume, et en faveur des grans et agreables services que Nous a par cy devant faiz nostredit cousin, et esperons que encores plus face ou temps avenir, les voulans aucunement recongnoistre, pour ces causes et autres à ce nous mouvans, avons, de nostre certaine science, grace especial, plaine puissance et auctorité royal, créé et estably, et par ces presentes creons et establissons audit lieu de Thuré, chacun an, quatre foires pour y estre tenues et excercées, c’est assavoir l’une et la première desdictes foires le jour de la feste de sainct Vincent, la seconde le jour de l’Invention sainct Estienne, la tierce le jour de la feste sainct Bernabé et la quarte le jour sainct Thomas, xxie jour de décembre, ausquelz jours l’an pourra vendre et achapter toutes manières de marchandises licites et honnestes, comme l’on fait ès autres foires de nostredit royaume ; sur lesquelles denrées et marchandises nous donnons povoir et auctorité par cesdictes presentes à nostredit cousin que il puisse et lui laise joir et user de toutes manières de coustumes, poix, aulnages, previlleges, franchises, libertez, prerogatives et preeminences, tout ainsi et par la forme et manière que ont acoustumé de joir et user les autres seigneurs dudit païs de Poictou, ayans foires et marchez en leurs terres et seigneuries. Et avecques ce, de nostre plus ample grace, avons à nostredit cousin donné et octroyé, donnons et octroyons congié et licence de faire faire en sadicte terre et seigneurie de Thuré garenne et repaire à connilz, lièvres et autres bestes, deffensable, garnie de clappiers et environnée de foussez et autres choses nécessaires et propres ou fait de garenne. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieuxtenans presens et avenir, et à chacun d’eulx, si comme a lui appartiendra que se noz present congié, grace, creacion, establissement et contenu en ces presentes, tant touchant lesdictes foires que ladicte garenne ilz facent, souffrent et laissent nostre dit [cousin] et ses successeurs, seigneurs dudit lieu de Thuré joir et user plainement et paisiblement, sans que pour ceste cause ne aux marchans affluans ausdictes foires, ores ne pour le temps avenir, on leur puisse faire, mettre ou donner aucun destourbier ou empeschement au contraire, en faisant cryer et publier a son de trompe lesdictes foires, par tous les lieux où il appartiendra, en establissant audit lieu de Thuré logis, places, estaulx et autres choses neccessaires pour l’excercice desdictes foires, en tenant ou faisant tenir en seurté les marchans affluans ès dictes foires, durans lesdiz jours, ensemble leurs denrées et marchandises, tout ainsi et par la forme et manière que l’on fait et que l’on a acoustumé de faire ès autres foires dudit païs de Poictou, pourveu que durant lesdiz jours que se tiendront lesdictes foires n’ait, à quatre lieues à la ronde, foires par quoy ce present establissement soit préjudiciable à icelles foires en aucune manière. Car ainsi nous plaist il estre fait, nonobstant quelzconques ordonnances, mandemens, restrinctions ou deffenses à ce contraires. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Thouars ou mois de janvier l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre règne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Par le roy, les evesques d’Alby, de Lombez et de Chalon, maistre Pierre de Sacierges

Sur Louis d’Amboise, évêque d’Albi, v. ci-dessus, t. XXXVIII, p. 320, note, et dans le présent vol., p. 184, note. Sur Pierre de Sacierges, qui devint évêque de Luçon, v. ci-dessus t. XXXVIII, p. 365, note. Jean de Villiers de la Grolaye, évêque de Lombez (1473-1493), abbé de Saint-Denis, mourut cardinal en 1499. André de Poupet, évêque de Chalon, 1480-1503, mourut en 1506. [L.C.]

et autres presens. Amys. — Visa. Contentor. Texier.

MDCCIII Janvier 1482 (n.s.)

Création de quatre foires l’an et d’un marché le vendredi de chaque semaine à Nieuil-l’Espoir, en faveur de l’abbaye de la Sainte-Trinité de Poitiers.

AN JJ. 209, n° 89, fol. 53 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 486-488

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de noz chères et bien amées les religieuses, abbesse

Louise de Blanchefort, sœur, ainsi qu’on le verra dans la suite du présent acte, de Jean de Blanchefort, conseiller du roi et maire de Bordeaux, fut abbesse de la Trinité de 1470 à 1484. (Gall. Christ., t. II, col. 1308.) [L.C.]

et convent de la Saincte Trinité de Poictiers, contenant qu’elles sont dames de la terre et seigneurie de Nyeil l’Espoir, lequel lieu de Nyeil l’Espoir est assis et situé en païs bon et fertile et y affluent et frequentent et ès environs grant quantité de marchans en plusieurs saisons de l’année, et en auroit encores plus, s’ilz avoient lieu et temps determinez pour eulx assembler et communicquer, en Nous requerant humblement que attendu ce que dit est et que ledit lieu de Nyeil l’Espoir est en lieu moult propre et convenable pour l’assemblée desdiz marchans, et y tenir quatre foires l’année à certains jours et marché à ung jour de la sepmaine, il Nous plaise sur ce creer et establir audit lieu de Nyeil l’Espoir quatre foires par chacun an et ung marché la sepmaine, c’est assavoir la premiere desdictes foires le jour et feste sainct Gervais, la seconde le lendemain de la feste de la Nativité Nostre Dame en septembre, la tierce le jour et feste sainct Clemens et la quarte le jour et feste sainct Mathias en fevrier et ledit marché au jour de vendredi par chacune sepmaine et sur ce nostre grace leur impartir. Pourquoy Nous, ces choses considerées, desirans le cours de marchandise estre multiplié en nostre royaume, et afin d’augmenter les droiz et dommaines desdiz supplians, à ce qu’elles aient mieulx de quoy vivre, pour faire dire et entretenir le service divin deu et accoustumé estre fait oudit monastère qui est, comme dit est, fondé de la Saincte Trinité, et en faveur de nostre amé et feal conseiller et chambellan et grant mareschal de noz logis Jehan de Blanchefort

Sur Jean de Blanchefort, conseiller et chambellan de Louis XI, maire de Bordeaux, maréchal des logis de France, employé par le roi à plusieurs missions diplomatiques, v. le P. Anselme, Hist. généal. de la Maison de France, t. IV, p. 289, et Vaesen, Lettres de Louis XI, t. IV, p. 192, note, et ci-dessus, p. 276, note. [L.C.]

, chevalier, maire de Bordeaulx, frere de ladicte abbesse, qui sur ce Nous a pour lesdiz supplians supplié et requis ; pour ces causes et autres à ce Nous mouvans, avons, de nostre certaine science, grace especial, plaine puissance et auctorité royal, creé et estably et par ces presentes creons et establissons audit lieu de Nyeil l’Espoir quatre foires par chacun an et ung marché toutes les sepmaines, pour y estre tenues et excercées, c’est assavoir la premiere foire ledit jour et feste sainct Gervais, la seconde le lendemain de la feste de la Nativité Nostre Dame en septembre, la tierce le lendemain du jour et feste sainct Clemens et la quarte le jour et feste sainct Mathias en fevrier, et ledit marché au jour de vendredi par chacune sepmaine ; ausquelz jour l’on pourra vendre et achapter toutes manieres de marchandises licites et honnestes, comme l’on fait ès autres foires de nostre dit royaume. Sur lesquelles denrées et marchandises Nous donnons povoir et auctorité par cesdictes presentes ausdictes supplians qu’elles puissent et leur loise joir et user de toutes manieres de coustumes, poix, aulnages, privilleges, franchises, libertez, prerogatives et preeminences, ainsi et par la forme et maniere que ont acoustumé de joir et user les seigneurs dudit païs de Poictou, ouquel est assis ledit lieu de Nyeil, ayans foires et marchez en leurs terres et seigneuries. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc., que de noz presens grace, creacion et establissement, etc.

La fin de ces lettres est exactement semblable à celle des précédentes.

. Et afin, etc., Sauf etc. Donné à Thouars, ou mois de janvier l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre règne la vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Par le roy, les evesques d’Alby et de Lombez

Sur Louis d’Amboise, évêque d’Albi, et Jean de Villiers, évêque de Lombez, voir ci-dessus, p. 486, note [L.C.]

et autres presens, Amys. — Visa. Contentor. Texier.

MDCCIV Janvier 1482 (n.s.)

Permission à Urbain de Lanet, écuyer, seigneur de Champeaux, de faire édifier audit lieu une maison fortifiée.

AN JJ. 209, n° 78, fol. 47 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 488-490

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre cher et bien amé Urbain de Lanet, escuier, seigneur de Champeaux, assis en la chastellenie de Montmorillon, contenant que ladicte terre et seigneurie est assise en beau païs et fertile et ou viennent et croissent plusieurs biens, par quoy ledit suppliant Nous a tres humblement fait supplier et requerir que attendu ce que dit est et que pour la seurté de lui, ses biens et les habitans dudit lieu, pour eschever le danger de brigans ou autres coureux, lui seroit besoing de faire eddiffier et construire maison à tours, creneaulx, pons levis et fossez en tour icelle audit lieu de Champeaulx, il Nous plaise sur ce lui impartir noz grace et provision sur ce. Pour quoy Nous, ce que dit est consideré, inclinans liberallement et favorablement à la supplicacion et requeste dudit suppliant et en faveur des bons, louables et agreables services que nous a par cydevant faiz en plusieurs et maintes manieres, et esperons que encores plus faire au temps avenir voulans aucunement les recongnoistre envers lui et les siens et afin qu’il Nous soit doresnavant plus enclin Nous servir et obeir, pour ces causes et autres à ce Nous mouvans, avons audit suppliant, de nostre certaine science, propre mouvement, grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, octroyé et octroyons congié et licence et lui avons permis et permettons, voulons et Nous plaist qu’il puisse et lui loise, sans prejudice d’autruy, faire fortiffier, bastir et eddiffier et construire de nouvel maison fort audit lieu de Champeaulx, et y faire murailles et creneaulx, tours, barbacanes, portes et pons levis et fossez entour icelle forteresse, pour la seurté des personnes et biens dudit suppliant et sa famille, ensemble ses hommes et subgectz d’icelle terre et seigneurie de Champeaulx, pourveu que à ce le seigneur chastellain d’icelle terre se consente. Et quant à ce imposons scillence perpetuel à nostre procureur, present et avenir. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous, etc., que de noz presens grace, octroy, congié, licence et permission ilz facent, seuffrent et laissent ledit suppliant et ses successeurs joir et user plainement et paisiblement, sans pour ceste cause, ores ne pour le temps avenir, on lui puisse faire, mettre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun destourbier ou empeschement au contraire ; lequel, se fait, mis ou donné lui estoit, le ostent et mettent ou facent oster et mettre, incontinant et sans delay, au premier estat. Car ainsi, et non obstant quelconques ordonnances, mandemens, restrinctions ou deffenses à ce contraires. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Thouars, ou mois de janvier l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre règne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Par le roy, les evesques d’Alby, de Lombez et de Chalon, maistre Pierre de Sacierges, le bailli de Melun et autres presens

Sur les évêques d’Albi (Louis d’Amboise), de Lombez (Jean de Villiers) et de Chalon (André de Poupet), voy. ci-dessus, p. 486, note ; quant au bailli de Melun, il s’agit sans doute de Philippe de Camprémy ; ce personnage, qualifié dans un document postérieur de conseiller et chambellan du roi, avait été qualifié de l’office de bailli de Melun par Louis XI ; le Parlement refusa de l’admettre au serment, ce qui motiva un ordre spécial du roi, en novembre 1478, ordre qui a été publié, avec une notice sur Philippe de Camprémy, dans les Lettres de Louis XI, éd. Vaesen, t. VI, p. 328. [L.C.]

. Amys. — Visa. Contentor. Texier.

MDCCV Janvier 1482 (n.s.)

Création en faveur de Guillaume Gouffier, chevalier, seigneur de Boisy, la Motte-Saint-Romain et Oiron

Guillaume Gouffier était aussi, comme l’on sait, seigneur de Bonnivet en Poitou, et baron de Roannez. Les deux terres et seigneuries de Boisy et de la Motte-Saint-Romain étant situées dans le Roannez (Boisy, Cne de Pouilly-les-Nonnains, Saint-Romain-la-Mothe, con de Saint-Haon, le Châtel, Loire), il suffit de signaler ces lettres et les suivantes par une analyse sommaire, sans en publier le texte. Guillaume Gouffier a été l’objet d’une notice dans un autre endroit de cette publication. (Arch. hist. du Poitou, t. XXXII, p. 295.)

, chambellan du roi, de deux foires par an, la première le 15 mai, la seconde le jour de la Saint-Matthieu, 21 septembre, à Boisy, lieu « assis en beau païs et fertil, mais devenu fort pauvre et dépeuplé au moien des guerres et divisions … » Si donnons en mandement par ces presentes au (blanc) … Donné à Thouars, au mois de janvier l’an de grace mil CCCC quatre vings et ung et de nostre règne le vingt et ungiesme. Ainsi signé : par le roy les évesques d’Alby, de Lombès et de Chalon, maistre Jehan Chambon

Sur Jean Chambon, v. une longue notice biographique dans le précédent vol. de cette publication. (Arch. hist. du Poitou, t. XXXVIII, pp. 380-383.) Sur les évêques d’Alby, de Lombez et de Chalon et sur Pierre de Sacierge, V. ci-dessus, p. 486, note. [L.C.]

, Pierre de Sacierges et autres presens. Amys. Visa. Contentor. Texier.

AN JJ. 209, n° 80, fol. 47 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 490

MDCCVI Janvier 1482 (n.s.)

Création en faveur du même en son lieu et seigneurie de la Motte-Saint-Romain, assis en beau et fertile pays, mais aussi appauvri et dépeuplé par les guerres, de deux foires l’an, l’une le lendemain de la Saint-Jean-Baptiste en juin, l’autre le jeudi de la mi-carême, et d’un marché le lundi de chaque semaine. « Si donnons en mandement au (blanc) … Donné à Thouars, au mois de janvier l’an de grace mil CCCC quatre vings et ung et de nostre règne le vingt ungiesme. — Ainsi signé : par le roy, les évesques d’Alby, de Lombez et de Chalon, maistres Jehan Chambon, Pierre de Sacierges et autres présens. Amys. Visa. Contentor. Texier ».

AN JJ. 209, n° 81, fol. 48 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 491

MDCCVII Janvier 1482 (n.s.)

Don de la terre de Nieul en Aunis à l’abbaye de Notre-Dame de Valence, en compensation des arrérages qui lui étaient dus, d’une rente annuelle de cent soixante livres tournois sur le domaine de la ville de la Rochelle et du pays d’Aunis, et en remplacement de la rente elle-même, avec amortissement de ladite terre.

AN JJ. 209, n° 91, fol. 53 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 491-494

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre amé et feal conseiller l’evesque de Evreux et abbé commandataire de l’abbaye de Nostre Dame de Vallence en Poictou

Raoul du Fou, frère d’Yves du Fou (sur lequel une copieuse notice figure dans un précédent volume de cette publication : Arch. hist. du Poitou, t. XXXVIII, pp. 103-107), abbé de Saint-Thierry au diocèse de Reims en 1461 (Gall. Christ., t. IX, col. 194), évêque de Périgueux en 1468, échangea en 1470 cette église contre celle d’Angoulême, avec Geoffroy de Pompadour, fut encore abbé de Noyers en Touraine, et de Nouaillé, il n’eut l’abbaye cistercienne de Valence, près de Couhé qu’après le 22 avril 1477 (Gall. Christ., t. II, col. 1359-60), il retint ces 3 abbayes en obtenant en 1479 l’évêché d’Évreux et fut encore, dans ce diocèse, abbé de Saint-Taurin. Il mourut le 2 février 1511. (Eubel, Hierarchia catholica, II, p. 165-167, 237, et III, p. 207). Nous le voyons, en 1482, envoyé par le roi avec Jean Chambon pour instruire le chancelier de l’état des négociations avec l’Angleterre (Vaesen, Lettres de Louis XI, t. IX, p. 139.). [L.C.]

et des religieux et convent de ladicte abbaye, contenant que, à cause de la fondacion, dotacion et augmentacion de ladicte abbaye ou autrement à certains justes tiltres et moiens, ilz ont droit d’avoir et prandre chacun an la somme de huit vings livres tournois de rente sur le revenu de nostre doumaine de noz ville de la Rochelle et païs d’Aulnis dont et de laquelle ilz ont esté bien et deuement paiez par longue espace de temps et jusques a prins aucun temps ença que, à l’occasion de plusieurs grans charges, dons, alienacions et transpors par nous faiz de et sur nostredit doumaine l’entier paiement de ladicte rente leur a esté interrompu et discontinué, tellement qu’il leur en est bien deu à present d’arrerages de huit à neuf cens livres tournois environ, et doubtent encores que cy après ilz n’en puissent estre paiez. Et pour ce, Nous ont humblement supplié et requis que, pour recompensacion et en assiete de ladicte rente, il Nous plaise leur bailler et transporter aucune pièce ou porcion de nostre doumaine, dont ilz puissent joir et en avoir et prendre les fruiz par leurs mains, et sur ce leur impartir nostre grace. Pour quoy Nous, les choses, etc., qui desirons les fiefz et aumosnes constituées et establies sur nostredit doumaine estre paiez en manière que noz predecesseurs, par qui elles ont esté constitués, ne soient frustrez de leur entencion, mesmement lesdiz supplians, affin qu’ils aient mieulx de quoy vivre et entretenir le service divin et luminaite qui a, acoustumé estre fait, dit et celebré en ladicte eglise et abbaye, et aussi à ce que soyons participans ès biensfaiz, prières et oroysons qui se font et feront en ladicte eglise, à iceulx abbé, religieux et convent de ladicte abbaye Nostre Dame de Valances supplians, pour et en l’acquit et assiete de ladite somme de viiixx livres tournois de rente qu’ils avoient et ont droit d’avoir et prendre chacun an sur nostredit doumaine de la Rochelle et pays d’Aulnys, avons donné et octroyé, ceddé et transporté, donnons, octroyons, ceddons et transportons, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, pour eulx et leurs successeurs en ladicte abbaye, nostre terre, paroisse et seigneurie de Nyeul audit pays d’Aulnys, ainsi que elle se comporte et extend avecques toutes et chacunes ses appartenances et appendences pour l’avoir, tenir, posséder et exploicter doresenavant perpetuellement et à tousjours par lesdiz abbé, religieux et convent et leurs successeurs et en prendre et parcevoir, cueillir, lever et recevoir par les mains de leurs gens, serviteurs et commis les fruiz, prouffiz, revenues et emolumens et autrement en faire et disposer à leur plaisir et voulenté, comme du droit et propre doumaine de ladicte abbaye, à quelzconque valeur et estimacion qu’elle soit, pourveu toutes voyes que lesdiz supplians seront tenuz paier les fiefz, aumosnes et charges, s’aucuns en sont deues et acoustumées d’estre payées sur icelle, et aussi que nous et noz successeurs serons et demourons (sic) quictez et deschargez desdictes viiixxx livres tournois que lesdiz religieux, abbé et convent avoient droit et coustume de prandre sur nostredit dommaine de la Rochelle et Aulnis, et aussi des arrerages qui leur povoient et pouroient estre deuz de tout [le] temps passé. Et laquelle terre, parroisse et seigneurie de Nyeul, ses appartenances et appendances Nous avons, en l’onneur, reverance et contemplacion de Dieu nostre createur, de ladicte glorieuse Vierge Marie, sa mère, dediée et amortie, dedions et amortissons à ladicte eglise et abbaye, sans ce que lesdiz supplians ne leurs successeurs en ladicte abbaye soient tenuz ne puissent estre contrains à la vuyder ne mettre hors de leurs mains, pour quelque cause que ce soit, ne pour ce paier à nous ne à noz successeurs aucune finance pour l’endempnité d’icelle ; et laquelle finance qui pour ce pourroit estre deue, Nous leur avons de nostre plus ample grace, puissance et auctorité, donnée et quictée, donnons et quictons par es presentes que Nous avons pour ce signées de nostre main. Si donnons en mandement à nos amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers à Paris, aux seneschal de Xantonge, gouverneur de la Rochelle, bailli d’Aulnis et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans ou commis, presens et advenir, et à chacun d’eulx, si comme à lui appartiendra, que en faisant lesdiz abbé, religieux et convent joir et user de noz presens dons, cession, transport, admortissement et choses dessus dictes, ilz leurs baillent ou facent bailler la possession et saisine d’icelle terre, parroisse et seigneurie de Nyeul et de sesdictes appartenances et appendances, et les en facent, seuffrent et laissent, et aussi leurs successeurs en ladicte abbaye, joir et user plainement et paisiblement, soubz les condicions et en la maniere dessusdicte, sans leur faire ne souffrir estre fait aucun destourbier ou empeschement au contraire, mais se fait leur estoit, le mettent et facent mettre à plaine delivrance, incontinant et sans delay. Et en rapportant le vidimus de cesdictes presentes fait soubz seel royal et recongnoissance desdiz supplians, pour une foiz seullement, Nous voulons nostre receveur ordinaire de Xantonge et la Rochelle estre tenu quicte et deschargé en ses comptes du revenu de ladicte terre, parroisse et seigneurie de Nyeul par nosdiz gens des comptes, ausquelz Nous mandons ainsi le faire, sans aucune difficulté. Car ainsi nous plaist-il estre fait, non obstant que la valleur de ladicte terre, paroisse et seigneurie de Nyeul ne soit pas cy autrement speciffiée ne declairée, que icelle seigneurie soit de nostre droit et ancien dommaine, qu’on veuille dire que d’icellui ne doyons aucune chose aliener, et quelzconques ordonnances, restrinctions, mandemens ou deffenses à ce contraires. Et afin, etc. Donné à Thouars, ou mois de janvier l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre règne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Loys. Par le roy, G. Briçonnet. — Visa. Contentor. Texier.

MDCCVIII 11 février 1482 (n.s.)

Lettres de grâce accordées à Michau Gallant et Jacques Marchant, demeurant à Parthenay, détenus prisonniers et condamnés à l’amende et à l’échelle pour faux témoignage.

AN JJ. 209, n° 208, fol. 114 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 495-497

Loys, etc. A tous ceulx qui ces presentes lettres verront, salut. Receue avons l’umble supplicacion de Michau Gallant et Jaques Marchant, povres gens de labeur, demourans à Partenay, contenant que ledit Michau Gallant fist naguères convenir et adjourner par devant le chastellain de Partenay ung nommé Simon Bonraut

Sic, plus loin Bonnaut. [L.C.]

, pour avoir paiement de huit sextiers de seigle, en quoy ledit Bonnaut (sic) lui estoit tenue pour le mariage de sa fille, qu’il avoit marié avec le filz dudit Michau Gallant, et en la matière fut tellement procedé que ledit Bonnaut fut condampné lui paier lesdiz huit sextiers de seigle à la valleur du temps qu’elle estoit deue (sic), sauf que si ledit Gallant monstroit par tesmoings qu’il eust requise ladicte seigle au temps qu’elle estoit deue et que d’icelle paier ledit Bonnaut eust esté reffusant, qu’il la paieroit au pris qu’elle vault à present. Et pour ce, afin d’avoir ladicte seigle audit pris qu’elle vault à present, ledit Michau Gallant, qui est povre et indigent, pour nourrir et alimanter son mesnaige, dont il est grandement chargé, il se tira par de vers ledit Jaques Marchant, qui est son prochain voisin et lui remonstra son cas, et lui pria et requist qu’il dist et deposast qu’il avoit esté present à veoir faire la requeste et sommacion par ledit Gallant audit Bonnaut de lui paier ladite seigle ondit temps qu’elle lui estoit deue ; ce que ledit Jacques Marchant lui accorda, moiennant ce que ledit Michau Gallant lui promist prester certaine quantité dudit blé pour lui aider à vivre lui et son mesnaige. Et se trouva ledit Jacques Marchant le mercredi ensuivant en jugement ondit lieu de Partenay, et fut produit par ledit Gallant à porter tesmoignage de verite à l’encontre dudit Bonnault, en la matière dessusdicte, et fist le serement en tel cas acoustumé. Et fut commis certain commissaire pour l’examiner et pour ce qu’il fut trouvé variant en sa depposicion, ledit commissaire se transporta par de vers ledit chastellain de Partenay, qui l’avoit commis à faire ledit examen, et lui rapporta ladicte variacion, après lequel rapport fait, ledit chastellain fist arrester et mettre ledit Jaques Marchant en prison ; lequel confessa que, au pourchaz dudit Michau Gallant, il avoit depensé de ladicte sommacion contre verité, par necessité et pouvreté, et pour avoir dudit blé pour la nourriture de luy et de sondit mesnaige. Et après ce, fut prins ledit Gallant, qui pareillement a confessé avoir suborné ledit Jacques Marchant, pour avoir ledit blé, pour la grant povreté et neccessité qu’il avoit de blé. Pour lequel cas lesdiz supplians sont prisonniers audit lieu de Partenay et ont esté condampnez, c’est assavoir ledit Michau Gallant en la somme de dix livres tournois et ledit Jacques Marchant en cent solz tournois, et en oultre à requerir pardon à justice et a estre eschallez et mictrez. Et doubtent lesdiz supplians que l’en voulsist contre eulx ladicte condampnacion, se nostre grace ne leur estoit sur ce impartie, si comme ilz dient, humblement requerant icelle. Pour ce est-il que Nous, etc., mesmement la povreté, etc., voulans misericorde, etc., ausdiz supplians avons quicté et pardonné le fait et cas dessus dit, avecques toute peine, etc. En mettant au neant, etc. Et les avons restituez, etc., satisfacion, etc. Et imposons, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous, etc. En tesmoing, etc. Donné à Thouars, le xie jour de fevrier l’an de grace mil iiiiciiiixx i, et de notre règne le xxie.

Ainsi signé : Par le roy, l’evesque d’Alby, le conte de Castres, le juge du Maine

Sur l’évêque d’Albi et sur Boffile de Juge, comte de Castres, voir plus haut. Le titre de Juge et Maire appartient normalement, de 1467 à 1524, à Pierre de Courthardi. Dupont-Ferrier, Les Officiers royaux des bailliages et sénéchaussées, Paris, 1902, p. 216. [L.C.]

et autres presens Amys.

MDCCIX Février 1482 (n.s.)

Lettres d’amortissement données en faveur de Nicolas d’Aigremont, curé de Saint-Médard de Thouars, d’une rente annuelle et perpétuelle de 50 livres tournois destinée à la dotation d’une chapelle qu’il a fondée en ladite église sous le vocable de Notre-Dame de Pitié.

AN JJ. 207, n° 80, fol. 39 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 497-500

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre bien amé Nicolles d’Aigremont

Nicolas d’Aigremont ou Daigremont, curé de Saint-Médard de Thouars, était seigneur de Blanchecoudre et des Trois-Marie, dont il fit aveu à Thouars, les 18 novembre 1454 et 1er septembre 1470. (Bauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, nouv. éd., t. III, p. 10.) Il y a une sentence contre lui au profit du chapitre de Saint-Hilaire de Poitiers, à cause de 7 deniers de rente qu’il devait sur sa terre de Lormeau à la seigneurie de Luzay, appartenant audit chapitre, après 1476. (Archives de la Vienne, G 871, dans Inventaire sommaire, série G, t. I (1883), p. 146.) [L.C.]

, prebstre, curé de l’église parrochial, monsieur Sainct Medar de ceste ville de Thouars, contenant que, pour la grant et singulière devocion qu’il a eue de tout temps en ladicte eglise monsieur Sainct Medar et a encores de present, il a fait construire et ediffier en ladicte eglise une belle et devote chappelle, appellée la chappelle Nostre-Dame de Pitié en l’onneur et reverence de ladicte dame, et en icelle fait aussi faire ung bel et notable sepulcre

Une chapelle de l’église Saint-Médard de Thouars porte encore le nom de chapelle du Sépulcre. [L.C.]

, afin que ladicte dame soit plus devotement servie et honnorée ; et avec ce a intencion de y donner et aumosner la somme de cinquante livres tournois de rente chacun an pour la fondacion et dotacion d’une messe qui sera dicte et celebrée chacun jour en ladicte chappelle, avec une oroison especiale pour Nous, et en la fin de ladicte messe une salutacion en l’onneur de ladicte Vierge, tant pour la prospérité de Nous, de nostre très cher et très amé filz le dauphin de Viennois que aussi pour le salut de l’âme dudit suppliant. Et icelle somme de cinquante livres tournois de rente est deliberé d’acquerir en fief noble ou ailleurs, mais il doubte que quant il auroit ainsi donnée et aumosnée à ladicte eglise, pour la fondacion d’icelle messe oroison et salutacion que noz gens et officiers ou temps avenir y vouloissent mettre et donner empeschement et le contraindre, ou les curez qui y pourroient estre le temps avenir, à en vuider leurs mains, si elle n’estoit par Nous admorties si comme ledit Nicolle d’Aigremont, suppliant, Nous a fait dire et remonstrer, requerant humblement nostre grace et liberalité lui estre sur ce impartie. Pour ce est-il que Nous, ce que dit est consideré et mesmement que ladicte chappelle a esté fondée en l’onneur et reverance de la glorieuse Vierge Marie, mère de Dieu, nostre Createur, à laquelle Nous avons tousjours eu et avons nostre esperance, recours, reffuge et especiale devocion, et à ce que soyons participans ès prières et oroisons qui se font chacun jour et seront faiz cy-après en ladicte eglise monsieur Sainct Medar, et aussi que la fondacion d’icelle messe, oroison et salutacion est faicte pour la prosperité de Nous et de nostredit filz le daulphin, à icellui Nicolle d’Aigremont pour ces causes et autres consideracions à ce nous mouvans, avons octroyé et octroyons, voulons et Nous plaist qu’il puisse et lui loise acquerir en nostre viconté et seigneurie de Thouars et autre part où il pourra licitement le faire, soit en fief noble en hors fief noble jusques à ladicte somme de cinquante livres tournois par chacun an, et icelle rente qu’il aura ainsi acquise jusques à ladicte valleur donner et aumosner à ladicte eglise monsieur Saint Medar, pour le chappellain ou chappellains qui sera ou seront ordonnez à dire et celebrer icelle messe par chacun jour, avec l’oroison et salutacion dessusdicte, et que icellui chappellain ou chappellains et leurs successeurs la puissent tenir et posséder et en joir perpetuellement comme admortie et à Dieu dediée. Et laquelle somme de cinquante livres tournois de rente qui ainsi sera acquise et par lui donnée pour la fondacion et dotacion de ladicte messe chacun jour, oroison et salutacion, Nous dès maintenant [comme] pour lors, avons indempnée et admotie, indempnons et admortissons de grace especial, plaine puissance et auctorité royal par cesdictes presentes, sans ce que ledit chappellain ou chappellains ne leurs successeurs soient tenuz icelle rente mettre hors de leurs mains, ne pour ce paier à nous ne aux nostres aucune finance ou indempnité pour quelque cause et en quelque manière que ce soit. Et laquelle finance, quelle qu’elle soit et à quelque somme qu’elle se puisse monter Nous avons donnée et quictée, donnons et quictons de nostre plus ample grace audit Nicollas d’Aigremont et esdiz chappellains par cesdictes presentes, signées de nostre main, par lesquelles Nous donnons en mandement à nos amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers et à tous noz autres justiciers et officiers ou à leurs lieuxtenans, presens et advenir et à chacun d’eulx, si comme à lui appartiendra, que ledit Nicolas d’Aigremont ledit chappelain ou chappellains, qui seront ainsi ordonnez ad ce et celebrer chacun jour icelle messe, oroison et salutacion et leurs successeurs ilz facent, seuffrent et laissent joir et user plainement et paisiblement de noz presens admortissement, don, quictance et octroy, sans leur faire, mettre ni donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun destourbier ou empeschement au contraire, lequel, se fait, mis ou donné leur estoit, si l’ostent ou facent oster et mettre incontinant et sans delay au premier estat deu. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Thouars, ou mois de fevrier l’an de grace mil cccc, quatre-vings et ung et de nostre règne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Loys. Par le roy, le bailli de Rouen

Sur Guillaume Picard, seigneur d’Estelan, notaire et secrétaire du roi sous Charles VII, général sur le fait de la justice des aides en Normandie en 1463, conseiller du roi et général des finances avant 1472, chambellan de Louis XI et bailli de Rouen en 1479, mort vers 1492 voy. Lettres de Louis XI, éd. Vaesen, t. IV, p. 112-113, note. [L.C.]

et autres presens, Geuffroy. — Visa. Contentor. Texier.

MDCCX Février 1482 (n.s.)

Lettres en faveur de l’abbaye de Charroux portant confirmation du domaine et des droits qu’elle avait acquis de feu Jacques d’Armagnac, duc de Nemours, comte de la Marche, en la châtellenie de Charroux, estimés à cent livres de rente, annulation du droit du rachat qu’elle avait consenti au profit du sire de Beaujeu, comte de la Marche

Sur Jacques d’Armagnac et la confiscation de ses biens, V. le vol. précédent : Arch. hist. du Poitou, t. XXXVIII, p. 276. C’est en septembre 1477 que le comté de la Marche fut donné à Pierre de Bourbon, sire de Beaujeu. (De Mandrot, Jacques d’Armagnac, duc de Nemours, dans la Revue historique, t. XLIV, 1890, p. 308.) [L.C.]

, et amortissement de la dite rente.

AN JJ. 207, n° 82, fol. 39 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 500-506

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, comme pour certaines justes et raisonnables causes, et mesmement pour la recongnoissance et compensacion de ce que Nous avons certaine grant partie de fust de la benoiste et digne Croix en laquelle Nostre Saulveur et Redempteur Jhesu Crist souffrit mort et passion, et laquelle feu de bonne memoire monsieur Sainct Charlemaigne, nostre predecesseur roy de France et principal fondateur de l’abbaye et monastere de Charroux ou diocèse de Poictiers, portoit sur luy toutes foiz qu’il alloit en batailles contre les infidelles et ennemis de la saincte foy catholique, et icelle avoit donnée et laissée à ladicte abbaye de Charroux, et laquelle feu nostre très chier seigneur et père que Dieu absoille, pour la grande et singulière devocion qu’il y avoit, print en ladicte abbaye ; et nous pareillement, pour la singulière devocion, affection et esperance que Nous avons en icelle, l’avons et portons continuellement avecques Nous, et pour autres consideracions à ce Nous mouvans, Nous eussions ja preça donné et aumosné à noz chiers et bien amez les religieux, abbé et convent et officiers de ladicte abbaye et monastère la somme de deux mil livres tournois et icelle leur fait bailler et delivrer comptans, pour estre convertie et emploiée en rentes et revenus au prouffit et augmentacion de ladicte abbaye et du divin service fait en icelle. Lesquelz religieux, en ensuivant nostre vouloir et intencion, eussent acquis et achapté de ladicte somme de feu Jacques d’Armeignac, en son vivant duc de Nemoux et conte de la Marche, tout le dommaine et droit de peage qu’il avoit en ladicte ville et chastellenie dudit Charroux et environs, valans par commune extimation cent livres tournois de rente ; en faisant laquelle acquisicion, les diz religieux eussent donné faculté audit Jacques d’Armignac de povoir ravoir et rachapter d’eulx ladicte rente dedans certain temps après ensuivant. Depuis laquelle acquisicion faicte ; tous et chacuns les biens, terres et seigneuries dudit feu Jacques d’Armignac Nous soient advenues et escheues par confiscacion et forfaicture, par quoy la faculté à lui donnée par lesdiz religieux, de povoir rachapter ladicte rente nous en compette et appartient. Et à ceste cause, desirans que les diz religieux joyssent de ladicte rente, Nous fussions desistez et departiz de ladicte grace et faculté de povoir retraire et rachapter ladicte rente, et icelle grace eussions donnée, quictée, transportée et delaissée audiz religieux sans ce que Nous ne nos successeurs, ne semblablement autres ausquelz pourrions faire don de ladicte confiscation dudit d’Armignac puissent jamais retraire ne rachapter ladicte rente et choses par eulx acquises dudit feu Jacques d’Armignac, ne en icelle poursuir ne demander aucune chose. Et icelle rente, ensemble autres anciennes ja acquises et qu’ilz pouvoient acquerir jusques à la somme de quatre cens livres tournois eussions admorties, ainsi comme ces choses sont plus à plain contenues ès lettres patentes

Voy. ci-dessus, n° MDLXXXIV, [L.C.]

