Recueil des documents concernant le Poitou contenus dans les registres de la Chancellerie de France École nationale des chartes Mathilde Henriquet 2013 — encodage 2013 http://elec.enc.sorbonne.fr/actesroyauxdupoitou/ École nationale des chartes
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Éditions en ligne de l'École des chartes http://elec.enc.sorbonne.fr Paul Guérin (éd.) Paul Guérin, Recueil des documents concernant le Poitou contenus dans les registres de la Chancellerie de France, t. VIII : 1431-1447, Paris, 1898 (Archives historiques du Poitou, 29).

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Recueil des documents concernant le Poitou contenus dans les registres de la Chancellerie de France publiés par Paul Guérin, archiviste aux archives nationales, VIII, (1431-1447) Actes royaux du Poitou, t. 8 (1431-1447) MXXV 28 mars 1431

Ordonnance pour la répression des pillages, oppressions et excès des gens de guerre dans le Poitou et les provinces voisines.

X2a 20, fol. 31 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 1-7

Charles, par la grace de Dieu roy de France. A noz amés et feaulx conseilliers les gens tenans et qui tiendront ou temps avenir nostre Parlement, aux seneschaulx de Poictou et de Xantonge, au gouverneur de la Rochelle, au seneschal de Lymosin, au bailly de Touraine et de Bourges, et à touz noz autres baillifs, seneschaulx, prevostz, justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans, salut et dilection. Oyes par nous les clameurs et griefves complaintes des gens des trois estaz, gens d’eglise, nobles, bourgois, marchans et autres gens de l’estat commun desdictes seneschaucies, bailliages et païs à nous obeissans

Une assemblée d’États, sur laquelle on ne possède que fort peu de renseignements, se tenait en ce moment même à Poitiers. On sait seulement qu’elle était composée des députés de la plupart des pays de Languedoïl, de l’obéissance du roi de France, que ceux-ci siégèrent jusques aux premiers jours d’avril et qu’ils accordèrent à Charles VII une aide de 200.000 livres tournois. Dans un mandement adressé, le 1er juin 1431, par Regnier de Boulligny, conseiller général au gouvernement des finances, à Guillaume Charrier, receveur général, il est question de « l’aide octroyée au roy par les gens des trois Estaz du païs de Languedoïl à l’assemblée par eulx faicte à Poictiers, ou mois de mars dernier passé ». (Original, Arch. nat., J. 891, n° 25.) On peut citer encore une quittance de gages, datée du 27 novembre 1431, de Bertrand de Saint-Avit, Guillaume Piedieu et Jean Barton, commissaires chargés d’imposer sur le pays de la Marche la somme de 7000 livres, pour sa part de « l’aide de iic mil frans au roy octroyé et par lui mis sus de l’aviz et consentement des gens des trois Estaz de son païs de Languedoc (sic), mandez et assemblez en la ville de Poictiers, au mois de mars dernier passé ». (Original, id., KK. 648, n° 127.) Enfin, dans des lettres patentes données par le roi à Chinon, le 26 décembre de la même année, et publiées par M. Ant. Thomas, on remarque ce passage : « Comme au mois d’avril dernier passé, la plus grande partie des gens des trois Estatz de noz pays de Languedoïl nous eussent octroyée et accordée la somme de deux cens mil livres tournois, pour aider et secourir à nos affaires,… » (Les États provinciaux dans la France centrale sous Charles VII, 2 vol. in-8°, 1879, t. II, p. 48.)

C’est évidemment en conséquence des plaintes et réclamations des députés présents en la ville de Poitiers que fut rendue cette importante ordonnance pour la répression des excès des gens de guerre. Elle est restée jusqu’ici inédite, et même elle a échappé aux recherches du récent historien de Charles VII, qui n’aurait pu manquer de la citer dans les pages intéressantes qu’il consacre aux désordres de la gendarmerie et aux vains efforts du gouvernement royal pour y remédier, de 1422 à 1435. (M. de Beaucourt, t. II, Le roi de Bourges, p. 645 et suiv.) Notre texte trace un tableau fidèle des oppressions dont souffraient les provinces que l’on aurait pu considérer comme privilégiées, puisqu’elles n’étaient pas occupées par l’étranger. Tel est son principal intérêt. On ne devait guère, en tant qu’ordonnance, espérer qu’elle serait efficace. Des dispositions répressives de cette nature ne pouvaient s’appliquer qu’après le rétablissement de la paix. Tous les hommes de guerre sans exception avaient les mêmes mœurs déplorables ; partout il eût fallu sévir. Le roi avait alors trop besoin de leurs services pour pouvoir les traiter avec la rigueur qu’ils méritaient.

, disans que, à l’occasion de ce que pluseurs cappitaines et gardes de forteresses et autres ont puis aucun temps tenu et encores tiennent en pluseurs villes et places, et en diverses parties de nostre royaume, hors et loing de la frontiere de noz adversaires et ennemis, compaignies de gens qui se dient gens d’armes et de trait, lesquelx se tiennent sur les chemins, espient, destroussent et desrobent marchans et toutes autres gens passans par les chemins publiques, prennent et emprisonnent les laboureurs, leurs chevaulx et charues, et empeschent les marchandises et labourages, batent et tuent les gens, violent, prennent et ravissent femmes et filles et font pluseurs autres grans maulx, excès et inhumanitez, par quoy homme ne ose passer, quelque part qu’il voise, sans doubte et peril de son corps et de perdre ses biens, et en sont les gens d’eglise et leurs benefices desollez et destruiz, leurs maisons demolies et abatues, et à grant peine peust [on] trouver gens qui vueillent ne puissent faire leurs labouraiges ; les nobles aussi semblablement en sont oprimez et dommaigés en leurs corps et en leurs biens, leurs subgiez prins, rançonnez et destruiz, et n’osent laisser leurs maisons, femmes et enfans, pour eulx emploier en nostre service contre le…

Quelques mots ont évidemment été omis par le scribe, en cet endroit.

, noz adversaires et ennemis, pour doubte que en leur absence leurs maisons feussent pillées et robées, ou peut estre leurs femmes et filles violées et ravies, comme souvent est advenu ; et en especial les marchans qui ont acoustumé frequenter foires et marchez n’osent aler par païs, pour faire et conduire le fait de leurs marchandises, ne les laboureurs n’osent et ne pevent tenir bestes à faire leurs labourages, ne eulx tenir au plat païs, pour doubte du peril de leurs corps et de perdre le demourant de leurs chevances. A l’occasion desquelles choses pluseurs et en grant nombre de noz subgietz, et singulierement marchans et laboureurs, ont delaissé et delaissent de jour en jour leurs marchandises et labouraiges et propres habitacions, et vont pluseurs d’iceulx marchans et laboureurs demourer hors de nostre obeissance, lesquelles choses sont importables à nos diz subgietz et en grant prejudice et dommaige de nous et de la chose publique de nostre royaume. Requerans les diz trois Estaz que sur ce vueillons pourveoir et remedier ainsi que au cas appartient, pour la confermacion de nostre seigneurie et de la pais et transquillité d’eulx et de noz autres bons et loyaulx subgiez.

Savoir vous faisons que nous, ayans en très grant desplaisance les dictes pilleries, robberies et autres maulx dessusdiz, voulans à nostre povoir preserver et garder noz subgiez des diz griefs, oppressions et autres molestacions, faire cesser toutes pilleries et robberies, et justice regner en nos diz royaume et seigneurie, et obvier aux inconveniens que nous savons qui pourroient plus advenir en nostre dit royaume, par faulte de bonne justice, et mettre la chose en telle disposicion que les gens d’eglise puissent faire le divin service et office, les nobles eulx emploier en nostre service contre noz ennemis et adversaires, les marchans faire et conduire leurs marchandisez et les laboureurs leurs labouraiges, et que touz noz subgiez puissent aler par païs seurement et vivre en paix et transquilleté soubz nostre garde et protection, de nostre certaine science, plaine puissance et auctorité royal, par l’advis et deliberacion de pluseurs des seigneurs de nostre sang et lignage et autres gens de nostre grant conseil, avons decerné, statué et ordonné, et par la teneur de ces presentes descernons, statuons et ordonnons que quelzconques noz vassaulx, capitaines de gens d’armes et de trait ne autres noz subgiez, de quelque estat ou prerogative qu’ilz soient en nostre royaume, sur peine de forfaire et confisquer envers nous leurs corps et touz leurs fiefz et autres biens, et de encourir nostre indignacion perpetuelle, ne tiengnent d’ores en avant quelxconques garnisons de gens d’armes et de trait en aucunes villes ou forteresses de nostre dit royaume et seigneurie, si non ès frontieres qui par nous ou par les chiefs de guerre de par nous seront establies et ordonnées contre noz ennemis et adversaires, et ne tiengnent ou receptent quelxconques larrons, pillars, robeurs ou espieurs de chemins, et ne facent ou souffrent par les gens de leurs garnisons, ne autres, que les gens d’eglise, nobles, noz officiers ou serviteurs, marchans, laboureurs ne autres noz subgiez soient aucunement opprimez, pillez, robbez, destroussez, batuz, pris, rançonnez ne autrement empeschez ou endommaigés, en corps, en biens ne en leurs maisons, marchandises ou labourages, en passant le chemin ne autrement. Et avec ce voulons, statuons et ordonnons que, se aucuns de nos diz feaulx vassaulx ou subgiez tiennent ou receptent en leurs hostelz aucuns larrons ou pilleurs qui aient pillé, destroussé ou desrobé aucunes gens d’esglise, nobles, noz officiers ou serviteurs, marchans, laboureurs ou autres noz subgiez ou bienvueillans, ilz seront puniz des meffais d’iceulx larrons ou pillars, comme les principaulx aucteurs et faiseurs d’iceulx crimes et malefices. Et dès maintenant pour lors en icelui cas declairons leurs fiefz et tenemens estre forfaiz et acquis à nous. Oultre, voulons et ordonnons que, se aucuns de noz feaulx vassaulx ou subgiez treuvent aucuns pillars ou espieurs de chemins, ilz les prennent et menent à justice pour en faire pugnicion, comme il appartendra. Et touz iceulx pillars, larrons et espieurs de chemins generalment avons abandonnez et abandonnons à touz nos diz feaulx vassaulx et subgiez, pour les prandre et amener à justice, ainsi que dit est, et leur avons donné et donnons les biens d’iceulx larrons et pillars dont ilz seront trouvez saisiz. Et se, en ce faisant, iceulx larrons, pillars ou espieurs de chemins se rebelloient ou vouloient resister, et ilz estoient tuez ou occis, nous voulons ceulx qui ainsi les tueroient, en estre quictes, et dès maintenant en ce cas le leur pardonnons et remettons par ces presentes. Si vous mandons et estroictement enjoignons, et à chascun de vous, en commettant [où il] appartendra, que nostre dicte ordonnance vous faictes tenir et garder sans enfraindre, et touz les transgresseurs de la dicte ordonnance, et en especial touz larrons, pillars et espieurs de chemins, et touz ceulx qui les recepteroient ou leur donroient aide, conseil et confort vous prenez ou faictes prendre aux corps et touz leurs biens, meubles et inmeubles, mettez ou faictes mettre soubz nostre main en seure et sauve garde, et les punissez comme crimineux et coulpables de crime de leze magesté, comme transgresseurs de noz commandemens et defenses, infracteurs de paix et ennemis de nature, souverenement et de plain, tellement et si rigoreusement que de bonne justice vous en soiez recommandez et que ce soit exemple à touz autres et crainte aux bons de mal faire. Et se il avenoit que aucuns des diz larrons, pillars et robeurs ou de ceulx qui les recepteroient, feussent rebelles ou desobeissans, et se tenissent en aucunes places ou forteresses, nous voulons et vous mandons que par main armée, assemblée de nobles, gens de bonnes villes et de peuple, par force, assault, siege ou autrement, vous faictes obeir à nous les diz rebelles et desobeissans, en faisant, se mestier est, abatre leurs maisons, et en telle maniere que la force en demeure à nous et à justice. De ce faire vous donnons plain povoir, auctorité et mandement especial. Mandons aussi et commandons à touz noz feaulx vassaulx et subgiez, de quelque auctorité qu’ilz soient, qui sur ce seront requis, sur tant qu’ilz doubtent desobeir à nous et à noz commandemens, que à vous et chascun de vous et à voz commis et deputez, en ce faisant, obeissent et entendent diligemment, et vous donnent aide, conseil et confort, se mestier en avez. Car ainsi nous plaist il et voulons estre fait, nonobstans quelxconques lettres, ordonnances ou mandemens à ce contraires. Et voulons que aux vidimus de ces presentes lettres faiz soubz seaulx auctentiques plaine foy soit adjoustée, comme à ce present original. Donné à Poictiers, le xxviiie jour de mars l’an de grace mil cccc. et trente, et de nostre regne le neufviesme.

Par le roy en son conseil. Mailliere.

Le trois jour du mois d’avril l’an mil quatre cens trente et ung, furent criées et publiées le contenu ou blanc de ces presentes ès lieux acoustumez à faire cris en la ville de Poictiers, à heure de marchié, par cry public et à son de trompe, par le commandement de Phelippot de la Roche

Un Philippe de la Roche, dit Roguet, homme d’armes, était poursuivi au Parlement, de 1419 à 1422, par Isabelle Belon, veuve de Pierre de Juilly, de Poitiers. Au mois de février 1401, ayant été pris par les ennemis, il avait été obligé, pour pouvoir payer sa rançon, de vendre audit de Juilly une rente annuelle de 35 livres, assise sur le manoir de Beauregard. Après la mort de celui-ci arrivée l’an 1415, il refusa de continuer le payement de sa redevance. La veuve qui, aux termes de la coutume, avait droit à la moitié des acquêts de la communauté, réclama sa part des arrérages et fit reconnaître son bon droit par arrêts du 14 août 1419 et du 7 mars 1422 n.s. (Arch. nat., X1a 9190, fol. 60 v°, 175.)

, sergent du roy nostre sire, presens à ce Jehan Fouasset, Pierre Guerin

Pierre Guérin, sergent du roi en Poitou, demeurant à Poitiers, était le 22 mai 1425 prisonnier à la conciergerie du Palais de cette ville, par ordonnance de la cour, « pour occasion de la prinse de certain cheval appartenant à Me Nicole de Grandrue. » Ce jour il obtint son élargissement pour une quinzaine, à la caution de Nicolas Guérin, son parent, qui promit, sous peine de 100 livres d’amende, de le ramener prisonnier au jour fixé. Cette affaire n’eut point d’ailleurs de suite fâcheuse. Le 17 août suivant, le sergent fut délivré de toute poursuite, du consentement de Grandrue. (X2a 21, fol. 33 et 37 v°.) Pierre Guérin (peut-être un personnage différent) rendait hommage, vers 1430, au sire de Parthenay, à cause d’une borderie de terre, mouvant de la Chapelle-Bertrand. (Arch. nat., R1* 190, fol. 9 v°.)

, Pierre Guilles, Herbert Duguet, Jehan Chevredens

Jean Chevredent exerçait la charge de procureur au Parlement de Poitiers et en cette qualité il occupait, le 15 mai 1436, pour l’abbaye de Nieul-sur-l’Autize, dans un procès criminel contre Thomas Voyer, chevalier. (Arch. nat., X2a 21, à la date.) Il devint procureur du roi en la sénéchaussée de Poitou, fonctions dont il était investi dès avant le 19 mars 1444 n.s. (Dom Fonteneau, t. XXVII, p. 741.) Le nom de Jean Chevredent figure encore, accompagné de la même qualité, dans deux actes, l’un du 1er octobre 1456, l’autre du 18 juin 1467. Il fut aussi maire de la ville de Poitiers durant l’année 1453-1454. (Arch. de la ville de Poitiers, K. 7, J. 1210, M. 42, reg. 11. — Cf. le Dictionnaire des familles du Poitou, 2e édit., t. II, p. 452.)

, Guillaume Rogier

Dans les pièces de comptes de la ville de Poitiers on trouve la mention d’un payement fait, le 21 avril 1449, de six écus à Guillaume Rogier, pour avoir fait l’inventaire des lettres perpétuelles de ladite ville. (Arch. de la ville de Poitiers, J. 1000.)

et pluseurs autres. — J. Germailin, à la requeste dudit Phellipot.

Lecta et publicata Pictavis in Parlamento, nona die aprilis post Pasca anno Domini millesimo quadringentesimo tricesimo primo. D’Asnieres.

MXXVI 9 avril 1431

Lettres d’abolition de tous excès de guerre commis par le passé, octroyées, moyennant certains engagements solennellement jurés, à Jean de la Roche, seigneur de Barbezieux, et à tous les gens d’armes de sa compagnie, nominalement désignés.

X2a 20, fol. 32 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 8-20

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, que, comme pour les grans clameurs qui nous ont esté faictes par les gens des troys estas de nostre royaume et seigneurie à l’encontre d’aucuns particuliers et tenans en leurs compaignies plusieurs gens d’armes et de trait, et autres, faisans grant quantité de roberies et pilleries, lesquelx ont endommaigé et endommaigent continuelment et incessanment noz subgiez, tant marchans et laboureurs que autres de noz païs de Poictou, Xanctonge et Limosin, et autres païs voisins, nous, afin de obvier et pourveoir à ce et faire cesser les dictes pilleries et roberies, ayons mandé et fait venir par devers nous plusieurs barons, seigneurs et autres noz feaulx vassaulx et subgiez, en nostre ville de Poictiers, et par grant et meure deliberacion, ayons fait certains statuz et ordonnances pour faire cesser les dictes pilleries et roberies

Ordonnance datée du 28 mars 1431, publiée ci-dessus.

, et aussi pour faire cesser plusieurs faulses monnoyes de nouvel mises sus en nostre royaume, sanz nostre congié et licence

Cette seconde ordonnance porte la même date que la précédente et ordonne la suppression immédiate de plusieurs ateliers monétaires créés contrairement aux droits du roi et exploités par des seigneurs, à leur profit particulier, entre autres ceux de Parthenay, d’Angoulême, établi précisément par le sr de Barbezieux, comme on le verra plus loin, de Montignac, de Bourg-Charente et de Fouras. Elle est imprimée dans le recueil des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XIII, p. 164, d’après une copie défectueuse. Il en existe un meilleur texte dans la layette du Trésor des chartes, J. 459, n° 363.

. Après la publicacion desquelles ordonnances nostre amé et feal Jehan de la Roche

Ce personnage qui devint quelques mois plus tard sénéchal de Poitou et joua un rôle important, quoique le plus souvent néfaste, figure fréquemment dans les textes et les chroniques de l’époque sous le simple nom de Jean de la Roche, nom porté par plusieurs autres contemporains. Aussi pendant longtemps sa naissance et son véritable état civil ont été méconnus. Les historiens le tenaient pour un vulgaire aventurier, venu l’on ne savait d’où et n’ayant d’autre notoriété que celle d’un capitaine de routiers, comme il s’en produisit tant dans la première moitié du xve siècle. Chef de routiers, il l’était incontestablement. Mais ce qui lui donne un tout autre relief, c’est qu’il appartenait à l’illustre maison de la Rochefoucauld, comme la qualification de seigneur de Barbezieux qui lui est attribuée ici en est la preuve indubitable. Nous l’avons du reste identifié déjà dans notre précédent volume (Introduction, p. xxix.) Depuis lors, M.G. Clément-Simon a publié dans la Revue des Questions historiques une intéressante notice biographique sur Jean de la Roche, auquel il a restitué aussi ses véritables nom, qualités et fonctions, ainsi qu’une partie des faits et gestes qui ont marqué dans sa carrière militaire. (Un capitaine de routiers sous Charles VII, Jean de la Roche, loc. cit., année 1895, livraison de juillet, nouv. série, t. XIV, p. 41-65.) Cette étude, documentée particulièrement au point de vue de l’histoire du Limousin, produit bon nombre de pièces inédites et jette une nouvelle et vive lumière sur cette personnalité originale. Toutefois les lettres d’abolition du 9 avril 1431, si curieuses, les provisions de l’office de sénéchal de Poitou, imprimées quelques pages plus loin, et la plupart des autres documents publiés dans le présent volume, ont échappé aux recherches de M. Clément-Simon et serviront à compléter son utile travail. D’autre part, nous avons recueilli de nouveaux actes importants relatifs à ce personnage et à son rôle en Poitou. Nous en tirerons parti dans l’introduction du présent volume, plutôt que de donner à cette note une étendue démesurée. Jean de la Roche était le second fils de Guy de la Rochefoucauld, seigneur de Barbezieux et de Verteuil, et de sa première femme, Rosine de Montaut, fille de Raymond de Montaut, sire de Mussidan, chevalier au service de l’Angleterre en Guyenne (voy. notre t. IV, p. 150, note). La mort de son père et de son frère aîné, Mondon, décédés vers l’an 1432, le rendit chef de cette branche. Il épousa Jeanne Sanglier, fille de Jean Sanglier, sr de Bizay, personnage sur lequel nous avons fourni des renseignements dans notre précédent volume, p. 5, note. Jean de la Roche avait déjà obtenu l’année précédente, à l’intercession du sire de Barbazan, des lettres de rémission que le Parlement siégeant à Poitiers s’était résigné à entériner le 28 juin 1430, mais dont le texte n’est point connu. (Arch. nat., X2a 21, fol. 136.)

, escuier, seigneur de Barbesieux et de Mussidan, a juré tenir et garder icelles ordonnances ; et en oultre a juré et promis que doresenavant il ne tendra, soustendra ne favorizera, par soy ne par autres, pilleries ne roberies, ne aucunes gens faisans dommaiges, maulx ne inconveniens quelxconques ès diz païs de Poictou, Xanctonge, Limosin et Angolmoys, ne en autres païs à nous obeissans, et ne tendra gens pour ce faire ; et s’aucuns de ses gens, le bastard de Saint Cyre

Le bâtard de Saint-Cyre, appelé aussi Bricet de Saint-Cyre, lieutenant de la compagnie du sr de Barbezieux, et plus tard de celle de Guy de la Rochefoucauld, sr de Verteuil et sénéchal d’Angoulême, son frère cadet, sera l’objet d’une notice dans un autre endroit de ce volume.

, ou autres, tant qu’ils seront de sa compaignie, faisoient le contraire, il en respondra et fera reparer, et baillera ses dictes gens ès mains des officiers de la justice des lieux où ses dictes gens auront fait les diz malefices ; et s’ilz estoient despartiz de sa dicte compaignie, il fera son loyal povoir de faire reparer les diz cas qui auront esté ou seront par eulx commis, et de les bailler à justice ; et obeira aux gens de nostre dicte justice, tant de nostre court de Parlement comme à noz seneschaulx et autres officiers, et leur fera faire ouverture de ses places pour avoir les malfaicteurs, quand il en sera par eulx requis. Et fera et aura fait vuider toutes ses gens, dedens quinze jours prouchainement venans, de toutes les forteresses, esglises et maisons fortes que lui ou ses dictes gens tiennent et occupent ès diz païs, et icelles mettra et fera mettre reaument et de fait en nostre main, excepté celles qui sont l’eritage de son pere et de lui, c’est assavoir Barbesieux, le Vivier Jussault et aussi les places de Montendre, la Tour Blanche, Mussidan, Puy Normant et Engolesme

Angoulême ne peut à aucun titre être compris dans l’héritage de Jean de la Rochefoucauld ni de son père ; si le nom de cette ville est joint ici aux seigneuries appartenant au sr de Barbezieux, c’est qu’il en était capitaine pour le comte d’Angoulême, comme on le voit dans plusieurs actes contemporains de ces lettres. L’absence continuelle de Jean d’Orléans, comte d’Angoulême, retenu prisonnier en Angleterre pendant plus de trente ans, eut pour résultat d’accroître l’autorité de Jean de la Roche à Angoulême, au point qu’il ne tarda pas à s’y considérer comme le maître absolument indépendant et à agir en conséquence. On rappelle un peu plus loin qu’il y avait créé un atelier monétaire, où il faisait forger de la monnaie royale, et qu’il l’exploitait à son profit.

. Et en oultre il ne donnera ne souffrera donner par aucuns de ses gens quelxconques sauf conduiz, souffrances ne aucunes seurtez à nulz de noz subgiez, ne prendra ne souffrera prendre par les dictes gens, le bastart de Saint Cyre ne autres de ses dictes gens, vivres, apatiz ne rençonnemens sur nosdiz subgiez ; et delivrera quictes et sans rançon ou finance tous les prisonniers qui sont èsdictes places, et ne prandront ou emporteront, lui ne ses dictes gens, aucuns des biens des bonnes gens qui sont demourans ou retraiz en icelles. Et avec ce, a promis et juré que ès places de son dit pere ne de lui, qui sont deça la riviere de Charante, il ne tendra aucunes garnisons de gens [de guerre], mais seulement y tendra gens pour la garde d’icelles et les fera garder aux despens de la revenue d’icelles, et ne prendront riens ceulx qui y seront sur noz hommes et subgiez, à nous obeissans, ne sur leurs terres ; et ne leur mettra charges ne redevances, sans le congié et licence de nous. Et avec ce, fera presentement vuider toutes les gens qu’il tient ès places dessus nommées, lesquelles ne sont point exceptées ne reservées, et toutes gens qu’il tient sur les champs et de son adveu èsdiz païs, et les fera logier ès dictes places de Barbesieux, Montendre, la Tour Blanche et Puynormant, sans retorner pour prendre vivre ne faire autres maux ne exactions sur nos diz subgiez et obeissans, où qu’ilz soient. Et en oultre, nous a promis et juré le dit Jehan de la Roche que, toutes et quantes foiz que nous passerons oultre la riviere de Saine, il passera et vendra avec nous avec le nombre de gens d’armes et de traict qu’il pourra finer, ses dictes places gardées ; ausquelx nous ferons faire paiement, comme aux autres qui passeront avecques nous. Et en oultre, nous a juré et promis le dit de la Roche que, en lui baillant Hervy le Chastel ou autre place de la riviere de Saine convenable pour le logeiz de luy et de ses gens, avecques la somme de mille frans, incontinent qu’il sera de ce acertenné, il partira avecques tout le plus grant nombre de gens qu’il pourra en sa compaignie, et les menera oultre la dicte riviere de Saine. Toutes

Le registre porte par erreur « contre ».

lesquelles choses le dit Jehan de la Roche nous a promises et jurées sollennement, en presence de pluseurs de nostre sang et gens de nostre grant conseil et de nostre court de Parlement, de pluseurs gens d’esglise, nobles, bourgeois et autres en bien grant nombre. Et nous a très humblement supplié et requis le dit de la Roche que, moiennant ce, tous les excès, crimes et malefices, roberies, pilleries, meurtres, aggressions de chemins et forcemens de femmes, sacrileges, abrasemens d’esglises et autres edifices, et maulx par luy et autres de sa dicte compaignie faiz et commis, luy voulsissions remettre, quicter et pardonner, et par forme de abolission iceulx crimes et malefices effacer et abolir, especialment à luy, à Regnault Chabot

Renaud Chabot, chevalier, sr de Jarnac, deuxième fils de Louis Chabot, sr de la Grève, et de Marie de Craon, était le beau-frère de Jean de la Roche, dont il avait épousé la sœur de père et de mère, Françoise, alors veuve de Gilles d’Appelvoisin, morte avant 1437. On trouve une longue notice sur ce personnage dans le Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., t. II, p. 180. Jehannot Chabot, sur lequel on ne possède point d’autres renseignements, était son frère. Nous retrouverons le sr de Jarnac dans le prochain volume.

, Jehannot Chabot, Brisset de Saint Cire, chevalier, Jehan de Peruce

Les généalogies de la maison de Pérusse des Cars ne disent rien de ce bâtard, non plus que de Jehannet bâtard des Cars, nommé quelques lignes plus bas.

bastard, Guillaume Parceval

Guillaume Perceval obtint, en mars 1446, des lettres d’abolition particulières qui seront publiées à leur ordre chronologique.

