Recueil des documents concernant le Poitou contenus dans les registres de la Chancellerie de France École nationale des chartes Mathilde Henriquet 2013 — encodage 2013 http://elec.enc.sorbonne.fr/actesroyauxdupoitou/ École nationale des chartes
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Éditions en ligne de l'École des chartes http://elec.enc.sorbonne.fr Paul Guérin (éd.) Paul Guérin, Recueil des documents concernant le Poitou contenus dans les registres de la Chancellerie de France, t. V : 1377-1390, Paris, 1891 (Archives historiques du Poitou, 21).

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Recueil des documents concernant le Poitou contenus dans les registres de la Chancellerie de France publiés par Paul Guérin, archiviste aux archives nationales, V, (1377-1390) Actes royaux du Poitou, t. 5 (1377-1390) DCI 24 janvier 1377

Lettres de rémission en faveur de Colin de Landelles, de Charroux, qui avait mis dans la circulation en Poitou des monnaies par lui rapportées d’Orange. Cependant il devra rester en prison pendant trois mois, au pain et à l’eau.

AN JJ. 110, n° 82, fol. 48 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 1-3

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté signifié par Colin de Landelles, demourant à Charros, ou païs de Poitou, que, comme pour cause de ce que par noz ennemis il avoit esté prins pluseurs foiz et par pillars et autres mauvaises genz desrobez souventes foiz, dont il a esté et estoit tellement dommagiez qu’il en estoit devenuz à pouvreté, et par ainsi lui consideranz qu’il estoit en telle misere, par induction et admonition d’autrui, eust depuis un an ença empruntez iiiixx frans d’or pour mettre et convertir en marchandises, dont il avoit acoustumé soy entremettre, et se fust transporté ou païs d’Orenge et environ, pour emploier la dicte somme de iiiixx frans d’or et en avoir blans et autre monnoie, qui illec avoient cours, la quelle il apporta ou dit païs de Poitou et environ en nostre royaume, et d’icelle fist satisfacion et paiement à ses crediteurs, aus quelx il estoit tenuz pour les diz iiiixx frans et autrement ; et pour ce il ait esté molesté moult grandement, priz et detenuz en prison par les genz et officiers de nostre amé et feal cousin le conte de la Marche

Jean Ier de Bourbon, second fils de Jacques Ier comte de la Marche, et de Jeanne de Châtillon-Saint-Pol. Son père et son frère aîné, Pierre, étant morts des suites de blessures reçues à la bataille de Brignais (6 avril 1362), il devint comte de la Marche. Catherine de Vendôme, qu’il avait épousée le 28 septembre 1364, le rendit père de six enfants, trois fils : Jacques II, comte de la Marche ; Louis de Bourbon, tige des comtes de Vendôme ; Jean, qui a fait la branche des seigneurs de Carency ; et trois filles dont l’aînée, Anne, fut mariée à Jean comte de Montpensier, fils de Jean duc de Berry, comte de Poitou. Jean Ier comte de la Marche mourut le 11 juin 1393.

, combien que à eulx n’en appartenist la cognoissance, et encores doubte d’en estre poursui et molesté par noz genz et officiers, se par nous ne lui est sur ce pourveu de nostre grace, si comme il dit. Sur quoy nous a fait très humblement supplier. Pour quoy nous, eue consideracion aus choses dessus dictes, et que le dit Colin ne fu onques mais approchiez, diffamez ne convaincuz d’aucun autre crime ou meffait, mais est de bonne vie et honneste conversacion, et que l’une partie de la dicte monnoie avoit et a commun cours ou dit païs de Poitou, ainsi que l’en dit, à ycellui ou cas dessuz dit avons remis, quictié et pardonné, quictons, remettons et pardonnons, de certaine science, grace especial, auctorité et plaine puissance royal, le fait dessuz dit et tout ce qui s’en est ensui, avecques toute peinne, amende et offense corporelle, criminelle et civile, en quoy il puet estre encouru ou avoir commis envers nous, comment que ce soit, pour la causse dessus dicte, en le remettant et restablissant, se mestier est, à sa bonne fame et renommée, se pour ce sont amenries, et à ses biens, pourveu que à ceulx qui auroient eu ou soustenu aucun dommaige, pour cause de la dicte monoie, soit faicte satisfacion, ainsi que de raison appartendra, s’il est aucun qui en vueille faire poursuite ; et que le dit Colin, pour en avoir en partie aucune punicion, demeure de fait en noz prisons ou dit païs, telles comme nostre bailli des Exempcions d’Anjou, de Touraine et de Poitou lui ordenera, continuelment par l’espace de trois mois, à compter du jour qu’il y entrera pour ce fait, sanz avoir pour son vivre aucune administracion que pain et eaue tant seulement, le dit terme durant. Si donnons en mandement à nostre dit bailli des Exempcions dessuz dictes et à touz noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que ou dit cas ilz facent, seuffrent et lessent le dit Colin joir et user paisiblement de nostre presente grace et remission, sanz le molester ou souffrir estre empeschié ou molesté, en corps ne en biens, ores ou pour le temps avenir, aucunement au contraire. Et se aucuns de ses biens estoient pour ce prins, saisiz ou empeschiez, si les lui mettent ou facent mettre sanz delay à plainne delivrance. Et afin que ce soit ferme et estable chose à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, en nostre chastel du Louvre, le xxiiiie jour de janvier l’an de grace mil ccc. lxxvi, et le xiiie de nostre regne.

Par le roy. J. Tabari.

DCII 10 février 1377

Confirmation du don des château et châtellenie de Sainte-Néomaye fait à Alain de Beaumont, et octroi de nouvelles terres portant de six cent à mille livres le revenu annuel de ces possessions, avec faculté de les rendre à leur seigneur légitime moyennant dix mille francs d’or, de les vendre ou de les échanger.

AN JJ. 110, n° 125, fol. 78 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 3-7

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que, comme pour consideracion des bons et agreables services que nostre amé et feal chevalier, Alain de Beaumont, lequel avoit mis par force d’armes en nostre obeissance le chastel de Sainte Onomoye en Poitou, que tenoit le sire de Mucidain, nostre rebelle, nous avoit fait en noz guerres et faisoit de jour en jour, nous lui aions donné et octroié le dit chastel avecques la chastellenie d’illeuc et leurs appartenances

Par lettres de mars 1373, publiées dans notre volume précédent (n° DLVIII, p. 292). Le château et la châtellenie de Sainte-Néomaye faisaient partie des domaines que Jeanne de Bauçay, fille unique et seule héritière d’Hugues VI de Bauçay, avait apportés en mariage à Charles d’Artois, comte de Longueville et de Pézenas. Ce dernier les avait engagés à Raymond de Montaut, seigneur de Mussidan, complice de sa défection (voy. notre tome III, p. 360, note 2), pour une somme de 10,000 livres qu’il lui avait promise dans le but de l’attacher à sa cause. Soit qu’il ait désintéressé son créancier, soit que celui-ci n’ait pas rempli ses engagements envers lui, Charles d’Artois voulut rentrer en possession de sa terre, et, quand il eut fait sa paix avec le roi de France, il prétendit que tous ses biens confisqués devaient lui être restitués. Naturellement, il contesta la validité de la donation faite à Alain de Beaumont. Celui-ci refusant de s’en dessaisir, il s’en suivit un procès au Parlement. L’instance fut introduite par Charles d’Artois et Jeanne de Bauçay contre Alain de Beaumont, le 2 décembre 1381. Nous avons la requête originale qu’ils adressèrent à la cour pour obtenir d’être remis en possession du château, de la châtellenie et de ses dépendances, et faire condamner le détenteur à leur rembourser les fruits, profits et émoluments qu’il en avait levés depuis près de huit ans. (Arch. nat., X1c 43, à la date.) L’affaire traîna en longueur. Charles d’Artois mourut avant de la voir régler, et sa femme continua à revendiquer Sainte-Néomaye.

Le 26 juin 1385, les parties plaidèrent. Voici un extrait de la plaidoirie du défendeur qui résume les faits : « Messire Alain dit que feu messire Charles d’Artois, mari quant il vivoit de la dite dame, se porta petitement contre le roy nostre sire et son royaulme, et fist guerre contre le roy et son royaume ; et fist aliances avec le seigneur de Mucidan qui promist à le servir contre tout homme, exceptez le roy d’Angleterre et ses enfans et excepté le roy de Navarre, et en recompensation messire Charles promist à Mucidan mil livres de terre ou x. mil frans, et li bailla le chastel et terre de Sainte Neomoye, et en furent faictes lettres qui depuis furent ratifiées par la dite dame ; et en fut seigneur Mucidan et en ot la foy et homage, saisine et possession. Quant la guerre commança, Mucidan ala devers les Anglois. Messrs les ducs de Berry, de Bourgoigne et de Bourbon et le connestable qui lors estoit recouvrerent le pays de Poitou, et après messire Alain demoura capitainne ou pays, et à ses propres coux et despens conquist le chastel de Sainte Neomoye. Pour ceste cause Monsr de Berry, en tant que faire le povoit, donna le dit chastel et chastellenie à messire Alain, et après le roy nostre sire qui lors regnoit confirma le don de Monsr de Berry… » (X1a 1472, fol. 292.) Il ajoute que depuis qu’il en a la jouissance, il y a fait pour 2,000 livres de réparations et d’améliorations. La réplique de Jeanne de Bauçay est fort intéressante ; elle dit entre autres choses que ces améliorations ont été payées par les habitants du bourg et des environs. Elle explique et cherche à justifier la conduite de son mari, argue qu’il se réconcilia avec le roi, et que d’ailleurs la terre litigieuse lui appartenait à elle, qu’elle devait bénéficier du traité conclu avec les barons poitevins, après la capitulation de Thouars, et rentrer, comme ils l’avaient tous fait, en possession de ses biens, etc. Il n’y eut point d’arrêt rendu à la suite de ces plaidoiries. Deux jours après, le mercredi 28 juin 1385, la cour décida que la visite (veue) du château et de la châtellenie avait été suffisante et ne serait pas recommencée, comme on le demandait, que les parties feraient « leurs faiz et, l’enquete faicte et rapportée, la court feroit droit » (X1a 1472, fol. 371 v°). Nous ne savons si le Parlement donna sa sentence définitive au profit de Jeanne de Bauçay ; ce qui est certain, c’est que les deux parties obtinrent satisfaction aux frais du roi Charles VI, sans conserver toutefois, ni l’un ni l’autre, la propriété de Sainte-Néomaye. Le roi l’acheta et paya 10,000 livres tournois à Alain de Beaumont et 3,000 livres à Jeanne de Bauçay. Il y eut deux actes de vente, comme s’ils eussent été tous les deux propriétaires légitimes, quoique à un titre différent. Le premier contrat est daté de Paris, le vendredi 28 juin 1387. (Vidimus de la Prévôté de Paris, aux Archives nat., J. 181B, nos 97 et 98, avec la procuration d’Alain de Beaumont, de même date, et double, J. 182, n° 107.) Le second fut passé à Loudun, le 31 août de la même année. (Deux copies authentiques, J. 181B, n° 99, et J. 187, n° 30.)

Charles VI n’avait acheté Sainte-Néomaye que pour en constituer une partie de la dot de sa sœur, Catherine de France, première femme de Jean, comte de Montpensier, fils du duc de Berry. Celle-ci étant morte l’année suivante sans enfants, le roi, son héritier, céda le château et la châtellenie à son oncle Jean duc de Berry, pour le prix qu’elles lui avaient coûté, par acte du 30 avril 1388, ainsi que la terre de Vatan en Berry, ces domaines se trouvant enclavés dans l’apanage du duc. (Vidimus sous le sceau de la Prévôté de Paris, du 23 novembre 1389, J. 182, n° 101.) Jean de Berry s’engagea, par acte daté de Bicêtre, le 7 décembre 1388, à payer au roi le prix d’acquisition dans un délai de trois ans, ou à lui rendre les deux terres, comme il était convenu dans le contrat de vente. (Original scellé, J. 182, n° 102.) Thibaut Portier devint seigneur de Sainte-Néomaye, quelques années plus tard, sans doute par suite d’un don du duc de Berry, dont il était chambellan. (Voy. un acte du 13 juin 1404, analysé dans le Cartulaire de l’abbaye des Châtelliers, publ. par Louis Duval, 1872, in-8°, p. 152.)

, les quelx et toutes les autres terres et possessions que le dit sire de Mucidan, du quel nous estions et sommes seigneur souverain et droiturier, nous estoient venuz en commis par sa rebellion, qui tenoit si comme encorestient le parti de nostre adversaire d’Angleterre en la guerre que il nous [a] nouvellement meue, à tenir yceulx chastel et chastellenie et appartenances par le dit Alain et par ses hoirs et successeurs, et ceulx qui auront cause de lui à tous jours, en la valeur de six cens livres de terre à tournois, pourveu que, se ou temps avenir, par traitié ou autrement estoit accordé que les diz chastel et chastellenie fussent rendues au dit sire de Mucidan ou aus aianz cause de lui, le dit Alain ne nous en peust demander ne nous ne feussions tenuz de lui en faire aucune recompensacion, si comme par noz autres lettres faictes sur le dit don on dit à plain apparoir ; nous, meuz de la consideracion dessus dicte et des services que le dit Alain nous a depuis faiz en noz dictes guerres et fait encores de jour en jour, en exposant pour ce son corps à touz perilz

Le 4 juillet 1376, Alain de Beaumont servait avec sa compagnie dans les guerres « ès parties de Perregort et d’Engolmois » (dom Lobineau, Hist. de Bretagne, t. II, col. 577), et nous avons vu précédemment (t. IV, p. 299, note) qu’il prit part, en 1377, au siège de Bergerac, sous les ordres du duc d’Anjou et de Du Guesclin.

, si comme nous sommes plainnement enformez, voulons et lui avons octroié et octroions de nostre auctorité royal, de certaine science et grace especial, en accroissant la valeur dessuz dicte de iiiic livres de terre ou de rente par an à tournois, que les diz chastel, chastellenie et appartenances il ait et tiengne, et ses diz hoirs et successeurs et ceulx qui de lui auront cause, en la valeur de mil livres de terre ou de rente à tournois par an, et les dictes iiiic livres de terre ou de rente lui donnons de nostre dicte auctorité et grace, à tenir avecques les dictes vic livres de terre, par la maniere et condicion dessuz dictes, avecques tout ce que il en a perceu du temps passé. Et comme nous aions entendu que le dit chastel et chastellenie n’estoient pas heritaige du dit sire de Mucidan, mais les avoit et tenoit en gaige de xM frans d’or, que le seigneur d’iceulx lui devoit et lui en estoit tenuz, nous, oye sur ce la supplicacion du dit Alain, lui avons octroié et octroions, en ampliant nostre dicte grace, que, ou cas ou il seroit trouvé et dit que les diz chastel et chastellenie ne fussent heritaige du dit sire de Mucidan, et que en lui paiant xM frans une foiz le seigneur les en peust retraire et recouvrer, yceulx dix mille frans, qui par la cause dessuz dicte nous doivent estre et sont confisquez, soient au dit Alain, au quel nous les donnons en lieu de don des diz chastel, chastellenie et appartenances. Et d’abondant grace, lui avons octroié que yceulx chastel et chastellenie il puisse eschangier ou transporter en autres, et que ceulx en qui il les transportera ou eschangera, les tiengnent et puissent tenir par la maniere et condicion dessuz dictes, ou aient les diz dix mille frans dessuz diz, deuz au dit sire de Mucidan, en lieu d’eulx, en cas de retrait ou de recouvrance, comme dit est, en joissent de tel droit comme le dit Alain y a, paisiblement et cessant tout empeschement. Si donnons en mandement, par la teneur de ces lettres, à touz les justiciers de nostre royaume, presens et avenir, ou à leurs lieux tenans, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit Alain et ceulx en qui il transportera ou eschangera les diz chastel et chastellenie facent et lessent joir et user paisiblement de nostre presente grace, sanz les molester ou empeschier en quelque maniere au contraire. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces lettres. Sauf en autres choses nostre droit, et l’autrui en toutes. Donné à Saint Germain en Laye, le xe jour de fevrier, l’an de grace m. ccc. lxxvi, et le xiiie de nostre regne

L’original scellé de cet acte est conservé dans les layettes du Trésor des Chartes (J. 181B, n° 95) ; il nous a servi à collationner le texte publié ici. Cet original est daté du 9 février ; un mandement qui y est joint et ordonne l’exécution desdites lettres, porte la date du 10 février. (Original, id., n° 94.)

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Par le roy. Yvo.

DCIII 14 février 1377

Lettres de rémission octroyées à Guillaume Larchevêque, sire de Parthenay, et aux officiers de sa châtellenie de Châtelaillon qui, de son commandement, avaient retenu prisonnier Arnaud Rosier et autres commissaires du duc de Berry, parce qu’ils avaient levé indûment un fouage dans ladite châtellenie et avaient refusé de restituer l’argent en provenant, malgré l’ordre du duc.

AN JJ. 110, n° 275, fol. 164 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 8-13

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que par nostre amé et feal chevalier Guillaume Larcevesque, sire de Partenay et de Chasteillailhon, nous a esté exposé que comme ou dit lieu de Chasteillailhon il ait chastel et chastellerie, qu’il tient de nous en foy et hommage et a tenu de nos predecesseurs, et jà soit ce qu’il y ait justice haulte, moyenne et basse, mere et miste impere, avec tout droit qui s’en despent, senz ce que aucun y puisse exiger, lever ou cueillir aucun nouvel treu, taille ou autre fouage quelxconques, senz le consentement ou voulenté du dit exposant, et des choses dessus dictes ait esté et soit tant par lui comme par ses predecesseurs en bonne possession et saisine seul et pour le tout, de la quelle il a usé et joy paisiblement par tel et si long temps qu’il n’est memoire du contraire, ou qu’il souffist et doit souffire à bonne possession et saisine avoir acquises et retenir ; neantmoins il n’y a pas long temps que Arnaut Rosier et autres, disant estre commissaires à lever [un fouage

Mots omis dans le texte. Parmi les autres documents relatifs aux finances du duc de Berry, nous citerons les dons qui lui furent faits par le roi, le 18 octobre et le 3 novembre 1376, des droits d’amortissement en Poitou, en Berry et en Auvergne. (Arch. nat. Mémoriaux de la Chambre des comptes, P. 2295, p. 485 et 487.)

] octroyé à nostre très chier et très amé frere et lieutenant le duc de Berry par les bourgeois et habitanz de la ville de la Rochelle et du païs d’environ, pour convertir à la tuicion et garde du dit païs, ou autrement, si comme il disoient, s’estoient efforciez de fait de imposer, exiger, prenre, cueillir et lever des hommes et subgiez de la dicte chastellerie de Chasteilailhon certain fouage, et de fait en leverent certainne somme, [senz] le congié, voulenté, consentement et octroy du dit exposant et de ses subgiez, et lui à ce non appellé, en le troublant et empeschant indeuement en ses droiz seignoriaux, possessions et saisine dessus dictes. Le quel exposant, veant ces choses à lui grandement prejudicier, se tray par devers nostre dit frere en lui exposant les choses dessus dictes ; le quel nostre dit frere, tant pour concideracion des choses dessus dictes comme autrement, deuement, voulant sur ce pourveoir, octroya au dit exposant qu’il peust prenre, cuillir et recevoir l’argent qui avoit esté cuilli et levé, pour cause du fouage dessus dit, sur ses diz habitanz et subgiez, et qu’il peust à ce contraindre les collecteurs du dit fouage levé en sa dicte terre, par prinse et detencion de leurs corps et biens. Et pour ce que le dit Arnaut [et autres] furent reffusans de rendre au dit exposant la somme qu’il avoient levée en la dicte terre et chastellerie, eulx et chascun d’eulx sur ce souffisanment requis, le dit exposant fist prenre, arrester et detenir en sa prison les diz collecteurs, jusques à ce qu’il lui orent baillé la dicte somme. Les quelx estans en prison, comme dit est, Thomasset Brouart, soy disant nostre sergent, se transporta au dit lieu de Chasteillailhon, et illecques, par vertu de certain mandement ou commission qu’il se disoit avoir du gouverneur dessus dit, fist certains commandemens au dit exposant, son bailli et capitaine du dit lieu de Chasteillailhon lors absent, qu’il baillassent et delivrassent le dit Arnaut Rosier, pour ce qu’il se disoit estre exempt du dit exposant, par vertu de certain appel ou appeaulx qu’il disoit avoir esté faiz par le commandeur de Saint Jehan du Perrot de la Rochelle, par le dit Arnaut ou autres, en mettant le dit Arnaut en recreance et en faisant pluseurs autres commandemens. Et depuis ces choses, le dit gouverneur et pluseurs autres noz officiers et autres en sa compaingnie vindrent ou dit chastel de Chasteillailhon, ou quel n’estoient pour lors le dit exposant, son bailli et capitaine, ou autres qui eussent povoir de lui, mais y estoient Guillaume Baronnea, prestre, Moudin Revillenea, Morissin Testart, frere Jehan Audouart, prieur de Saint Remart, et autres genz simples, les quelz ignoroient la venue du dit gouverneur, mais pour ce, sitost qu’il le virent venir, eulx doubtans que ce ne feussent noz ennemis, se enfermerent ou dit chastel et ne l’oserent ouvrir au dit gouverneur, ne obeir à certainz criz et commandemens qu’il fist ou fist faire à la porte du dit chastel, ne aussi bailler le dit Arnaut qu’il demandoit, pour ce qu’il n’avoient aucune administracion de la jurisdicion du dit exposant. Et depuis le dit gouverneur, acompaigné comme dit est, se transporta devant l’eglise et fort d’Angolin, assiz en la dicte chastellerie, ou quel n’estoient pour lors le dit exposant ne son dit bailli, et illecques fist ou fist faire certains commandemens à Jehan Tailler

Peut-être faut il lire plutôt Cailler. Nous avons rencontré précédemment Perrot Caillier, capitaine de Bertegon. Un Jean Cailler, l’aîné, obtint, le 7 août 1432, le bail à ferme des moulins de la commune de Poitiers, situés sur le Clain, passé par les maire, échevins et bourgeois de la ville, pour deux années et moyennant cinquante setiers de froment par an. (Archives de la ville de Poitiers, F. 70.)

, capitaine du dit fort, Aymery Marchant, Jehan Revillenea, Jehan Morisset, Jehan Guigoneau, et autres estans ou dit fort, qu’il lui ouvrissent ycellui fort ; les quelx en furent refusans, pour doubte qu’il ne mespreissent et feissent aucune chose prejudiciable au dit exposant. Pour les quelles choses et chascune d’icelles, le dit gouverneur et nostre procureur au dit lieu ont tenu et encor tiennent et s’efforcent de tenir en procès le dit exposant

Nous donnons ici l’énumération, d’après les registres du Parlement, des autres procès que Guillaume VII de Parthenay eut à soutenir entre les années 1373 et 1386. A la première de ces dates il était poursuivi au criminel par Jeanne de Beaumont, dame de Passavant, veuve de Béraud de La Haye, chevalier, seigneur de Mallièvre, ayant le bail de son fils Barthélemy. Le comte de Poitou, lieutenant du roi, « pour cause des excès et délits du feu sr de Passavant », avait baillé en garde au sire de Parthenay le château de Mallièvre, lui défendant de le remettre en autre main. La dame de Passavant en réclamait la restitution, ainsi que des fruits et revenus qui avait été levés par le commissaire au nom du roi, invoquant le traité du 15 décembre 1372, en vertu duquel les habitants du Poitou revenus à l’obéissance du roi devaient rentrer en possession de leurs biens confisqués, et disant que le château d’ailleurs lui appartenait à elle, et non à son feu mari. (Plaidoiries du 2 août 1373, X1a 1470, fol. 99 v°.) En même temps que le sire de Parthenay, étaient ajournés : Geoffroy Alecan, prieur de Mallièvre, Renaud Guyoneuf, Pierre Bonnet, Simon Alerain, Pierre Joberteau, Simon Richelot, Jean Richart, Jean Audeberteau, Jean Nau et Jean Clerjaut. Retenus par la guerre et la défense de leurs foyers, ils se firent excuser et autoriser à se faire représenter par un procureur, le 22 avril 1374 et le 6 avril 1375 (X2a 8, fol. 350 v°, 362 v°, 411 v°). Nous n’avons pas la suite de cette affaire. Un sieur Nicolas Vincent, de Parthenay, qui prétendait avoir prêté cent francs d’or à Guillaume Larchevêque, le fit semondre, le 1er juillet 1376, de comparaître au Parlement pour reconnaître sa dette et les lettres d’obligation revêtues de son sceau (X1a 25, fol. 228). Un autre différend avec le vicomte et la vicomtesse de Thouars Tristan Rouault et Pernelle, avait pour objectif la forteresse de la Chèze-Giraud. (Mandements du 17 juillet 1377 et du 10 septembre 1380 ; X1a 26, fol. 82 ; X1a 29, fol. 105 v°.)

Vers le même temps, Pierre de Montfaucon demandait au sire de Parthenay la réparation de graves dommages que les gens de celui-ci lui avaient causés. Pierre était seigneur de Saint-Mesmin (Deux-Sèvres), où il prétendait avoir tout droit de justice. Du vivant de son père, Jean de Montfaucon, Saint-Mesmin était un bon château, une forteresse réputée. Depuis, le demandeur l’avait réparé et mis en état de défense, pluria eciam edificia ibidem construxerat. Il y avait ses meubles et son train de maison, des sergents et officiers de justice, droit qu’il possédait de temps immémorial. Cependant Gervais d’Izé et autres complices de Guillaume Larchevêque, armés de pied en cap, pendant que le plaignant se trouvait pour le service du roi au siège de Cognac, dans la compagnie même du sire de Parthenay, envahirent le château en question, démolirent les fortifications et plusieurs autres édifices, pillèrent et incendièrent les biens meubles qui s’y trouvaient, dégâts estimés à 1,000 livres parisis environ. Après cette expédition, le sire de Parthenay avait institué audit lieu de Saint-Mesmin un sergent en son nom pour faire les exploits de justice. Guillaume de Parthenay prit fait et cause pour ses gens devant le Parlement et déclara avoir agi dans la plénitude de son droit (juin 1377, X1a 1470, fol. 260 r° et v°). Par arrêt du 23 janvier 1378, la cour ordonna que les parties produiraient leurs faits et moyens, prescrivit une enquête et maintint en cause les auteurs de cette agression, bien qu’ils n’eussent fait qu’obéir aux ordres de leur maître et qu’ils fussent avoués par lui (X1a 27, fol. 105). Le 1er septembre 1379, deux conseillers du Parlement furent commis pour faire l’information (X1a 28, fol. 102 v°). Le sire de Parthenay, cependant, introduisit une demande reconventionnelle contre Pierre de Montfaucon, à cause de ladite terre de Saint-Mesmin et de celle de la Fosse, située dans la baronnie de Vouvant, qu’il prétendait tenir en fief avec le reste des baronnies de Parthenay et de Vouvant, comme on le voit par des actes du 7 mars et du 30 juillet 1380 (X2a 9, fol. 191 v° ; X1a 29, fol. 175).

Guillaume Larchevêque eut encore quatre procès : 1° contre la dame d’Amboise, remariée alors à Guillaume d’Harcourt, pour une somme de 1,800 livres qu’il lui réclamait, le 6 septembre 1380 (X1a 29, fol. 106) ; — 2° contre André Chevalier, fils et héritier de Pierre Chevalier, appelant du sénéchal de Vouvant. Renvoi de l’affaire aux assises du sénéchal de Poitou à Saint-Maixent, le 7 septembre 1380 (id., fol. 105 v°) ; — 3° contre Hugues de Bretagne, cardinal, prieur de Marsay en Poitou, dépendant de Saint-Maixent ; exécution avait été commencée, à la requête du sire de Parthenay, contre les biens du prieuré. La cour prescrit une information, le 11 septembre de la même année (id., fol. 108) ; — 4° contre Jeanne du Plessis, dame de la Jodoinière, Guillaume de Parthenay prétendant que les hommes du Plessis et de la Jodoinière lui devaient le guet et des gardes dans ses forteresses. (Acte du 13 août 1386, X1a 35, fol. 49.)

, ses diz bailli, capitaine, procureur et autres estans ou dit fort, si comme il dit, en nous suppliant humblement que sur ce lui vueillons faire grace. Et nous, inclinans à sa supplicacion, consideré ce que dit est et aussi les bons et agreables services que le dit sire de Partenay a faiz à noz predecesseurs et à nous, et fait encores chascun jour, et esperons qu’il face ou temps avenir, à ycellui et à ses officiers, bailli, capitaine, procureur et autres ses genz et subgiez quelxconques, nommez ci dessus, et autres leurs complices, aussi et par la maniere comme s’il feussent en ces presentes nommez, et à chascun d’eulx, les faiz dessus diz et chascun d’eulx, avecques toute peinne et amende corporele, criminele et civile qu’il sont et pevent estre diz encoruz, ou qu’il devroient souffrir et soustenir pour ce que dit est, leur avons quictez, remis et pardonnez, et par ces presentes remettons, quictons et pardonnons, de nostre auctorité royal, certaine science et grace especial, en les restituant au païs, à leurs biens, s’aucuns en estoient pour ce prins, saisiz ou arrestez, et à leur bonne renommée, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre dit procureur, parmi ce que le dit de Partenay rendra les diz prisonniers, s’il ne sont renduz. Et ainsi lui avons octroyé et octroyons, de grace especial, non obstans quelxconques ordonnances, mandemens ou defenses et lettres subreptices, empetrées ou à empetrer au contraire, et quelxconques procès faiz et encommenciez à faire, à l’encontre d’eulx et chascun d’eulx, les quelx nous mettons au neant. Si donnons en mandement, par ces presentes, à nostre dit gouverneur de la Rochelle, et à touz noz autres justiciers, officiers et subgiez, ou à leurs lieux tenans et à chascun d’eulx, presens et avenir, que de nostre presente grace lessent et facent joir et user paisiblement les dessus nommez et chascun d’eulx, et leurs complices, comme s’il estoient nommez et declarez en ces presentes, senz les contraindre ou molester, ne faire ou souffrir estre contrains au contraire, en aucune maniere, en mettant leurs corps et biens qui sont pour ce que dit est pris, saisiz ou arrestez, à plaine delivrance. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touz jours mès, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Saint Germain en Laye, le xiiiie jour de fevrier l’an de grace m. ccc. lxxvi, et le xiiie de nostre regne.

Par le roy. L. Blanchet.

DCIV 14 février 1377

Autre rémission en faveur de Guillaume Larchevêque de Parthenay et de Jean Morisset, son sergent en la châtellenie de Châtelaillon, qui avait abattu une croix plantée en signe de borne, dans un endroit de ladite châtellenie, par le prévôt royal de la Rochelle, et était emprisonné et poursuivi à ce sujet.

AN JJ. 110, n° 276, fol. 164 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 13-16

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que nostre amé et feal chevalier, Guillaume Larcevesque, sire de Partenay et de Chasteillailhon, nous a donné à entendre que, comme il ait en ycellui lieu de Chasteillailhon chastel et chastellerie d’ancienneté, avecques toute justice, haute, moyenne et basse, mere et mixte impere, avec tout le droit qui s’en depent, les quelles choses le dit Guillaume tient de nous en foy et hommage, et jà soit ce qu’il ait esté et soit tant par lui, comme par ses predecesseurs, dont il a cause, en bonne possession et saisine et pour le tout, et en a joy et usé paisiblement par tel et si long temps qu’il n’est memoire du contraire, ou qu’il souffist et doit souffire à bonne possession et saisine avoir acquise et retenir, senz ce que nostre prevost de la Rochelle, noz officiers ou autres aient cause ou droit de y faire drecier ne planter croix, ne autre signe ou bonne

Sic pour borne.

, et aussi de y faire autres exploix, fors que en cas de souveraineté et de ressort tant seulement ; neantmoins, Jehan Lucas, soy disant nostre prevost de la Rochelle, ou autres noz officiers s’estoient, n’a pas longtemps, en certains lieux de la dicte chastellerie, appelé la Phalaize du Viez Fourneau de la Chau, près de la dicte ville de la Rochelle, assiz environ le lieu de Tasdon et la tour de la Chayenne, et yllecques avoyent drecié ou fait drecier et planter une croix de boys, en signe de bonne ou autrement, en la quelle il disoient estre pour lors noz armes, et senz le congié et consentement du dit Guillaume et de ses officiers, et senz leur sceu ; un des sergenz d’icellui Guillaume, appellé Jehan Morisset, autrement Yon, et autres en sa compaignie, veanz ces choses prejudicier au dit Guillaume, eussent abatu la dicte croix par nuit. Et depuis le gouverneur de nostre dicte ville de la Rochelle, nostre procureur ou autres noz officiers en ycelle ont prins ou fait prenre et emprisonner le dit sergent, et encor le detiennent prisonnier, et aussi le detiennent en procès pour cause de ce, et se sont efforciez et efforcent de jour en jour de prenre et emprisonner ses diz complices, et yceulx detiennent en procès, pour cause des choses dessus dictes, les quelles ont esté faictes en troublant et empeschant le dit Guillaume en ses droiz, seignories, possessions et saisine dessus dictes, si comme il dit. Suppliant que, consideré ce que dit est et que la dicte croix ne fu abatue par aucun mauvaiz propoz, mais pour la conservacion du droit du dit Guillaume, actendu aussi les bons et agreables services que nous a faiz ycellui Guillaume et les sienz, et à noz predecesseurs, il nous plaise à eulx faire grace. Et nous, inclinans à leur supplicacion, consideré ce que dit est, le dit fait, s’il est ainsi, avec toute peinne corporele, criminele et civile, en quoy il est, et le dit Morisset et ses complices sont ou pevent estre diz encoruz, ou qu’il devroient souffrir et soustenir, pour les causes dessus dictes, à eulx dessus nommez et à chascun d’eulx, et leurs complices, aussi et par la maniere comme s’il estoient especialment nommez en ces presentes, avons quictié, remis et pardonné, et, par ces presentes, quictons, remettons et pardonnons, de nostre auctorité royal, certaine science et grace especial, en les restituant au païs, à leurs biens, s’aucuns en estoient pour ce prins, saisiz ou arrestez, et à leur bonne renommée, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre dit procureur, parmi ce que la dicte croix sera remise ou dit lieu, se jà ne l’est ; et aus dessus nommez et à chascun d’eulx l’avons ainsi octroyé et octroyons, de grace especial, non obstans quelxconques ordenances, mandemens ou defenses et lettres subreptices, empetrées ou à empetrer au contraire, et quelxconques procès faiz et encommanciez à faire à l’encontre d’eulx et de chascun d’iceulx, les quelx nous mettons au neant par ces presentes. Si donnons en mandement, par ces presentes, à nostre dit gouverneur de la Rochelle et à touz noz autres justiciers, officiers et subgiez, ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulx, presens et avenir, que de nostre presente grace laissent et facent user et joir paisiblement les dessus nommez et chascun d’eulx, et leurs complices, comme s’il estoient nommez en ces presentes, senz les contraindre ou molester, ne faire ou souffrir estre contrains ou molestez au contraire, en aucune maniere, en mettant leurs corps et biens qui sont, pour ce que dit est, prins, saisis ou arrestez, à plaine delivrance. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touz jours mès, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Saint Germain en Laye, le xiiiie jour de fevrier l’an de grace m. ccc. lxxvi, et le xiiie de nostre regne.

Par le roy. L. Blanchet.

DCV Février 1377

Denis Gillier, autrefois lieutenant de son père comme receveur de Poitou, puis trésorier de France, poursuivi et emprisonné, malgré des lettres de grâce antérieures, par les généraux réformateurs du royaume, pour abus et malversations commises dans l’exercice de ces fonctions, obtient du roi une composition pécuniaire. Moyennant deux mille francs d’or qu’il s’engage à payer, quittance générale lui est donnée de tout ce qu’il pouvait redevoir en ses comptes, et absolution lui est accordée de tous délits et crimes dont il aurait pu se rendre coupable. Le roi confirme en outre les lettres de rémission octroyées à son père et aux lieutenants de celui-ci, en janvier 1367.

AN JJ. 110, n° 115, fol. 66 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 16-22

Charles, par la grace de Dieu roy de France et dalphin de Viennois. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que de la partie de nostre amé Denys Gilier

Denis Gillier, fils de Philippe, auquel nous avons consacré une longue notice dans notre troisième volume (p. 166, note 1), fut nommé trésorier général de France par lettres de Charles V, pour le récompenser de ce qu’il avait contribué à la défense de la ville de Poitiers (sans doute à la remise de cette ville sous l’obéissance du roi de France). Ces lettres figurent sous ce titre dans le Catalogue des Archives du baron de Joursanvault (Paris, Techener, in-8°, 1838, t. II, p. 77) ; mais la date n’en est pas indiquée. Elles sont évidemment postérieures à la reprise de Poitiers, c’est-à-dire au 7 août 1372, et antérieures au 7 novembre 1373 ; car il existe à cette date des lettres de Jean duc de Berry et comte de Poitou, mandant à Denis Gillier, trésorier de France, de donner la recette du barrage, soquet ou entrage, qu’il avait accordé pour un an à la ville de Poitiers, à d’autres fermiers, les premiers adjudicataires n’ayant pas rempli leurs engagements. (Archives municipales de Poitiers, H. 6.) Il servait à cette époque le duc de Berry et jouit toujours de la faveur de ce prince. On trouve de nombreuses mentions de leurs rapports, pour les années 1373 à 1378, dans les registres de comptes de l’hôtel du duc. Le 15 avril 1373, Denis Gillier était à Parthenay avec le receveur de Poitou, et le duc leur envoya de Poitiers un messager, porteur de lettres ; du 27 août au 13 septembre suivant, il séjourna à Fontenay-le-Comte, et le 3 octobre à Montmorillon, et de ces deux villes il correspondit activement avec son maître (KK. 251, fol. 94, 128, 129). Il obtint des lettres d’anoblissement le 10 août 1379 ; elles seront publiées ci-dessous à leur date. M. Beauchet-Filleau lui donne le titre de chevalier du duc de Berry et ajoute qu’il fut maire de Poitiers en 1392, 1393, 1394 et 1399. Il l’était déjà en 1391 ; on conserve un acte de cette année où il en prend la qualité ; c’est une ordonnance de Denis Gillier, maire, d’Étienne Guichart et de Guillaume de Lorberie, bourgeois, commissaires en cette partie, pour le payement des charpentiers, serruriers, maçons et autres ouvriers employés aux réparations des murs et ponts de la clôture de la ville. (Archives de la ville, J. 39.) Le sceau de Denis Gillier porte un chevron surmonté d’une fleur de lys et accompagné de trois losanges, deux en chef et un en pointe, avec deux cerfs pour supports. On conserve dans le même dépôt d’autres ordonnances des mêmes commissaires pour l’année 1394, munis de leurs sceaux. (Id., J. 44-65.) Denis Gillier fit deux testaments, le premier le 19 novembre 1390, et le second, le 24 décembre 1401. Dans ce dernier, il élit sa sépulture dans l’église des Cordeliers de Poitiers. Il s’était marié trois fois. Le nom de sa première femme est inconnu. En secondes noces, il épousa Jeanne, fille de Jean Guérineau de Poitiers, conseiller du duc de Berry dès l’an 1372 (KK. 251, fol. 99 v°), et en troisièmes, Jeanne de Taunay, fille de Jean, qui fut aussi maire de Poitiers. Il eut deux enfants de sa seconde femme : Nicolas, chambellan de Charles VII, tué à la bataille de Verneuil, et Jeanne, femme de Guillaume du Chilleau. Jeanne de Taunay lui en donna quatre : Étienne, seigneur des Roziers ; Jean, notaire et secrétaire du roi ; Jacqueline, femme de Poinçonnet de Vivonne, seigneur d’Oulmes ; et Jeanne, mariée à Jean de Vailly, qui fut président au Parlement de Poitiers, sous Charles VII. (Dict. des familles de l’anc. Poitou, t. II, p. 157.)

, demourant à Poitiers, filz de Philippe Gilier, nous a esté humblement exposé que, comme le dit Philippe, son pere, ait esté par long temps en pluseurs et divers offices de nous et de noz predecesseurs, c’est assavoir en la recepte de Poitou, Limosin et Belleville, maistre des garnisons de nostre très chier seigneur et pere, ou temps qu’il estoit duc de Normendie, tresorier de Mascon, maistre des pors et passages de nostre royaume, et en pluseurs autres estaz, entre les quelx il fu tresorier de nostre Dalphiné, et depuis tresorier de France, chastellain et garde de nostre chastel de Meleun, et aussi commis et deputez à faire les ouvraiges et edifices qui ont esté faiz de son temps en ycellui, et aussi à faire la bastide assise devant Marroles, et si s’entremist des euvres de nostre boys de Vincennes et aussi de certaines euvres qu’il fist faire en nostre hostel de Saint Pol ; durant le quel temps le dit Philippe, tant par lui comme par autres ses commis et deputez en son nom, fist pluseurs receptes et mises de grans sommes de deniers, et entre les autres de ses lieuxtenans et commis en ait esté le dit exposant ; et par especial ait esté lieu tenant du dit Philippe, son pere, en la recepte de Poitou, Limosin et Belleville, et aussi ou païs du Dalphiné, ou temps que le dit Philippe en estoit tresorier ; et pour avoir compte du dit Philippe sur ces choses, le eussent fait autresfoiz approchier et icellui emprisonner et souspendre des diz offices, à fin de compte et autrement ; le quel Philippe eust voulu ou dit compte passer et allouer à sa descharge, devant les genz de noz comptes à Paris, pluseurs granz sommes de deniers, les quelx lui furent debatuz et contrediz, tant en nostre presence comme ailleurs. Et combien que depuis, à sa requeste et priere, nous l’eussions receu sur ces choses à composicion parmi la somme de iiii. m. frans d’or et aussi parmi certaines autres choses, moyennant la quelle composicion le dit Philippe et touz ses lieux tenans et commis, qui avoient esté pour le temps estoient et demouroient quictes, absolz et delivrés à touzjours de toutes offenses, deffaulx, crismes et delicts, se aucuns en avoient commis ou perpetrez ès diz offices, ou en aucun d’iceulx ; les quelx crismes et deliz nous leur eussions quictié, remis et pardonné, avec toute peinne et amende corporele, criminele et civile, en quoy il pourroient estre encoruz pour occasion d’iceulx, et avec ce les eussions quictez et absolz à tousjours de toutes receptes, mises et despenz par eulx faiz et faictes pour le dit Philippe et en son nom ès offices dessus diz, ou en aucun d’iceulx, senz ce que nous ou noz officiers en puissent faire dores en avant aucune poursuite, action ou demande à l’encontre des diz Philippe, ses lieux tenans ou commis, ou aucuns d’eulx, si comme ce et pluseurs autres choses pevent plus à plain apparoir par noz lettres en laz de soie et cire vert, des quelles la teneur s’ensuit :

Charles, par la grace de Dieu roy de France, etc. Donné à Paris, ou moys de janvier l’an de grace mccclxvi, et le tiers de nostre regne

Voy. le texte des lettres de grâce accordées à Philippe Gillier, moyennant composition pécuniaire et certaines restitutions, en novembre 1354 (n° CCCXCVI) et celles de janvier 1367 n.s., ici insérées (n° CCCCXLV), dans notre tome III, p. 165 et s., p. 341 et s.

.

Neantmoins noz amez et feaulz conseillers les generaulz refformateurs de nostre royaume, derrainement seanz à Paris, firent arrester le dit exposant, lui estant à Paris, et icellui detenir prisonnier par aucun temps en nostre Chastellet de Paris, soubz umbre de ce que eulz et nostre procureur disoient et maintenoient contre lui que, ès diz temps que il avoit esté lieutenant et commis du dit Philippe, son pere, ès lieux dessus diz, il avoit receu pluseurs sommes de noz deniers et avoit fait et commis pluseurs crismes, deliz et malefices ès diz offices et autrement, en pluseurs manieres ; et aussi qu’il avoit esté tresorier de France, durant le quel temps il avoit pris et receu pour nous certaines sommes de deniers et yceulx appliquez à son prouffit, dont il n’avoit point rendu compte, et depuis eust esté eslargiz et mis hors de prison, senz ce que sur ces choses ait esté autrement procédé. Et nagueres le dit exposant se soit traiz devers nous et nous ait fait presenter noz dictes autres lettres cy dessus transcriptes, en nous requerant que contre la teneur d’icelles nous ne le voulsissions souffrir en aucune maniere molester ou contraindre ; et aussi nous ait fait requerir ycellui exposant, voulant estre et demourer tousjours en nostre grace et amour, que sur les choses dessus dictes, en tant comme il lui pourroit touchier, et toutes et chascune autres choses que l’en lui pourroit imposer avoir commis et perpetré ès offices dessus diz et en chascun d’iceulx, ou autrement, commant que ce soit, et aussi de tout ce en quoy il pourroit estre tenuz envers nous, à cause et pour raison des faiz et offices dessus diz, leurs circunstances et dependences, et autrement, commant que ce soit, dont on le peust ou pourroit poursuir ou approchier, nous le voulsissions recevoir à composicion amiable, et aussi ratiffier et approuver noz dictes lettres cy dessus transcriptes, en tant comme il lui touche ou pourroit touchier.

A la quelle composicion nous, qui tousjours nous voulons rendre gracieux et benignes envers noz officiers et serviteurs, afin de augmenter et acroistre leur coraige à nous servir de mieulx en mieulx, et pour contemplacion de nostre très chier et très amé frere le duc de Berry, conte de Poitiers, qui sur ce nous en a requis, avons receu benignement le dit exposant ; c’est assavoir parmi la somme de h.m. franz d’or, laquelle il sera tenuz et nous a promis paier à la feste saint Jehan Baptiste prochaine venant. Et parmi ce le dit exposant sera, demourra, est et demeure, seront et demourront ses hoirs ou ayanz cause perpetuelment et à tousjours, quictez, delivrés et absolz envers nous et noz successeurs, tant des receptes, mises et despenz dessus dictes et autres contenues ès dictes lettres, et du compte et reste qu’il nous seroit et pourroit estre tenuz de rendre, comme de touz les deliz, crimes, malefices et autres choses quelxconques, dont nous eussions peu faire poursuite, demande ou action contre lui, au jour de la date de ces presentes, des quelles choses et de chascune d’icelles nous le avons quictié et absolz, et de nostre certaine science, grace especial, plaine puissance et auctorité royal absolons, quictons et delivrons à plain et à tousjours mais perpetuelment, et aussi ses heritiers, successeurs ou ayanz cause, et nous en tenons pour bien contens, paiez et agreez par la teneur de ces presentes, senz ce que pour le temps avenir nous, noz genz ou officiers, noz successeurs ou leurs officiers, puissions ou doyons le dit exposant, ses hoirs ou ayanz cause, poursuir ou approuchier, ou autrement contraindre ou molester, commant que ce soit, pour occasion d’icelles, mais en demourront quictes, delivrés et absolz perpetuelment et à tousjours. Et avec ce avons ratiffié et approuvé, ratiffions et approuvons, par ces presentes, noz dictes lettres cy dessus transcriptes et tout l’effect et contenu en ycelles, en tant qu’il touche et pourroit touchier, à present ou pour le temps avenir, le dit exposant, ses hoirs ou ayanz cause, et le dit exposant de nouvel, en tant que mestier lui seroit, avons quictié, quictons et absolons, de nostre dicte grace, de toutes les choses dessus dictes et chascune d’icelles, et nous en tenons pour bien contens ; et avec ce lui avons quictié, remis et pardonné, quictons, remettons et pardonnons de nostre dicte grace, par ces presentes, toute peinne et amende corporele, criminele ou civile, en quoy il seroit ou pourroit estre encoru pour occasion d’icelles, non obstans quelxconques procès sur ce faiz, tant par devant noz diz reformateurs comme autres juges quelx conques, les quelx nous avons anullé, anullons et mettons du tout au neant par ces presentes, et en avons delivré le dit exposant et delivrons à plain. Et aussi avons levé et osté, levons et ostons tout empeschement et main mise qui seroient ou auroient esté mises en sa personne et biens quelxconques. Et non obstant aussi que les cas, receptes, mises et despenz, et mesmement ceulx dont (sic) pour les quelx noz diz reformateurs firent prenre le dit exposant, dont aucuns ne lui furent onques declarez, ne soient pas specifiez [et] declarez en ces presentes lettres, ordenances, mandemens ou defenses, usaiges ou stile, de quelque court ou jurisdicion que ce soit, à ce contraires ; les quelles nous ne voulons avoir lieu ou vigueur, en aucune maniere, à l’encontre de la grace, remission, quictance et octroy dessus diz ; mais imposons sur toutes les choses dessus dictes, leurs circunstances et dependences et autres quelx conques, silence perpetuel à nostre procureur et à touz autres noz justiciers et officiers, et autres quelx conques. Si donnons en mandement, par la teneur de ces presentes, à noz amez et feaulz conseillers les genz tenans nostre present Parlement et qui le tendront pour le temps avenir, les genz de noz comptes à Paris, noz tresoriers, à touz reformateurs, deputez ou à deputer, et à touz autres commissaires, commis ou à commettre, au prevost de Paris, au bailli des Exempcions de Touraine, de Poitou, d’Anjou et du Maine, et à touz autres justiciers et officiers de nostre royaume et du dit Dalphiné, presens et avenir, et à leurs lieuxtenans et chascun d’eulx, que le dit exposant, ses heritiers, successeurs ou ayanz cause, facent, sueffrent et laissent joir et user paisiblement de nostre dicte grace, remission, quictance et octroy dessus diz, senz le molester ou souffrir estre molesté en aucune maniere à l’encontre, mais son corps et ses biens, se pour ces choses il estoient empeschiez ou arrestez, mettent à plain au delivre et les baillent, rendent et restituent, ou facent baillier, rendre et restituer au dit exposant, selon la teneur de nostre dicte grace. Et que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Saint Germain en Laye, ou moys de fevrier l’an de grace m. ccc. lxxvi, et le xiiie de nostre regne.

Par le roy. L. Blanchet.

DCVI Mars 1377

Rémission en faveur de Guillaume Durand, coupable de meurtre, à la suite d’une rixe, sur la personne de Lucas Rocher, qu’il avait trouvé en train de faire paître des bestiaux dans ses prés de la châtellenie de Thouars.

AN JJ. 110, n° 237, fol. 139 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 22-24

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Guillaume Durant

On trouve un Guillaume Durand qui était en procès contre Jean Mercier, de Plaisance, au sujet d’une maison sise en ce lieu. Cette contestation fut terminée par une sentence de maître Jean Bernier, réformateur général en Poitou, Saintonge et Limousin, le 13 mars 1354 (X1a 15, fol. 192).

, contenant que, comme il eust certains prez ou autres heritaiges en la chastellenie de Touars, qui estoient partie de sa chevance, et pour ce qui vint à sa cognoissance que un appellé Lucas Rochier, qui estoit homme de petite conscience et coustumier de prendre à loier buefs, vaches et autres bestaux des granz seigneurs du païs, pour grever ses voisins, soubz umbre de leur puissance, lui gastoit et dommagoit ses diz prez, et y mettoit de jour en jour yceulx bestaux pasturer, ycellui Guillaume Durant, un jour entre les autres, ainsi qu’il estoit en ses diz prez, dist au dit Lucas qu’il faisoit mal de gaster ses diz prez et que plus ne y mesist ses dictes bestes pasturer. Neantmoins le dit Lucas dist que si feroit et que, si le dit Guillaume Durant estoit si hardi de en parler, il seroit très bien batuz, ou [telles] paroles en substance. Et de fait, present le dit Guillaume, ycellui Lucas y amena pluseurs bestes, les quelles le dit Guillaume cuida chassier et contredire l’entrer ès dis prés, mais incontinent le dit Lucas par son grant oultrage le frappa d’un grant baston appellé pantaut, qui le bleça grandement. Et pour ce le dit Guillaume, en repellant force par force et en deffendant son corps et ses biens, refrapa le dit Lucas, dont mort s’est ensuie. Du quel fait il a bonne paix à partie, si comme il dit. Et pour ce nous ait supplié que, ces choses considerées, que en touz cas il est de bonne renommée, et qu’il loist à un chascun deffendre son corps et ses biens modereement, nous lui vueillions sur ce nostre grace impartir. Pour ce est il que nous, de grace especial, ou cas dessuz dit et satisfait à partie, se fait n’est, premierement et avant toute euvre, au dit Guillaume Durant avons quictié, pardonné et remis, quictons, pardonnons et remettons le fait dessuz dit, avec toute peinne corporelle, criminelle et civile, evocacions et ban que pour ce puet avoir encouru envers nous, et le restituons à sa bonne fame et renommée, au païs et à ses biens non confisquez. Si donnons en mandement au bailli des Exempcions de Tourainne, d’Anjou, du Mainne et de Poitou, et à touz noz autres justiciers, presens et avenir, à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que, de nostre presente grace et remission le facent et seuffrent joir et user paisiblement, sanz le molester ne souffrir estre molesté en corps ne en biens, contre la teneur d’icelle. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à tous jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou mois de mars l’an de grace m. ccc. lxxvi, et de nostre regne le xiiie, avant Pasques.

Es requestes de l’ostel. P. Briet. Blondeau.

DCVII 16 avril 1377

Lettres de sauvegarde octroyées au prieur, aux commandeurs et aux frères de l’Hôpital de Saint-Jean-de-Jérusalem du prieuré d’Aquitaine.

AN JJ. 110, n° 252, fol. 149 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 24-27

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que nous, consideranz et ramenanz à memoire la bonne voulenté et grant affection de noz bien amez les religieus, prieur, commandeurs et freres de l’ordre de l’Ospital Saint Jehan de Jherusalem, ou prioré d’Acquitaine

On sait que Poitiers était le chef-lieu du grand-prieuré d’Aquitaine, dans la circonscription duquel on comptait trente-cinq commanderies situées tant en Poitou que dans les provinces voisines : l’Angoumois, la Saintonge, l’Aunis, la Touraine, l’Anjou, le Maine, le Perche et la Bretagne.

, ont tousjours eu à noz predecesseurs roys de France et à nous, ou temps passé et encores de jour en jour sanz cesser demonstrent par effect avoir à nous, et aussi les grans aides, responsions

Responsion, somme que les chevaliers des ordres militaires devaient payer tous les ans au procureur général de leur ordre. (Du Cange, Glossaire,Responsio, 2.)

et solvencions que il leur convient continuelment faire pour la tuicion et garde de la Saincte Terre de oultremer, voulanz pour ce yceulx guerredonner et poursuir de faveur especial et leur pourveoir de remede de nostre auctorité royal, par quoy eulx et leurs choses puissent estre et demourer paisiblement en nostre royaume, ou temps present et avenir, et les quelz sont de ancienneté en la saulve et especial garde et proteccion royal, les diz religieus, prieur, commandeurs et freres, leurs donnez, familes et hommes et femmes de corps de condicion serve, avec leurs maisons, granches, possessions et touz leurs autres biens, quelx qu’il soient, assiz et estanz dedans nostre royaume, en chief et en membres, avons receu, prins et mis, recevons, prenons et mettons dès orendroit à tousjours especialment par ces presentes, en la main, protection et garde especial de nous et de noz successeurs, roys de France. Et pour ce mandons et commettons à nostre bailli des Exempcions et ressors de Touraine, de Poitou, d’Anjou et du Maine, qui ores est, et à ceulx qui par le temps avenir ou dit office seront, le quel bailli est leur plus prochain juge royal, que aus diz religieus, toutesfoiz que il les requerront, deputent de par nous certainnes personnes souffisanz, noz sergens, pour les dessuz diz et chascun de eulx et leurs biens garder et deffendre, soubz la proteccion et garde dessus dicte, et leur donnent plain povoir, auctorité et mandement especial par lettres de garder les diz religieus, leurs donnez, familes et hommes et femmes de corps de condicion serve, maisons, granches, possessions et touz leurs autres biens, quelx qu’il soient, et de eulx maintenir et faire maintenir et garder en leurs justes possessions et saisines, droiz, usages, coustumes, franchises et libertez, quelles que elles soient, et yceulx et chascun d’eulx deffendre de toutes injures, violences, oppressions, griefs, molestes et nouvelletez indeues, quelles que elles soient, de force d’armes et puissance de lais, et de pourveoir yceulx et chascun d’eulx qu’ilz ne soient injuriez, toutes foiz que mestier en sera et que sur ce seront requis, et autrement entendans efficaument à la seurté et sauvement d’iceulx et de toutes leurs choses et de leurs biens, et de faire oster les turbacions, empeschemens et nouvelletez indeues, aus dessus diz faites ou à faire injustement, toutes foiz que mestier en sera ; et se debat ou opposicion naist entre yceulx et autres en cas de nouvelleté, se prendre et mettre le debat et la chose contencieuse en nostre main, comme souverainne, et faire restablir et ressaisir les lieux des choses prinses et ostées, se aucunes en y a realment et de fait, et faire faire recreance où elle sera à faire de raison et par ceulx qu’il appartendra, quant le cas y escherra et il en seront requis, les contredisans, opposanz, rebelles et injuriateurs adjourner en nostre Parlement à Paris, ou par devant noz bailliz ou noz autres juges competens, à qui la cognoissance en devra appartenir, pour aler avant sur les diz debaz, oppositions et choses contencieuses, si comme de raison appartendra, et de certiffier noz juges ou justiciers de tout ce que fait auront sur ce, par lettres ou autrement souffisanment. Aus quelx nous mandons que ilz facent aus parties sur ce bon et brief accomplissement de justice, et de mettre ou faire mettre noz pennunceaulx royaulx sur les maisons, granches, possessions et biens des dessuz diz, assiz en païs gouverné par droit escript, et ailleurs aussi, en cas de peril eminent et [quant] de ce seront requis ; et generalement de faire toutes et chascunes les choses qui à office de gardian pevent et doient appartenir, en quelque maniere que ce soit. Et n’est pas nostre entente que des choses qui requierent cognoissance de cause se doient entremectre en aucune maniere, fors si comme dessus est dit. Sauf aus dessuz diz les anciennes gardes données de noz predecesseurs et de nous, les quelles nous ne voulons pas estre rappellées par ces presentes, mais voulons que elles demeurent en leur vertu. Et pour ce que ce soit ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Donné à Paris le xvie jour d’avril après Pasques, l’an de grace m. ccc. lxxvii, et de nostre regne le xiiiie

Le texte de ces lettres a été publié, d’après la même source, dans le recueil des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. VI, p. 261.

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Par le roy, à la relacion du conseil. Mauloue.

DCVIII 29 mai 1377

Lettres portant que l’abbaye de Sainte-Croix de Poitiers, qui est de fondation royale, ressortira toujours devant les juges royaux, et non devant les officiers de Jean duc de Berry, comte de Poitiers

Ces lettres ont été publiées dans le recueil des Ordonnances des rois de France, t. VI, p. 265, d’après le registre du Trésor des Chartes et à l’aide du 5e volume des Ordonnances de François Ier, enregistrées au Parlement de Paris (nunc Arch. nat., X1a 8615, fol. 132). Les deux textes présentent quelques différences peu importantes qui ont été notées par les éditeurs des Ordonnances. Celui du Trésor des Chartes que nous donnons est le meilleur des deux.

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AN JJ. 111, n° 13, fol. 12 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 27-30

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de noz bien amées les religieuses, abbesse et convent de l’eglise Sainte Croix de Poitiers

L’abbesse de Sainte-Croix était alors Gallienne du Pouget. Elle avait été élue en 1371 et son nom figure encore avec cette qualité dans des actes des années 1374, 1376, 1381 et 1389. On la retrouve ensuite abbesse de Saint-Césaire d’Arles en 1393 ; elle avait été remplacée à Sainte-Croix, avant 1391, par Marie du Cros, précédemment placée à la tête dudit monastère de Saint-Césaire (Gallia christ., t. II, col. 1302.) Le 19 décembre 1370, une transaction avait été passée entre les religieuses de Sainte-Croix et les chanoines de Sainte-Radegonde de Poitiers, au sujet des charges, devoirs et obligations de ceux-ci envers les religieuses. (Coll. dom Fonteneau, t. V, p. 679.) Par bulle du 25 mai 1372, le pape Grégoire XI commit l’archevêque de Tours, Simon de Renoul, pour obliger, par la voie des censures ecclésiastiques, ceux qui avaient usurpé les droits, domaines et héritages de l’abbaye, d’en opérer la restitution. (Id. ibid., p. 691.) A l’époque où Gallienne du Pouget obtint les présentes lettres d’exemption de ressort, l’abbaye de Sainte-Croix était en procès au Parlement contre l’abbaye de Fontevrault touchant une rente annuelle de cinquante setiers de froment. (Acte du 20 août 1377, X1a 26, fol. 96.)

, estanz tant en chief comme en membres, avec leurs biens, serviteurs, genz et officiers quelconques en nostre protection et sauvegarde especial, contenant que, comme elles soient fondées par madame sainte Ragonde, jadis royne de France et femme du roy Clotaire, le quel et aussi le roy Pepin, Charlemaine, le roy Loys et autres pluseurs noz predecesseurs leur ont donné et octroié, ou temps passé, pluseurs beaux previleges, tant en faveur et pour contemplacion de la dicte eglise, comme pour ce aussi que la dicte eglise avoit esté fondée par la dicte royne, et par ce soient et doient estre et demourer, tant en chief comme en membres, sanz moien, soubz nostre souveraineté et ressort. Neantmoins aucuns des officiers et justiciers de nostre très chier et amé frere le duc de Berry et d’Auvergne, conte de Poitiers, et aucuns autres seigneurs se sont efforciez et efforcent de avoir la souverainneté et ressort des dictes supplianz et de leurs hommes, subgiez et justiçables, estanz et demourans en leurs terres et justices, combien que nous aions retenu et reservé par devers nous la souverainneté et ressort des eglises estanz de fondacion royal, qui sont des droiz de nostre coronne et n’en pevent ou doivent estre separées ou abdiquées, la quelle chose pourroit redonder ou grant grief et prejudice des dictes supplianz, se par nous n’y estoit sur ce pourveu, si comme elles dient ; supplianzque sur ce les vueillions pourveoir de gracieux remede, et oultre declairer et discerner les dictes religieuses, leur dicte eglise, tant en chief comme en membres, leur appartenences, appendences, avec leurs hommes, subgiez et justiçables, estanz et demouranz en leurs dictes terres et justices, estre et devoir demourer perpetuelment soubz nostre dicte souverainneté et ressort. Pour quoy nous, considerans les choses dessuz dictes, avons voulu et declairié, voulons et declairons par ces presentes, de nostre plainne puissance et auctorité royal, et de grace especial, se mestiers est, les dictes religieuses, leur eglise avecques touz ses membres et appartenances, leurs hommes, subgiez et justiçables, estanz et demourans en leurs dictes terres et justices, estre et devoir demourer perpetuelment en et soubz nostre dicte souverainneté et ressort, senz moien, et de noz justiciers et non d’autres. Si donnons en mandement par ces presentes à noz amez et feaulx genz de nostre Parlement et de nostre Chambre des comptes, à Paris, au bailli des Exempcions de Tourainne, de Poitou, d’Anjou et du Mainne, et à touz noz autres justiciers, presens et avenir, et à leurs lieux tenans et à chascun d’eulx, que de nostre presente grace, declaracion et octroy facent, seuffrent et lessent joir et user paisiblement les dictes supplianz et leurs successeurs, tant en chief comme en membres, leurs diz hommes, subgiez et justiçables, estans et demourans en leurs dictes terres et justices, en faisant inhibicion et deffense de par nous à touz ceulx dont il seront requis. Aus quelx nous deffendons, par ces presentes, que contre la teneur de nostre dicte grace et octroy ne les molestent, facent ou seuffrent estre molestez ou empeschiez, en aucune maniere à l’encontre ; mais s’aucune chose avoit esté fait ou attempté au contraire, le remettent ou facent remettre tantost et sanz delay au premier estat et deu, non obstans quelxconques usages ou seurprises et lettres quelxconques, subr[epticement] empetrées ou à empetrer au contraire. Et que ce soit ferme chose et estable, et à fin de perpetuelle memoire, nous avons fait mettre à ces presentes nostre seel ordenné en absence du grant. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris en nostre chastel du Louvre, le xxixe jour du mois de may l’an de grace mil ccc. lxxvii, et le xiiiie de nostre regne.

Par le roy en ses requestes. P. Houdoyer. Cramaut.

DCIX Mai 1377

Rémission accordée à Perrot Thomas qui, avec un de ses compagnons, avait frappé à mort, au Fenouiller, Jean Vayron, après que celui-ci leur eut cherché querelle et les eut gravement injuriés.

AN JJ. 110, n° 310, fol. 183 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 30-33

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, de la partie des amis charnelx de Perrot Thomas, povre laboureur du païs de Poitou, et subgiet de nostre amé et feal cousin et chambellan le viconte de Rochechoart

Louis vicomte de Rochechouart, fils de Jean Ier, tué à la bataille de Poitiers, et de Jeanne de Sully. Il rendit hommage le 13 septembre 1363 au prince de Galles, dont il fut pendant six ans le conseiller. Lors de l’appel porté devant le roi de France par les barons de Gascogne (mai-juin 1368) et de la rupture du traité de Brétigny qui en fut la conséquence, les sentiments français du vicomte de Rochechouart se réveillèrent. Soupçonné de défection, il fut mandé à Angoulême par le prince, et malgré la justification qu’il essaya, « le convenist tenir prison fremée, et demora un grant temps en ce dangier ». A la prière de ses amis de Poitou, le prince de Galles finit par le remettre en liberté et lui rendit « toute sa terre. Quant li dis viscontes fu delivrés de prison, il s’en vint couvertement, au plus tost qu’il peut, à Paris devers le roy et se tourna françois, et revint arriere en sa terre, sans ce que on sceuist riens encores de son afaire, et mist Thiebaut dou Pont, breton, un très bon homme d’armes, en sa forterece, et envoia tantost deffiier le prince et fist grant guerre au prince. » (Froissart, édit. S. Luce, t. VII, p. 137, 163.) De leur côté, les Anglais furieux portèrent le ravage dans ses possessions. La soumission du vicomte de Rochechouart à Charles V eut lieu vers le mois de juin 1369 ; à cette date, le roi, pour reconnaître le service de celui qu’il appelle son amé et féal cousin, lui fit don de 2000 livres de rente à asseoir sur le château et la châtellenie de Rochefort-sur-Charente et, en cas d’insuffisance de ce domaine, sur l’île d’Oléron (JJ. 100, n° 137, fol. 43 v°). Il fut nommé en même temps gouverneur du Limousin et chambellan du roi. On lit dans un mandement de Charles V, daté du 1er décembre 1369 : « Pour la garde et deffense des chasteaulx et forteresses que possede nostre amé et feal cousin le vicomte de Rochechouart, estans ou païs de Guyenne, et pour resister et grever nos ennemis, l’avons retenus et retenons au nombre de vixx hommes d’armes, et nostre amé et feal Regnault de Dony avec autres lx. hommes d’armes, sous le gouvernement dud. viconte », auquel il est alloué 60 francs d’or par mois de gages. Cette retenue fut renouvelée le 13 mars 1370, et le 11 mai suivant on trouve un ordre de payement des gages de ces deux capitaines et de leurs hommes d’armes. (L. Delisle, Mandements de Charles V, p. 304, 322, 348.) En vain le prince de Galles, pour ramener à lui le vicomte de Rochechouart, lui fit-il adresser secrètement une copie de l’amnistie qu’Édouard III avait accordée, par lettres du 15 novembre 1370, à tous ses sujets de la principauté d’Aquitaine qui, après avoir pris parti pour Charles V, voudraient faire leur soumission (Froissart, édit. Luce, t. VII, p. 212), le vicomte resta désormais fidèle à la cause française. Au mois de juillet 1372, la veuve d’Aimery de Tastes, dont les biens avaient été confisqués pour cause de rébellion, obtint des lettres de rémission et la restitution de sa terre, à condition de rendre le château et la ville de Tonnay-Charente à Louis de Rochechouart (JJ. 103, fol. 82). Celui-ci épousa en premières noces Marie de Trignac, dite de Javersy, et en secondes, Isabeau de Parthenay, fille de Guy Larchevêque, seigneur de Soubise ; il vivait encore en 1398. (Voy. le P. Anselme, Hist. général., t. IV, p. 653.)

, nous avoir esté humblement exposé que, comme le dit Thomas et un autre estanz ensemble en la ville de Fenoiller, à heure de soleil couchant, paisiblement et senz ce que il meffeissent à aucun, Jehan Vayron survint ou lieu ou il estoient et par avant les avoit poursuiz, et le quel meuz de sa voulenté leur dist pluseurs injures et villenies, et les menassoit et mesmement en disant qu’il estoient garsons, truans, ribaux, mauvais, et que il les avoit mis à povreté et encores les y mettroit il plus, se jamais il estoit temps de mettre subvencions et aydes ou païs, en leur disant oultre que il n’estoient que garsons et que ce qu’il mengoient n’estoit mie digne de mengier à un chien ; les quelx debonnerement et courtoisement eussent respondu au dit Jehan Vayron que il ne leur voulsist point dire de villenie, mais se il vouloit boire et mengier avecques eulx, que il en auroient grant joye ; mais ce non obstant, le dit Vayron en continuant en ses dures paroles, leur dist encores plus d’injures que devant, en blasmant et diffamant eulx et leur lignage, et aussi en les menassant de les villenner et injurier de leurs corps, et en disant les dictes menasses, se departi d’avecques les dessus diz ; et pou après, en continuant en sa mauvaise voulenté, ainsi comme il s’en aloient, le dit Jehan Vayron vint à l’encontre d’eulx et leur dist plus d’injures que devant, senz ce que les dessus diz lui eussent dit ou meffait aucune injure. Les quelx, veanz les grans oultraiges du dit Jehan, meuz et eschauffez tant du vin qu’il avoient beu comme des paroles injurieuses devant dictes, batirent le dit Jehan Vayron de leurs bastons que il portoient, senz ferreure, tellement que le dit Jehan en est mors. Pour doubte du quel fait le dit Thomas suppliant, doubtant rigueur de justice s’est absentez du païs ne n’y oseroit retourner, se sur ce ne lui est pourveu de nostre grace, de la quelle nous a fait humblement supplier. Pour quoy nous, ces choses considerées et que le dit suppliant, qui est povres homs, chargiez de femme et de petiz enfans, est de bonne renommée et honneste conversacion, senz aucun autre villain meffait, consideré aussi que le dit Vairon devant sa mort pardonna le dit meffait au dit Thomas, suppliant, en priant ses amis que contre le dit Thomas ne voulsissent faire aucune poursuite, et en recognoissant et disant que, se ce n’eust esté le dit Thomas, il feust mors senz confession, et que nostre dit cousin et chambellan, en quelle terre et jurisdicion le dit meffait fu perpetré, nous a humblement sur ce supplié, nous au dit Perrot Thomas, exposant, le cas et meffait de la mort dessus dicte, avecques toute peinne et amende corporele, criminele et civile, en quoy, pour la dicte mort ou occasion d’icelle, ycellui exposant puet et doit estre envers nous encoruz, avons ou cas dessus dit, de nostre auctorité, puissance royal et certaine science, remis, quictié et pardonné, quictons, remettons et pardonnons par ces presentes à ycellui Thomas suppliant, [et le] restit[uons] à son païs, fame, renommée et à ses biens, en imposant sur ce à nostre procureur et à touz autres perpetuel silence, satisfacion toutes foiz [faite] à partie, s’aucune en y a, sur ce civilement. Si donnons en mandement par ces presentes au bailli des Exempcions de Poitou et à touz noz autres justiciers et officiers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans, si comme à eulx et chascun d’eulx appartendra et pourra appartenir, que le dit Perrot Thomas suppliant facent et sueffrent joir et user paisiblement de nostre presente remission, senz le molester ne souffrir estre molesté au contraire aucunement, en lui mettant et faisant mettre son corps et biens, se pour ce estoient prins ou arrestez, à plaine delivrance. Et afin que ce soit ferme chose et estable à touz jours, nous avons fait mettre à ces presentes nostre seel [ordonné] en l’absence du grant. Sauf en autres choses nostre droit et en toutes l’autrui. Donné à Paris, ou moys de may l’an de grace m. ccc. lxxvii, et de nostre regne le xiiiie.

Par le roy. T. Hocie.

DCX Juin 1377

Rémission accordée à Jean Guergny, laboureur, demeurant à Romans, qui avait frappé à mort son beau-frère, dans une rixe provoquée par celui-ci.

AN JJ. 110, n° 355, fol. 203 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 33-35

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, de la partie de Jehan Guergny, povre laboureur demourant en la parroisse de Romen, nous avoir esté exposé que assez tost aura trois ans ou environ, feu Jehan Poilbelant, frere de la femme du dit exposant, qui estoit homme de male cole, à un certain jour après ce que il fu venu de son labour, meu de ce que les bestes avoient cellui jour desolé et gasté son laborage, se courroça à sa femme, en lui surmettant que par sa mauvaise garde leurs bestes propres avoient gasté leur labourage, la quelle chose estoit vraye, mais sa dicte femme, si comme le dit exposant a depuis sceu, lui dist, pour soy descharger et garder de estre batue, que ce avoient fait les bestes du dit exposant, cuidanz la dicte femme que atant son dit mary se deust appaisier, mesmement que le dit exposant avoit et a espousée la suer du dit deffunct, mais non fist, ains se garny d’un gros baston et de pluseurs grosses pierres, et en perseverant en sa fureur, sailli hors de son hostel et approcha l’ostel du dit exposant, son serouge, et geta pluseurs pierres aus enfanz d’icellui exposant, qui estoient au dehors de son dit hostel ; et quant la femme du dit exposant, suer du dit deffunct, oy ce, elle, meue d’amour maternelle, yssi hors du dit hostel pour soy prendre garde de ses diz enfanz et les garder de mal à son povoir, en demandant : « Qu’est ce ? qu’est ce ? » Et quant elle fu dehors le dit hostel, son dit frere, en lui surmettant que ses bestes avoient gasté son labourage, et pour ce que elle parloit des dictes pierres getées à ses diz enfanz, la fery deux cops par la teste du dit baston que il avoit, si que il lui fist deux plaies et la navra jusques au test. Et au cry et debat que elle fist pour les diz cops, son dit mary qui faisoit paisiblement sa besoingne en son dit hostel et de ce ne se gardoit, meuz d’amour envers sa dicte femme, yssi dehors, et quant il la vit ainsi navrée à son huis, et le dit defunct tenant le dit baston dont il l’avoit navrée, en le haussant pour la plus ferir, s’il eust peu, ycellui exposant feri d’un baston qu’il avoit prins en son dit hostel un cop seulement le dit deffunct par la teste, du quel cop ne yssi point de sanc ne n’y ot plaie ouverte, mais le sanc se assembla et ne pot issir et lui noersi la char alentour, et le dit deffunct fu mal secouru et gouverné ; si ala de vie à trespassement, deux jours après ou environ. Pour le quel fait le dit exposant se doubte que pour le temps avenir il peust estre poursuiz et mal traictiez par rigoreuse justice, combien que depuis le dit fait il ait demouré et demoure paisiblement au païs, et que justice ne partie n’en facent de present aucune poursuite, si comme il dit, en nous humblement suppliant que, comme en autres choses il ait tousjours esté et soit de bonne vie et conversacion, nous sur ce lui vueillions eslargir nostre grace. Nous adecertes, considerée la maniere du dit fait, avons au dit Jehan Guergny le fait dessuz dit et toute peinne, amende et offense corporelle, criminelle et civile, en quoy pour occasion de ce que dit est, il est et puet estre encouruz envers nous, ou dit cas, quictié, pardonné et remis, quictons, pardonnons et remettons de grace especial et de nostre auctorité royal, par la teneur de ces presentes lettres, et le restituons au païs, à sa bonne renommée et à ses biens, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur et à touz justiciers et officiers, satisfacion premierement faicte à partie civilement. Si donnons en mandement au bailli des Exempcions de Tourainne, d’Anjou, du Mainne et de Poitou, et à touz noz autres justiciers et officiers, à leurs lieux tenans presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit Jehan Guergny facent, seuffrent et lessent joir et user paisiblement de nostre presente grace, sanz le poursuir, contraindre ou molester ne faire ou souffrir estre contraint, molesté ou empeschié au contraire, pour occasion du dit fait, en corps ne en biens, en aucune maniere, ains s’aucun empeschement lui estoit pour ce donnez, si le ostent et facent oster tantost et sanz delay. Et que ce soit chose ferme et estable à tous jours, nous avons fait mettre à ces lettres nostre seel ordené en l’absence du grant. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou mois de juing l’an de grace m. ccc. lxxvii, et le xiiiie de nostre regne.

Es requestes de l’ostel. S. de Caritate. Praelles.

DCXI 7 juillet 1377

Confirmation et vidimus des privilèges octroyés à l’abbaye de Sainte-Croix de Poitiers, par deux diplômes des rois d’Aquitaine, Pépin Ier, le 1er avril 826, et Carloman, le 20 février 885.

AN JJ. 111, n° 169, fol. 86 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 36-42

Karolus, etc. Ad perpetuam rei memoriam. Dum oculos sursum levamus et in sui disposicione cuncta solerti studio prospicimus, inter cetera pietatis opera, nil regie celsitudini salubrius arbitramur quam illam Regis eterni sponsam unicam, sanctam matrem Ecclesiam, in suis particularibus membris, beneficiis dotare multiplicibus et temporalibus communire suffragiis, in illis potissime que predecessores nostri divina ordinacione atque superna inspirante clemencia pro ejusdem firmitate statuerunt, que et si nos nostris confirmamus temporibus, proculdubio eterne mercedem beatitudinis speramus nobis exinde promereri. Notum igitur facimus universis, presentibus pariter et futuris, nos litteras infrascriptas vidisse, tenores ac formas habentes que secuntur :

Pippinus, gracia Dei rex Acquitanorum. Si enim ea, que fideles regni nostri pro eorum opportunitatibus juste pecierint, nostris confirmamus edictis, regiam exercemus consuetudinem et hoc in postmodum jure firmissimo mansurum esse volumus. Idcirco noverit omnium fidelium nostrorum, presencium scilicet et futurorum, solercia, quia abbatissa nomine Gerberga

Aliàs Gerberta (Recueil des Hist. de la Gaule, etc., t. VI, p. 663). Gerberge était déjà abbesse de Sainte-Croix en 814, et elle se trouvait encore à la tête des religieuses en 840, année où Pépin, roi d’Aquitaine, l’auteur de ce diplôme, fut inhumé dans ce monastère. (Gallia christ., t. II, vol. 1300.)

vel sorores nostre ex monasterio Sancte Crucis adierunt celsitudinem nostram, suggerentes nobis ut mercata que sunt in earum villis, unum scilicet in pago Pictavensi, in loco qui dicitur Caioca, alium vero in pago Engolesmensi, in loco nuncupante Fulcrodo, perpetualiter in hiisdem locis manere licuisset, et ipsa telonea vel districta que ex ipsis exigi deberent, eis concederemus. Quarum peticionibus, divina miseracione compuncti et celesti amore succensi, minime [denegare]

Ce mot essentiel manque au texte du registre.

voluimus. Precipientes ergo jubemus ut nullus judex publicus vel quilibet ex judiciaria potestate de ipsis de qualibet re nullam exactionem

« De qualibet re aut ulla exactione » (reg. JJ. 111). Nous avons corrigé d’après le texte des Hist. de la Gaule (loc. cit.).

exigere presumat, sed liceat eis per nostram, sicut diximus, auctoritatem, ipsa mercata quiete ac secure agere vel possidere, et si aliquis in aliquo eis contradixerit et aliquod impedimentum facere visus fuerit, tunc volumus atque precipimus ut ante nos in raciones veniat, ac ibi finitam accipiat sentenciam, et quicquid inde fiscus sperare poterat, totum in nostra elemosina eis concessimus, ut in alimonia pauperum et stipendia ibidem Deo militancium proficiat in augmentis. Et ut hec precepcio à fidelibus nostris melius credatur, diligencius observetur, manu propria subter firmavimus et de anulo nostro sigillari jussimus.

Sic signatas. Signum (monogramme) Pippini regis.

Datum kalendis aprilis, anno xii° imperii domini Ludovici serenissimi augusti, et xi° regni nostri. Actum in foreste (sic) que dicitur Molarias. In Dei nomine feliciter. Amen

Ce diplôme de Pépin, roi d’Aquitaine, a été publié au moins trois fois : 1° par Besly, dans sa dissertation sur les Rois de Guyenne (preuves, p. 21), publ. à la suite de l’Hist. des comtes de Poitou ; 2° par le P. Ch. Le Cointe, Annales ecclésiast. Francorum, 8 vol. in-fol., 1665-1683, t. VII, p. 737 ; 3° dans le Recueil des historiens de la Gaule (ex archivio S. Radegundis), in-fol., 1749, t. VI, p. 663.

.

Item :

In nomine Domini Dei eterni et Salvatoris nostri Jhesu Cristi. Karlomannus, Dei gracia rex. Cum locis divino cultui mancipatis, ob divine servitutis amorem, opem congruam conferimus et regium morem decenter implemus, et id nobis profuturum ad eterne remuneracionis premia capescenda, veraciter

Var. « firmiter ». (Besly et Hist. de la Gaule.)

credimus. Igitur ergo notum esse volumus cunctis fidelibus nostris, episcopis, abbatitibus, comitibus, vicariis, centenariis eorumque minoribus

Var. « junioribus ». (Idem.)

, necnon missis nostris per universum regnum nostrum discurrentibus, seu eciam ceteris fidelibus sancte Dei Ecclesie et nostris, presentibus scilicet et futuris, quia adiit serenitatem culminis nostri Adargaldis

Adalgardis (id.). Le nom d’Adalgarde, abbesse de Sainte-Croix, ne se rencontre pas avant cette date ; elle avait remplacé Ava, qui dirigeait ce monastère en 878 (ci-dessous, p. 46, et Gallia christ., t. II, col. 1300).

, venerabilis abbatissa ex monasterio sanctimonialium, quod est constitutum

Var. « constructum ».

in honore Sancte Crucis, situm infra muros civitatis Pictavensis, quod scilicet quondam monasterium sancta et venerabilis Radegundis à fundamentis construxit et normam regularem ibi constituit, ferens gestas

Sic. Peut-être « suis gestans manibus », correction proposée par les éditeurs du recueil des Hist. de la Gaule.

manibus immunitates priscorum regum, predecessorum nostrorum, seu eciam atavi nostri sancte recordacionis Karoli augusti, nec non et preceptum piissimi Cesaris Ludovici, proavi nostri, pariterque et preceptum Pippini, avunculi nostri, quibus idem monasterium quiete in Dei servicio degere sanxerunt, et omnes res prefati monasterii in universo regno nostro, [Deo] largiente, in quibusdam pagis vel territoriis consistentes, que non solum ab orthodoxis principibus, verum eciam [à]ceteris fidelibus collate, vel per quos[libet] contractus et munimina cartarum eidem legaliter tradite sunt monasterio, sub immunitatis sue devocione consistere, et ab omni publica functione et judiciaria exaccione immunes liberasque reddidissent. Pro firmitatis namque studio hujuscemodi beneficium erga prefatum venerabile monasterium nostra auctoritate humiliter prefata Adalgardis abbatissa postulavit fieri. Cujus peticionibus, ob amorem Dei et veneracionem ipsius sancti loci, libenter assensum prebere nobis usquequaque libuit. Quapropter volumus atque decernimus ut omnes res ejusdem monasterii, cum omnibus sibi adjacentibus, sub nostre devocionis munimine modis omnibus consistant, ut indè ordo regularis perpetim atque regulariter nostris futurisque temporibus, sicut in precepto domini atavi nostri continetur, Deo annuente, conservetur atque custodiatur, ut sicut nunc ita in futuro ab omni exactione publica atque privata interius exteriusque immunis existat. Hanc nostre firmitatis auctoritatem circa idem venerabile monasterium ejusque congregacionem fieri jussimus, per quam decernimus atque sanccimus, et nostros successores monemus ut nec regine sue nec cuilibet predictum monasterium in beneficio detur aut committatur ; et nec dona nec servicium aliquod, aut opera tam à sanctimonialibus ibidem servientibus quam à rebus prefati monasterii, nec à nobis nec à successoribus nostris, nec à quibusdam superioris aut inferioris ordinis rei publice procuratoribus, aut à quibuslibet missis discurrentibus, exigatur aut precipiatur fieri ; sed sicut in suprascripta precepcione domini ac genitoris nostri continetur, et sanctimoniales in predicto monasterio Deo militantes, et res ibidem aspicientes ab omni functione tam publica quam privata interius exteriusque secure et immunes perpetim inviolabiliterque consistant. Si vero quelibet persona libera à prelatis prescripti monasterii, ex rebus ejusdem quidpiam beneficiario munere assecuta fuerit, pro persona libertatis sue iter exercitale, sicut ceteri homines, faciat eciam. Et hoc concessimus et perpetuo inviolabiliter mansurum esse volumus, ut ex hiis personis, que ex prefato monasterio beneficium habent, qualescunque abbatisse ejusdem monasterii voluerint, tres

Var. « cuncte ». (Besly et Hist. de la Gaule.)

domi remaneant propter neccessitates earumdem Deo militancium procurandas ; ceteri vero pro persona ingenuitatis sue, sicut diximus, itinera hostilia exerceant. Iterum iterumque precipientes jubemus atque precipimus ut nullus judex publicus, aut quilibet ex judiciaria potestate ad causas audiendas, in ecclesias aut villas, seu reliquas possessiones, quas moderno tempore in quibuslibet pagis aut territoriis regni nostri juste et legaliter tenent, vel que deinceps in jure ipsius monasterii divina pietas voluerit augeri, ingredi presumat, nec freda, aut tributa, aut mansiones, aut paradas

Var. « paratas » (idem).

, aut telonea per pontes aut portus, aut fidejussores tollere, aut homines tam ingenuos quam servos, supra terram ipsius monasterii commanentes, distringere, nec ullas publicas functiones aut redibiciones

Les mots « aut redibiciones » manquent dans Besly et dans les Hist. de la Gaule.

, vel inlicitas occasiones requirere, u ibus in aliquo idem monasterium sibique subjecti aliquid injuste paciantur incommodum ; [nec] nostris futurisque temporibus, quisquam temerarius existat qui faciendi illicitam sibi potestatem attribuere audeat. Quicquid ergo ex rebus prefati monasterii fiscus sperare poterat, totum nos pro eterna remuneracione eidem concedimus monasterio, scilicet ut in alimoniis pauperum et stipendiis earumdem sanctimonialium proficiat in augmentis. Si quis autem in tantam prorumpere ausus fuerit audaciam, ut hujus precepti nostri violator extiterit, non solum in offensam nostram, verum eciam trecentorum solidorum auri ad purum excocti se noverit pena multandum. Dignum namque justumque est ut tot piorum regum, decessorum nostrorum, nostrique precepti violator hujuscemodi subeat penam, et se tante temeritatis merito argui cognoscat, et ceteris, ne id agere quilibet pertemptet, timorem incuciat. Et quando quidem divina vocacione supradictam Aldargaldim, abbatissam, vel successores ejus, ab hac luce contigerit discedere, licenciam habeant eedem sanctimoniales, qualem meliorem et digniorem elegerint vel invenerint inter se, eligere abbatissam, qualiter

Var. « quatinus » (Besly et les Hist. de la Gaule).

congregacio ibidem per tempora labencia pro nobis patrumque nostrorum seu successorum, ac tocius populi christiani salute Domini misericordiam actencius exorare delectet. Et ut hoc nostre auctoritatis inviolabiliter preceptum firmius in Dei nomine habeatur, ac per futura tempora diligencius conservetur, manu propria illud subter firmavimus et anulo nostro postmodum insigniri jussimus.

Sic signatas. Signum Karlomanni (monogramme) gloriosissimi regis.

Datum kalendas martis

La signature ainsi que les mots « x° kalendas martis » manquent dans les imprimés ci-dessus.

anno sexto regnante Karlomanno gloriosissimo rege, indicione secunda. Actum Verno palacio

Vernum, Ver, au diocèse de Senlis, entre Compiegne et Paris. (Note des édit. des Hist. de la Gaule.)

, in Dei nomine feliciter. Amen

Le diplôme de Carloman a été imprimé dans la dissertation sur les Rois de Guyenne par Besly, ex archiv. S. Crucis Pictavensis, p. 40, et dans le Recueil des historiens de la Gaule, t. IX, p. 433, d’après Besly. Ce texte est en général plus correct que celui du registre du Trésor des Chartes et nous l’avons suivi de préférence en plusieurs endroits. Dans les cas de doute sur la meilleure leçon, nous avons noté les variantes.

.

Nos itaque, qui ipsorum predecessorum laudabilibus hujusmodi provocati exemplis, felicitate plenum speramus tempus nostrum, si non occulta patentis operis evidencia illorum quos sic circa hec studiosos notabilis probat devocio, imitatores sumus et collatam ab eis prefato monasterio libertatem, ad Dei et ipsius sancte sue Ecclesie honorem, sanccimus ac precipimus integram inviolatamque servari. Ipsas ob hoc litteras supratranscriptas, ratas habentes atque gratas, eas et omnia ac singula in eisdem contenta, volumus, laudamus et approbamus, ac nostre confirmacionis munimine, de nostris certa sciencia, auctoritate regia et gracia speciali, tenore presencium roboramus. Volentes et consencientes expresse ut memorate religiose cum predicti monasterii hominibus, villis, rebus, bonis, possessionibus, pertinenciis et adjacenciis predictis, ipsis quibus supra litteris omnibusque ac singulis in eis contentis previlegiis, modis superius annotatis, et quatenus ipsis rite et juste aliàs use sunt et fuerunt, perpetuo uti ac gaudere valeant libere eciam et quiete. Mandantes insuper dilectis et fidelibus gentibus Compotorum nostrorum Parisius, baillivo Exempcionum Andegavie, Pictavie, Turonie et Cenomanensi, omnibusque aliis justiciaris et officiariis nostris, presentibus et futuris, quatinus prefatas religiosas, cum ipsius monasterii hominibus, villis, rebus, bonis, possessionibus, pertinenciis et adjacenciis predictis, ipsis omnibus et singulis privilegiis sic et eo modo quo premittuntur, uti et gaudere pacifice faciant ac permittant, et contra nostre hujusmodi tenorem concessionis, eas aut ipsarum homines, in premissis aut aliquo premissorum, nullatenus impedire seu molestare presumant. Quod ut firmum et stabile perpetui roboris habeat fulcimentum, presentes litteras manu nostra propria subter signavimus et sigilli nostri impressione jussimus sigillari. Datum Parisius, viim die mensis julii anno Domini m. ccc. lxxvii°, et xiiii° regni nostri.

Per regem. P. [de] Corbie.

DCXII 7 juillet 1377

Confirmation et vidimus d’autres privilèges accordés à l’abbaye de Sainte-Croix de Poitiers par deux diplômes du roi Louis le Bègue, en date du 4 juillet 878.

AN JJ. 111, n° 170, fol. 87 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 42-49

Karolus, etc. Ad perpetuam rei memoriam. Dum occulos sursum levamus etc.

Même préambule qu’aux lettres précédentes.

. Notum igitur facimus universis, presentibus pariter et futuris, nos litteras infrascriptas vidisse, tenores ac formas habentes qui secuntur :

In nomine Domini Dei eterni et Salvatoris nostri Jhesu Cristi. Ludovicus, misericordia Dei rex. Si erga loca divinis cultibus mancipata propter amorem Dei, ejusque in eisdem locis sibi famulantibus beneficia opportuna largimur, premium nobis apud Dominum eterne retribucionis rependi non diffidimus. Proinde notum esse volumus omnibus fidelibus sancte Dei Ecclesie nostris, presentibus scilicet et futuris, quia venerabilis abbatissa Rotrudis

Rotrude, fille de Charles le Chauve, qui avait été élevée dans le monastère de Sainte-Croix de Poitiers, en fut élue abbesse vers l’année 876. Son élection donna lieu à des troubles, parce que les religieuses s’étaient partagées en deux camps. L’empereur Charles le Chauve, écrivit à ce sujet à Frothaire, archevêque de Bordeaux, le priant de s’entremettre pour rétablir la paix. Rotrude fut enfin reconnue comme abbesse, mais elle ne demeura pas longtemps à la tête de ce monastère. Elle était remplacée par Ava, le 4 juillet 878 (ci-dessous, p. 46).

ex monasterio Sancte Crucis, quod est situm infra muros urbis Pictavensis, nostram adiens clemenciam, obtulit obtutibus nostris precepta domini avi nostri Ludovici et pie memorie genitoris nostri Karoli, gloriosorum imperatorum, in quibus erat insertum quod non solum ipsi, verum eciam et predecessores eorum, reges videlicet Francorum, sub suo nomine et immunitatis tuicione cum monasterio sanctimonialium, quod est constructum in honore Sancte Crucis, quod scilicet quondam monasterium sancta et venerabilis Radegundis à fundamento construxit et normam regularem ibi constituit ; pro firmitatis namque studio hujuscemodi beneficium erga prefata venerabilia monasteria

Sainte-Croix et Sainte-Radegonde (voy. le diplôme qui suit, p. 47, ligne 13).

nostra auctoritate humiliter prefata soror nostra venerabilisque abbatissa Rotrudis fieri postulavit. Cujus peticionibus, ob amorem Dei et veneracionem ipsorum sanctorum locorum, libenter assensum prebere nobis usquequaque libuit. Quapropter volumus atque decernimus ut omnes res horum monasteriorum cum omnibus sibi subjectis sub nostre devocionis munimine modis omnibus consistant, ut inde ordo regularis perpetim atque regulariter, nostris futurisque temporibus, sicuti in precepto domini genitoris nostri continetur, Deo annuente, observetur atque custodiatur, ut sicut nunc ita in futuro ab omni exactione publica atque privata interius exteriusque immunes existant. Hanc nostre auctoritatis firmitatem circa ipsa venerabilia monasteria eorumque congregaciones fieri jussimus, per quam decernimus atque sanccimus, et nostros successores monemus ut nec regine sue, nec cuilibet predicta monasteria in beneficio dent aut committant, et nec dona nec servicium aliquod, aut opera tam à sanctimonialibus, ibidem Deo famulantibus, quam à rebus prefati monasterii, nec à nobis nec à successoribus nostris, nec à quibuslibet superioris aut inferioris ordinis rei publice procuratoribus, aut à quibuslibet missis discurrentibus, exigatur aut fieri precipiatur, sed sicut in suprascripta precepcione domini ac genitoris nostri continetur, et sanctimoniales in predicto monasterio Deo militantes, et res ibidem aspicientes, ab omni functione tam publica quam privata interiusque exteriusque secure et immunes perpetim inviolabiliterque consistant. Si vero quelibet persona à prelatis prescriptorum monasteriorum ex rebus eorumdem quidpiam beneficiario munere assecuta fuerit, pro persona libertatis sue iter exercitale, sicut ceteri liberi homines, faciat eciam. Et hoc [con]cessimus et perpetuo inviolabiliter mansurum esse volumus, ut ex hiis personis, que ex prefatis monasteriis beneficium habent, qualescunque abbatisse horum monasteriorum voluerint, tres domi remaneant propter necessitates earumdem Deo militancium procurandas ; ceteri vero pro persona ingenuitatis sue, sicut diximus, itinera ostilia exerceant. Iterum iterumque precipientes jubemus atque precipimus ut nullus judex aut princeps, comes, vel episcopus ex judiciaria potestate ad causas audiendas, in ecclesias aut villas, seu reliquas possessiones, quas moderno tempore in quibuslibet pagis vel territoriis regni nostri juste et legaliter tenent, vel que deinceps in jure ipsorum monasteriorum divina pietas voluerit augeri, ingredi presumat, nec freda aut tributa, aut mansiones, aut paratas, aut telonea per pontes aut portus, aut fidejussores tollere, aut homines tam ingenuos quam servos, supra terram ipsorum monasteriorum commanentes, distringere nec ullas publicas functiones aut redibiciones, vel inlicitas occasiones requirere, quibus in aliquo eadem monasteria sibique subjecti aliquid injuste paciantur incommodum, nostris futurisque temporibus, quisquam temerarius existat qui faciendi inlicitam sibi potestatem attribuere audeat. Quicquid ergo ex rebus prefatorum monasteriorum fiscus sperare poterat, totum nos pro eterna remuneracione eisdem concedimus monasteriis, scilicet ut in alimonia pauperum et stipendia earumdem sanctimonialium proficiat in augmentis. Si quis autem in tantam prorumpere ausus fuerit audaciam, ut hujusmodi precepti nostri violator extiterit, non solum in offensam nostram, verum eciam trecentorum solidorum auri ad purum excocti se noverit pena multandum. Dignum namque est ut tot piorum regum, decessorum nostrorum, nostrique precepti violator hujuscemodi subeat penam, et se tante temeritatis merito argui cognoscat, et ceteris ne id agere quilibet pertemptet, timorem incuciat. Et quando divina vocacione supradictam abbatissam, sororem nostram, Rotrudam, vel successores ejus, ab hac luce contigerit discedere, licenciam habeant eedem sanctimoniales, qualem meliorem et digniorem invenerint inter se, eligere abbatissam, qualiter congregacio ibidem per tempora labencia, pro nobis, conjuge proleque nostra atque successorum nostrorum, vel tocius populi christiani salute Domini misericordiam actencius exorare delectet. Et ut hec precepcio à fidelibus sancte Dei Ecclesie vel nostris firmius credatur diligenciusque observetur, manu propria subter firmavimus et anuli nostri impressione sigillari jussimus.

Sic signatas. Signum Ludovici (monogramme) gloriosissimi regis. Wlfradus notarius ad vicem Bacleni recognovit.

Datum iiii° nonas julii, indicione xim, anno regni domni Ludovici gloriosissimi regis. Actum Turonis, monasterio Sancti Martini, in Dei nomine feliciter. Amen

Ce diplôme de Louis le Bègue qui n’a pas encore été publié, peut être tenu comme suspect, quoiqu’il soit inséré dans une confirmation royale. On remarquera que le commencement en est conçu dans les mêmes termes que l’acte suivant, et que pour le dispositif, sauf les noms propres et quelques variantes insignifiantes, c’est la reproduction pure et simple du diplôme de Carloman du 20 février 885, publié au n° précédent (p. 37). Mais le plus singulier est que ces deux diplômes de Louis le Bègue, accordés à deux abbesses différentes, sont datés exactement du même jour. Le second a été publié deux fois : 1° d’après une copie assez défectueuse qui se trouvait dans les archives de l’abbaye de Sainte-Croix, par les auteurs du Gallia christ., t. II, instr., col. 358 ; 2° dans le Recueil des Hist. de la Gaule, t. IX, p. 404, d’après l’original (ex autographo in tabulario ecclesiæ collegiatæ Sanctæ Radegundis). Nous avons corrigé à l’aide de ce dernier les nombreuses fautes du texte fourni par le registre JJ. 111.

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Item. — In nomine Domini Dei eterni et Salvatoris nostri Jhesu Cristi. Ludovicus, misericordia Dei rex. Si erga loca divinis cultibus mancipata propter amorem Dei, ejusque in eisdem locis sibi famulantibus beneficia opportuna largimur, premium nobis apud Dominum eterne retribucionis rependi non diffidimus. Proinde notum esse volumus omnibus fidelibus sancte Dei Ecclesie, presentibus scilicet et futuris, quia venerabilis Ava

Ava avait remplacé Rotrude, fille de Charles le Chauve (ci-dessus, p. 43) ; elle eut elle-même pour successeur Adalgarde avant l’année 884, comme nous l’avons vu dans le diplôme de Carloman, roi d’Aquitaine, publié dans les lettres précédentes (p. 38, note 3).

, abbatissa ex monasterio Sancte Crucis, quod est situm infra muros urbis Pictavensis, nostram adiens clemenciam, obtulit obtutibus nostris precepta domini avi nostri Ludovici et pie memorie genitoris nostri Karoli, gloriosorum imperatorum ; in quibus erat insertum quod non solum ipsi, verum eciam et predecessores eorum, reges videlicet Francorum, sub suo nomine et immunitatis tuicione cum monasterio Sancte Radegundis, quod est situm in suburbio predicte urbis, et cum omnibus rebus vel hominibus ad se pertinentibus vel aspicientibus consistere fecerant, et eorum immunitatis auctoritate eundum monasterium munitum atque defensum fuisset. Sed pro rei firmitate postulavit nobis ut paternum seu predecessorum nostrorum, regum videlicet et imperatorum, morem sequentes, hujusmodi nostre immunitatis preceptum, ob amorem Dei, circa predicta monasteria, Sancte Crucis videlicet et Sancte Radegundis, ubi ipsa corpore requiescit, fieri censeremus. Cujus peticioni libenter assensum prebuimus, et hoc nostre auctoritatis preceptum circa ipsa monasteria pro divini cultus amore fieri decrevimus. Per quod precipimus atque jubemus ut nullus judex publicus vel quislibet ex judiciaria potestate in ecclesias aut loca, vel agros, seu reliquas possessiones predictorum monasteriorum, quas moderno tempore juste et racionabiliter possidere videntur in quibuslibet pagis vel territoriis, et quicquid ad ipsa loca propter divinum amorem conlatum fuerit, vel que deinceps in jure ipsorum voluerit divina pietas augeri, ad causas audiendas, vel freda exigenda, aut mansiones vel paratas faciendas, aut fidejussores tollendos, aut homines tam ingenuos quam servos, super terram ipsorum commanentes, inracionabiliter distringendos, nec ullas redibiciones aut inlicitas occasiones requirendas, ullo unquam tempore ingredi audeat, vel ea que superius memorata sunt penitus exigere presumat. Et quicquid de rebus ipsorum fiscus noster sperare poterat, nos pro eterna remuneracione predictis monasteriis concedimus, ut perhennibus temporibus in alimonia pauperum et stipendia servorum vel ancillarum Christi, in eisdem monasteriis Deo famulancium, proficiat in augmentum. Et quandoquidem supradicta abbatissa divina vocacione vel successores ejus de hac luce migraverint, quamdiu ipse ancille Dei inter se tales invenire potuerint, que ipsam congregacionem ubi Deo famulantur secundum regulam regere valeant, per hanc nostram auctoritatem licenciam habeant eligendi abbatissas, quatenus pro nobis, conjuge proleque nostra, et stabilitate regni nostri à Deo nobis conlati, jugiter Domini misericordiam exorare delectet. Concedimus eciam predictis fratribus Sancte Radegundis et ancillis Christi Sancte Crucis quasdam villas, sicut dominum genitorem nostrum Karolum augustum constat fecisse, id est Denzacum, Novamvillam, Bertronem, ac Mermenterum. Et ut hec nostra auctoritas, nostris et futuris temporibus, inconvulsam obtineat firmitatem, manu propria subter firmavimus et de anulo nostro insigniri jussimus.

Sic signatas. Signum Ludovici (monogramme) gloriosissimi regis. Wlfradus notarius ad vicem Gozleni recognovit et subscripsit.

Datum iiiim nonas julii, indicione xim, anno regni domni Ludovici gloriosissimi regis. Actum Turonis, monasterio Sancti Martini, in Dei nomine feliciter. Amen.

Nos itaque qui ipsorum predecessorum nostrorum laudabilibus hujusmodi provocati exemplis, felicitate plenum speramus tempus nostrum, si non occulta patentis operis evidencia illorum quos sic circa hec studiosos notabilis probat devocio, imitatores sumus, et collatam ab eis prefato monasterio libertatem, ad Dei et ipsius sue sancte Ecclesie honorem, sanccimus ac precipimus integram inviolatamque servari, ipsas ob hoc litteras supra transcriptas, ratas habentes atque gratas, eas et omnia singulaque in eis contenta volumus, laudamus et approbamus, ac nostre confirmacionis munimine, de nostris certa sciencia, auctoritate regia et gracia speciali, tenore presencium roboramus. Volentes et consencientes expresse ut memorate religiose cum predicti monasterii hominibus, villis, rebus, bonis, possessionibus, pertinenciis et adjacenciis predictis ipsis quibus supra litteris omnibusque ac singulis in eis contentis privilegiis, modo superius annotatis, et quatenus ipsis rite et juste aliàs use sunt et fuerunt, perpetuo uti ac gaudere valeant libere eciam et quiete. Mandantes insuper dilectis et fidelibus gentibus Compotorum nostrorum Parisius, baillivo Exempcionum Andegavie, Pictavie, Turonensi et Cenomanensi, ceterisque omnibus justiciariis et officiariis nostris, presentibus et futuris, quatinus prefatas religiosas cum ipsius monasterii hominibus, villis, rebus, bonis, possessionibus, pertinenciis et adjacenciis predictis ipsis omnibus et singulis privilegiis, sic et modo quo premittuntur, uti et gaudere pacifice faciant ac permittant, et contra tenorem nostre hujusmodi concessionis eas aut ipsarum homines, in premissis aut aliquo premissorum, nullatenus impedire seu molestare presumant. Quod ut firmum et stabile perpetui valoris habeat fulcimentum, presentes litteras inde confectas subter signavimus et sigilli nostri impressione jussimus sigillari. Datum Parisius, viim die mensis julii anno Domini m. ccc. lxxvii°, et xiiii° regni nostri.

Per regem. P. de Corbie.

DCXIII Août 1377

Rémission accordée à Jean, Pierre et Guillaume Boutin, et à plusieurs autres leurs parents et complices, coupables de meurtre sur la personne de Pierre Camus, qui passait pour sorcier et avait séduit et enlevé la femme de l’un d’entre eux.

AN JJ. 111, n° 315, fol. 164 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 49-52

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, nous avoir oye l’umble supplicacion de Jehan, Pierre, Guillaume Boutin, de la Roveliere, Guillaume Boudin, de la Girardere, Jehan Botin, Perrot Moudé, Jehan Garin et Estienne Damours, demourans ou païs de Poitou, disanz que feu Pierre Camus, ou temps que il vivoit, estoit homme de vie et conversacion deshonneste, qui prenoit sur les bonnes genz du païs pain, vin, poulaille et autres choses contre leur volenté, dont il n’osoient parler, et avecques ce estoit commune renommée ou païs que il usoit et ouvroit de mauvais art, comme de sorceries et caraux, non doubtanz l’indignacion de nostre Seigneur Jhesu Crist ne la grieve sentence de nostre mere sainte eglise, ordenée contre genz de telle et semblable condicion, et savoit, si comme l’en disot, art que seulement pour touchier à une femme, quelle que elle feust, elle alast après lui en quelque lieu que il la voulsist mener ; et il soit ainsi que, iiii. mois a ou environ, le dit Camus en continuant sa très mauvaise et inique voulenté, emmena par la maniere que dit est la femme de l’un des diz supplianz, et ycelle fist aler en une grange, et quant la dicte femme s’apperçut et ot cognoissance de son meffait, commença moult tandrement prier et requerir au dit Camus que il la lessast aler alaictier un petit enfant que elle avoit à la mamelle, le quel n’en volt onques riens faire, mais sacha sa dague, disant et jurant que il l’occirroit et mettroit à mort, se elle crioit ou disoit mot, et la tenoit muciée en la dicte grange dessouz le fuerre. Et depuis le mary d’icelle femme, accompaignié des autres dessuz nommez, se traist par devers le dit Camus et lui dist que il lui voulsist sa dicte femme enseigner et lessast ycelle aler à son petit enfant pour luy alaictier, le quel n’en volt onques riens faire pour chose que les diz supplians en deissent, mais usoit de grosses et deshonnestes paroles, en les appellant villains sanglans, et disant que il leur mettroit la dague parmi le corps ; et semblablement detint ycelle femme contre le gré et voulenté d’elle et de son dit mary, en commettant ravissement et force publique, et tant et si longuement que par la force du dit Camus le dit enfant fu estaint et mort de fain. Pour les quelles choses si detestables et qui redondoient en injure et vitupere des diz supplianz, consideré que il estoient parens et afins des diz mary et femme, doubtanz que ycellui Camus feist et usast semblablement vers leurs femmes et autres leurs parentes et affines, si comme de ce faire le dit Camus se ventoit, doubtanz aussi les menaces que le dit Camus leur faisoit de jour en jour, des quelles menaces il estoient en telle doubte et paour que, consideré que le dit Camus estoit homs de mauvaise voulenté et de mauvaise vie et que il demouroient près de lui en plat païs, hors et loing de ville fermée, en païs de guerre, il n’osoient continuelment couchier en leurs maisons, mais les en convenoit, pour doubte de lui, par pluseurs des nuiz eulx absenter, yceulx supplianz batirent le dit Camus, dont mort s’en ensui en sa personne. Pour le quel fait le dit Jehan et les autres dessuz nommez, pour doubte de rigoreuse justice, se sont absentez du païs. Si nous ont fait humblement requerir, comme il soient et aient tousjours esté de bonne vie, fame et conversacion honneste, nous leur vueillions sur ce eslargir nostre grace et misericorde. Nous adecertes aus diz supplians, et à chascun d’eulx, ou cas dessus dit, avons remis, quictié et pardonné, et par ces presentes leur quictons, remettons et pardonnons, de grace especial, le dit fait avecques toute peinne, amende et offense corporelle, criminelle et civile, que pour cause et occasion de ce il pevent estre encouruz envers nous, en les restituant à plain à leur bonne fame et renommée, au païs et à leurs biens non confisquez, satisfait à partie premierement et avant toute euvre, se fait n’est. Si donnons en mandement au bailli des Exempcions de Tourainne, de Poitou, d’Anjou et du Mainne, et à touz noz autres justiciers et officiers, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que les diz supplians et chascun d’eulx facent, seuffrent et lessent paisiblement joir et user de nostre presente grace et remission. Et avecques ce nous plaist et voulons que nostre très chier et amé frere le duc de Berry, conte de Poitou, les en seuffre joir et user paisiblement, sanz ce que ce porte prejudice à lui ne à sa jurisdicion, ores ne pour le temps avenir. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou mois d’aoust l’an de grace m. ccc. lxxvii, et de nostre regne le xiiiie.

Par le roy, à la relacion du conseil. Mauloue.

DCXIV 30 novembre 1377

Lettres de réhabilitation accordées à Thomas d’Armeville, naguère bailli des Exemptions de Poitou, Touraine, Anjou et Maine, qui avait été condamné par arrêt du Parlement à 400 livres d’amende envers le roi, à 300 livres de dommages et intérêts envers partie, à tenir prison jusqu’au paiement de ces sommes, et déclaré inhabile à exercer aucun office royal

Cet acte fut enregistré aussi au Parlement de Paris (X1a 27, fol. 31 v°). Nous n’en donnons pas le texte, parce que les faits qui motivèrent la condamnation de Thomas d’Armeville ne paraissent pas se rapporter à l’exercice de sa charge de bailli des Exemptions. Il avait été, « à la requeste de Guillaume Soufflentas, appellé par devant les generaulx réformateurs, derrainement deputez à Paris, sur certains cas à lui imposez. » Les pouvoirs des réformateurs ayant expiré avant que l’affaire ait pu être jugée, elle fut renvoyée au Parlement. L’arrêt de cette cour, visé par les lettres de réhabilitation, porte la date du 23 juin 1377 (X1a 26, fol. 307). On y apprend que Thomas d’Armeville avait échangé sa charge de bailli des Exemptions contre celle de bailli de Cepoy. Il avait servi le roi pendant quatorze ans en qualité de bailli, et durant ce temps il avait éprouvé de grands dommages par suite des guerres. Ces motifs, mais par-dessus tout la protection du connétable Du Guesclin, lui valurent sa grâce. Son prédécesseur au bailliage des Exemptions avait été Jean de la Tuille. Les mémoriaux de la Chambre des Comptes portent mention de la remise à celui-ci des sceaux des Exemptions de Poitou et de Saint-Maixent à la date du 21 mai 1373. (Arch. nat., P. 2295, fol. 133.) A la fin de 1377 (Delaville Le Roulx, Comptes municipaux de la ville de Tours, t. II, p. 121 et passim), et le 2 avril 1378, on trouve Pierre Aillembourse exerçant les fonctions de bailli des Exemptions de Poitou, Anjou et Touraine (X2a 9, fol. 111).

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AN JJ. 111, n° 376, fol. 195 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 52

DCXV Décembre 1377

Lettres de rémission en faveur de Regnault Bateau, qui avait pris part au meurtre de Guillaume Billard, rebelle et pillard, pour lequel son complice, Pierre Coronneau, avait déjà obtenu sa grâce.

AN J. 111, n° 359, fol. 188 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 52-56

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie de Regnaut Bateu

La cote à la marge, qui est de la même main que le corps de l’acte, porte : Remissio pro Reginaldo Bateau.

, autrement dit du Bois, ou diocese de Maillesez, que, après ce que Guillaume Billart du païs de Poitou, depuis ce que le païs de Poitou fu darrenement remiz en nostre obeissance, ot demouré avec noz ennemis au fort de Wices à demie lieue de la ville de Saint Hilaire, et ailleurs en nostre païs de Guyenne, icellui Guillaume qui longuement s’est tenuz nostre ennemi et conversé avecques noz diz ennemis, fist dire par un des hommes de la dicte ville de Saint Hilaire au dit exposant et à Pierre Corronneau, habitant d’icelle ville, que se il ne lui faisoient restitucion de certains biens que il disoit par lui avoir baillez au dit exposant et Corronneau, à un nostre ennemi appellé Coute Rouge, demourant ou dit fort de Wices, les quelx biens le dit Coutrouge (sic) disoit à lui avoir esté emblez par le dit Guillaume Billart, ou temps que le dit Billart servoit ou dit fort, icellui Cote roge (sic) nostre ennemi, comme dit est, il leur porteroit grant dommage de corps et de biens. Et pour ce que les diz exposant et Corronneau savoient certainement le dit Guillaume Billart avoir esté et estre nostre ennemi, rebelle, pillart et homme de très petit renom, et qui pluseurs dommaiges avoit fait à eulx et autres du dit païs, demanderent au dit Billart pour quelle cause et occasion il les ainsi menaçoit ; le quel Guillaume Billart leur respondi que il lui avoient osté les diz biens ainsi par lui emblez, comme dit est. Et icelle response oïe, le dit Pierre Corronneau, consideré tout ce que dit est et que le dit Guillaume Billart estoit illec venuz pour espier eulz ou autres noz subgiez, pour les faire prendre par noz diz ennemis, meuz de chaleur, fery un seul cop du poing en la teste le dit Guillaume Billart, qui plus amoit converser avec noz diz ennemis que demourer en nostre bonne obeissance et subjection. Et en ce moment icellui exposant, attendu ce que dit est et la grande mauvestié du dit Guillaume Billart, d’un coustel dont il tranchoit son pain fery un seul cop en l’ouye d’aventure le dit Guillaume Billart, non pas en lieu mortel ; mais le dit Guillaume Billart par son mauvais gouvernement, environ xviii [jours] après icelle bateure, ala de vie à trespassement. Le quel fait nous par noz autres lettres avons remis, quictié et pardonné au dit Pierre Corronneau

Nous avons vainement cherché les lettres de rémission accordées à Pierre Coronneau.

 ; mais le dit exposant fut pour ce detenuz prisonnier ès prisons du sire de Crecy. Et pendant le temps que les seigneurs de Weluis

Il faut sans doute lire Veluire. Hervé de Velluire ou de Volvire, chevalier, second fils d’Hervé et d’Alix de Moric, vivait à cette époque. Le 13 juin 1376, il était appelant au Parlement d’une commission du châtelain de Parthenay et d’exploits faits en conséquence par Guillaume Alain, sergent et commissaire de Guillaume Larchevêque, au profit de Catherine Emard ou Aymard, veuve de Raoul Eschalart, et de Robert Eschalart, son fils. Les parties obtinrent permission de faire accord (X1a 25, fol. 220). Hervé était aussi en procès, l’année suivante, contre Béthis Rouault, chevalier, et Marie de Volvire, sa femme. Le 3 août 1377, la cour les admit à se faire représenter par procureurs (X1a 26, fol. 89 v°).

et de Passavant

Le seigneur de Passavant était alors Berthelon de La Haye, sous la tutelle de sa mère Jeanne de Beaumont et du second mari de celle ci. Louis Larchevêque, seigneur de Taillebourg. Il était aussi seigneur de Mallièvre (canton de Mortagne-sur-Sèvre, Vendée.) Voy. notre troisième volume, p. 393 note, et le précédent, p. 273 note.

le requeroient à avoir pour le punir, icellui exposant sanz congié s’est desparti des dictes prisons et s’en est absentez et tient absent. Et pour ce le dit seigneur de Crecy l’a fait appeller à ses drois, si comme il dit, en nous humblement suppliant, comme le dit exposant en touz ses autres faiz ait esté et soit homme de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sanz avoir esté convaincu, condempné ne actaint d’autre meffait, le dit Guillaume Billart, comme dit est, fust nostre ennemi et mal renommé, et aussi par son mauvaiz gouvernement ait esté en coulpe de sa mort, et avec ce, ce fait soit advenu sanz haine precedent et sanz fait appensé de la partie du dit exposant, nous sur ce lui vuillons eslargir nostre grace. Nous adecertes, pour consideracion de ce que dit [est], au dit exposant ou cas dessuz dit avons remis, quictié et pardonné, remectons, quictons et pardonnons le dit fait avec les diz briz de prison et appeaulx, et tout ce qui s’en est ensui, de grace especial, avec toute peine et amende corporelle, criminelle et civile que pour ce il est encouru envers nous, en le restituant à plain à sa bonne fame, renommée, au païs et à ses biens non confisquiez, reservé le droit de partie, se aucun en y a, à poursuir civilemant. Si donnons en mandement au bailli des Exempcions de Touraine, de Poitou, d’Anjou et du Maine et à touz noz autres justiciers ou à leurs lieux tenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit exposant facent et souffrent joir et user de nostre presente grace et remission, et contre la teneur d’icelle ne le molestent ou empeschent doresenavant en aucune maniere ; mais se aucuns de ses biens non confisquiez sont pour ce prins et detenuz, il lui facent mettre sanz delay à plaine delivrance. Et avec ce nous plaist et voulons que les diz seigneurs de Crecy, de Wices (sic) et de Passavant et chascun d’eulx le facent et souffrent joir et user de nostre dicte grace, sanz porter aucun prejudice à eulx ne à leurs jurisdicions, ores ne ou temps avenir. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touzjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou mois de decembre l’an de grace mil ccc. lxxvii, et le xiiiie de nostre regne.

Es requestes de l’ostel. Henry. Corbye.