, par nous à ceulx sur ce octroyées, au moien et par vertu desquelles ilz aient depuis joy desdictes choses, et jusques a naguères que, soubz umbre d’aucunes lettres qui leur ont esté presentées de par Nous, èsquelles soit contenu qu’ilz reprinssent leurs deniers dudit acquist, se sont desistez et devstuz desdictes choses par eulz acquises dudit feu Jacques d’Armignac et ont receu au retraict d’icelle nostre très chier et très amé filz le sire de Beaujeu

L’acte de retrait du 15 janvier 1482 n.s. est aux Arch. nat., P. 13652, n° 1450. (Lecoy de la Marche, Titres de la Maison ducale de Bourbon, t. II, n° 6.676.) [L.C.]

, auquel Nous avons fait don dudit conté de la Marche, que tenoit icellui feu Jacques d’Armignac, ainsi que avons esté advertiz, qui a esté et est contre nostre vouloir et entencion et à desplaisance. Pour ce est-il que Nous, ce que dit est consideré et que voulons et entendons que lesdiz religieux, abbé, convent et officiers de Charroux joyssent entierement de ladicte rente et choses par eulx acquises dudit feu Jacques d’Armignac, sans ce que jamais eulx ne leurs successeurs les vendent ne mettent hors de leurs mains, en quelque manière que ce soit. Pour ces causes et autres consideracions à ce Nous mouvans, avons declairé et declairons que nostre plaisir et intencion a esté et est que iceulx religieux, abbé, convent et officiers joissent, liévent et possèdent perpetuellement et à tousjours ladicte rente et choses par eulx acquises d’icellui feu Jacques d’Armignac desdiz deniers par Nous à eulx donnez et aulmosnez pour les causes que dessus est dit, tout ainsi et par la forme et manière qu’ilz ont fait par cy devant et qu’ilz faisoient paravant qu’ilz receussent nostredit filz et cousin le sire de Beaujeu au rachapt d’icelles choses ; laquelle recepcion et tout ce qui au moien d’icelle s’est ensuy ne voulons sortir ne avoir aucun effect, mais l’avons mise et mettons du tout au neant par ces presentes, en restituant toutesvoyes par lesdiz religieux à nostre dit filz et à ceulz qui ont le droit et cause de luy en ceste partie la somme de deniers qu’il a baillée ou fait bailler en son nom pour ledit retraict. Et avecques ce, pour plus ample recompense et remuneracion de ladicte benoite et digne croix que Nous avons et portons avecques Nous, comme dit est, et que lesdiz religieux ont liberallement voulu et consenti qu’elle soit et demoure perpetuellement et à tousjours à nous et à nos successeurs, comme unie à nostre couronne, Nous, pour consideracion desdictes choses et aussi que sommes bien recors paravant la confiscacion à Nous advenue et adjugée des biens dudit feu Jacques d’Armignac, avoir fait don ausdiz religieux, abbé, convent et officiers de Charroux de la justice, propriété et seigneurie et juridicion que ledit feu d’Armignac avoit en ladicte ville et chastellenie de Charroux, ou cas toutesvoyes que declairacion de confiscacion y escherroit, et autres grans causes et consideracions à ce nous mouvans, et mesmement pour plus grand acquict et descharge de nostre conscience, et afin aussi que iceulz religieux soient plus enclins à prier Dieu pour Nous, nostre prospérité et lignée, et la bonne paix, union et transquilité de nostre royaume, et que soyons participans ès biensfaiz, prieres et oroisons qui se font et feront dores en avant en ladicte abbaye et monastère, avons ausdiz religieux, abbé, convent et officiers de Charroux, de nouvel donné, cedé, quicté, transporté et delaissé, et par la teneur de cesdictes presentes, de nostre grace especial, propre mouvement et certaine science, plaine puissance et auctorité royal, donnons, cedons, quictons, transportons et delaissons tout tel droit de justice, juridicion, proprieté et seigneurie que ledit feu Jaques d’Armignac avoit audit lieu, terre, seigneurie et chastellenie de Charroux, avec tous les droiz, noms, raisons et actions qui, au moien de ladicte confiscation et forfaicture dudit d’Armignac nous est advenue et escheue et povoit compecter et appartenir esdictes justice, seigneurie et juridicion comme dessus est dit, sans aucune chose en retenir ne reserver à Nous ne aux nostres, fors seullement le ressort et souveraineté, pour d’icellui droit de justice, juridicion et seigneurie, ensemble de ladicte rente et choses acquises par lesdiz religieux, abbé et convent de Charroux d’icellui feu Jaques d’Armignac desdiz deniers par nous à eulx donnez et aulmosnez pour les causes que dessus, à quelque valleur qu’ilz soient et puissent estre et monter, joir et user, et les avoir, tenir, posséder et exploicter par iceulx religieux, abbé, convent et officiers et leurs successeurs en icelle abbaye doresenavant plainement et paisiblement, perpetuellement et à tousjours comme admorties et à Dieu dediées, et lesquelles Nous admortissons et à Dieu, à ladicte eglise et monastère dedions par ces dictes presentes, non obstant quelque don qu’en avions fait à nostredit filz et cousin le sire de Beaujeu ou autres des biens, terres et seigneuries à Nous advenues et escheues par ladicte confiscacion d’icellui feu Jaques d’Armignac, que Nous ne voulons et n’entendons quant à ce avoir lieu ne sortir effect, ains les avons, quant ausdictes choses revocquez et revocquons, sans prejudice d’iceulx toutesvoyses en autres choses, sans ce que iceulx religieux ne leursdiz successeurs soient ne puissent estre contrains, ores ne pour le temps advenir, à vuider ne mettre lesdictes choses hors de leurs mains, soubz umbre de noz ordonnances faictes sur le fait des frans fiefz et nouveaulz acquestz, ne autrement, en quelque manière que ce soit, ne pour ce paier à Nous ne à noz successeurs aucune finance ou indampnité ; et laquelle finance, à quelque valleur qu’elle puisse monter, Nous, pour les causes et consideracions que dessus, leur avons donnée, quictée et aulmosnée, donnons, quictons et aulmosnons par ces presentes, que Nous avons pour ce signées de nostre main. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulz gens de nos comptes et tresoriers à Paris, aux seneschaulx de Poictou, Xantonge, Limosin, gouverneur de la Rochelle, et à tous, etc., que de noz presens, grace, declairacion, volunté, octroy, don, quictance, cession, transport, delaiz, admortissement et de tout le contenu en cesdictes presentes ils facent, seuffrent et laissent lesdiz religieux, abbe, convent et officiers et leursdiz successeurs joir et user plainement, paisiblement et à tousjours, sans leur faire, mettre ou donner, ne souffrir, etc., lequel se fait, mis ou donné leur avoit esté ou estoit, le leur ostent et mettent ou facent oster et mettre incontinant et sans delay au neant et au premier estat et deu, en contraingnant ou faisant contraindre à ce faire et souffrir tous ceulx qui pour ce seront à contraindre par toutes voyes, reaument et de fait, non obstant oppositions ou appellations quelzconques, pour lesquelles ne voulons estre aucunement differé et en ce faisant facent rendre et restituer ausdiz religieux par nostredit filz et cousin ou ceulx qui ont le droit et cause de lui en cestepartie les lettres d’achapt de ladicte rente et pareillement celles dudit transport par eulx fait d’icelle, en leur rebaillant, rendant et restituant par iceulx religieux les deniers pour eulx baillez ; lesquelles lettres de transport Nous avons declairées et declairons nulles et de nul effect et valleur. Et voulons et Nous plaist que nostredit filz et cousin, en ensuivant nostre volunté et declairacion, pour plus grant seureté et approbacion des choses dessus dictes, face et baille ausdiz religieux ses lettres de delaissement, renunciacion et consentement sur ce. Et par rapportant le vidimus de cesdictes presentes fait soubz scel royal et quictance ou recongnoissance souffisant desdiz religieux, abbé, convent et officiers de Charroux, pour une foiz tant seullement Nous voulons cellui de noz receveurs ordinaires ou autres à qui ce pourra toucher estre tenu quicte, paisible et deschargé de la valleur desdictes choses par nosdiz gens des comptes et par tout ailleurs où il appartiendra sans aucun contredit ou difficulté. Car ainsi Nous plaist il et voulons estre fait, non obstant comme dessus que la valleur et estimacion des choses dessusdictes ne soit cy autrement speciffiée ne declairée, que de ce ne soit levée descharge selon l’ordre de noz finances, que l’on vueille dire que d’icelles choses ne puissions ou doyons faire don ou allienacion, mais les retenir et applicquer à nostre dommaine, et quelzconques autres ordonnances, mandemens, restrinctions, deffenses et lettres à ce contraires. Et pour ce que de ces presentes lesdiz religieux pourront avoir à besongner en plusieurs et divers lieux, Nous voulons que au vidimus d’icelles fait soubz scel royal plaine foy soit adjoustée comme à ce present original. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Thouars ou mois de fevrier l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre regne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Loys. — Par le roy, Geuffroy. Visa. Contentor

En exécution de ces lettres, Pierre de Bourbon renonça à ses droits par un acte du 11 mars 1482 (n.s.) dont l’original est aux Arch. nat., P. 13762, n° 2.687. (Lecoy de la Marche, Titres de la Maison ducale de Bourbon, t. II, n° 6.780.) [L.C.]

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MDCCXI Février 1482 (n.s.)

Lettres de don et amortissement, en faveur du chapitre et église collégiale de Saint-Pierre du Château à Thouars, de quatre-vingt-un setiers de froment de rente annuelle, en compensation et décharge d’autres rentes sur le domaine de Thouars qui lui avaient été données, par acte du 7 juillet 1386, par Tristan Rouault, vicomte de Thouars, et Pernelle de Thouars, sa femme.

AN JJ. 209, n° 205, fol. 112 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 506-515

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de noz chiers et bien amez les doyen, chanoines et chappitre de l’eglise collegial de monsieur Sainct Pierre de nostre chastel de Thouars, contenant que ja preça Tristen Rouault

Des notices sur Tristan Rouault et Pernelle de Thouars, sa femme, figurent dans les t. IV et V de cette publication. (Arch. hist. du Poitou, t. XIX, p. 217, et XXI, p. 83.) Dans la seconde de ces notices, il est question de la fondation qui fait l’objet du présent acte. V. encore le P. Anselme, t. VII, p. 97. [L.C.]

, lors viconte de Thouars, et Perronnelle sa femme, de luy auctorisée pour la singulière devocion qu’ilz avoient à ladicte eglise, leguerent et donnèrent pour convertir au pain de chappitre desdiz chanoines les choses qui furent de Gillet de Maillebois assises à Oirvau ou ès environs et soixante sextiers de froment à la mesure de Thouars, et lesquelz iceulx viconte et vicontesse leur promisdrent paier par leur main dès lors en avant par chacun an à chacune feste de Sainct Michiel jusques à tant qu’ilz leur en eussent baillé bonne assiete et souffisante ; laquelle lesdiz de chappitre seroient tenuz prandre et acepter, et en ce faisant dire et celebrer à tousjours perpetuellement en ladicte eglise, par chacun jour une messe à note, incontinent après matines dictes, c’est assavoir le dimenche de la Trinité, le lundi des Anges, le mardi de sainct Pierre, le mercredi des Vierges, le jeudi du Sainct Esprit, le vendredi des Trespassez et le samedi de Nostre Dame, et chacun desdiz jours après l’offerte desdictes messes, faire prière par le chappellain qui la dira, pour le salut de l’ame desdiz viconte et vicontesse, leurs parens et amis. Et à ce obligèrent tous et chacuns leurs biens tant et si avant que l’on peut faire en tel cas, ainsi qu’il est contenu et declairé plus à plain ès lettres dudit don, dont la teneur s’ensuit :

A tous ceulx qui ces presentes lettres verront et orront, Tristan viconte de Thouars, conte de Benon, seigneur de Talmont, et Perronnelle, vicontesse, contesse et dame desdiz lieux, laquelle nous dit viconte avons auctorisee et auctorisons quant à faire, passer et accorder tout ce qui s’ensuit, et (sic) auctorisacion nous ladicte vicontesse avons pris en nous agreablement, salut en Dieu pardurable. Sachent tous que nous lesdiz viconte et vicontesse, pour la grant devocion que nous avons à Dieu et à l’eglise collegiée et seculiere de Sainct Pierre du Chastellet de Thouars, et au chappitre et chanoines d’icelle, de la diocèse de Poictiers, à icelle eglise, chanoines et chappitre d’icelle avons donné et octroyé, donnons et octroyons par ces presentes, pour faire pain de chappitre, à diviser chacun jour entre les chanoines dudit chappitre, qui les celebreront, aideront et seront presens à la messe perpetuelle dont cy après sera faicte mencion, dès le commencement de ladicte messe ou quoy que soit dès l’espitre jusques à la fin de ladicte messe, sans ce que les absens y preignent riens, c’est assavoir toutes et chacunes les choses qui furent de Gilles Maillebois, lesquelles il tenoit par le temps qu’il vivoit par hommaige lige de nous et de noz predecesseurs, estans et receans à Thouars et à Oirvau et à Bourc sur Oirvau et environ, quelzconques soient maisons, vergers, cens, rentes, coustumes, deniers de blez, deniers de chappons et autres choses, terres gangnables et non gangnables, prez, pasturaulx, vignes, bois, quars, complans et autres choses quelzconques, comment qu’elles soient appellées et nommées ; lesquelles choses nous sont advenues et escheues par faulte de hoir. Et lesquelles choses dessusdictes lesdiz chanoines et chappitre et leurs successeurs tiendront doresenavant perpetuellement et à tousjours à plain droit de nous et de noz successeurs, vicontes et vicontesses de Thouars, à ungs esperons blancs du pris de cinq solz de la monnoye qui lors courra, à nous et à noz successeurs vicontes et vicontesses de Thouars estre renduz et paiez dudit chappitre et chanoines, toutesfoiz qu’il adviendra le sr viconte et vicontesse aller de vie à trespassement, sans en faire aucun hommaige et sans ce que nous ne noz successeurs ny aucuns puissons avoir, querre ne demander sur lesdictes choses ne à cause d’icelles aucun rachapt ny autre devoir ne charge, fors seullement lesdiz cinq solz, retenu à nous et à noz successeurs en et sur icelles choses toute justice et juridicion haulte, moienne et basse, avec tout droit de ressort et souveraineté et ce qui s’en deppend, telle comme nous y avons et noz predecesseurs acoustumé y avoir ; et soixante sextiers de froment à la mesure de Touars, que nous rendrons et paierons, et promettons rendre et paier par nostre main audiz chappitre et chanoines par chacun an, en chacune feste de sainct Michel, jusques à tant que Nous les leur aions assis en bon lieu et convenable ; laquelle assiète ilz seront [tenuz] de prandre et accepter, et icelle faicte, nous et les nostres en demourrons quictes et deschargez perpetuellement ; à avoir, tenir, lever, posséder et exploicter perpetuellement dudit chappitre toutes et chacunes les choses et rentes par nous à eulx données, promises et octroyées sans empeschement, question ny demande, trouble ou perturbacion quelconques que nous ny noz successeurs y puissions jamès faire, ne nuyre par nous ne autres noz successeurs en ladicte eglise chanoines et chappitre d’icelle ; tout cedé droit d’action, de raison, de propriété, de possession, de seigneurie, de dommaine, de question et de demande et tous autres droiz quelzconques, que nous avons et avoir povons et devons, et à Nous appartenoit et peut et doit appartenir ès dictes choses par nous à eulx données et transportées, sans riens retenir à nous ne à noz successeurs, sinon seullement toute juridicion, haulte, moienne et basse, avecques tout droit de ressort et souveraineté et tout ce qui s’en deppend, et lesdiz esperons dudit pris de cinq solz à muance de seigneur ou de dame, viconte ou vicontesse de Thouars, comme dessus est dit et divisé. Lesquelles choses dessusdictes et declarées que nous avons baillées ausdiz chappitre et chanoines, qui furent dudit Maillebois, c’est assavoir celles que nous tenons à present, et lesdiz soixante sextiers de froment de rente et toutes et chacune les choses dessusdictes qui par iceulx seront baillées pour assiete nous leur promettons garantir et deffendre bien et loyaument vers tous et contre tous et les tenir audit chappitre quictes, franches, liberes et delivrés, et les admortir envers le roy nostre sire, et les delivrer et tenir quictes de finance et indampnité envers quelzconques personnes. Et seront tenuz lesdiz chanoines et chappitre rendre et paier tous cens et devoirs feodaux anciens deulz à autres que à nous, se aucuns en sont deuz à cause et pour raison desdictes choses par nous à eulx données. Lesquelles choses dessusdictes nous avons donné et octroyé ausdiz chappitre [et chanoines] et à leurs successeurs, pour dire et celebrer à ladicte eglise de Sainct Pierre une messe à note pour chacun jour perpetuellement pour nous et pour nos parens et amys deffuncts et pour le salut de noz ames ; c’est assavoir le dimanche de la Trinité, le lundi des Anges, le mardi de Sainct Pierre, le mercredi des Vierges, le jeudi du Sainct Esperit, le vendredi des Mors et le samedi de Nostre Dame, et pour faire la commemoracion et prière, tantost après l’offrande dicte de chacune desdictes messes, pour nous lesdiz viconte et vicontesse et pour tous noz parens et amis deffuncts ; laquelle messe sera dicte par chacun jour tantost après matines dictes et acomplies en ladicte eglise ; laquelle messe sera donnée dès le commancement des Laudes desdictes matines d’un propre sainct

Sainct et plus bas saims, pour seing ou sin, de signum, cloche. Cf. Godefroy, v° Sein. [L.C.]

que nous promettons faire faire à ladicte eglise pour sonner ladicte messe, et jusques à ce que nous aions fait faire et baillé ledit saint (sic), ladicte messe sera sonnée par la manière que dit est par ung des saims (sic) de ladicte eglise. Et toutes et chacunes les choses dessus dictes et divisées, nous lesdiz viconte et vicontesse, par tant que à chacun de nous peut toucher et appartenir diviseement, promettons par la foy et serement de noz corps et sur l’obligacion de tous noz biens, tenir, garder, entretenir et acomplir perpetuellement, bien et loyaument, sans jamais faire ne venir encontre, par nous ny par autres. Et renunçons à toutes decepcions et excepcions de devance (sic), de fraulde, de barat, de tricherie, de lesion et de circonvencion, et à toute aide de droit escript et non escript, à tous usaiges et coustumes de païs, et à tous previlleges, statuz, establemens, ordonnances de roy, de prince, de conte, de duc, d’empereur et d’autres quelzconques, et à tout droit disant general renunciacion non valloir, et à toutes les choses qui de fait ou de droit pourrount aider à nous et à noz successeurs à venir contre les choses dessus dictes ou aucunes d’icelles ou à les enfraindre ou adnuller en tout ou en partie. Et supplions-nous, lesdiz viconte et vicontesse à reverend pere en Dieu monsieur l’evesque de Poitiers qu’il lui plaise approuver, corroborer et confirmer toutes et chacuns les choses dessus dictes et y apposer son decret à perpetuité

Sic pour perpétuelle. [L.C.]

fermeté. En tesmoing desquelles choses, nous lesdiz viconte et vicontesse avons donné et octroyé audit chappitre et à leurs successeurs ces presentes scellées de nos propres seaulx. Fait et donné en nostre chastel de Thouars, le viie jour du mois de juillet l’an mil ccc. quatre vings et six. — Presens nobles et discrectz messire Guerard de Maumont, seigneur de Taunay, monsr Batis Rouault, monsr Jehan Girard, Guillaume de Meulles, maistre Guillaume Aumosnier, chastellain de Thouars, Hillaire de Bornizeas et plusieurs autres

Gérard de Maumont, seigneur de Tonnay-Boutonne, vendit en 1397, à Simon de Cramaut, évêque de Poitiers, patriarche d’Alexandrie, la terre de Nouzilly en Loudunais (ci-dessus, Arch. hist. du Poitou, t. XXI, p. 320.) — Sur Béthis Rouault, cousin du vicomte de Thouars, voy. ci-dessus. (Arch. hist. du Poitou, t. XIX, p. 218 n.) — Les éditeurs du Dictionnaire des familles du Poitou (2e éd., t. IV) citent plusieurs Jean Girard, qui pourraient être présents à un acte de l’an 1386, entre autres un conseiller du Parlement de Poitiers en 1418. Il s’agit peut-être de Jean Girard, familier des seigneurs de Parthenay, qui fut accusé en 1357 d’excès au préjudice du prieuré de Marsais (Arch. hist. du Poitou, t. XXI, p. 148 n.) — Guillaume Aumosnier est inconnu à MM. Beauchet-Filleau, qui citent une famille de ce nom en Bas Poitou au début du xve s. (Dictionnaire des familles du Poitou, 2e éd., t. I, p. 181.) Nous ne savons comment il prend place en qualité de châtelain de Thouars, entre Jean Blanchardin, qui tint les assises en 1377 (Arch. hist. du Poitou, t. XXIV, p. 94), et Jean de Saint-Germain, qui avait cessé d’occuper ce poste en 1398 (ibid., p. 10). — Hilaire Bournizeaux fut l’objet d’une lettre de maintenue de noblesse en juin 1378. (Arch. hist. du Poitou, t. XXI, p. 72.) — Aucun renseignement sur Guillaume de Meule. [L.C.]

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Donné par coppie et collacion faicte o les lettres originalles soubz le scel estably aux contractz à Thouars, le ixme jour du mois de février l’an mil ccc. quatre vings et dix neuf. Presens à ladicte collacion faire messire (sic) Jehan et Pierres Bonnes et Jehan Bertin, prebstres. Ainsi signé soubz le repply desdictes lettres : J. Taillea, pour coppie et collacion faicte à l’original scellé de seel de ladite viconté, en cire vert.

Au moien duquel don et legat cy dessus transcript, lesdiz supplians et leurs successeurs par cy devant ont celebré lesdictes messes en la forme et manière que dit est et que dedans est contenu et encores font de present, jaçoit ce qu’ilz n’aient joy entierement des choses ainsi à eulx données et leguées que dit est, fors [et] excepté de ce qui fut dudit feu Gillet de Maillebois et de vingt sextiers de blé tant seullement ; et de l’oultre plus montant quarante sextiers n’en aient depuis peu avoir solucion et paiement, quelque dilligence qu’ilz ou leurs successeurs (sic) en aient peu faire. Et pour ce que ledit viconté de Thouars, par certains moyens Nous soit obvenu et escheu

Sur la réunion de Thouars à la couronne, V. le précédent volume. (Arch. hist. du Poitou, t. XXXVIII, p. 247-248.) [L.C.]

, Nous ont iceulx supplians requis et subplié que nostre plaisir soit les faire paier de ce qu’il leur peut estre deu à cause dudit don et legat et leur faire continuer ou bailler assiete, selon la teneur dudit don et legat, et, affin que noz gens et officiers et autres, ou temps avenir, ne leur puissent donner aucun empeschement ne les contraindre à en vuider leurs mains, icelle quantité de blé admortir à ladicte église monsieur Sainct Pierre et leur impartir nostre grace. Pour ce est-il que Nous, inclinans liberallement a la supplicacion et requeste desdiz supplians, desirant icellui don et legat ainsi fait par les dessus diz viconte et vicontesse estre acomply, et pour la singulière devocion que avons à Dieu nostre Createur, à la glorieuse Vierge Marie et à monsieur sainct Pierre dont ladicte eglise est fondée ; pour ces causes et consideracions et autres à ce Nous mouvans, avons de nostre certaine science, grace especial, plaine puissance et auctorité royal, baillé, cedé, transporté et delaissé, et par ces presentes baillons, cedons, transportons et delaissons, pour l’assiete desdiz soixante sextiers de froment dessusdiz, et aussi pour descharger nostre demaine dudit viconté de dix neuf sextiers de froment et trois sextiers de seigle, dicte mesure, qu’ilz prenoient par autre moien sur la recepte de tout ancienneté, qui font en tout quatre vings ung sextiers de froment de ladicte mesure de Thouars, à les avoir et prandre sur les fromentages d’Oyronnois estans du demaine, en ce compris lesdiz trois sextiers de seigle que avons convertiz en deux sextiers de froment, à tousjours mais perpetuellement, pour Nous et les nostres et qui cause auront de nous, à iceulx supplians lesdiz iiiixxi, sextiers de froment de ladicte mesure, à les avoir et prandre sur lesdiz fromentaiges, comme dit est, si tant se pevent monter, et sinon, le rendre sur ladicte recepte ordinaire dudit viconté. Et s’il advient que lesdiz fromentaiges excèdent lesdiz iiiixxi sextiers, l’aultre plus demourra à ladicte recepte. Et d’abondant, afin que par lesdiz de chappitre le service divin soit mieulx entretenu en icelle eglise et que soyons participans ès prières, leur avons donné et donnons par cesdictes presentes, les trois mars d’argent que les fermiers desdiz fromentaiges sont tenuz de toute ancienneté paier en icelle prenant. Et se fera ledit paiement de blé et d’argent par le fermier ou fermiers d’iceulx fromentaiges, et aussi par ledit receveur ordinaire du reste, si lesdiz fromentaiges n’estoient de ladicte valleur, comme dessus est dit : pour desdiz iiiixxi sextiers de froment, dicte mesure, ensemble desdiz trois mars d’argent joir et user par lesdiz supplians et leurs successeurs, et iceulx avoir et prandre par la forme et manière que dit est, chacune feste de sainct Michel, par leur simple quittance seullement ou de leur procureur pour eulx. Et laquelle quantité de iiixxi. sextiers de froment et les trois mars d’argent dessus declairez, que leur avons ainsi donnez, cedez et transportez, Nous, dès maintenant pour lors, avons admortis et admortissons, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal par cesdictes presentes, sans ce que lesdiz doyen, chanoines et chappitre de ladicte eglise monsieur Sainct Pierre, ne leursdiz successeurs, soient tenuz les mettre hors de leurs mains, ne pour ce paier aucune finance ou indampnité à Nous ne aux nostres pour quelque cause ne en quelque manière que ce soit. Et laquelle finance, quelle qu’elle soit, Nous avons donné et quicté, donnons et quictons de plus ample grace, ausdiz supplians, pour consideracion des choses dessus dictes, par cesdictes presentes que Nous avons signées de nostre main. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers et au seneschal de Poictou, ou a son lieuxtenant, et à tous noz autres justiciers, etc., que de noz presens grace, don, cession, transport, admortissement et choses dessus dictes ilz facent, seuffrent et laissent lesdiz doyen, chappitre et chanoine de ladicte eglise monsieur Sainct Pierre, supplians, et leurs successeurs, joir et user plainement et paisiblement, perpetuellement et à tousjours, sans leur faire, mettre ou donner ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun destourbier ou empeschement au contraire ; et se fait, mis ou donné leur estoit, le mettent ou facent mettre incontinant et sans delay au premier estat et deu. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Thouars, ou mois de fevrier l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre regne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Loys. — Par le roy, l’evesque d’Alby

Sur Louis d’Amboise, évêque d’Albi, v. ci-dessus, t. XXXVIII, p. 320, et dans le présent volume la note de la p. 184 [L.C.]

, et autres presens. Geuffroy. — Visa. Contentor. Burdé.

MDCCXII Février 1482 (n.s.)

Lettres d’amortissement octroyées à Pierre Berlant, curé de la paroisse Notre-Dame du Château, à Thouars, d’une rente annuelle de dix livres léguée à ladite église par Marie de Rieux, pour la fondation d’une messe.

AN JJ. 209, n° 211, fol. 115 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 515-517

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre bien amé Pierre Berlant

Rien ne nous permet d’affirmer que ce curé de Thouars soit apparenté à la grande famille des Berland des Halles de Poitiers. MM. Beauchet-Filleau ne mentionnent pas ce personnage dans la longue liste des noms isolés qui figurent au début de leur généalogie de cette famille. (Dict. des familles du Poitou, 2e éd., t. I, p. 458.) [L.C.]

, prebstre, curé de l’eglise parroichial de Nostre Dame du Chastel de Thouars, contenant que jà pieça deffuncte Marie de Rieux

Marie, fille de Jean III, duc de Rieux et de Rochefort, baron d’Ancenis, et de Béatrix de Montauban, sa première femme, mariée à Louis d’Amboise, vicomte de Thouars. dont elle eut trois filles. Marie de Rieux mourut en 1461. Voy. P. Anselme, t. VI, p. 766, et Arch. hist. du Poitou, t. XXXIX, p. 60, et XXXV, p. 330. [L.C.]

, par son testament et ordonnance de derrenière vouleonté donna et legua à ladicte eglise certaine somme de deniers pour convertir en l’achapt de dix livres de rente en heritage à la valleur, pour la fondacion et dotacion d’une messe qu’elle ordonna estre dicte et celebrée en icelle eglise chacune sepmaine, mesmement le samedi en l’honneur de Nostre Dame, pour le salut de son ame et de ses parens et amis ; partie de laquelle rente icellui suppliant a jà acquise et a entencion d’aquerir le surplus, pour faire ladicte fondacion, selon l’intencion et vouloir de ladicte deffuncte legaterresse. Or doubte ledit suppliant que, le temps avenir, on le voulsist contraindre ou ses successeurs curez de ladicte parroisse, à vuider et mettre hors de leurs mains lesdictes dix livres de rente ou ledit heritaige ou possession à ladicte valleur, s’ilz n’estoient par Nous admortiz. Et à ceste cause Nous a icellui suppliant supplié et requis que nostre plaisir soit iceulx dix livres de rente ou heritaige à ladicte valleur, pour ladicte fondacion admortir et sur ce lui impartir nostre grace et provision convenable. Pour quoy est-il que Nous, ce que dit est considéré, inclinans liberallement à la supplicacion et requeste dudit suppliant, pour la singulière et entière devocion que Nous avons de tous temps à la benoiste glorieuse Vierge Marie, dont ladicte messe est fondée, et à ce qu’elle soit mieulx entretenue le temps avenir et que ledit suppliant et sesdiz successeurs soient plus enclins de prier Dieu et sa benoiste mère pour nous, nostre prosperité et lignée et la bonne paix et union de nostre royaume, pour ces causes et autres consideracions à ce Nous mouvans, Nous audit suppliant avons admortiz et admortissons, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, lesdictes dix livres de rente ou heritaige à la valleur, que ledit suppliant a acquises ou qu’il a entencion d’acquerir le plus tost qu’il pourra, pour satisfaire au vouloir de ladicte testarresse, et voulons et Nous plaist que ledit suppliant et ses successeurs, curez de ladicte cure, puissent tenir, posséder et exploicter lesdiz dix livres de rente ou heritaige et autres possessions à la valleur à tousjours mais perpepetuellement comme admorties et à Dieu desdués, sans ce qu’il ne sesdiz successeurs soient tenuz ne puissent estre contrains de les mettre hors de leurs main ne d’en paier pour le temps avenir, à Nous ne à noz successeurs aucune finance ou indampnité ; et laquelle finance ou indampnité Nous lui avons donnée, quictée et aumosnée, donnons, quictons et ausmonons, à quelque valleur qu’elle se puisse monter, de nostre grace, par cesdictes presentes signées de nostre main. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx gens de noz comptes et trésoriers à Paris, au seneschal de Poictou ou à son lieutenant au siège de Thouars, et à tous, etc., que de noz presens don, grace, admortissement, octroy et choses dessusdictes ilz facent, etc., ledit suppliant et sesdiz successeurs curez d’icelle cure, joir, etc., sans luy mettre ou donner, etc. Car tel est nostre vouloir, etc., nonobstant que ladicte finance, franc fié ou indampnité ou la valleur d’icelle ne soit cy autrement, etc. et quelzconques ordonnances, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Thouars, ou mois de fevrier l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre regne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Par le roy, l’evesque d’Alby

Sur l’évêque d’Albi, V. les renvois indiqués à la pièce précédente. [L.C.]

et autres presens. Geuffroy. — Visa. Contentor. Budé.

MDCCXIII Mars 1482 (n.s.)

Don et cession au commandeur de la commanderie de Prailles de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem, du droit de haute justice en toute la seigneurie dudit Prailles.