, Colas Barbastre, Pierre Auneau, Boniface Tistin, Heliot de Lavau, Jehan Paquaut

Jean Pasquaut, écuyer, était en procès contre Renaud de Meules, chevalier, et Guillemette Pasquaut sa femme, le 25 février 1407 n.s. (Arch. nat., X1a 54, fol. 145 v°.) Jean Pasquaut, dit Grandjean, et les frères Méry, Jean, Jacques et Guillaume de Montalembert, étaient poursuivis criminellement, les 27 février et 22 juin 1416, sur la plainte d’Hugues du Puy-du-Fou, chevalier, sr de Granzay, et de Jeanne Hélie, sa femme. (X2a 17, aux dates.)

, Laurent Faure, Perenot de la Guirande

Nommé dans les lettres d’abolition octroyées à Guy de la Roche, en juin 1446, publiées ci-dessous.

, Jehan Helie

Un Jean Hélies paya au receveur du dauphin en Poitou, le 25 septembre 1418, le devoir auquel il était tenu pour des terres qu’il possédait à Brelou, mouvant de Saint-Maixent. (Arch. nat., P. 1144, fol. 39.)

, Symonnet de Boyn, Jehan d’Aragon, Jehan de la Mare, Cabouche, Jehan Saunier, Jehan Le Clerc, Jehannet des Cars, bastart, Jehan Goussart, Colin du Pin

Colin du Pin, écuyer, sr de la Guerivière, servit plus tard à l’armée de Guyenne et mourut peu après la bataille de Castillon (1453), à laquelle il assista. (Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 1re édit., t. II, p. 531.)

, Pierre Quenault, Pierre de Saint Jalais

Pierre de Saint-Gelais, cinquième fils de Charles IV, sr de Saint-Gelais, et d’Yolande Bouchard ; il en sera question plus longuement à propos des lettres d’abolition de Guy de la Roche (juin 1446).

, Yvoys de Barro

Sur les familles de Barro et Aubaneau, cf. le Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., t. I, p. 135 et 311.

, le Bourgoignon, Jehan Desmier

En dehors des faits relatés dans la généalogie de sa famille, nous indiquerons quelques documents relatifs à Jean Desmier. Le 3 décembre 1418, Jean Desmier, de Villefollet, paya à Pierre Morelon, receveur du dauphin en Poitou, 30 sous de devoir pour la moitié de la tercerie de Puyfélix, mouvant de Civray, qui lui appartenait à cause de Catherine, fille de Pierre Aubert, sa femme. (Arch. nat., p. 1144, fol. 59.) Il fit aveu, le 4 mai 1419, de son fief appelé vulgairement le Clou de Maillé, mouvant de Chizé. (P. 1145, fol. 27 v° ; voir aussi P. 1144, fol. 56.) Sur le livre des hommages et aveux dus au sr de Parthenay (Artur de Richemont), vers 1428, on lit : « S’ensuivent les hommages de la Leonnière… La femme Jehan Desmier, à cause de ses enffans, femme à devoir de coustume de la borderie de la Caillerie ; et de present en fait hommage ». (R1* 190, fol. 12.)

, Pierre Aubaneau, Jehan Pichier

Paraît être le fils de Guillaume Picher, écuyer, dit « nagueres alé de vie à trespassement » dans un aveu du 19 juillet 1419, rendu par sa veuve Catherine Janvre, en son nom et au nom de leurs enfants. (P. 1144, fol. 25 v°, 39 ; P. 1145, fol. 69.)

, Mery du Chastelier, Jehan de Saint Martin

Famille noble de la Marche et du Poitou (d’Hozier, Armorial, 1er reg.), dont Sibille de Saint-Martin, femme de Guillaume Taveau, sr de Mortemer, en 1394 (Arch. de la Vienne, G. 245) ; Gilles, écuyer, sr de Lage-Gaudelin, et Guillaume, écuyer, sr de Saugé (dans la mouvance de Montmorillon), tous deux vivants en 1418. (Arch. nat., P. 1144, fol. 13 v°.)

, Ferminat, Pierre Clerc Saint Jame, Thomas Rosseleau, Jehan Richart, Pierre de la Croix

Voy. Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., t. II, p. 746.

, Petit Pierre, Jehan de Poictou

Jean Poitou faisait partie, avec quinze autres écuyers, de la compagnie de Jean Barbâtre, écuyer, dont une montre fut reçue à Ruffec le 28 déc. 1418. (Bibl. nat., pièces orig., vol. 187, dossier 4048, nos 2 et 4.)

, Pierre de Baille, le Normant, Olivier Mousse, Petit Jehannin, Jehan d’Acy, Colinet, Perrinet du Bois

Perrinet Du Boys fut appelé aussi à bénéficier des lettres d’abolition octroyées, en juin 1446, à Guy de la Roche, comme on le verra à cette date.

, Touchart Aubert, Jehan Doublet, Jehan Guenault, Jehan de Tillo, Jehan Martin, de Saint Georges de Longuepierre, Thomas de la Court

Plusieurs familles nobles du nom de la Cour existaient en Poitou à cette époque. La plus connue était établie dans la Gâtine. (Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. II, p. 671 et s.)

, Michau Perrinet, Gilet Rousseau, le bastart de Laligier

Famille dont on trouve quelques membres établis dans la châtellenie de Civray, au commencement du xve siècle. Jeanne de Laligier, dame de Lavau-Frénicart, rendit aveu en 1406 et en 1418 pour cette seigneurie et pour son hébergement de Magné en la paroisse de Blanzay. (Arch. nat., R1* 2172, p. 1332, 1337 ; P. 1144, fol. 67.) Le bâtard de Laligier avait prêté main-forte, en janvier 1430 n.s., à Hector des Essarts pour l’enlèvement dont il est question dans la note suivante. (Arch. nat., X2a 20, fol. 69.)

, Estor des Essars

Hector des Essarts, dit ailleurs le bâtard des Essarts, capitaine de la place d’Aubigny, fils naturel de Renaud de Vivonne, seigneur d’Aubigny, Faye et les Essarts (mort en 1418), avait à rendre compte d’autres méfaits. Il s’était rendu coupable, avec l’aide de son frère Jean de Vivonne, du rapt de Catherine Eschalart, fille de Jean Eschalart, chevalier, et fut pour cette cause poursuivi criminellement au Parlement de Poitiers. Les deux frères avaient obtenu des lettres de rémission, dont ils requéraient l’entérinement dès le 30 juin 1430. Jean Eschalart s’opposa à l’exécution de ces lettres et il en résulta une procédure dont on trouve la trace jusqu’au 19 mars 1435. Un arrêt du 6 février 1434, prononcé le 13, condamna Hector des Essarts par contumace au bannissement à perpétuité et à la confiscation de ses biens. (Voy. X2a 18, fol. 216 v°, 221 v°, 225, 238, 239 v° bas, 243, 246 ; X2a 20, fol. 69 ; X2a 21, fol. 127, 155, 158 r° et v°, 160 v°, 162 v°, et aux dates des 6 février et 28 juin 1434, 19 mars 1435 n.s.)

, le bastart de la Porte, Olivier, Maurice Lalant, ung nommé Calo, Mery Queroy, Jamet Chapelle, Guillaume de l’Espinas, Jehan Paillier, Artus Guillen, de Laleu, Jehan Otier, Fargon, Jacoton, Jamet l’Escossais, Guillaume François

Peut-être le fils aîné de Jean François et de Colette Coustaud. Celle-ci, veuve le 9 juin 1422, rendit a veu comme tutrice de ses enfants, Guillaume, Louis et Éléonor, de la dîmerie de Maisoncelle en la paroisse de Prailles. (Arch. nat., P. 1145, fol. 116.) L’année suivante, elle était en procès, toujours au nom de ses enfants, contre François de Montberon, vicomte d’Aunay, au sujet de certaines terres leur appartenant : Saint-Georges, le Grand-Pontereau et d’autres mouvant du sr de Chantemerlière. (Plaid. des 14 juin et 7 juillet 1423, X1a 9197, fol. 212, 224 v°, 250 ; arrêt du 15 juillet 1424, X1a 9190, fol. 300 v°.)

, Joachin Belivier

Cf. la généalogie de la famille Bellivier, originaire des environs de Lusignan. (Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., t. I, p. 433.)

, Jehan Caille, Pierre Larcher, Mery Villeneufve, Olivier Villeneufve, Loys Michau, Guion Faideau

Le nom de Guyon ne figure point sur le tableau généalogique, dressé par M. le baron d’Huart, de la famille Faydeau, à laquelle ce personnage appartenait vraisemblablement. (Persac et la baronnie de Calais, Mém. des Antiquaires de l’Ouest, nouv. série, t. X, 1887, p. 242 et suiv.)

, Jehan de Saint Benoist, Caillaut

Voir les renseignements réunis sur cette famille dans le Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., t. II, p. 98.

, Jehan Minaut, Besselance, Jehan Sabin, Richart, Jehan de Tillo, Macias de Tillo, Tenot Bonin

Id. ibid., t. I, p. 619.

, Jehan Herodeau, Anthoine du Pesle

Fils de Jean du Pesle ou du Paile et de N. Adeuil (sur lequel cf. notre t. VI, p. 401, 402 et note), Antoine avait entrepris la reconstruction de son hôtel du Paile (le Poile, à Vouillé), tenu du chapitre de Sainte-Radegonde de Poitiers, et voulut y annexer une tour fortifiée, ce qui l’entraîna dans un long procès contre Laurent Vernon, seigneur de Montreuil-Bonnin, qui s’en prit aussi au chapitre de Sainte-Radegonde. Nous ne pouvons entrer dans le détail de cette curieuse affaire. (Voy. actes judiciaires, plaidoiries et sentences des 17 avril 1426, 17 janvier 1429, 12 janvier et 21 février 1430 n.s., 27 septembre 1432, X1a 9191, fol. 111 v° ; 9192, fol. 312 ; 9198, fol. 149 v° ; 9199, fol. 218 et 238.) Le 9 septembre 1424, Antoine du Paile poursuivait au criminel Jean de Montléon, l’aîné, Olivier de Ry, Héliot de Lestang et autres qui avaient « bouté le feu en certaine escluze nouvellement édifiée par lui sur la riviere de la Creuse au dessoubz de la Haye en Touraine ». (X2a 21, fol. 20 v°.)

, Perrenet de Mery, Jehan d’Azay, Guillaume Robert, Heliot Menin, Jehan Palete, Colin de Mere, le bastart du Sable, Perrinet Grasset

C’est le nom d’un capitaine de routiers qui s’était emparé de la Charité et gardait cette place malgré le duc de Bourgogne et d’accord avec les Anglais. Perrinet Grasset est connu surtout pour avoir arrêté, le 30 décembre 1425, au mépris de son sauf-conduit, Georges de La Trémoïlle, envoyé en mission près de Philippe le Bon ; il l’avait retenu prisonnier à la Charité jusqu’à ce qu’il lui eût payé une rançon de 14000 écus. (De Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. II, p. 128, 130, 373-375. — Cf. aussi Mémoires de la Société hist. du Cher, 4e série, 1895, p. 242.) S’il s’agit du même personnage, ce qui n’est pas impossible, Perrinet, après avoir joué ce mauvais tour à La Trémoïlle, aurait été employé à son service. On doit faire remarquer cependant que Perrinet Grasset était encore maître de la Charité au moment du traité d’Arras (Bibl. nat., coll. de Bourgogne, vol. 100, p. 247) ; il aurait donc momentanément confié cette place à un lieutenant, pour s’enrôler dans la compagnie de Jean de la Roche. Ce n’est pas ici le lieu de chercher la solution de ce problème.

, Franqueville, Jehan Grangier et Granchier (sic), son frere, Petit André Migroget, Bernart de la Fousse, François Vigier, Guillaume de la Tour, Jehan Le Blanc, Jehan Saunier, Perrinet de Joigny, Alain Mery du Chastelar, Bertrand de Bouteville, Pierre, son frere, Perrinet Chauvet

On constate l’existence en Poitou et dans la Basse-Marche de plusieurs familles Chauvet, au xve siècle. (Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. II, p. 346 et suiv.)

, Pierre Quentan, Robin Brizejon, Capd’osteau, [de] Limalongue, le Rasle, mestre Jehan Bonnier, Recidat

Peut-être faudrait-il corriger légèrement ce nom et lire « Reculat ». Un Jean Reculat est compris dans les lettres d’abolition octroyées, en juin 1446, à Guy de la Roche et à ses complices. (Ci-dessous, à la date.)

, Petit Jehan, Arnault de Bazillac, Casaudet, Jehannot Calart, Pierre Marchant, Pierre Morin, Yvonet d’Agonnois, le Grant Colin, Jehan d’Aubigné, Jehan Herbert

On trouve Aimery et Guyon Herbert, valets, demeurant en 1409 et 1418 dans la châtellenie de Civray. (Arch. nat., R1* 2172, p. 1303 ; P. 1144, fol. 66.) Voir sur cette famille d’Hozier, Armorial général, 1er registre.

, Evrat Bigot

Nom commun à plusieurs familles poitevines.

, Jehan Moreau

Un Jean Moreau, écuyer, sr de la Mosnerie, marié à Marguerite Pain, possédait en 1440 le fief de la Dreille en Moncoutant et la sergenterie fieffée de Moncoutant. (Ledain, Hist. de Bressuire, p. 405 et 411. Voir aussi Arch. nat., R1* 190, fol. 12 et 257.)

, Beguinaut, George Valentin, Guy l’Escossois, Jehan Prevost, Heliot Robert, le Grant Paton, le Petit Paton, Chery Escossez, Jehan Montagu, Chaumont, Guillaume de la Faye, Jehan du Brueil

Peut-être Jean du Breuil, sr de Foussac, dont une fille, Blanche, épousa, le 19 mai 1446, Guillaume de Forges. (Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. I, p. 751.)

, Heliot de Pantro, Saussay, Jehan de Nolet, Guillon François, Thomin de Chaufour, Hevrart Lestap, le Camus, Jehan Jobert

Jobert, Jaubert ou Joubert, famille noble du Limousin, dont plusieurs membres, à la fin du xive siècle et au commencement du xve, portèrent le prénom de Jean. (JJ. 156, n° 106, fol. 62 v° ; X1a 45, fol. 261.)

, Jehan de Mailly, le Grant Jehannin, Pierre Pacaut, Jehan Guillart, Jehan Chattaigner

Plusieurs membres des diverses branches de la maison de Chasteigner portaient à cette date le prénom de Jean.

, le Grant Olivier, le bastart de Leve, André Mulot, Jehan Le Madre et autres quelxconques

En parcourant cette liste de plus de cent cinquante personnes, on reconnaît quantité d’autres noms poitevins, plus ou moins faciles à identifier. On remarquera que quelques-uns sont répétés deux fois et que plusieurs ont été certainement défigurés par le scribe. Seule une montre contemporaine de la compagnie de Jean de la Roche pourrait permettre de contrôler cette nomenclature et de la rectifier. Nos recherches dans les nombreuses montres de cette époque conservées à la Bibliothèque nationale sont demeurées vaines. Telle qu’elle est toutefois, cette liste n’est point dépourvue d’intérêt.

, estans de present de sa dicte compaignie, et aussi lui remettre, quicter, pardonner et abolir le crime et offense qu’il a commis envers nous et nostre magesté royal, à l’occasion de ce qu’il a fait batre, sans noz congié et licence, monnoye tant d’or que d’argent en la ville d’Angolesme, de mendre poix et loy que ne sont noz monnoyes, et à la impression et coings de nos dictes monnoyes aians cours en nostre royaume

On trouvera, dans un autre endroit de ce volume, quelques renseignements sur le fonctionnement de la Monnaie instituée par Jean de la Roche à Angoulême.

.

Pour quoy nous, ayans consideracion à ce que ledit Jehan de la Roche s’est employé bien et voulentiers, dès le temps de sa jeunesse, en nostre service et a fait pluseurs destrousses sur noz ennemis, et avecques ce a prins pluseurs chasteaulx et forteresses qui estoient occuppées par iceulx nos diz ennemis, ès païs de Gascoigne, Xanctonge et Angolmois, desquelles il a prins les aucunes par sieges, par lui et autres du païs tenuz devant iceulx chasteaulx et forteresses, les autres prins par assault et par force ; et aussi eu consideracion aux bons et notables services faiz à nous et à noz predecesseurs roys de France par le pere

Guy de la Rochefoucauld, seigneur de Verteuil et de Barbezieux, fils de Geoffroy III, seigneur de Verteuil, et d’Agnès de Barbezieux. Des lettres de 1385 données en faveur de ce Geoffroy portent que le château de Verteuil lui appartenant a été depuis deux ans pris par les Anglais qui continuent à l’occuper, et lui promettent que, si l’on parvenait à le racheter, ses droits lui seraient restitués. (JJ. 126, n° 200, fol. 130 v°.) Guy avait épousé un peu avant 1382, pendant les trêves avec l’Angleterre, Rosine de Montaut, fille de Raymond, seigneur de Mussidan, Montendre, Montguyon, Sainte-Néomaye, Blaye, etc. Celle-ci était décédée en 1404. Le sr de Verteuil eut deux autres femmes, Marie d’Usages et Jeanne de Rougemont, veuve de Guillaume Sanglier, sr de Bizay, à cause de laquelle il était en procès, le 22 juin 1426, contre Jean de La Haye, chevalier, au sujet de terres sises à Bournan. (X1a 9191, fol. 32 v°.) De cette dernière il eut Guy, sr de Verteuil, sénéchal d’Angoulême, dont la rébellion pendant et après la Praguerie est relatée dans des lettres d’abolition publiées plus loin dans le présent volume. Guy de la Roche eut un différend, l’an 1409, au nom de ses enfants contre le seigneur de La Rochefoucauld, qui prétendait certains droits sur la terre de Verteuil. Il fut créé bailli du grand fief d’Aunis par lettres datées de Paris le 10 février 1416 n.s. (Anc. mém. de la Chambre des comptes, coté H, fol. 67, 69 ; Bibl. nat., Pièces originales, vol. 2507 (nunc ms. fr. 28991), n° 52, et ms. fr. 21405, p. 71) ; le 12 septembre 1418, il présenta au Parlement des lettres du roi le nommant sénéchal de Saintonge et capitaine de la ville et du château de Saint-Jean-d’Angély, et en requit l’enregistrement. (Arch. nat., X1a 4792, fol. 81.) Le 6 octobre de la même année, quittance fut donnée par le receveur du dauphin, comte de Poitou, à Guy de La Rochefoucauld, de ce qu’il devait pour des fiefs à Montembeuf, Saint-Vincent et Chasseneuil en la châtellenie de Civray. (P. 1144, fol. 68 v°.) Il vivait encore le 11 septembre 1431. A cette date le Parlement de Poitiers rendit un arrêt dans un procès entre lui et le chapitre de Saint-Hilaire-le-Grand touchant la justice et seigneurie de Courcôme. (X1a 9192, fol. 259.)

et autres predecesseurs du dit suppliant, et à la très grant priere et supplicacion d’aucuns grans seigneurs, ses parens et amis, qui nous ont très instanment supplié et requis, audit Jehan de la Roche et autres dessus nommez et tous autres de sa dicte compaignie, et à chascun, avons, par forme de abolicion les diz crimes et malefices, tant de pilleries, roberies, meurtres, efforceis de femmes, aggressions de chemins, insultacions et assaulx d’eglises, abrasemens, sacrileges et autres crimes quelxconques, par eulx et chascun d’eulx commis et perpetrés par entreprise, voye de fait et autrement, avecques l’offense faicte et commise par ledit Jehan de la Roche, à cause des dictes faulses monnoyes, remis, quicté et pardonné, quictons, remettons, par donnons et abolissons par ces mesmes presentes, avec toute paine et offense que, pour occasion des choses dessus dictes, il et les dessus nommez et autres de sadicte compaignie ont encouru envers nous et justice, et, de plaine puissance et auctorité royal, iceulx crimez et deliz abolissons et effaçons, et voulons du tout estre aboliz et effacés, et sans ce que ledit Jehan de la Roche, les dessus nommez et autres de sa dicte compaignie soient aucunement tenuz d’iceulx crimes autrement specifier ne declairer ; ainçois voulons et nous plaist que ces presentes leur soient d’autel valeur et effect, comme si tous et chascuns les diz [crimes] et malefices par eulx commis et perpetrez ès choses dessus dictes et chascune d’icelles nous avoient esté exprimez et estoient en ces presentes expressement et nommement specifiez et declairez. En imposant sur ce scilence pepetuel à nostre procureur et tous autres. Et en faveur des choses dessus dictes, voulons et ordonnons, et mandons à noz seneschaulx de Poictou, Xanctonge et Limosin, et à touz noz autres seneschaulx et gouverneurs que, s’aucuns rotiers, gens d’armes et de trait venoient èsdiz païs, pour courir sus au dit de la Roche, qu’ilz lui donnent conseil, confort et aide, et le gardent d’oppression, violence et voye de fait, à tout leur povoir. Si donnons en mandement par ces dictes presentes à noz amez et feaulx conseilliers les gens tenans nostre Parlement et qui tiendront ceulx avenir, que de nostre presente grace, abolission, remission et octroy facent, seuffrent et laissent joir et user plainement et paisiblement ledit Jehan de la Roche, les dessus nommez et tous autres de sa dicte compaignie, sanz leur faire ou donner ne souffrir estre fait ou donné, en corps ne en biens, ores ne ou temps avenir aucun empeschement ou destourbier au contraire ; ainçois si les dessus diz ou aucun d’eulx, leurs biens ou d’aucuns d’eulx estoient pour ce saisiz, arrestez, detenuz ou empeschez, pour les causes dessus dictes ou aucunes d’icelles, les mettent ou facent mettre tantost et sans delay à plaine delivrance, et noz presentes lettres facent publier en nostre dicte court de Parlement et enregistrer ès registres d’icelle, à memoire perpetuel. Au vidimus des quelles, fait soubz scel royal ou autre autentique, nous voulons plaine foy estre adjoustée, comme à l’original. Et de nostre plus ample grace voulons et nous plaist, et au dit Jehan de la Roche et autres dessus nommez, et tous autres de sa dicte compaignie, avons octroyé et octroyons par ces mesmes presentes que la dicte publicacion qui de ses dictes presentes sera faicte en nostre dicte court de Parlement leur vaille, et à chascun d’eulx, plainiere verificacion, sans ce qu’ilz soient tenuz de autrement les verifier, ne pour ce comparoir personnelment en la dicte court. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours mais, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Donné à Poictiers, le ixe jour du mois d’avril l’an de grace mil quatre cens trente et ung, et de nostre regne le neufviesme.

Ainsi signée : Par le roy en son conseil. Malliere. Visa.

Lecta Pictavis in camera Perlamenti. Et ibidem juravit Johannes de la Roche complere et observare articulos de quibus in albo fit mencio, die sabbati xxia mensis aprilis anno Domini millesimo quadringentesimo xxxi°.

MXXVII Avril 1431

Lettres exemptant de toute imposition, ainsi que du guet et de la garde des portes de la ville, les coutres du chapitre de la cathédrale de Poitiers.

AN JJ. 200, n° 205, fol. 109 v° ; AN JJ. 211, n° 478, fol. 106 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 20-24

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de noz bien amez les doyen et chappitre de l’eglise cathedrale de Saint Pierre le Grant de Poictiers, contenant que, comme pour le service de la dicte eglise ilz aient aucuns serviteurs appellez coultres, c’est assavoir Thomas de la Barre

Un Thomas de la Barre, autrement dit de Touffou, rendit aveu au duc de Berry, le 1er mars 1403, et le renouvela à Charles, dauphin, comte de Poitou, le 2 janvier 1420 n.s., pour son hébergement de Marit qui lui venait de sa mère. (Arch. nat., R1* 2171, p. 35, et P. 1145, fol. 90 v°.)

, Jehan Regnault, dit Meriault

Var. Meryault (JJ. 211).

, Herbert Maudouyn, André Galipeau, Jehan Charpentier

Deux aveux de soixante prébenderées de terre au Theil, paroisse de Chenay, furent rendus par un Jean Charpentier et sa femme aux comtes de Poitou, le premier en date du 18 mai 1407, le second de l’année 1418. (R1* 2171, p. 376 ; P. 1144, fol. 26.)

et Jehan Gaudonneau, Pierre Ferrand, Jehan Guy

Un inventaire du xvie siècle des Archives de la ville de Poitiers mentionne une adjudication aux enchères du quart de la dîme de Chaumont qui appartenait à Jean de la Mollière, et qu’il possédait par indivis avec les seigneurs de la Suze et de Chéneché, faite, le 6 septembre 1414, à Jean Guy pour le prix de 30 livres et à la charge des foi et hommage envers le seigneur de Rochefort. (Rédet, Inventaire des Arch. de la ville de Poitiers, p. 314, n° 1974.)

et Jehan Chanvillon, lesquelz sont tenuz, chacun à son tour, de sonner les cloches à toutes les heures qui se dient en la dicte eglise et icelle garder de jour et de nuyt, et à ceste cause eussent iceulx coultres de toute ancienneté, quelque part qu’ilz feussent demourans en la ville et chastellenie de Poictiers, acoustumé de estre francs, quictes et exemps de toutes aides, tailles, subcides et subventions quelxconques, pour quelconque cause qu’ilz peussent estre mis sus en ladicte ville, et aussi des guectz et gardes de portes en icelle ville ; ce non obstant, les collecteurs des parroisses où les diz coultres sont demourans, se sont puis nagueres efforcez et efforcent de jour en jour de mectre, asseoir et imposer iceulx coultres et chascun d’eulx èsdiz aides, tailles et subcides, et de les contraindre à payer les taux ausquelx il avoient esté imposez, et aussi les maire et autres officiers de la dicte ville, eulx entremettans du guet et garde des portes d’icelle, les veullent pareillement contraindre à faire les diz guectz et gardes des portes, lesquelles choses ont esté et sont faictes ou très grant grief, prejudice et dommaige de la dicte eglise et des diz coultres, et plus seroit, se par nous ne leur estoit sur ce pourveu de nostre gracieulx et convenable remede, si comme ilz dient, en nous humblement requerant icelluy. Pour ce est il que nous, ces choses considerées, desirans de tout nostre cueur le service divin estre fait et celebré en la dicte eglise de Saint Pierre, avons, en faveur des diz doyen et chappitre d’icelle eglise voulu et ordonné, voulons et ordonnons que les diz Thomas de la Barre, Jehan Regnault, dit Meriaut, Herbert Maudouyn, André Galipeau, Jehan Charpantier, Jehan Gaudonneau, Pierre Ferrant, Jehan Guy et Simon Chanvillon

Au commencement de l’acte, il est nommé Jean Chanvillon.