DCXVI Décembre 1377

Lettres de rémission accordées à Guillaume d’Argy, à Gautier Herpin, à Geoffroy de Véretz et à Jean de Coulaines, qui avaient battu Guichard du Retail, seigneur de Dangé, et tué son valet, pour se venger des mauvais traitements qu’ils avaient eu à subir de leur part.

AN JJ. 112, n° 28, fol. 23 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 56-61

Charles, etc. Savoir faisons à touz presens et avenir, nous avoir oy l’umble supplicacion de Guillaume d’Argy, Gautier Harpin, Gieffroy de Verez et Jehan de Collaines, escuiers, disanz que en l’an lxxv, à un certain jour entre la saint Andrieu et Noel, le dit Guillaume d’Argy, en alent en aucunes ses besoingnes et negoces, accompaignié d’un sien varlet, passa par la ville [de] Dangé, ainsin que son chemin le donnoit et descendi en un hostel de la dicte ville pour y prandre sa refection, et si tost qu’il fu descendu, seurvint ou dit hostel Guichart du Retail, chevalier, seigneur de la dicte ville

Dans un arrêt du Parlement, en date du 9 mars 1377 n.s., Guichard du Retail est dit seigneur de Dangé. Il avait été ajourné personnellement devant cette cour par le procureur du roi et l’abbé et les religieux d’Aiguesvives en Touraine, qui l’accusaient de les avoir maltraités en paroles et par voies de fait, injuriis et armis illatis ; il obtint de se faire représenter par un procureur (X1a 26, fol. 37 v°). Guichard était fils de Jean du Retail et de Jeanne Pouvreau ; il avait eu un frère nommé Jean, mort avant cette époque, et une sœur, Guillemette, alors mariée à Hugues de Puyloer, aliàs Puylouher. La succession de son père et de son frère Jean était litigieuse, au commencement de l’année précédente, entre Guichard et sa mère, d’une part, et sa sœur, d’autre. Les premiers étaient appelants d’une commission donnée par le sénéchal de Poitou pour le duc de Berry, au profit d’Hugues de Puyloer et de sa femme. Le Parlement, par arrêt du 29 mai 1376, annula l’appel, du consentement des parties, et ordonna que la sixième part des biens et héritages de Jean du Retail, le père, et la cinquième partie des biens de Jean du Retail, le fils, réclamés par Guillemette, seraient mises sous la main du roi, et que les revenus en seraient appliqués au profit d’Hugues et de sa femme, en attendant l’issue du procès. Les parties furent ajournées en même temps aux jours de Poitou de la prochaine session (X1a 25, fol. 218). L’affaire se régla par un accord amiable.

Un autre procès remontant au 4 juillet 1355 nous fait connaître les noms des ascendants de Guichard. Son père Jean avait un frère nommé Guillaume ; ils prenaient tous deux la qualité de chevalier et revendiquaient contre Guillaume d’Appelvoisin et ses deux fils une partie de l’héritage de leur mère, Aiglantine de Pressigny. Celle-ci était la première femme d’un autre Jean du Retail, grand-père de Guichard, qui avait épousé en secondes noces Jeanne Rataud, alors veuve (X1a 16, fol. 60).

, accompaignié de deux varlez, et s’en ala le dit chevalier tout droit à l’estable ou le dit Guillaume estoit descendu, et combien que ycellui Guillaume feust son cousin remué de germain et ne lui eust fait aucun desplaisir, ne ne se doubtoit point de lui, le dit chevalier et ses diz varlez, meuz de très mauvaise voulenté, lui coururent sus et lui osterent son espée, et au varlet qui avec lui estoit son badelaire, et lors le dit chevalier le print par le chaperon et lui abati devant le visaige ; et adonques le dit chevalier et ses diz varlez le batirent moult oultrageusement. Et de ce non content, ycellui chevalier feri le dit Guillaume d’une dague parmi l’un de ses bras, dont il fu en grant peril de mort ou mutilacion. Et depuis la Toussains après ensuiant, le dit chevalier, accompaignié d’un sien varlet, appelé Grant Jehan, s’en ala aussi que jour faillant en un grant chemin royal près de la maison Jobert de Rillé, qui a espousée la suer du dit Guillaume, et manda au dit Jobert que illecques venist parler à lui et apportast son adveu des choses que il tenoit de lui. Le quel Jobert, combien que il fust tart et plus nuit que jour, pour obeir au dit chevalier, ala à son dit mandement et lui porta et bailla son dit adveu ; et quant le dit chevalier l’ot receu, dist au dit Jobert que il convenoit que il lui donnast le droit des ventes que il avoit sur maistre Estienne Baudrillet et sur Jehan de la Claye des choses que il avoient acquises ou fieu d’icellui Jobert. Et pour ce que le dit Jobert en fu refusant, le dit chevalier lui dist que se il l’avoit juré, il les aroit par amour ou par force, et en ce disant feri le dit Jobert du poing par le visaige moult injurieusement, jusques à grant effusion de sanc, et avecques ce sacha son espée et le feri du tranchant tellement que il lui fist une grant plaie, dont il fu en peril de mort ou mutilacion, et l’eust le dit chevalier mis à mort, si comme il apparu à son semblant, se le dit Jobert n’eust crié harou. Au quel cry la femme du dit Jobert et suer du dit Guillaume d’Argy acouru, criant comme femme forsenée pour la dolour que elle avoit de son dit mary, doubtant que le dit chevalier ne le meist à mort. Et quant le dit chevalier la vit, haussa l’espée en entencion et volenté de la ferir parmi le corps, mais pour resister au peril de la mort gecta la main au devant, la quelle main fu tranchée de la dicte espée, dont la dicte damoiselle est demourée mutilée à tousjours, tellement que elle ne s’en puet aidier. Et de ce le dit chevalier non content, mais en perseverant de mal en pis, hua ses chiens à la dicte damoiselle qui la mordirent en telle maniere que il li rompirent aus dens la char et les draps jusques à grant effusion de sanc, qui estoit très inhumaine chose à regarder. Pour le quel fait le dit Jobert, pour ce que ce avoit esté fait de nuit et ne povoit estre prouvé, l’accusa ou appella en cas de gaige ès assises à Tours, par devant nostre bailli, et offry son gaige, le quel chevalier le refusa, disant que il estoit clers et que par ce n’estoit tenuz de le recevoir ne de soy combatre en gage. Et depuis avint que, le dimanche après la Toussains derrainement passé, le dit Gautier Harpin, cousin du dit Guillaume d’Argy et son homme de foy, ala en aucune besoingne que il avoit lors à faire en la ville de Maruil, et environ heure de soleil couchant, encontra ainsi comme d’aventure le dit chevalier, accompagnié de deux varlez ; au quel Harpin le dit chevalier demanda de qui il tendroit le parti, ou de lui ou du dit Guillaume d’Argy. Le quel Harpin respondi que il tendroit le parti du dit Guillaume et que il estoit son cousin. Et le dit chevalier lui dist que il le feroit bien desdire, et lors mist la main à son espée et la volt sacher, mais le dit Harpin qui n’avoit aucune chose dont il se peust deffendre, mist la main sur la dicte espée pour doubte que le dit chevalier ne le meist à mort. Et adonques un de ses diz varlez, nommé Estienne Badefou, couru sus au dit Harpin, l’espée ou poin toute nue, et en fery le dit Harpin parmi la teste tellement que il lui fist une grant plaie, et incontinent le dit chevalier et l’autre de ses diz varlez descendirent à pié, tenans leurs espées toutes nues, et poursuirent le dit Harpin longuement, en criant après lui : « à mort ! à mort ! » Et firent tout leur povoir de le prendre et de le mettre à mort, ce que fait eussent, se il le peussent avoir atteint. Et le mercredi après ensuiant, quant le dit Harpin ot fait ses plaies estanchier, se traist devers les dessus diz Guillaume d’Argy, Gieffroy de Verez et Jehan Callaines (sic), et eurent adviz ensemble d’aler par devers le dit chevalier pour savoir son entencion, et à quoy il tenoit que il avoit telle indignacion contre les diz supplians qui onques ne lui avoient fait desplaisir, et si estoient de son lignage, et s’en alerent par devers lui en son hostel. Et pour ce que il redoubtoient la cruaulté et malevolenté de lui et de ses complices, et pour la tuition de leurs corps, vestirent chascun une cote de fer, et quant il furent devers le dit chevalier, ycellui chevalier commença user de haultainnes paroles et tant que il s’entreprindrent, et fu le dit chevalier feru et batu par les dessuz nommez supplians, ou les aucuns d’eulx. Et en ycellui debat le dit Estienne, varlet du dit chevalier, qui ainsi avoit navré le dit Harpin, vint moult impetueusement tenant l’espée toute nue et la haussa pour en ferir le dit Harpin. Et quant le dit Harpin apperçut que ce estoit cellui qui, n’avoit gueres, l’avoit ainsi inhumainnement navré en la teste, et dont il doubtoit encores peril de mort, pour resister à la male volenté d’icellui varlet et en deboutant force par force, le feri de l’espée parmi le corps tant que mort s’en ensui en sa personne, dedans deux jours après. Si nous ont fait humblement requerir que, comme il nous aient bien et loyaument servi en noz guerres et ont tousjours esté en touz leurs autres faiz de bonne vie et honneste conversacion, sanz aucun villain reproche, et que le dit fait soit ainsi advenu par la coulpe et oultrage du dit chevalier, qui par tant de foiz leur avoit fait pluseurs et excessives offenses, sanz aucune cause raisonnable, comme dessuz est dit, nous leur vueillions sur ce impartir nostre grace et misericorde. Nous adecertes, les choses dessuz dictes considerées, à yceulx supplianz ou dit cas avons remis, quictié et pardonné, et à chascun d’eulx remettons, quictons et pardonnons, de nostre auctorité royal et grace especial, le dit fait avec toute peinne et amende corporelle, criminelle et civile, que pour cause et occasion du fait dessuz dit il pevent estre encouruz envers nous, en les restituant à plain à leur bonne fame, renommée et au païs, satisfacion faite à partie avant toute euvre civilement. Si donnons en mandement au gouverneur du bailliaige d’Orléans, au bailli des Exempcions de Tourainne, d’Anjou, du Mainne et de Poitou, et à touz noz autres justiciers, ou à leurs lieux tenans, et à chascun d’eulx, presens et avenir, si comme à lui appartendra, que les diz supplians et chascun d’eulx facent, seuffrent et lessent joir et user paisiblement de nostre presente grace et remission et contre la teneur d’icelle ne les molestent ou empeschent doresenavant en aucune maniere, mais se aucuns de leurs biens non confisquez sont pour ce pris et detenuz, ilz leur facent sanz delay mettre à plainne delivrance. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou mois de decembre l’an de grace m. ccc. lxxvii, et le xiiiie de nostre regne

Il existe d’autres lettres de rémission en faveur des mêmes personnages et pour le même fait, sous la date de février 1378 n.s. La rédaction en est un peu différente, et l’exposé des particularités du drame n’est pas absolument identique. Cette différence ne portant que sur des détails, il suffit de la signaler, sans relever les passages où on la retrouve plus spécialement. Nous ne donnerons donc pas le texte de ces secondes lettres (JJ. 112, n° 71, fol. 44).

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Par le roy, à la relacion du conseil. J. Greelle.

DCXVII Décembre 1377

Rémission accordée à Thomas Girot pour un homicide commis à Sigournay. Provoqué et frappé par un charpentier, nommé Etienne Bertrand, il l’avait, en se défendant, frappé mortellement d’un coup de couteau.

AN JJ. 112, n° 29, fol. 24 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 61-63

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie de Thomas Girot, povre laboureur, que, comme jà pieça Estienne Bertran, charpentier, eust pris du dit exposant certains ays à soier, parmi certains priz d’argent que le dit exposant lui en paia avant la main, et pour ce que le dit Bertran ne delivroit point au dit exposant ses diz ays et qu’il les lui tenoit trop longuement et le menoit par journées et par delaiz, en disant tousjours que il auroit ses ays de jour à autre, dont il ne faisoit riens, le dit exposant, veant que le dit Estienne avoit receu son argent et ne lui vouloit delivre sa besoingne, dont il avoit grant dommage, l’eust fait adjourner par devant justice, pour avoir droit de lui et pour lui rendre ses diz ays, faiz ou à faire, ou pour lui rendre son argent ; neantmoins le dit Estienne, en contempt et despit de ce que le dit exposant l’avoit ainsi fait adjourner, vint environ la saint Jehan derrainement passée, en la parroisse de Segournay, où il trouva le dit exposant, qui en riens ne se gardoit de lui, mais se seoit et s’esbatoit avecques les voisins emmi la rue. Et sitost que le dit Estienne apperçut le dit exposant, vint à lui moult impetueusement, en lui disant moult d’injures et de villenies, presens les voisins et les bonnes genz qui y estoient, en disant : « Ribaut, tu m’as fait adjourner pour avoir tes ays ! Par le sanc Dieu, tu ne les auras pas, et en fay du pis que tu pourras ! » Et de fait le vint prendre par la gorge et lui tordi le chaperon en le cuidant estrangler, et le commença à batre moult inhumainnement du poing et du pié en pluseurs lieux et tant qu’il lui fist sanc et plaie ; et de ce non content, le dit Estienne print un grant pieu et l’entesa pour en vouloir assommer et tuer le dit exposant, mais ycellui exposant tenoit en sa main un petit coutel, dont il doloit un petit ays, quant le dit Estienne vint à lui, du quel coustel par cas d’aventure, ainsi que le dit exposant haussa sa main pour eviter ou obvier au cop du dit Estienne qui ainsi oultrageusement l’avoit batu et batoit, et faisoit tout son povoir de le mutiler et occirre, en repellant force par force pour doubte de mort, en fery le dit Estienne en l’ayne et le navra. Et ce non obstant, le dit Estienne s’efforça depuis de tout son povoir de batre et getter à terre le dit exposant et de le tuer et occirre, ce que fait eust, se n’eussent esté les bonnes genz qui là estoient presens ; de la quelle navreure l’en dit que mort s’est depuis ensuie en la personne du dit Estienne Bertran. Pour le quel fait le dit exposant doubte que ores ou en temps avenir il ne peust pour ce estre molesté ou empeschié par aucuns noz justiciers ou autres. Si nous a humblement supplié que, comme tout le temps de sa vie il ait esté et soit homme de bonne vie et renommée, gaignant son pain bien et loyaument, sanz riot ou debat et sanz aucun reproche, et que le dit fait est advenu par l’oultrage et coulpe du dit feu Estienne, nous sur ce lui vueillions impartir nostre grace et misericorde. Nous adecertes, attendu la qualité et maniere du fait, voulanz atremper rigueur de justice en ceste partie, de nostre grace especial, puissance et auctorité royal, avons ou cas dessuz dit quictié, remis et pardonné et, par ces presentes, quittons, remettons et pardonnons au dit exposant le dit fait, avec toute peinne et amende corporelle, criminelle et civile, qu’il pourroit ou puet avoir encourue envers nous, pour occasion du dit fait, en le restituant à sa bonne fame, renommée, au païs et à ses biens, reservé le droit de partie à poursuir civilement. Si donnons en mandement au bailli des Exempcions d’Anjou, du Maine, de Tourainne et de Poitou, et à touz les autres justiciers de nostre royaume, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent et lessent le dit exposant joir et user paisiblement, et contre la teneur d’icelle ne le molestent ou empeschent en aucune maniere, et se aucuns de ses biens non confisquez estoient pour ce pris, saisiz ou arrestez, lui mettent à plainne delivrance. Et pour ce que ce soit chose ferme et estable à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou mois de decembre l’an de grace m. ccc. lxxvii, et le xiiiiie de nostre regne.

Es requestes de l’ostel. T. Graffart. Evrardus.

DCXVIII Décembre 1377

Lettres de rémission en faveur de Girard de Contes, écuyer de la garnison de Chizé, qui avait tué dans une rixe, au château dudit lieu, Jean Coupedoy, dit Têtart.

AN JJ. 112, n° 77, fol. 50 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 63-66

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie des amis charnelx de Girart de Contes

Nous n’avons rien trouvé sur ce personnage ni sur sa famille, la même sans doute que celle du page de Jeanne d’Arc, Louis de Contes.

, escuier, que comme, ou mois d’octobre l’an de grace m. ccc. lxxv, ou quel temps le dit Girart estoit de la garnison du chastel de Chizet

Dans un arrêt du 17 mars 1375, rendu au Parlement entre le duc d’Orléans et Jeanne de Surgères, veuve d’Évrard de Clermont, tutrice de son fils Joachim, il est question du don du château de Chizé qui avait été fait par le dit duc à Évrard (X1a 24, fol. 238 v°).

, ycellui Girart s’en voulsist par un jour du dit mois aler chevauchier hors du dit chastel et fust prest de monter à cheval, quant un bon homme de la ville de Chizet, appellé Jehan Le Maire, tondeur, qui demouroit ou dit chastel, où il faisoit aussi bon guet, garde et arriereguet selon sa faculté, comme homme qui fust logé ou dit chastel, s’en vint au dit Girart qui resgardoit unes lettres, pour soy plaindre à lui, pour ce qu’il estoit et est cousin germain du capitainne du dit chastel, qui pour lors estoit dehors, de ce que un nommé Jehan Coupedoy, dit Testart, lui vouloit oster son logis que il avoit ou dit chastel, et l’en vouloit deslogier. Et ainsi comme le dit Jehan Le Maire se complaingnoit au dit Girart de ce que dit est, le dit Coupedoy survint, au quel le dit Girart dist bien amiablement : « Je vous prie que cest bon homme que vous voulez desloger de son logiz, vous ne deslogez point, mais le lui vueilliez laissier jusques à la venue du capitainne ; car il est bien necessaire ceans et l’un de ceulx qui y ont logiz qui fait le meilleur guet, garde et arriere guet. » Et le dit Testart lui respondi que il vuideroit, comment qu’il fust. Et quant il ot fait telle response au dit Girart, ycellui Girart, veant que le dit tondeur, qui pour la garde et seurté du dit chastel estoit moult necessaire, ycellui Coupedoy vouloit ainsi, sanz cause et de sa voulenté indeue, desloger de son dit logiz, dist au dit Coupedoy qu’il le garderoit bien de desloger le dit tondeur, et que il ne lui deist chose qui lui despleust, ou autrement il le courrouceroit. Et le dit Coupedoy lui dist que autres foiz avoient eulx eu riote ensemble et que il estoit de grans paroles et de petit fait. A quoy le dit Girart lui respondi que il estoit d’assez grant fait pour lui, et tant multiplierent en paroles que le dit Coupedoy dist au dit Girart qu’il l’en vendroit à fin à un cop, et commença à hausser une hache qu’il tenoit pour lui en cuidier donner, quant le dit Girart l’apperçut, que pour son corps garder et sa vie saulver, sacha un coustel qu’il avoit, dont il le fery un cop tant seulement, du quel cop il chey à terre et s’en ensui mort en sa personne tantost après. Pour cause et occasion du quel fait le dit Girart, ja soit ce qu’il ait fait paix et satisfacion à partie et que il ait esté de bonne vie et renommée, sanz avoir esté repris ne diffamé d’aucun autre villain cas, se doubte que ou temps avenir il n’en soit poursui et puny en corps ou en biens, se par nous ne lui est sur ce pourveu de piteable remede, si comme ilz dient. Si nous ont humblement supplié ses diz amis que, comme le dit Girart nous ait ou temps passé servi bien et loyaument en noz guerres, et encores fait de jour en jour, nous lui vueillions sur ce impartir nostre grace. Pour ce est il que nous, ces choses considerées, avons de grace especial, certainne science, plainne puissance et auctorité royal, ou dit cas, quictié, remis et pardonné, et par ces presentes quictons, remettons et pardonnons à ycellui Girart le dit fait, avec toute peinne et amende corporelle, criminelle et civile, en quoy il puet estre et avoir encouru pour cause de ce, et l’avons restitué et restituons à sa bonne fame, renommée, au païs et à ses biens. Et d’abondant grace, avons octroié et octroions à nostre très chier et amé frere le duc de Berry, en la jurisdicion du quel le dit fait fu perpetré, que au dit Girart, se mestier est, il puisse faire telle grace que bon li semblera, sanz ce que presentement ne ou temps avenir ce puisse tourner à prejudice à lui ne à sa jurisdicion. Et sur ce imposons silence perpetuele à nostre procureur, satisfacion faicte à partie premierement et avant toute euvre, civilement tant seulement, se faicte n’est, comme dit est. Si donnons en mandement par la teneur de ces presentes au bailli des ressors et exempcions de Poitou, d’Anjou, de Tourainne et du Mainne, et à touz noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit Girart de Contes facent, seuffrent et lessent joir et user paisiblement de nostre presente grace et remission, et contre la teneur de ces presentes ne le molestent, traveillent ou empeschent, facent, seuffrent ou lessent estre molesté, traveillié ou empeschié en corps ou en biens, mais se son corps estoit pour ce pris ou emprisonné et ses biens pris, saisiz, arrestez ou levez, que il les mettent ou facent mettre à plainne delivrance, sanz delay. Et pour ce que ferme chose soit et estable à tousjours mais, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf nostre droit en autres choses et l’autrui en toutes. Donné à Paris, en nostre chastel du Louvre, ou mois de decembre l’an de grace m. ccc. lxxvii, et le xiiiie de nostre regne.

Par le roi. P. de Corbie.

DCXIX 16 mars 1378

Ratification et amortissement de l’échange fait par l’évêque de Poitiers, pour son église, du domaine de la Châtre contre le château de Gouzon à Chauvigny.

AN JJ. 112, n° 144, fol. 87 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 66-69

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre bien amé en Dieu l’evesque de Poitiers

Bertrand II de Maumont, évêque de Poitiers du 17 janvier 1375 au 12 août 1385.

, contenant comme pieça à sa dicte eglise de Poitiers feust et appartenist comme sa propre chose un lieu appellé la Chartre

La Châtre (cne de Journet, Vienne), ancien domaine de l’église cathédrale de Poitiers, possédé antérieurement par Guy de Gouzon, chevalier, à qui Fort d’Aux, évêque de Poitiers, l’avait cédé en échange du château de Gouzon à Chauvigny. (Arch. de la Vienne, chapitre cathédral, 24, c. 4, d’après M. Rédet, Dict. topogr. de la Vienne, v° Châtre.) Un ancien inventaire des titres de l’évêché de Poitiers, publié dans le Cartulaire de l’évêché, mentionne un certain nombre d’actes relatifs au domaine de la Châtre. (Arch. hist. du Poitou, t. X, p. 346, 347.) Voy. aussi Arch. de la Vienne, G. 221. Outre le grand château possédé de temps immémorial par les évêques, il y avait à Chauvigny, comme on sait, trois autres châteaux appelés du nom des familles qui les possédaient à l’origine : Montléon, Gouzon et Harcourt. Ces trois châteaux devinrent successivement la propriété de l’évêché de Poitiers. (Voy. C. Tranchant, Notice sur Chauvigny et ses châteaux.)

, assiz ou ressort de Montmorillon, avecques pluseurs rentes de blefs, de deniers et d’autres revenues et appartenances, et ou quel lieu et appartenances et subgiez d’icellui, avec toute justice haulte, moyenne et basse…

Sic. Il doit manquer ici un membre de phrase.

, et le quel lieu estoit amorti ; or advint que Guy de Gouson, chevalier, seigneur du chastel de Gouzon, assiz à Chauvigny, ou quel chastel et appartenances le dit chevalier avoit toute justice, haulte, moyenne et basse, et le quel il tenoit en foy et hommage de l’eglise et predecesseurs du dit suppliant, considerans que la dicte terre de la Chartre et appartenances lui seroit plus profitable et mieulx que son dit chastel et appartenances de Gouzon, fist tant et procura avec les predecesseurs du dit suppliant que par tiltre de eschange ou permutacion le dit lieu de la Chartre avec ses appartenances lui fu baillée et delivrée, pour lui et pour ceulx de qui il auront cause, pour et au lieu de son dit chastel et appartenances de Gouzon, et à ce tiltre ait le dit suppliant depuis ces choses, et aussi ses predecesseurs par avant lui, tenu et possidé paisiblement le dit lieu de Gouzon ; neantmoins noz commissaires, ordenez ou dit pays sur le fait des finances des fermes, fiefs et amortissemens, s’efforcent de contraindre le dit suppliant à paier finance d’amortissement, pour raison du dit chastel de Gouzon, advenu et appartenant au dit suppliant et à sa dicte eglise, comme dit est, en grant prejudice et dommage du dit suppliant et de sa dicte eglise. Suppliant que nous lui vueillons sur ce impartir nostre grace et misericorde. Pour ce est il que nous, eue consideracion aus choses dessus dictes, et à ce que le dit lieu de la Chartre qui est baillié en recompensacion du dit lieu de Gouzon estoit amortis, et pour ycellui ne fust ne estoit tenuz de paier aucune finance et par ce nous n’en estions ne ne somes en riens deffraudez ; car le dit lieu de la Chartre ne demeure plus amorti par le dit eschange, et aussi que le dit lieu de Gouzon ne estoit pas de nostre fié ou censive, mais estoit tenuz en foy et hommage de la dicte eglise, comme dit est, si comme dit le dit suppliant ; attendu encore que le dit lieu de la Chartre sera et demoura, est et demeure perpetuelement de celle mesme condicion que estoit, par avant le dit eschange, le dit lieu de Gouzon, nous ayans aggreable le dit eschange, ycellui approvons, ratiffions et confermons, en tant que en nous est et que touchier nous puet, voulans à voir que le dit suppliant et ses successeurs tiennent et possident perpetuelement et à tousjours, ou cas dessus dit, le dit lieu de Gouzon et ses appartenances, sanz en faire à nous ne à noz successeurs, ores ne autrefoiz ou temps avenir, aucune finance pour raison d’amortissement ou autrement. Donnons en mandement par ces mesmes presentes lettres aus dis commissaires et à tous autres, sur ce deputez ou à deputer, que de nostre presente grace, octroy et confirmacion laissent, facent et seuffrent joir et user paisiblement le dit suppliant et ses successeurs, et que contre la teneur d’icelle ne les molestent ou contraignent en aucune maniere au contraire ; mais, se pour ce aucuns des biens du dit suppliant et de sa dicte eglise estoient prins, saisiz ou empeschiez, que il leur mettent tantost à plaine delivrance. Et que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, le xvie jour de mars l’an de grace mil ccc. lxxvii, et le xiiiie de nostre regne.

Es requestes tenues par vous, du commandement du roy. P. Houdoyer. — Evrardus.

DCXX Mai 1378

Lettres de rémission en faveur de Pierre Brechou qui, en état de légitime défense, avait frappé à mort Jean Paquereau. Ce dernier voulait tuer Guillaume Brechou, frère dudit Pierre, collecteur du fouage à Sainte-Gemme, qui l’avait fait exécuter pour le paiement de sa taxe.

AN JJ. 112, n° 315, fol. 157 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 69-72

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté signifié de la partie de Pierre Brechou, pouvre laboureur, que en l’an m. ccc. lxxvi, le jour de la feste saint Bleve

Paraît être S. Blaise, dont la fête se célèbre le 3 février.

, pour ce que Guillaume Brechou

Guillaume et Pierre Brechou appartenaient sans doute à la même famille que Gilles Brechou ou Berchou, sr du Puiset, mentionné dans le volume précédent, p. 241 note, et auquel une petite notice est consacrée dans celui-ci. (Ci-dessous, acte de mars 1390, n° DCCXXXVIII.)

, frere du dit signifiant, qui avoit esté collecteur du fouage en la ville et parroisse de Sainte Gemme, ou diocese de Luçon, avoit mis, tauxé et imposé pour le dit fouage Jehan Paquerea

Citons un acte de cette époque, où se trouve le nom poitevin de Pasquereau. Par lettres du 13 septembre 1380, le Parlement renvoya aux assises de Luçon, par-devant le bailli des Exemptions, une cause d’applégement qui avait été portée d’abord devant les officiers du duc de Berry en Poitou, puis au Parlement, à la requête de Thibaut Chabot, demandeur, contre Geoffroy Pasquereau, Nicolas et Guillaume James, Perrot Manssuyau, Nicolas Violeau et Jean Gouais. (Arch. nat., X1a 29, fol. 108.)

à la somme de xxv. solz, dont le dit Jehan paia xx. solz, et depuis aucuns officiers de nostre amé et feal connestable, qui alerent querir la finance des diz fouages, executerent le dit Jehan Paquerea et les autres que le dit collecteur leur bailla en reste, et prindrent et leverent du dit Paquerea une paelle pour la dicte reste de v. solz, ycellui Jehan Paquerea, meu de fureur envers le dit Guillaume, ycellui jour environ heure de vespres, issy de sa maison et vit la femme du dit Guillaume, à la quelle le dit Jehan dist que elle venist parler à lui, et elle lui respondi que il alast à elle, se il vouloit et il avoit de li à faire. Adonques lui dist il que il yroit, puis que elle ne vouloit venir à lui, et lui dist telles paroles : « Vous avez dit que voz choux vous sont emblez et que il ont au jour d’ui esté cuiz chiez moy. » Et la dicte femme lui dist que il n’en estoit riens. Et le dit Paquerea lui dist que elle mentoit mauvaisement, comme mauvaise torte pourrie, en lui disant que il lui en prendroit aussi comme au larron son mari, qui sa dicte paelle lui avoit emblée ; et la dicte femme lui respondi que son mari n’estoit mie larron et que il n’en avoit mie la renommée en la ville où il demouroit. Et à ces paroles, le dit Jehan vit venir le dit Guillaume, auquel il dist, quand il le vit : « Estes vous là, larron, qui m’emblastes ma paelle ! Par le sanc Dieu, tu le m’amenderas. » Et en ce moment le dit Jehan, accompaignié de ses trois enfanz, print le dit Guillaume à la gorge, et fu gecté contre terre, et fu illecques batu et feru de pluseurs cops par le dit Jehan et ses enfanz. Et là survindrent pluseurs bonnes genz qui les departirent ; mais le dit Jehan, en perseverant en sa mauvaise voulenté, courut à son hostel querir une grosse fourche de bois et retourna avecques ses diz trois enfanz pour le dit Guillaume batre et dommagier du corps ; mais les bonnes genz qui là estoient, quant ilz virent venir le dit Jehan ainsi impetueusement, distrent au dit Guillaume qu’il s’en fouist ou il estoit mort. Pour quoy le dit Guillaume s’en fouy, pour doubte de mort, et entra en l’ostel de l’un de ses voisins, et si tost que il fu ens, ferma l’uis. Et le dit Jehan et ses diz enfanz coururent après jusques à l’uis, pour le mutiler ou occire. Et quant le dit Jehan vit que il ne povoit plus faire mal au dit Guillaume, couru à la femme d’icellui Guillaume, que il vit emmi la rue, et la feri de là dicte fourche tellement que il lui rompi un braz. Et ce fait, ycellui Jehan et ses enfans virent le dit signifiant, qui là estoit seurvenu, le quel ilz escrierent et lui distrent, en courant vers lui, telles paroles ou semblables : « Larron, tu y mourras, puis que nous ne povons avoir ton frere. » Pour doubte des quelles paroles, le dit signifiant tourna en fuite, et le dit Jehan et ses diz trois enfans après, et tant que ilz l’aconsuirent, et le dit Jehan lui donna en fuiant si grant cop sur la teste que il le fist cheoir à terre. Et quant il se fu relevé à grant peinne, commença encores à fouir, et eulx après, par devant sa maison. Et le dit signifiant trouva sa charrue, où il print un baston que l’en appelle cureur, et quant il vit que le dit Jehan et ses diz enfans le tenoient de si près que il ne povoit plus fouir, et vouloit le dit Jehan ferir derechief le dit signifiant de la dicte fourche, pour evader à la mort et en deboutant force par force, fery le dit Jehan du dit cureur un seul cop sur la teste, duquel mort s’en ensui en la personne du dit Jehan. Pour le quel fait le dit signifiant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du païs. Si nous a humblement fait requerir que, comme en touz ses autres faiz il ait tousjours esté de bonne vie et honneste conversacion, nous lui vueillions sur ce eslargir nostre grace et misericorde. Nous adecertes, attendu la qualité du fait, à ycellui signifiant, ou dit cas, avons remis, quictié et pardonné, et par ces presentes lui quictons, remettons et pardonnons le dit fait, avecques toute peinne et amende corporelle, criminelle et civile, que pour ce il est encouruz envers nous, en le restituant à plain à sa bonne fame, renommée, au païs et à ses biens, reservé le droit de partie à poursuir civilement. Si donnons en mandement au bailli des Exempcions d’Anjou, du Mainne, de Tourainne et de Poitou, et à touz noz autres justiciers, officiers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, seuffrent et lessent le dit signifiant joir et user paisiblement, sanz le molester ou souffrir estre molesté en corps ne en biens, en aucune maniere, mais se son corps ou aucuns de ses biens sont pour ce prins, saisiz ou detenuz, mettez les lui ou faites mettre tantost et sanz delay à plainne delivrance. Et pour ce que ce soit chose ferme et estable à toujours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou mois de may l’an de grace m. ccc. lxxviii, et le xve de nostre regne.

Es requestes de l’ostel. S. de Caritate. — J. Fourcy.

DCXXI Juin 1378

Lettres de maintenue de noblesse en faveur d’Hilairet de Bournezeau. Pierre Regnault, maire de Poitiers et commissaire du roi pour la recherche des nouveaux acquêts, ayant voulu le faire financer, sous prétexte qu’il avait épousé une bourgeoise et s’entremettait de commerce, une enquête fut prescrite par le roi à la demande dudit sr de Bournezeau, qui justifia pleinement de sa qualité de noble.

AN JJ. 112, n° 325, fol. 163 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 72-79

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir veues les lettres dont la teneur est tele :

A touz ceulx qui ces presentes lettres verront et orront, Pierre Regnaut

La liste des maires de Poitiers, que nous avons citée à plusieurs reprises (ms. 20084 de la Bibl. nat.), porte que Pierre Regnault exerça cette charge de 1375 à 1377 (nous voyons ici qu’il était encore maire au mois de mars 1378 n.s.), puis de 1380 à 1384. A cette dernière date, on y lit : « Cette année, Jean duc de Berry donna au chapitre Notre-Dame de Poitiers, par lettres du 16 janvier, un petit emplacement joignant et contigu à l’église, que l’on appelait les Barres, et le 22 dudit mois, le dit Pierre Regnault, maire, à qui les lettres s’adressaient, fit borner l’emplacement dans lequel sont à présent (xviie siècle) les petites boutiques autour de ladite église du côté de la place. » Le nom de Pierre Regnault reparaît en 1389 sur la même liste avec cette mention : « Il fit bâtir cette année l’Aumônerie pour les pauvres », et on le retrouve encore maire de la ville de 1402 à 1406. Des documents d’une authenticité non suspecte nous fournissent d’autres renseignements sur ce personnage. Citons un mandement du 27 octobre 1380, adressé par Pierre Regnault, maire de Poitiers, et Simon Guillaut, archiprêtre de Gençay, commis à la distribution des fonds destinés aux réparations de la ville, à Jean Bernard, receveur, de payer la somme de six livres pour le gros bois employé à la tour située sur l’étang de Montierneuf, près du portail de Saint-Ladre. (Arch. de la ville de Poitiers, J. 2.) En 1386, James Guischart étant mort au milieu de son exercice, Pierre Regnault fut commis à sa place à la garde de la mairie. (Acte du 9 novembre et autres de 1386-1387, relatifs aux réparations des pont-levis et dormants de la ville et autres travaux, id., J. 4 à 30.) Plusieurs de ces actes sont scellés du sceau de ce personnage, et l’on y voit ses armes consistant en un pal chargé de trois coquilles, et autour ces mots : le scel de Pierre Regnaut. (Voy. aussi id., J. 216, 217.) Dans le même dépôt à la suite de comptes des rentes, revenus et domaines de la ville, du 1er septembre 1387 au 14 juillet 1391, se trouve un état sommaire des travaux exécutés pendant cette période, sous les maires Guillaume Taveau, Pierre Regnault et Hilaire Larcher. (Id., K. 1.)

Nous terminerons cette notice par quelques mots sur un long procès que soutint Pierre Regnault à propos de la succession de son frère Guillaume, contre la veuve de celui-ci, Perrette Picard, ou la Picarde. Il remontait à l’occupation anglaise, et le sénéchal de Poitou pour le prince de Galles avait prononcé son jugement. Puis, après la réduction du pays à l’obéissance de Charles V, l’affaire avait été portée en appel au Parlement, et par arrêt du 29 mai 1375, la cour décida que Perrette, ayant vécu avec son mari sous le régime de la communauté, aurait la moitié de la succession, et que l’autre moitié devait revenir au frère du défunt, Pierre Regnault, en ce qui concernait du moins les biens meubles et les conquêts immeubles, la question de partage des autres propriétés étant réservée. (X1a 24, fol. 61.) La veuve de Guillaume, qui s’était fixée à Paris, vint alors à Poitiers pour y faire entériner et exécuter ce jugement. Mais elle fut arrêtée et mise en prison par les officiers du duc de Berry, sans qu’elle pût savoir pourquoi. Une fois remise en liberté, elle intenta des poursuites contre son beau-frère qu’elle accusait de cette arrestation et de cette détention arbitraires, et auquel elle réclamait en outre différentes sommes qui lui avaient été prêtées par son mari, et particulièrement cinq cents francs d’or qu’il avait reçus de celui-ci, « pour soy racheter de certaine prison ». Le procureur du roi se joignit à la demanderesse. Pierre Regnault répondait qu’il n’était pour rien dans l’emprisonnement de Perrette, et que même il lui avait offert, à elle et à ses amis, de l’aider à obtenir sa délivrance. Quant aux prêts, il niait en avoir jamais reçus de son frère, et prétendait au contraire que c’était lui qui avait avancé à Guillaume diverses sommes, dont il n’avait jamais été remboursé. Le procès dura plusieurs années. Le 13 mars 1377, Pierre obtint de la cour de pouvoir se présenter par procureur et élut domicile chez Me Eudes Foubouchier, son procureur, rue de la Harpe. Au 9 avril, arrêt de procédure. Le 4 juillet, le Parlement ordonne à Foubouchier de faire venir son client en personne pour le 1er août suivant, et le 11 juillet, Étienne Gracien, procureur du duc de Berry en Poitou, complice de Regnault pour les excès faits à Perrette, obtient son élargissement dans l’enceinte de Paris. Le 4 août suivant, Regnault et Gracien furent interrogés séparément, puis confrontés ; après quoi la cour les élargit jusqu’aux jours du bailliage de Bourges de la prochaine session. Le 21 janvier 1378, ils obtinrent de nouveau de pouvoir se faire représenter par leurs procureurs (X2a 10, fol. 40, 41, 48 r° et v°, 50 et 58). Enfin le 10 janvier 1379, l’affaire se termina par un accord. Pierre s’engagea à payer, en la ville de Paris, à sa belle-sœur, 175 francs d’or du coin du roi, à titre de dommages et intérêts, compris dans cette somme les dépens du procès, et à désintéresser et défrayer les témoins qu’elle avait fait venir de Poitiers à Paris, à savoir Jean Bigot, Jean Imbert, Guillaume Gaboreau, Jean Bruneau et deux autres bourgeois, les ordonnances et jugements donnés en faveur de ladite veuve demeurant en leur force et vertu. En retour celle-ci promettait de lui donner une décharge générale de tout ce qu’elle avait pu ou pouvait lui réclamer, et de se désister de toute poursuite contre lui. (Archives nat., X1c 38.)

, maire de Poitiers, commissaire du roy nostre sire sur le fait des finances des nouveaux acquès ou païs de Poitou, faiz puis xl. ans en ça par gens d’eglise et non nobles, salut et dilection. Sachent touz que, comme par les lettres du roy nostre dit seigneur, desquelles la teneur s’ensuit :

Charles, etc. Aus commissaires deputez sur les finances des nouveaux acquès ès païs de Poitou et d’Anjou, salut. Hylairet de Bournisseas nous a fait exposer que, comme il soit homme noble, né et procreé de noble sanc et ligniée, et aussi ont esté ses predecesseurs de très grant ancienneté, et a esté de noble et honneste gouvernement, et servi, comme noble, nous et noz predecesseurs en noz guerres, et en touz ses autres faiz s’est maintenu comme noble, en ensuiant de tout son povoir les voies de ses antecesseurs ; et il soit ainsi que pour le temps que il se maria, pour ce que il n’avoit mie grant terre, pour son estat soustenir, il eust pris à femme une bourgoise faisant fait de change et autres marchandises licites, nientmoins vous le voulez contraindre à paier finances comme les non nobles, soubz umbre de ce seulement que vous dictes qu’il fait par lui ou par ses gens fait de marchandise, qui par raison ne lui doit prejudicier ; laquelle chose est en son grant grief, prejudice et dommage, si comme il dit. Pour quoy, nous, ces choses considerées, vous mandons et estroitement enjoignons que, se il vous appert que le dit Hylairet soit noble par la maniere que dit est, vous ne le contragniez à faire aucune finance des diz nouveaux acquès pour lui fais, mais l’en tenez et faciez tenir paisible, en lui mettant au delivre tout ce qui du sien seroit pris ou arrestez à ceste cause, non obstant que sa dicte femme ou autres de ses gens aient faiz ou facent aucun fait de marchandise. Car ainsi le voulons nous estre fait, et au dit exposant l’avons octroyé et octroyons de grace especial, par ces presentes. Donné à Paris, le iiiie jour de novembre l’an de grace mil ccc. lxxviie, et le xiiiie de nostre regne. Ainsi signé. Par le Roy à la relacion du conseil. Mauloue.

Nous ait esté mandé et enjoingt que, se il nous apparrissoit Hylairet de Bourniseas, dont mencion est faicte ès dictes lettres, estre noble, par la maniere que dit est en ycelles, nous ne le contragnissons à faire aucune finance de nouveaux acquès par lui faiz, mais l’en tenissions et feissons tenir paisible, en lui mettant au delivre tout ce qui du sien seroit pris ou arresté pour ceste cause ; et nous ayons enquis la verité de cestui fait o nobles personnes monseigneur Guy, seigneur de la Forest

Le procès que Guy de la Forêt soutenait contre Catherine de Machecoul, veuve de Pierre de Craon, dont il a été question précédemment (vol. IV, p. 125 note) se poursuivait encore en 1379. Le 7 septembre de cette année, Pierre Boschet et Adam Chanteprime, conseillers au Parlement, furent commis pour faire une enquête sur les lieux (Arch. nat., X1a 29, fol. 9 v°). Le nom de ce personnage figure encore dans un traité conclu le 4 février 1383 n.s., entre les sr et dame de Laval et Jacques de Surgères, seigneur de la Flocellière, au sujet de quelques acquêts que ceux-ci avaient faits dans la terre de Châteaumur. (Coll. dom Fonteneau, t. VIII, p. 161.) Dans un acte d’octobre 1388 publié ci-dessous, Guy de la Forêt est dit seigneur de Commequiers.

, monseigneur Jehan Olivier

Voy. ce qui a été dit d’un chevalier de ce nom, vol. précédent, p. 405 note.

, chevaliers, Regnaut et Aymeri de Barro

Aliàs de Bar, ou simplement Bar. En juillet 1369, une partie des biens de Regnault Bar, chevalier, ayant été confisquée parce qu’il restait au service des Anglais, fut donnée à Pierre de la Gresille, autre chevalier fidèle à Charles V. (JJ. 100, n° 527, fol. 162 v°.) Quant à Aimery, nous le rencontrerons plus loin (acte de juin 1390).

, et pluseurs autres ; et afin de plus seurement proceder ès choses devant dictes, nous, occupez de pluseurs negoces touchans le fait de la dicte commission, par vertu des dictes lettres, ayons mandé et commis à Pierre Beaujaan, notaire de la court de monseigneur le duc de Berry, soy informer bien et diligenment de et sur les choses contenues ès dictes lettres ; lequel, par vertu de noz lettres executoires des lettres du roy, nostre dit seigneur, a procedé à la dicte informacion faire o les tesmoings, des noms desquelx la teneur [ensuit], c’est assavoir monseigneur Tristan, viconte de Thouars

Tristan Rouault, marié à l’héritière de Thouars, a été l’objet d’une notice assez développée dans le précédent volume, p. 217, où il est d’ailleurs mentionné en plusieurs endroits. Aux documents relatifs à ce personnage précédemment cités, nous en ajouterons un qui autorise à fixer son décès vers la fin de 1395, ou au commencement de 1396. Le 6 mai de cette année, sa veuve Pernelle, vicomtesse de Thouars, fit don à l’abbaye de Boisgrolland du droit de guet et autres droits qu’elle possédait au village de la Brethommelière pour fonder une messe pour le repos de l’âme de feu Tristan, son époux. (Coll. dom Fonteneau, t. I, p. 547.)

, monseigneur Ferrant de la Sale

Le père de Gadifer de la Salle, dont il sera question plus loin.

, messire Guillaume de la Flocellere

La seigneurie de la Flocellière était entrée dans la maison de Surgères au commencement du xive siècle, par le mariage d’Olive, fille de Geoffroy de la Flocellière, avec Guy de Surgères, seigneur de la Bougueraine. (Beauchet-Filleau, Dict. des familles de l’anc. Poitou, t. II, p. 681.) On voit que cependant la famille de ce nom n’était pas éteinte. Déjà dans le vol. précédent, p. 400, il a été question d’un Roland de la Flocellière, à qui le prince de Galles avait donné, en 1359, des biens confisqués sur un serviteur du roi de France. Le Guillaume dont il est question ici avait épousé Marie Goulard, fille de Guillaume, seigneur de la Geffardière, et de Béatrice de Sainte-Maure (cette Marie non nommée dans la généalogie de la famille Goulard donnée par MM. Beauchet-Filleau, t. II, p. 838), et était mort avant le 10 février 1387 n.s., suivant un acte de cette date recueilli par dom Fonteneau, dont nous reproduisons ici l’analyse : « Quittance donnée par Rémi de Talensac, au nom et comme procureur d’Olivier, sire de Clisson et de Belleville, connétable de France, à Aimery Goulard, de la somme de 50 francs d’or, que celui-ci devait au sire de Clisson, en conséquence d’une transaction passée entre eux pour quelque vente que feu Guillaume de la Flocellière, chevalier, et feu Marie Goulard, sa femme, sœur d’Aimery, avaient faite à feu Aimery d’Argenton, chevalier, alors tuteur du sire de Clisson ; la quittance donnée en présence de Jean de la Flageole, lieutenant de Guillaume Taveau, sénéchal du sire de Clisson, et de Guillaume Sauvestre, écuyer ». (Coll. dom Fonteneau, t. VIII, p. 165.)

, monseigneur Pierre de la Broce

Pierre de la Brosse, chevalier, fut impliqué dans le procès criminel intenté par Jeanne d’Amboise, veuve de Gaucher de Thouars, à Miles de Thouars, sr de Pouzauges, qui l’avait chassée du château de Tiffauges, où elle demeurait depuis la mort de son mari. (Acte du 11 avril 1374, Arch. nat., X2a 8, fol. 350 v°.) Voy. sur cette affaire notre t. IV, p. 124 note.

, chevalier, religieus hommes, frere Jehan d’Arny, abbé de Saint Lonc de Thouars, frere Jehan Chelleur, abbé de Chambon

Dans une liste un peu moins incomplète que celle de la Gallia christ., on voit que Jean d’Arny, nommé, par suite d’une fausse lecture sans doute, « Johannes Daani », était encore abbé de Saint-Laon en 1386. (H. Imbert, Cartul. de Saint-Laon de Thouars, in-8°, 1875, p. 95.) Le Cartulaire de Chambon, publié l’année précédente par le même auteur, ne cite pas Jean Chelleur, mais son successeur Guillaume, qui fut abbé de 1382 à 1396.

, frere Aymeri Poupart, enfremier de Saint Lonc de Thouars, monseigneur Guillaume Bernart, prieur de Jaye, monseigneur Guillaume Poupart

Un Aimery Poupart était seigneur de la Roche-Bernard à Turageau en 1389 et 1408. (E. de Fouchier, La baronnie de Mirebeau, in-8°, 1877, p. 238), et le nom de Guillaume Poupart figure dans un procès entre Guillaume Larchevêque, sire de Parthenay, et Pierre de Montfaucon, seigneur de Saint-Mesmin, à cause des terres de Saint-Mesmin dépendant de Parthenay et de la Fosse, située dans la baronnie de Vouvant. (Voy. acte du 7 mars 1380, Arch. nat., X2a 9, fol. 191 v°.)

, prestre, Rollant de la Vaerie

Roland de la Voirie avait épousé N. du Puy du Fou, avant le 9 juillet 1355. A cette date on trouve une commission adressée à Jean Voisin et à Jean Bernier, pour faire exécuter un accord homologué au Parlement de Paris et mettant fin à un procès entre Jean du Puy du Fou, d’une part, ledit Roland et sa femme, Guillaume du Chaillou et Nicole du Puy du Fou, sa femme, et Isabelle du Puy du Fou, sœur desdites dames. (Arch. nat., X1a 16, fol. 65.) Le texte de ce traité n’existe plus dans la collection des accords enregistrés au Parlement. Roland était sans doute le frère de Huguet de la Voirie, dont il est question plus bas.

, Perrot, sire de Lyners

Perrot, sire de Liniers, c’est-à-dire le chef de la famille, celui qui possédait le fief. La filiation de plusieurs branches de cette maison a été établie pour le xive siècle et même pour la fin du xiiie, mais celle de Perrot n’est pas connue. (Beauchet-Filleau, Dict. des familles de l’anc. Poitou, t. II, p. 302 ; J. Richard, Généal. de la famille de Liniers, Mémoires de la Société de statistique des Deux-Sèvres, 2e série, t. VI, 1866, p. 53 et s.) Nous avons dit quelques mots de ce personnage dans une note de notre tome III, p. 366.

, Huguet de la Vaerie

Un acte du 20 juin 1383 nous apprend que Huguet de la Voirie, écuyer, était seigneur de Puyraveau. Il avait alors une contestation avec Girard Rabasté, chevalier, à propos des arrérages d’une rente de quatorze setiers moitié blé, moitié seigle, à la mesure de Thouars, assignée sur une dîme appelée la dîme de Jeu. Cette dîme avait été acquise quelque temps avant par H. de la Voirie de Huet Frétart. Un ancêtre de ce dernier, nommé aussi Huet Frétart, ainsi que sa femme Jeanne, par contrat passé à Loudun en 1316, s’étaient engagés à payer ladite rente annuelle aux prédécesseurs de G. Rabasté. Le sieur de Puyraveau l’ignorait, ou du moins le contestait, d’où un procès porté au Parlement, qui se termina par un traité passé devant la cour de Thouars, le 20 juin 1383. Huguet composa avec Girard moyennant vingt setiers moitié blé, moitié seigle, qu’il promit de payer en deux termes, à la Toussaint prochaine et à la Toussaint de l’an 1384, en présence et sous la garantie de Thibaut Rabasté, de Roland de la Voirie, de Jean de Bernezay, fils de Haquin de Bernezay, écuyer, de Jean Suyreau, dit Frère, et de plusieurs autres. Le Parlement reconnut la validité de cet accord par arrêt du 21 août 1383. (Arch. nat., X1c 47.)

, Jehan et Guillaume Billetes, escuiers, Pierre Richardin, Pierre Raymon, Pierre Gentis, Colin de la Porte, Guillaume Pedru, Guillaume Prevost

Guillaume Prévost avait été ajourné au Parlement, comme garant, par Renaud de Vivonne, seigneur de Tors, poursuivi en payement d’une somme de 4000 francs d’or par Geoffroy Ferron, chevalier. (Acte du 11 juillet 1376, X1a 25, fol. 232 v°.)

, Guillaume le Bloy, bourgois de Thouars. La quelle informacion nostre dit commissaire nous a tremis enclose soubz son seel. Pour ce que par l’informacion sur ce faicte par nous et nostre dit comissaire, nous est suffisanment et deuement apparu le dit Hylairet estre noble et de l’estat et condicion dont mencion est faicte ès dictes lettres, l’en avons envoyé sanz aucune finance desdiz nouveaux acquès par lui fais, et l’en tenons paisible à tousjours, en li mettant au delivre tout ce qui du sien auroit esté pris ou saisi pour ceste cause. Si defendons à tous et à chascuns les commis de par nous que, pour cause et occasion des choses dessus dictes, ne molestent ou empeschent le dit Hylairet en corps ny en biens. Donné soubz nostre seel, le second jour du moys de mars, l’an de grace mil ccc. soixante dix et sept.

Les quelles et toutes les choses qui y sont contenues nous avons fermes et agreables, ycelles voulons, louons, approvons, ratiffions et de nostre grace especial et de nostre auctorité royal confermons, voulans et octroyans au dit Hylairet de Bourniseas, denommé ès dictes lettres dessus transcriptes, que il soit reputé et tenu pour noble en tous cas, ainsi comme ses antecesseurs dont il est descenduz ont esté tenuz et reputez. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx gens de noz comptes à Paris, au seneschal de Xantonge, au gouverneur de la Rochelle, au bailli des Exempcions de Touraine, d’Anjou, du Maine et de Poitou, à touz commissaires reformateurs et autres, deputez et à deputer de par nous sur le fait des nouveaux acquès, fais des nobles par les non nobles et des personnes anoblis par noz lettres, et à touz noz autres justiciers et officiers, à leurs lieuxtenans presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que ledit Hylairet de Bourniseas facent, seuffrent et laissent joir et user de touz privileges de nobles et de nostre presente grace, sanz contredit aucun, lequel, se mis lui estoit, il facent oster tantost et sanz delay. Et que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et en toutes l’autruy. Donné à Paris, l’an de grace mil ccc. lxxviii, et le xvme de nostre regne, ou moys de juing.

Es requestes de l’ostel. S. de Caritate. — F. de Metis.

DCXXII Juillet 1378

Don à Thomas Olivier, le jeune, clerc d’un Trésorier des guerres, de vingt-cinq livres de rente annuelle, à prendre sur les terres et biens confisqués de Jean de Velort, écuyer, rebelle au roi, situés en Poitou, Touraine et Anjou.

AN JJ. 113, n° 81, fol. 32 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 79-82

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens etavenir, nous avoir oy l’umble supplicacion de Thomas Olivier, le jeune, clerc de nostre amé et feal tresorier des guerres Jaques Regnart

Jacques Renart ou Regnart est qualifié de trésorier des guerres dans plusieurs mandats de payement ou quittances des années 1375 et 1376, publiés par dom Morice (Hist. de Bretagne, Preuves, in-fol., t. II, p. 103, 173, etc.). Antérieurement il portait le titre de général conseiller des aides (acte du 15 janvier 1372 n.s.), et plus tard, le 5 septembre 1380, celui de conseiller du roi, commis à recevoir des montres. (G. Demay, Invent. des sceaux de la coll. Clairambaut, t. II, p. 110.) Voy. aussi une courte notice sur ce personnage dans le t. II, p. 115, des Comptes municipaux de la ville de Tours, publ. par M. Delaville Le Roulx.

, contenant comme ledit suppliant qui par le fait de noz guerres, ès quelles il a esté prisonnier, a esté moult grevé et dommagé de sa chevance, nous ait servi loyalment par l’espace de quatre ans ou environ, et sert chascun jour à son povoir, en la compaignie et ou service de nostre dit tresorier des guerres, et pour le paiement de noz dictes gens d’armes et autres soudoiers, ait pluseurs fois esté en armes et en chevaux ès frontieres de noz ennemis, aux journées, sieges et assemblées que nous avons fait tenir et mettre sus, si comme à Coignac

Il s’agit évidemment de la démonstration militaire faite en avril et mai 1375 et qui précéda la reddition de Cognac à Du Guesclin, celle-ci ayant eu lieu le 1er juin. (Voir l’introduction du précédent vol., p. liv.)

, à Saint Sauveur de Brettaigne

Saint-Sauveur de Bretagne est une expression défectueuse au point de vue géographique ; car il est de toute vraisemblance que c’est au siège et à la capitulation de Saint-Sauveur-le-Vicomte (Manche), qu’il est fait allusion ici. Cette ville se rendit le 3 juillet 1375. Il a été question de cet événement dans notre tome IV, p. 415 et note.

, en la conqueste du païs de Guyenne et ailleurs, où ycellui suppliant a gardé et administré loyalment à son povoir nostre finance à nostre proffit, et en ce a eu et soustenu pluseurs pertes de chevaux, dont les uns ont esté mors, les autres affolez et empiriez, et les autres avecques aucuns de ses varlès perduz et pris par noz diz enmiz, sanz ce qu’il en ait eu aucun restour ; et il soit ainsi que Jehan de Velort, escuier, filz de feu Aymery de Velort

Il est assez fréquemment question, dans les textes de cette époque, de Guy et de Pierre de Velort ; mais nous n’en avons point rencontré de relatif à Aimery et à Jean, qui appartenaient certainement à cette même famille du Loudunais.

, chevalier, né de nostre royaume, se soit pieça rendu nostre ennemi et rebelle, tenant le parti de noz ennemis, avecques lesquelx il est et demeure, en commettant envers nous crime de lese majesté ; pour quoy touz ses biens meubles et heritages, qu’il avoit en nostre dit royaume, nous sont confisquez et acquis ; que, en remuneracion des diz services, nous audit suppliant, pour lui et ses hoirs, vueillons donner yceulx heritages avecques touz les drois quelconques dudit Jehan de Velort, que il avoit, pour le temps qu’il devint nostre ennemi et rebelle, ès païs d’Anjou, de Touraine et de Poitou, jusques à la valeur de vint cinq livres tournois de rente, à l’assiete du païs, avecques les fruiz et revenues d’iceulx, depuis le temps de la rebellion et desobeissance dudit Jehan de Velort. Et nous adecertes, eue consideracion aux choses dessus dites, pour contemplacion de nostre dit tresorier des guerres, inclinans à la supplicacion du dit Thomas Olivier en ceste partie, à ycellui avons donné et octroyé, et par ces presentes, de nostre certaine science, grace especial et auctorité royal, donnons et octroyons pour lui, ses hoirs, successeurs et aians cause à tousjours mais, lesdictes terres et heritages, qui furent dudit Jehan de Velort, à nous appartenans et confisquez à la cause dessus dicte, jusques à la dicte valeur de vint cinq livres tournois de rente par an, à l’assiete du païs, avecques les fruiz et revenues d’iceulx heritages depuis le temps de la rebellion dudit Jehan, jusques à la valeur de six vins livres tournois en tout. Si donnons en mandement, par ces mesmes lettres, au bailli des Exempcions et ressors des diz païs de Touraine, d’Anjou et de Poitou, et à touz noz autres justiciers, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, ou à leurs lieuxtenans, que le dit Thomas Olivier, ou son procureur pour lui, il mettent ou facent mettre en possession et saisine des diz heritages soubz la valeur dessuz exprimée, et d’iceulx avecques les dictes revenues et yssues, depuis la rebellion d’icellui Jehan, facent et seuffrent lui et ses hoirs, successeurs ou aians cause, joir et user paisiblement à tousjours, jouxte la teneur de nostre presente grace, senz le souffrir par quelconques empeschier au contraire, ores ne pour le temps avenir ; laquelle chose nous voulons ainsi estre faicte, et l’avons octroyé audit Thomas de nostre grace, non contrestant quelconques autres dons ou graces, que faictes li aiens le temps passé, et que en ces presentes ne soient desclairiez, et ordenances, mandemens ou defenses à ce contraires. Toutesvoies, s’il avenoit que par traictié de paix ou autrement le dit Jehan retourneroit à ses heritages, nous n’en ferons au dit Thomas recompensacion aucune. Et que ce soit chose ferme à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Saint Germain en Laye, l’an de grace mil ccc. soixante et dix huit, et le quinziesme de nostre regne, ou moys de juillet.

Par le roy. P. Cadoret.

DCXXIII Septembre 1378

Cession faite par Charles V au vicomte et à la vicomtesse de Thouars des châteaux et châtellenies de Benon, avec titre de comté, et de Frontenay-l’Abattu, en échange des deux tiers du comté de Dreux.

AN JJ. 113, n° 118, fol. 50 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 82-90

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, que, comme par traicté et accort fait entre nous ou noz gens pour nous, d’une part, et noz amez et feaulx Tristan, viconte de Thouars, et Perronnelle, vicontesse du dit lieu

Tristan Rouault figure déjà, en cette qualité de vicomte de Thouars, dans un acte du 28 mai 1376, cité dans le précédent volume (p. 218 note) ; il avait épousé, vers la fin de l’année précédente, Pernelle, fille de Louis, vicomte de Thouars, mort en janvier 1370, et de Jeanne, fille de Jean II comte de Dreux. Cette dame était devenue héritière de la vicomté de Thouars, par suite de la mort de ses deux frères, Jean mort jeune, sans alliance, et Simon, dont il est question plus bas. Elle avait été mariée en premières noces à Amaury IV de Craon, dont elle devint veuve le 30 mai 1373, et dut soutenir un long procès au sujet de la succession de celui-ci, dont nous avons promis de dire ici quelques mots. Louis de Sully avait épousé Isabelle de Craon, héritière d’Amaury IV. La vicomtesse de Thouars leur réclamait les terres de Mareuil, Puy-Béliard, Chantonnay, le Bois-Pouvreau, Cherveux, Sanxay et Saint-Héraye, qui composaient son douaire. Isabelle de Craon prétendait être en légitime possession et saisine de tous les biens meubles et immeubles du défunt, sans aucune exception. Le Parlement, saisi de l’affaire, ordonna la mainmise royale sur les terres litigieuses, le 29 juillet 1374. (X1a 23, fol. 458.) Mais le château du Bois-Pouvreau, à cause des guerres et autres empêchements que rencontra l’exécuteur de cet arrêt, ne fut point compris dans cette opération, et la vicomtesse de Thouars continua d’en percevoir les revenus. Louis de Sully porta plainte à ce sujet. La cour adressa alors un mandement au bailli des Exemptions, lui ordonnant d’accomplir la teneur de l’arrêt en ce qui touchait le Bois-Pouvreau, tout comme pour les autres biens litigieux mis sous séquestre, le 19 mars 1377. (X1a 26, fol. 43 v°.) Toutefois, en attendant l’arrêt définitif qui ne devait pas être rendu de longtemps, elle fit provision à ladite vicomtesse du château de Mareuil et de 800 livres de rente annuelle sur les revenus de la châtellenie et des terres les plus proches provenant de la succession d’Amaury de Craon, dans le cas où les revenus de Mareuil ne suffiraient pas à parfaire cette somme. (Arrêt du 24 mars 1377, id., fol. 166 v°.) Un accord partiel intervint entre les parties. Le sieur et la dame de Sully maintenant leurs prétentions sur le château du Bois-Pouvreau, dont l’administration avait été commise, pendant la durée du procès, à Pierre Augustin, huissier du Parlement, la cour ordonna qu’il resterait sous la main du roi ; et comme le château et les édifices tombaient en ruine, au point de ne pouvoir plus résister à une attaque des ennemis, mandement fut adressé à l’abbé de Saint-Maixent et au bailli des Exemptions, le 10 mars 1378 n.s., leur prescrivant de faire visiter la forteresse et de pourvoir aux réparations urgentes. (X1a 27, fol. 40.) Enfin, le 15 juillet 1379, Pernelle de Thouars obtint mainlevée des châteaux et terres de Mareuil, Puy-Béliard, Chantonnay et autres. (X1a 28, fol. 75 v°.) Cependant l’affaire n’était point entièrement réglée, car nous retrouvons les parties en présence devant le Parlement, le 12 septembre 1380. (X1a 29, fol. 109 v°.) En même temps que la vicomtesse de Thouars poursuivait les héritiers de son premier mari, pour obtenir la libre possession de son douaire, elle était en contestation avec sa belle-mère Isabelle d’Avaugour, veuve de Louis vicomte de Thouars, au sujet du douaire de celle-ci, comme nous l’avons vu précédemment (t. IV, p. 196 note). Pernelle mourut vers 1397, sans enfants, et la vicomté de Thouars passa à son neveu Pierre d’Amboise, fils de sa sœur Isabelle et du second mari de celle-ci, Ingelger, seigneur d’Amboise. A la requête du nouveau vicomte de Thouars, le chapitre de l’église collégiale de Saint-Pierre de Thouars s’engagea, le 3 juillet 1411, à joindre un De Profundis pour le repos de l’âme du duc de Berry à la messe qui devait être célébrée par les chanoines, chaque jour, à perpétuité, pour le salut des âmes de feu Pernelle de Thouars et de Tristan Rouault, parce que le duc avait amorti une rente annuelle de soixante setiers de froment et de dix livres en argent, donnée audit chapitre par ladite Pernelle et son mari. (Arch. nat., J. 187B, n° 72.)

, nostre cousine, sa femme, d’autre part, yceulx mariez aient accordé à delessier et nous aient delessié, cedé et transporté hereditablement, tant par eschange comme par vendue et soultes, les deux pars de la conté de Dreux

L’autre tiers du comté de Dreux appartenait à Marguerite de Thouars, dame de la Chèze-le-Vicomte, la plus jeune fille de Louis vicomte de Thouars. Elle avait épousé : 1° Thomas de Chemillé, seigneur de Mortagne, qui vivait encore le 7 juillet 1371 ; 2° avant 1377, Guy Turpin, seigneur de Crissé. Ce dernier, agissant au nom de sa femme, avait vendu à Charles V son tiers du comté de Dreux pour le prix de sept mille livres tournois, suivant l’acte original conservé dans les layettes du Trésor des Chartes. (Du Chesne, Hist. généal. de la maison de Dreux, Preuves, p. 304.)

, le chastel et ville de Dreux, tant le principal chastel comme la tour de Dainemarche, le chastel nommé le palais de Fremeincourt, les terres, cens, rentes, bois, forez, garennes, justice et seignorie, nom et noblesse de la dicte conté, et toutes les appartenances, en laquelle conté nous avions la terce partie et seur toute ycelle deux cens livres tournois de rente chascun an à tousjours, dont les arrerages de xiiii. ans nous estoient deuz, chargiées avecques ce les dictes deux pars pour leur porcion des fiez, aumosnes et charges anciennes et reeles, et autres telles que elles y estoient au temps que nostre dicte cousine succeda à la dicte conté, après la mort de feu Symon de Thouars, jadis son frere et conte de Dreux, et de tel douaire comme y prenoit ou prent nostre cousine Jehanne de Artois

Jeanne d’Artois, la dernière fille de Jean d’Artois, comte d’Eu, et d’Isabelle de Melun (celle-ci veuve en premières noces, dès le 3 novembre 1345, de Pierre comte de Dreux, et fille de Jean de Melun comte de Tancarville, grand chambellan de France), avait été accordée par traité passé à Compiègne, le 1er juillet 1362, puis mariée au château d’Eu, le 12 juillet 1365, à Simon de Thouars, comte de Dreux, qui fut tué le jour même de ses noces dans un tournoi. (Voy. sur ce personnage notre troisième volume, p. 315, 322.) Elle demeura veuve le reste de ses jours et vivait encore le 22 mai 1420, date de son second testament. Elle fut enterrée auprès de son mari, dans la chapelle de la Trinité de l’abbaye d’Eu. (Le P. Anselme, Hist. généal., t. I, p. 389.) Jeanne d’Artois prélevait aussi une partie de son douaire sur le tiers du comté de Dreux, qui appartenait à sa belle-sœur Marguerite de Thouars, femme de Guy Turpin de Crissé. (Du Chesne, op. cit.)

, fille de nostre cousin le conte de Eu, jadis femme du dit feu Symon, sanz autres charges, excepté aucun empeschement que mettoient ou entendoient à mettre en la tierce partie de ladicte conté, ou autre porcion, Gibaut de Mellou, chevalier, sire d’Espoisse

Gibaut de Mello, aliàs Guillaume, chevalier, fils aîné de Guillaume III, seigneur d’Époisses. Il fit montre à Châlons, le 31 janvier 1371 n.s., de quatre chevaliers et de vingt et un écuyers. Il était mort avant 1383, sans enfants d’Isabelle de La Tour, sa femme, laquelle avait été mariée en premières noces avec Amé Dauphin, seigneur de Rochefort. (Le P. Anselme, Hist. généal., t. VI, p. 64.)

, et la dame de Saint Verain, jadis femme de Dreue de Mellou

Il s’agit de Dreux de Mello, seigneur de Saint-Bris et de Blagny, troisième fils de Guillaume II, seigneur d’Époisses, et de Marie de Châteauvillain, et par conséquent oncle de Gibaut, dont il est question ci-dessus. Il était mort en 1374, et sa femme, Marguerite de Saint-Verain, eut le bail de ses quatre enfants, depuis cette année jusqu’au 25 mai 1380. Le décès de celle-ci eut lieu un peu avant 1387. (Id. ibid., t. VI, p. 66.)

, chevalier, comme aiant le bail, garde et gouvernement des enfanz de elle et du dit deffunct, tout le droit que il ont et avoient, comment que ce soit, en l’office et seneschauciée de Guienne en mil livres de rentes prises sur nostre tresor et en ixM florins d’or de Florence, ès quelx ilz disoient que nous estions tenuz de leur rendre, et que il avoient esté par noz genz, pour la necessité des guerres de nostre royaume, vivant nostre très chier seigneur et pere, dont Dieux ait l’ame, prins en certain lieu ou charge où ilz avoient esté deposez par feue Jehanne de Dreux

Jeanne de Dreux, dame de Saint-Valery et de Gamaches, fille de Jean II comte de Dreux, première femme de Louis vicomte de Thouars, morte avant 1360. Le comté de Dreux, ainsi réuni à la couronne par le présent acte, fut donné, en 1382, par Charles VI à Arnaud-Amanieu sire d’Albret.

, mere de la dicte vicontesse, et de toutes les appartenances et arrerages des dictes seneschauciée et rente de mil livres, sanz y riens retenir, si comme ce et autres choses sont plus à plain desclarciz et contenuz en certainnes lettres sur ce faictes et passées par les diz mariez, soubz le seel de nostre Chastellet de Paris, lesquelles nous avons faictes recevoir de par nous, et sont et demeurent en toute leur teneur fermes et en vertu pour nous et noz successeurs heritiers et aianz cause de nous ; et lesquelx conté et dictes deux parties, seneschauciée et rente de mil livres estoient du propre heritaige de la dicte vicontesse, nostre cousine. Nous, en recompensacion, eschange et soultes et parmi toutes les choses dessus dictes et toutes celles qui, par lesdiz accors et lettres du Chastellet, nous ont esté delessées, transportées, et promises à delivrer, delessier et garentir, avons baillié et transporté, et par ces presentes baillons, cedons et transportons, par l’eschange et en lieu d’icelles choses et convenances contenues ès dictes lettres de Chastellet, le chastel et chastellenie de Benaon en la seneschauciée de Xantonge, avecques leurs appartenances et appendences, fiefs et arrierefiez, lieux, ressors, bois, terres, rentes, chasses, garennes, justice, seignorie et toutes les noblesses et dependences qui à cause desdiz lieux y doivent appartenir, et d’autre part la terre, chastellenie et appartenances de Frontenay l’Abatu

La châtellenie de Frontenay avait été donnée par le roi à Jean Larchevêque, seigneur de Parthenay, pour en jouir sa vie durant. Celui-ci dut en faire la rétrocession à Charles V, et, en échange de l’abandon de ses droits, il reçut de ce prince une somme de 2000 francs d’or, par lettres du 10 octobre 1378. (L. Delisle, Mandements de Charles V, Introduction, p. ix). Nous avons vu que Frontenay avait appartenu au maréchal Boucicaut et que la veuve de celui-ci, Fleurie de Limères, poursuivait au Parlement le sire de Parthenay, comme ayant le bail et la tutelle de Jean Larchevêque, son fils mineur, le 2 mai 1377, et demandait qu’il fût condamné à lui restituer cette terre et les revenus qu’il en avait perçus. (Tome III de cette collection, p. 280 note.)

, et toutes les rentes revenues et emolumens, proffiz, droiz, justice et seignorie, fiez, arrerefiez, ressors et noblesses, appartenances et appendences des diz demainnes, à tenir et avoir des diz mariez comme du propre heritaige de la dicte vicontesse, nostre cousine, ses hoirs et aianz cause d’elle à tousjours, en telle maniere que lesdiz chastel, chastellenie et appartenances de Benaon sont et seront tenuz de nous nuement par foy et hommage lige, en nom, noblesse et preeminence de conté, et dès maintenant, par ces presentes, de grace especial, plainne puissance et auctorité royal, l’avons faicte, crée et ordenée, creons, ordonnons et faisons conté, à le tenir à héritaige perpetuel de l’eritaige de nostre dicte cousine, aussi noblement comme estoit et elle tenoit la dicte conté de Dreux ; et l’autre dicte chastellenie, terres et appartenances dudit Frontenay l’Abatu, à tenir de nous à une autre foy et hommage lige.

Et seront chascun des diz fiez chargés de cent livres tournois de redevance et proffit en cas de relief par devers nous, et au ressort et souverainneté sanz moien de nous, au siege royal de Sainct Jehan d’Angeli, sanz ce que ycellui ressort et souverainneté puissent estre mises ne transportées en autres mains que de nous et noz successeurs roys de France, ne assegnez à la Rochelle, ne soubz les officiers d’icelle.

Et avec ces choses avons fait aus diz mariez paier et delivrer comptans trente et trois mile franz d’or, que yceulx viconte et vicontesse en ont eu, franchement, sanz rabat ne deducion de quins deniers ne autres devoirs pour ceste cause, les quelx pour ce deuz envers nous, nous leur avons quictez et remis, quictons et remettons pour ceste foiz, reservé à nous, à nos hoirs et successeurs, et mis en exprès convenant que, toutesfoiz que nous ou les aianz cause de nous voudrons aus diz mariez ou aus aianz cause de nostre dicte cousine, la vicontesse, bailler et delivrer, et leur sera baillié et delivré realment et de fait, premierement et avant toute euvre, autre terre convenable, et à la valeur des dictes chastellenie et terre de Benaon, avecques chastel aussi souffisant en la dicte seneschauciée de Xantonge, par deça Xaintes, ou au païs de Poitou, crée et decorée conté comme celle de Benaon, pour estre propre heritaige de la dicte vicontesse et de ses hoirs ou aianz cause, ilz seront tenuz de delesser à nous ou aus aianz cause de nous, quant ce l’en voudra estre fait, les diz chastel, terres, chastellenie et conté de Benaon, et les revenues et appartenances entierement et sauvement, telles et en la maniere que baillées leur ont esté, et de pranre et accepter l’autre dicte terre et conté en lieu, sanz contredit, debat ou opposicion, et à telles redevances en cas de relief comme Benaon. Et encores demeurent et sont quictes à toujours par devers nous, noz hoirs et successeurs, les diz mariez et les aianz cause de eulx, de touz les arrerages et debtes que nous ou noz genz, pour le temps passé, leur pourrions demander, comment que ce soit, à cause de la dicte conté de Dreux, et à cause des rentes et autres droiz que nous y avions avant ce traictié. Et aussi devons satisfier nostre dicte cousine d’Artois de ce que elle prent sur la dicte conté de Dreux, à cause de son dit douaire et de tout ce qui lui peut estre deu à cause d’arrerages, quins deniers, deffaux de hommages non faiz et autres droiz et demandes qui s’en pourroient ensuir, et pranre la deffense et charge des procès qui pour cause ou occasion d’aucunes de ces choses dessus dictes pevent pendre en Parlement, se aucuns y sont contre yceulx mariez, tant d’icelle nostre cousine d’Artois comme des diz de Mellou. Encores avons volu et accordé, voulons et accordons aus diz mariez, mesmement à notre dicte cousine de Thouars, que, se il advenoit que le païs de Guienne ou partie d’icellui feust par nous ou noz successeurs, par traictié de paix ou autrement transporté ès mains des Anglois ou autres, par quoy les diz de Thouars, leurs hoirs ou aianz cause ne peussent joir des dictes terres à eulx baillées par nous, ou qui leur seront ou devront estre baillées, nous et noz successeurs serons tenuz de les en recompenser et leur en baillier et asseoir, dedans un an après, autant de terres en noblesses, conté, chastiau, chastellenies, pris et valeur, en nostre royaume, c’est assavoir en Tourainne, Orlenoys, France, Champaingne, Normandie ou Vermendois, comme sont et seront et doivent estre les diz conté, chastel et chastellenies et terres, qui baillées leur sont ou seront et doivent estre par ce dit traictié, et en aussi nobles fiefs et ressors, avecques les fruiz du temps qui auroit couru depuis que les dictes terres seront mises hors de leur main.

Toutevoies est à entendre pour nous que, se ès dictes terres, conté, chastellenies, bailliées de par nous ou qui seront recompensées par nous ou noz successeurs, avoit aucunes eglises cathedraux ou autres lieux qui feussent de fondacion royal ou privilegiées, qui doient demourer soubz nous ou nostre couronne, nous ne les baillons pas ne n’en ferons ne serons tenuz de en faire restitucion, mais nous sont reservées et les retenons pour nous et noz successeurs roys, avecques toutes souverainnetez, ressors et droiz royaulx.

De toutes lesquelles terres et conté de Benaon, chastellenie de Frontenay et des appartenances, par nous baillées en demainne, noblesses et appartenances nous en avons revestu, revestons et saisissons, corporelment, realment et de fait, les diz viconte et vicontesse, et les en faisons et establissons à cause de la dicte vicontesse, nostre cousine, de son heritage, pour elle, ses hoirs et aianz cause, vrays proprietaires et demainiers, saisiz, possesseurs et seigneurs soubz nous, comme leur chose pour en user, joir et possider et faire toute leur plainne voulenté par la maniere dessuz esclarcie. Et les choses dessuz dictes par nous transportées promettons à garentir et defendre, envers touz et contre touz, de touz troubles et empeschemens, et les tenir quictes des choses dessus dictes, par nous à eulx quictées et remises, et les delivrer et tenir paisibles des choses dont dessuz nous nous sommes chargez de en prendre le plait et charge.

Et pour ce que aucuns subgiez des dictes terres ne se puissent excuser de eulx plainnement obeir, quictons touz noz hommes et vassaux des dictes terres à eulx baillées, comme dit est ; de toutes foys et hommages ès quelx il estoient envers nous pour ce tenuz, sauf noz diz droiz et souverainnetez, et voulons qu’il entrent en la foy et hommage du dit Tristan, à la cause dessuz dicte, et touz les tenans en censive et subgiez leur paient leurs devoirs et à eulx obeissent, comme il appartient et les terres le desirent. Donnans en mandement et commettant par ces presentes à nostre amé et feal conseillier, maistre Jehan Pastourel, et au seneschal de Xantonge ou à son lieutenant, et à chascun d’eulx, que les choses dessuz dictes et chascune d’icelles facent enteriner et accomplir au profit dudit Tristan et de nostre dicte cousine, de point en point, selon la teneur des dictes lettres, et les en facent joir et user paisiblement de toutes les terres et seignories à eulx de par nous bailliées et cedées, en ostant touz empeschemens et contraingnant viguereusement et sanz delay tous ceulx qui y feront à contraindre. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touzjours maiz, nous avons fait seeller ces lettres de nostre grant seel. Sauf nostre droit en autres choses et l’autrui en toutes. Donné à Paris, au moys de septembre l’an de grace m. ccc. lxxviii, et le xve de nostre regne

Ces mêmes lettres avaient été enregistrées à la Chambre des comptes (anc. mémorial D, fol. 189 v°). Elles figurent sous forme de copie dans les registres de cette cour reconstitués après l’incendie de 1737, accompagnées de l’inventaire des titres échangés entre les parties contractantes, à cette occasion. (Arch. nat., P. 2295, p. 539 et 549.)

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Par le roy. H. Blanchet.

DCXXIV Novembre 1378

Lettres de rémission accordées à Jean. Chaboussan, de Lezay, qui, après la prise de ce bourg par Alain de Beaumont, était entré dans la compagnie de ce capitaine et avait pris part à plusieurs actes d’incendie et de pillage.

AN JJ. 113, n° 316, fol. 157 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 91-94

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Jehan Chaboussan, de la parroisse de Lesay en Poitou, contenant comme, sept ans a ou environ, il [f]eust ou chastel du dit Lesay, qui pour lors estoit en l’obbeissance du roi d’Angleterre, ou quel temps vint devant le dit chastel Alain de Beaumont, chevalier, capitaine de par nous ès dictes parties, le quel prist et mist en nostre obeissance ycellui chastel

Les opérations militaires rapportées dans cet acte, c’est-à-dire les prises successives et à peu de jours d’intervalle de Lezay, de Chef-Boutonne, de Brioux, de Maisonnais, de Melle et de Sompt, ne sauraient être antérieures à la nomination d’Alain de Beaumont comme capitaine de la ville et du château de Saint-Maixent, c’est-à-dire au commencement de septembre 1372, comme on l’a vu dans notre précédent volume, p. 156 note et 297 note. D’autre part, l’Itinéraire de Philippe le Hardi, duc de Bourgogne, nous apprend que ce prince, revenant de prendre Aulnay, séjourna à Melle les 3, 4 et 5 octobre suivants. (Ernest Petit, Itinéraires, coll. des Documents inédits, in-4°, 1888, p. 87.) Il y a donc beaucoup d’apparence que ce fut dans le courant même de septembre que les localités ci-dessus mentionnées furent remises en l’obéissance du roi de France.

, le dit suppliant, qui depuis a tousjours tenue nostre partie, et pluseurs autres qui dedens estoient. Et ce faict, ycellui suppliant avec plusieurs autres d’icellui chastel ala, en la compaignie du dit capitaine, de Bertran Evecost, du bastart de Claquin

Michel, fils naturel de Bertrand du Guesclin. On trouve peu de renseignements sur ce personnage. Il servait en Normandie avec huit écuyers, le 18 octobre 1378, et Charles V lui accorda un don en argent le 21 décembre 1380, en récompense des services qu’il avait rendus aux guerres, où il avait été fait prisonnier en plusieurs rencontres et mis à grande rançon. On le retrouve en Flandre, sous l’amiral Jean de Vienne, en 1383. L’historien de Bretagne, dom Lobineau, rapporte aussi que le bâtard du Guesclin eut quelques démêlés avec Jeanne de Laval, dame de Tintiniac, veuve de son père le connétable. (Le P. Anselme. Hist. généal. de la maison de France, t. VI, p. 186.)

, de Bertran de Haac et de pluseurs autres, devant pluseurs forteresces angleches, c’est assavoir devant le chastel et eglise de Chevetonne, devant le fort de Brihuil et pluseurs autres ; et avint que en retournant du dit fort de Chevetonne, ils trouverent une cave appellé la Roche de Som, en la quelle avoit gens de païs assemblez, de l’obeissance du roy d’Angleterre, et en ycelle mirent et bouterent le feu, de nuyt, et en ycelle morut une femme, si comme l’en dit. Et après ce, en alerent à l’eglise de Maisonnès, qui pour lors estoit fortiffiée et en l’obeissance dessus dicte, et là prindrent les touailles de l’autel d’icelle eglise et y raençonnerent buefs et vaches. Et après alerent courre devant la ville de Merle, qui pour le temps estoit en la dicte obeissance, la quelle fut prise ; et prindrent en l’eglise de Saint Ligier de la dicte ville de Merle certaine quantité de vin pour leur provision, et de là s’en alerent en la parroisse de Som, qui lors estoit en l’obeissance dessus dicte, où ilz prendrent une jument et pluseurs autres choses. Et avecques ce, ou temps que le dit chastel de Lesay fu pris, comme dit est, assez tost après, le dit suppliant fu commandeur du guet du dit chastel, et en faisant son dit office, il print gaiges des defaillans, les quelx gaiges les Bretons qui estoient en ycellui chastel vendirent en la terre du Moulin ; et pour ce veult dire le seigneur du dit Moulin que le dit suppliant fut à pillier sa terre. Et aussi ou temps des guerres de feu nostre seigneur et pere, dont Dieux ait l’ame, vindrent gens d’armes de Saousé et de Voussay, qui lors estoient ou se disoient françois, les quelx prindrent grant quantité de bestail en la chastellerie du dit Lesay, qui aussi pour lors estoit françois. Et pour ce le dit suppliant et pluseurs autres du dit chastel et chastellerie yssirent hors pour secourre leur dit bestail, et en leur chemin encontrerent gens qui venoient du marchié de la dicte ville de Merle, qui estoient des diz lieux de Saousé et de Voussay et pour ce leur coururent sus, en disant que ilz les prenoient par marque pour leur dit bestail. Lesquelx de Saousé et de Voussay leur respondirent qu’ilz alassent gaignier ailleurs et que à eulx riens ne gaigneroient, ou quel debat morut un homme appellé Gacian. Et en ycellui temps, le dit suppliant et pluseurs autres en sa compaignie s’en alerent par nuyt à un moulin appellé la Sarpe, ou quel ilz prindrent blé et farine pour la provision de leur dit fort de Lesay. Et jà soit ce que des choses dessuz dictes ou de grant partie d’icelles le dit suppliant ait esté autresfoiz appellez et emprisonnez de par Parceval de Couloigne, chevalier, pour le temps nostre seneschal de Poitou

C’est-à-dire entre juin 1374 et juin 1375, suivant les quelques éléments chronologiques que nous avons pu recueillir sur le sénéchalat de Perceval de Cologne. (Tome IV de cette collection, p. 202 note.) Nous pouvons ajouter ici que dans un compte de juin 1375, il est encore formellement qualifié sénéchal de Poitou. (Arch. nat., KK. 252, fol. 62 v°.)

, et en après purgiez et delivrez, toutevoies s’efforce derechief nostre procureur ès dictes parties de le mettre en procès pour cause des choses dessus dictes ; que, attendu que ce que le dit suppliant a fait ès choses dessuz dictes, il a fait par temps de guerre et avecques les autres genz d’armes du dit chastel de Lesay et autres, cuidanz faire son devoir, mesmement que les diz fors et eglises de Chevetonne, de Brihuil, de Maisonnès, de Merle, de Som estoient en l’obbeissance du roi d’Angleterre ou temps dessuz dit, avec pluseurs autres si prochainnes d’eulx que à grant peinne povoient il avoir leurs vivres et garnisons, et que ycellui suppliant est homme de bonne vie et honneste conversacion, autrement non diffamé de villain blasme, nous lui vueillions sur ce impartir nostre grace et misericorde. Nous, eu regart et consideracion au temps des choses dessuz dictes, au dit Jehan, ou cas dessuz dit, avons remis, quictié et pardonné, quictons, remettons et pardonnons de nostre auctorité royal, plain povoir et grace especial, par ces presentes, toute peinne, amende et offense corporelle, criminelle et civile qu’il a et puet avoir encouru envers nous et justice, pour occasion des faiz dessuz diz, et le restituons à sa bonne renommée, au païs et à ses biens quelxconques, en imposant silence perpetuel à nostre procureur et à touz autres sur ce. Sauf et reservé à partie poursuite civile tant seulement. Si donnons en mandement à touz noz justiciers, presens et avenir, et à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit Jehan facent de nostre presente grace joir et user paisiblement, sanz le molester ou souffrir molester au contraire ; mais se son corps ou ses biens estoient pour ce pris, saisiz ou arrestez, lui mettent ou facent mettre au delivre. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, l’an de grace m. ccc. lxxviii, et de nostre regne le xve, ou mois de novembre.

Par le conseil estant à Paris. P. de Disy. — G. Dormans.

DCXXV Novembre 1378

Semblable rémission en faveur de Pierre Brun de la Braule, également de la paroisse de Lezay, pour les mêmes faits

Le texte, au commencement et à la fin de cet acte, est exactement semblable à celui des lettres qui précèdent. Seulement les faits à la charge de Pierre Brun s’arrêtent au vol d’une jument dans la paroisse de Sompt, et le récit reprend aux poursuites commencées par le sénéchal de Poitou, Perceval de Cologne. Nous avons vu au vol. précédent (p. 200, note 1) que la mère de ce dernier se nommait Pernelle Brun ou le Brun, et qu’il était en procès, de 1383 à 1388, avec un Pierre Brun, son cousin germain, alors mineur, fils de Geoffroy Brun et de Philippe d’Avoir. Peut-être le Pierre Brun, en faveur de qui sont données les présentes lettres de rémission, appartenait-il à la même famille.

AN JJ. 113, n° 319, fol. 158 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 94

DCXXVI Novembre 1378

Lettres de rémission octroyées à Moreau de Magné et à ses complices qui avaient tué Jean de Verruyes dans un combat auquel ils avaient été provoqués. Leur inimitié avait pour origine une contestation survenue entre eux au sujet du droit de justice à Saint-Rémy-en-Plaine.

AN JJ. 113, n° 331, fol. 162 bis P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 95-103

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que de la partie des amis charnelx de Moreau de Maigné

L’an 1361, étant en garnison au Coudray, Moreau avait déjà commis un homicide sur la personne de Geoffroy Ayraut, pour lequel le maréchal Boucicaut, lieutenant du roi en Poitou, lui avait accordé des lettres de rémission (tome III, p. 303). Moreau de Magné, chevalier, seigneur de Magné, à une demi-lieue de Saint-Liguaire, comme il est dit dans la rémission accordée à son valet, en juin 1383 (ci-dessous, n° DCLXV), avait épousé Isabelle Mignot, fille unique de Pierre Mignot, chargé successivement de plusieurs fonctions importantes en Poitou, que nous avons rencontré déjà et dont il sera question encore ci-dessous. Moreau et sa femme soutenaient, dix ans plus tard, contre l’abbaye d’Angle, au sujet d’une rente en argent et en vin, un procès qui se termina par un accord amiable ratifié par le Parlement, le 18 janvier 1389 n.s. (Arch. nat., X1c 58). Ils n’eurent qu’une fille, Jeanne, mariée à Simon Chasteigner, seigneur de la Meilleraye, auquel et ensuite à ses enfants elle porta la châtellenie de Magné, les terres d’Échiré, de Saint-Maxire, de Longèves près Fontenay-le-Comte, de la Boissière et de la Cour-de-Magné, près Fontaines en Saintonge ; elle épousa en secondes noces, entre 1398 et 1400, Thibaut Portier, seigneur de Sainte-Néomaye. Moreau de Magné mourut un peu avant le 13 février 1393 n.s. Dans un acte de cette date, Simon Chasteigner se qualifie seigneur de Magné et d’Échiré, à cause de sa femme, et déclare que Jean Rogre, demeurant à Rouvre, lui fit ce jour-là « un hommage plein qu’il lui était tenu de faire par la mort de feu messire Moreau de Magné, jadis chevalier, père de sadite femme, à cause de sa terre d’Échiré, à raison de certaines choses assises à Ternanteuil et environs, et en la paroisse d’Échiré. » (A. Du Chesne, Hist. généal. de la maison des Chasteigners, Paris, 1634, in-fol., p. 510, et Preuves, p. 160.)

, chevalier, nous a esté exposé que feu Jehan de Verruyes

La famille de Verruyes avait de nombreux représentants en Poitou à cette époque. Un acte du Parlement du 13 juillet 1377 en mentionne sept. Aimery de Verruyes et ses trois neveux, Jean de Verruyes, celui-là même dont le meurtre est relaté dans les présentes lettres, Tristan son frère, nommé plus bas, et le mari de leur sœur Jean Jousserant, chevalier, héritiers de Jeanne de Verruyes, leur sœur et tante, ainsi que Palmidas de Verruyes, chevalier, et Pierre de Verruyes plaidaient contre Hervé de Volvire, chevalier, seigneur de Nieul et de Châteauneuf, fils de Maurice de Volvire et de ladite Jeanne de Verruyes, et lui réclamaient des terres et rentes que celle-ci tenait de la générosité de son mari. Maurice de Volvire avait en effet donné à sa femme, tant comme don gracieux que pour son douaire, son hébergement de Chassenon (Vendée) et plusieurs autres petits fiefs. Plus tard, celle-ci les avait échangés avec son fils contre d’autres terres et des rentes, puis dans son testament elle avait définitivement abandonné à Hervé de Volvire tous ses droits de ce chef. Une transaction intervint par laquelle ses héritiers renoncèrent à leurs prétentions au moyen d’une indemnité de quelques centaines de livres (X1c 35). Jean avait épousé Isabelle de Montendre, dont il sera amplement parlé dans une note ci-dessous. — Un autre personnage qui paraît se rattacher à la même famille était seigneur de Foulletourte au Maine. Il se nommait aussi Jean de Verruyes et se qualifiait écuyer. Ayant tué en se défendant un nommé Michel Mercent, dudit lieu de Foulletourte, il obtint rémission du roi par lettres datées de Paris, juin 1395. (JJ. 147, n° 341, fol. 155 v°.)

, chevalier, ou temps qu’il vivoit fist publier que à certain jours lors avenir il tenroit son assise en certain lieu à Saint Remy de la Plaine près de Nyort, ou quel lieu le dit Moreau seul et pour le tout a toute justice haulte, moyenne et basse, et de gens d’armes et autres se fist fort le dit feu Jehan pour tenir la dicte assise. Ou quel jour le dit Moreau, acompaignié de pluseurs de ses amis, les aucuns armez et les autres non, vint au dit lieu où estoit le dit feu Jehan, acompaignié de gens d’armes et autres ; et là par le conseil de leurs amis se soubmirent yceulx Moreau et Jehan du descort qu’il avoient ensemble en l’ordenance du sire de Tors

Renaud de Vivonne, sire de Thors, auquel nous consacrons une notice dans un autre endroit de ce volume.

. Et après ces choses, sanz ce que le dit sire de Tors eust aucune chose ordené de leur debat, le dit feu Jehan, en demonstrant la mauvaise volonté qu’il avoit contre le dit Moreau, acompaignié d’aucunes personnes et de pluseurs chiens, ès venganges (sic) derrainement passées ou un pou devant, vint par pluseurs foiz en une piece de vigne du dit Moreau, où il avoit grant quantité de roisins, et tant alerent, vindrent et chacerent parmi la dicte vigne le dit feu Jehan et sa compaignie, que il gasterent grant partie de la vendange qui y estoit. Le quel Moreau, acompaignié de Guillaume Himbaut

Guillaume Imbaut vivait encore en 1404. Il était alors tuteur des petits-enfants de son maître, Simon et Jeanne Chasteigner, enfants de Simon Chasteigner, seigneur de la Meilleraye, et de Jeanne de Magné. C’est en leur nom que, le 15 janvier de cette année, il rendit aveu de la terre de la Meilleraye à Jean duc de Berry, comte de Poitou, à cause de son château de Fontenay-le-Comte. (Grand-Gauthier, copie du xviiie siècle. Arch. nat., R1* 2172, p. 1131. — Voy. aussi Du Chesne, Hist. généal. de la maison des Chasteigners, Paris, in-fol., 1634, p. 511.)

, son escuier, touz desarmez fors que d’espée, vint en la dicte vigne et y trouva le dit feu Jehan. Et après pluseurs paroles injurieuses eués entre eulx, le dit Moreau trait s’espée, et quant il apperçut que le dit feu Jehan n’avoit point d’espée pour soy defendre, il remist sa dicte espée ou fourrel et ne le fery point. Et depuis ce, le dit feu Jehan qui par avant aloit, lui tiers ou quart, touz desarmez par le pays, chevaucha à gens d’armes et à lances et à bacinès, et le jour de la feste saint Denys derrainement passé, vindrent icellui feu Jehan, Tristran de Verruyes, chevalier, son frere, Jehan de Verruyes, de Trevins, et autres ses compaignons armés, en la ville de Saint Legaire près de Nyort, où seeoit une foire le dit jour. Et après disner, environ vespres, se partirent de la dicte ville de Saint Legaire le dit feu Jehan et ceulx de sa compaignie, et vindrent au bout d’une chaucée sur un marez par où en aloit de la dicte ville de Saint Legaire à Maigné, où demouroit le dit Moreau. [Le quel Moreau], vestu d’un jaque et çainte s’espée sanz autre armeure, acompaignié du dit Himbaut, son escuier, armé d’une coste de fer et aiant en sa main une darde d’un varlet appellé Jehan Calet

Nommé plus bas Calot, Colet, et Talet dans des lettres de rémission qu’il obtint pour lui personnellement, en juin 1383. (Voy. ci-dessous, n° DCLXV.)

, qui avoit espée, taloche et une lance d’un page appellé Jehannin, qui portoit une lance (sic), les quelx avoient acoustumé de chevauchier avec lui, quant il aloit hors, et d’un compaignon appellé Normandeau

Ce Normandeau pourrait bien être Jean Normandeau qui avait été sergent de du Guesclin à Fontenay-le-Comte, sous Pierre Mignot, sénéchal du lieu, et beau-père de Moreau de Magné. (Voy. ci-dessus, p. 95 note.) En 1389, il était prisonnier au Châtelet de Paris, appelant au Parlement des officiers du duc de Berry audit lieu de Fontenay-le-Comte, qui l’avaient retenu enfermé au château de cette ville, alors qu’il était tenu de comparaître en personne aux jours de Vermandois dudit Parlement, à la requête du comte de Poitou. Le 22 décembre 1389, il fut élargi sous caution, avec permission de se faire représenter par un procureur, et élut domicile chez Étienne Petitbreton, procureur à Paris, demeurant à l’école Saint-Germain, « aux Sept-Rois, à l’enseigne du  » (sic). Le 20 mars 1390, il obtint un nouvel élargissement jusqu’à la fin de juin suivant, et le 27 de ce mois, un renvoi à la session suivante. (X2a 12, fol. 65 v°, 78 v°, 97.)

, tout desarmé, estoit parti du dit Maigné pour aler au dit Saint Legaire, pour certaine besoigne que Olivier de Saint Symon

Olivier de Saint-Simon avait épousé une cousine de Moreau de Magné. C’est lui qui avait prié son cousin de venir avec lui à la foire de Saint-Liguaire, pour l’aider à entrer en arrangement avec André Giffart, au sujet d’une rente de blé que la femme dudit Olivier, son mari étant prisonnier des Anglais, avait vendue à une dame veuve, remariée depuis audit Giffart, pour aider à payer sa rançon, en se réservant toutefois le droit de la racheter moyennant un certain prix. (Extrait de l’arrêt du 22 mai 1381, X2a 9, fol. 236 v°.) Olivier de Saint-Simon mourut peu de temps avant le 16 juillet 1403, époque où sa veuve, Jeanne de Gramouton, rendit aveu au duc de Berry pour son hébergement de la Roche-de-Chauray, dit l’hébergement de Bourgneuf, avec colombier, garenne, etc., etc. (Arch. nat., R1* 2172, p. 738).

avoit à faire à Andrieu Giffart

Ce personnage appartenait à une famille de Niort dont plusieurs membres figurent dans nos précédents volumes. (Voy. t. II, p. 221 et n., 405 n., et t. III, p. 209-212.)

, le quel le dit Moreau cuidoit trouver à la dicte foire. Et en alant vers la dicte ville de Saint Legaire trouva ou chemin le bourc de Luserches

Jean bâtard de Luzarche est dit cousin d’André Giffart dans l’arrêt du 22 mai 1381 (ci-dessus, note 3). Plusieurs de ses parents sont nommés aussi dans un volume précédent : Guillaume de Luzarche, prévôt de Niort, Jean de Luzarche et Pierre de Luzarche, qui fut procureur du roi en Poitou, l’an 1351. (Voy. T. II, p. 407 et note.)

, tout desarmé, le quel il fist aler avec lui. Et en chevauchant, le dit Calot (sic) apperçut les diz de Verruyes et leurs compaignons armez, et dit au dit Moreau : « Sire, je vois là gens d’armes. » Et lors le dit Moreau s’arresta, et les diz de Verruyes et ses compaignons se mirent en un pré au dessoubz de la dicte chaucée. Le quel feu Jehan et Jehan de Verruyes, de Trevins, qui estoit embacinez, et Pierre Claveau prindrent leurs lances et vindrent tout droit au long du pré contre le dit Moreau, jusques à un fossé par lequel l’en povoit aler du dit pré à la dicte chaucée, près du dit lieu où estoit arrestez le dit Moreau, et le dit Tristran, sa lance en sa main, se mist à cheval sur la dicte chaucée et s’adreça tout droit contre ledit Moreau, le quel et les dessus nommez de sa compaignie se trairent vers le dit fossé ; et dist le dit Moreau au dit feu Jehan : « Veulx tu riens ? — Ouïl, respondi le dit feu Jehan, je diz que tu es faulz et mauvaiz chevalier. Ores ay je espée comme tu. Ores est il temps de compter. Passe deça. » Et le dit Moreau respondi : « Mais tu deça ! » Le quel feu Jehan cuida faire passer son cheval ou dit fossé, mais le dit cheval ne voult, et le dit Moreau fist entrer ou dit fossé son cheval, qui y entra jusques à la poitrine. Et lors du dit feu Jehan, ou de Jehan de Trevins, ou du dit Claveau fu le dit Moreau feruz et navrez, et le dit Moreau feri de sa lance le cheval du dit feu Jehan, et lors cheirent les lances, et si fort des esperons feri le dit Moreau son cheval que il issi du dit fossé et vint ou dit pré. Et sacherent leurs espées l’un contre l’autre, et les diz feu Jehan et Moreau envayrent, blecerent et navrerent les uns l’autre ; et aussi le dit Himbert (sic) envay le dit feu Jehan, qui fu si navrez que mort s’en est ensuye en sa personne. Et le dit Tristran assailli le dit Calet et le feri de sa lance, et le dit Calet fery le dit Tristran de s’espée et le navra, sanz mort et sanz mehaing. Au quel debat seurvindrent Jehan Aymer

Ce personnage doit être Jehan Aymer l’aîné, valet, fils de Pascaut Aymer, de Lesson près Benet ; il avait épousé Isabeau de Lalier et fit, le 8 septembre 1397, un accord avec Marguerite de Lalier, sa belle-sœur, avec qui son père s’était remarié. (Titre orig. de la famille Aymer.)

, Jehan Ymbaut et Jehan Bon à pié, et avoient chascun d’eulx une espée sanz autre armeure, et ne ferirent oncques les diz de Verruyes ne leurs compaignons, mais seulement tira le dit Aymer son espée, après ce que le dit feu Jehan l’ot feru et navré, et n’en fery aucune personne le dit Aymer. Pour les quelx faiz, le dit Moreau et ses diz complices se sont absentez de leurs lieux, doubtans rigueur de justice. Et pour ce, nous ont supplié ses diz amis que, attendu que le dit feu Jehan a esté occasion des diz debaz, comme dit est, et que le dit Moreau en la compaignie de noz amez et feaulx nostre connestable et Loys de Sancerre

Second fils de Louis II, comte de Sancerre, et de Béatrix de Roucy, Louis de Sancerre, chevalier, seigneur de Charenton, de Beaumetz. de Condé et de Luzy, était maréchal de France depuis le 20 juin 1368 et frère d’armes de du Guesclin, comme le sire de Clisson. Il prit avec eux une part active à la conquête du Poitou sur les Anglais. (Voy. Delaville-Le Roulx, Comptes munic. de la ville de Tours, t. II, p. 299.) Après la mort de Philippe d’Artois, comte d’Eu, il fut pourvu de la charge de connétable de France, le 26 juillet 1397. Il fit son testament le dimanche 4 février 1403 n.s. et mourut le mardi suivant, d’une longue maladie, à l’âge de 60 ans. (Le P. Anselme, Hist. généal., t. II, p. 851 ; t. VI, p. 204 et 759.)

, mareschal de France, et ailleurs, nous a bien et loyalment servi en noz guerres, et servira encores, se Dieux plaist, et aussi ses predecesseurs ont servi longuement et loyalment nous et les nostres, et que honte et reproche lui eust esté de soy enfouir devant le dit feu Jehan, et que en tous ses autres faiz il a tousjours esté homme de bonne vie, renommée et conversacion honneste, et que oncques ne fu repris, attains ne convaincus d’autre villain cas, nous vuillons à lui et à ses diz complices estre piteables et misericors. Pourquoy nous, attendues les choses dessus dictes, au dit Moreau et à ses diz complices, et à chascun d’eulx, ou cas dessus dit, avons quicté, remis et pardonné, remettons, quictons et pardonnons de grace especial, par ces presentes, les faiz dessus diz et toute peine, offense et amende corporele, criminele et civile, qu’il pevent avoir encouru envers nous et justice, et les restituons au païs, à leur bonne renommée et à leurs biens quel conques, sattisfait premierement et avant tout euvre à partie civilement. Mandons au seneschal de Xantonge

Le sénéchal de Saintonge, à qui ces lettres sont adressées, était, paraît-il, des amis de Moreau de Magné et s’empressa de les faire entériner, malgré l’opposition de la veuve du défunt, et d’ordonner aux parties de transiger sur la question de dommages et intérêts. Isabelle de Montendre, femme de Jean de Verruyes, ne l’entendait pas ainsi et repoussa toutes les offres qui lui furent faites. Elle avait à défendre l’honneur et les intérêts de ses cinq enfants mineurs, Jean. Ponçonnet, Alardon, Marguerite et Jeanne, et pendant plus de trois ans elle poursuivit les meurtriers de son mari avec une constance qui ne se démentit pas un instant. D’abord elle allégua que leur juge naturel était le bailli des Exemptions du Poitou, puisque tous, demandeurs et défendeurs, habitaient ce pays, et que le crime y avait été perpétré. Elle repoussait ainsi la juridiction du sénéchal de Saintonge, « devant lequel, disait-elle, du reste, l’on ne eust peu avoir justice, pour le port de maistre Pierre Mignot, sénéchal du sire de Parthenay et père de la femme dudit Moreau, lequel Moreau est acointé des Anglois du païs. » Cette accusation, échappée à la douleur de l’épouse, n’était sans doute pas très bien fondée. Quoi qu’il en soit, Isabelle de Montendre eut le crédit de faire évoquer l’affaire au Parlement, où elle apparaît pour la première fois le 16 juin 1379. Dès lors nous avons la procédure très complète jusques et y compris les plaidoiries et l’arrêt définitif. Nous en donnerons un résumé aussi rapide que possible.

Moreau de Magné et ses complices, Jean Aymer, Jean et Guillaume Imbaut, frères, et Jean de Luzarche, dit le Bourc, amenés prisonniers au Châtelet de Paris, trouvèrent plusieurs déclinatoires de compétence. Jean de Verruyes, disaient-ils, ne relevait pas directement du roi et n’était pas sous sa sauvegarde ; ils ne devaient donc pas être jugés en première instance par le Parlement ; d’ailleurs ils étaient clercs, comme le prouvaient leur habit et leur tonsure, et appartenaient à la justice de leur évêque. Il paraît que, aussitôt après le meurtre, Moreau et ses compagnons s’étaient mis en franchise « en lieu saint », et que ce fut pendant leur séjour dans ce refuge sacré qu’ils eurent l’idée de se faire tonsurer. On fit venir un barbier juré qui les visita et trouva la tonsure irréprochable. Alors on vit les évêques de Paris, de Saintes et de Maillezais se disputer les prisonniers, le premier parce qu’ils étaient en état d’arrestation à Paris, le second parce que le crime avait été commis dans son diocèse, le troisième alléguant que leur résidence ordinaire les rendait ses justiciables. Naturellement le Parlement les mit tous les trois d’accord, en se déclarant compétent. Deux jours après, le 18 juin, la cour mit les prisonniers en liberté jusqu’à réception de l’enquête, à condition de réintégrer le Châtelet aux jours de Poitou du prochain Parlement. Ceux-ci firent élection de domicile chez leur procureur à Paris, et se placèrent sous la caution de Lestrange de Saint-Gelais, de Pierre de Maillé, sire de Laleu, de Jean seigneur de Payré et archiprêtre d’Ardin, et de frère Nicolas Renoul, prieur de Coulon. (X2a 9, fol. 161 ; X2a 10, fol. 86, 87.)

Isabelle de Montendre dirigeait parallèlement des poursuites contre un autre personnage, qui ne figure pas dans nos lettres de rémission. Il se nommait Jean Rose. Quoique n’ayant pas été présent au meurtre, il avait été arrêté à Niort, détenu prisonnier ainsi que sa femme, pendant quinze semaines, et mis à la question. On l’accusait d’avoir préparé l’embûche, d’être venu s’assurer de la présence de Jean de Verruyes à la foire de Saint-Liguaire et de l’avoir signalé à son ennemi. Amené aussi à Paris, la cour s’occupa de lui, les 13 et 18 août, pour joindre les deux affaires ensemble et l’élargir comme les autres. (X2a 9, fol. 165 ; X2a 10, fol. 90.)

Le 29 août 1379, Jean de Folleville, chevalier, et maître Adam Chanteprime, conseillers au Parlement, furent désignés par la cour pour faire l’enquête sur les circonstances du meurtre. Près de deux ans s’écoulèrent entre ce moment et celui du jugement, sans que l’on puisse se rendre compte des causes du retard. Les accusés se présentèrent tous aux jours de Poitou 1380 et furent de nouveau élargis, par sentence du 7 mai, jusqu’au Parlement prochain. Le 13 mars 1381, l’enquête est enfin reçue à juger. Moreau de Magné et les autres sont admis à se présenter par procureurs, parce qu’ils « sont ès guerres du roy en Poitou ». (X2a 9, fol. 166 v° et 225 ; X2a 10, fol. 103 v° et 125.)

Le procureur général et Isabelle de Montendre présentent naturellement les faits exposés dans les lettres de rémission sous un jour tout différent. L’accusation de préméditation et de guet-apens est retournée contre Moreau de Magné et ses complices, et non sans vraisemblance. Par suite, les lettres de rémission sont vivement attaquées, comme obtenues subrepticement et sur faux donné à entendre. Le meurtrier et la victime étaient parents et liés l’un à l’autre par serment d’amitié, juramento astricti. Peu de temps auparavant, ils avaient fait à frais communs le voyage de Prusse, sans doute pour prendre part à une expédition des chevaliers de l’ordre Teutonique. Après leur retour, Jean de Verruyes, un jour qu’il chassait dans une vigne, sans savoir qu’elle appartenait à Moreau, fut fort étonné de voir celui-ci s’avancer sur lui l’épée haute et la menace à la bouche. Ne comprenant rien à cette attaque, il chercha à calmer son adversaire en s’excusant sur son ignorance. Quant au drame final, Jean de Verruyes ne pouvait être l’agresseur, puisqu’il n’était pas en plus nombreuse compagnie. Il était allé à la foire de Saint-Liguaire avec son frère Tristan, pour distraire celui-ci qui souffrait d’une indisposition sérieuse. Bref, Isabelle s’opposait à l’entérinement des lettres de rémission, demandait que les défendeurs fussent condamnés solidairement à fonder deux chapellenies de quatre-vingts livres de revenu annuel dûment amorti, les chapelles munies des meubles et ornements nécessaires au service divin, dans chacune desquelles une messe serait célébrée, chaque jour à perpétuité, pour le repos de l’âme du défunt ; à faire amende honorable envers sa veuve et ses enfants, et à leur payer une amende profitable de cent livres de rente annuelle et perpétuelle, et 2,000 livres tournois à titre de dommages et intérêts, sans préjudice du châtiment corporel qu’ils avaient encouru pour crime de meurtre.

La cour rendit enfin son arrêt le 22 mai 1381. Nous avons emprunté à cet acte une partie de ce qui précède ; il est on ne peut plus explicite sur les faits présentés et les moyens proposés par les parties. Les lettres obtenues par les défendeurs sont déclarées subreptices, mais seulement en ce qui concerne Moreau de Magné et son écuyer, Guillaume Imbaut. En conséquence, ils sont condamnés tous deux solidairement, pour réparation envers la veuve et les enfants de Jean de Verruyes, à leur donner, à titre de dommages et intérêts, 500 livres une fois payées et une rente annuelle de 40 livres, durant la vie d’Isabelle de Montendre, payable par moitié à la Saint-Martin et à Pâques ; et en outre à payer 100 livres destinées à faire célébrer des messes pour le défunt, les dépens de la cause et une amende de 300 livres envers le roi, pour port d’armes. Les autres, c’est-à-dire Jean Aymer, Jean Imbaut, Jean Bourc de Luzarche et Jean Rose, sont renvoyés des fins de la plainte, et la rémission déclarée, en ce qui les concerne, valable et exécutoire. (Arch. nat., X1a 9, fol. 235 r°-237 v°.)

et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieux tenans presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit Moreau et ses diz complices, et chascun d’eulx, facent, seuffrent et laissent joir et user à plain de nostre presente grace et remission, et au contraire ne les molestent ou empeschent en corps ne en biens, en aucune maniere ; et se aucuns des biens d’eulx, ou d’aucuns d’eulx, sont pour ce priz, saisiz, levez ou arrestez, il leur mettent ou facent mettre à plaine delivrance. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou moys de novembre l’an de grace mil ccc. soixante dix huit, et le xve de nostre regne.

Par le roy à la relacion du conseil. Mauloue.

DCXXVII 11 décembre 1378

Confirmation de la cession faite par Pierre de Vieuxbourg, dit Herpin, à Guy Turpin de Crissé, de la tour, terre et juridiction de Chitré, pour s’acquitter d’une rente et d’anciens arrérages dont cette terre était chargée envers ledit Turpin.

AN JJ. 113, n° 349, fol. 170 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 103-112

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, de la partie de nostre amé et feal Guy Turpin

Guy V Turpin de Crissé, chevalier banneret, avait épousé en premières noces, l’an 1360, Marie de Rochefort, fille de Thibaut de Rochefort, baron du lieu et de Vihiers, et de Marie de Montbazon. Plusieurs années après la mort de sa première femme, leurs enfants étant encore mineurs, il eut à défendre leurs intérêts contre Nicolas de Cigné, Geoffroy de Griselle et Jean de Lezay. (Acte du 19 décembre 1381, X2a 9, fol. 251.) Plus de six ans auparavant, Guy V avait contracté un second mariage, grâce auquel il devint seigneur de la Chaise-le-Vicomte et de Curzon et eut souvent affaire en Poitou. Sa deuxième femme était Marguerite de Thouars, la plus jeune fille du vicomte Louis, veuve de Thomas, seigneur de Chemillé et de Mortagne. Elle eut plusieurs procès à soutenir contre sa sœur Pernelle, devenue vicomtesse de Thouars par la mort de ses deux frères, et contre les maris de celle-ci, au sujet de la succession de leur père. Elle avait droit à un tiers de cet héritage et transigea, le 7 juillet 1371, avec Amaury de Craon, vicomte de Thouars, premier mari de Pernelle. L’assiette d’une rente de 300 livres que celle-ci s’était engagée à payer à sa sœur cadette donna lieu à une longue contestation. Le procès engagé devant le Parlement à ce sujet, entre Marguerite de Thouars et Guy Turpin de Crissé, d’une part, et Pernelle vicomtesse de Thouars et Tristan Rouault, son second mari, dura plusieurs années. On en trouve la trace sur les registres au 1er février 1378 n.s., au 29 janvier 1379 n.s. et au 7 septembre de la même année. (X1a 27, fol. 29 ; X1a 28, fol. 232 v°, 233 et 262.) Un autre mandement de la cour, daté du 7 juillet 1377, nous initie à une autre difficulté que Guy Turpin eut, à cause de sa seconde femme, avec Guillaume Larchevêque, sire de Parthenay. (X1a 26, fol. 75 v°.) On conserve aux Archives de la Vienne une transaction de l’année 1397, entre le chapitre de Poitiers et Guy qualifié de seigneur de Crissé et de Montoiron, au sujet des empiétements de ce dernier sur la juridiction du chapitre à Mongamer (reg. G. 215). Sa femme, Marguerite de Thouars, faisait, le 6 février 1404 n.s., une donation de messes et services dans l’église et monastère de Saint-Michel-en-l’Herm, et vivait encore le 23 octobre suivant.

, chevalier, seigneur de Crissé et de la Chaise le Viconte, nous avoir esté presentées les lettres dont la teneur s’ensuit :

A tous ceulx qui ces presentes lettres verront et orront, Guillaume Gabereau

Ou plutôt Gaboreau. Il était encore garde du sceau aux contrats de Poitiers, le 7 août 1389, suivant le vidimus des lettres du duc de Berry nommant Pierre Meslin garde et gouverneur du gros horloge de ladite ville, vidimus conservé aux Archives municipales de Poitiers (J. 293). Le 10 juillet 1368, il était procureur de la commune et donna en cette qualité son consentement au bail fait, à maître Jean Rivaut, d’une maison en la rue de l’Aiguillerie, paroisse Saint-Didier, moyennant une rente annuelle de cent sous tournois. (Id., JJ. I, p. 179.) A cette notable famille de Poitiers appartenait Jean Gaboreau qui habitait en 1353 une maison de cette ville appartenant au roi, dont la justice donna lieu à une contestation jugée au Parlement, en même temps que la justice du four de la Celle et d’une autre maison habitée par Philippe Guichard. (Arrêt du 16 mars 1353, Arch. nat., X1a 15, fol. 25.) Ce Jean Gaboreau avait été aussi procureur de la commune de Poitiers. (Voy. acte du 7 novembre 1349. Arch. de la ville. de Poitiers, K. I, p. 147.)

, portans le seel aus contraiz à Poitiers, establi pour très doubté seigneur, monseigneur le duc de Berry et d’Auvergne, conte de Poitou, salut. Comme contens et debat feust esmeuz et pendist entre noble homme messire Guy Turpin, chevalier, seigneur de Crissé et de la Chaise le Viconte, d’une part, et Pierre de Viezbourc, autrement dit Harpin

Pierre de Vieuxbourg, dit Herpin, était valet de chambre de Jean duc de Berry, en juin 1369. En récompense de ses services, ce prince lui fit don alors, par lettres datées de Clermont en Auvergne, des biens confisqués sur un écuyer nommé Guillaume Batestaut, alors au service de l’Angleterre. Ces biens, consistant en maisons, rentes, héritages, revenus, etc., pouvaient valoir 60 livres parisis de rente annuelle, et étaient situés à Palain et en divers autres lieux du diocèse de Bourges. Ce don fut confirmé par lettres de Charles V, donnée à Rouen, le 5 septembre 1369. (Arch. nat., JJ. 100, n° 19, fol. 15.) Pierre de Vieuxbourg est mentionné en cette qualité de valet de chambre en plusieurs endroits des registres des comptes du duc de Berry, notamment le 22 juin 1370, à propos d’une somme de 30 livres dont son maître lui fit don, pour le défrayer de menus frais et dépenses qu’il avait faits dernièrement dans un voyage à Paris, où il l’avait accompagné. (Id., KK. 251, fol. 25 v°.)