AN JJ. 207, n° 368, fol. 171 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 517-520

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion des religieux prieur et frères de l’ordre de Sainct Jean de Jherusalem en Acquictaine, à cause de leur commanderie de Prailles

Cette commanderie ne figure pas parmi celles dont les papiers sont conservés aux archives départementales soit de la Vienne, soit des Deux-Sèvres. Elle n’est non pas plus comprise parmi celles sur lesquelles il y a des notes dans le n° LII de la coll. D. Fonteneau à la bibl. de Poitiers. D’après B. Ledain, Dictionnaire topographique des Deux-Sèvres, Prailles est un petit village qui fait aujourd’hui partie des communes de Saint-Martin de Sanzay et d’Argenton-Église. On y trouve trace d’une maison de l’Hôpital vers 1.200. (Arch. hist. du Poitou, t. I, p. 81.) M. Ledain (loc. cit.) affirme, d’après un document des archives de la Vienne, que la commanderie de Prailles fut réunie en 1462 à celle de Puy de Noyron. Le présent acte semble mal se concilier avec cette hypothèse. [L.C.]

et frère Jehan de Luain, chevalier dudit ordre, commandeur de ladicte commanderie, contenant que icelle commanderie de Prailles, qui est de fondacion royal, est fondée en l’onneur et reverence du tres glorieux sainct, parent, amy et procuseur (sic) de Nostre Seigneur Jhesu Crist, monsieur sainct Jehan Baptiste, fut despieça par aucuns noz predecesseurs fondée et douée de plusieurs beaulx donmaines et heritaiges, et par especial leur compette et appartient la seigneurie dudit lieu de Prailles, dont et de laquelle sont, deppendent et demeurent plusieurs hommes estagiers et subgectz couchans, levans (sic), à cens, rentes et devoirs de ladicte commanderie, en laquelle ilz ont droit de justice et juridicion moienne et basse seullement et pour l’excercice d’icelle seneschal et autres officiers qui tiennent leurs plaitz et assises quatre foiz l’an seullement, Nous requerens humblement que pour et afin qu’ilz puissent tenir et exercer leurdicte justice en plus grant auctorité, droit, prerogative et precminence, il Nous plaise, en faveur et contemplacion de mondit sieur Jehan (sic) leur donner et transporter la haulte justice et juridicion que avons audit lieu de Prailles, et surce leur octroyer noz grace et liberalité. Pour quoy Nous, ces choses considerées, inclinans liberallement à leur supplicacion et requeste, à iceulx religieux, prieur et frères de l’ordre de Sainct Jehan de Jherusalem, à cause de ladicte commanderie de Prailles, avons, de nostre certaine science, plaine puissance et auctorité royal donné, cedé, transporté et delaissé, donnons, cedons, transportons et delaissons, pour eulx et leurs successeurs à tousjours mais perpetuelment tout le droit de haulte justice et juridicion que avons et povons avoir et qui nous compette et appartient en toute ladicte seigneurie de Prailles, appartenances et appendances d’icelle et ès fiefz et arrierefiefz, s’aucuns en sont tenuz qui en deppendent et pevent depprendre, s’aucuns en y a, pour en joïr par lesdiz religieux, prieur et frères à cause de ladicte commanderie, ensemble et avec lesdictes moienne et basse justice qui y avoient precedemment, et en prandre et parcevoir tous et chacuns les droiz, honneurs, prerogatives, prouffiz et emolumens qui en deppendent et pevent deppendre et appartenir à quelque valleur et extimacion qu’ilz soient. Et leur avons donné et donnons faculté, puissance et auctorité de commettre, ordonner et establir bailli, seneschal, chastellain, prevost, greffiers, sergens et autres officiers et ministres de justice telz et en tel nombre qu’ilz vouldront et verront estre à faire pour le bien, solagement, abreviacion des causes et procès de leurs subgectz et justiciables, et aussi de creer et ordonner notaires et tabellions pour passer et recevoir tous contractz, instrumens, obligacions et autres lettres, soient en temps ou à perpetuelz, créer, eriger et faire …

Blanc au registre.

. seaulx a sceller lesdiz contractz, auditoire pour tenir et excercer lesdictes justice et juridicions, fourches patibulaires et generallement de faire faire toutes autres choses concernans et appartenans à droit de haulte justice, moienne et basse, et ainsi que font et ont acoustumé faire les seigneurs chastellains et autres aians droit de justice et juridicion haulte, moienne et basse, sans aucune chose en reserver ne retenir à Nous ne aux nostres, fors seullement le ressort et souveraineté. Si donnons en mandement à nos amez et feaulz les gens de noz comptes et tresoriers à Paris, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers ou a leurs lieuxtenans ou commis et à chacun d’eulx, si comme à lui appartiendra, que en faisant lesdiz supplians joir et user de noz presens don, cession et transport, ilz leur baillent et facent bailler et delivrer la possession et saisine de ladicte haulte justice et les en facent et leurs successeurs de ladicte commanderie joir et user perpetuellement, plainement et paisiblement, sans leur faire ne souffrir estre fait aucun destourbier ou empeschement ou contraire, mais ce fait ou mis leurs estoient, ones ou pour le temps avenir, mettent ou facent mettre à plaine delivrance incontinant et sans delay. Et par raportant ces presentes signées de nostre main ou vidimus d’icelles fait soubz seel royal et recongnoissance sur ce souffisent dudit frere Jehan de Luain, commandeur de ladicte commanderie, pour une foiz seullement, Nous voulons cellui ou ceulx de noz receveurs ordinaires et tous autres à qui ce pourra toucher, en estre et demourer quictes et deschargez par tout où il appartiendra, sans aucune difficulté. Car ainsi Nous plaist-il estre fait, nonobstant que la valleur de ladicte haulte justice ne soit cy speciffiée ne declairée, et quelzconques autres ordonnances, mandemens, restrinctions ou deffenses à ce contraires. Et afin, etc., Sauf, etc. Donné au Plesseys du Parc, ou mois de mars l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre regne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Loys. Par le roy. G. Briçonnet. — Visa. Contentor. Texier.

MDCCXIV Avril 1482 (n.s., avant le 7)

Rémission accordée à Louis Cousin, maître cordonnier à Mauzé, poursuivi comme complice du meurtre de Jean de Saint-Benoît, commis par Foucaut Guesdon, son valet, qui lui-même avait obtenu ses lettres de rémission

Tours, juillet 1481, dont le texte est imprimé ci-dessus.

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AN JJ. 209, n° 113, fol. 65 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 521-522

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de Loys Cousin, povre cordouannier, demourant en la ville de Mauzé en Xantonge, aagé de cinquante ans ou environ, chargé de femme et de cinq petiz enfans, contenant que ung jour environ les Roysons

Les Rogations.

derreniers ledit suppliant, Foucault Guesdon et Bernard, ses varletz, et Philebert Bardet, qui besoingnoit avecques lui dudit mestier de cordouannier, entreprindrent d’aller jouer aux champs vers le molin neuf et au lieu de Crans ou demeure la mère dudit suppliant, distant dudit Mauzé d’environ ung quart de lieue. Et quant ilz furent sur les champs, ledit Guesdon s’en alla le premier, lesdiz Bernard et Philibert après, et ledit suppliant le derrenier assez loing. Et advint que ledit Guesdon rencontra sur les champs, avec ung nommé Chemillé, feu Jehan de Sainct-Benoist, qui estoit dudit mestier de cordouannier et avoit demouré et besoingné avec ledit suppliant par quatre ans ou environ. Et pour ce que ledit de Sainct Benoist, le jour precedent, avoit batu et oultragé ledit Guedon, ilz eurent parolles ensemble et en l’absence dudit suppliant qui estoit demouré derrière, s’entrebatirent iceulx de Sainct Benoist et Guesdon, et tellement que icellui Guesdon, après qu’il eut esté blecié et oultragé par ledit de Sainct Benoist, qui estoit mal renommé et qui autresfoiz avoit, comme l’en dit, fait murtre dont il avoit obtenu lettres de remission, pour soy deffendre et resister contre ledit de Sainct Benoist, le frappa ung coup d’estoc d’un braquemart ou espée par la poitrine, dont il tumba mort, ainsi que depuis on rapporta audit suppliant qui estoit demouré derrière, comme dit est, lequel en fust fort desplaisant. Et combien que ledit suppliant n’ait esté present audit coup, mais fust demouré derrière, comme dit est, et que ledit Guesdon qui dudit coup a obtenu noz lettres de remission, eut deschargé dudit cas icellui suppliant, toutesvoies pour occasion dudit cas et aussi pour ce que autresfoiz il avoit pourchassé faire informacions contre ledit feu de Sainct Benoist pour oultraiges qu’il lui avoit faiz et dit que, s’il n’estoit puny par justice, que une foiz il en seroit vengé ou semblables parolles en effet, icellui suppliant a esté constitué prisonnier ès prisons de la justice dudit lieu de Mauzé et esté fait son procès et s’est porté pour appellant de ce que on le vouloit mettre en geheyne et torture, lequel appel il a relevé par devant le gouverneur de la Rochelle où est le procès pendant indecis, il doubte que on voulsist contre lui proceder par rigueur de justice, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant icelles. Pour quoy Nous, etc., voulans, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessus dit, avecques toute peine, etc., en mettant au neant, etc. Et l’avons restitué, etc., satisfacion, etc. Et imposons silence, etc. Si donnons en mandement au gouverneur de la Rochelle, et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre regne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. F. Texier. Visa. Contentor. Texier.

MDCCXV Avril 1482 (n.s., avant le 7)

Rémission obtenue par Jean Sabourin, dit Guilloteau, Poitevin, réfugié depuis trois ans à Pomard, près Beaune en Bourgogne, condamné par contumace au bannissement et à la confiscation de ses biens par les officiers de justice de Niort, pour un meurtre par lui commis dans cette ville, en 1477, sur la personne de Pierre Aillery, auquel il était allé chercher querelle, parce qu’il avait battu son cousin, Guillaume Perier. Lesdites lettres visent aussi deux autres homicides dont il s’était rendu coupable, l’un sur un Écossais de Villeneuve-la-Comtesse, et pour lesquels il avait déjà eu des lettres de rémission.

AN JJ. 209, n° 14, fol. 7 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 523-527

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Saborin, dit Guilloteau, de nostre païs de Poictou, aagé de trente ans ou environ et chargé de femme et enfans, hostellier à present demourant à Pommart près Beaulne en Bourgongne, contenant que le cinquiesme jour d’octobre l’an mil cccclxxvii, ledit suppliant estant en nostre ville de Nyort ondit païs de Poictou, où il estoit lors demourant, se transporta, environ neuf à dix heures devers le soir, en l’ostel d’un nommé Guytart Fillacier demourant audit Nyort et avoit et portoit une rapière espée en sa main, et lui arrivé ondit hostel, icellui Guytart dist audit suppliant que ung nommé Micheau Rabier, lequel auparavant avoit batu ou aidé à batre et oultrager en ladicte ville de Nyort ung nommé Guillaume Perier, cousin dudit suppliant, estoit ledit jour arrivé audit lieu de Nyort. Sur quoy icellui suppliant, désirant savoir la vérité de ladicte bateures et parce que feu Pierre Ailleri dit Cheron, que l’on disoit avoir fait ladicte batterie, avoit autresfoiz dit audit suppliant que il n’avoit point batu sondit cousin, dist icellui suppliant audit Guytart telles parolles ou semblables en substance : « Allons par l’ostel de mon frere et de là le menons avec nous et yrons en la maison du bourreau où devoit estre ledit Rabier, et illec saurons qui a fait ladicte bature. » Et tantost après s’en allèrent d’illec lesdiz supplians (sic) et Guytart, et tirèrent en la maison de Guyot Ayrodeau, frère dessusdit et Jehanne Sabourine, sa femme, seur dudit suppliant, hostelliers et demourans en la maison où pend l’enseigne de la Teste Noire audit lieu de Nyort, et à present demourans en l’ostellerie où pend l’enseigne de l’Escu de France. Et lors ledit suppliant pria et requist ledit Ayrodeau de aller en la compaignie de lui et dudit Guytart en la maison dudit executeur de la haulte justice, esperant qu’ilz y trouveroient et auroient ledit Rabier, afin de savoir la cause et vérité dudit debat et bature. A quoy ledit Ayroudeau, mary de la seur d’icellui suppliant, dist qu’il estoit content d’aller avec eulx, et print ung braquemart à sa sainture, qu’il avoit souvent acoustumé porter, et ung baston de bois en sa main. Et incontinant iceulx suppliant, Guytart et Ayroudeau et ung jeune compaignon, nommé Micheau, lors logié en ladicte hostellerie de la Teste Noire, duquel Micheau ledit suppliant autrement ne scet le nom, se transportèrent jusques devant le chastel de ladicte ville de Nyort où illec ilz parlèrent ensemble en disant les ungs ès autres qu’ilz ne fissent aucun oultrage à personne. Et d’illec allèrent vers l’ostel dudit executeur et eulx arrivez devant ledit hostel, premier que appeller ne faire bruit, parlèrent ensemble et entre autres choses dist ledit Ayroudeau que, comment qu’il feust et quelque chose qu’ilz feissent, qu’il n’y eust point de noise et que autrement il n’yroit point avec eulx en icellui hostel. Devant lesquelles parolles, la femme dudit executeur ouvrit la porte dudit hostel, et incontinent entrèrent lesdiz suppliant, Guytart, Ayroudeau et Micheau en ladicte maison, et ledit suppliant premier et ledit Ayroudeau second ; et illec trouvèrent ledit Rabier. Et quant ilz furent entrez, dist ledit suppliant à icellui Rabier telles parolles ou semblables : « Pourquoy as-tu batu mon cousin Perier ? » et en ce disant donna audit Rabier du poing sur la teste, dont il ne lui peut pas faire grant mal. Et ce voyant, ledit feu Pierre Aillery, lors estant en ladicte assemblée et maison, demanda audit suppliant pour quoy il frappoit ledit Rabier. A quoy icellui suppliant lui respondit telles parolles : « C’est doncques toy qui l’as batu ! » et ledit feu Aillery lui dist autres telles parolles ou semblables : « Et puis, se je l’avoyes ores batu, je suis bien pour l’amender. » Et adonc ledit feu Aillery aiant la main sur ung braquemart qu’il portoit, se tira devers la porte dudit hostel où estoit ledit suppliant, quequessoit derrière la femme d’un nommé maistre Denis. Et doubtant icellui suppliant que icellui Aillery le voulsist invader et cousir (sic) sus dudit braquemart, et aussi tout esmeu et courroucé des parolles qu’il lui avoit dictes et puis que ores il auroit batu son cousin, tira ledit suppliant sadicte espée et l’en frappa ung cop d’estoc en la cuisse. A cause duquel coup icellui Aillery alla tantost après de vie à trespas. Et depuis en ont lesdiz Guytart et Ayroudeau obtenu noz lettres de pardon et remission. Pour occasion duquel cas et aussi pour les meurdres et homicides par lui commis ès personnes d’un Escossoys, en son vivant demourant à Villeneufve entre Sainct Jehan d’Angely et Nyort et d’un nommé Clement, cordouannier en la ville de Bordeaulx, dont toutesvoyes ledit suppliant a obtenu de Nous lettres de pardon et remission, desquelles il a piéça requis l’enterinement par devant le seneschal du Poictou ou son lieutenant audit lieu de Nyort, s’est ledit suppliant absenté dudit païs de Poictou et s’en est allé demourer ondit païs de Bourgogne, et y a jà demouré par l’espace de trois ans ou environ, et encores fait, tant audit lieu de Pommart près Beaulne où il tient hostellerie que ailleurs. Et depuis sondit partement a continuellement suyvy les guerres et servy au fait de l’advitaillement de noz armées au mieulx que possible lui a esté. Duquel cas il a obtenu lettres de pardon et remission de nostre lieuxtenant ondit païs ; mais, pour ce qu’il doubte que, non obstant icelles, on le voulsist molester en corps ne en biens, sans avoir regard ausdictes lettres, et aussi que puis naguères il a esté adverty que à ces causes noz officiers ondit païs de Poictou ont contre lui procedé et fait proceder à bannissement dudit païs de Poictou et declairé ses biens confisquez, et autrement icellui suppliant n’oseroit jamais seurement converser, repairer ne demourer audit païs de Poictou ne ailleurs en nostre royaume, se le cas et homicide par lui commis en la personne dudit feu Aillery, et aussi en tant que rechief mestier seroit, ceulx des personnes desdiz feux Clement cordouannier et l’Escoçois, quictez, remis et pardonnez, et sur ce noz grace et misericorde lui en estre imparties, en Nous humblement requerant que, attendu ce que dit est et aussi les services que ledit suppliant a faiz en noz armées de Bourgongne sur le fait dudit advitaillement et austrement, et que depuis qu’il est èsdit païs de Bourgongne, il s’est tousjours bien et honnestement gouverné et conduit et a entencion doresenavant le faire et continuer, il Nous plaise lui quicter, remettre et pardonner lesdiz cas et sur ce lui impartir nosdictes grace et remede. Pour quoy Nous, etc., voulons, etc., audit suppliant, en l’onneur et reverence, etc., avons quicté, remis et pardonné les faiz et cas dessus diz, avecques toute peine, etc. ; en mettant au neant, etc. Et l’avons restitué, etc., satisfacion, etc. Et imposons, etc. Si donnons en mandement, etc., aux seneschaux de Poictou, bailliz de Dijon, d’Ostun et de Chalon, et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Paray le Monnial, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre regne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Par le roy, le sire du Bouchaige, le doyen de Noyon, maistre Jehan de Vallée, grant (sic) procureur general

Sur Imbert de Batarnay, seigneur du Bouchage, voy. ci-dessus, p. 65, note 4. — Le doyen de Noyon était en 1482 Jacques de la Viefville, d’une famille noble d’Artois qui occupa cette charge de 1476 à sa mort, survenue en 1508. (Gall. Christ., t. IX, col. 1.035.) — Maître Jean de Vallée fut nommé le 23 mai 1481 « procureur et solliciteur du roi notre sire en toutes ses causes et procès meus et à mouoir tant à la court de céans que ès parlemens de Tholose et de Bordeault, ès requeste du Palaiz que ailleurs en toutes autres justices et juridiction du royaume ». La Cour n’enregistra pas ces pouvoirs exorbitants sans restrictions ; Jean de Vallée fut néanmoins reçu le 15 janvier 1482 n.s. (Aubert, Hist. du Parlement de Paris, t. I (1894), p. 145.) [L.C.]

, et autres presens. Parent. — Visa. Contentor. Texier.

MDCCXVI Mai 1482

Rémission obtenue par Guillaume Girard et à Guillemette Fortune, demeurant à Saint-Loup, prisonniers à Thouars pour avoir été pris en flagrant délit d’émission en cette ville de faux florins qu’ils s’étaient chargés de mettre en circulation pour le compte d’une association de faux monnayeurs auxquels ils étaient affiliés.

AN JJ. 208, n° 163, fol. 99 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 527-535

Loys, etc. Savoir faisons à tous, présens et advenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Guillaume Girard et Guillemete Fortune, sa femme, chargez de plusieurs enfans, demourans à Sainct-Lou en la seneschaucée de Poictou, à present prisonniers en noz prisons de Touars, contenant que, deux ans a ou environ, lesdiz Girard et sa femme, estans lors demourans au bourg et parroisse de Gougé près ledit lieu de Sainct Lou, ung nommé Jehan d’Arvoirs, dit Grant Jehan acueillit et alloua à ladicte Guillemete une sienne niepce jusques à certain temps lors ensuivant ; et pour ce que icelle niepce auparavant avoit estée mariée avec ung tainturier de toilles, ladicte Guillemete le tint avecques elle six sepmaines ou environ, en entencion de savoir et aprandre d’elle la manière de taindre lesdictes toilles. Durant lesquelles six sepmaines, ladicte niepce dist à ladicte Guillemete que ledit Grant Jehan, son oncle, savoit l’art de faire la monnoye d’or et d’argent et qu’elle lui en parleroit. Et aucun temps après ledit d’Arvoirs dit Grant Jehan, se trouva en la maison desdiz Girard et sa femme, en laquelle il fist ung fourneau et monstra a ladicte Guillemete ung instrument de verre qu’il avoit apporté avecques lui, lequel il appelloit alenby, pour tirer de l’eau de vie. Et depuis, tant au moien dudit acueilliage de ladicte niepce que aussi que ledit d’Arvors avoit et a certaine maison et autres dommaines et heritages joingnans une petite gangnerie ou mestarie appartenant ausdiz Girard et sa femme, appellée la Pacaudière, iceulx Girard et sa femme prindrent congnoissance avec ledit Grant Jehan, et semblablement depuis ont eu congnoissance à ung nommé Loys, dont ilz ne savent le surnom, qui a esposé une des filles dudit Grant Jehan, que aussi que icellui Loys et sa femme ont une petite gangnerie joingnant de ladicte Pacaudière. Lequel Loys ung an et demi a ou environ, lui estant en sadicte mestarie, se transporta audit lieu de la Pacaudière pour achapter des pouletz et il trouva ladicte Guillemete, et ainsi qu’ilz parloient ensemble de plusieurs choses, Jehan Godebon, frere uterin de ladicte femme dudit Loys, passa aupres d’eulx avecques certain nombre de chiens, et après qu’il fut passé, ladicte Guillemete dist qu’elle s’esbahissoit comment il povoit entretenir si grant estat de nourrir tant de chiens ; et lors ledit Loys respondit qu’il avoit beau les mener et qu’il savoit bien l’art de faire des florins et autres monnoyes. Et lors ladicte Guillemete, qui est simple jeune femme et indigente, non pensant que ce feust fort grant mal, dist audit Loys qu’ils devoit trouver moyen d’en faire comme lui, veu qu’il estoit marié avecques sa seur. Et a donc ledit Loys lui dist que si elle et sondit mary lui voulaient aider à mettre et employer desdiz florins, qu’il leur en apporteroit dedans brief temps ; ce que ladicte Guillemete lui accorda. Et sans autre chose faire, ledit Loys, se departit d’elle et s’en alla en sadicte mestaierie et de là en la ville de Poictiers, en laquelle ledit Loys se tient par diverses foiz. Et incontinant que ladicte Guillemete fut retournée par devers ledit Girard, son mary, elle lui déclaira les parolles et entreprises qu’elle avoit eues avecques ledit Loys touchant lesdiz florins en l’exhortant, tant pour leur subvenir à plusieurs leurs necessitez qu’ilz avoient et ont à present à cause de la sterilité du temps que autrement, que pour leur aider à marier leur fille, aagée de vingt ans ou environ, qu’il voulsist acompaigner ledit Loys à mettre lesdiz florins par le pais. Par le moien desquelles remontrances et exortacions, ledit Girard se consentit de ce faire. Et tantost après lesdiz Girard et sa femme se partirent dudit lieu de Gourgé et s’en vindrent demourer audit lieu de Sainct-Lou, ouquel ilz ont tousjours depuis demouré jusques à present. Auquel lieu ledit Loys se rendit par devers eulx et leur dist qu’il savoit bien la manière d’avoir des florins d’Arragon faulx et autres, mais qui les mettroit en tel point qu’ilz se mettroient pour bons et que si ledit Girard lui vouloit tenir compaignie à aller par le pays les mettre et emploier, qu’il en auroit prouffit comme lui. Lequel Girard, tempté de l’ennemy et sans avoir congnoissance du mal qu’il entendoit de ce faire et qu’il en povoit ensuir, voyant la grande povreté et neccessité où il estoit, et qu’il n’avoit blé ne vin de quoy il peust vivre ne entretenir sa femme et enfans, se consuntit à ce et accorda audit Loys qu’il yroit par le pays mettre et employer desdiz florins. Et adonc ledit Loys dist audit Girard et sa femme qu’il s’en alloit audit Poictiers pour en faire, et bailla lors audit Girard deux ou trois desdiz florins pour les mettre et employer, et sans autre chose faire ledit Loys se partit d’eulx et s’en alla. Et aucun temps après ledit Loys retourna audit Sainct-Lou et demanda ausdiz Girard et sa femme s’ilz avoient mis lesdiz florins et qu’il vouloit auoir partie de la monnoye qu’ilz en avoient eue. Lequel Girard lui dist qu’il avoit employé lesdiz florins, c’est assavoir l’un en ung sextier de seigle et les autres en ses affaires, mais que pour l’eure il ne lui en bailleroit aucune chose, pensant qu’on les lui retournast. Après lesquelles parlolles, icellui Loys dist ausditz Girard et sa femme qu’il leur en envoyroit en brief d’autres pour les mettre. Et aucun temps après ledit Loys vint audit lieu de Sainct-Lou et apporta sept ou huit desdiz florins d’Arragon, lesquelz il frappa en l’estable desdiz Girault (sic) et sa femme, en la presence de ladicte femme et les dora d’un demi ducat que lui bailla ledit Girard, et l’autre moitié laissa audit Girard. Et depuis à une autres foiz icellui Loys vint audit Sainct-Lou et demanda au dit Girard s’il avait encores la moitié dudit ducat en lui priant qu’il lui en voulsist bailler la moitié, qui estoit ung quart et qu’il en avoit afaire, ce que fist ledit Girard et print dudit Loys en monnoye ce que valloit ledit quart.

Durant lequel temps ledit Grant Jehan dist ausdiz Girard et sa femme qu’il leur aprandroit à gecter desdiz florins et austres monnoyes et leur monstra ung fer plat, lequel il emploie de cendre passée, destrampée d’eaue salée et mettoit sur ladicte cendre ung gros de Bretaigne, pour en former la marche, ou autre monnoye, et fist bailler ausdiz Girard et sa femme certain argent cassé qu’ils avoient tant en aneaulz que autrement, pour faire de ladicte monnoye ; lequel ledit Grant Jehan fist fondre et paravant que le marcher et mettre en forme, fist l’essay destaing et y fist deux ou trois formes de gros de Bretaigne, et après en fist dudit argent, mais il ne put riens faire et ne valut riens le tout de ladicte monnoye. Et avecques ce icellui Grant Jehan bailla audit Girard ung billot de bois pour faire faire ung fer semblable à icellui billot, lequel fer ledit Girard en fist depuis faire deux par deux fois à ung mareschal demourant audit Gourgé, sans ce que ledit mareschal scust pourquoy s’estoit et les bailla ledit Girard audit Grant Jehan, pour en faire des coings à monnoye telle qu’il vouldroit, sans savoir quelle. Et pareillement icellui Girard depuis la feste sainct Jehan derrenière passée, par le commandement dudit Grant Jehan a fait faire par ung coustellier deux autres pieces de fer pour en iceulx graver la marque de certaine monnoye, lesquelz il a aussi baillez audit Grant Jehan. Et depuis, c’est assavoir environ les vendanges derrenieres passées, lesdiz Grant Jehan, Loys et ung nommé Jehan Seignemault (sic) entreprindrent ensemblement que ledit Seigneurault (sic) leur feroit certain nombre de pièces d’argent rondes, pour faire gros de Bretaigne ; et pour ce que ledit Seigneurault disoit qu’il ne povoit pas faire les choses de lui mesmes, ilz se rendirent audit lieu de Sainct Lou devers ledit Girard et bailla icellui Girard audit Seigneurault pour faire lesdictes pièces jusques à la somme de cinquante solz tournois dont il devoit estre remboursé du premier venu desdictes pièces. Et tantost après ledit Seigneurault apporta audit Girard audit lieu de Sainct Lou le nombre de vingt pièces toutes rondes prestes à marquer, lesquelles ledit Girard print dudit Seigneurault et les porta à la Jardinière par devers ledit Loys ; et incontinant qu’il les lui eut monstrées, ledit Loys et Girard s’en allèrent ensemble ès bois de la Pacaudière, estans près dudit lieu de la Jardinière, et porta ledit Loys ung fer engravé à la marque des gros de Bretaigne, et oudit bois ledit Loys, en la presence dudit Girard frappa oudit coing quatre ou cinq desdictes pièces, mais ilz ne peurent faire chose qui riens vaulsist, par quoy ledit Girard reprint icelles pièces et les retourna audit Seigneurault. Et depuis et durant ledit temps ladicte Guillemete bailla audit Grant Jehan trois vieilles guillières d’argent, desquelles ledit Grant Jehan fist aucuns gros, dont il en bailla six audit Girard et sa femme, qui les ont mis et emploiez. Semblablement, environ la my Karesme derrenière passée, ung autre nommé Jehan, frère dudit Loys, vint audit lieu de Sainct Lou, par devers lesdiz Girard et sa femme, et se logea en leur maison et leur dist qu’il avoit apporté le nombre de xxiiii. ou xvv. florins tous faiz, lesquelz ledit Jehan dora d’un ducat et quart que lui bailla ledit Girard en certaine maison à lui appartenant, on laquelle maison ledit Loys en remercha sept ou huit ou environ, en la presence dudit Girard. Et le lendemain lesdiz Jehan et Girard se partirent dudit Sainct Lou et dirent à ladicte Guillemete qu’ilz s’en alloient par le païs pour mettre, changer et employer en monnoye ou marchandise lesdiz xxiiii. ou xxv. florins et s’en allèrent jusques en la ville de Nantes, en laquelle et en y allant et retournant audit Sainct Lou ilz changèrent en monnoye et autres plusiéurs choses qu’ilz acheptèrent lesdiz xxiiii. ou xxv. florins. Et eulx retournez dudit voyage audit Sainct Lou, auquel voyage ilz misdrent neuf ou dix jours, ilz trouvèrent qu’ilz avoient de retour desdiz florins oultre et par dessus la despence qu’ilz avoient faicte et autres choses qu’ilz avoient acheptées environ de dix sept à dix huit livres, de laquelle somme ledit Jehan bailla à ladicte Guillemete la somme de six livres qu’il lui donna pour ses peines et salaires dudit voyaige et le surplus print pour lui. Et le lendemain au matin se partit dudit Sainct Lou et l’acompaigna ledit Girard jusques à la Maladerie dudit lieu, et en allant ledit Jehan promist audit Girard que en brief il retourneroit devers lui audit Sainct Lou, et lui apporteroit derechief desdiz florins et après se departirent, et s’en alla ledit Jehan à Poictiers, ainsi qu’il disoit. Et depuis, c’est assavoir le mardi xxvie jour de mars derrenier passé, ledit Jehan retourna de rechief audit lieu de Sainct Lou et se logea en la maison desdiz Girard et sa femme et illec apporta avecques lui le nombre et quantité de vingt et quatre florins, tant d’Arragon que au monde tous faiz et dorez, excepté six ou sept que ledit Jehan dora au soir après que ledit Girard fut cousché, en la presence de ladicte Guillemete, de certaine doreuze qu’il avoit apportée avecques lui. Et le jeudi ensuivant, qui fut le xxviiie jour du mois de mars, lesdiz Jehan et Girard se partirent dudit Sainct Lou et s’en allèrent couscher à la Roche de Luzay en une hostellerie estant près le pont dudit lieu, et le lendemain au matin baillèrent à l’oste de ladicte hostellerie l’un desdiz florins en paiement de leur escot, lequel hoste leur retourna l’outre plus dudit escot en monnoie à la raison d’un bon florin et s’en allèrent en la ville de Touars en laquelle avoit marché cedit jour, et pour mettre et employer lesdiz autres florins, se logèrent en l’ostel d’un nommé Guillaume Babin, claveurier

Serrurier.

, et tantost qu’ilz furent arrivez, ledit Girard qui avoit lesdiz florins par devers lui, achepta audit marché une paire de chausses et une cornète le pris de xxxi. solz tournois, pour le paiement desquelles choses il bailla au marchant de qui il les avoit acheptées deux desdiz florins, lequel lui retourna le residu en monnoie à la raison de deux bons florins. Pareillement ledit Girard achepta audit marché deux petiz chappeaulx du pris de iiii. solz ii. deniers tournois, pour le paiement desquelz il bailla au chappellier de qui il les avoit acheptez ung desdiz florins qui lui en retourna l’aultre plus de ce qu’il povoit valloir à la raison d’un bon florin. Et depuis, parce que lesdiz marchant et chappellier desquelz ledit Girard avoit acheptées lesdictes chausses, cornète et chappeaulx trouverent que lesdiz florins qu’il leur avoit baillez n’estoient pas bons, ains qu’ilz estoient faulx, les retournèrent à icellui Girard qui les reprint et leur rendit lesdictes choses avecques la monnoie qu’ilz lui avoient baillée avecques lesdiz florins. Et tantost après lesdiz Girard et Jehan paièrent leur escot audit Thouars de l’un desdiz florins, lequel ilz baillèrent à l’ostesse, afin qu’elle leur retournast l’outre plus de leurdit escot à la valleur de ce que ledit florin eust peu valloir, s’il eust esté bon, et pour ce que ladicte hostesse n’avoit point lors de monnoie, ainsi qu’elle disoit, pour retourner audit Jehan Girard (sic), porta ledit florin à ung changeur dudit Thouars pour le changer et en avoir la monnoie. Lequel changeur, incontinant qu’il vit et eut ledit florin entre ses mains congneut et apperceut qu’il estoit faulx, et à ceste cause s’en vint à ladicte hostellerie avecques ladicte hostesse, pour savoir qui lui avoit baillé ledit florin. Et quant ilz furent à ladicte hostellerie, ledit changeur fist copper ledit florin par ledit Babin hostellier ou par l’un de ses varlez et fut trouvé faulx et qu’il n’estoit pas de bon aloy. Et incontinant ledit changeur l’ala dire et reve ler aux gens de nostre justice, lesquels firent venir par devers eulx ledit Girard pour savoir qui lui avoit baillé ledit florin, et pour ce qu’il confessa l’avoir apporté et aussi qu’il en fut trouvé sur lui jusques au nombre de vingt ou vingt et ung autres semblables faulx tant au monde que desdiz florins d’Arragon, il a esté prins et constitué prisonnier audit lieu de Touars et aussi y a depuis esté mise prisonnière ladicte Guillemete sa femme. Et combien que lesdiz Girart et sa femme n’ayent besoingné à faire lesdiz florins et que jamais ilz n’aient sceu la manière commant ilz ont esté faiz, fors en la manière que dit est, neantmoins, ilz doubtent que à l’occasion des cas dessusdiz on veille (sic) proceder à l’encontre d’eulx à rigueur de justice, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, en nous humblement requerans que, attendu ce que dit est et que ce qu’ilz ont fait en ceste partie, ce a esté par povreté et indigence et que en tous leurs autres faiz ou affaires ilz ont tousjours esté de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans jamais avoir esté actains ne convaincuz d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise leur impartir nosdictes grace et misericorde. Pourquoy nous, etc., voulans, etc., ausdiz Guillaume Girard et Guillemete, sa femme, et à chacun d’eulx, avons, en l’honneur et reverence de Dieu nostre createur, Nostre Dame et de Monsieur Saint Claude

L’itinéraire de Louis XI signale en effet la présence du roi à Saint-Claude les 21 et 22 avril 1482. (Vaesen et Mandrot, t. XI, p. 223.) [L.C.]

, dont sommes presentement retournez de voyaige que y avons fait en grant devocion, quicté, remis et pardonné les faiz et cas dessus diz, avecques toute peine, etc., en mettant, etc. Et les avons restituez, etc. Satisfacion, etc. Et imposons, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou ou à son lieuxtenant ou acesseur à son siège dudit Thouars, et generaulx de noz monnoys et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Belleville en Beaujoulois ou mois de may l’an de grace mil cccc. quatre vings deux et de nostre règne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Par le roy, l’arcevesque de Vienne

Astorg Aimery, d’abord évêque de Saint-Paul-Trois-Châteaux (14 août 1478), puis archevêque de Vienne (11 décembre 1480), chargé par le roi de missives en Angleterre, avant le 8 juillet 1482. Gallia christiana novissima, t. IV (1909), p. 429, 448, et Lettres de Louis XI, t. IX, p. 257. [L.C.]

et autres presens. Parent. — Visa. Contentor (sic).

MDCCXVII Juin 1482 (?)

Rémission accordée à Jean Fournier, serviteur de Louis Goulart, l’un des gentilhommes de l’hôtel, détenu prisonnier à Belleville en Beaujolais, puis à Orléans, pour avoir dérobé à son maître un cheval et une boîte contenant 30 livres tournois, au récent voyage fait, deux mois avant, par le roi et la cour à Saint-Claude. « Si donnons en mandement au prevost de nostre hostel et à tous, etc. Donné à Clery, au mois de juing l’an de grace mil CCCC quatre vings et ung, et de nostre règne le vingt et ungiesme

Sic. Il semble que l’année 21e du règne ne devrait commencer que le 22 juillet 1481. Faut-il corriger 1482, au lieu de 1481, ou 20e du règne, au lieu de 21 ? Le roi fut à Cléry seulement les trois premiers jours de juin 1481 et à partir du 8 juin 1482 (V. l’Itinéraire dans Vaesen et Mandrot, t. XI, p. 214 et 225) : il y a donc plus de probabilité pour 1482 ; d’autre part, la pièce n° 278, dans le même registre, porte pour date Cléry, juin 1482, de notre règne la 21c. Sur le voyage à Saint-Claude, voir la note de la pièce précédente. [L.C.]