, coultres de la dicte eglise de Saint Pierre de Poictiers, et autres qui pour le temps advenir le seront, soient et demeurent à jamais francs, quictes et exemps de toutes aides, tailles, subcides et subvencions quelxconques, mises et à mettre sus en la dicte ville de Poictiers, et aussi des guetz et gardes des portes d’icelle ville, des quelx nous les avons exemptez et affranchiz, exemptons et affranchissons à tousjours mais par ces presentes. Si donnons en mandement à nostre amé et feal conseillier maistre Regnier de Boulegny

Régnier de Boullegny, ou de Bouligny, faisait partie de l’administration des finances dès l’année 1412. En 1418, il accompagna le dauphin à Bourges et à Poitiers et entra dans le conseil souverain. Dans un mandement du roi à lui adressé d’Amboise, le 4 juin 1433, il est qualifié « general conseiller par nous ordonné sur le fait et gouvernement de toutes noz finances, tant en Languedoïl comme en Languedoc ». L’an 1435, les États du haut Limousin lui firent, ainsi qu’à d’autres conseillers du roi, des dons pour services rendus au pays. (A. Thomas, Les États provinciaux du centre de la France sous Charles VII, t. I, p. 310 ; t. II, p. 51, 67.) Le volume 450 des Pièces originales à la Bibl. nat. contient un certain nombre de quittances de Renier de Bouligny. En 1441, il y avait trois généraux conseillers des finances : Renier de Bouligny, Jean de la Barre et Jean Chastenier ; en 1444, ils étaient remplacés tous les trois. Bouligny continua néanmoins à siéger au conseil. Au mois de mai 1445, il était avec le comte de Vendôme, Jean Rabateau et autres, l’un des représentants du roi aux conférences de Châlons. (De Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. III, p. 465 ; t. IV, p. 131, et passim.) Il était mort avant le 12 mai 1456. A cette date, sa veuve Marguerite la Touroulde, chez laquelle Jeanne d’Arc avait résidé pendant son séjour à Bourges, après le sacre, témoignait à Paris en faveur de la Pucelle et rendait hommage à sa piété, à sa charité et à la pureté de ses mœurs. (J. Quicherat, Procès de réhabilitation de Jeanne d’Arc, t. III, p. 83.)

, general conseillier sur le fait et gouvernement de toutes noz finances et autres generaulx conseilliers qui pour le temps advenir seront sur le fait et gouvernement de nos dictes finances, aux esleuz et commissaires, commis et à commettre, à mettre, asseoir et imposer les diz aides, tailles, subcides et subvencions quelxconques en la dicte ville et chastellenie de Poictiers, au maire

« Maire » manque dans JJ. 200.

present et avenir, et autres entremetteurs de guet et gardes des portes d’icelle ville, que de nostre presente grace, affranchissement, quictance et exempcion facent, seuffrent et laissent les dessus diz coultres de Saint Pierre le Grant de Poictiers et autres qui le seront ou temps advenir, demourans en la dicte ville et chastellenie de Poictiers, et chascun d’eulx, joir et user à tousjours plainement et paisiblement, sans leur faire ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné, ne à aucun d’eulx, pour occasion de ce que dit est, ores ne pour le temps advenir, aucun empeschement au contraire, mais se mis y estoit, le facent incontinent oster. Et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Poictiers, ou moys d’avril l’an de grace mil cccc. trente et ung après Pasques, et de nostre regne le neufviesme

L’original de ces lettres patentes est conservé aux Archives de la Vienne, ainsi que des lettres de Louis XI et des rois ses successeurs confirmant les privilèges des coutres du chapitre cathédral, et des documents au nombre de cent cinquante relatifs à ces officiers, entre les années 1381 et 1776. (G. 389, 390 et 391.) Le texte des lettres de Charles VII est transcrit deux fois sur les registres du Trésor des chartes, la première dans une confirmation donnée par le roi Louis XI, à Poitiers, février 1465 n.s. (JJ. 200, n° 205, fol. 109 v°), et la seconde dans un vidimus de Charles VIII, daté de 1484, sans indication de lieu ni de mois. (JJ. 211, n° 478, fol. 106 v°.) Il est imprimé dans le recueil des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XVI, p. 302.

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Ainsi signées : Par le roy, vous, l’evesque de Sées

Robert de Rouvres, maître des requêtes de l’hôtel, membre du conseil de Charles VII et garde du sceau royal, avait été élu et confirmé évêque de Séez le 1er juillet 1422. Il fut transféré, le 4 mars 1433, au siège de Maguelonne, où il ne résida guère, étant retenu le plus souvent à la cour ou envoyé en mission par le roi ; néanmoins il en demeura titulaire jusqu’à sa mort, arrivée à la fin de l’année 1453. (Cf. Gallia christ., t. VI, col. 801, et t. XI, col. 698.)

, les sires d’Argenton

Guillaume d’Argenton, chevalier, seigneur dudit lieu, de Gourgé, Onzain, etc., fils de Geoffroy, sr d’Orfeuille, Gourgé, etc., et de Jeanne de Vernou, fut l’un des confidents de Charles VII. Il assista ce prince, alors dauphin, lors de l’accord qu’il conclut à Angers avec le duc de Bretagne, le 2 juillet 1417, et plus tard il devint gouverneur du dauphin Louis. Le sire d’Argenton s’était marié, en 1403, à Chiché, avec Jeanne, fille unique d’Hélène de Naillac, sr d’Onzain, et de Marie d’Amboise, après l’avoir enlevée de la maison de sa mère, alors femme en secondes noces de Guy d’Argenton, oncle paternel de Guillaume, qui s’opposait au mariage pour garder la tutelle de cette riche héritière. (Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. I, p. 102.) Les registres du Parlement, où Guillaume d’Argenton soutint un assez grand nombre de procès, fournissent sur ce personnage des renseignements intéressants. On peut voir, entre autres, un accord conclu le 31 mars 1419 n.s. entre lui et son frère Jean, sr d’Orfeuille, au sujet du partage qui leur avait été fait par leur mère Jeanne de Vernou, dans lequel Guillaume se prétendait lésé, et aussi touchant la succession de leur oncle Guy, sire d’Argenton (Arch. nat., X1c 117) ; une autre transaction passée entre Guillaume d’Argenton, d’une part, Amaury d’Estissac et sa femme, Jeanne Guenant, tutrice de ses enfants du premier lit, Pierre et Madeleine d’Amboise, d’autre part. Charles dauphin et régent avait fait don au sire d’Argenton de la part qui devait revenir à Isabelle d’Amboise, femme de Guy d’Aigreville, sur la châtellenie de Chaumont-sur-Loire. Cette dernière était la sœur d’Hugues III d’Amboise, sr de Chaumont, père de Pierre et Madeleine, et sa succession aurait dû revenir à ceux-ci. De là le litige. (X1c 123.) Le 3 août 1425, Guillaume d’Argenton obtint du Parlement un arrêt touchant la restitution du château de « Saint-Verain-des-Bois » (de Sancto Verano de Boscis), dont il avait confié la garde à Jean de Lesgoy, chevalier. (X1a 9190, fol. 353.) La même année, de concert avec Thibaut Chabot, sr de la Grève, Jean Rabateau et autres, il poursuivait au criminel Jean Lorson, prieur d’Angles, pour excès et graves préjudices. L’affaire est curieuse, mais nous devons, pour ne pas nous étendre démesurément, nous contenter de donner les cotes. (Voir X2a 18, fol. 83 v° ; X2a 19, fol. 18 ; X2a 20, fol. 8 ; X2a 21, fol. 28, 31, 34 v° ; X1a 9190, fol. 344 v° ; et X1a 9198, fol. 48-50, 53, 55 et 87, plaidoiries). Un autre procès intéressant à un autre point de vue est celui que le sire d’Argenton soutint contre Catherine de la Haye, veuve de Geoffroy de Beaumont, Louis de Beaumont, Guy de Chourses (ou de Sourches), à cause de sa femme, Marie de Beaumont, touchant la dot de sa tante, Yolande d’Argenton, mariée à Thibaut de Beaumont, et autres biens patrimoniaux provenant de son grand-père et de sa grand’mère. (Plaidoiries, 11 février 1433 n.s., X1a 9200, fol. 112 ; long arrêt du 13 septembre 1434, X1a 9193, fol. 50 v° ; voir aussi X1a 9194, fol. 79 v°.) Enfin l’an 1447, Guillaume était poursuivi au Parlement pour excès et violences par Jean de Montours, chevalier, ainsi que François de Beaumont, chevalier, son capitaine d’Argenton, et Pierre Fouchier, son châtelain audit lieu. (X2a 23, fol. 337, au 7 septembre 1447.)

, de Mortemer

Ce nom dans la souscription des lettres royales est écrit tantôt Mortemer, tantôt Mortemar. Selon toute vraisemblance, il s’agit non pas de Geoffroy Taveau, sr de Mortemer, mais de Jean de Rochechouart, chevalier, sr de Mortemart, de Vivonne, de Saint-Germain, etc., conseiller et chambellan de Charles VII, créé gouverneur de la Rochelle en 1426, mort avant le 6 avril 1437. (Cf. notre précédent vol., p. 372, note.)

et autres presens. Coingnet. Visa.

MXXVIII 7 mai 1431

Extrait des lettres de rémission octroyées à Georges de La Tremoïlle, grand chambellan du roi, pour la détrousse et emprisonnement de Jean Chartier, receveur du roi en l’élection d’Orléans, l’arrestation arbitraire et séquestration privée de Martin Gouge, évêque de Clermont, et autres abus de pouvoir, excès et violences

Ces lettres de rémission ont été publiées par M. le duc de La Trémoïlle, d’après une copie qui se trouve au chartrier de Thouars, analysées longuement et commentées par M. de Beaucourt (Les La Trémoïlle pendant cinq siècles, tome Ier, Guy et Georges (1343-1444), Nantes, in-4°, 1890, p. 192 ; Histoire de Charles VII, t. II, p. 274, 275.) Nous n’en donnerons qu’un extrait relatif à l’emprisonnement de deux bourgeois de Limoges à Chauvigny et à Poitiers. L’intérêt de ces lettres résulte en grande partie de la date qu’elles portent. Le lendemain, 8 mai, furent prononcés les arrêts condamnant Louis d’Amboise, vicomte de Thouars, à la prison et à la confiscation de ses biens ; André de Beaumont et Antoine de Vivonne, à la peine de mort. Tous les historiens s’accordent à reconnaître l’influence souveraine de La Trémoïlle dans ce procès et dans son dénouement. M. de Beaucourt fait justement remarquer qu’à la veille de la condamnation de ses ennemis, le favori, sentant que par un soudain retour de fortune sa situation pouvait se trouver gravement compromise, crut se mettre à l’abri d’une éventualité redoutable en se faisant délivrer un acte d’amnistie et la remise de toutes les peines qu’il avait encourues par le passé.

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AN JJ. 177, n° 209, fol. 139 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 25-28

Charles, etc. Savoir faisons, etc. De la partie de nostre chier et feal cousin, conseiller et grant chambellan, George seigneur de la Trimoille et de Suly, nous avoir esté exposé que aucuns bienveillans et amys privez dudit sr de la Trimoille et frequentans sa compaignie familiairement lui ont par plusieurs foiz dit et remonstré que, pour cause et occasion d’aucuns cas cy après declairez particulierement, on lui pourroit donner coulpe et charge et en pourroit avoir à besoingner et à faire, et encourir en dangier et dommaige ou temps avenir, se il n’y pourveoit, et qu’il en feust deschargié ; et pour ce y advisast et querist sa provision devers nous. Des quelz cas, ainsi que audit exposant puet souvenir, particulierement la declaration s’ensuit

En 1416, La Trémoïlle, sous prétexte de se payer de 10.000 livres qu’il prétendait lui être dues pour la solde de ses gens, s’était approprié certaine grosse somme d’argent que Jean Chartier, receveur du roi en l’élection d’Orléans, envoyait à Paris, et avait fait battre le porteur qui avait dénoncé la détrousse. En juin 1418, après l’occupation de Paris par les Bourguignons, La Trémoïlle s’était saisi de la personne de Martin Gouge, évêque de Clermont, et l’avait tenu enfermé au château de Sully, jusqu’à ce que le dauphin fût venu en personne le délivrer. Tel est le résumé des faits criminels visés au commencement de ces lettres de rémission.

 : . . . . . . . . . . . . . . . Autres des diz cas regardans la prinse des personnes de Guillaume de Julien et de ung appellé Desiré Martin, bourgois de Limoges. Est assavoir que comme le dit sr de la Trimoïlle ayant grant auctorité et gouvernement entour nous et en noz affaires, comme il a de present, eust esté prié et requis de par la dicte ville de Limoge et consulat d’icelle de les aidier et secourir de certain nombre de gens d’armes et de trait, pour aller mettre le siege devant le chastel et place de Moruscle (sic) ; lequel sr de la Trimoïlle obtempera à la dicte requeste, et par les diz de Limoges lui fut promis grant somme de deniers. Et pour les diz gens de guerre entretenir et aler oudit voiage exposa du sien grant somme de deniers. Desquelz paier et tenir promesse, depuis le dit service fait, ceulx de la dicte ville de Limoges furent requis de par icellui sr de la Trimoïlle plusieurs foiz ; lesquelz en furent delayans. Et pour ce, icellui sr de la Trimoïlle, recors de ces choses et de son interest, voulant estre recompensé, fist prendre et mener prisonniers les diz Guillaume de Julien et Desiré Martin ou chastel de Chauvigny, où il les avoit fait mettre prisonniers, et mener en nostre chastel de Poictiers et ailleurs où bon lui sembla, comme des plus principaulx du fait et poursuite de la dicte ville de Lymoges, pour estre paié de sa dicte mise et despence. Lesquelz Guillaume de Julien et Desiré Martin lui paierent de vim à viim frans ou autre somme non gueres plus grant, de toute laquelle somme il n’est pas bien souvenant…. Donné à Poictiers, le septiesme jour de may l’an de grace mil cccc.xxxi, et de nostre regne le xme

Ces lettres sont enregistrées, sans motif apparent, au milieu d’abolitions accordées à des gens de guerre pour leurs excès, au mois d’avril 1446, et il est à noter que, sauf la rémission de Georges de La Trémoïlle, tous les actes du reg. JJ. 177 sont des années 1444, 1445 et 1446.

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Ainsi signé : Par le roy en son conseil, ouquel vous, Christofle de Harecourt

Christophe d’Harcourt, troisième fils de Jacques d’Harcourt, seigneur de Montgommery, et de Jeanne d’Enghien, fut seigneur d’Havré du chef de sa mère, conseiller et chambellan de Charles VII, souverain maître et général réformateur des eaux et forêts de France, l’an 1431, l’un des négociateurs du traité d’Arras (1435), gouverneur des villes de Beaumont et de Mouzon en 1437, et mourut sans alliance le 11 mai 1438.

, le mareschal de Saincte Severe

Jean de Brosse, sr de Saint-Sévère, maréchal de France (1426), dit aussi le maréchal de Boussac, né en 1375, mort en 1433. C’est lui qui tua, par ordre de Richemont, Camus de Beaulieu, l’indigne favori du roi.

, maistre Jehan de Vaily

Jean de Vaily, premier président du Parlement de Poitiers (vol. précédent, p. 256, note 1). Son nom revient presque à chaque page des registres de cette cour. Le 15 janvier 1426, il requérait des poursuites contre Thévenin de Lestang et ses complices, coupables d’avoir battu et injurié Jacques de Vaily, l’un de ses fils. (Arch. nat., X2a 21, fol. 41 v°.) L’an 1432, le premier président, veuf et déjà fort âgé, se remaria avec Jeanne Gillier, fille de Denis Gillier et de Jeanne de Taunay, veuve elle-même de Pierre Royrand ; il eut à cause d’elle un procès avec Étienne et Jean Gillier, ses frères, au sujet de l’héritage d’Herbert de Taunay, leur oncle. (Actes des 25 juin, 4 et 28 juillet et 9 décembre 1433, X1a 9194, fol. 48 v°, 49, 52, 55, 60 v° ; plaidoiries des 23 juin et 21 juillet 1433, X1a 9200, fol. 167, 177 v°, 179, 181, 185, 186.) Un accord intervint entre les parties, le 7 décembre 1433 (X1c 146). Jean de Vaily habitait une maison derrière le Palais de Poitiers. Le 19 octobre 1434, infirme et ne pouvant aller à pied ni monter à cheval, il demanda et obtint de ses collègues qu’une porte murée qui donnait de la chambre du conseil, faisant suite à la grande chambre du Parlement, sur le jardin du Palais, derrière la tour de Maubergeon, fût percée à nouveau et fermée à clef pour son service particulier. (X1a 9194, fol. 82 v°.) Le premier président mourut le 9 et fut enterré le 11 mars 1435. (Id., fol. 93.) Le même jour, la cour fit apposer les scellés sur ses meubles et papiers. (X2a 21, au 11 mars.) Son fils aîné, Jean de Vaily, avait été reçu conseiller au Parlement le 14 mars 1425, par ordre du roi ; il jouissait d’une prébende en l’église de Laon par lettres données à Bourges, le 2 mars 1422. (X1a 8604, fol. 112.) Jacques, son second fils, est qualifié chevalier. Ses autres enfants étaient Marguerite, femme de Me Jean Simon, Tanguy, âgé de moins de vingt-cinq ans à la mort de son père, et Perrette, mariée à Me Jean Le Viste. Les héritiers du premier président transigèrent avec sa veuve relativement au douaire de celle-ci, par acte du 2 avril 1435. (X1c 149 et X1a 9194, fol. 96.) M. Thomas parle d’une autre fille de Jean de Vaily, qui aurait épousé Nicole de la Barre, maître des requêtes de l’hôtel (Les États provinciaux sous Charles VII, t. I, p. 279) ; mais elle n’est point nommée dans l’acte du 2 avril 1435. On y apprend que le premier président avait acquis, depuis son second mariage, une maison près des Cordeliers à Poitiers, et que la plus grande partie de ses biens était au pouvoir des Anglais.

et Junien Le Fevre

Junien Le Fèvre, fils de Pierre décédé président à mortier au Parlement de Paris, n’est pas nommé dans l’ordonnance de Niort (21 sept. 1418) instituant une Cour souveraine à Poitiers. Cependant il avait suivi le dauphin, après l’entrée des Bourguignons à Paris. Celui-ci le pourvut d’un office de président au Parlement créé à Toulouse par lettres du 20 mars 1420 et transféré à Béziers en 1425, sous le nom de Parlement de Languedoc. Lorsque cette cour fut supprimée et réunie à celle de Poitiers (Chinon, 7 octobre 1428), Junien Le Fèvre siégea dans cette dernière, au même titre. Mais son rang n’était pas encore réglé le 4 novembre 1429 ; il demandait à prendre séance suivant la date de sa réception. La question fut soumise au roi et décidée au profit de Guillaume Le Tur. Junien n’eut que le troisième rang parmi les présidents à mortier, et le second après le décès de Jean de Vaily. (Blanchard, Les Présidens à mortier, in-fol., p. 79.) On trouve encore son nom, à la dernière séance tenue à Poitiers, le 6 novembre 1436. (X1a 9194, dernier fol.) Depuis il siégea au Parlement réinstallé à Paris. On trouve un acte relatif au président Junien Le Fèvre dans le fonds du chapitre de Notre-Dame-la-Grande de Poitiers ; c’est un arrentement de fondis sis en la rue de la Jabrouille, consenti à son profit, l’an 1432. (Arch. de la Vienne, G. 1138.)

, presidens en Parlement, et plusieurs autres dudit conseil estiez. Malliere. Visa. — Contentor. P. Le Picart.

MXXIX 10 mai 1431

Confirmation des privilèges et franchises des habitants de l’île de Noirmoutier.

AN JJ. 216, n° 79, fol. 64 ; AN JJ. 224, n° 10, fol. 11 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 28-31

Charles, par la grace de Dieu roy de France. A tous ceulx qui ces presentes lettres verront, salut. Savoir faisons que, ouye par nous l’umble supplicacion de nostre cher et feal cousin, conseillier et grant chambellan, Georges seigneur de la Trimoïlle, de Craon, de Sully et de l’isle de Noirmoustier

Quelques années avant la date de cette confirmation, l’île de Noirmoutier était profondément divisée et agitée par les querelles et contestations incessantes qui surgissaient entre les officiers et sujets de Georges de La Trémoïlle et ceux de l’abbaye dite de l’Isle-Dieu. Les religieux portèrent plainte au Parlement de Poitiers, « en cas d’excès et attemptats ». Leur fondateur, qui était à la fois seigneur de la Garnache et de Noirmoutier, avait disaient-ils, complètement affranchi le monastère et ses sujets de toutes tailles et subsides, ainsi que de la justice qu’il exerçait dans le reste de l’île. Ils se plaignaient que les officiers de La Trémoïlle cherchaient constamment à empiéter sur leurs privilèges, les troublaient dans l’exercice de leurs droits et depuis quelque temps empêchaient même le service divin au monastère, par suite de leurs exactions et de leurs violences. Ces derniers, de leur côté, adressaient reconventionnellement les mêmes reproches aux officiers et sujets de l’abbaye, particulièrement en ce qui touchait le droit de naufrage et d’épave qu’ils prétendaient appartenir à leur maître. De plus, ils accusaient l’abbé et ses moines de ne point vivre selon la règle, de porter des armes, etc. On peut lire dans les intéressantes plaidoiries des 26 février, 19, 26 et 29 avril 1425, les griefs détaillés invoqués par les deux parties et les cas particuliers de violence dont ils se plaignaient réciproquement. (Arch. nat., X1a 9198, fol. 35, 59, 63 v°, 64 v°.)

, et des povres manans et habitans en ladicte isle, hommes et subgectz de nostre dit cousin, consors en ceste partie, contenant que feu nostre très chier seigneur et pere, cui Dieu pardoint, par l’advis de son conseil et pour les causes contenues plus à plain ès lettres de nostre dit feu seigneur et pere, desquelles la teneur est telle : « Charles, etc.

Suit le texte des lettres du 25 octobre 1392, portant exemption des aides pour le fait de la guerre, en faveur des habitants de l’île de Noirmoutier et en considération de leur belle conduite, lors d’un récent débarquement des Anglais, lettres qui ont été imprimées dans le tome VI de notre collection, p. 88 (t. XXIV des Archives hist. du Poitou).

 », affranchy et exempta les diz habitans, et volt estre tenuz frans et quictez, dès lors en avant, de contribuer aux aides imposées et à imposer en ce royaulme pour le fait de la guerre, lesquelles lettres leur furent veriffiées et expediées par les generaulx conseillers sur le fait des aides lors ayans cours pour le fait de la guerre. Duquel previlege et exempcion ilz ayent joy et usé tout le vivant d’icelluy feu nostre seigneur et pere. Et combien que la cause pour laquelle fut aus diz supplians octroié la dicte exempcion et previlege soit aussi grande de present qu’elle estoit au temps de lors et que noz ennemis depuis deux ans en ça aient courue et arse la dicte isle

Nous n’avons point trouvé de renseignements sur la descente des Anglais à Noirmoutier en 1429.

, et y pevent venir par mer, quant bon leur samble, à navire et autrement, ainsi que plusieurs foiz ont fait, et que de present les tailles et subcides qui se mettent et sont mises sus de par nous, depuis nostre partement de nostre ville de Paris, nous soient et aient esté octroyées par noz subgectz pour nous servir et aider à demener le fait de nostre guerre à l’encontre de noz ennemis et rebelles, et doient sortir la nature des dictes aides, desquelx, ainsi que dit est, et par les dictes lettres iceulx supplians ont esté et sont affranchiz et exemptez, ce non obstant noz gens et commissaires sur le fait des diz tailles et subcides les ont imposez et imposent à iceulx et s’efforcent de les contraindre à iceulx paier, ainsi que s’ilz n’eussent aucun previleige ou exempcion sur ce, et tellement les travaillent à cause de ce que, se par nous n’est sur ce pourveu aus diz habitans, il leur conviendra laisser le pays et la dicte isle comme inhabitée, au grand prejudice de nous et diminucion de nostre seigneurie et aussi de celle de nostre dit cousin, ainsi qu’il nous a fait remonstrer. Nous, ce consideré, voulans aus diz habitans secourir en leur neccessité, en faveur et contemplacion de nostre dit cousin, qui de ce nous a fait humblement requerir, à iceulx habitans de l’isle de Noirmoustier avons octroié et octroyons de grace especial, par ces presentes, que doresenavant ilz soient et demeurent frans, quictez et exemps de contribuer aux tailles, aides et subcides imposées et à imposer en nostre royaulme pour le fait de la guerre, ainsi comme en sont francs, quictes et exemps les habitans des dictes autres isles, et que les dictes aides n’aient aucun cours en icelle isle de Noirmoustier ne que elles ont eu ès isles dessus dictes. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx les generaulx conseilliers sur le fait et gouvernement de toutes noz finances, au gouverneur de la Rochelle et aux esleuz et commis et receveurs sur le fait des diz aides et subcides ou pays de Poictou et ès dioceses de Poictiers et de Xantonge, et à tous noz autres justiciers et officiers ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à luy appartiendra, que les diz habitans et chacun d’eulx facent, seuffrent et laissent joïr et user plainement et paisiblement à tousjours de noz presens grace, exempcion et afranchissement, et contre la teneur d’iceulx ne les molestent, travaillent ou empeschent, ne facent ou seuffrent molester, travailler ne empescher en aucune maniere, mais tout ce qui seroit fait au contraire mettent et ramenent, ou facent mettre et ramener sans delay au premier estat et deu. En tesmoing de ce, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Donné à Poictiers, le dixiesme jour de may l’an de grace mil cccc. trente ung, et de nostre regne le ixme

Deux copies de cette confirmation, y compris les lettres du 25 octobre 1392, se trouvent sur les registres du Trésor des chartes ; car elle est insérée dans les vidimus de Louis XI (le Plessis-lès-Tours, mars 1479 n.s.) et de Charles VIII (Gien-sur-Loire, décembre 1484). Tous ces actes sont publiés dans le recueil des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XVIII, p. 459.

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Par le roy, Christofle de Harecourt

Christophe d’Harcourt, souverain maître et réformateur des eaux et forêts de France. (Ci-dessus, p. 27.)

, les seigneurs de Gaucourt

Raoul VI sire de Gaucourt, premier chambellan du roi et grand maître de France, avait été sénéchal de Poitou de décembre 1427 à juin 1429. (Voir notre vol. précédent, p. xxix, et 285, note.)

et de Mortemer

Jean de Rochechouart, sr de Mortemart. (Cf. ci-dessus, p. 24, note.)

, et maistre Jehan Rabateau

Jean Rabateau, né à Fontenay-le-Comte vers 1370 ou 1375, d’abord procureur, puis avocat en Parlement, avocat général près cette cour à Poitiers, membre du conseil privé, président lai de la Chambre des comptes de Bourges, et enfin président à mortier au Parlement, mort en 1451. Nous ne saurions mieux faire que de renvoyer, pour la biographie de ce célèbre Poitevin, à l’intéressant ouvrage récemment publié par M. Henri Daniel-Lacombe, sous le titre : L’hôte de Jeanne d’Arc à Poitiers, maître Jean Rabateau, président au Parlement de Paris (Extrait de la Revue du Bas-Poitou), Paris, Niort, in-8° de 192 pages. Un dépouillement attentif des registres du Parlement nous a fait connaître quelques traits inédits de la vie de Rabateau, échappés aux recherches de son consciencieux biographe. Peut-être aurons-nous occasion de les présenter dans un autre endroit de notre publication.

, presens. — Signé Cotereau.

MXXX Mai 1431

Lettres permettant à Georges de La Trémoïlle d’établir un péage sur la Loire, pour ses château et châtellenie de Rochefort, avec le consentement des marchands fréquentant ladite rivière. « A nostre chier et feal cousin, conseiller et grant chambellan, Georges, seigneur de la Trimoïlle, de Suly et de Craon, chevalier,… avons octroyé et octroyons par ces presentes qu’il puisse mettre sus à son chastel de Rochefort, assis sur la riviere de Loyre, par forme de trebut et peage sur chascune pipe de vin menée en devalant et sur chascun muy de sel, mesure nantoise, mené en montant par la dicte riviere de Loyre, à l’endroit dudit chastel de Rochefort, et aussi par terre en toute sa chastellenie du dit Rochefort, ès fins et mettes d’icelle, la somme de quinze deniers tournois, et icelui trebut et peage faire lever doresenavant par ses gens et commis en l’isle de Taneré, en laquele d’ancienneté on a acoustumé de lever le peage ancien de la dicte chastellenie de Rochefort

Et cependant le 15 mars précédent, par lettres données à Saumur, Charles VII avait déclaré abolis et supprimés les nouveaux péages établis sur la Loire (reg. X1a 8604, fol. 105 v°, publiées dans les Ordonnances des rois de France, t. XIV, p. 7, note).