, d’autre part, sur ce que le dit monseigneur Guy disoit et proposoit contre le dit Harpin que Jehan Buef, jadiz seigneur de Chistré

Sur Jean Beuf et son fils Huguet, nommé plus bas, seigneurs de Chitré, voy. le vol. précédent, p. 388 note.

, et Pernelle Denarde, sa femme, pour certaine cause juste et leue, vendirent et transporterent à messire Guy Turpin, [ayeul de messire Guy], à present seigneur de Crissé, et du quel il est heritier par le moyen de son feu pere, vint sextiers de fromment, mesure de Chistré, et huit livres en deniers de rente tournois, monnoie courant, le tout de rente annuelle et perpetuele, situez et assiz sur le hebergement de Chistré et sur tous les autres biens des diz vendeurs, si comme il appert clerement par lettres autentiques soubz seaulx royaulx confaictes, données, passées et accordées, des quelles rentes de blé et deniers le dit messire Guy Turpin, ayeul du dit seigneur de Crissé, joy à plain durant sa vie. Et depuis messire Guy Turpin, son filz

Guy III Turpin de Crissé, marié en 1298 avec Jeanne de Bauçay, eut pour fils aîné Guy IV qui épousa Jeanne d’Avoir. (Voy. La Chesnaye-Desbois. Dict. de la noblesse, in-4°, t. XII, p. 703, dont l’article d’ailleurs est rempli d’erreurs.)

, pere du dit seigneur de Crissé, et aussi le dit messire Guy, à present seigneur de Crissé, jusques au temps et heure que Huguet Buef, seigneur du dit lieu de Chistré, se opposa encontre certainnes requestes faictes en la court du dit seel, par vertu des dictes lettres royaulx, par Jehan Charrer, procureur du dit messire Guy, à present seigneur de Crissé, en la quelle requeste et opposicion se deffailli le dit Hugues par tant de deffaux simplex (sic) et jugez que il fu dit, sentencié et desclairié, ès grans assises de Poitiers, qui commencerent le second jour de juing l’an mil ccc. lxxvi, qu’il n’estoit mes partie qui fust à recevoir à conduire sa dicte opposicion, et que la requeste du dit messire Guy seroit acomplie sur le dit Hugues et sur ses biens. Le quel Huguet Buef, jadis seigneur du dit lieu de Chistré, s’est jà pieça renduz rebelle et desobeissant du roy nostre sire, du dit monseigneur le duc, et s’est fait de l’obeissance et partie du roy d’Angleterre, de ses aliez et adhereurs, et ennemis du dit monseigneur le duc et du roy. Et pour ceste cause, le dit monseigneur le duc, comme lieutenant du roy nostre sire, et en tant comme lui povoit touchier, donna au dit Pierre de Viezbourc, autrement dit Harpin, les tour, lieu, terres et appartenances de Chistré perpetuelment à heritage, comme commis et confisquiez

La seigneurie de Chitré changea en cinq ans quatre fois de maître par le fait de la rébellion d’Huguet Beuf, son légitime possesseur. Il convient de rappeler ici qu’elle fut donnée en février 1373 à Jean de Kerlouet, écuyer du connétable, puis, le 11 janvier 1376, à du Guesclin lui-même. (Voy. t. IV de cette collection, p. lxxiii et 388.) Ce dernier ne la conserva pas longtemps, puisque la donation faite par le duc de Berry à son valet de chambre, dont il est question ici, est nécessairement antérieure au 4 septembre 1378, date de la cession consentie par Pierre Herpin de Vieuxbourg en faveur de Guy Turpin de Crissé.

. Et pour ce que le dit Harpin, comme seigneur, proprietaire et possesseur de la dicte tour, lieu, terres et appartenances de Chistré, fut aucunement delaiant et en demeure de paier au dit messire Guy, à present seigneur de Crissé, les arrerages de sa dicte rente, sur ce souffisanment requis, le dit messire Guy obtint certainnes lettres du roy nostre sire, par vertu des quelles il estoit mandé au premier sergent royal sur ce requis, [qu’il] feist commandement au dit Harpin, ou nom que dessus, que il feist satisfacion et paiement au dit seigneur de Crissé des arrerages de ses dictes rentes de blé et deniers. Et ou cas que le dit Harpin se opposeroit encontre ou seroit delaiant ou refusant de paier, que il fust adjournez en Parlement à certain jour et competent. Le quel Pierre de Viezbourc, autrement dit Harpin, savant et deuement acertené des dictes rentes, ne se opposa ne ne voult aucunement soy opposer contre le commandement qui, par vertu des dictes lettres royaux, à la requeste du dit messire Guy, sur ce lui fu fait, mais toutesvoies fu contredisant et en demeure de paier au dit messire Guy les diz arrerages, et pour ce lui fu jour assigné en Parlement, au xve jour du moys de juing derrain passé. Au quel jour le dit Harpin ne ala ne envoya, et fu mis en deffaut vers le dit messire Guy, apparoissant souffisanment, et ordené par la court du dit Parlement

Cet ajournement et le défaut ont été vainement cherchés sur les registres du Parlement.

que le dit seigneur de Crissé seroit paiez des diz arrerages, non obstans quelconques opposicions faites et à faire par le dit Harpin. [Lequel Pierre] de Viezbourc, autrement dit Harpin, a tout ce congneu et confessé par devant nous et en nostre presence. Pour quoy en droit, en nostre court present et personnelment establi le dit Pierre de Viezbourc, autrement dit Harpin, soubzmettant soy, ses biens, ses hoirs et les biens de ses hoirs, meubles et immeubles, presens et avenir, au destroit, jurisdicion, povoir et cohercion de nostre dicte court, sanz autre povoir ne juridicion advoer, de sa bonne volenté et pour ce que très bien li plait, deuement et à plein, si comme il dit, acertenné du bon droit et faiz du dit messire Guy, à present seigneur de Crissé, et du commandement, volenté et assentement du dit monseigneur le duc et en sa presence, à ycellui messire Guy, à present seigneur de Crissé, à ses hoirs et successeurs et aians sa cause pour et à cause des dites rentes et arrerages d’icelles, et pour en demourer du tout quicte et deschargié, a baillié, livré, quitté, remis et delaissié et du tout transporté, et encore le fait, la dicte tour et juridicion et lieu de Chistré en Poitou, avecques touz les hostelx, maisons, terres, vignes, bois, prez, cens, censes, moulins, hommes, hommages esclus, et toutes et chascunes les autres choses quelconques, appartenances et appendences au dit lieu de Chistré, et biens qui furent et estoient du dit Huguet, au temps de sa dicte rebellion, quelx qu’ilz soient et comme ilz soient nommez et appellez ; et en oultre, pour le pris et somme de quatre cens livres tournois, monnoie courant, franc de fin or la piece pour vint solz, que messire Jehan de la Touche

Jean de la Touche accompagna, en 1382, Louis Ier duc d’Anjou à la conquête du royaume de Naples, et revint, après la mort de ce prince, en Poitou où, quelques années plus tard, il eut contre un nommé Jean Bouquin un procès en matière de gage de bataille, se rattachant aux événements de cette expédition. Bouquin, qui y avait pris part aussi, avait fait courir le bruit que Jean de la Touche et son frère Marpaut, ayant été chargés par le duc d’Anjou de la garde du château d’Arienzo, dont il venait de s’emparer, l’avaient vendu et livré aux ennemis, et que Jean avait eu pour sa part 1000 francs d’or. Le duc, instruit de cette trahison, avait fait décapiter Marpaut, et son frère aurait eu le même sort, s’il ne s’y était soustrait par la fuite. C’est sous prétexte que Jean de la Touche, furieux de cette révélation, avait voulu le faire assassiner, que Jean Bouquin le provoqua en duel. L’affaire fut portée du sénéchal de Mortagne devant le sénéchal du Poitou. La sentence de celui-ci lui ayant été défavorable, Bouquin en appela au Parlement. Dans leurs plaidoiries du 11 mars 1395 n.s. qui ont été conservées, les adversaires se reprochent mutuellement de n’être pas gentilshommes. Le père de Bouquin avait été meunier, disait de la Touche. — On savait le contraire dans le pays, répondait l’autre, et que son père, noble de race, avait été tué à Mortagne même, pendant les guerres contre les Anglais. Jean de la Touche repoussa naturellement l’accusation de trahison, déclarant que, quand Arienzo avait été repris par Charles III Durazzo, il avait quitté la place depuis longtemps, qu’il était alors lui-même prisonnier des ennemis du duc, et que ceux-ci ne s’emparèrent d’ailleurs du château qu’après un siège de trois mois. Son frère, Marpaut de la Touche, avait été si peu décapité qu’il était encore vivant, douze ans après, et en bonne santé, chevalier de l’ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem. Le Parlement confirma, par arrêt du 27 mars suivant, la décision du premier juge et condamna Jean Bouquin à l’amende et aux dépens. (X2a 12, fol. 243 v° ; X2a 13, fol. 73 v°. — Voy. aussi la généalogie de la Touche par MM. Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, t. II, p. 731 et s.)

, chevalier, a promis rendre et paier au dit Harpin, pour et ou nom du dit messire Guy Turpin, si comme il appert par certainnes lettres sur ce, entre le dit messire Jehan et le dit Harpin passées et accordées. De la quelle tour et lieu de Chistré, terres, possessions, biens, appendences et appartenances quelconques le dit Harpin s’est du tout despoillé, desvetu et dessaisi, et en a vestu et saisi le dit messire Guy, pour lui, ses hoirs et successeurs, et qui de ly aura cause, et transporté en lui la saisine et possession et tout droit de proprieté, ensembleement et tous les drois, noms, raisons, actions, peticions et demandes quelconques, que le dit Pierre avoit, avoir povoit et devoit ès dictes choses, de lui transportées et delaissées au dit messire Guy, et vers quelconques personnes que ce soit, par raison d’icelles, en saisissant et constituant sur ce le dit messire Guy en ycelles choses vray seigneur, proprietaire, procureur et possesseur, comme en sa propre chose, à lui deuement acquise, sanz jamais riens y avoir, demander, ne retenir du dit Pierre ne des siens. Et veult et est d’assentement le dit Pierre que le dit messire Guy praigne et puisse prandre et apprehender, par lui et par autres, en son nom et de sa propre auctorité, la saisine et possession des dictes choses et s’en faire vestir et saisir à la seignourie, senz y requerre ne appeller le dit Harpin, et face la foy et hommage d’icelles choses à reverent pere en Dieu, l’evesque de Poitiers

Bertrand de Maumont était alors évêque de Poitiers (17 janvier 1375-12 août 1385). En ce qui concerne l’hommage dû pour Chitré aux évêques de Poitiers, voy. p. 388 note du précédent volume.

, du quel le dit lieu de Chistré est tenu, le dit Pierre à [ce] present ou absent, et sanz lui sur ce jamais requerre ne appeller. Au quel reverent pere en Dieu le [dit] Pierre prie, supplie et requiert que des dictes choses il li plaise prandre et recevoir à sa dicte foy et hommage le dit messire Guy. Les quelles choses le dit Pierre a promis et promet, est et sera tenu et obligez perpetuelment garentir, delivrer et deffendre au dit messire Guy, à ses hoirs et successeurs et qui de li aura cause, vers tous et contre tous, de touz troubles et empeschemens quelconques, de toute eviction et de toutes charges et obligacions mises par li en son fait, et amender touz cousts, fraiz et dommages interests, mises et despens, que le dit messire Guy Turpin, les siens ou porteur de ces presentes feront, auront ou soustiendront, par deffaut de gariment et autres choses dessus dictes ou aucunes d’icelles non faictes, enterinées et acomplies, à leur seul et simple serement ou de l’un d’eulx, sanz autre preuve sur ce requerre. Renunçant le dit Harpin en cestui son fait à toutes excepcions et decepcions en fait de mal, fraude, crainte, barat, tricherie, lesion, circonvencion, machinacions et excepcion d’oultre moitié de droit pris, à plus fait et moins escript, et à l’opposite, à tous establissemens, constitucions, privileges, ordonnances, statuz et grace de pape, d’empereur, de roy, de nostre dit seigneur le duc et d’autre prince ou seigneur quelconque, faiz ou à faire et donnez ou à donner, par cause de guerre ou autrement, à tout usage et coustume de païs, à tout droit canon [et] civil, et generalment à toutes autres excepcions, etc. A congneu le dit Harpin les dictes choses estre vraies, et a juré et promis aus sains evangilles nostre Seigneur, touchié le livre, et sur l’obligacion de tous et chacuns ses biens meubles et inmeubles, presens et avenir, perpetuelment tenir et garder, enteriner et acomplir fermement et loyalment, sanz enfraindre et sanz jamais faire ne venir encontre en aucune maniere, en temps avenir. De et sur les quelles choses dessus dictes et chascune d’icelles le dit Harpin fu jugiez et condempnez, à sa requeste, par le jugement de la court du dit seel, à la juridicion et cohercion de la court duquel il suppousa lui, ses hoirs et tous ses biens dessus diz, quant à ce. En tesmoing des quelles choses, nous le dit Guillaume Gabereau, portant le dit seel, ycellui, à la supplicacion et requeste du dit Harpin, à ces presentes lettres avons mis et apposé. Donné et fait, present à ce messire Guillaume Larcevesque, chevalier, seigneur de Partenay, Loys de Harecourt, viconte de Chastelleraut, et messire Jehan de la Touche, chevalier, le quart jour du moys de septembre l’an mil ccc. soixante dix et huit. — N. Le Doux.

Et pour ce que de la partie du dit chevalier, du quel nous avons eu bonne relacion que bien et loyalment il nous a servi tant en noz guerres comme autrement, nous a esté exposé qu’il se doubte que ou temps avenir aucun ne voulsissent dire et maintenir le dit don, dont les dictes lettres font mencion, à nous appartenir et par nous devoir estre fait, jaçoit ce que le dit Harpin eust le dit don de nostre très chier et amé frere le duc de Berry et d’Auvergne, conte de Poitiers, comme nostre lieutenant, il nous a humblement fait supplier que les dictes lettres et accort cy dessus encorporées, nous lui vuillions confermer et de nouvel lui donner, se mestier est, le droit à nous appartenant et que nous povons avoir en la dicte terre, tour, appartenances et appendences de Chistré, plus à plain desclairié en ycelles lettres. Nous, inclinans à sa supplicacion, de nostre certaine science, majesté royal et grace especial, les lettres et accort cy dessus encorporées, et aussi le don qui en fu fait par nostre dit frere au dit Harpin, confermons et approuvons, et de nouvel, d’abondant, se mestier est, donnons par ces presentes, au dit chevalier le droit à nous appartenant en la dicte terre, tour, et appartenances et appendences de Chistré, à tenir et possider par lui, ses hoirs et aians cause, ou temps avenir, comme leur propre chose, et en faire ce qu’il leur plaira. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx gens de noz comptes à Paris, presens et avenir, et à tous noz autres justiciers et officiers, et à chascun d’eulx, que le dit chevalier, ses hoirs ou aians cause ou temps avenir facent et laissent joir et user paisiblement de nostre presente grace, sanz les empeschier ou souffrir estre empeschiez en aucune maniere au contraire. En tesmoing de ce, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné en nostre hostel de Saint Pol à Paris, le onziesme jour de decembre l’an de grace mil ccc. soixante dix et huit, et de nostre regne le quinziesme.

Par le roy. Bordes.

DCXXVIII Mars 1379

Lettres de grâce et rappel de ban accordés à Jean Faugereux, de Saint-Savin. Lors de l’occupation anglaise, étant de la garnison de la Rocheposay, il avait couru et pillé les terres du seigneur de Preuilly et d’autres, pour ravitailler le fort. Poursuivi et mis en prison, en attendant son jugement, il s’était évadé et avait été banni du royaume par contumace.

AN JJ. 114, n° 204, fol. 102 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 112-116

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Jehan Faugereux, de la parroisse de Saint Savin

La ville de Saint-Savin fut remise sous l’obéissance du roi de France, vers la fin de l’année 1369, par un moine qui la livra à Louis de Saint-Julien et à Kerlouet. (Froissart, édit. S. Luce, t. VII, p. 191.)

en Poitou, contenant que, pour le temps que feu Karalouet tenoit le fort de la Roche de Pouzay

Sur Jean de Kerlouet et la prise de la Rocheposay, en juin ou juillet 1369, voy. notre IIIe volume, p. 390, et le IVe, p. xx, 73 n. et 85 n. Le pont de la Rocheposay avait été reconstruit à neuf, l’an 1352, aux frais de l’abbé et des religieux de la Merci-Dieu, sous la direction de Simon Chapon et de Pierre Janvre (Junior), sergents royaux, commis spécialement à cette opération. Voy. mandement au bailli de Touraine de faire mainlevée des biens des dits religieux, qui avaient été saisis par lesdits commissaires parce que l’abbé leur réclamait les comptes de 700 livres tournois et plus qu’il avait remis aux deux sergents pour la reconstruction du pont, 13 mars 1353. (Arch. nat., X1a 15, fol. 41 v°.)

, ou quel temps le prince de Gales, nostre ennemi, occupoit le pays de Poitou ; pour le quel fort advitailler et garder, comme il feust assiz en frontiere d’ennemis, il estoit de necessité le dit suppliant et ses compaignons pour la garnison du dit fort aler et chevauchier, et fourrage querir et avoir des vivres en pluseurs et divers lieux loing du dit fort, mesmement que le dit pays de Poitou environ ycellui fort estoit lors gasté et destruit, et comme tout desnué de vivres et autres biens, par le fait et occasion de noz guerres ; et en chevauchant par le dit pays de Poitou, querant des diz vivres, prindrent xii. beufs les quelz leur furent ostez en la ville d’Escuillé en Touraine, en la quele ville, pour cause des diz beufs à eulz ainsi ostez, il prindrent par maniere de marque xii. personnes, que hommes que femmes, et par force les menerent ou dit fort et les firent composer à eulz à la somme de cent frans d’or, et avecques ce chevaucherent par pluseurs foiz en la terre du seigneur de Prully

Eschivard VI, baron de Preuilly, fils unique d’Eschivard V et d’Isabeau de Montgeron. Ils étaient seigneurs de la Rocheposay, et prétendaient ne relever que du roi seul pour ce fief, dont l’évêque de Poitiers réclamait l’hommage. Il en résulta un procès qui dura environ dix ans. Commencé en 1345 par Eschivard V, qui mourut à la fin de 1349, il ne fut terminé qu’en 1354, par une ordonnance du roi Jean, donnant gain de cause au seigneur de Preuilly et déclarant que la Rocheposay relèverait dorénavant de la couronne. Eschivard VI ne dut prendre que fort peu de part à la guerre, dont ses possessions cependant étaient le théâtre, car son nom apparaît à peine dans les chroniques et les textes de l’époque. Il fut marié trois fois : la première avec Isabeau de Brizay qui lui donna une fille, Orable, femme de Renaud de Montléon, dont il a été question dans le vol. précédent, p. 354 note ; la seconde avec Blanche de Montendre, dont il n’eut pas d’enfants. De sa troisième femme, Sarrazine de Prie de Buzançais, naquirent deux fils Gilles et Antoine, qui furent successivement barons de Preuilly, et deux filles, Louise, dame de la Rocheposay, et Jeanne, femme de Nicolas Braque. Eschivard VI de Preuilly mourut le 23 avril 1407 et fut inhumé à la Merci-Dieu. La généalogie de cette famille a été donnée par M. Carré de Busserolle, Dict. géographique d’Indre-et-Loire, t. V, p. 199-222. Nous l’avons rectifiée en ce qui concerne l’ordre des mariages d’Eschivard VI, à l’aide de Du Chesne, Hist. généal. des Chasteigners, in-fol., p. 238. Nous avons mentionné dans notre troisième volume les extraits des registres du Parlement relatifs aux démêlés d’Eschivard de Preuilly avec Fort d’Aux, évêque de Poitiers (p. 224 note). Parmi beaucoup d’autres procès auxquels il fut mêlé de 1350 à 1361, nous citerons seulement celui qu’il soutint contre sa sœur aînée, Jeanne, et le mari de celle-ci, Bernard Robert, écuyer, qui réclamaient le tiers de la succession d’Eschivard V, leur père et beau-père. On y voit que Jeanne était fille d’un premier lit et que sa mère s’appelait Marguerite Turpin. La première trace de cette affaire apparaît au 12 mars 1350. Eschivard VI était alors mineur et sous la tutelle de sa mère Isabeau de Montgeron (X1a 12, fol. 369 v° et 381). Un arrêt de procédure du 29 mai suivant porte qu’il sera procédé outre, nonobstant les lettres d’état présentées par le défendeur (Id. fol. 458). Le 3 juin 1351, provision de cent vingt livres de rente annuelle est accordée à Jeanne de Preuilly, en attendant le règlement définitif (X1a 11, fol. 370 v°). Ce procès durait encore le 1er avril 1355 (X1a 16, fol. 28 et 120 v°).

et de pluseurs autres noz subgiez, ou dit pays et environ, en prenant toutes manieres de vivres, sanz autre reprouche ou meffait. En hayne des queles prises et pilleries, le dit seigneur de Prully et pluseurs autres ses malveillans eussent accusé le dit suppliant et fait convenir par devant nostre bailli des Exempcions de Touraine, d’Anjou, du Maine et de Poitou, ou son lieutenant, en denonçant et faisant proposer par nostre procureur ès diz pays le dit suppliant avoir commis et fait les pilleries et choses dessus dites, et avec ce avoir osté un mantel et pris diz solz par maniere de roberie en la bourse d’un marchant, et pluseurs autres choses ; pour les queles il fu detenu prisonnier et mis en noz prisons, et depuis elargi par pluseurs journées, aus queles et chascune d’icelles il se comparu deuement et tant que, à certain jour qui lui estoit assigné sur ce, lui fu demandé par la suggestion de ses diz hayneux, se de ces choses il se vouldroit rapporter à ce que par informacion ou enqueste en pourroit estre trouvé ou dit pays. Le quel suppliant, comme simples homs et de petit entendement, soy sentant pur et innocent de aucunes des choses à lui imposées, par especial dont il deust et peust par raison, si comme il lui sembloit, souffrir peine de corps ou autrement estre condempnez à mort, mesmement que par traictié

Traité ratifié par Charles V, le 15 décembre 1372. (Vol. précédent, p. 176 et s.)

, quant le dit pays de Poitou, du quel il est nez, retourna en nostre obeissance, touz cas criminelz et civilz furent à touz generalment par nous remis et pardonnez, se soubzmist liberalment et de sa bonne volenté, sanz alleguer la dicte remission general ne autrement soy en aidier, à la dicte informacion et enqueste, par la quele il fu trouvez coulpables des choses dessus dictes ou d’aucunes d’icelles, en peril d’estre pour ce justiciez et condempnez à mort. La quele chose venue à sa cognoissance, et pour obvier à tel peril comme de la mort, rompi noz dictes prisons, ès queles il estoit pour ce detenu prisonnier et se absenta du pays. Et le quel appellé à noz droiz, doubtant rigueur de justice, n’est aucunement comparuz, et pour ce a esté banny de nostre royaume. En nous suppliant humblement que, comme pour le temps qu’il estoit demourans ou dit fort de la Roche de Pouzay, il estoit jeunes homs, et depuis s’est mariez ou dit pays, ou quel il s’est bien et loyaument portez et gouvernez, sanz aucun blasme ne reprouche, attendu aussi et considéré la dicte general remission en la reddicion du dit pays de Poitou, comme dit est, en la quele il povoit et devoit estre compris, nous lui veuillions sur ce impartir nostre grace et misericorde. Nous, ces choses considerées, inclinans à sa supplicacion, au dit suppliant la dicte prison brisée, les faiz, pilleries, roberies et toutes les choses dessus dictes, avecques toute peine corporele, criminele et civile, en quoy il pourroit pour ce estre encoru envers nous, et le ban qui s’en est ensuy, avons remis, quictié et pardonné, et remectons, quictons et pardonnons de nostre certaine science et grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, ou cas dessus dit, et le restituons à sa bonne fame et renommée, pays et biens non confisquiez, en imposant sur ce à nostre procureur silence perpetuel, sauf et reservé le droit de partie à poursuir civilement tant seulement. Si donnons en mandement à nostre dit bailli des dictes Exempcions de Touraine, d’Anjou, du Maine et de Poitou, et à touz noz autres justiciers et officiers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que le dit suppliant facent, seuffrent et laissent joir et user plainement et paisiblement de nostre presente remission et grace, sanz le molester, faire ne souffrir molester ou empeschier en corps ne en biens, ores ou pour le temps avenir, au contraire. Et se aucuns de ses biens estoient pour ce pris, saisiz, levez ou empeschiez, ou son corps emprisonnez, se lui mettent ou facent mettre du tout au delivre, sanz aucun delay. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf en autres choses nostre droit et en toutes l’autrui. Donné à Senliz, ou mois de mars l’an de grace mil ccc. lxxviii, et de nostre regne le xve

Le texte de ces lettres a été publié déjà par M. Delaville-Le Roulx, Comptes municipaux de la ville de Tours, in-8°, t. II, 1881, p. 338. On trouve dans le même recueil un autre document intéressant sur les pillages et dévastations des Bretons qui occupaient les forts de la Rocheposay, du Blanc et de Fontgombault. Un habitant de Betz en Touraine, Jean Leconte, avait été accusé devant le bailli de Tours « d’avoir esté avecques lesd. Bretons et leur avoir enseigné les biens de ses voisins ». Condamné à l’amende, il fit appel au Parlement et vint à Paris pour le soutenir ; mais dénué de ressource et réduit à demander son pain, il lui fut délivré des lettres annulant ledit appel et le renvoyant vers le bailli de Touraine, le 25 avril 1373. (Id. ibid., p. 334.)

.

Par le roy en ses requestes. P. de Montyon. — Blondeau.

DCXXIX 9 avril 1379

Confirmation de la sentence d’absolution rendue par l’évêque de Maillezais en faveur de Nicolas Audoineau, clerc, accusé d’un meurtre commis à Fontenay-le-Comte sur la personne de Pierre d’Aunay.

AN JJ. 114, n° 273, fol. 145 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 117-122

Karolus, etc. Notum facimus universis, presentibus et futuris, nos vidisse quasdam litteras dilecti et fidelis nostri episcopi Malleacensis infrascriptas, formam que sequitur continentes :

Universis presentes litteras seu presens publicum instrumentum inspecturis et audituris, Guido

L’abbé Lacurie dit que Guy était déjà évêque de Maillezais en 1360 et ne donne pas plus de renseignements sur ce prélat, dont on ne connaît même pas le nom de famille, que la Gallia christiana. Le successeur de Guy, Pierre de Thury, n’apparaît pas avant l’année 1382. (Hist. de l’abbaye de Maillezais, in-8°, 1852, p. 114.)

, miseracione divina Malleacensis episcopus, salutem in Domino. Notum facimus omnibus per presentes quod nuper ad nostrum pervenit auditum, quod Nicolaus Audoynelli, clericus, Petrum de Aunayo

Voy. les lettres de rémission accordées au meurtrier de Pierre d’Aunay, au mois de juillet 1375 (t. IV de cette collection, p. 377 et s.).

, laicum, in villa Fonteniaci Comitis nostre diocesis, publice et notorie verberavit et percussit et vulneravit et taliter tractavit, quod ex dicta verberacione et percussione et vulneribus mortuus fuit infrà breve, et quod eum interfecit, occidit et ejus morti causam et occasionem prebuit et dedit, et quod ob hoc idem Petrus suum ultimum diem clausit antè tempus. Super quibus dictus Nicholaus, clericus, se detulit et coram nobis personaliter constiterit (sic) et in arresto nostro positus. Et Johanne Pagani

Dans un acte du 7 mai 1375 est mentionné un Jean Payen, qualifié de commissaire du roi et du bailli des Exemptions de Poitou, Touraine et Anjou. (Arch. nat., X1a 24, fol. 56 v°.)

, clerico, procuratore nostro, promotore causarum curie officialis nostri, presente et instante, officiali nostro Malleacensi ibidem presente, vive vocis oraculo dedimus in mandatis quatinus de premissis se competenter informaret et nobis refferret quidquid de eis reperiret, vices nostras eidem super hiis committendo. Qui quidem officialis noster, commissarius predictus, dictis procuratore nostro et Nicholao, clerico, delato, instantibus, mandavit et fecit citari ad curiam nostram coram se apud Malleacum, primo ad diem Jovis ante festum Nativitatis beate Marie virginis, et iterum et secundo ad nonnullos alios dies, edicto posthinc, proposito et dato ex causa ad diem Mercurii post festum beati Remigii subsequentis, et ad nonnullos alios dies et terminos posthabitos, relictam dicti defuncti Petri de Aunayo et omnes ejus amicos carnales, necnon et justiciam secularem dicti loci de Fonteniaco, et alios quoscunque, quorum interesset, proposituros, dicturos vel denunciaturos quidquid dicere, proponere, denunciare vel defferre vellent contra ipsum clericum, reum seu delatum, vel in aliquo ipsum accusare de crimine supradicto. Ad quos dies et locum ipsa relicta vel aliquis pro ea vel alius minime comparuit, vel aliquis pro ipsis, qui contra eundem clericum, reum seu delatum, aliquid dicere, proponere, denunciare, defferre vel accusare vellent super crimine antedicto ; salvo Nicholao Mercerii

Nicolas Mercier, que nous voyons ici procureur de du Guesclin dans sa châtellenie de Fontenay-le-Comte, était en 1349 procureur et châtelain de Thibaut Chabot, seigneur de la Grève, et avait été victime de mauvais traitements de la part des agents du sire de Parthenay, qui était en guerre avec ledit Chabot. Il avait été saisi la nuit dans son lit et emmené prisonnier par Pierre de Bèze, châtelain de Vouvant, et autres soudoyers dudit château. (Voy. mandement au sénéchal de Poitou pour informer de ces excès, le 9 mars 1349, X2a 5, fol. 122). Mercier était mort avant le 11 juillet 1376 ; car à cette date, sa veuve, Jeanne Jarousseau, avait été ajournée au Parlement avec André Rouault, Jean Alonneau, Guillaume Prévot et autres, que Renaud de Vivonne, sire de Thors, appelait en garantie d’une somme de 4,000 francs d’or que lui réclamait Geoffroy Ferron, chevalier (X1a 25, fol. 232 v°). Cette dame mourut elle-même peu de temps après, ne laissant de Nicolas Mercier que deux filles, mariées, l’une à Pierre Raveau et l’autre à Jean Guyard. Sa succession donna lieu à une contestation entre ceux-ci et le même Renaud de Vivonne. Gilles Berchou, seigneur du Puiset, figure aussi parmi les héritiers de Jeanne Jarousseau, on ne dit point à quel titre. (Ajournement en reprise de procès, le 27 avril 1379, X1a 28, fol. 45.) Le 1er août suivant, Renaud de Vivonne se désista de sa poursuite, se réservant de s’en prévaloir à l’occasion. Dans les actes de cette procédure, on trouve quelques renseignements utiles à noter. Il y est dit entre autres choses que Nicolas Mercier, au moment de sa mort, redevait des comptes touchant le rachat de la forteresse de Jard. (Id. ibid., fol. 83 r° et v°.)

, procuratore domini conestabularii Francie, domini dicti loci, qui dictis diebus et loco comparuit, et nichil aliud dixit vel dicere voluit, sed tantum quod super premissis ex officio suo, quatenus tangit justiciam secularem, se, prout melius potuerat, informaverat et nichil reperierat, propter quod dictus clericus delatus esset inquietandus, molestandus vel puniendus, sed pocius quod erat bone fame et conversacionis honeste, prout et eciam fuimus per alios competenter informati, dicto clerico seu delato dictis diebus et loco et eorum quolibet, coram dicto officiali, commissario nostro, personaliter comparente et humiliter supplicante quatenus ad ejus expedicionem cause et ab arresto nostro procedere dignaremur, justicia mediante ; et dictus officialis, commissarius noster, vellet via inquisicionis contra dictum clericum delatum, instante dicto procuratore nostro et eo presente, procedere et articulos de et super premissis offerente et dare volente, dictus clericus, reus seu delatus, proponi fecit quod super premissis inquietari vel in processu poni, quacunque via ordinaria sive extraordinaria, non debebat, utpotè quia auctoritate penitenciarii domini nostri pape, si et quatenus indigebat à premissis, fuit canonice absolutus ; et ad hoc probandum dictus clericus, reus seu delatus, exhibuit coram dicto officiali, commissario nostro, in judicio et audiencia nostri officialis, et subsequenter coram nobis, in porticu portalis nostri, tria paria litterarum, videlicet duo paria venerabilis patris, fratris (sic) curie domini notri pape penitenciarii, directarum venerabili patri abbati de Niolio super Alticiam

La Gallia christiana ne donne le nom d’aucun abbé de Saint-Vincent de Nieul-sur-l’Autize entre Pierre de Verdale (mort avant 1337) et l’année 1445 (tome II, col. 1395).

, nostre diocesis, commissario ab eodem penitenciario, ut prima facie apparebat. In quibus continebatur quod dictus venerabilis penitenciarius dictum clericum à reatu laycalis homicidii et peccatis suis remittebat absolutum, et committebat venerabili abbati penitenciam injungendam ipsi delato, quam penitenciam injunxerat dictus venerabilis abbas, juxta traditam sibi formam, prout in suis litteris, suo sigillo sigillatis, litteris dicti penitenciarii affixis, plenius continetur. Quare dicebat dictus Nicholaus, clericus, reus seu delatus, quod contra eum ad aliquam inquestam vel processum aliàs facere minime debeamus, paratus tamen se, siexpedierit, canonicè purgaturum. Qua purgacione canonica sibi indicta et per eum solempniter facta, nos vero episcopus predictus, attendentes dicti clerici bonam famam, dictum clericum à facto et fama reatus homicidii predicti, quantum possumus et nobis ex alto concessum est, absolvimus sentencialiter in hiis scriptis, ipsum clericum à carcere et arresto nostris liberamus et expedimus, et abire perpetuo permittimus, eidem procuratori et cuicunque alii perpetuum silencium imponentes, et eum in suam pristinam bonam famam reducentes, cum eo, quantum possumus, misericorditer dispensando.

In quorum testimonium, nos Guido, episcopus predictus, per Guillelmum Boudaudi, presbyterum, publicum auctoritate imperiali notarium, publicari et in formam publicam redigi, scribi et subscribi mandavimus et fecimus sigilli nostri appensione muniri. Datum et actum apud Malleacum, in locis predictis, sub anno Domini millesimo ccc° lxx° quinto, tercia die mensis octobris, indicione xiiii, pontificatus sanctissimi in Christo patris ac domini Gregorii, divina providencia pape undecimi, anno quinto. Presentibus venerande religionis viris, domino Johanne Fabri, archidiacono ecclesie Lucionensi, domino Guillermo Beliardi, Johanne Fortini

Un Jean Fortin était en 1398 chapelain et aumônier de Jean de France duc de Berry, comte de Poitou. (Comptes de l’hôtel de ce prince, KK. 253, fol. 13 v°.)

, presbyteris, de Fenioux et Sancte Eugenie ecclesiarum rectoribus, Gauffrido Rousselli et Simone de Niorto, clericis, curie officialis nostri notariis juratis, Malleacensis diocesis, et pluribus aliis testibus, ad premissa specialiter vocatis et rogatis.

Et ego Guillermus Boudaudi, presbyter, Lucionensi diocesi oriundus, publicus auctoritate imperiali notarius predictus, comparicioni, supplicacioni, litterarum exhibicioni, supersedicioni et cessacioni, ab arresto abire permissione preceptoque, et omnibus aliis et singulis premissis, dum per dictum reverendum patrem et dominum officialem recitarentur, agerentur et fierent, una cum prenominatis testibus, presens fui et ea vidi

Le texte porte par erreur ubi.

et audivi, et de mandato dicti reverendi patris et domini officialis, in hanc publicam formam redegi, manuque mea propria scripsi et hic me subscripsi, signoque meo solito signavi, requisitus per dictum Nicolaum Audoynelli, clericum, reum, specialiter et rogatus.

Nos autem litteras suprascriptas ac omnia et singula in ipsis litteris contenta, in quantum rite et juste facta fuerint et in rem transierint judicatam, volumus, laudamus, approbamus, ratifficamus et, de gracia speciali ac auctoritate nostra regia, confirmamus. Dantes in mandatis, tenore presencium, universis justiciariis regni nostri et eorum locatenentibus, presentibus et futuris, et eorum cuilibet, prout ad quemlibet eorum pertinuerit, quatinus prefatum Nicolaum Audoynelli in prescriptis litteris nominatum, de omnibus et singulis in eisdem litteris contentis uti et gaudere pacifice permittant, nil in contrarium attemptando nec attemptari permittendo. Quod ut firmum et stabile imperpetuum permaneat, presentibus litteris nostrum fecimus apponi sigillum. Salvo in omnibus jure nostro et quolibet alieno. Datum Parisius, mense aprilis anno Domini millesimo ccc° septuagesimo nono, et [regni nostri] decimo sexto.

In requestis hospicii. P. Houdoyer. — F. de Metis.

DCXXX Juin 1379

Rémission accordée à Jean Breteau qui, dans une rixe, avait brisé la jambe de Jean Laisné, du Marchais. Celui-ci, s’étant mal soigné, fut atteint du mal Saint-Maixent et en mourut.

AN JJ. 115, n° 62, fol. 28 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 122-124

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, nous avoir esté exposé de la partie des amis charnelx de Jehan Breteau, que comme depuis deux mois en ça Symon de la Garde et Jehan Lainsné, du Marchais, le dit Breteau estant en leur compaignie, eussent devisé et accordé ensemble que il joueroient aus billes pour le vin l’un contre l’autre, et au commancement du jeu, le dit Jehan Lainsné dist au dit Symon qu’il meist gaige pour le jeu et pour ce qu’il perdroit, le quel Symon dist que non feroit, et le dit Jehan Lainsné dist et respondi que si feroit, et sur ce murent pluseurs paroles, tant que le dit Symon appella le dit Jehan Lainsné villain, le quel Jehan Lainsné dist que il n’estoit pas villain et qu’il estoit plus gentil homme que le dit Symon ; et lors le dit Jehan Breteau dist à ycellui Jehan que il mentoit et le fery d’un baston qu’il trouva en son chemin, parmi la jambe, non pas en entencion de le vouloir griefment blecer, toutesvoies sanc en yssy et dient aucuns que la jambe estoit brisée. Et tantost dist le dit Breteau au dit Jehan Lainsné qu’il se feist appareillier, et il paieroit voulentiers les mires et coutast xx frans. Et ce fait, vint un mire ou cirurgien qui appareilla et lia la jambe du dit Jehan Lainsné, mais assez tost après ycellui Lainsné la se fist deslier. Et depuis par faute de bon gouvernement ou autrement, par la voulenté de Dieu, vint en la dicte jambe une maladie que l’en appelle le mal Saint Messent, et d’icelle maladie et ferure le dit Jehan Lainsné jut au lit malade environ xv. jours, et puis est alez de vie à trespassement ; et à sa derreniere fin pardonna le dit fait au dit Jehan Breteau. Le quel Jehan Breteau, doubtanz rigueur de justice, s’est absentez du païs. Si nous ont humblement fait supplier les diz exposans que, consideré que paravant le dit fait les diz Jehan Breteau et Jehan Lainsné estoient bien amis et affins ensemble, et n’avoit onques eu le dit Breteau hayne, rancune ou malivolence au dit Lainsné, consideré aussi que par longtemps le dit Jehan Breteau nous a servi ou fait de noz guerres, et a encores entencion de faire, ès quelles il a esté prins prisonnier par deux foiz et rançonné à très grans rançons, dont il a esté moult grandement dommaigiez, et aussi que il ne fu onques actains ne convaincuz d’aucun autre crime, mais a esté homme de bonne vie, renommée et honneste conversacion, nous sur ce vueillions eslargir nostre grace. Pour quoy nous, ces choses considerées, au dit Jehan Breteau, ou cas dessuz dit, avons remis, quictié et pardonné, remettons, quictons et pardonnons, de nostre grace especial et auctorité royal, tout le fait dessuz dit, avec toute peinne et amende corporelle, criminelle et civile, en quoy il puet estre encouru envers nous, pour cause et occasion du fait dessuz dit, satisfait à partie civilement tant seulement ; en imposant sur ce silence perpetuelle à nostre procureur. Si donnons en mandement par ces presentes à nostre bailli des ressors et Exempcions de Touraine, d’Anjou, du Mainne et de Poitou, et à touz les autres justiciers de nostre royaume, presens et avenir, et à leurs lieux tenans, que de nostre presente grace et remission facent, seuffrent et lessent le dit Jehan Breteau joir et user paisiblement, sanz les empeschier au contraire. Et se son corps ou aucuns de ses biens sont pour ce prins, saisiz ou arrestez, si les lui mettent à plainne delivrance. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, l’an de grace m. ccc. lxxxix, et le xvie de nostre regne, ou mois de juing.

Par le conseil estant à Paris. Lucas. — Forges.

DCXXXI 10 août 1379

Lettres d’anoblissement octroyées à Denis Gillier.

AN JJ. 115, n° 282, fol. 139 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 124-126

Karolus, etc. Regalis providencia digne pensans merita fidelium subditorum, illos libenter extollit honoribus et prosequitur favoribus graciosis, qui morum honestate et aliarum virtutum meritis decorantur, ut et ipsi commodum et honorem inde se reportasse letentur et ipsorum exemplo ceteri similibus se conformant. Notum itaque facimus universis, presentibus et futuris, quod, cum Dyonisius Gilier

Denis Gillier a été l’objet d’une notice développée, ci-dessus, p. 16.

, qui ex innobilibus traxisse dicitur originem, hujusmodi moribus et virtutibus insignitur, prout plurium fide dignorum attestatur relacio, ipsum Dyonisium cum tota ejus prole et ejus posteritate utriusque sexus, de legitimo matrimonio nata et nascitura, de speciali gracia, certa sciencia et auctoritate nostra regia, et potestatis plenitudine, nobilitamus et nobiles efficimus per presentes. Volentes et decernentes ut ipse, cum dicta sua prole et posteritate, nobiles nuncupentur et pro nobilibus reputentur et habeantur ubilibet, in judiciis et extra, universisque privilegiis, honoribus et prerogativis quibus utuntur ceteri regni nostri nobiles, ipsi gaudeant et utantur. Ulterius concedentes eidem ut ipse suaque proles et posteritas masculina, de legitimo matrimonio procreata et procreanda, valeant, quando sibi placuerit, milicie cingulo decorari, feuda insuper et retrofeuda nobilia ubicunque in regno nostro acquirere, et acquisita tenere et possidere libere, prout ceteri nobiles regni nostri consueverunt et possunt facere, et proinde ac si ab inicio nobilis et ortus à nobilibus extitisset, et absque eo quod pro acquisitis et acquirendis hujusmodi seu pro nostra presenti concessione quamcunque financiam nobis solvere teneatur. Nos etenim dictam financiam, ad quemcunque valorem dici aut reputari posset ascendere debere, eidem Dyonisio, certis ducti consideracionibus, remisimus et remittimus de nostra gracia predicta, per presentes. Quapropter dilectis et fidelibus gentibus nostris compotorum nostrorum Parisius et consiliariis nostris super facto nostri domanii, et thesaurariis Parisius, universis insuper justiciariis nostri regni, presentibus et futuris, vel eorum loca tenentibus, et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, tenore presencium precipimus et mandamus quatinus dictum Dyonisium, suamque prolem et posteritatem predictam, et eorum quemlibet, nostra presenti gracia uti et gaudere pacifice faciant et permittant, ipsos aut eorum aliquem in contrarium non turbantes, constitucione, usu, stilo, consuetudine vel observancia, in contrarium editis vel edendis, non obstantibus quibuscunque. Quod ut firmum et stabile perseveret, sigillum nostrum presentibus litteris est appensum. Salvo in aliis jure nostro et in omnibus alieno. Datum apud Montemargi, xm die augusti anno Domini millesimo ccc° septuagesimo nono, et regni nostri sexto decimo.

Per regem. Yvo.

DCXXXII 16 octobre 1379

Amortissement en faveur de Guy de la Trémoïlle, premier chambellan du duc de Bourgogne, de deux cents livres de rente destinées à la dotation de plusieurs chapelles.

AN JJ. 115, n° 304, fol. 148 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 126-128

Karolus, etc. Inter curas et sollicitudines que nobis ex ministerio regalis dignitatis incombunt assidue cogitare, nos convenit ut ad id summo opere nostre consideracionis versetur acies, per quod possimus Altissimo complacere quodque grata nobis ac nostris exhibentibus obsequia, juxta meritorum ipsorum exigenciam, nos habeamus pretendere liberales. Notum igitur facimus, presentibus pariter et futuris, quod, audita supplicacione dilecti et fidelis militis nostri Guidonis de Tremolia

Guy VI de la Trémoïlle, seigneur de Château-Guillaume, etc., fils aîné de Guy V, seigneur de Vazois et de Lussac-les-Églises, et de Radegonde Guenant, conseiller et chambellan du roi, grand chambellan de Bourgogne, garde de l’oriflamme de France (1382), assista à la bataille de Nicopolis et fut préservé du massacre. Retenu prisonnier pendant près de deux ans, il tomba malade à Rhodes, en revenant en France, et y mourut en 1398. (Voy. t. III de ce recueil, p. 374 note, et t. IV, p. 84 note.) Le 15 octobre 1376, il avait racheté toute la terre et seigneurie de la Trémouille, mouvante de la baronnie d’Angle, de Louis de Saint-Julien, chevalier, seigneur de Luzuret, agissant tant pour lui que pour son neveu, Jacques de Saint-Julien, moyennant le prix de cinq cents deniers d’or, valant vingt sous tournois la dite pièce ; la vente scellée du sceau établi aux contrats à Montmorillon, pour le duc de Berry et d’Auvergne, comte de Poitou. (Acte recueilli par dom Fonteneau, t. XXVI, p. 297, dans les archives du château de Thouars.) Guy de la Trémoïlle épousa, vers 1382, Marie de Sully, baronne de Sully, Craon, etc., dame de Sainte-Hermine, Prahecq, Luçon, etc., veuve de Charles de Berry, comte de Montpensier, prince du sang, dont il eut, entre autres enfants, le fameux Georges de la Trémoïlle, favori de Charles VII.

, primi cambellani carissimi germani nostri ducis Burgondie, continente quod ipse ducentas libras turonensium annui et perpetui redditus in fundacione et dotacione cappellaniarum vel alias in devotos et pios usus, insimul vel divisim, prout sibi melius expedire videbitur, convertendas, pro sue et parentum ac benefactorum suorum animarum remedio et salute, acquirere proponit, dummodo ad hoc noster consensus interveniat dictosque redditus admortisare dignemur. Nos laudabile ipsius Guidonis propositum in Domino commendantes, considerantesque grata et laudabilia nobis et dicto germano nostro per ipsum exhibita, ac in guerris nostris et aliàs multis modis impensa servicia, et ut suffragiis missarum et aliarum devotarum oracionum que fient in locis quibus dicti redditus fuerint assignati, nos, predecessores ac successores nostros participes efficiamur, eidem Guidoni quod ipsas ducentas libras turonensium anno quolibet redduales, ubicunque in regno nostro sibi placuerit, extra tamen feodum et justiciam, acquirere possit et valeat, ac in fundacione seu dotacione capellaniarum aut in usus alios distribuere et conferre concessimus, ac ex certa scientia, de speciali gratia et plenitudine potestatis regie, concedimus. Volentes et ulterius annuentes quod persone ecclesiastice, in quas prefatus Guido dictos redditus usque ad summam predictam, in toto vel in parte, transtulerit aut concesserit, eosdem ipsos tanquam admortisatos habeant, teneant et possideant, perpetuis temporibus, pacifice et quiete, absque eo quod ipsos redditus vendere, alienare, aut extra manum suam ponere compellantur, ac ex his ipse Guido aut dicte persone ecclesiastice, quibus dictos redditus dederit, insimul vel per partes, financiam aliquam nobis aut nostris successoribus solvere de cetero teneantur. Quam quidem financiam prefato Guidoni, consideracione dictorum serviciorum ac contemplacione predicti germani nostri, quittamus, remittimus et damus ex liberiori dono gracie liberaliter et omnino. Dilectis et fidelibus consiliariis nostris super facto domanii nostri et thesaurariis Parisius, ceterisque justiciariis et officiariis nostris, et eorum locatenentibus, ac cuilibet ipsorum, presentibus et futuris, dantes, harum serie, in mandatis quatinus prefatum Guidonem, ac illum vel illos, in quem seu quos predicti redditus fuerunt translati, nostra presenti gratia uti et gaudere pacifice faciant et permittant, ac contra tenorem presentium nullatenus inquietent seu molestent, aut inquietari seu molestari in futurum aliqualiter paciantur. Et ut premissa robur perpetue stabilitatis obtineant, sigillum nostrum hiis presentibus mandavimus apponi. Salvo in aliis jure nostro et in omnibus quolibet alieno. Datum in Monte Argi, decima sexta die mensis octobris anno Domini millesimo ccc° septuagesimo nono, et regni nostri sexto decimo.

Per regem. J. Tabary.

DCXXXIII Février 1380

Rémission accordée à Guillaume Eraut, qui avait tué en loyal combat Martin Gragaut, le séducteur de sa femme.

AN JJ. 116, n° 62, fol. 35 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 128-130

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Guillaume Eraut, contenant que comme, environ la Penthecouste darrainement passé, il eust trouvé Martin Gragaut nu à nu couchié avec sa femme et se feust prins à eulx, mais par les gens qui y survindrent fu si empeschié, qu’il n’en pot prendre vengence, et en ce moment le dit Martin emmena la dicte femme, mais assez tost après elle retourna avec le dit suppliant. Après les queles choses, le dit Martin accumulant mal sur mal, vint de nuit assaillir le dit suppliant en son hostel, et en après ravy et emmena derechief la dicte femme et emporta pluseurs biens du dit suppliant. Et encore qui pis est, et de ce non contens, pour ce que la dicte femme lui fu ostée et menée avec sa mere, pour la garder, et que le dit suppliant l’avoit fait adjourner en cas d’asseurement, et impetré contre lui lettres de sauvegarde, le dit Martin fist pluseurs aguez sur le dit suppliant pour le tuer et mettre à mort, et finablement tant l’espia et aguetta que, un jour entre les autres, environ la Toussains darrainement passée, ainsi que le dit suppliant cuidoit aler en sa marchandise, ycellui Martin, garni et premuni d’espée et d’un grant baston à son col, comme provocant et aggresseur, envay le dit suppliant et tant se combatirent que finablement le dit suppliant, à l’aide de son bon droit et sa juste et loyal defense, desconfy le dit Martin et le navra, dont mort s’est ensuye. Et pour ce le dit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absentez du païs ; requerant que, eue consideracion aux choses dessus dictes et à la grant mauvaistié du dit Martin, qui estoit homme marié et compaignon du dit suppliant, au jour et heure que premierement lui fortrait sa dicte femme, et se confioit lors de lui le dit suppliant, comme s’il fust son frere ou son cousin, nous lui vueillons sur ce nostre grace impartir. Pour ce est il que nous, de grace especial, ou cas dessus dit, et satisfacion faicte à partie civilement, quittons, remettons et pardonnons le fait dessus dit, appeaulx et ban sur ce faiz, s’aucuns en y a, avec toute peine et amende corporele, criminele et civile, que pour ce il puet avoir encouru envers nous. Et le restituons à sa bonne fame et renommée, se pour ce estoit aucunement diminuée, au païs et à ses biens non confisquez. Si donnons en mandement au bailli des Exempcions de Touraine, de Poitou, d’Anjou et du Maine, et à touz noz autres justiciers, presens et avenir, à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulz, si comme à lui appartient, que de nostre presente grace et remission le facent, sueffrent et laissent joir et user paisiblement, senz le perturber, molester ou empeschier, ne souffrir estre perturbé, molesté ou empeschié aucunement contre la teneur d’icelle. Et en ampliant nostre dicte grace, nous plaist et voulons que nostre très chier frere le duc de Berry et le sire de Chauvigny

Guy de Chauvigny, vicomte de Brosse, avait épousé, le 30 janvier 1374, Jeanne de Beaufort, fille de Guillaume vicomte de Turenne. (Voy. Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, t. I, p. 635.)

, soubz qui jurisdicion le dit fait est avenu, lui facent sur ce tele grace qu’il leur plaira, senz prejudice à eulx ne à leurs jurisdicions, ores ou pour le temps avenir. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touzjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, l’an de grace mil ccc. soixante et dix neuf, et de nostre regne le xvie, ou moys de fevrier.

Es requestes de l’ostel. P. Briet. — A. Boistel.

DCXXXIV Avril 1380 (après le 8)

Lettres de rémission accordées à Gervais d’Izé et à ses deux fils, Guillaume et Huguet d’Izé, écuyers, familiers du sire de Parthenay, pour le meurtre de Jean d’Aiglix, commis à la suite d’une rixe, où celui-ci était soutenu des trois frères Louis, Renaud et Aimery de Marconnay.

AN JJ. 116, n° 208, fol. 122 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 130-137

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que, oye l’umble supplicacion des amis charnelz de Guillaume et Huguet d’Izé, escuiers du païs de Poictou, enfans de Gervais d’Izé

Une branche de la famille d’Izé ou d’Izay, originaire du Maine (cf. Izé, Mayenne), et possessionnée en Anjou, se fixa en Poitou au xive siècle. Nous possédons un assez grand nombre de renseignements sur les quatre personnages de cette branche nommés dans la présente rémission, le père et ses trois fils. Gervais est appelé dans quelques actes Jamet. Nous avons trouvé son nom mentionné pour la première fois dans un acte du 22 janvier 1358 n.s., portant ajournement au Parlement, à la requête de Jean de Vivonne, pour excès non spécifiés, commis par Jean Larchevêque, sire de Parthenay, et plusieurs de ses officiers et familiers. Parmi ces derniers figurent « Gervais d’Izy, le jeune », et son fils Jean. (Arch. nat., X2a 6, fol. 382, 385.) Lors de la rupture du traité de Brétigny, il resta, comme les autres nobles du pays, au service du prince de Galles, si bien que les héritages qu’il possédait encore en Anjou et au Maine furent confisqués par Charles V. Par lettres d’octobre 1369, son fief de Monnay et ses métairies de la Haulterie, du Perreux et du Petit-Tiron, situés dans le comté du Maine, furent donnés à Jean Turpin, chevalier, seigneur de Varennes, maître des eaux et forêts du roi, second fils de Guy IV Turpin de Crissé et d’Eustache de Bauçay (JJ. 100, n° 119, fol. 39). Nous avons vu ci-dessus (p. 12 note) que Gervais d’Izé fut poursuivi comme complice du sire de Parthenay par Pierre de Montfaucon, qui les accusait d’avoir envahi à main armée son château de Saint-Mesmin et commis des dévastations sur ses terres ; et que Hugues d’Izé était défendeur dans un procès criminel au Parlement, le 12 février 1378, avec Guy d’Argenton, Robert Eschalard et autres, contre Louis de Beaumont, seigneur de Bressuire. (T. IV, p. 11 n.)

Quelques années plus tard, Gervais et ses deux fils Guillaume et Huguet soutenaient devant le gouverneur de la Rochelle, aux Grands Jours du duc de Berry, puis au Parlement, contre le sire de Parthenay, deux affaires auxquelles mit fin une transaction, enregistrée au Parlement, le 30 janvier 1385 n.s. Les sieurs d’Izé réclamaient à Guillaume Larchevêque 2,700 pièces d’or d’une part, et 400 pièces d’or, de l’autre, qu’il avait reconnu leur devoir et s’était engagé à leur payer par deux obligations souscrites de son seing et scellées de son sceau. Au moyen de l’accord, ils déclarent renoncer à poursuivre leur créance et en déchargent le sire de Parthenay et ses successeurs, promettant de lui rendre ou de détruire en sa présence les deux lettres obligatoires. En retour, le sire de Parthenay les quitte, décharge et déclare absous envers lui « de toutes et chacunes actions, peticions et demandes réelles, personneles, civiles et crimineles », qu’il poursuivait contre eux, le 8 novembre 1382, et pour le temps antérieur devant son sénéchal de Parthenay, aux Grands Jours de Poitiers et au Parlement. De plus, il reconnaissait que la sergenterie d’« Autuing » (forêt d’Autun ou d’Autin, commune de Thénezay, Deux-Sèvres), litigieuse entre Guy de Rochefort et Gervais d’Izé, devait appartenir à ce dernier et lui demeurerait acquise, à lui et à ses héritiers, ainsi que ses prédécesseurs la tenaient du sire de Parthenay. (Arch. nat., X1c 47.)

Guillaume d’Izé était capitaine de Vouvant en 1380. Il porte ce titre dans un accord, dont voici le sommaire. Le prieur et les religieux du Bois-d’Alonne, de l’ordre de Grandmont, avaient fait ajourner devant le bailli de Saint-Pierre-le-Moustier, commis par des lettres de sauvegarde du roi à la défense des religieux de cet ordre, Jean d’Izé, Pierre Charron, Guillaume d’Izé, capitaine de Vouvant, et Pierre Jaquant, pour enfreinte à leur sauvegarde. Les deux premiers avaient « batu et vilené un homme subgiez et justiçable » du prieuré, et les autres « pris certains biens en la terre et sur les hommes des diz religieux ». L’affaire vint en appel au Parlement, puis les parties, d’un commun accord, décidérent de s’en rapporter au sire de Parthenay, pour le jugement de leur débat. (Arrêt d’entérinement du 31 mai 1380, X1c 40.) Huguet d’Izé était écuyer tranchant du duc de Berry en 1398. (KK. 253, fol. 91.)

Le Jean d’Izé, dont il vient d’être question, semble être un autre fils de Gervais. Il est mentionné sur un acte du 5 juillet 1392, analysé dans le Cartulaire de l’abbaye des Châtelliers (édit. L. Duval, p. 150). En 1397, il était panetier du duc de Berry et figure en cette qualité à plusieurs reprises sur les registres de comptes de l’hôtel de ce prince. Voici un extrait qui le concerne : « A Jehan d’Izé, panetier de mond. seigneur, qui estoit malade, auquel mond. seigneur a donné pour faire ses fraiz et despens de s’en aler de Paris en son hostel en Poitou, et pour s’y aidier à relever de lad. maladie, si comme il appert par mandement de mond. seigneur, donné le 1er jour de mars mil ccc.iiiixxxvii, et quictance dud. Jehan, faicte le samedi iie de mars,… xxviii l. ii. s. vi d.t. » (KK. 253, fol. 16 v°.)

Enfin Pierre, nommé quelques lignes plus bas, autre fils de Gervais d’Izé, rendit aveu au duc de Berry, le 3 février 1403, pour son hébergement de la Coutancière près de Saivre, tenu du comte de Poitou, à cause du château de Saint-Maixent. Il y est dit « valet, fils de feu Jamet d’Izé ». (Copie du Grand-Gauthier, R1* 2172, p. 778.) — Dans des aveux de fiefs relevant de Parthenay, rendus en 1428, on trouve encore les noms de Jacques d’Izé et de Mathurine d’Izé. (R1* 190, fol. 227 v°, 277.)

, contenant que, comme pour ce que le dit Gervais d’Izé n’avoit voulu delaissier à Jehan Guy

Peut-être ce Jean Guy était-il parent d’Imbert Guy, chevalier, et de Thomasse de Maillé, dont il a été question dans notre IIIe volume, p. 238. Son nom se retrouve au commencement du xve siècle. Cf. l’adjudication aux enchères du quart de la dîme de Chaumont qui appartenait à Jean de la Mollière, et qu’il possédait par indivis avec les seigneurs de la Suse et de Cheneché, faite à Jean Guy, pour le prix de trente livres et à la charge de la foi et hommage envers le seigneur de Rochefort. (Archives de la ville de Poitiers, H. XLVI, p. 137.)

, escuier du païs d’Anjou, certains heritages, terres et possessions assis en Anjou, que le dit Gervais avoit et tenoit dès lonc temps à bon et juste tiltre, et avoient esté, si comme l’en disoit, à feu Jehan Guy et à sa mere, des quelx le dit Gervais avoit joy x. ans paisiblement ou environ, du quel defunct le dict Jehan Guy estoit frere, ycellui Jehan Guy, feu Jehan d’Aiglix

On trouve un Jean d’Aiglix, ou mieux des Glix, seigneur de Mazeuil, en 1327, 1329, et Jeanne des Glix, femme de Gauvain Chenin, en 1350. (E. de Fouchier, La baronnie de Mirebeau, p. 213.)

, ou temps qu’il vivoit, Loys, Regnaut et Aimery de Marconnay

La généalogie de cette famille considérable du Mirebalais est trop embrouillée encore à cette époque, pour que l’on puisse dire avec certitude à quelle branche ces trois frères doivent être rattachés. On rencontre dans les textes du xive siècle un grand nombre de personnages du nom de Marconnay dont la filiation est inconnue. En ce qui touche Louis, Renaud et Aimery, elle peut être établie à l’aide de trois ou quatre actes mentionnés par MM. Beauchet-Filleau. Ils eurent pour père Guicheux de Marconnay, tué à la bataille de Poitiers et inhumé aux Cordeliers de Poitiers, qui lui-même était frère de Philippe de Marconnay, sire de Mornay. Louis, qui semble être l’aîné, paraît dans un aveu rendu au seigneur de Mirebeau, le 4 mai 1381, par Geoffroy de Bouderon pour son hébergement de Sauves. Il était mort avant le 31 mai 1402, époque du partage de sa succession entre ses enfants : Geoffroy, Catherine, mariée alors à Pierre de Mousson, chevalier, et Jeanne. Renaud de Marconnay, le second fils de Guicheux, donna quittance, le 22 novembre 1375, de ses gages et de ceux d’un chevalier et de neuf écuyers de sa compagnie servant à la guerre en Saintonge, Limousin et Périgord, sous les ordres de Louis de Sancerre, maréchal de France, dont il avait fait montre à Saint-Junien, le 1er novembre précédent. Il la scella de son sceau en cire rouge, portant trois pals de vair, chargés d’un lambel à trois pendants. Il figure comme écuyer dans la montre que Renaud de Vivonne, seigneur de Thors, fit de sa compagnie à Niort, le 16 avril 1385. Un titre de 1402 constate qu’il était fils de Guicheux et frère d’Aimery. Ce dernier fit, en 1362, un accord avec Guillaume de Couhé, pour la succession de son oncle Philippe, sire de Mornay, et transigea, la même année, pour la succession d’Estelle de Marconnay. Aimery figure encore dans une montre d’Hélyon de Naillac, chevalier bachelier, du 17 octobre 1386. (Dict. des familles de l’anc. Poitou, t. II, p. 354.) Le Grand-Gauthier contient aussi un aveu rendu à Jean de France, comte de Poitou, le 12 avril 1404, par Aimery de Marconnay, de son hébergement de Jaunay, en la paroisse de Cherveux, et de plusieurs autres petits fiefs et droits féodaux. (Copie du xviiie s. aux Arch. nat., R1* 2172, p. 791-805.) Voy. aussi sur la famille et la seigneurie de Marconnay, E. de Fouchier, La baronnie de Mirebeau, etc., 1877, in-8, p. 197-203.

, freres, cousins et parens du dit Jehan Guy, eussent conceu contre raison très grant hayne à l’encontre du dit Gervais d’Izé et ses enfanz, et par pluseurs foys eust dit ou fait dire le dit d’Aiglix au dit Gervais et à ses enfans, que ilz delaissassent les diz heritages, terres et possessions au dit Guy, ou autrement ilz en seroient dommagiez en corps et en biens. Et en mettant à effect leur mauvais propos, yceulx de Marconnay à certain jour ensuivant coururent sus, les espées traictes, contre Pierre d’Izé, frere des diz Guillaume et Huguet, qui aucune chose ne leur meffaisoit, et convint que pour doubte de mort il se muçast en une cave, où les diz de Marconnay vindrent et pousserent des glaives contre lui. Et pour ce que par voie de justice le dit Pierre les poursuy sur les diz excès, par devant nostre bailli des Exempcions de Poitou, à son siege de Luçon, les diz de Marconnay, Jehan d’Aiglix et autres leurs amis furent plus indignez que devant contre le dit Gervais d’Izé et ses diz enfans, et en hayne d’eulx batirent et vilenerent aucuns de leurs serviteurs et moitoiers. Et oultre, le dit Jehan Guy mist en cause le dit Gervais, sa femme et le dit Pierre d’Izé, leur filz, qui sont demourans en Poitou, par devant les juges de Saumur pour nostre très chier et très amé frere le duc d’Anjou, où ilz procederent par aucun temps pour raison des choses dessus dictes, pendenz les quelx procès les dessus nommez menaçoient touzjours les diz pere et enfanz de leur porter dommage et injure en corps et en biens. Et à certain jour nagaires passé, les diz Gervais d’Izé, Guillaume et Huguet, ses enfans, estans à Partennay, où ilz demeurent, ainsi comme les diz Guillaume et Huguet qui estoient armez de cotes de fer pour la seurté, tuicion et defense de leurs corps, s’en vouloient aler par le commandement à eulx sur ce fait par nostre amé et feal le sire de Partennay, avec Pierre Berjaut

Pierre Berjaut nous est connu d’autre part pour un démêlé qu’il eut, du temps de l’occupation anglaise, avec Jean Boschet. Celui-ci lui était redevable d’une rente annuelle de sept setiers de froment, à la mesure de Latillé, et lui devait un arriéré assez considérable. Berjaut obtint du sénéchal de Poitou pour le prince de Galles une commission en vertu de laquelle l’assiette de ladite rente serait faite à l’avenir sur le lieu de « Ribouart » (Riboire, cne de Béruges, Vienne) et ses appartenances. Boschet fit opposition, d’où il résulta un procès devant ledit sénéchal, qui ordonna, en attendant le jugement, que la terre de Riboire serait tenue et administrée sous la main de justice. La cause fut ensuite renvoyée devant la cour des Grands Jours du prince de Galles. Après la mort tragique de Jean Boschet, août 1370 (voy. le vol. précédent, p. xxxviii, 120 et s., 199, 200), Maurice Boschet, son neveu et héritier, fit ajourner Pierre Berjaut devant le bailli des Exemptions de Poitou, qui donna gain de cause à ce dernier. Le perdant fit appel au Parlement, si bien que le procès dura quatorze ou quinze ans. Finalement, Boschet se désista purement et simplement de son opposition, consentit que l’assiette de la rente fût faite à Riboire et promit de payer à Berjaut les dépens que Jean Oujart, conseiller du roi, et Jean Blanchardin jugeraient convenables. Cet accord fut entériné au Parlement le 21 août 1383. (Arch. nat., X1c 47.) D’après M. Ledain, Pierre Berjaut fut sénéchal de Bressuire de 1382 à 1389. (Hist. de la ville et baronnie de Bressuire, in-8°, 1866, p. 389.)

, seneschal du dit lieu, pour lui tenir compaignie, pour doubte des ennemis qui courent sur le païs chascun jour, à aler juques à la ville de Vouvent, où il a de Partenay viii. lieues, pour les besoignes du dit seigneur de Partennay, on vint dire aux diz Huguet et Guillaume que entre le dit Gervais, leur pere, d’une part, et le dit d’Aiglix, Jehan Guy, Loys de Marconnay et pluseurs leurs complices, d’autre, avoit eu certaines paroles injurieuses, et que les diz d’Aiglix, Loys de Marconnay et autres avoient fait ou dit vilenie à leur dit pere et le vouloient tuer, et avoient procedé à fait en tirant leurs cousteaulx. Pour la quele cause les diz Guillaume et Huguet, meuz d’affection naturele, alerent au lieu assez près et en la dicte ville où l’en leur avoit dit que la dicte noise estoit, en quel lieu ilz trouverent les diz d’Aiglix et de Marconnay et autres dessus diz assemblez, et ne virent point leur dit pere, dont ilz furent moult courrouciez et esmeuz, cuidanz que les dessus nommez l’eussent tué ou [à] lui fait grans injures. Et quant le dit Huguet les vit ainsi assemblez, il tira un badelaire que il avoit acoustumé de porter, en disant au dit d’Aiglix : « Tu as cuidié tuer ou vilener mon pere ! » Auquel le dit d’Aiglix respondi : « Tu dis voir, si feray je bien toy. » Et tirerent les diz d’Aiglix et Marconnay leurs cousteaux, et aussi tira son coustel le dit Guillaume, frere du dit Huguet. Auquel Huguet le dit de Marconnay dist moult arrogamment que il le tueroit tout froit, s’il faisoit semblant de riens faire. Et adonc commencierent paroles rioteuses entre eulx, et des paroles procederent à fait les diz Huguet et d’Aiglix l’un contre l’autre, et frapperent l’un l’autre, et ne scet on de certain le quel premier. Et entre les autres cops, frappa le dit d’Aiglix d’un coutel ou badelaire le dit Huguet sur la teste, telement que du cop il trencha un chappel de bievre

Bièvre, sorte de loutre ou de castor.

qu’il avoit sur sa teste et le bleça en l’oreille et en la teste, et aussi le bleça en l’une de ses mains très enormement. Et le dit Huguet frappa aussi un cop ou deux de son dit badelaire le dit Jehan d’Aiglix sur la teste, et aussi le bleça en un de ses braz, et atant se departirent les diz Huguet et Guillaume, le quel Guillaume fut presens à ce faire. Et aussi y survint le dit Gervais, leur pere ; mais il, ne le dit Guillaume, ne frapperent point ledit d’Aiglix, en la personne du quel mort s’ensuy ii. ou iii. jours après. Pour doubte duquel fait, les diz pere et enfans sont en voie d’eulx absenter du païs et delaissier leurs femmes et enfans, se sur ce ne leur est pourveu de nostre grace. Et pour ce, nous ont requis leurs diz amis que, consideré ce que dit est et que ilz sont et ont esté touzjours de bonne renommée, et aussi que le dit fait est avenu par chaleur, et furent les diz enfanz meuz d’affection naturele d’aler veoir en quel estat estoit leur dit pere, et n’y alerent fors pour entencion de lui secourir, si comme ilz dient, nous leur vueillons sur ce estre piteables et misericors. Nous, inclinanz à leur supplicacion, considerans les choses dessus dictes, et pour contemplacion du dit sire de Partenay, du quel ilz sont familiers, à yceulx Huguet et Guillaume et à leur dit pere, pour tant que mestier lui est, le fait dessus dit avec toute peine, offense et amende corporele, criminele et civile, en quoy ilz pourroient estre encouruz pour occasion des choses dessus dictes, leur avons remis, quictié et pardonné, et par ces presentes, de grace especial et auctorité royal, remettons, quictons et pardonnons, et eulx et chascun d’eulx restituons et remettons à leur bonne fame et renommée, au païs et à leurs biens. Et quant à ce nous imposons silence perpetuel à nostre procureur et à touz autres à qui il appartient, satisfacion faicte à partie civilement tant seulement. Si donnons en mandement par ces presentes au bailli des Exempcions de Touraine, d’Anjou, du Maenne et de Poitou, et à touz noz autres justiciers et officiers, presens et avenir, ou à leurs lieux tenans, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que les diz Hugues et Guillaume et leur dit pere facent, sueffrent et laissent joir et user paisiblement de nostre presente grace et remission, et contre la teneur d’icelle ne les molestent, contraignent ou empeschent, ou sueffrent estre molestez, contrains ou empeschiez en corps ou en biens, de present ou pour le temps avenir, en aucune maniere. Et que ce soit ferme chose et estable à touzjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou moys d’avril l’an de grace mil ccc. iiiixx, et le XVIIe de nostre regne.

Par le roy, à la relacion du conseil. Mauloue.

DCXXXV Avril 1380 (après le 8)

Rémission en faveur de Jean Delise, de la châtellenie de Montreuil-Bonnin, qui avait tué dans une rixe Guillaume Pètre, celui-ci l’ayant outragé et provoqué.

AN JJ. 116, n° 216, fol. 128 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 137-138

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Jehan Delise, de la chastellenie de Monstereul Bonnin, povre et miserable personne, contenant que, comme environ v. ans a, il eust tendu en la riviere d’Osance certains engins à prendre poisson, et il fust ainsi que un appellé Guillaume Petre vint sur la dicte riviere et trouva yceulx engins, les quelz par son oultrage et senz cause raisonnable il getta en la dicte riviere, et des poissons estanz en iceulx fist sa volenté ; et qui pis fut, pour ce que le dit suppliant lui dist que ce n’estoit pas bien fait d’avoir ainsi getté en l’eaue ses engins et prins son poisson, le dit Guillaume, après aucunes paroles, dist qu’il mentoit et qu’il n’y avoit onques touchié. Et lors le dit suppliant lui respondi que sy avoit et que le fait y apperroit, et n’avoit trouvé personne que lui qui ce peust avoir fait. Dont le dit Guillaume ot si grant despit que par grant oultrecuidance il print une perche et couru sus au dit suppliant. Et pour ce icellui suppliant, pour obvier et resister qu’il ne le tuast ou mutilast de la dicte perche, print un pel ou baston senz fer qu’il trouva d’aventure, et en repellant force par force frappa le dit Guillaume, dont par cas de meschief et de fortune, ainsi que les choses aviennent, le dit Guillaume dedenz brief temps après ala de vie à trespas. Et jassoit ce que les amis charnelx du dit Guillaume, sachans que il avoit esté aggresseur et eu tort envers le dit suppliant, en aient fait paix et accord avecques lui, neantmoins le dit suppliant, pour demourer en plus grant seurté, nous a fait humblement requerir que, ces choses considerées et qu’il est chargié de femme et enfans, nous sur ce li vueilliens nostre grace impartir. Pour ce, est il que nous, de grace especial, au dit suppliant, ou cas dessus dit, quittons et remettons toute peine et offense corporele, criminele et civile que pour ce puet avoir encouru envers nous, et le restituons à sa bonne fame et renommée, au païs et à ses biens, en faisant par lui satisfacion à partie civilement, se faicte n’est. Si donnons en mandement au bailli des Exempcions de Touraine, de Poitou, d’Anjou et du Maine, et à touz noz autres justiciers, presens et avenir, à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission le facent, sueffrent et laissent joir et user paisiblement, senz le perturber, molester ou empeschier, ne souffrir estre perturbé, molesté ou empeschié en aucune maniere, en corps ne en biens, contre la teneur d’icelle. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touzjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, l’an de grace mil ccc. quatre vins, et de nostre regne le xviie, ou moys d’avril.

Es requestes de l’ostel. P. Briet. — Cramaut.

DCXXXVI Juin 1380

Lettres de rémission octroyées à Jean Rupin, d’Alonne, coupable d’homicide par imprudence sur la personne de son beau-frère.

AN JJ. 117, n° 112, fol. 83 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 139-140

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie de Jehan Rupin, parroissien d’Alone en Poitou, comme ou moys de septembre prochain venantaura iiii. ans ou environ, le dit exposant et feu Pierre Deschamps lors vivant, son serourge, fussent alez amiablement ensemble ouvrer du mestier de tonnelerie et relier et faire tonneaux ou cuves en la ville de Louin, pour gaigner leurs vies et sustentacions, et ainsi que il faisoient ou relioient illec une cuve, queue ou tonnel, et que le dit Pierre tenoit sur un cercle un petit maillet, et que le dit exposant feroit d’un plus grant maillet sur le maillet d’icelli Pierre, pour chacier et mettre aval le dit cercle et estraindre le dit vaissel, le manche du maillet du dit exposant en ferant fort d’icellui sur le maillet du dit Pierre, ainsi comme il convient faire en tel ouvrage faisant, fust d’aventure rompu près de la teste d’icellui maillet et fust icelle teste du dit maillet saillie ou volée, par cas de fortune, contre le front ou le visage du dit Pierre, dont il ala depuis de vie à trespassement. Pour occasion du quel fait ainsi avenu par cas de fortune, le dit exposant, doubtant rigueur de justice, s’est absentez du païs, et appellez aux droiz du sire de Partenay, et non comparans ad ce, a esté banniz, si comme on dit, en nous suppliant humblement, comme le dit cas soit ainsi avenu par cas de fortune, et que le dit suppliant et feu Pierre estoient serourges et bons amis ensemble, senz avoir aucune rancune ou malivolence l’un contre l’autre, et que le dit suppliant a touzjours esté de bonne vie, renommée et honneste conversacion, senz aucun autre vilain reprouche, et a par le dit temps de son absence moult souffert de povreté et misere, que sur ce lui vueillons impartir nostre grace et avoir de lui pitié et compassion. Nous adecertes, voulans grace preferer à rigueur de justice, inclinans à sa supplicacion, considerées les choses dessus dites, au dit suppliant, ou cas dessus dit, le dit fait et cas avec toute peine, offense et amende corporele, criminele et civile, que par cause et occasion de ce il puet estre ou avoir encouru, avons remis, quittié et pardonné, et, par la teneur de ces presentes lettres, de nostre grace especial et auctorité royal, remettons, quittons et pardonnons, et le restituons à sa bonne fame, renommée, en tant comme mestier lui puet ou pourroit estre, ou païs et à ses biens non confisquez, en lui quittant et remettant le dit ban, s’aucun en y a, satisfaction faicte à partie civilement tant seulement, se faicte n’est, se aucun en veult faire poursuite. Et en ampliant nostre dite grace, il nous plaist et voulons que le dit sire de Partenay, soubz qui jurisdicion le dit suppliant demouroit lors, et le viconte de Touars, en la jurisdicion duquel le fait advint, ou leurs gens ou officiers pour eux, lui puissent faire sur ce pareille grace, se mestier est, senz porter prejudice à eulx ne à leurs jurisdicions, pour le temps present ou avenir. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au bailli des Exempcions et ressors d’Anjou, de Poitou, de Touraine et du Maine et à touz nos autres justiciers, etc. Et pour ce que ce soit ferme, etc. Sauf, etc. Donné à Paris, l’an de grace mil ccc. iiiixx et le xviie de nostre regne, ou moys de juing.

Par le conseil estant à Paris. N. Gaignart. — G. Guerout.

DCXXXVII 31 août 1380

Permission accordée à Gadifer de la Salle de faire fortifier sa maison de Ligron, dans la châtellenie de Thouars.

AN JJ. 117, n° 224, fol. 145 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 141-145

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, de la partie de nostre amé Gadifer de la Sale

Cet acte et surtout les lettres de rémission d’avril 1385, publiées ci-dessous (n° DCLXXXVII), ajoutent quelques traits marquants à l’histoire d’un personnage curieux et jusqu’ici peu connu. Les biographes, quand ils parlent de Gadifer de la Salle, ne disent ni qui il était, ni d’où il venait, ni comment il finit. Ils ne connaissent de lui que sa participation à un voyage de découverte aux îles Canaries ; son prénom de Gadifer est présenté comme un nom patronymique. Nous voyons qu’il appartenait à une famille de la Salle, originaire sans doute de Poitou ou en tout cas établie dans ce pays, et qu’il y possédait entre autres fiefs la maison forte de Ligron. Les membres de cette famille, du moins à l’époque où nous la rencontrons, empruntent volontiers leurs prénoms aux romans de chevalerie. Le père de Gadifer se nommait Ferrant et son frère Brandelis. Cela peut être l’indice d’un goût héréditaire d’aventures, que dans tous les cas la vie accidentée de Gadifer ne dément point. L’enlèvement raconté dans les lettres d’avril 1385 en est une première preuve. Ce document, qu’on lira plus loin, fournit en outre quelques renseignements sur la parenté et les alliances de la famille de la Salle en Poitou.

Gadifer fit ses premières armes l’an 1372, lors de la reprise de son pays sur les Anglais, dans l’armée de du Guesclin et des trois ducs de Berry, de Bourbon et de Bourgogne, plus particulièrement sous les ordres de ce dernier, si l’on en juge par un extrait des comptes de ce prince. Notre chevalier lui avait gagné au jeu de paume trente-un francs qui lui furent payés le 22 novembre 1372 à Saumur, où ils se trouvaient en compagnie du connétable, d’Olivier de Clisson, etc. « A messire Cadifer de la Sale, chevalier, auquel mondit seigneur les avoit perduz estant au jeu de paume, par mandement de monseigneur et quittance du dit messire Cadifer, donnée le xxiie de novembre… xxxi. franz ». (E. Petit, Itinéraires de Philippe le Hardi et de Jean sans Peur, ducs de Bourgogne. Paris, Imp. nat., 1888, in-4°, Doc. inédits, p. 490.) Un compte du trésorier des guerres nous apprend qu’il servait encore l’année suivante en Poitou, sous le duc de Berry, et commandait à une compagnie de cinq chevaliers et de vingt-deux écuyers. (Intr. de notre t. IV, p. lxv.) Le duc prit Gadifer en affection, le créa son chambellan et encouragea son penchant pour les expéditions lointaines. Car, entre autres mentions des registres de comptes de son hôtel, nous relevons celle-ci : « A messire Gadiffer de la Sale, chevalier, chambellan de monseigneur, auquel mondit seigneur a donné pour une foiz de grace especial, c. frans pour aidier à faire son voyage de Pruce, où il entant aler, à lui paiez par mandement donné le dernier jour d’octobre l’an ccc. lxxviii. » (KK. 252, fol. 168 v°.) Il allait prendre part sans doute, comme ses compatriotes Moreau de Magné et Jean de Verruyes, mentionnés quelques pages plus haut (voy. p. 103 note), à une croisade des chevaliers de l’Ordre teutonique. Les lettres d’avril 1385 nous font connaître son retour (au commencement de l’année 1381), et la façon dont il occupait ses loisirs.

Gadifer trouva aussi dans Louis duc d’Orléans un protecteur bienveillant, qui aimait les voyages et les aventures. C’est aux frais de ce prince qu’il prit part, au milieu de l’année 1390, à l’expédition de Barbarie, sous la direction du duc de Bourbon. A peine de retour en octobre 1390, il part de nouveau pour la Prusse, avec plusieurs chevaliers, compagnons du duc en Barbarie, parmi lesquels nous citerons seulement Jean de Trie et Boucicaut. Il s’agissait encore d’une sorte de croisade, sur laquelle nous n’avons pas d’éclaircissement, et qui était terminée en avril 1391. Au mois d’octobre 1396, il accompagna le duc d’Orléans, dont il était devenu chambellan, à Saint-Omer pour le mariage d’Isabelle de France, fille de Charles VI, avec Richard roi d’Angleterre, et nous le retrouvons au mois d’avril 1401 à la suite de son maître, lors de l’entrevue de celui-ci avec le puissant duc Guillaume de Gueldre. (E. Jarry, La vie politique de Louis de France, duc d’Orléans. Paris, 1889, in-8°, p. 55, 180 et 250.)

Dans l’intervalle, Gadifer de la Salle avait rempli les fonctions de sénéchal de Bigorre. C’est ce que nous apprend une procédure criminelle dirigée contre lui par le procureur général du roi et Arnaudon de Vézien, et dont l’on trouve six fois la trace entre le 21 juillet 1394 et le 6 avril 1396, dans les registres du Parlement. L’on y apprend qu’il fut pourvu de cet office en septembre 1391, après la mort d’Arnaud Guillem, dont il avait été, lors d’une précédente vacance, le compétiteur malheureux. Si l’on en croit son défenseur, l’avocat Jean de Popincourt, qui devint, quelques années plus tard, premier président du Parlement, Gadifer s’appliqua, dès son entrée en fonctions, à déraciner les abus de l’administration, et imposa, entre autres réformes, la résidence aux officiers royaux, sous peine d’être privés de leur traitement, ce qui lui attira la haine des mauvais fonctionnaires. Des enquêtes faites contre plusieurs révélèrent des faits graves qui nécessitèrent des poursuites. Dominique de Vézien, père du demandeur, et procureur du roi au pays de Bigorre, était soupçonné d’avoir assassiné sa femme ; l’information prouva qu’il était au moins l’instigateur du crime. Ayant refusé de comparaître à l’assignation, le sénéchal le fit arrêter et conduire non pas dans les prisons de Tarbes, qui n’étaient pas assez sûres, plusieurs évasions s’y étant produites récemment, mais dans celle d’un château voisin. Suivant la procédure ordinaire, il fut mis à la question et avoua son crime. Laissé seul un instant, il voulut fuir et sauta par une fenêtre ; dans sa chute il se tua. Telle est, résumée, la version de la défense. Toute autre est celle du fils de la victime, auquel s’était joint le procureur général. Gadifer était vindicatif ; il attribuait l’échec de sa première candidature au sénéchalat à Dominique de Vézien. De là contre celui-ci une série de persécutions et de violences qui alla jusqu’au meurtre. La prétendue évasion de la victime n’était qu’une fable, que le sénéchal avait cherché à accréditer. La vérité était qu’il avait fait prendre, sans aucun motif, son ennemi par des hommes armés qui l’avaient meurtri et ensanglanté, traîné en prison au château de Campo, soumis aux plus cruelles tortures et finalement précipité du sommet d’une tour, au bas de laquelle il avait trouvé la mort. Ce fait avait eu lieu en novembre 1393. De ces deux récits contradictoires la vérité ne peut être dégagée, l’arrêt définitif ne se trouvant point dans les registres du Parlement. La dernière fois que l’affaire est mentionnée, c’est le 6 avril 1396. La cour accorde un nouveau délai à Gadifer de la Salle, toujours qualifié sénéchal de Bigorre, sous prétexte des affaires de son gouvernement. (Voy. Arch. nat., X2a 12, fol. 214 v°, 264 r° et v°, 300 ; X2a 13, fol. 43.) Si l’on ne peut, dans cette malheureuse circonstance, accepter comme fondée l’accusation portée contre notre chevalier, on doit dire cependant qu’il y a contre lui une grave présomption. Le 7 août 1395, le Parlement condamna pour d’autres excès commis antérieurement (l’an 1386) contre Dominique de Vézien, Guillaume de Quimbat, receveur de la sénéchaussée de Bigorre, à faire amende honorable nu tête et en chemise et à demander pardon pour ces violences, à payer au fils de Vézien une amende profitable de 100 livres tournois et une autre de 200 livres envers le roi. De plus, il fut privé de sa charge et déclaré indigne et incapable d’exercer à l’avenir aucun office royal (X2a 13, fol. 84 v°). Or, ce Guillaume de Quimbat nous est présenté par l’accusation comme l’instrument du sénéchal. Coupable ou non, Gadifer dut se tirer assez facilement d’affaire. Nous avons vu qu’il ne manquait pas de protecteurs haut placés.

Quoi qu’il en soit, ce qui rendit célèbre le nom de Gadifer de la Salle et lui valut de passer à la postérité, c’est la part que prit ce hardi chevalier avec l’illustre Jean de Béthencourt, non pas à la découverte, comme on l’a dit peu exactement, mais plutôt à la conquête des îles Canaries. Les deux intrépides explorateurs s’étaient rencontrés déjà en Barbarie. La nouvelle expédition commandée par Béthencourt partit des côtes de Normandie. Elle fit relâche à la Rochelle, où la rejoignit Gadifer, « un bon et honeste chevalier qui alloit à son adventure », suivant l’expression de l’un de ceux qui l’accompagnèrent, et avec plusieurs bâtiments quitta ce port le 1er mai 1402. Ils s’arrêtèrent quelque temps en Espagne et arrivèrent à Lancerote, où ils bâtirent un fort. De là Béthencourt retourna en Espagne chercher des soldats. Pendant son absence, Gadifer, après avoir réprimé une révolte de ses troupes, étendit sa domination sur les îles voisines. Béthencourt, revenu avec des renforts et revêtu du titre de seigneur de toutes les Canaries, fit une expédition au cap Bojador et soumit l’île Fortaventure. Après une tentative infructueuse sur la grande Canarie, des querelles s’élevèrent entre la Salle et Béthencourt, et le premier ayant vu ses prétentions repoussées par le roi de Castille qu’ils avaient pris pour arbitre, abandonna son compagnon. Depuis lors, nous n’avons plus retrouvé sa trace. La relation de cette expédition, faite par deux serviteurs de Béthencourt, le franciscain Pierre Bontier et Jean le Verrier, prêtre, a été publiée en 1629 par Pierre Bergeron, sous le titre de Hist. de la première découverte et conqueste des Canaries, faite en 1402, par Jean de Béthencourt. Paris, petit in-8°, réimprimé en 1735, in-4°.

, chevalier du païs de Poitou, nous avoir esté exposé, en nous suppliant humblement, que comme il ait et tiengne en fié de nostre ame et feal cousin le sire de Cliçon une maison assise en la ville de Ligron, en la chastellenie de Thouars, la quele maison est bien aisiée, ordené et disposée pour fortifier et emparer, et la quele le dit chevalier, tant pour ce que lui, ses gens et familiers y puissent estre et demourer seurement, comme pour ce que les bonnes gens voisins du plat païs d’environ la dite maison y aient et puissent avoir, en cas de besoing et necessité, retrait et refuge pour eulx et leurs biens, feroit volentiers fortifier et emparer, mais que sur ce li voulsissions donner et impartir nostre congié et licence. Et nous inclinans à sa supplicacion, considerans les bons et agreables services que le dit chevalier nous a longuement et loyaument faiz en noz guerres, et esperons qu’il face encores ou temps avenir, et afin que les bonnes gens du païs d’environ la dite maison y puissent dores en avant retraire et mettre à sauveté eulx et leurs biens, en cas de necessité, au dit Gadifer, de nostre auctorité royal, certaine science, pleine puissance et grace especial, avons donné et octroié, donnons et octroions par ces presentes congié et licence et auctorité de la faire fortifier, emparer et garder, à ses despens, et que icelle ainsi fortifiée et emparée lui, ses hoirs, ses successeurs et ceulx qui de lui auront cause ou temps avenir, la puissent tenir, possider et garder, comme forteresce notable et d’ancienneté, ou cas toutevoies que le dit sire de Cliçon, de qui la dite maison est tenue en fié, se vouldra à ce consentir, senz ce que eulx ou aucuns d’eulx soient ou doient estre, ores ou ès temps avenir, contrains ou molestez à ycelle abatre ou demolir. Si donnons en mandement par ces presentes au bailli des Exempcions de Touraine, de Poitou, d’Anjou et du Maine et à touz les autres justiciers et officiers de nous et de nostre royaume, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit Gadifer, ses hoirs, ses successeurs et ceulx qui de lui auront cause ou temps avenir, ou cas dessus dit, laissent, facent et sueffrent user et joir plainement et paisiblement de nostre presente grace et octroy, senz leur y mettre ne souffrir estre mis, ores ou ès temps avenir, aucun empeschement ou destourbier. Et pour ce que ce soit ferme et estable chose à touzjoursmès, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné en nostre hostel de Beauté sur Marne, le darrenier jour d’aoust l’an de grace mil ccc. iiiixx, et le xviie de nostre regne.

Par le roy. H. Blanchet.

DCXXXVIII 5 novembre 1380

Don à Guy de La Trémoïlle, chambellan du duc de Bourgogne, de tous les biens meubles, héritages et possessions confisqués sur Pierre de Bar, coupable de plusieurs crimes de lèse-majesté

Ces biens de Pierre de Bar ne sont pas autrement spécifiés et rien n’indique le pays où ils étaient situés. Dans ces conditions, il est suffisant de donner ici une courte analyse de cet acte, qui a d’ailleurs été publié par M. le duc de La Trémoïlle, Guy VI de La Trémoïlle et Marie de Sully. Nantes, in-4°, 1887, appendice, p. 160.

. Reims, le 5 novembre 1380.

AN JJ. 118, n° 52, fol. 36 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 145

DCXXXIX 24 novembre 1380

Restitution à Jacques de Surgères d’une rente annuelle de cent dix livres, qu’il avait été contraint de vendre à Guillaume Felton, sénéchal de Poitou du temps de la domination anglaise, pour payer une amende, et que les héritiers de celui-ci avaient transportée à Pierre Mignot.

AN JJ. 118, n° 123, fol. 66 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 145-149

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et advenir, que, oye la supplication de nostre amé et feal Jaques de Surgieres

Fils aîné de Guy de Surgères, seigneur de la Flocellière, et de Marguerite de Bourgneuf, sa seconde femme, fille de Jean seigneur de Retz, et veuve en premières noces de Guillaume Chabot, seigneur de la Tourmelière, Jacques de Surgères était encore mineur quand son père mourut, et ce fut sa mère et tutrice, Marguerite de Bourgneuf, qui fit en son nom l’aveu de sa terre de la Flocellière à Jean de France, comte de Poitou, au mois de mars 1344 n.s. (Arch. nat., P. 594, n° 136, fol. 73). En 1355, il servait en Poitou sous le maréchal de Clermont, suivant une quittance de gages du 13 février, et le 19 septembre 1356, il prit part à la bataille de Poitiers. Pendant l’occupation anglaise, Jacques de Surgères joua un rôle en vue, et malgré que le prince de Galles « l’eust prins en haine », il le servit fidèlement. Froissart rapporte ses exploits et MM. Beauchet-Filleau ont reproduit plus d’un passage du chroniqueur relatif à ce personnage, dans leur Dict. des fam. de l’anc. Poitou, t. II, p. 681. Nous nous contenterons de renvoyer à ces auteurs, en ajoutant que le sire de la Flocellière mit son nom au traité de Surgères, le 18 septembre 1372, et fit sa soumission au roi de France le 30 novembre suivant, avec les autres barons poitevins enfermés dans Thouars. (Voy. l’introduction du précédent vol., p. xl-xlii).

Dom Fonteneau nous a conservé deux actes intéressants, touchant un démêlé de Jacques de Surgères et de son capitaine du château de la Flocellière, Guillaume Catineau, avec Jean de Granges, dont ils avaient insulté les armoiries, lui contestant le droit de porter les armes de la maison de Surgères. (Commission du duc de Berry à son sénéchal, Hugues de Froideville, le 1er septembre 1378, et rapport fait à celui-ci, le 30 octobre suivant, t. VIII, p. 155 et 157. — Voy. aussi Beauchet-Filleau, op. cit., t. II, p. 684). Un autre procès qu’il soutint contre Guy d’Argenton de 1377 à 1380, fut jugé par le Parlement. Il s’agissait de la succession d’Hugues de Surgères, leur oncle, et particulièrement des seigneuries de Valans et du Breuil, sises dans les châtellenies de Benon et de Frontenay-l’Abattu, dont ils se disputaient la possession. Les renseignements généalogiques qui s’y trouvent confirment ceux de Louis Vialart, auteur de la Généalogie de la maison de Surgères, impr. en 1717. Aussi nous n’entrerons pas dans le détail de cette affaire. (Voy. sur ce sujet un mandement du 4 juillet 1377, X1a 26, fol. 74 ; un jugé du 23 décembre 1378, X1a 28, fol. 256 ; et des lettres du 6 août 1380, X1a 29, fol. 93 v°). Une autre contestation est mentionnée dans le registre du 28 juillet 1380 (X1a 29, vol. 88), entre le sire de la Flocellière, d’une part, Guy de Laval et Isabelle d’Avaugour, sa femme, de l’autre ; il est question d’un ajournement pour arriver à un accord. C’est à cette affaire vraisemblablement que se rapporte le traité conclu, le 4 février 1383 n.s., entre M. et Madame de Laval et Jacques de Surgères, fils de feu Guy de Surgères, au sujet de quelques acquêts que ceux-ci avaient faits dans la terre de Châteaumur, et dont ils confient l’examen à Guy de La Forêt, en présence de Jean d’Acigné, de Guillaume de Mathefelon et de Pierre du Puy-du-Fou. (Dom Fonteneau, t. VIII, p. 161).

Jacques avait épousé, avant le 3 février 1367, Marie, fille d’André de Laval, seigneur de Châtillon-en-Vendelais, et d’Eustache de Bauçay, dont il eut un fils et une fille, cette dernière mariée à son cousin, Joachim de Clermont, seigneur de Surgères. Il fit son testament le 29 septembre 1380, faisant un legs aux pauvres de la Flocellière pour le repos des âmes de ses père et mère. Sa mort dut arriver entre le mois de février 1383 et le 23 avril 1385, date d’un aveu de la seigneurie de la Flocellière, rendu par son fils nommé aussi Jacques de Surgères, à Jean duc de Berry, comte de Poitou. (Copie du Grand-Gauthier, Arch. nat., R1* 2171, p. 393).

, chevalier, requerant que, comme par avant que la duchié de Guienne retournast derrainement en l’obeissance de nostre très cher seigneur et pere, que Dieux absoille, icelui suppliant qui lors demouroit ou povoir du prince de Gales, se fust pluseurs fois armez et aliez avec noz subgez contre pluseurs gens de compaignie qui dommageoient nostre royaume, et par especial se fust armez en la compaignie de nostre très cher oncle le duc de Bourgongne devant la Charité sur Loire

Les deux chefs de compagnie, Bernard et Hortingo de la Salle, s’étaient emparés par surprise de la Charité-sur-Loire (arr. de Cosne, Nièvre), au mois d’octobre 1363, et cette ville resta en leur pouvoir pendant seize ou dix-sept mois. Ce fut lors de cette occupation, au mois de septembre 1364, que Robert de Fiennes, connétable de France, et les deux maréchaux Boucicaut et Arnoul d’Audrehem, vinrent mettre le siège devant cette ville, où ils furent rejoints par Philippe, duc de Bourgogne. La Charité se rendit à ce prince au mois de novembre suivant. (S. Luce, édit. de Froissart, t. VI, p. lxi, lxiv-lxvii).

, que aucuns Engloiz et Gascoings, gens de compaignie, avoient occupée et la detenoient. Et pour ce aussi qu’il disoit les dictes compaignies estre aliez du dit prince, icellui prince l’eust prins en haine et fait amender grandement, pour la quelle amende payer lui convint lors vendre à feu Guillaume de Felton, chevalier englois, lors seneschal de Poitou

Guillaume de Felton, chevalier, frère de Thomas, mentionné plusieurs fois dans le précédent volume, est nommé pour la première fois dans un acte de 1345. (Rymer, Fœdera, etc., t. III, p. 53). Il avait été créé sénéchal de Poitou pour le roi d’Angleterre par Jean Chandos, lieutenant d’Édouard III, lorsque celui-ci prit possession au nom de son maître de la ville de Poitiers, le 23 septembre 1361. (A. Bardonnet, Procès-verbal de la délivrance faite à Jean Chandos, p. 148), et occupa cette charge sans interruption jusqu’à sa mort (mars 1367). Il fut tué en combattant vaillamment dans une escarmouche à Vitoria, pendant l’expédition du prince de Galles en Espagne. (Froissart, édit. S. Luce, t. VII, p. ix, 21-25). Si les renseignements n’abondent pas sur sa personne, on conserve un grand nombre d’actes émanant de lui comme sénéchal de Poitou, entre autres des lettres de protection et sauvegarde accordées au chapitre de l’église cathédrale de Poitiers. (Arch. de la Vienne, G. 510). Nous en citerons un certain nombre par un simple renvoi aux ouvrages ou collections : E. Rymer, Fœdera, etc., nouv. édit., 1830, t. III, part. i, p. 53 ; part. ii, p. 639, 654, 675, 679, 685, 699, 735, 827 ; — Rédet, Cartul. de l’évêché de Poitiers ou Grand Gauthier, p. 185 ; — A. Richard, Chartes de l’abbaye de Saint-Maixent, t. II, p. 1169 ; — Coll. dom Fonteneau, t. III, p. 581 ; t. XI, p. 535 et 545 ; t. XVI, p. 277 ; t. XX, p. 169 et 197, etc., etc. — Voy. aussi : A. Richard, Inventaire des archives du château de la Barre, t. II, p. 435. — Guillaume de Felton eut pour successeur immédiat Baudouin de Fréville, qui porte déjà le titre de sénéchal de Poitou dans une obligation souscrite à Burgos par dom Pèdre, le 2 mai 1367. (Rymer, t. III, p. 825.)

pour le dit prince, cent x. livres de rente sur toute sa terre pour le pris de mil frans. Après la quelle vente faicte, le dit Guillaume ala de vie à trespassement, et après son trespas ses heritiers eussent transporté la dicte rente en Pierre Mignot, qui avoit esté lieutenant du dit seneschal, pour le pris de vc frans, ou temps du quel transport la duchié de Guienne fu fourtraite et confisquée à nostre dit seigneur et pere par la rebellion du dit prince, qui lui avoit meue et faisoit guerre ; par quoy la dicte rente avec les autres possessions du dit prince et de ses aliez estans en nostre royaume, appartindrent à nostre dit seigneur et pere, et par ce ne la povoient les diz heritiers lors transporter au dit Mignot

Pierre Mignot était seigneur de Longèves dans la châtellenie de Fontenay-le-Comte. Nous avons trouvé son nom pour la première fois dans un ajournement au Parlement, en date du 29 novembre 1357. Il était accusé avec Jean Brisseteau, Jean Girard, Aimery Barbotin et autres officiers et familiers de Jean Larchevêque, sire de Parthenay, d’excès commis au préjudice du prieuré de Marsais, dépendant de l’abbaye de Saint-Maixent (X2a 6, fol. 386). Le sire de Parthenay fut jugé responsable des agissements de ses officiers, et ajourné à son tour pour la même affaire, le 15 avril 1361 (X2a 7, fol. 3 v°). Lieutenant du sénéchal anglais de Poitou, comme on le voit ici, Mignot, après la reprise de ce pays, se fit apprécier de du Guesclin, qui l’institua sénéchal de Fontenay-le-Comte. (Acte du 14 juillet 1377, cité dans notre précédent volume, p. 401, note), et devint l’année suivante sénéchal de Parthenay. Nous avons mentionné aussi un accord qu’il conclut, le 2 avril 1375 n.s., avec Jean Sanglier, écuyer, et sa femme (t. IV, p. 126 note). C’est dans cette pièce que Pierre Mignot est qualifié de seigneur de Longèves. Sa fille unique Isabelle, issue de son mariage avec Jeanne de Terves, avait épousé Moreau de Magné, chevalier, dont il a été question ci-dessus (p. 95 de ce volume), et qui n’eut lui-même, qu’une fille, mariée à Simon Chasteigner, seigneur de la Meilleraye, de sorte que cette branche de la maison de Chasteigner, entra en possession de la terre de Longèves et de tous les biens de Pierre Mignot et de son gendre. (Voy. A. Du Chesne, Hist. généal. de la maison des Chasteigners, in-fol., p. 510).

. Et toutesvoies les diz heritiers du dit Felton angloiz et le dit Mignot, qui encores estoit lors lieutenant du seneschal de Poitou et tenoit le parti du dit prince, firent par leur puissance que il s’obliga envers le dit Mignot à lui paier la dite rente chascun an, à la quelle chose se fust le dit suppliant acordé, pour ce qu’il lui aidassent à faire sa paix envers le dit prince, qui de rechief l’avoit prins en haine, pour ce que il s’estoit armez en la compaignie du feu sire de Craon

Amaury IV, sire de Craon, vicomte de Thouars par son mariage avec la fille aînée du vicomte Louis. Voy. la notice sur ce personnage dans le t. IV, p. 245.

et des mareschaux de France devant Faye, où estoient pluseurs Angloiz, Gascoings et autres gens de compaignie

C’est en 1368 que les Grandes compagnies s’emparèrent de Faye-la-Vineuse. Cet événement est mentionné déjà dans trois actes imprimés dans les deux précédents volumes (t. III, p. 419, 420 ; t. IV, p. 4 et 81). Voy. aussi Delaville-Le Roulx, Comptes municipaux de la ville de Tours, t. II, 1881, p. 28-29.

 ; nous lui veullions faire sur ce nostre grace. Nous, ces choses considerées et aussi pour consideracion des bons et loyaux services que le dit suppliant a fais à noz predecesseurs ès guerres, sur lesquielx avons eu la relacion de pluseurs dignes de foy, et que nous esperons que il nous fera ou temps avenir, lui avons donné de grace especial et de nostre auctorité royal, et donnons par la teneur de ces lettres la dicte rente ainsi confisquée, comme dit est, avec tous les arrerages qui en sont deuz de termes passez, et la transportons en lui, pour lui et pour ses hoirs et successeurs, pour en jouir paisiblement et perpetuelment, cessant tout empeschement. Et que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre à ces lettres nostre seel ordonné en l’absence du grant. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, le xxiiie jour de novembre, l’an de grace mil ccc. iiiixx, et le premier de nostre regne.

Par le roy, presens messeigneurs les dux d’Anjou, de Berry et de Bourgoigne. Yvo, etc.

DCXL Novembre 1380

Lettres de rémission octroyées à Pierre Lorencin, de Pompois, paroisse de Sainte-Verge, pour meurtre commis à la suite d’une rixe.

AN JJ. 118, n° 87, fol. 48 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 150-151

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, que Pierre Lorencin, povre laboureur de bras de la ville de Ponpaix, de la parroisse de Saincte Verge, nous a fait exposer que, comme le jour de la Nostre Dame de septembre darrenierement passée, le dit Pierre feust en la ville de Monstereul Bellay, pour acheter certaines danrées et là eust tant beu de vin que il fu tout yvre, et en soy retournant en son hostel, sanz mal penser ne que il eust haine à aucune personne, eust trouvé en son chemin, environ le jour escloant, un appellé Berthelot Charles, monté sur un asne, qui aussi avoit très grandement beu ; ou quel chemin se murent paroles entre le dit Pierre et le dit Berthelot, teles que ilz commancerent à desmentir l’un l’autre, comme gens qui estoient tous yvres et plains de l’ennemi, et tant parlerent ensemble que ycellui Berthelot feri le dit Pierre d’un baston qu’il tenoit. Et lors le dit Pierre print son baston où il n’y avoit point de fer et en s’en revengant en fery le dit Berthelot, tellement que ycellui chey de dessus son asne à terre, et tantost après fu mort, sanz ce qu’il y eust oncques plaie. Pour le quel fait le dit Pierre s’est absentez du païs, si comme il dit, en nous humblement suppliant que comme le dit Pierre ait tousjours esté homme de bonne vie et renommée, ne onques mes ne fu reprins d’aucun villain cas, ne aussi n’avoit aucun maltalent au dit Berthelot, nous sur ce li veullons estendre nostre grace et misericorde. Nous adecertes, ces choses considerées, voulans en ceste partie grace et misericorde estre preferée à rigueur de justice, au dit suppliant, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, avons quictié, remiz et pardonné, quictons, remettons et pardonnons par ces presentes ou cas dessus dit le dit fait, avecques toute peine, amende et offense corporele, criminele et civile en quoy il est et puet estre encouruz pour les choses dessus dictes, et le restituons à sa bonne fame, renommée et à ses biens, sauf toutesvoies le droit de partie civilement. Si donnons en mandement au bailli des Exempcions de Touraine, d’Anjou, du Maine et de Poitou, et à touz nos autres justiciers et de nostre royaume, et à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace facent et laissent le dit suppliant joir et user, et contre la teneur d’icelle ne le travaillent, molestent ou empeschent orez ne ou temps avenir en aucune maniere, et son corps et biens, se aucuns sont detenuz ou empeschiez pour le dit fait, lui mettent à plainne delivrance. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel ordené en l’absence du grant à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, ou mois de novembre, l’an de grace mil trois cens quatre vins, et le premier de nostre regne.

Es requestres de l’ostel. Adam. — Cramaut.

DCXLI 3 avril 1381

Confirmation d’une sentence rendue, le 12 août 1370, par Thomas de Percy, sénéchal de Poitou pour le roi d’Angleterre, en faveur de Jean de Loubert, chevecier du chapitre cathédral de Poitiers, portant que les redevances dues par des ecclésiastiques à la chevecerie seront payées en forte monnaie tournois ou en monnaie courante, estimée à sa valeur réelle suivant le marc d’argent.

AN JJ. 118, n° 395, fol. 211 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 151-160

Karolus, etc. Notum facimus universis, presentibus et futuris, nos litteras defuncti Edwardi, primogeniti quondam regis Anglie, adversariorum nostrorum, cum viverent, tempore quo idem Edwardus Pictavensem patriam in sua potestate detinebat, concessas vidisse, tenoris seu continencie subsequentis :

Edwardus, regis Anglie primogenitus, princeps Acquictanie et Wallie, dux Cornulie, comes Cestrie, dominus Biscaie et Castri de Ordialibus, universis et singulis, presentibus et futuris, ad quos presentes littere pervenerint, salutem. Litteras nobilis viri Thome de Percy, militis et senescalli nostri Pictavensis, sigillo quo in dicta senescallia utitur in pendenti sigillatas, recepimus, tenorem qui sequitur continentes :

Thomas de Percy, chevalier, seneschal de Poitou

Thomas Percy ou de Percy, fils puîné de Henri Percy et de Marie de Lancastre Plantagenet, fille de Henry comte de Lancastre et de Leicester, était par sa mère arrière-petit-fils de Henri III, roi d’Angleterre. Son nom revient assez fréquemment dans notre précédent volume, à l’occasion des événements du Poitou de 1369 à 1372, auxquels il prit une part prépondérante. La date de sa nomination en qualité de sénéchal de Poitou est controversée. Froissart dit que James d’Audeley, mort à Fontenay-le-Comte, au milieu de l’année 1369, fut remplacé comme sénéchal de Poitou par Jean Chandos. (Edit. S. Luce, t. VII, p. 163.) En effet, Chandos dut exercer cet office pendant la seconde moitié de cette année ; il est mentionné en cette qualité dans un mandement de Jean de Harpedenne, sénéchal de Saintonge, daté de Niort, le 27 novembre 1369. Mais M. Luce cite un acte du 3 mars 1369 n.s. qui prouverait que Thomas de Percy était déjà sénéchal à cette époque (id. ibid., t. VII, p. lxxv, note), et un autre où James d’Audeley prend le titre de lieutenant du prince de Galles en Poitou et Limousin, et non de sénéchal, charge qu’il n’aurait jamais remplie. Comme Froissart, à la date du 30 décembre 1369, donne à Thomas de Percy la qualification de sénéchal de la Rochelle, le savant éditeur en conclut que Percy fut pourvu de ce dernier office quand il fut remplacé en Poitou par Chandos. (Id. ibid., p. lxxx.) Il y a en tout cas une chose certaine, c’est que Thomas de Percy reprit la place de Chandos, mort le 2 janvier 1370 n.s. et ne cessa d’exercer les fonctions de sénéchal que lors de la reprise du Poitou, ou, pour préciser, le 23 août 1372, date du combat devant Soubise, où il fut fait prisonnier par un Gallois nommé « Honvel Flinc », avec le captal de Buch. (Id., t. VIII, p. xxxviii, note 1.) Charles V ayant donné au duc de Berry la rançon de Percy, celui-ci resta le prisonnier de ce prince jusqu’au 2 octobre 1374 ; sa mise en liberté coïncida avec la reddition du château de Lusignan et fut probablement une des conditions du traité de capitulation. (Introd. de notre t. IV, p. li). Depuis cette époque, Thomas de Percy remplit les plus hautes charges à la cour d’Angleterre. Il vivait encore en 1398.

pour nostre seigneur le prince d’Acquitaine et de Gales, à touz ceulx qui ces presentes lettres verront et orront, salut. Saichent touz que, comme en nostre court, par devant certains commissaires sur ce deputez, pendist cause et feust esmeue entre le procureur de nostre dit seigneur, demandeur, d’une partie, et honorable homme maistre Jehan de Lobert

Jean de Lobert ou de Loubert exerça ces fonctions de chevecier de l’église cathédrale de Poitiers jusqu’à la suppression de cet office par Clément VII, le 22 avril 1389. Pour mettre fin à des litiges existant entre l’évêque Simon de Cramaud et son chapitre, au sujet des émoluments de la cour de l’officialité, dont le chapitre réclamait le quart, le pape supprima la chevecerie et en réunit les revenus à la mense capitulaire. La bulle est datée d’Avignon, le x des calendes de mai 1389. Le même jour, Jean de Loubert remit sa démission entre les mains de Guy, cardinal évêque de Préneste, commissaire du pape. Dans cet acte, il prend le titre de licencié ès lois. La bulle et l’acte de démission ont été publiés par M.L. Rédet, Cartul. de l’évêché de Poitiers ou Grand-Gauthier, t. X, des Arch. hist. du Poitou, p. 197 et 205. Nous ne savons quelle compensation fut donnée à Jean de Loubert, sur lequel nous n’avons point d’autres renseignements.

, chevacier de la grant eglise de Poitiers, defendeur, de l’autre partie, sur ce que le dit procureur disoit encontre le dit chevacier que le dit chevacier ou ses genz li aians ferme et estable, en venant contre les ordonnances des monoies faictes par nostre dit seigneur le prince, avoit refusé à prendre la monnoie de nostre dit seigneur, pour ce que elle valoit et avoit cours, et s’estoit efforcié et efforçoit le dit chevacier ou ses genz de lever, prendre et exigier, à cause de sa dicte chevacerie, de pluseurs curez et autres personnes d’yglise de nostre seneschauciée, en la valeur et extimacion selon marc d’argent de petiz tournois fors, certainnes pensions annuelles pecuniaires, deues au dit chevacier par les diz curez et autres personnes d’eglise, à cause de leurs benefices qu’ilz ont et obtiennent en nostre dicte seneschauciée de Poitou, pour cause de luminaire et des autres charges que le dit chevacier ne ses predecesseurs cheveciers de la dicte eglise par le temps jadis, si comme le dit procureur disoit, aient acoustumé à lever, prandre ne exigier, si non tant seulement la monnoie usuale qui communaument avoit cours au temps du paiement, et que neantmoins le dit nostre seigneur le prince povoit donner tel cours comme il voloit à ses monnoies, et que un de ses petitz deniers, combien qu’il fust plus feble, vaulsist et eust cours pour un fort tournois petit. Et pour ce disoit le dit procureur que le dit chevecier ne le povoit faire et concluoit à fin civile, par prise et detencion du temporel de la dicte chevecerie. Le dit chevecier disanz au contraire, et qu’il n’a mailhe de temporel ; et que, combien que les personnes, c’est assavoir tant lui que les debteurs des dictes pensions, soient pures genz de saincte mere eglise, et toutes les choses dessus dictes soient regardanz le divinal office de saincte mere eglise, et pour ce ne se povoient ne devoient traicter en feur seculier, se non en feur d’eglise. Toutesfoiz sanz prejudice, afin que la court fust plus à plain informée de sa innocence et sauve reserve à lui par la court de son previlege sur ce, disoit-il au contraire, c’est assavoir que tant li que ses predecesseurs cheveciers de la dicte eglise, qui avoient esté par le temps passé, avoient esté d’ancienneté et partant de temps qu’il n’estoit memoire du contraire, que que soit, par tant de temps qu’il li devoit souffire, en saisine et possession, et aussi du droit de lever, percevoir et exiger les dictes pensions des personnes qui les doivent, en et de forte monnoie, selon marc d’argent des fors tournois petiz, quant les diz tournois avoient cours, et quant il n’avoient cours, en et de la monnoie usuale, courant par le temps, en paiant tant d’icelle à la value et estimacion selon le marc des diz fors tournois petiz, et quant les diz debteurs des dictes pensions par aucunes années estoient à ce defaillanz, le dit chevecier et ses predecesseurs les y faisoient condempner et contraindre par leurs juges competens, si comme il disoit apparoistre par procès et par lettres de la saincte sée de Rome et par autres lettres autentiques ; et que neantmoins, si comme il disoit, pluseurs des diz debteurs avoient cogneu et confessé les choses dessuz dictes estre vrayes, et avoient promis à paier perpetuelment au dit chevecier et à ses successeurs forte monnoie tournois petiz, ou la valeur et l’estimacion selon le marc d’argent d’iceulx, s’ilz n’avoient cours pour le temps. Disant en oultre le dit chevecier que, combien que nostre dit seigneur donget et puichet donner cours à ses monnoies, si comme il lui pleist, ce est senz dommage d’autrui et mesmement de saincte mere yglise, et par especial, car touz les diz debteurs si sont purs genz d’eglise, desquelx et de leurs eglises et des charges d’icelles nostre seigneur le pape puist ordonner à son bon gré, et nul autre ; et n’y a nul lays. Et neantmoins doivent paier par telx choses qui regardent le divinal office, le quel nostre dit seigneur le prince ne vouldroit par rien qu’il se perdist ; car il n’y pert rien ains y gaigne, en tant comme sa monnoie a plus de cours, et plus en paiet ou par la valeur et extimacion de plus forte monnoie. Car les monnoiers du seigneur gaignent plus, quant plus l’en en met et plus ont de cours, que qui en mettroit moins. Et le dit chevecier, si comme il disoit, ny ses genz nul temps ne refuserent à prandre la monnoie de nostre dit seigneur le prince, ains l’ont tousjours prise et la prennent sanz contredire pour ce que elle vault, en deduction de la dicte plus forte monnoie qui est deue.

Et la cause contestée sur les faiz dessus diz, et juré par les dictes parties, et données par la court competentes dilacions à prouver de sà et de là leurs ententes, et receuz par la court, en presence du dit procureur, pluseurs anciens tesmoins admenez par la partie du dit chevecier à prouver ses faiz avant diz, des quelx en y a de telx qui ont cent ans ou environ, et eulx examinez et l’enqueste publiée, et produictes en oultre par la partie du dit chevecier pluseurs bulles de pape et autres lettres et instrumens à prouver son entencion, et octroyé et donné copie du tout, et certain jour competent à dire encontre au dit procureur ; à la parfin, comparoissens en jugement par devant nous, à Poitiers, au jour d’ui assigné par nous ès dictes parties à faire et prendre droit sur les choses dessus dictes, Thevenin Gracien, procureur substitut de nostre dit seigneur le prince pour Thibaut Gracien

Sur Thévenin ou Étienne, et sur Thibaut Gracien, voy. le vol. précédent, p. 332 et note. Il est question aussi d’Étienne Gracien dans une note sur Pierre Regnault (ci-dessus, p. 74, note). Le même personnage est encore mentionné avec le titre de procureur du duc de Berry au comté de Poitou, dans un acte de février 1377, n.s. (ci-dessous, n° DCCVI), et dans un autre d’octobre 1389 (n° DCCXL).