. »

AN JJ. 207, n° 282, fol. 129 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 535

MDCCXVIII (10 juillet 1482)

Confirmation par Louis XI, en qualité d’héritier universel de Charles, roi de Sicile et de Jérusalem, comte du Maine, vicomte de Châtellerault, du legs fait par celui-ci dans son testament au profit de Jehan Chapperon, écuyer, panetier du roi, de la terre et seigneurie de Queue-de-Vache

La terre et seigneurie de Queue-de-Vache « assis sur la coste de la mer en nostre pays de Xanctonge » à 2 lieues de La Rochelle avait été donnée à Charles d’Anjou, comte du Maine, vicomte de Châtellerault par lettres patentes datées de Paris, au mois de mars 1464 (n.s.) ; enregistrées au Parlement de Paris, le 28 mai. Le texte en a été publié dans le recueil des Ordonnances des Rois de France, in-fol., t. XVI, p. 188. [L.C.].

avec toutes ses appartenances. « Si donnons en mandement à nos amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers, au seneschal de Xantonge, gouverneur de la Rochelle, bailli d’Aulnis et à tous, etc. Donné à Clery, le dixiesme jour de juillet l’an de grace mil CCCC quatre vings et deux, et de nostre règne le vingt et ungiesme. — Ainsi signé : Loys. Par le roy. A Robert. — Visa. Contentor. J. Duban ».

AN JJ. 207, n° 347, fol. 161 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 536

MDCCXIX Juillet 1482 (avant le 22)

Rémission obtenue par Antoine Mangarineau, écuyer, meurtrier d’un nommé Jacques Frappier, braconnier, qu’il avait surpris en train de pêcher à Asnières dans les pêcheries réservées de l’abbé de Trizay, son frère, et avec lequel il avait été obligé pour se défendre, d’en venir aux mains.

AN JJ. 207, n° 277, fol. 125 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 536-539

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Anthoine Mangari neau, escuier, aagé de vingt ans ou environ, contenant que le unzeiesme jour du mois de juing derrenier passé, il s’en alla de l’abbaye de Jart, où il estoit allé veoir ung sien frère qui y est religieux, au lieu et maisons d’Asnières deppendant de l’abbaye de Trisay

Il s’agit ici de l’abbaye de Lieudieu en Jard (canton de Talmont, Vendée), et de l’abbaye de Trizay (commune de Saint-Vincent-Puymaufrais, canton de Chantonnay, Vendée), appartenant, la première à l’ordre de Prémontré, la seconde à celui de Citeaux et toutes deux au diocèse de Luçon. Les auteurs de la Gallia christiana (t. II, col. 1444) ne connaissent aucun nom d’abbé de Trizay entre la fin du xiiie siècle et le xvie, aucune trace par conséquent de N. Mangarineau. [L.C.]

, par devers son frère qui est abbé de ladicte abbaye de Trisay, avecques lequel abbé de Trisay ledit suppliant se tint par aucun temps. Et pour ce que ledit abbé de Trisay, à cause de sadicte abbaye a de beaulx et grans deffends et pescheries en une rivière appellée l’Oyon

La rivière dont il est question ici pourrait bien être l’Yon, qui se jette dans le Lay quelques kilomètres au-dessous de Trizay. Il faut cependant reconnaître que ni le Dictionnaire des Postes, ni la carte d’État-Major, ni Cassini ne placent le lieu dit Asnières dans ces parages. [L.C.]

, esquelles pescheries nul autre que ledit abbé n’a aucun droit de pescher et prandre poisson, icellui abbé avoit fait mettre ses travaulx et engins à pescher en ladicte rivière, dedans sesdictes pescheries, et le xiiiie dudit mois de juing ledit suppliant et ung nommé Thomas Charlot, bourdier dudit abbé et demourant en ladicte maison d’Asnières, environ l’eure de huit heures de matin, se partirent dudit lieu d’Asnières pour aller ès dictes pescheries lever sesdiz travaulx et engins pour savoir se il y avoit aucun poisson prins, et pour apporter lesdiz engins, ledit Thomas Charlot monta sur une jument ; et au regard dudit suppliant, il print une sienne arbaleste et deux ou trois materactz pour tirer les oyseaulx de mer et de rivière, pour ce que c’estoit sur les marroys, sans ce qu’il eust dague ne espée ne aucun autre baston. Et s’en allèrent lesdiz suppliant et Charlot vers ladicte rivière. Et quant ledit suppliant fut près d’un villaige appellé la Grenoillère, il apperceut de loing ung homme qui peschoit esdictes pescheries et deffens dudit abbé de Trisay, son frère, et pensant que ledit homme eust ung vesseau pour lever lesdiz engins ledit suppliant qui se esmoyoit (sic) fort d’en trouver ung, monta sur ladicte jument et s’en alla jusques au lieu où estoit ledit homme. Et lui illec arrivé, il apperceut que c’estoit ung nommé Jacques Frappier, renommé et coustumier de desrober les pescheries et garennes du païs. Lequel Frappier peschoit èsdictes pescheries et deffends avec cinq lignes. Auquel Frappier ledit suppliant dist que c’estoit mal fait à lui de pescher sans le congié dudit abbé de Trisay. A quoy ledit Frappier respondit qu’il y pescheroit quiconque le voulsist veoir, et sur ce eurent lesdiz suppliant et Frappier certaines rigoureuses parolles ensemble, et tellement que ledit Frappier, qui estoit enbastonné d’une dague et d’une grosse massue de bois, se leva et tira ladicte dague et soy aproucha en courant sus audit suppliant qui estoit sur ladicte jument, et couppa icellui Frappier avec sa dague la corde de l’arbaleste dudit suppliant, combien qu’elle ne fust point bandée, tellement que ledit suppliant commença à soy en aller et departir d’illec ; mais ledit Frappier le suivoit tousjours, et à ceste cause ledit suppliant qui n’avoit aucun autre baston que ladicte arbaleste dont la corde estoit coppée, doubtant que ledit Frappier l’oultragast, appella à haulte voys ledit Thomas Charlot qui estoit loing d’illec et venoit à pié après ledit suppliant ; mais ledit Charlot ne le peut oyr pour la distance qui estoit entre eulx deulx. Et alors ledit Frappier s’aproucha plus fort dudit suppliant, et de ladicte massue qu’il avoit s’efforça le vouloir frapper, tellement que icellui suppliant fut contrainct de descendre, et en descendant tumba à terre et lui cheut sadicte arbaleste auprès de lui. Et lors ledit Frappier se gecta sur ledit suppliant et lui donna plusieurs coups tellement qui lui rompit le pousse de la main senestre, et se combatirent illec par aucun temps. Et depuis se redroissèrent sur piez, et incontinant eulx relevez, ledit Frappier courut de reschef sus audit suppliant et s’efforça le frapper de ladicte massue. Et pour ce empescher ledit suppliant reprint sa dicte arbaleste pour soustenir lesdiz coups [et] de l’estrier (sic) de ladicte arbaleste icellui suppliant frappa icellui Frappier par la poitrine et le fist cheoir d’un genoil en terre, et en se voulant redresser ledit Frappier print de rechief sadicte dague et courut sus et en voulut estoquer ledit suppliant. Lequel suppliant ce voyant donna ung coup de ladicte arbaleste sur la teste et eschine dudit Frappier, dont il cheut à terre. Et lors ledit suppliant lui osta lesdictes massue et dague et s’en revint la où estoit ledit Thomas Charlot, auquel il compta le cas tel que dessus est dit et lui bailla ladicte dague à porter, puis s’en allèrent lever lesdiz engins et travaulx qui estoient esdictes pescheries et deffens dudit abbé de Trisay. Et ne pensoient point que ledit Frappier fust mort ; toutes foiz ledit suppliant a sceu depuis que ledit Frappier, au moien desdiz coups estoit incontinant après et sur le lieu mesmes allé de vie à trespas. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du païs et n’y oseroit jamais seurement retourner, converser ne repairer, se noz graces et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant icelles. Pour quoy nous, etc., voulans, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessusdit avecques toute peine, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous noz autres, etc. Donné à Baugency, ou mois de juillet l’an de grace mil cccc. quatre vings et deux, et de nostre règne le vingt et ungiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. J. de Villebresme. — Visa. Contentor. J. Duban.

MDCCXX Août 1482

Rémission accordée à Jean de Monhet, à Guillaume et Colmet de Villars, ses neveux, et à Jean Delisle et Pierre Lenoble, qui, attaqués en l’église même de Monhet près Saint-Benoît [du Sault], par Jean de la Celle, ennemi juré dudit Jean de Monhet, Helion de la Celle, son frère, et plusieurs autres compagnons armés, avaient en leur résistant et se défendant contre eux, frappé ledit Hélion d’un coup d’épieu à la gorge, dont il mourut peu après. « Si donnons en mandement par ces presentes au seneschal de Poictou et à tous nos justiciers, etc. Donné à Baugenci, ou moys d’aoûst l’an de grace mil CCCC quatre vings deux et de nostre règne le xxiime

L’analyse de cet acte est insérée dans le présent recueil uniquement à cause de l’adresse au sénéchal de Poitou, qui avait alors juridiction sur Saint-Benoît de Sault, cf. ci-dessus, t. X. (Arch. hist. du Poitou, t. XXXV), p. 3. [L.C.]

. »

AN JJ. 208, n° 244, fol. 145 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 539-540

MDCCXXI Août 1482

Confirmation du don fait à l’église collégiale de Notre-Dame de Châtellerault par Charles comte du Maine, roi de Sicile et de Jérusalem, vicomte de Châtellerault, de l’hôtel de la Berlandière et de l’institution réglée par son testament de deux nouveaux vicaires et de deux enfants de chœur en sus de ceux qui étaient entretenues déjà dans ladite église.

AN JJ. 208, n° 247, fol. 147 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 540-543

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de noz chiers et bien amez les doyen

Ce doyen devait être Guillaume Laurens, signalé en 1483 par l’abbé Lalanne, Hist. de Châtellerault (1859, 2 vol. in-8°), t. II, p. 398. [L.C.]

et chappitre de l’eglise collegial de Nostre Dame de Chastelayrault, contenant que feu nostre frère et cousin Charles, en son vivant roy de Jherusalem et de Cecille, viconte dudit lieu de Chastelayraud

Sur Charles d’Anjou. V. Arch. hist. du Poitou, t. XXIX, p. 146, note. [L.C.]

, pour la grant, singulière, parfaicte et entiere devocion qu’il avoit et a en son vivant tousjours eue à la très glorieuse Vierge Marie et à sadicte eglise de Chastelayraud, et à ce que Dieu nostre Createur y feust de bien en mieulx servy et adorré et ladicte Vierge Marie priée et requise et qu’il fust de plus en plus participant ès service divin, prières et oraysons et autres services et biensfaiz qui se font, dient et celèbrent en ladicte eglise chacun jour, et pour l’augmentacion et acroissement dudit service divin, par son testament et ordonnance de dernière voulenté, a institué et ordonné en ladicte eglise Nostre Dame deux vicaires teneurs et deux enfans de cueur oultre et par dessus ceulx qui y sont dis pieça fondez et instituez, lesquelz il a voulu et ordonné estre entretenuz en ladicte eglise des premiers et plus clairs deniers du domaine et revenu de ladicte viconté et seigneurie de Chastelayraud, et aussi a donné et legué à ladicte eglise une maison appelée la Berlandière avec ses appartenances, située et assise près dudit lieu de Chastelayraud, ainsi que ces choses sont plus à plain contenues et declairées ès deux articles du testament dudict deffunct nostre frère, desquelz la teneur est telle :

Item, pariter legavit sive reliquit idem dominus noster rex testator ecclesie beate Marie ville de Castroayraudo quamdam ejus domum vulgariter dictam la Berlandière sitam in territorio videlicet prope eamdem villam Castri Ayraudi per (sic) imperpetuum cum juribus et pertinenciis suis quibusdem (sic) reservacione tacita vel expressa.

Item, equidem disposuit, voluit et ordinavit jamdictus dominus noster rex testator constitui, apponi, ordinari et manuteneri in eadem ecclesia Nostre Domine Castri Ayraudi duos vicarios, qui vicarii sint tenores, et duos clergenos (sic) ultra numerum consuetum, manutenendos, alimentandos ac stipendiandos, ad Dei laudem et pro servicio ipsius ecclesie per imperpetuum inde et super melioribus denaris et redditibus tocius recepte vice comitatus Castri Ayraudi postea predicte ecclesie dandis et consignandis, ita quidem quod ipsis vicaris et clergenis sit omni tempore bene et sufficienter provisum.

Au moyen desquelz lesdiz supplians ont mis et ordonnez en ladicte eglise lesdiz deux vicaires et aussi lesdiz deux enfans, qui chacun jour aident à faire le divin service en icelle ; et à ceste cause ont entencion requerir aux officiers dudit viconté que des premiers et plus clers deniers dudit revenu ilz vueillent entretenir lesdiz deux vicaires et enfans, selon et en ensuivant l’entencion dudit deffunct. Mais ilz doubtent que lesdiz officiers voulsissent de ce faire difficulté et aussi qu’ilz les voulsissent empescher en la jouissance de ladicte maison de la Berlandière et ses appartenances, se les choses dessusdictes, contenues esdiz deux articles ne leur estoient par nous confermées, ainsi qu’ilz nous ont faiz dire et remonstrer en nous humblement requerant sur ce nostre grace et provision leur estre imparties. Pour quoy, etc., qui desirons de tout nostre cueur le testament et ordonnance de dernière voulenté dudit deffunct nostre frère estre entretenu, à ce que d’iceluy nous qui sommes son heritier, puissons estre deschargez ; pour ces causes et à ce que soyons participans ès prières et oroysons, service divin et autres euvres salutaires qui se font, dient et celebrent chacun jour en ladicte eglise et que lesdiz supplians et leurs successeurs soient plus enclins à prier Dieu nostredit Createur pour les armes (sic) de nostredit frere, de noz predecesseurs, nous et noz successeurs, et pour autres [causes] et consideracions à ce nous mouvans, le contenu esdiz deux articles cy-dessus transcriptz, avons eu et avons pour agreable, l’avons ratiffié, confermé et approuvé, confermons, ratiffions et approuvons de grace especial, plaine puissance et auctorité royal par ces presentes. Par lesquelles nous donnons en mandement à noz amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers au seneschal de Poictou ou à son lieuxtenant, et à tous, etc., que en faisant joir lesdiz supplians du don et laiz de nostre dit frere et cousin et de noz presens confirmacion et aprobacion, ilz leur baillent ou facent, se mestier est, bailler la possession et saiserie de ladicte maison de la Berlandière et de ses dictes appartenances et les en facent et leurs successeurs joir et user, et aussi facent entretenir lesdiz deux vicaires et deux enfans de cueur en ladicte eglise des premiers et plus clers deniers dudit revenu et domainne de Chastelayraud perpetuellement et à tousjours, sans leur faire, etc., lesquelz de faiz avoient esté, etc. Et en rapportant ces presentes signés de nostre main ou vidimus d’icelle fait soubz seel royal unesfoiz et recongnoissance desdiz doyen et chappitre sur ce souffisant, tant seulement, nous voulons le receveur ordinaire dudit viconté de Chastelayraud en estre tenu quicte et deschargé, et tout ce qu’il aura paié et baillé pour l’entretenement desdiz deux vicaires et deux enfans de cueur estre alloué en ses comptes et rabatu de sa recepte par nosdiz gens des comptes, ausquelz nous mandons ainsi le faire sans difficulté, non obstant que ladicte maison de la Berlandière et ses appartenances, la valleur d’icelle, ainsi ce que se pourra monter et qu’il conviendra baller pour l’entretenement desdiz deux vicaires et deux enfans ne soient cy autrement declarez, que de ce ne soit levé descharge par le changeur de nostre tresor, et quelzconques ordonnances, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Meung sur Loyre, ou mois d’aoust l’an de grace mil cccc. quatre vings deux, et de nostre règne le xxiie.

Ainsi signé soubz le reply : Loys ; et dessus : Par le roy, Robert. — Visa. Contentor. Triboulet

Cet acte a été publié par M. l’abbé Lalanne dans son Histoire de Châtellerault, Châtellerault, 1859, 2 vol. in-8°, t. I, p. 600-604, d’après l’original dans les Archives de la Vienne.

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MDCCXXII Octobre 1482

Rémission obtenue par Pierre de La Nozaye, de Lesigny-sur-Creuse, coupable d’un meurtre. Soupçonnant Denis Charlot d’avoir commis un vol dans son moulin, il alla de nuit en compagnie de ses beaux-frères et de plusieurs autres perquisitionner dans la maison de celui-ci, où il en trouva aucun des objets dérobés. Mais plusieurs habitants de Pressigny étant venus au secours dudit Charlot, il y eut une mêlée dans laquelle ce dernier fut frappé mortellement par ledit de La Nozaye.

AN JJ. 207, n° 142, fol. 70 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 543-547

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, Nous avoir receue l’umble supplicacion de Pierre de La Nozaye, povre homme de braz, chargé de famme et enfans, demourant en la parroisse de Lésigny sur la rivière de Creuse, contenant que la nuit de mardi des foiriez de Penthecouste derrnière passée, aucuns larrons et malfaicteurs avoient prins et furtivement emporté de son molin ung quartier et demi de lart, trente cinq solz tournois, deux aulnes de drapt de bureau camelin et neuf boisseaulx de mousture appartenans à ses beauffrères, et comme le lendemain au matin on avoit dit à Jehan Chevreau le jeune que Philippon Charlot et Denis Charlot son filz avoient fait lesdiz larrecins et que le jour precedant on les avoit veuz tournoyer et visiter ledit molin et que dès piéça ilz estoient renommez d’estre larrons, icellui suppliant dist audit Jehan Chevreau puisné, que s’il se doubtoit que aucunes gens eussent fait ledit larrecin, qu’il les lui nommast et qu’il admeneroit des gens pour les sercher et feroit tant qu’il les trouverroit et rencontreroit, et puis recouvreroit les choses qu’on leur avoit prinses et emblées. A quoy ledit Chevreau puisné respondit que c’estoit bien dit et qu’il lui amenast des gens. Et incontinant icellui suppliant s’en alla audit lieu de Lésigny, et ce pendant ledit Chevreau se transporta par devers Jehan Chevreau l’ainsné, son frère, estant en ung autre molin près d’illec et lui raconta ledit larrecin ainsi fait en leurdit molin et commant ledit suppliant estoit allé querir des gens qu’il devoit amener au soir, pour faire dilligence de trouver lesdiz larrons ; lequel lui responde qu’il s’en allast devant et il se rendroit à eulx sur le soir, ce qu’il fist. Et ce soir vindrent et arrivèrent ledit suppliant, Jehan Chevreau, le plus jeune frère desdiz Chevreaux, Jehan Heliot, Jehan Odet et Jehan Debaru qui se assemblèrent audit molin et illec delibererent et conclurent ensemble que icelle nuyt ilz yroient en l’ostel dudit Phelippon Charlot estant près dudit molin, pour sercher en sa maison se lui ou Denis Charlot, son filz, avoient prins et emporté l’argent, lart, blé et drap dessusdiz. Et de fait allèrent lesdiz suppliant, Chevreaulx et autres dessusdiz, armez et embastonnez d’arbalestes, javelines et bracquemars pour la seureté de leurs personnes et non pas en entencion de mal faire, environ l’eure de unze heures d’icelle nuyt au rays de la lune, en la maison dudit Phelippon Charlot. Et en icelle maison entrèrent lesdiz Chevreaulx (sic) le jeune, Jehan Alyot et Jehan Odet, et lesdiz Chevreaux ayans leurs arbalestes bandées et des materaz dessus non ferrez, demourèrent dehors avecques ledit suppliant et autres leurs complices ; et serchèrent ceulx qui estoient entrez en ladicte maison s’ilz trouverroient lesdiz argent, blé, lart et drap, qui avoit esté prins ondit molin. En laquelle maison ilz ne trouverent riens de ce qu’ilz demandoient et après s’en allèrent en l’ostel dudit Denis Charlot, filz dudit Philippon, distant dudit hostel de trois traictz d’arc ou environ, pour semblablement sercher se ilz trouveroient ce qui leur avoit esté prins ondit molin ; et en icelle maison entrerent lesdiz Jehan Chevreau le plus jeune, Jehan Alyot et Jehan Odet, et lesdiz Chevreaulx et suppliant demourèrent dehors avecques leurs arbalestes bandées, chargées de matractz non ferrez. En laquelle maison ilz ne trouvèrent semblablement riens de leurs biens. Et s’en fuyt ledit Denis en l’ostel de Estienne Boisguyon distant d’illecques d’un traict d’arc ou environ, et en s’en fuyant lesdiz suppliant et Chevreaux et leurs compaignons le poursuivirent et le prindrent, et le lya par les mains d’une corde ledit Jehan Chevreau le plus jeune et le tindrent assis sur une souche de bois en une court estant près l’ostel dudit Estienne Boisguyon, afin que ledit Denis Charlot ne s’en fuyst et qu’il n’empeschast les autres de sercher sadicte maison. Et pour ce que peu après survindrent sur eulx plusieurs gens de Precigny, armez et embastonnez à l’aide et secours dudit Denis Charlot, parce que le père d’icellui Denis estoit allé audit lieu de Precigny crier que les brigans estoient en sa maison, ledit suppliant et sesdiz compaignons, ainsi qu’ilz visdrent venir lesdiz de Precigny sur eulx tous esmeuz leur disdrent qu’ilz estoient les Chevreaulx et leur prièrent qu’ilz ne les frappassent point et qu’ilz n’estoient illec venuz que pour querir lesdictes choses desrobées. Et pour ce que à la prière desdiz suppliant et ses compaignons ne voulloient obtemperer, mais disoient bien telles parolles ou semblables : « Frappez, frappez et tuez tout, car ilz sont tous brigans ! » iceulx suppliant, sesdiz beauffrères et leurs compaignons se misdrent en deffense à l’encontre d’eulx et s’entredonnèrent plusieurs coups et collées les ungs aux autres. Et après ce que lesdiz de Precigny eurent blecé ledit suppliant …

Mots passés au registre. [L.C.]

, et donna ung coup de bracquemart audit Denis ou corps, duquel ledit Denis, par faulte de bon gouvernement ou autrement, cinq heures après ou environ alla de vie à trespas. Pour occasion duquel cas ledit suppliant s’est absenté du païs où il n’oseroit jamais bonnement converser ne repairer, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, en nous humblement requerant que, attendu ce que dit est et qu’il a esté tout le temps de sa vie de bonne vie, renomée et honneste conversacion, sans jamès avoir esté actainct ne convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise sur ce lui impartir nosdictes grace et misericorde. Pour quoy Nous, etc., voulans, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessusdit, avecques toute peine, etc., en mettant au néant, etc. Et l’avons restitué, etc. Satisfacion, etc. Si donnons en mandement au bailli de Touraine et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, ou mois d’octobre l’an de grace mil cccc. quatre vings et deux, et de nostre règne le xxiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. J. Foucher. — Visa. Contentor. Texier.

MDCCXXIII Octobre 1482

Don d’un droit d’usage en la forêt de Moulière et création d’un sceau aux contrats et de tabellions, ainsi que de trois foires l’an et d’un marché chaque semaine à Beaumont, en faveur d’Abel de Brizay, écuyer d’écurie du roi, seigneur du lieu.

AN JJ. 207, n° 152, fol. 73 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 547-550

Loys, etc. Savoir faisons à tous presens et avenir, que nous ayans regard et consideracion aux grans, continuelz, agreables et recommandables services que nostre chier et bien amé escuier d’escuierie Abel de Brisay, seigneur de Beaumont

Sur Abel de Brisay, seigneur de Beaumont, né en 1446, mort en 1503, marié à la marquise de Menou, voy. Beauchet-Filleau, Dictionnaire des familles du Poitou, nelle éd., t. I, p. 794, notice où l’octroi du droit d’usage en forêt de Moulière, qui fait l’objet d’une des dispositions du présent acte, est attribué, par erreur, à Charles VIII, qui dut seulement le confirmer. [L.C.]

, nous a par cy devant faiz dès son jeune aage, fait et continue chacun jour on fait de noz guerres, alentour de nostre personne en noz plus grans et principaulx affaires et esperons que encores face le temps avenir voulans iceulx aucunement recongnoistre envers lui et eslever sesdictes terres en honneurs et preeminences, à icellui, pour ces causes et consideracions et autres à ce nous mouvans, avons octroyé et octroyons, voulons et nous plaist, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, qu’il puisse et lui loise faire ordonner et establir audit lieu de Beaumont et seigneurie dudit lieu, en laquelle de toute ancienneté il a droit de toute justice, haulte moienne et basse et aussi y souloit avoir droit de chastellenie, seel aux contractz et tabellions pour recevoir et passer toutes manières de contractz, obligacions et autres lettres, pour en joir perpetuellement par lui et ses successeurs, seigneurs dudit lieu de Beaumont, ensemble, des droiz et prerogatives qui en deppendent, tout ainsi que les autres seigneurs aians seel aux contractz ont accoustumé joyr et user ; et lequel seel et tabellions nous avons creez, ordonnez et establiz, creons, ordonnons et establissons audit lieu de Beaumont. Et oultre lui avons donné et octroyé, donnons et octroyons de nostredicte grace par cesdictes presentes, pour lui et ses successeurs, seigneurs desdiz lieux de Beaumont et du lieu de Bram, droit de usaige en nostre fourest de Moulière, et voulons que lui et ses successeurs seigneurs desdiz lieux, puisent perpetuelment prandre en ladicte forest tout le bois qu’il leur sera neccessaire tant pour leur chauffage que pour bastir, construire et ediffier esdiz lieux, et duquel droit ses predecesseurs, seigneurs dudit lieu de Beaumont, ont jouy d’ancienneté, et lequel droit d’usage lui et ses successeurs tiendront de nous à foy et hommage à cause de nostre chastel de Poictiers et seront tenuz le faire à chacune muance de seigneur et vassal, et aussi à la recepte ordinaire de Poictiers paier ung esparvier, sans autre charge ou reddevance quelconque. Et pour ce que audit lieu de Beaumont frequentent et affluent chacun jour plusieurs marchans, par quoy, pour le bien et augmentacion de ladicte seigneurie et des habitans d’environ, seroit besoing et necessité establir aucunes foires et marché ; nous, ces choses considerées, desirans de plus en plus augmenter ladicte seigneurie de Beaumont en honneurs et prerogatives, avons audit lieu de Beaumont creées, ordonnées et establies, creons, ordonnons et establissons, de nostre plus ample grace et auctorité trois foires l’an et ung marché par chacune sepmaine, c’est assavoir lesdictes foires l’une le jour et feste monsieur sainct Blaise qui est le iiie jour de fevrier, la seconde le jour et feste monsieur sainct Georges, qui est le xxiiie jour de avril, et la tierce le jour et feste du glorieulx martir monsieur sainct Laurens, qui est le dixiesme jour d’aoust, et ledit jour de marché un jour de mardi par chacune sepmaine ; et voulons que ausdiz jours lesdiz foires et marché soient doresnavant perpetuellement tenues et que tous marchans et autres qui les frequenteront et à icelles afflueront y puissent vendre, debiter et eschanger toutes denrées et marchandises licites et honnestes et qu’ilz joyssent de telz et semblables previlleiges, franchises et libertez qu’ilz ont acoustumé joir et user ès autres foires et marchez dudit païs. Et pour icelles tenir, voulons et nous plaist que ledit Abel de Brizay puisse faire construire et eddiffier halles en tel lieu ou lieux qu’il verra ad ce estre propices et convenables. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers, au seneschal de Poictou, maistre et reformateur general de noz Eaues et forest, et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chacun d’eulx, si comme à lui appartiendra que de noz presens grace et octroy ilz facent et souffrent ledit Abel et sesdiz successeurs, seigneurs desdiz lieux, joir et user paisiblement, perpetuellement et à tousjours, sans leur faire ou mettre, ne souffrir estre fait ou mis aucun destourbier ou empeschement ; au contraire lequel se fait ou mis leur estoit, mettent ou facent mettre incontinant et sans delay à plaine delivrance et au premier estat et deu, en faisant crier et publier lesdictes foires et marché ès lieux acoustumez et ainsi qu’il est acoustumé faire en tel cas, et faisant joir les marchans qui les frequenteront de telz et semblables previlleges, franchises et libertez qu’ilz ont acoustumé joir et user ès autres foires et marchez dudit païs, pourveu toutesvoyes que ausdiz jours ne à quatre lieues à l’environ n’y ait aucunes foires et audit jour de mardi à deux lieues aucun marché, à qui lesdictes foires et marché puissent nuyre ou prejudicier. Et en rapportant ces presentes signées de nostre main ou vidimus d’icelles fait soubz seel royal et recongnoissance de nostredit chambellan sur ce suffisante pour une foiz tant seullement, nous voulons tous noz receveurs à qui ce pourra toucher en estre perpetuellement tenuz quictes et deschargez par nosdiz gens des comptes, sans aucune difficulté, non obstant quelzconques ordonnances, restrinctions mandemens ou deffences à ce contraires. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné au Plesseys et du Parc les Tours, ou mois d’octobre l’an de grace mil cccc. quatre vings et deux, et de nostre règne le vingt et deuxiesme.

Ainsi signé : Loys. — Par le roy. A. Robert. — Visa. Contentor. Bernart.

MDCCXXIV Octobre 1482

Lettres d’amortissement d’une rente annuelle de cent dix livres tournois assignée sur le fief des Essarts, par Nicole de Bretagne, comtesse de Penthièvre, aux chanoines de l’église collégiale de Saint-Maurice du château de Montaigu pour une fondation de douze messes par semaine faite en ladite église par Jeanne de Bretagne, sa tante.

AN JJ. 207, n° 295, fol. 135 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 550-553

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre très chère et amée cousine Nicole de Bretaigne, contesse de Poinctièvre

Nicole de Blois, dite de Bretagne, fille de Charles de Blois (de la maison Chatillon) et d’Isabelle de Vivonne, mariée en 1437 à Jean de Brosse, auquel elle apporta la comté de Penthièvre. (V. le P. Anselme, Hist. généal. de la Maison de France, t. V, p. 573, et VI, p. 105.) [L.C.]

, contenant que feue Jehanne de Bretaigne

Jeanne de Blois, dite de Bretagne, fille de Jean de Blois et de Marguerite de Clisson, petite-fille de Charles de Blois, l’un des prétendants de la guerre des deux Jeanne, et sœur de Charles de Blois dont il est question à la note précédente, fut mariée à Robert de Dinan, seigneur de Châteaubriant, qui mourut en 1429 sans enfants. (Kerviler, Bio-bibliographie bretonne, t. IV, p. 16, et t. XVI, p. 185.) [L.C.]

, tante de nostredicte cousine suppliante, par son testament et ordonnance de derrenière vovlenté, fonda et ordonna à sa devocion et pour prier Dieu pour les ames de ses predecesseurs, d’elle et ses successeurs, douze messes estre dictes et celebrées perpetuellement, par chacune sepmaine, en l’eglise collegial monsieur Sainct Maurice estant au chastel de Montagu, et aussi pour l’entretenement du luminaire de ladicte eglise ; pour la dotacion et fondacion desquelles messes et aussi pour l’entretenement dudit luminaire, icelledicte Jehanne de Bretaigne donna et lega en aulmosne cent dix livres tournois de rente universanment sur tous et chacuns ses biens, promettant icelles dictes cent dix livres tournois de rente admortir. Et incontinant ou bien tost après, sans avoir assigné aux doyen et chappitre de ladicte eglise rentes et revenues pour lesdictes cent dix livres tournois de rente pour la continuacion et entretenement desdictes messes et luminaire, alla ladicte Jehanne de vie à trespas, delaissée nostredicte cousine Nicole de Bretaigne, suppliante, son heritière. Laquelle voulans acomplir le testament de sadicte tante et acquicter sa conscience, et que par arrest de nostre court de Parlement

La procédure durait depuis longtemps entre le chapitre de Saint-Maurice de Montaigu et la comtesse de Penthièvre. Celle-ci refusait de donner au chapitre une assielte à la rente léguée par Jeanne de Bretagne. Dès le 6 avril 1473, selon les registres du Conseil du Parlement (Arch. nat., X1a 1486, fol. 50 v°), la Cour, confirmant une première sentence, dont nous ignorons la date, condamnait Jean de Brosse et sa femme à asseoir audit chapitre les dites 110 livres de rente sur les terres et seigneuries de Bournejean, Puymaufroy et les Pineaulx et autres situées en Poitou, en Anjou et en Saintonge, où, si ces terres n’y suffisaient, sur celles de Paluau, Chasteaumur, les Défans et le Fié l’Evesque en Poitou, et Fourras en Saintonge. Les lettres d’amortissement d’octobre 1482, que nous publions, semblent avoir été obtenues par la Ctesse de Penthièvre, précisément pour décharger ses domaines de la rente en question, et le chapitre ne s’y laissa pas prendre : il n’accepta pas le fief des Essarts, offert par Nicole, et le 31 mai 1483, toujours d’après le Conseil du Parlement (XIa 1490, fol. 305 v°), obtenait du Parlement une nouvelle sentence en sa faveur. Nous ignorons la fin de cette affaire. Ce qui précède suffit à montrer que la volonté d’exécuter le testament de sa tante n’était pas très spontanée chez Nicole de Bretagne. [L.C.]

elle a esté condampnée de ainsi le faire, et que doresenavant lesdictes messes soient perpetuellement dictes et celebrées, ainsi que sadicte tante l’avoit et a ordonné, a nostredicte cousine suppliante, en ensuivant la teneur et ordonnance desdiz testament et arrest, baillé et aumosné avsdiz doyen et chappitre de ladicte eglise, pour la continuacion desdictes messes et entretenement dudit luminaire, ladicte somme de cent dix livres tournois de rente annuelle et perpetuelle, et pour icelle leur a baillé et delaissé apperpetuité ung fief à elle appartenant, appellé le fief des Essars assis en ladicte chastellenie de Montagu, tant en la Marche que auprès dudit lieu de Montagu, Chavaignes, que ailleurs en ladicte chastellenie, tenu et mouvant de nous par hommaige à cause de nostre chastel et chastellenie dudit lieu de Montagu, et tant ainsi et par la forme et manière que elle et ses predecesseurs ont acoustumé joir dudit fief et ses appartenances quelque part qu’il soit situé et assis, sans riens à elle y retenir, ainsi que plus à plain est contenu ès lettres passées entre nostredicte cousine et lesdiz doyen et chappitre sur ce faictes et passées. Mais elle doubte que le temps avenir au moien des ordonnances royaulx faictes sur le fait des francs fiefs et nouveaulx acquestz ou autrement on vueille contraindre lesdiz doyen et chappitre à mettre et vuider hors de leurs mains ledit fief et rente comme de main morte, et les composer à aucune finance, se nostre grace ne lui estoit sur ce impartie, si comme elle dit, humblement requerant icelle. Pourquoy nous, les choses dessusdictes considerées, qui desirons de tout nostre cueur et affection l’augmentacion et acroissement du service divin, inclinans à ceste cause liberallement à la supplicacion et requeste de nostredicte cousine, en faveur de la proximité de linaige dont elle nous attient, ledit fief des Essars et choses ainsi baillées par nostre dicte cousine pour lesdictes cent dix livres tournois de rente, comme dit est, avons admorties et [à Dieu] dediées, et par ces presentes, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, admortissons et à Dieu et à monsieur Sainct Maurice et à ladicte eglise dedions, pour les tenir, posséder, et exploicter par lesdiz doyen et chappitre perpetuellement, plainement et paisiblement, les fruiz, prouffiz, revenues et emolumens, sans ce que, au moien desdictes ordonnances ne autrement, pour quelque cause ou occasion que ce soit, ilz soient ne puissent estre, ores ne pour le temps avenir contrains à les mettre ne vuider hors de leurs mains, ne pour ce paier à nous ne à nosdiz successeurs aucune finance ou indampnité. Et laquelle finance, à quelque somme qu’elle se puisse et pourra monter, nous avons donnée et quictée, donnons et quictons à nostredicte cousine, de nostre plus ample grace, par cesdictes presentes, lesquelles nous avons pour ce signées de nostre main. Si donnons en mandement à nos amez et feaulx les gens de noz comptes et tresoriers, au …

Trois ou quatre mots en blanc sur le registre.

et à tous, etc., que de noz presens grace et admortissement ilz facent, seuffrant et laissent lesdiz doyen et chappitre joir et user perpetuellement, plainement et paisiblement, sans leur faire, mettre ne souffrir estre fait ou mis, ores ne pour le temps avenir, aucun destourbier ou empeschement au contraire ; lequel, se fait, mis ou donné leur estoit, mettent où facent mettre incontinent et sans delay au premier estat et deu, nonobstant que ladicte finance ne la valleur et estimacion d’icelle ne soit cy autrement declairée, que de ladicte valleur ne soit levée descharge, selon l’ordre de noz finances, et quelzconques ordonnances, restrinctions, mandemens ou deffenses à ce contraires. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné au Plesseys du Parc les Tours, ou mois d’octobre l’an de grace mil cccc. quatre vings et deux, et de nostre règne le xxiie.