… Donné à Poictiers, ou mois de may l’an de grace mil quatre cens trente et ung, et de nostre regne le ixe. — Ainsi signé : Par le roy en son conseil, ou quel vous, l’evesque de Sées

Robert de Rouvres, évêque de Séez de 1422 au 4 mars 1433.

, Christofle de Harecourt

Ci-dessus, p. 27, note 2.

, les sires de Gaucourt

Raoul VI de Gaucourt. (Cf. le vol. précédent, p. 285, note.)

, de Mareuth

Geoffroy de Mareuil, chevalier, seigneur de Mareuil et de Villebois, fils de Raymond de Mareuil, chevalier, avait vendu à Charles VI la terre de Dompierre en Aunis, au mois de novembre 1408. (Arch. nat., J. 182, n° 126.) Il avait succédé comme sénéchal de Saintonge à Olivier du Châtel, vers 1418, et il exerça cet office pendant plus de vingt ans. Dans un arrêt du 23 juin 1423, il est question d’une expédition qu’il fit en 1420 sur la frontière de Guyenne avec Jean de Torsay, et il est qualifié sénéchal de Saintonge (X1a 9190, fol. 234 v°). On trouve dans des lettres de rémission en faveur de Guinot du Chastenet, qui servait sous les ordres de Geoffroy de Mareuil, des renseignements sur sa participation à la prise des places de Benon et de Marans sur les partisans de Louis d’Amboise, vicomte de Thouars, l’an 1431. (JJ. 178, n° 3, fol. 2.) Un arrêt du 23 décembre 1429, dans un procès qu’il soutint contre Guy Larchevêque, sr de Taillebourg, et Louise d’Anduze, veuve de Jean Larchevêque, sr de Soubise, porte qu’Anne de Mareuil, sa sœur, avait été la première femme du sr de Soubise. (X1a 9192, fol. 168 v°.) Peu de temps après sa mort, le 29 octobre 1441, son fils François de Mareuil fut institué à sa place sénéchal de Saintonge. (Anc. mém. de la Chambre des comptes coté K, fol. 73 v°, Bibl. nat., ms. fr. 21405, p. 104.)

et de Mortemar

Jean de Rochechouart, sr de Mortemart. (Cf. ci-dessus, p. 24, note 2.)

et pluseurs autres estiez. Malliere. »

X1a 8604, fol. 112 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 32

MXXXI 23 novembre 1431

Provisions de l’office de sénéchal de Poitou en faveur de Jean de la Roche, seigneur de Barbezieux.

X1a 8604, fol. 111 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 33-36

Charles, par la grace de Dieu roy de France. A tous ceulx qui ces presentes lettres verront, salut. Savoir faisons que nous, confians à plain des sens, loyaulté, vaillance et bonne diligence que par experience de fait et autrement avons cogneu et savons estre en la personne de nostre amé et feal escuier d’escuirie, Jehan de la Roche, seigneur de Barbesieux, ayans regart aussi et consideracion à l’ostel, noblesse et lignage dont il est et aux très grans et recommendables services qu’il nous a faiz ou fait de noz guerres à l’encontre de noz ennemis et adversaires, et autrement, et mesmes derrenierement oultre la riviere de Seine où il s’est bien et grandement gouverné

Comme il en avait pris l’engagement par les lettres d’abolition qui lui avaient été octroyées le 9 avril précédent (ci-dessus, p. 11). En effet, Jean de la Roche avait conduit sa compagnie de gens d’armes en Champagne, où commandait le sire de Barbazan, avec lequel il avait été en relations antérieurement. Pendant cette campagne, on s’empara de Voisines, de Pont-sur-Seine, d’Érvy, de Saint-Florentin, etc. ; on assiégea ensuite Anglure, dont le siège dura deux mois et qui fut pris, au commencement de juin, après la défaite de seize cents Anglo-bourguignons venus pour dégager la place. (Monstrelet, t. IV, p. 440-441 ; le héraut Berry, édit. Godefroy, p. 383 ; Boutiot, Un chapitre de l’histoire de Troyes, p. 14, 16, 19, 22.) Probablement même Jean de la Roche prit-il part à l’expédition de Barbazan, quand il alla au secours de René d’Anjou, expédition qui se termina par la défaite de Bulgnéville (2 juillet 1431), où fut tué le célèbre capitaine. En tout cas, la présence du sr de Barbezieux est signalée le 13 juillet suivant à Troyes et aux environs, et on disait alors qu’il venait « d’estranges marches pour le service du roi ». Quoiqu’il se présentât comme capitaine soumis à l’autorité royale, sa bande, dit M. Boutiot, n’en jetait pas moins l’effroi parmi les populations. (Histoire de Troyes, in-8°, t. II, p. 538.)

, esperant que de bien en mieulx doye continuer et soy employer en nostre dit service, icelui, pour ces causes et autres à ce nous mouvans, avons, de nostre certaine science et par l’advis de nostre grant conseil, fait, ordonné et establi, faisons, ordonnons et establissons par ces presentes nostre seneschal de nostre païs de Poictou

Jean de La Rochefoucauld succédait en cette qualité à Maurigon ou Amaury d’Estissac, qui avait été reçu au Parlement et avait prêté serment, le 3 juin 1429 (Arch. nat., X1a 9199, fol. 158 v°), et qui depuis fut lieutenant de Charles d’Anjou en Limousin, et plus tard, l’an 1442, sénéchal de Saintonge.

, et lui avons donné et donnons de grace especial icelui office de seneschal, en en deschargant tout autre par ces dictes presentes, pour le avoir, tenir et exercer doresenavant, aux honneurs, prerogatives, franchises, libertés, gaiges, droiz, proufiz, emolumens acoustumez et qui y appartiennent, tant qu’il nous plaira. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx gens de nostre Parlement que, pris et receu le serement acoustumé dudit Jehan de la Roche, icelui mettent et instituent, ou facent mettre et instituer en possession et saisine dudit office de seneschal et d’icelui, ensemble des diz gages, droiz et proufiz dessus diz, le facent, seuffrent et laissent jouir et user plainement et paisiblement, et à lui obeir et entendre, en la maniere acoustumée, de tous ceulx qu’il appartendra ès choses touchans et regardans le dit office. Mandons aussi à nostre amé et feal maistre Regnier de Boulligny

Dans le mandement du 1er juin 1431, cité ci-dessus, p. 2, note, Regnier de Boullegny ou de Bouligny s’intitule « general conseiller sur le fait et gouvernement de toutes les finances tant en Languedoc qu’en Languedoïl ».

, general conseiller sur le fait et gouvernement de noz finances, que les diz gages appartenans à icelui office de seneschal face payer doresenavant, par nostre receveur ordinaire en nostre dit païs de Poictou, au dit Jehan de la Roche, aux termes et en la maniere acoustumez ; et par rapportant ces dictes presentes ou vidimus d’icelles, fait soubz seel royal pour une foiz seulement, avecques quictance sur ce soufisant, tout ce que payé lui en sera voulons et mandons estre alloé ès comptes et rabatu de la recepte du dit receveur par noz amez et feaulx gens de noz comptes, sans contredit aucun. En tesmoin de ce, nous avons fait mettre à ces dictes presentes nostre seel ordonné en l’absence du grant. Donné à Amboise, le xxiiie jour de novembre l’an de grace mil quatre cens trente et ung, et de nostre regne le xme.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil, ou quel les contes de Clermont

Charles Ier de Bourbon, comte de Clermont et de Forez, fils de Jean Ier duc de Bourbon et de Marie de Berry, devint duc de Bourbon à la mort de son père (janvier 1434).

et de Vendosme

Louis de Bourbon, comte de Vendôme et de Chartres, grand chambellan du roi et grand maître de France, deuxième fils de Jean de Bourbon, comte de la Marche, et de Catherine comtesse de Vendôme, mort le 21 décembre 1446. (Le P. Anselme, Hist. général., t. I, p. 322.)

, l’evesque de Sées

Robert de Rouvres. (Cf. ci-dessus, p. 23, note 3).

, les sires de Lebret

Charles II sire d’Albret, dont il sera question dans un autre endroit de ce volume.

, de la Trimoïlle, de Treves

Robert Le Maçon, seigneur de Trèves en Anjou, conseiller de Louis II, duc d’Anjou, chancelier d’Isabeau de Bavière (1414), puis membre du grand conseil de Charles VII, décédé le 28 janvier 1443.

et de Tussé

Baudoin, aliàs Hardoin de Champagne, baron de Tucé, bailli de Touraine et conseiller du roi.

, maistres Jehan Rabateau

Jean Rabateau, alors avocat général au Parlement de Poitiers et membre du conseil privé (voy. ci-dessus, p. 31, note 5).

, Regnier de Bouligny et Maurice Claveurier

Maurice Claveurier, lieutenant général de la sénéchaussée de Poitou. Une notice biographique lui est consacrée quelques pages plus loin.

et plusieurs autres estoient. J. Le Picart.

Et à tergo erat scriptum : Johannes de Ruppe, armiger, dominus de Barbesieux, senescallus Pictavie in albo nominatus, receptus fuit et solitum prestitit juramentum Pictavis, in Parlamento, die xxvii. novembris anno Domini millesimo cccc° xxxi°. Blois

Voici le texte de l’arrêt d’enregistrement de ces provisions : « Du mardi xxvii. jour de novembre mccccxxxi. Veues les lettres du roy octroyées à Jehan de la Roche sur le don de l’office de senechal de Poictou, presentées par ledit de la Roche, à ce qu’il feust receu à faire le serement de seneschal en la court de ceans ; et après que maistre Jehan Viau, comme procureur de Jehan de Comborn, seigneur de Trignac, se y est opposé ; la court a deliberé que ledit de la Roche sera receu audit office et à faire ledit serement, sans prejudice de l’opposicion dudit de Trignac et d’autres qui opposer se vouldront, lectisque dictis litteris palam in audiencia, ledit de la Roche a fait ledit serement ». (X1a 9194, fol. 2 v°.) Jean de Comborn, successeur immédiat de Jean de Torsay, avait été dépossédé de son office six mois après son institution (novembre 1427), sans autre motif que son intimité avec le connétable de Richemont que Georges de La Trémoïlle venait de supplanter dans la faveur du roi. Il avait été remplacé par Raoul de Gaucourt, auquel succéda Amaury d’Estissac, puis Jean de La Rochefoucauld. Le sr de Trignac, se considérant comme lésé dans ses droits, ne pouvait que protester, et il ne manquait pas de le faire à chaque nomination d’un nouveau sénéchal. (Cf. l’Introduction du précédent volume, p. xxviii.)

.

Collacio facta est cum originali.

MXXXII 16 mars 1432

Lettres portant ratification de la création d’une Université à Poitiers, et lui octroyant les mêmes privilèges et immunités qu’aux autres Universités du royaume

L’original de ces lettres est aujourd’hui en déficit ; il en existe plusieurs copies aux Archives de la ville de Poitiers, et aux Archives nationales, série K, 184, n° 20, et dans des confirmations postérieures données par les rois de France, enregistrées au Trésor des chartes et au Parlement. Nous les publions d’après le registre des Ordonnances du Parlement de Poitiers et d’après un vidimus de Louis XI, en date de Toulouse, mai 1463, transcrit sur le registre du Trésor des chartes. Le texte d’ailleurs en a été imprimé plusieurs fois, particulièrement dans les ouvrages suivants : E. du Boulay, Histoire de l’Université, in-fol., t. V, p. 484 ; Filleau, Traité sur l’Université de Poitiers, à la fin des Annales d’Aquitaine de Bouchet, édit. de 1643 ; Recueil des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XIII, p. 179 ; Thibaudeau, Histoire du Poitou, in-12, t. III, p. 361 ; et récemment par Marcel Fournier, Les statuts et privilèges des Universités françaises, Paris, 1892, in-4°, t. III, p. 285. M. Fournier a publié aussi les anciens statuts de la Faculté de droit, du 11 mai 1438, que l’on croyait perdus et dont le texte a été retrouvé dans le ms. lat. 7212A de la bibliothèque nationale. (Bulletin de la Faculté des lettres de Poitiers, vol. de 1892.)

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AN JJ. 199, n° 252, fol. 146 v° ; X1a 8604, fol. 109 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 36-44

Karolus, Dei gratia Francorum rex. Ad perpetuam rei memoriam. Quantum ad Ecclesie militantis illustracionem et profectum, fidei katholice robur ac divini cultus augmentum, quantum eciam ad justicie et pacis, cujuslibetque policie temporalis conservacionem et stabilimentum conferant scientia et littere, nemo est intelligens qui ignoret, et satis seipsam edocet magistra rerum experientia ; que etenim regna legimus, quasve regiones aut provincias, fidei firmitate, religionis perseverencia salubritateque doctrine floruisse, ubi errores, ubi scismata, ubi scandala profligatos et extinctos esse, nisi ubi sciencie lumen prefulsit, valueruntque plurimum et viguerunt studia litterarum ? Hinc gloriosi retro principes, nostri precipuè incliti progenitores, summa semper ope nisi sunt totaque soli[ci]tudine curaverunt studia hujusmodi in quamplurima valuerunt suarum dictionum loca advocare et excolere, quo inibi preciosum sciencie germen ubertim et fecunde valeret in posteros, quasi in quosdam multiplicatos palmites excrescere et protendi. Hoc et ipso sepius animo permoti sumus, et ab eo potissimum tempore quo, causantibus guerrarum variorumque turbinum incursibus, quibus hoc regnum nostrum concuti divina clemencia permisit, studia generalia ejusdem regni, olim virencia ac florida, jam marcere ac desolari incipere eorumque supposita in varias dispersiones dari vidimus et comperimus.

Statuimus igitur extunc et decrevimus in civitate nostra regia Pictavensi, loco quidem insigni valde, ac per nos tanquam ad hoc inter cetera totius nostre dictionis cunctis commoditatibus apto et ydoneo, preelecto, Studium generale omnium scientiarum et facultatum licitarum erigi et institui, ibique plurimos doctorum et magistrorum, qui jam ab aliis studiis, causantibus premissis, secesserant, ceterosque universos scientie acquirende multiplicandeque gracia convenire volentes, recolligere et reunire. Quo sanctissimo patri nostro Eugenio pape quarto

Gabriel Condolmero, vénitien, d’une famille roturière, succéda au pape Martin V, en 1431, sous le nom d’Eugène IV, et occupa le trône pontifical jusqu’en 1447, année de sa mort.

, nunc Ecclesie presidenti, nostra ex parte exposito, ipse sanctissimus pater tam salubre nostrum collaudans propositum, eidemque condescendens, in dicta nostra civitate Pictavensi Studium generale omnium scientiarum et facultatum licitarum, ad instar studii Tholosani

L’Université de Toulouse, la plus ancienne après celle de Paris, fut fondée en 1229.

, erexit, statuit et ordinavit, perpetuis futuris temporibus, Domino conservante, duraturum, ipsumque studium ac omnes et singulos doctores et magistros inibi legentes universaque ejus supposita futura immunitatibus, previlegiis et indulgenciis, graduumque honoribus et insigniis quibuscunque, doctoribus et magistris legentibus ac scolaribus in universitate dicti studii Tholosani existentibus per Sedem apostolicam et aliàs qualitercunque concessis, et quibus uti consueverunt, munivit, dotavit et decoravit, prout in litteris apostolicis ipsius summi pontificis, que et nobis presentate et per nos videri et visitari ordinate extiterunt, protencius explicaciusque continetur

L’original de la bulle du pape Eugène IV, portant érection de l’Université de Poitiers, datée du iv. des calendes de juin (29 mai) 1431, est conservé dans les archives de la ville de Poitiers (P. carton 56, n° 1402). Elle a été publiée par Du Boulay, Hist. de l’Université, t. V, p. 482, dans le Traité de l’Université de Poitiers, cité dans la note de la page, précédente, dans l’Histoire du Poitou de Thibaudeau, t. III, p. 357, et dans les Statuts et privilèges des Universités françaises, in-4°, 1892, t. III, p. 283.

.

Nos igitur dictam ipsius sanctissimi patris nostri disposicionem, voluntatem et ordinacionem, sic nostro proposito nostroque desiderio conformem, ad Dei et Ecclesie laudem et gloriam, fidei ac doctrine exaltacionem, totiusque hujus nostri regni decus et honorem clare redundare cognoscentes, ipsam grato animo excepimus et acceptavimus, ac eam, in quantum melius valuimus, valemus et possumus, de nostra certa sciencia, plenaria potestate et auctoritate regia, juxta plenarium prefatarum ipsius sanctissimi patris nostri litterarum effectum, laudavimus, ratificavimus et approbavimus, laudamusque, ratificamus et approbamus per presentes, ipsum Studium generale sic in dicta civitate nostra Pictavensi, auctoritate apostolica erectum, institutum et ordinatum, nostra eciam ex parte nostraque auctoritate, in quantum in nobis est, firmando, instituendo et ordinando. Quod ut uberius succrescere solidiusque subniti, subsistere et perdurare valeat, cunctique ibi ad haurienda scientie et doctrine fluenta eo libentius conveniant, quo se majoribus favoribus potioribusque gratiis senserunt prosequutos, ipsum Studium Pictavense ac universos et singulos futuros doctores et magistros, suppositaque et membra ejusdem sub nostro nomine nostraque speciali protectione, gardia et salvagardia per has easdem presentes, recipimus et ponimus, ac ipsis eorumque singulis omnia et singula privilegia, prerogativas, exempciones, immunitates ac jura, per nos ac predecessores nostros Francie reges et principes quoscunque Parisiensi, prefato Tholosano, necnon Aurelianensi, Andegavensi et Montispessulano studiis et universitatibus hactenus quomodolibet data, indulta, concessa et confirmata, damus, concedimus et indulgemus, perpetuo duratura, ipsisque prefatum Studium Pictavense communimus, dotamus et decoramus, ac insuper eidem Studio ejusque prefatis futuris doctoribus ac magistris, suppositisque et membris, pro dictorum suorum privilegiorum, prerogativarum, exempcionum, immunitatum ac jurium tuicione, conservatione et defensione, dilectum ac fidelem consiliarium nostrum magistrum Mauricium Claveurier

Plusieurs fois déjà, dans le cours de notre précédent volume, s’est rencontré le nom de ce personnage, qui, pendant trente-cinq ans environ qu’il exerça les hautes fonctions de lieutenant général du sénéchal de Poitou, jouit d’une grande autorité dans les conseils de Charles VII et dans la ville de Poitiers, dont il fut élu maire à vingt-deux reprises différentes et durant plusieurs années consécutives. La nouvelle édition du Dictionnaire des familles du Poitou (t. II, p. 512) fournit d’abondants détails biographiques sur Maurice Claveurier et ses enfants. Les registres du Parlement en contiennent beaucoup d’autres. Nous nous en tiendrons à une partie de ces derniers, et encore nous ne les mentionnerons que sommairement, pour éviter de donner à cette note un développement démesuré. Un accord conclu, le 15 février 1419 n.s., par Maurice Claveurier avec Pierre de La Fontaine, hôtelier demeurant à Poitiers, nous apprend qu’à cette date sa première femme, Guillemette Gautier, était déjà décédée depuis quelque temps. Cette dernière et Perrot Gautier, son frère, comme héritiers d’Étienne Guichart, réclamaient à La Fontaine une rente de 8 livres tournois, et un procès avait été engagé à ce sujet devant « Hugues Girault, lors lieutenant du seneschal de Poitou ». L’hôtelier affirmant qu’il avait racheté cette rente, M. Claveurier en son nom et au nom de ses enfants déclara se désister de toute poursuite. (Arch. nat., X1c 117.) Lors de l’entrée de Charles VII à Poitiers, Pierre Frotier, premier écuyer de son écurie, ayant adressé des paroles outrageantes à Claveurier, qui faisait partie du cortège au double titre de maire et de lieutenant du sénéchal, celui-ci ne voulut point qu’une atteinte fût portée impunément à sa dignité et à son honneur, et, sans crainte de s’attaquer à un favori qui disposait de tout auprès du roi, il porta plainte contre lui au Parlement. Les plaidoiries de cette curieuse affaire eurent lieu le 17 août 1424 ; malgré leur intérêt, nous devons nous contenter de renvoyer au registre où elles sont transcrites (X1a 9197, fol. 338). Sur un autre registre, à la date du 22 août 1430, se trouve le serment prêté par Maurice Claveurier, élu de nouveau maire, et par les vingt échevins et jurés de la ville de Poitiers, parmi les noms desquels on lit celui de Guillaume, son fils aîné, de garder « bien et loyaument le roy, son honneur, sa vie, ses membres et ses droiz » (X1a 9199, fol. 322). Aux 15 et 25 février, 16 et 20 mars 1434 n.s., on trouve des renseignements sur une affaire judiciaire engagée par notre personnage contre Étienne de Vignoles, l’illustre La Hire. Une somme de 1500 livres avait été mise à la disposition de celui-ci pour une expédition dont le roi l’avait chargé, et elle avait été avancée en partie par le lieutenant du sénéchal qui devait être remboursé sur les revenus de Montmorillon. On sait que cette ville et les droits seigneuriaux en dépendant avaient été depuis engagés par Charles VII à La Hire. Claveurier n’ayant pas encore été désintéressé, assigna ce dernier en payement de la somme prêtée, mais ne put en obtenir satisfaction (X1a 9194, fol. 62 v°, 63 v° ; X1a 9200, fol. 204, 209). Un arrêt du 22 juin 1434, rendu dans un procès entre le lieutenant du sénéchal et Jamet de Brillac, au sujet de réparations à des maisons sises à Poitiers, fournit des détails intéressants sur d’importantes tanneries que le premier avait installées dans cette ville (X1a 9194, fol. 71 v°). Il sera question ailleurs des poursuites criminelles exercées par lui contre le bâtard de Chanac et le seigneur de Château-Larcher, qui l’avaient menacé de représailles, s’il ne relâchait pas un prisonnier. Une sentence donnée par Maurice Claveurier, en qualité de conservateur des privilèges de l’Université de Poitiers, au profit de Jean Barton, curé de Notre-Dame de Lusignan, contre Jean Grabot, aumônier de la Maison-Dieu de Loudun, et portée en appel au Parlement, fut confirmée le 7 mai 1435. (X1a 9193, fol. 84.)

Les deux fils du premier lit de Maurice Claveurier, Guillaume et Pierre, furent pour leur père une cause de graves soucis et de sérieux embarras. Meurtriers d’un nommé Herbert Bernard, ils obtinrent des lettres de rémission, dont le frère et le père de la victime combattirent l’entérinement. Maurice, mis en cause, dut, pour étouffer complètement l’affaire, s’engager à payer une forte composition pécuniaire (25 septembre 1432). Les parties néanmoins demeurèrent en état d’hostilité, au point que de nouvelles violences étaient à redouter. La cour fit comparaître Guillaume Claveurier et Jean Bernard, le jeune, et le 19 juin 1433, en présence de leurs pères, Maurice Claveurier et Jean Bernard, l’aîné, aussi mandés, elle leur fit défense « de procéder l’un contre l’autre non seulement par voie de fait, mais par paroles injurieuses, défis, dérisions, espionnages, etc. » (X2a 21, fol. 183 v°, 184 r° et v°, 185, 187 v°, 195, et à la date du 19 juin 1433.) Le 9 juillet 1435, on retrouve Guillaume prisonnier à la conciergerie du Palais et se faisant réclamer par l’évêque de Poitiers, comme prétendu clerc (X1a 9194, fol. 105 v°). De son coté, Pierre fut mis en état d’arrestation comme coupable d’autres actes de violence exercés sur la personne de Guillemette Petit ; élargi provisoirement, le 5 janvier 1433 n.s., les procédures criminelles continuèrent contre lui, les 12 et 20 janvier (X2a 21, fol. 199 v°, 200 et 201). Mis de nouveau en prison, deux ans plus tard, il fut revendiqué aussi comme clerc, quoique marié, par la justice de l’évêque, le 2 juillet 1435, requête dans laquelle se trouve un curieux détail de costume ; le même jour, après midi, il obtint d’être élargi. (Même registre, à la date.) Maurice Claveurier lui-même ne se distinguait pas précisément par la douceur de son caractère et, quoique premier magistrat de son pays, il n’avait pas au plus haut degré le respect des droits et de la propriété d’autrui, témoin une commission du roi, décernée à Poitiers, le 19 avril 1438, sur la plainte de l’abbesse de Sainte-Croix de Poitiers, pour l’assigner au Parlement. Accompagné de ses enfants et de plusieurs autres personnes, il était allé pêcher au Pré-l’Abbesse et y avait pris une grande quantité de poissons ; il avait en outre répondu par des menaces et des injures aux avertissements qui lui furent donnés par les gens de l’abbaye. (F2 350, p. 31, inventaire des titres de Sainte-Croix de Poitiers.) Il désintéressa sans doute la partie lésée, car on ne retrouve plus trace de cette affaire. Une autre preuve du naturel violent de Maurice Claveurier nous est fournie par les actes d’un long procès criminel que lui intenta Jean Colas, conseiller au Parlement de Paris. On sait qu’il avait épousé en secondes noces, vers 1420, Jeanne Colas, sœur de ce dernier, veuve elle-même de Nicolas Roigne, qui avait été lui aussi lieutenant général du sénéchal de Poitou. Étant décédée sans enfants, sa succession devait revenir à sa famille. Maurice Claveurier ayant refusé de rendre ses comptes, s’attira les réclamations des héritiers naturels de sa seconde femme. Il fit traîner les choses en longueur, puis, pressé plus vivement, il se rendit coupable d’abus de pouvoir et d’excès de différente nature, dont Jean Colas porta plainte. Les premiers actes de l’action criminelle datent du 3 avril 1447. La procédure était lente pour tout le monde à cette époque ; entre deux magistrats, dont l’un avait intérêt à créer des incidents, elle menaçait de s’éterniser. Elle durait encore quand la mort surprit l’inculpé. Son décès survint entre le 23 décembre 1454 et le 6 juillet 1455. (X2a 23, fol. 329 v°, 338 r° et v°, 339, 379 v° ; X2a 26, fol. 153 ; X2a 27, fol. 6 v° et 55 v°.) Maurice Claveurier devait avoir environ quatre-vingts ans ; jusqu’au bout il est qualifié de lieutenant du sénéchal de Poitou. Son testament, daté du 4 octobre 1451, est conservé dans le fonds du chapitre Notre-Dame-la-Grande de Poitiers. (Arch. de la Vienne, G. 1087.) Deux des fils qu’il eut de sa troisième femme, Louise Eschalart, tenaient de leur père une humeur peu pacifique. A la fin de l’année 1456, Michel et Maurice Claveurier étaient poursuivis au Parlement avec André et Jean de Conzay, frères, et plusieurs autres, pour avoir pénétré de nuit par escalade dans l’hôtel de Pierre de Mourry, sous-doyen de Saint-Hilaire-le-Grand de Poitiers. (Arch. nat., X2a 28, aux dates des 15, 29 novembre, 2 et 9 décembre 1456, et 5 décembre 1458.) On peut citer, pour finir, quelques aveux rendus par Maurice Claveurier au sr de Parthenay (R1* 190, fol. 250 et 268) et par son plus jeune fils Jean au roi, pour l’hébergement de la Payre-en-Jaunay et l’hôtel des Moulins. (P. 1145, fol. 157, 158, 160.)