, procureur general de nostre dit seigneur, si comme appert de leurs procuracions par lettres autentiques, exhibées et produictes en jugement par devant nous, des quelles les teneurs sont cy dessouz insertes et contenues, et l’avocas fiscal de nostre dit seigneur, ou les quelx touz les procès de ceste cause ont esté conduys et menez, d’une partie, et ledit maistre Jehan de Lobbert, chevecier, de l’autre partie, revoquez par nous touz autres commissaires donnez et deputez en ceste cause, et oyes par nous les parties avant dictes et tout ce que elles ont voulu dire, veuz et regardez diligemment tous les procès, erremens et enquestes faiz et faictes en la dicte cause, et eu par nous conseil o saiges sur ce, et gardé tout ordre de droit, avons prononcié et prononçons en ces escriptz par nostre diffinitive sentence que le dit procureur n’a mie prouvé ses faiz ne son entencion avant diz, et li imposons perpetuel silence sur les choses dessus dictes, et que le dit chevacier, tant par bulles de papes et de la saincte sée de Rome, quant par instrumens et lettres autentiques et tesmoins très anciens a prouvé très plenerement et souffisamment son entencion et ses faiz dessus diz. Pour quoy l’avons absoult et absolons de la demande de la court et du dit procureur dessus dicte, et li donnons licence et povoir, à lui et à ses successeurs cheveciers de Poitiers, qui seront pour le temps, car ce est son droit et de son benefice, si comme il a souffisamment prouvé, de prendre, lever et exiger les dictes pensions en et de forte monnoye tournois petiz, quant il auront cours, ou, quant il n’auront cours, en et de la monnoie usuale, courant par le temps, en prenant tant d’avantage d’icelle qu’elle montoit à la valeur et extimacion des fors tournois petiz, selon le marc d’argent, en prenant la monnoie de nostre dit seigneur le prince, qui corra parle temps, pour ce que elle vauldra en deduction de la monnoie plus forte deue. Et mandons et commandons à touz les officiers, sergens et subgez de mon dit seigneur le prince et de nous, que, par cause et occasion des choses dessuz dictes, ilz ne molestent de cy en avant ny permettent estre molestez les diz cheveciers, ou leurs genz, ne leurs biens, en aucune maniere ; et si estoit fait le contraire, qu’il le revoquent et mettent au neant, et au premier et deu estat, par la teneur de ces presentes lettres. Données à Poitiers en jugement, soubz le seel de nostre seneschauciée, le dozeme jour du mois d’aoust, l’an de grace mil ccc.lxx.

Les teneurs des dictes procurations du dit Thibaut et Thevenin Gracien s’ensuivent en ceste fourme, avecques les subscripcions contenues en ycelles :

Edoward, ainsné filz du roy d’Angleterre, prince d’Acquitainne et de Galles, dux de Cournoaille, conte de Cestre, seigneur de Biscaie et de Castre d’Ordials, faisons savoir que pour le bon rapport que nous avons eu de la souffisance, loyauté et bonne diligence de noz amez Thibaut Gracien et Nicolas Mercier

Voy. sur ce personnage la note ci-dessus, p. 118.

, nous yceulx et chascun d’eulx avons ordonné, constitué et establiz, ordonnons et establissons par ces presentes noz procureurs generaulx en la seneschauciée de Poitou, aus gaiges, proffiz et emolumens acoustumez, osté du dit office tout autre qui y auroit esté ordonné et establi avant ces heures, le quel nous en ostons par ces presentes. Et leur avons donné et donnons, et à chascun d’eulx, povoir et auctorité de faire et exercer office de procureur, de substituer ou dit office en leur absence un ou pluseurs substituz souffisans, à leurs perilz, et de faire toutes et chascunes les choses qui à office de procureur puet et doit appartenir, tant comme il nous plaira. Si mandons à nostre amé seneschal de Poitou, ou à son lieutenant que, receuz de noz diz procureurs les seremens acoustumez en telx cas, les mettent ou facent mettre en possession du dit office, et à yceulx ou chascun d’eulx seuffre et face noz subgez, en ce qui appartendra ou dit office, obeir et entendre diligemment. Et en oultre mandons à nostre receveur illecques, qui ores est ou qui par le temps sera, que à noz diz procureurs, tant comme il seront en dit office, il paie au face paier leurs diz gaiges aus termes acoustumez, en prenant lettre de recognoissance d’eulx, parmi la quelle avec la copie de ces presentes soubz seel autenticque, voulons que ce que ainsi paié leur aura lui soit alloé en ses comptes et rabatu de sa recepte sanz contredit. Donné à Angolesme, le derrenier jour de janvier, l’an de grace m.ccc.lxvii. — Visa. C. Aymeri.

Saichent touz que je Thibaux Gracien, procureur general en Poitou

Le scribe a écrit par distraction Pontieu.

pour très haut et très excellent prince monseigneur le prince d’Acquitainne et de Galles, ayans pouvoir pour ma procuracion de constituer en lieu de moy un ou pluseurs substituz, ay feit, ordonné, constitué et establi, fais, ordonne, constitue et establis par ces presentes Thevenin Gracien, mon neveu, mon substitut general en la seneschauciée de Poitou, et lui ay donné et donne povoir et auctorité de comparoistre en lieu de moy et pour moy en jugement et dehors, ès choses touchans mon dit office, de faire office de substitut et de faire en mon absence procureur en lieu de moy et pour moy, comme mon substitut general, toutes et chascunes les choses qui appartiennent à office de sustitut et que je feroie et faire pourroie en ce qui touche et appartient et puet appartenir à mon dit office, se je estoie presens, parmi ce qu’il a juré aus sains ewangiles nostre Seigneur faire et exercer bien et loyaument le dit office en mon absence et comme mon substitut, au proffit de nostre dit seigneur et de ses subgez. En tesmoin des quelles choses, je ay donné au dit Thevenin ces lettres, signées de mon seing et seellées de mon propre seel. Donné le samedi emprès Reminiscere, l’an mil ccc.lviii

Le 11 mars, samedi après le second dimanche de Carême.

.

T. Gracien. — Enregistrée. Faicte est collation.

Quas quidem litteras et omnia et singula in eis contenta, et prout in eisdem continentur, laudamus, approbamus, ratifficamus, et ad supplicacionem et requestam dicti magistri Johannis de Loberto, capicerii, de speciali gracia, ex certa sciencia, tenore presentium, confirmamus, supplentes omnem defectum, si quis esset forsitan in eisdem. In cujus rei testimonium, nostrum magnum hiis nostris presentibus litteris jussimus apponi sigillum. Datum Xanctonis, quinta die mensis maii, anno Domini millesimo ccc° septuagesimo primo.

Quas quidem litteras et sentenciam in eisdem insertam, prout juste et sancte lata fuit, ac omnia et singula alia in litteris ipsis contenta, rata et grata habentes, in quantum ipsam concernunt sentenciam et jus capiceriatus ecclesie Pictavensis superius nominati, laudamus, approbamus et harum serie confirmamus, auctoritate nostra regia et de gracia speciali. Universis et singulis justiciariis nostris et eorum loca tenentibus, presentibus et posteris, et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, presentium tenore mandantes quatinus capicerium Pictavensis ecclesiæ antedicte et suos successores, pro tempore capicerios ejusdem, presentes et futuros, nostra presenti gracia et confirmacione uti et gaudere pacifice deinceps faciant et permittant, contra harum tenorem non sinendo eosdem aliqualiter molestari, quin ymo si que secus acta repererint, eadem ad statum pristinum et debitum reducant, seu faciant rejecta mora reduci. Et ut hec omnia stabilitate perpetua solidentur, hiis presentibus nostrum fecimus apponi sigillum. In ceteris nostro et alieno in omnibus jure salvo. Datum Parisius, iiim die aprilis, anno Domini millesimo ccc° octuagesimo, et regni nostri primo.

Per regem, ad relacionem dominorum Andegavie et Burgundie ducum, vobis et pluribus aliis consiliariis presentibus. P. Manhac.

DCXLII 3 avril 1381

Rémission octroyée à Boniface Vassaut, écuyer, pour avoir laissé mettre à mort sousses yeux un nommé Pierre Tenebrer, dit l’Aumônier, de Bressuire, que le sénéchal de Poitou l’avait chargé de prendre au corps et qui résista aux sergents.

AN JJ. 118, n° 442, fol. 233 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 160-164

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie des amis charnelz de Boniface Vassaut

Vassaut ou Vassant. D’Hozier donne la généalogie, à partir du xve siècle, d’une famille de Vassan (nom orthographié aussi à l’origine Vassent), dont on peut suivre plusieurs branches en Champagne, en Picardie et dans l’Île-de-France (Armorial gén. de la France, in-fol, 1738, t. Ier, 1re partie, p. 606 et s.) ; maison ne saurait affirmer que le personnage ici nommé puisse se rattacher à cette maison.

, escuier, comment, pour ce que un appellé Pierre Tenebrer, dit de Lussay, autrement appellé Aumosnier de Bersuire, engendré de frère Guillaume Braer, abbé de l’Ausie en Gastine

Cet abbé de l’Absie en Gâtine est inconnu aux auteurs de la Gallia christiana, qui n’en nomment aucun entre les années 1301 et 1402 (t. II, col. 1383). Il appartenait sans doute à une famille Braer, possesseur à cette époque du domaine de la Fontaine, paroisse d’Échiré, qui d’elle a pris le nom de la Fontaine-Braer, auj. la Fontaine-Bray.

, et de Marion Tenebrere, femme diffamée, estoit homme de très mauvaise et deshonneste vie, diffamé et renommé d’avoir commis, fait et perpetré pluseurs crimes, malefices et deliz, et en especial d’avoir batu, villenné et navré pluseurs personnes, tant religieuses comme autres, d’avoir derobé plusieurs marchans et autres gens, et aussi d’avoir esté present et consentant à tuer et murdrir, au pays de Poitou, un marchant nommé Pierre Baribaut, nostre amé et féal Hugues de Froideville

Hugues de Froideville, chevalier, était maréchal d’Auvergne en 1373 et servait alors en Poitou, sous les ordres du duc de Berry, à la tête d’une compagnie de cinq chevaliers et de vingt-quatre écuyers. (Extrait d’un compte de Jean Le Mercier, trésorier des guerres, publié dans notre t. IV, p. lxv). Pendant le mois d’août de cette année, il dirigeait les opérations du siège du château de Lusignan. (Id. ibid., p. xlix). Hugues de Froideville figure sur les listes les plus autorisées des sénéchaux du Poitou, entre les années 1376 et 1383, comme successeur de Perceval de Cologne. Outre le présent acte, nous en pouvons citer quatre autres où il prend ce titre : 1°, 1er septembre 1378. Ajournement devant lui, en qualité de sénéchal, de Jacques de Surgères, seigneur de la Flocelière, pour défendre à celui-ci d’inquiéter Louis de Granges sur le fait de ses armoiries. (Dom Fonteneau, t. VIII, p. 155, 157 ; Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, t. II, p. 685). — 2°, 20 mai 1381. Acte donné aux assises de Niort par le lieutenant général de Hugues de Froideville, sénéchal de Poitou pour le duc de Berry, au procureur de Héliot Tison, écuyer, de la représentation qu’il avait faite de la mainlevée d’une saisie de ses biens, pour n’avoir pas réparé l’arceau du pont de Niort, comme il s’en était chargé. (Coll. dom Fonteneau, t. XX, p. 97) ; — 3°, 27 juin 1382. Le maire de Poitiers promet aux fermiers du farinage qui se levait dans la ville et la châtellenie de Poitiers, de les garantir et désintéresser envers le sénéchal Hugues de Froideville, qui avait mis ce droit en la main du roi. (Arch. de la ville de Poitiers, E. xiiii, p. 86) ; — 4° à la suite d’un compte daté de 1385 d’une taille levée à Poitiers sur le clergé et le tiers état, est transcrit un mandement du même sénéchal, ainsi qu’un autre de Bertrand de Maumont, évêque de Poitiers, ce dernier donné le 24 mai 1385. (Id. ibid., J. 3.) Il semble résulter de ce document que le sr de Froideville était encore sénéchal pendant la première moitié de l’année 1385. Suivant Froissart, il devint ensuite sénéchal de Toulouse. (Edit. Kervyn de Lettenhove, t. XI, p. 28, 212, etc.). — Il était originaire d’Auvergne, ou du moins y avait des terres patrimoniales. Cela résulte de plusieurs accords enregistrés au Parlement que nous mentionnerons sommairement. Le 1er août 1386, il fit abandon à Morinot de Tourzel, chambellan du duc de Berry, des droits qu’il possédait sur les terres d’Allègre, de Saint-Just, d’Auzelles, et de Chomelix, dont le duc avait fait don à son serviteur. (Arch. nat., X1c 53). Un procès que Hugues de Froideville soutenait contre Jean de Billom, se termina le 28 août 1388 par une transaction (id., X1c 57). Quelques années plus tard, il disputait encore à Catherine de Bruant certains droits sur la terre de Bruant ; un accord mit également fin à cette contestation, le 4 février 1394 n. s. (Id. ibid., X1c 69).

, seneschal de Poitou pour nostre très cher et très amé oncle le duc de Berry et d’Auvergne, comte de Poitou, manda et commanda à Symon Dousset et à tous les autres sergens de nostre dit oncle, et aussi au dit escuier que, quelque part que le dit Ausmonier trouver pourroient en la jurisdicion et pouvoir de nostre dit oncle, hors lieu saint, il le preissent et arrestassent de par ycellui nostre dit oncle et le menassent en ses prisons plus prouchaines du lieu ou priz l’aroient, sanz en faire delivrance ou recreance sanz especial mandement du dit seneschal. Or est ainsi que le dit escuier, voulant obeir au mandement d’icellui seneschal, monta à cheval avecques autres à soy acompaigniez pour aler prendre ycellui Ausmonier, selon que mandé et commis lui estoit, comme dit est. Et après qu’il ot oy dire que le dit Ausmonier aloit de la dicte abbaie de l’Ausie à un lieu appellé la Roche, lui et ses diz compaignons se mirent sur le chemin en un boiz appellé de la Roche, afin que miex peussent excecuter le dit mandement, pour ce que ycellui Aumosnier estoit très bien monté. Et quant ycellui escuier apperçu ycellui Aumosnier venir, il se tray vers lui, pour lui monstrer et lire son dit mandement, et fere et acomplir ce que par ycellui mandé et commis lui estoit. Si advint que, tantost que les compaignons du dit escuier vouldrent mettre la main ou dit Aumosnier pour le prendre, il se mist en rebellion et leur contresta, et avecques ce feru et navra ou bras un d’iceulx compaignons, appellé Jehan Gautier ; pour cause des quelles contradiction, rebellion et navreure, les diz compaignons batirent et navrerent le dit Aumosnier par maniere que mort s’est ensuye en sa personne. Et combien que le dit escuier ne ferist ou batist aucunement le dit Aumosnier, ainsi que l’en dit, toutevoyes lui, doubtant povoir estre aucunement traveillié ou temps avenir, pour ceste cause, nous a fait humblement supplier que, considerées les choses dessus dictes et qu’il a servi longuement et loyaument nostre très cher seigneur et pere, dont Diex ait l’ame, et nous ou fait des guerres, et est prest et appareillié de faire dores en avant à son povoir, il nous plaise sur ce lui eslargir nostre grace. Pour quoy nous, inclinans à la dicte supplication, pour regard de ce que dessus est dit, à ycellui escuier, tant comme lui touche et peut toucher, avons ou dit cas quittié, remis et pardonné, remettons, quittons et pardonnons par ces presentes, de grace especial, auctorité et plaine puissance royal, le fait et cas dessus diz avecques toute paine, amende et offense corporelle, criminele et civile en quoy il peut estre encouruz ou avoir commis envers nous, pour cause de ce, en aucune maniere, en le restituant et remettant à sa bonne fame, renommée, au pays et à ses biens non confisquiez, pourveu que, en tant comme lui touche, il fera satisfaction civilement à partie, se il est aucun qui en face poursuite. Si donnons en mandement à tous nos justiciers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chacun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, laissent et seuffrent le dit escuier joir et user paisiblement, sanz faire ou soufrir que contre la teneur de ces presentes il soit traveillié, molesté ou empeschié, ores ne ou temps avenir, en corps ne en biens en aucune maniere. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tous jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, le iiie jour d’avril l’an de grace mil ccc. quatre vins, et le premier de nostre regne.

Par le roy, present monseigneur le duc de Bourgongne. P. Manhac.

DCXLIII 4 juillet 1381

Lettres de rémission en faveur d’Aymar Malemain, impliqué dans l’assassinat d’André de Parthenay, commis par le beau-père de celui-ci, Perrot Loyau, écuyer, et son beau-frère, Gillet Loyau.

AN JJ. 119, n° 154, fol. 101 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 164-166

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, nous avoir esté exposé de la partie de Aymart Malemain, contenant que, comme ou moys de juing derrenierement passé Perrot Loya

Nommé Pierre Leaue et Leau, dans deux lettres de rémission accordées à sa propre personne, pour ce même meurtre, en juillet 1381 (JJ. 119, n° 159, fol. 103), et le 22 mai 1382 (JJ. 120, n° 308, fol. 450). Voy. ci-dessous à ces dates.

, escuier, demourant en la parroisse Saincte Gemme en Poitou, qui nagueres avoit marié une sienne fille appellée Jeanne Loyelle, à André de Pertenay

On rencontre souvent des personnes nobles portant ce nom de Parthenay, n’ayant aucun lien connu avec l’illustre maison. Larchevêque de Parthenay. Il y eut certainement plusieurs familles de ce nom ; mais les généalogies n’en ont pas été dressées. Nous en rencontrerons divers autres membres par la suite.

, se fust transporté en l’ostel du dit exposant quí estoit son voisin à moins d’une lieue, et lui eust dit qu’il estoit mal content et courroucié contre le dit de Partenay, son gendre, pour ce qu’il menoit trop dure vie à sa dicte fille, qui estoit et est jeune damoiselle de bon lignaige et de bonne vie et renommée, et nouvellement mariée au dit André, et qu’il la batoit et deschassoit moult inhumainement, de quoy il estoit commune renommée au pays, et aussi eust le dit Perrot prié moult affectueusement au dit exposant que il lui feist compaignie à aler à Coulonges, où demouroit le dit de Partenay, son gendre, pour ycellui blasmer, se il le trouvoit, et le induire à ce que sa dicte femme il voulsist traictier amiablement, ainsi que il appartenoit. Le quel exposant, meu d’amour et affection que il avoit au dit Perrot, son voisin, desirans aussi de mettre à bonne paix et accort les diz mariez, s’en ala avec ycellui Perrot, un baston en sa main, pour ce que c’estoit environ un quart de lieue loins de son hostel, sanz ce toutesvoies que il eust entencion de en faire aucun mal. Et ainsi que il furent là venus, il trouverent le dit André hors de son hostel, le quel le dit Perrot Loya et un sien filz nommé Gilet, qui survint à l’eure, il ferirent et batirent en tele maniere que mort s’en ensuy en sa personne. Pour quoy les diz Perrot et Gilet, son dit filz, furent prins et emprisonnez. Et combien que le dit exposant ne ferist ne ne touchast le dit de Partenay, ne ne lui fist autre chose que dit est, et que au dit Perrot il ne donnast conseil, confort ou ayde autrement que dit est, mais tantost que il vit la maniere du dit fait, s’en retourna en son dit hostel tout doulent, couroucié et effreé de ce ; toutes voies, jà soit ce que partie adverse ne lui en demande riens, le dit exposant, doubtant rigueur de justice, mesmement que on dit que le dit Gilet lui impose que il fery le dit André i. cop du dit baston, n’ose bonnement demourer ou pays et se doubte que justice ne procede rigoreusement à l’encontre de lui, se par nous ne lui est sur ce impartie nostre grace et misericorde, si comme il dit. Si nous a humblement fait supplier que, comme il ne soit autrement coulpable du dit fait que dit est, et aussi que tousjours il ait esté et encores est de bonne vie et renommée, sans avoir esté reprins ou diffamé d’aucun meffait, nous lui vuillions sur ce impartir nostre dicte grace et misericorde. Pour quoy nous, eue consideracion aux choses dessus dictes, avons au dit Aymart Malemain, ou cas dessus dit, quittié, remis et pardonné, quittons, remettons et pardonnons, de grace especial, plainne puissance et auctorité royal, par ces presentes, toute paine, amende et offense corporelle, criminele et civile, et tout ce en quoy il puet estre et avoir encouru pour cause de ce ; et l’avons restitué et restituons à sa bonne fame et renommée, au payz et à ses biens. Et sur ce imposons silence perpetuel à nostre procureur. Sauf et reservé le droit de partie adverse à poursuir civilement tant seulement, se aucun y a qui à l’encontre du dit Aymart en vuille faire poursuite. Si donnons en mandement, par la teneur de ces presentes, au gouverneur de la Rochelle et à touz noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieux tenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit Aymart Malemain facent, sueffrent et laissent joir et user paisiblement de nostre presente grace et remission, et contre la teneur de ces presentes ne le molestent, traveillent ou empeschent, facent, sueffrent ou laissent estre molesté, traveillié ou empeschié en corps ou en biens, en aucune maniere ; mais se son corps estoit pour ce prins ou emprisonné, si le mettent ou facent mettre avec ses biens, qui pour cause de ce seroient prins, saisis, arrestez, levez ou empeschez, à plainne delivrance tantost et sanz delay. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable perpetuelment et à touz jours mais, nous avons fait mettre à ces presentes nostre seel ordené en l’absence du grant. Sauf nostre droit en autres choses et l’autrui en toutes. Donné à Paris, le iiiie jour du moys de juillet l’an de grace mil trois cens quatre vins et un, et le premier de nostre regne.

Es requestes de l’ostel. J. d’Ailly. — G. Guerout.

DCXLIV Juillet 1381

Lettres de rémission accordées à Pierre Léau, écuyer, coupable de meurtre sur la personne d’André de Parthenay, son gendre

Ce meurtre est relaté dans les lettres précédentes données en faveur d’Aymar Malemain, mais avec beaucoup moins de précision et de détails. Le beau-frère d’André de Parthenay y est nommé Perrot Loya (Loyau) et est dit habitant de Sainte-Gemme. Pierre Léau ou Loyau ne put sans doute obtenir l’entérinement de la présente rémission ; car, environ un an après son crime, on le retrouve en prison et soumis à la torture. Le 22 mai 1382, il lui fut délivré d’autres lettres de grâce dont nous donnerons, à leur date, la seconde partie seulement, le commencement étant la reproduction exacte, presque mot pour mot, du récit qui se trouve ici

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AN JJ. 119, n° 159, fol. 103 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 166-170

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté humblement exposé de la partie des amis charnelx de Pierre Leaue, escuier, que comme le dit Pierre ait nagueres mariée une sienne fille appellée Jehanne à André Partenay, soubz esperance qui s’entramassent et fructifiassent ensemble comme bonnes genz, selon que ordre de mariage requiert, neantmoins durant ycellui mariage, le dit André menoit et a mené à sa dicte femme vie dissolue, mauvaise et deshonneste, car il manutenoit et gouvernoit une concubine

« De l’aage de l. ans ou environ », ajoutent les secondes lettres de rémission (22 mai 1382).

, la quelle aloit et reparroit touz les jours en l’ostel du dit André, et en a eu un bastart, et pour la dicte concubine le dit André, ou autrement, de sa voulenté desordonnée, a batu, injurié et villené, et bouté hors de sa compaignie et de son hostel par force et violence, par pluseurs foiz, à heure de mynuit et à diverses autres heures, la dicte Jehanne, sa femme, qui est jeune de l’aage de xv. ans ou environ et est femme de bonne fame, vie et renommée, et conversacion honneste, et faloit que elle alast coucher toutes les nuys ou teit aus bestes ou ailleurs en lieu non honneste ; de la quelle chose les amis de la dicte Jehanne et du dit André l’avoient pluseurs foiz blasmé et monstré qu’il laissast la dite concubine et ne frequentast plus avecques elle, et qu’il se portast honnestement avec la dite Jehanne, sa femme, et qu’il faisoit mal de ainsi la traitier et demener, dont il n’a voulu riens faire. Mais en procedant de mal en pis, le dimanche après l’Ascension derreniere passée

Le 26 mai.

, à heure de mynuit ou environ, bouta par force et violence sa dicte femme dehors de son hostel et la mena bien loing entre bois et buissons, et lui dist que elle s’en alast là où elle vouldroit et que elle ne seroit plus avecques lui. Et lors elle fu moult desconfortée et dist moult humblement à son dit mari que elle ne savoit où aler et que elle seroit en peril d’estre gastée et perdue, et que elle s’en retourneroit avecques lui, comment que ce feust ; et en s’en voulant retourner après le dit André, son mari, il la bati et navra moult enormement et inhumainement, en disant que se elle retournoit à l’ostel, qu’il la tueroit, et pour crainte de mort, elle n’y osa aler et s’en ala d’illecques toute nuit à l’ostel du dit Pierre Leau, son pere, où il avoit une grosse lieue. Et quant son dit pere la vit ainsi navrée et demenée, il en fu moult courrociez et indignez, et s’en parti pour aler devers son dit gendre ; et en alant, trouva Aymar Malemain, qui lui demanda où il aloit. Le quel Pierre respondi qu’il aloit devers son dit gendre pour savoir que c’estoit pour quoy [avoit] ainsi batu sa dicte fille. Et lors le dit Malemain, ami et affin des diz pere et gendre, veant le dit Pierre estre courrociez, dist qu’il yroit avecques lui pour blasmer le dit gendre, et afin qu’il ne se riotassent. Et ainsi qu’ilz furent près de la ville de Coulonges, ilz encontrerent Gilet, filz du dit Pierre, de l’aage de xiiii. ans ou environ, qui par le commandement de son pere ala avec lui, et quant ilz furent à l’ostel du dit gendre, le dit Pierre non aiant propos ne entencion de ferir ne villener son gendre en aucune maniere, mais lui monstrer son erreur, lui dist qu’il faisoit mal de ainsi batre et villener sa fille sanz cause, et de l’avoir ainsi mise hors de son hostel à heure de mynuit, comme dit est, et que ce n’estoit pas fait de preudomme, mais avoit fait que mauvais et desloyaulx, consideré que sa dicte femme estoit et est preude femme et sanz villain reproche. Et tantost le dit André, sanz plus dire, sacha un grant coustel qu’il portoit et s’efforça d’en ferir le dit Pierre Leau, et l’en eust feru et par aventure mis à mort, si comme par ses mauvais propos apparessoit, se le dit Pierre n’eust resisté et soy mis à deffense contre son dit gendre. Le quel Pierre, en resistant et soy defendant et repellant force par force, mist au devant du dit coustel une hache qu’il portoit, dont il attaint son dit gendre par la teste ; et pour ce que le dit André s’efforçoit tousjours de ferir le dit Pierre du dit coustel, il le frapa pluseurs cops par les braz et jambes et en autres parties de son corps, en resistant comme dessuz, et tant que le dit Pierre le fist reculer jusques à un vivier où ilz le trouverent, quant ilz arriverent, lavant ses mains, et chey dedans, dont il est alez de vie à trespassement. De quoy après il a moult despleu au dit pere et filz et aus autres leurs amis, pour honneur de la dicte femme. En nous humblement suppliant que, comme le dit suppliant soit homs de bon estat, de bonne vie, fame et honneste conversation, ce que n’estoit le dit gendre, qui estoit rioteux et noiseux et menoit mauvaise vie, et ce qui en fu fait avint par sa coulpe et fait dampnables, comme dit est, nous lui vueillions sur ce impartir nostre grace. Nous adecertes, ces choses considerées, aianz compassion du dit Pierre Leau, vueillanz rigueur de justice temperer de misericorde, le fait de la dicte mort et toute peinne et amende corporelle, criminelle et civile qu’il a et puet avoir commis et encouru, ou cas dessuz dit, et sauf le droit de partie, se aucune en est, à poursuir civilement tant seulement, lui avons remis, pardonné et quictié, remettons, quictons et pardonnons, de nostre auctorité royal et grace especial, et au païs, fame et renommée, et à ses biens qui par ban ne seroient confisquez, le restituons et remettons, et à nostre procureur et à touz autres officiers imposons silence perpetuel par ces presentes. Par la teneur des quelles nous donnons en mandement au gouverneur de la Rochelle et à touz noz autres justiciers et officiers, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, ou à leurs lieuxtenans, que de nostre presente grace et remission le facent user et joir paisiblement, sanz le molester ne empescher, ou souffrir estre molesté ne empesché en corps ne en biens au contraire, mais leurs corps et biens qui pour ce seroient pris, molestez ou empeschez, mettent ou facent mettre à plainne delivrance, et tout ce qui seroit fait au contraire remettent ou facent remettre au premier estat et deu, tantost et sanz delay. Et pour ce que ceste chose soit ferme et estable à tous jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, l’an de grace m. ccc. iiiixx et un, et de nostre regne le premier, ou mois de juillet.

Seellée soubz nostre seel ordonné en l’absence du grant, ès ans et mois dessuz diz.

Es requestes de l’ostel. G. Niczon. — Blondel.

DCXLV Juillet 1381

Don à Guy de La Trémoïlle, chambellan du roi, en récompense de ses services, pour lui et ses hoirs, de « tous les biens, tant terres arables, bois, prez, vignes, eaues, estangs, maisons, comme autres biens quelconques, à nous avenuz et escheuz pour certaines causes, de feu Nicolas Lappe, fils et hoir de feu Thibaut Lappe, jadis demourans à Bar sur Aube ». Crécy en Brie, juillet 1381

Cet acte a été transcrit une seconde fois sur le même registre, n° 4062, fol. 236 v°, et une troisième sur le registre JJ. 123, n° 240, fol. 121. Il a été publié par M. le duc de La Trémoïlle, Guy de La Trémoïlle et Marie de Sully, Livre de comptes. Nantes, in-4°, 1887, Appendice, p. 164.

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AN JJ. 119, n° 309, fol. 192 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 170

DCXLVI 29 septembre 1381

Lettres portant que, conformément à une clause du traité de Guérande, conclu au mois de janvier précédent, entre Charles VI et le duc de Bretagne, les biens confisqués sur Geoffroy de Kérimel, chevalier, en Anjou, en Poitou et en Saintonge, lui seront restitués. « Donné à Compiegne, le penultime jour de septembre l’an de grace mil ccc.iiiixx et un, et le second de nostre regne. »

P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 171

« Pourveu toutevoies que nostre dit cousin sera tenu de tenir ceulx qui auront tenu nostre parti quictes et paisibles, ou ceste soit de nulle value. Donné l’an et le jour dessuz diz

Nous ne donnons pas le texte de ces lettres : 1° parce qu’elles sont rédigées en termes généraux et qu’au point de vue du Poitou, elles ne fournissent pas plus que l’analyse ci-dessus ; 2° parce que Geoffroy de Kérimel, chevalier breton, a été l’objet déjà d’une notice dans le vol. précédent. (p. 278, note) ; 3° parce que la restitution contenue dans cet acte paraît n’avoir jamais eu lieu, comme on le verra ci-dessous par un document daté d’octobre 1386 (n° DCCVIII). Sans doute Geoffroy de Kérimel ne se conforma pas à la condition stipulée dans le post-scriptum.

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« Par le roy, à la relacion de messieurs les ducs d’Anjou, de Bourgongne, de Bourbonnois et du Conseil, ou quel estoient les arcevesques de Reims, de Rouen, vous, l’evesque de Laon

Richard Picque, archevêque de Reims (5 février 1375-6 décembre 1389) ; Guillaume de Lestrange, archevêque de Rouen (1376-11 mars 1389), le chancelier Miles de Dormans, et Pierre Aycelin, cardinal de Montaigu, évêque de Laon (janvier 1371-1385).

, le connestable, les mareschaux de Sancerre, de Blainville et pluseurs autres. J. Tabary. »

DCXLVII 6 octobre 1381

Rémission accordée à Jean Morin, Poitevin, qui, emmené à l’âge de sept ans en Angleterre par la dame de Mortemer, y était resté dix-huit années.

AN JJ. 119, n° 323, fol. 197 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 171-173

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que de la partie de Jehan Morin, du pays de Poitou, nous a esté exposé en suppliant humblement que, comme pieça lui estant jeune enfant de l’aage de vii. ans ou de viii, la dame de Mortemer

Radegonde Béchet, femme en premières noces de Guy Sénéchal, sr de Mortemer, dame de Mortemer et de Gençay, s’était remariée avec l’Anglais Adam Chel, sr d’Agorisses. (Voy. notre vol. précédent, p. 58 note). Le séjour de dix-huit ans de Jean Morin en Angleterre reporte à l’année 1363 son départ du Poitou, et tout semble indiquer qu’alors la dame de Mortemer était déjà la femme du chevalier anglais.

l’eust emmené en Angleterre, ou quel pays il a esté et demouré par l’espace de xvii. ou de xviii. ans ou environ, et jusques à ce que, à sa priere et requeste, nostre très cher et amé cousin le conte de Liney et de Saint Pol

Valeran III de Luxembourg, comte de Saint-Pol et de Ligny, châtelain de Lille, etc., fils aîné de Guy de Luxembourg et de Mahaut de Châtillon. Gouverneur et lieutenant du roi à Gênes, par lettres du 30 décembre 1396, puis grand maître des eaux et forêts de France en 1402, il s’attacha au parti du duc de Bourgogne, qui le fit pourvoir de la charge de grand bouteiller de France, le 29 octobre 1410, du gouvernement de Paris en 1411, et enfin de l’office de connétable. Il mourut à Yvoy en Luxembourg, le 19 août 1413. (Le P. Anselme, t. III, p. 722 ; t. VI, p. 223.)

l’a ramené par deça, et combien que oncques ne se armast contre nous ne que il n’ait pendant le dit temps passé par deça la mer, toutesvoies pour doubte de rigueur de justice, il n’ose bonnement aler, converser ne venir par nostre royaume ou dit pays de Poitou, là où il fu né et là où il a ses amis et ses heritages, si comme il dit. Sy nous a supplié que sur ce lui veuillions estre piteables et misericors. Pour quoy nous, eue consideracion aus choses dessus dictes, lui avons ou dit cas quictié, remis et pardonné, quictons, remettons et pardonnons de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, ce qu’il a ainsi esté et demouré par le temps dessus dit ou dit pays d’Angleterre, avec toute peine, offense et amende corporele, criminele et civile, en quoy il peut estre et avoir encoru pour cause de ce, et l’avons restitué et restituons à sa bonne fame et renommée, au pays et à ses biens, et sur ce imposons silence perpetuel à nostre procureur. Si donnons en mandement, par la teneur de ces presentes, au gouverneur de nostre bailliage d’Orleans, aus seneschaux de Xanctonge et de Lymosin, et à touz noz autres justiciers et officiers, et à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que le dit Jehan Morin facent, souffrent et laissent joir et user paisiblement de nostre presente grace et remission, et contre la teneur de ces presentes ne le molestent, traveillent, ou empeschent, facent, seuffrent ou laissent estre molesté, traveillié ou empeschié en corps ou en biens, en aucune maniere, mais se son corps estoit pour ce pris ou emprisonné, si le mettent ou facent mettre avec ses biens, qui pour cause de ce seroient pris, saisiz, arrestez, levez ou empeschiez, à plaine delivrance tantost et sanz delay. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable perpetuelment et à touz jours mais, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf nostre droit en autres choses et l’autruy en toutes. Donné à Compieigne, le vie jour d’octobre l’an de grace mil ccc. iiiixx et un, et le second de nostre regne.

Seellée soubz nostre seel ordené en l’absence du grant.

Par le roy, present monseigneur le duc de Bourgongne. J. d’Ailly.

DCXLVIII Novembre 1381

Lettres de rémission octroyées à Jean Du Mas, archiprêtre de Mauzé, qui, assailli par des habitants de la Rochelle, contre lesquels il publiait des sentences et mandements apostoliques, frappa à mort, en se défendant, l’un d’eux nommé Pierre Barthélemy.

AN JJ. 119, n° 402, fol. 234 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 173-175

Karolus, etc. Notum facimus universis, presentibus et futuris, nobis pro parte amicorum carnalium magistri Johannis de Manso, bacalarii in legibus et archipresbyteri de Mausiaco, Xanctonensis diocesis, [expositum fuisse

Mots omis par le scribe.

], quod cum ipse, tanquam verus catholicus, olim quadam die certos processus apostolicos publicaret et exequeretur contra quosdam homines in villa de Rupella existentes, ipsis processibus inobedientes, eisdem exhibendo dictos processus et dicendo quod dictis processibus et mandatis apostolicis obedirent, quod ipsi sue salutis immemores facere dampnabiliter recusarunt, quinymo ex hiis indignati contra ipsum archipresbyterum et executorem se protinus insurgentes et commoti : « Fy, fy de te et tuis hujusmodi processibus apostolicis ! Tu es unus ribaldus, garcio, proditor et hereticus, et si te tenere possimus, in tali loco te ponemus quod nunquam videbis solem, et te faciemus mori mala morte. » Et hiis non contenti, magnos lapides in eum projecerunt vociferantes unanimiter et terribiliter in suo vulgari : « A luy, à luy ! » Et hoc facto, unus ipsorum vocatus Petrus Bartholomei, clericus, in dictum archipresbyterum manus injecit violentas, ipsum per capillos sui capitis fortiter trahendo et eum in hospicio suo, aliquibus suorum complicum et inobedientium ipsum executorem per spatulas turpiter impingentibus, violenter satagendo. Tunc archipresbyter ipse, videns se sic per dictos inobedientes et complices invasum et oppressum, et quod tunc fugere comode non poterat, metu mortis et terribilis hujusmodi insultus ac comminacionum dictorum complicum se defendendo et resistendo eontra eos, ac vim vi repellendo, cum aliàs eorum manus evadere nequivisset, quemdam gladium quem continue secum deferre consueverat evaginavit, de quo predictum Petrum Bartholomei, qui sic ipsum archipresbyterum per capillos trahebat et male tractabat, in calido motu percussit et sic à manibus ipsius et aliorum suorum complicum recessit ; ex qua percussione postmodum mors in ipsius Petri Bartholomei personam fuisse dicitur subsecuta. Et licet ipse archipresbyter remissionem et indulgentiam quatinus indigebat, à sancta Dei ecclesia super hoc obtinuerit, attamen ipse qui expost villam predictam de Ruppella non frequentavit, dubitat per justiciam temporalem super hoc in corpore sive bonis impediri, nostram gratiam humiliter sibi super hoc impartiri supplicando. Nos igitur, habito respectu ad predicta, factum mortis predicte ac omnem penam, offensam et emendam corporalem, criminalem et civilem, quam et quas idem archipresbyter incurrit et incurrere potuit pro predictis, eidem in casu predicto, et salvo jure partis civiliter prosequendi, remisimus, remittimus et quictamus, ac eum ad patriam famam et bona sua restituimus, auctoritate nostra regia et de gratia speciali, per presentes, procuratori nostro silentium perpetuum imponentes. Dantes per eosdem presentes in mandatis senescallo Xanctonensi et gubernatori de Ruppella, ceterisque justiciariis et officiariis nostris, presentibus et futuris, vel eorum locatenentibus et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, quatinus prefatum archipresbyterum nostra presenti gratia et remissione uti et gaudere pacifice faciant et permittant, nec ipsum in corpore sive bonis propter hoc impediant seu molestent, aut impediri seu molestari paciantur à quoquam, sed si quid in contrarium factum vel attemptatum fuerit, ad statum pristinum et debitum reducant aut reduci faciant indilate. Quod ut firmum et stabile permaneat in futurum, nostrum presentibus litteris fecimus apponi sigillum. Nostro in aliis et alieno in omnibus jure salvo. Datum Parisius, mense novembris anno Domini millesimo ccc° octogesimo primo, et regni nostri secundo.

Per consilium. G. Miton. — T. d’Estouteville.

DCXLIX Décembre 1381

Rémission accordée à Moricet Briet, pauvre laboureur de Gentray, pour le meurtre d’un nommé Perrot Bordereau qui, au mois d’octobre précédent, à la faveur des gens d’armes, nombreux alors dans le pays d’environ, était venu de nuit voler le vin et le blé du dit Briet.

AN JJ. 119, n° 428, fol. 249 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 176-178

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que comme de la partie de Morisset Briet, povre laboreur de terres, demourant en la chastellenie de Saint Maixant, nous ait esté exposé que, ou mois d’octobre dernier passé ou environ, que pluseurs grans quantitez de genz d’armes furent ou pays de Poitou en une petite ville champestre appellée Saint Eraye et logiez tout alentour, et povoient bien estre trois mille chevaux ou environ, si comme l’on disoit, qui vivoient sur le pays et prenoient toutes manieres de vivres et autres choses qui bonnes leur sembloient, et soubz umbre et coleur d’eulz, pluseurs malfaicteurs faisoient et perpetroient pluseurs excès et malefices par nuit et par jour, il avint, le viie jour du dit mois ou environ, que aucunes des dictes genz d’armes estanz ou dit pays, vindrent en un village appellé Gentray, et aussi soubz umbre d’eulz y vint par nuit, à l’eure de prinsomme, Perrot Borderea, homme mal renommé et passa à la dicte heure devant la maison du dit exposant qui lors estoit en son lit, et fu apperceu par la femme du dit exposant qui estoit et encores est ensainte d’enfant, laquele veilloit en la dicte maison, que le dit Borderea aloit en une petite maison qui est du dit exposant et de sa dicte femme, en laquele il avoient un pou de vin et deblé, qui estoit aussi comme tout leur vaillant, que il avoient là mis pour estre à sauveté et pour en avoir la substantation d’eulz et de leurs povres petits enfanz. Et tantost que la dicte femme l’ot veu, elle dist au dit son mary ces paroles : « Sire, levez vous, que je voy un homme qui entre en nostre hostel, et croy bien qu’il y va pour nous desrober, et ne sçay se il est des genz d’armes qui sont sur le pays, ou qui est, mais je vois veoir qui il est ». Et d’illec la dicte femme se departi pour aler là, et trouva le dit Borderea qui avoit rompu l’uys de la dicte maison et traioit du vin des diz mariez, et en avoit jà aimpli deux grans vaisseaux. Et lors la dicte femme s’escria en disant : « A l’aide ! l’en nous robe », et le dit Borderea la frappa tant avant qu’il la tumba par terre. Si cria la dicte femme : « Au murtre ! » Pour le quel cry le dit exposant se leva du lit tout effraié, et prist un baston en sa main, et vint à sa dicte femme, la quele il trouva par terre ; et ainsi comme il arriva au dit lieu, le dit Borderea qui avoit une espée nue en sa main, apposa la dicte espée à la poitrine du dit exposant, le quel fu de ce tout espovantez et doubta que le dit Borderea le meist à mort. Et pour resister, fery le dit Borderea parmi la teste du dit baston et l’abati par terre, et s’en est mort ensuye en la personne du dit Borderea. Et quant le dit exposant vit le dit Borderea mort, cuidans qu’il fust des genz des routes dessus declairées, il ot paour que, se les dictes genz le savoient ainsi mort, qu’il n’en preissent sur le pays grant vengence, mesmement que quant aucuns de leurs genz estoient batuz au pays, les dictes genz d’armes en batoient pour un vint, et porta ycellui exposant le dit Borderea mort en une riviere appellée la Sevre, la quele passe auprès du dit village. Pour les quelz cas le dit exposant est detenu prisonnier en la prison du prieur de Sovigné

La paroisse et le prieuré de Souvigné sont fréquemment mentionnés dans le Recueil de chartes et documents pour servir à l’hist. de l’abbaye de Saint-Maixent, publié par M.A. Richard (t. XVI et XVIII des Arch. hist. du Poitou). Le prieuré de Souvigné fut réuni à la mense abbatiale de Saint-Maixent par une bulle du 15 des calendes d’août 1418, mais l’union ne fut rendue définitive qu’après la mort du prieur Hugues Tousselin, arrivée le 2 janvier 1420 n.s., lequel était à la tête du prieuré dès l’année 1380. (Bibl. nat., ms. latin 13818, fol. 293.)

, membre de l’abbaye de Saint Maixant, du quel prieur les diz mariez sont subgiez levans et couchans. Si nous a fait humblement supplier le dit exposant que, comme il ne pourroit procurer ses justifications et defenses, qu’il a justes et bonnes en ceste partie, pour ce que les dictes choses se firent de nuit, comme dit est, nous veuillions avoir de lui pitié et lui elargir nostre grace. Nous adecertes, ces choses considerées, avons de grace especial et de nostre auctorité royal, au dit Morisset les cas criminelz dessus declairez, avec toute peine et amende corporele, criminele et civile, qu’il a pour ce encorue, quictié, pardonné et remis, quictons, pardonnons et remettons par ces presentes, ou cas que par bonne renommée et par le serement des diz mariez, que l’en dit estre de bonne fame, le fait sera trouvé estre avenu par la maniere dessus devisée et que le contraire ne sera prouvé ; et le dit suppliant avons restitué et restituons à sa bonne fame et renommée, au pays et à ses biens, en lui mettant son corps et ses diz biens pour ce empeschiez à plaine delivrance, reservé le droit de partie à poursuir civilement tant seulement. Si donnons en mandement à touz noz justiciers et officiers de nostre royaume et à chascun d’eulz, si comme à luy appartendra, ou à leurs lieuxtenans, que pour cause ou occasion des cas et crimes dessus diz, il ne empeschent ne molestent en aucune maniere le dit suppliant, mais son corps et ses biens mettent et facent mettre au delivre du tout, en le faisant joir et user de nostre presente grace, sanz ce que ce face aucun prejudice à la justice et juridicion des diz religieus ou temps avenir. Et que ce soit chose ferme et estable à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruien toutes. Donné à Paris, ou mois de decembre l’an de grace mil ccc. iiiixx et un, et de nostre regne le second.

Par le conseil. S. de Caritate. — F. de Metis.

DCL Décembre 1381

Confirmation des lettres de Philippe de Valois du mois d’août 1329, ratifiant un accord conclu, à la suite d’une enquête, entre l’abbé de Charroux et les gens du roi du comté de la Marche, touchant la justice de Charroux.

AN JJ. 120, n° 26, fol. 17 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 179

Karolus, etc. Notum facimus universis, presentibus et futuris, nos litteras infrascriptas vidisse, quarum tenor talis est :

Philippus, Dei gratia Francorum rex. Notum facimus etc. nos infrascriptas vidisse litteras, formam que sequitur continentes :

Universis presentes litteras inspecturis, Raymbaudus de Rechignevoisin, archidiaconus in ecclesia Eduensi, etc… Actum apud Sanctum Remigium in Varena juxta Ligerim, anno Domini millesimo ccc° xx° nono, mense augusti

C’est le texte des lettres de Philippe de Valois, contenant l’enquête commencée par Itier de Puy-Aymar et Renaud d’Ahun, continuée par Raimbaud de Rechignevoisin et Hugues Pouvreau, sénéchal de la Marche et de Limousin, les pouvoirs de ces deux derniers commissaires, datés du 6 mars 1326 n.s., et l’accord conclu à Charroux, le lundi avant la Toussaint 1326, tels qu’ils sont publiés dans notre premier volume, t. XI des Archives hist., p. 346-349.

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Quas quidem litteras suprascriptas ac omnia et singula in eisdem contenta, rata et grata habentes, eas et ea volumus, laudamus, approbamus, ratifficamus ac tenore presentium, de nostris gratia speciali et auctoritate regia, quathenus ut dicti abbas et conventus usi fuerunt huc usque, confirmamus. Quod ut firmum et stabile permaneat in futurum, nostrum presentibus litteris fecimus apponi sigillum. Nostro in aliis et quolibet alieno in omnibus jure salvo. Datum Parisius, anno Domini millesimo ccc° iiiixx primo, et regni nostri secundo, mense decembris.

Per consilium. N. Gaignart. — G. Guerout.

DCLI Janvier 1382

Confirmation avec vidimus des lettres du 26 novembre 1372 et autres antérieures, transférant de Niort à Loudun le ressort de l’abbaye de Saint-Maixent, tant que le comté de Poitou sera détaché de la couronne.

AN JJ. 120, n° 2, fol. 6 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 180-181

Karolus, etc. Notum facimus universis, presentibus et futuris, nos infrascriptas carissimi domini et genitoris nostri vidisse litteras, formam continentes subsequentem :

Karolus, etc… Actum et datum Parisius in castro nostro de Lupera, die xxvim mensis novembris anno Domini mccc. septuagesimo secundo, et regni nostri nono

Outre les lettres du 26 novembre 1372, dont nous avons donné le texte dans notre précédent volume, la confirmation de Charles VI contient les vidimus des actes semblables émanés des rois de France depuis cent ans : 1° de Philippe le Hardi, Paris, décembre 1281 ; 2° de Louis X, Vincennes, avril 1315 ; 3° de Philippe le Long, juillet 1317 ; 4° de Charles duc de Normandie, lieutenant du roi Jean, mars 1354 n.s. ; 5° du même Charles duc de Normandie, régent pendant la captivité de son père, Paris, avril 1358 ; toutes ces lettres imprimées dans notre recueil. (Voy. t. I, p. 18, 111 et 170 ; t. III, p. 263, et t. IV, p. 153.)

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Quas quidem litteras suprascriptas, omniaque et singula in eis contenta, rata habentes et grata, volentes ut religiosi, abbas et conventus monasterii supradicti, presentes et futuri, et eorum abbatia, ipsiusque priores et prioratus universi et singuli, ac homines eorumdem litteris suprascriptis, ac contentis et declaratis in eisdem, utantur perpetuo de cetero, prout et quathenus ipsi et eorum quilibet eisdem usi sunt hacthenus et uti consueverunt, pacifice et quiete, easque et ea volumus, laudamus, approbamus, ratifficamus, et de speciali gratia auctoritateque nostra regia, tenore presentium, confirmamus. Dantes harum serie in mandatis universis justiciarius nostris, presentibus et futuris, ac eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, et locatenentibus eorumdem quatenus ipsos religiosos, abbatem et conventum, prioresque dicte abbacie, modernos et futuros, et homines suos et quemlibet ipsorum, litteris preinsertis et nostra presenti gratia et confirmacione uti et gaudere perpetuo pacifice et quiete faciant et permittant, non permittentes ipsos aut eorum alterum in contrarium quomodolibet molestari, seu eciam impediri, sed si quid contra tenorem presentium litterarum factum vel attemptatum repererint, id ad statum pristinum et debitum reducant vel faciant indilate reduci. Quod ut firmum et stabile permaneat in futurum, sigillum nostrum litteris presentibus est appensum. Salvo in aliis jure nostro et in omnibus quolibet alieno. Datum et actum Parisius, mense januarii anno Domini m° ccc° octuagesimo primo, et regni nostri secundo

La présente confirmation de Charles VI a été publiée dans la collection des Ordonnances des rois de France, d’après le registre du Trésor des Chartes, t. VI, p. 641.

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Per consilium Parisius existens. S. de Caritate. — F. de Metis.

DCLII 8 février 1382

Confirmation du don fait par Charles V à Jean de Liniers, écuyer, de la terre de son frère Maubruni de Liniers

La terre confisquée sur Maubruni de Liniers et donnée à son frère dès l’année 1372 serait, si l’on en croit André Du Chesne, la terre d’Airvault. Mais cette affirmation a besoin d’être contrôlée. Le savant généalogiste a certainement confondu deux personnages du nom de Maubruni de Liniers : le premier mort en 1387, c’est le nôtre ; le second, qui vivait encore le 22 juin 1446 et était incontestablement seigneur d’Airvault. Ces deux personnages n’étaient point le père et le fils, comme le disent MM. Beauchet-Filleau, mais plutôt l’oncle et le neveu, et le fief principal du premier paraît avoir été la Meilleraye, comme nous le verrons dans un instant. L’erreur de Du Chesne a eu pour résultat de brouiller complètement la filiation de la famille de Liniers au xive siècle et au commencement du xve. Les généalogistes modernes, en voulant expliquer ou rendre vraisemblables les données fournies par l’auteur de l’Histoire de la maison des Chasteigners, n’ont réussi qu’à multiplier les contradictions et à augmenter la confusion. (A. Du Chesne, Hist. généal. de la maison des Chasteigners, in-fol., p. 84-85 ; Beauchet-Filleau, Dict. des anc. familles du Poitou, t. II, p. 303 et s. ; J. Richard, Généalogie de la famille de Liniers. Mémoires de la Société de statistique des Deux-Sèvres, 2e série, t. VI, 1866, p. 53 et s.)

Les principaux traits de la biographie de Maubruni de Liniers sont connus, grâce à Froissart. On sait particulièrement quels services militaires il rendit au prince de Galles et à son successeur en Guyenne. Le chroniqueur le qualifie de « moult vaillant et appert chevallier ». En 1369, il fit partie de l’expédition de James d’Audeley contre le baron de Chauvigny, qui venait de faire sa soumission à Charles V. Il accompagna, la même année, le comte de Pembroke dans sa chevauchée en Mirebalais et en Saumurois, et était encore du nombre des seigneurs poitevins qui accompagnèrent Jean Chandos, lorsqu’il voulut surprendre la ville de Saint-Savin, projet qui amena la rencontre du pont de Lussac et la mort du fameux guerrier anglais. Les années suivantes, on retrouve Maubruni au siège de Monpont (1371), à celui de Moncontour (août 1371), à la Rochelle, prêt à se joindre au comte de Pembroke, qui tente de débarquer une armée de secours (juin 1372). Quand les Poitevins enfermés dans Thouars résolurent de faire leur soumission, notre chevalier se sépara d’eux et se retira à Niort pour rester fidèle à la cause anglaise jusqu’à son dernier jour. (Voy. Froissart, édit. Luce, t. VII, p. 138-139, 189-190, 196 ; t. VIII, p. 15-17, 18-20, 39-40, 97). En effet, il mourut au service de l’Angleterre. L’an 1386, le duc de Lancastre, à la sollicitation et avec l’aide du roi de Portugal, débarqua en Galice, s’y fit proclamer roi de Castille et s’empara de quelques places. Maubruni de Liniers se distingua encore dans cette expédition, qui ne se termina pas d’une façon aussi brillante que le début semblait le promettre. Les maladies se mirent dans l’armée anglaise et enlevèrent les principaux chefs. Maubruni fut du nombre. Il succomba à Noya, petite ville de Galice, pendant l’été de 1387. (Voy. idem, édit. Kervyn de Lettenhove, t. XI, p. 327, 377, 382, 383 ; t. XII, p. 99, 211, 212, 316, 324.) Lopez de Ayala, dans ses Cronicas de los reyes de Castillas, don Pedro, don Enrique, etc., rapporte à la même époque la mort de Liniers ; toutefois il ne dit pas qu’il mourut de la peste, mais les armes à la main.

La mémoire des faits et gestes de Jean de Liniers ne nous a pas été conservée comme celle de son frère, et nous n’avons pu recueillir sur lui que quelques renseignements de famille. Sa femme se nommait Jeanne du Fouilloux. Dans un acte du 13 décembre 1387, elle est dite veuve et son défunt mari est qualifié seigneur de la Meilleraye. C’est précisément un aveu de la terre de la Meilleraye qu’elle rendait au sire de Parthenay, comme tutrice de ses enfants mineurs. (Beauchet-Filleau, t. II, p. 122). On peut en induire que Jean était mort depuis peu et que la seigneurie de la Meilleraye, dont il portait le titre, était celle qui lui venait de son frère par don de Charles V, confirmé par Charles VI. Jeanne du Fouilloux eut à soutenir, après la mort de son mari, contre Jean d’Argenton, seigneur d’Hérisson, un procès au sujet du droit de patronage de la collégiale de Ménigoute. Elle agissait au nom de Jean de Liniers, son fils mineur (il n’est point question d’autres enfants). Celui-ci mourut au cours du procès, avant le 22 mai 1393, sans laisser d’héritier de sa chair. Ses droits prétendus sur ledit patronage, ainsi que tous ses biens, passèrent à Amaury de Liniers. Celui-ci continua d’abord les poursuites, puis finit par les abandonner, reconnaissant le bien fondé des prétentions de son adversaire. Il en résulta une transaction datée du 22 mai 1393, enregistrée au Parlement qui lui donne force d’arrêt, le 21 mai 1395. A cette pièce est annexée une procuration donnée le 11 mai précédent par Amaury de Liniers, qui s’intitule seigneur de la Meilleraye, à Jean Rabateau, Jean de Bethisy et cinq autres procureurs au Parlement de Paris, pour soutenir ses causes à ladite cour en général, « et particulièrement faire accord entre lui et Jean d’Argenton, sieur de Hérisson, et le trésorier et chapitre de Saint-Jean de Ménigoute, à cause du droit de présentation et patronage, collation et institution de tous les benefices de ladite église ». Cet accord, document précieux, expose les titres des parties en remontant à la création de la collégiale de Ménigoute et à son fondateur, le chancelier Jean de Cherchemont, premier et naturel patron de cette église. Pierre de Cherchemont, chevalier, neveu et principal héritier du chancelier, lui succéda dans ce droit de patronage qui passa ensuite à sa fille, Mathurine de Cherchemont. Celle-ci était la mère des deux compétiteurs. Elle s’était mariée deux fois : la première, avant 1340, à Guy (appelé aussi Guillaume) de Liniers ; la seconde à Aimery d’Argenton, sieur d’Hérisson. Du premier lit était né entre autres Jean, le mari de Jeanne du Fouilloux, et du second Jean d’Argenton. Jean de Liniers, étant l’aîné des enfants survivants de Mathurine, aurait dû avoir le droit de patronage litigieux. Mais celle-ci en avait fait don et cession par titre authentique, avec d’autres biens, à Jean d’Argenton, en récompense de services particuliers qu’il avait rendus à sa mère. C’est pourquoi il eut gain de cause. (Arch. nat., X1c 70, sous la date du 21 mai 1395).

Les renseignements généalogiques précis fournis par ce document en contiennent implicitement d’autres. Maubruni ne laissa pas d’enfants, ou, s’il en eut, ils restèrent expatriés comme leur père, sans quoi ils eussent hérité de leur cousin, Jean, mort mineur, fils de Jean de Liniers et de Jeanne du Fouilloux. L’héritier nommé dans l’accord du 22 mai 1393, qui s’intitule seigneur de la Meilleraye, Amaury de Liniers, était, suivant toute vraisemblance, l’oncle de Jean le jeune, par conséquent le frère de Maubruni et de Jean l’aîné. De cette façon, la Meilleraye passa successivement aux trois frères, et demeura au dernier survivant. On ne manque pas de renseignements sur cet Amaury. C’est lui qui épousa Marie de Chausseraye, dame d’Airvault, fut père d’un second Maubruni de Liniers, (et non du premier, comme le veulent les généalogies imprimées), et mourut un peu avant le 11 février 1399 n.s. Maubruni II, dans plusieurs actes de la première moitié du xve siècle, est qualifié seigneur de la Meilleraye, terre qui lui venait de son père par le moyen de ses deux oncles, et d’Airvault, qu’il tenait de sa mère, et ces titres prouvent de plus que c’est lui, et non pas Maubruni Ier, qui fut marié avec Sibille Taveau. (Arch. de la Vienne, G. 736, 737, 756, 1165, etc.)

, qui était resté au service de l’Angleterre.

AN JJ. 120, n° 56, fol. 34 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 181-185

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que comme jà pieça nostre très chier seigneur et pere, que Diex absoille, considerans les bons et aggreables services que lui avoit faiz et faisoit chascun jour en ses guerres Jehan de Liniers, escuier, né du pays de Poitou, et que le dit pays estant en la main de nostre adversaire d’Angleterre, ycellui Jehan avoit touz jours tenu nostre parti, eust donné au dit Jehan, dès l’an lxxii. derreniere passé, toute la terre de Maubruni de Liniers, frere du dit Jehan, comme commise et confisquée, parce que le dit Maubruni tenoit le parti de nostre dit adversaire, du quel don le dit Jehan n’eut oncques lettres, et pour ce l’an lxxviii. ensuivant et derreniere passé, nostre dit seigneur, considerans ce que dit est et que le dit Maubruni tenoit encores le parti de nostre dit adversaire, eust de nouvel donné la dicte terre au dit Jehan, dont il eut lettres, si comme il nous est apparu ; et il soit ainsi que le dit Maubruni ait depuis touz jours tenu et encores tieigne le parti de nostre dit adversaire, nous, pour consideration des choses dessus dictes et des bons services que le dit Jehan nous fait chascun jour en noz guerres, et esperons qu’il face ou temps avenir, le dit don de la dicte terre fait par nostre dit seigneur et pere au dit Jehan, comme dit est, voulons lui estre valable, et de nouvel, se mestiers est, lui donnons, de nostre auctorité royal et grace especial, par ces presentes, ycelle terre avec les appartenances et appendences d’icelle, à la tenir, avoir et possider perpetuelment et hereditablement par le dit Jehan, ses hoirs et aianz cause de lui ou temps avenir. Si donnons en mandement par ces presentes à noz amez et feaulz genz de nos comptes et tresoriers à Paris, et à touz noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de la dicte terre mettent ou facent mettre le dit Jehan en possession et saisine, se desjà ne la posside, et d’icelle avec ses appartenances facent, seuffrent et laissent lui, ses hoirs et aianz cause joir et user paisiblement, sanz leur permettre ou souffrir estre mis empeschement en aucune maniere. Toutesvoies nostre entencion n’est pas que, ou cas que le dit Maubruni, son frere, retourneroit à nostre obeissance, pour quoy nous lui deussions ou voulsissions rendre la dicte terre, qui lui souloit appartenir, que nous en doions faire audit Jehan aucune recompensacion. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, le viiie jour de fevrier l’an de grace mil ccc.iiiixx et un, et le second de nostre regne.

Par le roy en son grand conseil ordené. L. Blanchet.

DCLIII Avril 1382

Rémission accordée à Jean Douin pour le meurtre de Laurent Bourget.

AN JJ. 120, n° 160, fol. 80 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 185-187

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie des amiz charnelz de Jehan Douyn, demourant en Poytou, que comme, environ le samedi devant karesme prenant derrenier passé, le dit Jehan Douyn eust trouvé certainne quantité de bestes qui pessoient en certains pasturages nobles appartenans à Katin Lucase, fille de feu Guillaume de la Chauviere, de la quele et de ses biens il est tuteur et administreur donné par justice, et ycelles eust pris comme faire pouvoit et luy loisoit de usage et de coustume, pour en avoir amende de vii. solz et demi, la quele lui appartient ou nom de la dicte Katin, toutes foiz que bestes estranges y sont prises et trouvées, et il soit ainsy que, en voulant mener en sauf les bestes devant dictes, vint à l’encontre un appellé Laurens Bourget, disant ycelles bestes estre siennes et qu’il ne les emmenroit point. Et lors le dit Jehan, voulant garder son droit, respondi que si feroit et que c’estoit raison ; et tantost ycellui Laurens dist derechief de felon courage que ne feroit, et, sanz plus dire, se prist au corps du dit Jehan et le jeta à terre soubz lui moult vilainnement, et le frapa pluseurs cops du poing sur la teste, et ainsi que le dit Jehan se levoit de dessouz le dit Laurens, en resistant à sa force au mieulz qu’il povoit, la fille d’ycellui Laurens le frapa d’un baston que elle tenoit par la teste jusques à grant effusion de sanc. Et lors le dit Douyn, soy veant ainsy opprimé et batu, doubtant la puissance des diz pere et fille, qui ancores s’efforçoient de le mieulz batre, en soy defendant, prist un baston qu’il osta à une bergiere et du dit baston fery le dit Laurens par la teste un seul cop, du quel il chey à terre, et après tantost se leva et s’en ala à sa maison, comme se il feust tout sain, et pou de temps après il ala de vie à trespassement. Pour occasion du quel fait et pour doubte de rigoreuse justice, s’est absentez du païz le dit Jehan, le quel en touz cas a esté et est de bonne vie et renommée et de conversacion honeste, en nous humblement suppliant que sur ce lui veuillons impartir nostre grace. Nous adecertes, ces choses, considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, le fait dessus dit avecques touz appeaulz et evocacions qui ensuiz s’en sont, se aucuns en y a, et toute peine, offense et amende corporele, criminele et civile que ycellui Jehan a et puet avoir encouru pour les choses dessus dictes, à ycellui Jehan, ou cas dessus dit, satisfacion faicte à partie avant tout euvre, lui avons remiz, quictié et pardonné, remettons, quictons et pardonnons, et au païz, sa renommée et biens non confisquiez le restituons et remettons, en mettant au neant les appeaulz et evocacions dessus diz, et à nostre procureur imposons silence perpetuele, de nostre auctorité royal et grace especial, par ces presentes. Si donnons en mandement au gouverneur de la Rochelle et à touz noz autres justiciers et officiers, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, que de nostre presente grace et remission facent et laissent le dit Jehan user et joir paisiblement, et contre la teneur d’icelle ne l’empeschent ne sueffrent estre molesté ne empeschié en corps ne en biens, maiz tout ce qui sera fait au contraire mettent et facent mettre au premier estat et deu, tantost et sanz delay. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touzjours, nous avons fait mettre à ces presentes nostre seel ordené en l’absence du grant. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, ou moiz d’avril l’an de grace mil ccc. iiiixx et un, et de nostre regne le second, avant Pasques.

Par le conseil. G. Niczon. — T. d’Estouteville.

DCLIV 22 mai 1382

Nouvelles lettres de rémission octroyées à Pierre Léau, écuyer, coupable de meurtre sur la personne d’André de Parthenay, son gendre, à condition de faire célébrer cent messes pour le repos de l’âme du défunt.

AN JJ. 120, n° 308, fol. 150 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 187-189

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir esté exposé de la partie des amis charnelz de Pierre Leau, escuier…

Toute la première partie (vingt lignes du registre), contenant le récit des mauvais traitements qu’André Parthenay faisait endurer à sa femme et la scène entre Pierre Léau et son gendre, qui eut pour dénouement le meurtre de ce dernier, étant la reproduction presque textuelle des premières lettres de rémission (juillet 1381, n° DCXLIV, ci-dessus p. 166), nous nous contentons de donner la fin de ces secondes lettres.

, qui a servi noz predecesseurs et nous ou fait de noz guerres bien et loyaument et frayé du sien grandement, si comme ilz dient. En nous suppliant humblement que, comme le dit Andrieu feust homs rioteux et noiseux et menoit mauvaise vie, et aussi que le dit Pierre pour le fait dessus dit a esté detenu prisonnier par l’espace d’un an ou environ et ancores est, en grant povreté et misere, en vile et oscure prison, en la quele il a esté gehynez, tourmentez et questionnez très durement et inhumainnement, et telement que pour doubte de la dicte gehine et tourment que souffri le dit Pierre, a fait autre confession que le casi est dessus exprimez, et pour ce que tantost que il fu pris, il fist la dicte confession par force et doubte de la dicte gehyne, il est en peril de fenir ses jours, se par nous ne lui est sur ce impartie nostre grace. Pour quoy nous, eu regart et consideracion aux choses dessus dictes et à la longue povreté de prison qu’il a pour ce soustenue et soufferte en patience, par le temps dessus dit, ou dit Pierre Leau avons remis, quictié et pardonné, remettons, quictons et pardonnons ou dit cas, de nostre auctorité royal et grace especial, par ces presentes, toute peine et offense et amende corporele, criminele et civile qu’il puet avoir encouru envers nous, pour occasion du fait dessus dit, et le restituons au païs, à ses biens, à sa bonne fame et renommée, satisfacion faicte à partie premierement, civilement tant seulement. Et pour ce que le dit Pierre, pere de la dite femme ne pourroit monstrer ne prouver bonnement l’eure que sa dicte fille vint à son dit hostel et que, pour en chastier et reprendre courtoisement son dit mary, il estoit alez comme courrouciez à lui de ce que à si tarde heure l’avoit getée et menée hors de son dit hostel, dont le dit cas est avenu, en ampliant nostre dicte grace, lui avons octroyé et octroions par ces presentes que, informacion faicte, se il est de bonne renommée ou païs et moyennant le serement de lui et de sa dicte fille, il soit receu à la verificacion de noz presentes du fait contenu en icelles, parmi ce qu’il sera tenu de faire dire et celebrer, pour le remede de l’ame du dit defunct, cent messes des mors. Si donnons en mandement par ces presentes au gouverneur de la Rochelle et à touz noz autres justiciers, presens et avenir, et à chascun d’eulz, ou à leurs lieuxtenans, si comme à lui appartendra, que le dit Pierre Leau facent et sueffrent joir et user paisiblement de nostre presente grace et remission, et contre la teneur d’icelle ne le molestent ou seuffrent estre molesté ou empeschié en aucune maniere au contraire doresenvant ; et son corps et biens qui pour ce sont et ont esté pris et arrestez, lui mettent ou facent mettre tantost et sanz delay à plaine delivrance. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touzjours, nous avons fait mettre nostre seel ordené en l’absence du grant, à ces presentes. Sauf nostre droit en autres choses et l’autruy en toutes. Donné à Meleun sur Seine, le xxiie jour de may l’an de grace mil ccc. iiiixx et deux, et de nostre regne le second.

Par le roy, à la relacion monseigneur le duc de Bourgongne. Jacques Du Val.

DCLV Juin 1382

Rémission accordée à Jean Moreau, dit Forget, de Fontenay-le-Comte, qui, chargé de la garde d’une porte de la ville, alors menacée par les gens d’armes de la compagnie de Robert de Beaumanoir, en s’opposant à trois valets armés de ladite compagnie qui voulaient forcer le passage, avait tué l’un d’eux d’un coup de hache.

AN JJ. 120, n° 304, fol. 148 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 189-193

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, de la partie de Jehan Morea

Sur la liste des notables habitants de Fontenay-le-Comte qui prêtèrent serment de fidélité au roi d’Angleterre, le 2 octobre 1361, figurent André, Pierre et Simon Moreau. (A. Bardonnet, Procès verbal de délivrance, etc., p. 163).

, dit Forget, demourant en la ville de Fontenay le Conte, à nous avoir esté exposé que comme, la veille de saincte Katherine derreniere passée, il eust esté establi et ordené à garder et defendre la porte de Saint Michiel de la dicte ville de Fontenay, de par le capitaine et les habitans d’icelle ville, pour doubte des gens d’armes et autres de la compaignie Robert de Beaumenoir, chevalier, lors estans ou païs de Poitou

Déjà des lettres de décembre 1381 (ci-dessus, p. 176) mentionnent la présence, dans les environs de La Mothe-Saint-Héraye, de nombreux gens d’armes (environ 3000 chevaux), pendant le mois d’octobre 1381. Ces deux textes se corroborent, et le fait d’un grand mouvement de troupes en Poitou à cette date ne peut être mis en doute, mais il ne laisse pas que de surprendre. Rien, dans les données générales de l’histoire, ne peut aider à résoudre les questions qu’il soulève naturellement. Qui motivait cette expédition ? Contre qui était-elle dirigée ? Quel était le but précis que se proposait Robert de Beaumanoir ? Au profit de qui travaillait-il ? Pourquoi menaçait-il particulièrement Fontenay-le-Comte, Mouzeuil, Luçon et Marans ? Robert était le second fils de Jean de Beaumanoir, célèbre par le combat des Trente, et de Tiphaine de Chemillé. On peut le suivre pendant une partie de son existence, année par année, mois par mois, grâce aux montres publiées par dom Morice. Du premier janvier 1376 au premier août 1380, il ne cesse de faire partie de la compagnie d’Olivier de Clisson, que l’on voit successivement à Vannes, à Saint-Gouëno, à Montrelais, à Ploërmel, au Château-Josselin. (Hist. de Bretagne, in-fol., t. IV (Preuves, II), p. 100, 101, 103, 172, 188, 202, 204, 206, 208, 245, 254). Ensuite on le perd de vue pendant deux ans, et le 27 janvier 1383 n.s., on le retrouve à Paris, passant sa montre avec Éon de Lesnerac, capitaine de Clisson. (Id., p. 436). Ils se rendaient en Flandre pour porter secours au duc de Bourgogne. Malgré la lacune constatée dans son itinéraire, on peut affirmer que Robert de Beaumanoir ne quitta pas un instant le service du connétable de Clisson. Mais en admettant même que celui-ci, dont les intérêts étaient considérables dans le Bas-Poitou, fût l’instigateur de cette chevauchée, elle n’en resterait pas moins mystérieuse dans ses causes et dans son but.

Ne pourrait-on supposer plutôt que les habitants de Fontenay-le-Comte s’étaient mépris sur les intentions de Robert de Beau manoir, à cause de l’indiscipline des compagnies qu’il conduisait ? La paix signée à Guérande, au mois de janvier 1381, avait mis fin à la guerre entre le roi de France et le duc de Bretagne. Quelques mois après, Olivier de Clisson lui-même avait fait un traité particulier, plus ou moins sincère, avec Jean de Montfort. Le 27 septembre, le duc fit hommage solennel à Charles VI pour son duché. (Dom Morice, t. I, p. 380 à 384). Cette pacification donna forcément des loisirs à tous les gens de guerre des deux partis, et ils devinrent sûrement un embarras pour le pays qu’ils occupaient. D’un autre côté, Jean duc de Berry éprouvait des difficultés sérieuses dans son gouvernement de Languedoc, par suite de la révolte du comte de Foix, qui lui avait déjà infligé, en juillet 1381, un échec sérieux. (Dom Vaissète, Hist. de Languedoc, in-fol., t. IV, p. 378). Serait-il téméraire, étant donné cette double situation, de conjecturer que le connétable, pour se débarrasser de gens d’armes devenus inutiles et gênants, eut donné mission à Robert de Beaumanoir et autres capitaines de les conduire en Languedoc, pour les mettre à la disposition du duc de Berry ? En passant à travers le Poitou, ces compagnies auraient pillé les campagnes et menacé certaines forteresses jugées de prise facile, qu’elles n’auraient fait que se conformer aux habitudes invétérées des routiers et de toutes les bandes de soudoyers du xive siècle.

Quant à Robert de Beaumanoir, dont la responsabilité dans cette affaire peut n’avoir été qu’indirectement engagée, et dont les intentions sont peut-être à tort incriminées dans ces lettres de rémission, il resta fidèle à Clisson jusqu’à sa mort ; il partagea son sort, l’an 1387, quand le connétable fut emprisonné par ordre du duc de Bretagne et obligé de payer une énorme rançon. Olivier, par son testament le chargea de remettre au roi son épée de connétable de France. Le P. Anselme rapporte la mort de Robert de Beaumanoir au 16 juillet 1408. (Hist. généal., in-fol., t. VII, p. 381).

, et qui de jour en jour s’efforçoient, comme ennemis du dit païs, de prendre d’assault et per force les forteresses d’icellui, et par especial la forteresse de Luçon, la ville de Marant et la forteresse de Mousuyl, qui estoient et sont assez prouchaines de la dicte ville de Fontenay, dont tout le pays estoit en grant doubte et effroy, mesmement les habitans d’icelle ville de Fontenay, qui chascun jour cuidoient estre assailliz des diz ennemis ou estre pris par trayson, pour ce que le jour de la dicte feste de saincte Katherine troiz varlès et autres leurs complices qui estoient de la compaignie d’iceulz ennemis, estoient venuz ès barrieres de la dicte ville, et avoient blecié et navré d’une espée le compaignon portier du dit exposant, et aussi avoient fait et dit pluseurs autres oultrages par quoy la dicte ville estoit en grant paour et mouvement. Et depuis, c’est assavoir le lendemain veille de saincte Katherine dessus nommée, les diz troiz varlès feussent revenuz, armez d’espées et de dagues, et leurs visages estoupez et muciez de leurs chaperons, au long d’une douve et fossé tenant au bail

Bail, première défense d’une ville, barrière, palissade. (Du Cange).

de la dicte ville jusques à la dicte porte de Sainct Michiel, à la quele le dit exposant estoit lors portier et faisoit le gueit par l’ordenance et volenté des diz capitaine et habitans, et après par force et violence feussent volu entrer en la dicte ville, oultre la volenté et licence du dit exposant qui estoit portier. Et en entrant en la dicte porte de Saint Michiel, icellui exposant se mist au devant de eulz et leur dist que ilz n’y entreroient point, pour ce que le dit capitaine lui avoit defendu que eulz ne aucun autre de la dicte compaignie d’icelles gens d’armes ne entrast en la dicte ville, sans son congié et licence ; lesquelz varlès incontinent, meuz de male volenté, l’appellerent vilain chien, et qui pis est, trairent leurs dagues et espées et courirent sur lui pour le murtrir et tuer mauvaisement, se ilz eussent peu. Et lors icellui exposant, pour soy defendre et garder de mort, et que iceulz varlès ne entrassent en la dicte vile, fery un seul coup d’une haiche qu’il tenoit l’un d’iceulz trois varlès, appellé Jehan Digaret, du quel coup mort s’en ensuy ; dont pluseurs d’iceulz gens d’armes et autres de la dicte compaignie vouldrent qu’il leur fust amendé. Pour la quelle amende paier et afin qu’il ne feissent pis, les diz habitans, saichans le dit exposant avoir fait loisiblement le dit cas, en soy defendant de mort, et pour garder la dicte ville, leur baillerent xl. frans ou environ, c’est assavoir à l’un deulz, à l’autre troiz, à l’autre quatre, et ainsi des autres jusques à la dicte somme. Non obstans les queles choses, le dit exposant se doubte qu’il n’en soit ores ou ou temps avenir poursuiz par justice et en peril de perdre son corps et ses biens, se de lui n’avons pitié et compassion, suppliant que sur ce lui vueillions impartir nostre grace et misericorde. Et nous, eue consideracion et regart aus choses dessus dictes, au dit exposant, ou cas dessus dit, avons quictié, remis et pardonné et par ces presentes de grace especial, plaine puissance et auctorité roial, quictons, remettons et pardonnons le dit fait, avec toute peine, amende et offense corporele, criminele et civile qu’il peut, pour le fait et cas devant dit, avoir esté et est encouru envers nous et justice, et le restituons à sa bonne fame, renommée, au païs et à ses biens, reservé le droit de partie à poursuir civilement, se aucune en y a qui ait cause raisonnable de l’en poursuir. Si donnons en mandement par ces presentes au gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers et officiers, presens et avenir, ou à leurs lieutenans, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, seuffrent et laissent joir et user paisiblement, sans le molester, travaillier ou empeschier, ne souffrir molester, traveillier ou empeschier en corps ou en biens dores en avant, en aucune maniere au contraire, maiz se son corps ou aucuns de ses biens estoient pour ce pris, emprisonnez, saisis ou arrestez, lui mettent ou facent mettre sans contredit à plaine delivrance. Et [pour que] ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre à ces presentes lettres nostre seel ordené en l’absence du grant. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, l’an de grace mil ccc. quatre vins et deux, et le secont de nostre regne, ou mois de juing.

Par le conseil. J. de Coiffy.

DCLVI Juin 1382

Lettres de sauvegarde données en faveur d’Isabelle d’Avaugour, vicomtesse douairière de Thouars

Une notice développée a été consacrée à la vicomtesse douairière de Thouars, dans notre précédent volume, p. 196, note. Elle prend ici le titre de dame de Mayenne, de Meduana, qui fut porté d’abord par sa sœur aînée, Jeanne, héritière d’Avaugour, mariée en 1318 à Guy de Bretagne, comte de Penthièvre, puis par la fille de celle-ci, Jeanne, duchesse de Bretagne, femme de Charles de Blois

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AN JJ. 120, n° 355, fol. 172 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 193-196

Karolus, etc. Notum facimus universis, presentibus pariter et futuris, quod nos, ad supplicacionem dilecte et fidelis consanguinee nostre Ysabellis d’Avaugour, vicecomitisse Thouarcii et domine de Meduana, vidue, asserentis ex certis et verisimilibus conjecturis justam causam metus habere ne eidem, in persona, rebus, possessionibus, terris, jurisdicionibus, hominibus et bonis suis violencie, injurie aut molestaciones vel inquietaciones indebite propter hoc inferantur, attentis laudabilibus gratuitisque serviciis per dictam supplicantem nobis et carissimo domino et genitori nostro, cujus anima in pace requiescat, ac carissimis patruis et consanguineis et aliis fidelibus nostris, in guerris nostris et aliàs diversimode impensis, et que incessanter impendere non desinit, eandem supplicantem, ad quam pro dictis causis et aliis justis ad hoc nos et non immerito moventibus, affectum sicut decet gerimus specialem, una cum ejus familia, rebus, juribus, terris, possessionibus, jurisdicionibus, usibus, hominibus de corpore et bonis suis universis in regno nostro existentibus, in et sub protectione et salva gardia nostris specialibus, ad sui juris conservacionem dumtaxat, ex nostris speciali gratia et auctoritate regia, suscipimus et ponimus per presentes, in eadem speciali et salva gardia perpetuo permansuram. Dantes serie presentium in mandatis gubernatori nostro de Ruppella ac baillivo Rothomagensi, ceterisque justiciariis nostris, modernis et futuris et qui pro tempore fuerint, vel eorum locatenentibus et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, quatinus dictam supplicantem in suis possessionibus, juribus, usibus, franchisiis, jurisdicionibus, libertatibus et saisinis, in quibus ipsam esse suosque predecessores fuisse pacifice ab antiquo repererint, in et sub dicta protectione ac speciali et salva gardia manuteneant et conservent, ipsamque ab omnibus injuriis, violenciis, gravaminibus, oppressionibus, vi armorum et potencia laycorum, ac inquietacionibus, perturbacionibus et novitatibus indebitis quibuscunque tueantur et defendant, nec sibi permittant in persona, familia, rebus, terris, usibus, juribus, jurisdicionibus, hominibus de corpore et bonis suis predictis violenter aliquas injurias aut molestaciones, seu novitates indebitas, fieri vel inferri, quas, si facta esse vel fuisse in predicte nostre salve gardie et dicte supplicantis prejudicium invenerint, eas ad statum pristinum et debitum celeriter reducant seu reduci faciant indilate, ac emendam condignam nobis et parti propter hoc prestari, et de personis de quibus dicta supplicans, vel dicti ejus familia, gentes seu homines de corpore assecuramentum habere voluerint, eisdem, juxta patrie consuetudinem, legitimum prestari faciant, presentemque salvam gardiam nostram in locis et personis ubi et prout expedierit, publicari et intimari. Penuncellos eciam seu baculos nostros regios, in signum hujusmodi salve gardie nostre, in et super bonis, domibus, maneriis et possessionibus dicte supplicantis et dictorum suorum hominum de corpore, si opus fuerit, apponi faciant, ne quis causam habeat ignoranciam allegandi, inhiberi faciendo omnibus personis de quibus extiterint requisiti, sub certis et magnis penis nobis applicandis, ne dicte supplicanti, in personis, familia, rebus, hominibus, juribus et bonis suis injuriari aut aliàs indebite molestari presumant. Et si inter supplicantem aut familiares suos, seu homines de corpore et quosvis alios, occasione bonorum suorum quorumcunque in regno nostro existentium, aliquod oriatur debatum, debato ipso et rebus contenciosis ad manum nostram, tanquam superiorem, positis, locisque ablatis primitus et ante omnia ac realiter et de facto ressaisitis et restitutis, factaque recredencia per illum seu illos judices, per quem vel quos debebit fieri, illi de dictis partibus cui de jure furit facienda, partes debatum hujusmodi facientes, ac eciam dicte nostre salve gardie infractores, et qui in contemptum ejusdem servientibus nostris et gardiatoribus super hoc deputandis, gardiatoris officium exercendo, injuriam fecerint vel offensam, seu qui inobedientes fuerint, coram judicibus ad quos predictorum cognicio pertinere debuerit, adjornent seu adjornari faciant, super hoc processuros et facturos quod fuerit racionis, exhibendo partibus, ipsis auditis, super hoc celeris justicie complementum. Et quo ad premissa diligencius exequenda, unum vel plures de servientibus nostris, quociens opus erit, eidem supplicanti gardiatores concedant et deputent, cum super hoc fuerint requisiti, sumptibus et expensis dicte supplicantis ; qui tamen de hiis que cause cognicionem [requirunt] se nullatenus intromittant. Qui quidem gardiatores et eorum quilibet faciant et facere possint omnia et singula ad gardiatoris officium spectantia et pertinere debentia, ab omnibus autem justiciariis et subditis nostris predictis gardiatoribus et eorum cuilibet, in premissis et ea tangentibus, pareri volumus et efficaciter intendi, ac auxilium, consilium et favorem prestari, si opus fuerit et super hoc extiterint requisiti. Quod ut firmum et stabile perseveret in futurum, sigillum nostrum presentibus litteris duximus apponendum. Salvo in aliis jure nostro et in omnibus quolibet alieno. Datum Parisius, anno Domini millesimo ccc° octogesimo secundo, et regni nostri secundo, mense junii.

Per consilium. G. Niczon. — Roony.

DCLVII Août 1382

Rémission accordée à Amelin Du Fresne, écuyer, complice des excès commis dans un but de vengeance au préjudice de Pierre Barriou, curé d’Asnières.

AN JJ. 121, n° 112, fol. 62 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 196-198

Charles, par la grace de Dieu, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie de Amelin Du Fresne, escuier, et Jehanne Beaujeue, sa femme, que comme la dicte Jehanne Beaujeue et Pierre Barriou, prestre, curé d’Asnieres

L’adresse de ces lettres au gouverneur de la Rochelle, alors qu’il n’y a point d’Asnières dans l’Aunis, peut être invoquée comme preuve, à défaut d’autre, qu’il s’agit d’une localité du Poitou. S’il était question du curé d’Asnières en Saintonge, c’est au sénéchal de Saintonge, alors officier royal, que commission serait donnée pour l’exécution de la présente grâce. Tant que le Poitou resta comme apanage détaché du domaine de la couronne, les actes du pouvoir souverain concernant cette province ne furent point adressés au sénéchal, qui était officier du comte, mais aux officiers royaux des pays les plus rapprochés, particulièrement au gouverneur de la Rochelle, comme il est facile de le constater par les pièces qui précèdent et qui suivent.

, eussent eu paroles contencieuses et debat ensamble, lors absent le dit Amelin du païz, il advint que, après ce que le dit Amelin fut retourné, sa dicte femme se complaint à lui des injures et debat que le dit curé lui avoit fait, et dist icelle femme au dit son mary que le dit prestre s’estoit efforcié de lui faire vilenie de son corps et qu’il l’en vengast ; du quel fait le dit Amelin fu moult dolent et courrouciez, et cuidoit le dit Amelin qu’il y eust pis, pour ce que le dit prestre est homs de vie dissolue et deshoneste et qui a mauvaise renommée au païs. Et avant que le dit Amelin peust sur ce remedier, il chey au lit malades, où il fu par longtemps ; durant la quele maladie vindrent à son hostel pour le visiter aucuns ses amis qui avoient oy nouvelles du dit fait et auxquelz, ou aucuns d’eulz, le dit prestre avoit autrefoiz meffait ; lesquelz amis du dit Amelin, tant pour eulz vangier des maulz que le dit prestre leur avoit fait, ou aucuns d’eulz, comme dit est, comme du fait et injure devant diz, se armerent du harnoiz du dit Amelin et autre qu’il avoit en son hostel et alerent par nuit en l’ostel du dit curé, et par violence rompirent les huys de la maison du dit curé, et entrerent par dedens le dit hostel ; et pour ce que ilz ne trouverent pas le dit prestre, ilz mirent ou feu ses lettres et les firent ardoir, et emmenerent un cheval et une jument qui estoient par dedens le dit hostel et qui estoient du dit prestre, et son breviaire, iiii. linceulz et ii. couvertes, et d’ilecques s’en alerent là où bon leur sambla. Et depuis de toutes ces choses a esté faicte restitucion et satisfacion entierement au dit curé ; en nous humblement suppliant que, consideré les injures devant dictes et la mauvaise renommée du dit prestre, et que les diz Amelin et sa dicte femme sont nobles et de noble lignée, et qui touz jours ont vesqu sanz aucun autre vilain blasme ou reprouche, et aussi que le dit Amelin a servi nous et noz predecesseurs en noz guerres, et fait de jour en jour, et exposé son corps et toute sa chevance ou la plus grant partie d’icelle, et que lui et sa dicte femme sont et ont esté touzjours de bonne fame, et leur desplait moult du fait dessus dit, et que il n’y ot mort, mutilacíon ne mehaing, et aussi que restitucion et satisfacion a esté faicte deuement, comme dit est, nous leur veuillons faire sur ce et impartir nostre grace et remission du dit cas. Nous adecertes, attendu ce que dit est, voulens misericorde preferer à rigueur de justice, le fait dessus dit, s’il est ainsi, et toute peine et offense corporele, criminele et civile, que iceulz conjoins ont et pevent avoir pour ce commiz et encouru ou cas dessus dit envers nous, et satisfait à partie premierement, se satisfacion n’est faicte, aux diz conjoins et chascun d’eulz avons quictié, remiz et pardonné, quictons, remettons et pardonnons, de nostre auctorité royal et grace especial, par ces presentes, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur et à touz noz autres officiers. Si donnons en mandement au gouverneur de la Rochelle et à touz noz autres justiciers et officiers, presens et avenir, et chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent et laissent les dessus diz exposans, et chascun d’eulz, joir et user paisiblement, sanz les contraindre ne souffrir estre contrains, molestez ne empeschez au contraire aucunement, en corps ne en biens, mais tout ce qui fait seroit au contraire, mettent ou facent mettre tantost et sanz delay au premier estat et deu. Et pour ce que ce soit chose ferme et estable à touzjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, ou mois d’aoust l’an de grace mil ccc iiiixx et deux, et de nostre regne le second.

Par le conseil. G. Niczon. — Filleul.

DCLVIII Décembre 1382

Rémission en faveur de Pierre Rataut, homme d’armes, coupable de vols à Vouvant et à Pouillé, et de bris de prison.

AN JJ. 122, n° 2, fol. 7 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 199-200

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, à nous avoir esté signifié de la partie des amis charnelz de Pierre Rataut

Peut-être cet homme d’armes appartenait-il à la famille Rataut de Poitou, dont plusieurs membres sont mentionnés dans des actes de janvier et de juin 1385. (Voy. ci-dessous les nos DCLXXX et DCXC.)

, comme nagueires icellui Pierre qui avoit esté par aucun temps à gaiges en la ville de la Rochelle, pour la dicte ville et le païs d’environ aidier à garder et deffendre de noz ennemis, après son retour du dit lieu de la Rochelle, pour le desir qu’il avoit de avoir harnoys et armeures pour nous venir servir en la compaignie des gens d’armes qui venoient à nostre mandement, du quel harnoys il ne povoit bonnement finer, parce qu’il avoit esté malvaisement paié de ses gaiges de service au dit lieu de la Rochelle, il eust prins et osté à deux hommes de Vouvent quatre livres iiii. solz ii. deniers moins, et à deux hommes de Poillé autres iiii. livres ou environ, pour lesquelx fais, il fu pris et emprisonné au dit lieu de Vouvent, ès prisons de nostre amé et feal le sire de Partenay, ès quelles prisons par force de questions et gehine, il confessa les choses dessus dictes. Et depuis le dit Pierre, doubtant à la cause dessus dicte estre mis à son derrenier tourment, rompy les dictes prisons et s’en party sanz congié ; et pour ce s’est absenté du pays ne jamaiz n’y osera retourner, se par nous ne lui est sur ce pourveu, si comme dient ses diz amis, en nous humblement suppliant que, comme en tous ses autres faiz il ait tousjours esté de bonne vie et honneste conversacion, et que de toutes les choses ainsi par lui confessées les parties se tiennent pour contemptes et bien sattisfiées, nous luy vueillons sur ce eslargir nostre grace et misericorde. Pour quoi nous, voulans pitié et misericorde estre preferée à rigueur de justice, à icellui Pierre, ou dit cas, avons quictié et pardonné les faiz dessus dis et chascun d’iceulx, et par ces presentes lui quictons ; remettons et pardonnons de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, avec toute peine et amende corporelle, criminelle et civile, que pour ce il puet avoir encouru envers nous, et le restituons à sa bonne fame et renommée, au pays et à ses biens non confisquiez, sattisfacion faicte à partie premierement et avant toute euvre, et parmi ce que, se doresenavant il rencheoit en tels ou semblables malefices, ceste presente grace lui soit nulle et de nulle valeur. Si donnons en mandement au gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers, ou à leurs lieux tenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit Pierre Rataut facent et sueffrent joir et user paisiblement de nostre presente grace et remission, et contre la teneur d’icelle ne le molestent ou seufrent estre molesté ou empeschié en aucune maniere. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel ordené en l’absence du grant à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou mois de decembre l’an de grace mil ccc.iiiixx et deux, et de nostre regne le tiers.

Par le conseil. P. Briet. — Dormans.

DCLIX 19 février 1383

Rémission accordée à Jean de Lage, pauvre gentilhomme demeurant à Chauvigny, qui avait dérobé, avec deux compagnons, trois chevaux et une malette remplie de reliques et d’ornements d’église appartenant à des pèlerins, dans une hôtellerie de Saint-Savin, et ne les avait restitués que plus de six mois après.

AN JJ. 122, n° 129, fol. 63 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 200-202

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, de la partie de Jehan de Lage, de Freschinay, demourant à Chauvigny, povre gentilhomme, nostre serviteur en noz guerres soubz nostre amé escuier le Poursuivant d’Amours

Jean Win ou Wyn, dit le Poursuivant d’Amour, occupait le château de Beaufort en Champagne en 1369, pour le duc de Lancastre, quand il prit le parti de Charles V. Froissart dit qu’il était l’ami d’Yvain de Galles et Gallois lui-même. (Edit. Kervyn de Lettenhove, t. VII, p. 324, 325, 539). On conserve dans la coll. Clairambault, à la Bibl. nat., une quittance des gages d’Yvain de Galles scellée du sceau de Jean Win, à Paris, le 24 avril 1373, pour des services de guerre dans le Bordelais. L’écu est écartelé : au 1er et 4, un lion à la bande brochant ; au 2 et 3, un lion, penché, timbré d’un heaume couronné et cimé d’une tête de loup, supporté par un lion et par un loup. (G. Demay, Invent. des sceaux de la coll. Clairambault, in-4°, 1886, t. II, p. 328).

, a nous avoir esté exposé comme deux ans a ou environ le dit exposant fust venuz de nuit en la ville de Saint Savin en l’ostel Jehan Couvet, hostellier, avec lui et en sa compaignie deux autres hommes, ou quel hostel le dit exposant et les diz compaignons d’un commun accort eussent priz et ostez iii. chevaulx et une malette à certains pelerins ylà hebergiez, et iceulz chevaulx et malette eussent emmenez hors du dit hostel, cuidans que en la dicte malette eust austres choses qu’il n’avoit, car dedans n’y avoit que aournemens et reliques d’eglise ; les quielx chevaux, aournemens et reliques ilz retindrent par devers eulz par l’espace de demi an ou environ, sanz en faire restitucion aucune, jasoit ce que le dit exposant et compaignons dessus diz, il a un an et plus, considerans et advertissans qu’ilz avoient mal fait, aient rendu et restitué les diz chevaulx, aournemens, reliques et malette aux diz pelerins, et leur en aient fait plaine satisfacion à leur gré. Neantmoins pour doubte de rigueur de justice, s’est absentez le dit exposant du dit païs, et n’y oseroit bonnement retourner, si comme il dit, se de nous n’avoit remission du dit fait, en nous humblement suppliant que nous sur ce lui vueillons impartir nostre grace. Nous, attendu ce que dit est et pour consideracion des services que icellui Jehan nous a fait en noz dictes guerres, en soy exposant pluseurs foiz à grans perilz, et especialment en nostre armée faicte derrenierement en Flandres, tout le fait et crime dessus declaré et toute peine et offense corporele, criminele et civile que le dit exposant pourroit avoir encouru envers nous pour celle cause, à icellui exposant ou cas dessus dit avons remis, quictié et pardonné, remettons, quictons et pardonnons de nostre grace especial, plaine puissance, auctorité et magesté royal, par ces presentes, sattisfacion faicte premierement et avant toute euvre, se faicte n’est, en le restituant au païs, à sa bonne fame, renommée et à ses biens. Si donnons en mandement par ces presentes au seneschal du Poictou et à tous autres justiciers de nostre royaume, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, que le dit exposant de nostre presente grace facent et sueffrent joir et user paisiblement ores et par les temps avenir, sanz le faire ne soufrir estre molesté aucunement à l’encontre. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touz temps, nous avons fait mettre à ces presentes nostre seel ordenné en l’absence du grant. Sauf nostre droit en autres choses et l’autrui en toutes. Donné à Paris, en nostre chastel du Louvre, le xixe jour de fevrier l’an de grace mil ccc iiiixx et deux, et le tiers de nostre regne.

Par le roy, à la relacion de monseígneur le duc de Bourgongne. S. de Castel.

DCLX 20 février 1383

Rémission accordée à Guy de la Trémoïlle, chambellan du roi et du duc de Bourgogne, et à Thévenin de Chavenay, son familier, pour les mauvais traitements qu’ils avaient fait subir à Jean Allegrin, conseiller en la chambre des enquêtes, qui, quatorze ans auparavant, à Saint-Denis près Paris, avait frappé le dit Thévenin à coups de bâton et causé la perte de trois chevaux dont il avait la garde pour son maître. Paris, 20 février 1382

Ces lettres ont été publiées par M. le duc de la Trémoïlle, Livre de comptes de Guy de la Trémoïlle et de Marie de Sully. Nantes, 1887, in-4°. Appendice, p. 166.

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AN JJ. 122, n° 113, fol. 56 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 202-203

DCLXI Février 1383

Don à Jean Harpedenne, écuyer, de tous les biens que son oncle Thomelin Harpedenne, originaire d’Angleterre, avait possédés en Poitou, en Saintonge et en toutes autres parties du royaume, pendant l’occupation anglaise, et restitution au même des héritages confisqués sur son père Jean Harpedenne, chevalier, demeuré au service du roi d’Angleterre.

AN JJ. 122, n° 95, fol. 49 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 203-207

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, que comme ou temps que la duchié de Guyenne estoit en l’obeissance de noz ennemis d’Angleterre, Thomelin Harpedanne, né d’Angleterre, oncle de nostre amé et feal Jehan Harpedanne

On trouve ce nom écrit tantôt Harpeden, Harpedane, tantôt d’Harpedenne ou d’Harpedaine ; c’est celui d’une maison anglaise, dont la branche mentionnée dans cette donation s’établit en Poitou, lors de l’occupation qui suivit le traité de Brétigny, et y resta fixée après la soumission du pays à Charles V, grâce à ce que Jean Harpedenne le jeune, élevé par son oncle Olivier de Clisson, s’attacha au service de la France. Jean Ier Harpedenne possédait le manoir de Raine dans le Devonshire. Jean Chandos qu’il accompagnait, lorsque le lieutenant d’Édouard III prit possession du Poitou et de la Saintonge, le créa, le 1er octobre 1361, châtelain de Fontenay-le-Comte en remplacement de Perreau Courin, chevalier, qui y commandait pour le roi de France. Il fut aussi, après Baudoin de Fréville, sénéchal de Saintonge, titre qu’il prend avec celui de capitaine de Fontenay dans plusieurs actes publiés par M. Benjamin Fillon, datés des 14 et 27 novembre 1369, et du 25 septembre 1371. (Histoire de Fontenay-le-Comte, et Jean Chandos, connétable d’Aquitaine. Fontenay, 1856, p. 30-34). Le premier de ces actes est un mandement de « Jehan de Harpedanne, chevalier, seneschal de Saintonge, chastellain et capitaine des chastel, ville et chastellenie de Fontenay pour le prince de Galles », ordonnant aux habitants de onze paroisses voisines de faire le guet au château, les réparations des douves des fortifications et les charrois nécessaires pour ces travaux. Les services militaires que Jean Harpedenne rendit à Édouard III et au prince de Galles sont rapportés par Froissart. Le chroniqueur vante particulièrement son empressement à se porter au secours du comte de Pembrocke et ses efforts courageux et désespérés, lors du combat naval livré le 23 juin 1372 devant la Rochelle. Fait prisonnier avec Pembrocke, Guichard d’Angle, etc., et emmené en Espagne, il ne recouvra sa liberté que dans les premiers mois de l’année 1375. (Edit. S. Luce, t. VIII, p. xxiv et s., 36 et s., 165-166). Jean Ier Harpedenne fut créé sénéchal d’Aquitaine, le 1er mars 1384 (a.s.), selon M. Kervyn de Lettenhove (édit. de Froissart, t. XXI, p. 526). On peut voir en cet endroit le résumé des principaux événements auxquels ce personnage fut mêlé, pendant les dernières années de sa vie. Il est mentionné pour la dernière fois en avril ou en mai 1387, lorsqu’il se rendit à Bayonne au devant du duc de Lancastre qui revenait de son expédition en Galice et dans le royaume de Léon. (Id., t. XIII, p. 96). Sa mort dut arriver deux ans après au plus tard, car on trouve sa veuve remariée dès avant le mois de juin 1390. (Voy. notre t. IV, p. 402, note).

Jean Ier Harpedenne avait épousé, sans doute après qu’Olivier IV de Clisson eut été remis en possession des biens confisqués de son père et de sa mère, c’est-à-dire postérieurement à septembre 1361 (voy. notre t. III, p. 324), Jeanne, la plus jeune fille d’Olivier III de Clisson et de Jeanne de Belleville. Il en eut un fils, Jean, en faveur de qui est faite la présente donation. Jeanne de Clisson mourut jeune, on ne sait exactement en quelle année, mais avant 1372 ; car à cette époque son mari avait déjà épousé en secondes noces Catherine Sénéchal de Mortemer. (S. Luce, édit. de Froissart, t. VIII, p. xlx, note 3, p. l, note 2). Elle était fille de Guy Sénéchal, seigneur de Mortemer, et de Radegonde Béchet, dont il a été question dans notre précédent volume. (Voy. p. 58 note, 283 note, 365, 402 et note), et que nous retrouverons ci-dessous dans un acte de septembre 1390. On y voit qu’elle n’avait que quatorze ans, lorsqu’elle épousa Jean Harpedenne (n° DCCXLVI). C’est à elle que Froissart attribue la résistance à Du Guesclin, lorsque le connétable vint, le 9 octobre 1372, pour s’emparer de Fontenay-le-Comte, où elle résidait en l’absence de son mari, prisonnier en Espagne (t. IV, p. 283, note). Elle rejoignit celui-ci, après la soumission complète du Poitou, l’accompagna en Guyenne et en Angleterre, et ne revint en France qu’après sa mort. Alors elle conclut un second mariage avec un chevalier de la maison du duc de Berry, nommé Étienne d’Aventois, et obtint la restitution de ses terres de Poitou. Quant à Thomelin, le frère de Jean Ier et l’oncle de Jean II Harpedenne, nous n’avons trouvé aucun autre renseignement sur son compte.

Jean II Harpedenne naquit à Fontenay, durant que son père en était gouverneur, et fut baptisé en l’église Notre-Dame de cette ville ; ce fut sans doute en souvenir de cet évènement qu’il fit une donation à cette église, à la condition d’y célébrer une messe le samedi de chaque semaine entre soleil levant et heure de prime. (Beauchet-Filleau, Dict. des familles de l’anc. Poitou, t. II, p. 206. Cet ouvrage fournit quelques renseignements, mais la plupart sont erronés ; la biographie du père et du fils y est constamment confondue). Jean II devait avoir environ vingt ans à l’époque où le roi lui fit don des biens de son oncle, Thomelin. Grâce à son autre oncle, le connétable de Clisson, il s’éleva rapidement à une haute situation. Le 1er décembre 1386, il servait à Arras dans l’armée destinée à envahir l’Angleterre. Il était chambellan de Charles VI en 1388 et reçut de ce prince un don de 100 francs, le 13 octobre de cette année. Le duc de Touraine le gratifia d’une somme de 1200 livres, par lettres du 12 août 1389. (Actes analysés dans le dossier Harpedenne, au Cabinet des titres de la Bibl. nat.). Froissart le cite cette année-là parmi les grands personnages qui assistèrent à l’entrée à Paris de la reine Isabeau de Bavière. (Edit. Kervyn de Lettenhoye, t. XIV, p. 21). Suivant le même chroniqueur, Jean Harpedenne prit part en 1390 à l’expédition du duc de Bourbon dans les États barbaresques et assista au siège d’Afrique ou Méhédia en Tunisie. (Id., t. XIV, p. 224, 245). L’année suivante, il touchait une pension annuelle de 1,000 fr. sur le trésor royal (acte du 4 avril 1391) et exerçait l’office de sénéchal de Saintonge, suivant des lettres émanées de lui en cette qualité et datées du 26 avril. (JJ. 140, n° 293, fol. 342). Dans cet acte il s’intitule aussi seigneur de Montendre et chambellan du roi. Cependant c’est en janvier 1397 seulement que des lettres de Charles VI portent donation en sa faveur de la ville et seigneurie de Montendre (JJ. 153, n° 77, fol. 37), confisquées sur le Soudit de Latrau. (Voy. notre t. IV, p. 417, note). On trouve ensuite Jean Harpedenne guerroyant en Guyenne sous Enguerrand de Coucy, pendant les années 1395 et 1396. A cette dernière date il est dit sénéchal de Périgord, office qu’il exerçait encore le 23 mars 1399 n.s., suivant des lettres de ce jour, lui accordant de la part du roi un don de 1,000 livres tournois, en récompense de ses services. (Dossier du Cabinet des titres).

Dans le Grand-Gauthier figure un aveu de quelques petits domaines rendus par Jean Harpedenne au duc de Berry, comme comte de Poitou, le 10 janvier 1402. (Copie aux Arch. nat., R1* 2172, p. 1074). Après la mort du connétable de Clisson, on procéda au partage de ses biens, ou plutôt on refit le partage de la succession d’Olivier III et de Jeanne de Belleville, entre les deux filles d’Olivier IV, Béatrix de Clisson, mariée à Alain vicomte de Rohan, et Marguerite de Clisson, comtesse de Penthièvre et vicomtesse de Limoges, d’une part, et son neveu Jean Harpedenne, fils de Jeanne de Clisson, d’autre part. Ce dernier eut les terres de Belleville, de Montaigu, de Vendrines et de la Lande. Le vicomte de Rohan et la comtesse de Penthièvre eurent le reste, comprenant les seigneuries de Clisson, de Palluau, de la Garnache, de Châteaumur, des Deffens, du Fief-l’Évêque et de leurs appartenances. Cet acte, daté du 5 mai 1408, se trouve dans la collect. de Dom Fonteneau, t. XXVI, p. 335. Le 10 octobre 1415, François de Montberon, vicomte d’Aunay, et Louise de Clermont, sa femme, vendirent à Jean Harpedenne les terres de Cosnac et de Mirambeau moyennant 8000 écus d’or. Il était encore seigneur de Saint-Hilaire-le-Vouhis et de Mareuil et soutenait un procès, le 4 août 1418, contre Georges de la Trémoïlle, au sujet de la justice de ces terres. (Arch. nat., X1a 4792, fol. 59 v°, 61). Il intervint à la même époque comme seigneur (1er août et 15 septembre 1418) dans une contestation jugée au Parlement, entre les habitants de la ville de Montaigu, et ceux de la châtellenie au sujet du guet. (Id. ibid., fol. 57 et 82). Enfin Jean II Harpedenne, comme seigneur de Belleville et de Montaigu, eut un différend grave avec Maurice de Volvire, et ensuite avec Nicolas de Volvire, son frère et héritier, seigneur de Rocheservière et de Ruffec. Il s’agissait d’une véritable guerre privée ; les partisans de Volvire avaient fait le siège de Montaigu et de Vendrines, comme on l’apprend par des plaidoiries datées des 14 juillet et 16 août 1429. (X2a 18, fol. 164 v° et 172 v°). Nous aurons sans doute occasion de revenir sur cette affaire et sur d’autres intéressant la biographie de Jean II. Il fit son testament le 13 juin 1434, d’après MM. Beauchet-Filleau ; il s’était marié deux fois, la première avec Jeanne de Mussidan, qui le rendit père de Jean III ; la seconde avec Jeanne de Penthièvre. Ce dernier nom me paraît fort suspect et je croirais plus volontiers Besly, disant que Jeanne d’Aspremont, héritière de Poiroux, de Rié et d’Aizenay, veuve de Savary de Vivonne, fit, en 1404, de Jean Harpedenne son second mari. (Lettres de Jean Besly, publ. par Apollin Briquet, t. IX des Arch. hist. du Poitou, p. 72).

, escuier, tenist et possidast à certains tiltres ès pays de Poitou, de Xantonge et d’ailleurs en nostre royaume, plusieurs herbergemens, terres, rentes, possessions et biens, tant en fiefs comme en censive, lequel Thomelin est trespassez en l’obeissance de noz ennemis ; par quoy tous les heritaiges et biens qu’il tenoit furent acquis à nostre très chier seigneur et pere, dont Dieux ait l’ame, comme forfaiz et confisquiez, et il soit ainsi que le dit Jehan, son nepveu, dès le temps de son enfance ait tousjours demouré en nostre obeissance et de nostre dit feu seigneur et pere, et ait loyalment servy nostre dit seigneur et nous en noz guerres, en la compaignie de nostre très chier et feal cousin le sire de Cliçon, nostre connestable, son oncle, et est bien ordennez de nous grandement servir ou temps advenir. Nous, considerans les services dessus diz et pour contemplacion de nostre dit cousin et connestable, et aussi attendu la prochaineté du sanc et lignage d’entre les diz feu Thomelin et le dit Jehan, son nepveu, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, ycellui Jehan avons restitué et restituons, par la teneur de ces presentes, à toute la succession et generalment à tous les heritaiges, terres, biens, droiz et possessions quelconques que tenoit le dit Thomelin, en son vivant, ès pays dessus diz. Et d’abondant tous iceulx heritaiges et biens, et aussi tous les heritaiges et biens que tenoit ès diz pays Jehan Harpedenne, chevalier, pere du dit escuier, le quel chevalier, né d’Angleterre, a tenu et tient la partie de noz ennemis, de quelque valeur que soient iceulx biens, avons donné et donnons par ces presentes au dit escuier, pour lui, ses hoirs, successeurs et ayans cause, estans et qui seront en nostre obeissance, non obstant quelconques dons autrefoiz faiz des terres et biens dessus diz à autres personnes quelconques. Si donnons en mandement à noz amez et feaulz gens de nostre Parlement, aux seneschaulx d’Angolesme et de Xantonge, au gouverneur de nostre ville de la Rochelle, et à leurs lieuxtenans, et à tous noz autres justiciers et officiers, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que des dictes restitucion et donnacion facent et laissent joir et user le dit Jehan, ses hoirs, successeurs et ayans cause paisiblement, sanz aucun empeschement. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre à ces presentes nostre seel ordenné en l’absence du grant. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, l’an de grace míl ccc. iiiixx et deux, et de nostre regne le tiers, ou mois de fevrier.

Par le roy, à la relacion de messeigneurs les ducs de Berry et de Bourgongne. J. Tabari.

DCLXII Février 1383

Rémission accordée à Pierre Aymon pour un meurtre commis à L’Hermenault sur la personne de Jean Garineau, son cousin.

AN JJ. 122, n° 102, fol. 51 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 207-209

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie de Pierre Aymon

Dans leur notice sur la famille Aymon, originaire du Bas-Poitou, MM. Beauchet-Filleau mentionnent un Pierre Aymon, dit Clusea, vivant en 1393. (Dict. des familles du Poitou, t. I, p. 179).

que, comme le jour après Noel derrainement passé, en la ville de l’Ermenaut en Poitou, certain debat et riote feust meue entre Jehan Garineau, d’une part, et Raoul Cousson, commissaire à lever et cueillir en la dicte ville une ayde octroyée à nostre très chier et amé oncle le duc de Berry et d’Auvergne, conte de Poitou, et aucuns autres, d’autre part, avint que le dit exposant qui avoit à femme la cousine germaine du dit Garineau, pour bien de paix et amour naturele de son dit cousin, se adreça là en voulant apaisier la besongne, dont il fist son povoir ; car contre son dit cousin qui tenoit un grant tison dont il s’efforçoit de villener le dit commissaire et l’eust fait, s’il eust peu, le dit exposant ala et se mist entre deux, en destournant son dit cousin le mielx qu’il povoit, afin qu’il ne vilennast le dit commissaire ; et après pluseurs paroles et amonnestemens qu’il fist à son dit cousin, afin qu’il se deportast dudit commissaire de nostre dit oncle injurier, pour ce que son dit cousin n’y vouloit obeir et tousjours perseveroit et s’efforçoit de batre le dit commissaire, ycellui exposant, qui ce vouloit eschever, prist et entretint à force son dit cousin, lequel meuz de malvaise volenté et pour ce que le dit exposant, pour bien de paix, le detenoit, et ne lui laissoit faire son malvaiz propos, atout le tison qu’il tenoit fery le dit exposant sur l’espaule, et recouvra deux foys et le refery sur la teste et sur le bras, et tant que le dit exposant qui se sentoit batuz et villenez, pour doubte de pis avoir, le plus tost qu’il peust s’en fuy devant son dit cousin, qui de ce ne fu pas contens, maiz le poursuy chaudement et de mauvaiz propos atout le dit tison, jusques à tant que le dit exposant, qui pour bien faire avoit ainsi esté batus et injuriez et encores estoit poursuys, en soy deffendant et repellant force par force, frapa son dit cousin d’une barre de bois qu’il trouva, à quoy on fermoit une porte, i. seul cop, dont après son dit cousin ala de vie à mort. Pour occasion du quel fait, le dit exposant doubte rigueur de justice et n’ose converser au pays, en nous humblement suppliant comme en tous [autres] cas, il ait esté et soit de bonne vie et renommée, et honneste conversacion, nous sur ce lui vueillons impartir nostre grace. Nous adecertes, ces choses considerées, voulans rigueur de justice temperer de misericorde, le fait de la dicte mort et toute peine, offense et amende corporelle, criminele et civile, que le dit exposanta et puet avoir pour ce commis et encouru ou cas dessus dit, et sattisfait à partie premierement, lui avons quictié, remis et pardonné, quictons, remettons et pardonnons de nostre auctorité royal et grace especial, en le restituant à sa bonne renommée, se pour ce en estoit amendrye, au pays et à ses biens, qui par ban ne seroient confisquiez, et en imposant sur tout silence perpetuel à nostre procureur par ces presentes. Par la teneur des quelles nous donnons en mandement au gouverneur de la Rochelle et à touz noz autres justiciers et officiers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent et laissent le dit exposant joir et user paisiblement, sanz le molester ne empeschier, ne soufrir estre molesté ou empeschié aucunement, en corps ne en biens, au contraire ; mais tout ce qui seroit fait ou attempté à l’encontre mettent ou facent mettre, tantost et sanz delay, au premier estat et deu. Et pour ce que ce soit chose ferme et estable à tousjours maiz, nous avons fait mettre nostre seel ordenné en l’absence du grant à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou mois de fevrier l’an de grace mil ccc iiiixx et deux, et de nostre regne le tiers.

Es requestes de l’ostel. G. de Mezon. — Robert.

DCLXIII Avril 1383

Don à Guy de la Trémoïlle, chambellan du roi, d’une rente annuelle de 300 livres assise sur la terre de Nieul près la Rochelle, telle qu’en jouissait par donation de Charles V feu Jean l’Espagnol, en récompense de ses services et spécialement de sa participation à la dernière campagne de Flandre. Brie-Comte-Robert, avril 1383 après Pâques

Cet acte a été publié par M. le duc de La Trémoïlle (Livre de Comptes de Guy de la Trémoïlle et de Marie de Sully. Nantes, 1887, in-4°. Appendice, p. 171), d’après un vidimus qui fait partie du chartrier de Thouars. Il porte non pas la date d’avril 1383, mais celle de Courtray en Flandres, le 6 décembre 1382.

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AN JJ. 123, n° 167, fol. 87 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 209-210

DCLXIV Juin 1383

Rémission pour Jean Talet qui avait pris part ou assisté à la rixe entre Moreau de Magné et Jean de Verruyes, dans laquelle ce dernier trouva la mort.

AN JJ. 122, n° 324, fol. 159 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 210-212

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie Jehan Talet, povres homs, comme ja pieça et par longtemps il ait servy nostre amé Moreau de Margny

Sic. Il faudrait Maigny ou Maigné. On trouvera ci-dessus (n° DCXXVI, p. 95) les lettres de rémission accordées à Moreau de Magné et à ses complices, en novembre 1378. La scène y est rapportée avec plus de développement qu’ici ; cependant ce nouveau texte est plus précis sur certains points, particulièrement en ce qui concerne la topographie. Aussi il nous a paru utile de le donner in extenso. Il est question, dans les lettres de 1378, du rôle joué dans le drame par le valet du sr de Magné, Jean Talet, qui y est nommé Calet ou Colet.

, chevalier, et pour le temps qu’il le servoit le dit chevalier et feu Jehan de Verruyes, jadiz chevalier, eurent certain debat et riote l’un contre l’autre, et se distrent pluseurs paroles haultaines et injurieuses, après lesquelles choses advint que, le jour de la saint Denys l’an lxxix.

La date des lettres de rémission en faveur de Moreau de Magné nous fournit celle de l’événement ; c’est à la Saint-Denis 1378, et non 1379, qu’il eut lieu.

ou environ, le dit Moreau, son maistre, se parti de son hostel de Margny pour aler aux foires qui estoient le dit jour à Saint Legaire, à demie lieue près de son dit lieu, et avec le dit Moreau estoit le dit exposant, son serviteur, et pluseurs autres. Et quant ilz eurent passé la riviere de la Sevre, et se aproucherent du dit lieu de Saint Legaire, le dit feu Jehan de Verruyes et pluseurs autres ses complices qui venoient des dictes foires, les apperceurent, et tantost se mist le dit feu Jehan en i. pré, avec luy aucuns ses complices et aucuns autres vinrent tout droitement vers le dit Moreau, au long d’une chaucie par laquelle chevauchoit le dit Moreau et ses gens. Et quant le dit Moreau fu au droit d’un fossé qui entroit dedenz le pré, où estoit le dit feu Jehan qui l’attendoit illec, et lors ilz se distrent aucunes injurieuses paroles, et tant que le dit Moreau entra ou fossé, et là le dit feu avec ses complices le blecierent d’un glaive en la gorge ; et quant il se senty blecié, il s’efforça de passer et entra ou dit pré où estoit le dit feu, et là s’entrecombatirent, et tant que Guillaume Ymbaut, escuier du dit Moreau, fery le dit feu Jehan par la gorge d’une lance gaye, et aussi le dit Moreau le fery d’une espée, et mouru en la place. Et depuis Ysabel de Montandre, jadiz femme du dit feu chevalier, a fait appeller en Parlement

Voy. ci-dessus la note de la p. 101, où l’arrêt rappelé ici et toutes les procédures sont analysés.

le dit Moreau et Guillaume Ymbaut, et pluseurs autres qui estoient là avec le dit Moreau, et par arrest de Parlement, enqueste faicte sur les faiz des parties, ont tous ceulx qui estoient en procès esté absolz, excepté le dit Moreau et Guillaume Ymbaut, qui ont esté condempnez en amende civile. Et se le dit exposant se feust comparu et eust esté en procès, il eust aussi esté absoulz, car il n’y fery onques coup, mais pour doubte et rigueur de justice, il s’est absentez et a esté pris des Anglois, en la prison des quielx il a longuement demoré. Et toutevoies il a tant esté procedé contre luy par les officiers de nostre très chier et amé oncle le duc de Berry, conte de Poitou, en la juridicion du quel le delit fu perpetré, que il a esté et est banny, si comme l’en dit. En nous humblement suppliant que, consideré ce que dit est et qu’il ne fist pas le fait, et ne savoit riens que ainsi deust avenir, et qu’il est chargié de femme et est de bonne fame et renommée, nous luy vueillons sur ce faire grace et misericorde. Nous adecertes, attendu ce que dit est, le fait de la dicte mort et toute peine, offense et amende corporele, criminele et civile, que le dit suppliant a et puet avoir pour ce commis et encouru ou cas dessus dit, et sauf le droit de partie à poursuir civilement, luy avons quictié, remis et pardonné, quictons, remettons et pardonnons, de nostre auctorité royal et grace especial, par ces presentes, en le restituant au pays, sa bonne renommée et à ses biens, qui par ban ne seroient confisquez, et imposons silence perpetuel à nostre procureur. Si donnons en mandement au gouverneur de la Rochelle et à touz noz autres justiciers et officiers, et à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à luy appartendra, que le dit suppliant facent et laissent joir et user paisiblement de nostre presente grace et octroy, et contre le teneur d’icelle ne le molestent, traveillent ou empeschent, ou sueffrent traveiller, molester ou empescher, en aucune maniere, en corps ou en biens, maiz rapellent et remettent, ou facent rapeller et mettre au premier estat et deu tout ce qu’ilz trouveront estre ou avoir esté fait au contraire, et ses diz biens, se pour ce estoient pris, saisiz, arrestez ou empeschiez, luy mettent et facent mettre sanz delay à plaine delivrance. Et pour ce que ce soit chose ferme et estable à tousjours mais, nous avons fait mettre nostre seel ordenné en absence du grant à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris l’an de grace m.ccc.iiiixx et trois, et de nostre regne le tiers, ou mois de juing.