Ainsi signé : Loys. Par le roy, Gillebert. — Visa. Contentor. F. Texier.

MDCCXXV Novembre 1482

Rémission octroyée à Jean Laisné, orfèvre, prisonnier à Poitiers, pour avoir fabriqué de la fausse monnaie.

AN JJ. 207, n° 185, fol. 88 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 554-556

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Jehan Laisné, orfevre, aagé de xxv. ans ou environ, à present detenu prisonnier en noz prisons de Poictiers, contenant que puis quatre ans en ça ou environ, lui estant en l’ostel du seigneur de Lestrac

Il n’est pas possible, faute de données sur la région où peut se trouver la seigneurie de Lestrac, dont le nom ne figure pas au Dictionnaire des Postes, d’identifier le seigneur dont il est ici question. Il est presque certain que ce n’est pas un Poitevin, et c’est tout à fait par hasard que Laisné, ouvrier ambulant, a passé de chez lui en Poitou. [L.C.]

, où il faisoit de la vaisselle d’argent et autre orfavrerie, vint audit Jehan Laisné ung appellé Pochon

Il n’a pas été possible de trouver trace aux Arch. nat., dans Z1b 30 (juridiction criminelle de la Cour des monnaies), d’un procès fait à un nommé Pochon comme faux monnayeur vers 1478. [L.C.]

, receveur dudit lieu de Lestrac pour ledit seigneur de Lestrac lequel demanda à icellui Laisné s’il sauroit faire des fers et coings pour faire nobles et que s’il les lui savoit bien faire, qu’il le paieroit bien. Lequel Laisné lui respondit qu’il les lui feroit très bien et qu’il lui baillast ung noble de la façon qu’il le vouloit. Et lors ledit receveur bailla audit Laisné ung noble à la rose ; lequel Laisné incontinant se mist à faire lesdiz fers, pille et coings, et les tailla tous prestz, et firent lui et ledit receveur certaine quantité de nobles d’argent fin que ledit Laisné bailla audit receveur et sembloit que lesdiz nobles feussent d’or, mais ilz n’estoient que dorez par dessus seullement. Et en bailla ledit receveur audit Laisné vingt ou vingt quatre livres pour sa peine d’avoir fait lesdiz fers et coings, et aussi pour lui avoir aprins l’abillité et science pour ce faire ; et aussi lui bailla quatre pièces desdiz faulx nobles qu’ils avoient faiz. Et depuis ledit Jehan Laisné, lui estant audit lieu de Lestrac, trouva ung aveugle lequel enseigna audit suppliant à faire fondre ung marc d’argent avecques trois marcs de cuivre et de les faire devenir aussi blancs comme si s’estoit argent fin. Lequel Laisné depuis se trouva en nostre ville de Poictiers, en la compaignie de Raymond et Damiens

Sic. Un prénom omis.

, frères, et d’un nommé Morice Charlot, lesquelz tous ensemble firent en l’ostel dudit Charlot près Chastellerault quatre ou cinq marcs dudit faulx argent, et ce fait s’en vindrent en nostre ville de Tours avecques ledit faulx argent, lequel ilz portèrent au maistre de noz monnoyes audit Tours et lui demanderent s’il voulloit poinct achepter ledit faulx argent lequel respondit qu’il l’achepteroit voulentiers, mais qu’il l’eust essayé. Et lors ledit suppliant et sesdiz compaignons lui dirent qu’ilz ne povoient pas attendre et atant s’en allèrent d’illec. Et puis naguères ledit Laisné se trouva au lieu de Chavigné, en l’ostellerie ou pend l’enseigne Sainct-Jacques, et illec cuida changer ung desdiz faulx nobles que lui avoit baillé et laissé ledit receveur dessus nommé, et ainsi qu’il le vouloit changer, fut prins et constitué prisonnier par l’un des gardes de noz monnoyes, nommé Guillaume de Bellac

Guillaume de Bellac ne figure pas parmi les archers gardes des monnaies appartenant presque tous au xviiie siècle, dont les dossiers sont conservés aux Arch. nat. (Z1b 789). Les provisions d’offices, dans la même série, commencent seulement à l’année 1498. [L.C.]

et mené prisonnier audit lieu de Poictiers où il est a present detenu à grand povreté et misère en voye d’y finir miserablement ses jours, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce preallablement imparties ; humblement requerans que, attendu le jeune aage dudit Jehan Laisné et qu’il ne fist ne commist jamais autre villain cas, blasme ou reprouche, mais s’est tousjours bien et honnestement gouverné et conduit en sondit mestier d’orfèvre, il nous plaise nostredicte grace et misericorde lui impartir. Pour quoy nous, etc., voulans, etc., audit Jehan Laisné avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessusdit, avecques toute peine, etc. Sauf, etc. Donné au Plesseys du Parc lez Tours, ou mois de novembre l’an de grace mil cccc. quatre vings et deux, et de nostre règne le vingt et deuxiesme.

Ainsi signé : Par le roy, en son conseil, ouquel le conte de Clermont, le sire de Beaujeu, le grant seneschal de Normandie, maistre Simon Radin

Il faudrait lire « le comte de Clermont, sire de Beaujeu », puisque ces deux titres appartenaient alors à un même personnage, Pierre de Bourbon (cf. Lecoy de la Marche, Titres de la Maison ducale de Bourbon, t. II, n° 6.797. — Sur Jacques de Brézé, grand sénéchal de Normandie, voy. ci-dessus, Arch. hist. du Poitou, t. XXXVIII, p. 210. — Sur Simon Radin, conseiller au Parlement de Paris, voy. Vaesen, Lettres de Louis XI, t. IX, p. 310. [L.C.]

et autres estoient. M. Courtin. — Visa. Contentor. Budé.

MDCCXXVI Décembre 1482

Lettres de naturalisation données en faveur de Guillaume Goupil, écuyer, natif d’Écosse, avec permission de disposer de ses biens acquis ou à acquérir en France par testament ou autrement, comme bon lui semblera.

AN JJ. 207, n° 204, fol. 95 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 556-558

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre chier et bien amé Guillaume Goupil

Les auteurs de la nouvelle éd. du Dictionnaire des familles du Poitou, t. IV, p. 296, donnent 3 textes relatifs à un ou à des personnages nommés Guillaume Goupil : un archer en 1477, un sr de la Ratonnière en 1483, un sr du Theil en 1485. [L.C.]

, escuier, natif du païs d’Escosse, contenant que puis aucun temps ença il est venu demourer en nostre royaume et s’est mis en nostre service, ouquel il a acquis aucuns biens, en esperance d’y faire sa residence et y demourer le demourant de ses jours ; mais à l’occasion de ce qu’il n’est pas natif de nostredit royaume, il doubte que après son decès on voulsist mettre empeschement en sesdiz biens et les prandre de par nous ou autres, comme biens aubeins, et en frustrer ses heritiers, ou lui obicer que d’iceulx il ne puisse disposer par testament ou ordonnance de derrenière voulenté, se nos grace et provision ne lui estoient sur ce imparties, si comme il dit, en nous humblement requerant iceulx. Pour quoy nous, ces choses considerées et mesmement les bons et agreables services que ledit suppliant nous a fait, par cy devant, et esperons que encores face le temps avenir, à icellui, pour ces causes et consideracions et autres à ce nous mouvans, avons octroyé et octroyons de grace especial, plaine puissance et auctorité royal par cesdictes presentes, voulons et nous plaist qu’il puisse et lui loise acquerir en nostredit royaume telz biens meubles et immeubles qu’il y pourra licitement acquerir, et d’iceulx, ensemble de ceulx qu’il y a jà acquis, joir et user, ordonner et disposer par testament et ordonnance de derrenière volunté et autrement, ainsi que bon lui semblera, et que sa femme, enfans et heritiers, qu’il a de present ou pourra avoir ou temps avenir lui puissent succeder et apprehender les biens meubles et immeubles de sadicte succession, tout ainsi et par la forme et manière que se luy et sesdiz hoirs estoient natifs de nostredit royaume. Et quant adce les avons habilitez et habilitons de nosdictes grace et auctorité, par cesdictes presentes, sans ce que au moien des ordonnances royaulx faictes sur le fait des francs fiefz et nouveaulx acquestz ne autrement, pour quelque cause, couleur ou occasion que ce soit, ilz soient ne puissent estre contrains à nous paier aucune finance ; et laquelle finance, à quelque somme qu’elle se puisse ou pourra monter, nous lui avons, en faveur desdiz services, donnée et quictée, donnons et quictons par cesdictes presentes lesquelles nous avons pour ce signées de nostre main. Si donnons en mandement, par ces presentes, à noz amez et feaulx gens de nos comptes et tresoriers, au seneschal de Poictou et à tous, etc., que ledit suppliant

Suppléez : Ses femmes et enfans, pour le sens.

et chacun d’eulx, ensemble leurdiz hoirs, successeurs et ayans cause ilz facent, seuffrent et laissent joir et user de noz presens grace, congié, licence et octroy plainement et paisiblement, sans leur faire ne seuffrir estre fait aucun destourbir ou empeschement, au contraire lequel se fait, mis ou donné, etc., nonobstant que ladicte finance, ne la valleur et estimacion d’icelle ne soit cy autrement declairée, que de ladicte valeur ne soit levée descharge, selon l’ordre de noz finances, et quelzconques ordonnances, restrinctions, mandement et deffenses à ce contraires. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné au Plesseys du Parc lez Tours, ou mois de decembre l’an de grace mil cccc. quatre vings et deux, et de nostre regne le vingt et deuxiesme.

Ainsi signé : Loys. Par le roy. A. Robert. — Visa. Contentor.

MDCCXXVII Décembre 1482

Lettres patentes portant union au domaine de la couronne des ville et vicomté de Châtellerault, et établissement dans ladite ville d’un siège royal qui prendra le nom de Gouvernement de Châtellerault et ressortira directement au Parlement de Paris.

AN JJ. 209, n° 229, fol. 125 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 558-562

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, comme puis nagueres et ung an ou environ, feu Charles d’Anjou

Sur Charles II d’Anjou, v. ci-dessus (n° MDLXII). [L.C.]

en son vivant roy de Cecille, conte du Maine et de Provence et viconte de Chastellerault, nostre frère et cousin, par son testament ou ordonnance de derrenière volonté, nous eust fait, constitué et ordonné son heritier universal, et entre autres choses par sondit testament nous eust delaissé ledit viconté de Chastelleraud, pour icellui estre joinct et uny à la couronne de France, sans ce que il en peust jamais estre osté ne separé ; depuis lequel trespas, nous eussions differé et delayé de accepter ledit laiz d’icellui viconté, soubz umbre de certains troubles et empeschemens qui autresfoiz avoient esté mis à feu le conte du Maine, en son vivant nostre oncle et pere dudit roy de Cecille derrenier trespassé, touchant ledit viconté, jusques à present que avons esté deuement informez que iceulx empeschemens avoient esté ostez du vivant dudit feu vicomte (sic) du Maine, nostre oncle, par le moien des bons et vraiz tiltres que il avoit en icellui viconté de Chastellerault, qui ont esté trouvez après son decès, ainsi que par les gens de nostre Grant Conseil, par lesquelz avons fait veoir et visiter iceulx droiz et tiltres, nous en avons [esté] deuement acertainez. Pour ce est il que nous, ayant regard et consideracion à la voulenté de feu nostredit frère et cousin le roy de Cecille, viconte dudit viconté de Chastellerault, qui a voulu icellui viconté estre uny à la couronne de France, voulans à ceste cause icellui viconté de Chastellerault essaucer, eslever, decorer et ameliorer, et mesmement nostredite ville de Chastellerault, ou il y a très beau logis, amenable et delectable bien et honneste demoure, assise en très bonne et belle situacion de païs, environnée et circuye de beaulx et plaisans chasteaulx, places et maisons de plaisance alentour et de tous les coustez d’icelle ville, laquelle est aussi assise en grant trespas des païs de Picardie (sic), Guyenne, Bretaigne, Normendie et Lyonnois

On attendrait plutôt ici la Touraine et l’Anjou que la Picardie et le Lyonnais. Il faut sans doute entendre, comme le mot trespas le laisse supposer, que Châtellerault se trouve sur la route que suivaient habituellement beaucoup de gens, se rendant d’une des provinces en question à une autre. [L.C.]

, et près de noz villes et chateaulx de Tours, Poictiers, Chinon, Loches et Emboise, en quelz lieux qui sont près du milieu des extremitez de nostre royaume de toutes pars, esperons que nous et nostre très cher et très amé filz Charles, daulphin de Viennois, y ferons partie du temps noz habituacions et demourances, et à ce que icelle nostre ville et viconté de Chastellerault se puissent mieulx et en brief reffaire et augmenter ; pour ces causes et consideracions et autres à ce nous mouvans, de nostre propre mouvement, plaine puissance et auctorité royal, avons iceulx noz ville et viconté dudit Chastellerault uniz, joings et mis, unissons, joingnons et mettons, par ces presentes, a nostre demaine et à nostredicte couronne de France, sans que jamais, pour quelconque cause ou occasion que ce soit, ilz en puissent estre ostez, separez, desjoincts ne mis hors en aucune manière. Et de nostre plus ample grace, propre mouvement et auctorité royal, avons voulu, ordonné et declairé, voulons, ordonnons et declairons que en nostre dicte ville de Chastelleraud y ait doresenavant sieige royal qui se appellera le Gouvernement de Chastellerault, qui y sera tenu et exercé par nostre amé et feal conseiller et chambellan Galehault d’Aloigne

Sur Galehaut d’Aloigny, voy. Arch. hist. du Poitou, t. XXXVIII, p. 289, une notice très complète. [L.C.]

, chevalier, seigneur de la Groye, et maistre de nostre hostel, lequel, depuis que ledit viconté est venu en noz mains, nous avons fait gouverneur et cappitaine de nosdiz ville et viconté, et par ses successeurs (sic) et gouverneurs dudit lieu, ou leurs lieuxtenans. Et lequel gouverneur, present et avenir, ou son lieutenant, avec la principalle auctorité et congnoissance de nostre justice et pollice audit lieu, comme ont noz autres gouverneurs, seneschaulx et bailliz des seneschaucées et bailliaiges royaulx de nostre royaume. Et lequel siège de gouverneur de sadicte juridicion audit lieu de Chastellerault ressortira directement et sans moien par appel et (sans)

Le mot sans est supprimé, comme l’exige le sens, dans le texte publié par les Ordonnances et par Lalanne. [L.C.]

en ressort en nostre court de Parlement, en laquelle nous voulons qu’il soit intitulé siège royal, comme les autres sieiges des autres gouverneurs, seneschaulx ou baillifs royaulx de nostredit royaume, et que le juge ordinaire dudit lieu de Chastellerault, qui y a acoustumé estre, ait la congnoissance seulement de l’ordinaire d’iceulx noz ville et viconté, et duquel le ressort et les appeaulx ressortiront directement par devant ledit gouverneur ou sondit lieutenant, sans ce que les appeaulx tant dudit juge qui souloient ressortir par devant le seneschal (sic) dudit chastel qui y a esté par cy devant, ne ceulx dudit gouverneur à present ou lieu dudit seneschal, ressortissent plus doresenavant, ne pas devant nostre seneschal de Poictou ; ains ressortiront ceulx dudit juge ordinaire par devant ledit gouverneur de Chastellerault ou sondit lieutenant, et ceulx dudit gouverneur directement et sans moien en nostre dicte court de Parlement, comme dit est, et tout ainsi que font ceux des autres gouverneurs (sic) seneschaucées ou bailliaiges royaulx de nostredit royaume. Et avecques ce, que iceulx habitans de nostre dicte ville de Chastellerault soient et demeurent noz subgectz sans moien, et qu’ilz joyssent de telz et semblables previlleiges et exempcions que font noz autres subgectz sans moien de nostredit royaume ; et lesquelz dès a present nous voulons estre mis, prins et tenuz en nostre protection et sauvegarde especial, toutes foiz qu’ilz le requerront, par noz lettres de sauvegarde qu’ilz pourront avoir et obtenir de nostre Chancellerie, tout ainsi que sont et ont acoustumé estre noz autres subgectz sans moien de nostredit royaume, en les ostant, eximant et separant à tousjours mais du ressort de nostredicte seneschaucée de Poictou et du sieige royal de Poictiers, et lesquelz nous avons ostez, extraictz, eximez et separez, ostons, extraions et separons doresenavant, de nostre dicte puissance et auctorité royal, par ces presentes. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx conseillers, les gens de nostre court de Parlement et de noz comptes à Paris, à nostre dit seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, et à leurs lieuxtenans ou commis, presens et avenir, et à chacun d’eulx, si comme à lui appartiendra et qui requis en sera, que ceste nostre presente unyon, ordonnance, declaracion et voulenté ilz facent publier et enregistrer en nosdictes court du Parlement et Chambre de nosdiz Comptes, et ailleurs ou mestier en sera, et du contenu en icelles facent et seuffrent joir et user nosdiz gouverneur, juge et autres officiers audit lieu de Chastellerault, et aussi nosdiz subgects de nosdiz ville et viconté, sans pour ce leur faire, mettre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné, ores ou pour le temps avenir, aucun destourbier ou empeschement ; au contraire lequel, se fait, mis ou donné leur avoit esté ou estoit, ostent et mettent ou facent oster et mettre, sans delay, au premier estat et deu, non obstant opposicions ou appellacions quelzconques, et que par cy devant ladicte ville et viconté aient ressorti d’ancienneté audit Poictiers, et quelzconques ordonnances, mandemens, restrinctions ou deffenses à ce contraires. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre scel à cesdictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné au Plesseys du Parc lez Tours, ou mois de decembre l’an de grace mil cccc. quatre vings et deux, et de nostre règne le vingt et deuxiesme.

Ainsi signé : Par le roy, A. Robert. — Visa

Ces lettres patentes ont été enregistrées au Parlement de Paris, le 6 février 1483. (Arch. nat., X1A, 8.608, fol. 151.) Elles ont été publiées dans le Recueil des Ordonnances des Rois de France, t. XIX, p. 79, et dans l’Histoire de Châtellerault, de M. Lalanne, t. I, p. 309. [L.C.]

MDCCXXVIII Décembre 1482

Rémission donnée en faveur de Pierre Le Roux, de Saint-Cassien, messier et garennier du Bois Louet, et de Pierre de Beaussé, son compagnon, qui ayant surpris un nommé Geuffriaut en train de couper un pommier dans ledit Bois-Louet et ayant voulu lui enlever sa serpe et le mettre en état d’arrestation, l’avaient frappé parce qu’il cherchait à leur résister, au point qu’il en était mort.

AN JJ. 209, n° 231, fol. 126 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 563-565

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Pierre Le Roux, aagé de xxv à xxx. ans ou environ, demourant au bourg de Sainct Casian, chargé de femme et d’enfans, et Pierre de Beausse, aagé de xxviii. à xxx. ans ou environ, parroissien de Sainct Jehan de Thirey, contenant que le ixe jour de ce present [mois] de decembre, ilz se partirent dudit bourg de Sainct Casian et s’en allèrent à demie lieue d’illec en ung bois appellé le Bois Louet, duquel bois ledit Le Roux estoit messier et garennier, et portèrent des poches et ung furet pour prandre des connilz. Et quant ilz furent audit bois, ilz trouverent en icellui ung nommé …

Blanc au registre.

Geuffriault, demourant à la Chaussée, qui coppoit du bois qui lui avoit esté vendu par ung marchant qui avoit acheté la couppeure et tonture dudit bois, et entre autres choses avoit couppé ou couppoit ung pommier, qui estoit chose deffendue. A laquelle cause ledit Le Roux, garennier, demanda audit Geuffriault pourquoy il avoit couppé ledit pommier et lui dist icellui Roux qu’il lui baillast sa serpe de quoy il avoit couppé ledit pommier, qu’il tenoit et de quoy couppoit ledit bois. Lequel Geuffriault lui dist qu’il n’en feroit riens ; auquel lors ledit Le Roux, garennier, en exersant son office, print ledit Geuffriault au collet, disant qu’il auroit sadicte serpe, et icellui Geuffriault dist que non auroit. Et en eulx debatant, ledit Geuffriault cheut à terre et ainsi qu’il se levoit, ledit de Beausse, voyant qu’il vouloit resister à ce que ledit Le Roux, garennier, ne lui ostast ladicte serpe et faisoit manière de soy deffendre et courir sus audit Le Roux, qui en ce faisant excerçoit son office de garennier, d’un petit baston qu’il tenoist d’une main (et de l’autre main il tenoit ung bissac on estoient lesdictes poches et furet) donna, en revenchant ledit Le Roux, son compaignon, ung coup seullement, duquel coup, de cas de fortune il actaignit icellui Geuffriault sur la teste. Au moien duquel ledit Geuffriault gent à terre, et peu après, aucuns ses parens et amis le prindrent et misdrent sur une jument pour l’enmener en sa maison, et en l’enmenant, par faulte de bon gouvernement ou autrement, alla icellui Geuffriault de vie a trespas. Pour occasion duquel cas, lesdiz suplians, doubtans rigueur de justice, se sont absentez dudit païs et n’y oseroient plus retourner, converser ne reppairer, se noz grace et misericorde ne leur estoient par nous sur ce imparties, si comme ilz dient, en nous humblement requerant que, attendu ce que dit est, mesmement que ledit de Beausse ne entendoit point d’occire icellui Geuffriault en lui donnant ledit coup de baton, qui n’estoit que ung petit baston, que dudit coup il l’ataignit de cas de fortune sur la teste, que, en tous autres cas, il et ledit Le Roux sont bien famez et renommez, il nous plaise nosdictes grace et misericorde leur impartir. Pour ce est il que nous, etc., ausdiz suplians et à chacun d’eulx, avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessus dit avecques toutes peines, etc., en mettant au neant, etc. Et les avons restituez, etc. Satisfacion, etc. Et imposons, etc. Si donnons en mandement au juge de Lodun ou à son lieutenant, et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné au Plesseys du Parc lez Tours, ou mois de decembre, l’an de grace mil cccc. quatre vings et deux, et de nostre règne le xxiie.

Ainsi signé : Par le roy, le conte de Clermont, l’arcevesque de Narbonne, maistre Simon Radin

Sur le titre de comte de Clermont et sur Simon Radin, conseiller au Parlement, voy. ci-dessus (MDCCXXV). — François Hallé, avocat du Roi au Parlement de Paris de 1466 à 1482, puis grand archidiacre de l’Église de Paris, fut nommé archevêque de Narbonne par Louis XI en juillet 1482. Georges d’Amboise essaya de lui disputer ce siège, qu’il n’obtint qu’à la mort de François, en 1492. (G. Picot, le Parlement sous Charles VIII, Paris, 1877, in-8°, p. 23.) Hallé entra au Conseil du roi à la suite du traité de Confians de 1465. (Aubert, le Parlement de Paris, t. I, p. 348.) La Gallia christiana (t. VI, p. 106) dit qu’il fut chancelier de l’ordre de Saint-Michel ; son nom ne figure pas, cependant, dans la liste imprimée en 1725 à la suite des Statuts de cet ordre. Louis XI le chargea de missions diplomatiques. (Lettres, éd. Vaesen, t. VIII, p. 292.) M.G. Picot (loc. cit.) l’appelle même « un des plus intimes conseillers » de ce prince. [L.C.]

, et autres presens. Courtin. — Visa. Contentor. Texier.

MDCCXXIX Décembre 1482

Rémission obtenue par deux jeunes gens de Poitiers, les frères Maurice et Jean Challot, qui, à l’instigation de Daniel et Raymond Fauconnier, orfèvres de ladite ville, et de Jean Laisné, leur parent, faux monnayeurs, avaient tenté d’émettre des faux ducats de Gênes, et nobles à la rose, à Châtellerault et à Tours, et avaient pour ce fait été arrêtés en cette dernière ville.

AN JJ. 209, n° 236, fol. 128 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 565-568

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de noz bien amez Morice et Jehan Challotz, frères, demourans en nostre ville de Poictiers, jeunes enfans, contenant que, environ la feste de Pasques derrenière passée et depuis, Daniel et Raymond Faulconniers, frères, orfevres, pour lors demourans audit lieu de Poictiers, eurent parolles avecques ledit Morice Challot, et entre autres pour tendre à leurs fins, pour cuider trouver moien d’eulx acquicter de certaine somme d’argent en laquelle ilz estoient tenuz et obligez envers ung nommé Teste folle, cousturier dudit lieu de Poictiers et aussi afin qu’il les caucionnast envers ledit Teste folle de la somme de cinq livres cinq solz tournois, iceulx Faulconnier disdrent audit Morice, suppliant, que s’il voulloit, il le feroit riche à jamais et qu’ilz feroient bien des ducatz de Gènes, lesquelz ilz pourroient bien mettre en marchandise. A quoy ledit suppliant donna son consentement et loua une chambre estant en une maison appartenant à sa mère, en laquelle ledit Daniel demoura ung peu de temps, durant lequel il fist trois ou quatre pièces desdiz ducatz, au veu et sceu dudit Morice et de sondit frère ; desquelx ledit Danien (sic) en mist [une] ou deux en la boucherie dudit Poictiers, ainsi que depuis il dist audit Morice et à sondit frère. Et tantost après ledit Damien (sic), Morice et sondit frère se departirent de ladite ville de Poictiers et s’en allèrent en une maison assise a Nestre, entre ladicte ville de Poictiers et Chastellerault, laquelle maison est et appartient à la mère dudit Morice et sondit frère, supplians. Et illec, en une roche, marqua certain nombre desdiz ducatz que ledit Damien avoit faiz audict Poictiers, en presence et consentement desdiz Challotz ; desquelz ducatz ledit Damien bailla audit Chalot et à chacun d’eulx une pièce, lesquelz tous trois ensemble furent audit lieu de Chastellerault, auquel lieu ledit Morice en mist ung en une hostellerie pour sa despense, qui fut trouvé faulx et rendu audit Damien, pour ce que ledit Morice s’en estoit allé dudit lieu. Et convint depuis audit Morice, supliant, paier la despence pour laquelle ledit ducat avoit esté baillé. Et aussi ledit Damien, en presence dudit Morice et de son consentement, donna ung quartin d’argent et deux deniez, qui furent baillez à Jehan Roguelet, ne scet ledit Morice qu’il en a esté fait, et aussi ledit Damien bailla et laissa audit Morice et sondit frère certain nombre de ducatz de cuivre, lesquelz ne valloient riens ; et à ceste cause, ledit Morice les gecta en la rivière. Et depuis lesdiz Raymond et Damien amenèrent audit Morice en sa maison ung nommé Jehan Laisné, leur parent, qui disoit estre le plus habille homme que l’on peust trouver et que d’un marc d’argent qu’il en feroit quatre, qui seroit bon pour faire vaisselle d’argent. Et à ceste cause se deliberèrent lesdiz Morice et sondit frère et les autres dessus nommez d’aller audit lieu de Naistré, auquel lieu ilz essayèrent faire ledit argent et firent fondre du cuivre avecques de l’argent, duquel lesdiz Faulconniers et Laisné firent une douzaine de cuillers, lesquelz ledit Raymond vendit ou engaiga le pris et somme de trois escuz, comme il disoit, ne surent ledit Morice et sondit frère à qui. Et depuis, ou mois de septembre derrenier passé, lesdiz Morice, Laisné, et sondit frère ont fait fondre audit lieu de Naistré trois ou quatre marcs d’argent et du cuivre, parmy lequel les dessusdiz avoient apportez en la ville de Tours et s’estoient efforcez le vendre, mais ilz ne peurent trouver qui le voulsist achapter. Et aussi ledit Laisné avoit fait certains nobles à la roze, desquelz ledit Morice s’estoit essayé à en mettre deux, lesquelz il avoit mis ; et pour ce qu’ilz ne s’estoient trouvez bons, lui avoient esté renduz, et à ceste cause il avoit rendu ou autre de par lui la valleur d’iceulx. Lesquelz Morice et Jehan Chalotz, frères, supplians, après que les faulcetez furent congneues et adverées, ilz furent arrestez en nostre ville de Tours où ilz ont esté detenuz prisonniers par aucun temps, et depuis ledit Jehan a esté eslargy et ledit Morice est toujours demouré prisonnier ; et doubtent que se nostre grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, on voulsist proceder à l’encontre d’eulx à rigueur de justice, si comme ilz dient, en nous humblement requerant que, attendu les choses dessusdictes et qu’ilz n’ont esté causes de faire lesdites faulces monnoyes, mais y ont esté admonnestez par les dessus diz (sic) Daniel et Raymond Fauconniers et que en tous autres cas ilz sont de bonne vie, renommée et honneste conversacion, il nous plaise sur ce leur impartir nosdictes grace et misericorde. Pourquoy nous, etc., voulans, etc., ausdiz supplians avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessus dit, avecques toute peine, etc. En mettant au neant, etc. Et les avons restituez, etc., satisfacion, etc. Et imposons, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, prévost de nostre hostel et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné au Plesseys du Parc, ou mois de decembre l’an de grace mil cccc. quatre vings et deux, et de nostre regne le vingt et deuxiesme.

Ainsi signé : Par le roy, A. Robert. — Visa. Contentor.

MDCCXXX Janvier 1483 (n.s.)

Lettres portant création de dix foires par an à Tusson et changement du jour du marché hebdomadaire reporté du lundi au mardi, données en faveur d’Anne d’Orléans, abbesse de Fontevrault

Anne d’Orléans, seconde fille de Charles d’Orléans et de Marie de Clèves, sa troisième femme, succéda comme abbesse de Fontevrault à Marie de Bretagne, en 1478, mourut en 1491. (P. Anselme, t. I, p. 208, et Gallia christiana, t. II, col. 1325.) [L.C.]

, qui avait à cet effet présenté requête au roi, lui remontrant que à cause du prieuré conventuel de Tusson

Tusson est un village de la Charente, arrondissement de Ruffec, canton d’Aigre. Si cet acte, qui concerne une localité située en dehors des départements poitevins, a été analysé ici par M. Guérin, c’est sans doute par le moyen du rattachement de cette région au « païs de Poictou » à l’époque de Louis XI, peut-être aussi parce que l’abbaye de Fontevrault fait partie du diocèse de Poitiers. [L.C.]

, membre dépendant de ladite abbaye, elle « est dame et lui compette et appartient le bourg dudit Tusson, qui est beau et de grant estandue, et y a droit de chastellenie, justice et juridicion haulte, moyenne et basse, et parce, ou ensuivant la coutume du païs de Poictou, où icellui bourg et seigneurie de Tusson est assise, elle est fondée de droit d’avoir foires et marché audit bourg … Si donnons en mandement par ces presentes au seneschal de Poictou et à tous, etc. Donné au Plesseys-du-Parc, au mois de janvier l’an de grace mil CCCC quatre vingts et deux, et de notre règne le vingt deuxiesme. — Ainsi signé : Par le roy, les comtes de Clermont et de Dunois, le gouverneur d’Auvergne, maistre Simon Radin et autres presens

La charge de gouverneur d’Auvergne, occupée jusqu’en 1482 par Jean de Doyat, passa avant le 15 mars 1483 à Claude de Montfaucon. Il est probable qu’il s’agit ici du premier de ces deux personnages, le seul dont nous soyons certains qu’il a eu le titre de conseiller du roi. Cf. Audigier, Histoire d’Auvergne, Clermont, 1899, p. 331 ; Vaesen, Lettres de Louis XI, t. VI, p. 301, et t. X, p. 128. Les autres membres du Conseil royal nommés ici ont déjà été identifiés au cours de ce volume. [L.C.]

. Amys. Visa. Contentor. Texier. »

AN JJ. 208, n° 224, fol. 133 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 568

MDCCXXXI Janvier 1483 (n.s.)

Déclaration en faveur de Jean Laidet, sr de Rambaut, lieutenant du sénéchal de Poitou au siège de Niort, portant que, ayant été anobli avec les autres membres du collège des maires, échevins et conseillers de ladite ville, le Roi entend qu’il jouisse, lui et sa postérité, de tous les privilèges, exemptions de taille et impositions inhérents à la noblesse.

AN JJ. 200, n° 248, fol. 138 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 569-572

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre amé et feal conseiller maistre Jehan Ledet

Sur Guillaume Pierre et Jean Laidet, voy. les notes qui accompagnent la publication des lettres patentes de novembre 1461, citées ci-après au t. IX de la présente publication. (Arch. hist. du Poitou, t. XXXV, p. 300-301.) [L.C.]

, seigneur de Rambault et lieutenant de nostre seneschal de Poictou au sieige de Nyort, contenant que dès pieça, par noz autres lettres patentes en forme de chartre en laz de soye et cire verd, nous avons anobly et affranchy perpetuellement ledit suppliant, avec ses hoirs et successeurs, lors nez et procreez et par le temps avenir à naistre et procreer en loyal mariage, avecques autres du nombre et collieige des maire, eschevins et conseillers de nostredicte ville de Nyort, et pour les causes contenues en icelles, et ordonné qu’ilz, sesdiz enfans et successeurs feussent francs, quictes et exemps de toutes tailles, subcides, finances et admortimens des francfiefz et autres subvencions quelzconques et que par l’advenir ilz pussent parvenir et acquerir l’ordre et estat de chevallerie, par ainsi toutesfoiz qu’ilz vivroient noblement et obeyroient à noz bans et arrière bans, comme les autres nobles du païs. Lesquelles noz lettres de chartre et autres du don de ladicte finance eussent esté depuis deuement veriffiées et expediées par noz amez et feaulx conseillers les gens de noz comptes à Paris

Ces lettres patentes en date de novembre 1461 ne se retrouvent pas dans les Mémoriaux reconstitués de la Chambre des comptes. M. Guérin les a publiées à leur date d’après le Trésor des chartes : Arch. hist. du Poitou, t. XXXV, p. 299, 304. [L.C.]