, locumtenentem generalem senescalli nostri Pictavie, in dicto officio per nos et auctortate nostra institutum et ordinatum, ac pronunc sepefate ville nostre Pictavensis majorem, et successive locum tenentes senescallorum predicte senescallie Pictavie, qui pro tempore erunt, judices et conservatores sub immediato ressorto curie nostre supreme Parlamenti damus, committimus, deputamus et delegamus, cum plenaria in omnibus et per omnia potestate, auctoritate et juridicione respectu premissorum suarumque omnium circonstanciarum et dependenciarum, quas habent habereque consueverunt alii conservatores prenominatis studiis et universitatibus, auctoritate regia dati et deputati. Quocirca dilectis et fidelibus consiliariis nostris, presens tenentibus et qui futura nostra tenebunt parlamenta, universisque senescallis, baillivis, prepositis ceterisque justiciariis, officiariis et subditis nostris ubilibet constitutis, ac eorum locatenentibus, damus tenore presentium in mandatis, quatinus presentem nostram ordinacionem, disposicionem et voluntatem in suis auditoriis aliisque locis suarum juridictionum talia consuetis publicari et registrari, omnesque prefatos doctores et magistros suppositaque et membra dicti Studii Pictavensis, qui pro tempore erunt, dictis privilegiis, prerogativis, exempcionibus, immunitatibus ac juribus universis uti et gaudere plenarie et pacifice, prout ad unumquemque ipsorum pertinuerit, faciant et permittant, dictoque magistro Mauricio, locumtenenti, ac suis in dicto officio locumtenencie successoribus, quoad ea que presentem eorum commissionem dictorumque privilegiorum ipsius Studii Pictavensis conservacionem suasque circunstancias et deppendencias concernent, obediant ac obediri faciant sine difficultate quacunque. Quoniam sic fieri volumus et jubemus. Opposicionibus, reclamationibus ac appellationibus quibus presentium effectus quomodolibet impediri posset aut differri, litterisque surrepticiis impetratis aut impetrandis non obstantibus quibuscunque. Et quia presentibus forsan in pluribus et diversis locis opus erit, volumus quod transcripto ipsarum sub sigillo regio facto fides plenaria in judicio et extra adhibeatur, tanquam presenti originali. Que ut firma et inconcussa perpetuo subsistant, sigillum nostrum presentibus litteris jussimus apponi. Datum Caynone, die xvia mensis marcii anno Domini millesimo quadringentesimo tricesimo primo, et regni nostri decimo.

Sic signatum : Per regem, domino de la Tremoïlle, Christoforo de Harcourt

Christophe d’Harcourt (voy. ci-dessus, p. 27, note 2).

, Ludovico des Quars

A quelle famille se rattachait ce personnage, dont le nom figure ici parmi les membres du conseil royal, et quelles fonctions remplit-il avant d’arriver à ce poste élevé ? On pourrait supposer qu’il appartenait à la maison de Pérusse d’Escars ou des Cars ; cependant il ne figure pas sur les généalogies de cette famille bien connue. Un « messire Loys des Quars », le même très vraisemblablement, occupait la forteresse d’Airvault pendant le temps de la Praguerie et tenait le parti des princes rebelles. Les gens de guerre de sa compagnie se rendirent alors coupables de divers excès, et entre autres de la détrousse d’un sergent du sr de Parthenay, chargé de recouvrer des amendes au bailliage d’Autin dans la Gâtine. (Acte du 20 avril 1443, Arch. nat., R1 192.)

et aliis presentibus. J. Gilier.

Et à tergo erat scriptum : Lecta et publicata Pictavis, in Parlamento regio, et ibidem registrate viii. die aprilis anno Domini millesimo quadringentesimo tricesimo primo ante Pascha. — Blois.

MXXXIII 7 octobre 1433

Ratification par Charles VII de l’acte par lequel Jean Harpedenne, sr de Belleville, règle sa succession au profit de Jean de Belleville, sr de Mirambeau, son fils aîné, marié avec Marguerite de Valois, fille naturelle du feu roi Charles VI.

AN JJ. 198, n° 359, fol. 315 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 44-52

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir veu les lettres desquelles la teneur s’ensuit :

Saichent tous que en la court du seel à present estably ès contraictz en partie de la seneschaucée de Poictou pour le roy nostre sire, en lieu de cellui qui jadis fut estably à la Roche sur Oyon pour icellui seigneur, en droit present et personnellement estably noble et puissant seigneur messire Jehan Harpedenne, chevalier, seigneur de Belleville et de Montagu

Dans nos trois précédents volumes, plusieurs notes fort développées ont été consacrées à Jean II Harpedenne, seigneur de Belleville. (Cf. t. V, p. 205-206 ; t. VI, p. 290 ; t. VII, p. 106 et 187.) Nous n’y reviendrons pas ici. On verra plus loin que la date de son décès peut être fixée au 8 ou 9 juillet 1434, et ailleurs, que Jeanne, sa fille aînée, épousa Le Galois de Villiers.

, soubzmettant soy, ses hoirs, avec tous et chacuns ses biens meubles et heritaiges quelxconques à la juridicion, cohercion et seigneurie de la dicte court quant ès choses qui s’ensuivent ; lequel de sa certaine science et vray propos, sans inducion et machinacion aucune, mais pour ce que très bien lui a pleu et plaist, a voulu, consenty, passé, promis et accordé, veult et consent, passe, promect et accorde que, comme entre le roy, nostre sire, d’une part, et ledit seigneur de Belleville et de Montaigu, et messire Jehan de Belleville

Jean III Harpedenne, ou plutôt Jean de Belleville, car il n’est connu que sous cette dernière appellation et renonça à son nom patronymique (ainsi du reste que son frère, ses sœurs et leur postérité), eut, aussitôt la mort de son père, un procès à soutenir, au Parlement siégeant à Poitiers, contre Jovine de Mussidan, sa mère, au sujet de l’assiette du douaire de celle-ci. Nous avons dit un mot de cette affaire et des prétentions de la veuve de Jean Harpedenne (vol. précédent, p. 189 note). Outre les citations des registres du Parlement faites en cet endroit, nous signalerons encore les intéressantes plaidoiries qui furent prononcées au nom des parties les 20 juin et 18 juillet 1435, par lesquelles on apprend que le mariage de Jean II Harpedenne avait été célébré à Blaye et le contrat passé à Bordeaux, pendant les trêves entre la France et l’Angleterre, qu’il en était de même pour le sr de Barbezieux, père de Jean de la Roche, sénéchal de Poitou (on verra ailleurs que Rosine de Montaut, femme de Guy de La Rochefoucauld, sr de Barbezieux, était sans doute la sœur de Jovine de Mussidan), et que ces circonstances ne pouvaient empêcher ces actes d’être valables, comme le prétendait l’avocat de Jean de Belleville. (Arch. nat., X1a 9200, fol. 359, 370 v°.) Cette affaire se termina par un accord amiable entre le sr de Belleville et sa mère, le 24 novembre ou le 2 décembre de cette même année ; le texte n’en a pas été conservé, mais la mention s’en trouve dans un inventaire officiel des accords enregistrés au Parlement de Poitiers. (X1a 8604, fol. 21.) Ce procès ne fut pas le seul que Jean de Belleville eut à soutenir au sujet de la succession de son père. L’établissement de sa sœur Jeanne et le partage avec son frère Olivier donnèrent lieu à des contestations dont il sera parlé en d’autres endroits du présent volume.

Des lettres d’abolition accordées en août 1446 à Jean de Longpré, dit Heurtebise, arbalétrier de Montaigu, publiées ci-dessous, sont remplies de renseignements curieux sur les faits et gestes de Jean de Belleville. Dans un différend entre Méry de Montalembert, sr de Granzay, et l’abbaye des Châtelliers, touchant la possession d’une maison à Nuaillé, le premier se plaint de n’avoir pu faire entendre ses témoins, parce que Nuaillé appartenant au sr de Belleville qui « dès longtemps a grant haine et malveillance » contre lui, comme il est notoire, celui-ci par ses menaces l’a empêché de se rendre dans cette ville et a fait défense, sous peine de prison, à ses sujets d’aller témoigner en sa faveur. (Arch. nat. X1a 9201, fol. 46.) En effet, on trouve que Méry de Montalembert et sa mère Jeanne Hélies (alors remariée à Hugues du Puy-du-Fou) poursuivaient, dès le 4 mai 1430, le sr de Belleville et son fils aîné pour graves excès et attentats non spécifiés, l’affaire n’ayant pas été plaidée au fond, parce que les défendeurs firent défaut ce jour-là et le 19 juin suivant. (X2a 18, fol. 201, et X2a 21, fol. 135 v°.) Après vingt-sept ans d’interruption, en janvier 1457 n.s., Pierre de Montalembert, huissier d’armes du roi, fils de Méry, reprit ce procès et obtint des lettres de relèvement. Jean de Belleville demanda d’abord deux délais, puis fit attaquer par son procureur ces lettres comme inciviles, le 7 avril. Le procureur du roi soutint les droits du demandeur, prétendit que l’interruption était couverte par les appointements subséquents et déclara que si Belleville refusait de se défendre, il devait être reconnu coupable. (X2a 28, aux dates des 8 et 15 février, 7 avril 1457.) On ne sait quelle conclusion reçut cette poursuite. Le 28 février 1447 n.s., fut plaidée au Parlement une autre affaire criminelle entre Jean de Belleville et Nicolas Queyré, son sénéchal à Montaigu. Celui-ci se dit noble, clerc, licencié ès lois, ayant longtemps pratiqué en Poitou, marié à Montaigu, où il a toujours exercé son office au profit du seigneur et des habitants. Souvent il avait fait des prêts d’argent audit sr de Belleville. Celui-ci devant aller à Bourges pour un procès qu’il y avait contre l’évêque de Luçon, à cause de quatre bonnes cures qu’il désirait faire unir à sa chapelle de Montaigu, il voulut encore emprunter à son sénéchal une somme importante. Queyré refusa et fut emprisonné, puis relâché à la requête de sa femme. Mais Belleville ayant perdu son procès, il accusa le sénéchal d’en être cause, sous prétexte que son frère était vicaire de l’évêque de Luçon, et jura qu’il se vengerait et lui ferait payer tous les dépens, qu’il estimait à 500 écus. Le 9 janvier 1446 n.s., il fit équiper et mettre en embuscade à la porte Jaillet de Montaigu deux de ses serviteurs, les nommés Fredaine et Hurtebise, « qui sont gens bannis », et au moment où Nicolas entrait en ville, ceux-ci se saisirent de lui et le menèrent en prison. Les amis de Queyré requirent Jean Macaire, alors sénéchal de Belleville, de faire mettre son collègue en liberté, puisqu’il n’y avait point d’information contre lui. Ce dernier n’osa rien faire sans en référer à Jean de Belleville, qui déclara que son prisonnier ne serait pas délivré avant d’avoir payé les 500 écus. Jean Chèvredent, procureur du roi en Poitou, fut envoyé à Montaigu pour exécuter un mandement du sénéchal de Poitou, ordonnant de lui remettre le prisonnier ; Belleville fit fermer les portes de la ville et dit « qu’il failloit gecter en la riviere telz ribaulx qui apportoient telles lettres ». Ayant exposé ces faits à la cour, l’avocat de Nicolas Queyré conclut par une requête de renvoi devant le sénéchal de Poitou. De son côté, Jean de Belleville répliqua que Queyré avait commis, dans l’exercice de sa charge de sénéchal, quantité de prévarications et d’abus de pouvoir, motivant suffisamment son emprisonnement. Nous ne suivrons pas l’avocat dans l’exposé détaillé qu’il fit de ces délits. Le procureur du roi au Parlement ajouta que le sr de Belleville avait nommé Queyré son sénéchal à Montaigu moyennant une grande somme d’argent, et que ce dernier tombait sous le coup de la loi contre le péculat. A la suite de ces plaidoiries, la cour décida qu’elle examinerait les informations et jugerait s’il y avait lieu de renvoyer la cause au sénéchal de Poitou (X2a 24, aux 27 et 28 février 1447 n.s.), ce qui fut fait sans doute, car on ne retrouve plus trace de cette affaire au Parlement.

On retrouve Jean de Belleville dans deux autres circonstances. Le duc d’Anjou était demandeur contre lui en cas d’excès, le 29 octobre 1451. (Mandement à Élie Dalée, conseiller au Parlement, de faire une enquête sur les faits incriminés, X2a 26, fol. 142.) Enfin, le 3 décembre 1455, la cour rendit un arrêt de renvoi au sénéchal de Poitou, à son siège de Fontenay-le-Comte, d’un autre procès criminel intenté par le sr de Belleville à Jean, Nicolas et Denis Peyraudeau. (X2a 27, fol. 121 v°.) Deux quittances de 400 livres chacune de Mathieu Beauvarlet, secrétaire du roi, commis à la recette générale des finances, l’une du 18 mai 1455, l’autre du 25 janvier 1458 n.s., nous apprennent que Charles VII avait accordé à Jean de Belleville une pension annuelle de 1000 livres, pendant dix ans, à partir d’octobre 1444. (Bibl. nat., Pièces originales, vol. 279, p. 7 et 8.) Ce seigneur ayant fondé l’église collégiale et chapitre de Saint-Maurice de Montaigu, lui légua par son testament la terre et seigneurie de Vendrines. Louis XI en confirma la possession à cet établissement, par lettres de 1475, contrairement aux prétentions de Marguerite de Culant, qui, à la mort de son mari, Louis de Belleville, fils aîné de Jean, s’était emparé, au nom de ses enfants mineurs, de ladite terre et du château de Vendrines. (Id., vol. 279, n° 17.) Jean de Belleville eut de son mariage avec Marguerite de Valois quatre fils : Louis, sr de Belleville et de Montaigu, Gilles, sr de Cosnac-sur-Gironde, Jacques et Antoine, et une fille Marie, qui fut femme de Bertrand Larchevêque, seigneur de Soubise. Il épousa en secondes noces, sans en avoir de postérité, Jeanne, la plus jeune fille de Jean de Blois, dit de Bretagne, comte de Penthièvre, et de Marguerite de Clisson. Jean de Belleville vivait encore le 12 juin 1462, date d’une confirmation en sa faveur des lettres publiées ici, que lui accorda Louis XI.

, chevalier, seigneur de Mirambeau, filz aisné dudit seigneur de Belleville, souffisanment auctorisé, par tant que mestier estoit, dudit seigneur son pere, d’autre part, eust esté par le dict traicté promis et accordé entre les dictes parties, entre autres choses, que en mariage faisant, et icellui accomplissant, du dit seigneur de Mirambeau et de dame Marguerite de Valois

Marguerite de Valois, fille naturelle de Charles VI et d’Odette de Champdivers, la Petite reine, fut l’objet de la bienveillance particulière du roi, son frère. Il la fit venir à la cour, à Mehun-sur-Yèvre, en 1425, lui accorda des lettres de légitimation datées de Montrichard au mois de janvier 1428 n.s. (le texte de ces lettres citées par le P. Anselme, t. I, p. 115, n’a pas été retrouvé) et en la mariant à son chambellan, lui fit cadeau de 20.000 moutons d’or, dont la moitié, remise à Jean Harpedenne, le père, devait être employée en achat de terres et héritages au nom de sa bru. Ce don et cette destination sont rappelés dans une plaidoirie faite au Parlement de Poitiers, le 26 août 1435, pour Jean de Belleville contre Olivier, son frère. (Arch. nat., X1a 9200, fol. 380 v°.) On a voulu voir dans l’acte que nous publions le contrat de mariage de Jean et de Marguerite de Valois (de Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. II, p. 566 n.) ; mais c’est plutôt un règlement de la succession de Belleville fait en dérogation de la coutume de Poitou, au profit, il est vrai, des deux époux, et qui, pour avoir force de loi, avait besoin de la ratification royale. D’ailleurs le mariage avait eu lieu antérieurement à cette date. Marguerite de Valois fut attachée à la personne de la reine ; elle était connue à la cour sous le nom de Mademoiselle de Belleville. Jean de Belleville survécut à sa femme ; celle-ci était décédée avant le 25 janvier 1458, suivant un compte de Mathieu Beauvarlet, commis à la recette générale des finances.

, à present sa femme, seur naturelle du roy nostre sire, se le cas advenoit que le dit seigneur de Mirambeau alast de vie à trespassement, delaissez enfans nez et procreés de mariage des diz seigneur et dame de Mirambeau, que les diz enffans peussent venir à la succession de leur dit pere, heritier futur principal du dit seigneur de Belleville, son pere, en representant leur dit pere, et seroient receuz à la possession et saisine de tous et chacuns les biens immeubles desquelz le dit seigneur de Mirambeau seroit mort vestu et saisi, en icellui representant. Aujourd’uy le dit seigneur de Belleville, voulant garder et accomplir le contenu de ses promesses et voulans acroistre le droit de ses heritiers qui le representent et mesmement du dit seigneur de Mirambeau, son filz aisné, et acroistre les droiz de sa primogeniture, voulans autresi garder ses seigneuries, baronnies, chasteaulx, chastellenies et terres de Belleville, de Montagu, de Vendrines et de la Lande entieres, sans icelles estre aucunement parties ne divisées entre son principal heritier masle et les freres puisnez du dit principal heritier, et sans icelles seigneuries estre aucunement mises hors des mains du dit principal heritier par droit de retour, ne autre droit coustumier, ne par partage ne divisions à faire entre les futurs heritiers des diz seigneurs de Belleville et de Mirambeau, mais icelles seigneuries devant dictes estre gardées entierement et par le tout par les principaulx heritiers des diz seigneurs, sans icelles estre gouvernées par droit coustumier de païs, tant au regard des diz puisnez que des filles qui sont et pour l’advenir pourront estre nées et procreés du dit seigneur de Mirambeau et de ses principaulx heritiers, ou qui les representeront, [et que les] hoirs masles successivement aient et preignent, tiengnent, possident et explectent les dictes seigneuries, baronnies et terres de Montagu, de Belleville, de Vendrines et de la Lande, sans icelles estre aucunement parties ne divisées entre le dit seigneur de Mirambeau et ses heritiers masles qui le representeront, ses freres puisnez et seurs ou qui les representeront, et sans icelles seigneuries et terres cheoir en droit de [re]tour ne autre droit coustumier, par les diz puisnez. Et ne pourra le dit seigneur de Mirambeau ne les siens les dictes seigneuries departir ne diviser, ne icelles aliener, transporter ne charger de charges nouvelles par dons et legaz faiz à eglise, ne autrement, que elles ne demeurent entieres à l’ainsné. Et pour les droiz, parties et porcions que, ou [temps] du trespassement du dit seigneur de Belleville, pourroient competter et appartenir aux freres puisnez du dit seigneur de Mirambeau, ou à leurs successeurs, ès seigneuries devant dictes demour[ans] audit seigneur de Mirambeau, icellui droit soit baillé par le dit seigneur de Mirambeau à ses diz freres puisnez, là où bon lui semblera, sur les acquestz et couvrances du dit seigneur de Belleville, sans leur bailler aucune forteresse. Lesquelles choses baillées aux enfans puisnez du dit seigneur de Belleville furent, en tout ou partie, l’acquest du dit seigneur de Belleville. Sur les quelles choses et acquest le dit seigneur de Belleville veult et ordonneles parties et porcions de ses diz enfans puisnez estre prinses par les parties et porcions qui pourroient competter et appartenir ausdiz puisnez ès biens et ancien heritaige du dit seigneur de Belleville. Et le surplus des diz acquestz le dit seigneur de Belleville veult et ordonne estre et appartenir audit seigneur de Mirambeau et à ses principaulx heritiers masles, dès à present et sans attendre le cas du trespassement du dit seigneur de Belleville, et en deffault de hoir masle, à son aisnée fille ou qui la representera. Lesquelz acquestz dès à present ledit seigneur de Belleville donne, cede et transporte audit seigneur de Mirambeau, son filz aisné en lui avansant ses droiz de houairrie. Et en oultre veult et consent, promect, ordonne et accorde ledit seigneur de Belleville que, en cas que ses diz enfans puisnez ne vouldroient tenir le contenu en ces presentes, que ou dit cas, dès à present comme dès lors et dès lors comme dès à present, le dit seigneur de Mirambeau de son droit puisse faire emparer et puisse joyr paisiblement, au prouffit de lui et de ses heritiers, de tous et chacuns les acquestz, conquestz et couvrances faiz par le dit seigneur de Belleville, en quelque lieu et temps, fief et seigneurie qu’ilz soient ou puissent estre ; lesquelz ou dit cas le dit seigneur de Belleville a donné et donne audit seigneur de Mirambeau, son filz, et à ses futurs principaulx heritiers, tant pour les bons et agreables services que le dit seigneur de Mirambeau lui a faiz que pour l’avancement de ses droiz de hoirie, que pour maintenir et garder le nom et les armes de la dicte seigneurie. Et ou cas que les freres puisnez du dit seigneur de Mirambeau esmouvroient aucun debat, plait ou procès

On verra, dans un autre endroit de ce volume, que cette prévision se réalisa et que le second fils de Jean Harpedenne, Olivier de Belleville, attaqua les dispositions paternelles et, à la suite d’un procès dirigé contre son frère aîné, obtint d’abord par un arrêt provisionnel de la cour, en date du 4 août 1436, puis par un accord amiable, une répartition un peu plus équitable de cette succession dont son père l’avait presque complètement exclu.

à l’ancontre du dit seigneur de Mirambeau ou ses heritiers, ou qui le representeroient, ledit seigneur de Belleville ou dit cas, pour les causes et ingratitude et autres plus à plain declairées ou testament ou derreniere voulenté du dit seigneur de Belleville, ledit seigneur de Belleville les prive et desherede de tous et chacuns les droiz, parties et porcions à eulx par dessus baillées par le dit seigneur de Belleville, et à eulx appartenans ou pouvans appartenir, en biens et heritaiges de leur dit pere. Et à tenir les choses dessus dictes le dit seigneur de Belleville a obligé et oblige tous et chascuns ses biens, tant envers le roy nostre dit seigneur que envers le dit seigneur de Mirambeau, son filz aisné et presumptif heritier, à ce present, stipulant et acceptant, pour lui et ses heritiers, les choses dessus dictes et chascune d’icelles, lui souffisanment auctorisé du dit seigneur de Belleville, son pere ; et icelles le dit seigneur de Belleville a promis garantir et deffendre de tous et contre tous, renonçant sur ce à toutes et chascunes les excepcions, raisons et alegacions qui contre ces presentes pourroient estre dictes ou proposées en tout ou partie. En tesmoing desquelles choses le dit seigneur de Belleville en a donné aus diz messire Jehan de Belleville et dame Marguerite, sa femme, ces presentes lettres, scellées à sa requeste du seel estably aux contractz en la dicte court ; au vidimus desquelles, faiz soubz seaulx autenticques, a voulu le dit seigneur de Belleville que foy soit adjoustée comme à l’original. Soubz et par le jugement de laquelle court ledit seigneur de Belleville en a esté jugié et condempné, de son consentement et voulunté. Fait et donné le tiers jour du moys de may l’an de grace mil cccc. trente troys. — Ainsi signé : Morin, J. Guerry.

Lesquelles lettres nous, considerans l’entencion de nostre amé et feal conseillier et chambellan Jehan Harpedenne, chevalier, seigneur de Belleville et de Montagu, qui principalement est pour entretenir les dictes baronnies et seigneuries de Belleville et de Montagu unies, à ce que du seigneur qui pour le temps avenir sera nous, noz successeurs roys de France et la chose publicque soions mieulx et plus grandement serviz, et aussi affin de conserver et garder icelles seigneuries et baronnies en la main de nostre amé et feal Jehan de Belleville, chevalier, seigneur de Mirambeau, son filz aisné et de ceulx qui ystront de lui et de nostre chiere et bien amée Marguerite de Valois, sa femme, fille naturelle et legitime de feu nostre très chier seigneur et pere, que Dieu absoille, avons louées, approuvées, ratiffiées et confermées, louons, approuvons, ratiffions et confermons, voulans et descernans, de grace especial et de nostre plaine puissance et auctorité royal, que, non obstant quelxconques usaiges et coustumes de païs, elles sortissent leur effect. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx conseillers les gens de nostre Parlement, les maistres des requestes de nostre hostel, aux seneschaulx de Poictou et de Xanctonge, au gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartiendra, que nos dictes voulenté et grace ilz facent, seuffrent et laissent ledit seigneur de Mirambeau [et ses successeurs] joïr et user plainement et paisiblement, sans les empescher ne souffrir estre empeschez aucunement au contraire ; et à nostre procureur general, qui à present est et qui pour le temps advenir sera, que, se aucun venoit ou s’efforçoit venir à l’ancontre, que il se constitue partie contre luy et se adjoigne avec icellui seigneur de Mirambeau et ses diz successeurs. Et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes, aux vidimus desquelles, faiz soubz seaulx auctentiques, voulons foy estre adjoustée comme à l’original. Donné à Tours, le septiesme jour d’octobre l’an de grace mil cccc. trente troys, et de nostre regne le onziesme

Ces lettres sont transcrites sur le registre du Trésor des chartes, incorporées dans une nouvelle confirmation accordée à Jean de Belleville par le roi Louis XI, à Chinon, le 12 juin 1462.

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Ainsi signé : Par le roy, le bastard d’Orleans

Jean comte de Longueville et de Dunois, l’un des plus célèbres capitaines du xve siècle, né vers 1403, mort le 24 novembre 1468, fils naturel de Louis duc d’Orléans, frère de Charles V, et de Mariette d’Enghien, dame de Cany.

present. J. Gilier

Jean Gillier était le second fils de Denis, chevalier du duc de Berry, anobli par lettres du 10 août 1379 (voy. notre t. V, p. 16, note, et 124), et de sa troisième femme, Jeanne de Taunay. Il remplit les fonctions de notaire et secrétaire du roi, et c’est en cette qualité que sa signature est apposée au bas des présentes lettres. Nous avons vu qu’il hérita, en 1430, avec son frère Étienne et ses sœurs, d’Herbert de Taunay, son oncle maternel (vol. précédent, p. 397, note). Sa plus jeune sœur, Jeanne, avait épousé Jean de Vaily, président au Parlement de Poitiers, avec lequel il fut en procès au sujet de la succession de sa mère, en juin et juillet 1433. (Arch. nat., X1a 9200, fol. 167, 177 v°, 179, 181, 185 et 186.) Jean Gillier fut aussi commis à la recette des francs-fiefs et amortissements en Poitou, Saintonge et au gouvernement de la Rochelle. Il est dit décédé « puis naguères » dans les lettres patentes commettant à sa place Jean Bésuchet, aussi notaire et secrétaire du roi, données à Montpellier, le 18 mars 1437 n.s. (Original, Bibl. nat., Chartes royales, ms. fr. 25710, n° 105.)

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MXXXIV 14 octobre 1433

Lettres portant confiscation des biens meubles de feu Pierre Paumier, décédé conseiller au Parlement de Poitiers

Pierre Paumier, conseiller clerc, ne faisait point partie du personnel du Parlement de Poitiers, lors de sa création (ordonnance de Niort, 21 septembre 1418). On ne connaît point la date de sa nomination, le premier registre du conseil de cette cour (1418-1430), sur lequel elle devait être consignée, étant perdu. Son décès était tout récent. Car son successeur comme conseiller clerc, Étienne Pasne, présenta ses provisions à la cour le 16 novembre 1433 et fut reçu le 2 décembre suivant. (Arch. nat., X1a 9194, fol. 54 r° et v°.)

, parce que sa mère, qui était sa seule héritière, était restée à Paris sous la domination anglaise, et attribuant la moitié de la somme qui en proviendra au paiement des gages des officiers dudit Parlement et des maîtres des requêtes, et l’autre moitié au receveur général des finances Guillaume Charrier

Avant d’être receveur général des finances, Guillaume Charrier avait été receveur de Poitou ; en 1422, il reçut en cette qualité trois quittances de Jean Larchevêque, sr de Parthenay. (B. Ledain, La Gâtine historique, p. 203.) D’après une pièce du chartrier de Thouars, il exerçait ces mêmes fonctions le 29 octobre 1428.