Es requestes de l’ostel. G. Mezon. — Auneel.

DCLXV Juin 1383

Don à Guillaume de La Trémoïlle

Il a été question précédemment de Guillaume, frère de Guy VI, de La Trémoïlle, fils de Jean V et de Radegonde Guénant. (Voy. notamment notre t. III, p. 374, et t. IV, p. 84.)

, chevalier, chambellan du roi et du duc de Bourgogne, pour lui et ses héritiers, des maisons des Bruyères près Paris et d’une maison ou motte appelée « la folie Nicolas Quipie », le tout confisqué sur Jean Des Marets

Jean Des Marets était avocat du roi au Parlement de Paris et âgé de soixante-dix ans. Il avait été anobli lui et sa famille, en 1365, par Charles V. Accusé d’avoir trempé dans la sédition des Maillotins, on le comprit dans la sentence de mort prononcée contre douze bourgeois déclarés coupables de lèse-majesté, et il eut la tête tranchée, en février ou mars 1383, bien que sa culpabilité ne fût rien moins que démontrée. « Plusieurs estiment que son plus grand crime était d’avoir soutenu contre les ducs de Berry et de Bourgogne les intérêts du duc d’Anjou, qui, étant passé en Italie pour disputer le royaume de Naples, n’estoit plus en estat de le protéger. » (Dom Félibien, Hist. de la ville de Paris, in-fol., 1725, t. II, p. 697).

, récemment condamné à mort et exécuté. Paris, juin 1383

M. le duc de La Trémoïlle a imprimé cet acte dans l’appendice de son Livre de comptes de Guy de La Trémoïlle et de Marie de Sully, Nantes, 1887, in-4°, p. 173.

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AN JJ. 122, n° 364, fol. 175 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 213

DCLXVI Juin 1383

Lettres d’amortissement d’une rente annuelle de cent livres fondée par Guy de La Trémoïlle, sr de Château-Guillaume et de Dracy, « de Draceyo », pour l’entretien de six religieux « in prioratu de Lugneyo prope Barbarans, ordinis Cartusie, Lingonensis diocesis. » Paris, juin 1383

Bien que ces lettres paraissent inédites, nous n’en donnons qu’une brève analyse, les localités dont il y est fait mention étant étrangères au Poitou.

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AN JJ. 123, n° 22, fol. 13 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 213

DCLXVII Février 1384

Rémission accordée à Jean Le Pelletier, potier de terre, pour le meurtre de Jean Croissons, son beau-frère, qui lui avait cherché querelle, en revenant du marché de Pouzauges, et l’avait le premier frappé à coups de couteau.

AN JJ. 124, n° 104, fol. 60 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 213-216

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie de Jehan Le Peletier, que, le vendredi prouchain après la saint Hylaire derrenierement passée, le dit exposant et en sa compaignie Jehan Croissons, duquel le dit exposant a expousé la suer, alerent au marchié qui lors se tenoit à Pousauges, et avec eulx menerent deux bestes chargiez de poz de terre, en entencion de vendre ou dit marchié yceulx potz de terre. Et quant ce dit jour, ilz orent esté ou dit marchié et eurent vendu leurs diz potz, ilz en la dicte ville de Pousauges entrerent en une taverne, pour illeuc prandre leur refection, et illeuc burent si largement de vin que ilz furent surpriz et chargiez de vin, et environ l’eure de la nuyt, se partirent de la dicte taverne, et se misdrent à chemin pour retourner en leurs hostelz, et eulx faisans leur chemin ensemble, le dit Jehan Croissons qui estoit très rioteux homs et plains de grant malice, fort jeune, puissant de corps et legier de courage, prist paroles avec le dit exposant, en disant que ycellui exposant vendoit mieulx ses poz que ne faisoit icellui Jehan Croissons. Et après ce que le dit exposant gracieusement lui eust respondu que le dit exposant estoit mieulx acoursez, c’est assavoir mieulx achalandez que n’estoit le dit Croissons, et que les gens plus volentiers aloient acheter ses potz, pour ce que ycellui exposant, en faisoit meilleur marchié, ycellui Jehan Croisson en usant de parole injurieuse illeuc desmenti le dit exposant et oultre lui dist que par son lignage qui estoit grant et puissant au regart du dit exposant, il feroit batre ycellui, qui adonc lui respondi que il feroit grant pechié et que, se le dit exposant avoit deshonneur, aussi l’auroit le dit Jehan Croissons ; lequel Jehan, perseverant en son mauvais courage, retourna sur le dit [exposant], descendi à pié et prist un baston du gros du bras commun d’un homme, couru sus au dit exposant et du dit baston le fery trois cops telement que il le fist cheoir de dessus une jument sur laquelle il estoit adonc monté, et en escriant au dit exposant que il par sa main mourroit, le devant dit Jehan Croissons tray un sien coutel et en cuida tuer le dit exposant, et en lui ne demoura pas que il ne le meist mort. Le quel exposant, estant ou peril et dangier là où le dit Jehan Croissons l’avoit mis, se dreça, se prist aux poings du dit Croissons, et pour eschiver le peril de la mort et mieulx resister à la male volenté du dit Croissons, lui osta le dit coustel et à sa defense en ce moment, durant leur conflict, en fery le dit Jehan Croissons, telement que mort s’en est ensuye ; mais le dit Jehan Croissons, avant sa mort, sachant le tort que il avoit au dit exposant, excusa ou descoulpa le plus qu’il pot le dit exposant de cestui cas et le lui pardonna, en tant comme en lui estoit. Pour occasion duquel fait ainsi avenu en chaude meslée, sanz hayne precedent et sanz fait avisé de la partie d’icellui exposant, le dit exposant aagié

Le texte porte chargié.

de l. ans ou environ et chargié de femme et de six petiz enfanz, doubte estre molestez ou empeschiez, si comme il dit, en nous humblement suppliant comme il, en touz ses autres faiz ait esté et soit homme de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sanz avoir esté condempné, convaincu ne actaint d’autre meffait, et avec ce le dit Jehan Croissons ait esté commencent et en coulpe du dit fait commiz par le dit exposant en soy defendant, autrement il ne cuidoit eschiver le peril de la mort, là où s’efforçoit de le mettre ycelui Jehan Croissons, nous sur ce lui vueillons eslargir nostre grace. Nous adecertes, pour consideracion de ce que dit est, au dit exposant ou cas dessus dit avons remis, quictié et pardonné, et de grace especial remettons, quictons et pardonnons le dit fait, avec toute peine, amende et offense corporele, criminele et civile, que pour ce il puet avoir encouru envers nous, et satisfait premierement, avant toute euvre, à partie bleciée, se faicte n’est, le restituons au païs, à sa bonne renommée, se pour ce est amenrie, et à ses biens. Si donnons en mandement au bailli de Chartres, au gouverneur de la Rochelle et à touz noz autres justiciers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que le dit exposant facent et seuffrent joir et user de nostre presente grace, sanz le molester au contraire, en corps et en biens, mais se aucuns de ses biens ou choses sont pour ce priz, saisiz, levez, arrestez ou empeschiez, lui mettent ou facent mettre à plaine delivrance. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou moys de fevrier l’an de grace mil ccc. iiiixx et trois, et le quart de nostre regne.

Es requestes de l’ostel. Henry. — Orgemont.

DCLXVIII 4 mars 1384

Lettres de rémission octroyées à Jean Milleteau, écuyer, panetier du duc de Berry, qui, au retour de la dernière expédition de Flandre, avait séjourné en une « ville champestre ou païs de Beausse, assise ou bailliage d’Orliens », pour attendre nouvelles du duc, et y avait pris des vivres en enfreignant une ordonnance récemment criée et publiée, portant défenses « que aucunes gens d’armes en eulx retournant ne sejournassent en chascune ville plus d’un jour et d’une nuit, sur peine de perdre corps, chevaux, hernoys et finance…. Donné à Paris, le iiiie jour de mars l’an de grace mil trois cens quatre vins et trois, et le quart de nostre regne ».

AN JJ. 124, n° 150, fol. 87 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 216

DCLXIX Mars 1384

Rémission accordée à Jouan Lesay, de Chey en Poitou, pour le meurtre de Guillon Caillier, son oncle.

AN JJ. 125, n° 208, fol. 119 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 216-219

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des amis charnelz de Jouan Lesay, povre laboureur demourant à Chay en Poitou, en la chastellenie de Luisegnen, contenant comme un peu devant Noel derrenierement passé, un nommé Guillon Caillier, oncle du dit Jouan et icellui Jouan feussent demourans ensemble et communs en biens, en fait de labourages, de marchandises et en toutes autres choses, et pour ces choses faire avoient chevaux ou jumens ; mais pour ce que le dit Jouan avoit doubte que leurs dictes bestes ne leur feussent pillées, prises et ostées par les ennemis du royaume, qui en pluseurs fors estoient tout environ et près de eulz, il vendit une des dictes jumens pour le proffit de lui et de son dit oncle, au mieux que il pot ; de la quelle vendue d’icelle jument il desplut au dit oncle forment, quant il le sçot et tant qu’il dist à son dit neveu pluseurs injures et villenies, en le appellant faulx mauvais garçon, traitre, larron, « tu m’as vendu ma jument, dont nous faisions nostre labour, par le sang Dieu, je te batray tant que il te mescherra. » Et combien que le dit Jehan lui respondi courtoisement par telz mos : « Mon oncle, je l’ay fait pour nostre proffit et pour doubte que ces males gens Engloiz et ennemis ne la nous ostassent » ; le quel oncle, non content de ces paroles, en perseverant en son ire mauvaise et oultrageuse voulenté, comme tempté de l’ennemi, prist un grant et pesant tison de buche qui estoit ou feu tout ardant, et en fery le dit Jouan, son nepveu, un coup parmi la teste, dont il l’abbati à terre, et perdi la parole, et encore recouvra il et fery de rechief pluseurs autres coups sur le dit Jouan du dit tison, par tele maniere qu’il estoit aussi comme tout couvert de sang. Et comme icellui Jouan se vit ainsi durement demené, villené, batu et navré, doubtans que son dit oncle ne le meist illec du tout à mort, meuz de grant courroux, et en reppellant la force et l’excès à lui faict par son dit oncle, et pour eschiver la mort, sacha un petit coustel trenche pain qu’il portoit à sa sainturre, et de chaude cole et despourveement en soy defendant, en feri le dit son oncle un seul cop ou corps, dont mort s’ensuy le landemain en la personne d’icellui oncle. Mais avant qu’il mourust, le dit oncle sentans et confessans qu’il avoit eu tort et estoit agresseur, pardonna à son dit nepveu le dit fait. Pour doubte du quel fait et trop grant rigueur de justice, ycellui Jouan s’est absentez et ne se ose ne oseroit veoir ne comparoir, se par nous ne lui estoit impartie nostre grace, requerans ycelle, mesmement que le dit Jouan a tout le temps de sa vie esté homme de bonne vie, honneste conversacion et renommée, sans avoir esté point repris d’aucun autre villain blasme ou reprouche, comme dient les dessus diz amis. Nous adecertes, attendues les choses dessus dictes, le fait du dit homicide ou cas dessus dit au dit Jouan Lesay avons remis, quictié et pardonné, et par la teneur de ces presentes, de nostre plaine puissance, grace especial et auctorité royal, quictons, remettons et pardonnons, avecques toute peine corporele, criminele et civile en quoy, pour cause et occasion du dit fait, il puet estre encouru envers nous, comment que ce soit, satisfacion faicte à partie premiers, civilement tant seulement, en le restituant à plain à sa bonne fame et renommée, au païs et à ses biens non confisquez. Si donnons en mandement au seneschal de Xanctonge, gouverneur de la Roichelle et à touz noz autres justiciers et à chascun d’eulz, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, que le dit Jouan facent, laissent et seuffrent joir plainement et paisiblement de noz dictes grace et remission, et contre la teneur d’icelle ne l’empeschent ou seuffrent estre empeschié en aucune maniere, en corps ne en biens. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, l’an de grace mil ccc. iiiixx et trois, et le quart de nostre regne, ou moys de mars.

Es requestes de l’ostel. P. Houdoyer. — Barreau.

DCLXX Avril 1384

Lettres d’institution de deux foires chaque année à la Chaize-Giraud, l’une le 19 août et l’autre le 8 novembre, données à la requête de Jean de La Muce, seigneur du lieu.

AN JJ. 124, n° 214, fol. 121 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 219-223

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que comme par vertu des lettres de commission de bonne memoire nostre très chier seigneur et pere, cui Dieux pardoint, à la requeste de notre amé et feal Jehan La Muce, chevalier, seigneur de la Cheze Giraut

Les renseignements sur cette famille féodale sont très rares. Jean de La Muce, chevalier, tuteur de Catherine et Jeanne, filles mineures de Jean d’Aye, aliàs d’Ahaye, eut des différends à propos de la succession de leur père, avec Guy de la Rochefaton et autres ; ils se terminèrent le 17 avril 1354 par une transaction qui ne nous apprend rien sur la personne et la famille du tuteur (Arch. nat., X1c 8). C’est lui sans doute qui avait épousé Catherine de la Haye, et dont le frère, Jamet de La Muce, écuyer, était marié à Jeanne de la Haye, la sœur de Catherine. La succession de cette dernière fut partagée, le 13 juin 1382, entre Jamet de La Muce à cause de sa femme et d’autres cohéritiers. (Beauchet-Filleau, Dict. des fam. de l’anc. Poitou, t. II, p. 208). Le Jean de La Muce au profit de qui sont instituées les foires de la Chaize-Giraud ne peut être le même que le mari de Catherine de la Haye, décédée avant le 13 juin 1382, sans enfants, puisque à cause de sa femme il avait obtenu des lettres de Charles V, et que celle-ci vivait encore en avril 1384. Peut-être était-il le fils de Jamet. Dans un autre acte, trop peu explicite, du 4 avril 1390, enregistré au Parlement, le 17 mai suivant, « noble homme Jehan de La Muce, chevalier, seigneur de la Chese Giraut », par conséquent le nôtre, déclare se désister d’un appel qu’il avait relevé de la cour de Talmont au Parlement, du temps que le duc d’Anjou et Isabeau d’Avaugour, vicomtesse de Thouars, tenaient le château et la terre de Talmont, possédés à présent par Tristan, vicomte de Thouars, et retourner à l’obéissance du dit vicomte et de sa cour de Brandois. (Arch. nat., X1c 60.) Nous n’avons pu malheureusement découvrir à quelle famille appartenait la dame de la Chaize-Giraud, femme de Jean de La Muce. En 1380, le sire de Parthenay était en procès touchant la forteresse de la Chaizé-Giraud contre le vicomte et la vicomtesse de Thouars. On l’apprend par un mandement d’enquête, qui d’ailleurs ne fait point connaître l’affaire (X1a 29, fol. 105 v°). Guillaume « de la Mousse », qui figure avec le titre de châtelain de Niort, dans un passage des comptes de l’hôtel du duc de Berry, où il est question de l’approvisionnement de blé du château de cette ville, à la date de juillet 1373 (KK. 251, fol. 105 v°) appartenait très vraisemblablement à la même famille que le seigneur de la Chaize-Giraud.

à cause de sa femme, le lieutenant ou commis du bailli qui lors estoit ès Exempcions de Poitou, appellez ceulz qui faisoient à appeller, ait fait deux informacions sur le proffit ou dommage qui à nostre dit seigneur et la chose publique pourroit avenir, en l’octroy de deux foires mettre et instituer chascun an perpetuellement en la dicte ville de la Cheze Giraut, c’est assavoir l’une le dix neuviesme jour d’aoust et l’autre le viiie jour de novembre, par les quelles informacions pieça apportées en nostre tresor à Paris, par devers noz amez et feaulx tresoriers illec, icelles par eulz avec plusieurs de noz amez et feaulz conseillers en nostre Parlement, à ce especialment appellez, diligemment veues et examinées, ensemble noz autres lettres contenans cette fourme :

Charles, par la grace de Dieu roy de France. A noz amez et feaulz tresoriers à Paris, salut et dilection. Exposé nous a Jehan de La Muce, escuier, seigneur de la Cheze Giraut à cause de sa femme, que comme de bonne memoire nostre très chier seigneur et pere, que Dieux absoille, eust pieça octroyé lettres au dit exposant, pour faire seoir deux foires chascun an en la dicte ville de la Cheze Giraut, à certaines journées et en certaine maniere declarée ès dictes lettres, par vertu desquelles le bailli des Exempcions, qui lors estoit en Touraine, Anjou et Poitou, à ce commis, eust fait certaines informacions sur le profit et dommage qui seroit aux seigneurs et leurs voisins, en l’octroys des dictes foires, et ycelles informacions eust baillées closes et seelées en nostre tresor à Paris, pour les veoir et en ordener comme il appartiendroit ; neantmoins, soubz umbre de ce que le procureur de nostre très chier et très amé oncle le duc de Calabre et d’Anjou, qui lors tenoit le chastel et chastellenie de Thalemont

Louis Ier duc d’Anjou et de Calabre, comte de Provence et du Maine, roi de Sicile, etc., né à Vincennes le 23 juillet 1339, mort à Biseglia près Bari (royaume de Naples), le 20 septembre 1384, second fils du roi Jean et de Bonne de Luxembourg. Isabelle d’Avaugour, vicomtesse douairière de Thouars, lui engagea, l’an 1373, les terres de son douaire dans le Bas-Poitou, c’est-à-dire Talmont, Château-d’Olonne, Brandois, Curzon, Olonne, les Sables et Château-Gaucher ; mais elle les reprit environ trois ans plus tard, en 1376, ou 1377. (Archives nat., P. 13341.)

, à cause de nostre bien amée Ysabeau d’Avaugour, s’estoit opposé à l’expedicion des dictes lettres et non autres, vous avez differé et delayé expedier ycelles lettres, ja soit ce que ce eust esté et seroit le proffit du pays et du bien publique, qui par ce seroit empeschié, se pourveu n’y estoit, si comme dit le dit exposant, requerant que, ce consideré et que le dit opposant n’a soustenu ne soutient la cause de son opposition, et que aussi de present nostre dit oncle n’a aucun droit en la dicte terre de Thalemont, pour la quele il avait fait la dicte opposition, mais en a esté debouté par arrest de nostre Parlement, par lequel arrest a esté adjugée au viconte et vicontesse de Thouars

Le procès que soutint Isabelle d’Avaugour puis le duc d’Anjou, pendant qu’il eut les terres de celle-ci, énumérées dans la note précédente, et à leur sujet, contre Pernelle, vicomtesse de Thouars, et Tristan Rouault, son mari, a été exposé avec quelque détail dans une note de notre t. IV, p. 196. Il nous suffira d’y renvoyer le lecteur.

, à cause de elle, nous sur ce li vueillons pourveoir de nostre grace. Nous, ces choses considerées et que dès pieça le procès fu mis en nostre tresor et encores y est par devers vous, vous mandons estroictement, enjoignons en commettant, se mestier est, que, s’il est ainsi et que aucun ne poursuie la dicte opposition, veez et visitez diligemment icelles informacions et sur tout bailliez ou faites baillier teles lettres comme en tel cas appartient. Car ainsi le voulons nous estre fait, et à icellui exposant l’avons octroyé et octroyons de grace especial, non obstans lettres surreptices à ce contraires. Donné à Paris, le xxiie jour de septembre l’an de grace mil ccc. iiiixx et trois, et le quart de nostre regne.

Leur soit clerement apparu que profitable chose et neccessaire seroit à nous et au bien publique de estaublir et instituer les dictes foires ès lieu et jours dessus diz. Nous, ces choses considerées avec les bons et agreables services que le dit chevalier a faiz par longtemps à nous et à noz devanciers ou fait des guerres, avons ordené et establi, et de nostre auctorité royal, plaine puissance et grace especial, ordenons et establissons par ces presentes les dictes foires estre doresenavant et à tousjours ès lieu et jours dessus diz, et que en ycelles foires touz marchans, leurs serviteurs et autres puissent aler, venir, demourer et retourner seurement, pour vendre, eschangier et acheter, mener et remener par eulx ou par autrui toutes manieres de denrées, vivres et marchandises, et faire toutes leurs besoignes et choses licites quelconques ; et que le dit chevalier, à la cause dessus dicte, ses successeurs et les ayans d’eulz sur ce cause aient en et sur les dictes foires et sur les marchandans en ycelles et leurs appartenances tele justice, juridicion et congnoissance, ensemble les profis et emolumens acoustumez et appartenans à fait et seigneur de foires, et comme il avoit paravant ce present octroy au dit lieu de la Cheze, et qu’il usent et joissent des usages, libertez, franchises et previleges dont l’en use et a acoustumé de user ès autres foires d’environ, gardez les usages et coustumes du païs. Mandans au gouverneur de la Rochelle, ou à son lieutenant, et à touz nos autres justiciers et officiers, qui ores sont et pour le temps avenir seront, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, en commettant, se mestier est, que les dictes deux foires facent crier, publier, establir et ordener ou dit lieu et ès autres lieux, et en la maniere en tel cas acoustumée, et desdiz privileges, usages et libertez facent joir et user paisiblement le dit chevalier, à la cause devant dicte, ses successeurs et leurs ayans cause, les diz marchans, leurs serviteurs et autres, alans, venans et demourans pour marchander et autrement licitement ès dictes foires, sanz eulx empeschier aucunement au contraire. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous à ces presentes lettres avons fait mettre nostre seel ordené en l’absence du grant. Sauf en toutes choses nostre droit et l’autrui. Donné à Paris, ou moys d’avril l’an de grace mil ccc. iiiixx et trois, et le quart de nostre regne.

Par le roy, à la relacion des tresoriers à Paris. Hennin.

DCLXXI Mai 1384

Confirmation des lettres de rémission accordées par le prince de Galles, l’an 1370, à Guyon Chovin, écuyer, pour le meurtre de son frère.

AN JJ. 124, n° 277, fol. 161 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 223-225

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, de la partie des amis charnelz de Guion Chovin, escuier, de Riberioles de la paroisse de Sales, en la chastellenie de Saint Maixant en Poitou, à nous avoir esté donné à entendre que ja pieça entre lui et Hugues Chovin, son frere, estans lors en un leur bois, se murent paroles contencieuses et tant que de chaude meslée le dit Guion feri le dit Hugues et lui donna un coup dont il fu malade, et combien que ou lit de sa dicte maladie, dont il ala de vie à trespassement, le dit Hugues desblasmast et excusast ledit Guion sur ce et lui pardonnast, en disant que en son corps defendant il l’avait feru, et que de et sur ce cas qui advint dès l’an mil ccc soixante dix ou environ, c’est assavoir ou temps que le pays de Poitou et le dit Guion estoient en l’obeissance du prinpce de Gales, il eust d’icellui prinpce de Gales, le dit an mil ccc lxx, remission et grace, si comme l’en dist apparoir plus plainement par lettres sur ce faictes, et aussi que quant le dit pays de Poitou et les habitans et subgiez d’icellui revindrent derrenierement à l’obeissance de nostre très chier seigneur et pere, que Dieux absoille, et à la nostre, nostre dit seigneur et pere par ses lettres ait quictié, remis et pardonné à touz les subgiez et habitans du dit pays de Poitou, et à chascun d’eulx, toutes rebellions, desobeissances, murtres, ravissemens, violemens, sacrileges, larrecins, roberies, crimes de leze majesté et autres quelconques deliz et malefices et excès, lors par eulx ou aucuns d’eulz commis et perpetrés, en quelque maniere que ce feust, avec toute peine offense et amende, ainsi que ces choses l’en dit plus à plain apparoir par lettres sur ce confaictes

Voy. ces lettres d’abolition générale, datées du 15 décembre 1372, dans notre précédent volume, n° DXXXI, p. 176 et suiv.

, et par ainsi estoit et [est] le dit cas comprins en la dite remission generale ; et aussi que le dit Guion ait toujours esté et soit de bonne vie et honneste conversacion, sanz estre actaint ou convaincus d’aucun autre villain cas ou crime, il doubte qu’il peust estre molestez ou temps avenir pour ceste cause, se par nous pourveu ne lui estoit de nostre grace, de la quelle avoir il nous a fait humblement supplier. Pour ce est il que nous, ayant regart à ce que dit est, voulons, nous plaist et octrions par ces presentes, de nostre auctorité royal et especial grace, que ou cas dessus dit les dictes lettres, remissions et graces, en tant que touche le dit fait, aient et sortissent leur plain effect, et, se mestiers est, ycellui fait avons quictié, remis et pardonné, remettons, quictons et pardonnons de nouvel, par la teneur de ces lettres de nostre auctorité et grace dessus dictes, au dit Guion, avec toute peine, offense et amende corporele, criminele et civile, en quoy il pouroit pour ce estre encouru envers nous. Et le restituons à sa bonne fame et renommée, au pays et à ses biens non confisquez, en imposant à nostre procureur et à touz noz autres officiers sur ce perpetuel silence, satisfacion faicte à partie avant [toute] euvre, civilement, se faicte n’est. Si donnons en mandement au seneschal de Xantonge et gouverneur de la Roichelle, et à touz noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace, et aussi de graces et remissions dessus dictes, facent ou dit cas, par la maniere que dit est, le dit Guion joir et user paisiblement et plainement, sanz faire ou souffrir qu’il soit contraint, traveilliez ou empeschiez en corps ne en biens, ores ne ou temps avenir, comment que ce soit au contraire. Et afin que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, l’an de grace mil ccc. quatre vins et quatre, et de nostre regne le quart, ou moys de may.

Par le roy, à la relacion du conseil. P. Manhac.

DCLXXII Mai 1384

Lettres portant cession au roi moyennant 8,000 livres par Guy de La Trémoïlle, seigneur de Sully, chambellan du roi, d’une maison qu’il avait récemment achetée à Paris, rue de Jouy, près de la poterne Saint-Paul et qui avait appartenu à feu Hugues Aubriot

Le célèbre prévôt de Paris sous Charles V était originaire d’une famille bourgeoise de Bourgogne et fut d’abord bailli de Dijon. Il reçut, l’an 1367, en titre d’office la prévôté et la capitainerie de la ville de Paris, et l’exerça jusqu’a la mort de son maître. Au temps de sa faveur, il avait combattu l’Université et ses privilèges. Les ennemis que cette attitude lui suscita profitèrent de la minorité de Charles VI pour renverser le prévôt. Enfermé dans les prisons de l’évêque, il en fut tiré le 1er mars 1382 par les Maillotins révoltés et se réfugia en Bourgogne, où il mourut, on ne sait au juste combien de temps après, mais postérieurement au 25 mai 1384, dans l’obscurité. M. Le Roux de Lincy a publié une étude sur Hugues Aubriot, dans la Bibl. de l’école des Chartes, t. XXIII, année 1862, p. 173-213. L’hôtel de la rue de Jouy avait été antérieurement la propriété de Jacques de Pacy. Charles V avait donné à Aubriot la somme nécessaire pour en faire l’acquisition, le 10 septembre 1367. (Id. ibid. p. 205-206.)

, prévôt de Paris ; de laquelle maison le roi fait don à son chancelier, Pierre de Giac

Chancelier de France depuis le 19 juillet 1383, Pierre de Giac avait été précédemment chancelier de Jean duc de Berry, comte de Poitou, comme on le verra ci-dessous. (Acte d’octobre 1386, n° DCCV).

. Paris, mai 1384

Cet acte a été publié par M.G. Fagniez ainsi qu’un accord enregistré au Parlement, le 25 mai 1384, passé entre l’abbaye de Tiron et Hugues Aubriot, au sujet précisément de cet hôtel de la rue de Jouy, qui était dans la mouvance de l’abbaye et dont celle-ci réclamait la propriété, sous prétexte qu’elle était confisquée par suite de la condamnation du prévôt de Paris pour crime d’hérésie. (Bulletin de la Société de l’histoire de Paris, t. V, 1878, p. 84-91.)

.

AN JJ. 124, n° 318, fol. 181 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 225-226

DCLXXIII Juin 1384

Rémission accordée à Perrot Richard pour le meurtre de Simon Jouyau, quatrième mari de sa mère, Pernelle Pouvereau.

AN JJ. 125, n° 9, fol. 8 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 226-229

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, de par les amis charnelz de Perrot Richart, povre laboureur de l’aage de xxx. ans ou environ, nous avoir esté exposé que comme Perrenelle, fille de feu Estienne Pouvereau, mere du dit Perrot, eust derrainement esté conjoincte par mariage avec Symon Jouyau, tixerant, le quel a esté toute sa vie homme noiseux et rioteux et de deshonneste conversacion, avec lequel la dicte Perrenelle a enduré pluseurs grans noises, riotes et durtez desordenées, sanz ce que ycellui Simon eust aucune cause raisonnable de ce faire, attendu et consideré que ycelle Perrenelle a demouré bien paisiblement et honnestement, sans avoir onques esté reprise d’aucune mauvaistié avec trois marys, qu’elle avoit euz par avant le dit Simon ; et pour ce que ycellui Symon ne vouloit cesser des dictes noises et durtez, se feust la dicte Perrenelle, qui estoit assez ancienne, retraicte en l’ostel du dit Perrot Richart, son filz, pour ce que bonnement elle ne povoit souffrir les dictes noises et durtez ; ouquel hostel le dit Symon son mari, si tost qu’il sçot qu’elle y estoit, se transporta et commança tantost à tancier et rioter au dit Perrot Richart, en lui disant : « Ribaut garçon, tu me vuelz desmarier de ma femme, mais malgré que tu en ayes, elle s’en revendra avec moy. » Et se distrent illeucques pluseurs autres grans injures et vilenies. Et pour ce la dicte Perrenelle, veans ces choses et que son dit mary estoit si mal meu, pour lui obeir s’en retourna avec lui en son hostel et compaignie ; mais pour ce que l’ostel de son dit mary distoit bien de l’ostel du dit Perrot deux lieues françoises ou environ, le dit Perrot Richart sanz penser à aucun mal et senz ce qu’il eust voulenté de soy courroucier, suy le dit Symon et sa dicte mere, pour les convoier. Si advint que, quant ilz furent en un lieu appellé la parroisse de Poustumé, la dicte Perrenelle qui estoit laisse et vaine, tant pour ce qu’elle n’avoit mengié de tout le jour, comme pour ce que elle estoit malaide, dist à son dit mary qu’elle se vouloit reposer et qu’elle ne povoit plus avant aler ; lequel lui respondi très yreusement que non feroit. Et lors le dit Perrot ayant pitié et compassion à sa dicte mere, pour raison d’amour maternelle qui à ce le mouvoit, et aussi qu’il savoit qu’elle estoit malade et n’avoit mengié de tout le jour, dist et pria amiablement le dit Symon qu’il luy pleust la laissier reposer, quar elle en avoit mestier, pource qu’elle estoit malade et jeune

A jeun.

. Le quel Symon lui respondi très malicieusement et par yre, en le injuriant tousjours, que non feroit, en despit de lui, et se distrent derechief pluseurs injures et villenies ; pour occasion des quelles le dit Perrot, en la chaleur en quoy il estoit et pour ce qu’il doubtoit que le dit Simon le frappast d’un coustel qu’il tenoit tout nu en sa main en venant droit à luy, en soy efforçant de l’en frapper, doubtant de la mort pour la grant rancune et hayneque le dit Symon lui avoit monstré et monstroit par ses paroles, en obviant et resistant à l’inconvenient qui se povoit ensuir en sa personne, se il se fust laissié ferir, frappa d’un baston qu’il avoit porté et portoit par le chemin pour soy apuyer, pour ce qu’il plouvoit et faisoit glissant par les chemins, le dit Symon, dont mort s’en ensuy en la personne dudit Symon. Pour doubte du quel fait et que justice procedast rigoreusement contre lui, il s’est absentez du païs et a delaissié sa femme et enfans et mainage et touz ses autres biens, lesquelx quierent maintenant leur pain et sont mendians ; et n’oseroit le dit Perrot jamaiz retourner au païs, se sur ce ne lui est impartie nostre grace et misericorde. Nous adecertes, eue consideration aux choses dessus dictes, voulans rigueur de justice temperer par misericorde, attendu que ycellui fait a esté fait de cas d’aventure et que le dit Perrot est encores jeunes homs et ne fu oncques reprins d’aucun villain fait, et que lui, sa dicte femme et ses enfans sont desers pour occasion du dit fait, et qu’il a souffert et enduré grant misere et povreté par l’espace de deux ans depuis le dit fait, si comme il dit, à ycellui Perrot le fait dessus dit ou dit cas, et toute peine corporele, criminele et civile, et bannissement que par ce il puet avoir encouru envers nous, avons remis, quictié et pardonné, remettons, quictons et pardonnons, et au païs et à sa bonne fame et renommée, et à ses biens non confisquez le restituons de nostre auctorité royal, plaine puissance et grace especial, par la teneur de ces presentes, satisfacion faicte à partie avant toute euvre civilement, se faicte n’est. Si donnons en mandement au gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, seuffrent et laissent le dit Perrot joir et user paisiblement, sanz le molester ou souffrir estre molesté aucunement au contraire, et se son corps ou ses diz biens sont pour ce prins, saisiz on empeschiez, si les lui mettent ou facent mettre à plaine delivrance. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou moys de juing l’an de grace mil ccc. iiiixx et quatre, et de nostre regne le quart.

Par le roy, à la relacion du conseil. P. du Perier.

DCLXXIV Juin 1384

Rémission accordée à Nicolas Fouquerent, valet du curé de Saint-Avaugour au diocèse de Luçon, pour un meurtre.

AN JJ. 126, n° 126, fol. 82 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 229-231

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie de Nicolas Fouquerent, povre varlet que, comme cestuy an present, lui estant varlet du curé de Saincte Waubour ou diocese de Luçon, eust prins en une demaine et dangier du dit curé son maistre certaines bestes qui estoient à Guillaume Landerea, le quel n’avoit aucuns droiz de les y mettre, advint que en la prise des dictes bestes, debat se meut, car le dit Guillaume, meuz de mauvaise voulenté, touz eschauffez s’adreça contre le dit exposant et en li voulant rescoure et oster de fait les dictes bestes, le frappa d’un gros baston tellement que par lui ne failli pas que le dit exposant ne feust grandement bleciez et en voie de mort. Et lors le dit exposant, soy sentant ainsi feruz, prinst une pierre en soy deffendant, et en fery le dit Guillaume, et après le getta à terre atout les poins, et lui osta le baston dont il l’avoit feru, mais pendant ce qu’il le tenoit soubz soy, Jehanne Landerelle, mere du dit Guillaume, et un sien parent survindrent avec le dit Guillaume, contre le dit exposant, et ainsi qu’il se combatoient ensemble, le dit exposant en la presse et entreprisse getta un coup de baston dont il attaint d’aventure la dicte Jehanne, non pas en la cuidant ferir, mais en soy revenchant contre son filz et son dit parent qui le pressoient et se combatoient à lui, comme dit est, sanz ce que par ledit fait, il lui feist sanc ne plaie, et n’apparoissoit lieu où elle eust esté ferue, et sanz ce que contre elle il eust paroles contencieuses par avant, mais toutevoyes trois ou quatre jours après ce, la dicte Jehanne qui estoit très vielle et ancienne femme, et avoit esté malade demi an et plus, ala de vie à trespas. Pour occasion du quel fait le dit exposant, doubtant rigueur de justice, s’est absentez du lieu et n’y ose seurement converser, en nous humblement suppliant comme en touz autres cas il ait esté et soit de bonne vie et conversacion honneste, et que le fait dessus dit n’avint point de certain propos, mais en chaude cole et par cas de meschief, et aussi la dicte Jehanne, ou lit de la mort, dist et ordena que elle vouloit que le dit exposant n’en eust aucune villennie ou dommage, en disant que elle ne savoit se elle mouroit pour ce fait ou par viellesce et maladie que elle avoit, comme dit est, nous sur ce lui vueillons impartir nostre grace. Nous adecertes, ces choses considerées, le fait dessus dit et toute peine, offense et amende corporele, criminele et civile, que le dit exposant a et peut avoir pour ce commis et encouru ou cas dessus dit, et satisfacion faicte à partie premierement, se faicte n’est, li avons quictié, remis et pardonné, quictons, remettons et pardonnons, et à son pays, bonne fame et renommée et biens non confisquez restituons, de nostre auctorité royal et grace especial, par ces presentes. Par la teneur desquelles au seneschal de Xaintonge, gouverneur de la Rochelle, et à touz noz autres justiciers et officiers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, donnons en mandement que de nostre quictance et remission facent le dit exposant joir et user paisiblement, et se son corps ou aucuns de ses biens estoient ou sont, pour occasion de ce que dit est, pris, saisiz, levez ou detenuz, lui mettent tantost et sans delay à plaine delivrance. Et que ce soit ferme chose et estable à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, ou mois de juíng l’an de grace mil ccc. iiiixx et quatre, et le quint de nostre regne

Il y a une erreur dans cette date ; il faudrait juin 1384 et le 4e de notre regne, ou 1385 et de notre regne le 5e, le règne de Charles VI commençant au 16 septembre 1380.

.

Par le roy, à la relacion du conseil. P. Milet.

DCLXXV 10 juillet 1384

Lettres de rémission octroyées aux habitants de l’île de Noirmoutier, coupables de rébellion envers les officiers du roi et du duc de Berry, chargés d’affermer et de lever les aides du huitième et du sel.

AN JJ. 125, n° 93, fol. 56 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 231-233

Charles, etc. A touz ceulz qui ces presentes lettres verront, salut. Comme nous eussons ordonné les aydes ayans cours en nostre royaume pour le fait de la guerre estre mises sus ou pays de Poitou, et par les commis à ce eussent esté mises sus, et par les esleus du dit pays eussent esté faictes assavoir les bailletes de fermes dudit pays, et eussent esté les dites fermes baillées par les diz esleuz et mesmement l’imposition et huitiesme de l’isle de Noirmoustier

Rappelons que Guillaume de Sainte-Maure, seigneur de Noirmoutier, dans la première moitié du xiiie siècle, avait accordé aux habitants de l’île, excepté à huit hommes de divers métiers, la remise entière de toute espèce de cens et de taille, à raison d’une rente annuelle de 450 livres (curieuse charte française, de 1225 à 1250, publ. par P. Marchegay, Cartulaires du Bas-Poitou. Les Roches Baritaud, 1877, in-8°, p. 303), et qu’au siècle dernier encore Noirmoutier passait pour un pays exceptionnellement privilégié en matière d’impôt. « C’est une espèce d’isle fortunée, dit l’abbé d’Expilly. Ses habitants ne payent ni taille ni capitation, ni aucun autre subside, à l’exception du papier timbré et des droits de contrôle et d’insinuation. » (Dict. géographique, historique, etc., in-fol., t. III, p. 859, v° Isle-de-Noirmoustier.)

estant ou dit pays, et aussi eussent ordené certaines personnes pour lever l’aide du sel

Voir des Instructions du roi Charles VI, en date du 1er décembre 1383, touchant la levée de l’aide établie sur le sel en Poitou et en Saintonge, publ. dans le grand recueil des Ordonnances, in-fol., t. VII, p. 753.

ou dit ysle, et ordené certaines personnes pour enroler le sel qui seroit vendu en ycellui ysle, et pour faire paier les diz aydes, eussent commis aucuns de noz sergenz et autres de nostre très chier et bien amé oncle le duc de Berry et d’Auvergne, conte de Poitou ; et il soit ainsi que les diz habitans d’icellui ysle ou queque soit la plus grant partie d’iceulz ont commis et perpetré pluseurs rebellions de fait et desobeissances en la personne des diz fermiers, sergens et commis à faire les choses dessus dictes, et n’ont voulu souffrir les diz aydes avoir cours ou dit ysle ; et pour ce eussent les diz esleuz par devant eulx fait adjourner pour les diz cas pluseurs des habitans dudit ysle qui avoient commis et perpetrez les faiz dessus diz, et aucuns d’iceulx adjournez et en leur absence, par defaut et contumace, les eussent retenuz en grans peines et amendes crimineles et civiles envers nous, et contre aucuns des autres eussent commancié de faire procès pour les faiz et cas dessus diz ; et depuis les diz habitans se soient trays par devers nous, en nous humblement suppliant que les diz cas nous leur voulsissons pardonner, quicter et remettre, et sur ce leur impendre nostre grace et misericorde. Nous, à la requeste de nostre amé et feal chambellan, Guy de la Tremoïlle, seigneur de Suilly

De la maison de Sainte-Maure, la seigneurie de Noirmoutier passa dans celle de Craon, par le mariage d’Amaury III sire de Craon avec Isabelle de Sainte-Maure, fille unique et héritière de Guillaume III de Sainte-Maure, vers 1306. Le petit-fils d’Isabelle, Amaury IV de Craon, étant mort sans enfant, l’an 1373, sa sœur Isabelle fut son héritière et porta les biens de la succession de Craon dans la maison de Sully, lorsqu’elle épousa en troisièmes noces Louis Ier sire de Sully, dont la fille unique Marie, dame de Sully, épousa, vers 1382, Guy VI de La Trémoille, lui apportant entre autres terres l’île de Noirmoutier.

, et afin que yceulx habitans puissent mieulx paier les diz aydes, voulans preferer misericorde à rigueur de justice, avons quictié, remis et pardonné, quictons, remettons et pardonnons, de nostre grace especial par ces presentes, toutes peines, amendes corporeles, criminelles et civiles ès queles eulz et chascun d’eulx puent estre encouruz envers nous, pour cause des cas et deliz, contumaces et defaulx dessus diz, tant celles ès quelles ilz ont, ou aucuns d’eulz, esté condempnez, comme autres amendes ou offenses quelconques. En imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur, gens et officiers. Si donnons aux diz esleuz et à touz noz autres justiciers et officiers, et à chascun d’eulz, que de nostre presente grace facent et laissent joir et user paisiblement, et les ostent de touz procès en quoy ilz pourroient estre avecques nostre procureur, pour cause des cas dessus diz. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces [presentes]. Donné à Paris, le xe jour de juillet l’an de grace mil ccc. iiiixx et quatre, et de nostre regne le quart.

Par le roy, à la relacion monseigneur le duc de Berry, aucuns du conseil presens. J. le Masle.

DCLXXVI Août 1384

Ratification et vidimus d’un contrat d’accord et échange passé entre l’abbaye de Valence et Audouin Chauveron, chevalier, sr de Laurière, garde de la prévôté de Paris, avec confirmation de l’amortissement déjà accordé par le duc de Berry, comme comte de Poitou, à ladite abbaye pour diverses rentes qu’elle a acquises à Pouzeau et à Sairé dans la châtellenie de Lusignan, à Payré dans la châtellenie de Couhé, et à Reigner près Lezay.

AN JJ. 125, n° 134, fol. 79 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 233-243

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, nous avoir fait veoir par nostre conseil et les gens de noz comptes à Paris les lettres de nostre très chier et très amé oncle le duc de Berri et d’Auvergne, conte de Poitou, et nostre lieutenant ès diz pais, ou duchié de Guienne et en tout le païs de Languedoc, seellées de son grant seel en las de soye et cire vert, contenans la fourme qui s’ensuit :

Jehan, filz de roy de France, duc de Berry et d’Auvergne, conte de Poitou, lieutenent de monseigneur le roy ès diz païs, ou duchié de Guienne et en tout le païs de Languedoc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, de la partie de nostre bien amé Audoyn Chauveron

La famille Chauveron était établie alors dans le Limousin, aux environs du Dorat. Audouin et son frère Jean sont les premiers sur lesquels on possède des renseignements précis. Celui des deux qui nous intéresse particulièrement, parce que son nom est mêlé à des actes poitevins tels que celui-ci, et surtout parce que, douze ans plus tard, il fut investi des plus hautes fonctions administratives de notre province, fut successivement bailli de Cotentin, bailli d’Amiens, office où il fut institué le 15 décembre 1379 (Arch. nat., P 2295, p. 639), et garde de la prévôté de Paris, charge dont il fut pourvu le 31 mai 1381, en remplacement du célèbre Hugues Aubriot. On voit par les lettres de mai 1383 publiées ici, qu’il se qualifiait docteur en lois, conseiller du roi et maître des requêtes de l’hôtel. Ce n’est qu’à partir de l’année suivante qu’il s’intitule chevalier (actes des 5 avril 1384 n.s. et 19 juin 1384, publ. par dom Félibien, Hist. de la ville de Paris, in fol., t. III (Preuves, I), p. 335 et 407), ce qui donne créance à l’assertion de Jean Le Féron, qu’Audouin Chauveron fut fait chevalier le 11 septembre 1383. Dans d’autres actes il prend la qualité de seigneur du Dognon, et plus tard de la Motte-sur-Indre, près Palluau (Indre), terre qu’il acheta pour le prix de 2,000 livres, le 14 mai 1388, de Jean de Châteauneuf et de Jeanne de Charenton, sa femme. Jusqu’au 25 mai 1384, Audouin habitait à Paris un hôtel sis devant Saint-André-des-Arts ; il l’avait acquis de Pierre Cadoret, et le céda moyennant 1,200 fr. d’or à Guy de La Trémoïlle (acte du 25 mai 1384. (Arch. nat., X1c 48.) La Thaumassière dit qu’il exerça cet office jusqu’au 25 janvier 1388 et mourut au mois de juin de la même année (Hist. du Berry, Paris, in-fol., 1689, p. 869), ce qui est une grosse erreur. La date du 25 janvier 1388 peut être exacte, d’après l’ancien style ; mais Audouin Chauveron vécut encore plus de dix années. Il dut quitter la prévôté de Paris sous une grave accusation de péculat, concussion, abus de pouvoir, etc., dont le jugement fut confié à une commission extraordinaire, puis au Parlement. Les poursuites étaient certainement commencées en janvier 1389 n.s., puisque, à la date du 30 de ce mois, on lit dans le registre criminel de la cour : « Audouin Chauveron, nagueres prevost de Paris, se soumet à repondre à tout, mais demande que contre lui ne soient pas faites informations secretes » (X2a 12, fol. 39). Un an plus tard, il obtint des lettres de rémission. Nous en publions ci-dessous un extrait relatif à l’un des protégés du prévôt de Paris, Antoine de Buxeron, qu’il avait fait nommer garde de la Monnaie de Poitiers (janvier 1390, n° DCCXXXVIII ci-dessous). Aussi nous n’insisterons pas ici sur cette grave affaire. Audouin était arrivé sans doute par son mérite, mais aussi par la faveur du duc de Berry. Ce prince ne l’abandonna pas. Quelques années plus tard, il le nomma même son sénéchal en Poitou. Il exerça cet office de 1394 à 1396 au moins. Il est désigné en sa qualité de sénéchal et comme seigneur du Doignon dans un titre du 4 novembre 1394 (Arch. de la Vienne, abb. de Saint-Hilaire de la Celle), et le 20 juillet 1396, un autre titre du chapitre de Notre-Dame-la-Grande lui donne comme lieutenant général Guillaume Du Chastin (Idem, G. 1104). Nous n’avons point de renseignements sur les dernières années et le décès de ce personnage. On sait qu’il était mort avant le 2 juillet 1399. A cette date, sa veuve, Galienne Vigier, ayant la garde noble de leur fille unique, Marguerite Chauveron, et son frère Jean Chauveron, conclurent une transaction avec les chanoines de Palluau, homologuée au Parlement le 4 février 1406 n.s. (X1c 91). Marguerite Chauveron fut mariée avec Jean II d’Aubusson, sr de la Borne, dont elle eut dix enfants. (Le P. Anselme, t. V, p. 332.)

Jean Chauveron, chevalier, seigneur de Laurière, de Riz-Chauveron, etc., avait épousé Marie Vigier, sœur de la femme de son frère Audouin. On a de lui un accord passé avec André de Naillac, le 22 juillet 1388, touchant l’exécution de la vente de la terre de Riz-Chauveron et de la juridiction de la paroisse d’Azat-le-Riz. (Arch. nat., X1c 57.) Dans un aveu rendu à Jean comte de Poitou, le 19 juin 1406, pour son hébergement de Dinsac et autres relevant de la châtellenie de Montmorillon, Jean Chauveron s’intitule chevalier, chambellan et conseiller du roi et du duc de Berry. (Copie du Grand-Gauthier, Arch. nat., R1* 2171, p. 669.) Il vécut jusqu’à la fin de 1421 au moins, et par son testament daté du 4 décembre de cette année, il choisit sa sépulture en l’église de Grammont, près du tombeau d’Audouin son frère. (La Thaumassière, op. cit., p. 869.)

, docteur en loys, conseiller et maistre des requestes de l’ostel de monseigneur le roy, et son prevost de Paris, nous avoir esté exposé lui avoir desir et affection de bailler et laissier à fin de heritage, pour le salut de son ame, et pour certaines autres causes, à l’eglise de Nostre Dame de Valence

Voici l’indication de deux documents intéressants pour l’histoire de l’abbaye de Valence, vers cette époque. Dans le premier qui est un mandement du Parlement du 17 juillet 1380, on voit que deux foires avaient été accordées par le roi à l’abbé et aux religieux infra clausuram abbacie, mais que le procureur du comte de Poitou, le seigneur de Couhé et l’abbaye de Bonneuil, conviés à l’enquête de commodo et incommodo, s’opposèrent à cet établissement, d’où procès à la Chambre des Comptes, puis en appel au Parlement. (Arch. nat., X1a 9, fol. 86.) Le second est un arrêt rendu au Parlement sur un différend entre l’abbé de Valence d’une part, et Guillaume de Saint-Just et le procureur du roi, touchant la possession que l’abbaye prétendait avoir depuis deux cents ans « de villa de Passayo Naudonii » en Angoumois. Cet arrêt, du 17 janvier 1394 n.s., porte, renvoi des parties devant la Chambre des Comptes. (Id., X1a 41, fol. 131 v°.)

quarante sextiers de froment de rente, à la mesure de Cohec, ou autres rentes ou heritages à la value, et pour yceulx achater avoir baillié certaine somme d’argent à l’abbé et convent de la dicte eglise, en nous suppliant que aux dessus diz abbé et convent vueillons donner congé d’achater en nostre païs de Poitou les xl. sextiers de froment dessus diz, ou autres rentes ou heritages à la value, et que yceulx vueillons amortir à tousjours. Nous, à la supplication et requeste du dit Audoyn et que de tout nostre cuer desirons l’augmentacion, bien et proffit de l’eglise, en l’honneur de Dieu et de la glorieuse Virge Marie, sa mere, avons donné congé et donnons par ces presentes aus dessus diz abbé et convent de acquerir en nostre dicte conté les xl. sextiers de froment dessus diz, ou autres rentes ou heritages, sans justice, à la juste value des diz quarante sextiers, au proffit de la dicte eglise et de l’ame du dit Audoyn, et à sa descharge, et yceulx xl. sextiers ou autres heritages ou rentes à la value à ainsi acquerir par les dessus diz abbé et convent pour la dicte eglise, pour l’ame du dit Audoyn et en sa descharge, comme dit est, dès maintenant pour lors que acquis seront, et dès lors pour maintenant, de nostre certaine science, grace especial et auctorité royal à nous attribuée en ceste partie, leur avons admorti et admortissons par ces presentes, voulons que si tost que les dessus diz abbé et convent les auront acquis, eulx et la dicte eglise les puissent tenir et possider plainement, paisiblement et perpetuelment comme pardurable et à tous jours. Si requerons, par ces mesmes presentes, à noz amez les gens des comptes de monseigneur le roy, mandons aux gens de noz comptes et à touz autres justiciers et officiers, et à leurs lieuxtenans, qui à present sont et pour le temps avenir seront, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et admortissement laissent, facent et seuffrent joir et user paisiblement, plainement et perpetuelment la dicte eglise et les dessus diz abbé et convent, sans les contraindre ne souffrir estre contrains à yceulx xl. sextiers de froment, ou la valeur d’iceulx, quant ainsi seront acquis, comme dit est, mettre hors de leur main, ne autrement les empeschier, perturber ou molester, ne souffrir estre empeschiez, perturbez ou molestez au contraire, en aucune maniere ; car ainsi le voulons nous estre fait, non ostant ordenances, mandemens et defenses quelconques au contraire. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours mais, nous avons fait mettre nostre grant seel à ces presentes. Sauf le droit de monseigneur le roy et le nostre en autres choses, et l’autrui en toutes. Donné à Paris, en nostre hostel de Nesle, l’an de grace mil ccc. iiiixx et trois, ou moys de may.

Et aussi avons veu autres lettres seellées des seaulx des religieux, abbé et convent de Nostre Dame de Valence, de l’ordre de Citiaux, ou diocese de Poitiers, dont la teneur est tele :

Universis presentes litteras inspecturis, Johannes

Jean II était déjà abbé de Valence en 1376. La Gallia christiana cite une transaction datée de cette année entre lui et le seigneur de Couhé. C’est d’ailleurs la seule mention faite de cet abbé. On passe ensuite à son successeur Pierre, cité en 1399. (T. II, col. 1359.)

, miseratione divina abbas monasterii Beate Marie de Valencia, Cisterciensis ordinis, Pictavensis diocesis, totusque ejus loci conventus, salutem in Domino. Noveritis quod, cum lis seu controversia verteretur aut verti speraretur inter nos actores, ex una parte, et nobilem virum dominum Audoynum Chauveron, militem, prepositum Parisiensem, dominum de Laureria, defensorem, ex parte altera, super eo quod nos abbas et conventus predicti dicebamus et proponebamus nos habere super terra de Laureria

La terre de Laurière avait été donnée par le roi, en août 1311, à Hugues de la Celle, chevalier, et en novembre 1326, à Jourdain de Loubert, chevalier. (Voy. notre tome Ier, p. 40 n. et 265.)

, quam tenet idem miles, quolibet anno octoviginti septem sextaria siliginis cum arura, ad mensuram dicti loci de Laureria, de redditu, que bene valent xxv. sextaria siliginis ad mensuram Cohiaci, et requirebamus contra dictum militem, dictam terram tenentem, nobis persolvi redditum antedictum; dicto milite dicente plures causas et raciones, propter quas asserebat minime se teneri ad nobis solvendum redditum ante dictum, et maxime quia actio, quam habere dicebamus contra ipsum, erat prescripta propter lapsum temporis, et, supposito quod non esset prescripta, quod tempore assinacionis dicti redditus, si unquam assignatum fuit super dicta terra, ipsa terra bene valebat quingentas libras rendales et plus, et quod nunc, propter guerras que diu viguerunt in illis partibus, dicta terra non valet centum libras redditus. Nos enim abbas et conventus predicti dicebamus plures raciones ex adverso, et quod idem miles redditum ante dictum persolvere tenebatur. Demum pluribus altercationibus hinc inde habitis super premissis inter nos et dictum dominum Audoynum Chauveron, militem, cum hoc quod de beneplacito et voluntate reverendissimi patris in Christo domini abbatis Clarevallis

Étienne II de Foissy, aliàs de Foigny, fut abbé de Clairvaux de 1380 à juillet 1402, date de sa mort. (Gall. christ. t. IV, col. 809.)

, superioris nostri, procedat et non aliàs, habita inter nos abbatem et conventum predictos deliberacione matura super premissis, consideratis illis que considerare potuimus, concordavimus et pacificavimus cum dicto milite per medium qui sequitur :

Videlicet quod dictus miles, cupiens particeps esse in missis et aliis orationibus in dicto nostro monasterio faciendis, et eciam exonerare concienciam suam, si aliqualiter onerata erat, de redditu predicto acquiri nobis et de pecunia sua persolvi fecit res immobiles que secuntur : videlicet ab Hugone du Tay, valeto, à Guillelmo de la Chappelle et ejus uxore, et ab Hugone Sercler omnes et singulas res immobiles, quas habebant in villagio de Pouzeaus sito in castellania de Lesigniaco, dicte Pictavensis diocesis, sive essent res predicte in censibus, tailliis, coustumis, redditibus, bladis, denariis, altilibus, terragiis, decimis bladorum, agnorum, porcellorum, caseis et aliis rebus quibuscunque, cum omni juridicione quam habebant in dicto villagio, que res bene valere possunt xl. prebendaria siliginis de redditu, ad mensuram Coyaci, que valent decem sextaria siliginis ad dictam mensuram ;

Item, à Petro de Pinu, valeto, omnes et singulas res quas habebat in dicto villagio de Pouzeaus, sive essent res predicte in pasquerio pecudum, decimis bladorum, redditibus, denariis et aliis rebus quibuscunque, que bene valent quolibet anno xxv. prebendaria siliginis redditus, ad mensuram de Coyaco, que valent sex sextaria siliginis et unum prebendarium ad eandem mensuram ;

Item, à Paquerio du Molin, valeto, de consensu ejus uxoris, omnes et singulas res hereditales, quas habebat in villagio de Sayret, sito in dicta castellania de Lesigniaco, sive sint res predicte in hominibus subditis, censibus, tailliis, coustumis, redditibus bladorum et denariorum, altilibus, terragiis, decimis bladorum, pecudum, lini et canapis, et aliis rebus quibuscunque, que bene valere possunt anno quolibet l. prebendaria siliginis redditus, ad mensuram Coyaci, que valent duodecim sextaria cum dimidio ad dictam mensuram ;

Item, ab Hugone Chaucea omnem partem et porcionem, quam habebat in magna decimaria de Payret, situata in castellania de Coyaco, que pars bene valere potest xii. prebendaria siliginis redditus, ad mensuram Coyaci, que valent tria sextaria siliginis, ad dictam mensuram ;

Item, à domino Johanne de Vezençay

Il appartenait à la même famille que Guillaume de Vezançay, abbé de Saint-Maixent (voy. t. IV, p. 153 note), et Constantin de Vezançay, dont la fille Jeanne avait épousé Guillaume de Lezay, seigneur des Marais, et était veuve le 5 septembre 1395, date d’un hommage qu’elle fit à l’évêque de Poitiers pour le château des Marais, relevant de la châtellenie de Celle-l’Évêcault. (Le P. Anselme, t. III, p. 87.)

, milite, omne jus quod habebat in decimaria de Reignet, sita in terra de Lezay, quod bene valet tria sextaria siliginis redditus, ad dictam mensuram de Coyaco.

Quas res immobiles supradictas nos abbas et conventus predicti acquisivimus et de peccunia ipsius militis persolute fuerunt, et super hoc fuerunt littere autentice passate et concordate ; et quas res sic acquisitas dictus miles admortisari fecit per illustrissimum principem dominum ducem Bitturie et Alvernie, comitem Pictavensem, et locumtenentem domini nostri regis in partibus ante dictis. Occasione quarum rerum sic acquisitarum, que sunt magni valoris et utiles et propinque dicto monasterio, nos dictum militem et suos voluimus et volumus participes effici in missis et orationibus dicti nostri monasterii, et ipsi militi dimisimus et dimittimus pro nobis et successoribus nostris perpetuo omne jus quod habebamus et habere et percipere consueveramus in quadam decimaria vocata decimaria de Folas, in castellania de Laureria, que nobis valere poterat quolibet anno quinque sextaria siliginis, ad mensuram Coyaci.

Item unum sextarium frumenti de redditu ad mensuram de Laureria et quatuor solidos in denariis de redditu, in quibus nobis tenebantur certe persone super certis tenementis, situatis in villa de Laureria, et eciam si placeat dicto domino abbati Clarevallis, ut prefertur, quictavimus, tradidimus et concessimus pro nobis et successoribus nostris dicto domino Audoyno, pro se et suis heredibus et successoribus dicta octoviginti septem sextaria cum mina siliginis redditus, que habebamus et habere consueveramus super dicta terra de Laureria, et in ipsum dominum Audoynum cessimus et transtulimus omne jus et quicquid juris in redditu et decima predictis, et bonis et personis pro eisdem obligatis, habebamus et habere poteramus et debebamus, quacunque racione seu causa.

Hec autem universa et singula, prout superius sunt expressa, promisimus et promittimus, pro nobis et successoribus nostris, bona fide et sub obligacione omnium et singulorum bonorum dicti monasterii, et nobis racione ejusdem commissorum, tenere, adimplere, inviolabiliter observare et contra non facere vel venire, casu aliquo contingente. In quorum testimonium, sigilla nostra hiis presentibus litteris duximus apponenda. Datum in capitulo nostro, nobis omnibus more solito ad sonum campane pro capitulando congregatis, die quarta mensis aprilis anno Domini m° ccc. octuagesimo iiiito.

Et parmi les lettres du dit abbé de Valence estoient annexées certaines lettres de l’abbé de Clervaux, pere abbé d’icelle eglise de Valence, contenant ceste forme :

Nos frater Stephanus, abbas Clarevallis, Cisterciensis ordinis, Lingonensis diocesis. Notum facimus universis quod, cum olim per nostras patentes litteras commiserimus venerabili coabbati nostro de Castellariis

L’abbé des Châtelliers se nommait alors Jean. M.L. Duval cite de lui deux actes, l’un de 1379, l’autre de 1387. (Cartul. de l’abbaye de N.-D. des Châtelliers, Société de Statistique des Deux-Sèvres, Niort, 1867, in-8°, introduction, p. lxxxiv.)

, dicti nostri ordinis et generacionis, quatinus ad monasterium de Valencia, nobis immediate subjectum, personaliter accederet et perquireret diligenti scrutinio si permutacio quorumdam reddituum in litteris quibus nostra presens annectitur confirmacio, dicto monasterio de Valencia foret utilis, absque inquisicione ulteriori facienda de cetero cuicunque ve narranda nisi nobis, cui auctoritate incumbit paterna, sane quia per ipsum venerabilem coabbatem nostrum de Castellariis et suas litteras fuimus et sumus plenarie informati, precipue cum informacionem senciat per commonachos loci et vicinos laudabilem de dicta permutacione que fiet monasterio utilis, Deo dante, eamdem et in litteris quibus nostre sunt annexe contenta, auctoritate nostra paterna, in quantum debemus et possumus, ratificamus, approbamus et tenore presentium confirmamus, ad humilem supplicacionem venerabilium coabbatis et conventus dicti loci de Valencia, teste sigillo nostro presentibus cum suis affixo. Datum anno Domini m° ccc. octogesimo quarto, die iim mensis maii.

Toutes lesquelles lettres et les choses contenues et dont mencion est faicte en ycelles, nous, à la supplicacion et requeste de nostre amé et feal chevalier et conseiller Audoyn Chauveron, garde de nostre prevosté de Paris, et par l’advis et deliberacion de noz dictes gens de noz comptes, avons agreables et les loons, greons, ratiffions et approuvons, et de nostre plaine puissance, auctorité royal et grace especial, les octroyons et confermons par la teneur de ces presentes. Par les quelles donnons en mandement à noz amez et feaulx les genz de noz diz comptes et tresoriers à Paris, et à touz noz autres justiciers et officiers, et à leurs lieuxtenans, qui à present sont et pour le temps avenir seront, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et de la grace et admortissement fais par nostre dit oncle, comme contenu est en ses lettres cy dessus transcriptes, laissent, facent et seuffrent joir et user paisiblement, plainement et perpetuelment les diz religieux de Valence et leurs successeurs, sans les contraindre ne souffrir estre contrains jamais, ou temps avenir, à mettre hors de leurs mains les possessions et revenues immeubles, que yceulz religieux de Valence ont acquis et achaté de nouvel des deniers de nostre dit conseiller et à la descharge de sa terre de Lauriere, que il tient de nous en foy et hommaige en la seneschaucie de Limosin ; lesquelles possessions et revenues montent à xxxv. sextiers de froment de rente, à la mesure de Cohec, ou environ, selon ce que par les lettres des diz religieux de Valence cy dessus encorporées puet apparoir. Et voulons et leur octroyons que il les tiennent pour toutes amorties, et sanz estre en ce fait empeschiez ou molestez en aucune maniere, ores ne ou temps avenir. Par mi ce toutevoies que ce qui est delaissié ou permué par les diz religieux à nostre dit conseiller, à la descharge de sa dicte terre de Lauriere, demourra et demeure prophane et non amorti, tenu nuement de nous par foy et hommage lige, et uni avec le dit fié, terre et seigneurie de Lauriere, dont mencion est faicte dessus, laquele terre il tenoit et tient de nous par la dicte foy et hommage, deschargée et franche de toute rente, revenue et charge que povoient avoir ou reclamer les diz religieux, comment et pour quelconque cause ou action que ce fust ou soit. Car ainsi nous plaist il estre fait et de nostre dicte grace l’avons octroyé, voulons et octroyons par ces presentes, non obstant quelconques ordenances, mandemens ou defenses au contraire. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf nostre droit en autres choses et l’autrui en toutes. Donné à Paris, l’an de grace mil ccc. iiiixx et quatre, et de nostre regne le iiiie, ou moys d’aoust.

Par le roy, à vostre relacion et du conseil estant en la Chambre des comptes

Ces lettres ont dû être enregistrées à la Chambre des comptes et transcrites sur les anciens mémoriaux détruits dans l’incendie de 1737 ; nous les avons vainement cherchées sur les mémoriaux reconstitués.

. P. Manhac.

DCLXXVII Septembre 1384

Rémission accordée à Colin le Bétort pour un vol de joyaux commis au préjudice de Guy de La Trémoïlle, seigneur de Sully, chambellan du roi. Il lui avait dérobé et plus tard restitué « neuf afiquez d’or, vint et cinq verges d’or, une pierre ynde, un levrier d’or, un tableau d’or là où estoit pourtrait Nostre Seigneur Jhesu Christ et Nostre Dame, trois paires de patrenostres de perles et autres menues choses ». Paris, septembre 1384

Cette pièce est imprimée dans le Livre des comptes de Guy de La Trémoïlle et Marie de Sully, publ. par M. le duc de La Trémoïlle, Nantes, 1887, in-4°, Appendice, p. 174.

.

AN JJ. 125, n° 162, fol. 93. v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 243

DCLXXVIII Novembre 1384

Rémission accordée à Mériot Couturier, de la Chenaye, paroisse de Sainte-Néomaye, pour le meurtre de Pierre Brunet, dans une rixe survenue à l’issue d’un enterrement entre les héritiers de la défunte.

AN JJ. 125, n° 252, fol. 141 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 244-246

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté humblement exposé de la partie de Meriot Cousturier, povres homs demourant en la ville de la Chaignée en la chastellerie de Saint Maixant, en la parroisse de Sainte Neomaye, que, comme pluseurs gens se feussent assemblez en la dicte ville de la Chaignée pour faire et acomplir l’obseque d’une femme qui estoit alée de vie à trespassement, et aussi pour diviser ses biens entre les amis d’icelle, et il soit ainsi que, après qu’ilz orent beu et mengié oultre mesure, paroles injurieuses se meurent entre eulx et firent grant cry, auquel cry le dit exposant vint pour les cuidier appaisier et sans aucune hayne ou rancune qu’il eust à aucun ; et quant il arriva sur eulx, il dist à Pierre Brunet, filz de Jehan Brunet, que ce n’estoit pas bien fait qu’il ne departoient leurs biens plus courtoisement, et le dit Pierre Brunet lui respondi : « Que en as tu à faire ? — Si ay, dist le dit exposant, quar vous nous avez fait grant paour, que nous cuidions que il feussent les Anglois », pour ce que lors ils estoient sur le païs ou près d’illec

La date du meurtre de Pierre Brunet n’étant pas précisée, on ne saurait rechercher à quel événement il est fait allusion ici. Selon toute vraisemblance, ces faits se passèrent dans le cours de l’année 1384 ; il est de toute façon curieux de noter cette chevauchée d’Anglais aux environs de Saint-Maixent.

. Et lors Pierre Espaissay, oncle du dit Brunet, crya sur le dit exposant, et tantost le dit Pierre Brunet qui estoit mal meu et eschauffé de ce qu’il s’estoit combatu à Pierre de Mons, tenant une grant fourche, courut sus au dit exposant et le fery plusieurs cops sur la teste, dont grant effusion de sanc sailli. Et lors le dit exposant, veant son sanc et doubtans les cops, de chaude cole, pour eschever à la mort, en repellant force par force, fery le dit Brunet de son couteau tranchepain un cop, dont deux ou trois jours après mort s’en ensui en la personne d’icellui Brunet. Et s’est le dit exposant absentez du païs, auquel il n’oseroit jamais retourner, sans nostre grace et misericorde, si comme il dit. Suppliant humblement que, eue consideracion aux choses dessus dictes et que en touz ses autres faiz il a esté de bonne vie et honneste conversacion, sans avoir esté repris d’aucun autre villain cas ou reprouche, il nous plaise à lui impartir nostre grace sur ce. Nous, attendu ce que dit est, voulans en ceste partie grace estre preferée à rigueur de justice envers le dit suppliant, à icellui ou cas dessus dit avons, de nostre grace especial et auctorité royal, quictié, remis et pardonné, quictons, remettons et pardonnons par ces presentes le dit fait avec toute peine, amende et offense corporele, criminele et civile en quoy il puet pour ce estre encouru vers nous, et le restituons à sa bonne fame, renommée, au païs et à ses biens non confisquez, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur, satisfacion faicte à partie premierement et avant toute euvre, civilement tant seulement. Si donnons en mandement au seneschal de Poitou et à touz noz autres justiciers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, seuffrent et laissent joir et user paisiblement le dit suppliant, sans le molester, contraindre ou empeschier, ne souffrir estre molesté, contraint ne empesché en aucune maniere au contraire ; mais son corps et ses biens non confisquez, pour ce pris, saisiz, arrestez ou empeschiez, lui mettent ou facent mettre tantost et sans delay à plaine delivrance. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et en toutes l’autrui. Donné à Paris, ou moys de novembre l’an de grace mil ccc. iiiixx et quatre, et de nostre regne le quint.

Es requestes de l’ostel. J. de Savigny. — Barreau.

DCLXXIX Janvier 1385

Lettres de légitimation données en faveur de Martin Amellaut, mercier de Thouars, fils de Moudin Amellaut et d’Isabelle Constans, non mariés.

AN JJ. 126, n° 24, fol. 13 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 246-247

Karolus, Dei gratia Francorum rex. Legitime genitos quos vite decorat honestas nature vicium minime decolorat, nam decor virtutis abstergit in prole maculam geniture et pudicitia morum impudor originis aboletur. Plus enim valet probitatis splendor in humili quam fastus originis in sublimi. Notum igitur facimus universis, presentibus et futuris, quod licet Martinus Amellaut, pauper mercerius commorans apud Thouarçum in Pictavia, filius defunctorum Moudini Amellaut, soluti, et Ysabellis Constance, solute, quondam filie defuncti Dyonisii Constans, ex illicita copula genituram traxisse noscatur, talibus tamen, ut testatur relatio fide digna, virtutum donis et morum venustate coruscat et in ipso supplent merita et virtutes quod ortus odiosus adjecit, quod super defectu natalium quem patitur gratiam à nostra magestate regia meruit obtinere. Nos igitur, hiis attentis, ipsum Martinum de nostre plenitudine regie potestatis et de gratia speciali legitimavimus et legitimamus, ac legitimacionis titulo decoramus et ipsum in judicio et extra pro legitimo reputari, censeri volumus et haberi. Concedentes eidem nichilominus per presentes ut ipse Martinus, quamquam, ut prefertur, de dampnato cohitu traxerit originem, ipso defectu natalium non obstante, quem totaliter abolemus, bona temporalia quecunque, mobilia et immobilia, acquirere, et am acquisita possidere valeat et tenere, et de eisdem inter vivos vel in testamento disponere pro libito voluntatis, ad successionemque dictorum patris, matris et parentum suorum, et aliorum quorumcunque ex testamento vel ab intestato, ni sit alius proximior de genere nec sit alteri jus quesitum, admittatur, habeatque ex testamento vel ab intestato legitimos successores, et ad quecunque officia, honores, status et actus legitimos admittatur, ac si esset de legitimo matrimonio procreatus, defectu predicto, constitutionibus, usu, consuetudine, statuto, edicto vel indicto contrariis non obstantibus quibuscunque. Nolumus eciam quod in graciis imposterum obtinendis et aliis actibus de presenti gratia mencionem facere teneatur. Solvendo nobis propter hoc sola vice dumtaxat financiam moderatam. Mandantes universis justiciariis et officiariis regni nostri, aut eorum locatenentibus, presentibus et futuris, et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, quatinus prefatum Martinum nostra presenti gratia et legitimacione uti pacifice faciant et gaudere, amoto quolibet impedimento, quod si forsan in premissis seu quolibet premissorum apponeretur, illum ad statum pristinum et debitum reducant seu reduci faciant indilate. Quod ut perpetue stabilitatis robur obtineat, presentes litteras sigilli nostri fecimus appensione muniri. Nostro in aliis et alieno in omnibus jure salvo. Actum Parisius, mense januarii anno Domini millesimo cccmo octogesimo quarto, et regni nostri quinto.

Per regem, ad relacionem consilii. J. de Crespy.

DCLXXX Janvier 1385

Rémission pour les excès qu’il a pu commettre depuis vingt ans pendant les guerres auxquelles il a pris part, accordée à Jean Rataut, fils bâtard de Jean Rataut, chevalier poitevin, au moment où il va quitter les compagnies.

AN JJ. 126, n° 32, fol. 17 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 247-250

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, de la partie de Jehan Rataut, filz bastart de nostre bien amé Jehan Rataut, chevalier du pays de Poitou

On rencontre, dans les textes, de nombreux membres de cette famille à l’état isolé ; le présent volume en mentionne au moins six, dont il est difficile de retrouver la filiation ou le lien de parenté, les généalogies faisant défaut. La famille Rataut possédait, entre autres fiefs, au xive siècle, Dilay près Ardin, Arçais, Laudonnière autrement Curzay, et portait, suivant Du Chesne, « burelé d’argent et d’azur au bâton de gueulle engreslé, brochant sur le tout », (Hist. généal. de la maison des Chasteigners, p. 119.) Jean Rataut est nommé avec son frère Dreux, dans un arrêt du Parlement du 27 août 1393, parmi les nombreux héritiers de Jacques Chenin, sr de la Jarrie. Celui-ci, au moment de sa mort, était en procès avec le prieur de Mazerolles, dépendant de l’abbaye de Nouaillé, au sujet du partage des revenus d’un bac sur la Vienne, établi par eux à frais communs, et d’autres droits qui se levaient à leur profit à Lussac. Aussitôt le décès de la partie adverse, le prieur fit ajourner ses ayants droit, mais la cour annula cet ajournement et renvoya les parties aux requêtes du Palais, pour le 1er octobre suivant. Voici la liste des prétendus héritiers du sr de la Jarrie ; elle peut avoir son intérêt : Jean de Dercé, chevalier, « Bonum de Dolé » et Marie Rataut, son épouse, Jean et Dreux Rataut, frères, Eustachie Rataut, Louis, Héliot et Jean Chenin, frères, Hugues de Cologne, chevalier, en son nom et comme tuteur de son fils Jacquet, Geoffroy Gabet et Péronnelle Chenin, sa femme, Jean Janvre et Marguerite Chenin, sa femme, et Pierre de Payré, seigneur de Cyré. (Arch. nat., X1a 40, fol. 113.)

, à nous avoir esté exposé que, comme il ait poursuy et frequenté les guerres de nostre royaume depuis vint ans en ça, et nous ait servi tant ès chevachées que fait avons en Flandres, comme paravant ès compaignies de noz très chiers et très amés oncles les dux de Berry, de Bourgoingne et de Bourbon, en pluseurs voyages et chevachées que ilz ont faites pour nostre très chier seigneur et pere, dont Dieux ait l’ame, et pour nous, et il soit ainsi que en frequentant noz dictes guerres, le dit exposant ait esté en pluseurs compaignies de gens d’armes et soubz divers capitaignes, si comme soubz le sire de Tors

Renaud de Vivonne, seigneur de Tors. (Voir sa notice ci-dessous, n° DCXC, acte de juin 1385.)

, Jehan Labbé, Loys Tarabray et autres, tant ès frontieres de Guienne, ès chastelleries de Fontenay le Comte, de Saint Mexant, de Partenay, de Poitiers et en autres pluseurs lieux où il a vescu, davantage pris vivres sans payer, pour lui et pour ses chevaulx, et a esté en pluseurs des dictes compaignies où il a pillié bestail, rampsonné gens, chevaulx et bestes à vin, viandes et aucunes foiz à argent, tant en trieves comme hors trieves, sans ce toutes fois que oncques en sa vie il ait bouté ne aidé à bouter feux, fait murdres ne larrecins, ne efforcié femmes. Pour ce toutesfoiz que le dit exposant a voulenté de soy retraire d’icelles compaignies et de vie desordenée, pour doubte que par les temps avenir il ne puist par aucuns ses hayneux ou autres gens, ou aucuns officiers ou justiciers estre approchié, molesté ou attaint des choses dessus dictes, dont il pourroit estre en aventure de sa personne ou de ses biens, se sur ce n’en avoit obtenu de nous grace et remission, nous a humblement supplié que, consideré que oncque mais en sa vie ne fu repris ne actaint d’aucun meffait, mais a esté en touz ses autres fais de bonne vie, renommée, et tout ce que dit est a fait en poursuyant noz dictes guerres, ycelle grace lui vueillons eslargir. Nous adecertes, attendu ce que dit est, à ycellui suppliant ou cas dessus dit, avons remis, quictié et pardonné, quictons, remettons et pardonnons, de nostre auctorité royal, plaine puissance et grace especial, par ces presentes, toute peine, offense criminele, corporele et civile, que pour les diz cas il pouroit avoir encouru envers nous, reservé le droit de partie à poursuivre contre lui civilement, s’aucuns l’en vueillent poursuivre, en le restituant au pays, à sa bone fame, renommée et à ses biens. Si donnons en mandement par ces presentes au seneschal de Xantonge et à touz noz justiciers, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent et seuffrent joir et user paisiblement le dit suppliant, sans le perturber ou molester, ne souffrir estre perturbé ou molesté dores en avant en aucune maniere, contre la teneur de ces presentes, pourveu que, se ledit suppliant renchiet dores en avant en aucun des cas dessus diz, nostre presente grace lui sera inutile et de nulle valeur. Sauf nostre droit en autres choses et l’autruy en toutes. Donné à Paris, ou mois de janvier l’an de grace mil ccc. iiiixx et quatre, et de nostre regne le quint.

Par le roy, à la relacion du conseil. S. du Castel.

DCLXXXI Février 1385

Rémission accordée à Jean Roy, demeurant à Brillac, paroisse de Saint-Etienne de Chaix, pour le meurtre d’Etienne Giraudeau.

AN JJ. 126, n° 82, fol. 52 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 250-252

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir été exposé de la partie de Jehan Roy

Un Jean Roy était commandeur de la Villedieu pour le grand prieur d’Aquitaine, le 8 juillet 1373, et soutenait alors un procès contre Herbert Pouvreau, valet, appelant du sénéchal de Poitou pour le prince de Galles, suivant des lettres de procuration de cette date. (X1a 23, fol. 345.)

, povre laboureur demourant à Brialhac en la parroisse de Saint Estienne de Chay en Poitou, disant que comme, un an a ou environ, Estienne Giraudeau se print au corps de Mery Roy, clerc, de l’aage de xvi. ans ou environ, filz du dit exposant, et le frappa en lui donnant coups et collées, pour laquelle bateure ledit Giraudeau fu mis en procès par devant l’official de Maillezois, et finalement parties oyes sur ce, ledit Giraudeau fu declairié excommunié et condempné en amende et aux despens de partie, dont le dit Giraudeau fu grandement jugié contre le dit exposant et son dit filz, et leur dit par pluseurs foiz qui s’en vengeroit bien une foiz d’eulz, et de jour en jour les menaçoit, disant que, s’il les povoit trouver à son gré, il s’en vengeroit bien et que jamaiz il ne cesseroit jusques à ce qu’il feust desdommagiés de la dicte amende. Lequel Giraudeau en procedent de paroles à fait, le samedi au soir veille de la festé saint Vincent derrenierement passée

Le 21 janvier 1385 n.s.

, environ jour couchant, ainsi comme le dit exposant se appareilloit pour soy couchier, un de ses voisins lui vint dire qu’il avoit veu le dit Giraudeau et sa femme en certain lieu où estoit la buche dudit exposant, et que d’icelle buche ilz emplissoient un vaisseau ou bateau, lequel exposant pour ce parti de son hosté et se mist en un sien bateau ou vaisseau, pour aller par eaue au lieu ou sa dicte buche estoit ; et quant il fu aus près d’icellui lieu, il vit et apperçut [les] diz Giraudeau et sa femme qui emplissoient leur bateau ou vaisseau de la dicte buche du dit exposant, qui leur dit que ce n’estoit pas bien fait de prendre sa buche ; lesquelx Giraudeau et sa femme, meuz de mauvais propos, commancerent tantost à eulz approuchier leur bateau contre ledit exposant, et quant il furent assez près de lui, le dit Giraudeau qui estoit premier en la teste de son vaisseau, s’efforça de ferir d’un grant baston qu’il avoit le dit exposant et aussi s’efforça d’entrer ou vaisseau du dit exposant pour le tuer et occirre, ou pour le faire cheoir en l’eaue où il peust estre noiez. Le quel exposant qui estoit seul et se sentoit fleibles, considerans les dictes menaces, le peril où il estoit et la grant doubte et paour de mort qu’il ot, se mist pour ce en deffense, à ce que les diz Giraudeau et sa femme n’entrassent en son vaisseau, en les repellant d’un fourchie dont il menoit son dit vaisseau, et en ce faisant, frappa un cop ou deux sur la teste du dit Giraudeau, de quoy mort s’en ensuy en la personne du dit Giraudeau. Pour lequel fait le dit exposant s’est absenté ou latité, pour doubte de rigueur de justice, si comme il dit, requerant humblement que, consideré ce que dit est et que ledit exposant a tousjours esté en autres cas homme de bonne vie et honneste conversacion, sans estre attaint ne convaincu d’aucun autre mauvais cas, et que il est chargié de femme et de six enfans, qui sont jeunes et petiz, et que ledit fait est advenu par cas de male fortune, et mesmement que le dit exposant ne se parti pas de sa dicte maison en entencion de occire ledit Giraudeau, maiz en entencion de garder que le dit Giraudeau ne lui emblast sa dicte buche, si comme il dit, nous vueillons avoir de lui compassion et lui impartir sur ce nostre grace. Nous adecertes, attendu les choses dessus dictes, voulans rigueur de justice estre temperée et moderée par pitié et misericorde, avons au dit exposant ou cas dessus dit, de nostre plaine puissance, auctorité royaul, le fait dessus dit quictié, remis et pardonné, et par ces presentes remettons, quictons et pardonnons, avec toute paine, offense et amende corporele, criminele et civile qu’il peut avoir encouru en ce, et le restituons à sa bonne fame et renommée, au païs et à ses biens non confisqués, et imposons sur ce silence perpetuel à nostre procureur et à touz autres à qui il peut appartenir, satisfaction faicte à partie civilement tant seulement, premierement et avant toute euvre. Et donnons en mandement par ces presentes au gouverneur de la Roichelle et à touz noz autres justiciers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, seuffrent et laissent joir et user plainement et paisiblement le dit exposant, sanz l’empeschier ne molester, ne souffrir estre empeschié ne molesté en corps ni en biens, à present ne pour le temps avenir, aucunement au contraire, Et s’aucuns de ses biens estoient pour ce pris, saisiz ou arrestez pour la cause dessus dicte, qu’ilz lui mettent ou facent mettre sans delay à plaine delivrance. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel [à ces presentes]. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, ou mois de fevrier l’an de grace mil ccc. iiiixx et quatre, et de nostre regne le quint.

Es requestes de l’ostel. P. Houdoyer. — Barreau.

DCLXXXII 24 mars 1385

Permission à Pierre Térinet, châtelain de Clisson, d’établir une garenne privilégiée au Mortier-Garnier, en la châtellenie de Montaigu.

AN JJ. 126, n° 143, fol. 95 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 253-254

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que, oye la supplicacion que nous a faicte Pierre Terinet, chastellain de Cliçon, contenant que comme en une terre qui est dudit suppliant, appellé le Mortier Garnier, assise en la chastellenie de Montagu, qui est de nostre cousin et connestable le sire de Cliçon, ait une place ou de tous temps a eu repaire et retraire de connis, laquelle place est ainsi comme ou milieu de sa terre et assez loing de toutes autres, à qui les connis qui y repairent peussent faire aucun dommaige, nous lui vueillons octroier que en la dicte place il ait garenne privilegiée et deffendue, comme il est acoustumé en tel cas. Nous, ces choses considerées et pour contemplacion et faveur de nostre dit cousin et connestable, duquel il est homme et serviteur, lui avons octroyé de nostre auctorité et puissance royal, et octroyons par la teneur de ces lettres, de grace especial, ou cas dessus dit, ycelle garenne en la place dessus dicte, avec toute deffence, previlege et noblesse qui à ce pevent appartenir. Si donnons en mandement par ces presentes au seneschal de Xantonge, gouverneur de la Rochelle, et à touz noz autres justiciers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit suppliant et ses hoirs et successeurs ou aians de lui cause, facent et laissent joir et user de noz diz octroy et grace, en faisant garder ycelle garenne en ses drois et deffences, comme il appartendra, sanz souffrir estre fait au contraire. Et que ce soit ferme chose et estable à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces lettres. Sauf en toutes choses nostre droit et l’autruy. Donné à Paris, le xxiiiie jour de mars l’an de grace mil ccc. iiiixx et quatre, et de nostre regne le quint.

Par le roy, à la relacion du conseil. P. de Sauls.

DCLXXXIII Mars 1385

L’an 1384, une route de Gallois étant logée à Saint-Clair

« En la ville de Saint Cler, estant en Touraine. » Ne serait-ce pas Saint-Clair, canton de Martaizé, arr. de Loudun ? On sait que le Loudunais était considéré comme faisant partie de la Touraine, et d’autre part, dans cette province proprement dite, on ne connaît pas de localité du nom de Saint-Clair.

, il s’éleva une rixe sanglante entre plusieurs hommes d’armes de cette compagnie, et l’un d’eux fut tué. — Rémission accordée au meurtrier nommé « Clœlin Bren, escuier, nez du païs de Galles

Cet écuyer Gallois ne jouit pas longtemps du bénéfice de la grâce royale. Le 31 octobre 1385, il périt lui-même de mort violente, à la suite d’une rixe qu’il avait provoquée à propos d’un fait d’armes auquel il avait pris part à Bouteville. Ses meurtriers obtinrent à leur tour des lettres de rémission, dont nous allons extraire les passages essentiels, parce que l’on y trouve en outre des renseignements curieux sur l’attaque de Bouteville en octobre 1385. « Exposé de la partie de Ligon de Vergne, Guy de Villebois, sire de la Rochebecourt, Moudonnet de la Porte, Hélyot Hermite et Perrot de Bar, escuiers, que, comme un moys ença messire Jehan Buffet, chevalier, et Arnauton des Bordes, escuier, feussent alez courre à certain nombre de gens d’armes en leur compaignie devant le chastel de Bouteville, que les Anglois et ennemiz de mesdiz seigneurs et de nous tiennent et occupent, lesquelx Anglois, si tost qui les sceurent et combien il estoient, yssirent hors de leur forteresse dudit Bouteville et leur coururent sus et les desconfirent, et fut mort en la place ledit messire Jehan Buffet, et ledit Arnauton et pluseurs autres pris ; avecques et soubz lequel Arnauton estoit un Galoys, appellé Clausin Bren, qui en ladite besoingne laissa les dessus diz et s’enfouy à Angoulesme, où il dist et publia, meu de mauvaise voulenté et contre verité, que ledit messire Jehan avoit esté mort et ledit Arnauton pris en fuyant, en les diffamant et blasmant sanz cause. Ce venu à la notice dudit Ligon, qui avoit esté serviteur de feu le seigneur de Marcilly et dudit messire Jehan Buffet, son nepveu, vint audit Clausin et lui demanda la maniere comme la besoingne avoit esté, et ycelluy Galoys lui usa des paroles dessus dictes, et après ce il vint vers Sansse Bernart qui y avoit esté pris, pour en savoir la verité, lequel dist audit Ligon que il n’estoit pas ainsi comme disoit ledit Clausin, maiz que ledit messire Jehan Buffet avoit esté mort et ledit Arnauton pris vaillamment, non mie en fuyant. Et lors ledit Clausin dist qu’il ne l’avoit pas dit dudit Arnauton, maiz dudit messire Jehan Buffet, et pour ce ycellui Ligon, esmeu et couroucié de la mort dudit son maistre, dist audit Clausin qu’il mentoit, car son maistre n’avoit pas esté mort en fuyant, et mist la main au coustel sanz le saicher. Et incontinent ledit Galoys saicha sa dague et couru sus audit Ligon, et l’en fery deux cops ; et quant ledit Ligon se senti ainsi feru, lui et les dessus nommez, dont les aucuns sont ses amis charnelz et les aucuns ses amis et affins, comme eschauffez de ce, veans aussi ledit Ligon en peril de mort, en lui revengant et deboutant force par force, eulz touz ensemble batirent et navrerent ledit Clausin en telle maniere qu’il en fu porté du lieu et mis au lit, où il a demeuré malades, tant pour cause de ladite bateure comme de la boce, qui lui survint ou col, par l’espace de quinze jours ou environ, et pour ce et aussi pour son petit gouvernement de boire, de manger et autrement, il ala de vie à trespassement, la veille de la feste de Touzsains dernierement passée… » Dans la suite, il est dit que Clausin Bren, homme « rioteux », avoit été contraint de quitter la compagnie des Gallois à la suite du meurtre de deux de ses camarades, et que les impétrants avaient toujours vaillamment servi le roi en ses guerres, ainsi que le duc de Bourbon, particulièrement « en la chevauchée que fait avons derrenierement en Guienne ». Ces lettres de rémission sont du duc de Bourbon qui s’intitule lieutenant du roi en Bourbonnais, Forez, Limousin, Angoumois, Saintonge Périgord et la Marche, et du duc de Berry en ses pays de Berry, d’Auvergne et de Poitou. Elles sont datées « de nostre host à Charroz en Poitou », novembre 1385, et insérées dans une confirmation royale, donnée à Paris au mois de février 1386 n.s. (JJ. 128, n° 81, fol. 52 v°.)

 ». Paris, mars 1385.

AN JJ. 126, n° 100, fol. 62 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 254

DCLXXXIV Mars 1385

Don à Pierre de La Trémoïlle, chambellan du duc de Bourgogne

Ce don ayant été fait déjà en faveur de Guillaume de La Trémoïlle, aussi chambellan du duc de Bourgogne, au mois de juin 1383 (ci-dessus n° DCLXV), le roi déclare que celui-ci aura une compensation par ailleurs.

, pour lui et ses héritiers, des « maisons de Bruyeres lès Paris et d’une maison ou mote appellée la Folie Nicolas Quipie, assise près desdictes maisons, avec toutes les terres arables, vignes, bois, etc. », d’une valeur de 100 livres de rente annuelle, confisquée sur Jean Des Marets, condamné à mort et exécuté. Paris, mars 1385.

AN JJ. 126, n° 160, fol. 103 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 255

DCLXXXV Mars 1385

Rémission accordée à Denis Robineau et à Béry Andiau, cousins, de Triou en Loudunais, coupables de meurtre sur la personne de Jehannot Aubery.

AN JJ. 126, n° 210, fol. 138 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 255-258

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie des amiz charnelz de Denis Robineau, chargié de femme et de deux petiz enfanz, et laquelle femme est grosse d’enfant, et de Bery Andiau, cousins et parens, povres laboureurs de terres, que comme, six ans a ou environ, le dit Denis Robineau estant à un jour en une taverne en la ville de Triou, dont les diz cousins sont nez et où il avoit beu avec pluseurs de ses amis et voisins, et ainsi comme le dit Robineau s’en vouloit yssir de la dicte taverne, sanz ce qu’il eust lors rien meffait ne mesdit en aucune maniere à homme du monde, et par especial à Perrot Aubery et Jehannot Aubery, freres, [iceulx Perrot et Jehannot], meuz de mauvaise voulenté et courage desordené et d’aguet appensé et sanz deffiances precedens, batirent et navrerent moult inhumainement le dit Robineau et lui firent une grant playe en la teste d’un badelaire, et tant fu seurprins le dit Robineau par les diz freres que il ne se pot revainchier ne defendre, de la quelle bateure le dit Robineau fu malades l’espace de xv. jours environ, sanz gaires partir de l’ostel ; et il soit ainsi que, n’a gaires de temps, le dit Bery Andiau aidoit à monter sur une jument en la dicte ville de Triou, entre chien et lou, un sien ami appellé Brissaut, qui demoure à une lieue près de la dicte ville ou environ, et ainsi lui aidoit à ploier et à mettre à point sur la dicte jument pluseurs sacs et poches qu’il avoit, afin qu’il ne lui cheussent et se perdissent, pour ce qu’il venoit sur le tart, et illecques present le dit Jehannot Aubery, meu de mauvaise voulenté, ainsi comme le dit Brissaut montoit, tira l’un des sacs et sacha, et d’icellui sac, sanz ce que le dit Bery Andiau eust riens dit ne meffait lors ne autres foiz en aucune maniere au dit Jehannot, icellui Jehannot Auberi frappa le dit Bery Andiau parmi le visaige, tellement que du dit cop il fu aussi comme tout eslourdé de la teste et li sailli le sanc parmi le nez et la bouche ; et après le dit Bery Andiau dist au dit Jehannot Aubery ces paroles en substance : « Jehannot Aubery, m’avez vous frappé par jeu ou par rancune, dites le moy, s’il vous plaist, car je le vouldroie bien savoir. » Et lors le dit Jehannot Aubery respondi orguilleusement et oultraigeusement au dit Bery Andiau : « Prens le par bien ou par mal, car il ne me chaut comment. » Et tantost icelluy Bery Andiau, moult couroucié et moult esmeu, s’en va partir de la place pour aler querre un baston ou autre chose à son hostel, pour batre et soy vengier du dit Jehannot Aubery, qui ainsi l’avoit feru du dit sac, et en alant à son dit hostel trouva d’aventure le dit Robineau, son cousin, et lui dit le fait et finallement eulz recordans et doulans d’icelles bateures, tous deux ensemble en celle chaleur, heure et mouvement, trouverent le dit Jehannot Aubery devant l’ostel du prieur de la dicte ville de Triou

Le prieuré de Saint-Nicolas de Triou dépendait de l’abbaye de Marmoutier.

et le batirent de bastons, sanz avoir entencion de le tuer, de laquelle bateure, après pou de jours, ycellui Jehannot Aubery ala de vie à trespassement. Pour occasion du quel fait et pour doubte de rigueur de justice, les diz Robineau et Andiau, cousins, se sont absentez du pays, ou au moins n’y osent converser ne habiter. En nous humblement suppliant que, comme le dit fait soit advenu par chaude cole et que en touz autres cas les diz Robineau et Andiau, qui sont povres laboureurs et n’ont dont vivre fors de leur dit povre labour à journées, ont esté toute leur vie de bonne vie, fame, renommée et conversacion honneste, sanz avoir esté reprouchiez d’autres villains cas, et estoit le dit mort moult oultrageux et coustumier de faire desplaisirs et dommages à ses voisins, et que sur ce a esté faicte satisfacion à la femme, pere et mere, freres et autres amis charnelz et parens du dit mort, et tellement qu’il en sont contens et agreez par bonnes lettres, faictes et passées soubz le seel lors establi aux contraux de la chastellenie de Loudun, dont il apperra deuement, nous leur vueillons sur ce impartir nostre grace et misericorde. Pour quoy, nous qui voulons rigueur de justice temperer par misericorde, aux diz Deniz Robineau et Bery Andiau, cousins, et à chascun d’eulz ou dit cas avons quictié, remis et pardonné, remettons, quictons et pardonnons, de nostre grace especial et auctorité royal, satisfacion faicte à partie, se faicte n’est, et le fait dessus avec toute paine, offense corporele et criminele, que les dessus nommez Robineau et Andiau et chascun d’eulz, pevent avoir encouru, commis et perpetré envers nous pour occasion du dit cas, lequel nous avons tourné et converti en pur civil, et les restituons à leur bonne fame et renommée, à leurs pays et à leurs biens, qui par ban ne seroient confisquez, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur, present et avenir, par ces presentes. Par la teneur desquelles nous donnons en mandement au gouverneur du bailliage de Touraine, ou à son lieutenant au siege de Loudun, en qui chastellenie les parties sont demourans et il est advenu le dit fait, et à touz nos autres justiciers et officiers, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, seuffrent et laissent les diz Denis Robineau et Andiau et chascun d’eulz joir et user paisiblement et perpetuelment, sanz les molester ne souffrir estre molestés aucunement au contraire, maiz se leurs corps ou leurs biens, ou d’aucun d’iceulz, estoient prins, saisiz, arrestez ou empeschez pour la cause dessus dicte, que il leur mettent et facent mettre à plaine delivrance, tantost et sanz delay. Et que ce soit ferme chose et estable à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, ou moys de mars l’an de grace mil ccc. iiiixx et quatre, et de nostre regne le quint.

Par le roy, à la relacion du conseil. P. Milet.

DCLXXXVI Avril 1385

Rémission accordée à Gadifer de la Salle, à Brandelis, son frère, à Guillaume de la Voirie, tous trois chevaliers, à Philippon de Nueil et à Boileau de Fontenay, pour l’enlèvement de la fille de feu Jean Garin, alors sous la garde de Renaud de Thouars, seigneur de Pouzauges, et qu’ils voulaient marier audit Philippon de Nueil.

AN JJ. 126, n° 193, fol. 126 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 259-262

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, de la partie de Gadifer de la Sale

A la notice consacrée à ce personnage (p. 141 n. ci-dessus), ajoutons la citation suivante du Jouvencel (Jean de Bueil) qui lui fait grand honneur : « Se vous voullés bien faire aux armes, vous ne poez faillir à parvenir à de trois choses l’une, de quoy les armes payent tousjours leurs souldoyers, c’est assavoir : ou de la mort, ou de vivre povre et honnouré et que chascun parlera de vous et des vostres, dont il sera renommée après vous, comme il a esté de messire Bertran de Clayquin, messire Gadiffer de la Salle et autres bons chevalliers, qui sont mort povres… » (Edit. C. Favre et L. Lecestre, pour la Societé de l’histoire de France, 1887, in-8°, t. Ier, p. 43.) — Il a été question aussi de son père, Ferrant de la Salle, nommé plus bas, dans des lettres de juin 1378 (ci-dessus, p. 76).

, Guillaume de la Voyerie

Guillaume de la Voirie était, en 1378, châtelain de Mortagne-sur-Sèvre pour Berthelon de la Haye, mineur sous la tutelle de son beau-père Louis Larchevêque, sr de Taillebourg, et fut, comme tel, compris dans un procès criminel intenté contre celui-ci par Jean de la Martinière, ancien capitaine du château de Mortagne. Ce que nous avons trouvé sur cette affaire a été exposé dans le précédent volume, p. 273 note. Il suffit de s’y reporter. Voy. aussi les courtes notices sur deux personnages de la même famille, Roland et Huguet de la Voirie (ci-dessus, p. 77 et 78).

, Brandelis de la Sale, frere du dit Gadifer, chevaliers, Philippon de Nueil et Boileau de Fontenoy, nous avoir esté exposé comme, environ l’an mil ccc. iiiixx et un que le dit Gadifer fut retourné de certain voyage où il avoit esté, lui estant en l’ostel de feu Ferran de la Sale, chevalier, son pere, ycellui son pere, après aucunes besoingnes parlées et traictées entr’eulx, en excitant le dit Gadifer, eust dit que, au vivant de feu Jehan Garin, il avoit voulu faire le mariage du dit Philippon de Nueil, escuier, cousin germain du dit Gadifer, et de la fille de feu Jehan Garin, disant que le mariage n’avoit point esté fait parce que la dicte fille estoit trop jeune, et que de present la dicte fille, laquelle estoit assés aagée de marier, estoit par devers feu Regnault de Thouars, chevalier, seigneur de Pousauges

Fils de Miles de Thouars, seigneur de Pouzauges (sur lequel voy. notre t. III, p. 171 n., 423 n., et notre t. IV, p. 124 n.), et de Jeanne, dame de Chabanais et de Confolens, il fut poursuivi avec son père par Jeanne d’Amboise, veuve de Gaucher de Thouars, qu’ils avaient dépossédé par violence du château de Tiffauges (actes des 21 avril et 10 juin 1374, X2a 8, fol. 350 v° ; X1a 23, fol. 422). « Il servit en Guyenne en 1371, sous le connétable du Guesclin, jouta contre le sire de Vertain en Hainaut, en présence du sr de Buckingham, l’an 1380, suivit le roi en Flandres en 1382 et assista à la prise de Bourbourg », dit le P. Anselme (Hist. généal., t. IV, p. 97), d’après Froissart. Nous ferons observer cependant que le chroniqueur, quand il parle du sire de Pouzauges, ne distingue pas toujours entre le père Miles de Thouars, qui vivait sûrement encore le 29 août 1377 (voy. notre t. III, p. 171 n.), le fils, Renaud de Thouars, vivant encore en 1381 et décédé avant le mois d’avril 1385, comme on le voit dans le présent acte, et le petit-fils Miles II. Ainsi il nomme le sire de Pouzauges comme faisant partie de l’ost du duc de Bourbon en juillet 1385 (édit. Kervyn de Lettenhove, t. X, p. 329) ; ce ne pouvait être, d’après notre texte, que le fils de Renaud. N’ayant pas les dates exactes du décès de Miles Ier et de son fils, il est parfois difficile d’attribuer à l’un plutôt qu’à l’autre les faits avancés par Froissart. Notons aussi qu’il dit constamment le sire de Poissauces, Poussauce, Puissauce, que les éditeurs impriment à tort Poissances, Poussance ou Puissance. Renaud de Thouars avait épousé Catherine, fille d’Éon, seigneur de Lohéac, et en eut Miles II, Jean, mort jeune, et Béatrix.

, et en sa garde, et qu’il seroit bon qu’il sceust devers lui se au dit mariage il se vouldroit consentir ; et aucun temps après, ycellui Gadifer, à l’excitation de son dit feu pere, eust parlé du dit mariage au dit feu seigneur de Pousauges et à aucuns des amis de la dicte fille, de par son pere ; les quelz furent d’accort du dit mariage, et manda le dit seigneur de Pousauges par pluseurs foiz à son capitaine du chastel de Pousauges qu’il baillast la dicte fille au dit Gadifer, pour faire et acomplir ycellui mariage. Et pour ce le dit Gadifer, accompaignez des dessus nommez estans avec lui…

Sic. Le clerc chargé de la transcription a évidemment sauté plusieurs mots.

, que la dicte fille estant mendre d’aage, avoit esté et estoit par avant fiancée au filz d’un dit Ladmiraut de Pousauges, le dit Gadifer eust demandée la dicte fille, laquelle lui fu monstrée par ceulx du dit chastel, et mesmement par la femme de feu Loys Goderaut

Louis Goderaut est nommé parmi les officiers du sire de Pouzauges qui firent violence à Jeanne d’Amboise, veuve de Gaucher de Thouars, pour la faire sortir du château de Tiffauges, dans les arrêts du Parlement des 21 avril et 10 juin 1374, rappelés dans la note précédente. De 1367 à 1373, un Louis Goderaut était châtelain de Bressuire. (B. Ledain, Hist. de la ville et baronnie de Bressuire, in 8° 1866, p. 390.)

, jadiz seneschal de Pousauges, avec laquelle elle estoit. Et lors le dit Guillaume la print par la main, et en ce faisant la femme du dit Loys eust dit à la dicte fille que elle s’en alast avec le dit Gadifer ; le quel un peu après, lui monté à cheval, la fist mettre derriere lui pour l’en mener en l’ostel de ses pere et mere, où quel il la fist garder environ un quart d’an. Et ainsi comme il emmenoit la dicte fille, elle commença à soy larmenter, en criant au murtre. Et depuis le dit Philippon l’espousa en face de Saincte Eglise, quatre ans a ou environ, et a esté depuis paisiblement et continuelment avec lui. Pour occasion du quel fait, les gens et officiers de nostre très chier et très amé oncle le duc de Berry et conte de Poitou, du quel conté le dit suppliant et autres dessus nommez sont, ont fait prendre le dit Philippon de Nueil et ses biens mettre en sa main, et ycellui detiennent prisonnier en la prevosté de Poitiers, et donné commission et mandement de prendre les autres dessus nommez et leurs biens, et de les mettre en la main de nostre dit oncle ; et desjà ont mis la dicte main [sur] les biens d’aucuns d’iceulx et ont fait prendre le dit Boileaue, si comme l’en dit, dont il pourront estre grandement dommaigiez, se par nous ne leur estoit sur ce pourveu de nostre grace, si comme ilz dient. Pour quoy nous, ces choses considerées, avec les bons et agreables services que le dit Gadifer a faiz à nous, à nostre très chier seigneur et pere, et à feu nostre très chier et très amé oncle le roy de Jherusalem et de Cecile

Louis Ier, duc d’Anjou, roi de Sicile.

, dont Dieu ait les ames, et esperons qu’il nous face ou temps avenir, à ycellui Gadifer, Guillaume de la Voyerie et autres dessus nommez, ou cas dessus dit, le dit fait, avec toute peine, amende et offense corporele, criminele et civile que il, pour occasion d’icellui fait, puent avoir encouru envers nous et justice, avons quictié, remis et pardonné, avec le ban ou bans, se aucun ou aucuns s’en estoient ensuys, et par ces presentes, de nostre plaine puissance, grace especial et auctorité royal, quictons, remettons et pardonnons, et les restituons à leur bonne fame et renommée, au païs et à leurs biens non confisquez, satisfacion faicte à partie premierement et avant toute euvre, se aucune en y a poursuiant, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur. Si donnons en mandement au gouverneur du bailliage de Touraine, au gouverneur de la Rochelle et à touz noz autres justiciers et officiers, et à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, seuffrent et laissent les diz Gadifer, Guillaume de la Voyerie et autres dessus nommez, joir et user paisiblement, sens les molester ou souffrir estre molestez ou empeschiez en aucune maniere ; et leurs corps ou biens pour ce prins, saisiz ou arrestez, mettent ou facent mettre sanz delay à plaine delivrance. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Compiengne, l’an de grace mil ccc.iiiixx et cinq, et le quint de nostre regne, ou moys d’avril.

Par le roy, à la relacion de monseigneur le duc de Bourgongne. J. de Bosco.

DCLXXXVII 5 mai 1385

Don à Jean Des Corces, écuyer, servant en la compagnie du duc de Berry, des biens meubles et immeubles situés à la Versée et au Bois, dans la châtellenie de Mortemer, échus à Andrivot de la Croisille par succession de Guyon Goupy, son beau-père, et confisqués au roi parce que ledit de la Croisille et sa femme tiennent le parti du roi d’Angleterre.

AN JJ. 126, n° 294, fol. 183 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 263-264

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que, comme par la mort et succession de feu Guion Gouppy et de sa femme, pere et mere jadiz de la femme de Andrivot de la Croisille, soient avenuz et escheuz aux diz Andrivot et à sa femme, à cause d’elle, pluseurs rentes et autres heritages assis aux lieux de la Versée et du Boys en la chastellenie de Mortemer en Poitou, et au païs d’environ, en la valeur de xx. livres de rente ou environ par an, à la coustume du païs, et aussi leur soient escheuz par la succession des diz trespassez plusieurs biens meubles en la valeur de cent livres parisis ou environ, les quelz nous appartiennent parce que les diz Andrivot et sa femme ont esté et sont de l’obeissance de nostre adversaire d’Angleterre, et ont tenu et tiennent son parti contre nous, en commettant crime de lese majeste envers [nous], si comme entendu avons. Nous, considerans les bons et loyaulx services que Jehan Des Corces, escuier, nous a faiz en noz guerres et autrement, en la compaignie de nostre très cher et très amé oncle le duc de Berry et d’Auvergne, et fait encores chascun jour, à icellui Jehan avons donné, de grace especial et de nostre auctorité royale, et donnons par la teneur de ces lettres les biens meubles, rentes et heritages dessus diz, à nous avenuz et escheuz par la maniere et en la valeur dessus dicte, ou cas que ycelles rentes et heritages ne seroient appliquez à nostre demainne. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx genz de noz comptes à Paris, au gouverneur du bailliage de Tours et du bailliage d’Orleans, ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que au dit Jehan baillent et delivrent les diz biens meubles, et des rentes et heritages dessus diz le mettent, ou son procureur pour lui, en possession et saisine, en la dicte valeur, et l’en laissent et facent joir et user paisiblement, cessant tout empeschement. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, le ve jour de may l’an de grace mil ccc. iiiixx et cinq, et de nostre regne le quint.

Par le roy, à la relacoin de Monseigneur le duc de Bourgongne. Yvo.

DCLXXXVIII Mai 1385

Rémission accordée à Aimery Ricot, taillandier de Traversonne, près Vouillé, pour un meurtre commis, seize ans auparavant, sur la personne de Jean Morineau, boucher, avec lequel il avait tenu une ferme dans la châtellenie de Montreuil-Bonnin. Le défunt en avait eu tout le profit et refusait d’en rendre compte.

AN JJ. 126, n° 243, fol. 154 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 264-267

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté humblement exposé de la partie de Aymery Ricot, taillendier, chargié de femme et d’enfans, disans que, seze ans a ou environ, le dit exposant et feu Jehan Morinea, alias Armant Boulerea, boucher, buvoyent ensemble, à un jour de dimanche avant disner, en une taverne en la ville de Vouillé, et illecques en parlant et comptant d’une ferme qu’ilz avoient tenuz ensemble en la chastellenie de Monstereul Bonnin, et dont le dit defunct avoit receu tout le prouffit, et n’en vouloit rendre compte ne raison au dit exposant, paroles se meurent entre eulz, et disoit et maintenoit le dit defunct que pour chose que le dit exposant peust faire, ou au moins paroles en substance, il ne lui rendroit jà compte de la dicte ferme ; et lors le dit Aymery respondi amiablement que si feroit et que c’estoit raison, de quoy le dit defunct le desmenti et lui dist moult d’autres oultraigeuses injures et villennies ; et après se departirent de la dicte taverne, chacun là où bon lui sembla. Et avint que, ainsi comme le dit exposant s’en aloit à sa maison à Traversonne, en la dicte parroisse de Vouillé, cuidant que le dit defunct fust jà lors à son hostel, qui est au dit lieu de Traversonne, trouva d’aventure, cellui jour mesmes environ vespres, en son chemin le dit defunct, lequel perseverent touzjours en son iniquité et pervers propos assailli de paroles haultaines le dit exposant qui s’en aloit simplement son chemin à son dit hostel, sanz avoir entencion de faire mal à aucun. Et lui commença tantost à dire : « Aymeri, tu m’as dit que je te rendrai compte de la ferme, maiz pour tout ton povoir non ferai », et par pluseurs foiz le desmenti, en lui disant qu’il le courrouceroit du corps. Et le dit Aymeri respondi qu’il auroit bien raison de lui. Et lors ycellui defunct qui estoit homs rioteux, noiseux et coustumier de faire riote, commença à dire pluseurs villennies et injures au dit exposant, et à mettre la main à un coustel de boucher que il portoit pour le vouloir saicher contre le dit exposant, en disant qu’il le villenneroit de son corps, avant qu’il lui eschappast ; à quoy le dit exposant recuilloit le plus qu’il povoit et s’en aloit touzjours son chemin, en lui disant qu’il le laissast en payx et qu’il auroit raison de lui par justice, et qu’il faisoit mal de le assaillir. Et pour ce que le dit defunct le suyoit touzjours, tenant sa main à son coustel, comme dit est, pour en ferir le dit exposant, comme par ses paroles et mouvemens apparissoit qu’il se approuchoit de lui souvent, ycellui exposant meu et courocié de ces choses, pour doubte de mort ou d’estre villennement traictié par le dit deffunct, qui moult estoit esmeuz, yrez et eschauffez à l’encontre, et en soy defendant, revainchant et repellant force contre force, cuida ferir le dit defunct d’un baston qu’il portoit sur la main ou bras dont il s’efforçoit de sacher le dit coustel, pour en ferir le dit exposant, comme dit est, sanz ce que le dit exposant eust aucune entencion de le tuer, maiz par cas de fortune le dit cop eschey sur la temple de la teste du dit defunct, duquel cop il ala de vie à trespassement. Pour occasion duquel fait et pour doubte de rigueur de justice, le dit exposant s’est par pluseurs foiz latité et diffuy du pays, et encores se doubte grandement, en nous humblement suppliant que, comme en touz autres cas le dit exposant ait esté et soit de bonne vie, fame, renommée et conversacion honneste, sanz estre reputé d’aucun villain cas, nous lui vueillons sur ce impartir nostre grace et misericorde. Pourquoy nous, ces choses considerées, au dit exposant au cas dessus dit, avons remis, quictié et pardonné, remettons, quictons et pardonnons par ces presentes, de nostre grace especial et auctorité royal, le fait dessus dit, avecques toute paine et offense corporele, criminele et civile, que pour occasion du dit cas il peut avoir commis, offensé et encouru envers nous, satisfacion faite à partie civilement premierement et avant toute euvre, se faicte n’est. Et le restituons à sa bonne fame, renommée, au pays et à ses biens qui par ban ne seroient confisquez, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur et à touz noz autres officiers. Si donnons en mandement au gouverneur du bailliage de Touraine, par ces presentes, et à touz noz autres justiciers et officiers, à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, seuffrent et laissent le dit exposant joir et user paisiblement, sanz le molester ou souffrir estre molesté, pour occasion du dit fait, au contraire, maiz se son corps ou ses biens estoient pour ce pris, saisiz, arrestez ou empeschiez, ilz lui mettent ou facent mettre tantost et sanz delay à plaine delivrance. Et que ce soit ferme chose et estable à touzjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, ou mois de may l’an de grace mil ccc. iiiixx et cinq, et de nostre regne le cinquiesme.

Par le roy, à la relation du conseil. Guichart.

DCLXXXIX Mai 1385

Rémission accordée à Pierre Pascaut, coupable d’homicide par imprudence sur la personne de sa femme.

AN JJ. 126, n° 257, fol. 161 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 267-269

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que de la partie de Pierre Pascaut

En avril 1376, un Pierre Pascaut était sergent et commissaire du sénéchal de Poitou. Il est mentionné dans un arrêt du Parlement au profit de Jean et Guyon Clerbaut. (X2a 10, fol. 15 v°.)

, povre et simple laboureur, nous a esté exposé que comme, environ Quaresme prenant, à certain jour derrenierement passé après soupper, à heure de soleil couchant, le dit exposant voulsist aler au fort de Beauvoir, où il avoit acoustumé d’aler de nuyt pour estre plus seurement, et Jehanne sa femme tenist un pain appellé fouace, lequel ycellui exposant vouloit avoir pour y porter, et le dit exposant et sa dicte femme avec leur chamberiere feussent sur une eschielle en leur hostel, par laquelle l’en descent d’un planchier du dit hostel au bas, et le dit Pierre voulsist prendre la dicte fouace que tenoit sa dicte femme, laquelle par esbatement ou autrement bailla ycelle fouace à leur chamberiere qui estoit au dessus d’eulz sur l’eschielle mesmes, laquelle chamberiere, quant elle tint la dicte fouace, s’efforça de monter plus hault, afin que le dit exposant ne la prist, lequel contendoit tousjours monter après, quar il estoit ou milieu, et sa dicte femme le tenoit par la robe, afin qu’il ne montast plus hault, et pour le retenir et empeschier qu’il n’alast après la dicte chamberiere, et pour ce qu’il s’efforçoit de monter la dicte eschielle et d’icelle chamberiere poursuivre, bouta sa dicte femme qui estoit au dessoubz tellement que sa robe ly eschappa, dont elle chey à terre. Duquel fait tantost après mort s’en ensuy. Et pour ce que le dit exposant, doubtant rigueur de justice et d’estre prins et emprisonnez, et que on ne procedast contre lui rigoreusement par emprisonnement, arrest de son corps ou autrement, et que d’icellui cas il ne s’en povoit justifier, pour ce que lors ou dit hostel n’avoit fors ly, ses dicte femme et chamberiere, et aussi troublé pour la douleur de la mort de sa dicte femme, s’en est alez et absentez du païs depuis ledit temps, et encores en est absens et n’ose retourner, pour rigueur de justice, se par nous ne lui est sur ce impartie nostre grace, si comme il dit, en nous humblement suppliant que, consideré l’ignorance et rudesse de lui, et que oncques mais ne fu reprins d’aucun mauvaiz fait, et que ce avint par cas d’aventure et non mie d’aguet appensé ne de certain propos, il nous plaise sur ce lui pourveoir de nostre dicte grace. Pour quoy nous, attendu ce que dit est, au dit suppliant, ou cas dessus dit, avons quictié, pardonné et remis, et par ces presentes quictons, pardonnons et remettons de grace especial le dit fait, les appeaulx et ban, se aucuns s’en sont ensuiz, avec toute peinne corporele, criminele et civile, que pour ce puet avoir encouru envers nous, et le restituons à sa bonne fame, renommée, au païs et à ses biens non confisquez, satisfacion faicte à partie premierement, se faicte n’est. Si donnons en mandement par ces presentes au seneschal de Xantonge et à touz noz autres justiciers et officiers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que le dit suppliant facent et laissent joir et user paisiblement de nostre presente grace et remission, et contre la teneur d’icelle ne le molestent, facent ou seuffrent estre molesté au contraire, en corps ne en biens, en aucune maniere, mais ses biens non confisquez, se aucuns sont pour ce pris, detenuz ou arrestez, lui mettent ou facent mettre sans delay à plaine delivrance. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf en autre chose nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou moys de may l’an de grace mil ccc. iiiixx et cinq, et de nostre regne le quint.