, et depuis ledit Laidet et sesdiz enfans aient vescu et saroient entretenuz noblement et comme personnes nobles, sans avoir usé de fait de marchandise ne autre desrogant audit estat de noblesse. Et combien que ledit suppliant ait depuis continuellement travaillé à l’exercice de sondit office de lieutenant et à la garde, gouvernement et police de ladicte ville et applicqué son temps à nous servir oudit estat et office de lieutenant du seneschal de Poictou tant audit lieu et sieige ordinaire de Nyort, que aussi de Fontenay le Conte qui sont deux des principaulx sieiges de ladicte seneschaucée, aussi ait servy en plusieurs grandes commissions et charges qu’il a eues de nous, et autres qui ont eu charge de par nous touchant le fait de noz guerres, bans et arrière bans, provisions de vivres et de vitailles, et par le bon ordre, conduite et gouvernement qu’il y a mis et mect chacun jour, nostre justice a esté et est bien et deuement faicte et administrée au bien et augmentacion de nous, de nostredicte ville et païs d’environ, et encores s’i occuppe, vacque et entend de jour en jour, et soit tout prest de plus faire par l’advenir, par quoy raisonnablement il soit et doye estre, avecques sadicte postérité et lignée, tenuz francs, quictes et libres de toutes tailles, subcides et subvencions, admortimens, francs fiefz et nouveaux acquestz ; ce neantmoins aucuns colleteurs de ladicte ville, par hayne et envie qu’ilz ont conceue contre ledit suppliant, l’ont assis et imposé en la taille de l’année derrenièrement passée, et pour ce qu’ilz l’ont voulu contraindre à y contribuer, comme les autres gens rousturiers d’icelle ville, procès s’est meu entre ledit suppliant, d’une part, et lesdiz colleteurs, d’autre pour devant noz amez et feaulx les generaulx conseillers sur le fait de la justice de noz aides à Paris ou ledit procès est pendant indecis

Les registres des Plaidoiries de la Cour des aides, aux Archives nationales (série Z1A), présentent une lacune pour les années 1481-1505. Le vol. Z1A 32, qui contient une partie de l’année 1481, n’a ni tables ni rubriques ; ce qui rend une recherche de détail fort hasardeuse. Nous n’y avons pas trouvé mention du procès en question. [L.C.]

. Lequel procès ledit suppliant, jaçoit ce qu’il y ait bon droit a differé de poursuir jusques à ce que en feussions adverty, en nous requerant humblement que, attendu que, de nostre propre mouvement nous l’avons et sadicte postérité

Le registre porte « prospérité » par suite d’une distraction du scribe.

ainsi anobly et affranchy, et que du fait desdiz previlleiges ne autrement il ne vouldroit aucunement plaider à nostre desplaisance, qu’il nous plaise sur ce declairer nostre voulenté et intencion et lui impartir sur ce nostre grace et provision. Pour quoy nous, les choses [dessusdictes] considerées, bien records et memoratifz de l’octroy desdiz previlleiges et des grans et louables services que ledit suppliant nous a faiz et fait chacun jour en maintes manières, dont nous voulons bien aucunement le remunerer et les siens pour le temps avenir ; pour ces causes et autres à ce nous mouvans, avons, de nostre certaine science, plaine puissance et auctorité royal declairé et declairons par ces presentes, que nostre vouloir et entencion a esté tousjours et est que ledit supliant et sesdiz enfans, nez et procréez en loyal mariage, demeurent nobles et perpetuellement joyssent et usent entièrement dudit previlleige de noblesse ; et lequel et sadicte posterité, née et à naistre, en tant que mestier est ou seroit, nous avons anobly et anoblissons par cesdictes presentes, et que, en ce faisant, icellui suppliant et sesdiz enfans soient francs, quictes et exemps de toutes tailles et subvencions quelzconques, et qu’ilz joyssent de telz et semblables previlleiges que font les autres nobles de nostre royaume, sans ce que, à ceste cause, il en soit plus tenu en procès en quelque manière que ce soit. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx les generaulx conseillers sur le fait de noz aides à Paris, au seneschal de Poictou et ausdiz (sic) esleuz en ladicte seneschaucée, ou à leurs lieuxtenans, et à chacun d’eulx, si comme à lui appartiendra, que de nostre presente declairacion, don et octroy ilz facent, seuffrent et laissent ledit suppliant et sesdiz enfans joïr et user plainement et paisiblement, et s’aucun trouble ou empeschement, ou s’aucuns de leurs biens avoient esté ou estoient pour ce prins, saisiz ou empeschez, qu’ilz les mettent ou facent mettre, tantost et sans delay, à plaine delivrance. Car ainsi nous plaist il et voulons estre fait, nonobstant que ledit suppliant exerce l’office et estat de lieutenant de nostredit seneschal de Poictou et judicatures, et lesquelz estat et office nous declairons n’estre derogant à noblesse, et quelzconques lettres ou declairacions, par nous faictes et que par noz lettres et commissions desdictes tailles il soit dit que tous nouveaulx anobliz soient contrains à contribuer esdictes tailles, et autres restrinctions, mandemens ou deffenses, opposicions ou appellacions quelzconques, faictes ou à faire, à ce contraires. Pourveu que ledit suppliant et ses enfans suyvent noz armes, comme les autres nobles du païs, et ne facent chose qui desrogue audit estat de noblesse. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné au Plesseys du Parc les Tours, ou mois de janvier l’an de grace mil cccc. quatre vings et deux, et de nostre regne le vingt et deuxiesme.

Ainsi signé : Par le roy. A. Robert. — Visa. Contentor. Texier.

MDCCXXXII 22 février 1483 (n.s.)

Lettres patentes données à la requête et en faveur du comte de Dunois, déclarant que désormais ses terres et seigneuries de Parthenay, de Vouvant de Mervent, la Gatine et leurs habitants ressortiront par devant le sénéchal de Poitou ou son lieutenant, à son siège de Poitiers.

AN JJ. 210, n° 44, fol. 26 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 572-578

Loys, etc. A tous ceulx que ces presentes lettres verront, salut. La supplicacion de nostre amé et feal cousin, le conte de Dunois

Sur les possessions poitevines de François d’Orléans, comte de Dunoi, voy. ci-dessus (MDLV) et Arch. hist. du Poitou, t. XXXV, p. 73. [L.C.]

, avons receue, contenant que, jaçoit ce qu’il tiengne et ait acoustumé de tenir, et ses predecesseurs, les baronnies, terres et seigneuries de Partenay, Vouvant Merevant et autres, leurs appartenances et deppendences de nostre conté de Poictou et tour de Maubergion, assise en nostre ville de Poictiers, et par ce en feussent et soient lui et ses hommes, subgectz directement en juridicion et ressorts et que d’ancienneté il eust acoustumé de y ressortir, et que aussi en nostre ville de Poictiers y eust une cours et siège ordinaire seullement et non ailleurs, auquel lieu lui et ses subgectz avoient et eussent acoustumé obéir ès causes dont par previlleiges estoit donné et commis la congnoissance de lui et desdiz subgectz et autres vassaulx et subgectz dudit païs ; que, ce neantmoins par aucun temps, durant le vivant de nostre très cher et très amé oncle le duc de Berry

Jean, duc de Berri, dernier comte de Poitiers (1340-1416), arrière-grand-oncle de Louis XI. [L.C.]

, qui tenoit nostre ville de Saint Maixent, il avoit fait ressortir, en droit d’assise seullement, lui et ses subgectz desdictes terres audit Saint Maixent. Et depuis, après qu’il fut decedé et que les terres de Saint Maixent, Melle, Civray et Chisé furent baillées en appanage à nostre très cher et très amé oncle le feu conte du Maine

La donation de Saint-Maixent, Melle, Chizé, Civray et Sainte-Néomaye à Charles d’Anjou Cte du Maine eut lieu en février 1443, par lettres patentes publiées, avec une notice sur Charles d’Anjou, au t. XXX, des Arch. hist. du Poitou, p. 146. [L.C.]

, nostre seigneur et père avoit remis ledit ressort d’assises desdictes terres en la ville de Nyort, en laquelle ilz ont obey ; et depuis nostre avenement avons créé ung sieige ordinaire au sieige de Nyort, au moien duquel ilz ont fait obeir nostredit cousin et sesdiz subgetz non seullement ondit ressort d’assise mais en juridicion ordinaire, telz qu’ilz avoient acoustumé obeir à nostre sieige de Poictiers ; et soit nostre très cher et très amé cousin le roy de Secille, filz de nostredit oncle

Sur Charles II d’Anjou, comte du Maine, duc de Calabre, roi de Sicile à la mort du roi René, voy. ci-dessus (MDLXII). [L.C.]

, puis peu de temps ença allé de vie à trespas, au moien duquel et pour ce que lesdictes terres nous sont retournées de plain droit, à la requeste desdiz habitants de Saint Maixent, qui nous ont fait remonstrer lesdictes terres avoir ressorti en droit d’assise audit Saint Maixent paravant que audit Nyort, et lesdictes choses estre retournées en leur nature, eussions ordonné sieige audit Saint Meixant, comme il estoit paravant, et que lesdictes terres de Partenay, Vouvant et Merevant et ressort de Gastine y ressortiroient tout ainsi qu’elles avoient acoustumé ressortir du temps de nostre dit feu oncle duc de Berry, et mandé à nostre seneschal de Poictou ou son lieutenant expedier lesdictes assises tout ainsi qu’on avoit acoustumé faire ondit temps ; lesquelz habitans aient presenté leurs lettres à nostredit seneschal, lequel, sans oyr ne appeller ledit exposant nostre cousin, leur a donné ses lettres executoires, au moien desquelles lettres et executoire Jehan Gastineau, soy disant nostre sergent, s’est transporté en ladicte ville de Partenay et signiffié ladicte assignacion desdictes assises à certain jour audit Saint Maixent, et que le ressort desdictes terres y estoit assigné, duquel octroy desdictes lettres executoires et signifficacions faictes par ledit Gastineau, nostredit cousin exposant ou procureur pour lui ait appellé à nous et à nostredicte court de Parlement

Il ne m’a pas été possible de trouver trace de cette affaire dans les registres du Parlement. Les historiens poitevins, Thibaudeau, Hist. du Poitou, t. II (1840, p. 50), et Ledain, Hist. de Parthenay (1858), p. 243 et 255, nous apprennent, d’après les documents relevés par D. Fonteneau, que les lettres du roi transférant au siège de Niort la connaissance des affaires de Parthenay remontaient au 27 juin 1441, et celles en faveur de Saint-Maixent au 8 juillet 1482. Les lettres patentes publiées ici ne terminèrent pas entièrement la lutte, mais l’avantage resta en définitive aux Poitevins. [L.C.]

, et son appel bien et deuement relevé et fait faire les adjournemens [et] inthimacions en tel cas appartenans ; aussi se soient opposez les maire, bourgeois et eschevins de nostredicte ville de Nyort, pour et afin que lesdictes terres de nostredit cousin et ressort d’icelle ne feussent mises en nostre dicte ville de Saint Maixent ; sur laquelle opposicion est et a esté tant procedé par devant nostredit seneschal ou son lieutenant que les parties aient esté appointées à escripre à fin de memoire et à en fournir à certain jour, et que ce pendant l’obéissance et ressort desdictes terres surcerroit, dont n’a esté appellé ne reclamé. Et depuis, lesdiz maire et eschevins dudit Nyort se soient tirez par devers nous et aient de nous obtenu autres lettres, par lesquelles aians ordonné et mandé audit seneschal de Poictou ou son lieutenant ondit sieige de Nyort et autres noz juges ressortir lesdictes terres dessusdictes audit Nyort, tout ainsi qu’ilz eussent fait ou peu faire paravant les lettres par nous données à ceulx dudit Saint Maixent ; au moien de quoy sont et se meuvent entre ceulx dudit Saint Maixent et de Nyort plusieurs procès et differans. Et combien que, comme dit est, nostredit cousin ait bonne cause et matière d’appel, neantmoins il doubte que s’il le poursuivoit en nostredicte court, au moien de la grant multitude des causes qui y sont, le ressort et juridicion de sesdictes terres pourroit longuement estre retardé et empesché, et aussi au moien des questions et procès qui sont ja meuz et introduiz pour occasion de ce entre lesdictz habitans dudit Nyort et de Saint Maixent, qui seroit en grant detriment de lui, sa juridicion et de ses subgectz, et retardement de leursdiz procès et en grant fatigacion d’eulx d’estre tenuz obeir en nostre court ordinaire audit lieu de Nyort, et en ressort et droit d’assise audit [Saint] Maixent qui sont devers lieux et diverses jurisdicions, et dont souventesfoiz pour occasion de mesme matière se pourroient asseoir divers procès et ensuir diverses sentences, au grant interest et dommaige de nostredit cousin et de sesdiz subgectz, consideré mesmement la pocité du conseil, qui est en chacune desdictes villes, par quoy voulentiers obeiroit en juridicion ordinaire et aussi ressortiroit en nostredicte court et siège de Poictiers, tant pour le bon et notable conseil qui y afflue, que aussi que noz officiers y sont manans, demourans et residens, que lesdictes terres sont tenues de nous à cause de nostredicte tour de Maubergeon assise en nostredicte ville de Poictiers, par quoy la matière y est subgecte et disposée naturellement et directement selon la nature des fiefz, si nostre plaisir estoit sondit appel mettre au neant et ce dont a esté appellé sans amende, et ordonner sesdictes terres ressortir tant en ordinaire que droit d’assise à nostredit siège de Poictiers, ainsi que d’ancienneté et selon la nature du fief elles avoient acoustumé et sont tenues ressortir, requerant nostre provision surce. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans remettre les choses à quoy naturellement elles sont disposées et selon que raisonnablement elles sont tenues et doivent ressortir, et autres consideracions à ce nous mouvans, ladicte appellacion dessusdicte ainsi faicte par nostredit cousin, ensemblement ce dont a esté appellé avons mis et mettons du tout au neant, de grace especial, sans amende ; et neant[moins], par cesdictes presentes, avons, de nostre certaine science, grace especial, plaine puissance et auctorité royal, et par l’advis et deliberacion de plusieurs de nostre sang et autres gens de nostre grant conseil, ordonné et declairé, ordonnons et declairons, par ces presentes, que lesdictes terres, baronnies et seigneuries de Partenay, Vouvant et Merevant et ressort de Gastine et les deppendances d’icelles ressortiront doresenavant par devant nostre seneschal de Poictou ou son lieutenant à nostredit siège de Poictiers et obeyront à sadicte court ordinaire et siège de Poictiers tout ainsi qu’elles eussent fait ou peu faire paravant qu’elle eussent et aient ressorti par quelque temps que ce fut, audit Sainct Maixent et Nyort, et ce nonobstant la creacion faicte dudit siège ordinaire audit Nyort et quelzconques lettres de declairacion à eulx et à chacun d’eulx sur ce données, lesquelles quant ad ce nous avons revocquées, cassées et adnullées, revocquons, cassons et adnullons et sans ce qu’ilz s’en puissent aider à l’encontre de nostredit cousin ne sesdiz subgectz, et lesquelles nous ne lui voulons nuyre ne prejudicier touchant la decision desdictes causes et ressort de lui et de sesdiz subgectz. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx conseillers les gens qui tiennent ou qui tiendront nostre court de Parlement à Paris, aux seneschal de Poictou, conservateur des previlleiges royaulx de l’Université dudit Poictiers ou à leurs lieuxtenans, commis ou acesseurs, que de nostre presente ordonnance et declairacion ilz facent joïr nostredit cousin et sesdiz hommes et subgetz, sans souffrir sesdictes terres ressortir ne sesdiz subgetz obeir, en assise ou ordinaire, ausdiz Nyort ne Sainct Maixent, et de contraindre les juges, greffiers et autres officiers dudit Nyort à mettre les procès qu’ilz ont en droit par devers eulx, par devant vous, seneschal, ou vostre lieutenant à vostredit siège, qui seroient d’entre les parties …

Quatre ou cinq mots en blanc.

dudit ressort, pour en estre par vous decidé, et lesquelz, en tant que mestier seroit, en avons evocquez et evocquons, ensemble tous les autres procès dudit ressort, et aussi les reffusans de ce faire, touchant ladicte matière et les deppendances, à vous obeir et tous autres par toutes voyes deues et raisonnables. Car ainsi, etc., nonobstant opposicions ou appellacions quelzconques faictes ou à faire, et lettres impetrées ou à impetrer à ce contraires, par lesquelles ne voulons estre differé. En tesmoing de ce, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Donné au Plesseys du Parc, le xxiiiie jour de fevrier l’an de grace mil cccc. quatre vings et deux, et de nostre regne le xxiie.

Ainsi signé : Par le roy, le conte de Clermont, l’arcevesque de Nerbonne, l’evesque de Chalon, le gouverneur de Bourgongne, les sires de Sainct Pierre, d’Estellant et de L’Isle, Me Philippe Bairdot

Pierre de Bourbon, comte de Clermont, François Hallé, archevêque de Narbonne, André Poupet, évêque de Châlons, et Guillaume Picard, sieur d’Estelan, ont dé à été l’objet de notices au cours de ce volume. Le gouverneur de Bourgogne était alors Jean de Beaudicourt, qui avait succédé à Charles d’Amboise. (Mouget, La Chartreuse de Dijon, t. II (1901), p. 191, et Vaesen, Lettres de Louis XI, t. V, p. 169-170) — Jean Blosset seigneur de Saint-Pierre, paraît déjà dans un acte de 1474 (Arch. hist. du Poitou, t. XXXVIII, p. 454) ; il fut grand sénéchal de Normandie. (Vaesen, Lettres de Louis XI, t. V, p. 23.) — Philippe Baudot, conseiller au Parlement de Paris, reçu le 6 mars 1480 (Aubert, Le Parlement de Paris, t. I, p. 76), remplacé en 1506 (ibid., p. 62). [L.C.]

et autres presens. Amys. — Visa. Contentor. de Villechartre.

MDCCXXXIII Février 1483 (n.s.)

Lettre de création en faveur de Jean de Fontenay, écuyer, de quatre foires l’an, en sa terre et seigneurie de Saint-Cassien dans le Loudunais, et permission de porter à quatre au lieu de trois les piliers de sa justice patibulaire.

AN JJ. 207, n° 338, fol. 157 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 578-581

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre chier et bien amé Jehan de Fontenays

Sur Jean de Fontenay, seigneur de Saint-Cassien, fils aîné d’Amboise de Fontenay et de Marie du Puy, marié à Jean Frotier, mort sans postérité connue, voy. Dictionnaire des familles du Poitou, nouvelle éd., t. III, p. 469. [L.C.]

, escuier, seigneur de Saint Cassien en Anjou, contenant que en ladicte seigneurie il a tout droit de baronnie, chastellenie, justice, juridicion haulte, moienne et basse et est assise en beau païs et fertil ; mais au moien des guerres et divisions qui par cy devant ont eu cours en nostre royaume il est devenu fort povre et depopullé, par quoy les habitans du païs ne pevent faire argent des biens qui y croissent, paier les rentes droiz et devoirs qu’ilz doivent et ont à supporter, s’il n’y avoit audit lieu de Saint Cassien frequentacion de foires et marchez par assemblées de gens, denrées et marchandises. Et à ceste cause ledit suppliant nous a humblement fait suplier et requerir que, attendu ce que dit est et que pour le bien de la chose publicque d’environ ledit lieu de Saint Cassien est besoing et neccessité y avoir foires et marchés, nostre plaisir soit creer et establir audit lieu de Sainct Cassien quatre foires l’an, c’est assavoir la première desdictes foires le jour sainct Fabien et sainct Sebastien en janvier, la seconde le jour monsieur sainct Jehan en may, la tierce le jour saincte Radegonde ou mois de …

Blanc au registre.

et la quarte le jour des octaves de la feste de Toussaint en novembre, et que sur les denrées et marchandises qui illec cesdiz jours seront vendues et distribuées il puisse joïr et user de toutes manières de coustumes, poix, aulnaiges, prerogatives, preeminences, previlleiges, franchises et libertez, tout ainsi et par la forme et manière que ung seigneur baron, chastellain, hault, bas et moien justicier peut et doit joïr et user par raison et la coustume du païs d’Anjou, où icelle seigneurie est assise et sur ce lui impartir noz grace et provision. Pour quoy nous, ce que dit est consideré, inclinans liberallement et favorablement à la supplicacion et requeste dudit suppliant et en faveur des bons, louables, recommandables et agreables services qu’il nous parcy devant faiz en maintes manières et continue chacun jour tant ou fait de noz guerres que ailleurs en plusieurs manières et esperons que encores plus face le temps avenir, pour ces causes et autres à ce nous mouvans, avons, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, crée et estably et par la teneur de ces presentes creons et establissons audit lieu de Sainct Cassien quatre foires l’an, c’est assavoir la première desdictes foires le jour sainct Fabien et sainct Sebastien en janvier, la seconde le jour monsieur sainct Jehan en may, la tierce le jour saincte Radegonde ou mois de …

Ces personnages ont tous été l’objet de notices au cours de ce volume. [L.C.]

et la quarte le jour des octaves de la feste de Toussains, auxquelz jour l’en pourra vendre, achepter et distribuer audit lieu de Sainct Cassien toutes manières de marchandises, licites et honnestes, tout ainsi et par la forme et manière que l’on fait et que l’on a acoustumé de faire ès autres foires et marchez de nostredit royaume ; sur lesquelles denrées et marchandises nous donnons plain povoir et auctorité audit suppliant de avoir, joïr et user de toutes manieres de coustumes, poix, aulnaiges, prerogatives, franchises, previlleiges et libertez, tout ainsi et par la forme et manière que ung seigneur baron, chastellain, hault, bas et moien justicier peut et doit joïr et user par raison et la coustume dudit païs d’Anjou. Et avecques ce avons, de nostre plus ample grace et auctorité, consenti, permis et octroyé, consentons, permettons et octroyons que, en signe dudit droit de baronnie et chastellenie en icelle seigneurie de Sainct Cassien, voulons et nous plaist que ledit suppliant puisse et lui loise faire adjoindre à sa justice patibulaire ung pillier, laquelle est exigée (sic) de tout temps et ancienneté à trois pilliers, en manière qu’il puisse avoir ladicte justice patibulaire à quatre pilliers, tout ainsi que ung seigneur baron et chastellain, en ensuivant ladicte coustume peut et doit faire. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal d’Anjou, juge de Lodun et à tous, etc., que de nos presens grace, creacion, establissement, permission, octroy et voulenté ilz facent, seuffrent et laissent ledit suppliant et ses successeurs joïr et user plainement et paisiblement, sans en ce, ores ne pour le temps avenir, ne aux marchans affluans ausdictes foires et marchez, ensemble leurs denrées et marchandises, leur faire, mettre et donner, ne seuffrir estre faict, mis et donné aucun destourbier ou empeschement au contraire, en faisant crier et publier [lesd. foires], se mestier est, à son de trompe et cry publique, par tous les lieux où il appartiendra, en y establissant audit lieu de Sainct-Cassien loges, places, estaulx et autres choses necessaires pour l’excercice desdictes foires, en tenant en seureté les marchans affluans à icelles [foires] ensemble leurs denrées et marchandises, aux jours qu’elles se tiendront, tout ainsi qu’il est acoustumé de faire ès autres foires et marchez de nostredit royaulme, pourveu que à quatre lieues à la ronde dudit lieu de Sainct Cassien n’ait autres foires aux jours dessus-diz, par quoy ce present establissement feust ou soit préjudiciable en aucune maniere. Car ainsi nous plaist il et voulons estre fait, non obstant, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné au Plesseys du Parc, ou mois de fevrier l’an de grace mil cccc. quatre vings et deux, et de nostre regne le xxiie.

Ainsi signé : Par le roy, le conte de Clermont, l’arcevesque de Nerbonne, l’evesque de Chaallon le sire de Sainct Pierre, maistre Simon Radon et autres presens. Amys. — Visa. Contentor.

MDCCXXXIV Mars 1483 (n.s. avant le 30)

Lettres de rappel de ban et d’absolution générales confirmatives des rémissions antérieurement obtenues par Jacques de Belleville, écuyer, alors prisonnier depuis six ans à la Conciergerie du Palais à Paris, pour le meurtre d’Hilaire Geoffriau, prévôt fermier de la ville de Poitiers, l’assassinat de Girard Chrétien, écuyer, et plusieurs autres crimes.

AN JJ. 207, n° 306, fol. 140 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 581-585

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jaquet de Belleville

Il a déjà été donné de nombreux renseignements sur la famille Harpedenne, dite de Belleville, notés au cours du présent ouvrage. (Voy. notamment Arch. hist. du Poitou, t. XXXV, p. 367, aux renvois aux vol. précédents, et t. XXXVIII, p. 395.) Jacques de Belleville était le frère de Louis de Belleville, seigneur de Montaigu, et l’un des fils de Jean III Harpedenne, seigneur de Belleville, chambellan du roi et de Marguerite de Valois ; il reçut compensation pour ses droits prétendus sur la seigneurie de Montaigu, cédée à Louis XI par son frère Louis en 1473 (Arch. hist. du Poitou, t. XXXVIII, p. 397) et plaidait en 1475 contre la veuve de ce dernier (ibid., p. 423 et 429). [L.C.]

, escuier, prisonnier en la Conciergerie de nostre Palais à Paris, contenant que, à l’occasion de la mort et meurtre par lui commis en la personne de feu Hilaire Geuffriau, en son vivant et lors prevost fermier de nostre ville de Poictiers, le suppliant obtint des pieça de nous lettres de remission et pardon

Ces lettres, datées du 30 mars 1464 (n.s.), ont été publiées au t. X du présent recueil (Arch. hist. du Poitou, t. XXXV, p. 454) ; le fermier de la prévôté tué par Jacques de Belleville y est appelé Hilleret Tondeur. [L.C.]

 ; et après plusieurs informacions contre lui faictes tant sur ledit cas que autres, et fust depuis par nostre ordonnance constitué prisonnier, et sur le contenu esdictes informacions ledit suppliant obtint dès pieça de nous lettres de remission et pardon, comme dit est. Et fut interrogué par certains commissaires, à ce de par nous commis, et après par les gens de nostre Grant Conseil et sur sa confession et depposicion prinses et plusieurs tesmoingz examinez en ladicte informacion ledit suppliant fut et a esté trouvé chargé et coulpable d’avoir tué ledit feu Hilaire Geuffriau en autre manière que ne contenoient lesdictes lettres de remission, d’avoir aussi frappé par derrière et en trahison Girard Chrestien, escuier

Girard Chrestien, écuyer, lieutenant et garde du château de la Roche-sur-Yon, pour le duc d’Anjou, étant amené prisonnier à la Conciergerie du Palais par Jean Musnier, huissier du Parlement, fut frappé haineusement d’un coup de dague par Jacques de Belleville, et mis par là en danger de mort. Jacques de Belleville, arrêté sur-le-champ, fut remis en liberté sous la caution d’Henri de Livres, conseiller du Parlement, qui passait au même moment sur le Pont-aux-Changes. En raison de ces faits, Girard Chrestien obtint les 7 et 18 février 1472 (n. st.) mandats d’ajournement et d’amener contre ledit de Belleville. (Arch. nat., X2a 38, fol. 148 et 151.) [L.C.]

, en lui donnant ung coup de dague à travers le corps en intencion de le tuer, ledit Chrestien estant lors ès mains d’aucuns des huissiers de nostre court de Parlement

Girard Chrestien et Jean Vincendeau étaient ajournés, par mandat du 9 juillet 1466, à la requête du Prieur d’Aquitaine des Frères de l’Hôpital, pour répondre de certains excès et délits. (Arch. nat., X2a 34, fol. 217 v°.) C’est peut-être à l’occasion de cette affaire que Chrestien se trouvait entre les mains de la justice au moment de l’attaque de Jacques de Belleville. [L.C.]

, plus d’avoir batu, gehainé et inhumainnement traicté Guillaume Barré et sa femme, leur avoir fait chauffer les piez, jambes et le ventre tellement que la peau leur en estoit cheute par loppins, icellui Barré à ceste cause decedé et sa femme longtemps malade et en dangier de mourir ; d’avoir aussi prins et destroussé sur les champs le paige dudit Chrestien ; d’avoir en oultre pillé et ranconné le povre peuple de dessus les champs et fait plusieurs autres maulx, au moien desquelz cas et après ce que les gens de nostre dit Grant Conseil eurent enteriné nosdictes lettres de remission audit suppliant, ilz le condampnèrent envers les parties interessées en certaines sommes de deniers et à tenir prison, jusques à plaine saptisfacion, le bannirent à tousjours de nostre royaume et declairèrent le residu de ses biens à nous confisquez. Et à ceste cause ledit suppliant a tousjours depuis et paravant [esté] detenu prisonnier en ladicte Conciergerie par l’espace de six ans ou environ, et encores y est de present en grant povreté et misère tellement qu’il y est cuidé mourir de froit, de faim et plusieurs autres grans povretez et indigences qu’il a souffertes et endurées en telle manière qu’il est devenu gouteux, perclus et en danger de devenir aveugle et de brief y miserablement finir ses jours, se nostre bon plaisir n’estoit avoir pitié et compassion de lui et lui impartir nostre grace et misericorde, en nous humblement requerant, [consideré] la longue detencion de sa personne, les misères et souffretés qu’il a depuis endurées en prison, et qu’il a ferme propos de soy maintenir et vivre doresenavant gracieusement (sic) et meurement, sans faire à son povoir aucun desplaisir à personne, et avecques ce, pour mieulx satisfaire envers Dieu aux offences par lui commises, il a entencion, se Dieu lui donne la grace, de faire et accomplir les voyaiges et pellerinages de monsieur Sainct Glaude, monsieur Sainct Anthoine de Viennois, de Sainct Anthoine de Pade, de la benoiste Magdelene à la Baulme et d’illec à Romme et en Jherusalem, il nous plaise, et aussi en remunbrance de la Passion de nostre Redempteur, le rappeller en nostre dit royaume et avecques ce lui pardonner et abolir lesdiz cas et autres qu’il pourroit avoir commis envers nous et justice, qui ne seroient assez emplement contenuz et speciffiez en sondit procès, sentence et arrest et sur ce lui impartir nosdictes graces et misericorde. Pour quoy nous, etc., voulons, etc., audit suppliant en l’onneur, etc., esperant qu’il habandonnera et delaissera sa mauvaise vie et inclinacion, qu’il conversera et se contiendra doresenavant gracieusement, paisiblement et meurement, sans faire ne pourchasser aucun ennuy, dommaige ou destourbier à quelque personne que ce soit, et qu’il fera et accomplira lesdiz voyaiges, se possible lui est, ledit suppliant pour ces causes avons rappellé et de nostre grace, etc., rappellons en nostredit royaume, pour y estre et demourer comme il eust fait auparavant ledit ban. Et en oultre, de nostre plus ample grace lui avons remis et aboli les faiz et cas dessus declairez et autres par lui commis, qui ne seroient assez emplement contenuz et speciffiez en sondit procès, avecques toute peine, etc. En mettant au neant, etc. Et l’avons restitué, etc. Satisfacion, etc. Et imposons, etc. Si donnons ou mandement à noz amez et feaulx conseillers les gens de nostre dit Grant Conseil, de nostre court de Parlement, et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné au Plesseys du Parc lez Tours, ou mois de mars l’an de grace mil cccc. quatre vings et deux, et de nostre règne le xxii.

Ainsi signé : Par le roy tenant ses requestes. Charpentier. — Visa. Contentor. G. Budé.

MDCCXXXV Mars 1483 (n.s., avant le 30)

Rémission octroyée, à condition de payer vingt livres pour les réparations des couvents des Cordelières du faubourg Saint-Marceau, à Jean de l’Herbergement, écuyer, lieutenant du sr de la Trémoïlle en l’île de Noirmoutier, pour le meurtre de Guillaume Fillon, tenancier d’une taverne publique, et substitut du procureur aux assises de l’île, qui lui avait interdit sa maison parce qu’il le soupçonnait d’entretenir des relations avec sa femme, et avait tenu contre lui des propos menaçants.

AN JJ. 210, n° 53, fol. 30 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 585-589

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan de L’Erbergement, escuier, contenant que ledit suppliant a esté lieutenant et garde de la place forte pour le feu sire de La Trimoille en l’isle de Nermoustier, et lui estant en icelle ysle, sans ce que jamais il eust fait aucun desplaisir à aucune personne en icelle ysle ne à autre, feu Guillaume Fillon consceut hayne à l’encontre de lui, sans ce que jamais il lui eust meffait ne mesdit en aucune manière, et depuis (sic) sur ce advenu que le mardi tiers jour de fevrier derrenier passé, ledit feu Fillon estant ès petites asses

Lisez assises.

tenues illec pour ledit seigneur de La Tremoille où il estoit commis ou substitut du procureur, ledit suppliant s’en alla pour desjeuner en l’ostel dudit Fillon, qui tenoit taverne publicque, acompaigné d’un nommé Huguet Rondeau, et desjeunèrent avecques la femme dudit feu Fillon. Et tantost après les dictes assises tenues, pour ce que ledit feu Fillon avoit la charge de faire la despense aux officiers dudit seigneur de La Tremoille qui tenoit lesdictes assises, il convoya (sic) ledit suppliant à disner avecques lesdiz officiers d’icelle court et assises ; durant lequel disner, pour ce que ledit Fillon vit que ledit suppliant ne mengoit comme point, il fut tout courroucé, doubtant que il eust desjeuné avecques sadicte femme, comme depuis il monstra par effect. Car tout incontinant qu’ilz eurent disné, ledit feu Fillon, comme tout courroucé et esmeu, demanda à sadicte femme se ledit suppliant avoit desjeuné en sa maison ; laquelle lui fist responce que non, jaçoit ce qu’il y eust desjeuné, doubtant qu’il la fist …

Un mot en blanc.

ou lui fist desplaisir dont ledit feu Fillon ne se voult pas contenter, mais appella ung sien serviteur, appellé Grogneau et lui demanda s’il estoit vray que ledit suppliant eust desjeuné en sa maison, lequel lui respondit que oyl et que lui et sa maistresse avoient desjeuné ensemble. Et avecques ce, appella une sienne seur qui demouroit avecques lui, à laquelle il demanda pareillement s’il estoit vray que ledit suppliant eust desjeuné avecques sadicte femme, laquelle lui dist semblablement que oyl. Lequel feu Fillon tout incontinant, comme mal meu et courroucé, s’en alla et adreça vers sadicte femme, laquelle il print par le manton tout rigoureusement, en lui disant : « Tu m’avois dit que le lieutenant (qui estoit ledit suppliant) n’avoit pas desjeuné siens

Sic pour céans.