, pour employer aux nécessités et affaires du roi. « Donné à Tours, le xiiiie jour d’octobre l’an de grace mil quatre cens trente et trois, et de nostre regne le unziesme. — Ainsi signé : Par le roy, le conte de Clermont

Charles Ier de Bourbon, comte de Clermont, puis duc de Bourbon en 1434. (Ci-dessus, p. 35, note 2.)

, monseigneur Charles d’Anjou

Charles d’Anjou, comte de Mortain, puis comte du Maine, frère cadet de René d’Anjou, duc de Lorraine, roi de Sicile.

et autres presens. J. Chastenier. »

X1a 8604, fol. 117 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 53

MXXXV Janvier 1434

Rémission en faveur de Guillaume de Marellessart, lieutenant du capitaine de Chauvigny, qui avait refusé de livrer cette place à l’évêque de Poitiers, après la prise de Georges de La Trémoïlle.

X2a 20, fol. 60 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 53-57

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Guillemet de Marellessart, escuier, que, comme jà pieça le chastel de Chauvigny, appartenant à nostre amé et feal conseillier l’evesque de Poictiers, ait esté mis et tenu en nostre main, et à la garde d’icellui eust esté commis et depputé Pierre de Fontenil, escuier, lequel Fontenil eust en la dicte place de Chauvigny fait son lieutenant le dit suppliant, lequel ait depuis demeuré en la dicte place jusques à la prinse faicte de la personne du seigneur de la Tremoïlle

Il est fait allusion en cet endroit à l’exécution, au château de Chinon, du complot formé contre Georges de La Trémoïlle par la reine Yolande, Charles d’Anjou, son fils, le connétable de Richemont, Jean de Bueil, neveu du favori, Pierre d’Amboise, sr de Chaumont, Prégent de Coëtivy, Raoul de Gaucourt et Pierre de Brezé. A la fin de juin 1433, les sires de Bueil, de Brezé, de Chaumont et de Coëtivy, introduits avec leurs gens d’armes dans la tour du Coudray par Olivier Frétart, lieutenant de Gaucourt à Chinon, s’emparèrent de La Trémoïlle, qui fut blessé d’un coup de dague dans le ventre par Jean de Rosnivinen, et le conduisirent au château de Montrésor, appartenant à Jean de Bueil, où il resta prisonnier jusqu’à ce qu’il eut pris l’engagement de payer à son neveu 4000 moutons d’or, de rendre toutes ses places et de renoncer à toute ingérence dans le gouvernement. (Voy. de Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. II, p. 297.) On voit ici que le lieutenant du château de Chauvigny refusa, à l’instigation de l’ex-premier ministre, de rendre cette place, mais il n’est pas dit clairement quelle sorte d’autorité celui-ci y exerçait. Sans doute il en était capitaine, ce qui expliquerait comment il avait pu y détenir prisonniers deux bourgeois de Limoges, ainsi qu’il a été rapporté dans les lettres de rémission du 7 mai 1431. (Ci-dessus, p. 26.)

 ; et combien que, depuis la dicte prinse, nous ayons voulu et ordonné la dicte place de Chauvigny estre baillée et livrée à nostre dit conseiller l’evesque de Poictiers

L’évêque de Poitiers était alors Hugues de Combarel. Ce personnage appartenant à une famille noble du Limousin était conseiller clerc à la Cour des aides sous Charles VI. En 1415, il fut chargé d’une ambassade auprès de la République de Gênes, où il demeura cinq mois. Nommé, l’an 1416, évêque de Tulle par une partie du chapitre, son élection longtemps contestée fut confirmée par arrêt du Parlement de Poitiers du 12 juillet 1421. (Arch. nat., X1a 9190, fol. 161 v°.) Mais, peu de temps après, Hugues de Combarel permuta avec Bertrand de Maumont et devint évêque de Béziers. Au mois d’avril 1424 (la Gallia christiana dit par bulle de Martin V du 16 des calendes de mars, t. II, col. 1198), il fut transféré à l’évêché de Poitiers, qu’il occupa jusqu’à sa mort. Hugues joua un rôle important dans le gouvernement de Charles VII. Il fit partie dès l’origine du personnel du Parlement de Poitiers et l’ordonnance de Niort (21 sept. 1418) le mentionne avec le titre de conseiller clerc. (Cf. notre vol. précédent, p. 374 n., 376 n., 377 n.). Le 22 octobre 1425, le roi ayant reconstitué à Poitiers la Cour des aides, nomma Combarel général avec le titre et les attributions de président. (Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XIII, p. 105.) En 1427, il fut chargé, avec l’évêque de Limoges et le sr de Mortemart, d’apaiser le différend qui s’était élevé entre le vicomte de Limoges et les consuls de cette ville, différend qui avait dégénéré en guerre ouverte et mis à feu et à sang tout le haut Limousin. Les commissaires du roi réussirent à faire signer un compromis aux parties le 12 juillet 1427. (A. Thomas, Les États de la France centrale sous Charles VII, 2 vol. in-8°, t. I, p. 309.) On trouve quelques renseignements intéressants sur la famille de l’évêque de Poitiers dans les plaidoiries d’un procès entre François de Combarel, son neveu, et Jacquette de Mons, femme de celui-ci, d’une part, et Hugues de Magnac et Alice de Mons, sa femme, d’autre, les 9 mai et 12 juillet 1434. (Arch. nat., X1a 9200, fol. 232 v°, 264.) Un accord fut conclu à Châtellerault, le 19 février 1435 n.s., et enregistré au Parlement le 30 juin suivant, entre Hugues de Combarel et Jean VII d’Harcourt, vicomte de Châtellerault, au sujet d’un boulevard et d’une palissade que ce dernier avait fait élever sur la motte située entre le château de l’évêque de Poitiers et celui des d’Harcourt à Chauvigny. (X1c 149, au 30 juin 1435.) Hugues avait pour sénéchal dans cette ville Jean Bernard, qui interdit à Pierre Rivaut, licencié ès lois, demeurant audit lieu, d’y exercer son office d’avocat. Après appel de cette décision, une transaction intervint par laquelle l’évêque de Poitiers leva cette interdiction, le 14 mai 1436. (X1c 151.) On dit communément qu’Hugues de Combarel mourut vers 1440. Le dernier acte connu émanant de ce personnage est en effet du 11 février 1440 n.s. (Coll. dom Fonteneau, t. II, p. 237 ; voir dans le même recueil deux autres documents relatifs à l’évêque de Poitiers, l’un de 1426, l’autre du 27 novembre 1430, t. II, p. 213, et t. XX, p. 229.)

, et que par pluseurs foiz aions mandé audit suppliant par lettres patentes et closes, et autrement, que de la dicte place et chastel il se partist avec les gens et compaignons de garnison qui estoient dedans, et icellui chastel baillast et livrast ès mains de nostre dit conseillier, ou à son certain commandement ; neantmoins le dit suppliant, soubz umbre d’aucunes promesses, que le dit sire de la Tremoïlle et lui avoient eu ensemble du fait de la dicte place, a esté de ce reffusant et contredisant, et en icelle place, depuis la dicte prinse, a tenu gens en garnison contre nostre voulenté et ordonnance, et à nostre desplaisance. Lesquelz, soubz umbre et soustenement de lui, ont fait pluseurs roberies, pilleries, rançonnemens, destroussemens et appatiz sur noz hommes et subgiez, et commis pluseurs autres maulx, lesquelx ilz ne sauroient bonnement declairer. Pour lesquelx il doubte avoir encouru nostre indignacion et que ou temps avenir le dit suppliant et ceulx qui ont esté avec lui en la dicte place en puissent estre reprins, et par ce moyen cheoir en dangier de justice, se par nous n’estoit sur ce nostre grace impartie audit suppliant et aux autres qu’il a tenu en la dicte place, requerant humblement que, comme il ait fait les choses dessus dictes à la très grant priere, requeste et instigacion dudit sire de la Tremoïlle, qui le chargeoit du serment qu’il disoit lui avoir fait, du temps que le dit sire de la Tremoïlle estoit en nostre service ; et voyant et considerant que, quelque promesse que le dit suppliant eust fait à autre, raison estoit qu’il nous obeisse et aussi que la dicte place de Chauvigny est de l’eglise, pour quoy il ne la puet ne doit detenir ; veuz mesmement les commandemens qui de par nous sur ce lui ont esté faiz, nous lui vueillons et à tous les autres qu’il a tenuz avec lui impartir nostre dicte grace. Et nous, eu regart aux choses dessus dictes, et à ce que le dit suppliant veult de present, en obeissant à noz commandemens et ordonnances, bailler et livrer la dicte place audit nostre conseillier, au jour que le dit nostre conseillier auroit appoinctié sur ce ou en dedans, et d’icelle soy departir et faire departir tous les gens et compaignons de garnison estans en icelle ; et aussi qu’il jurera et promettra que doresenavant il se gouvernera et maintiendra paisiblement, sans soustenir pilleurs ne robeurs sur le pays, mais quelque part qu’il les saura, s’emploiera et fera sa diligence de les prendre et apprehender, et iceulx mener ou faire mener à justice, afin que punicion soit faicte d’eulx selon leurs demerites ; considerans aussi pluseurs grans services que le dit Guillemet et ses freres, qui, pour acquicter leur loyaulté envers nous, ont delaissé leurs maisons et pays et sont venuz devers nous, ont fait et font chascun jour en nos guerres, et esperons que encores facent, à icellui suppliant et autres qu’il a tenuz en la dicte place avons quicté, remis et pardonné, etc., pourveu toutesvoies que le dit suppliant baillera et livrera, comme dit est, à nostre dit conseillier la dicte place et chastel de Chauvigny. Au quel nous mandons et commandons bien expressement, sur la loyauté et foy qu’il nous doit et sur quant que il se puet meffaire envers nous, que ainsi le face, non obstant le serment qu’il a de ce fait au dit sire de la Tremoïlle ou autres quelzconques, dont nous le quictons. Et combien que en ces presentes ne soient nommés ceulx qui ont esté en la dicte place avecques le dit suppliant, et n’y soient pas declairez particulierement les maulx, crimes et deliz par eulx commis et perpetrés, nous voulons ceste nostre presente grace sortir son effect, tout ainsi comme s’ilz y fussent nommez et leurs diz mesfaitz declairez, et que du vidimus de ces presentes le dit suppliant et chascun d’eulx se puissent ayder et y soit foy adjoustée, comme à ce present original. Si donnons en mandement par ces presentes à noz amez et feaulx les gens qui tiennent ou qui ou temps avenir tiendront nostre Parlement, aux seneschaulx de Poictou, Limosin et Xantonge, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Bourges, ou mois de janvier l’an de grace mil cccc. trente et trois, et de nostre regne le douziesme.

Par le roy en son conseil. Budé. — Visa.

Die veneris xiia die februarii anno m° cccc° xxxiii°, presentes littere lecte fuerunt in camera Parlamenti Pictavis, et ibidem Guillemetus de Marellessart prestitit juramentum in eis declaratum. Hisque sic peractis, curia, de consensu procuratoris regis, eisdem litteris obtemperavit.

MXXXVI 21 août 1434

Confirmation des chartes de commune octroyées à la ville de Niort par les rois Philippe-Auguste et saint Louis.

AN JJ. 198, n° 103, fol. 104 ; AN JJ. 210, n° 81, fol. 52 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 58-59

Karolus, Dei gratia Francorum rex. Notum facimus universis, presentibus pariter et futuris, nos vidisse litteras carissimorum progenitorum nostrorum Philipi et Ludovici, inclite memorie regum Francie, majoribus, burgensibus et communie ville de Nyorto in comitatu nostro Pictavie concessas, tenorum subsequentium :

In nomine sancte et individue Trinitatis, amen. Philippus, Dei gratia Francorum rex. Noverint universi, presentes pariter et futuri, quod nos concedimus burgensibus nostris de Nyorto, in eadem villa commorantibus, ut communiam suam habeant ad puncta et consuetudines communie Rothomagensis, que continentur in registro nostro. Quod ut perpetuum robur obtineat, sigilli nostri auctoritate et regii nominis karactere inferius annotato presentem paginam, salvo jure nostro et ecclesiarum nostrarum, confirmamus. Actum Pictavis, anno incarnati Verbi millesimo ducentesimo quarto, regni nostri vicesimo quinto. Astantibus in palacio nostro quorum nomina supposita sunt et signa. Dapifero nullo. S. Guidonis, buticularii. S. Mathei, camerarii. S. Droconis, constabularii. Data vacante cancellaria, per manum fratris Garini.

Ludovicus, Dei gratia, etc. Actum apud Sanctum Maxentium, anno Domini m. cc. tricesimo, mense julii

Cette charte de saint Louis, de juillet 1230, a été imprimée dans notre premier volume (t. XI des Arch. hist. du Poitou), p. 205, avec un vidimus de Charles le Bel, daté du 13 février 1322.

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Quas quidem litteras superius insertas et inscriptas et omnia et singula in eis contenta, ratas et gratas, rataque et grata habentes, ipsas et ipsa laudamus et approbamus, auctoritate nostra regia et plena potestate confirmamus per presentes, si et in quantum majores, burgenses et habitatores de Niorto privilegiis, franchisiis et libertatibus, de quibus in predictis litteris fit mentio, hactenus debite usi sunt ; harum tenore presentium mandantes senescallo Pictavensi ceterisque justiciariis et officiariis nostris, presentibus et futuris, aut eorum locatenentibus, quathinus majores, burgenses et communiam dicte ville Niorti nostris presentibus approbacione, ratifficacione, confirmacione et gracia uti et gaudere faciant et paciantur, nullam molestiam sibi in contrarium inferentes. Salvo tamen in aliis jure nostro et in omnibus quolibet alieno. Quod ut stabile sit et perseveret, hiis presentibus nostrum sigillum in absencia magni ordinatum duximus apponendum. Datum Turonis, die vicesima prima mensis augusti anno Domini millesimo cccc. tricesimo quarto, regni nostri duodecimo

Les lettres de Charles VII avec les chartes de Philippe-Auguste et de saint Louis sont transcrites deux fois sur les registres du Trésor des chartes, insérées dans des vidimus de Louis XI (Amboise, novembre 1461) et de Charles VIII (le Plessis du Parc-lès-Tours, janvier 1484 n.s.). Elles ont été publiées par Chr. Augier de la Terraudière, Thrésor, etc., et Privilèges de la ville de Nyort. Nyort, 1675, in-12, p. 12, 14, et, d’après cet ouvrage, dans le recueil des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XI, p. 287 et 327 ; t. XIII, p. 204.

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Sic signatum : Per regem, episcopo Magalonensi, domino de Treviis et aliis presentibus. J. Gilier. — Visa. Contentor. Chaligaut.

MXXXVII 8 septembre 1434

Donation par Henri VI, roi d’Angleterre, à Jean comte d’Arundel.

Au commencement de cette année 1434, Jean comte d’Arundel, capitaine renommé pour sa bravoure, avait, à la tête d’une armée anglaise, dirigé une expédition heureuse dans le Maine, où il avait pris les villes de Saint-Célerin, Sillé-le-Guillaume et Beaumont-le-Vicomte ; il avait eu ensuite les mêmes succès dans le pays Chartrain, dont plusieurs places se soumirent à Henri VI. Mais l’année suivante, ayant le titre de lieutenant du roi d’Angleterre en Normandie, il fut battu sous les murs de Gerberoy par La Hire et Saintrailles (mai 1435) ; grièvement blessé dans cette rencontre, il mourut quelques jours après. (Monstrelet, t. V, p. 119-123 ; Berry, p. 388.)

et seigneur de Mautravers, en récompense de ses services et sur l’avis du duc de Bedford, régent en France, du duché de Touraine

Rappelons ici que le duché de Touraine, à la réserve de Chinon, avait été donné à Archibald comte Douglas et à ses hoirs mâles, par lettres patentes de Charles VII, datées de Bourges, le 19 avril 1423. Celui-ci ayant péri à la bataille de Verneuil (17 août 1424), et aucun héritier mâle ne s’étant présenté pour recueillir sa succession, le roi par de nouvelles lettres signées à Angers, le 21 octobre 1424, et contenant la même réserve, fit don de ce duché à Louis, duc d’Anjou, roi de Jérusalem et de Sicile, et à Isabelle de Bretagne, à l’occasion de leur mariage, avec engagement de leur donner l’équivalent, dans le cas où un héritier légitime de Douglas viendrait à faire reconnaître son droit. (Arch. nat., X1a 8604, fol. 65 et 69 v°.)

, « excepté toutesvoies le chastel et chastellenie de Lodun et ses appartenances, qui, par le moien du don et transport par nous fait à nostre dit oncle (Bedford) de toutes les terres que tint, en nostre dit royaume de France, feu Loys jadis roy de Sicile

Il s’agit de Louis II duc d’Anjou, roi de Naples et de Sicile, décédé à Angers le 29 avril 1417, car son fils Louis III, né le 25 septembre 1403, ne mourut que le 15 novembre 1434 à Cosenza (Calabre).

, appartiennent à icelui nostre oncle… Donné à Rouen, le viiime jour de septembre l’an de grace mil cccc.xxxiiii, et de nostre regne le xiime. — Ainsi signé : Par le roy, à la relacion de monseigneur le gouvernant et regent nostre royaume de France, duc de Bedford. J. Milet. »

AN JJ. 175, n° 365, fol. 131 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 59-60

MXXXVIII Septembre 1434

Lettres portant restitution au vicomte de Thouars de ses terres et bien confisqués l’an 1431, sauf les terres et châtellenies de Talmont-sur-Jard, Amboise et Civray ; avec une quittance dudit vicomte au profit du sr de Montgauguier.

X1a 8604, fol. 121 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 60-69

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, que, comme jà pieça, en l’an mil cccc. trente et ung, nous eussions fait arrester en nostre chastel de Poictiers Loys d’Amboyse

Louis d’Amboise, vicomte de Thouars, comte de Benon et de Guines, seigneur de Talmont, de Mauléon, Montrichard, l’île de Ré, Marans, etc., fils d’Ingelger II seigneur d’Amboise et de Jeanne de Craon, avait hérité de tous les biens de son oncle Pierre, seigneur d’Amboise et vicomte de Thouars, vers l’an 1422. (Voy. notre vol. précédent, p. 42, note.) Nous n’essaierons pas ici de faire la biographie, même sommaire, de ce célèbre personnage dont la carrière fut longue et accidentée ; nous nous contenterons de citer quelques actes inédits, relatifs surtout à la période de sa vie dont il est question dans ces lettres, et d’énumérer les procès criminels qu’il eut à soutenir au Parlement. Le vicomte de Thouars fut arrêté à Poitiers le 28 mars 1431 n.s. (voir Bibl. nat., ms. fr. 21302, à cette date, extraits d’un registre du conseil du Parlement de Poitiers, aujourd’hui perdu). L’arrêt du 8 mai 1431, le relevant de la peine de mort qu’il avait encourue, et le condamnant à la prison et à la confiscation, est conservé en original aux Arch. nat., J. 366, n° 1. Une autre layette du Trésor des chartes renferme deux serments de fidélité prêtés au roi, par Louis d’Amboise. L’un est du 7 août 1436. L’autre, plus intéressant, n’est malheureusement pas daté ; il est antérieur de peu de temps à sa condamnation, et c’est précisément ce qui le rend important et fait regretter qu’il ne porte pas une date précise. Par cet acte, le vicomte de Thouars déclare renoncer à toute alliance contraire à la volonté de Charles VII, notamment à celle d’Antoine de Vivonne, d’André de Beaumont et de Renaud de Velors, qui avait été son capitaine à Amboise, et nommer dans les principales places qui lui appartiennent des capitaines ayant l’agrément du roi : à Thouars, Louis d’Avaugour ; à Mauléon, Hardy Savary ; à Talmont, le sire de Tonnay[-Boutonne], et à Amboise, Jacques de Lestang. (J. 400, nos 74 et 76.) D’après le P. Anselme, le capitaine de Thouars qui livra cette ville aux commissaires royaux, le 14 mai 1431, était Jacques de Montbron. (T. VII, p. 17.) Le 11 décembre 1433, le roi ayant mandé au Parlement de lui délivrer copie de l’arrêt rendu contre le vicomte de Thouars et des interrogatoires, en ce qui le concernait, d’André de Beaumont et d’Antoine de Vivonne, ses complices, la cour fit réponse qu’elle ne possédait rien des arrêts ni des confessions. (Arch. nat., X2a 21.) Outre les biens déclarés dans les lettres de restitution, il y avait encore les terres de Laleu et de Loumeau en Aunis ; le procureur général en contestait la possession à Louis d’Amboise. Celui-ci toutefois avait obtenu d’en percevoir les revenus, à titre de récréance, pendant la durée du procès ; le receveur royal à la Rochelle ayant émis la prétention d’en faire la recette, Louis obtint du procureur du roi la pleine reconnaissance de son droit d’usufruit, jusqu’au prononcé de l’arrêt, par accord du 10 décembre 1434. (X1c 148.)

Dans d’intéressantes plaidoiries du 28 février 1427 n.s., on apprend que Louis d’Amboise, vicomte de Thouars, et son capitaine de la Chaize-le-Vicomte, Jean Buor, chevalier, sr de la Gerbaudière, ayant fait démolir les fortifications du prieuré dudit lieu, dépendant de l’abbaye de Saint-Florent de Saumur, furent l’objet d’une plainte en attentat et abus d’autorité de la part du prieur, Zacharie Geffroy. (X1a 9198, fol. 249 v°, 251.) Le vicomte de Thouars, qui s’était rendu coupable du meurtre de Simon de Velors, avant le mois de juillet 1435, ayant obtenu des lettres de rémission, des poursuites furent exercées contre lui par Renaud de Velors, écuyer, sr de Meulles et de la Chapelle-Belloin (son ancien allié), Jeanne de Velors, sœur de celui-ci et femme de Jean Loube (aliàs Boubé), écuyer, Thibaut Fourrateau et Guyonne de La Coudre, sa femme, tous parents et héritiers de la victime et opposants à l’entérinement de la grâce, et les procédures, commencées le 2 juillet 1435, durèrent jusqu’au 18 mai 1442. (X2a 22, aux dates des 31 mars 1438, 20 janvier et 3 février 1439, 4 janvier, 21 avril et 2 mai 1440 ; X2a 23, fol. 12 et 94 v°, arrêt du 18 mai 1442 ; X2a 25, aux 2 et 20 juillet, 2 août 1435, 23 mai, 7 juillet et 6 octobre 1436.) Louis d’Amboise fut encore poursuivi, ainsi que Jean Sanglier, chevalier, et Guillaume Maynard, ses familiers, par Huguet Vivier qui les accusait d’excès et de mutilation sur sa personne. (Actes des 2 août 1443, 8 juin 1444, et arrêt du 5 avril 1447 ; X2a 23, fol. 120 et 370 ; X2a 24, au 8 juin 1444.) Mentionnons, en outre, les procès criminels engagés par le vicomte de Thouars contre le duc et la duchesse de Bretagne, les 3 juin et 14 octobre 1457 (appel d’une sentence du sénéchal de Poitou, X2a 27, fol. 263, 286 v°) ; contre Louis Fumée, avocat au Parlement, le 23 juillet 1457. (Id., fol. 271.) Aux 5 et 8 juin 1469, Guillaume Chauvin était demandeur en matière d’excès contre lui et contre Jean Guymar, son sénéchal de Talmont, Étienne Bricet et autres officiers du lieu. (X2a 35, aux dates.) Une autre affaire relative au prieuré de Saint-Jouin de Mauléon donna lieu à des procédures criminelles entre François de Brillac, abbé de Pontlevoy, et Louis d’Amboise, les 28 novembre, 5 et 7 décembre 1469. (Même registre.) Le vicomte de Thouars décéda dans les premiers mois de l’année suivante. Le 25 janvier 1462 n.s., il avait fait cession à Louis XI de la vicomté de Thouars, à la réserve de l’usufruit, moyennant la somme de 10,000 écus d’or, en présence de Louis de Crussol, sénéchal de Poitou, et de plusieurs autres personnages. (Anc. mémorial M de la Chambre des comptes, fol. 24 ; Arch. nat., P. 2299, p. 284.) La collection de dom Fonteneau contient aussi un grand nombre d’actes intéressants relatifs à Louis d’Amboise.

, chevalier, pour certains cas et deliz que on lui imposoit, sur lesquelz par nostre ordonnance il fut interrogué et examiné et sur sa confession prins droit, veue laquelle par nous en nostre grand conseil, appellez à ce les presidens et conseillers laiz de nostre court de Parlement, se ensuit certain arrest pronuncé en nostre presence, en nostre Palais à Poictiers, par lequel ledit Loys d’Amboyse fut par nous relevé de la peine de mort, et fut dit et declairé tous ses biens meubles et immeubles estre à nous confisquez et acquis. Et avecques ce, par le dit arrest fut dit et ordonné que icelluy Loys d’Amboise tendroit prison fermée jusques à nostre bon plaisir et voulenté. Par vertu du quel arrest et en executant icelluy ; tous ses biens immeublez furent mis en nostre main et aussi fut icelluy Loys d’Amboise mis prisonnier ou chastel d’Amboyse, auquel il fut detenu par aucun temps, et depuis fut transporté ou chastel de Chasteillon sur Yndre. Auquel lieu il a esté detenu prisonnier et très durement traictié par l’espace de neuf moys ou environ, en tele maniere qu’il en a esté fort debilité de sa personne. Esquelles prisons d’Amboise et de Chasteillon il a esté detenu par l’espace de troys ans ou environ. Et depuis nostre très chiere et très amée mere la royne de Scicile et nostre très chier et très amé frere Charles d’Anjou et autres, tant de nostre sang et lignage comme autres de noz conseillers, officiers et serviteurs, nous ayent humblement supplié et requis que audit Loys d’Amboyse voulsissons extendre et impartir nostre grace, tant au regart de la delivrance de sa personne, comme aussi de la restitucion de ses biens et heritages, à nous acquis et confisquez, comme dit est.

Pour ce est il que, eue consideracion à ce que dit est et aussi aux bons et agreables services que feu Pierre d’Amboise, oncle dudit Loys d’Amboise, en son vivant viconte de Thouars

Une notice a été consacrée à Pierre d’Amboise, vicomte de Thouars, dans notre précédent volume, p. 42, note.