Par le roy, à la relacion du conseil. J. de Coiffy.

DCXC Juin 1385

Rémission accordée à Guillaume Brotel le jeune, tavernier d’Ardin, pour le meurtre de sa femme.

AN JJ. 127, n° 1, fol. 1 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 269-275

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, de la partie de Guillaume Brotel le jeune, demourant en la ville d’Ardin en la seneschaucie de Poitou, jadiz mary d’une femme appellée Guillemete, à nous avoir esté donné à entendre que, le dimanche jour de la Trinité derrenierement passé, après disner, les diz mariez qui estoient taverniers, alerent boire et essaier en l’esglise d’Ardin, qui est forte, des vins de Mabile Rataude, damoisele du seigneur de Tors, seneschal de Poitou

Renaud de Vivonne, fils de Savary IV et de Marie Chasteigner Son père étant mort jeune en 1351, il succéda à son aïeul Savary III décédé vers le mois de septembre 1367, et aux seigneuries de Thors des Essarts, de Faye et d’Aubigny. Pendant la domination anglaise, il servit loyalement le prince de Galles et ne fit sa soumission qu’avec les autres barons poitevins enfermés dans Thouars, le 30 novembre 1372. Son nom figure au bas du traité de Surgères, conclu le 18 septembre précédent, avec ceux des principaux chevaliers du Poitou qui s’engagèrent à retourner à l’obéissance de Charles V, s’ils n’étaient secourus par le roi d’Angleterre ou ses fils, avant la Saint-André suivante. (Siméon Luce, édit. de Froissart, t. VIII, p. clvi.) Dès lors il témoigna au roi de France et au duc de Berry toute la fidélité qu’il avait montrée au service du prince d’Aquitaine. Un avocat plaidant, le 13 mars 1431, au Parlement de Poitiers, pour Jean de Vivonne, seigneur d’Aubigny, dans un procès criminel, rappela que Renaud, le grand-père de son client, avait combattu bravement aux côtés de Du Guesclin, aux batailles d’Aunay et de Chizé, et qu’il avait mérité le surnom de bon sénéchal. En 1379, étant à la Rochelle, Renaud de Vivonne prit part à l’expédition dirigée contre Hélyot de Plassac, capitaine de Bouteville pour les Anglais, et dans les années qui suivirent on le retrouve toujours combattant les ennemis du royaume, tantôt sous les ordres du duc de Bourbon, lieutenant en Poitou, en 1385, tantôt avec le maréchal de Sancerre, en 1386 et 1387, dans la Saintonge, l’Angoumois et le Limousin. Il était alors sénéchal de Poitou pour le duc de Berry et avait succédé en cette qualité à Hugues de Froideville. La durée de son sénéchalat, d’après les listes les plus autorisées, s’étendrait de 1384 à 1389. Nous avons pu serrer ces dates de plus près, grâce aux nombreux documents que nous avons recueillis sur ce personnage, quoique sa qualité de sénéchal ne soit pas toujours inscrite à la suite de son nom dans les années mêmes où il exerçait certainement cette charge. Déjà nous avons vu, dans la notice d’H. de Froideville (ci-dessus, p. 161, n. 2) que ce dernier dut exercer cet office jusqu’au milieu de l’année 1385 au moins, ce qui retarderait l’entrée en fonctions du sire de Thors de près de deux ans. De fait, le premier document en date où nous l’avons trouvé qualifié de sénéchal est du 23 mars 1385 (1386 n.s.), comme on le verra plus loin. Par contre, il est absolument certain qu’il en portait encore le titre, le 21 novembre 1391. Nous donnerons ici une énumération sommaire des principaux actes qui intéressent la biographie de Renaud de Vivonne.

Sa femme Catherine d’Ancenis était dame d’Esnandes. La possession de cette terre donna lieu à un long procès, dont nous suivons la trace du 27 août 1373 au 28 novembre 1380. Le frère de cette dame, Jean d’Ancenis, qui avait épousé Agnès de Grazay, et sa sœur Jeanne d’Ancenis, mariée à Charles de Dinan, prétendaient également droit à la seigneurie d’Esnandes. Les principaux intéressés, c’est-à-dire Catherine d’Ancenis, son frère et sa sœur, moururent avant que l’affaire ne fût terminée. Renaud de Vivonne, au nom de ses enfants, dut poursuivre la cause au Parlement contre les héritiers de Jean et de Jeanne d’Ancenis. Ceux-ci finirent par abandonner leur prétention au moyen d’une indemnité pécuniaire. La transaction conclue à ce sujet fut enregistrée au Parlement, le 25 avril 1379. (Arch. nat., X1c 38. — Voir aussi, pour cette procédure, les registres X1a 23, fol. 182 ; X1a 29, fol. 43 v° et 102 v°.) Les comptes d’administration de la terre d’Esnandes pendant le litige furent l’occasion d’un autre débat entre Renaud de Vivonne et Barthélemy Vilois, le receveur des revenus ; il se termina aussi par un accord, homologué le 28 novembre 1380 (X1c 41). Le sire de Thors soutint un autre procès contre Geoffroy Ferron, chevalier, au sujet d’une créance de 4,000 francs d’or, dont il a été parlé dans notre tome IV (p. 76 note) et dont il sera question encore dans un autre endroit du présent volume. A propos d’une note sur Nicolas Mercier (ci-dessus, p. 118), nous avons dit quelques mots des poursuites entamées par Renaud contre Pierre Raveau, Jean Guiart et Gilles Berchou, seigneur du Puiset, poursuites dont il se désista purement et simplement, le 1er août 1379. (X1a 28, fol. 83 v°.) Il sera question encore, quelques pages plus loin, d’un curieux litige à propos des droits de justice que la seigneurie d’Aubigny conférait à Renaud de Vivonne sur la ville de Saint-Maixent (n° DCCXV). Une dernière affaire fort intéressante, dont Amos Barbot a donné un résumé succinct dans son Histoire de la Rochelle (édit. Denys d’Aussy, Arch. hist. de la Saintonge, t. XIV, 1886, p. 242), mérite encore d’être mentionnée ici. Un traité était intervenu, l’an 1380, entre la ville de la Rochelle, d’une part, le vicomte de Thouars et Renaud de Vivonne, comme seigneur d’Esnandes, d’autre, traité aux obligations duquel ceux-ci cherchèrent à se soustraire. Le litige fut porté au Parlement, qui rendit son arrêt, le 18 avril 1388, au profit de la ville. Tristan Rouault, à cause des havres du Plom et du Port-Neuf, Vivonne, à cause du port d’Esnandes, furent condamnés envers les maire, échevins et pairs de la Rochelle à payer le droit de « courtage » de tous les navires de vingt tonneaux et plus qui chargeraient dans leurs ports, et ce à raison de ce qu’ils percevraient de fret par tonneau (X1a 34, fol. 331). Cet arrêt est très important pour les renseignements qu’il fournit sur le commerce de la Rochelle au xive siècle et sur l’état et les défenses militaires de son port. Cette question du courtage, en ce qui concernait Esnandes au moins, fut de nouveau réglée, l’année suivante, entre la ville de la Rochelle et le sire de Thors, en son nom et au nom de ses quatre enfants, par un accord amiable où sont établies les sommes dues à la ville par suite de la non-exécution du traité antérieur. Cette nouvelle transaction fut homologuée au Parlement le 31 juillet 1389 (X1c 59).

Le 19 octobre 1384, Charles VI donna commission aux sires de Parthenay et de Thors pour faire observer en Poitou la trêve avec l’Angleterre, conclue le 14 septembre précédent, entre les ducs de Bourgogne et de Berry, d’une part, le duc de Lancastre et le comte de Buckingham, d’autre. (Coll. dom Fonteneau, t. XX, p. 199.) Renaud de Vivonne n’y est point qualifié sénéchal. Deux lettres émanées du sire de Thors, agissant comme sénéchal, se trouvent aux Archives municipales de Poitiers. L’une du 23 mars 1385 (sans doute 1386 n.s.), est une commission à Pierre Grippon de recevoir une somme imposée sur les habitants de la ville pour la construction de l’horloge (J. 191) ; l’autre, du 25 juin 1387, porte prorogation pour un an du droit de barrage octroyé à la ville (H. 8). Le titre de sénéchal est accolé encore au nom de Renaud de Vivonne, dans plusieurs actes conservés aux Archives nationales. Le premier est un procès-verbal d’exécution d’une ordonnance rendue, le 30 juillet 1387, par le roi pour régler les différends entre le connétable de Clisson et le duc de Berry, sous la date du 28 août 1387 (J. 186a, n° 73). Le second, daté de Loudun, le 31 août de la même année, est l’acte de vente par Jeanne de Bauçay au roi, de la terre et châtellenie de Sainte-Néomaye (J. 181b, n° 98, et J. 187a, n° 30). Le troisième porte la date du 1er octobre 1388. Maître Jean Marchant étant en procès au Parlement contre Jean Rousseau et Marine Favereau, sa femme, ils avaient choisi pour arbitre Renaud de Vivonne, s’en remettant entièrement à sa décision. Le délai pour rendre son jugement avait été fixé au 1er août 1388. Mais « ledit seigneur de Tors, lequel est seneschal de Poitou, pour plusieurs autres grosses besoingnes dont il estoit occupé », n’avait pu vaquer à cette affaire. Son pouvoir fut alors prorogé jusqu’au 1er janvier 1389, avec cette clause que, si l’accord n’était pas intervenu à cette époque, les parties devraient se présenter à la cour le 15 janvier suivant (X1c 57). Dans une sentence d’absolution de l’official de Maillezais en faveur de Jean Alonneau, confirmée en mars 1390 par lettres du roi, imprimées ci-dessous à cette date, il est dit que Renaud de Vivonne était sénéchal de Poitou, en septembre 1388. Enfin dans une confirmation royale (janvier 1393 n.s.) de l’adjudication faite à Pierre Boschet de partie de la terre de Sainte-Gemme, saisie sur Guillaume Ancelon, écuyer, et sa femme, est inséré un acte donné par le même sire de Thors, en qualité de sénéchal, à Niort, le 21 novembre 1391. (JJ. 144, n° 67, fol. 33.) Il est vraisemblable qu’il conserva cet office jusqu’à sa mort.

Citons encore un traité passé, le 7 janvier 1386, entre Renaud de Vivonne, seigneur de Thors, Faye et Aubigny, et l’abbaye des Châtelliers, analysé dans le cartulaire publié par M.L. Duval, p. 147 ; un aveu à lui rendu, le 13 février 1387, à cause de son château d’Aubigny, par ladite abbaye (idem, p. 148) ; deux quittances, l’une du 4 décembre 1386, l’autre du 9 août 1387, de gages payés à Renaud de Vivonne, sire de Tors, sénéchal de Poitou, chevalier banneret, pour service de guerre en Poitou et en Guyenne. (Bibl. nat., ms. Clairambault 114, pièce 8953, et ms. 105, p. 8225.) Le sceau appendu à ces pièces représente un écu d’hermines au chef, penché, timbré d’un heaume cimé d’un col de cygne dans un vol aux armes, supporté par deux hommes sauvages dans une rose gothique.

Le dernier acte que l’on connaisse de Renaud de Vivonne est une procuration donnée par lui, en qualité de curateur de Marie Chasteigner, dame de la Châteigneraye, sa tante, à Huguet de Montsoreau, pour la levée des fruits et revenus d’une de ses terres ; elle est du 16 novembre 1392. (Coll. dom Fonteneau, t. XVII, p. 521). A partir de cette époque, on perd la trace du sire de Thors, et l’on ne connaît pas la date de sa mort qui arriva sans doute peu de temps après. De Catherine d’Ancenis sa femme, accordée en 1353 et mariée quelque temps après, il eut trois fils : Savary V, seigneur de Thors (le seul de ses enfants qui fut majeur le 25 avril 1379, X1c 38), tué à la bataille de Nicopolis en 1396 ; Renaud, seigneur d’Aubigny, de Faye et des Essarts ; Guillaume, seigneur de la Tour-Chabot ; et une fille, Marguerite, mariée, le 2 décembre 1392, à Jacques de Surgères, sr de la Flocelière, morte avant le 23 avril 1411, que son mari se remaria. La généalogie de Vivonne se trouve dans Du Chesne, Hist. généal. des Chasteigners, p. 34 ; le P. Anselme, Hist. généal., t. VIII, p. 764 ; La Chenaye-Desbois, Dict. de la noblesse ; et Beauchet-Filleau, Dict. généal. des familles de l’anc. Poitou.

, et après ce qu’il les eurent preciez, beu et essayé d’icelx, cheurent en propos et voulenté d’en acheter une partie de Huguet Rataut, escuier du dit seigneur de Tors et frere d’icelle Mabile

L’écuyer de Renaud de Vivonne était vraisemblablement le fils ou le petit-fils d’Humbert Rataut, qui était seigneur de Dilay, près Ardin, et dont la fille Jeanne épousa Pierre de la Rochefaton, vivant en 1350 et 1362 (voy. notre précédent vol., p. 385 note). D’après un aveu du 12 juin 1403, Huguet Rataut tenait de Jacques du Plessis, seigneur de la Touche-Poupart à cause de sa femme, Denise Poupart, l’hébergement de la Périnière avec ses appartenances, contenant seize sexterées de terre et garenne, la dimerie de Laudonnière, de la Rousselière et du Petit-Lizon, et plusieurs autres petits fiefs, droits, rentes, etc. (Copie du Grand-Gauthier, Arch. nat., R1* 2172, p. 728.) Dans le même recueil se trouve un aveu rendu au comte de Poitou par Marguerite Rataut de son hébergement d’Arçais, mouvant du château de Niort et autres petits fiefs dans cette paroisse et dans celle de Saint-Hilaire-la-Pallud, le 22 avril 1404. (Id., ibid., p. 982.)

, qui les leur avoit monstrez pour vendre, pour et ou nom de sa dicte suer, et en esperance de faire le dit marchié, le dit Guillaume dit à sa dicte femme qu’elle apparillast un oison qu’ilz avoient, ou autre viande telle qu’elle pourroit avoir à souper pour eulz et le dit Huguet, escuier, lequel il amenroit avec eulx, si povoit ; laquelle femme incontinant fu refusant de ce faire et dit plainement à son dit mary qu’elle n’en feroit riens, et par grant despit se parti et s’en ala de leur hostel en une estable, qu’ilz avoient ailleurs en la ville, querre deux jumens, l’une grande et l’autre petite, pour les mener paistre aux champs, et le dit Guillaume la suy et lui dist qu’il ne vouloit mie qu’elle alast aux champs, maiz à l’ostel apparillier à souper, comme dit est, quar c’estoit plux leur honneur et proufit que de mener paistre les dictes jumens ; laquelle femme par grant despit et desobbeissance lui dit qu’elle n’en feroit riens, et pour ce que le dit Guillaume vit et oy sa rebellion, il s’efforça de lui oster des mains les dictes bestes qu’elle tenoit ; laquelle femme incontinant fery son dit mary injurieusement et de felon courage de la corde dont l’une des dictes bestes estoit liée, et pour ce le dit Guillaume la fery de la main, et lui dit et commenda qu’elle s’en retournast à l’ostel, et lui osta lesdictes bestes et les laissa aler aux champs. Et elle moult yrée, pour injurier son dit mary, le prist par la chevesse, pour ce qu’il estoit desboutonné devant ; et ainsi comme il se entretenoient en ce point, il survint sur eulz un appellé Jehan Mercier qui s’entremist de les appaisier. Auquel le dit Guillaume demanda qu’il queroit et que à lui n’appartenoit de riens, se ilz s’entre batoient, par quoy le dit Jehan Mercier s’en ala et le dit à pluseurs. Et pour ce que le dit Guillaume se vit ainsi injurié et batu de sa femme, et que encor pluseurs le savoient, dont il avoit grant dueil, despit et honte au cuer, il fery sa dicte femme d’un petit coustel qu’il tray ou flanc du cousté senestre, et lui fist une petite plaie. Et sur ce vint Guillaume de Meceil, escuier, qui lui osta le dit coustel et les desmella. Neantmoins la dicte femme, qui touzjours fu obstinée en son yre et despit, s’en ala incontinant aux champs et ne voult aler en son hostel, pour chose que son dit mary lui deist, ne le dit escuier aussi. Et par ainsi ne se fist pas si tost appareiller jusques au soir bien tart, qu’elle fu veue et visitée par un barbier qui dist, ycelle veue et visitée, que le cop n’estoit pas mortel et qu’elle en seroit bien tost garie. Et après aucuns jours, une bosse vint à la dicte femme ou costé, d’autre part le dit cop, pour occasion desquelles choses elle morut assez tost après, c’est assavoir le mardi après la feste du Saint Sacrement derrenierement passé

Le 7 juin 1385.

. Et en sa maladie, elle a tousjours dit qu’elle n’avoit peril de mort que de sa bosse, consideré la grande et excessive mortalité de la bosse et autrement ; et aussi elle a esté bien ordonnée et confessée, et receu touz ses sacremens et fait son ordonnance telle qu’il lui a pleu. Pour occasion de la quelle mort, les biens du dit Guillaume ont esté mis en inventoire par le dit seigneur d’Ardin, qui se dit hault justicier en la dicte ville, ou par ses gens et officiers, et le dit Guillaume s’est absentez du lieu et se tient en sa garde, ne n’y ose retourner, pour doubte de trop grant rigueur de justice ou de trop long emprisonnement. Et pour ce, nous a fait très humblement supplier que, attendu les choses dessus dictes, et ce aussi que en touz autres cas il a tousjours esté homme de bonne vie et honneste conversacion, et sanz avoir esté reprins d’aucun villain reprouche, nous lui vueillons estre piteables et misericors, et sur ce estendre nostre benigne grace. Pour quoy nous, eu consideracion aux choses dessus dictes, voulans pitié et misericorde estre preferées à rigueur de justice, au dit Guillaume avons quictié, remis et pardonné, et par la teneur de ces presentes quictons, remettons et pardonnons, de grace especial, ou cas dessus dit, le dit fait et crime, avecques toute paine corporele, criminele et civile en quoy il peut estre pour ce que dit est encheuz ou encouruz envers nous et justice, avecques les bans et appeaulx, s’aucuns s’en sont pour ce ensuys ou ensuyoient, et le restituons du tout et à plain à sa bonne fame et renommée, au pays et à ses biens non confisquez, satisfacion faicte civilement avant toute euvre là où il appartendra de raison. Si donnons en mandement au gouverneur de la Roychelle et à touz noz justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans presens et avenir, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, seuffrent et laissent le dit suppliant joir et user paisiblement et à plain, sanz le troubler, molester ou empeschier, ou souffrir estre troublé, molesté ou empeschié en aucune maniere au contraire, ores ne ou temps [avenir], et lui mettent ou facent mettre au delivre ses biens, se il ne sont confisquez. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touzjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, l’an de grace mil ccc. iiiixx et cinq, et de nostre regne le cinquiesme, ou mois de juing.

Par le conseil. P. de Beaune. — Barreau.

DCXCI Juillet 1385

Le roi ayant fait amener des prisons de Parthenay au Châtelet de Paris Marie de Bourbon et Perrette de Sétigny, déclare qu’il entend que ce précédent ne porte aucun préjudice aux droits de juridiction du sire de Parthenay et de ses successeurs.

AN JJ. 127, n° 67, fol. 44 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 276

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que comme nous, pour certaines et justes causes qui ad ce nous meuvent, aions ordené à prandre ès prisons de nostre amé et feal le sire de Partenay, en son chastel de Partenay, Marie de Bourbon, et semblablement une autre femme nommée Perrette de Setigny, demourant ou dit chastel de Partenay, laquelle est de la farrule du dit sire de Partenay, lesquelles nous voulons estre admenées en nostre Chastellet de Paris, pour en ordener par nous ou nostre court de Parlement, si comme bon nous semblera. Nous, consideré que nous avons reservé et pour cause à nous ou à nostre dicte court la congnoissance du cas, pour lequel nous avons ordené à faire la dicte prise, avons octroyé et octroyons par ces presentes, de grace especial, au dit sire de Partenay, que les dictes prises ne chose qui s’en ensuyve, pour occasion d’icelles, ne porte ou puisse porter, ores ou pour le temps avenir, aucun prejudice au dit sire de Partenay, à sa juridicion et justice, ne de ses successeurs seigneurs du dit lieu. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touzjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou mois de juillet l’an de grace mil ccc. iiiixx et cinq, et de nostre regne le quint.

Par le roy, à la relacion du conseil, ou quel vous, monsieur le chancellier du Dalphiné, et pluseurs autres, estiez. Mauloue.

DCXCII Août 1385

Rémission accordée à Jean Closet, carrier de Migné et entrepreneur d’une partie de la maçonnerie de la tour du château de Poitiers, qui, se trouvant en cas de légitime défense, avait tué d’un coup de couteau Étienne Jarnet, l’un de ses associés.

AN JJ. 127, n° 86, fol. 54 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 277-281

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, de la partie des amis charnelz de Jean Closet, carrier, demourant en la parroisse de Maigny, assez près de la ville de Poictiers, nous avoir esté exposé que, comme nagueres le dit Jehan Closet et un appellé Estienne Jarnet, demourant aussi en la dicte parroisse, eussent eu debat ensemble pour raison de certains ouvraiges de massonnerie, que le dit Closet avoit pris en tasche à faire ès tours du chastel de la dicte ville de Poitiers

Les comptes des bâtiments du duc de Berry à Poitiers subsistent pour les années 1384 à 1387, et sont remplis de détails précieux sur la construction du château, du palais et autres monuments de cette ville. Ces comptes sont dressés semaine par semaine, et celui de l’année 1384 donne les noms et surnoms de tous les ouvriers employés pour les travaux du duc. Ainsi, l’on y trouve qu’Étienne Jarnet travailla au château pendant six semaines, du 26 septembre au 5 novembre 1384, à raison de 5 sous par jour. Son nom figure parmi les « pierreurs » chargés de faire « un pertuis au mur de la tour qui est auprès de la chambre du retrait, pour faire une husserie à entrer en la viz de la dicte tour, et aussi pour faire un pertuis ou groux mur de la chambre basse qui est soubz la chappelle, où il sera fait unes aisances » (KK. 256, fol. 2, 4 v°, 6 v°, 8, 11, 13 v°). Malheureusement, à partir de février 1385, les noms ne sont plus mentionnés ; le rédacteur a supprimé le détail des chapitres, et se contente de la formule « pour pluseurs journées » de carriers, tailleurs de pierres, maçons, charpentiers, etc. Cependant, du 6 au 13 février, on rencontre le nom d’un Guillaume Closet parmi les carriers désignés « pour traire pearre en la pearriere de Chardonchamp et pour visiter les paerrieres du Breuil l’Abasse, de Bonillet et des Lourdines, lesquelles seroient plus proffitables pour tirier pearre pour la tour de Mauberjon ». (Idem, fol. 52 v°.) En parcourant le registre, on peut constater que les travaux de cette tour furent poussés activement pendant les six premiers mois de l’année 1385.

, et en la quelle tasche ou marchié il avoit à compaignie le dit Estienne et Perret Esmeret

Ou Aymeret, suivant cet autre extrait du registre précité : « A Perret Aymeret, perreur, pour cause d’avoir abatu le gros mur des galleries du chastel de Poictiers, lequiel mur tient au coing de la chappelle par devers le degré, et contient le dit mur xviii. piés de haut, xvi. piés de long et vii. piés d’espoisse, et a esté le dit mur abatu pour croistre l’oratoire de mondit sire, ainsi qu’il est contenu par le marché sur ce fait par ledit mestre Guy avec ledit Aymeret, le xe jour de fevrier l’an mil ccc. iiiixx et cinq, etc. » (KK. 256, fol. 82.)

 ; et un moys a ou environ, le dit Jarnet eust demandé compte au dit Closet de certain argent qu’il avoit receu des diz ouvraiges, et en parlant ensemble, le dit Closet, entre les autres paroles dit au dit Jarnet : « Tu en auraz ton compte. » Et après ces paroles, il alerent à la taverne boire ensamble et en pluseurs autres lieux, en la dicte ville de Poictiers, et sur le tart il se mistrent au chemin pour eulx en aler ensamble de la dicte ville de Poitiers à leurs maisons. Maiz quant ilz furent au dehors d’icelle ville, il encommencerent à parler l’un à l’autre, et entre les autres paroles le dit Closet dist qu’il estoit bien tenuz au maire de Poictiers

Le maire de Poitiers était cette année-là James Guichard.

et au maistre de l’euvre

Le nom du « general maistre des euvres » du duc de Berry, de 1384 à 1387 au moins, nous est fourni par le registre des comptes des bâtiments. C’était Guy de Dampmartin ; il recevait vingt sous de gages par jour. (Voy. KK. 256, 257, fol. 56 et passim.) Il est appelé Ginot (s.d. pour Guiot) de Dampmartin dans l’Invent. des arch. de la ville de Poitiers, p. 180, où l’on mentionne un marché passé entre lui et le plombier, le 18 mars 1386.

de nostre très chier et amé oncle le duc de Berry, car il les avoient gardé d’avoir esté menez en l’ost de nostre très chier oncle le duc de Bourbon

Il s’agit de l’armée convoquée à Niort, au mois de mai 1385, par Louis ii duc de Bourbon, lieutenant du roi en Bourbonnais, Forez, Saintonge, Angoumois et Périgord, et du duc de Berry en Poitou, Berry et Auvergne, comme on l’a vu ci-dessus. Les Anglais occupaient encore à cette époque beaucoup de forteresses en Saintonge et en Angoumois (voy. lettres de rémission pour Guillaume Barrière, écuyer de la garnison de Merpins, JJ. 124, n° 111, fol. 63 v°), et les garnisons de ces villes faisaient de fréquentes incursions en Poitou. L’expédition du duc de Bourbon eut pour objet de réprimer leurs audacieuses tentatives et de dégager les frontières des États du duc de Berry, et pour résultat la prise de dix environ de ces forteresses, entre autres Verteuil, le château d’Aigre, Bourg-Charente, Taillebourg, Archiac, Montlieu, etc. Il sera question de cette campagne, qui dura environ six mois, en d’autres endroits de ce volume. Elle a été racontée par Froissart (édit. Kervyn de Lettenhove, t. X, p. 316, 328 et 374), et d’après lui par M. Massiou, Hist. de la Saintonge et de l’Aunis, Paris, 1838, t. III, p. 196-202. Le biographe du bon duc Loys de Bourbon, Cabaret d’Orville, la narre aussi avec d’abondants détails ; seulement il a le grand tort de la placer en 1382. (Edit. Chazaud, pour la Société de l’hist. de France, in-8°, 1876, p. 136-154.)

, pour miner, comme avoient esté pluseurs autres carriers et maçons. Et le dit Estienne Jarnet dist qu’ilz estoient trop plus tenuz au lieutenant du seneschal de Poictou, car se il eust voulu, il eussent esté menez ou dit host, et l’eussent juré touz ceulz de Poictiers, et que…

Le mot omis en cet endroit paraît l’avoir été avec intention.

autant d’eulx comme d’un bouton, en disant le mot tout oultre. Et pour ce que le dit Closet lui dist qu’il disoit mal, le dit Jarnet le desmenti, en disant : « Ribaut, tu m’as autresfoiz argué par pluseurs foiz, maiz aujourd’uy tu t’en repentiras, et je reny Dieu et touz les sains de paradiz, se je ne te met huy mort. » Et lors le dit Closet lui répondi : « Tu as renié Dieu et je l’avoue, et se Dieu plaist, je me garderai de ta malice, et je t’en pri, va t’en ton chemin à ton hostel, et je m’en yrai le mien, car je n’é cure de riote. » Et tantost le dit Jarnet dit qu’il yroit avec lui quelque part que il alast, et qu’il ne se departiroit point de lui, jusques à ce qu’il en feust autrement vangié. Et lors le dit Closet, voiant que le dit Jarnet estoit mal meu et plain de maulvaise voulenté, pour eschever le debat, s’en cuida aler par un autre chemin ; maiz tantost le dit Jarnet lui escria : « Ribaut, tu as paour de moy, maiz tu n’en as pas paour sanz cause. » Et en disant ces paroles, vint au dit Closet et le fery de son coustel sur la teste et lui fist une grant playe, et le dit Closet tout esbay et couroucié, voiant aussi le sanc qui lui couloit par le visaige et ailleurs, dist au dit Jarnet : « Tu as fait que très mauvais garçon de moy avoir ainsi villenné. » Mais le dit Jarnet, non content de ce, respondi au dit Closet : « Ribaut, tu n’en es pas quicte. » Et lors le dit Closet ainsi batuz et villennez, pour eschever la mort et obvier à la fureur

Le scribe a écrit par distraction « à la faveur. »

et maule voulenté [dudit] Jarnet, en soy revanchant, saicha son coustel et dit au dit Jarnet que, se il se tiroit plus à lui, il le courouceroit, et sanz plus mot dire le dit Jarnet prent la course contre le dit Closet et le cuida enferrer de son coustel parmi le corps, et au devant de la pointe du coustel du dit Jarnet le dit Closet mist la main senestre, et en l’autre il tenoit son coustel tout trait, et le persa le dit Jarnet le premier det de la dicte main et le petit det tout oultre et li trancha tout le fons de la dicte main, et li persa sa robe en deux lieux ou cousté senestre, et en eulz ainsi entretenant, le dit Closet qui entendoit à destourner le coustel du dit Jarnet, afin qu’il ne li entrast dedens le corps, y mist l’autre main en la quelle il tenoit son coustel, et en boutant ainsi l’un contre l’autre, le coustel du dit Closet qui estoit le plus loing et duquel la pointe estoit devers le dit Jarnet entra d’aventure dedens le corps du dit Jarnet, et pour paour de pis avoir le dit Closet osta le coustel du dit Jarnet et le gecta assez loings de lui. Et après ce, le dit Closet qui ne cuidoit point que le dit Jarnet feust blecié, fu esbay quant il li vist craichier le sanc, dont assez tost après le dit Jarnet se laissa cheoir à terre, où il ala de vie à trespassement. Pour lequel fait et pour doubte de rigueur de justice, le dit Closet s’est absentez du pays, et ont esté prins touz ses biens par la justice de religieux abbé et convent du Moustier Nuef de Poictiers, en laquelle il estoit demourant, et n’oseroit retourner au pays, se par nous ne lui estoit sur ce pourveu de nostre grace et misericorde, en nous suppliant humblement que, comme il ait esté devant pluseurs forteresses occupées par noz ennemis et nous y ait bien et loyalment servi, et soit homme de bonne vie et renommée, et que le dit mort fust premier aggresseur et l’avoit par avant assailli, batu et villenné, et que ce fust fait en chaude meslée et en soy deffendant à l’outraige du dit mort et par inadvertance, et de cas de meschief, comme dit est, nous lui vueillons sur ce faire nostre grace. Nous adecertes, voulans rigueur de justice temperer par misericorde, le fait et cas dessus diz, avec les appeaux et ban, s’ensuy estoient ou cas dessus dit, et satisfacion civilement faicte à partie premierement, lui avons quictié, remis et pardonné, et par ces presentes quictons, remettons et pardonnons, de nostre auctorité royal et grace especial, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur, et en le restituant au pays, à sa renommée et à ses biens, qui ne seroient confisquez, par ces presentes. Par la teneur desquelles nous donnons en mandement au gouverneur de la Rochelle et seneschal de Xantonge, et à touz noz autres justiciers et officiers, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, ou à leurs lieux tenans, que de nostre presente grace et remission facent et laissent le dit Closet joir et user paisiblement, sanz le molester ne souffrir estre molesté ne empeschié aucunement au contraire, maiz tout ce que fait seroit ou actempté à l’encontre soit mis, tantost et sanz delay, au premier estat et deu. Et que ce soit ferme chose et estable à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, l’an de grace mil ccc. iiiixx et cinq, et de nostre regne le quint, ou moys d’aoust.

Par le conseil. G. Niczon. — Fedeau.

DCXCIII Décembre 1385

Lettres de rémission données, à la requête du connétable de Clisson, en faveur de Nicolas Jehan, maître du vaisseau le Saint-Esprit de Guérande, et de Noël Galois, marchand dudit lieu, détenus prisonniers à la Rochelle. Avant la dernière expédition de Flandre, ils avaient chargé ledit vaisseau de sel pour l’aller vendre en Espagne et y acheter « des lances et autres harnoiz, pour en armer une barge qui est de nostre amé Eon de Lesnerac

Éon de Lesnerac figure pour la première fois, parmi les pièces justificatives de l’Histoire de Bretagne, dans une montre d’Olivier de Clisson passée à Vannes, le 1er janvier 1375, au nombre des écuyers de sa compagnie, et on l’y retrouve dans toutes les montres de cette année et des années suivantes. (Dom Morice, t. III, Preuves, t. I, p. 100 et s.) A partir du 27 janvier 1383 n.s., il est à la tête d’une compagnie et se qualifie capitaine de Clisson, écuyer. (Id., p. 436.) Cette nouvelle montre, où il est mentionné, fut reçue à Paris ; Éon de Lesnerac avec quatorze chevaliers se rendait en Flandre au secours du duc de Bourgogne contre les Anglais. (Le P. Anselme, Hist. généal., t. VII, p. 381.) Son nom se retrouve sous la forme « Yon de Lizingnerat », capitaine de Clisson, dans des lettres de rémission en faveur d’un écuyer appelé Boniface de Primache (novembre 1383, JJ. 123, n° 218, fol. 109 v°). On apprend dans cet acte que la ville et le château de Tonnay-Charente, occupés par les Anglais, furent repris au mois de juillet 1383, que le capitaine de Clisson prit part à ce fait d’armes et qu’une rixe sanglante eut lieu entre des Bretons de sa compagnie et d’autres gens d’armes de la garnison. On s’étonne que M. Massiou (loc. cit. dans une note précédente, p. 279) place la reprise de Tonnay-Charente au milieu de l’année 1385, durant la chevauchée du duc de Bourbon ; on ne voit pas ce qui a pu le déterminer à identifier le « bourg Charente » du chroniqueur avec Tonnay-Charente.

, capitaine de Cliçon pour nostre amé et feal cousin et connestable le seigneur de Cliçon et de Belleville, et Hervé Chamiete, si comme il leur avoit esté enchargié par les diz Hervé et Eon, lesquelx, si comme il disoient, avoient entencion de la dicte barge, maiz que elle feust enarmée, faire mener à l’Escluse pour nostre armée que nous entendions lors faire pour aler en Angleterre

Août 1383.

. » Les dits Nicolas Jehan et Noël Galois allèrent bien à Saint-Sébastien en Espagne, acheter les lances et harnais convenus, mais ils avaient fait relâche auparavant à Bayonne, où ils avaient vendu leur sel et autres denrées aux Anglais. A leur retour, ils furent pris par les « baleniers d’Olonne » et amenez à la Rochelle, où ils furent mis et tenus longtemps en procès devant le gouverneur de ladite ville, et pendant ce temps étroitement gardés dans les prisons. Paris, décembre 1385.

AN JJ. 127, n° 283, fol. 174 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 281-282

DCXCIV 4 février 1386

Don à Guy de La Trémoïlle, sr de Sully, chambellan du roi, des biens meubles de la valeur de 6,000 francs d’or et des héritages estimés à 300 livres parisis de rente annuelle, qui avaient appartenu à Oudart d’Atainville, juge criminel de Toulouse, et avaient été confisqués sur ce personnage, condamné, pour divers crimes, au bannissement à perpétuité. Paris, 4 février 1386

Cet acte a été publié par M. le duc de La Trémoïlle, Livre de comptes de Guy de La Trémoïlle et de Marie de Sully. Nantes, 1887, in-4°, Appendice, p. 176.

.

AN JJ. 128, n° 100, fol. 59 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 282-283

DCXCV Mars 1386

Rémission accordée à Jean Debien, de Champdenier, pour le meurtre de Nicolas Claveurier, curé de Saint-Projet, commis à la suite d’une rixe sur la voie publique.

AN JJ. 128, n° 124, fol. 72 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 283-286

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé humblement de la partie des amis charnelz de Jehan De Bien, demourant à Champdener en Poitou, jeune homme de l’aage de xxii. ans ou environ, que, comme environ la saint Jehan Baptiste derreniere passée ot un an, ainsi que le dit Jehan De Bien et Jehan Escot faisoient charier et mener du fain à un village appelé la Doretere en Poitou, ilz encontrerent en un grant chemin public, en alant au dit village, un prestre appellé Nicolas Claveurier

La famille Claveurier fut l’une des plus notables de Poitiers. MM. Beauchet-Filleau en ont donné la généalogie (Dict. des familles du Poitou, t. I, p. 679), mais à partir du xve siècle seulement. Nous ne savons si le curé de Saint-Projet doit y être rattaché.

, lors curé de Saint Projet, lequel estoit à cheval et menoit après lui a pié une jeune femme de l’aage de xxv. ans ou environ, auquel prestre le dit Escot demanda où il menoit la dicte femme, lequel lui respondi moult haultainnement : « Que vous en appartient il ? Vous n’en saverez rien. » Et lors le dit Jehan Escot lui respondi que à eulz appartenoit mieulx que au dit prestre, et que ce n’estoit pas office ne honneur de prestre de mener jeunes femmes par le pays. Lequel prestre lui respondi lors plus hautainnement que paravant n’avoit fait, que s’il en parloit plus il le courouceroit du corps, et en voulant mettre ses paroles à effect, il descendi de son cheval et impectueusement se approcha du dit Jehan Escot, et de fait le frappa d’un baston qu’il tenoit parmi son espaule, et après non content de ce, le print par la robe très rudement pour le vouloir injurier plus. Et lors le dit Jehan De Bien, meu de chaleur de jeunesce par la sugestion de l’ennemi, dist au dit prestre qu’il laissast son dit compaignon et que, se plus il le frappoit, aussi…

Quelques mots passés.

 ; lequel prestre incontinent laissa le dit Jehan Escot et se approcha du dit Jehan De Bien atout le dit baston dont il avoit frappé le dit Escot, comme dit est, en lui disant : « T’en fault il parler ? » Et après moult impectueusement hesma son dit baston sur le dit Jehan De Bien pour l’en vouloir frapper. Et lors le dit Jehan De Bien chaudement et en soy defendant et deboutant force pour force, frappa le dit prestre parmi la teste, environ l’oreille un seul cop d’un petit baston, sanz aucune voulenté ou esperance qu’il eust de le tuer, et après l’en poussa dont il chey à terre, et incontinent ala de vie à trespassement. Et pour ceste cause, le dit Jehan De Bien a esté appellez aux drois en la court de nostre très chier et très amé oncle le duc de Berry et d’Auvergne, conte de Poitou, ès grans assises de son seneschal de Poitou, au siege de Saint Maixent, et depuis en a esté rendue l’obeissance au sire de Partenay, et encores en demande l’obeissance le sire de Champdener

Guillaume de Chaunay était alors seigneur de Champdeniers. (Voy. notre t. IV, p. 374 note.) Cette terre passa plus tard à la maison de Rochechouart par le mariage d’Anne, fille et héritière de François de Chaunay et de Catherine de La Rochefoucauld, avec Jean de Rochechouart, seigneur de Jars, le 27 janvier 1448.

, pour ce que le dit De Bien est son subget et justiçable, si comme l’en dit, sanz ce que contre lui ait encore esté aucunement procedé à ban ne à prise de corps. Toutevoies le dit Jehan De Bien, pour doute de rigueur de justice, n’oseroit demourer ou pays seurement, se par nous ne lui est sur ce pourveu de nostre grace et misericorde, si comme dient les diz exposans. Supplians que, comme le dit Jehan De Bien soit jeunes homs et ait esté tout le temps de sa vie homme de bonne fame, renommée et honneste conversacion, non suspect, convaincuz ne actains d’aucun autre villain cas ou reprouche, et que le dit fait advint par chaleur et chaude cole, et fu fait en soy defendant et deboutant la fureur et mauvaise voulenté du dit prestre comme dit est, nous lui vueillons sur ce impartir nostre dicte grace et misericorde. Nous adecertes, eu consideracion aux choses dessus dictes, voulans preferer misericorde à rigueur de justice, au dit Jehan De Bien ou cas dessus dit, de nostre grace especial et auctorité royal, avons quictié, remis et pardonné, et par ces presentes quictons, remettons et pardonnons le fait et cas dessus dit, avec toute peine, offense et amende corporele, criminele et civile, en quoy il peut pour ce estre encouru, et toutes evocations, appeaulx et bans, s’aucuns en ont esté ou sont pour ce faiz contre lui, et le restituons à sa bonne fame et renommée, au pays et à ses biens non confisquez, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur et à autres noz officiers, satisfacion premierement faicte à partie, se faicte n’est. Si donnons en mandement au gouverneur de la Rochelle et à touz noz autres justiciers et officiers, à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit Jehan De Bien facent, seuffrent et laissent joir et user paisiblement de nostre dicte grace et remission, sanz le molester, etc. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable perpetuelment, nous avons fait mettre à ces presentes lettres nostre seel ordonné en l’abence du grant. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, ou mois de mars l’an de grace mil ccc. iiiixx et cinq, et le siziesme de nostre regne.

Par le conseil. J. de Crespy.

DCXCVI Mars 1386

Rémission accordée à Jean et à Pierre Chapereau, de Corps au diocèse de Luçon, sergents et familiers de Jean du Plessis, chevalier, pour le meurtre de Pierre Suire, qu’ils avaient trouvé coupant des ajoncs sur la terre de leur maître et se disposant à les emporter. Il avait répondu par des injures et des coups aux ordres que lui donnaient les deux sergents, de les suivre avec le corps du délit.

AN JJ. 128, n° 130, fol. 75 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 286-290

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie de Jehan et Pierre Chapereauz, de la parroisse de Corp ou diocese de Luçon, que ainsi comme les diz exposans, sergenz et familliers de Jehan du Plesseys

Si ce personnage se rattache à la famille du Plessis, ce ne peut être que par une branche ignorée des généalogistes. Le troisième fils de Guillaume III, seigneur du Plessis, des Breux, de la Vervolière, etc., se nommait à la vérité Jean et est mentionné dans le testament de son père, daté du 20 avril 1373 ; mais il ne reparaît plus dans l’acte de partage de la succession paternelle qui fut fait le 18 février 1389. Il était par conséquent mort à cette époque, et sans laisser d’enfants. (A. Du Chesne, Hist. généal. de la maison du Plessis-Richelieu, in-fol., p. 22 et 138.) Or le Jean du Plessis, mentionné dans ces lettres de rémission, vivait encore en 1402. Un autre Jean du Plessis, le chef de la famille, échanson de Charles VI en 1404, vivait à la date de nos lettres : c’était le fils de Pierre III et le petit-fils de Guillaume III ; mais il était bien jeune en 1386, et pas encore marié. D’ailleurs il n’eut point d’autre femme que Catherine Frétart et vécut jusqu’en 1446. (Id. ibid., p. 87 et 139.)

En 1376, notre Jean du Plessis, qualifié déjà de chevalier, disputait à Renaud du Plessis, sans doute son parent, on ne sait à quel degré, la terre de Brillouet provenant de la succession de feu André Joubert, écuyer. L’affaire vint au Parlement, en appel de l’auditoire du sénéchal de Poitou, et, le 26 juin 1376, la cour manda au sénéchal de mettre sous la main du roi la terre litigieuse, jusqu’à sentence définitive. Jean de la Chaussée fut commis à l’administration de Brillouet et à la recette des revenus. Pierre Joubert, l’ancien possesseur, avait grevé sa terre d’une rente annuelle de 100 sous au profit de Catherine, fille de Jean Alonneau, pour aider à la marier. Jean de la Chaussée refusant de lui payer cette somme, le Parlement chargea le bailli des Exemptions de lui faire avoir satisfaction, le 18 mars 1377 n.s. (Arch. nat., X1a 25 ; fol. 225 ; X1a 26, fol. 41). Les registres de Parlement ne donnent plus rien, après cette date, sur cette affaire, ce qui fait penser que les parties la réglèrent à l’amiable.

Jean du Plessis demeurait à la Forestière (note de la page suivante), et avait un hôtel à Thiré, près Sainte-Hermine. Cela résulte d’un procès dont nous allons dire quelques mots. Feu Pierre Tabary avait vendu à Jean Guynier, père de Jeanne Guynier, dont elle était fille unique et seule héritière, quatre setiers et un quart de froment de rente, à la mesure de Sainte-Hermine, et cent sous de rente, « rendables chaque année à Tiré en l’ostel Jehan du Plesseys. » Cette redevance n’étant pas payée, l’hébergement du Temple, appartenant audit Tabary, avait été saisi et mis en la main du roi, et Jean du Plessis assigna Colette Tabary, fille et héritière de Pierre, et le mari de celle-ci, Jean Baritaut, devant le bailli des Exemptions de Poitou, Touraine et Anjou, à son siège de Chinon. Au cours de l’instance, le mari et la femme moururent, laissant un fils, Mathurin Tabary, mineur. Celui-ci décéda à son tour. Jean Griffier, son héritier, n’accepta la succession que sous bénéfice d’inventaire. Le litige en faisait partie, et le Parlement fut appelé à se prononcer en appel. Les parties convinrent alors de régler le différend, sans attendre l’arrêt définitif. Les arrérages s’élevant à une somme assez ronde, Griffier jugea de son intérêt d’abandonner tous ses droits à la succession à Jean du Plessis et à sa femme, qui en échange lui donnèrent quittance de ce qu’ils prétendaient leur être dû. Cet accord fut homologué au Parlement, le 9 décembre 1396 (X1c 72).

Dans un aveu rendu, le 10 janvier 1402, au duc de Berry, comte de Poitou, par Jean Brechou, de sa terre du Puiset, relevant du château et de la châtellenie de Fontenay-le-Comte, on trouve que Jean du Plessis, à cause de sa femme « Jeanne Guynere », tenait en fief dudit Brechou diverses terres, terrages, complants, prés, bois, cens et autres droits, d’une valeur de trente livres de rente annuelle environ. (Copie du Grand-Gauthier aux Arch. nat., R1* 2172, p. 1074.)

, chevalier, le jour de feste saint Marc l’ewangeliste derrenierement passée, aloient de la Rooliere au dit lieu de Corp, eulz en leur chemin trouverent Pierre Surre

Ou Suire. Il est nommé Pierre Suyre dans de nouvelles lettres de rémission que Pierre Chapereau obtint pour ce meurtre, au mois de janvier 1396 n.s. (JJ. 149, n° 39, fol. 15 v°), ce qui donne à supposer que les présentes ne furent pas entérinées.

en la terre du dit chevalier, c’est assavoir ou fief de la Chaume appartenant au dit chevalier à cause de Jehanne Guinere, sa femme, pour raison du doaire d’elle, et pour ce que le dit Pierre Surre, sanz congié ou consentement du dit chevalier, en ycelle terre et fief avoit cueilli et emblé certains biens et choses du dit chevalier, appellez ajoons, selon le langage du pays, — ajons sont defenduz de cuillir et prendre sanz licence de cellui à qui il appartient, — et yceulz ajons avoit mis sur une jument et sur une mule qui d’icellui Pierre Surre estoient, pour les porter ou mener en son hostel, assiz aux Motes en la parroisse de Buigné, en commettant

Le texte porte par erreur « en commençant ».

roberie et larrecin, en grant offense ou prejudice du dit chevalier, ou dit nom, et de sa justice. Et pour ce les diz exposans, en usant du droit dudit chevalier, ou dit nom, firent commandement au dit Pierre Surre que il au lieu de la Forestiere

La Forestière ou la Foresterie était, suivant les lettres de janvier 1396, la résidence ordinaire de Jean du Plessis. On ne trouve point dans ces parages de localité ainsi nommée, ni sur la carte de Cassini, ni sur celle de l’État-major. Il semble, d’après la situation des autres lieux cités dans cet acte, qu’elle devait exister entre Corps et Sainte-Gemme-la-Plaine, près de la forêt de Sainte-Gemme.

, duquel estoit et est mouvant le dit fief de la Chaume, rendist son corps et ycelles deux bestes ainsi chargées d’iceulz ajons ; mais le dit Pierre Surre moult arrogamment respondi que riens n’en feroit, et que au dit commandement ne obbeyroit, ainçois dist que, en despit d’iceulz exposans, il en son dit hostel menroit yceulz ajons et bestes. Lesquelx exposanz firent commandement, de par le dit chevalier, au dit Pierre Surre que il baillast gaige en signe dudit meffait, pour en ester à jugement en la court du dit chevalier, et en recevoir telle paine ou punicion comme au cas appartendroit ; ce que ne volt faire le dit Pierre, qui respondi moult fierement que jà ilz n’en auroient gaige et que il n’obbeyroit point à la court dudit chevalier ; et de ce non content, s’adreça vers le dit Pierre Chapereau et de felon couraige, sanz cause, lui couru sus, et en lui disant ces paroles ou semblables : « Puis que tu demandes gaige, tu l’auraz », le dit Pierre Surre d’une fourche de boys de deux denz, qu’il tenoit, feri en la teste le dit Pierre Chapereau, à plaie et à effusion de sanc, et telement que à pou que le dit Pierre Chapereau ne chey à terre. Et pour ce que le dit Pierre Surre perseveroit en la dicte voye de fait, le dit Jehan Chapereau, doubtant que par les mains du dit Pierre Surre ycellui Pierre Chapereau, son frere, ne feust mis à mort ou corporelment dommaigiez, se mist près du dit Pierre Surre, et pour eschever le peril là où il mettoit le dit Pierre Chapereau, osta au dit Pierre la dicte fourche et, pour la douleur et couroux qu’il avoit de la bature et navreure ainsi sanz cause faicte à son dit frere, il meu d’amour fraternel et de chaude cole, fery un seul cop sur la teste le dit Pierre Surre, qui de ce cop ne chey pas. Et après ce les diz exposans, en usant de leurs offices et si comme faire pooient, prindrent ycelles deux bestes, chargiées comme dit est, et les menerent ou envoierent au dit lieu de la Forestiere, et en y faisant leur chemin, le dit Surre les suy bien longuement, et en les suyant, ycellui Pierre chey à terre, si comme l’en dit, et illeuc demoura toute la nuyt, en laquelle fist grant froit, et landemain environ heure de tierce, le dit Surre ala de vie à trespassement. Pour occasion des quelles choses, l’en a voulu proceder contre eulz criminelment, pour ce que l’en maintient qu’il ont esté en cause et occasion de la mort dudit Surre, combien que autre bature ou injure de fait n’y ait esté par eulz faicte que dessus ont confessé et confessent, c’est assavoir d’avoir feru un seul cop le dit Surre, par la maniere que dit est ; de et sur lequel fait avenu sanz fait appensé et sanz hayne precedent de la partie de diz exposans, ilz sont en bonne paix et acord avec partie bleciée, qui s’est tenue et tient pour contente des diz exposans, qui en touz leurs autres faiz ont esté et sont de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sanz avoir esté convaincuz, condempnez ne actains d’autre meffait, si comme ilz dient, en nous humblement suppliant sur ce eslargir nostre grace. Nous adecertes, pour consideracion de ce que dit est, aux diz exposans ou cas dessus dit, avons remis, quictié et pardonné de grace especial, remettons, quictons et pardonnons le dit fait, avec toute paine, amende et offence corporele, criminele et civile, que pour ce ilz pevent avoir encouru envers nous, et satisfait premierement et avant toute euvre à partie bleciée, se fait n’est, les restituons au pays, à leur bonne renommée et à leurs biens. Si donnons en mandement au seneschal de Xantonge, gouverneur de la Rochelle, et à touz noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que les diz exposans facent joir et user paisiblement de nostre presente grace, sanz les molester au contraire, en corps ne en biens. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touz jours, nous avons fait mettre à ces presentes nostre seel ordonné en l’absence du grant. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, ou moys de mars l’an de grace mil ccc. iiiixx et cinq, et de nostre regne le siziesme.

Par le conseil. Henry. — Cornet.

DCXCVII Mars 1386

Rémission accordée à Jean Petitbon, marchand colporteur de Poitiers, qui, fait prisonnier par les Anglais à Verteuil et mis à rançon, leur avait au lieu d’argent livré des marchandises.

AN JJ. 128, n° 138, fol. 80 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 290-293

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie de Jehan Petit Bon, de la ville de Rouffet, que, ou temps que les Anglois et autres noz ennemiz tenoient occupé le chastel ou fort de Vertueil

Verteuil était tombé au pouvoir des Anglais en 1383, et resta un peu plus de deux ans entre leurs mains. Par un acte de 1385, malheureusement sans indication de mois, Geoffroy de la Roche (Geoffroy III de la Rochefoucauld, seigneur de Verteuil et de Barbezieux ; voy. le P. Anselme, Hist. généal., t. IV, page 447), dépossédé de son principal château et ayant appris qu’il était question de le racheter aux ennemis qui l’occupaient depuis deux ans, fit valoir ses droits et obtint du roi la promesse qu’il lui serait rendu, dans le cas où l’on donnerait suite au projet (JJ. 126, n° 200, fol. 130 v°). Du reste Verteuil ne fut pas replacé sous l’autorité de Charles VI au moyen d’une composition pécuniaire, mais repris de vive force par le duc de Bourbon, pendant la campagne qu’il dirigea en Saintonge et en Angoumois, au milieu de l’année 1385, c’est-à-dire peu de mois après la promesse faite à Geoffroy de la Rochefoucauld. C’était une place très forte, qu’on ne put réduire qu’après un siège de plus de trois semaines, où l’art des mines parait avoir joué le principal rôle. Cet épisode est relaté avec quelque développement par Froissart (édit. Kervyn de Lettenhove, t. X, p. 317 et 375), et par Cabaret d’Orville avec une grande abondance et des détails parfois romanesques, tel que le combat singulier du duc de Bourbon contre Renaud de Montferrand, dans la mine même (Chronique du bon duc Loys de Bourbon, édit. Chazaud, p. 144-152), reproduit par Thibaudeau dans son Histoire du Poitou. Pour le reste, les deux chroniqueurs sont d’accord ; ils s’entendent spécialement pour dire que le duc de Bourbon n’aurait consenti à aucun prix à lever le siège de Verteuil, et qu’il avait formellement promis au duc de Berry, en le quittant, de s’emparer de cette forteresse, dont la garnison venait courir souvent à Couhé et jusque sous les murs de Poitiers, dévastant tout le pays. Des lettres du duc de Bourbon, expédiées pendant cette chevauchée (publ. ci-dessous n° DCCXXXIII), sont datées de Ruffec, le 30 juillet 1385. On serait tenté de croire que c’est à ce moment qu’eut lieu le siège de Verteuil. Cependant il n’en est rien. Froissart et Cabaret d’Orville le présentent tous deux comme la dernière opération de la campagne, et nous avons à produire un témoignage encore plus décisif. Une commission du duc de Bourbon, relative au droit de barrage de Niort, porte cette date : « Donné en nostre ost et siege devant Verteuil, le 28 septembre 1385 ». Il n’y a donc aucun doute à avoir ; la capitulation de Verteuil eut lieu dans les premiers jours d’octobre. Froissart ajoute (loc. cit.) qu’une fois la ville prise, l’armée alla se rafraîchir à Charroux, assertion qui se trouve de même vérifiée par la date des lettres de rémission expédiées par le duc de Bourbon à Charroux, en novembre 1385, dont nous avons donné un fragment ci-dessus (p. 254, note 2).

, le dit exposant, garni de aguillettes, peaulx de megeys, toilles et autres menues denrées, que il de Poitiers portoit sur son col en la ville de Rouffet pour les revendre, fu entre Poitiers et Rouffet pris, puis un an ença, par yceulx Anglois ou autres noz ennemis, et par eulz il avec ce que dit est fu menez prisonnier ou dit chastel de Vertueil, ou quel il a esté detenu prisonnier ès fers par l’espace de trois mois ou environ, et par ceulz qui ainsi le tenoient fu miz à vint frans de raençon, et de la dicte prison il, à la caucion du Basquin de Gaillart, son pleige, fu eslargy, recreu ou delivrez, et pour soy acquitter de sa dicte raencon, ycellui exposant porta aux diz Anglois ou autres noz ennemis ou dit chastel de Vertueil cent livres de chandeilles de suif ou environ, sept douzenez d’aguillettes, xxiiii. peaulx rouges de chevrotins et xvi. aulnes de toille, autrement le dit exposant qui est un petit marchant de telles menues denrées et de petites facultez, n’eust peu acquicter soy de sa dicte raençon, et autre confort ou ayde n’a fait ycellui exposant à noz diz ennemis d’icellui chastel, et autre crime ou offense n’y a commis. Pour occasion des quelles choses, le dit exposant, à l’instigacion d’aucuns ses hayneux ou autrement a esté pris et emprisonnez au dit lieu de Poitiers, ès prisons de nostre très chier oncle le duc de Berry et d’Auvergne, conte de Poitou, là ou il a longuement esté et encores est detenuz à grant misere ; en laquelle prison il a confessié avoir porté à noz diz ennemis d’icellui chastel de Vertueil les choses dessus declairées pour sa dicte raençon, et non autrement, ou quel il eust esté mort, si comme il dit, en nous humblement suppliant, comme il qui est chargié de femme et de troiz petiz enfanz, en touz ses autres faiz ait esté et soit homme de bonne vie, renommée et honneste conversacion, et ou fait d’un pou de marchandise que il a acoustumé mener et exercer pour avoir la sustentacion de lui, de sa dicte femme et de ses diz enfanz, il se soit loyaulment portez, sanz avoir esté convaincuz, condempnez ne actaint d’autre meffait, et ce qu’il a fait en ceste partie il l’a fait pour la raençon et delivrance de sa personne, nous sur ce lui vueillons eslargir nostre grace, mesmement que par le fait de noz ennemiz et pour occasion des guerres il a moult perdu et est moult diminuez de sa chevance. Nous, pour consideracion de ce que dit est et de la longue et dure prison que le dit exposant a pour ce souffert, au dit exposant en ce cas avons remis, quictié et pardonné de grace especial, remettons, quictons et pardonnons le dit fait, avec toute peine, amende et offense corporele, criminele et civile, que pour ce yl peut avoir encouru envers nous, et le restituons au pays, à sa bonne renommée et à ses biens non confisquez. Si donnons en mandement au seneschal d’Angoulesme et à touz noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que le dit exposant facent joir et user de nostre presente grace, sanz le molester ne empeschier au contraire, en corps ne ès diz biens, mais, se son corps ou aucuns d’iceulz biens estoient pour ce pris ou empeschiez, les lui mettent ou facent mettre à plaine delivrance, en contraignant ou faisant à ce contraindre ceulz qui à contraindre y feront, par toutes voyes et manieres deues. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touzjours, nous avons fait mettre à ces presentes nostre seel ordonné en l’absence du grant. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, ou mois de mars l’an de grace mil ccc. iiiixx et cinq, et de nostre regne le siziesme.

Par le conseil. Henry. — Barreau.

DCXCVIII Mars 1386

Rémission accordée à André Coquet pour le meurtre de Perrotin Sergent, fils du receveur de Frontenay-l’Abattu pour le vicomte de Thouars.

AN JJ. 128, n° 146, fol. 83 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 293-295

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie de la femme, enfans et des amis charnelz de Andry Coiquet que, le dimenche après la Chandeleur derrenierement passée, le dit Andry estant en la ville de Fontenay l’Abatu, ou païs de Xantonge, en l’une des rues d’icelle ville, un appellé Perrotin Sergent, filz de Guillaume Sergent, receveur au dit lieu pour le viconte de Touart, vint vers le dit Andry, et lui dist qu’il lui baillast certain argent qu’il disoit qu’il devoit à son dit pere de certaine taillée ; lequel Andry lui respondi que à ycellui Perrotin il ne devoit riens et que, quant ilz avoient compté ensemble lui et son pere, qu’il lui baillerent bonne quictance, et que, se aucune chose lui devoit, qu’il le paieroit voulentiers ; et lors le dit Perrotin lui dist que, se il ne lui bailloit le dit argent qu’il lui demandoit, qu’il mettroit l’uys de sa maison du travers. Et lors se murent paroles contentieuses entr’eulx et tant que le dit Perrotin, esmeuz de couroux et de son oultrage, saicha une dague qu’il avoit pour en vouloir fraper le dit Andri, et le dit Andri, qui est un simples homs, quant il le vit couroucié et esmeu, s’en fouy tant comme il pot en son hostel, et le dit Perrotin s’en fouy après lui au plus fort qu’il peut, tenant sa dague en sa main toute nue et faisant semblant de le vouloir tuer. Et quant le dit Andry fu dedens son hostel, pour vouloir sauver sa vie à son povoir, cloy appertement son huys à l’encontre du dit Perrotin, et le dit Perrotin en reculant ou pour le branle de l’uys, ou autrement, le dit Andri ne scet pas bien comment, ycellui Perrotin se frappa lui meismes ou hurta de sa dicte dague parmi l’ueil, dont d’icellui coup mort s’en ensuy le landemain en la personne d’icellui Perrotin. Pour lequel fait et pour doubte de rigueur de justice, le dit Andri qui est simples homs, non rioteux, et vivans de son labour, s’est absentez du dit païs, et sont ses biens pris et mis en main de justice, et n’y oseroit retourner, se de nostre grace sur ce [n’estoit] secouruz, requerant humblement ycelle, mesmement que le dit Andry a esté toute sa vie homme de bonne vie, renommée et conversacion honneste, sanz ce qu’il feust onques mais repris d’aucun autre villain blasme, si comme dient ses diz amis. Nous adecertes, attendues les choses dessus dictes, voulans rigueur de justice estre temperée et moderée par pitié et misericorde, avons au dit Andri, ou cas dessus dit, de nostre auctorité royal et grace especial, le dit fait remis, quicté et pardonné, et par ces presentes remettons, quictons et pardonnons, avec toute peine et offense corporelle, criminelle et civile, en quoy il puet estre encouruz pour occasion des choses dessus dictes, et le restituons à sa bonne fame et renommée, au païs et à ses biens non confisquez, satisfaction faicte à partie tout premiers, civilement tant seulement. Donnans en mandement par ces lettres au seneschal de Xantonge, gouverneur de la Rochelle et à touz noz autres justiciers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission laissent, seuffrent et facent joir et user plainement et paisiblement le dit Andry, sanz le traveiller ne molester, ne souffrir estre molesté ne traveillié doresenavant, en aucune maniere au contraire, et ses biens pour ce prins et empeschiez li facent sanz delay mettre à plaine delivrance. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre à ces lettres nostre seel ordonné en l’absence du grant. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou moys de mars l’an de grace mil ccc. iiiixx et cinq, et le vie de nostre regne.

Par le conseil. P. Houdoyer. — Barreau.

DCXCIX Mars 1386

Rémission accordée à Guillaume Bienlevaut pour un meurtre commis à Sainte-Néomaye, sur la personne d’André Cormullot.

AN JJ. 128, n° 161, fol. 92 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 295-297

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Guillaume Bien le vault, chargié de femme et d’enfans, contenant comme, environ les Brandons

Le premier dimanche de Carême, jour des Brandons, tomba cette année-là le 9 février.

derrenierement passez, il feust en la ville de Saint Omainne, en laquelle estoit Andrieu Cormullot, qui par pluseurs fois avoit dictes du dit suppliant et de sa femme pluseurs paroles injurieuses qui grandement touchoient le deshonneur du dit suppliant et de sa dicte femme, auquel Andrieu le dit suppliant dist qu’il faisoit mal de le injurier et vilener, ne aussi sa dicte femme, et qu’il s’en pouroit bien repentir ; lequel Andrieu perseverant en son mauvaiz propos, pour touz jours injurier le dit suppliant et sa dicte femme, dist et repeta de rechief au dit suppliant les dictes injures et vilennies, tenant en sa main un baston dont il cuida ferir ycellui suppliant, et lui meu et couroucé des dictes injures, prist une pierre et la rua au dit Andrieu et l’en assena en la teste tellement qu’il chey à terre. Et ce fait, le dit Andrieu se releva et voult ferir le dit suppliant, mais ycellui suppliant lui donna d’une espée sur la teste et lui osta son baston dont il le bati tellement que, dedans brief temps, il ala de vie à trespassement. Pour lequel fait et mort, le dit suppliant doubtant rigueur de justice, s’est absenté du pays, et n’y oseroit retourner, sanz avoir sur ce nostre grace et misericorde, implorans icelle. Pour ce est il que nous, ces choses considerées et que en touz autres cas le dit suppliant a esté reputé homme de bonne vie et renommée, et de honneste conversacion, sanz avoir esté actaint d’aucun autre villain cas, attendu aussi que le dit Andrieu estoit homme de mauvaise conversacion, rioteux et plain de mauvaises paroles, et pour contemplacion des bons et aggreables services que nous a faiz en noz guerres et autrement le dit suppliant, ou temps passé, et esperons qu’il face ou temps avenir, à ycellui suppliant le dit fait et mort ou cas dessus dit, et toute peinne, amende et offense corporele, criminele et civile, qu’il peut pour ce avoir encouru envers nous, et le ban, s’aucun s’en est ensuy, lui avons quictié, remis et pardonné, et de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, quictons, remettons et pardonnons, et le restituons à sa bonne fame et renommée, au pays et à ses biens non confisquez, satisfacion faicte à partie, avant toute euvre, se faite n’est, et imposons à nostre procureur sur ce perpetuel silence. Si donnons en mandement au gouverneur du bailliage de Touraine, et à touz noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, seuffrent et laissent plainnement et paisiblement joir et user le dit suppliant, sanz lui donner ou souffrir estre donné, ores ne ou temps avenir, aucun empeschement ou destourbier, mais s’aucuns de ses biens estoient pour ce pris, saisiz ou arrestez, lui mettent ou facent mettre avec son corps, se pour ce estoit detenu prisonnier, tantost et sanz delay, à pleine delivrance. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touz jours mais, nous avons fait mettre à ces presentes nostre seel. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Hedin, ou mois de mars l’an de grace mil ccc. iiiixx et cinq, et de nostre regne le siziesme.

Par le roy, à la relacion de monseigneur le duc de Bourgogne. K. de Templo.

DCC Avril 1386

Rémission accordée à Guillaume Chabot, clerc non marié, pour des excès commis avec Michel Pain, prêtre, et plusieurs autres jeunes hommes, au domicile et au préjudice de Pierre Pain, prêtre, frère dudit Michel, au faubourg Saint-Mesme de Chinon, en récompense des services rendus au roi par ledit Chabot, qui a « bien et loyaulment servi en noz guerres de Flandres, en la compaignie et soubz le gouvernement de nostre amé et feal chevalier et chambellain, Guy de La Trémoïlle, sire de Suly. » Paris, avril 1386.

AN JJ. 128, n° 242, fol. 138 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 297-298

DCCI Juin 1386

Rémission, sauf amende et emprisonnement d’un mois, et pèlerinage à Notre-Dame du Puy, accordée à Hardouin de la Porte, écuyer, qui avait escaladé les murs du prieuré de Tourtenay, en avait enlevé et violé la clavière, nommée Guillemette Chrétien, et avait commis d’autres méfaits de même nature.

AN JJ. 129, n° 20, fol. 12 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 298-301

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie des amis charnelz de Hardoyn de la Porte, escuier de la terre et seigneurie de Monstereul Bellay, que le dit Hardoyn de l’aage de xx. ans ou environ, acompaignié d’aucunes personnes, environ la feste de Noel derrenierement passée, se transporta devant le priouré de Tourtenay prez du dit Monstereul, et par dessus les murs d’icellui priouré entra en icellui et ala jusques à l’entrée dela chambre du prieur d’icellui priouré, en intencion d’avoir Guillemette Chrestianne, clavierre en ycellui priouré, la quelle Guillemette yssy hors de la dicte chambre d’icellui prieur et monta en un degré ; et si tost comme le dit Hardoyn oy marchier la dicte Guillemette, ycellui Hardoyn la poursuy le plus tost qu’il pot, et en faisant ceste poursuite, le dit Hardoyn par ycellui prieur et par un sien compaignon, ou autre homme avec lui, fu pris et jecté à terre, et lesquelz prieur et son compaignon ou homme osterent en ce moment au dit Hardoyn s’espée et sa dague, et ce fait le dit prieur fist fermer une porte qui estoit devant la grant sale du dit priouré, afin que ceulz de la compaignie du dit Hardoyn, ne survenissent illec pour ycellui Hardoyn secourre, mais ceulz de la compaignie du dit Hardoin alerent à la dicte porte et en partie ycelle rompirent et firent tant que par force ilz entrerent dedans, et la dicte Guillemette par force prindrent et avec eulz menerent icelle Guillemette, laquelle ycellui Hardoyn tint avec soy par l’espace de trois jours, et icelle par force congnut charnellement. Et pour ce que le dit prieur detenoit ycelles espée et dague du dit Hardoyn, ycellui Hardoyn et ceulx de sa dicte compaignie prindrent un mantel, deux barrettes, un goufort

Gouffourt ou plus ordinairement coufort, bâton ferré, javeline.

, une paire d’esperons et trois connilz du dit prieur, lesquelz ilz rendirent si tost comme les dictes espée et dague leur furent restituées. Et oultre ce, environ la feste de la Chandelleur derreniere passée, et Caresme prenant après ensuivant, le dit Hardoyn et aucuns de sa compaignie alerent en la parroisse de Nueil sur Passavant, en l’ostel de feu Jehan Charrier, entrerent ou dit hostel et y prindrent Thomasse, femme de Aimery Chaillou, fille de la deguerpie du dit Charrier, pour icelle par force (sic) et mener avec eulz, et pour ce que elles le contredirent, ilz leur donnerent pluseurs bufes de paulmes et un cop de baston, et par force emmenerent avec eulz la dicte Thomasse et la congnurent charnelment. Lesquelles Guillemette et Thomasse, diffamées et abandonnées à pluseurs hommes, en tant que leurs maris pour ce, longtemps paravant ce, les avoient laissiées pour cause des mauvaiz precedens faiz d’elles, ont esté depuis ce devant les juges et officiers au dit Monstereul, pour nostre amé et feal cousin et chambellain Guillaume, viconte de Meleun

Guillaume IV comte de Tancarville, vicomte de Melun, seigneur de Montreuil-Bellay, fils de Jean II, mort en 1382. Il fut premier chambellan du roi Charles VI, connétable et chambellan héréditaire de Normandie, grand bouteiller de France, etc. Par contrat du 21 janvier 1390, il épousa Jeanne de Parthenay, dame de Semblançay, fille de Guillaume VII Larchevêque, seigneur de Parthenay, et de Jeanne de Mathefelon, dont il n’eut qu’une fille, mariée à Jacques d’Harcourt, baron de Montgommery. Il fut tué à la bataille d’Azincourt (1415). (Voy. le P. Anselme, Hist. généal., t. V, p. 227, et t. VIII, p. 553).

et seigneur du dit Monstereul, et en jugement ont dit et declairié que aucune chose pour les diz cas criminelment, civilement ou autrement, ne vouloient ne ne veulent demander au dit Hardoyn, adonc et à present detenu ès prisons de nostre dit cousin et chambellain, et en ont esté jugiés par les diz juges ou officiers sanz appel ou reclam ; ès quelles prisons longuement à grant povreté et misere a esté detenu le dit Hardoyn, qui ces cas ou crimes pluz par jeunesce que autrement a commiz, et loyalment nous a servi en noz guerres, ès parties de Poitou et de Xaintonge, en la compaignie du seigneur de Tors

Renaud de Vivonne sire de Tors, sénéchal de Poitou, prit part aux expéditions du duc de Bourbon en 1385 et du maréchal de Sancerre en 1386-1387 en Saintonge, Angoumois et Limousin. (Voy. ci-dessus, p. 266 note.)

, et aussi a il servy ès parties d’Ytalie nostre oncle le roy de Jherusalem et de Sezille derrenierement trespassé

Louis Ier de France, comte de Provence, duc d’Anjou et du Maine, roi de Sicile et de Jérusalem, né à Vincennes, le 23 juillet 1339, mort à Biseglia près Bari, au royaume de Naples, le 20 septembre 1384.

, si comme il dit, en nous humblement suppliant, comme le dit Hardoyn, qui est noble et bien enlignagiez, ait [esté] et soit en ses autres faiz de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sanz avoir esté convaincu, condempnez ne actaint d’autre meffait, nous sur ce lui veillions eslargir nostre grace. Nous adecertes, pour consideracion de ce que dit est, au dit Hardoyn ou cas dessus dit, toute peine, amende et offense corporelle et criminelle, que pour cause et occasion des faiz et cas dessus diz, il puet avoir envers nous encouru, avons mué de grace especial et muons en paine et amende civile, et satisfait premierement et avant tout euvre à partie bleciée, se faicte n’est, le restituons au païs, à sa bonne renommée et à ses biens, ycelle peine et amende premierement sur ce prise, parmi ce que le dit Hardoyn sera detenu prisonnier au pain et à l’eaue par l’espace d’un moys continuel. Et après ce que miz sera hors de prison, tenuz sera aler et yra en pelerinage à l’eglise de Nostre Dame du Puy en Auvergne, et de ce sera tenu rapporter et rapportera certifficacion à cellui de noz juges ou son lieutenant, qui congnoistre devra de la verification et execucion de ces presentes. Si donnons en mandement au gouverneur du bailliage de Touraine, et à touz noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit Hardoyn facent et seuffrent joir de nostre presente grace, sanz le molester ne souffrir estre molestez au contraire, et son corps et ses biens pour ce pris, saisiz ou empeschiés, lui mettent ou facent mettre à plaine delivrance, soubz la condicion dessus dicte. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou moys de juing l’an de grace mil ccc. iiiixx et six, et de nostre regne le siziesme.

Pour le roy, à la relation du conseil. Henry.

DCCII Août 1386

Rémission accordée à Étienne de la Grève, coupable d’homicide sur la personne de Nicolas Barré, en défendant son frère.

AN JJ. 129, n° 134, fol. 85 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 301-304

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté signifié de la partie de Estienne de la Greve, povre laboureur que, le dimenche prouchain après la feste de l’Ascension derrenierement passée

Le 3 juin 1386.

, environ heure de vespres, Perrot Barré et Jean de la Greve, son fillastre, frere germain du dit signifiant, orent riote ensemble de paroles injurieuses ou village de Flaviere en la parroisse de Vairré, et assez tost après Nicolas Barré, frere germain du dit Perrot Barré prist riote de paroles injurieuses avecques le dit Jehan de la Greve, lequel Nicolas en procedant par voie de fait prist le dit Jehan de la Greve par le col et par la chevessaille, en le tirant, boutant et malmenant rigoreusement et par grant ire, et en ce faisant le dit Perrot Barré et Guillaume Barré leur pere, meu de mauvaise voulenté, courrurent sus au dit Jehan de la Greve, et de fait le prisdrent par le col et par la chevessaille, et en le poussant, boutant et injurieusement malmenant, telement que les genz à ce presens se misrent en paine de les desmeler et separer à leur pooir, lequel Jehan de la Greve soy veant oppressé, comme dit est, apperçut le dit signifiant et à haulte voix lui escria que il lui aidast à soy rescourre des mains et de la puissance des dessus nommez pere et freres, qui ainsi le mal traictoyent, en disant au dit signifiant ces paroles ou semblables en substance : « Ha, mon frere, me lairez vous yci morir ? » Et adonc le dit signifiant, meu de pitié et d’amour fraternel, veant le dit Jehan de la Greve son frere ainsy oppressé, ala vers les diz Guillaume, Perrot et Nicolas dis (sic) Barré, pour rescoure de leurs mains le dit Jehan de la Greve, son frere, doubtant que il ne meissent à mort le dit Jehan de la Greve, son frere, et pour ce que il ne le vouldrent legierement ou tost laissier, le dit signifiant veant le dit Jehan son frere en peril et doubtant que il ne feust mis à mort par les iii. dessus nommez ou aucuns, sacha un petit coustel appellé badelaire, dont d’aventure il feri un seul coup le dit Nicolas Barré sur la teste jusques au sang ; et tantost après le dit cop, ycellui Nicolas se parti de la place et s’en ala à l’ostel du dit Perrot Barré, son frere, ou quel hostel Jehan Garin, habitant du dit vilage de la Flaviere, voult regarder la plaie du dit Nicolas, pour le estanchier de le seignier et y faire à son pooir mieux que il pourroit, en priant au dit Nicolas que il se laissast regarder ou visiter et estanchier, maiz le dit Nicolas, mal meu et de felon courage, et aussi le dit Guillaume Barré, son pere, ne voudrent souffrir que l’en estanchast ne visitast le dit Nicolas Barré, ainçois le dit Nicolas Barré issy hors du dit hostel, et ainsi comme l’en lui disoit que il se laissast visiter et estanchier, ycellui Nicolas crioit à haulte voix qu’il n’en feroit riens et que il vouloit mourir, en disant : « Je meur par Estienne de la Greve. » Et après pluseurs paroles eues entre le dit Nicolas et son dit frere, d’une part, et le dit Jehan Garin et autres genz qui le amonnestoient de soy souffrir visiter et estanchier, d’autre, le dit Nicolas Barré en la compaignie de André Portegal, sergent de la Mote Achart, se parti du dit village de la Flaviere et ala ou village de la Roche Richart distant par deux lieues du dit village de la Flaviere, et au dit village de la Roche Richart se coucha, sanz soy faire regarder ne visiter ; et ileuc le dit Nicolas par son mauvais gouvernement moru dedens cinq jours après ou environ. Et le dit signifiant qui en touz ses autres faiz a esté de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sanz avoir esté convaincu, condempné ne actaint d’autre meffait, s’est absentez et se tient absent pour doubte de rigueur de justice, si comme il dit, en nous humblement suppliant comme ce fait soit avenu en chaude meslée et par la maniere que dit est, nous sur ce lui veillions eslargir nostre grace. Nous adecertes, pour consideracion de ce que dit est, au dit signifiant ou dit cas avons remis, quicté et pardonné de grace especial, remettons, quictons et pardonnons par ces presentes le dit fait, avec toute peine, amende et offense corporelle, criminelle et civile, que pour ce il puet avoir encouru envers nous, et satisfait premierement et avant tout euvre à partie bleciée, le restituons au païs, à sa bonne renommée, se pour ce est amenrie, et à ses biens non confisquez. Si donnons en mandement au seneschal de Xaintonge, gouverneur de la Rochelle, et à touz noz autres justiciers, ou à leurs lieux tenans, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit signifiant facent et seuffrent joir et user de nostre presente grace, sanz le molester au contraire, et ses biens et ses choses non confisquiez, pour ce pris, saisiz, arrestez, levez ou empeschiez, lui mettent ou facent mettre à plaine delivrance. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres [choses] nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou moys d’aoust l’an de grace mil ccc. iiiixx et six, et de nostre regne le vie.

Par le roy, à la relacion du conseil. Henry.

DCCIII Août 1386

Rémission accordée à Macé Du Pois pour sa participation au meurtre de Jean Gabory, commis dans une rixe au village de la Violière, paroisse du Falleron.

AN JJ. 129, n° 136, fol. 86 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 304-306

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, de la partie de Macé Du Poiz, povre simple homme de labour, nous avoir esté exposé comme, certain jour du mois de fevrier derrenier passé, à heure de soleil couchant ou environ, noise et discencion feussent meuz et commenciez ou village de la Violiere en la parroisse de Faleron, ou diocese de Lusson, entre feu Jehan Gabory, sa femme et enfans, d’une part, et Vincent Martin et sa femme, d’autre, en tant que d’une partie et d’autre fu crié « à la force », selon la coustume du pays, sur lequel cry le dit exposant qui est de la dicte parroisse et aucuns autres qui estoient venuz ensemble de leurs afaires besoingner, survindrent et ariverent d’aventure. Et lors le dit exposant dit au dit feu Gabory ces paroles ou assez semblables en substance, afin de le descoraiger de non perseverer en la dicte noise : « Larron, deporte toy, ou tu es en aventure de toy faire pendre, toy et les tiens, des riotes que tu meuves ». Et ce dit, pour ce qu’ilz estoient prestz et garniz d’un costé et d’autre de user de fait, lors la femme du dit feu Gabory dist à son dit feu mary qu’il preist le dit exposant par la gorge pour lui faire desdire les dictes paroles ; lequel feu Gabory, en acomplissant les paroles et la voulenté de sa dicte femme, vint au dit exposant et le print par la gorge. Et lors sa dicte femme et un leur filz ferirent le dit exposant, qui ne faisoit tant seulement que soy efforcier de eschaper, sur la teste et sur le corps de bastons qu’ilz tenoient, tellement qu’il chey à terre tout evanoy. Et adonc le laisserent yllec cheu à terre, et alerent courir sus au dit Vincent, lequel se mist tellement à deffense qu’il fery sur la teste, si comme l’en dit, le dit feu Jehan Gabory, tellement que dedens deux jours après ou environ, mort s’en ensuy en sa personne. Pour lequel fait, le dit exposant qui est simples homs de labour et qui avoit esté feru et batu par la teste et ailleurs tellement qu’il estoit cheu, et sanz ce qu’il eust feru le dit feu Gabory ne autre, ne fait autre chose que soy efforcier à eschapper de leurs mains, comme dit est, et qui a touz jours esté de bonne vie et honneste conversacion et renommée, sans avoir esté reprins ne diffamez d’aucun villain cas, s’est absentez du pays, doubtant rigueur de justice, et n’oseroit retourner en ycellui, se de nostre grace ne lui estoit sur ce pourveu, en nous suppliant humblement d’avoir ycelle. Nous ces choses considerées, au dit suppliant qui a satisfait à partie, si comme il dit, avons remis, quictié et pardonné, en tant que mestier lui en est, et par ces presentes ou cas dessus dit quictons, remettons et pardonnons tout le fait dessus dit, avecques toute paine, amende et offense criminele, corporele et civile, en quoy il puet estre encouru envers nous, à cause de ce, et le restituons à sa bonne fame, renommée, au pays et à ses biens quelxconques, satisfaction faicte à partie premierement et avant toute euvre civilement, se faite n’est. Si donnons en mandement aux gouverneurs du bailliage de Touraine et de la Rochelle, et à touz noz autres justiciers et officiers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace, remission et quictance facent, seuffrent et laissent joir et user paisiblement le dit Macé Du Poiz, exposant dessus dit, sanz le molester ou empeschier, ne souffrir estre molesté ou empeschié en corps ne en biens, de present ne pour le temps avenir, en aucune maniere au contraire. Et que ce soit ferme chose et estable à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, ou moys d’aoust l’an de grace mil ccc. iiiixx et six, et de nostre regne le siziesme.

Par le conseil. M. Massuel. — Barreau.

DCCIV Septembre 1386

Lettres accordant au sire de Liniers

Sans doute Pierre ou Perrot, sire de Liniers. (Voy. ci-dessus, p. 77, note 5.)

la création en sa ville de la Cellette

Ce lieu paraît être la Cellette, canton de Châtelus-Malvaleix, arrondissement de Boussac (Creuse), et cependant le mandement est adressé au bailli de Saint-Pierre-le-Moutier.

d’un marché chaque semaine et de quatre foires par an, le mardi avant la Chandeleur, le mardi avant l’Annonciation, le mardi avant la Toussaint et le mardi avant Noël, du consentement du sire de Châteauroux, vicomte de Brosse

Guy de Chauvigny, baron de Châteauroux, vicomte de Brosse. (Voy. le vol. précédent, p. 45 note, 93 note, 113 n., et ci-dessus, p. 130.)

, et du sire de Sainte-Sévère et de Boussac

Louis II de Brosse, seigneur de Boussac et de Sainte-Sévère, fils de Louis Ier sr de Boussac, tué à la bataille de Poitiers, et de Constance de la Tour-d’Auvergne, sa seconde femme. En 1388, le duc de Berry le retint dans son hôtel pour accompagner Charles VI au voyage d’Allemagne ; il suivit aussi le duc de Bourbon dans son expédition en Barbarie, et mourut au retour à Gênes, le 8 octobre 1390. (Voy. le P. Anselme, Hist. généal., t. V, p. 571.)

, « qui ont de leurs villes, terres et lieux près de la dicte ville de la Sellecte ». Arras, septembre 1386.

AN JJ. 129, n° 165, fol. 104 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 306

DCCV Octobre 1386

Confirmation des quatre foires annuelles et du marché hebdomadaire institués par le duc de Berry, comte de Poitou, à Vouillé, en faveur du chapitre de Sainte-Radégonde de Poitiers.

AN JJ. 131, n° 1, fol. 1 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 307-315

Karolus, Dei gracia Francorum rex. Notum facimus universis, presentibus pariterque futuris, nos litteras carissimi patrui nostri ducis Bituricensis et Alvernie, comitisque Pictavensis, in eisdem partibus nec non in tota lingua occitana et ducatu Acquitanie locumtenentis nostri, vidisse, formam que sequitur continentes :

Johannes, regis Francorum filius, dux Bituricensis et Alvernie, comes Pictavensis, et locumtenens domini mei regis in eisdem partibus. Universis presentes litteras inspecturis, salutem. Cum dudum emanatis à nobis litteris, quarum tenor sequitur in hec verba :

Jehan, filz de roy de France, duc de Berry et d’Auvergne, conte de Poitou, lieutenant de monseigneur le roy ès diz pays et pluseurs autres. Savoir faisons à tous, presens et avenir, que comme à l’umble supplicacion de noz chers et bien amez les prieur et chapitre de l’eglise de Sainte Ragonde de nostre cité de Poitiers, comme nous leur voulsissions donner licence et congié de avoir, faire et tenir en leur ville de Vouilhé près de nostre dicte cité de Poitiers, foires par quatre foiz chascun an à certains jours, à tousjours mais et perpetuelment, et semblablement un marchié à certain jour de chascune sepmaine, nous par noz autres lettres ouvertes eussions mandé et commis à noz bien amez Robert Aubourc

Le 12 mars 1364, Robin Aubourt, procureur de la commune de Poitiers, passa à Jean Massé le bail d’une maison où était le four de la commune, tout auprès du portail de la Tranchée, moyennant un cens annuel de 30 sous. (Arch. municip. de Poitiers, F. 40.) Vraisemblablement, c’est le même personnage que le Robert Aubourt, mentionné ici.

et Jehan Ymbert que, appellez ceulx qui feroient à appeller, ilz se enformassent bien et diligemment se le dit don et octroy, et les dictes foires et marchiez seroient ou estoient en prejudice de nous et de noz autres foires et marchiez voisins, et, la dicte informacion faicte par eulx, nous renvoiassent enclose soubz leurs seaulz, afin que, ycelle veue, nous peussions faire la dicte grace, don ou octroy aux dessus diz prieur et chapitre, si comme il appartiendroit et bon nous sembleroit, si comme plus à plain est contenu en noz lettres ouvertes dessus dictes, des quelles la teneur s’ensuit :

Jehan, filz de roy de France, duc de Berry et d’Auvergne, conte de Poitou, lieutenant de monseigneur le roy ès diz pays et ès pays de Xantonge et d’Angomois, et en pluseurs autres parties de son royaume. A nostre amé Robin Aubourc et Jehan Ymbert, salut. Comme noz chers et bien amez le prieur et chapitre de l’eglise de Sainte Ragonde de nostre cité de Poitiers, nous aient très humblement supplié qu’il nous pleust de nostre certaine science et grace especiale leur donner auctorité, congié et licence de avoir, tenir et faire tenir en leur ville de Vouilhé, près de nostre dicte cité de Poitiers, foires par quatre foiz chascun an à touz jours mais perpetuelment, c’est assavoir ès jours des festes de saint Jehan à la Porte latine, vi. jour de may, ou jour de feste de saint Mathié appostre, ou jour et feste de sainte Katherine, et ou jour et feste de la Convercion saint Pol appostre, et en semblablement un marchié, chascun jeudi de chascune sepmaine de l’an, nous vous mandons et, se mestier est, commettons que, appellez ceulx qui font à appeller, vous vous enformez bien et dilligemment se le dit octroy et les dictes foires et marchié seroient ou prejudice et dommage de nous et de noz autres foires et marchiez voisins, et la dicte informacion que fait aurez nous renvoyez enclouse soubz voz seaulz, afin que, ycelle veue, nous puissions faire la dicte grace aux dessus diz prieur et eglise, si comme il appartendra et bon nous semblera, appellé à ce nostre procureur de Poictou

Le scribe a écrit par distraction « Pontieu ».

. Donné en nostre ville de Poitiers, soubz nostre seel, le xxie jour de juing l’an de grace mil ccc. lxxv.

Que par vertu de noz dictes lettres ouvertes dessus transcriptes, les diz Robin Aubourc et Jehan Ymbert, selon le contenu de leur commission et de nostre mandement, firent et ont faicte la dicte informacion bien et dilligemment, et ycelle faicte par eulx comme dit est, et les deposicions de pluseurs personnes et tesmoings sur ce oys et examinez, contenuz en icelle informacion, nous aient et ont renvoyé enclouse soubz leurs seaulx bien et saigement, que du commandement de nostre amé et feal chevalier messire Pierre de Giac

Pierre de Giac, chevalier, originaire d’Auvergne, seigneur de Châteaugay, de Josserand et d’autres terres dans le comté de la Marche, fut d’abord conseiller et maître des requêtes de Jean de France, duc de Berry, en 1358, lorsqu’il n’était encore que comte de Poitiers. Ce prince le créa son chancelier en 1371, en remplacement de Guy de Malsec, évêque de Lodève. Le 2 février 1372 n.s., il reçut 232 livres pour 84 jours qu’il avait passés au service du duc ou en la compagnie d’Imbaut du Peschin (KK. 251, fol. 96). Ses gages sont notés chaque année dans ce registre et le suivant. En 1398, encore, Pierre de Giac figure sur les registres de comptes de l’hôtel du duc de Berry, avec le titre de conseiller de ce prince et des gages de huit francs par jour, outre sa pension ordinaire (KK. 253, fol. 8, etc., 41). Cette même année, au mois de juillet, il vendit au duc son hôtel de la Grange-aux-Merciers près Paris, sur les bords de la Seine, entre Saint-Antoine et Conflans (Charenton), avec les appartenances, tant à Paris qu’à Saint-Mandé, dont il s’était rendu adjudicataire en janvier 1388 n.s. (J. 187a, nos 17 et 18). Le 19 juillet 1383, il avait été élevé à la dignité de chancelier de France avec 2,500 livres de pension extraordinaire. En avril 1393, il soutenait au Parlement un procès contre Baudet de Vauvilliers (X1a 40, fol. 332). Son testament est daté du 25 février 1399 n.s. ; il y désigne pour exécuteurs le duc de Berry, Hugues de Magnac, évêque de Saint-Flour, Marguerite de Capendu, sa femme, Étienne d’Aventois, son neveu, Jean André, conseiller au Parlement, et Clément de Reillac, avocat du roi en la même cour. Il ne mourut qu’en 1407 et fut enterré dans l’église des Cordeliers de Riom. (Voy. le P. Anselme, Hist. généal., t. VI, p. 343.)

, nostre chancellier, fait de bouche par la relacion de nostre amé et feal secretaire, maistre Ascelin de Maches

Ascelin de Maches faisait déjà partie de l’hôtel du duc de Berry de 1370 à 1375. (Voy. les reg. de comptes KK 251-252, où son nom se trouve à plusieurs reprises.)

, noz amez et feaulx conseillers, maistre Jehan de Londres et Jehan Tavel

Jean de Londres et Jean Tavel ou Taveau appartenaient l’un et l’autre à des familles de Poitiers, dont plusieurs membres exercèrent des offices municipaux dans cette ville. Ils portaient le titre de conseillers du duc de Berry, en 1376, et comme tels furent nommés commissaires pour juger une plainte criminelle portée par Hélie Vigier et Marguerite Quentin contre Jean Chevalier, Jean Larcher, Jean et Pierre Chasteigner, etc. (Voy. le vol. précédent, p. 76 note.) Quant à Jean de Londres, nous avons mentionné aussi un accord qu’il conclut à Poitiers, le 6 novembre 1376, avec Renaud de Montléon, seigneur de Touffou, touchant l’hébergement de la Galicherie qu’il venait d’acquérir. (Ibid., p. 357 note.)

, ensemble avec eulx et ad ce appellé nostre amé et feal general procureur en nostre dit conté de Poitou, Estienne Gracien

Sur Étienne Gracien, voy. ci-dessus, p. 156 note.

, ouvrirent et ont ouverte la dicte informacion, et ycelle aient veue et examinée, et pour ceste cause se soient et sont assemblez par pluseurs foiz, et eu advis et deliberacion sur les choses contenues en la dicte informacion, et aient et ont les dessus diz noz conseillers et nostre dit procureur sur ce fait relacion et rescript par leurs lettres ouvertes, seellées de leurs seaulx, par la forme, maniere et teneur contenue en leurs dictes lettres ouvertes, desquelles la teneur s’ensuit :

A hon[norable] et discret seigneur, monseigneur le chancellier [de monseigneur le duc] de Berry et d’Auvergne, conte de Poitiers, les vostres touz Jehan de Londres, tresorier de Manigouste, et Jehan [Tavel], conseillers de nostre dit seigneur, et Estienne Gracien, procureur de nostre dit seigneur en son conté et ressort de Poitou, salut et reverence. Comme maistre Ascelin de Maches, secretaire de nostre dit seigneur, au departir que nostre dit seigneur le duc et vous feistes darrainement de ces parties, nous deist de par vous que, comme le chapitre et chanonnes de l’eglise de Sainte Radegonde de Poitiers, par vertu d’aucunes lettres octroyées de nostre dit seigneur le duc, adressées à Robin Aubourc et Jehan Ymbert, sur la supplicacion que les diz chapitre et chanonnes avoient faicte à nostre dit seigneur le duc, comme il leur voulsist octroyer et donner congié et licence de tenir et faire tenir quatre foires en l’an et un marchié chascune sepmaine, à un jour d’icelle, en la ville de Vouilhé, si comme plus à plain est contenu ès dictes lettres de nostre dit seigneur, yceulx Robin Aubourc et Jehan Ymbert eussent et aient faicte certaine informacion, appellé à ce le dit procureur de Poitou, savoir mon se nostre dit seigneur le duc ycelles foires et marchiez pourroit ne devoit octroyer ou non, nous veissions et examinissions la dicte informacion bien et diligemment, à la fin dessus dicte, et vous feissons savoir ce qu’il nous en sembleroit, afin que nostre dit seigneur le duc en peust ordener sa bonne voulenté. Plaise vous savoir, très chier seigneur, que nous, pour ceste cause, nous sommes assemblez une foiz et pluseurs et avons veue et examinée la dicte informacion, et que, ycelle veue et examinée diligemment, et eu advis sur ycelle, et consideré ce qu’il sembloit de considerer sur ce, avons regardé et nous est advis que nostre dit seigneur le duc, pour honneur de la benoicte dame madame saincte Radegonde, jadiz royne de France, qui est en sa ville de Poitiers, et que nous avons advisé que ce n’est point prejudice ne dommage à nostre dit seigneur, ne à aucun autre lieu voisin, et que le pays et les marchans d’icelli en vendront mieulx, que nostre dit seigneur, se il lui plaist, puet octroyer bonnement congié et licence aux diz chapitre et chanonnes de tenir et faire tenir quatre foires en chascun an, et ès jours contenuz en la supplicacion des diz chapitre et chanonnes, et un marchié au jour du vendredi. En tesmoing de ce, nous avons mis noz seaulx à ces presentes. Donné à Poitiers, le vie jour de decembre l’an mil ccc. lxxv.

Nous, enclinans à la dicte supplicacion des dessus diz prieur et chapitre, considerées les choses dessus dictes, ayans bonne et vraye devocion à la dicte benoite dame saincte Radegonde, de laquelle le benoit corps est en la dicte eglise de Saincte Radegonde et en nostre cité de Poitiers, et pour ce que ycelle benoicte dame prie pour nous, pour nostre très chiere et très amée compaigne la duchesse, pour tous noz enfanz et successeurs, et nous soit aidant envers nostre Seigneur Jhesu Crist, sa benoicte mere, la Vierge Marie, tous les sains et saintes de Paradiz et toute la court celestial, aux dessus diz prieur et chapitre de la dicte eglise de Sainte Radegonde, de nostre dicte cité de Poitiers, de l’auctorité royal à nous donnée, de la nostre, de nostre certaine science et grace especial, avons donné et octroyé, donnons et octroyons par la teneur de ces presentes, licence, congié, auctorité et puissance de avoir, faire et tenir chascun an, à touz jours mais et perpetuelment, en la dicte ville de Vouilhé iiii. foires, c’est assavoir au jour et feste de saint Jehan Porte latine, qui est le vie jour de may, au jour et feste de saint Mathieu, appostre, au jour et feste de saincte Katherine, et au jour et feste de la Convercion saint Pol

S. Matthieu, le 21 septembre, Sainte Catherine, le 25 novembre, et la Conversion de S. Paul, le 25 janvier.

, appostre, et semblablement un marchié chascun jour de vendredi de chascune sepmaine de l’an, et ycelles foires et marchié avons ordené et institué, ordenons et instituons par ces presentes estre tenues et celebrées ou dit lieu et ville de Vouilhé, à touz jours mais et perpetuelment chascun an, aux jours dessus diz, comme dit est. Et avons voulu et octroyé, voulons et octroyons, de noz dictes auctoritez, certaine science et grace especial, aux dessus diz prieur et chapitre que touz ceulx et celles qui yront, vendront et seront aux dessus dictes foires et marchié, joissent et usent entierement, paisiblement et à plain, perpetuelment et à touz jours mais, de touz et quelxconques previleges, immunitez, franchises, graces, usaiges, coustumes et libertez, des quelles usent et joissent, doivent et ont acoustumé de joir et user les autres foires et marchiez des lieux et villes voisines. Et mandons à touz les justiciers et subgiez de mon dit seigneur, de par mon dit seigneur, et aux nostres de par nous, ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulx, que les dessus diz prieur et chapitre laissent et facent joir et user de nostre presente grace et octroy ; et à yceulx deffendons expressement que, contre ycelle ne contre les dictes foires et marchié, ne viengnent ne seuffrent estre fait ne venir, ne yceulx prieur et chapitre, pour cause de ce, ne empeschent ne molestent, facent empescher ne molester, comme que ce soit, par aucuns en aucune maniere, presentement ne ou temps avenir, lettres empetrées ou à empetrer, ordenances, deffenses ou mandemens non obstant au contraire. Et que ce soit ferme chose et estable à touz jours mais, nous avons fait mettre nostre grant seel à ces presentes. Nostre droit sauf en autres choses et en toutes autres l’autruy. Donné à Paris, l’an de grace mil ccc. lxxvi, ou mois de fevrier. — Par monseigneur le duc et lieutenant, à la relacion de son conseil. Ascelin.

Collacion est faicte avec les originaulx lettres cy encorporées, par moy. Ascelin.

Nobis seu curie nostre suggestum fuerit informacionem, de qua in dictis litteris fit mencio, minus legitime factam fuisse, nos testes super hoc examinatos recoli seu iterum audiri, ipsosque et alios de novo, usque ad numerum quatuor decim hominum, mercatorum et aliorum fide dignorum, et in talibus noticiam habentium, per dilectos et fideles consiliarios nostros, magistros Johannem Corneti et Petrum Juilly

On retrouve le nom de Pierre Juilly, avec la qualité de conseiller du duc de Berry, au bas d’un acte du 17 décembre 1395, portant relief d’appel aux prochains Grands Jours du comté de Poitou, obtenu par la commune de Poitiers contre un jugement rendu par Étienne Gracien, assesseur du sénéchal de Poitou. (Arch. municip. de Poitiers, D. 11.)

, examinari mandavimus diligenter. Et quia per informacionem super hoc factam, vocato procuratore nostro, nobis per dictos nostros consiliarios transmissam, sub suis sigillis fideliter interclusam, nobis constitit et constat primos testes in prima informacione fuisse legitime examinatos, et in suis primis deposicionibus permansisse, ipsosque et alios secundos testes predictos deposuisse nullum nobis, seu alteri cuicunque, posse ex concessione nundinarum et mercati seu fori, de quibus in dictis litteris agitur, prejudicium generari, ymo magnum commodum et utilitatem nobis et toti patrie provenire, redditis sufficientibus et evidentibus racionibus de dictis et depositis eorumdem. Nos concessionem hujus modi nundinarum et mercati, auctoritate dicti domini mei (sic) regis et nostra, et de speciali gracia, si sit opus, suum validum effectum sortiri volumus, juxta litterarum suprascriptarum continenciam et tenorem. Qua propter senescallo nostro Pictavensi ceterisque justiciariis et officiariis nostris, et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, vel locatenentibus eorumdem, damus presentibus in mandatis quatinus priorem et capitulum ecclesie Beate Radegundis nominatos gratia, concessione, nundinis et mercato, de quibus fit mencio in litteris suprascriptis, uti et gaudere pacifice faciant et permittant, sine contradicione quacunque, et ipsos contra tenorem dictarum litterarum et presentium non molestent vel inquietent, seu faciant vel permittant aliqualiter molestari ; sed attemptata si que fuerint, ad statum pristinum et debitum reducant seu faciant indilate reduci. In cujus rei testimonium, sigillum nostrum hiis presentibus est appensum. Datum Bituris, die xiiim aprilis anno Domini m° ccc° octogesimo quinto.

Nos etenim litteras preinsertas omniaque et singula in eis contenta, eisdem attentis, ratas et gratas habentes in casu premisso, ipsas ratifficamus, laudamus, approbamus ac de speciali gracia et auctoritate nostra regia confirmamus, harum serie litterarum. Per quas mandamus universis et singulis justiciariis et officiariis nostris, aut eorum locatenentibus, presentibus et posteris, et ipsorum cuilibet, prout spectaverit ad eundem, quatinus priorem et capitulum seu canonicos antefate Sancte Radegondis ecclesie, necnon et ceteros ad quos pertinuerit, eorumque successores nostra presenti confirmacione et gracia uti et gaudere pacifice faciant et permittant, sine contradicione quacunque, non permittentes ipsos contra tenorem presentium aliqualiter molestari ; sed attemptata si que fuerint, ad statum primevum et debitum reducentes seu reduci facientes, absque mora. Et ut hec sub firma et stabili perpetuitate consistant, nostrum hiis presentibus juximus (sic) apponi sigillum. Nostro in reliquis et alieno in omnibus jure salvo. Datum Insule, anno Domini millesimo cccmo octogesimo sexto, et septimo regni nostri, mense octobris

Les lettres de Jean duc de Berry, du 13 avril 1385, et la confirmation royale d’octobre 1386 ont été transcrites par dom Fonteneau (t. XXIV, p. 149 et 151), d’après les originaux conservés dans les titres du chapitre de Sainte-Radégonde de Poitiers, aujourd’hui aux archives du département de la Vienne.

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Per regem, ad relacionem consilii. P. Manhac.

DCCVI Octobre 1386

Confirmation du don fait par Jean, duc de Berry, des terres et biens confisqués de Geoffroy de Kérimel, chevalier, en Poitou, à cause de son alliance avec les Anglais, en faveur de Morinot de Tourzel, seigneur d’Allègre, et de la cession que ce dernier en a faite à Simon de Cramaud, évêque de Poitiers.

AN JJ. 132, n° 56, fol. 33 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 315-321

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, nous avoir veues les lettres de nostre très chier et très amé oncle le duc de Berry et d’Auvergne, comte de Poitou, des quelles la teneur s’ensuit :

Jehan, filz de roi de France, duc de Berry et d’Auvergne, conte de Poitou. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que pour et en recompensacion des bons et agreables services que nostre amé escuier et eschançon Morinot de Tourzel

Le même registre contient un autre don fait à Paris, le 12 juin 1388, par le duc de Berry à son chambellan Morinot de Tourzel, sieur d’Allègre, de biens situés en Auvergne, son pays. Jean Chauchat, trésorier de France et receveur général des finances du roi et du duc, étant mort sans avoir rendu ses comptes et sans laisser d’héritiers, sa succession fut dévolue à Jean de Berry ; elle consistait en un hôtel derrière la cathédrale de Clermont, une autre maison dans la même ville, des terres à Aulnat, Cournon, Pont-du-Château, Lempdes, Riom, etc., et 400 francs d’or de meubles. La libéralité de son maître mit le sieur d’Allègre en possession de cette riche dépouille. Le don lui en fut confirmé par lettres de Charles VI, datées de Paris, juin 1388. (JJ. 132, n° 324, fol. 172.)

Maurin, dit Morinot, seigneur de Tourzel, fils d’Assalit de Tourzel et de Marquise d’Espinchal, entra jeune au service du duc de Berry, dont il fut d’abord l’échanson. Ce titre lui est donné dans un compte du 6 octobre 1377. (Arch. nat., KK 252, fol. 147.) Il devint chambellan de ce prince avant l’année 1385. Sur les registres de l’hôtel des années 1398 à 1400 où son nom revient fréquemment, il prend le titre de chambellan et conseiller du duc, aux gages de 4 livres 10 sous tournois par jour. (KK. 253, fol. 15 v°, 66, 93 v°, 121.) Son maître ne cessa de le combler de bienfaits. Par lettres datées de Bourges, avril 1385, il lui donna les terres d’Allègre et de Chomelix, tenues de lui en foi et hommage. La duchesse de Berry confirma cette largesse par un acte de même date. (Copies coll. insérées dans un accord du 7 juillet 1385, Arch. nat., X1c 51.) Dans cet accord Ithier Raybe, écuyer, dit Percevaut, abandonne au duc de Berry les droits qu’il tenait de sa mère Agnès, dame d’Allègre, sur ladite terre, moyennant 100 francs d’or, une charge de chevalier d’honneur du duc et l’entérinement de lettres de rémission qu’il avait obtenues pour un meurtre. Par une autre transaction, du 1er août 1386, Hugues de Froideville, chevalier, seigneur du lieu, céda à son tour à Morinot de Tourzel tous les droits qu’il pouvait prétendre sur lesdites terres d’Allègre et de Chomelix, et sur celles d’Auzelles et de Saint-Just. (Id., X1c 53.) Le P. Anselme énumère une partie des autres dons qui furent faits au nouveau seigneur d’Allègre par le duc de Berry et par le roi. (Voy. Hist. généal., t. VII, p. 707.) Au mois d’octobre 1407, il fut créé conseiller au Grand Conseil, aux gages de 1,000 livres, et le 1er février suivant, il obtint du duc la remise d’une amende en laquelle il avait été condamné pour excès faits à Pierre Ribier. « Il est dit dans un arrêt que, les autres officiers du duc de Berry ayant conçu haine et jalousie contre lui, le firent constituer prisonnier à la Conciergerie, d’où il fut mené à l’hôtel de Nesle, et de là à Dourdan, mais qu’il fut mis en liberté par la duchesse. » Morinot de Tourzel fit son testament le vendredi 1er octobre 1418, et demanda à être enterré dans la chapelle qu’il avait fait construire en l’église Notre-Dame de Clermont.

, nous a faiz ou temps passé, fait continuelment sanz cesser, et esperons qu’il doye faire ou temps avenir, nous à icellui Morinot, de nostre certaine science et grace especial, avons donné et octroié, donnons et octroions par ces presentes, à tousjours mais perdurablement, pour lui, ses hoirs et successeurs et aians cause de lui, tout le droit que nous avons en toute la terre, jurisdicion et justice que messire Gieffroy de Carrimel

Compagnon d’armes de Du Guesclin, Geoffroy de Kérimel, chevalier breton, avait été gratifié l’an 1372, en récompense des services qu’il avait rendus au roi et au duc de Berry, « à la conqueste des pays de Poitou, Saintonge et Angoumois », des biens confisqués sur le chevalier anglais Gautier Spridlington, qu’il dut partager avec Geoffroy Budes et Geoffroy Payen. (Voy. notre t. IV, p. 141 note, 278 note, 413 note.) Les terres énumérées ici provenaient évidemment de cette donation, et l’on voit qu’elles étaient vouées à la confiscation et destinées à changer fréquemment de maîtres. Le 29 septembre 1381, Charles VI, en exécution d’une des clauses du traité de Guérande, conclu avec le duc de Bretagne, le 15 janvier précédent, restitua à Geoffroy de Kérimel les biens qui lui avaient été confisqués en Poitou, en Saintonge et en Anjou, à condition de laisser paisibles et de ne pas inquiéter ceux qui avaient soutenu le parti du roi de France (ci-dessus, p. 171). Cette interdiction fut-elle enfreinte, ou Geoffroy encourut-il pour une autre cause le mécontentement du roi ou du duc de Berry ? Toujours est-il qu’il ne rentra pas en possession de ses biens de Poitou. La confirmation, en octobre 1386, de la transaction conclue à leur sujet entre Simon de Cramaud et Morinot de Tourzel, en est la preuve. D’ailleurs Kérimel resta en Bretagne, au service de Jean de Montfort. Au mois de mars 1382, il fit partie d’une ambassade envoyée par le duc de Bretagne au roi d’Angleterre pour tenter de se faire pardonner le traité de paix conclu avec la France. (Dom Morice, Hist. de Bretagne, in-fol., t. VI, p. 384.) Après cette date, on ne trouve plus qu’une mention de Geoffroy de Kérimel dans un compte de 1385 (id., t. IV, Preuves, II, p. 512), et l’on ignore l’époque de sa mort.

souloit tenir en nostre dicte conté de Poitou, c’est assavoir à Saint Remy, à l’Aleu de la Bergue, avec la terre de François Perres de Charray et deux molins appartenans à la dicte terre ; et oultre une maison avec ses appartenances assise en nostre ville de Nyort, devant Saint Andrieu, qui fu du dit messire Gieffroy, avecques toute jurisdicion et justice haulte, moienne et basse, hommages, fiefs et rerefiefs, toutes terres, rentes, demaines, possessions, bois, garennes, choses, droiz, devoirs quelconques appartenans ès terres dessuz dictes, quelconques choses que ce soient, comment que elles soient nommées et appellées et en quelque lieu que elles soient assises, tant en nostre dicte ville et chastellenie de Nyort, comme ailleurs en tout nostre dit païs de Poitou, et tel droit comme nous y puet et doit appartenir par confiscacion, pour ce que le dit messire Gieffroy s’est rendu ennemi et rebelle de monseigneur le roy et de nous et s’est aliez et mis et encores est en la compaignie des Anglois, et a pluseurs d’iceulz recueilliz et receuz en certaines forteresses de Bretaigne, des quelles terres et autres choses dessus dictes, de nous ainsi données au dit Morinot, comme dit est, et de toutes et chascunes les appartenances d’iceulz, dès maintenant nous vestons et saisissons reelment et de fait, par la teneur de ces presentes, le dit Morinot, pour lui, ses hoirs et successeurs, et aians cause de lui, à tenir et possider à touz temps mais de lui, ses diz hoirs et successeurs, et aians cause de lui, comme sa propre chose à lui acquise par droit heritage, sanz aucune chose y retenir ou reclamer à nous et à noz hoirs et successeurs, si non tant seulement les moulins dessoubz nostre chastel du dit lieu de Nyort, près des molins André Sene

Jehan Sene était maire de Niort, lors de la délivrance de cette ville à Jehan Chandos, en 1361.

, et nostre souveraineté et ressort, avec hommage tel comme deu nous est des choses dessuz dictes ou d’aucunes d’icelles. Voulans que ceste donacion faicte comme dit est vaille et puisse valoir à touz temps mais perdurablement, pour le dit Morinot et ses diz hoirs, aus devoirs que ycelles choses sont anciennement chargées. Si donnons en mandement, par la teneur de ces presentes, à noz amez et feaulz gens de noz comptes, à noz seneschal et receveur, et à touz noz autres justiciers, officiers et subgiez, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace, don et octroy, fait comme dessuz, laissent, facent et sueffrent à tousjours mais perdurablement joir et user et exploictier le dit Morinot, ses diz hoirs et aians cause de lui paisiblement, et contre la teneur de nostre dit don et octroy ne l’empeschent ne sueffrent aucunement estre empeschié au contraire. Toutevoies n’est il mie nostre entente que, ou cas que nous n’aurions aucun droit en la dicte terre, que nous soions tenuz de en faire aucune recompensacion au dit Morinot. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours mais, nous avons fait mettre nostre grant seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné au Bois de Vincennes, l’an de grace mil ccc. lxxix, ou mois de juillet.

Et comme Morinot de Tourzel, escuier, seigneur d’Alegre, depuiz le don et octroy à lui fait par les lettres dessus transcriptes, ait cedé, transporté et delaissié à nostre amé et feal conseiller Simon de Cramaut

Nous ne pourrions, sans passer de beaucoup les bornes d’une simple note, donner ici un résumé même succinct de la vie de cette haute personnalité ecclésiastique de la fin du xive siècle. D’ailleurs, le rôle considérable qu’il joua dans les crises politiques et religieuses de cette époque, les éminentes dignités ecclésiastiques dont il fut revêtu sont suffisamment connus. Nous nous contenterons de rappeler les principales dates de sa biographie. Les auteurs s’accordent à placer le lieu de naissance de Simon de Cramaud à Cramaut près Rochechouart (auj. Cramaux, Haute-Vienne) et la datent vers 1340. Il passa les premières années de sa vie à l’abbaye de Saint-Lucien de Beauvais, fut nommé maître des requêtes de Charles VII, puis chancelier de Jean duc de Berry, comte de Poitou, qui le fit pourvoir, le 16 juin 1382, de l’évêché d’Agen, dont il se démit peu de temps après. Bertrand de Maumont, évêque de Poitiers, étant décédé le 12 avril 1385, fut remplacé par Simon, grâce à l’influence du duc. Il occupa ce siège pendant moins de quatre ans. Clément VII l’appela auprès de lui et lui confia l’évêché d’Avignon en 1389, puis le nomma patriarche d’Alexandrie et administrateur du diocèse de Carcassonne. Après la mort de ce pape, le schisme n’ayant fait que s’affirmer, Simon de Cramaud fut au premier rang des personnages qui s’employèrent à le faire cesser ; il présida le concile national de Paris réuni par ordre de Charles VI, et plusieurs autres, remplit différentes missions auprès des papes de Rome et d’Avignon, auprès d’Henri II, roi de Castille, et de Richard II, roi d’Angleterre. En récompense des services qu’il lui avait rendus au concile de Pise (avril 1409), le pape Alexandre V fit élever Simon de Cramaud au siège archiépiscopal de Reims (15 décembre 1409). Puis Jean XXIII, à la demande de Charles VI, le créa cardinal (1412). L’année d’après, allant à Rome recevoir le chapeau, il fut nommé évêque de Préneste et administrateur de l’Église de Poitiers, qu’il avait toujours affectionnée comme sa patrie, et dont l’évêque, Pierre Trousseau, le remplaça à l’archevêché de Reims. Après avoir pris part au fameux concile de Constance, où son autorité prévalut souvent, Simon se retira dans son diocèse, où il passa paisiblement les dernières années de sa vie. Il mourut vers le 15 décembre 1422, disent les uns, en 1429, affirment les autres. Jean Besly, qui tient pour cette dernière date, dit que Simon de Cramaud fut inhumé dans l’église cathédrale Saint-Pierre de Poitiers, et il rapporte son épitaphe, où on ne lit aucune indication d’année. (Des Évêques de Poitiers, Paris, 1647, in-4°, p. 191.) — Voy. aussi pour la biographie de Simon de Cramaud, Du Puy, Histoire du schisme d’Avignon, etc., Paris, 1654, in-4° ; Dreux du Radier, Bibliothèque hist. et critique du Poitou, in-12, 1754, t. I, p. 382 ; M. l’abbé Auber, Mém. de la Société des Antiquaires de l’Ouest, ann. 1840, p. 249.

Le patriarche d’Alexandrie avait d’autres possessions en Poitou, outre celles qu’il acquit de Morinot de Tourzel, comme on le voit ici, entre autres la Chapelle-Belloin, dont il fit don à son frère Pierre. Nous donnerons, à la date de décembre 1394, le texte de l’acquisition qu’il fit de la duchesse d’Anjou, des terres et seigneuries de la Roche-Rigault et de Ranton en Loudunais. Le 12 avril 1397 encore, il acheta de Gérard de Maumont, seigneur de Tonnay-Boutonne, la terre de Nouzilly dans le même pays, acte ratifié, le 19 juin suivant, par Jean de Beaumont. (Coll. dom Fonteneau, t. II, p. 189, extrait des arch. de la cathédrale de Poitiers.) Les archives de la Vienne contiennent divers titres de Simon de Cramaud, en qualité de seigneur de Nouzilly, et la donation faite par lui en 1402, au chapitre de l’église cathédrale de Poitiers, de la terre de Pouant près Berrie, dans la châtellenie de Loudun, de dîmes à Nouzilly, etc., pour la dotation de la psallette qu’il venait de fonder en ladite église. (Série G. 257 et 258.) D’autres actes relatifs à cette fondation et à Simon, évêque de Poitiers, sont conservés dans la collection de dom Fonteneau. (Voy. la table des manuscrits de cette collection, dressée par M. Rédet, p. 311, 312, 315, 317, 318 et 321.) Dans une note touchant un neveu du cardinal, imprimée quelques pages plus loin, on verra que Simon de Cramaud et une partie de sa famille étaient complètement établis en pays poitevin.