, et tu as menti. C’est bien ce que on m’a dit, putain, paillarde que tu es ; et je te promectz que tu n’auras jamais beau temps avecques moy. » Et lors, comme tout esmeu et courroucé, ledit feu Fillon print ung grant braquemart qu’il avoit à sa sainture, combien qu’il n’eust point acoustumé de le porter, sinon quant il prenoit débat ou question avecques aucuns dudit ysle, dont il estoit coustumier de ce faire et de les bastre et insulter, et mesmement deux ou trois des plus gens de bien dudit ysle, qu’il a batu très enormement, et en prenant ledit braquemart, dist à ung nommé Pierre Sorin, son parent : « Dictes au lieutenant Jehan de l’Erbergement que je luy deffens ma maison et qu’il ne s’i tienne plus comment que ce soit. » Et depuis advint que, le jeudi ensuivant, ledit feu Fillon, se transporta, aiant sondit braquemart à l’ouvrouer d’un cordouannier, nommé Roland Thomas, ou illecques se rendi Jacquin Charleau, marchant, demourant en ladicte ysle de Nermoustier, qui dist audit feu Fillon : « Et qu’est ce cy à dire ? Portez-vous à ceste heure braquemart ? » Et sur ces parolles ledit feu Fillon lui respondit qu’il en feroit de courroucez devant qu’il finst le voir. Et après se departirent d’ensemble. Et le vendredi ensuivant qui fut le lendemain devers le matin ung nommé Colas Garseche, accesseur pour le chastellain dudit seigneur de La Tremoille et ledit feu Fillon, eulz estans en l’église de Sainct Philebert dudit Nermoustier, icellui Garesche demanda audit feu Fillon pour quoy il portoit ledit braquemart et qu’il en vouloit faire. A quoy il lui respondit qu’il en feroit de courroucez avant qu’il dormist. Pour laquelle cause et ainsi que ledit suppliant estoit en ladicte église, pour oyr messe, ledit jour de vendredi, ung nommé Leonnet Charleau, filz de Jaques Charleau, ainsi qu’il se premenoit (sic) avecques lui dedans ladicte église, lui dist, voyant ledit feu Fillon a tout sondit braquemart, qu’il se donnast garde et que ledit feu Fillon pourtoit ledit braquemart pour lui et qu’il le savoit bien, ce que oy par ledit suppliant, il lui respondi que s’il l’assailloit, il se deffendroit. Et ladicte messe dicte, ledit suppliant s’en yssy de ladicte église et s’en alla vers le caiz jusques à une pierre qui est devant la tour neufve du chastel dudit lieu. Et tantôt après lui, s’en allèrent Nicolas Pirro, prebstre, Raoullet Fueillart, Guillaume Thobellet et Jamet Collet, et en passant se salluèrent ledit suppliant et eulz tout gracieusement. Et tantost après survint illec ledit feu Fillon, partant de ladicte église atout sondit braquemart comme ung homme esmeu et courroucé, et en cest estat rencontra ledit suppliant en son chemin, qui s’entreprindrent de parolles rigoureuses et tellement que ledit feu Fillon mist la main à son braquemart et le tira demi pié ou environ pour en vouloir oultrager ledit suppliant. Ce que voyant ledit suppliant et doubtant sa fureur (sic) et qu’il le meurtrist et occist de sondit braquemart, ou qu’il le bleçast et batist, comme il avoit fait plusieurs austres dudit ysle, et coustumier de ce faire, comme dit est et qu’il estoit dangereux homme et à doubter, pour deffendre son corps, et voyant la façon de faire dudit Fillon, tira ung sien braquemart en disant audit feu Fillon : « On dit que tu me menaces, et pourquoy tires-tu ton braquemart ? » et voyant qui l’avoit desjà presque du tout tiré et prins son advantage pour le vouloir frapper, lui dist : « Deffends toij ! » et sur ces parolles lui donna de son dit braquemart sur la teste tellement qu’il cheut à terre. Et pour ce qu’il doubtoit qu’il se revenchast et lui courust sus et se levast pour le tuer, le frappa de sondit braquemart deux ou trois coups sur l’une de ses jambes. Sur quoy vindrent illec lesdiz Esveillart, Thobellet et Jamet Collet, qui les departirent. Et atant s’en alla d’illec ledit suppliant ou chastel dudit lieu. Et depuis est icellui feu Fillon, à l’occasion desdiz coups, par deffault d’avoir esté bien pensé et habillé, bon gouvernement ou autrement, allé de vie à trespassement, cinq ou six jours après ou environ. Et à ceste cause, ledit suppliant doubtant rigueur de justice, s’est absenté du païs, où il n’oseroit jamais converser ne repaiser (sic), se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, si comme dit ledit suppliant, humblement requerant que, attendu ce que dit est, et que en toutes autres choses il a esté tousjours bien famé et renommé et ne fut jamais actainct ne convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise lui impartir nostre grace et misericorde. Pour quoy nous, etc., voulans, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessus dit, avecques toute peine, etc., en mettant au neant, etc. Et l’avons restitué, etc., satisfacion, etc. Et imposons sur ce silence, etc. ; moiennant et parmy ce que ledit suppliant a baillé et paié comptant la somme de xx livres tournois pour la reparacion de l’eglise et monastère des religieuses Cordelières de Sainct Marcel lez Paris

Sur ce couvent, voy. Bournon, Rectifications et additions à l’Histoire de Paris, de Lebeuf, Paris, 1890, in-8°, p. 228. [L.C.]

, à ce que lesdictes religieuses prient Dieu pour l’ame dudit deffunct. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou ou à son lieutenant à Thouars, et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné au Plesseys du Parc ou mois de mars l’an de grace mil cccc. quatre vings deux, et de nostre regne le vingt et deusiesme.

Ainsi signé : Par le roy, les contes de Clermont et de Dunois, l’evesque de Chalon, les sires de Curton et de Sainct Pierre

Le sire de Curton est Gilbert de Chabannes, conseiller et chambellan du Roi, gouverneur du Limousin (28 août 1480, Vaesen, Lettres de Louis XI, t. VIII, p. 266-268). Les autres personnages ont déjà été identifiés. [L.C.]

et autres presens. Amys. — Visa, Contentor, F. Texier.

MDCCXXXVI Mars 1483

Rémission octroyée à Jean Bizet de Moncontour, prisonnier à Poitiers, poursuivi comme complice de Jean d’Oyreveau (Airvault), dans l’assassinat de Macé Sireau, et coupable d’un faux.

AN JJ. 210, n° 61, fol. 35 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 590-594

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amys charnelz de Jehan Bizet, povre homme, chargé de femme et enfans, aagé de xxxv. ans ou environ, à present detenu prisonnier en la Conciergerie de nostre palais de Poictiers, contenant que feu Macé Sizeo, en son vivant demourant à Sainct Cler, près Moncontour, et ung nommé Jehan d’Oyrevau, demourant en la ville dudit Moncontour, avoient certain procès ensemble, qui dura longtemps au moien et én hayne duquel procès ledit Jehan d’Oyrevau conceut grant hayne contre ledit feu Sireo (sic), et par plusieurs foiz, en allant et venant, ledit d’Oyrevau parla audit Jehant Biret (sic), sondit feu Sireo, lui disant qu’il vouldroit avoir trouvé moyen de le faire mourir et que si ledit Biret povoit trouver façon de le faire, qu’il le quicteroit de la somme de cent livres tournois, en quoy icelluy Bizet et Eustace Rety lui estoient tenuz pour cause de prest. Et depuis, longtemps après, entre la feste de Pasques et de Penthecouste derrenieres passées, ung nommé Jaques Courtin, prebstre, se tira ung jour entre les autres en la maison dudit Bizet, auquel il demanda où estoit ledit Jehan d’Oyrevau, qui lui respondit qu’il ne savoit. Et adonc s’en allerent ensemble vers la maison dudit d’Oyrevau, et en allant, demanda ledit Courtin audit Bizet conmant il alloit du procès d’entre ledit feu Sireo et d’Oyrevau ; lequel respondit qu’il ne savoit, et ledit Courtin s’en alla parler audit d’Oyrevau. Et tantost après ledit Bizet aussi alla vers lesditz Constin et d’Oyrevau et oyt comme ledit Courtin disoit audit d’Oyrevau que si ledit feu Sireo s’en fust allé le soir devant, qu’il eust esté despesché, et qu’ilz avoient esté trois ou quatre en ung lieu appellé Puyblanc, estant entre ladicte ville de Moncontour et ledit Sainct Cler, pour occir ledit feu Sireo, lequel ilz avoient guecté par trois ou quatre foiz. Et oyt aussi lors comme ledit Courtin disoit audit d’Oyrevau qu’il convenoit envoyer querir ledit feu (sic) Sireo, pour venir passer certaines lettres de donnacion entre lesdiz Courtin et d’Oycevau (sic), et que ledit Bizet passeroit avecques ledit feu Sireo lesdictes lettres. Et après se departit d’illec ledit Bizet. Et le mardi dix septiesme jour de juing, ledit Bizet alla audit lieu de Sainct Cler pour certain procès qu’il y avoit, où il trouva ledit Sireo et lui dist qu’il convenoit qu’il allast le lendemain audit lieu de Moncontour et que ledit d’Oyrevau lui mandoit. Et adonc ledit Sireo estant à table pour soupper, escripvit certaines lettres missoires qu’il bailla audit Bizet pour les bailler audit d’Oirevau, ce qu’il fist. Et après que ledit Bizet eut baillé audit d’Oyrevau lesdictes lettres, icellui d’Oyrevau lui dist qu’il convenoit qu’il allast prandre la ferme de Monjehan appartenant au sr de Boisroques

Il s’agit évidemment de Bois-Rogue, cne de Rossay, con de Loudun, seigneurie qui appartenait au moyen âge à la famille de Coué (Dict. des familles du Poitou, nouvelle éd., t. II, p. 647). Jean de Coué étant mort sans enfants vers le milieu du xve siècle, nous ne savons comment le Bois-Rogue passa ensuite à la famille Sanglier, à laquelle il appartenait sans doute encore au moment des faits qui sont mentionnés ici. (Cf. Dict. des familles du Poitou, t. I, p. 616.) [L.C.]

(sic) et qu’il fust son plaisir de l’aller cueillir bien matin en sa maison ; Ce que fist icellui Bizet. Et commanda ledit d’Oyrevau à Petit Jehan d’Oyrevau son filz qu’il allast audit lieu de Sainct-Cler et qu’il dist audit Sireo qu’il vint parler à lui, ce que fist ledit filz d’icelui d’Oyrevau. Et ainsi l’avoient entreprins faire lesdiz d’Oyrevau et Bizet. Et puis après s’en alla ledit Bizet en la maison dudit Courtin, assise audit lieu de Moncontour, pour [de] lui savoir s’il voulloit acheter de la toille, de quoy autres foiz ilz avoient parlé ensemble. En laquelle maison estoit lors ledit feu Sireo, lequel ledit Bizet salua en disant Bona dies, et parlèrent ensemble de ladicte toille et puis après ledit Courtin lui dist que ledit feu Sireo éstoit venu illecques pour ce qu’il savoit et qu’il le convenoit despescher. Lequel Bizet ne respondit aucune chose audit Courtin et s’en alla parler à ung nommé Pierre Turpault, pour savoir s’il vouloit aller avecques lui à Lodun, pour porter le rolle de la taille, pour estre signé des esleuz et d’ilec s’en alla à sa maison prandre ce qu’il lui estoit neccessaire pour porter audit lieu de Lodun. Et lui estant près le jardin du chasteau dudit lieu de Moncontour, en attendant ledit d’Oyrevau, qui lui avoit promis d’aller audit Lodun, ledit feu Sireau (sic) arriva illeques, qui demanda audit Bizet où estoit ledit d’Oyrevau, qui lui respondit qu’il estoit en son jardin illec près. Lequel Sireo ne entra oudit jardin, mais s’en alla contre bas la rue, et aussi ledit Bizet s’en alla vers la maison dudit Turbault, pour le soliciter de rechief d’eulz en aller audit lieu de Loudun. Et puis s’en alla à la maison dudit d’Oyrevau par la porte derrière ou illec il trouva ledit d’Oyrevau et feu Sireo qui avoient grant noise ensemble et se reprouchoient l’un l’autre qu’ilz s’estoient deserviz en procès, et que ledit feu Sireo estoit cause de la mort de son beau-père. Et quand ledit d’Oyrevau vit que ledit Bizet fut arrivé, se print audit feu Sireo, ainsi qu’ilz avoient entreprins faire. Et ainsi qu’ilz se combatoient l’un l’autre, ledit Bizet print ung pié de banc qu’il savoit où estoit, dont il frappa ung coup seullement ledit feu Sireo sur la teste, tant qu’il le tumba sur ung coffre, et se escria, en disant : « A, ribault, tu m’as frappé ! » Et incontinant ledit Bizet s’en sortit hors la maison et lessa lesdiz feu Sireo et d’Oyrevau ensemble, et s’en alla chez ung nommé Pierre Turon, avecques ung nommé André Alart, Gregoire Gosse et Pierre Lory, pour desjeuner, et eulx estans illec, survint ledit d’Oyrevau qui se mist de leur escot. Et quant ilz eurent desjeuné, ledit d’Oyrevau s’en alla à Mirebeau et ledit Bizet à Lodun, pour aucunes leurs afaires. Et icellui mesmes jour, ledit d’Oyrevau se rendit audit lieu de Lodun, où illec il trouva ledit Bizet, et eulx estans ensemble, ledit d’Oyrevau dist audit Bizet que ledit Sireo estoit mort. Auquel d’Oyrevau ledit Bizet dist telles parolles ou semblables : « Qui l’a tué ? » Et ledit d’Oyrevau respondit : N’en sçay tu rien ? » — « Non, dist ledit Bizet. » Et lors ledit d’Oyrevau lui dist : « Puisque tu n’en say rien, tu n’en sauras rien ne autre chose pour moy. » Et après ce, ledit suppliant et d’Oyrevau s’en retournèrent audit lieu de Moncontour, et en leur compaignie ung nommé Jehan Robert, et eulx estans ou chemin, entreprindrent de porter ledit feu Sireo en la rivière de la vieille Dyve qui passe audit lieu de Moncontour. Lequel d’Oyrevau, la nuit ensuivant, environ unze heures, se transporta en la maison dudit Bizet, lequel estoit cousché avecques sa femme, pour aller chez lui, et quant il fut en la maison dudit d’Oyrevau, il vit ledit feu Sireo mort, entre deux tables, qui avoit ung sac en la teste, et aussi estoit lié de cordes les piez et les mains. Lequel Bizet n’avoit veu ledit feu Sireo, depuis le jour devant au matin comme dit est, à l’eure qu’il lui bailla ledit coup dudit pié de banc, et ne l’avoit icelluy Biret (sic) lyé desdictes cordes ne aidé à ce faire, mais croit que ce avoit fait ledit d’Oyrevau. Et incontinant prindrent ledit feu Sireou (sic), ainsi lié comme dit est, savoir est ledit d’Oyrevau par la teste et ledit Bizet par les piez, et le portèrent en ladicte rivière de la Vieille Dyve, pour crainte de justice et misdrent sur lui des pierres, des espines et des arsons de bois, afin qu’il ne levast sur l’eaue ; et ce fait, s’en allèrent en la maison dudit Bizet. Et puis après, le derrenier jour de novembre derrenier passé, ledit Bizet se transporta en la ville de Poictiers, en la compaignie d’un nommé Mathurin Bizet, son frère, chez Mathurin Michet, presbstre, et Jacquet Germon, notaires, demeurans audit Poictiers ausquelz il fist signer, à la requeste dudit d’Oyrevau qui estoit absent [une cedule] par laquelle icelluy d’Oyrevau congnoissoit et confessoit avoir eu et receu dudit Jehan Bizet la somme de quatre vings livres tournois, pour l’admortiment de soixante dix solz tournois de rente que lui devoit ledit Bizet ; de la quelle rente ledit d’Oyrevau confessoit par ladicte cedulle l’en tenir quicte. Et en ce faisant, icellui Bizet se nommoit, devant lesdiz notaires, Jehan d’Oyrevau et faisoit nommer ledit Mathurin, son frère, Jean Bizet. A l’occasion desquelz cas ledit Jehan Bizet se mist en franchise ès Carmes de Poictiers

D’après Jean Bouchet, Annales d’Aquitaine, Poitiers, 1644, in-fol., p. 216 et Thibaudeau, Hist. du Poitou, t. I (1839), p. 404, suivis par Ledain, Hist. de Poitiers, Fontenay, 1889, p. 102, c’est à Jean Chandos, sénéchal du Poitou pour le roi d’Angleterre, que serait due la fondation des Carmes de Poitiers. Thibaudeau la place en 1366. [L.C.]

, où depuis il a esté prins et constitué prisonnier esdictes prisons, en grant povreté et misère et en dangier de miserablement y finir ses jours se par nous ne lui estoit sur ce pourveu de noz grace, quictance, remission et pardon, si comme il dit, humblement requerant iceulx. Pour ce est il que nous, etc., audit suppliant, en l’onneur

Il s’agit sans doute d’une grâce octroyée le vendredi saint, en l’honneur de la Passion. En 1483, la fête de Pâques se célébra le 30 mars.

, etc., avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessus dit avecques toute peine, etc., en mettant au neant, etc. Et l’avons restitué, etc., satisfacion, etc. Et imposons, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné au Plesseys du Parc ou mois de mars l’an de grace mil cccc. quatre vings et deux, et de nostre règne le xxiie.

Ainsi signé : Par le roy tenant ses requestes. Bessonet. Visa-Contentor …

MDCCXXXVII Avril 1483

Rémission octroyée à James Bichet, originaire d’Écosse, sergent et garde forestier de Jacques Vernon, chevalier, seigneur de Montreuil-Bonnin, et à Macé Paton qui lui avait prêté main forte, pour le meurtre de Guillaume Agin, dont les enfants avaient été pris en flagrant délit de vol de bois et qui avait voulu s’opposer par la force à la saisie de sa charrette et de ses bœufs.

AN JJ. 207, n° 296, fol. 135 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 595-600

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de James Bichet, natif du royaume d’Escosse, aagé de xxxvi ans, et de Macé Dynnel, dit Paton, povre homme de labour, aagé de xxiiii. ans, chargez de femmes et grant nombre d’enfans, demourans à present à Monstereul Bonin ou pays de Poictou, contenant que depuis neuf ou huit ans ença ledit Bichet a servy et demouré avecques nostre amé et feal conseiller et chambellan Jaques Vernon

Sur Jacques Vernon, voy. Arch. hist. du Poitou, t. XXXVIII, p. 130.

, chevalier, seigneur dudit lieu de Monstereul Bonin, ouquel service il s’est bien et honnestement gouverné, au moien de quoy nostredit conseiller et chambellan, le voyant bon et loyal serviteur, le fist, crea et constitua en sadicte seigneurie son sergent et officier, et lui donna la garde de ses bois et forestz, qui sont beaulx bois de grant garde et longue estandue, ce que ledit James a tousjours depuis fait, sans y avoir acquis aucun mauvais bruit ne exedé les termes de justice. Et le jeudi de la Samrie (sic) xxiiie du mois de mars derrenier passé

Cette date est inexacte : le 23 mars 1483 était un dimanche ; c’est en 1480 que le 23 mars tomba un jeudi. Cette anomalie pourrait s’expliquer par l’insertion mot pour mot dans les lettres de rémission d’une supplique écrite en réalité quelques années plus tôt. Ce que nous ne pouvons expliquer, c’est le terme « jeudi de la Samrie ». On appelle quelquefois la Samaritaine le vendredi de la 3e semaine de Carême, mais le 23 mars tombe dans cette semaine, en 1476, un samedi, puis en 1484, un mardi, et point entre les deux. [L.C.]

, ledit Bichet, voullant excercer sondit office en soy acquictant envers sondit seigneur et maistre, se partit au bien matin du bourg dudit lieu de Monstereul Bonin pour aller garder et visiter lesdit bois et fourestz et veoir s’il y trouveroit aucuns malfaiteurs en iceulx, et avecques lui mena ung povre homme de labour, nommé Simon Gerbault pour l’acompaigner et estre record des esploiz qu’il feroit. Et quant ilz furent èsdictes forestz, comme environ une lieue en tirant vers le bourg de Latilhé, trouvèrent deux jeunes compaignons, enfans de feu Guillaume Agin et avec eulx ung jeune compaignon qu’on disoit estre varlet dudit Agin, qui avoient une charrete et deux beufs qu’ilz conduisoient et estoient arrestez au dedans desdictes forestz et chargeoient ladicte charrète et y avoient ja mis certaine quantité de bois d’icelle forest, combien que ledit feu Agin ne feust en riens usaigier d’iceulx bois et forestz, et par ce n’avoient lesdiz compaignons aucun droit ne auctorité de en prendre ne en emporter, ains estoient admendables envers ledit seigneur de Monstereul Bonin et leurdiz charrète et beufs confisquez à ladicte seigneurie par et selon l’usaige et coustume qu’on garde en icelle seigneurie et chastellenie et que de toute ancienneté on y a gardée. Et à ceste cause ledit James suppliant et ledit Gerbault son record ou compaignon dirent ausdiz compaignons qu’ilz avoient forfait contre ledit seigneur de venir rober lesdiz bois et que leursdiz beufz estoient confisquez à ladicte seigneurie ; lesquels beufz et charrète ledit James en usant de son office saisist et mist en la main de justice, ainsi que raison estoit, et lui et ledit Gerbault s’efforcèrent les mener et conduire audit chasteau de Monstereul Bonin, pour en estre fait la raison telle qu’il appartenoit. Et avoit ledit James ung espiot et ledit Gerbault n’avoit aucun baston, mais print l’aguillon que lesdiz compaignons avoient, avec lequel il se mist à conduire lesdiz beufs et charrète droit audit chasteau de Monstereul Bonin. Lesquelz compaignons ainsi trouvez en meffait que dit est, si tost qu’ilz virent qu’on en menoit leur charrète et beufs, s’en retournèrent acourans devers ledit Agin, qui, tantost qu’ilz lui eurent dit le cas, print ung baston tannis et ledit son varlet ung autre, monstèrent chacun sur ung cheval ou jument et s’en vindrent au devant desdiz charrète et beufs et les trouvèrent près l’ostel de Mathurin Poignet, receveur dudit Monstereul Bonin, en laquelle maison ledit James suppliant s’estoit mis et laissoit à mener ladicte charrète et beufs audit Gerbault. Et comme il eut esté ung peu en ladicte maison s’en sortit dehors pour veoir si ledit Gerbault amenoit lesdiz beufs et charrète, et ainsi qu’il fut dehors d’icelle maison, veist venir ledit feu Agin, ung de sesdiz enfans et sondit varlet avecques lui qui s’adressoient audit Gerbault et de prime face ledit Agin osta l’aguillon audit Gerbault et fist incontinant retourner lesdiz beufs et charrète. Laquelle chose voyant, ledit James s’en alla droit à eulx avecques sondit espiot qu’il a acoustumé porter quant il va visiter lesdiz bois, et quant il vit ledit Agin qui vouloit recourre lesdiz beufs et charrète, il se mist au devant pour empescher que ledit Agin ne les enmenast. Et quant ledit Agin, qui estoit plain de grant couraige, aagé de xl. à l. ans, vit que ledit James retournoit lesdiz beufs, bailla ledit aguillon à ung des compaignons estans avecques lui en lui disant qu’il conduit sit lesdiz beufs et charrète en leur maison. Et ce fait, ledit Agin avec sondit baston de tannis de cinq piez de long ou environ [vint] audit James, le cuidant faire retirer de devant lesdiz charrète et beufs, lui cuidant bailler ung coup de sondit baston sur la teste, mais ledit James lui rabbatit ledit coup tellement que pour celle foiz il lui toucha aucunement. Et tantost ledit coup rabatu, ledit James print ledit Aigin au collet et le tumba par terre, et quant il l’eut tumbé, lui aida à relever lui mesmes, sans lui faire aucune violence, en lui disant qu’il estoit fol d’y venir par telles voyes et que s’il estoit saige, il se tireroit vers la dame dudit lieu qui estoit ondit chasteau de Monstereul Bonin, en absence dudit seigneur, son mary ; [et que] elle lui rendroit sesdiz beufs et lui feroit grace pour bien peu de chose. A quoy ledit Agin fist responce audit James qu’il n’en feroit riens, disant que par le sang Nostre Seigneur il n’enmeneroit point lesdiz beufs et charrète et qu’il se feroit plus tost tuer que le souffrir [et qu’ilz lui fussent rendus

Mots suppléés.

] sur le champ ou tueroit ledit James. Et en ce disant, ledit Agin ou sondit varlet lui donnèrent d’un desdiz bastons de tannis qu’ilz avoient au travers les rains tant qu’ilz peurent ramener, dont ledit James se trouva tout esmeu et oultraigé, et à ceste cause dudit espiot qu’il avoit il tourna la hampe et en frappa ledit Agin et sondit varlet chacun ung coup sur les bras. Et ce pendant qu’ilz se debatoient, le filz dudit Aigin enmenoit tousjours ladite charrète ; et quant ledit James se vit ainsi oultragé, voyant qu’il y avoit deux compaignons ou grant chemin public près d’illec, c’est assavoir ledit Macé Dynnel, dit Paton, suppliant et ung nommé Petitcru, leur cria à l’aide et qu’ils le voulussent secourir. Lequel Macé suppliant qui avoit ung esguillon dont il touchoit lesdiz beufs et charrète, car il venoit desdiz bois querir une charrète de bois pour ledit Petitcru. Lequel Petitcru qui oyt ledit cry dist audit Paton suppliant qu’il allast aider audit James et que estoit en neccessité, ce qu’il fit, et en y allant print ung [pal] à une palice ou cloison estant en son chemin et vint à l’assemblée. Et comme il fut près d’eulx, ledit feu Aigin lui dist tout esmeu telles parolles : « Retourne t’en, si feras que saiges » ; et y avoit entre eulx deux une palice, et si comme ledit Paton cheminoit droit à eulx, ledit Agin lui dist telz motz : « Par le sang bien, se tu ne t’en retournes, tu t’en repentiras. » Et lors ledit Macé s’avança plus fort de venir à eulx et ainsi qu’il s’approuchoit, ledit Aigin leva sondit baston de tannis et le cuida frapper. Lequel Paton suppliant desmarcha tellement que le coup dudit Agin tumba à terre, et laquelle chose voyant, ledit Paton suppliant leva ledit pal qu’il tenoit et en bailla ung coup sur la teste dudit Agin jusques à effusion de sang, et aussi ledit James voyant l’oultraige dudit Agin lui bailla de la hampe dudit espiot ung coup sur la teste tellement que icellui Agin tumba à terre. Et après lesdiz supplians vindrent ausdiz beufs et charrète et les misdrent ondit chemin pour les mener ondit chastel de Monstereul Bonin, mais ce non obstant lesdiz filz et varlet dudit Aigin levèrent icellui Agin et de rechief vindrent ensemble ausdiz supplians pour cuider recourre lesdiz beufs et charrète. Laquelle chose voyans, lesdiz supplians vindrent de rechief sur ledit Agin et lui donnèrent chacun d’eulx ung coup sur les bras, et après ledit James le poussa de la hampe de sondit espiot tellement qu’il en tumba à terre ; et quant il fut tumbé, iceulx supplians enmenerent lesdiz beufs et charrète et laissèrent ledit Aigin ondit estat. Lequel tantost après et en icellui jour, comme l’on dit, fut mené en l’ostel d’un povre homme nommé Morrigon où il a demouré malade par l’espace de douze jours, quoy que soit le douziesme jour après, au moien de ce que ledit Aigin avoit esté naguères très fort malade de fièvres qui l’avoient tenu longtemps, que aussi il n’avoit esté pensé ne gouverné de sesdictes playes et basteures comme il appartenoit, ou autrement, est allé de vie à trespas. Et combien que lesdiz supplians en faisant ce que dit est fust et soit en deffendant leurs personnes et que ledit feu Aigin estoit agresseur en tant qu’il avoit envoié prandre ledit bois esdictes forestz, sans auctorité ne droit qu’il y eust de ce faire, et que de prendre et enmener lesdiz beufs et charrète appartenoit ondit James suppliant à cause de sondit office et que l’oultrage fait audit James de vouloir ainsi par sa force recourre lesdiz beufs et charrète estoit enfraindre la main de justice, et par ce appartenoit bien audit suppliant d’en garder la force audit seigneur de Monstreul Bonin, et y appeller secours et aide pour ce faire, toutesvoyes iceulx supplians, doubtans rigueur de justice se sont mis en l’église et advouent franchise, où ilz sont en grant povreté et misere et dont leursdiz femmes et enfans ont de grans affaires et neccessitez, et sont en voye de mendier et encores pourroient plus estre s’il ne leur estoit sur ce pourveu de nostre grace et misericorde, en nous humblement requerant que de leur (sic) part n’ont esté agresseurs et que ledit feu Aigin pendant lesdiz douze jours qu’il a esté malade en l’ostel dudit Morrigeau (sic), il a racongneu qu’il avoit tort en ladicte matière et que ledit James n’avoit fait sinon ce qu’il devoit faire à cause de sondit office et requis pardon de l’oultrage qu’il lui avoit faicte et qu’il lui pardonnoit à lui et audit Paton sa mort, si elle s’en ensuivoit, et les quictoit du tout en tout en faisant ramener et mettre sadicte charrète en sa maison, ce qu’ilz ont fait, que de tout temps et d’ancienneté lesdiz povres suplians ont esté de bonne vie et vescu honnestement, etc., il nous plaise leur quicter, remettre et pardonner les faiz et cas dessusdiz et sur ce leur impartir nostredicte grace et misericorde. Pour quoy nous, etc., voulans, etc., ausdiz supplians et à chacun d’eulx avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessusdit avecques toute peine, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Tours ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. quatre vings trois, et de nostre règne le xxiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. Guillart. — Visa. Contentor.

MDCCXXXVIII Mai 1483

Lettres d’amortissement d’une rente de treize livres donnée pour la fondation de deux messes chaque semaine à l’église de Saint-Laon de Thouars par Léonat Martin, demeurant en ladite ville, et Guillemine de Hautefeuille, damoiselle, sa femme, femme de chambre de la Reine, en exécution d’un legs de feu Héliot Martin. leur frère et beau-frère, dont ils étaient les héritiers principaux.

AN JJ. 209, n° 286, fol. 160 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 600-603

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de noz bien amez Leonnet Martin, demourant à Thouars, et Guillaumine de Haulte fueille, damoiselle, sa femme, naguères lavandière de nostre corps et de present femme de chambre de nostre très chère et très amée compaigne la royne, contenant que dès pieça Helyot Martin, son frère germain, alla de vie à trespas sans hoir procréé de sa chair, delaissé ledit suppliant son héritier principal ; auquel par son testament il ordonna estre dictes chacune sepmaine en l’eglise Monseigneur Saint Laon de Thouars deux messes, l’une le samedi, de Nostre-Dame, et l’autre des Mors le lundi, avant souleil levant, pour le salut de son ame et de ses parens et amis trespassez, et icelles estre fondées jusques à telle somme qui seroit advisée par gens en ce congnoissans, laquelle somme icellui suppliant seroit tenu faire admortir et indampner, comme il est plus à plain contenu et declairé par les lettres dudit testament. Pour lequel acomplir, icellui suppliant est esté (sic), puis aucun temps ença convenu en la court de nostre amé et feal conseiller l’evesque de Poictiers, par devant son official audit lieu, par devant le maistre des testamens et illec néanmoins qu’il face dire lesdictes messes par chacune sepmaine et que les heritiers de la femme dudit feu Helyot Martin, après son trespas, eussent prins la charge de faire l’admortissement desdites messes, a esté condampné et admonesté de fournir xiii. livres de rente pour la fondacion d’icelles et de les faire par nous indampner et admortir, en ensuivant le vouloir dudit testateur, comme son principal heritier, dedans certain temps qui de brief expirera, sous peine de sentence d’excommeniement ; ce que les diz supplians feroient vouluntiers un heritage à la valleur, s’il nous plaisoit icelle rente admortir et indampner, en nous humblement requerant sur ce nostre grace et provision. Pour quoy nous, ce que dit est considéré, inclinans liberallement à la supplicacion et requeste des diz supplians, pour la singulière et entière devocion que nous avons de tout temps eue à la benoiste glorieuse Vierge Marie, dont l’une des dictes messes est fondée, et à ce qu’elles soient mieux entretenues le temps avenir, et que lesdiz supplians ou leurs successeurs soient plus enclins de prier Dieu et sa benoiste mère, pour nostre prosperité et lignée, et de nostre filz le Daulphin, et la bonne paix et union de nostre royaume, et afin que soyons participans ésdictes messes ; pour ces causes et aussi pour consideracion des grans, bons et louables services que la dicte Guillemine suppliante, dès le temps de son jeune age a fait à feue nostre très chière et très amée mere la royne Marie, cui Dieu pardoint, et à nous après son trespas, et fait encoures à nostredicte compaigne, et autres consideracions à ce nous mouvans, avons en faveur des diz supplians, admorti et à Dieu dedié, admortissons et dedions, de nostre grace especial, par ces presentes, lesdictes treize livres de rente ou heritage à la valleur que iceulx supplians ont acquises ou qu’ilz ont entencion d’acquerir le plus tost qu’ilz pourront, pour satisfaire au vouloir dudict deffunct, en quelque lieu qu’elles soient assises et constituées, en fief, arrière fief censive ou arrière censive. Et voulons et nous plaist que les gens d’eglise à qui ilz bailleront et delaisseront lesdictes treize livres de rente ou autre heritaige ou possession à la valleur, les puissent tenir, posséder et exploicter à tousjours mais perpetuellement, comme admorties et à Dieu dediées, sans ce qu’ilz et leurs successeurs soient tenuz ne puissent estre contrains de les mettre et vuyder hors de leurs mains, comme de main morte, ne d’en paier pour le temps avenir, à nous ne a noz successeurs, aucune finance de francfief ou indampnité ; et laquelle finance ou indampnité nous leur avons donnée, quictée et aumosnée, donnons, quictons et aumosnons, à quelque valleur qu’elle se puisse monter, de nostredicte grace, par cesdictes presentes, lesquelles nous avons pour ce signées de nostre main. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers à Paris, au seneschal de Poictou ou à son lieutenant à son siège de Thouars, et à tous, etc., que de noz presens don, admortissement, octroy et choses dessus dictes ilz facent, souffrent et laissent lesdiz supplians et aussi ceulx à qui ilz bailleront lesdictes xiii. livres de rente ou la valleur, et leursdiz successeurs, joir et user plainement et paisiblement, sans leur faire ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné, ores ne pour le temps avenir, aucun destourbier ou empeschement au contraire ; lequel, se fait, etc., au premier estat et deu. Car ainsi nous plaist il estre fait, nonobstant que ladicte finance, etc., ne soit cy autrement specifiée, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné au Plesseys du Parc ou mois de may l’an de grace mil cccc. quatre vings et trois, et de nostre règne le vingt et deuxiesme.