, nous a fait en nous recevant en grant obeissance en ses terres et païs, après nostre partement de Paris, et nous faisant aussi tout ayde et confort de son povoir, et autrement en maintes manieres ; considerans aussi la griefve et longue prison que le dit Loys d’Amboise a soufferte et porté paciemment, et esperans que doresenavant il se porte envers nous comme il doit faire, et se employe en noz guerres et autrement en nostre service, comme bon et loyal subgiet doit faire, et aussi pour contemplacion de nosdiz mere et frere, et pour certeines autres causes à ce nous mouvans ; nous, de nostre certaine science, plaine puissance, autorité royal et grace especial, parces presentes avons le dit Loys d’Amboise restitué et restituons entierement et à plain à ses bonne fame et renommée, et lui avons avecques ce remis et quicté la dicte prison, et ycellui avons mis et mettons à sa franchise et pleine delivrance de sa personne, et sommes contens de la dicte prison qu’il a tenue, sans ce que, à l’occasion dudit arrest, il soit, puisse ou doye estre empesché doresenavant en aucune maniere en sa personne. Et de nostre plus ample grace à ycelluy Loys d’Amboise avons restitué et restituons, et, se mestier est, lui avons donné, cedé, transporté et delaissé, donnons, cedons, transportons et delaissons pour lui et les siens et ayans cause, à tousjours, toutes ses terres et seigneuries que il avoit, tenoit et possidoit au temps du dit arrest, pour en joyr et user et en faire perpetuelment, tant de la proprieté que des foiz, homagez, hommes, subgiez, droiz, noblesses et prerogatives, fruiz, prouffiz, revenues et emolumens qui y appartiennent, comme il faisoit ou eust peu faire par avant le dit arrest. Et en oultre, en tant que mestier [est] ou seroit, avons mis et mettons au neant la dicte forfaiture e confiscacion, tant au regart d’icelles terres et seigneuries par nous delaissées au dit Loys d’Amboyse, comme aussi de toutes autres qui cy en après lui pourront par succession ou autrement competter et appartenir, sauf et reservé toutesvoyes à nous le chastel, terre et chastellenie de Thalemond sur Jard, avecques leurs appartenances et appendences, tant en cens, rentes, foys, hommagez, fiefz arriere fiefz, comme en nauffraiges, espaves et autres choses quelxconques, avecques le chastel et forteresse de Chasteau Gautier ; sauf aussi et reservez à nous le chastel, terre, chastellenie et seigneurie d’Amboyse avecques la terre de Sivray, ensemble les foys, homages, fiefz, arrierefiefz, droiz, noblesses, prerogatives, prouffiz, revenues et emolumens quelxconques qui y appartiennent. Et combien que eussions retenu les terre et chastellenie de Bleré et appartenances avec les dis chastel et chastellenie d’Amboyse, neantmoins, à la supplicacion et requeste des dessus diz, nous avons delaissé et delaissons par ces presentes les dictes terre, chastellenie, droiz et appartenances quelzconques de Bleré au dit Loys d’Amboise, sauf que nous avons retenu et retenons doresenavant mettre capitaine, en nostre nom et de par nous, en la forteresse et pont du dit lieu de Bleré ; et parmy ce aussi que ledit Loys d’Amboise demourra chargié et nous guarentira de ce que le seigneur de Moncauguier

Jean II de Sainte-Maure, seigneur de Montgauguier, fils de Jean Ier et de Jeanne des Roches, était en 1425 sous la tutelle de Philippe d’Orgemont. La mère de Jean Ier, seconde femme de Pierre de Sainte-Maure, sr de Montgauguier, était Marguerite d’Amboise, fille puînée d’Ingelger Ier, seigneur d’Amboise. A la mort de celle-ci, son fils réclama le tiers de la succession d’Amboise qui lui fut contestée par les co-héritiers. D’où naquit le procès dont il est question ici. Il n’était point terminé à la mort de Jean Ier et fut repris par le tuteur de Jean II, contre Louis d’Amboise, vicomte de Thouars. (Le P. Anselme, Hist. généalogique, t. V, p. 11.) Jean Ier de Sainte-Maure et Jeanne des Roches, sa femme, réclamèrent aussi une part de la seigneurie de Mortagne-sur-Sèvre à Jean de la Haye, sr de Passavant, Isabelle de Vivonne et Pierre de Brézé, qui la tenaient par indivis. (Long et curieux arrêt du 31 janvier 1420 n.s., Arch. nat., X1a 9190, fol. 75.) Jean II soutint encore d’autres procès, qu’il nous suffira de mentionner sommairement. Une affaire criminelle, dont l’origine n’est pas nettement établie, était pendante, le 9 juin 1430, entre le sr de Montgauguier et Philippe d’Orgemont, chevalier, sr de Méry, d’une part, et Jean Mauliart. A cette date, celui-ci obtint son élargissement et un sursis jusqu’à la Saint-Martin suivante. (X2a 21, fol. 134 v°.) Le 7 juillet 1433 et le 7 juin 1434, Jean procédait contre Geoffroy de Trémarret et Isabelle Goyon, sa femme, auxquels il réclamait la tierce partie de la seigneurie de Berrie. (X1a 9200, fol. 171 v°, 248.) Du 7 juin 1432 au 15 novembre 1435, on trouve le sr de Montgauguier engagé dans une autre contestation judiciaire, commencée du vivant de son père, contre Pierre sr de la Rocherousse. Marie de Sainte-Maure, sa tante, lors de son mariage avec Pierre de la Rocherousse, le père, avait eu en don la terre de Rivarennes ; il paraît qu’il avait été stipulé qu’après le décès de son mari, cette terre ferait retour aux frères ou neveux de Marie et ne deviendrait pas l’héritage de ses enfants. (X1a 9194, fol. 17, 83 et v°, 85 v°, 86 ; X1a 9200, fol. 286.) La cour s’étant montrée disposée à reconnaître le droit prétendu par Jean de Sainte-Maure sur Rivarennes, le sr de la Rocherousse déposa en garde au greffe une somme de 100 royaux d’or « pour certaines erreurs qu’il entendait proposer » contre un arrêt rendu au profit du sr de Montgauguier. (Acte du 16 juillet 1435, X2a 21.) Jean II de Sainte-Maure décéda avant l’année 1463. A cette époque, sa veuve plaidait contre un fils du premier lit.

et ses coheritiers pourroyent demander par le moyen de certain arrest par eulx obtenu en la court de Parlement contre le dit Loys d’Amboise sur les diz chastel, terre et chastellenie d’Amboyse et autrement, et nous en acquittera et deschargera du tout ; et les diz chastel, terre et chastellenie d’Amboyse, tant de principal que des arrerages, et nous en baillera le dit Loys d’Amboise ses lettres convenables sur ce. Lesquelz chasteaulx, terres et chastellenies de Thalemond et d’Amboyse, avecques leurs dictes appartenances et appandences quelxconques, et la place de Chasteau Gautier, avons reservées et retenues à nous, reservons et retenons à nous et aux nostres, en la maniere que dit est. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx conseillers les gens tenans et qui tendront nostre dit Parlement, aux gens de noz comptes aux seneschaulx et bailli de Poictou, de Touraine et de Xantonge, au gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace, concession et octroy fassent, souffrent et laissent ledit Loys d’Amboyse, les siens et ayans cause, joïr et user à plain, sans leur faire ou mettre, ou souffrir estre fait ou mis, aucun destorbier ou empeschement au contraire, mais se fait estoit, le facent cesser et oster. Car ainsi nous plaist il estre fait ; et sur [ce] imposons scilence perpetuel à nostre procureur. Et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre à ces dictes presentes nostre seel ordonné en l’absence du grant. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Tours, ou moys de septembre l’an de grace mil cccc. xxxiiii, et de nostre regne le douziesme.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil, ouquel monseigneur Charles d’Anjou, le comte de Vendosme, l’arcevesque de Vienne

Jean de Norry, fils de Pierre, chevalier, conseiller et chambellan de Charles VI, et de Jeanne de Montboissier, fut élu en 1433 archevêque de Vienne, siège qu’il occupait encore en 1437 et qu’il parait avoir gardé jusqu’à sa mort arrivée en octobre 1438. (Gallia christ., t. XVI, col. 113.)

, l’evesque de Magalonne

Robert de Rouvres, d’abord évêque de Séez, occupait le siège de Maguelonne depuis un an et demi. (Voy. ci-dessus, p. 23, note 3.)

, Christofle de Harecourt

Sur ce personnage, cf. ci-dessus, p. 27, note 2.

, le sire de Treves

Robert Le Maçon, seigneur de Trèves en Anjou. (Vol. précédent, p. 298, note 2.)

, le maistre des arbalestriers

Jean Malet, sire de Graville et de Marcoussis, grand-maître des arbalétriers, de 1427 à 1449.

, les sires de Bueil

Jean V, sire de Bueil, Montrésor, Saint-Calais, etc., comte de Sancerre, conseiller et chambellan du roi, fils de Jean IV et de Marguerite dauphine d’Auvergne, dame de Marmande, personnage des plus considérables du règne de Charles VII, fut créé amiral de France après la mort de Prégent de Coëtivy (1450) et vécut jusqu’au 7 juillet 1477. M. Camille Favre a placé en tête de l’édition du Jouvencel, texte établi et annoté par M. Léon Lecestre, publié par la Société de l’Histoire de France, une importante et très complète biographie de Jean V sire de Bueil (Paris, 2 vol. in-8°, 1887). La duchesse d’Anjou, Yolande, reine de Sicile, lui engagea la baronnie de Mirebeau, pour le prix de 11000 réaux d’or, par acte du 20 février 1431 n.s., et René d’Anjou la lui racheta les 8 et 15 mars 1448 n.s. (Arch. nat., P. 1340, cotes 260, 1 à 6.)

et de Maillé

Hardouin VIII, baron de Maillé, né en 1383, encore vivant en 1466, alors grand-maître d’hôtel de la reine Marie d’Anjou et membre du conseil du roi. Il avait épousé Perrette d’Amboise, dame de Rochecorbon.

et plusieurs autres estoyent. J. Le Picart.

Et au dos :

Registrata et lecta et publicata Pictavis in Parlamento, decima septima februarii m° cccc° xxxiiiito. Blois.

Collacio facta est cum originali.

Lettre de la promesse faicte par monseigneur de Thoars de garantir au roy et acquicter les terres d’Amboise et de Civray.

Loys d’Amboise, viconte de Thouars et conte de Bannon, à tous ceulx qui ces presentes lettres verront, salut. Comme le roy nostre sire, par ses lettres patentes, données à Tours, ou moys de septembre derrenier passé, entre autres choses, me ait de sa grace especial donné et octroyé, cedé, quicté, transporté et delaissé, pour moy, les miens et mes ayans cause à tousjours, toutes et chascunes les terres, possessions et seigneuries que j’avoie, tenoie et possedoie au temps et par avant certain arrest pronuncié l’an mil cccc.xxxi., tant en proprieté que avec les droiz, foiz, hommages, noblesses, prerogatives, fruiz, prouffiz, revenues et emolumens quelxconques d’icelles, sauf et reservé la chastellenie, terre et seigneurie de Thalemont sur Jard, avec ses appartenances et appendences quelxconques, et la place de Chasteaugautier, et aussi la terre, seigneurie et chastellenie d’Amboyse, avec ses appartenances quelxconques, et la terre de Civray, lesquelles le dit seigneur a retenu et reservé à soy ; et par les dictes lettres ait voulu et ordonné que la terre et chastellenie de Bleré, avec ses appartenances et appendences, soit et demeure à moy, aux miens et à mes ayans cause, comme les autres terres à moy restituées, parmy ce toutesvoyes qu’il a retenu et reservé à soy mettre capitaine de par lui et en son nom, audit pont dudit lieu de Bleré, parmy ce aussi que je acquicteray et deschargeray et seray tenu acquicter et descharger le roy nostre dit seigneur et aussi la dicte terre et chastellenie d’Amboise envers le seigneur de Mongauguier et ses coheritiers, tant en principal que ès arrerages, de ce que leur puet competer et appartenir en ladicte terre et chastellenie d’Amboyse, par le moyen de certain arrest par lui obtenu en la court de Parlement, et de ce bailler mes lettres convenables audit seigneur, si comme tout ce et autres choses par les dictes lettres du roy nostre dit seigneur puet plus à plain apparoir. Pour ce est il que je, voulant de tout mon povoir obeir au roy mon souverain seigneur, et desirans aussi acomplir ses ordonnances, bon plaisir et voulenté, promettant en bonne foy, et soubz l’obligacion de tous mes biens, garentir et acquicter le roy nostre dit seigneur, et la dicte terre, chastellenie et seigneurie d’Amboyse, avecques la dicte terre de Civray et leurs appartenances envers le dit sr de Montgauguier et ses coheritiers, du droit et de tout ce que par le moyen du dit arrest par lui obtenu en la dicte court de Parlement, tant en principal que ès arrerages, leur pourroit et peut competer et appartenir, et en faire tenir quictes, paisibles et deschargez le roy nostre dit seigneur et la dicte terre, chastellenie et seigneurie d’Amboyse, tant du temps passé que avenir. En tesmoing de ce, j’ay fait mettre et apposer le seel de mes armes à ces presentes, et à plus grant confirmacion les ay fait signer des seigns manuelz de André Chambret

Le Dictionnaire des familles du Poitou contient quelques notes sur divers membres de cette famille originaire des environs de Thouars et cite deux actes, l’un du 17 février 1434, l’autre du 21 juin 1437, dans lesquels André Chambret paraît en cette même qualité de notaire. (Nouv. édit., t. II, p. 225.) Le 5 mars 1426 n.s., Jean Chambret, procureur de la vicomté de Thouars, était poursuivi au criminel par un nommé Jean Cartaut, ainsi que Jean Barret, sénéchal, et Jean Colas, châtelain dudit lieu. (Arch. nat., X2a 18, fol. 90.)

et Jehan Gentis, notaires de la court du seel estably aux contraux à Touars, et seeller du seel des diz contraux, le xvme jour de fevrier l’an mil cccc. xxxiiii.

Ainsi signé : A. Chambret, par commandement et à la requeste de mon dit seigneur ; J. Gentis, par commandement et à la requeste de mon dit seigneur.

Et au dos :

Lecta et publicata Pictavis in Parlamento, xvii. februarii millesimo ccccmo tricesimo quarto.

Collacio facta est cum originali.

MXXXIX Novembre 1434

Confirmation des privilèges antiques de l’abbaye de Saint-Jean-l’Evangéliste, dite Montierneuf, à Poitiers.

AN JJ. 218, n° 143, fol. 83 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 69-89

Karolus, Dei gratia Francorum rex. Notum facimus universis, presentibus et futuris, nos sex litteras vidisse pro parte dilectorum nostrorum religiosorum abbatis et conventus ecclesie Sancti Johannis Evangeliste Monasterii novi in suburbio Pictavensi

L’abbaye de Saint-Jean ou de Montierneuf avait alors à sa tête Jean de Torsay, que nous retrouverons plus loin, dans des lettres de rémission de mai 1446, en faveur d’Emery Arrignon. Dès l’année 1413, on le trouve avec la qualité d’abbé de Montierneuf, qu’il conserva jusqu’à sa mort, arrivée le 1er ou le 10 août 1439. (Gallia christ., t. II, col. 1271.) En 1386, Audouin Chauveron, alors prévôt de Paris et depuis sénéchal de Poitou (cf. notre t. V, p. 234 note), était en procès contre les religieux de Montierneuf au sujet de l’exhaussement qu’ils avaient fait de la chaussée de leurs étangs au bourg neuf, ce qui était préjudiciable, prétendait-il, à un moulin qu’il possédait en cet endroit. Dans les plaidoiries, on peut lire des détails intéressants pour la topographie de ce quartier de Poitiers. (Arch. nat., X1a 1473, fol. 73 v°.) L’abbé, comme seigneur et justicier du bourg Saint-Saturnin, réclamait la dîme sur tous les produits de cette terre ; le curé de cette paroisse, dont la nomination appartenait à l’abbé de Saint-Cyprien, la lui disputait. La cause avait été portée, dès 1408, en appel du sénéchal aux Grands Jours de Poitou ; elle ne fut réglée que le 20 mars 1419 n.s., par un accord conclu entre l’abbé Jean de Torsay et Jean Guillemot, curé de Saint-Saturnin, portant que la dîme des vignes et des vergers serait perçue par le premier, et que le second la prélèverait sur les autres récoltes. (X1c 117, à la date.) Une autre contestation entre Montierneuf et le prieuré de Saint-Paul, d’une part, et le chapitre de Sainte-Radegonde, d’autre, fut terminée aussi par une transaction, enregistrée au Parlement le 3 mars 1422 n.s. Il s’agissait d’une rente annuelle de 18 sous, que le prieur de Saint-Paul prétendait avoir sur une maison avec jardin sise à Poitiers, paroisse Saint-Paul, en la grande rue communiquant de Notre-Dame-la-Petite à Saint-Pierre. Les chanoines reconnus dûment propriétaires de la maison s’engagèrent à payer désormais la rente litigieuse au prieur. (X1c 123.) A l’époque où l’abbaye de Montierneuf obtenait de Charles VII la confirmation de sa charte de fondation et de ses anciens privilèges, elle était en procès contre le procureur général, précisément à propos d’un droit qu’elle tenait de Geoffroy, dit Guillaume VII, et de Guillaume VIII, comtes de Poitou, comme on peut le voir dans les diplômes de 1077 et de 1087 ci-dessous, qui lui reconnaissent formellement la propriété du péage du Pont neuf, dit plus tard de « l’Eschalace ou de la Charrace », situé au-dessous de l’étang, près la porte ou bastide de Saint-Ladre. Le procureur général revendiquait ce péage au nom du roi, alors que les religieux, possesseurs incontestés depuis la fondation de leur monastère, s’en étaient dessaisis au profit d’un membre de leur abbaye, le prieuré de Saint-Nicolas de Poitiers. Le lieutenant du sénéchal tout à coup s’était avisé qu’un péage ne pouvait appartenir qu’au souverain seigneur, comte de Poitou ou roi de France, et avait ordonné au fermier du prieur de cesser toute perception ; même, pour être plus sûr de son obéissance, il l’avait fait mettre en prison. L’affaire fut plaidée d’abord le 1er juillet 1434, puis le 22 mars 1435. (X1a 9200, fol. 258 v°, 320.) Dans l’intervalle, le 22 septembre 1434, la cour, considérant que « le roy ne doit plaider dessaisi », avait décidé que ledit péage serait séquestré en main souveraine et exploité jusqu’à nouvel ordre par un commis qu’elle désigna. (X1a 9194, fol. 82.) Cependant la nouvelle confirmation des antiques chartes de donation octroyées à Montierneuf ne pouvait que lui faire obtenir gain de cause.

, nunc intra menia dicte civitatis site, nobis exhibitas, formam que sequitur continentes :

In nomine sancte et individue Trinitatis. Ego Philippus, Dei gratia Francorum rex, omnibus sancte matris Ecclesie alumpnis, tam presentibus quam futuris, volo manifestari quia Gaufredus

Geoffroy, duc d’Aquitaine, nommé plus tard Guillaume VII. (Cf. ci-dessous, p. 73 note 2.)

, Acquitanorum dux, nostram agens serenitatem, precatus est nos ut, si aliquis nostrorum hominum aliquid de terra que ad nos adtinet, pro anime sue redemptione, dederit monasterio quod ipse edifficare facit in suburbio Pictavis, in loco scilicet qui dicitur Chassagnie, annuerimus esse firmum. Cujus petitionem aure benigna suscipientes, annuimus esse firmum et ratum, si quilibet homo vel quelibet femina de terra que ad nos adtinet, cult a videlicet vel inculta, vel de silvis vel de pratis, vel de aquis, ubicunque locorum sit in terra que ad nos adtinet, pro redemptione anime sue, vel aliqua precii commutacione monasterio supradicto dederit. Ut vero hec concessionis carta firmior permaneat, cruce facta inferiori margine hujus carte propriis manibus firmavimus, atque ad firmandum tradidimus nostris obtimatibus qui ibi aderant, ipsi eciam duci suisque obtimatibus, quorum nomina nostrorum scilicet et suorum obtimatum subtus sunt scripta. Volumus autem manifestum fieri quia de omni terra que ad nos adtinet, si quis dederit vel vendiderit supradicto Monasterio novo annuimus esse firmum et ratum, terra de thesauro Sancti Martini solo modo excepta. Volumus quoque manifestum fieri quia ideo nostri sigilli impressionem huic carte imponere non jussimus, quia illud apud nos non habebamus ; tunc enim temporis cum magna festinacione et nimis private veneramus Pictavis, ad Gaufredum ducem Acquittanorum, ut nobis auxilium preberet contra Guillelmum, regem Anglorum et comitem Normanorum

Guillaume Ier, dit le Conquérant ou le bâtard, septième duc de Normandie, né en 1027, roi d’Angleterre par suite de sa victoire d’Hastings, où Harold fut tué (14 oct. 1066), mort à Rouen, le 9 septembre 1087. Il est fait allusion ici à l’expédition de Guillaume en Bretagne, dont le duc Hoël V avait pour allié le roi de France (1075), et au siège de Dol que le roi d’Angleterre dut lever, après avoir éprouvé de grandes pertes.

, qui tunc contra nos in Britaniam quoddam opidum obsederat. Si quis ergo, vel ego vel aliquis ex mea progenie contra hanc cartam calumniando insurrexerit, iram omnipotentis Dei et beate Dei Genitricis Virginis Marie et beati Johannis Evangeliste, in quorum honore hoc monasterium est edificatum, omniumque Dei fidelium, incurrat, perpetuoque anathemate percussus pereat. — S. Gauffredi, Acquittanorum ducis, qui hanc cartam a rege fieri peciit. S. Hugonis magni, fratris Philipi regis

Hugues le Grand, comte de Vermandois, troisième fils de Henri Ier roi de France, né en 1057, mort le 18 octobre 1102, près de Nicée.

. S. Fulconis, in Ambianensem episcopatum tunc electi

Foulques, évêque élu d’Amiens, ne prit point possession de ce siège, soit qu’il se démît, soit qu’il mourût avant sa consécration. (Gallia christ., t. X, col. 1166.)

, non adhuc consecrati. S. Raginaldi, Sancti Martini thesaurarii. S. Galeranni Silvanectensis

Waleran ou Galeran de Senlis fut grand chambrier de France de 1065 à 1084.

, camerarii regis. S. Audeberti, comitis de Marchia

Aldebert III, comte de la Marche (1047-1088), fils aîné de Bernard Ier, comte de la Haute-Marche et de Périgord.

. S. Guidonis Navernensis. — Hec crux, signum Philipi regis. Acta sunt hec Pictavis, pridie idus octobris anno ab Incarnacione Domini millesimo septuagesimo sexto, regni Philipi regis nonodecimo

Le 14 octobre 1076. Ce diplôme de Philippe Ier, roi de France, se trouve aux Archives de la Vienne, fonds de Montierneuf, et en copie dans la collection de dom Fonteneau, t. XIX, p. 25, d’après l’original. Il est imprimé dans Besly, avec la date « id[ibus] octobris », c’est-à-dire le 15 octobre, et non « pridie idus octobris ». (Histoire des comtes de Poictou et ducs de Guyenne, Paris, in-fol., 1647, p. 365.) La date exacte est celle de la veille des ides.

.

Deinde sequitur secundarum litterarum forma :

Postquam humana condicio à primordio sue creacionis per incuriam seu suo vicio corrupta in hujus exilii confinio et convalle ploracionis devenit, divine miserationis respectu superna moderatio monstrata humanis rebus illuxit et cecitatis humane tenebras rutilo sue lucis splendore radiavit, quo splendore mens fidelium exita suis corporibus in tantum convaluit tantoque libertatis privilegio donatur, ut iterum prima stola velit indui et suis principiis per divinam graciam desideret refformari. Cujus antique benedictionis partem et incorruptionis vestem, ego Guillermus, qui et

Les éditeurs du recueil des Ordonnances ont corrigé « est » ; il vaut mieux sous-entendre « qui et G. appellatus est ».

Gaufridus, dux Acquitanorum

Guy, surnommé Geoffroy et enfin Guillaume VII, comte de Poitiers et de Gascogne, duc d’Aquitaine, fils puîné de Guillaume IV et d’Agnès de Bourgogne, sa seconde femme, succéda à tous les états et seigneuries de son frère Guillaume VI, l’an 1058, et mourut le 24 septembre 1086. (Voy. Besly, Hist. des comtes de Poictou, p. 96 et suiv.)

, per Dei misericordiam adipisci desiderans, et vel minimum cavens in futurum, in nomini Patris et Filii et Spiritus sancti, sancte et individue Trinitatis, pro enormitate scelerum meorum, pro redemptione anime mee, patris et matris et omnis mee parentele, ad honorem Dei omnipotentis et sancte ejus genitricis semperque virginis Marie, et sanctorum Apostolorum Johannis et Andree, statui michi construere monasterium in suburbio Pictavis, quatinus in extremo examine Dei miseracione protectus et sancte ejus genitricis et prefatorum apostolorum omniumque sanctorum orationibus munitus, facinorum meorum veniam adipisci merear, et de parte beate resurrectionis partem obtinere. Quod monasterium, tam illud quam ea que ad se pertinere videntur, constituo et confirmo liberum et francum cum omnibus que ad se pertinere videntur, quesitis et acquirendis, videlicet burgum novum quod ultra fluvium est situm, burgum quoque quod circa illud monasterium in terra et possessione ipsius monasterii construitur. In tanta enim libertate et quiete volo et jubeo esse illud monasterium ut, si aliquis pro aliquo forifacto vel eciam me irato, timore aliquo pressus, ad predictum burgum fugerit, liber et quietus ibi sine aliquo timore, velut in ecclesia, maneat, donec aut placitum faciat aut in pace discedat. Ceteri vero illic commorantes vel sua illic afferentes sive reponentes, homines scilicet extranei cum suis omnibus absque ulla injuria a meis hominibus sibi facta permaneant. Et ita volo eos esse quietos scilicet monachos et omnes res eorum hominumque eorum, ubilibet positorum, ut nullus meorum, non filius, non filia, non uxor, non aliquis propinquus, non dapifer, non prepositus, non mariscalcus, non serviens, aut in aliquo ministerio positus, aut monachos jamdicti monasterii aut homines eorum in quocumque loco eorum habitent, cogat sibi prebere arbergariam aut hospicium, aut querat ab eis quod tallatam vocant ; nec cogantur predictorum homines monachorum, ubicunque habitent, ire in excercitu aut expedicione, nisi agatur nomine belli. Concedo quoque eidem monasterio ea que usque ad muros civitatis acquirere poterit, nullam omnino in hiis consuetudinem michi retinens. Dono eciam ipsi monasterio stagnum ipsius civitatis contiguum, cum piscaria et cum molendinis in eodem positis, et cum consuetudine molarum que necessarie erunt eisdem molendinis, quas eciam molas homines consuetudinarii qui eas extrahunt, debent sine aliquo precio, exceptis molis veteribus, quas ipsi homines accipiunt ; quas eciam molas judex de Bonolio per consuetudinem debet conducere usque ad lacum de Forgiis, et judex de Forgiis usque ad molendina, sine aliquo precio. Dono quoque burgum Sancti Saturnini cum tampnatoribus suis consuetudinariis, et villam Agriciacum, villam similiter Puteoli et revestituram de Mosterolio, cum quesitis et acquirendis, et villam Januas que de Molerias dicitur ; terram quoque de Legudiaco et terram Prati Maledicti, atque terram de Passiaco cum silva, sicuti eas ab archiepiscopo Burdegalensi et canonicis ejusdem ecclesie acquisivi. Dono eciam in territorio Sanctonensi medietatem ville et terrarum de Olalei et cimiterium ecclesie, et Jarretam cum terris sibi appendentibus, et revestituram de Boeth et de Usello, et revestituram de Cormer et terram et silvam, a via quo trensit (sic) per Carretam usque ad viam quo transit per Ussel, totum ab integro quod ad me pertinebat, et medietatem pedagii de Ussel. Similiter dono et concedo revestituram de Boeth cum quesitis et acquirendis, et vineas eidem ville contiguas, quas ego hucusque in dominio habueram, et quamdam silvam in territorio Sanctone ad revestituram faciendam, scilicet inter Pontem Labeium et Rametam et Botirault et Malam villam. Dono quoque predicto monasterio pascherium de Jart et quartam partem de Olerum, excepta turre et castro. Similiter dono et concedo sibi villam de Bennaco cum cassamentis militum, sicuti eam hucusque habueram, et pascherium ejusdem ville, et medietatem terre de Cuguls, et medietariam de Genbergaria et in burgo Sancti Johannis de Angeriaco decem modios vini censuales unoquoque anno ; et dono Ortigiam extremam. Dono quoque monachis sepefati monasterii per totam terram meam vendera et pedagia de rebus suis, et concedo eis ut nullam omnino consuetudinem dent in tota terra mea. Concedo eciam eis omnes silvas meas ad ignem, ad domos suas conficiendas vel reedificandas, sive ad omnia necessaria facienda, tam hiis qui habitant in monasterio, quam hiis qui sunt per obediencias. Auctorizo autem et concedo quidquid milites mei vel homines mei in honore meo sive de honore meo dederint vel vendiderint predicto monasterio. De contencionibus autem et querelis que plerumque eciam inter fratres oriuntur, si contigerit oriri inter homines meos et homines monachorum, precipio ut ita teneatur : si enim aliquando aliquis hominum monachorum tortitudinem fecerit preposito meo, nullomodo cogat eum prepositus meus venire in curiam suam rectum facere, sed magis facta proclamacione monachis et statuto die vadat in curiam eorum, ante abbatem aut prepositum, et ibi accipiat quicquid curia judicaverit. Concedo eciam eis pedagium Pontis novi et in aqua Clennis hoc quod meum erat, à molendinis de Cassanniis usque ad molendina de Sartis.