, à present evesque de Poitiers et chancellier de nostre dit oncle, par certain traictié et accort faiz entre eulz, les maisons, terres, cens, revenues, rentes, fiefs et arrerefiefs, dont mencion est faicte ès dictes lettres, si comme par certaines autres lettres du dit traictié et accort sur ce faictes puet apparoir, nous, ayans agreables le don et octroy faiz par nostre dit oncle au dit Morinot, par les lettres dessus transcriptes, avecques toutes les choses contenues en ycelles, et le transport et delaissement par ycellui Morinot depuiz faiz à nostre dit conseiller, ycelles lettres et toutes les autres choses dessuz dictes loons, greons, ratiffions et approvons, et par ces presentes, de nostre grace especial et auctorité royal, confermons. Et en oultre, en ampliant nostre dicte grace, à nostre dit conseiller, pour consideracion des bons et agreables services qu’il nous a faiz, fait chascun jour, et esperons que face ou temps avenir, les terres, cens, rentes, revenues, fiefs, arrerefiefz et autres choses, dont mencion est faicte ès lettres de nostre dit oncle, avons donné et donnons de nouvel, se mestiers est, à les tenir et avoir par lui, ses hoirs et successeurs qui de lui auront cause, à tousjours mais perpetuelment, comme son propre heritage, reservez les droiz de souveraineté et ressort, avec l’ommage, s’aucun nous en est deu, selon la forme et teneur des dictes lettres de don dessuz transcriptes. Si donnons en mandement à noz amez et feaulz gens de noz comptes à Paris, au seneschal de Touraine et à touz noz autres justiciers et officiers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de nostre present don, confirmacion et octroy facent, sueffrent et laissent nostre dit conseiller joir et user paisiblement, et contre la teneur de ces presentes ne l’empeschent ou sueffrent estre empeschié aucunement. Et que ce soit ferme chose et estable à toujours, nous avons fait mettre nostre seel à ces lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Lisle, ou mois d’octobre l’an de grace mil ccc. iiiixx et six, et de nostre regne le viime.

Par le roy, à la relacion de monseigneur le duc de Bourgongne. Nicasius.

DCCVII Janvier 1387

Rémission accordée à Macé Frotier pour le meurtre d’Étienne Garnier. Celui-ci lui avait volé du blé, qu’il avait caché en une cave dans les bois d’Usseau, afin de le soustraire au pillage des gens d’armes répandus dans le Châtelleraudais, au commencement du Carême 1385.

AN JJ. 130, n° 58, fol. 33 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 321-324

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie des amis charnelz de Macé Froter, povre laboureur de braz, disans que en la premiere sepmaine du Caresme prochain venant aura deux ans ou environ, plusieurs genz d’armes estoient ou païs de Chasteleraudois en Poictou, dont les aucuns pilloient et roboient le païs, et ransonnoient les biens des bonnes genz du plat païs, pour doubte desquelles gens d’armes le dit Macé Froter et un autre appellé André Danya prindrent plusieurs de leurs biens, comme blez, draps de lit et autres utensiles d’ostel, et pour les sauver les porterent par nuyt en une cave qui est ou bois d’Usseau, sur la riviere de Vienne, et en les y portant, après ce qu’ilz y furent alez par plusieurs fois, ilz encontrerent d’aventure en alant à la dicte cave un appellé Estienne Garnier, lequel emportoit à son col son fais ou charge d’un blé qu’ilz avoient mis en la dicte cave, le dit blé appellé baillarge, que le dit Estienne avoit prins et emblé par nuyt en la dicte cave, auquel ilz distrent gracieusement : « Vous faites mal de nous embler noz biens et nostre blé, et de faire ce que vous faites. » Lequel Estienne leur dit et respondi par très grant arrogance teles paroles ou semblables : « Et qu’en est il ? qu’en volez vous dire ne faire ? » Et après tantost mist le dit blé à terre et, non content de ce, par grant effroy print un baton et un coutel qu’il tenoit en ses deux mains, et d’iceulx baton et coutel hema roidement et de moult felon courage contre les diz André et Macé, tant que, se il les en eust attains, ilz eussent esté affolez ou mors, maiz le dit Macé, pour defendre lui et le dit André, son compaignon, print et recuelli à l’une de ses mains le cop du dit baston, et à l’autre main print et recueilli le dit coutel tout nu et le detint, afin que le dit Estenne n’en frapast aucun d’eulz, maiz ce non obstant le dit Estienne saicha et arracha le dit coutel que le dit Macé tenoit tout nu à l’une de ses mains, comme dit est, dont le dit Macé fu moult durement copé et navré en la dicte main, et en mist à garir pluz de sept sepmaines après ; et de rechief le dit Macé et son dit compaignon qu’il detint le dit coutel à l’une de ses dictes mains, comme dit est, ycellui Estenne s’efforça de tout son povoir d’en vouloir fraper ou occire le dit Macé et son dit compaignon, et s’en mist en toute la peine qu’il puet. Et pour ce le dit Macé, veant la fureur du dit Estenne, tout couroucié et eschauffé de ce que le dit Estenne leur avoit emblé leur blé, et que avec ce il s’efforçoit de les vouloir fraper et occire du dit coutel, doubtant la mort et en deboutant force par force, osta le dit coutel au dit Estienne, et après tantost de chaude cole en ce moment lui en donna un seul cop parmi le col ou la gorge, dont mort s’en ensuy, en ce conflict, en la personne du dict Estienne. Et après ce, les diz Macé et André tous effrayez de la dicte mort, prindrent incontinant le corps du dit feu Estienne et le porterent en la dicte riviere de Vienne qui estoit assez près d’ilec, et après s’en alerent en leurs hostelz, touz courouciez et dolens du dit fait. Et depuis pour occasion du dit fait, le dit Macé fu prins et arrestez prisonnier par la justice du lieu en son hostel mesmes, en la parroise d’Entran ou village des Gardes, lequel hostel lui fu baillé par prison ; nonobstant lequel arrest le dit Macé, qui tout le temps de sa vie a esté simples homs, bon laboureur, de bonne fame et renommée, non suspect, convaincu ne attaint d’aucun autre vilain cas ou reproche, doubtans rigueur de justice, se parti du dit hostel et se absenta de la dicte parroisse, et s’en ala demourer autre part, et depuis n’y osa aler demourer, et encores n’ouseroit, doubtant ou temps avenir estre punis par justice, se par nous ne lui est sur ce extendue nostre grace et misericorde, si comme dient ses diz amis, en nous humblement suppliant que de lui nous veuillons avoir pitié et compassion, et lui impartir nostre dicte grace et misericorde. Nous adecertes, voulans rigueur de justice temperer par misericorde, eue consideracion aus choses dessus dictes, au dit Macé Froter, ou cas dessus dit, les faiz et cas dessus diz et chascun d’iceulx, de nostre auctorité royal et grace especial, avons quictié, remis et pardonné, et par ces presentes quictons, remettons et pardonnons, avec toute peine, offense et amende corporelle, criminelle et civile, qu’il a et puet pour ce avoir commis et encouru, en quelque maniere que ce soit, en le restituant à plain à sa bonne fame et renommée, au païs et à ses biens qui ne seroient confisquez ; et sur ce imposons silence perpetuel à nostre procureur, satisfacion toutevoies faicte à partie avant toute euvre, civilement tant seulement, se faicte n’est. Si donnons en mandement, par la teneur de ces presentes, aus gouverneurs du bailliage de Touraine et de la Rochelle, et à touz noz autres justiciers et officiers, leurs lieuxtenans, presens et avenir, et chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit Macé Frotier facent, sueffrent et laissent joir et user plainement et paisiblement de nostre dicte grace, remission et pardon, sanz le molester ou empeschier, ne souffrir estre molesté ou empeschié au contraire, en aucune maniere, en corps ne en biens, maiz se son corps ou aucuns de ses biens estoient pour ce prins, saisiz, arrestez ou empeschiez, ores ne autresfoiz, ilz les lui mettent ou facent mettre tantost et sanz delay à plaine delivrance. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à tousjours maiz, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou mois de janvier l’an de grace mil trois cens quatre vins et six, et de nostre regne le septiesme.

Es requestes de l’ostel. P. Houdoyer. — Barreau.

DCCVIII Mars 1387

Rémission accordée à Jean Cosson, de Nieul-le-Dolent, qui, dans une rixe, avait porté un coup de couteau à la cuisse de Jean Bastard, curé dudit lieu, son beau-frère, lequel était mort quatre jours après.

AN JJ. 130, n° 157, fol. 84 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 325-327

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir esté humblement exposé de la partie des amis charnelz de Jehan Cosson, povre homme ancien de l’aage de lx. ans ou environ, chargié de femme grosse et d’un petit enfant, demourant à Nyoil le Doulant en Poictou, disanz que le dimainche devant la my Quaresme derrenierement passé au soir, Jehan Bastard, prestre, curé du dit lieu, Michiau Naudon, prestre, son chappellain, le dit Jehan et sa femme, suer du dit curé et autres souppoyent et buvoyent ensemble, en l’ostel du dit Jehan Cosson, qui lors tenoit vin à taverne. Et avint lors que riote de paroles se meurent entre le dit Michiau Naudon et le dit Jehan Cosson, le quel Cosson pour ycelle riote eschiver et la compaignie du dit Michiau qui moult estoit esmeu, se parti d’illecques et s’en ala en sa chambre pour soy couchier, et en soy voulant couchier, ycellui Jehan Bastart, curé, voulant porter et soustenir son dit chappellain contre le dit Jehan Cosson, frere du dit curé à cause de sa femme, et sanz ce qu’il lui eust riens meffait, se leva impetueusement de la table et comme moult esmeu et eschauffé, si comme il sembloit par ses mouvemens, ala assaillir de certain propos le dit Jehan Cosson en sa chambre, où il se couchoit, comme dit est. Et de fait par felon courage, ycellui curé se print au corps du dit Cosson, en soy efforçant de le jecter à terre, en disant qu’il le comparroit du corps. Et pour ce que le dit curé le tenoit à grant destrece à deux braz parmy le col et la teste, et telement qu’il ne se povoit despescher ne delivrer de lui, et ne le vouloit laissier en paix, ycellui Cosson moult esmeu et eschauffé de ce que lui faisoit et efforçoit de faire le dit curé, qui ainsi le tenoit durement, comme dit est, saicha un petit coustel à trancher pain qu’il portoit, et d’icellui fery le dit curé parmi la cuisse un coup. Et combien que ycellui curé, qui quatre jours ou environ après le dit coup, ala de vie à trespassement, ait recongneu et affermé au lit de la mort, par serement ou autrement, et de son propre mouvement, que pour le dit coup il ne mouroit pas, mais estoit pour la maladie qu’il avoit portée en son corps un an et plus, et autressi ait pardonné de bon cuer le dit coup au dit Jehan Cosson, comme non coulpable en riens de sa mort, ycellui Cosson, pour doubte de rigueur de justice, s’est absentez hors du pays, et a laissié sa dicte femme et enfant, et est en voye que jamais n’ose retourner au pays, se nostre grace et misericorde ne lui est sur ce impartie, en nous humblement suppliant que, comme icellui Jehan Cosson ait esté en tous autres cas, tout le temps de sa vie, homme de bonne fame, vie, renommée et honneste conversacion, sanz estre attaint, ne convaincu d’aucun autre villain cas, nous sur ce lui vueillons impartir nostre dicte grace. Pour quoy nous, considerées ces choses, le fait dessus dit, avec toute peine, offense et amende corporelle, criminele et civile, que le dit Jehan Cosson a et peut avoir pour ce commis et encoru envers nous, satisfacion faicte à partie premierement et avant toute euvre, se faicte n’est, à icellui Jehan Cosson, ou cas dessus dit, avons quicté, remis et pardonné, et par ces presentes, de nostre auctorité royal et grace especial, quictons, remettons et pardonnons, et le restituons à sa bonne fame et renommée, au païs et à ses biens quelconques, qui par ban ne seroient confisqués, en imposant sur ce silence perpetuelle à nostre procureur et à tous autres officiers, parmi ce toutesvoies que le dit Jehan Cosson paiera une foiz seulement un marc d’argent ou la valeur, pour convertir en la fabrique de l’eglise du dit lieu de Nyoil, et fera par trois jours solennez la procession tout entour de la dicte eglise, tenant en sa main un cierge de une livre de cire. Si donnons en mandement, par ces meismes presentes, au seneschal de Xantonge, gouverneur de la Rochelle, et à tous les autres justiciers et officiers de nostre royaume, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, sueffrent et laissent le dit Jehan Cosson joir et user paisiblement et perpetuelement, et contre la teneur d’icelle ne le molestent ou empeschent, ne ne sueffrent estre molesté ou empesché, en corps ou en biens, en aucune maniere au contraire ; mais se son corps ou ses diz biens non confisqués par ban, comme dit est, estoient pour ce pris, saisiz, detenus ou empeschez, lui mettent et facent mettre senz delai à plaine delivrance. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou mois de mars l’an de grace mil ccc. iiiixx et six, et de nostre regne le septiesme.

Par le roy, à la relacion du conseil. Guichart.

DCCIX 31 mai 1387

Don à Guillaume de La Trémoïlle, chevalier, chambellan du roi, de « nostre hostel nommé le chastel de Galays, assiz à Paris en la rue de la Platriere, tenant d’une part à la maison de nostre dit chambellan, et d’autre part à Jehan de Senliz, près de nostre sejour, avec la granche et toutes les autres appartenances et appendences quelxconques dudit hostel. » Maubuisson près Pontoise, le 31 mai 1387

Acte publié par M. le duc de La Trémoïlle, Livre de comptes de Guy de La Trémoïlle et Marie de Sully. Nantes, 1887, in-4°. Appendice, p. 185.

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AN JJ. 130, n° 273, fol. 154 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 327

DCCX Juin 1387

Rémission accordée à Jean Bigot, de Saint-Maurice-des-Noues, pour un meurtre commis par lui le jour et à l’occasion de l’élection annuelle des maîtres de la confrérie de Saint-Nicolas dudit lieu, à condition qu’il ira en pèlerinage à Notre-Dame du Puy et fera dire cent messes pour le salut de l’âme du défunt.

AN JJ. 130, n° 268, fol. 151 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 328-331

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, à nous avoir esté humblement exposé de la partie de Jehan Bigot, povre homme, laboureur de bras, demourant en la parroisse Saint Maurice des Nohes en Poitou, que comme chascun an, le jour de la feste saint Nicolas ou moys de may, l’on ait acoustumé de faire certaine confrarie à la quelle se assemblent, en l’onneur de Dieu et du dit saint, grant quantité des habitans d’icelle parroisse, tant clers que autres, et il soit ainsi que le jour de la dicte feste saint Nicolas darrainement passé, les confreres d’icelle confrarie se feussent assemblez, comme acoustumé avoyent, et landemain de la dicte feste après disner, le dit exposant eust esté esleu et ordené pour l’année subsequent l’un des maistres et gouverneur de la dicte feste et confrarie, dont aucuns par envie ou autrement le mistrent hors ; de quoy il fu doulant et couroucié, pour ce qu’il avoit grant voulenté et affection de bien faire son devoir, en l’onneur de Dieu et du dit saint, et aussi des diz confreres. Et lui estant ainsi couroucié, Jehan Beuvet

On peut lire aussi bien « Bennet ».

et autres en sa compaignie, sanz ce que oncque le dit exposant leur eust rien meffait ne delinqué, prindrent ycellui exposant qui seoit sur une forme ou banc en la maison où la dicte confrarie avoit esté lors faite, et par maniere de blasonnement, de injure ou autrement, et oultre le gré et voulenté d’icelli exposant le prindrent et le mistrent en une moyau ou cuve, et en ycelle, combien qu’il leur defendist et deist qu’il n’avoit cure de leurs jeux, le moullerent et lui gecterent grant quantité d’eaue sur son corps et sur ses draps, et mesmement le dit Beuvet portoit l’eawe et la gectoit sur le dit exposant, et disoit qu’il seroit bien mollez avant qu’il eschapast. A quoy ycellui exposant respondi et dist : « Beuvent (sic), laisse moy, tu fais mal de moy ainsi faire, et saiches qu’il m’en desplaist, et t’en pourraz bien repentir. » Et ce non obstant, le dit Beuvet ne cessoit point et disoit : « Par le sanc Dieu, il ne m’en chaut, tu seraz bien moillez avant que tu eschapes. » Et advint que en ycellui fait et mouvement, ycellui suppliant comme moult esmeu, yré et eschauffé de ce que dit est, et qu’il estoit yvres, non pas d’aguet appensé, mais par chaude cole, sacha un petit coustel à tranchier pain qu’il portoit et d’icellui par cas d’aventure et de meschief fery un seul coup le dit Jehan Beuvet, non pas pour entencion de le vouloir tuer, du quel coup le jour mesmes le dit Beuvet ala de vie à trespassement. Pour occasion du quel fait, du quel le dit exposant fu et est très doulant et couroucié, a esté pris et emprisonné ès prison du prieur du dit lieu de Saint Maurice, duquel ledit exposant est subget et justiçable, ès quelles prisons il est et a esté depuis le dit faict detenu en fers et à très grant durté, povreté et misere, et est en voye de y finer miserablement ses jours, se nostre grace et misericorde ne lui est sur ce impartie ; en nous humblement suppliant que, comme en touz autres cas il ait esté et soit de bonne vie, fame, renommée et honneste conversacion, sanz ce que oncques il feust actaint ne convaincu d’aucun autre villain blasme, et que le dit cas n’est pas d’aguet, mais par chaude cole et yvresce, comme dit est, et la dure prison et povreté qu’il y a souffert et encores souffre chascun jour, et que le dit defunct le li pardonna à son trespas, present le curé de la dicte parroisse et autres, en voulant que pour le dit fait il n’en eust aucun tourment de son corps, ne autrement, et aussi Jehanne Journele, vefve du dit defunct et ses autres plus prochains parens l’ont pardonné et quictié au dit exposant, lequel a tant fait envers eulx qu’il en sont contens, nous lui vueillons sur ce eslargir nostre dicte grace et misericorde. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, au dit exposant ou cas dessus dit, et satisfacion faicte à partie premierement et avant toute euvre, se faicte n’est, avons quictié, remis et pardonné, remettons, quictons et pardonnons par ces presentes, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, le fait dessus dit, avec toute paine, offense et amende corporele, criminele et civile, que pour cause d’icellui fait il a et puet avoir commis et encouru envers nous. Parmi ce toutevoyes que ycellui suppliant fera, dedens un an prochainement venant, un pelerinage à Nostre Dame du Puy en Auvergne, et yllecques rendra et offerra devant l’ymage Nostre Dame un cierge pesant une livre de cire, et en apportera lettres tesmoinnables d’avoir fait son dit pelerinage et offerte ; et avecques ce fera dedans le dit an chanter cent messes en l’eglise de la parroisse où le dit deffunct est enseveli, ou ailleurs où il plaira au dit exposant, pour le salut de l’ame du dit deffunct, et sera tenuz d’en enseigner de bonne quictance et descharge. Et le dit exposant restituons à sa bonne fame, pays et renommée, et à ses biens non confisquez, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur et à touz noz autres officiers, par ces mesmes presentes. Par la teneur des quelles nous donnons en mandement aux gouverneurs de la Rochelle et du bailliage de Touraine, et à touz noz autres justiciers et officiers, à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, seuffrent et laissent joir et user paisiblement perpetuelment le dit exposant, sans le molester ou souffrir estre molesté ou empesché, en corps ou en biens, en aucune maniere au contraire, de nostre dicte grace et remission ; mais se son corps ou ses diz biens non confisquez, comme dit est, sont ou estoient pour la cause dessus dicte prins, saisiz ou empeschez, li mettent ou facent mettre à plaine delivrance, sans delay. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou moys de juing l’an de grace mil ccc. iiiixx et sept, et de nostre regne le viie.

Par le roy, à la relacion du conseil. P. Milet.

DCCXI 11 juillet 1387

Rémission accordée à Jean Jaquet, de Chasnais près Luçon, qui, attaqué par un nommé Guillaume Bachier, l’avait, en se défendant, frappé mortellement.

AN JJ. 131, n° 62, fol. 35 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 331-333

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté humblement exposé de la partie des amis charnelz de Jehan Jaquet laboureur de bras, fils de Jean Jaquet l’ainsné, comme, le lendemain de la feste saint Barnabé apostre

Le 11 juin 1387.

, derrenierement passée, le dit exposant feust en un sien vergier, au lieu de Chanay lez Luçon, ou quel il labouroit et vouloit planter des poreaux et autres herbes, pour aidier à vivre sa femme et enfans, et ledit exposant estant ou dit vergier, le jour dessuz dit, passée l’eure de my jour, vint du marchié de Luçon un homme appelé Guillaume Bachier, laboureur, et passoit par un chemin publique joingnant aus vergiers qui sont touchant au vergier du dit exposant, et quant le dit Guillaume fu à l’endroit du dit exposant, li dist moult malicieusement qu’il faisoit là et le appela Jehannin, lequel lui respondi qu’il plantoit des poreaux. Et lors le dit Guillaume dist au dit exposant qu’il prenoit tousjours du sien ; au quel il respondit qu’il alast veoir s’il prenoit du sien. Lequel Guillaume dist de rechief au dit exposant, en lui donnant menaces et disant : « Je te paieray bien », et descendi de sur une beste et l’atacha à une haye de bois qui est closture d’un jardin ; et d’icelle closture le dit Guillaume arracha et tira de terre à li un pal des plus gros de la dicte haye, et passa oultre la dicte haye, entrant en un jardin du dit exposant qui estoit delez ; et quant il fu près du dit exposant, l’appela larron, bourgoignon, et leva le dit pal pour ferir le dit exposant, lequel exposant resista de parole au dit Guillaume le mieulz qu’il pot. Et pour ce, le dit exposant, doubtant que le dit Guillaume le ferist et villenast, bouta d’une deschaussoere le dit Guillaume en la poitrine un cop, par la quelle bouteure il chei à terre, et après le fery de la dicte deschaussoere parmi le costé, et convint que ycellui Guillaume en feust portez en son hostel, où il a esté malade environ xx. jours, et tantost après soit alez de vie à trespassement. Pour occasion du quel fait, le dit exposant est priz et tenu prisonnier au dit lieu de Chanay, et ses biens saisiz et empeschiez ; et pour ce il doubte que la justice procede contre lui à punicion corporele. Et il soit ainsi que le dit exposant ait esté touz les jours de sa vie homme de bonne fame, renommée et honneste conversacion, sanz avoir esté accusé ou convaincu d’aucun autre mauvais cas, soit marié et ait enfans ; et aussi que le dit Guillaume soit aggresseur en ce fait, et ait esté homme noiseur et rioteux, et comme touz les jours yvre par tele maniere que il cheoit de sur sa beste, par lesquelles cheoistes et autres choses le dit Guillaume estoit pourri et ainsi comme percuz ; et si a pardonné le dit Guillaume le dit cas au dit exposant par ainsi qu’il marie deux de ses filles, selon leur estat, et face dire trente messes pour l’ame de lui, et que ses heritiers ne facent aucune poursuite contre le dit exposant, qui est en aventure de briefment finer ses jours en la dicte prison de Chanay, se par nous ne lui est sur ce impartie nostre grace, si comme il dit, en nous humblement requerant ycelle. Nous, inclinans à sa supplicacion, consideré ce que dit est, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, au dit exposant avons ou cas dessus dit quicté, remis et pardonné, quictons, remettons et pardonnons, de grace especial et auctorité royal, par la teneur de ces presentes, le dit cas et toute peine, offense et amende corporele, criminele et civile, que pour ce il a et puet avoir encouru envers nous, et le restituons à sa bonne fame, renommée, au pays et à ses biens non confisquez, en imposant sur ce à nostre procureur et à touz autres silence perpetuel, satisfacion faicte à partie premierement et avant toute euvre civilement tant seulement, se faicte n’est. Si donnons en mandement au gouverneur de nostre ville de la Rochelle et à touz noz autres justiciers, ou à leurs lieux tenans, presens et avenir, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace, remission et pardon facent et laissent le dit exposant joir et user paisiblement, sanz le molester ou souffrir estre molesté aucunement au contraire, et son corps detenu prisonnier, et ses biens pour ce priz, saisiz ou empeschiez, comme dit est, lui mettent ou facent mettre tantost au delivre. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à tous jours mais perpetuelment, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Rouen, le xie jour de juillet l’an de grace mil ccc.iiiixx vii, et de nostre regne le viime.

Par le roy, à la relacion de messeigneurs les ducs de Berry et de Bourgoingne. G. Lafons.

DCCXII Septembre 1387

Rémission accordée à Renaud du Plessis, sr de la Colinière, et à son fils Perrot, coupables de meurtre sur la personne de Jean Ledoux, à la Bironnière, et de coups et blessures sur Macé Ledoux, frère de ce dernier, avec lesquels ils étaient en procès.

AN JJ. 133, n° 5, fol. 2 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 333-336

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté humblement exposé de la partie des amis charnelz de Regnault du Plesseys

De même que son parent Jean du Plessis (ci-dessus, p. 286, note), Renaud, seigneur de la Colinière, appartenait à une famille autre que la famille du Plessis de Richelieu, ou à une branche ignorée de Du Chesne et des autres historiens de cette maison. Il a été question du procès soutenu par Renaud du Plessis au sujet de la terre de Brillouet (id. ibid.). Nous n’y reviendrons pas ici. En dehors de cette affaire, nous n’avons plus à indiquer, touchant ce personnage, que l’extrait suivant d’un aveu rendu au sire de Parthenay par Louis Normandeau, chevalier, pour son hébergement de la Chapelle-Bertrand et dépendances : « S’ensuivent les homages dehuz à Chapelle-Bertrand… Regnault du Plesseys, homme lige à devoir de dix livres, à mutacion de homme, du lieu de Sonnay, appartenances et appendences et d’autres choses. A present tenent le dit lieu de Sonnay les heritiers feu Jehan Ojart, assavoir est la fille feu Pierre Sauvestre de Thouars. » Cet état non daté est de 1428 environ, mais remonte aux dernières années du xive siècle pour la plupart des noms de tenanciers. (Arch. nat., R1* 190, fol. 8 v°.)

, escuyer, seigneur de la Coliniere, et Perrot du Plesseys, son filz, disanz que comme Macé Ledoulz et Jehan Ledoulz, son frere, feussent tenuz en certains devoirs et droitures, dont souventes foiz pluseurs debas et riotz se sont meuz entre les diz freres et le dit Regnault et Perrot, son filz, et tant que iceulx Regnault du Plesseys et Jehan Ledoulz estoient en asseurement l’un vers l’autre ; et il soit ainsi que nagueres paroles contentieuses feussent sur [ce] meues entre le dit Macé Ledoulx et le dit Regnault, estanz lors en un villaige appellé la Bironniere, et aussi pour ce qu’il fu rapporté audit Perrot, filz du dit Regnault, qui lors estoit en un autre villaige assez près d’illecques, que le dit Macé avoit injurié le pere dudit Perrot, icellui Perrot meu d’affection naturelle et paternelle, vint couramment lors au dit lieu de la Bironniere et trouva le dit Macé, et tantost le dit Perrot, moult esmeu et eschauffé de ce que on lui avoit dit et rapporté de son dit pere, feri et bati le dit Macé d’un baston et aussi le feri un cop de baselaire par l’une de ses jambes, durant laquelle meslée, ainsi que le dit Regnaut aloit pour deffaire et departir la dicte meslée de son filz et du dit Macé, afin que aucun inconvenient de mort ou meshaing ne s’ensuist, le dit Jehan Ledoulz, meu de voulenté desordenée, d’aguet appensé, garny d’une pelle de bois en ses mains, vint hastivement encontre le dit Regnault et s’efforça et esma de le ferir de la dicte pelle par la teste, en enfraignant l’asseurement devant dit, et en verité l’eust affolé et meshengné de son corps ou par avanture mis mort, se il n’eust receu ledit cop à ses deux braz et mains ; et non content de ce, icellui Jehan Ledoulx se prist au corps du dit Regnault et tant qu’il le fist cheoir à terre, et illecques le tenoit moult estroictement par la gorge et par le chaperon, si qu’il ne se povoit aidier ne parler ; et adonc icellui Perrot, voiant son dit pere en tele perplexité, vint au dit Jehan Ledoulx, et lui dist : « Laisse mon pere, ou tu le comparras. » Et pour ce qu’il en fu refusanz et procedoit à lui faire injure à son povoir, le dit Perrot en revenchant son dit pere, frappa du dit baselaire icellui Jehan Ledoulx en chascune de ses jambes un cop, non paz en entencion de le tuer, dont icellui Jehan est alé de vie à trespassement. Pour le quel fait et du quel iceulx pere et filz ont esté et sont très doulens et courourciez, et pour doubte de rigueur de justice, se sont absentez du païz et sont en voie d’estre banniz et que jamaiz ilz n’y osent habiter ne demourer, se nostre grace et misericorde ne leur est sur ce eslargie et impartie, en nous humblement suppliant que, comme en touz autres caz iceulx Regnault et Perrot aient esté et soient de bonne vie, fame et renommée, et honneste conversacion, sans estre attains, reprouchiez ou convaincuz d’aucun autre vilain blasme, et que le dit Jehan Ledoulz estoit homs rioteux et noiseux, et de mauvaise renommée, nous leur vueillons impartir nostre dicte grace. Pour quoy nous, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, aus dis Regnault et Perrot, son filz, et à chascun d’eulx, satisfaction faicte à partie premierement et avant toute euvre, se faicte n’est, le fait dessus dit avec toute peine, offense et amende corporele, criminele et civile, que pour occasion des choses dessus dictes et de chascune d’icelles, ilz et chascun d’eulx ont et puent avoir commis et encouru envers nous, avons remis, quictié et pardonné, quictons, remettons et pardonnous par ces presentes, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, et les restituons à leur bonne fame, renommée et à leurs biens qui ne seroient confisquez, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur et à tous autres officiers de nous. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes au gouverneur de la Rochelle et du bailliage de Tours, et à touz noz autres justiciers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra ; que de nostre presente grace et remission facent, sueffrent et laissent les diz Regnault et Perrot, son filz, et chascun d’eulx joir et user paisiblement et perpetuelment, sanz pour ce les molester ou souffrir estre molestez ne empeschiez en corps ne en biens, en aucune maniere ; maiz se leurs corps ou leurs diz biens non confisquez, ou de l’un d’iceulx, sont ou estoient pour la cause dessus dicte priz, saisiz, arrestez ou empeschiez, le mettent ou facent mettre à plaine delivrance, sanz delay. Et que ce soit ferme chose et estable à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à la Fontaine de Houx, l’an de grace mil ccc.iiiixx et sept, et de nostre regne le septiesme, ou mois de septembre.

Parle roy, à la relacion de monseigneur le duc de Berry. G. d’Aunoy.

DCCXIII Octobre 1387

Rémission octroyée à Jehan Moigneron et à Thomas Forestier, de Triou, paroisse de Mougon, pour le meurtue de Jean Bonin qu’ils avaient surpris en train de faire violence à la femme dudit Moigneron.

AN JJ. 131, n° 161, fol. 99 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 337-339

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion des amis charnelz de Jehan Moingneron, dit Vignier, de Triou, de la parroisse de Saint Jehan de Mougon, en la chastellenie et ressort de Niort, et de Thomas Forestier, de la dicte ville, compere et voisin du dit Jehan Moigneron, povres laboureurs, chargiez de femmes et d’enfans, contenant comme le dit Moigneron eust et ait esposé une bonne preude femme de l’aage de vint ans ou environ, la quelle a esté tout son temps de bonne et honneste conversacion, et y soit ainsi que Jehan Bonin, de la dicte ville de Triou, en son vivant homme pillart et de mauvaise renommée, la poursuy bien par l’espace de un an ou environ, pour d’icelle avoir ses voulentez et cognoistre charnelment, à quoy elle ne se voult oncques consentir, mais dist par pluseurs foiz à son dit mary qu’il voulsist en ce mettre remede, afin qu’elle ne feust deshonnorée de son corps, et le dit Jehan son mary dist, supplia et requist au dit Jehan Bonin que il se cessast et deportast de plus poursuir et requerre sa dicte femme de vilenie, et aussi que plus en sa maison ne venist ne conversast, ou autrement il lui en desplairoit ; et mesmement lui en fu faicte defense par les officiers de nostre très chier et très amé oncle le duc de Berry et d’Auvergne, conte de Poitou, seigneur de la dicte ville. Neantmoins le dit Bonin ne se voult depourter de ce faire, mais poursui la dicte femme plus fort que devant, et vint en perseverant son mauvais propos, armez et à force d’armes en la maison du dit Moingneron, lui rompi sa porte, entra dedens la court de sa maison et tua un chien, en lui efforsant tousjours de ravir la dicte femme et de tuer son dit mari, s’il les eust trouvez, et tant poursui en son mauvais propos que, environ la feste du Saint Sacrement derrenierement passé, à heure de midi ou environ, il s’embat en la maison du dit Moingneron, en la quelle il trouva sa dicte femme toute seule, fors de un enfant d’un an ou environ, la quelle par sa force et maugré elle, il prist à plains braz, la rua à la terre et s’efforça de tout son povoir de la cognoistre charnelment, mais elle s’escria si hautement, en requerant aide, que son dit mari et le dit Thomas, son compere, l’entendirent, au quel cri et en aide à icelle ilz vindrent le plus tost qu’ilz pourent, et virent le dit Bonin

Le texte porte en cet endroit « Wonin » ou « Wouin », au lieu de Bonin.

qui de tout son povoir s’efforçoit de la violer. Et lors le dit mari, ce veant et le grant efforcement que le dit Bonin lui porchassoit, meu de chaleur, trouva un baston de quoy on faisoit le lit de son dit hostel, et icellui print en venant contre le dit Bonin, qui avoit jà tiré sa dague pour venir contre lui pour le tuer, s’il eust peu, et d’icellui baston feri le dit Bonin sur la teste, telement que mort s’en ensuy en sa personne. Pour occasion du quel fait, les diz Moingneron et Thomas, doubtans rigueur de justice, se sont absentez du pays et sont en aventure que jamais n’i osent retourner et de cheoir en mandicité, eulx, leurs femmes et enfans, se sur ce ne leur est impartie nostre grace et misericorde, si comme iceulx amis charnelz dient. Si nous ont humblement supplié iceulz amis charnelz que, pour consideracion aus choses dessus dictes et à ce que les diz Moingneron et Thomas ont esté toute leur vie hommes de bonne et honneste conversacion, fame et renommée, qu’ilz ne furent oncques mais reprins d’aucun autre mauvais vice, blasme ou reprouche, que d’iceulz nous vueillions avoir pitié et compassion. Nous adecertes, ces choses considerées, voulans mísericorde estre preferée à rigueur de justice, de nostre grace especial, puissance et auctorité royal, aux dessus diz Jehan Moingneron et Thomas Forestier, ou cas dessus dit, avons remis, quictié et pardonné, quictons, remettons et pardonnons par ces presentes tout le fait et cas dessus dit, avec toute peine, amende et offense corporele, criminele et civile, qu’ilz ont ou puent avoir encouru envers nous et justice, pour le fait et occasion dessus dit, et les avons remis et remettons à leurs bonnes fames et renommées, au pays et à leurs biens non confisquez, satisfacion faicte à partie premiers et avant toute euvre, se faicte n’est, civilement tant seulement, et imposons sur ce à nostre procureur silence perpetuel. Si donnons en mandement par ces presentes au gouverneur de la Rochelle et à touz noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, seuffrent et laissent joir et user plainnement et paisiblement les diz Jehan Moingneron et Thomas Forestier, sans les contraindre, molester, traveillier ou aucunement empeschier au contraire ; mais se leurs corps ou aucuns de leurs biens non confisquez estoient pour ce prins, saisiz, levez, arrestez ou empeschiez, si les leur mettent ou facent mettre à plainne delivrance. Et pour ce que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Beauvais, ou moys d’octobre l’an de grace mil ccc. iiiixx et sept, et le viiie de nostre regne.

Es requestes de l’ostel. G. Budé. — Fresnel.

DCCXIV 14 janvier 1388

Confirmation de la propriété et possession de la terre et seigneurie de Touffou pour Jean de Cramaud, chevalier, et Orable de Montléon, sa femme, ladite terre à eux cédée par Renaud de Montléon, frère de ladite dame.

AN JJ. 132, n° 81, fol. 45 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 339-345

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que, oye la supplicacion à nous faicte de la partie de noz bien amez Jehan de Cramaut

La famille de Cramaud, Cramaut ou Cramaux était originaire d’auprès de Rochechouart et n’est guère connue que par le cardinal Simon de Cramaud. (Voy. ci-dessus, p. 319.) Le 24 avril 1374, Guy de Cramaut, chevalier, son fils Jean de Cramaut, écuyer, et la femme de celui-ci, Marguerite de Neuville, étaient appelants au Parlement contre Louis vicomte de Rochechouart, dont ils étaient sujets et féaux. Le sénéchal de Rochechouart les avait condamnés à l’amende dans un procès dont l’objet n’est pas indiqué. S’étant ravisés, ils déclarent se désister de leur appel et se soumettre au premier jugement. (Arch. nat., X1c 28.) Quel était le lien entre ces personnages et le cardinal ? On ne sait. Le fils même, malgré la similitude de prénom, ne paraît pas être le Jean de Cramaut, chevalier, dont il est question ici. Dans l’acte de vente de la terre de Sainte-Néomaye, faite au roi le 31 août 1387, à Loudun, par Jeanne de Bauçay, sont nommés parmi les procureurs de cette dame Pierre et Jean de Cramaut, chevaliers (Arch. nat., J. 187A, n° 30), le premier frère de Simon et père de notre Jean, suivant le P. Anselme, A. Du Chesne et les titres les plus authentiques. Pierre porta à la bataille de Poitiers la bannière du seigneur de Rochechouart. Son frère le prélat lui fit don par la suite de la terre de la Chapelle-Bellouin, qu’il avait acquise de Catherine de Maillé.

Jean de Cramaut, fils de ce Pierre, épousa, non pas en 1404, comme le dit Du Chesne (Hist. généal. des Chasteigners, p. 240), mais à la fin de 1383 ou au commencement de 1384, Orable, fille aînée de Renaud Ier de Montléon et d’Orable de Preuilly, qui lui apporta en dot la seigneurée de Touffou. (Voy. la note de la p. 343.) Orable de Montléon avait été mariée une première fois à Huet Odart, chevalier, seigneur de Mons, qui mourut au bout de deux ans de mariage, laissant un fils, Jean Odart, dont Jean de Cramaut fut le tuteur. (Op. cit., Preuves, p. 115.)

Guillaume de Mareuil avait légué par son testament 1.000 francs d’or aux Frères mineurs de Niort sur sa terre de Niort, qu’il fallut vendre pour exécuter le legs. Louis et Élie Buffet, écuyers, ses neveux et héritiers, trouvèrent un acquéreur dans notre Jean de Cramaut, moyennant le prix de 1.300 francs d’or. Cette terre comprenait des hébergements et maisons avec vergers, prés, clôtures, etc., à Niort, devant l’église de Saint-André (qui prirent par la suite le nom de fief Crémeau), des moulins et pêcherie sur la rivière de Sèvre, etc., plus le village de François en la châtellenie de Saint-Maixent, etc., etc. Du consentement de l’acheteur, il fut stipulé que Simon de Cramaut, alors évêque de Poitiers, aurait la jouissance et l’usufruit, sa vie durant, de ces diverses propriétés. (Traité conclu le 2 juillet 1386, homologué au Parlement le 10 du même mois, X1c 53.) L’année suivante, Jean de Cramaut servait sous le maréchal de Sancerre, dans les guerres de Guyenne, comme en témoignent : 1° un mandement daté de Niort, le 20 mars 1387 n.s., à Jean Le Flament, trésorier des guerres, de lui payer ses gages et ceux de sa compagnie comprenant un chevalier bachelier et dix-huit écuyers (Arch. hist. du Poitou, t. XX, p. 290) ; 2° une quittance desdits gages datée de la Rochelle, le 12 octobre 1387, et scellée du sceau de Jean de Cramaut, où l’on voit un « écu à la bande accompagnée de six merlettes en orle, penché, timbré d’un heaume couronné et cimé d’une tête de lion dans un vol, supporté par deux griffons. » (G. Demay, Invent. des sceaux de la coll. Clairambault, in-4°, t. I, p. 312.)

Il accompagna aussi le duc de Bourbon dans son expédition de Barbarie, en 1390. Pendant son absence, Pierre Pertseschausses, agissant comme sénéchal de Prahec pour Jean de Chalon, sieur d’Arlay, et Guy de La Trémoïlle, co-seigneurs, saisit un fief non nomme mouvant de cette châtellenie et appartenant au neveu de l’évêque de Poitiers, sous prétexte qu’il avait négligé d’en faire l’hommage. A son retour, Jean de Cramaut, seigneur de Touffou, réclama mainlevée de son fief, alléguant des lettres d’état qu’il avait obtenues pour toute la durée de son voyage. Sur le refus du sénéchal, il en appela au Parlement ; mais l’affaire s’arrangea à l’amiable. Un accord conclu le 4 janvier 1391 n.s. stipule que le demandeur renoncera à ses poursuites et que sa terre lui sera délivrée, aussitôt qu’il aura fait acte de foi et hommage (X1c 62). A son tour, le seigneur de Touffou fit saisir la terre de la Guillonnière, appartenant à Jean Bozier, bourgeois de Poitiers, située dans sa juridiction et relevant de son fief de la Galicherie, parce qu’on ne lui avait pas présenté le contrat de l’acquisition faite par Aimery d’Ayron, aïeul de Bozier, et qu’on ne lui avait point payé les droits de vente. Cette affaire se termina aussi par une transaction. Le bourgeois de Poitiers s’engagea à payer dans un mois 20 écus au seigneur de Touffou, et sa terre lui fut restituée. (Acte du 13 août 1396, homologué au Parlement le 30 décembre suivant, X1c 72, à cette dernière date.) L’année précédente, Jean servait en qualité de chevalier bachelier avec neuf écuyers de sa compagnie, sous le maréchal Boucicaut, comme on l’apprend d’une autre quittance de gages, aussi conservée parmi les titres scellés du fonds Clairambault.

En 1402, on retrouve Jean de Cramaut et sa femme en procès contre Itier de Martreuil, évêque de Poitiers, à cause de la tour et de la terre de Touffou. L’évêque réclamait le devoir qui lui était dû « à mutacion de seigneur » et accusait le seigneur de Touffou d’entreprises contre ses droits. Cramaut déclara que la terre lui appartenait en propre et non à cause de sa femme, affirmation dont acte fut donné à Itier de Martreuil, sur sa requête, par lettres du Parlement, le 14 juillet 1402 (X1A 49, fol. 59). Le 15 avril 1408, le maire de Poitiers fit saisir six pipes de vin que Jean de Cramaut, seigneur de Touffou, avait fait descendre à son hôtel, sans autorisation de l’échevinage. (Arch. municip. de Poitiers, M. 42, reg. 11, fol. 86 v°.) Enfin, en 1417, un jugement du sénéchal de l’évêque de Poitiers condamna Jean Peyroteau, dit des Barbelières, à déguerpir du moulin de la Ronde, faute du payement d’une rente de 38 mines de mouture et de deux mines de froment, due au même seigneur de Touffou. (Arch. de la Vienne, G. 207.) Le 19 juin de la même année, il fit hommage au duc de Berry pour divers usages qui lui appartenaient dans la forêt de Moulière. L’acte en fut produit, lors d’une réformation des forêts, par Jean Bellucheau, échevin de Poitiers, seigneur de l’hôtel des Arables à Bonneuil-Matours, autrement dit Crémault, le 30 août 1529, et transcrit sur un registre de la juridiction des eaux et forêts. (Arch. nat., Z1e 320, fol. 103.)

Nous avons découvert plusieurs autres documents intéressants pour la biographie de Jean de Cramaut, et entre autres le testament de son oncle le cardinal évêque de Poitiers, dont il fut l’héritier. Ils nous serviront à compléter cette notice, déjà longue, dans un autre endroit de cette publication. Si l’on en croit le P. Anselme, Jean aurait eu de son mariage avec Orable de Montléon deux filles : Jeanne, mariée : 1° à Jourdain Tizon, 2° à Aymar de Pressac ; et Marguerite, qui épousa : 1° Guillaume des Prez, 2° Bertrand Rataut. (Hist. généal., t. II, p. 44.) Toutefois A. Du Chesne dit, et avec raison, croyons-nous, que Jeanne et Marguerite n’étaient point les filles, mais les sœurs de Jean de Cramaut. (Hist. de la maison des Chasteigners, p. 240.)

, chevalier, et Orable de Montleon, sa femme, fille de feu Regnaut de Montleon, chevalier, jadiz sire de Toufou et maistre de nostre hostel, contenant que, ou temps que derrenierement le prince de Gales tenoit le duchié de Guienne pour le roy d’Angleterre, son pere, le dit prince pour ce que le dit feu Regnaut de Montleon

Voy. la notice sur Renaud Ier de Montléon (tome IV, p. 354, note).

estoit bon et loyal François, fist prendre et emprisonner ycellui de Montleon, et après pluseurs grans dommages qu’il lui fist faire de son propre corps, donna le lieu de Toufou et les appartenances à un Anglois appellé Jehan d’Angle

Sur ce Jean d’Angle, voy. id., p. 313 et 355, notes.

, chevalier, dit le bastart d’Angle, qui povoit valoir jusques à iiic livres tournois de rente, auquel don consenti le dit de Montleon, et oultre ce, le transporta, si comme l’en dit, au dit Anglois, pour doubte de pis avoir. Et aussi Jehan Ysoré

Jean Ysoré, seigneur de la Varenne, gendre de Guichard d’Angle et beau-frère de Jean, dit le bâtard d’Angle, a été de même l’objet d’une notice dans le précédent volume, p. 313, note.

, chevalier du païs de Touraine, le quel se disoit avoir droit au dit lieu et appartenances, transporta au dit Anglois tout le droit qu’il povoit avoir au dit lieu et appartenances. Toutevoies par trait de temps, c’est assavoir quant le païs de Poitou, ou quel est assise la dicte terre, fu retourné à l’obeissance de monseigneur le roy, que Diex absoille, et à la nostre, le dit de Montleon reprist ycelle terre et d’icelle a joy et usé paisiblement jusques au jour de son trespas ; et après le dit trespas, en a joy Regnaut de Montleon, fil et heritier du dit feu Regnaut de Montleon

Renaud II de Montléon succéda aux seigneuries de Touffou et d’Abain, et n’avait que dix-huit mois lorsque son père mourut. « A l’occasion de quoy, dit A. Du Chesne, Jean Ysoré, qui prétendoit divers droits sur Touffou, luy donna de grandes traverses et plus encore Jean de Cramaut, son beau-frère, qui s’empara du bien soubs couleur d’en avoir esté estably capitaine par le roy Charles VI, quoy que par des lettres de 1387 (celles que nous publions ici), il fait dire au roy que ce Renaut de Montléon, frère de sa femme, luy en bailla la possession. » (Hist. généal. de la maison des Chasteigners, in-fol., 1634, p. 240-241.) Quoi qu’en dise le savant généalogiste, ces lettres contiennent l’expression de la vérité, et Jean de Cramaut fut mis en possession de Touffou de la façon la plus régulière et la plus légale. L’acte de tutelle de Renaud II et une transaction conclue en conséquence en fournissent la preuve irréfutable. Le 2 mars 1387 n.s., Renaud de Vivonne, sire de Thors, sénéchal de Poitou, nomma tuteur de Renaud et de Béatrix de Montléon, enfants mineurs de Renaud Ier et d’Orable de Preuilly, leur parent (il n’est pas dit à quel degré), Lionnet de Montléon, sur la présentation et à la requête des parents et amis du défunt réunis. Ce conseil de famille se composait de l’abbé de Saint-Jouin de Marnes, de Guy de la Touche, Louvet de Billy, Alais de Brisay, Briand de Colombiers, Renaud de Mondion, chevaliers, Eschivart de Preuilly, Guillaume Aigret, Perrot de Couhé, Ringuet de Brisay, Jean de Targé et plusieurs autres. Dans cet acte il est expressément stipulé que le tuteur aura pour mission d’assigner sur la terre de Touffou la rente reconnue à Orable de Montléon par son père, lors de son contrat de mariage. C’est à ce titre que l’acte de tutelle est inséré dans le règlement de la dot de la fille aînée de Renaud Ier.

Ce traité conclu, pour éviter un procès imminent entre Jean de Cramaut pour lui et sa femme, d’une part, et Lionnet de Montléon, au nom des deux mineurs, Renaud II et Béatrix, porte la date du 20 juillet 1387. Il y est dit que, lors de son premier mariage avec feu Huet Odart, seigneur de Mons, Orable de Montléon avait eu en dot une rente annuelle de 100 livres, assise sur la terre de Villiers et la tour de la Grimaudière, plus 10 autres livres de rente. Quand elle épousa ensuite Jean de Cramaut, Renaud de Montléon, son père, lui fit les mêmes conditions, et le nouveau contrat était exactement le même que le premier, stipulant qu’après la mort du père, Villiers et la Grimaudière deviendraient la propriété absolue des époux. Simon de Cramaut, alors évêque de Béziers (c’est-à-dire de mars 1383 à juin 1384), oncle dudit Jean, se porta fort pour son neveu et promit de lui faire ratifier ce contrat, ce qui fut fait. Renaud le père vendit aussi au même Simon de Cramaut vingt livres de rente annuelle ; mais il mourut sans avoir assigné cette rente, non plus que les 10 livres complémentaires de la dot de sa fille aînée. En outre, les autres héritiers dudit Renaud, c’est-à-dire son fils et sa fille mineurs, tenaient de fait Villiers et la tour de la Grimaudière, et refusaient de s’en dessaisir, comme ils le devaient aux termes du contrat de mariage. Comme transaction, la terre et le fort de Touffou, y compris les dépendances et acquisitions nouvelles faites par Renaud Ier, furent substitués aux deux autres terres pour tenir lieu non seulement des 100 livres, mais encore des 10 livres complémentaires, et même des 20 livres de rente dues à Simon de Cramaut, sauf certaines réserves pour le cas où les époux décéderaient sans enfants. (Arch. nat., X1c 55.)

Du Chesne dit encore que Renaud II « étant venu en âge », après la bataille d’Azincourt où il avait été fait prisonnier, reprit Touffou sur son beau-frère avec l’assistance d’Olivier de Riz, de Brunet de Frozes, Louis de Marconnay, Jean de Montléon et frère Jean de Montfaucon, c’est-à-dire par la violence. Poursuivi pour ce fait par Jean de Cramaut et le cardinal de Cramaut, son oncle, le Parlement ordonna, en 1418, que Touffou serait saisi et mis en garde entre les mains du sieur de Prie. — En 1415, Renaud II avait trente-deux ans. S’il avait été lésé par le fait de l’occupation de Touffou par son beau-frère, il aurait été long à le reconnaître et à en tirer vengeance. Qu’il désirât, lui le chef de la famille, rentrer en possession de cette terre qui avait été considérée par ses aïeux comme leur principal fief, rien de plus naturel. Sans doute il négocia avec Jean de Cramaut à ce sujet, et de ces négociations sortirent des engagements qui, non ou mal exécutés, occasionnèrent une brouille, d’où résulta l’attaque sus-mentionnée, puis le procès au Parlement. Un arrêt rendu en 1429 fut favorable à Renaud de Montléon et lui restitua Touffou. Du moins il fit hommage pour cette seigneurie, en 1442, à l’évêque de Poitiers. On cite une transaction passée à Loudun, le 18 mars 1453, entre Renaud et sa sœur Orable, veuve de Jean de Cramaut, par laquelle il lui cède la terre de Chincé, « pour partage de tous ses droits. » (Du Chesne, op. cit., Preuves, p. 115). Si cette date est exacte, la veuve de Jean de Cramaut vécut jusqu’à quatre-vingt-dix ans.

, qui depuiz l’a baillié à Jehan de Cramaut, chevalier, et à la dicte Orable de Montleon, sa femme, par certaine forme et maniere plus à plain contenue ès lettres sur ce faictes, et encores le dit Jehan de Cramaut et sa dicte femme, suer dudit Regnaut, en joissent sanz aucun empeschement. Mais pour ce que aucuns pourroient dire que tout ce qui estoit dudit Jehan d’Angle, qui estoit et moru obeissant et tenant le parti de nostre adversaire d’Angleterre, nous fu confisqué et acquis, et nous doit appartenir, et que ainsi la dicte terre est nostre et nous appartient par la confiscacion dessuz dicte, si comme par rigueur il se pourroit faire raisonnablement, nous, consideré ce que dit est et que, en hayne du dit monseigneur que Diex absoille et de nous, le dit de Montleon fu emprisonné, comme dessuz est dit et lui convint consentir au don et faire le transport dessuz dit aus diz Jehan de Cramaut et Orable, sa femme, pour eulz, leurs hoirs et successeurs, avons donné, quicté et cedé, donnons, quictons et cedons ou cas dessuz dit, de grace especial et de certaine science par ces presentes le dit ban et tout tel droit et action qui en ycellui nous puet et doit appartenir, pour cause ou occasion des choses dessuz dictes, à tenir ycellui lieu de Toufou et appartenances par les diz mariez perpetuelment, comme leur propre chose et heritage, tout en la forme et maniere comme le dit feu Regnaut de Montleon les avoit et tenoit et possidoit, au jour qu’il fu pris, et qu’il ala de vie à trespassement, comme dit est. Si donnons en mandement, par ces mesmes lettres, à noz amez et feaulz les gens de noz comptes à Paris, au bailli de Touraine et à touz noz justiciers et officiers, presens et avenir, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, ou à leurs lieuxtenans, que de nostre present don et grace facent et laissent joir et user paisiblement les diz mariez et chascun d’eulz, sans les empeschier ou souffrir empeschier au contraire. Et que ce soit chose ferme et estable à tous jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, en nostre chastel du Louvre, le xiiiie jour de janvier l’an de grace mil ccc. iiiixx et sept, et de nostre regne le viiime.

Par le roy, messeigneurs le duc de Berry et le cardinal de Laon

Pierre Aycelin, cardinal de Montaigu, évêque de Laon de 1371 à 1385.

presens. Bordes.

DCCXV Janvier 1388

Rémission accordée à Jeanne Desmier, veuve de Pierre de Chardes, chambrière de Jean Birocheau, chanoine de Menigoute, détenue dans les prisons de l’abbé de Saint-Maixent pour un vol chez son maître.

AN JJ. 132, n° 19, fol. 9 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 345-348

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, de la partie des amis charnelz de Jehanne Desmere, vefve de feu Pierre de Chardes, prisonniere ès prisons de l’abbé de Saint Maixent en Poitou, nous avoir esté exposé que, comme jà pieça la dicte Jehanne servist comme chamberiere Jehan Birochea, chanoine de Menigoste, demourant lors au lieu de Menigoste, et il soit ainsi que, lui estant ou dit service et le dit chanoine estant absent de son hostel, elle print la clef d’un forcier ou coffre du dit chanoine qui estoit sur une cimaise de la cheminée d’icellui chanoine, de laquelle clef par temptacion de l’ennemi, elle ouvri le dit forcier ou coffre et print dedens une bourse qui y estoit, où il avoit grant quantité de florins, sept frans et demi ou environ, et avec ce print et emporta hors d’icellui hostel avec les diz sept frans et demi, deux linceux ou draps, une couverture et un cortieu qui estoient de petite valeur ; pour lequel fait la dicte Jehanne a esté poursuye et prise dedens Saint Maixent, et mise et detenue prisonniere ès dictes prisons du dit abbé de Saint Maixent, en quel justice et seignorie elle a esté prise, et par le seneschal ou juge d’icellui abbé, par devant lequel elle a recognu avoir fait le dit furt, elle a esté condempnée à soustenir pour ce peine corporele, de laquelle condempnacion Regnaut de Vivonne, chevalier, seigneur de Thors, a appellé, ou son procureur pour lui, pour et ou nom de la dicte Jehanne, en nostre court de Parlement

Jeanne Desmier avait été prise par les officiers de l’abbaye de Saint-Maixent et amenée en jugement par devant Berthomé Poussart, juge et sénéchal des religieux, où elle avoua sa culpabilité. Ledit sénéchal fut alors sommé de remettre sa prisonnière entre les mains des officiers de Renaud de Vivonne. Voici pourquoi. Le sire de Thors prétendait qu’à cause de son château d’Aubigny, il était vigier de la ville de Saint-Maixent et qu’en raison de ladite vigerie il avait droit de juridiction en ladite ville, « mesmement que toutes et quantes fois aucun est pris ou emprisonné par les gens et officiers des diz religieuz pour cause de larrecin ou de meurtre, ou autre crime, et qu’il a confessé ou est convaincu avoir commis le dit larrecin ou meurtre, ou autre crime, pour lequel il doit prandre mort ou avoir copé aucun de ses membres, icellui crimineulx doit tantost estre bailhé par les officiers des diz religieuz en certain lieu, appellé le Cul du leon, en ladite ville de Saint Maixent, au dit sire de Thors ou à ses gens, avecques les chouses emblées et ses biens qu’il avoit avec soy, quant il fut pris, pour le juger et en faire tout ce qu’il appartiendra… » Renaud de Vivonne disait que sur ce droit et plusieurs autres que lui conférait ladite vigerie un débat avait été soulevé entre un de ses prédécesseurs, seigneur d’Aubigny, et l’abbaye de Saint-Maixent, et qu’à la suite un règlement avait été passé d’un commun accord par les parties, règlement contenant la reconnaissance formelle de ce droit, dont ses ancêtres et lui avaient toujours joui depuis.

Néanmoins Berthomé Poussart refusa de livrer Jeanne Desmier au procureur du sire de Thors, et l’affaire fut portée en appel au Parlement. La cause fut plaidée et les parties appointées en faits contraires. Alors, considérant que Renaud de Vivonne était « vassal de la dite abbaye de pluseurs grans terres et ne voudroit point avoir matiere de plait avec les diz abbé et religieuz, ni les diz religieuz contre lui », on résolut de part et d’autre de traiter à l’amiable. Par cette transaction le droit du sire de Thors fut de nouveau reconnu, tel qu’il est exprimé ci-dessus. Les crimes entraînant la peine de mort ou la perte d’un membre seront jugés par ses officiers, auxquels appartiendra aussi l’exécution. Seulement, quand il y aura doute sur l’issue du procès et sur la peine à encourir, le sénéchal de l’abbaye sera juge du cas. A cet effet, il est décidé pour l’avenir qu’à leur entrée en fonctions, les sénéchaux de l’abbaye de Saint-Maixent prêteront serment de juger les cas douteux loyalement et sans favoriser ni l’abbaye ni le seigneur d’Aubigny. Pour les autres articles non modifiés par le nouveau traité, on promit d’un côté comme de l’autre de garder et d’exécuter l’ancienne ordonnance, convenue entre l’abbaye et Sebran Chabot, seigneur d’Aubigny, prédécesseur de Renaud de Vivonne. Cet accord porte la date du 20 août 1387, et fut homologué au Parlement le 11 janvier 1388 n.s. (Arch. nat., X1c 56.)

. Pour le quel appel la punicion d’icelle Jehanne s’est sursiz, et est demourée ès dictes prisons où elle a esté et est, par l’espace d’un an et demi, à grant povreté et misere. Neantmoins, si comme on dit, le dit abbé et le dit chevalier sont sur esperance d’accort pour ycellui appel, par quoy les amis d’icelle Jehanne, doubtans que la dicte condempnacion ne sortisse son effect, et pour ce, nous ont très humblement supplié que, attendu que la dicte Jehanne a souffert, durant le temps dessuz dit, grant peine, durté et misere de prison, et fait encores de jour en jour, et que en touz ses autres faiz, elle a esté de bonne fame, vie et renommée, sanz estre actainte ne reprochée d’aucun autre vilain blasme, nous sur ce à ycelle Jehanne vueillons extendre nostre grace et misericorde. Pour quoy nous, ces choses considerées, à la dicte Jehanne voulans en ceste partie, ou cas dessuz dit, temperer rigueur de justice en pitié et misericorde, satisfaction faicte à partie avant toute euvre, avons quictié, remis et pardonné, et par la teneur de ces presentes, de nostre grace especial, quictons, remettons et pardonnons le dit fait avec toute peine, offense et amende corporele, criminele et civile, en quoy pour le fait et occasion dessuz diz elle puet estre encourue envers nous et justice, et la restituons à plain à sa bonne fame, renommée, au païs et à ses biens non confisquez ; et quant à ce à nostre procureur nous imposons silence perpetuel, par la teneur de ces mesmes presentes. Par lesquelles nous donnons en mandement au seneschal de Xanctonge, gouverneur de la Rochelle, et à touz noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de nostre dicte grace et remission la dicte Jehanne facent, sueffrent et laissent joir et user paisiblement, sanz lui donner destourbier ou empeschement aucun au contraire ; et son corps pour ce detenu prisonnier, avec ses biens, s’aucuns en a arrestez, priz ou empeschiez et non confisquez, lui mettent ou facent mettre sanz delay à plaine delivrance. Et pour ce que ce soit ferme et estable chose à tousjours, nous avons fait mettre à ces presentes lettres nostre seel. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou mois de janvier l’an de grace mil ccc. iiiixx et sept, et de nostre regne le viiime.

Par le roy, à la relacion du conseil. Guichart.

DCCXVI Janvier 1388

Rémission accordée à Guillaume Montourneau, cordonnier de Mirebeau, pour un meurtre commis en cas de légitime défense et à la suite d’une rixe survenue à la taverne du curé de Seuilly.

AN JJ. 132, n° 22, fol. 11 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 349-352

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie des amis charnelz de Guillaume Montourneau, cordouannier, chargié de femme et d’un petit enfant, comme l’endemain de la feste saint Laurens derrenierement passé

Le 11 août 1387.

, environ heure de nonne, le dit Guillaume et pluseurs autres compaignons, entre lesquelz estoit un appellé Philippon Rayve, feussent alez esbatre chiez le curé de Suyllé près de Mirebeau, le quel vendoit vin à detail, et illec eussent joué à la bille, et après ce le dit Philippon se feust departi de la dicte compaignie et alé en la dicte ville, en un lieu où estoit la femme de son frere et la mere d’icelle femme, et depuis retourna ycellui Philippon en la dicte compaignie. Auquel le dit Guillaume presenta le vin à boire amiablement, mais le dit Philippon le reffusa et lui dist qu’il n’estoit mie digne d’estre en bonne compaignie et qu’il estoit un faulx garçon et mauvais coqu. Et lors le dit Guillaume lui respondi que non estoit, et que sa femme estoit bonne preude femme ; et le dit Philippon lui respondi : « Tu mens, car c’est une très mauvaise putain », et se print le dit Philippon au dit Guillaume et lui donna une buffe ; et après ce print une bille de bois dont ilz avoient joué et la lansa contre le dit Guillaume, qui bessa la teste pour obvier à la male volenté du dit Philippon. Et furent departiz par leurs diz compaignons ; et après ces choses, jouerent de rechief ensemble, et quant vint au partir, le dit Guillaume s’en parti premier, et en soy en venant en la dicte ville de Mirebeau, sanz coustel, espée ne baston, le dit Philippon se avança de venir après lui, tenent un grant baston en sa main, et tant qu’il aconçut en chemin le dit Guillaume et print son dit baston à deux mains et en fery le dit Guillaume par les bras et par les jambes tant qu’il chut à terre, et le blessa moult griefment. Et ainsi comme le dit Guillaume se cuida redrecier, le dit Philippon le cuida derechief ferir du dit baston, mais le dit Guillaume happa le dit baston et se leva, et après ce le dit Philippon lui dist : « Laisse moi aler mon baston » ; lequel Guillaume lui dist que non feroit, car il le veoit trop mal meu et obstiné de lui mal faire, et qu’il l’avoit desjà moult blecié, et le dit Philippon lui dist : « Je ne t’en ferray plus ». Et adont le dit Guillaume le lui laissa aler ; et quant le dit Philippon tint le dit baston, il en fery de rechief le dit Guillaume par les bras, et lui en donna deux coups, et lors le dit Guillaume lui osta derechief le dit baston et se mist à la voye pour s’en aler ; mais le dit Philippon en perseverant en sa male volenté, veant qu’il avoit perdu son dit baston, print une pierre et en donna un grant cop au dit Guillaume par le costé. Et adonc le dit Guillaume se retourna et le bouta contre un tesier, et depuiz le dit Philippon relevé print une autre pierre pour en ferir le dit Guillaume ; et lors ycellui Guillaume, veant la grant fureur du dit Philippon, en soy defendant et en repellant force par force, pour obvier au peril de mort où il se veoit, fery le dit Philippon du poing par les dens et après du baston qu’il lui avoit osté un seul cop sur le bras, si comme il lui fu avis. Et ce fait, s’en vint le dit Guillaume au dit lieu de Mirebeau, et le dit Philippon s’en retourna au dit lieu de Suyllé et lava les plaies qu’il avoit eues, tant ycelle journée comme en pluseurs autres meslées qu’il avoit faictes contre pluseurs autres personnes ; et quant il eut ainsi lavées les dictes plaies, il s’en retourna au dit lieu de Mirebeau, environ heure de vespres, et le dit jour accusa à la justice du lieu le dit Guillaume, en disant qu’il lui avoit donné le cop de la mort ; et ycellui jour mesmes, environ heure de mienuit, ala le dit Philippon de vie à trespassement. Pour occasion du quel fait ainsi avenu, comme dit est, le dit Guillaume est detenu prisonnier à Mirebeau, où il a desjà esté par grant temps à grant misere et povreté, si comme les diz amis charnelz dient, en nous humblement suppliant que, actendue la qualité du dit fait et que le dit Guillaume fery le dit Philippon en soy defendant et en repellant force par force, comme dit est, après ce que le dit Philippon l’eut injurié et feru par pluseurs foiz, et que le dit Philippon estoit brigueux et rioteux homme, et que ycellui Guillaume a esté touz les temps de sa vie homme de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sanz avoir esté repris ne convaincus d’aucun villain blasme ou reprouche, nous lui vueillons extendre en ceste partie nostre grace et misericorde. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans atremper rigueur de justice par pitié et misericorde, au dit Guillaume, ou cas dessuz dit, avons quictié, remis et pardonné, et par ces presentes quictons, remettons et pardonnons, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, le fait dessuz dit, avecques le ban et toute peine, amende corporelle, criminelle et civile en quoy il puet pour ce estre encouru envers nous, et le avons restitué et restituons à ses bonnes fame et renommée, satisfacion faicte à partie premierement et avant toute euvre, se faicte n’est, à fin civile tant seulement. Si donnons en mandement au gouverneur du bailliage de Touraine et à touz noz autres justiciers et officiers, presens et avenir, ou à leurs lieux tenans et à chascun d’eulz, que de nostre presente grace et octroy facent, sueffrent et laissent le dit Guillaume Montourneau joir et user plainement et paisiblement, sanz le molester ou souffrir estre molesté, ou traveiller en aucune maniere au contraire. Et pour ce que ce soit chose ferme et estable à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou mois de janvier l’an de grace mil ccc. iiiixx et sept, et de nostre regne le viiime.

Es requestes de l’ostel. J. de Crespy.

DCCXVII Janvier 1388

Concession à Guy de La Trémoïlle, sr de Sully, chambellan du roi, d’une prise d’eau sur les fontaines de la ville de Paris, pour la commodité de son hôtel de la rue des Bourdonnais

L’hôtel de La Trémoïlle, rue des Bourdonnais, était connu au xive siècle sous le nom de Grande maison aux Carneaux (créneaux). Philippe duc d’Orléans, second fils de Philippe de Valois, qui mourut le 1er septembre 1375, est le premier possesseur connu de cet hôtel. Peu de temps avant sa mort, il le vendit à Guy VI de La Trémoïlle.

, au moins de préjudice possible pour les hôtels du voisinage, appartenant au roi, au duc de Berry et au duc de Bourgogne, les frais de conduite étant mis à la charge de la ville. Paris, janvier 1388

Acte publié par M. le duc de La Trémoïlle, Livre de Comptes de Guy de La Trémoïlle et Marie de Sully. Nantes, 1887, in-4°. Appendice, p. 188.

.

AN JJ. 132, n° 43, fol. 24 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 352

DCCXVIII 1er février 1388

Rémission accordée à Guillaume Dorin, écuyer, pour le meurtre de Guillaume de Chaumes, à Leigné.

AN JJ. 132, n° 60, fol. 35 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 352-354

Charles, par la grace, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté supplié de la partie de Guillaume Dorin, escuier, que comme, environ Noel derrenier passé ou la Chandeleur ot un an, le dit suppliant fust en la ville de Ligné, en la quelle ville il sot que un appellé Guillaume de Chaumes, frere d’un appellé Symon de Chaumes, au quel un jour, environ le tiers ou quart d’an par avant, ot certainne grant riote pour cause de ce qu’il lui avoit volu eslever un grant blasme, comme de vouloir faire plaindre la femme de son dit frere du dit escuier, pour le vouloir deshonorer, et en oultre de fait l’avoit cuidié ferir d’une fourche de fer par mi le corps, et non obstant qu’il lui eust pardonné à sa requeste et d’aucunes personnes qui s’en meslerent, depuis en traïson, quant le dit suppliant lui eust pardonné et ne se doubtoit de riens, l’eust le dit de Chaumes derechief cuidié ferir de la dicte fourche par derriere, pour le cuidier murtrir, et après, quant il ot failli, s’en fut fouy si que le dit suppliant ne le pot ataindre, maiz depuis s’en parti le dit suppliant pour aler nous servir en noz guerres, où il avoit demouré grant temps, et oy dire qu’il estoit en l’ostel de Thomas de Ligné, ou quel il entra et trouva le dit de Chaumes ; le dit suppliant courourcié et esmeu des injures et vilenies que le dit de Chaumes lui avoit faictes, comme dessus est dit, lui eust donné par chaleur deux cops d’un baston qu’il tenoit, non cuidant le blecier ne navrer mortelment, dont assez tost après mort s’ensuy en la personne du dit Guillaume de Chaumes, requerant sur ce nostre grace. Pour quoy nous, consideré ce que dit est et aussi qui nous a esté raporté par genz notables, noz officiers et capitaines de noz gens d’armes, à qui nous adjoustons plaine foy, des notables services que le dit suppliant nous a faiz et est disposé à faire en noz guerres et autrement, voulans en ce cas misericorde et pitié preferer à rigueur de justice, au dit suppliant, ou cas dessus dit, avons quictié, remis et pardonné, et par ces presentes quictons, remettons et pardonnons, de nostre grace especial et auctorité royal, tout le fait dessus dit, avec toute peine, amende et offense corporele, criminele et civile que il pourroit pour ce avoir encouru envers nous, et le restituons à sa bonne fame, renommée et à ses biens quelxconques, satisfaction faicte à partie premierement et avant toute euvre. Si donnons en mandement au seneschal de Xantonge et à touz noz autres justiciers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulx, que de nostre presente grace et remission facent et laissent le dit suppliant joir et user paisiblement, et contre la teneur d’icelle ne le molestent ou empeschent en aucune maniere, mais se son corps ou aucuns de ses biens estoient pour ce prins, saisiz ou arrestez, ores ne ou temps à venir, lui facent mettre à plaine delivrance sanz delay. Et que ce soit ferme chose et estable à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, le premier jour du mois de fevrier l’an de grace mil trois cens quatre vins et sept, et de nostre regne le huitiesme.

Par le roy, à la relacion de messeigneurs les ducs de Berri et de Bourgongne. P. de Sauls.

DCCXIX Février 1388

Rémission accordée à Jean Pillat, de Romans, pour le meurtre de Mathé Aubereau.

AN JJ. 132, n° 112, fol. 62 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 354-356

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté humblement exposé de la partie de Jehan Pillat, povre homme, laboureur de bras, demourant à Romans en Poitou, que comme, le vendredi xxiiiie jour de janvier derrenierement passé, le dit exposant et un appellé Mathé Aubereau, dit Paris, labourassent ou fouyssent ès vignes du prieur du dit lieu de Romans, avec pluseurs autres laboureurs, du quel prioré

Prieuré sous le vocable de Saint-Symphorien.

qui est membre de l’abbaye de Saint Maixant en Poitou, laquelle est de fondacion royal et nostre subjecte sanz moien, tant en chief comme en membres, le dit exposant est subget, et les diz laboureurs estans est dictes vignes et labourans en ycelles, debat se feust meu entre le dit exposant et le dit Mathé Aubereau, et eussent dit l’un à l’autre pluseurs paroles injurieuses, et de cest debat et de parler injurieusement l’un à l’autre les autres laboureurs qui avec eulz estoient les eussent fait cessier et deporter ; toutevoies, quant ilz eurent fait leur journée et que chascun se departoit pour aler à son hostel, le dit Mathé Aubereau qui encores estoit mal meuz et courrouciez contre le dit exposant, en demonstrant son ire et son courroux, dist à ycellui exposant qu’il estoit ribaut, coux, avec pluseurs autres injures qu’il avoit par pluseurs foiz dictes devant. Et lors, le dit exposant lui respondi qu’il mentoit mauvaisement, comme larron qu’il estoit, et comme courrouciez, du premier mouvement qui n’est pas en la puissance de homme, gecta contre le dit Mathé Aubereau sa besoche ou besche, de la quelle il avoit ouvré la journée, et en frappa le dit Aubereau par derriere en sa jambe auprès du genoil et telement qu’il lui en fist sanc et playe ; et combien que plus il ne le ferist de la dicte besche ne d’autre chose en aucune maniere, neantmains du dit cop mort s’en est ensuye en la personne du dit Aubereau, si comme l’en dit. Suppliant que, consideré ce que dit est et que en l’eure il fu mal meuz et courrouciez de ce que le dit Mathé Aubereau lui disoit villennie et le appelloit coux en la presence de pluseurs, et par ce avoit juste doleur, et que le cas avint merveilleusement et par grant fortune, sanz malvais propos, aguet ou volenté qu’il eust contre le dit Mathé Aubereau, le quel estoit renommez d’estre larron et de très mauvaise et deshonneste vie, et que le dit suppliant tout le temps de sa vie a esté homme de bonne vie et renommée et d’onneste conversacion, non repris d’aucun autre vilain cas, nous lui vueillons sur ce extendre nostre grace et misericorde. Pour quoy nous, voulans preferer misericorde à rigueur de justice, à ycellui exposant ou cas dessuz dit avons quictié, remis et pardonné, quictons, remettons et pardonnons, par la teneur de ces presentes, de nostre auctorité royal et grace especial, le dit fait, avec toute peine et amende corporele, criminele et civile, en quoy il est encouru envers nous, pour occasion de ce que dit est, et le restituons et remettons à sa bonne fame et renommée, au païs et à ses biens pour ce non confisquez, satisfaction faicte à partie premierement et avant toute euvre, civilement tant seulement. Si donnons en mandement au gouverneur de la Rochelle et seneschal de Xanctonge, au gouverneur du bailliage de Touraine, et à touz noz autres justiciers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que le dit exposant il facent, sueffrent et laissent joir et user paisiblement de nostre presente grace et remission, sanz le molester ou traveillier, faire ou souffrir molester ou traveillier pour occasion de ce que dit est, en corps ou en biens, au contraire, mais se son corps ou ses biens estoient pour ce pris, arrestez, detenuz ou empeschiez en aucune maniere, qu’il les lui delivrent, rendent et restituent, et mettent ou facent mettre à plaine delivrance. Et afin que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou mois de fevrier l’an de grace mil ccc. iiiixx et vii, et de nostre regne le viiime.

Par le conseil. G. Niczon. — Corbie.

DCCXX Mars 1388

Rémission accordée à Élie Chaudrier, chevalier, et à ses complices parmi lesquels son frère, Louis Chaudrier, écuyer, pour violence exercée à la Rochelle, sur la personne de Jeannette de la Roche poitevine.

AN JJ. 132, n° 158, fol. 87 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 356-360

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, de la partie des amis charnelz de Helie Chauderier

Élie et Louis Chaudrier étaient les fils de Jean Chaudrier, maire, puis gouverneur de la Rochelle, et de Jeanne Larchevêque (voy. le vol. précédent, p. 264, note) ; ils étaient mineurs lors de la mort de leur père. L’aîné eut en héritage la terre de Dompierre en Aunis, dont le roi avait fait don à Jean Chaudrier, le 16 mai 1370 et le 8 janvier 1373, mais qui lui était disputée par Raymond de Mareuil, chevalier. (Voy. un arrêt du Parlement du 16 février 1380 n.s., X1a 29, fol. 125 v°.) Elle lui resta en définitive, car nous le retrouvons qualifié seigneur de Dompierre dans un acte d’avril 1391. Son sénéchal de ce lieu avait laissé échapper un prisonnier, et se fit délivrer des lettres de rémission pour sa coupable négligence (JJ. 140, n° 215, fol. 246). Les comptes de tutelle d’Élie et Louis Chaudrier donnèrent lieu entre ceux-ci et Jean du Pois à un procès au Parlement, qui se termina par un accord homologué le 29 juillet 1390 (X1c 61, rouleau). Les deux frères eurent bien d’autres affaires litigieuses sur les bras, et il faudrait faire de nombreux emprunts aux registres de la cour, si on voulait les exposer toutes. Quelques-unes n’étaient du reste pas réglées lors du décès d’Élie qui mourut âgé seulement de trente-six ans, un peu avant le mois d’août 1401, laissant de Blanche de Montendre deux jeunes enfants, Jean et Jeanne. Ceux-ci furent placés sous la tutelle de Jean de Harpedenne, de Robert du Vair et de Jean Fetiteau, et les procès continuèrent en leurs noms et au nom de leur oncle, Louis Chaudrier. (Voy. notamment X1a 48, fol. 98 v°, 204 ; X1a 49, fol. 41 ; X1a 50, fol. 14, 312.)

, chevalier, de l’aage de xx. iii ans ou environ, Loys Chauderier, son frere, escuier, Jehan Maignien

Jean Maignen était lieutenant de Jean Chaudrier, gouverneur de la Rochelle, le 10 juillet 1376, lors d’un différend que celui-ci eut avec le grand prieuré d’Aquitaine et le commandeur de Bourgneuf, au sujet d’un marché créé à Dompierre (X1a 25, fol. 232 v°). C’était sans doute le père du compagnon d’Élie Chaudrier.

, Arnaut Courson, Jehan Galiot et Jehan Herbert, familiers et serviteurs des diz chevalier et escuier, que comme, environ le mois d’aoust derrenier passé, le dit chevalier qui n’estoit ne n’est en aucun lien de mariage, par esbatement et comme meu de jonesse, demanda à aucuns de ses diz serviteurs se ilz savoient aucune fillette, la quelle il peust bonnement aler veoir, et que nature le contraignoit à ce. Et lors aucuns de ses diz serviteurs lui respondirent que Perrin Pepin, demourant à la Rochelle, tenoit en concubinage une belle jeune femme, qui estoit du païs de Poitou, nommée Jehannette de la Roche, la quelle l’en disoit que de long temps elle avoit delaissié son mari, et que bien y povoit aler, mesmement qu’elle estoit femme diffamée. Adont le dit chevalier dist à ses diz frere et serviteurs : « Menez m’y, je y vueil aler. » Et lors le dit chevalier se mist à la voye pour y aler, et ses diz frere et serviteurs avec lui, et vindrent jusques à l’ostel du dit Perrin Pepin, sur heure de l’entrée de la nuit, et quant ilz furent à l’uys du dit Perrin, le dit chevalier et ses complices hucherent le dit Perrin, en lui disant par pluseurs foiz : « Ouvres ton huis, ouvres » ; le quel ne respondit aucun mot, ne autre pour lui. Et pour ce, le dit chevalier, comme indigné de ce que le dit Perrin ne lui respondoit, ne autre pour lui, feri du pié à l’uis du dit Perrin, lequel [huis] estoit de floible et petite estoffe, et le rompi, ou la fermeture d’icellui. Et ycellui huis rompu, entrerent les diz chevalier, escuier et serviteurs dedens le dit hostel du dit Perrin, et trouverent le dit Perrin gisant en son lit ; et lors, le dit chevalier lui demanda l’où estoit Jehannete de la Roche. Le quel Perrin lui dist, jura et afferma par grans seremens que en son hostel n’estoit point ne ne savoit l’où elle estoit. Et lors, le dit chevalier sacha son coustel et en fery deux cops le dit Perrin et lui fist une playe ou braz, et en ce faisant, aucuns de ses diz serviteurs trouverent la dicte Jehannette ou dit hostel, montée sur un tref

Pièce de bois.

, et la firent descendre ; et ycelle descendue, le dit chevalier la prist et mena en une chambre du dit hostel, et la cognut charnelment. Et depuiz ce la dicte Jehannete s’est venue plaindre à justice, en disant que le dit chevalier, acompaigné de ses diz frere et serviteurs, l’avoit efforcée et cogneue charnelment oultre son gré. Pour cause et occasion du quel fait, le gouverneur de nostre ville de la Rochelle ou son lieutenant, par certains noz sergens ou commis, vouldrent proceder à la prise des corps des dessuz nommez et de chascun d’eulz, et de leurs biens. Lesquelz, doubtans rigueur de justice, firent en ceste matiere certaines appellation ou appellations du dit gouverneur ou de son lieutenant, et de noz diz sergens ou commis, à nous ou à nostre court de Parlement, en laquelle court encores est pendent ycelle appellation. Suppliant humblement les diz chevalier, escuier et serviteurs, que, comme ilz soient gens de bonne fame, renommée, et les diz chevalier et escuier nous aient bien et lealment servi en noz guerres et servent continuelment, et le dit fait soit avenu au dit chevalier, comme contraint par jonesse, cuidant non grandement mesprendre ou offenser, eu regart à la renommée

Le texte porte « revenue », erreur évidente.

de la dicte femme, nous leur vueillons sur ce impartir nostre grace. Pour ce est il que nous, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, aiens en memoire les diz services à nous faiz par les diz chevalier et escuier, et esperons qu’ils nous facent ou temps avenir, et aussi les bons et agreables services que feu Jehan Chauderier, chevalier, leur pere, fist en son vivant à nostre très chier seigneur et pere, que Diex pardoint, à yceulz chevalier et escuier, et à leurs diz serviteurs dessus nommez, et à chascun d’eulz, pour contemplacion de pluseurs noz chambellans et autres noz serviteurs, qui de ce nous ont supplié et requis, tout le fait dessuz dit, avec toute peine, amende et offense corporele, criminele et civile, en quoy ilz sont et pevent estre encouruz et encheuz envers nous et justice, pour cause et occasion du fait dessus dit, avons quicté, remis et pardonné, quictons, remettons et pardonnons par ces presentes, de nostre plaine puissance, auctorité royal et grace especial, ou cas dessuz dit, avec touz bans et appeaulz, et autres choses qui pour ce se sont ensuiz, et les restituons à leur bonne fame, renommée, au païs et à leurs biens non confisquez, satisfaction faicte à partie premierement, se faicte n’est, à poursuir civilement tant seulement. Et avec ce l’appellation ou appellations, dont dessuz est faicte mencion, avons mis et mettons par ces presentes du tout au neant, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur. Si donnons en mandement au seneschal de Xanctonge, gouverneur de la Rochelle et à touz noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que les dessuz diz chevalier et escuier, Jehan Maignien, Arnaut de Courson, Jehan Galiot et Jehan Hebert, leurs diz familiers, de nostre presente grace et remission facent, sueffrent et laissent joir et user paisiblement, sanz les pour ce contraindre ou molester aucunement en corps ne en biens ; et se leurs corps ou aucuns de leurs biens estoient pour ce priz, saisiz ou empeschiez, qu’ilz leur mettent ou facent mettre tantost et sanz delay du tout au delivre. Et que ce soit chose ferme et estable à tous jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Saint Arnoul en Eveline, ou mois de mars l’an de grace mil ccc. iiiixx et sept, et de nostre regne le viiime.

Par le roy, à la relacion monseigneur le duc de Bourgoingne. L. Benoit.

DCCXXI Avril 1388

Rémission accordée à Jean Le Faure, de Bienavant, pour un homicide commis sur la personne de Marcel de Champeville, à la suite d’une querelle de jeu.

AN JJ. 132, n° 200, fol. 107 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 360-363

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Jehan le Faure, de Benavent de Puy Vausery, en la terre et chastellenie de Bredes, du ressort de Montmorillon, de la seneschaucée de Poictou

La châtellenie de Brèdes. Ce nom de lieu doit être identifié avec Bridiers, tout près duquel Cassini marque Breth, ville ruinée. Dans les limites de cette châtellenie, plus tard vicomté de Bridiers, se trouve le Peux-Vosserie (cf. avec le Puy-Vausery des présentes lettres), commune de Saint-Germain-Beaupré, Creuse. Il n’est pas sans intérêt de montrer jusqu’où s’étendait la sénéchaussée de Poitou, à la fin du xive siècle. C’est dans ce but surtout que nous publions ce document, quelque peu étranger à notre province proprement dite.

, contenant que comme, le jour de la saincte Agate

C’est-à-dire le 5 février.

derrenierement passé, le dit suppliant, Jehan Thomas, Pierre de Saint Germain et Marcel de Champeville feussent en une taverne en l’ostel de Petit Pierre en la maison appellé Berault, où ilz buvoient ensemble, et après ce qu’ilz eurent beu amiablement, sanz ce que aucun d’eulz eust hayne l’un contre l’autre, le dit Marcel ala dire s’il estoit nul qui vousist jouer contre lui aux dez un blanc, qu’il joueroit, à quoy se consentirent les diz suppliant et Jehan Thomas, et ainsi qu’ilz jouoient, le dit Marcel eust volu mesconter la chance du dit suppliant, mais le dit Jehan Thomas s’apperçut de ce, qui dist au dit Marcel que ce n’estoit pas raison de mesconter ne retenir l’argent que le dit suppliant avoit gaignié ; sur quoy debat se mut illec et tant que finablement le dit Marcel si jecta par courroux pluseurs blans dedens le feu, dont le dit suppliant en y avoit un, qu’il ala querir. Et lors le dit Marcel s’adreça à lui et lui dist qu’il jetast ou dit feu le diz dez, et il lui respondi que non feroit ; et pour ce le dit Marcel eust sachié un coustel et le hauça pour en cuidier donner au dit suppliant, quant ycellui suppliant qui n’avoit aucun harnois pour lui defendre, le prist par les deux bras et tant qu’il ne lui fist aucun mal…

Mots sautés par le scribe.

, par les gens qui là estoient qui les departirent. Et ce fait, se departirent de la dicte taverne les diz suppliant et autres dessus nommez, qui s’en aloient chascun à son hostel, quant le dit Marcel survint, armé de jaques et autres harnoys, sur yceulz qui s’en aloient leur chemin ; lequel s’adreça au dit suppliant qui n’avoit de quoy lui defendre, et pour doubte de son corps, veant que le dit Marcel s’adreçoit à lui, pour lui vouloir mettre à mort, afin de obvier à sa male volenté, se parti du chemin, et lors trouva un sien filz menant une sienne jument, sur la quele il monta, afin de soy en aler plus hastivement en son hostel et eschiver le peril de son corps. Et il soit ainsi que, quant le dit suppliant fu arrivé en son hostel, doubtant que le dit Marcel ne meist à mort son dit filz, qui estoit demouré derriere, prist en son dit hostel une lance, et aussi Pierre, son frere, une espée, et vindrent aux champs au devant du dit filz qui estoit prez du dit Marcel. Lequel Marcel, incontinent qu’il apperçut les diz suppliant et son frere, s’adreça moult hastivement et par especial au dit suppliant en lui courant sus, et jecta à lui pluseurs cops, et pour ce qu’il ne le pot aucunement attaindre, s’adreça au dit Pierre, en lui jetant un estoc d’un grant coustel qu’il avoit. Le dit Pierre, pour ce esmeu et pour eschiver le peril de la mort, en repellant force par force, donna un cop de taille seulement de son espée au dit Marcel parmi la teste, dont un moys après ou environ, aprez ce que ycellui Marcel ot fait pluseurs excez de boire, mengier, labourer et travaillier en pluseurs manieres, ala de vie à trespassement. Pour occasion du quel fait, le dit suppliant s’est absenté du païs, doubtant rigueur de justice ; et pendant son absence a esté appellé aux droiz du seigneur du dit lieu de Bredes, et est en adventure que ne soit banny et d’avoir pour ce grieve punicion, si comme il dit, requerant que, comme il soit homme de bonne vie, fame, renommée et de honeste conversacion, sanz ce qu’il feust onques repriz ne convaincu d’aucun autre villain cas, crisme ou malefice, et que l’en dit lui avoir fait paix et satisfaction à partie, nous lui vueillons sur ce eslargir nostre grace et misericorde. Nous adecertes, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, à ycellui suppliant ou cas dessus dit toute peine, amende et offense criminele, corporele et civile, qu’il a ou peut avoir encouru envers nous pour le fait dessus dit, ensemble les appeaux et ban, s’aucun s’en est ensuy pour ceste cause, avons quictié, remiz et pardonné, et par ces presentes, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, quictons, remettons et pardonnons, et le restituons à sa bonne fame, renommée, au païs et à ses biens non confisquez, satisfaction faicte à partie premierement et avant toute euvre, se faicte n’est, et imposons sur ce silence perpetuel à nostre procureur, present et avenir. Si donnons en mandement au seneschal de Lymosin et à touz noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans, presens et à venir, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, seuffrent et laissent le dit suppliant joir et user plainement et paisiblement, sanz le molester, ne empeschier, ou souffrir estre molesté ne empeschié en corps ne en biens, ores ne pour le temps avenir, en aucune maniere au contraire ; mais se son corps ou aucuns de ses biens, non confisquez par ban, estoient pour ce prinz, saisiz, levez, arrestez ou empeschiez, si les mettent ou facent mettre sanz delay à plaine delivrance. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à tousjours mais, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Orliens, ou moys d’avril l’an de grace mil trois cens iiiixx et huit, et le huitiesme de nostre regne.

Par le roy, à la relacion du conseil. N. de Voisines.

DCCXXII Juillet 1388

Rémission pour Jean Bitonneau, coupable d’avoir frappé Tiphaine Seigneur, femme de Clément de Forges, et d’avoir ainsi causé son avortement.

AN JJ. 133, n° 18, fol. 7 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 364-366

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie des amis charnelz de Jehan Bitonneau, chargié de femme et deux jeunes enfanz, que, environ la saint Barnabé derrenierement passée, Thiphaine Seignore, femme de Clement de Forges, meue de sa voulenté, tensa et assailli de paroles le dit Bitonneau, et en icelles paroles desmentirent l’un l’autre, et de ce non contente, maiz en procedant à fait, la dicte Thiphaine print une assez grosse pierre et la gecta par très grant ire et felonnie à la teste du dit Bitonneau, et lui en fist une playe jusques à effusion de sang, et qui pis est icele Thiphaine, perseverant en sa fureur, le print à ses draps et au corps et s’efforça de le vilener et dommaigier, et telement que, pour resister à sa male voulenté, le dit Bitonneau veant que elle l’avoit blecié et injurié, se print à la dicte Thiphaine et la feri et frappa des piez et des poings pluseurs cops, cuidant et non saichant la dicte Thiphaine estre grosse d’enfant ; or est advenu que, le prouchain jour après la dicte bateure, ycelle Thiphaine qui n’estoit enceinte que de deux mois ou environ, si comme aucunes matrones en ce congnoissans l’ont tesmoingné, avorta de son fruit. Pour le quel fait et pour doubte de rigueur de justice, le dit Bitonnea s’est absentez du pays, et est en voye que jamaiz n’i ose retourner, se nostre grace et misericorde ne lui est sur ce impartie et eslargie, en nous humblement suppliant que, comme le dit Jehan Bitonnea en touz autres caz ait esté et soit de bonne vie, fame et renommée, et honneste conversacion, que la dicte femme est saine et en bon point et bien guerie, et que le dit Bitonneau fist la dicte bateure par chaude cole et en soy defendant et resistant contre la dicte Thiphaine, qui estoit jeune et forte, et moult esmeue contre lui, et laquelle il ne savoit ne pensoit estre grosse d’enfant, nous sur ce lui vueillons extendre et impartir nostre dicte grace et misericorde. Pour quoy nous, inclinans à la dicte supplicacion, considerans les choses dessus dictes, au dit Jehan Bitonneau, ou cas dessus dit, avons remis, quictié et pardonné, remettons, quictons et pardonnons par ces presentes, de grace especial et de nostre auctorité royal, le fait et caz dessus diz, avecques toute peine, amende et offense corporele, criminele et civile, que le dit Bitonneau a et puet pour ce avoir commis et encouru envers nous, et le restituons à sa bonne fame et renommée, au pays et à ses biens non confisquez, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur et à touz noz autres officiers, satisfacion faicte à partie civilement, premierement et avant toute euvre, se faicte n’est. Si donnons en mandement au seneschal de Xantonge, gouverneur de la Rochelle, au bailli de nostre grant fief d’Aunys, et à touz noz autres justiciers et officiers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, sueffrent et laissent joir et user paisiblement et à plain le dit Bitonnea, sanz pour ce le molester ou souffrir estre molesté ou empeschié en corps ne en biens, en aucune maniere, ores ne pour le temps avenir ; maiz se son corps ou ses diz biens non confisquez, comme dit est, sont ou estoient prinz, saisiz, arrestez ou empeschiez, pour la cause dessus dicte, les lui mettent ou facent mettre à pleine delivrance, sanz delay. Et que ce soit ferme chose et estable à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou mois de juillet l’an de grace mil ccc. iiiixx et huit, et de nostre regne le huitiesme.

Es requestes de l’ostel. G. Guingant. — T. d’Estouteville.

DCCXXIII Juillet 1388

Rémission octroyée à Aimery de Chabanais, demeurant à Royan, capitaine d’une galiote armée et montée par trente-cinq matelots, « pour resister et contrester au passage des ennemis,… detenu prisonnier ès prisons du viconte de Thouars, en son chastel de Thalemont ». Le vendredi avant les Rameaux 1387, ayant rencontré devant la Rochelle une embarcation espagnole, commandée par le capitaine Macheco, il s’était laissé persuader par celui-ci de donner la chasse et de capturer une barque sortie du port de la Rochelle à destination de l’Espagne, que l’on disait porter des marchands sujets du roi de Portugal ; mais en réalité ces marchands étaient Normands et leurs marchandises étaient des draps de Saint-Lô. Paris, juillet 1388.

AN JJ. 133, n° 20, fol. 8 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 366

DCCXXIV Septembre 1388

Rémission accordée à Jean Basin qui, en légitime défense, avait tué Guillemin Châtet, son ennemi juré.

AN JJ. 133, n° 186, fol. 107 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 366-368

Charles, etc. Savoir, etc., de la partie d’aucuns des amis charnelx de Jehan Basin, demourant en la chastellenie de Mirebeau, à nous avoir esté exposé que, comme Phelippon Chatet et Guillemin son filz, eussent en cuer conceue hayne couverte contre le dit Jehan, et en perseverant en ce, à certain jour jà pieça passé, ainsi que le dit Jehan estoit aux champs, en un bois, où il chargoit ou faisoit chargier de fagoz une charette, et ne se donnoit ou prenoit garde des diz pere et filz, eulx de fait et esgait appensé, garniz de cousteaux ou autres armeures, courrurent sus au dit Jehan, pour le mettre à mort ou mutiler de ses membres, et le batirent et ferirent pluseurs cops, et depuis, environ la feste saint Jehan Babtiste derreniere passée ot un an, le dit filz en perseverant en son oultrage et male voulenté, et non content de ce que fait avoit esté, et qui tousjours se mettoit en aguet de tousjours trouver le dit Jehan à son dessous, garni d’un grant baston, le trouva en l’eritage du dit Jehan où il estoit paisiblement, le quel filz du dit Phelippon s’efforça de tout son povoir de ferir le dit Jehan du dit baston, et de le mettre à mort ; et pour y eschiver, en deboutant force par force, ycellui Jehan d’un baston ferré qu’il tenoit fery un seul cop le dit filz, en la personne du quel filz dedens brief temps mort s’en ensuy. Pour doubte du quel fait et pour rigueur de justice, le dit Jehan s’est absentez du païs, et pour ce [a esté] mis ès appeaulx de la justice du lieu où le fait fu perpetré, et pour ce n’ait ausé ne ose retourner par devers sa femme et enfans, qui pourson labour doivent estre alimentez ; en nous humblement suppliant que, comme le dit Jehan soit et durant le temps de sa vie ait esté homme de bonne vie, paisible et honneste conversacion, sanz reprehencion d’aucun autre mauvais cas, nous lui vueillons sur ce impartir nostre grace et misericorde. Nous adecertes, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice en ceste partie, au dit Jehan ou dit cas, de grace especial, avons quictié, remis et pardonné, et par ces presentes quictons, remettons et pardonnons le dit fait, avec toute peine et amende criminele, corporele et civile, en quoy pour ce il puet ou pourroit estre ou avoir esté encouru envers nous, et le restituons à sa bonne fame et renommée, au païs et à ses biens non confisquez, avecques les diz appeaulx et ban, satisfaction faicte à partie, s’aucune en y a, civilement, premierement et avant tout euvre. Si donnons en mandement au gouverneur du bailliage de Tourainne et à touz noz autres justiciers, presens et avenir, ou à leurs lieutenans, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit Jehan facent et seuffrent de nostre presente grace et remission joir et user paisiblement, sanz le molester ne empeschier, ne souffrir estre molesté ne empeschié, en aucune maniere au contraire. Et pour ce, etc. Sauf, etc. Donné à Paris, ou mois de septembre l’an de grace mil ccc. iiiixx et huit, et de nostre règne le huitiesme.

Par le conseil. Auneel. — P. de Disy.

DCCXXV Octobre 1388

Rémission accordée à Aimery Caresmeau et à ses deux frères, pour le meurtre de Perrot Ayraud qui avait forcé le domicile dudit Aimery et voulu faire violence à sa femme, Bienvenue Faudrier.

AN JJ. 133, n° 135, fol. 82 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 368-371

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie des amis charnelz de Aymery, Jehan et Jehannin Caresmeaux, freres, et de Bienvenue Faudriere, femme du dit Aymery, povres gens laboureurs, demourans ou pays de Poitou, que comme Perrot Ayraud, meu de mauvaise voulenté, se feust pieça et par pluseurs foiz efforcié d’avoir compaignie charnelle à la dicte femme, et à pluseurs lieux et à diverses personnes eust dit et se feust venté par maintes foiz que, voulsist la dicte femme ou non, malgré et en despit de son dit mari, de touz ses amis et d’autres ses parens, il auroit compaignie charnelle et qu’il ne l’oseroit contredire, et en ycelle voulenté avoit il perseveré par long temps, et pour celle cause et aussi pour ce qu’il estoit renommé ou pays, en pluseurs lieux, qu’il vouloit avoir compaignie charnelle aus femmes, voulsissent ou non, la dicte femme qui est et a esté tout le temps de sa vie tenue pour bonne et preude femme, et de bonne conversacion et issue de bon lien et honneste, n’osoit aler en ses besongnes où elle avoit afaire hors de son hostel, sanz estre bien acompaignée de gens, et ce eust dit et notifié à son dit mari, comme bonne femme doit faire ; et depuis le dit mari eust eu en propos, à un certain jour, d’aler en pelerinage à Saint Antoine de la Beneste, assez près de son domicille, et appella avec lui les diz Jehan et Jehannin, ses freres, pour li tenir compaignie, et assez tost après eust entendu de certain que le dit Perrot devoit en celle nuit venir en son hostel, pour faire sa voulenté de sa dicte femme, cuidant le dit Perrot que le dit mari n’y feust pas, maiz feust alé à son dit pelerinage, où il ne ala pas pour la dicte cause, maiz se tint environ son hostel, avec lui ses diz freres, tant qui fu nuyt, pensant que le dit Perrot n’y vendroit pas seul, maiz acompaignié d’aucuns de son amitié, car aussi estoit il plus puissant et fort de corps et d’amis que ycellui Aimery. A la quele nuit, ycelli Perrot, continuant sa male voulenté, vint armé de pluseurs armeures invasibles à l’ostel du dit Aymery, frappa et hurta moult fort à l’uis du dit hostel, et tant que par force et violence il rompi la fermeure du dit huys et entra ou dit hostel, et tantost ala au lit où estoit couchée la dicte femme et aucuns de ses enfans, se print tantost à la dicte femme, pour en faire sa voulenté et la deshonnorer ; la quele femme se perforça tant qu’elle pot, et commença à crier haro, au quel cry vindrent et saillirent avec pluseurs autres tantost le dit Aimery et ses diz freres, courrurent suz au dit Perrot qui tenoit et perforçoit la dicte femme, pour en faire sa voulenté, le batirent et ferirent par tele maniere que mort s’en ensuy après tantost ; le dit Aimery cuidant que le dit Perrot ne feust pas mort, car il estoit nuit et n’avoit point de lumiere ou dit hostel, ala parler à un sergent qui demouroit assez près d’illec, en lui priant et requerant qu’il alast avec li en son dit hostel, pour mettre hors un mauvais homs qui y estoit venu et entré par force, pour villener sa dicte femme ; lesquelz Aimery et sergent venuz ou dit hostel, trouverent mort le dit Perrot, dont le dit Aimery fu moult esbahi. Et adonc le dit sergent print le dit Aimery et sa dicte femme et les envoia ou chastel de Commiquiers, qui lors estoit à Guy de la Forest

Plusieurs membres de la famille de La Forêt en Bas-Poitou sont mentionnés dans nos précédents volumes. Guy de La Forêt, particulièrement, a été l’objet de notes dans les tomes III, p. 54, 381, et IV, p. 125. Il avait épousé Marguerite de Machecoul, dont il n’eut point d’enfants, et il était mort depuis quelques années. On le trouve encore mentionné, comme vivant, dans un accord du 30 septembre 1383. (Arch. nat., X1c 47.) Dans des lettres de Charles VI données à Vernon, le 30 juillet 1387, pour mettre fin à des différends très graves survenus entre le duc de Berry et le connétable de Clisson, celui-ci s’opposant à la levée des aides dans ses terres de Poitou, on lit parmi les griefs invoqués contre lui : « Item que après la mort de feu Guy de La Forest, chevalier, seigneur du chastel, terre et appartenances de Commequiers et de certaines autres terres estans en la conté de Poitou, Regnier Josseaume, chevalier, heritier d’icelui Guy », voulut se mettre en possession et saisine de cette succession. Mais Olivier de Clisson, « de son autorité et par force de gens d’armes », fit occuper le château de Commequiers et les autres terres de Guy de La Forêt, qui étaient tenus et mouvant du vicomte de Thouars, et commit beaucoup d’autres excès au préjudice du seigneur et des habitants. (Arch. nat., J. 186a, n° 69.)

, chevalier, où ilz furent mis en arrest ; maiz pour doubte de rigueur de justice, et aussi qu’ilz n’estoient pas en prison fermée, se partirent du dit chastel, sanz faire infraction ou briseure aucune, et se sont absentez ; et aussi semblablement se sont absentez les diz freres du dit Aymeri. Suppliant que, eue consideracion aus choses devant dictes, mesmement que paix et accord sont faiz aus amis du dit feu Perrot, nous leur veuillons en ceste partie faire impartir nostre grace. Nous, attendu et consideré ce que dessus est dit, aus diz Aimery, sa femme et ses diz freres le fait de la mort du dit Perrot, et aussi au dit Aymeri et à sa dicte femme, et à chascun d’eulz, le departement du dit chastel et touz bans et appeaulx, s’aucuns s’en sont ensuiz, avec toute peine et punicion corporele, criminele et civile, que pour ce les dessus diz et chascun d’eulx pourroient estre encouruz envers nous, avons à yceulx et à chascun d’eulx, ou cas dessus dit, remis, quictié et pardonné, remettons, quictons et pardonnons, [de nostre auctorité royal] et grace especial, en les restituant à leurs bonnes fames et renommées, au païs et à leurs biens non confisquez, par la teneur de ces presentes, satisfacion faicte à partie, se faicte n’est, sur ce civilement. Mandons à touz noz justiciers, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que les diz freres et femme, et chacun d’eulx, ilz souffrent, facent et lessent joir et user de nostre presente grace et remission, sanz les empeschier, molester ou traveillier sur les cas dessus diz ou aucun d’iceulx, contre la teneur de ces presentes, en corps ou en biens, ores ne ou temps avenir, en aucune maniere. Et quant à ce, nous imposons à nostre procureur silence perpetuel. Et que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou mois d’octobre l’an de grace mil ccc. iiiixx et huit, et de nostre regne le ixe.

Par le roy, à la relacion du conseil. G. Houssaie.

DCCXXVI Novembre 1388

Rémission accordée à Pierre de La Forêt, écuyer, pour un viol commis à Paris, de complicité avec Jean de Vieuxbourg dit Herpin et Moreau de Monlon, valets tranchants du duc de Berry.

AN JJ. 133, n° 191, fol. 109 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 371-374

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, à nous avoir esté humblement supplié de la partie de Pierre de La Forest escuier, que nagaires lui, Jehan Herpin et Moreau de Montlon, escuiers

Les deux complices de Pierre de La Forêt obtinrent aussi, chacun individuellement, des lettres de rémission pour ce crime ; elles sont datées de Reims, octobre 1388. et transcrites sur le même registre (JJ. 133, n° 193, fol. 110, et n° 237, fol. 137). Leurs noms et qualités y sont donnés d’une façon plus explicite ; ce sont Jean de Vieuxbourg, dit Herpin, et Jehannin ou Moreau de Monlon, écuyers, valets tranchants du duc de Berry. Rien n’indique précisément, dans les lettres en faveur de Pierre de La Forêt, qu’il appartint à la famille poitevine ; cependant, la rencontre que nous avons faite précédemment (tome III, p. 24, note) d’un personnage portant ce nom et ce prénom, et les fonctions qu’il remplissait auprès du duc de Berry, comte de Poitou, donnent à penser qu’il s’agit bien d’un membre de cette famille. Pierre de La Forêt avait déjà obtenu des lettres de rémission en juin 1375 (voy. le vol. précédent, p. 373 et s.), pour un meurtre commis de complicité avec Guillaume de Chaunay, chevalier.

Jehannin ou Moreau de Monlon était vraisemblablement poitevin aussi. Du moins nous avons trouvé, dans un acte de 1355, un chevalier nommé Guillaume de Monlon, appelant au Parlement d’une sentence du sénéchal de Poitou contre Guillaume Maignen, à propos de la succession de Jean Prevost. (Arrêt du 18 juillet 1355, X1a 16, fol. 152 v°.) Peut-être même ces deux personnages étaient-ils de la famille des Montléon, seigneurs de Touffou, d’Abain, etc. ; leur nom, écrit tantôt Monlon, tantôt Montlon, présente bien de l’analogie avec Montléon ; de plus, différents membres de cette dernière famille ont porté, au xive siècle, les prénoms de Jean et de Guillaume.

Quant à Jean de Vieuxbourg, dit Herpin, c’était le fils de Pierre de Vieuxbourg, qui eut en don du duc de Berry la terre de Chitré et la céda à Guy Turpin de Crissé. (Voy. ci-dessus, acte du 11 décembre 1378, où se trouve une note touchant Pierre de Vieuxbourg, p. 105.)

, pour ce qu’il leur avoit esté dit que en l’ostel Jehan de Combertrain, demourant en nostre ville de Paris, en la rue de la Harpe, avoit une josne fille nommée Gillete la Carrée, la quele faisoit de son corps aucune foiz pour les compaignons, alerent en l’ostel du dit Jehan de Combertrain

D’après les lettres en faveur de Jean de Vieuxbourg, c’est le 19 juin 1388 que le viol fut perpétré.

, et là par chaleur de josnesse et temptacion de l’ennemi, prindrent et leverent la dicte Gillette de fait, la quele se prinst à crier et à soy deffendre, mes ce non obstant la menerent par la rue de la Harpe et de la Parcheminerie ; et quant aucunes gens y venoient ou acouroient, le dit suppliant tenant un baston en sa main, les faisoit tirer et aler arriere, en disant que ce n’estoit que une putain, et la menerent en la rue Saint Jaques, en l’ostel de la Cloche Rouge, et là en l’estable des chevaulx, le dit Jehan Harpin premierement congneut charnelement la dicte Gilette, oultre le bon gré d’elle, et après ce la congneut aussi yllec mesmes le dit suppliant. Et ycelle, quant ce vint, sur heure de la nuit, ilz menerent en l’ostel de la Cloche Noire, ou quel hostel le dit Moreau coucha avecques elle et la cognut aussi charnelement, maugré elle. Et le landemain, un po devant le jour, le dit suppliant et Jehan Harpin, très dolens, courrouciez et eulx repentans de ce qu’ilz avoient fait, vindrent du dit hostel de la Cloche Noire et la firent remener amiablement par leurs varlès au lieu où ilz l’avoient prise. Pour occasion du quel fait, le dit suppliant a esté appellé à noz drois et depuis banni de nostre royaume, et pour ce est en aventure qu’il conviegne absenter et estre fuitiz à tousjours d’icellui, se sur ce ne lui est nostre grace impartie, combien que lui et pluseurs autres gentilz hommes, chevaliers et escuiers, ses parens et amis charnelz bien prouchains, nous ayent bien et loyaulment servi en noz guerres et soient tousjours prests de faire, toutes foiz qu’il nous plaira, et que icellui suppliant en tous autres cas ait esté et soit de bonne vie et renommée, sanz avoir esté repris d’aucun autre villain fait que de cestui seulement, si comme il dit ; [suppliant que] il nous plaise avoir merci de lui, sur ce lui estendre nostre benigne grace et moderer en ce cas rigueur de justice par pitié et misericorde. Pour ce est il que nous, ayans pitié et compassion de lui, consideré les diz services que il et ceulx duquel lignage il est nous ont faiz, et esperons qu’ilz facent ou temps avenir, à ycellui Pierre de La Forest, de nostre auctorité royal, plaine puissance et grace especial, avons quictié, remis et pardonné, quictons, remettons et pardonnons, par ces presentes, le fait et ban dessus dit, s’il est ainsi comme dit est, avecques toute peine, amende et offense corporele, criminele et civile, en quoy il est ou peut estre pour ce encouruz envers nous et justice, et le restituons à sa bonne fame et renommée, à nostre dit royaume, au païs et à ses biens non confisquez, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur, satisfaction toutesvoiez faicte à partie adverse, premierement et avant toute euvre. Si donnons en mandement au prevost de Paris et à touz noz autres justiciers, presens et a venir, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit Pierre, ou cas dessus dit, laissent, facent et sueffrent joir et user plainement, paisiblement et à tousjours de nostre presente grace, quictance, remission et pardon, senz le travaillier, molester ou empeschier, ne faire ou souffrir estre, ores ou ès temps avenir, travaillié, molesté ou empeschié en corps ou en biens, ne autrement, comment que soit, au contraire ; maiz ses biens, s’aucuns estoient pour ce prins, saisiz ou arrestez, lui mettent ou facent mettre à plaine delivrance. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Reims, l’an de grace mil ccc. iiiixx et huit, et de nostre regne le ixe, ou mois de novembre.

Par le roy, present monseigneur le duc de Bourgongne. J. Bertaut.

DCCXXVII Février 1389

Rémission accordée à Jean Chaillot, qui avait accompagné le seigneur de Pauléon, quand celui-ci alla faire violence à la femme d’un nommé Pierre Millot.

AN JJ. 135, n° 78, fol. 45 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 374-376

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, à nous avoir esté humblement exposé de la partie des amis charnelz de Jehan Chaillot, le jeune, povre jeune varlet du païs de Poictou, contenant que comme, le premier dimenche de karesme derrenier passé ou environ, le seigneur de Pauleon

En 1377, le seigneur de Pauléon était Bouchart Chenin, deuxième fils de Gauvain III, seigneur de la Jarrie et de l’Île-Bapaume. Celui-ci avait épousé en secondes noces Jeanne Lécuyer, laquelle était décédée en 1377. Cette année-là, Gauvain le jeune et Bouchart son frère firent un accord touchant la possession de l’île de Bapaume (canton de la Jarrie, Charente-Inférieure), qui venait de leur mère. (Lettres de Jean Besly, publiées par Apollin Briquet, t. IX des Arch. hist. du Poitou, p. 333. — Voy. aussi le tableau généal. de la famille Chenin, donné par M. le baron d’Huart, Persac et la châtellenie de Calais. Société des Antiquaires de l’Ouest, 2e série, t. X (1887). Poitiers, 1888, in-8°, p. 141.)

eust mandé au dit exposant, qui demouroit assez près du manoir d’icellui seigneur, que il alast parler à lui, et pour ce que le dit Jehan n’oseoit desobeir ne reffuser d’aler au mandement d’icellui seigneur, ala par devers lui, car il ne savoit que il lui vouloit. Et si tost qu’il fu devers lui, icellui seigneur de Pauleon lui dist qu’il convenoit qu’il alast avec lui en certain lieu, où il avoit à faire. Et après ce, environ mienuit, icellui seigneur et ses gens et le dit Jehan en leur compaignie alerent en un hostel, ou quel il entrerent par force, et en icellui trouverent Symonne, femme de Pierre Millot, la quele femme le dit seigneur prinst par force et en fist sa voulenté. Pour le quel cas et fait dessus dit, le dit Jehan qui oncques n’y fist riens, fors seulement que il fu en la compaignie d’icellui seigneur et ses dictes gens, auquel seigneur il n’osa refuser d’aler avec lui, comme dit est, et aussi il ne savoit où vouloit aler le dit seigneur, ne que il vouloit faire, et tout le temps de sa vie il a esté de bonne vie et honneste conversacion, senz oncques maiz avoir esté reprinz ou attaint d’aucun autre vilain cas ou malefice, doubtant rigueur de justice, s’est absentez du païs. Et pour ce a esté appellez à noz droiz, et doubte que par contumace il n’ait esté banniz de nostre royaume, ou quel païs il n’oseroit jamaiz converser ne repairier, se sur ce ne lui estoit nostre grace estendue, si comme il dit. Nous adcertes, eue consideracion aux choses dessus dictes, voulans rigueur de justice en ceste partie estre moderée par misericorde, au dit Jehan Chaillot, ou cas dessus dit, avons quictié, remis et pardonné, et par ces presentes remettons, quictons et pardonnons, de nostre grace especial et auctorité royal, le fait et cas dessus diz, et le dit ban, se pour ce s’est ensuy, avec toute peine, amende et offense corporele, criminele et civile, que il peut pour cause des choses dessus dictes estre encouruz envers nous et justice. Et le restituons à sa bonne fame et renommée, au païs et à ses biens non confisquez, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur, present et avenir, satisfaction faicte à partie civilement, se faicte n’est, premierement et avant toute euvre, s’aucun est qui en face poursuite. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Xanctonge et à tous noz autres justiciers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, sueffrent et laissent le dit Chaillot joir et user plainement et paisiblement, senz lui donner ou souffrir estre fait ou donné empeschement aucun au contraire ; maiz se son corps ou aucuns de ses biens non confisquez estoient pour ce prinz, saisiz, levez ou arrestez, si les lui mettez ou faites mettre, tantost et senz delay, à plaine delivrance. Et pour ce que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf nostre droit en autres choses et l’autruy en toutes. Donné à Paris, ou mois de fevrier l’an de grace mil ccc. iiiixx et huit, et de nostre regne le ixe.

Par le conseil. N. de Voisines.

DCCXXVIII Mars 1389

Rémission accordée à Jean Basin, de Coulonges-les-Royaux, pour tous les excès de guerre qu’il a pu commettre, tant avec les Anglais, quand ils occupaient le Poitou, que depuis qu’il fut rentré en l’obéissance du roi de France.

AN JJ. 135, n° 127, fol. 72 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 376-378

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, que de la partie de Jehan Basin, de Coulonges lez Royaulz en Poitou, nous a esté exposé que, ou temps que la duchié de Guienne estoit occuppé par le roy d’Angleterre ou le prince de Gales, son filz, et que le chastel et terre du dit Coulonges estoient soubz leur obeissance, le dit exposant s’arma pluseurs foiz et chevaucha avec noz ennemis en Guienne, et fu avec eulx quant ilz ardirent l’ostel de Pacoinès près de Maillezès, qui lors estoit feu Huguet de la Croix

Il s’agit, selon toute apparence, d’Hugues de la Croix, procureur du roi en Poitou, dont il a été souvent question dans notre troisième volume, ou peut-être de son fils. Suspendu pendant quelque temps de son office, il y fut rétabli en février 1356. Nous ajouterons ici qu’il était en procès, l’année suivante, contre les habitants de Talmont et les abbayes de Notre-Dame d’Angle et de Lieu-Dieu en Jard. Voy. à ce sujet deux mandements du Parlement au sénéchal de Poitou, datés du 28 mars 1357. (Arch. nat., X2a 6, fol. 316 v° et 337).

, osta une jument à un appellé Escotere, prist pluseurs vivres et autres biens sur le païs, et fu avec noz diz ennemiz où furent commiz pluseurs crimes et deliz. Et depuis par nostre amé et feal Guillaume de la Mote

Le Grand-Gauthier renferme deux aveux rendus, le 12 septembre 1403, au duc de Berry, comte de Poitou, par un Guillaume de la Mothe, écuyer : le premier, d’une maison à Chizé, et quatre quartiers de pré sur la rivière de Belle, etc. ; le second, d’un droit d’usage en la forêt de Chizé, pour le chauffage des fours de Boisserolle, du four de la Cigogne, etc., etc. (Copie du xviiie siècle, Arch. nat., R1* 2173, p. 1842 et 1852.)

, chevalier, fu le dit Basin prinz et amenez prisonnier ou chastel de Cholet et rettourna à nostre obeissance, et s’arma pluseurs foiz et chevaucha en la compaignie de nostre amé et feal connestable, le dit de la Mote et autres noz gens et subgez, fu au dit lieu de Coulonges, qui encores estoit soubz l’obeissance du roy d’Angleterre, et là par lui et autres noz subgez, furent prinses et raençonnez pluseurs personnes, prinz et emmenez pluseurs chevaulx, jumens et autres bestes et biens, et fait autres faiz acoustumez en guerre, en terre d’ennemis, et fu et chevaucha durans les guerres pluseurs foiz en pluseurs autres lieux, avec noz gens, tant en terre de noz ennemis comme en terre à nous rebelle, où furent prins vivres et autres biens, et commis pluseurs crimes et deliz ; pour les queles choses, à l’instigacion d’aucuns ses hayneux, ou autrement, il doubte estre poursuiz par justice ou autrement ; et pour ce nous a humblement supplié que sur ce lui veuillons impartir nostre grace. Pour quoy nous, ces choses considerées, au dit Jehan Basin, ou cas dessus dit, avons remiz, quictié et pardonné, remettons, quictons et pardonnons, de grace especial, ou cas dessus dit, les diz faiz, crimes et deliz, et toute peine et offense et amende corporelle, criminele et civile, que pour ce peut avoir encouru envers nous, et le restituons au païs, à sa bonne renommée et tous ses biens non confisquiez, en faisant sattisfaction civilement à partie bleciée. Si donnons en mandement au bailli des ressors et Exempcions de Touraine, d’Anjou, du Maine et de Poitou, et à tous noz autres justicicrs ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit Jehan Basin facent, sueffrent et laissent joir et user à plain de nostre presente grace et remission, et au contraire ne le molestent ou empeschent, et ne sueffrent estre molesté ou empeschié en corps ne en biens, en aucune maniere. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à tous jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, soubz nostre seel ordené en l’absence du grant, l’an de grace mil ccc. iiiixx et huit, ou mois de mars avant Pasques, et de nostre regne le ixe.