Ainsi signé : Loys. — Par le roy. Ja. Erbault. — Visa. Contentor. F. Texier.

MDCCXXXIX Mai 1483

Rémission accordée à Martial de Châtelart, laboureur, et à sa mère, établis depuis quatre ans à Latières, dans l’enclave poitevine d’Arnac, qui avaient commis un homicide en défendant celui-ci son père, et celle-là son mari, Huguet de Châtelart, poursuivi et maltraité par plusieurs habitants de Châtelart, qui voulaient le contraindre à payer la taille en l’élection de Limousin, alors qu’il était inscrit sur les rôles du commis des élus du Poitou pour ladite enclave.

AN JJ. 209, n° 274, fol. 153 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 603-607

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Marcial du Chastellart, dit de Latières, et de Huguete, sa mère, demourant audit lieu de Latières en l’aclave d’Arnac en nostre païs et conté de Poictou, povres gens de labour, contenant qu’il a quatre ans ou environ que Huguet de Chastellart, dit de Latières, père et mary desdiz supplians, s’en vint demourer du lieu de Chastellart, où il estoit pour lors demourant, en l’election de Limosin, en certaines maisons, dommaines et heritaiges qu’il a audit lieu de Latières, lequel lieu est assis en l’election de Poictou, et par ce moien a esté contribuable à paier les deniers des tailles (sic) de noz aides mises sus en nostredit païs de Poictou, en ladicte enclave d’Arnac, aux collateurs de ladicte enclave. Et depuis ledit temps de quatre ans, noz colleteurs et commis à lever noz deniers mis sus en ladicte enclave ont enrotulé en leur roolle icellui Huguet de Latières, et icellui ont tauxé et imposé à certain taux par chacun an ; lequel il a bien et deuement paié aux commissaires de nosdiz deniers en ladicte enclave de Poictou, et y a depuis icellui temps tenu feu et lien, par ce qu’il y avoit tous ses biens, et fait sa continuelle residence. Et depuis, icellui Huguet de Latières, le xxie jour du mois d’avril derrenier passé, print ses deux beufs et se transporta audit lieu de Latières, en certaine pièce de terre qui lui compette et appartient, estant audit lieu de Chastellart, qui est assis en l’election de Limosin ; et ainsi qu’il labouroit en ladicte terre, oyt ung grant bruit et apperceut que ung nommé Pierre Poste, soy disant nostre sergent, acompaigné de Estienne Guerreau, soy portant sergent de la baronnie de Maignac, Mathieu Andrieu, Simon Rangon, Jehan Polliget, Vallent des Bordes, Marcial du Chastellart, Simon Plantineau, tous demourans en l’election de Limosin et contribuables à paier nosdiz deniers en la parroisse d’Arnac en nostre election de Limosin ; aussi estoit en leur compaignie Jehan Cathelin, Jehan Clemençon et Jehan Guillemot qui se disoient avoir esté commissaires l’année passée de ladicte parroisse d’Arnac, pour lever les deniers de ceulx qui estoient contribuables en ladicte election de Limosin, embastonnez les aucuns d’eulx de grans cousteaulx et autres bastons invasibles, et vindrent devers icellui Huguet, qui labouroit, comme dit est, et eulx arrivez, comme mal esmeuz s’efforcèrent batre lesdiz beufs, desquelz ledit Huguet labouroit, voulans supposer l’avoir tauxé en ladicte election de Limosin. Quoy voyant ledit Huguet leur dist et declaira qu’il n’estoit en riens leur tenu et qu’il avoit très bien paié le taux à quoy il avoit esté tauxé par les commissaires de ladicte enclave d’Arnac, dudit païs de Poictou où il a depuis quatre ans contribué, qu’il s’opposoit afin qu’ilz ne lui feissent aucune chose. Et parce que, nonobstant son opposition, ilz s’efforçoient emmener lesdiz beufs, combien que leur commission estoit expirée, appelle d’eulx par plusieurs foiz en adherant à son premier appel. Mais nonobstant lesdictes appellacions par lui interjectées, les dessusdiz s’efforcerent de prandre lesdiz beufs, mais icellui Huguet les destella et les pourchassa, tellement qu’il les fist aller près certain boucaige tirant vers ledit lieu de Latières, qui est ès fins et mettes de ladicte ellection de Poictou. Les dessusdiz Poste, Cathelin, de Montmaignen (sic) et Dubrault suivirent ledit de Latières en faisant ung grant bruit et en le menassant très fort. Auquel bruit survint ladicte suppliante, Grant Jehan de Latières, son fils, Jehanne sa femme, Mathurin Gallant, Marguerite, sa femme, ledit suppliant et Valère, sa seur, et illecques eulx arrivez, ledit Grant Jehan de Latières, d’un petit cousteau de quoy il couppoit son pain couppa les julles de quoy estoient liez lesdiz beufs tellement qu’il les fist evader. Lesquelz Poste, Cathelin, de Montmaigne et Dubrault les suivirent plus d’un traict d’arc au dedans de ladicte election de Poictou, et voyant qu’ilz ne les povoient avoir, se prindrent audit Huguet de Latières, lequel ilz gectèrent par terre et blessèrent très fort d’un grant cousteau en la cuisse et en la main, combien qu’il appelast d’eulx, et le vouldrent trayner et mettre hors dudit païs de Poictou, pour en faire leur plaisir et voulenté. Et pour le secourir, survindrent ladicte Jehanne, femme dudit Grant Jehan, Marguerite, femme dudit Mathelin, et ladicte Vallère, fille dudit Huguet, lesquelles, tant pour la resistence qu’elles faisoient avecques autres des dessus nommez, qui disoient aux dessus diz qu’ilz faisoient mal de ainsi le traicter, mais non contens de ce, prindrent en ung champ, près la maison dudit Huguet, en ladicte élection de Poictou jusques au nombre de xxxv. à xl. aigneaulz appartenans à icellui Huguet et en mangèrent trois ; mais ce nonobstant et qu’ilz eussent lesdiz aigneaulx, ledit Poste, mal esmeu, en disant qu’il ne povoit mal faire et qu’il en seroit bien soustenu, se transporta audit lieu de Latières qui estoit illecques pris, et à la porte de la grange dudit Huguet où illec se trouverent lesdiz Cathelin et autres dessusdiz et ladicte suppliante, laquelle leur remonstra qu’ilz faisoient mal de ainsi le traicter, attendu qu’ilz estoient appellans d’eulx ; mais ce neantmoins, ledit Poste par force voulut entrer en ladicte grange. Au devant de laquelle porte ladicte suppliante estoit pour lors seulle, leur dist qu’ilz n’y entreroient point. Et ce voyant, ledit Poste dist audit Jehan Clemençon et autres dessus diz qu’ilz lui aidassent à oster ladicte suppliante de la dicte porte, en disant : « Prenez vous y, prenez, de par le diable, a oster ceste vieille. » Lequel Clemençon se print à ladicte suppliante tant rigoureusement avec ledit Poste, qui la tenoit et pressoit très fort et oultrageoit de sa personne [que] ledit Marcial suppliant, qui illec survint au bruit en icelle heure, voyant qu’on pressoit sadicte mère, esmeu d’amour naturelle en venant vers elle trouva en son chemin ung petit tranc

Godefroy mentionne ce mot d’après le présent texte et n’en cite point d’autre exemple. (Dict. de l’anc. langue française, t. VIII.)

, duquel on a acoustumé oster le fiens des bestes, duquel il donna audit Clemençon de Montmaigner, ung seul coup sur la teste, duquel il tumba, dont sadicte mère supliant fut très fort courroucée. Et le redressèrent et lui redressé s’en alla d’illecques jusques audit lieu d’Arnac, de son pié, distant dudit lieu de Latières d’un quart de lieue ou environ, où illec il vesquit depuis ledit jour de lundi jusques au dimenche après ensuivant qu’il alla, par deffault de bon gouvernement ou autrement de vie à trespas. Pour occasion duquel cas, lesdiz supplians, doubtans rigueur de justice, se sont absentez du païs et n’y oseroient jamais seurement retourner, converser ne reppairir, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, en nous humblement requerant que, attendu que lesdiz supplians ont toujours esté de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans jamais, etc. Pour quoy nous, etc., voulons, etc., ausdiz supplians et à chacun d’eulx, avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessus declairé, avecques toute peine, etc., en mettant au neant, etc. Et l’avons restitué, etc. Satisfacion, etc. Et imposons, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, ou mois de may l’an de grace mil cccc. quatre vings et trois, et de nostre règne le vingt et deuxiesme.

Ainsi signé. Par le roy, à la relacion du Conseil. [Nom en blanc.] — Visa. Contentor. J. Duban.

MDCCXL Mai 1483

Rémission obtenue par Jean Jeudy, boucher de la Rochelle, arrêté à Fontenay-le-Comte et condamné à être pendu par le lieutenant du sénéchal de Poitou en cette ville, pour plusieurs vols et divers autres méfaits.

AN JJ. 210, n° 13, fol. 11 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 607-610

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amys charnelz de Jehan Jeudy, bouchier, filz de feu Philippon Jeudy, en son vivant demourant en la ville de la Rochelle, povre homme, aagé de xxii. à xxiii. ans ou environ, non marié, contenant que xi. ans a ou environ, ledit Philippon Jeudi, son pere, alla de vie à trespas et le delaissa en l’age de xi. à xii. ans ; depuis lequel trespas s’est trouvé en la compaignie d’aucuns de ladicte ville de la Rochelle, en la maison de Regnault Testart, à prendre une jeune femme joyeuse, qui estoit mal famée et renommée de son corps, dont icellui Testart s’est d’icellui Jehan Jeudi depuis tenu pour content, comme il peut apparoir par appointement entre eulx sur ce fait. Et depuis ledit Jehan Jeudi et certains autres des compaignons se transportèrent au lieu de Pensac où ilz prindrent en l’ostel d’un prebstre une femme qui estoit en habit de homme qui avoit couronne sur la teste, et leur donna ledit prebstre où elle estoit trois escuz d’or pour la ravoir. Et certain autre temps [après] se transportèrent lui et sesdiz autres compaignons en l’ostel d’un nommé Jehan Fumée où ilz prindrent une autre femme mal renommée de son corps, qui estoit illec, gardée et entretenue de ung prebstre ; prindrent aussi deux robbes, l’une à l’usage de homme et l’autre à usaige de femme ; laquelle robbe à usaige de homme icellui Jehan Jeudi acheta de ses compaignons la somme de soixante ung solz sept deniers. Et certain jour ung nommé Regnault Vaslin voult prandre ledit Jehan Jeudi au corps, lequel Jeudi, lors ignorant qu’il fust nostre sergent tira ung cousteau qu’il avoit pour le frapper, mais il ne l’en frappa point. Et trois ou quatre foiz, pour ce qu’il estoit tart quant il venoit de dessus les champs pour querir les marchandises à lui neccessaires pour le fait de son mestier et qu’il trouvoit les portes de ladicte ville fermées, a passé par ung couex ou pertuys par ou l’on gecte les inmondicitez de la boucherie de ladicte ville ; et derrenièrement la vigille de la feste de Noël derrenière passée, y passa pour estre à matines et oïr le divin service. Par trois ou quatre autres foiz a entré par ung creneau qui est fort bas en ladicte ville, estant ledit creneau à l’endroit de Saint Nicolas, non cuidant en ce faisant mesprandre envers nous ne justice. Aussi pour ce que ung nommé Bertran Chevalier, qui avoit esté actaint et convaincu de larrecin, publicquement menassoit de oultraiger icellui suppliant et ses compaignons lequel avoit une belle espée que lui et ses compaignons desiroient avoir, ilz le trouvèrent ou villaige de Lafons et lui ostèrent deux pièces d’or dont icellui supliant n’eust aucune chose. Depuis lesquelles choses ledit supliant, voyant qu’il avoit esté adjourné par quatre termes ou esdiz pour raison des choses dessusdictes par devant le gouverneur de la Rochelle ou son lieutenant, doubtant rigueur de justice, n’a comparu ausdiz jours à lui assignez, à laquelle causé a esté banny de ladicte ville. Et ce voyant, a esté et s’est transporté en plusieurs païs et lieux champaistres, avec autres jeunes gens ses compaignons, lesquelz et lui en leur compaignie se transportèrent ung jour ou bourg de Champaigné le Sec, autrement dit Champaigné le Marois ; lesquelz ses compaignons prindrent illec, lui estant ou lit couchié, une femme assez ancienne, nommée Layessilli, laquelle ilz amenèrent devant lui, disans qu’elle estoit sorcière et qu’il en failloit faire pugnicion, de laquelle lesdiz compaignons eurent certaine somme d’argent, dont ledit suppliant n’eust aucune chose. Lequel Jehan Jeudi et ses compaignons estans oudit bourg de Champaigné le Sec furent prins et constituez prisonniers en noz prisons de Fontenay le Comte, esquelles prisons ledit Jehan Jeudi a esté par aucun temps et encores est detenu et par le seneschal de Poictou ou son lieutenant ou accesseur audit lieu de Fontenay condampné à estre estranglé et noyé, dont soy sentant agrevé, a appellé à nous et à nostre court de Parlement ; lequel appel il n’a encores relevé et est dans le temps de ce faire. Et combien qu’il die et maintienne avoir très bonne cause et matière d’appel, attendu le jeune aage dont il est et estoit lors qu’il a fait et commis les cas dessusdiz, ce non obstant il seroit contant soy desister dudit appel, s’il nous plaisoit le mettre au neant et lui impartir sur ce noz grace et misericorde, si comme il dit, humblement requerant [attendu] ce que dessus est dit et que en tous autres cas il est bien famé et renommé, et ne fut jamais actaint ne convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise nosdictes grace et misericorde lui impartir sur ce. Pour quoy nous, etc., voulans, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessusdit, avecques toute peine, etc. Et l’avons restitué, etc., satisfacion, etc. Et imposons silence, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou ou à son lieutenant audit lieu de Fontenay le Comte, et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, ou mois de may l’an de grace mil cccc. quatre vings trois, et de nostre regne le xxiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion de Conseil. Triboulet. — Visa. Contentor.

MDCCXLI Juin 1483

Rémission en faveur de Nicolas Poinsset, serviteur de Huchon Yvalles, écuyer, sr de Pautrot, qui surveillant pour son maître la façon d’une coupe de bois, avait été traîtreusement attaqué par Jean Berquellet, sr de Villefolet, et en se défendant avait tué celui-ci et l’un de ses serviteurs.

AN JJ. 209, n° 285, fol. 160 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 610-614

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Nicolas Poinsset, povre compaignon, natif du païs de Champaigne, aagé de vingt et cinq à vingt et six ans ou environ, contenant qu’il peut avoir trois ans ou environ, il fut baillé par son père à service avecques Huchon Yvalles, escuier, seigneur de Pautrot

Un acte de mars 1461, publié à sa date dans le présent ouvrage (Arch. hist. du Poitou, t. XXXV, p. 281), se rapporte à des faits qui avaient eu lieu au même endroit de Poutrot, paroisse de Vernou-sur-Boutonne. Un Jean Bonnet, chevalier, y figure. M. Guérin l’a identifié avec Jean Bonnet, seigneur de la Chapelle Saint-Bertrand, qui appartient à une famille dont les continuateurs de Beauchet-Filleau ont donné la généalogie. (Dict. des familles du Poitou, 2e éd., t. I, p. 616.) Cette généalogie ne dit mot de Bastien Bonnet né de Benoîte de Belleville. Cette dernière, qui appartient évidemment à la famille Harpedenne, n’est nommée nulle part dans les notes de M. Guérin rappelées ci-dessus n° (MDCCXXXIV). [L.C.]

en Poictou où il a tousjours demouré, bien vivant et conversant honnestement, et sans estre brigueux ne noiseux, ne commetant cas digne de reprehencion, et jusques ou mois d’avril derrenier passé que ainsi que ledit Huchon, son maistre et lui estoient ou païs de Xantonge, icellui son maistre lui commanda qu’il s’en allast en son hostel de Poitrot (sic) en nostredit païs de Poictou lui faire preparer, amasser et buscher certain bois et icellui fagoter, lequel il devoit faire prandre en une garenne de bois, laquelle appartient pour une tierce partie audit Huchon, à cause de Benoiste de Belleville, damoiselle, sa femme, et le résidu appartient au seigneur de Villefollet, à cause de sa femme, fille de ladicte Benoiste et de feu Bastien Bonnet, en son vivant son mary et seigneur dudit lieu de Villefollet. En obtemperant auquel commandement de sondit maistre, il alla à pié dudit païs de Xantonge ondit païs de Poictou, en l’ostel de sondit maistre ; et quant il y fust, il fist dilligence d’avoir des gens à journée à buscher et fagoter en ladicte garenne, ainsi que sondit maistre lui avoit commandé faire. Et le xxv. ou xxvie jour dudit mois d’avril, ne scet lequel jour des deux, eut ledit suppliant à buscher et fagoter ondit bois jusques au nombre de sept à huit hommes avecques lesquelz y ala, et eulx estans ondit bois et garenne, ainsi qu’ilz besoingnoient, ledit jour, environ l’eure de vespres, arrivèrent à eulx deux hommes eulx disans serviteurs et tenanciers de Jehan Berguellet, seigneur de Villefollet

Villefollet, comme Vernou, est une commune du canton de Brioux. Le Dictionnaire des familles du Poitou ne la mentionne pas parmi les seigneuries des Bonnet, et n’a point d’article au nom de Berquellet. [L.C.]

, l’un nommé Pierre Mesnart et l’autre Guillaume Martin ; lesquelz saluèrent ledit suppliant et icellui suppliant les salua et leur dist et demanda dont ilz venoient, et l’un d’eulx respondit de Saligné, l’autre de Villefollet. Et lors ledit suppliant leur demanda sy ledit Berguellet, seigneur de Villefollet y estoit et ilz firent response qu’ilz ne savoient où il estoit, en demandant audit suppliant et autres qui fagotoient et buscheoient illec s’ilz seroient receuz ledit jour pour journée pour buscher. Lesquelz firent responce que non pas pour ledit jour, mais s’ilz vouloient y estre le lendemain, ilz y seroient receuz. Et sur ces parolles disans, ledit suppliant vit venir par ung cousté de ladicte garenne et bois ledit Jehan Berguellet, qui est homme coustumier de batre, mutiller et mettre à mort, ayant son espée au cousté, en sa compaignie ung sien serviteur, nommé Saudé, qui aussi avoit une espée en la main, et estoient à pié, dont il fut tout esbay, et print ledit suppliant son espée avecques tout le fourreau, qui estoit à terre près lui, laquelle il avoit portée illec pour ce que en passant par Annay il avoit ouy dire que ledit Berguelet

Ou Berquelet.

le menassoit de tuer. Et quant ledit Bequellet (sic) fut en ladicte garenne et bois, dist : « Veez ci bien des bucherons », en les regardant l’un après l’autre et les appellant les ungs par leur nom. Et lors ledit suppliant le salua gracieusement, en aiant tousjours paour et freyeur de lui, pour lesdictes menasses, et aussi qu’il estoit venu ainsi avecques son homme, enbastonnez de leurs espées, en disant audit Berguellet : « J’ai ouy dire, Monsieur de Villefollet, que vous me menassés. » Et ledit Bequelet lui fist responce en parolles gracieuses que non faisoit, et que à lui ne aux autres serviteurs dudit seigneur de Pautrot il ne vouloit point de mal et qu’ilz faisoient bien de servir leur maistre. Et en ce disant s’aproucha dudit suppliant et quant il fut près de lui, il se gecta sur lui et le print par les deux bras et le gecta contre une soche de bois où il le tint à l’envers par aucun temps. Et en le tenant lascha ung desdiz bras dudit suppliant et print sa dague qu’il avoit à son cousté, et en donna tel coup audit suppliant le long des coustez tellement qu’il en persa sa robe et aussi son pourpoint au travers. Et ce voyant ledit suppliant, il trouva moien de tirer une petite dague qu’il avoit acoustumé porter au cousté et en donna audit Berquellet deux coustz (sic) en la poictrine et gorge, et à ce moien ledit Berguellet le lascha, en disant audit Saudé, son serviteur : « Deffens moy et le tue, et aide moy », aussi à Guillaume Martin (sic). Et alors ledit Saudé de son espée qu’il avoit nue ou poing en voulut frapper icellui suppliant sur la teste ; mais de son espée qu’il tira, il receut le coup, et en le recepvant, frappa icellui Saudé serviteur susdit sur ung doy de la main, et aussi lui donna du revers de la main avec ladicte espée au long du coub et de la gorge ; et tantost après il tumba à terre et mourut. Et ce voyant ledit Berquellet cuida venir contre ledit suppliant, son espée en poing, le frapper et tuer. Mais icellui suppliant lui donna de rechief de son espée ung coup sur la joue et ung coup ou deux sur les cuisses et jambes tellement qu’il cheut du tout à renvers et alla de vie à trespas. Et ce fait ledit suppliant print leurs espées, aussi osta audit Berquellet une petite chesne d’or qu’il avoit au coub et le tata s’il avoit point d’argent, mais n’en trouva point, et s’en alla hors ladicte garenne et bois, où il trouva une femme qui tenoit les chevaulx dudit Berquellet et sur le meilleur des deux monta dessus, et soy absenta du païs. Et depuis ce fait restitucion de ladicte chesne et dudit cheval entre les mains de nostre justice de Xantonge. Et doubte icellui suppliant que pour occasion dudit cas l’on vueille proceder contre lui par rigueur de justice, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, en nous humblement requerant, attendu qu’il s’est tousjours bien et honnestement gouverné sans jamais avoir esté actaint ne convaincu d’aucun villain cas, blasme ou reprouche, et que lesdiz cas sont advenuz en son corps deffendant, il nous plaise lui impartir nosdictes grace et misericorde. Pour quoy nous, etc., voulans, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessusdit avecques toute peine, etc., en mettant au neant, etc. Et l’avons restitué, etc., satisfacion, etc. Et imposons, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Tours, ou mois de juing l’an de grace mil cccc. quatre vings et trois, et de nostre resgne le vingt et deuxiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. Menon. — Visa. Contentor. F. Texier.

MDCCXLII Juillet 1483 (après le 22)

Rémission octroyée à Antoine de Séris, écuyer, homme d’armes de la compagnie d’ordonnance du sénéchal de Bourgogne. Ayant eu à se plaindre de Guillaume de Chorres, prévôt de Saint-Benoît-du-Sault, son cousin germain, qui lui avait promis, pour le marier à Catherine de Salignac, sa parente, une somme de deux cents sous et cinquante livres ; et une fois le mariage accompli, n’avait point tenu son engagement, ledit de Séris pénétra le 3 septembre 1482, avec huit personnes, en l’absence de son oncle, en la maison de la prévôté et y prit huit cents sous, deux gibecières de velours, un anneau, un sceau d’argent et différentes autres pièces de monnaie et cédules. Poursuivi devant le sénéchal du Poitou ou son lieutenant, il avait été mis en quatre défauts et condamné par contumace. « Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous, etc. Donné à Tours, au mois de juillet l’an mil IIIIc IIIIxx III, et de nostre règne le vingt troisième. »

AN JJ. 210, n° 6, fol. 7.

Acte analysé à cause de la juridiction poitevine sur Saint-Benoît-du-Sault. [L.C.]

P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 614

MDCCXLIII Juillet 1483

Confirmation du don de huit cents livres de rente sur la vicomté de Châtellerault, fait à Marguerite de Calabre, par Charles d’Anjou, roi de Sicile et de Jérusalem, comte du Maine, vicomte de Châtellerault, par son testament.

AN JJ. 210, n° 8, fol. 7 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 615-617

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre chère et amée cousine, Margarite de Calabre

Sur Marguerite de Calabre, fille naturelle de Nicolas d’Anjou, mariée à Jean de Chabannes, fils d’Antoine de Chabannes, comte de Dammartin, voy. le P. Anselme, Hist. généal. de la Maison de France, t. I, p. 234, et La Chesnaye des Bois, Dict. de la noblesse, t. IV, col. 961. [L.C.]

, fille naturelle de feu nostre filz et cousin Nicolas d’Anjou, en son vivant duc de Calabre et de Lorraine

Sur Nicolas d’Anjou, marquis de Pont, duc de Calabre et de Lorraine, voy. Arch. hist. du Poitou, t. XXXVIII, p. 250. [L.C.]

, contenant que depuis le trespas de nostre dit feu filz et cousin le duc Nicolas, feu nostre cousin Charles d’Anjou en son vivant roy de Jherusalem et de Scecille, conte de Prouvence et viconte de Chastellerault a fait nourrir et entretenir ladicte suppliante en son hostel, en la compaignie de feue

Sur Charles d’Anjou, voy. ci-dessus, (MDLXIII). [L.C.]

nostre cousine Jehanne de Lorraine, sa femme et tousjours l’a entretenue et honnestement fait po[ur]voir de ce qu’il lui a esté necessaire, et jusques à l’eure de son trespas ; lequel soy voyant malade, dont il est allé de vie à trespas, fist son testament et ordonnance de derrenière voulenté, par lequel, entre autres choses, pour certaines causes à ce le mouvans, masmement considerant que icelle suppliante estoit demourée orpheline en bas aage, despourveue de tout bien, sans avoir heritaiges ne autres biens dont elle peust vivre ou temps avenir, ne de quoy entertenir son estat, selon le lien et lignaige dont elle est yssue, lui donna et delaissa, pour elle, ses hoirs, successeurs et ayans cause a perpetuité la somme de huit cens livres tournois de rente annuelle et perpetuelle, à l’avoir et prendre sur les rentes et revenues des ville et viconté de Chastellerault. Et avec ce lui donna tous les joyaulx, dyamans et autres pierres demourées par le décès et qui estoient et appartenoient à sa dicte feue femme, laquelle estoit decedée paravant, ainsi que des diz don et laiz nous est apparu par ledit testament, dont la teneur de la clause et article, extraict d’icellui, faisant de ce expresse mencion s’ensuit et est telle.

« Item eciam legavit sive relinquit nobili domicelle Margarite de Calabra, filie naturalis eterne memorie domini Nicolay ducis Calabrie et Lothoringie, ac suis heredibus et successoribus quibus cumque per imperpetuam, octingentas libras turonensium, habendas, exigendas, recipiendas et recuperandas annuatim in et super denariis juribus et reditibus vice comitatus Castri Ayraudi. Item, jocalia supra dicte condam domine nostre regine Johanne, videlicet les diamans et ceteros lapides preciosos. »

Et après plusieurs autres dons et laiz faiz par ledit feu Charles, nostre cousin, il nous fist et institua sun heritier seul et universal ; au moien de laquelle institucion et autrement ledit viconté de Chastellerault, ensemble les rentes, droiz et revenues d’icellui nous sont advenues et escheues, et à ses tiltres et moiens en avons prins et apprehendé la possession. Et depuis, non advertiz et informez desdiz don et laiz faiz à nostre dicte cousine, suppliant, avons donné, aumosné et admorti aux chanoines et chappellains par nous nagueres fondez en nostre maison des Montiz les Tours

Le chapitre, ou église collégiale, appelé aussi Sainte-Chapelle, des Montils ou du Plessis du Parc, placé sous le vocable de saint Jean l’Évangéliste, fut fondé au château du Plessis par lettres patentes de Louis XI, données audit lieu du Plessis, au mois de novembre 1484 ; par autres lettres datées des Montils-les-Tours, mai 1483, le roi déclara que la collégiale comprendrait vingt chanoines, et la dota de 4.000 livres de rentes. Ces lettres furent enregistrées au Parlement de Paris, le 29 juillet 1483. (Arch. nat., X1a 8608, fol. 19 v°, 196.)

, en l’honneur de monseigneur Sanct Jehan, apostre et envangeliste, certaines grans rentes et revenues sur ladicte terre, seigneurie et viconté de Chastellerault, et leur en avons fait faire assiete. A laquelle cause icelle supliant n’a peu ne peut avoir, prendre ne parcevoir lesdiz huit cens livres tournois à elle données et laissées par la manière dessus dicte ; et doubte qu’elle n’en puisse joir, et que à ce moien elle demeure depourveue de sa vie, qui seroit chose piteable, se de nostre grace ne lui est aidé et secouru ; en nous humblement requerant et suppliant que nostre plaisir soit la faire joir desdiz don et laiz selon l’intencion que ledit deffunct l’a voulu et ordonné par son dit testament et derrenière voulonté. Pour quoy nous, voulans lesdiz don et laiz faiz à nostre dicte cousine suppliant sortir leur plain et entier effect et entretenir

La transcription de ces lettres est restée ainsi inachevée ; le registre, à la suite, porte un blanc d’une page et deux tiers. Le texte n’en a pas été enregistré au Parlement. Nous lui donnons la date de juillet 1483 parce qu’elles se trouvent au milieu d’autres actes tous de cette date. D’après M. Lalanne (Hist. de Châtellerault, t. I, p. 308), Marguerite consacra, sur les 800 livres léguées par son oncle, 160 livres à la fondation d’une messe à l’église collégiale Notre-Dame de Châtellerault, par acte du 2 septembre 1488. Il y avait eu même, au sujet de cette fondation, un procès entre les héritiers de Marguerite et le chapitre de Notre-Dame, procès dont je n’ai trouvé nulle trace dans les tables des procès du Parlement, aux Archives nationales. [L.C.]

MDCCXLIV Août 1483

Rémission obtenue par Jacques Bonamy, écuyer, seigneur de la Couperie, des peines encourues par lui pour participation à un meurtre. Sa mère, Jacquette Bouchard, s’étant remariée à un homme de vingt-cinq ans plus jeune qu’elle, nommé Savary Gaymart, et celui-ci la maltraitant et la frappant brutalement, Jacques voulut intervenir. Une rixe sanglante éclata entre eux et plusieurs de leurs parents, dans laquelle Bonamy fut grièvement blessé et Gaymart tué.

AN JJ. 211, n° 1, fol. 1 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 617-620

Loys par la

Jacques Gaymard (Gueymart ou Guymart), écuyer, puis sa veuve damoiselle Françoise Maître et ses enfants François et Jean poursuivirent Jacquette Bouchard, Jacques Bonamy et Jean Millet devant le sénéchal de Poitou, puis, sur appel au Parlement où ils obtinrent contre les défendeurs plusieurs défauts du 18 janvier 1485 n. st. (X2A 52), 14 février 1486 n. st. (X2A 54). 6 mars 1486 n. st. (X2A 51), enfin 14 février 1487 n. st. (X2A 51). Le 16 février (ibid.), la Cour ordonna que la cause de frère Jacque Bonamy, moine bénédictin, — il avait évidemment pris l’habit dans l’intervalle — serait rendue à l’évêque de Paris. [L.C.]

grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre bien amé Jacques Bonnamy, escuier, seigneur de la Couperie ou les païs de Poictou, contenant que Savary Gaymart, aagé de xxv. ans, puis aucun temps ença a espousée Jaquete Boucharde, mere dudit suppliant, qui est aagé de cinquante ans ou environ. Lequel Savary, depuis ledit mariage s’est efforcé de seduyre ladicte Jaquete, sa femme, de soy faire donner et transporter tous ses biens, ce qu’elle n’a voulu faire. Et voyant ledit Savary que sadicte femme ne lui vouloit en ce obeyr, et qu’il estoit jeune et elle estoit ancienne, l’a tractée très durement en la batant et mutilant et avec ce en tenant plusieurs autres femmes, ses concubines emprès elle. Et ce venu à la cognoissance dudit suppliant, a plusieurs foiz remonstré audit Savary que ce n’estoit pas bien fait à luy de ainsi tracter sadicte femme, et qu’il l’a voulsist entretenir ainsi qu’il appartenoit en fait de mariage. Mais ledit Savary en perseverant en sa vie dissolue, a tellement tracté sadicte femme qu’il lui a convenu par plusieurs foiz s’en venir à refuge à l’ostel dudit suppliant son filz. Lequel suppliant a aucunes foiz ramené sadicte mère audit Savary et [tenté] de les appaiser au mieulx qu’il a peu, afin de nourrir paix et amour entre eulx. Mais ce non obstant, cinq ou six jours après, ledit Savary batit et mutila sadicte femme très enormement, en soy efforçant de luy vouloir coupper la gorge, en quoy faisant il la navra tellement qu’elle en fut griefvement au lit malade par aucun temps. Et voyant ladicte femme qu’elle ne pourroit plus vivre ne demourer avec sondit mary, après ce qu’elle fut ung pou revenue, elle se fist transporter à l’ostel dudit suppliant, qui est distant de la maison dudit Savary d’une lieue ou environ ; auquel suppliant elle racompta comment sondit mary la tractoit de pis en pix et comment il luy avoit voulu coupper la gorge, et qu’elle ne pourroit plus demourer avec luy, en requerant audit suppliant, son filz, qu’il alast querir ses robes et habillement. A ceste cause ledit suppliant Jehan Mullet (sic), son frère, et Colas Bernard, leur serviteur, le xiiiie jour de juillet derrenier passé, se partirent dudit lieu de la Couperie et alèrent au lieu du Plantis, ouquel lieu ledit Savary estoit demourant, et y trouvèrent ledit Savary et sa mère qu’il y avoit fait venir, ensemble ung franc archier d’extrange païs, et eulx arrivez, parlèrent ensemble gracieusement desdictes questions. Mais en ce faisant, survint illec Françoys Gaymart, frère dudit Savary, qui dist audit suppliant que, s’il ne sortoit hors dudit hostel, qu’il le oultrageroit. Lequel suppliant, voyant que ledit François estoit mal meu, pour obvier à inconvenient, sortit hors dudit hostel. Mais ledit François, non content de ce, tira ung braquemart qu’il avoit, et ala après ledit suppliant et s’efforça l’en vouloir oultrager et tuer par plusieurs foiz ; mais ledit suppliant, pour obéir à la fureur dudit François, tira une espée qu’il avoit pour soy defendre. Et ce voyans, lesdiz Savary, sa mère et franc archier coururent sus audit suppliant, et le frapa ladicte mère dudit Savary, tellement qu’il cheut à terre, et luy estant à terre, fut frapé par ledit Savary et autres dessusdiz ses complices plusieurs cops et en plusieurs parties de son corps, et luy firent neuf playes presque toutes mortelles. Et ce voyant, ledit Mallet (sic), frère dudit suppliant, et ledit Bernard, son serviteur, pour secourir audit suppliant et le preserver de mort, baillèrent ung cop ou deux audit Savary, au moyen desquelz cops, par faulte de gouvernement, il est alé de vie à trespas. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant s’est mis en franchise, requerant, etc. Pour quoy, etc., audit suppliant avons quicté, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, etc. Donné à Paris, ou moys d’aoust l’an de grace mil cccc. quatre vings et troys, et de nostre règne le xxiiie

Dans le registre JJ. 211, tous les actes de cette date sont donnés par le Conseil et datés de Paris, alors que Louis XI n’a pas bougé de Montils-les-Tours (Itinéraire, ap. Vaësen et de Mandrot, Lettres, t. XI, p. 236). C’est le conseil du Parlement sans doute. Il y en a de la même écriture et de la même provenance pour Louis XI et Charles VIII. [L.C.]

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Ainsi signé : Par le Conseil, Guiberteau. — Visa. Contentor. D’Asnières.