Par le conseil. Mauloue.

DCCXXIX Juin 1389

Rémission accordée à Guillaume Poisson, de Saint-Martin de Bernegoue, pour le meurtre d’Étienne Giboin, homme sans aveu, ancien routier, qui était venu s’établir audit village, dont il pillait, rançonnait et battait les habitants. Poussé à bout par ses vexations, ledit Poisson s’était adjoint trois de ses voisins et l’avait assommé à coups de bâton, ainsi que sa femme.

AN JJ. 135, n° 306, fol. 165 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 378-383

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, à nous avoir esté humblement exposé de la partie de Guillaume Poisson, povre homme et simple laboureur, demourant ou plat païs en la parroisse de Saint Martin, en la chastellenie de Praec, en la conté de Poictou, que comme un appellé Estienne Giboign feust venuz nagaires demourer en la dicte parroisse, et illecques se maria avecques une femme de très mauvaise vie

« Appelée Margot », texte de la rémission accordée à un complice dudit Poisson. (Ci-dessous note 1 de la p. 381.)

, blasmée et publiquement diffamée de son corps et de larrecins, les quelz mariez n’avoient aucun mestier ne usoient d’aucune marchandise, ne avoient aucun heritage dont peussent ou deussent vivre, maiz estoient les diz mariez rioteux, qui prenoient riotes et debas avecques leurs voisins, qui sont povres et simples gens, laboureurs, demourans en plat païs ouvert et en frontiere, ou souventes foiz passent gens d’armes, tant d’amis comme d’anemis, qui font et donnent de grans dommages à telles simples gens demourans en plat païs, et pour ce que le dit Estienne estoit publiquement diffamé d’avoir suy longtemps les routes de la forte compaignie, ses diz voisins le doubterent moult fort, et tant que le dit Estienne batoit de jour en jour ses diz povres voisins et les injuroit, et aloit parmy la dicte parroisse de Saint Martin, portant un gleve de jour et de nuit, espiant les dictes povres gens, et quant les trouvoit soubz et hors de la veue des gens, leur prenoit le leur et leur desroboit l’argent de leur bourse, et pluseurs autres roberies et pilleries commettoit, et aussi sa femme les encusoit et indusoit le dit Estienne encores à plus faire maulx ; et tant estoient les diz mariez en la dicte parroisse doubtez et cremiz que les dictes povres gens n’en osoient faire plainte à justice, ne les gens et officiers de la justice du dit lieu ne lui osoient faire ou dire son desplaisir, maiz qui plus est le dit Estienne menaçoit le juge temporel du dit lieu

Add. « de Bernaguoe ». (Idem.)

, et lui dist pluseurs injures et villenies. Le quel Estienne par son grant oultraige print riote et debat pluseurs foiz avec le dit exposant, et pluseurs traictiez et accors en furent faiz tant par Nicolas Giboign, frere du dit Estienne, comme par autres ; et aucunes foiz, pour racheter pais, le dit exposant donnoit ou quictoit au dit Estienne de son argent, en quoy il lui estoit tenuz de ses denrées ou autrement, autrefoiz du blé, autrefoiz lui aidoit de la peine de son corps et de ses bestes, senz en avoir aucune sattisfaction. Et ce non obstant, le dit Estienne vint un jour bien tard, sur la nuytier, à l’ostel du frere du dit exposant et l’appella, icellui exposant cuydant estre en bonne paix avecques le dit Estienne, le coustel tout nu en sa main, encontinent couru suz ou dit exposant qui hastivement s’en fouy en l’ostel d’un sien voisin, où le suyt le dit Estienne, et se il [l’]eust trouvé, il [l’]eust murtry ou navré très durement. Et qui plus est, le dit Estienne, le lundi après la saint George l’an m. ccc. iiiixx et sept, en presence de pluseurs bonnes gens, ou dit lieu de Praec, et aussi en la dicte parroisse de Saint Martin, dist et se vanta en renoiant Dieu et faisant autres grans seremens qu’il mettroit mort le dit exposant, et puis s’en iroit à Bouteville

Cette place était tombée entre les mains des Français, l’an 1379, à la suite de la défaite infligée à Hélyot de Plassac, son capitaine. (Voy. notre tome IV, p. 203.) Quand retomba-t-elle au pouvoir des ennemis ? Froissart n’en parle pas. L’on a vu ci-dessus la tentative malheureuse faite, en octobre 1385, pendant une expédition dirigée par le duc de Bourbon en Saintonge et en Angoumois, pour enlever Bouteville aux Anglais (p. 254, note 2). L’année suivante, le maréchal Louis de Sancerre, nommé lieutenant du roi en Guyenne, et ayant pour mission de reprendre les diverses forteresses encore au pouvoir de l’ennemi dans ces pays, n’eut rien de plus à cœur que d’assiéger la forte place de Bouteville, sur la lisière méridionale de la Saintonge. Gaucher de Plassac, qui guerroyait au midi de la Garonne, reçut l’ordre de se joindre promptement au maréchal. Ayant réuni soixante lances et cent arquebusiers génois, il vint renforcer le camp de Bouteville, où il avait été devancé par les sénéchaux de Poitou (Renaud de Vivonne) et de la Rochelle. La place, occupée par une garnison anglaise sous le commandement d’un Gascon, appelé Guillaume de Sainte-Foy, avait été investie par un corps de Poitevins et de Saintongeais, conduit par le maréchal de Sancerre en personne. Mais on apprit bientôt que Jean de Harpedenne (le père), sénéchal anglais de Bordeaux, rassemblait des gens d’armes à Libourne pour aller au secours des assiégés. (Froissart, édit. Kervyn de Lettenhove, t. XI, p. 225.) Le siège durait encore ou plutôt avait été repris deux ans après, lors de la descente du comte d’Arondell sur les côtes de l’Aunis, quand les Rochellais menacés prièrent Louis de Sancerre de venir à leur secours. Puis, le 18 août 1388, de nouvelles trêves furent publiées. (Id. t. XIII, p. 274, 276.) Donc Bouteville était encore aux mains des Anglais à cette date. On voit d’ailleurs ici qu’ils occupaient cette ville à la Saint-Georges, c’est-à-dire le 23 avril 1387, et les terme des lettres de rémission ne laissent guère douter que la situation ne fut toujours la même, quand elles furent expédiées, c’est-à-dire au mois de juin 1389. A Guillaume de Sainte-Foy succéda, quelques années plus tard, comme capitaine anglais de Bouteville, Jean de Grailly, fils bâtard du fameux captal de Buch. Froissart, qui le connaissait particulièrement, puisqu’il rapporte une conversation qu’ils eurent ensemble, lui donne ce titre en 1395. (Id., t. XV, p. 134, 148, 156.)

, que detiennent les ennemis, et se feroit Angloiz. Les queles choses furent faictes assavoir, le dit lundi, au dit exposant, en venant du dit lieu de Praec au dit lieu de Saint Martin, par aucuns de ses amis ; et qui plus est, la femme du dit Estienne, le dit lundi sur le tart, ot paroles contencieuses avec le dit exposant, en le menassant très durement. Et pour ce le dit exposant, veant qu’il estoit en grant regart tous les jours du dit Estienne, très doulant et courrouciez, doubtant tout seul aler parler au dit Estienne, en la compaignie de iii. compaignons

Parmi ces compagnons se trouvait « Perrot Jouyn, le jeune, demourant nagaires à Bernaguoe en la chastellenie de Praec en Poitou », neveu de Guillaume Poisson, qui obtint aussi des lettres de rémission individuelles, à la même date de juin 1389 (JJ. 136, n° 56, fol. 30 v°). Nous ne publierons pas ce second texte qui ne présenté que des variantes insignifiantes avec celui-ci.

, ala le dit lundi, sur la nuitier, à l’ostel du dit Estienne ; et encontinent que le vit icellui Estienne, couru suz aux diz exposant et compaignons et ilz au dit Estienne, et se entrebatirent entre eulx de cops de bastons et d’un coup de coustel que le dit Estienne ot sur les jambes seulement, et pluseurs cops de baston sur les jambes et sur son corps ; en la quelle baterie la femme du dit Estienne, qui de ce se entremesloit, fu de cas de meschief ferue sur la teste d’un baston par l’un de la compaignie des diz iiii. compaignons, maiz l’en ne scet par lequel, et le merquedi ensuivant, les diz Estienne et sa femme furent à cause de ce et de leur mauvaix gouvernement, ou autrement, trouvez mors en leur hostel. Pour occasion du quel fait, le dit exposant, doubtant rigueur de justice, s’est absentez du païs et a delaissiez ses pere et mere, vielz et anciens, qui de douleur et très grant misere sont depuis alez de vie à trespassement, et sa femme qui est grosse et ii. petiz enfans, dont le greigneur n’a point iii. ans, qui iront à très grant misere mendiant, se par nous sur ce n’est pourveu de nostre misericorde et grace, si comme il dit. Suppliant humblement, consideré ce que dit est et la mauvaise vie et renommée des diz mariez, et que Nicolas Giboign, frere du dit Estienne, sa mere et les plus prouchains parens du dit Estienne et de sa dicte femme ont plainement au dit Guillaume remiz, quictié et pardonné le dit fait, avecques toute action et cause que pour cause et occasion du dit fait leur en pourroit competer, et que tousjours le dit suppliant a esté de bonne vie et honneste conversacion, senz avoir esté reprins d’aucun autre villain cas ou crime, il nous plaise à lui impartir nostre dicte grace. Nous, attendu ce que dit est, voulans en ceste partie grace estre preferée à rigueur de justice vers le dit suppliant, à icellui ou cas dessus dit avons, de nostre grace especial et auctorité royal, quictié, remis et pardonné, quictons, remettons et pardonnons le dit fait, avecques toute peine, amende et offense corporele, criminele et civile, qu’il pour ce peut avoir encouru vers nous, et le restituons à sa bonne fame, renommée, au païs et à ses biens non confisquiez, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur, sattisfaction faicte à partie premierement et avant toute euvre, civilement tant seulement. Si donnons en mandement à tous noz justiciers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, sueffrent et laissent joir et user paisiblement le dit suppliant, senz le molester, contraindre ne empescher, ne souffrir estre molesté, contraint ou empeschié aucunement au contraire ; maiz son corps et ses diz biens, qui pour ce seroient prinz, saisiz, arrestez ou empeschiez, lui mettent ou facent mettre, tantost et senz delay, à plaine delivrance. Et que ce soit, etc. Sauf, etc. Donné à Paris, l’an de grace mil ccc. iiiixx et ix, et le ixe de nostre regne, ou moys de juing.

Es requestes par vous tenues, du commandement du roy, presens les evesques de Langres, de Noyon

Bernard de la Tour-d’Auvergne, évêque duc de Langres (1374-16 janvier 1395), et Philippe de Moulin, évêque-comte de Noyon (26 décembre 1388-31 juillet 1409).

et pluseurs autres du conseil. Savigny. — Auneel.

DCCXXX Juillet 1389

Lettres de grâce octroyées à Colinet Alard, de Saint-Pierre-du-Luc, cordonnier, condamné à mort par le sénéchal des religieux de Saint-Georges de Montaigu, pour avoir volé deux selles à la foire dudit lieu, et pour avoir enlevé la femme de Jean Morice, du Luc, qu’il a épousée depuis la mort de ce dernier, à condition d’aller en pèlerinage à Notre-Dame de Rocamadour.

AN JJ. 136, n° 43, fol. 24 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 383-387

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie de Colinet Alard, povre et miserable personne, cordouanier de gros ouvrage, que comme, le jour de la feste saint George derreniere passé, ycellui exposant et un autre homme en sa compaignie, appellé Picart, feussent alez à la foire de Saint George de Montagu, et eulz estans en la dicte foire par temptacion de l’ennemi dirent l’un à l’autre qu’il convenoit changer leurs selles à deux meilleurs, et adviserent deux chevaux ensellez et firent semblant de les froter et lever les piez aussi que se ilz fussent leurs, et après prindrent et emporterent de fait les selles d’iceulx deux chevaulx, maiz en les emportant, ceulx à qui les diz chevaulx et selles estoient survindrent et virent que les dessus nommez s’enfuioient avecques les dictes selles, et lors commencerent à crier à haute voix : « Aux larrons ! aux larrons ! » et furent poursuis telement qu’ils furent pris et mis ès prisons du prevost moine du dit lieu de Saint George, à qui la dicte foire estoit et appartient, et en qui juridicion le dit fait avint. En la quelle prison, le dit exposant confessa avoir pris et esté consentant des dictes selles par la maniere dessus dicte ; du quel fait le dit Picart fu delivré des dictes prisons ou au mains banni de la terre et juridicion du dit prevost moine de Saint George, et le dit exposant demoura prisonnier, et lui imposa l’en en oultre qu’il avoit fortrait et enmené Jehanne Moricete, à present sa femme, et pour le temps femme de feu Jehan Morice, et aussi deux jumens et autres biens du dit feu Morice. Sur quoy le dit exposant confessa la verité du fait, c’est assavoir qu’il estoit bien vray que la dicte Jehanne lui dist pieça, ou temps que elle avoit vint cinq ans ou environ et le dit exposant en avoit bien vint ou environ, que elle ne vouloit plus demourer avec le dit Morice, son mari, qui bien en avoit lx. environ, et qu’il la voulsist convoier jusques en Anjou. A quoy le dit exposant, seduit de jeunesse, se accorda que voulentiers il iroit là où elle vouldroit, et consenti bien le dit exposant, par l’ennortement d’icelle Jehanne que elle prist en l’ostel de son dit mary deux jumens, deux linceaux et un pot de beurre, les queles jumens elle enmena, et emporta le dit burre hors de la ville de Saint Pere du Luc où ilz demouroient, et aussi faisoit le dit exposant ; et là au dehors, en certain lieu, le dit exposant ala à la dicte Jehanne et d’ilecques se partirent et alerent ainsi ensamble jusques à Mathefelon en Anjou, où le dit exposant la laissa et s’en ala à Longué en Valée, ou il demoura et ouvra de son mestier par aucun temps ; et depuis, après pou de temps, vint la dicte Jehanne au dit lieu de Longué, et demanda au dit exposant que elle feroit des dictes jumens, et que elle n’en savoit que faire, et il lui respondi que elle en povoit faire à son plaisir, et en povoit vendre une ; laquelle elle vendi l. solz, si comme elle dit depuis au dit exposant, et de l’autre ne scet le dit exposant que elle devint. Et depuis la dicte Jehanne se parti de la dicte ville de Mathefelon et s’en ala demourer avec le dit exposant au dit lieu de Longué en Valée. Et après ces choses, ledit exposant desirant retourner à ses amis, laissa la dicte Jehanne et retourna au pays en la dicte ville de Saint Pere du Luc, dont il estoit nez, comme dit est, et trouva que le dit Morice, premier mari de la dicte Jehanne, estoit trespassé bien avoit cinq moys ou environ, et lors à la requeste et priere de la mere de la dicte Jehanne, retourna devers la dicte Jehanne, pour la querre et ramener audit lieu du Luc devers sa mere et amis, et ycelle ainsy ramenée, pou de temps après, à la requeste de la dicte mere, ycellui exposant espousa la dicte Jehanne, cuidant le dit exposant qui lui eust engendré un enfant, qui lors n’avoit guerres estoit né. Pour les quelles choses ci dessus confessées, le juge ou seneschal du dit lieu de Saint George pour le dit prevost moine a jugié et condempné à pranre mort le dit exposant, dont il appella en nostre court de Parlement, pour eschever la dicte mort. Et ainsi le dit exposant qui doubte que le dit appel, du quel il n’avoit de quoy l’amende paier, ne se puisse seurement ne bonnement conduire ne soustenir, sera en voye de finer et morrir miserablement, se nostre grace ne lui est sur ce eslargie, si comme il dit, en nous humblement suppliant que, attendues les choses devant dictes, pour les quelles il a demouré trois moys prisonnier en fers et en grant misere, et a esté durement gehinez et questionné, que ycelui exposant est à present chargié de la dicte Jehanne et de trois petis enfans, que en tous autre cas il a esté et est de bonne fame, vie, renommée et honneste conversacion, sanz onques estre attaint ne convaincu d’aucun autre villain blasme, que le dit prevost moine en l’execution et condempnacion du dit exposant n’auroit guerres grant proffit, pour ce que, par la coustume du pays de Poitou, il n’a aucune confiscacion pour crime capital ès biens immeubles du crimineulx qui est condempné et excecuté à mort, et aussi que ceulx à qui estoient les dictes selles les orent celle mesme journée, et ne se font en rien partie sur ce, nous sur ce lui vueillons impartir nostre dicte grace. Nous adecertes, eue consideracion aux choses devant dictes, voulans en ceste partie, par pitié et compassion, rigueur de justice estre temperée par misericorde, à ycellui exposant, de nostre grace especial et auctorité royal, ou cas dessus dit, avons remis, quicté et pardonné, remettons, quictons et pardonnons le fait et cas dessus diz, avec toute peine, offense et amende corporelle, criminelle et civile, que pour cause et occasion d’iceulx il puet avoir pour ce commis et encouru envers nous, en le restituant et mettant à sa bonne fame, pays, renommée et à ses biens non confisquez, satisfaction faicte à partie civilement, se faicte n’est, comme dit est, et sauf tel droit comme au dit prevost moine en puet ou doit appartenir ; parmi ce aussi que, dedens Noel prochainement venant, le dit exposant sera tenu de faire un pelerinage à Nostre Dame de Rochemadour. Et de nostre plus ample grace, consideré que le dit exposant a encores deux moys ou environ, si comme l’en dit, de relever son appel, nous la dicte appellacion, avec la sentence et tous procès dont sortist le dit appel, ou dit cas, mettons au neant sanz amende, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx genz tenans nostre present Parlement et qui le tendront pour le temps avenir, et à touz noz autres justiciers et officiers, et à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission ilz facent, seuffrent et laissent joir et user paisiblement le dit exposant, sanz le molester ne souffrir estre molesté en corps ne en biens, en aucune maniere ; mais son corps et ses diz biens pour ce pris, saisiz ou empeschiez mettent ou facent mettre, sanz delay, à plaine delivrance. Et pour ce que ce soit ferme chose à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou moys de juillet l’an de grace mil ccc. iiiixx et ix, et de nostre regne le ixe.

Par le roy, à la relacion du conseil. R. Le Fevre.

DCCXXXI 9 août 1389

Un malfaiteur dangereux nommé Turpelin terrorisant la région, plusieurs habitants d’Azay-le-Brûlé et des environs, réunis, résolurent de s’en débarrasser et le tuèrent à coups d’épées et de bâtons. Lettres de rémission données en faveur de Jean Cholet, impliqué dans cette affaire.

AN JJ. 136, n° 94, fol. 50 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 387-389

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté humblement exposé de la partie

Le texte porte « personne » au lieu de partie.

de Jehan Cholet, povre laboureur, chargié de femme et d’un petit enfant, de la parroisse d’Azay en la chastellenie de Saint Maixent en Poitou, comme an et demi a ou environ, pour ce que un appellé Turpelin qui estoit homme de très mauvaise renommée, c’est assavoir pillart, larron, robeur, rompeur de huys, efforceur de femmes, alant de nuit et de jour pour grever et endommagier autrui, estoit et conversoit sur le dit pays, en la dicte parroisse d’Azay et en pluseurs autres lieux de environ, en usant des mauvaistiez dessus dictes, Jehan Levrier, Jehan Joulin et pluseurs autres, en la compaignie desquelz le dit exposant estoit, se fussent assemblez et de fait fussent, sans licence et auctorité de justice, alez par nuit en un village ou hamel appellé Laignes, près du dit lieu de Saint Maixent, là où ilz avoient oy dire que le dit malfaiteur estoit, lequel ilz trouverent, le prindrent aucuns d’iceulx et batirent, dont mort s’ensuy en la personne d’icellui Turpelin, à la quelle prise et bateure le dit exposant ne toucha en aucune maniere. Pour occasion du quel fait le dit exposant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté, du pays et n’y oseroit retourner, se nostre grace ne lui estoit sur ce faite, en nous humblement suppliant que, attendu ce que dit-est, et que le dit exposant a tout le temps de sa vie esté homme de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sanz ce qu’il fust oncques repris d’aucun villain blasme, fors du cas dessus dit, où il ne toucha aucunement, comme dit est, et la mauvaise vie et renommée du dit Turpelin, qui par pluseurs foiz avoit esté de nuit et de jour en l’ostel du dit exposant, lui avoit rompu l’uis de son hostel et volu efforcer sa femme, si comme il dit, nous lui vueillons sur ce extendre nostre dicte grace. Pour quoy nous, considerées les choses dessus dictes, voulans en ceste partie misericorde preferer à rigueur de justice, au dit exposant, ou cas dessus dit, avons quicté, remis et pardonné, et par ces presentes, de nostre grace especial et auctorité royal, quictons, remettons et pardonnons le dit fait, avec toute paine, amende et offense corporelle, criminelle et civile qu’il puet pour ce estre encourus envers nous, et le restituons à sa bonne fame et renommée, au pays et à ses biens non confisquez, satisfaction faicte à partie civilement tant seulement, premierement et avant toute euvre, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur. Si donnons en mandement, par la teneur de ces presentes, au seneschal de Xantonge et à touz noz autres justiciers et officiers, à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission ilz facent, seuffrent et laissent le dessus dit Jehan Cholet joir et user paisiblement, sanz le molester, traveillier ou empeschier, ou le souffrir estre molesté, traveillié ou empeschié ores ny ou temps avenir, en aucune maniere ; maiz se aucuns de ses biens non confisquez pour ce sont saisiz ou arrestez, lui mettent ou facent mettre à plaine delivrance. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touzjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, le ixe jour d’aoust l’an de grace mil ccc. iiiixx et ix, et de nostre regne le ixe.

Par le roy, presens monseigneur le duc de Touraine et le Besgue de Villaines. K. de Templo.

DCCXXXII Août 1389

Rémission accordée à Simon Sabourin pour le même fait

Les deux relations du même fait se complètent mutuellement ; c’est pourquoi nous donnons la partie essentielle de ces secondes lettres de rémission.

AN JJ. 136, n° 161, fol. 82 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 389-390

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, de la partie des amis charnelz de Symon Sabourin, laboureur de braz, de la parroisse d’Azay en Poytou, povre et miserable personne, chargié de femme et de deux enfans, à nous avoir esté humblement exposé que, environ le moys d’octobre derrainement passé eust un an, autrement du jour n’est recors, le dit exposant estant en la ville d’Azay, avec pluseurs autres de la dicte ville et d’ailleurs, survint en la compagnie des dessus diz un homme appellé Jehan Levrier, laboureur de braz de la ville de Saint Mexant, leur ami, voisin et affin, le quel dist et anunça, aux dessus diz assistans, en soy griefment complaignant, que un homme appellé Truppelin, lierres, robeur, pilleur et rançonneur de genz, lui avoit freschement osté et tolu par force sa jument, et en oultre ce, pour ce qu’il la poursuivoit, l’avoit volu tuer et murdrir, ausquelles parolles dictes estoient presens Jehan Joulin et Jehan Pajerot, laboureurs de braz, qui disdrent en audience des assistans que semblablement avoit le dit Truppelin nagueres batu et navré les femmes des diz Joulin et brulé la barbe du dit Pajerot, pour eulx rançonner ; adonc les assistans au dit lieu, comme courrouciez et esmeuz des dictes pilleries, roberies et villenies, que faictes leur avoit le dit Truppelin, et faisoit chascun jour, eulx touz ensamble, le dit exposant avec eulx, d’un commun accort et assentement, en entencion de trouver le dit Truppelin, et pour ravoir ce qu’il avoit sur eulx extorqué, alerent en la ville de Leignes, près du dit lieu d’Azay, et là le trouverent, et tantost qu’ilz l’apperceurent, comme esmeuz par chaleur, lui coururent sus et le batirent d’espées et bastons telement que, un ou deux jours après, mort s’en ensuy en la personne du dit Truppelin. Pour occasion, etc. Si donnons en mandement au bailli des Exempcions de Touraine, d’Anjou, du Maine et de Poytou, etc… Donné à Paris, ou mois d’aoust l’an de grace mil ccc. iiiixx et ix, et de nostre regne le ixe.

Es requestes de l’ostel. L. Benoit. — Tristran.

DCCXXXIII Septembre 1389

Confirmation des lettres de rémission données par Louis duc de Bourbon, lieutenant du duc de Berry en Poitou et autres pays, en faveur d’Olivier Clerbaut, écuyer, poursuivi pour l’enlèvement de Margot Marchant, veuve de Jean Tabary, fait du consentement de celle-ci, et qu’il avait légitimement épousée.

AN JJ. 138, n° 87, fol. 105 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 390-395

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, nous avoir veu les lettres de nostre très chier et très amé oncle, le duc de Bourbon, lors lieutenant de nous et de nostre très chier et très amé oncle, le duc de Berry, contenans la forme qui s’ensuit :

Loys duc de Bourbonnois, conte de Clermont et de Forez, per et chambrier de France, et lieutenant du roy en noz diz pays de Bourbonnois et de Forès, en Limosin, la Marche, Xaintonge et Angoulmoys et Pierregourt, et de monseigneur de Berry en ses pays de Berry, d’Auvergne et de Poitou

Par lettres datées du 16 mars 1385 n.s., Charles VI avait nommé son lieutenant ès pays de Bourbonnais, Forez, Limousin, la Marche, Saintonge, Angoumois et Périgord, son oncle maternel, le duc Louis ii de Bourbon, déjà établi par le duc de Berry capitaine général pour la guerre en Poitou, Berry et Auvergne, et lui avait donné pouvoir de lever 1,400 lances, dont 800 aux gages du roi, 300 aux gages du Poitou, 100 à ceux du Limousin et de la Marche, 200 à ceux du Berry, de l’Auvergne, du Bourbonnais et du Forez. Le 28 mars suivant, à Mehun-sur-Yèvre, le duc de Berry ratifia lesdites lettres en ce qui le concernait (Arch. nat., P. 13772, cote 2822.) La commission de lieutenant du duc en Poitou, Auvergne et Berry dut précéder de peu de temps seulement celle de lieutenant du roi. Le biographe du bon duc Loys de Bourbon, Cabaret d’Orville, explique d’une façon très plausible l’origine de cette mission. Le sire de Parthenay, selon ce chroniqueur, et d’autres chevaliers du Poitou étaient venus se plaindre à Charles VI et au duc de Berry des ravages des garnisons anglaises. Alors Jean de France pria, en invoquant leur parenté, le duc de Bourbon de se charger de les expulser du pays, et celui-ci y consentit après avoir fait observer « que les chasteaux estoient moult forts et qu’il fauldroit grande finance ». En trois semaines les Poitevins levèrent un fouage de 60.000 francs ; ils fournirent de plus à l’armée du duc de Bourbon 600 hommes d’armes. (Edit. Chazaud, pour la Société de l’Hist. de France, 1876, in-8°, p. 137 et suiv.)

La mission de Louis de Bourbon, en effet, fut avant tout une mission militaire. Les trêves entre la France et l’Angleterre, prolongées de deux mois lors de l’entrevue qui eut lieu, au commencement de l’année 1385, entre les ducs de Bourgogne et de Berry, d’une part, le duc de Lancastre et le comte de Buckingham, d’autre, expirèrent le 1er mai. C’est à partir de ce moment que le duc de Bourbon put agir. Il réunit à Moulins les chevaliers de ses états et convoqua à Niort, pour le 1er juin, la noblesse de Poitou, de Berry, d’Auvergne, de Limousin, de Rouergue et de Saintonge. Là vinrent le comte de la Marche, les sires de Pons et de Parthenay, le vicomte de Thouars, Aimery de Rochechouart, sénéchal de Limousin, les sires de Pouzauges, de Thors, Jean d’Harcourt, etc., etc., 2,000 combattants, au dire de Froissart, plus 200 hommes d’armes sous les ordres de Guillaume de Lignac, sénéchal de Saintonge, que l’armée s’adjoignit quand elle fut en campagne. Cette chevauchée dura environ six mois et fit honneur à celui qui la dirigeait. Cinq places importantes et plusieurs petits forts furent enlevés aux Anglais. Suivant Froissart, l’armée du duc de Bourbon se dirigea de suite sur Montlieu, « dans les landes de Bordeaux », le point le plus éloigné de l’expédition. Le château, après avoir soutenu un siège, fut pris d’assaut. On s’empara ensuite d’Archiac, de Taillebourg, dont le siège dura plus de neuf semaines, de Bourg-Charente, et enfin de Verteuil. D’après Cabaret d’Orville, l’itinéraire aurait été différent. Il marque les victoires de Louis de Bourbon dans l’ordre suivant : Taillebourg, Bourg-Charente, le Faon, Montlieu et Verteuil, et entre dans des détails circonstanciés sur chacune de ces opérations. (Froissart, édit. Kervyn de Lettenhove, t. X, p. 316-317, 328-333, 375-376. — La Chronique du bon duc Loys de Bourbon, édition Chazaud, p. 136-154.)

Voici l’indication de quelques documents qui confirment les faits relatés par les deux chroniqueurs, et qui en précisent parfois la date. Le 15 août 1385, Charles VI fait don du château de Montlieu (arrondissement de Jonzac, Charente-Inférieure), qui vient d’être repris sur les Anglais, à Arnaudon des Bordes (JJ. 127, n° 109, fol. 69), lequel fut fait prisonnier au mois d’octobre suivant, comme nous l’avons vu, à l’attaque de Bouteville (ci-dessus, p. 254, note 2). Dans des lettres de rémission de février 1389 n.s., en faveur des habitants de Cognac, il est dit que l’an 1385 le duc de Bourbon s’empara, entre autres forteresses, de Bourg-Charente et qu’il en fit démolir et abattre le château, sauf la tour (JJ. 135, n° 89, fol. 50 v°). Vers le mois de juin de la même année, lit-on dans d’autres lettres, l’armée du duc prit le fort du Fan (commune de Sireuil, canton de Châteauneuf, Charente.) Une partie des prisonniers fut envoyée à Angoulême et douze furent baillés en garde à Guillaume Dorier, alors garde de la prévôté d’Angoulême, qui les fit enfermer dans une sorte de puits muré de pierres, le capitaine du château n’ayant pas voulu mettre à sa disposition les prisons du château. Ils restèrent six semaines dans cette fosse, et au bout de ce temps parvinrent à s’évader. On leur avait donné par compassion du foin qui leur servit à confectionner des liens, à l’aide desquels ils se hissèrent dehors, après avoir descellé les pierres. Guillaume Dorier, devenu receveur du roi à Angoulême, se fit délivrer des lettres de rémission pour ce fait, en juin 1388 (JJ. 133, n° 46, fol. 23). On voit combien ces sortes de documents sont parfois utiles pour contrôler les chroniques. En ce qui concerne le siège et la prise de Verteuil, le dernier événement de la campagne du duc de Bourbon, il en a été traité dans un autre endroit de ce volume (ci-dessus, p. 290). Après ce dernier succès, l’armée vint se reposer à Charroux, d’où le duc data, en novembre, des lettres imprimées plus haut (p. 255, note). Ce prince alla ensuite à Limoges, où il demeura huit jours, et de là il s’en retourna près du roi, à Paris.

La mission du duc de Bourbon prit-elle fin en même temps que sa campagne ? On ne saurait le dire avec certitude. Il faudrait plutôt admettre le contraire, si l’on s’en rapporte aux termes d’un arrêt du Parlement daté du 12 août 1386. Guillaume Ancelon, seigneur en partie de Sainte-Gemme, avait appelé à la cour d’une décision du duc de Bourbon, lieutenant du duc de Berry en Poitou, et de son sénéchal, imposant aux hommes de Sainte-Gemme la garde, le guet et les réparations du château de Fontenay-le-Comte. Par la sentence en question, le Parlement se dessaisit de la cause et renvoie l’appelant à la prochaine session des Grands jours du comte de Poitou (X1a 35, fol. 45). Si la lieutenance du duc avait cessé, la mention de sa qualité dans le texte serait précédée du mot tunc ou aliàs. Quoi qu’il en soit, l’acte que nous venons de citer établit que les pouvoirs du duc de Bourbon n’étaient pas seulement militaires, mais qu’ils lui conféraient en même temps la direction administrative. Les lettres de rémission en faveur d’Olivier Clerbaut en sont une autre preuve, ainsi qu’un acte conservé dans la collection de dom Fonteneau, portant « commission du droit de barrage faite pour un an à l’hôtel de ville de Niort par Louis duc de Bourbonnais, lieutenant en Poitou, pour les réparations des ponts et portes de la ville ». Il est daté ainsi : « Donné en nostre ost et siege devant Verteuil, le 28e septembre 1385 » (coll. dom Fonteneau, t. XX, p. 205), ce qui nous donne, à quelques jours près, la date de la capitulation de cette ville.

. Savoir faisons à touz, presens et avenir, nous avoir oy l’umble supplicacion de Olivier Clerbaut

Les registres du Parlement mentionnent, aux environs de cette date, différents membres de cette famille peu connue. Jean Clerbaut, chevalier, et son frère Guy ou Guyon, aussi chevalier, soutenaient un procès criminel contre le procureur du roi, Jacques du Plessis, le sénéchal de Poitou, Pierre Pascaut, sergent et commissaire du sénéchal, et autres officiers du duc de Berry, comte de Poitou. Par arrêt du 2 avril 1376, ils furent élargis jusqu’à nouvel ordre, et ils furent ajournés de nouveau, le 7 février 1378 (X2a 9, fol. 109 ; X2a 10, fol. 15 v°). Au 31 août 1380, reprise d’un procès en matière civile entre Isabelle Clerbaut, veuve de Pierre de Cherchemont, chevalier, et Jean Clerbaut, chevalier, d’une part, Maingot de Melle, en son nom et au nom de feu Guy de Melle, son frère, d’autre part (X1a 29, fol. 102). Dans un aveu rendu au duc de Berry, le 15 novembre 1404, par Guillaume du Fouilloux, écuyer, on voit que Jean Clerbaut, chevalier, tenait de celui-ci divers fiefs et droits dans les paroisses de Surin, Sainte Ouenne et Faye. (Arch. nat., R1* 2172, p. 995.) Cette famille a donné son nom au domaine de la Grange-Clerbaut, commune de Sainte-Ouenne canton de Champdenier, Deux-Sèvres.

, escuier, contenant que, comme il et Margot Marchande, vefve de feu Jehan Thabary, demourant en Talemondoys, eussent secretement parlé ensamble d’estre adjoins l’un à l’autre par mariage, et ce parlé, la dicte Margot se doubtast que, s’elle en parloit à aucuns de ses amis, qu’il ne voulsissent consentir ne avoir aggreable le dit mariage, et aussi se elle le faisoit senz le consentement et voulenté d’iceulx, que elle ne encourust leur indignacion, et pour obvier ad ce, eust parlé avec le dit Olivier qu’il la feist prandre, aussi comme se ce ne feust de sa voulenté, lequel Olivier inclinant à ce, la fist prandre, et avecques elle et de son consentement et voulenté se adjoingny et acomplit le dit mariage, par la maniere que entr’eulx deux avoit esté secretement entrepris, lequel mariage ainsi fait la dicte Margot a tousjours eu et encores a aggreable. Et ce nonobstant le dit Olivier a esté depuis et encore est traictié et mis en procès, pour occasion du fait dessus dit, par les officiers de damoiselle Jehanne de Rays

Jeanne Chabot, sœur et héritière de Gérard VI Chabot, baron de Retz, de Machecoul, etc. (Voy. notre t. IV, p. 111, note.)

, en sa court et siege de la Meuriere

Aliàs la Chapelle-Maurière. A la date du 5 juillet 1390, on trouve un accord entre Jeanne dame de Retz et Isabelle d’Avaugour, vicomtesse douairière de Thouars, à la suite d’un différend touchant la saisie des terres de la Mothe-Achard et de la Chapelle-Maurière. (Arch. nat., X1c 61.)

, en laquelle court il pourroit estre longuement. Et pource, nous a supplié que sur ce lui vueillons impartir nostre grace. Pour quoy nous, attendu ce que dit est, inclinanz à la supplicacion du dit escuier, en faveur du dit mariage, à ycelli, ou cas dessus dit, avons quictié, remis et pardonné, et par ces presentes, de grace especial, plaine puissance et auctorité dont nous usons, quictons, remettons et pardonnons le fait et cas dessus dit, avec toute paine, amende et offense corporelle, criminelle et civile, en quoy il puet pour ce avoir esté et estre encouruz envers nos diz seigneurs et justice, et le restituons à sa bonne fame et renommée, s’en aucune maniere estoit pour ce diminuée ou amendrie, au pays et à ses biens, voulanz qu’il soit mis hors de touz plaiz et procès, ès quielx il est et pourroit estre pour le fait et cause dessus diz. Si donnons en mandement, par ces mesmes lettres, au seneschal de Poitou et à touz les autres justiciers et officiers de nostre lieutenance, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que, ou cas où il leur apperra par la foy et serement de la dicte Margot seulement le dit mariage avoir esté fait par la maniere dessus dicte, et que elle ait esté et conversé avec le dit escuier comme femme doit faire avec son mary, il facent ycellui joir et user paisiblement de nostre presente grace et remission et le mettent ou facent mettre hors de touz plaiz et procès, ès quelx il est ou pourroit estre pour occasion du dit fait, sanz le molester, traveillier ou empeschier, ou souffrir estre molesté, traveillié ou empeschié aucunement au contraire ; et se son corps ou aucuns de ses biens estoient pour ce priz ou arrestez par recreance ou autrement, mettent les ou facent mettre sanz contredit à plaine delivrance. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces lettres. Sauf en autres choses le droit de mes diz seigneurs et le nostre, et l’autrui en toutes. Donné à Ruffiec, le penultime jour de juillet l’an de grace mil ccc. quatre vins et cinq.

Les quelles lettres dessus transcriptes et tout le contenu en ycelles nous ayans fermes et agreables, les louons, ratiffions et approuvons, de nostre grace especial et auctorité royal, et par la teneur de ces presentes confermons. Si donnons en mandement à tous noz justiciers et officiers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit Olivier Clerbaut il facent, seuffrent et laissent joir et user paisiblement de nostre presente grace et confirmacion, selon la forme et teneur des lettres dessus transcriptes, sanz le molester ou empeschier, ou souffrir estre molesté ou empeschié en corps ou en biens, ores ne ou temps avenir, aucunement au contraire. Et que ce soit ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, l’an de grace mil ccc.iiiixx et ix, et de nostre regne le ixe, ou moys de septembre

Entre le 1er et le 15 septembre. La neuvième année du règne de Charles VI finissait le 16, son père étant mort le 16 septembre 1380.

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Par le roy, à la relacion du conseil. P. Christiani.

DCCXXXIV Septembre 1389

Rémission accordée à Martin du Queroy, de Luchapt, menacé de poursuites pour avoir trafiqué avec les Anglais des garnisons de Jumillac et de Courbefy.

AN JJ. 136, n° 175, fol. 94 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 395-398

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie de Martin du Queroy, de la parroisse de Luchac en Poictou, que comme ou temps que les Angloiz, ennemis de nous et du royaume, tenoient et occupoient le port (sic, lisez fort) de Jumillac en Lymosin, pour racheter un povre sien voisin nostre subget, prisonnier, appellé Jehan Gailadras, des prisons de noz diz ennemiz, le dit exposant eschangast avec un de noz diz ennemiz de la dicte garnison de Jumillac un petit cheval roncin sien avec un autre, dont le dit de Jumillac lui deut rettourner la somme de viii. frans, que le dit exposant remist et delessa aux diz ennemis, en rabat et deduction de la finance du dit prisonnier ; et aussi vendi et bailla, en rabat et deduction de la finance du patiz ou souffrance que les bonnes gens demourans et habitans en la dicte parroisse de Luchac et de Moustel en Poitou devoient aus Anglois et ennemis de la garnison de Corbaffin, un autre cheval du pris de viii. frans ou environ. Et pour cause ou occasion de ce, à l’instigacion ou pourchaz d’aucuns ses malveillans, nos genz et officiers ou de nostre mareschal de Sancerre

Cette intervention des officiers du maréchal de Sancerre exige quelques mots d’explication. Louis de Sancerre était lieutenant du roi en Guyenne, avec des pouvoirs très étendus sur les pays situés au nord de la Dordogne et de la Garonne. Le 15 août 1386, il était à Poitiers, où fut passée la montre de sa compagnie, comprenant 37 chevaliers bacheliers et 162 écuyers, queux, trompette et maréchal de son hôtel. (Original, Bibl. nat., ms. Clairambault 234, n° 9). C’est à cette époque qu’il fit le siège de Bouteville, dont il a été parlé ci-dessus, p. 380. Durant les quatre années qui suivirent, il dirigea dans ces parages d’autres expéditions plus heureuses, que Froissart a négligé de relater, mais dont on trouve la trace ailleurs, particulièrement dans les actes du Trésor des Chartes, où l’on voit qu’il reprit la suite des opérations du duc de Bourbon, interrompues au mois de novembre 1385 (ci-dessus, p. 392, note), en Saintonge, en Angoumois et en Limousin. Par acte daté de Paris, le 17 mai 1386, Charles VI confia spécialement à Louis de Sancerre la garde des châteaux de Cognac, Merpins et Châteauneuf-sur-Charente. (Le P. Anselme, t. VI, p. 760.) L’an 1387, lit-on dans des lettres données en faveur des habitants de Cognac, le maréchal vint en Saintonge et y conquit Jarnac-sur-Charente et plusieurs autres forteresses. Il fit démolir le château et les fortifications de Jarnac et la tour de Bourg-Charente, que le duc de Bourbon avait laissée debout, parce qu’il jugeait ces forts trop difficiles à garder. Alors il fit commandement aux habitants de Cognac, « pour la seureté et tuicion du païs d’environ et pour eschever les grans maulx, inconvéniens et dommages qui à cause d’iceulx lieu de Jarnac et tour de Bourc peussent estre ensuiz aus dix habitants et au païs d’environ, s’il advenoit qu’ilz eussent autresfoiz esté oriz par noz diz ennemiz qui lors detenoient et encores detiennent ou dit païs pluseurs lieux et forteresses », de prêter aide à la démolition susdite. Ce qu’ils firent. Mais depuis, ceux qui prétendaient droit sur Jarnac et Bourg-Charente menacèrent les habitants de Cognac de les poursuivre en dommages-intérêts et les requirent de remettre lesdits lieux en état. Ceux-ci se pourvurent auprès du roi, qui déclara que, du moment qu’ils avaient agi sur l’ordre de son lieutenant, ils étaient à couvert, et interdit tout procès qui pourrait leur être intenté à ce sujet. (Acte de février 1389 n.s., JJ. 135, n° 89, fol. 50 v°.) Saint-Séverin près Aubeterre fut aussi recouvré sur les Anglais par le maréchal de Sancerre, comme on le voit dans des lettres de don à Jean-Raymond d’Aubeterre du dit lieu de Saint-Séverin, qui avait appartenu à Jean Vigier, puis à sa veuve Guillemine d’Aubusson. Cette dame avait été attirée dans un guet-apens et noyée par Migonnet de Broussac, neveu dudit Vigier, qui hérita ainsi de Saint-Séverin. Mais son crime ayant été découvert, la terre fut confisquée avec ses autres biens. (Lettres du 24 mars 1391 n.s., JJ. 140, n° 195, fol. 227.) Dans d’autres lettres de rémission pour un crime commis à Saint-Jean-d’Angély par Barthélemy Danay, arbalétrier de la compagnie du capitaine Étienne Sauvage, on apprend que, le 31 mai 1388, le maréchal de Sancerre était attendu prochainement à Saint Jean-d’Angély. (Juillet 1388, JJ. 133, n° 29, fol. 15.)

, le aient trait ou veuillent traire en cause et proces, le dit suppliant, doubtant rigueur de justice et lequel est en voie d’estre povres et desers à tousjours, si nostre grace ne lui est sur ce faicte et impartie, en nous humblement suppliant que, consideré ce que dit est et que les diz change et vente faiz par le dit exposant avec les diz de Jumillac et de Corbafin ont esté faiz pour traire ou mettre hors des prisons de noz diz ennemis de Jumillac son dit povre voisin, nostre subget, et aussi pour obvier plus grant dommage que les diz ennemis de Corbaffin eussent fait ou donné aux dictes bonnes gens et habitans de Luchac et de Moustel, pour deffaute de paiement de la dicte finance, et que tousjours le dit suppliant a esté de bonne vie et honneste conversacion, senz estre reprinz d’aucun autre villain cas ou delit, si comme il dit, il nous plaise lui impartir nostre dicte grace. Nous, attendu ce que dit est, voulans en ceste partie grace estre preferée à rigueur de justice vers le dit suppliant, à icellui ou cas dessus dit avons, de nostre grace especial et auctorité royal, quicté, remis et pardonné, quictons, remettons et pardonnons les diz faiz, avec toute peine, amende et offense corporele, criminele et civile, que pour ce peut avoir encouru envers nous ; et le restituons à sa bonne fame et renommée, au païs et à ses biens non confisquiez, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur. Si donnons en mandement au seneschal de Lymosin et à touz noz autres justiciers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent et laissent joir et user le dit suppliant, senz le molester, contraindre ne empeschier, ne souffrir estre molesté, contraint ou empeschié aucunement au contraire ; maiz se son corps et ses diz biens qui pour ce seroient prinz, saisiz, arrestez ou empeschiez, lui mettent ou facent mettre, tantost et senz delay, à plaine delivrance. Et que ce soit, etc. Sauf, etc. Donné à Paris, l’an de grace mil ccc. iiiixx et ix, et de nostre regne le xe, ou mois de septembre

La dixième année du règne de Charles VI commençant le 16 septembre 1389, cet acte fut donné entre le 17 et le 30 septembre.

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Par le conseil. Niczon. — Auneel.

DCCXXXV Décembre 1389

Rémission accordée à Maurice Lévêque, dit Rochereau, serviteur du curé de Saint-Fulgent, coupable du meurtre d’André Gentis.

AN JJ. 136, n° 255, fol. 156 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 398-401

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, de la partie des amis charnelz de Maurice Levesque, autrement dit Rocherea, à nous avoir esté humblement exposé que, comme icellui Maurice ait demouré en l’ostel et ou service du curé de Saint Fulgent en Poictou par certain temps, pendant lequel c’est assavoir le mardi après la Penthecoste l’an de grace mil ccc.iiiixx et huit, à heure de vespres ou environ, le dit curé se parti de son dit hostel et ala à l’ostel d’un chevalier du dit païs, appellé Jehan de Lestang

Ce personnage ne figure pas sur la généalogie de la famille de Lestang donnée par MM. Beauchet-Filleau, dont la filiation suivie ne commence d’ailleurs qu’en 1448 (Dict. des familles de l’ancien Poitou, t. II, p. 294). Un Guillaume de Lestang, écuyer, châtelain de Thouars, vivant de 1354 à 1357, n’y est pas mentionné non plus. Ayant partagé la captivité de Louis, vicomte de Thouars, prisonnier des Anglais, et dont il était l’écuyer, il avait aidé son maître à s’échapper des mains de ses ennemis et était devenu son favori. Ce Guillaume de Lestang soutint plusieurs procès au Parlement, l’un entre autres en matière de rapt, fort curieux, contre Jeanne de Velort, damoiselle, qu’il prétendait sa femme. Il y avait eu mariage entre eux et librement consenti, affirmait-il ; de plus, l’official de Poitiers, appelé à se prononcer, les avait déclarés légitimes époux. Guyon de Marçay enleva ladite Jeanne, qui lui fut rendue quelque temps après. Puis les amis de celle-ci, en tête desquels se trouvait Hugues de Bauçay, qui avait été son tuteur ainsi que de son frère, Guy de Velort, lui conseillèrent de quitter définitivement ledit de Lestang, et dénoncèrent ce dernier au sénéchal d’Anjou comme coupable de rapt et de violences sur la personne de ladite Jeanne, se fiant à la protection du vicomte de Thouars. (Long arrêt du 16 mai 1355, prescrivant un supplément d’information, X2a 6, fol. 247 v°.) Nous renvoyons aux registres du Parlement pour la suite de cette affaire ; voy. particulièrement X2a 6, fol. 124, 204, 218 v°, 267 v°, 333 ; X1a 15, fol. 225.) En 1412, un de ses descendants, Louis de Lestang, écuyer, eut aussi des démêlés avec la justice, comme nous le verrons, pour avoir enlevé une jeune et riche héritière.

, et laissa en son dit hostel entre les autres un chappellain appellé Jaques Amissea et le dit Maurice, et leur commanda et à ses autres genz qu’ilz gardassent bien son dit hostel, ou quel jour icellui Maurice qui venoit de la dicte ville de Saint Fulgent, environ heure de jour couchant, et se vouloit aler couchier en l’ostel de son dit maistre, pour la garde d’icellui, ainsi que commandé lui avoit, trouva à l’uys du dit hostel iii. personnes, entre les quelles estoit un appellé André Gentis, les quelz escoutoient, si comme il sembloit, quelz gens il avoit ou dit hostel ; et lors le dit Maurice entra dedans le dit hostel et dist au dit chappellain qu’il avoit gens dedans la closture du dit hostel, et pensoit qu’ilz y feussent venuz à celle heure pour rober leur dit maistre ; et pour ce s’en issirent au dehors du dit hostel les diz Maurice et chappellain, pour savoir que c’estoit. Les quelz André et ses compaignons se retrairent, quant ilz les oïrent issir hors d’icellui hostel, en alant tout au long de la cohue ou halle du dit lieu et jusques à l’ostel d’un appellé Colin Vinet, au quel lieu les diz Maurice et chappellain alerent pour cuidier savoir quelz gens c’estoient et que ilz demandoient. Et quant ilz furent au dit lieu, le dit André se tourna vers eulx, tenant en sa main un grant coustel tout nu, en s’efforçant d’en ferir le dit Maurice parmi la poictrine ; le quel Maurice, veant que le dit André s’efforçoit de le frapper et pour obvier et resister à la male voulenté d’icellui André, saicha un grant coustel qu’il avoit et en donna un coup au dit Andre tant qu’il lui en fist une grant plaie en la teste, pour occasion du quel coup ou navreure icellui André ala de vie à trespassement, le xiiiie jour ou environ après la dicte navreure. Pour la quelle chose le dit Maurice, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du païs et n’y oseroit jamaiz rettourner, ainçois seroit du tout desert, se par nous ne lui estoit sur ce pourveu de nostre grace. Suppliant humblement les diz exposans que, comme en tous autres cas le dit Maurice ait esté et soit de bonne fame et renommée, et ne cuidoit mie telement navrer le dit André, ainçois en fu très courouciez, et aussi que ce fu en reppellant force par force, nous sur ce lui veuillons pourveoir de nostre dicte grace. Pour quoy nous, ces choses attendues et considerées, voulans misericorde estre preferée à rigueur de justice, avons ou cas dessus dit remis, quicté et pardonné, remettons, quictons et pardonnons, de grace especial, par ces presentes au dit Maurice le fait et cas dessus dit, avecques toute peine et amende corporele, criminele et civile qu’il pourroit avoir encouru envers nous et justice, pour occasion du dit fait, et le restituons à sa bonne fame et renommée, au païs et à ses biens quelconques non confisquez. Et avecques ce lui remettons tous appeaulx et ban, s’aucuns ont esté pour ce faiz contre lui, en imposant à nostre procureur sur ce silence perpetuel, sattisfaction faicte à partie civilement tant seulement, premierement et avant toute euvre, se faicte n’est. Si donnons en mandement au bailli des ressors et Exempcions de Touraine, d’Anjou, de Poictou et du Maine, et à tous noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, que le dit Maurice facent, sueffrent et laissent joir et user paisiblement de nostre dicte grace et remission, senz le molester ou empeschier, ne souffrir estre molesté ou empeschié en aucune maniere au contraire, et se son corps ou aucuns de ses diz biens estoient pour ce prinz, saisiz, arrestez ou empeschiez, que ilz lui mettent ou facent mettre, tantost et senz delay, à plaine delivrance. Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, l’an de grace mil ccc. iiiixx et ix, et de nostre regne le xe, ou mois de decembre.

Par le roy, à la relacion du conseil. Guingant.

DCCXXXVI Décembre 1389

Rémission accordée à Guillaume Champoseau pour un meurtre par lui commis, plus de quatre ans auparavant, sur Jean Sorio, l’un des commis du duc de Berry à la levée d’une taille à Coulonges-Thouarsais, qui avait saisi ses biens et menaçait de lui faire pis, bien qu’il eût payé les cinq sixièmes de sa quote-part et pris des engagements pour le reste.

AN JJ. 136, n° 277, fol. 171 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 401-404

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Guillaume Champoseau, povre homme laboureur, chargié de sa mere, de l’aage de lxx. ans ou environ, de sa femme et de troiz petiz enfans, contenant que, environ la feste de la Penthecoste derrainement passé ot iiii. ans, le dit suppliant qui lors demouroit en la parroisse de Coulonges Thoarçoises fu assiz et imposez à la somme de lx. solz tournois pour sa part et porcion d’une taille, que lors nostre très chier et très amé oncle le duc de Berry avoit fait asseoir et imposer sur les habitans de la dicte ville, pour la quelle cueillir furent commiz en la dicte ville de Coulonges jusques au nombre de x. personnes ou environ, aux quelz le dit suppliant paia l. solz sur la dicte somme de lx. solz qui lui estoit imposée, et s’obliga de paier aus diz commis les dix solz qui demouroient du residu, et parmi ce que les diz commis le devoient tenir paisible et lui firent delivrer ses biens qui pour ce lui avoient esté empeschiez ; neantmoins feu Jehan Sorio

Peut-être pour Suirot ou Suyreau. Cf. un Jean Suyreau, dit Frère, qui était présent, le 20 juin 1383, à un accord passé devant la cour de Thouars entre Girard Rabasté, chevalier, et Huguet de la Voirie, seigneur de Puyraveau. (Arch. nat., X1c 47.)

, qui commis estoit avec les diz autres à lever la dicte taille, par hayne ou autrement, de sa voulenté indeue, pou de temps après la dicte paie et obligacion ainsi faicte, vint en la maison du dit suppliant, ycellui absent et senz la voulenté des autres commis, ou autrement, prinst et fist prendre des biens meubles du dit suppliant jusques à la valeur de plus de xx. solz ; et encores non contens de ce, le jour de la feste saint Jaques et saint Christofle lors après ensuivant

Le 25 juillet 1385.

, le dit feu Jehan Sorio, qui venoit du marchié de Bresseure, encontra d’aventure icellui suppliant qui pareillement venoit du marchié de la dicte ville, pour avoir et trouver finance de autres xxx. solz en quoy il estoit imposé en une autre taille, et eulx estans ou grant chemin qui va de Coulonges à Bresseure, près du pont de Croy, ledit feu Jehan Soryo dist au dit suppliant moult arroganment pour quoy il n’estoit paiez des dix solz qu’il devoit du residu de sa dicte taille ; au quel le dit suppliant respondi que il avoit priz ou fait prendre de ses gaiges qui valoient plus de xx. solz et que il n’y povoit lors mettre remede. Et lors le dit feu Jehan Sorio lui dist que encores en prendroit il, le quel lui respondi tout courtoisement : « Je pry Dieu qu’il ne vous en doint jà voulenté ne povoir. » Et incontinent le dit feu Jehan Sorio, non content et esmeu de ses paroles, vint au dit suppliant et lui dist : « Ha, ribaut, me contrarie tu ! » et de fait se prist à lui et lui donna pluseurs cops. Le quel suppliant, voyant la male voulenté du dit feu Jehan et que senz cause il estoit ainsi gouvernez, tempté de l’ennemi, sur son corps defendant et en reppellant force par force, haussa un baston qu’il tenoit et en donna un coup au dessus de l’espaule au dit feu Jehan Sorio, et aussi l’en fery depuis par les jambes, senz lui faire sang ne plaie et senz ce qu’il eust propos ne entencion de le tuer ou mutiler ; depuis la quelle bateure ainsi faicte, l’en dit ycellui feu Jehan Sorio estre pour ce alé de vie à trespassement. Pour le quel fait, le dit suppliant dès lors se absenta du païs, pour doubte de rigueur de justice. Et a pour ce esté appellé à noz droiz et banny de nostre royaume, si comme l’en dit, dont il est en aventure d’estre desert et fuitif à tousjours, se de nostre grace et misericorde ne lui est sur ce secouru, en nous requerant humblement que, consideré le long temps que il a que le fait advint, pendant le quel il a souffert pluseurs povretés et miseres, et aussi que tout le temps de sa vie il a esté et est homme de bonne vie et renommée et de conversacion honneste, senz oncques avoir esté reprins, actaint ou convaincu d’aucun autre vilain cas ou reprouche, si comme il dit, et aussi que il a fait paix et sattisfaction à partie, nous lui veuillons nostre dicte grace impartir et lui estre piteables et misericors. Nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, au dit suppliant ou cas dessus dit avons pardonné, quictié et remis, et par la teneur de ces presentes, de grace especial et de nostre auctorité royal, pardonnons, quictons et remettons le dit fait, et tous appeaulx, deffaulx et le ban, se pour ce s’en est ensuy, avecques toute peine, offense et amende corporele, criminele et civile, en quoy il peut pour ce avoir encouru envers nous et justice. Et le restituons et remettons à sa bonne fame et renommée, au païs et à ses biens non confisquiez, sattisfaction faicte à partie civilement, avant toute euvre, se faicte n’est. Si donnons en mandement par ces presentes au bailli des ressors et Exempcions de Touraine, d’Anjou, du Maine et de Poitou, et à touz noz autres justiciers et officiers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit suppliant ilz facent, sueffrent et laissent joir et user paisiblement de nostre presente grace et remission, senz le molester ou empeschier, ou souffrir estre molesté ou empeschié en corps ou en biens, de present ou pour le temps avenir, en aucune maniere ; maiz son corps et tous ses biens non confisquiez, s’aucuns en sont pour ce prins, saisiz ou arrestez, lui mettent ou facent mettre senz delay à plaine delivrance. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, ou mois de decembre l’an de grace mil ccc. iiiixx et ix, et de nostre regne le xme.

Par le roy, à la relacion du conseil. Freron.

DCCXXXVII Décembre 1389

Rémission accordée à Guillaume Reugart, charpentier, d’Ursay, coupable d’homicide sur la personne de Jean Morin, qu’il avait trouvé avec sa femme et contre lequel il avait été obligé de se défendre.

AN JJ. 136, n° 279, fol. 172 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 404-407

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir esté exposé de la partie des amis charnelz de Guillaume Reugart, povre charpentier demourant à Hursay en Poitou, que comme, environ le jour de feste saint Lyenart qui fu ou mois de novembre derrenier passé, icellui Guillaume feust revenuz de la Lande, où il avoit ouvré de son mestier, en son hostel au dit Hursay, environ deux lieues de nuyt, et quant il fu à son dit hostel, pour ce qu’il y apperceut clarté, hucha sa femme, la quelle, quant elle l’oy huchyer, estaigny la chandelle et ne lui voult ouvrir l’uys, combien qu’il la huchast par pluseurs fois et que Barthelemi Lucas, voisin du dit Guillaume, qui estoit ou dit hostel luy deist : « Ouvre, c’est ton mary », et pour ce se feust le dit Guillaume efforcié de rompre l’uys ; la quelle chose oyant le dit Barthelemi Lucas estant ou dit hostel, comme dit est, ouvry au dit Guillaume le dit huys de son hostel, du quel, quant le dit Guillaume y fu entré, sa dicte femme s’en issy, et lors un nommé Jehan Morin, autrement Veillon, qui estoit ou dit hostel avec la dicte femme, qui depuis qu’elle fu mariée au dit Guillaume est alée aval le païs jouer et est dissolue et mal renommée, coury sus au dit Guillaume et lui passa un petit glaive, qu’il avoit emprès le costé, le voulant ferir d’icellui, et pour ce qu’il failli, recouvra de rechef, et frappa et navra le dit Guillaume en son bras senestre ; et lors le dit Guillaume saisi le dit glaive et le dit Jehan derechief print le dit Guillaume par son chapperon et le lui estourdi

Tordit.

entour son col, et adonc le dit Guillaume, veant que le dit Jehan ne le vouloit laissier, maiz s’efforçoit de le tuer, crya : « A l’ayde, l’en me veult murdrir ». Et ce non obstant, icellui Jehan ne le voult laissier, ains perseveroit tousjours en sa mauvaise voulenté, et pour ce le dit exposant, pour doubte de mort et pour eschaper des mains du dit Jehan Morin, le frappa en ceste chaleur d’un coustel qu’il portoit, deux cops, l’un en la poictrine et l’autre par le nombril ; et lors le dit Jehan soy sentant feru, laissa le dit Guillaume et s’enfuy en l’ostel du dit Barthelemi Lucas, ou quel hostel le lendemain, environ demie prime, pour cause des navreures dessus dictes, il ala de vie à trespassement. Maiz avant qu’il trespassast, il se confessa et dist publiquement, en la presence du prestre qui le confessa et d’autres, qu’il avoit eu très grant tort envers le dit Guillaume et qu’il estoit venuz en son hostel pour couchier avec sa dicte femme, et pour ce il lui pardonnoit sa mort, en lui priant qu’il lui pardonnast ce que dit est. Pour doubte du quel fait, le dit exposant, doubtant rigueur de justice, nous a humblement fait requerir nostre grace sur ce lui estre impartie. Pour quoy nous, attendu ce que dit est et que icellui exposant a tousjours esté homme de bonne fame et renommée, senz avoir esté attaint d’autre villain cas ou reprouche, et que ce qu’il en a fait a esté en son corps defendant et en repellant force par force, voulans pour ce lui estre piteables et misericors, au dit Guillaume, le quel s’est pour ce renduz ès prisons des religieus, abbé et convent de Ferrieres, en la haulte justice des quelz le dit fait advint, ou cas dessus dit, avons quicté, remis et pardonné, quictons, remettons et pardonnons, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, le fait dessus dit, avec toute peine, amende et offense corporele, criminele et civile, en quoy pour ce il peut estre encouru envers nous et justice, et le restituons à sa bonne fame et renommée, au païs et à ses biens non confisquez, sattisfaction faicte à partie, se faicte n’est, civilement tant seulement. Si donnons en mandement au bailli des ressors et Exempcions de Tourainne, d’Anjou, du Maine et de Poitou, et à tous noz autres justiciers quelconques, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, ou à leurs lieuxtenans, que le dit Guillaume facent, sueffrent et laissent joir et user de nostre presente grace et pardon plainement et paisiblement, senz l’empeschier pour ce, ores ne ou temps avenir, en corps ne en biens, en aucune maniere au contraire ; maiz son dit corps et ses biens pour ce detenuz et empeschiez lui mettent ou facent mettre à pure et pleine delivrance ; et quant à ce imposons silence perpetuel à nostre procureur et à tous autres. Et que ce soit ferme et estable à tousjours, nous avons à ces presentes fait mettre nostre seel. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, ou mois de decembre l’an de grace mil ccc. iiiixx et ixe, et de nostre regne le xme.

Par le roy, à la relacion du conseil. Freron.

DCCXXXVIII Janvier 1390

Extrait de lettres de rémission en faveur d’Audouin Chauveron, chevalier, ancien Prévot de Paris, relatif à Antoine de Buxeron, garde de la Monnaie de Poitiers, et à son mariage.

AN JJ. 138, n° 98, fol. 118 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 407-409

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir oy de l’umble requeste ou supplicacion de nostre amé et feal Audoyn Chauveron

Bien qu’il eût des intérêts en Poitou, comme le montrent les lettres publiées ci-dessus (p. 233), Audouin Chauveron n’appartenait pas à une famille poitevine. Nous devons donc laisser de côté ces longues lettres de rémission (elles comportent douze pages du registre, ce qui donnerait environ trente-six pages d’impression), malgré tout l’intérêt qu’elles présentent, sauf ce court passage qui a trait à un garde de la Monnaie de Poitiers. Le reste se rapporte à des faits de l’administration de Chauveron en qualité de Prévôt de Paris et de bailli de Cotentin. Les autres accusations portées contre lui, sous trente chefs environ, sont beaucoup plus sérieuses que son entremise pour le mariage d’Antoine de Buxeron. Elles visent les crimes de concussion, péculat, dilapidation, corruption, abus de pouvoirs, etc. On lui impute entre autres d’avoir imposé à la ville de Paris des tailles, sans ordre du roi, et de s’en être approprié le produit. Emprisonné, puis élargi sous caution, Chauveron fut renvoyé devant une commission extraordinaire. Son procès fut ensuite soumis au Parlement. C’est alors qu’intervint la grâce royale. Soit que toutes les accusations fussent mal fondées, soit qu’il eût de puissants protecteurs à la cour (tels que le duc de Berry, voy. ci-dessus, p. 235 note), l’ancien Prévôt fut renvoyé indemne et sans aucune condition des fins de toutes les plaintes. Ces lettres ont ceci de particulier qu’elles reproduisent, à côté de chaque accusation, les arguments de la défense, comme le ferait une sentence d’absolution.

, chevalier, nagaires Prevost de nostre ville de Paris et garde de la Prevosté des marchans de nostre dicte ville, contenant que, comme nostre procureur general ait baillez et proposez certains cas et articles contre le dit Audoyn, par devant noz amez et feaulz conseillers maistre Symon Foison, president en nostre Parlement, Tristan du Bois, chevalier, et maistre Robert Cordelier, maistres des requestes de nostre hostel, aux quelz cas et chascun d’eulz ycellui Audoyn a respondu promptement, en lui excusant et defendant sur ce, les quelz cas s’ensuivent : . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Item, a dit et proposé le dit procureur contre le dit Audoin que par sa force et puissance, et soubz umbre de son office, il a mariée une fille de nostre dicte ville de Paris, nommée Perrette Alebrain, la quelle avoit bien vaillant vc frans et la quele n’avoit pas x. ans à un serviteur du dit Audoin, le quel estoit un povres homs de petit estat et d’estrange païs, et dit que, supposé que les amis s’i consentissent, ce auroit esté de bouche et non pas de cueur, et pour ce a conclud à privacion d’offices royaulz et publiques obtenuz et à tenir amende honnorable aus amis et proufitable de iiiim livres, et à nous de viiim livres. A quoy le dit Audoin a respondu que, à la requeste de Anthoine de Buxeron

La nomination d’Antoine Buxeron comme garde de la Monnaie de Poitiers est postérieure au 11 avril 1377, date extrême d’un registre de comptes de fabrication de cet établissement, conservé parmi les Archives de l’ancienne Cour des Monnaies. (Arch. nat., ZIB 935.)

, bourgeois de Lymoges, orfevre et garde de la Monnoye de Poitiers, le quel est un homme bien né et riches homs et nostre officier, et lequel n’estoit ne fu oncques son familier ou serviteur, qu’il parla aus amis charnelz de la dicte Perrette du mariage du dit Anthoine et de elle, car à elle ne failloit point parler, pour ce qu’elle estoit paravant d’accord au dit Anthoine, comme il a oy par pluseurs foiz dire à ceulz qui le savoient, et que les amis se consentirent senz aucune force ne contrainte, et furent en fiançailles de Noel l’an iiiixx et un jusques au dymenche avant la saint Jehan l’an iiiixx et deux, et avecques ce, que les noces furent faictes publiquement et y furent tous les amis de la dicte fille, et firent la cemonce les amis de la dicte fille, et avoit la dicte fille bien xvi. ans, comme il appert par le regart de la dicte fille ; et aussi respond qu’il n’est nulz, fors Dieu, qui peust congnoistre ce que nostre dit procureur dit que les amis n’avoient pas au cuer ce qu’ilz disoient de bouche, et aussi qu’il n’y a point de partie poursuivant ne complaignant, ainçois est la fille demourant à Poitiers avec son dit mary, richement et mieulz mariée que frere ne suer qu’elle ait ; et si a affermé la dicte fille, par son serement, que ce fu de son bon gré et bonne voulenté. Et pour ce doit estre de ce tenuz quictes et absolz. . . . . . . . . . . . . . . .

Donné à Lion sur le Rosne, ou mois de janvier l’an de grace mil ccc. iiiixx et ix, et de nostre regne le disiesme.

Par le roy, presens le connestable, l’evesque de Noyon, le sire de Coucy et maistre Odart de Molins. J. Bertaut.

DCCXXXIX Mars 1390

Confirmation d’une sentence d’absolution rendue par l’official de Maillezais en faveur de Jean Alonneau, de Fontaines, accusé d’avoir assassiné et dévalisé, au mois d’août 1372, Robert de Grantonne, receveur de Poitou pour le prince d’Aquitaine, et de plusieurs crimes de faux.

AN JJ. 138, n° 118, fol. 148 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 409-432

Karolus, etc. Notum facimus universis, presentibus pariter et futuris, nos infrascriptas vidisse litteras, quarum tenor sequitur et est talis :

Universis presentes litteras seu presens publicum instrumentum inspecturis et audituris, officialis Malleacensis, commissarius in hac parte à reverendo in Christo patre domino Johanne, Dei et apostolice sedis gratia Malleacensis episcopo, specialiter deputatus, salutem in Domino et fidem indubiam presentibus adhibere. Noveritis quod, delato apud dictum reverendum patrem et arresto ejusdem et in prisionibus suis detento Johanne Allonnelli

Les noms de Jean Alonneau et de plusieurs autres membres de cette famille du Bas-Poitou se rencontrent dans divers textes de la fin du xive siècle. Pierre Joubert, écuyer, seigneur de Brillouet, avait légué 100 sous de rente sur les revenus de cette terre à Catherine Alonneau, fille de Jean Alonneau, pour l’aider à se marier. Après la mort de Pierre Joubert, un différend s’étant élevé entre ses héritiers, ses biens furent mis sous la main du roi, et le 18 mars 1377, mandement fut adressé à l’administrateur de Brillouet d’avoir à payer cette rente. (Arch. nat., X1a 26, fol. 41). Voici trois autres actes contemporains relatifs à un Jean Alonneau, qui pourrait bien ne faire qu’une seule et même personne avec l’accusé du meurtre de Robert de Grantonne. Malheureusement ces pièces ne sont pas très explicites. Jean Alonneau et Jean Thiébaut, pour certaines sommes et arrérages qui leur étaient dus, avaient fait saisir certains héritages de feu Pierre Virole, que tenait alors maître Jean Girard, lesdits héritages situés à l’Hermenault. Puis les parties consentirent à s’en rapporter au jugement d’arbitres et choisirent pour les mettre d’accord l’archiprêtre d’Ardin, et Pierre Mignot, sénéchal de Fontenay-le-Comte ; cette convention fut ratifiée par le Parlement, le 10 juin 1376 (X1c 32).

Dans la seconde affaire, Jean Alonneau était appelant devant la cour d’un décret de prise de corps obtenu contre lui, « pour cause de certains cas à lui imposez » par Pierre de Saint-Gilles, Gillet-Berchou, sieur du Puiset, Guillaume Robert et Simon Pageraut, pour lors prévôt de Fontenay-le-Comte pour le duc de Berry. Depuis cet appel et bien qu’il eût été dûment relevé et poursuivi, Alonneau fut pris par Guillaume Robert et amené sur un cheval prisonnier audit lieu de Fontenay, ceux qui le conduisaient disant « qu’il le rendroient mort ou vif à Poitiers. » Par une transaction intervenue et homologuée le 6 juin 1388, il fut décidé que l’appel serait mis à néant sans amende et sans dépens, et que délivrance de sa personne et de ses biens saisis serait accordée à Alonneau, à condition qu’il se présenterait devant le sénéchal de Poitou ou son lieutenant, aux prochaines assises de Fontenay qui devaient se tenir après la Saint-Rémy de ladite année (X1c 56). Ne s’agissait-il pas déjà de l’affaire d’assassinat sur le receveur du prince de Galles ? Il se pourrait que la justice séculière en ait été saisie d’abord, puis qu’elle ait été obligée de reconnaître le privilège de cléricature de l’accusé et de le renvoyer devant le juge ecclésiastique. Les dates concordent bien et se prêtent facilement à cette hypothèse.

Quoi qu’il en soit, Jean Alonneau n’en avait pas fini de ses démêlés avec les tribunaux. Au commencement de l’année 1390 n.s., il était de nouveau appelant au Parlement de « certaine ordonnance, mandement ou commission, exploiz et autres griefz à lui faiz », au profit du procureur du duc de Berry par Jean Langlois, receveur dudit prince et son commissaire en Poitou, et par Pierre Maynart, sergent du roi, député par ledit Langlois, « pour raison de certaine dette que le procureur dudit duc maintenoit ledit Alonneau devoir et estre tenuz envers ledit seigneur. » Cet appel fut encore mis à néant sans amende ni dépens, du consentement d’Alonneau qui s’engagea à payer au duc ou à son receveur ce qu’il lui redevait, aussitôt qu’il serait retourné dans son pays, accord homologué le 21 mars 1390 n.s. (X1c 60).

Une Berthomée Alonneau, dont on ne connaît pas les liens de parenté avec Jean, était mariée vers cette époque avec Jean Goyon qui, à cause d’elle, rendit aveu au duc de Berry d’une pièce de terre à Chizé et d’autres petits fiefs (R1* 2173, p. 1834).

, clerico, parrochiano de Fontanis, Malleacensis diocesis, super eo quod eidem impositum fuerat et opponebatur per nonnullos quod dictus delatus scienter, pensatis insidiis, animo deliberato et ex certo, dampnato proposito, inimico totius humani generis suadente, interfecerat dominum Robertum de Grandonia

Nous avons eu à nous occuper, à plusieurs reprises dans le précédent volume, de ce Robert de Grantonne ou Grandonne, receveur de Poitou pour le prince de Galles, particulièrement à propos de la confiscation de ses biens (p. 63-65, 117-119, 121 n., 134-138, 163-165, 354-358). Nous ignorions alors sa mort tragique et les détails intéressants contenus dans la sentence d’absolution de l’official de Maillezais. Il est facile de déterminer, à quelques jours près, la date du crime dont il fut victime et qui paraît être demeuré définitivement impuni. Des lettres du roi du 29 juillet 1372 parlent de Robert de Grantonne comme vivant encore ; d’autres du duc de Berry, datées de Poitiers le 8 août 1372, le disent défunt. (Id. p. 119 et 137.)

, presbyterum, tunc receptorem comitatus Pictavie pro domino tunc principe Acquitanie, ac furtive et latenter habuerat, ceperat, rapuerat, secum deportaverat minus juste et indebite de bonis mobilibus dicti deffuncti receptoris usque ad valorem decem mille librarum monnete currentis, aut quod ad premissa facienda, perpetranda et committenda, opem, favorem, consilium, auxilium prebuerat et juvamen. Eciam opponebatur contra ipsum delatum quod ipse minus juste commisit crimen falsi, faciendo et scribendo manu sua propria quoddam protocollum cujusdam littere quictancie per Guillelmum Ferron, clericum, passate domino de Torcio per Guillelmum de Poillé

Voy. le volume précédent, p. 126 note.

, valetum, cujusdam littere obligatorie quam dictus delatus habebat contra dictum dominum de Thorcio de sex centum florenis auri

Rapprocher de l’affaire dont il est question ici des poursuites exercées par Geoffroy Ferron, chevalier, contre Renaud de Vivonne, sire de Thors, en payement d’une obligation de 4.000 francs d’or que ce dernier lui avait souscrite. Renaud avait invoqué le témoignage d’André Rouault, chevalier, de Guillaume Prévost, de Jeanne Jarousseau, veuve de Nicolas Mercier, et de Jean Alonneau, et les avait fait assigner au Parlement, où ils ne se présentèrent pas. (Acte du 11 juillet 1376, X1a 25, fol. 232 v°.) Le 23 décembre suivant, la cour rendit son arrêt portant que Renaud de Vivonne ne pouvait être admis à impugner la validité de cette obligation et qu’il devait payer les 4.000 fr., sauf 1.032 qu’il avait prouvé avoir donnés comme acompte (X1a 26, fol. 138 v°), et mandement fut adressé, le 11 avril 1377, au premier huissier du Parlement d’avoir à faire exécuter cette sentence. (Id., fol. 51.)

 ; eciam quod opponebatur contra dictum delatum, quod ipse minus juste et indebite quamdam litteram falsam fecerat et scripserat, et consignaverat de et super certis contractibus et convencionibus dudum factis inter Johannem Durablea, clericum, ex parte una, et Johannem Theobaldi

Sans doute Jean Thiébaut, celui qui est mentionné dans la note de la p. 410, relative à Jean Alonneau. Le registre des aveux et dénombrements des fiefs compris dans les châtellenies de Belleville, Châteaumur, Palluau, la Garnache, rendus à Jean duc de Normandie et comte de Poitou, au mois de mars 1344, contient l’aveu d’un Jean Thiébaut. (P. 594, fol. 19.)

, parrochianum Beate [Marie] de Fontiniaco, ex altera, et in dictis litteris multas clausulas et objectiones viciose et per speciem falsitatis posuerat, ultra materiam contractuum et convencionum hujusmodi, ex quo dictus delatus contraxerat et confecerat et signaverat litteram antedictam in magnum prejudicium dicti Durablea, ob premissa crimen falsi et alias juris penas dampnabiliter incurrendo, sub sigillo venerabilis et discreti viri decani Fontiniaci ; et quod predictus clericus delatus ad premissa facienda consilium prebuerat et juvamen. Dictusque Johannes Allonnea asserens se innocentem et inculpabilem de premissis omnibus et singulis, omnia premissa negavit. Et prout nostro incumbit officio diligenter omnimodam pro viribus super hoc inquirere veritatem, nollentes eciam, prout tenemur, alicui justiciam denegare, sed eidem delato super hoc volentes apperire et facere justiciam, citari mandavimus et fecimus coram nobis per edicta rectores ecclesiarum parrochialium Beate Marie de Fontiniaco, Sancti Martini de Vado, de Fontanis et de Petocia, diocesis Malleacensis, et primo ad diem primam juridicam post festum beati Xisti

La fête de S. Sixte, pape, se célébrait le 6 août ; mais il s’agit plutôt sans doute de S. Xiste ou Sixte, premier évêque de Reims, dont la mémoire était honorée le 1er septembre.

anno quo dicebatur millesimo cccmo octuagesimo septimo ; item secundo, anno predicto, ad primam diem juridicam post festum beati Dyonisii ; item tercio et peremptorie, anno predicto, coram nobis, ad diem Jovis post festum Omnium Sanctorum ; iterum quarto perhemptorie, anno predicto, coram nobis, ad diem Lune post festum beate Marie Magdalenes ; iterum quinto perhemptorie ex habundanti, coram nobis, quinto et uno perhemptorio pro omnibus, coram nobis, ad diem terciam juridicam mensis septembris anno quo dicebatur millesimo cccmo octuagesimo octavo, nobiles et potentes viros dominum de Thorcio, senescallum Pictavensem, dominum Persevaldum de Culloigne

Sur Perceval de Cologne, voy. le volume précédent, p. 201 note. On voit ici qu’il fut bien en effet châtelain de Fontenay-le-Comte.

, castellanum ville et castri Fontiniaci, ac venerabiles viros locumtenentem dicti domini senescalli Pictavensis, Teveninum Gracien

Étienne ou Thévenin Gracien. Voy. ci-dessus, p. 156, note, de ce volume.

, procuratorem illustrissimi domini domini, ducis Bitturie et Alvernie, comitis Pictavie, Egidium Brechou

Ce Gilles Brechou (aliàs Berchou) était seigneur du Puiset près de Fontenay-le-Comte et est nommé dans un autre acte relatif à Jean Alonneau, cité dans la note consacrée à ce dernier personnage (ci-dessus, p. 410). Il a été question dans le précédent volume des démêlés de Gilles Brechou avec Jean Bigot, châtelain de Mareuil, entre les années 1376 et 1385 (p. 241, note). Pendant le même laps de temps, notamment en avril et en août 1379, on le retrouve en procès contre Renaud de Vivonne, sire de Thors, au sujet de l’héritage de Jeanne Jarousseau, veuve de Nicolas Mercier, dont il réclamait une part (X1a 28, fol. 45 et 83). Voy. ci-dessus la note consacrée à ce Nicolas Mercier, dans un acte du 9 avril 1379 (p. 118). Le nom de Gilles Brechou figure encore, le 12 septembre 1394, dans un acte où il est question d’hommages de fiefs relevant de la châtellenie de Fontenay-le-Comte, pour lesquels les officiers du duc de Berry avaient mis en cause un nommé Guillaume Blanchet (X1a 41, fol. 267). Il mourut vraisemblablement dans le courant de l’année 1401. On a, sous la date du 10 janvier 1402 n.s., deux aveux de son fils Jean Brechou, écuyer, le premier de son hébergement sis à Fontenay-le-Comte et autres fiefs en dépendant, le second de son hébergement du Puiset, mouvant de la châtellenie dudit Fontenay. (Arch. nat., copie du Grand-Gauthier, R1* 2172, p. 1073 et 1081.)

, valetum, Petrum Rinsant

Pierre Rincent, après avoir été boucher au service du sire de Parthenay, devint châtelain de Fontenay-le-Comte. Quelques années plus tard, il fut condamné pour vol et pour viol, crimes remontant à l’année 1377, par sentence du sénéchal de Poitou, dont il releva appel. Le 18 juin 1400, son affaire fut plaidée au Parlement, et le 23 juin, la cour l’élargit jusqu’à nouvel ordre (X2a 12, fol. 433, 434). Voy. encore d’autres actes de cette procédure jusqu’au 6 septembre 1400 (X2a 13, fol. 327 v°, 329, 336). Le 8 octobre 1410, Pierre Rincent rendit aveu au duc de Berry de son hôtel et hébergement de la Vieille-Bruyère, mouvant de Fontenay-le-Comte (R1* 2172, p. 1139). Nous aurons sans doute occasion de reparler de ce personnage, dont le nom apparaît fréquemment sur les registres de la cour.

, Ramundum Audiart, procuratorem seu substitutum dicti procuratoris, Johannem Coluz, Bretinum Ocquet, Johannem de Foussaio

Jean de Foussay, déjà qualifié de sergent du duc de Berry à Fontenay-le-Comte, était appelé au Parlement, le 11 août 1386, pour répondre d’excès que lui reprochait un nommé Hugues Sajot (X1a 35, fol. 45 v°). Dans un autre acte du 9 du même mois, il est question d’un exploit fait quelques années auparavant par Jean de Foussay, le jeune, sergent du duc, sur l’ordre de Pierre Pertseschausses, lieutenant du sénéchal de Poitou, dont Ponce de Vivonne avait appelé au Parlement. (Procès repris par le fils de celui-ci, Jean de Vivonne, X1a 35, fol. 50 v°.)

, servientes dicti domini ducis, Johannem Durablea, clericum, et omnes alios et singulos officiarios brachii secularis et habitatores ville et castri predictorum, et omnes alios et singulos parrochianos et subditos ecclesiarum predictarum, et omnes alios quoscunque publice et in generali, in ecclesiis supradictis, populo ibidem congregato pro divinis audiendis, dicturos, proposituros, denunciaturos vel quicquid dicere, proponere, denunciare vel defferre vellent contra dictum Johannem Allonnea, delatum, in carceribus dicti reverendi patris detentum occasione premissorum, vel ipsum accusare super premissis criminibus seu aliquo eorumdem, si ipsum clericum vellent in aliquo accusari aut se partem facere contra eumdem ; cum insinuatione quod, sive ad dictos dies venirent sive non, nos contra ipsum clericum delatum et cum ipso procederemus via juris, ipsorum citatorum et cujuslibet absentia non obstante. Ad quos quidem dies, aut ad aliquem ipsorum, dicti citati vel eorum aliquis non comparuerunt, nec aliquis alius qui aliquid dicere, proponere, denunciare vellent contra dictum Johannem, delatum, aut ipsum in aliquo accusare, vel se partem facere contra ipsum, et quos citatos non comparentes reputavimus contumasses ; ipsaque die tercia die juris mensis septembris predicti, nobis in audiencia nostra Malleacensi, pro tribunali ad jura reddenda sedentibus, dictos sic citatos et non comparentes, et per nos contumaces reputatos, de dicendo, proponendo, denunciando vel defferendo aliquid de premissis contra dictum Johannem, delatum, vel [ipsum] accusando, aut se contra ipsum partem faciendo de cetero, conclusimus via juris. Et hiis actis, nos officialis Malleacensis predictus, volentes ex nostro mero officio super premissis procedere contra dictum Johannem, delatum, ad rei veritatem sciendum, decrevimus per viam inquisitionis contra ipsum Johannem, delatum, fore procedendum, et eidem articulos dari per venerabilem et discretum virum, Aymericum Radini, clericum, procuratorem dicti domini episcopi et causarum officii curie dicti domini promotoris, et ad dandum eidem Johanni, delato, articulos super premissis et eorum singulis, assigna[vimus] coram nobis diem Jovis post festum beati Andree apostoli anno millesimo cccmo octuagesimo octavo, et ad procedendum ulterius, ut jus esset. Qua die adveniente, dictus procurator eidem Johanni, delato, super factis predictis articulos dedit et obtulit, formam que sequitur continentes :

Coram vobis venerabili et circumspecto viro, domino officiali Malleacensi, commissario domini episcopi Malleacensis ad corrigendum et puniendum crimina, excessus, maleficia et delicta quorumcunque clericorum, dicto episcopo subjectorum, delinquentium in diocesi Malleacensi, articulos infrascriptos dat, dicit et in jure ponit et exhibet quos sibi sufficit de eisdem probare intendi, Aymericus Radini, clericus, procurator et nomine procuratorio dicti domini episcopi, promotor causarum officii curie vestre, contra Johannem Allonelli, de Fontanis, clericum, subditum vestrum, apud vos et curiam vestram delatum, et detentum in carceribus episcopalibus Malleaci, in causa inquisitionis officii, quam idem actor, nomine quo supra, fama publica refferente et super ea facta legitima informatione precedente, habet et prosequitur coram vobis contra dictum delatum, per quem ejus medio juramento petit eisdem articulis et singulariter singulis, remoto quolibet advocato, procuratore, notario et instructore, judicialiter respondere.

Et primo quod à xviii. annis ultimo preteritis citra, deffunctus dominus Robertus de Grandonne, presbyter, tunc receptor Pictavie pro domino Eduardo, olim principe Acquittanie et Envaillie, tempore quo vivebat, confidens de legalitate dicti clerici delati, secum tunc piissime conversantis, et ipse delatus una cum pluribus aliis de villa Fontiniaci Comitis apud Vadum de Veluyre, diocesis Malleacensis, insimul personaliter convenerunt.

Item, quod dictus receptor extunc secum habebat et defferebat jocalia et magnas auri et pecuniarum summas pluraque alia bona mobilia, usque ad valorem triginta millium florenorum vel circa, sciente dicto delato antedicto.

Item, quod ipsis receptore et delato ad invicem declaratis et existentibus in dicto loco de Vado, ac eidem delato prius ibidem per dictum receptorem in custodia traditis auri et argenti jocalibus, pecuniis et bonis mobilibus supradictis, in quadam maleta corii albi, idem clericus delatus, de precepto dicti receptoris, ut eum antecederet et preiret, ascendit et intravit secum ducens et habens in quodam vase predicta bona, arepto remige seu navigio, eundo apud Marantum, distantem per duas leucas à dicto loco de Vado.

Item, quod dictus receptor paulo post ipsum delatum versus dictum Marantum iterum secum tulit, in quodam alio vase ingressus, navigans usque ad primum districtum vocatum bouchaut dicte aque.

Item, quod dicto delato tunc existente quasi ad alium inde sequenter, secundum districtum seu bouchaudum ipsius aque, nonnulli malefactores ignoti, cum quibus idem delatus mortem ipsius receptoris antea scienter, ex certo dampnato proposito et deliberato animo, pensatis insidiis, machinaverat, et conspirationem fecerat occidendi ipsum receptorem, favore et nomine dicti delati, latenter insidiis in dicto bouchaudo, minus juste et indebite, de die invaserunt et insultaverunt, et eum percussis

Le texte porte ici pertenssis ; il est d’ailleurs très fréquemment incorrect et nous l’amendons en beaucoup d’endroits, sans noter toutes les fautes corrigées.

lanceis, ensibus et gladiis animose irruentes diversis et duris plagis, ictibus et vulneribus impositis contra, eum inhumaniter insevientes vulneraverunt, ipso delato tunc audiente ipsum receptorem clamantem et vociferantem alta voce in dicto vase : « A la mort ! à la mort ! » quasi mortuum, defectum et post paucos dies deffunctum, et sic homicidium perpetrando, ipsis malefactoribus dare terga conantibus et inde fugientibus metu pene, de mense augusti anno quo dictum fuit Domini millesimo cccmo octogesimo primo

On devrait plutôt lire septuagesimo secundo. Cf. la note 1 de la p. 411 ci-dessus.

, sedente in Ecclesia sancta Dei sancte recordationis domino Gregorio papa

Le pape Grégoire XI, Pierre Roger, était mort en 1378, à Rome. En août 1381, le siège pontifical de Rome était occupé par Urbain VI, et celui d’Avignon par Clément VII. Cette date de 1381 est donc de toute façon inexacte.

, et regnante in regno domino Karolo, quondam Francorum rege.

Item, quod idem delatus, tunc associatus pluribus personis et aliquibus Anglicis, familiaribus dicti receptoris, audito clamore et vociferatione, ad eum licet tute reverti potuisset et audivisset ululantem quemdam magnum canem, quem tunc dictus receptor secum habebat, cum non longe ab eo secum navigaret, rediit et de premissis se senciens culpabilem et suspectum, apud Marantum vie festinans applicuit, ubi statim coram officiariis domini dicti loci de Maranto fecit evocari, interrogari et jurari Johannem de Pratis, utrum sciret quod dictus delatus insultationi et morti dicti receptoris ullatenus consentisset.

Item, quod postea dictus receptor infra triduum, occasione premissorum vulnerationis et plagarum ictus expiravit, et ante et post ejus obitum, dictam maletam corii albi ac in ea existentia omnia aliaque et singula bona supradicta, ad ipsum receptorem spectantia, dictus delatus per se vel alium, ejusdem nomine et mandato, et ipso monente et ratum habente, furtive et latenter secum extunc ubi sibi placuit deportavit seu deportare fecit, usque ad valorem supradictum, et in proprios suos usus convertit, et ea indebite contractando apud se habet et detinet, vel per eum factum ut dolose habeat et detineat, sic furtum et latrocinium committendo, et extunc sententias auctoritate conciliorum provincialium et sinodalium contra tales bona clericorum indebite detinentes generaliter latas dampnabiliter incurrendo.

Item, quod dictus delatus dictum homicidium in persona dicti deffuncti receptoris, presbyteri, dampnabiliter ac perperam et inique per dictos malefactores ignotos in dicto loco acoso fieri, perpetrari et committi fecit, seu ob dolum factum, culpa ipsius delati facta, perpetrata, procurata et commissa extitit, aut ad illum faciendum, procurandum, perpetrandum et committendum idem delatus dedit opem, juvamen, consilium et favorem, anno, mense, ac presidente et regnante tunc quibus supra, sic homicidium perpetrando et excommunicationis sentenciam auctoritate sacri canonis « si quis suadenter dampnabiliter… » incurrendo.

Item, quod dictus delatus dictum homicidium ratum et gratum habuit, tanquam ab ipso gestum ejusque nomine perpetratum, loco, anno, presidente et regnante quibus supra.

Item, dicit et probare intendit dictus actor, nomine quo supra, quod dictus reus aliàs, per se vel per alium ejus nomine et mandato, et ipse monente et ratum habente, promisit reddere et restituere nobili et potenti viro domino Reginaldo de Vivonna, domino de Thors

A la notice consacrée à Renaud de Vivonne (ci-dessus, p. 269, note), nous ajouterons deux renseignements importants, que nous avons recueillis depuis, touchant la durée de son sénéchalat, et la date de sa mort. Dans un mandement du roi au Parlement, en date du 12 juillet 1392, il est question du sire de Thors au présent, et il y est qualifié sénéchal de Poitou. (Arch. nat., X1a 39, fol. 88.) Dans un autre registre, à propos du contrat de mariage de sa fille Marguerite avec Jacques de Surgères, seigneur de la Flocellière, qui fut passé au commencement de décembre 1392, on lit : « Quo contractu facto et antequammatrimonium solemnizatum extitisset, dictus dominus de Thors decesserat. » Ses trois fils et héritiers, frères de ladite Marguerite, ratifièrent les clauses de ce contrat. (Extrait d’un arrêt rendu, après la mort de Marguerite de Vivonne, et touchant sa succession, entre son mari et ses enfants, d’une part, et les autres enfants et héritiers de Renaud de Vivonne, le 24 novembre 1414, X1a 60, fol. 410 v°.) Il résulte de ces textes que la mort du sire de Thors arriva à la fin de décembre 1392 ou en janvier 1393, et qu’il exerça, comme nous le supposions, son office de sénéchal jusqu’au jour de son décès.

, unam litteram obligatoriam, facientem mentionem de sex centum denariis auri vocatis Guiennois, de cugno regis Anglie, in quibus idem dominus de Thors dicto reo erat et fuerat obligatus, ad ipsum dominum de Thors et suos quictandum perpetuo de totali summa auri supradicta.

Item, quod dictus reus debebat et tenebatur, et promisit dictam quiptanciam passare in manibus Guillelmi Ferron, jurati et notarii curie illustrissimi principis domini ducis Bitturie et Alvernie, comitis Pictavensis.

Item, quod dictus reus coram dicto notario passavit quiptanciam, seu aliàs se tenuit de dicta summa pro contento.

Item, quod dictus reus, sciens dictum notarium esse simplicem et non cautelosum, volens eum decipere blandis sermonibus, sibi dicit quod ipsemet reus faceret minutam dicte quictancie in bona forma, ad exhonerandum ipsum notarium de labore scripture.

Item, quod dictus notarius, confidens de probitate et legalitate dicti rei, consentiit quod super hoc faceret proto[col]lum, facti sustancia non mutata.

Item, quod dictus reus fecit et scripsit, propria sua manu, protocollum scienter sub dolo et fraudulenter admisit facere mentionem de dicta quictancia in dicto protocollo, cujus tenor sequitur sub hiis verbis :

« Le xxe jour du moys d’aoust l’an mil ccc. iiiixx un, monseigneur Regnault de Vivonne, seigneur de Thors, congneut et confessa avoir eu et receu de Guillaume de Poillé, valet, une lettre obligatoire en laquelle estoit contenu que le dit seigneur de Thors estoit tenu et obligié à rendre et paier à Jehan Allonnea six cens deniers d’or, appelez Guyennoys coronnez, du coing du roy d’Angleterre, par certaines causes justes contenues en ladicte obligacion, et la quelle obligacion ledit Guillaume de Poillé avoit promis rendre et bailler au dit sire de Thors, par la foy et serement de son corps, et en avoit donné lettre et obligation soubz le scelle du Chastellet de Paris. Obligeant, etc. Renunçant, etc. Promettant, etc. Et en fu jugé par le juge de la cour du seel establi à Fontenay aus contraus, par Guillaume Ferron, clerc, juré et notaire de la dicte court, presens à ceu Guillaume Rataut

Le Grand-Gauthier contient, à la date du 10 mars 1404, un aveu rendu par Guillaume Rataut au duc de Berry, comte de Poitou, à cause de son château de Lusignan, « à homage lige et au devoir de un homme d’arme monté et armé suffisament, à estre et demourer à mes despens par quarante jours à la garde et deffence dudit chastel de Lesignen, mon harbergement de Laudouynere et ma mothe, bourc et terre de Curzay avec toutes et chescunes leurs appartenances et appendences quiexconques », etc., etc. (Arch. nat., R1* 2171, p. 311). Plusieurs autres membres de la famille Rataut sont mentionnés dans le présent volume.

, Pierre Canterea, Jehan Poussart

Jean Poussart était garde du sceau aux contrats de Saint-Maixent en 1379 (acte du 21 août, Cartulaire des Châtelliers, p. 144). Jean Poussart, bourgeois de la Rochelle, mort vers le 1er janvier 1380, avait épousé Pétronille de la Vie, veuve en premières noces de Pierre Triaise. Il laissa quatre fils et deux filles. L’aîné, nommé aussi Jean, vraisemblablement celui dont il est question ici, était majeur à la mort de son père, ainsi que le cadet Jacques, qualifié docteur ès lois dans beaucoup d’actes de la fin du xive siècle. Le premier fut, dès 1380, tuteur de ses jeunes frères, Jeannet et Laurent, et de ses sœurs, et dut soutenir à cause d’eux un procès contre les enfants du premier lit de leur mère, Jean, Gilbert et Pétronille Triaise, enfants de Pierre Triaise et de Pétronille de la Vie. (Voy. mandement de juillet 1380, X1a 29, fol. 82) L’affaire se termina par un accord homologué au Parlement le 30 juin 1391 seulement (X1c 62). Dans ces deux actes on peut puiser des renseignements utiles sur la branche restée bourgeoise de la famille Poussart.

, le chastellain de Saint Maixent. »

Item, quod postmodum dictus reus de interesse et anno supradictis, ac presidente in Ecclesia sancta Dei et regnante in regno Francie tunc quibus nunc, ipse reus apud Fontiniacum Comitis dictum protocollum eidem notario tradidit, dicens veritatem omnimodam contineri et esse in bona forma et materia ordinatum, undeque notarium requisivit et rogavit quod inde faceret et consignaret litteram ottentiquam, originalis dupplicatam partibus antedictis.

Item, quod dictus notarius, consilio suorum amicorum avisatus, percepit quod dictum prothocollum veritatem non continebat, postquam de dicta quictancia in eo nulla mentio facta erat, et ob hoc cognoscens fraudem et dolum dicti rei, ipse notarius inde litteram non confecit nec signavit.

Item, quod per dictum reum non stetit quin dictus notarius inde litteram consignasset, ut efficacem seu utiliorem obligationem dictus reus haberet erga dictum dominum de Thorcio de dicta summa, inde litteram ab ipso notario signari [faciendo], quodque non erat intentio ipsius rei quod dictus dominus de Thorcio de dicta auri summa quictus esset, sic fraudem et dolum dampnabiliter committendo et nittendo dolose decipere notarium antedictum.

Item, quod premissa omnia et singula supradicta sunt vera, publica, notoria et manifesta.

Item, quod ea dictus delatus aliàs pluries confessus fuit competenter esse vera.

Item, quod de et super premissis omnibus et singulis contra ipsum delatum labor[abat] et laborat in parrochiis Sancti Martini de Vado, de Fontiniaco, de Fontanis et locis circumvicinis publica vox et fama, et communis oppinio credulitatis et assercio plurimorum.

Item, quod de et super premissis omnibus et singulis fuit et est dictus delatus, apud bonos et graves, in parrochiis et locis supradictis palam, publice, manifeste et notorie diffamatus.

Item, dicit et probare intendit dictus actor, nomine quo supra, quod dictus clericus delatus jam diu fuit et est creatus notarius et juratus curie venerabilis viri decani Fontiniaci Comitis, judicis inferioris vestri.

Item, quod quando dictus reus fuit creatus notarius et juratus curie dicti decanatus, ipse reus inter cetera corporaliter prestitit juramentum, in manibus illius decani, recipiendi potestatem habentis, quod dictum notarii et jurati officium bene et fideliter exerceret ; item, quod in conficiendo aliquam litteram vel aliquod instrumentum privatum, sub sigillis ipsius decanatus, super contractibus inter partes coram eo contrahentes inhitis et per eum passatis, nil adderet vel mutaret sine auctoritate cujuslibet dictorum contrahencium quod facti substanciam aut materiam immutaret.

Item, quod dudum fuit inter Johannem Theobaldi et Johannem Durablea materia questionis, occasione cujusdam domus, virgulti et suarum pertinentiarum, que quondam fuerunt dicti Johannis de Chassay, sitarum in logiis Fontiniaci Comitis, que dicebat dictus Johannes Theobaldi ad eum pertinere et jus servitutis sibi competere hauriendi aquam in puteo sito in viridario dicti Durablea, contiguo ex uno latere domui, virgultis et pertinentiis supradictis.

Item, quod de et super questione hujusmodi et nonnullis debatis, pro quibus erat mota discordia seu controversia inter ipsas partes, occasione et nomine domus, virgulti et viridarii et pertinentiarum eorumden, super certis proprietatibus, possessionibus, franchisiis et libertatibus à dictis partibus contra alterutram allegatis hinc et inde, de ipsarum partium communi consensu ad invicem contrahencium, in manibus rei predicti notarii et jurati pacifficatum extitit et amicabiliter concordatum.

Item, quod de et super contractu, concordia seu accordo predictis idem reus, super hoc requisitus, litteram passavit sub sigillo supradicto et inde fecit, scripsit, edidit et consignavit propria sua manu in papiro quendam protocollum, in se continentem omnem substanciam et materiam contractus, accordi et concordie predictorum, sub data diei Veneris in vigilia beati Eutropii

La fête de S. Eutrope, premier évêque de Saintes, se célébrait le 30 avril.

anno quo dictum fuit millesimo cccmo octogesimo quarto ultimo revoluti.

Item, quod dictus clericus delatus ex et de dicto prothocollo, prout voluit, duas litteras originales ordinavit, confecit, scripsit scienter et signavit manu sua propria, ut notarius et juratus dicte curie ipsius decani, et sub sigillo predicto fecit et procuravit sigillari, quarum unam dicto Johanni Theobaldi et aliam dicto Durablea, ipsius rei signo manuali signatas et sigillo predicto sigillatas, tradidit, sub data diei, jam predictorum indices et conformes.

Item, quod dictus reus reddendo et restituendo dictis partibus litteras predictas, asseruit in singulis earum clausulis et capitulis veritatem omnimodam contineri.

Item, quod in littera, ut prefertur, dicto Durablea ab ipso reo tradita, et protocollo predictis aliàs coram vobis, domino officiario predicto, judicialiter in causa hujusmodi exhibitionis et sponte recognovit per dictum reum fuisse confectum, ad quos se referens et quorum tenores idem actor petit et vult hic haberi pro insertis et expressis, ex ipsis clare patet et est manifesta contrarietas in materia et substancia dictorum contractuum, magno dampno et prejudicio dicti Durabelli.

Item, quod in dicto protocollo hec clausula inter cetera : « Le dit Thebault sera tenuz de mettre la moitié en chenaux neccessaires pour recoillir les agoz des dictes maisons, et fera beans mur commun, et seront tenuz de les tenir par commun, et les dictes chenaux. »

Item, quod dictus reus scienter et animo deliberato et ex certo proposito, die et anno predicto tunc quibus nunc, presidente in Ecclesia sancta Dei sanctissimo in Christo patre domino Clemente, divina providencia papa septimo

Clément VII, pape d’Avignon, reconnu par une partie de l’Église, fut élu en 1378, après la mort de Grégoire XI, et mourut en 1394.

, et regnante in regno Francie domino nostro domino Karolo, Dei gracia Francorum rege moderno, in diocesi Malleacensi, vicium falcitatis excercendo in dictis triginta (sic) litteris posuit fraudulenter et conscripsit, perperam et inique inter cetera committendo, in hac materia et substancia dicti prothocolli, quod, si eveniret quod opporteret fieri canalia pro recipiendo decursum aquarum labantium, dictus Durablea dicta canalia fieri faceret, prout clausula super hoc confecta, contenta in dicta littera ipsius Durablea, seriosius continetur sub hiis verbis : « Se il avenoit que il convenist faire chenaux pour recevoir l’agouz, le dit Durablea le feroit faire, et le dit Thibaut ou ceulx qui auront sa cause seront tenuz à y contribuer de la moitié de ceu qu’elles auront cousté, sanz aucun contredit, et sera beans le dit mur entre les dictes parties, et seront tenuz de le tenir par commun, et les dictes chenaulx ; » de quibus faciendis dicto Durablea pro textu dicte littere falso imponitur servitus, in ipsius Durablea detrimentum non modicum et gravamen, presertim in dicto protocollo liqueat, evidenter ubi patet falsitas, facilius super hoc deprehendi, sic crimen falsi committendo, et alias juris penas contra tales presumptores latas et dampnum incurrendo.

Item, quod super articulo contento in dicto protocollo qui sic incipit : « Et en cas ou le dit Thebault vouldroit alssier

Sic. Peut-être faudrait-il lire « lessier ».

son dit logis à mur, etc. », post dicta vocabula « le dit Thebault », dictus reus in prejudicium dicti Durablea posuit in dicta littera et adjecit : « ou les siens », de quibus verbis respectivis dicti Theobaldi in dicto protocollo non cavetur.

Item, quod in eodem protocollo sequitur alius articulus, qui talis est : « Item ou verger tenant à la dicte maison, le dit Durablea est tenus de retraire devers le bout de dessous le palen

Plus souvent écrit palanc, barrière de pieux.

, ainsi comme il marque par bonnes genz. » Post que verba idem reus subjunxit in dicta littera hec verba : « par ceu que eulx l’avoient assis trop plus avant sur l’eritage du dit Thibaut, que eulx ne devoient ne ne poveoient », de quibus verbis ultimis dictum protocollum non facit mentionem aliquam.

Item, in articulo in dicto protocollo et littera predictis, qui sic incipit : « Item, au dessus du dit vergier en quoy le dit Durablea a son issue », ad quem articulum se refert dictus actor et hic petit et haberi vult pro inserto et expresso, constat evidens contrarietas et diversitas, per quas in materia contrariantur ad invicem protocollum et littera supradicta.

Item, quod idem reus suo ausu temerario, diabolo suadente, in dampnum et lesionem dicti Durablea, adjecit in dicta littera quod dictus Theobaldus aquam exhaustam in puteo dicti Durablea declarato in dicto protocollo et littera predictis, poterit defferre quod sibi utile videbitur per viridarium et domum dicti Durablea, de qua aqua deferenda seu portanda in dicto protocollo aliqualis mentio non habitur, et ob hoc dictus reus substantiam et materiam dicti contractus mutasse testatur, et in hoc falsitatis vicium commisit.

Item, quod premissa omnia et singula sunt vera, publica, notoria et manifesta.

Item, quod ea omnia et singula premissa confessus fuit dictus reus pluries et competenter esse vera.

Item, quod de et super premissis omnibus et singulis fuit et est dictus reus apud bonos et graves palam, publice, notorie et manifeste, in villa Fontiniaci Comitis et locis circumvicinis, diffamatus.

Item, quod contra dictum reum de et super premissis omnibus et singulis, dictum crimen falsi tangentibus, laboraverunt et laborant communis oppinio et assercio et credulitas plurimorum, ac publica vox et fama, quare cum talia crimina, maleficia, excessus et delicta non debeant sub dissimulationis negletu conniventibus oculis impunita remanere, petit dictus procurator et promotor, actor nomine quo supra, per vos dominum officialem, commissarium prefatum, vestrum officium in his in quibus potest et debet, humiliter implorando et promovendo quod predictis criminibus, maleficiis, excessibus et delictis, singula singulis referendo, ab ipso clerico delato, ut prefertur, perpetratis et commissis, eundem clericum delatum pronunciari, decrevi et declarari homicidam, furem, latronem, falsarium, et excommunicationis sentencias auctoritate sacri canonis incurisse, homicidium, furtum, latrocinium et crimen falsi commisisse et exercuisse vicium falsitatis, et sic declaratum tanquam homicidam, furem, latronem, parjurium et infamem in dictis carceribus detrusum fore et detrudi, ac condempnandum fore et condempnari ad perpetuam ibidem penitanciam peragendam cum pane doloris et aqua tristicie, ut commissa deleat et ceteris transeat in exemplum, prout factorum qualitates exigunt et requirunt, secundum canonicas xanctiones, remediis opportunis, causis et rationibus quibus supra, maxime cum premissa omnia et singula sunt vera, publica, notoria et manifesta, eaque dictus delatus clericus aliàs confessus fuit pluries et competenter esse vera.

Protestans dictus procurator et promotor, actor nomine quo supra, de addendo, corrigendo, diminuendo, specificando latius et clarius declarando, et alios graviores articulos, si opus fuerit, dando, loco et tempore opportunis, prout sibi et suo consilio videbitur expedire, et quod non astringit se ad omnia et singula premissa probanda, sed solum ad ea que sibi sufficient de premissis, et quathenus probaverit, eathenus obtinere desiderat in petitis.

Quibus articulis hodie in scriptis datis, est assignata ipsis partibus coram vobis die Jovis post festum beati Andree

S. André, le 30 novembre.

apostoli, ad respondendum peremptorie et personaliter, deliberate et consulte, ex parte dicti rei, hujusmodi articulis et ad procedendum ulterius in dicta causa inter ipsas partes, prout fuerit racionis. Datum die xxim mensis augusti anno Domini millesimo ccc° octogesimo octavo.

Quibus articulis sic datis respondit dictus Johannes Allonnea, delatus, cum protestatione quod predicti articuli omnes et singuli non procedant quovismodo, peccantes in materia et in forma, et de ipsis articulis et eorum quolibet impunando, tociens quociens fuerit opportunum, et de opponando et proponendo quocienscunque contra, et de opponendo et proponendo factum contrarium, parte adversa in contrarium protestante, litem contestando narratam in dictis articulis et eorum quolibet, prout narrantur et articulantur, vera non esse, et petita sive articulata contra ipsum delatum fieri non debere, ac excipiendo sive repplicando ; dictus Johannes delatus dixit et proposuit, per modum facti contrarii, ad sui defencionem, ad justificationes et innocencias in causa inquisitionis predicte, quod ipse Johannes Allonnelli, clericus, de contentis omnibus et singulis in predictis articulis est inculpabilis et innocens, et talis persona et homo bone fame, bone vite et conversationis honeste, nulloque crimine irretitus, et pro tali habitus et reputatus apud bonos et graves, et pro tali se gessit et habetur in omnibus locis in quibus dictus Johannes conversatus est. Que negavit dictus procurator dicti domini episcopi. Et sic super premissis, ut decuit, lite legitime contestata juratoque de calumnia et de veritate dicenda super factis hinc inde propositis, in causa predicta, à partibus predictis, coram nobis productis pluribus testibus hinc et inde, videlicet à parte dicti procuratoris super articulis pro parte ipsius datis, et eciam pro parte ipsius delati, ad probandum bonam famam suam et alia per ipsum proposita ad ipsius innocenciam ostendendam, receptis, juratis, dictis partibus presentibus et diligenter examinatis, et eorum deposicionibus in scriptis redactis, et postmodum attestacionibus dictorum testium, de consensu partium predictarum, publicatis et pro publicis habitis, et decreto per nos fieri copiam de eisdem partibus supradictis hinc et inde, conclusoque et renunciato hinc et inde, in causa predicta, à partibus antedictis pluribusque aliis processibus in dicta causa factis ; tandem inter ceteras dierum assignaciones, ipsis partibus diem Veneris post festum apostolorum Simonis et Jude

Les SS. Simon et Jude se fêtaient, chez les Latins, le 28 octobre.

et ante festum Omnium Sanctorum duximus assignandum, ad faciendum jus et diffiniendum per nos in dicta causa, si posset in ea commode diffiniri.

Quo die Veneris adveniente, nobis ad jura reddenda loco solito, videlicet in officialatu et audiencia nostra publica Malleaci, sedentibus pro tribunali, de causa hujusmodi et aliis ordinariis generaliter cognoscendo, constitutis et comparentibus personaliter in jure, coram nobis domino Petro Rocherii, presbytero, procuratore substituto causarum officii curie predicte domini episcopi, pro dicto venerabili viro Aymerico Radini, clerico, procuratore supradicto, litteratorie destinato, ex parte una, et dicto Johanne Allonnelli clerico, delato, ex altera, petentibus per nos diffiniri et jus fieri in causa superius declarata.

Nos vero Officialis Malleacensis, commissarius predictus, visis et diligenter inspectis processibus et meritis dicte cause, habitaque diligenti et matura deliberatione cum peritis, nichil de contingentibus obmittentes, quia tamen, juxta aliquorum vulgi opinionem, videtur dictus Johannes super premissis aliqualiter diffamatus, ut invenimus, nos sibi super objectis criminibus hujusmodi purgacionem canonicam cum duodecima manu sui ordinis, sive majoris, duximus indicendam, quam quidem purgacionem eadem die obtulit et prestitit forma juris, et ad ipsam complendam dominum Petrum de Fordesio, Johannem Riguelli, rectores ecclesiarum parrochialium de Campeniaco in Maresiis et de Fontanis, Johannem Penardi, presbyteros, Michaelem Massé, Johannem Pageraudi

Cette famille était alliée, vers cette époque, à la famille Alonneau par le mariage de Pierre Pageraut avec Jeanne Alonneau. Celui-ci possédait à cause de sa femme le fief de la Pointe, sis entre la Forêt-Nesdeau, le village de Bourgneuf, le village de Chaix, etc., mouvant de Fontenay-le-Comte, et il en rendit aveu au duc de Berry le 4 janvier 1404. (Copie du Grand-Gauthier, Arch. nat., R1* 2172, p. 1114-1130.)

, Johannem Brissoni, Guillelmi Rodeti, Nicolaum Poilivelli, Johannem Beraudi

Cf. un arrentement perpétuel fait, en 1392, par les chanoines de Notre-Dame de Poitiers, d’un hébergement ou fondis sis au village de Vérines, qui fut à Jean Béraut, valet. (Archives de la Vienne, G. 1175.)

, Guillelmum Girardi, Guillelmun Barberii et Johannem Giboin, clericos suos, compurgatores in premissis produxit ibidem coram nobis, quos quidem sic productos recepimus et jurari fecimus forma juris. Et hiis actis, ad ferendum et reddendum nostram diffinitivam sentenciam processimus in hunc modum :

In Dei nomine, amen. Cum Johannes Allonnelli clericus, delatus, fuerit ob suspicionem nonnullorum criminum, videlicet mortis domini Roberti de Grandonne, bonorum suorum detrucionem seu sustractionem, dudum Pictavie regis Anglie receptoris, necnon ob suspicionem criminis falsi in litteris contractus, inter Johannem Theobaldi et Johannem Durabelli inhiti et per ipsum passati, commissi, ac eciam in quadam littera quictancie tangentis dominum de Thorcio, manu sua scripta, et per Guillelmum Ferron passata, racione quorum criminum fuit hodie dicto clerico cum duodecima manu indicta per nos purgacio, quam secundum formam juris prestitit et debite implevit. Ideo nomine Domini invocato, inspecta diligenter inquisitione super hoc habita, consideratis considerandis, habitoque consilio cum peritis in hiis scriptis, per nostram diffinitivam sentenciam à predictis casibus sive criminibus ipsum delatum absolvimus et pro absoluto habemus, et procuratori domini mei Malleacensis episcopi silencium perpetuum imponimus per presentes. In quorum omnium et singulorum fidem, has presentes seu presens publicum instrumentum hujusmodi, nostram diffinitivam sentenciam continentes, per notarium publicum infrascriptum scribi, publicari, in hanc publicam formam redegi, sigillique curie nostre fecimus et mandavimus appensione muniri. Datum et actum anno Incarnationis dominice millesimo ccc. octogesimo nono, indicione decima tercia, dicta die Veneris post festum apostolorum Symonis et Jude, antepenultima mensis octobris, loco solito, videlicet in domo audiencie nostre Malleaci, nobis ibidem ad jura reddenda pro tribunali sedentibus, de causa hujusmodi et aliis causis ordinariis dicte curie nostre generaliter cognoscendo, hora prime vel circa, pontificatus sanctissimi in Christo patris et domini nostri domini Clementis divina providentia pape septimi anno undecimo, presentibus venerabilibus et discretis viris magistris Johanne Artaudi, in legibus licenciato, Guillelmo Barbelli, notario apostolico publico, fratribus Petro Racodeti

Dans une sentence de l’officialité de Luçon, confirmée en 1390, qui sera publiée dans le prochain volume, sont mentionnés trois autres personnages du nom de Racodet, François, Guillaume et Denise. Ils appartenaient tous à la famille du Bas-Poitou, dont MM. Beauchet-Filleau ont donné la généalogie depuis le commencement du xive siècle (Dictionnaire des familles de l’ancien Poitou, t. II, p. 578). François Racodet, valet, demeurant au château de Nalliers près Sainte-Hermine, est le premier nommé sur cette généalogie. Celui qui obtint l’absolution de l’official de Luçon s’appelait de même François Racodet ; il était accusé d’un meurtre commis précisément à Nalliers. Cf. aussi un aveu du fief de la Cour de Thiré, rendu au chapitre de Poitiers par Pierre Racodet, écuyer, en 1403 (Arch. de la Vienne, G. 279), personnage qui a échappé aux recherches de MM. Beauchet-Filleau, ainsi que les quatre cités dans nos textes.

, armario ecclesie Malleacensis et procuratore capituli ejusdem ecclesie, Petro Pontoys, priore prioratus Sancte Cristine, Petro Bienavant, presbytero, rectore ecclesie Sancti Petri Veteris, Johanne Basini, scutifero, Bitturicensis, Malleacensis et Lucionensis diocesum, testibus ad premissa vocatis specialiter et rogatis.

Quas siquidem litteras, ac omnia et singula in eis contenta, ratas et gratas habentes, eos et ea volumus, laudamus, approbamus et de gracia speciali auctoritateque nostra regia, in quantum rite et juste acta fuerunt et in rem transierunt judicatam, tenore presentium confirmamus. Dantes harum serie in mandatis universis justiciariis nostris, presentibus et futuris, vel eorum loca tenentibus, et cuilibet ipsorum, prout ad eum pertinuerit, quatinus dictum Johannem Allonnelli, in preinsertis litteris nominatum, nostra presenti gratia et confirmacione uti pacifice faciant et gaudere, ipsum in contrarium nullatenus molestando, nec à quoquam molestari permittendo, nunc vel in futurum. Quod ut firmum et stabile perpetuo perseveret, nostrum presentibus litteris fecimus apponi sigillum. Jure nostro et alieno in omnibus semper salvo. Datum Parisius, mense marcii anno Domini millesimo cccmo octogesimo nono, regni vero nostri decimo.

Per regem, ad relacionem consilii. G. Guingant.