Facta est [hec] carta donacionis, sive firmacionis, seu concessionis, v. kalendas februarii anno ab Incarnacione Domini millesimo lxxvii

Le 28 janvier 1077.

, indictione xv, regnante rege Francorum Philipo, pontificatum romanum tenente Gregorio VIIe papa, anno pontificatus ejus iiii

Grégoire VII, par bulle du 9 décembre (v. des ides) 1076, donna à Hugues, abbé de Cluny, et à ses successeurs, le gouvernement de l’abbaye de Montierneuf. (Coll. dom Fonteneau, t. XIX, p. 23 ; Gallia christ., t. II, Instr., col. 353.)

, in manu Willelmi, filii mei. Istis audientibus et videntibus : Oddone, abbate Sancti Johannis

« Oddone » ne peut être qu’une faute de copiste pour « Guidone » ou « Widone ». Guy, d’abord prieur de Cluny, puis premier abbé de Saint-Jean ou de Montierneuf, resta à la tête de cette abbaye jusqu’en 1092, année de sa mort. (Gall. christ., t. II, col. 1264.)

, Guidone de Navert, Hugone de Leziniaco

Hugues VI de Lusignan, dit le Brun ou le Diable, fils d’Hugues V dit le Pieux, et d’Almodis, fille de Bernard Ier, comte de la Marche, succéda à son père, tué à la porte de son château de Lusignan, dans un combat contre Guillaume VI, comte de Poitou, duc d’Aquitaine, qui lui avait déclaré la guerre, le 8 octobre 1060 ; il mourut en Terre Sainte, l’an 1110.

, Borrello de Mosteriolo, Beraldo de Dunis, Magingodo de Mella, Girberto de Sancto Johanne, Gauterio de Corbornario, Oddone preposito, Poncio monacho et Vitale monacho

Le diplôme de Guillaume VII, duc d’Aquitaine et comte de Poitou, du 28 janvier 1077, a été publié par Besly, Hist. des comtes de Poictou, p. 366, et par la Gallia christiana, t. II, Instr., col. 351.

.

Item terciarum :

Sicut pigrorum desidia jubetur esse devitanda, sic bonorum justicia nobis proponitur imitanda, unde est illud : Declina a malo et fac bonum. Ergo festinare debemus laborando bonorum imitatores fieri, operantes bonum ad omnes, religionis loca fundando, fundata augmentando, augmentata conservando. Et ideo ego Willermus, Acquittanorum dux

Guillaume VIII, comte de Poitiers et duc d’Aquitaine, fils aîné de Guy Geoffroy, dit Guillaume VII, n’avait que quinze ans à la mort de son père (24 septembre 1086) et régna quarante ans. La date de son décès est le 13 février 1126. (Besly, op. cit., p. 108-128.)

, videns me non posse sufficere ad faciendum tam magna opera, sicut patres mei fecerunt, in hoc utiliter michi consului si eorum bona facta conservem, inter que precipue statui apud me custodire et conservare et pro posse augmentare monasterium quod bone memorie pater meus Willermus, qui et Gaufredus, in suburbio Pictave civitatis à fundamentis edificavit in honore beate Dei genitricis Marie et sanctorum apostolorum Johannis et Andree, ubi ipse tumulatus jacet et ego, Deo volente, tumulandus sum, et omnis deinceps progenies mea, quodque eciam de suis reditibus et consuetudinibus ditavit, et tam auctoritate apostolica quam regia liberum et francum absque ulla inquietudine posterorum meorum imperpetuum esse confirmavit. Et ego, concedente uxore mea et filio meo Willermo, concedo et confirmo cuncta munimenta que pater meus eidem monasterio dedit. Et concedo tam illud quam ea que ad se pertinere videntur sub tocius libertatis munimine ab omni inquietudine cujuscunque potestatis, tam filii mei quam parentum et omnium successorum meorum, fundum scilicet in quo monasterium sedet, constituo et concedo liberum et francum burgum quod circa illud monasterium est, usque ad mercatum novum, et in mercato novo unam ruam. Et concedo cuncta que usque ad muros civitatis acquirere poterit, nullam ibi consuetudinem retinens, et burgum ultra fluvium Clennis et burgum Sancti Saturnini cum tampnatoribus consuetudinariis, et concedo liberos et francos omnes homines qui pertinent ad jus illius ecclesie, ubicunque sint, ab omni excercitu et expedicione, excepta illa que vocatur nomine belli, cum scilicet dominus Pictavis bellum acturus est cum aliquo inimicorum suorum. Et concedo omnia ad ipsum monasterium pertinentia libera ab hospicio et abergaria, sicut pater meus voluit et jussit ea esse libera et quieta, ita ut nec ego nec uxor mea nec filius nec aliquis propinquus, non dapifer, non marescallus, non cubicularius, non prepositus aliquis meus aut serviens in obedienciis ipsius monasterii aut locis hospicium aut abergariam per consuetudinem querat, aut tailliatam faciat, aut sibi dari cogat. Concedo et confirmo immunitatem illam quam pater meus loco illi dedit, ut scilicet quicunque aliquo timore pressus aut forifacto gravatus vel eciam propter dominum Pictavensem iratum, ad predictum burgum fugerit, liber et quietus ibi sine timore maneat, donec aut placitum faciat aut in pace discedat ; ceteri vero homines et illius burgi et qui sua illic afferunt, et qui sua illic reponunt, ut quieti cum suis hominibus a meis et a cunctis hominibus sint, precipio. Concedo aquam ipsius Clennis à molendinis de Chassanhnis usque quo Biberis intra[t] in Clenne et ab exclusa vetula usque ad molendinum de Charuellis et usque ad molendinum de Sartis. Concedo pedagium Pontis novi totum, sicut tempore patris mei habuerunt, et stagnum civitati contiguum, cum piscaria et cum molendinis et cum consuetudine molarum, quas homines consuetudinarii extrahunt sine precio, exceptis molis veteribus que de ipsis molendinis proiciuntur ; molas autem novas debet judex de Bonolio conducere per consuetudinem sine precio usque ad lacum de Forgiis, et judex de Forgiis usque ad molendina, absque ullo precio. Concedo villam Januas que Moleria dicitur, cum hiis que ego adjeci de eadem silva, villam Agriciacum, villam Puteolli. Concedo terram Prati Maledicti, terram quoque de Passiaco cum silva et terram de Lugudiaco, cum pratis, et silvam que dicitur Trossea, que omnia pater meus beneficio acquisivit ab archiepiscopo Burdegalensi et clericis ejus. Concedo villam que dicitur de Mosteriolo ; concedo et ea que pater meus dedit prefato monasterio in territorio Sanctonensi, medietatem ville et terrarum de Ololey et cimiterium ecclesie, et Jarreriam cum terris sibi appendentibus, villam de Faya et Cormer, villam de Boeto, villam de Xartis, et concedo pascherium de Jart, et ea que pater meus dedit et in Oleron et villam de Bennaco. Concedo Ortigiam extremam et ad Burdegalem unum furnum de sub turre. Concedo autem quicquid Hugo de Mota, filius Rogerii, dapiferi patris mei, eidem monasterio dedit, ad Sanctam scilicet Flamem duas borderias et terram de Monte rubeo et de Mota cum conca de Pratis et cum conca de Cauda Vacce. Et concedo quicquid mei homines de honore meo sive in honore meo eis dederunt vel vendiderunt, et à modo daturi sunt vel vendituri, in quibus consuetudines meas concedo eis. Ego vero jandudum eidem monasterio dederam in civitate de levagio salis duas partes, et ad eas colligendas eidem hominem proprium habere, et nunc iterum concedo. Dono eciam eis truncatas à stagno usque ad fluvium Clennis, turrem quoque que sub stagno est do in custodia abbatis et monachorum. Dono et remitto eis omnes consuetudines quas habebam in terra de Puteo et de Magnecio et de Pachiaco. Et dono maresia de Jart libera et quicta cum cappella Sancti Nicolai. Et concedo ea que Alderardis, mater mea, dedit eciam eidem monasterio in Jart. Concedo et omnia alia que pater meus predicto monasterio dedit. Dono autem Podium de Serra eidem monasterio, ubi et jubeo me tumulari. Concedo eciam eidem loco omnes silvas meas, sicut pater meus eas dederat eis ad ignem, ad domos edificandas et reficiendas et ad omnia necessaria facienda, tam hiis qui sunt in monasterio quam hiis qui sunt per obedian[cia]s. Dono eciam silvam mortuam de Moleria, quam acquisivi beneficio et amicicia ab Helia de Calviniaco

Élie de Chauvigny, sans doute fils d’Aimery, prévôt féodal de Chauvigny. (Voy. Arch. hist. du Poitou, t. III, p. 140 ; Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., t. II, p. 352.)

. Dono eciam omnia pedagia mea et monachis et hominibus terre eorum, ut omnes sint liberi de pedagiis terre mee, in eundo sive in redeundo ; et monachis dono omnem consuetudinem per totam terram meam, ut liceat eis sua propria et suis usibus sine injuria emere et vendere. De contencionibus autem et querelis que plerumque oriuntur inter homines meos et homines monachorum, precipio ut ita teneatur sicut factum est tempore patris mei, ita ut, si tortitudinem aliquis hominum monachorum fecerit preposito meo, non cogat eum prepositus meus venire in curiam suam rectum facere, sed magis facta proclamacione monachis et statuta die vadat in curiam eorum, ante abbatem aut prepositum, et ibi accipiat rectum quod curia

Le texte porte par erreur « circa ».

eorum judicaverit. Precipio eciam ut, sicut pater meus instituerat et preceperat, ut omnes qui sua in burgo ponunt et vendunt, quecunque merces sit, sine ulla contradictione mei vel meorum debitam consuetudinem monachis reddent. Cursores

Cursores, marchands ambulants, et non proxénètes, comme le traduisent les éditeurs des Ordonnances des rois de France, t. XIX, p. 692 note.

vero qui sunt de civitate et stant ibi vendentes et ementes, si in burgo illo venerint et sua vendiderint, debitam consuetudinem monachis reddant, et ipsi idem in civitate hominibus meis ipsam eandem consuetudinem, sublata omni injuria, persolvant.

Factum est hoc in manu Marchi, predicti monasterii abbatis, et Duranni, prioris Sancti Nicolai, et Martini, monachi

Le texte de ce diplôme imprimé par Besly, « ex Tabulario Monasterii novi Pictavensis », porte après « Martini monachi » et avant la liste des témoins : « anno Incarnationis dominice 1087, regnante Philippo Francorum rege ». (Op. cit., p. 404.) Cette date n’est évidemment pas une interpolation de l’auteur de l’Histoire des comtes de Poitou. Il faut plutôt accuser le scribe de la Chancellerie de l’avoir omise par distraction sur le registre du Trésor des chartes. Un fragment du diplôme de Guillaume VIII a été publié aussi par L. Vialart, Hist. généalogique de la maison de Surgères, Paris, in-fol., 1717, p. 41.

. Testes sunt : Savaricus, clericus, Hugo, frater meus, Hugo de Doet, Aimo Rufus, Bernardus Dormiens, Mainardus cementarius, Adalelmus cliens, Guillermus Magingodi et Petrus Nivardi, Arveus cubicularius, Frotgerius cocus, et alii plures.

Item quartarum litterarum sequitur forma :

Gratia Dei omnipotentis, in cujus manu sunt potestates et omnia jura regnorum, post mortem patris mei sublimatus in principatum, ego Willermus, dux Acquittanie

Guillaume IX, comte de Poitiers et duc d’Aquitaine, succéda à son père Guillaume VIII le 11 février 1126 et mourut, suivant Besly, le 11 avril 1137, en route pour se rendre à Saint-Jacques de Compostelle, où son corps fut transporté. Peu de temps après, le mariage de sa fille Eléonore avec le fils de Louis VI qui avait été convenu antérieurement, fut célébré à Bordeaux, et le 1er août suivant elle devint reine de France. (Besly, op. cit., p. 137.)

, prima vice post obsequium funeris ejus qua Pictavis veni, descendi invisere fratres Novi Monasterii et videre sepulturam illius. Et fratres ejusdem ecclesie exeuntes obviam michi, ornamentis ecclesiasticis induti, susceperunt me cum digno honore et gloria, completo cantu et oratione conventus, omnes, ego et proceres mei et maxima multitudo populi que confluxerat, venimus in capitulum. Videns vero sepulturam tam carissimi et victoriosissimi ducis, tacens dolore cordis intrinsecus commota sunt omnia viscera mea super patre meo, et post multas lacrimas et egra suspiria et consolacione procerum meorum et circum ad statum relevatus, revixit spiritus meus, et representate sunt michi carte, quas avus meus et pater fecerant, concesserant et signis suis firmaverant, de constructione illius ecclesie et immunitate et omnium hominum et cunctarum rerum que pertinent illi ecclesie libertate. Pietate itaque patris mei ducis et consilio illustrium virorum qui mecum erant commotus, pro remedio anime mee, patris et avi mei, et pro salute mea, illa omnia que ecclesie Sancti Johannis Evangeliste Novi Monasterii avus meus donavit, concessit et firmavit, et similiter pater meus donavit, concessit et confirmavit, concedo, confirmo et in perpetuum tenenda precipio, tam in acquisitis quam in acquirendis. Concedo et confirmo cuncta munimenta que avus et pater meus eidem monasterio dederunt, et concedo tam illud quam ea que a[d] se pertinere videntur, sub tocius libertatis munimine ab omni inquietudine cujuscunque potestatis et omnium parentum meorum cunctorumque successorum meorum, videlicet ipsum monasterium, sicut patres mei fecerunt, constituo liberum et francum burgum quod circa illud monasterium est et ea que nunc habent in mercato novo, et sicut avus et pater meus concesserunt, quicquid poterunt acquirere, usque ad muros civitatis concedo, nullam ibi consuetudinem michi retinens. Concedo quoque burgum ultra aquam fluvii et fontem qui est in ripa fluminis et aquam à molendinis de Chassegnes usque quo Biberis intrat in Clennem, et a vetula exclusa usque ad molendina de Charruhel, et inde usque ad molendina de Xartis. Concedo pedagium Pontis novi totum, sicut tempore avi et patris mei, totum habuerunt et tenuerunt. Concedo burgum Sancti Saturnini cum tampnatoribus suis, sicut ab avo meo datum est liberum et francum, et sicut hactenus habuerunt ; et concedo omnes homines qui pertinent ad jus illius ecclesie, ubicunque sint, ab omni excercitu et expedicione, excepta illa que vocatur nomine belli, liberos et francos, et omnia loca ad ipsum monasterium pertinencia concedo libera ab hospicio et arbergaria, sicut avus et pater meus voluerunt et jusserunt esse libera et quicta, ita ut nec ego, nec uxor, nec aliquis liberorum meorum, non propinquus, non senescallus, non marescalleus, non cubicularius, non prepositus aliquis meus, aut serviens in obedienciis ipsius monasterii aut locis hospicium vel arbergariam per consuetudinem querat, aut tailliatam faciat, aut sibi dari aliquid cogat. Concedo quoque stagnum civitati contiguum, quod Agnes

Ou « Aques ». Les éditeurs du recueil des Ordonnances des rois de France ont imprimé « Aquas ».

fecit ad munimentum civitatis, quodque avus meus habuerat in dominio solidum et quictum, ita ut nullus posset cursum aque ad hoc stagnum venientis impedire, et ita solidum et quictum donavit illud prefato monasterio, cum piscaria et cum molendinis, et consuetudinem molarum, quas homines consuetudinarii extrahunt sine precio, exceptis molis veteribus que de ipsis molendinis proiciuntur. Quas eciam molas judex de Bonolio per consuetudinem debet ducere usque ad lacum de Forgiis, et judex de Forgiis usque ad molendina, absque ullo precio. Homines vero illos qui molas extrahunt debent monachi tueri et custodire. Concedo villam Agriciacum et villam Januas, que Moleria dicitur, cum hiis que pater meus adjecit de eadem silva, villam similiter Puteoli, terram quoque Prati Maledicti et terram de Paisiaco cum silva, et ea que sunt ad Legudiacum, sicut ea avus meus beneficio acquisivit ab archiepiscopo Burdegalensi et clericis ejus. Concedo revestituram de Mosteriolo et revestituram de Usello et Cormer, et revestituram de Boeto, et revestituram de Xartis, sicut determinate sunt, et medietatem pedagii de Usello, et medietatem de Lolayo et terrarum illi pertinencium, et cimiterium ecclesie, et Jarretam cum terris sibi appendentibus. Concedo et villam Bennaci cum casamentis militum et pascherium ejusdem ville, et medietatem terre de Cugulz et medietatem de Gibergeria, et in burgo Angeriacensi decem modios vini censuales uno quoque anno, et quartam partem de Oleron, excepta turre et castro, et in Burdegalensi territorio Ortigiam et extremam, et in Burdegalia civitate furnum unum de sub turre, et pascherium de Jart cum loco illo ubi est cappella Sancti Nicolai, et cum hiis omnibus rebus quas Alderardis

Aldéarde, femme de Geoffroy, dit Guillaume VII, duc d’Aquitaine (voy. ci-dessus, p. 73, note). Les éditeurs de la Gallia christiana ont publié une charte non datée d’Aldéarde, qu’ils attribuent à l’année 1120 ou environ, par laquelle elle donne à l’abbaye de Montierneuf « omnes metarias quas in Jard habeo, quasque etiam mihi predictus vir meus pro sponsalibus dederat ». (T. II, Instr., col. 355.)

, avia mea, predicto monasterio donavit. Et concedo maresia et Poudium de Serra, que pater meus illi donavit. Et concedo de levagio salis duas partes, tercia retenta, quas pater meus illi donavit, ad quas eciam colligendas concessit monachis proprium habere hominem, et ego eodem modo concedo. Concedo eciam silvam de Moleriis, et vivam et mortuam, sicut eam pater meus amicicia et beneficio acquisivit ab Helya de Calviniaco. Concedo et omnes silvas meas, sicut avus et pater meus jam olim dederunt eis ad ignem, ad domos faciendas vel reficiendas, et ad omnia neccessaria facienda, tam hiis qui habitant in monasterio quam hiis qui sunt per obediencias. Concedo eis truncatas a stagno usque ad fluvium Clennis et turrem que sub stagno est, ut sit in custodia monachorum, sicut pater meus olim preceperat. Concedo consuetudines de Puteo et Magnecio, [et] de Pachiaco, quas eis pater meus donavit. Concedo eciam quicquid Hugo de Mota, filius Rotgerii, dapiferi avi mei, predicto monasterio dedit. Concedo quicquid homines mei de honore meo sive in honore meo eis dederint vel vendiderint, et amodo daturi sunt vel vendituri, de quibus et in quibus omnes consuetudines meas concedo eis. Concedo eciam eisdem monachis omnia pedagia mea et omnem consuetudinem per totam terram meam, ut liceat eis sua propria et suis usibus vendere et emere sine injuria. Precipio eciam ut, sicut avus et pater meus instituerant et preceperant, ut omnes qui sua in burgo monachorum ponunt et vendunt, quecunque merces sit, sine ulla contradictione mei vel meorum, debitam consuetudinem monachis reddant. Similiter mercatores extranei, si transitum illinc habuerint et sua vendiderint, eis debitam consuetudinem reddant. Cursores qui habitant in civitate, ementes et vendentes, si et in burgo illo venerint et sua ibi vendiderint, debitam consuetudinem monachis reddant, et ipsi idem civitatem ascendentes non aliam quam ipsam consuetudinem, sublata omni injuria, persolvant. Omnes vero illic commorantes, vel sua illic afferentes sive reponentes, quieti cum suis omnibus absque ulla injuria a meis hominibus sibi facta permaneant. De contencionibus autem et querelis que plerumque oriuntur inter homines meos et homines monachorum precipio ut ita teneatur, sicut factum est tempore avi et patris mei, ita ut si tortitudinem aliquis monachorum hominum fecerit preposito meo, non cogat eum prepositus meus venire in curiam suam et rectum facere, sed magis facta proclamacione monachis et statuta die vadat in curiam eorum, ante abbatem aut prepositum illorum, et ibi accipiat quicquid eorum curia judicaverit, sicut factum comperi a patre meo. Hoc et ego tenebo et posteros meos tenere jubeo, et similiter per omnes obediencias illorum a meis hominibus teneri precipio ; non enim volo monasterium illud de honore quem avus meus illi dedit et pater meus tenuit, imminuere, sed eadem libertatem et immunitatem quam illi dederunt et tenuerunt volo et jubeo ibi conservari, ita ut, si aliquis pro aliquo forisfacto vel eciam me irato timore pressus, ad predictum burgum fugerit, liber et quietus ibi maneat, donec aut placitum faciat aut in pace discedat, sicut semper observatum est tempore avi et patris mei. Si quis vero regum, comitum, episcoporum, judicum ac aliarum secularium personarum hanc nostre donacionis et concessionis, sive confirmacionis cartam calumpniatus fuerit vel perturbaverit, nisi emendendo satisfecerit, iram Dei omnipotentis incurrat et in extremo examine districte ulcioni subjaceat.

Facta est hec carta confirmacionis hujus anno Dominice Incarnacionis millesimo c. xxvi, indictione quarta, qum fuit Pascha III. idus aprilis, regis Francorum Ludovici anno septimo decimo, Willermo Adalelmi Pictavensi sedi presidente

Guillaume, « Guillelmus cognomento Adelelmi », dit la Gallia christ., fut consacré évêque de Poitiers le 1er juin 1124, occupa ce siège jusqu’en 1130 et mourut la veille des nones d’octobre 1140. (Tome II, col. 1172.)

, anno primo mei principatus. Hujus rei testes sunt : Wlgrinus, comes Angolimensis

Wulgrin II Taillefer, fils de Guillaume III, comte d’Angoulême de 1120 à 1140.

, Aymericus vice comes Thoarcensis

Aimery V, douzième vicomte de Thouars, fils d’Herbert II, succéda à Geoffroy II, son oncle, et tint la vicomté de 1126 à 1139, suivant les généalogistes.

, maritus sororis mee, Ramnulfus, abbas Sancti Petri Deaurati

Ramnulphe, aliàs Radulphus, de Nieul ou de Brigueil, lit-on dans la Gallia christ., était déjà abbé de Saint-Pierre du Dorat et chanoine de Saint-Étienne de Limoges, l’an 1107. (T. II, col. 549.)

, Robertus Burgundius, Chotardus de Mauritania, Willermus de Asperimonte

Guillaume d’Aspremont, probablement fils de Raoul, vivait entre les années 1088 et 1140. Il prit part à la première croisade et son nom figure au bas de plusieurs chartes de l’abbaye du Boisgrolland. (Voy. Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., t. I, p. 130.)

et Arveus de Morolio, frater ejus, Radulphus Acharie, Willermus Fortonis

On trouve dans la Gallia christiana un fragment assez important de ce diplôme de Guillaume IX, duc d’Aquitaine. (Tome II, Instrumenta, col. 353.) Dom Fonteneau en a recueilli une copie d’après l’original existant dans les archives de l’abbaye de Montierneuf. (T. XIX, p. 185, 189.)

.

Item quintarum litterarum sequitur tenor :

Ludovicus, Dei gracia Francorum rex et dux Acquitanorum, omnibus in perpetuum. Pium opus ac rege dignum nos facere credimus, quando in posterum libertati ecclesiastice et quieti benigna solicitudine providemus. Hoc nimirum intuitu ecclesiam beati Johannis de Monasterio novo, cum universis rebus et possessionibus suis, sub nostra protectione suscipimus et auctoritate regie patrocinio communimus, beneficia quoque omnia ac dona universa quecunque ab antecessoribus nostris ducibus Acquitanorum eidem ecclesie collata sunt, prout ipsorum ducum scripta continent et protestantur, cum omni integritate sibi tenenda concedimus et per presentem paginam auctoritatis nostre precepto perhenni stabilitate corroboramus. Statuimus eciam, superaddentes ex parte nostra, ut pro destructione domorum suarum que circa turrim de stagno erant, habeat deinceps singulis annis prefata ecclesia viginti solidos Pictavensis monete in civitate nostra Pictavis, qui de primis reditibus ferie quadragesimalis, sine contradictione primi reddantur. Preterea damus eidem ecclesie atque concedimus ut deinceps proprium ponat et habeat servientem, qui de levagio salis accipiat debitam et consuetam partem suam ; in nemore eciam nostro, quod Molerias appellatur, sibi concedimus trencheras illas, quas ab antiquo dono ducis Acquittanorum habuit, perpetuo possidendas. Ut igitur hoc nostre constitucionis preceptum ratum perhenniter maneat et inconcussum, scripto commandari, sigilli nostri auctoritate muniri nostrique nominis subter inscripto caractere corroborari precipimus. Actum Pictavis, anno Incarnacionis dominice m. c° xlvi°, regni nostro decimo. Astantibus in palacio nostro quorum nomina subtitulata sunt et signa. — Signum Radulphi, Viromandie comitis

Raoul Ier ou IV, dit le Vaillant, fils d’Hugues le Grand, comte de Vermandois et de Valois, de 1116 à 1152, grand sénéchal de France.

, dapiferi nostri. S. Guillermi, buticularii

Guillaume Ier de Senlis, déjà grand bouteiller sous Louis le Gros, fut titulaire de cet office jusqu’au 9 juin 1147, qu’il partit avec Louis VII pour la Croisade.

. S. Mathei, camerarii

Mathieu Ier comte de Beaumont, chambrier de France de 1139 à 1151.

. S. Mathei, constabularii

Mathieu Ier de Montmorency, connétable de France de 1138 à 1160.

. Data per manum Cadurci cancellarii

La date du diplôme de Louis VII doit être fixée entre le 1er août 1146 et le 2 février 1147 n.s. (A. Luchaire, Études sur les actes de Louis VII, Paris, 1885, in-4°.) L’original s’en trouve aux Archives de la Vienne, fonds de Montierneuf, et une copie dans la collection de dom Fonteneau, t. XIX, p. 227, d’après le cartulaire de l’abbaye. Duchesne en a publié un fragment dans l’Hist. généal. de la maison de Montmorency, in-fol., Preuves, p. 46. Voir aussi Teulet, Layettes du Trésor des chartes, in-4°, t. I, n° 94, qui en donne un résumé et les formules finales, d’après une copie de la seconde moitié du xiiie siècle.

. (Monogramme.)

Item et sequitur sextarum forma :

In nomine sancte et individue Trinitatis. Quoniam hominum memoria cito labitur, nec ab hoc inter posteros altercacionis scrupulus oriatur, ego Alienor, Dei gracia Acquitanorum ducissa et Normannorum

Le mariage d’Aliénor d’Aquitaine avec Louis VII avait été déclaré nul par le concile de Beaugency, le 18 mars 1152. On sait qu’elle épousa, peu de temps après, Henri Plantagenet, qui devint roi d’Angleterre en 1155, et qu’elle passa les dernières années de sa vie à l’abbaye de Fontevrault.

, signiffico tam presentibus quam futuris quod, consilio illustrium virorum et precibus Helie, abbatis monachorum Novi Monasterii, et pro remedio anime mee, patris et avi mei, illa omnia que ecclesie Sancti Johannis Ewangeliste Novi Monasterii attavus meus donavit, concessit et confirmavit, et similiter avus et pater meus donaverunt, concesserunt et confirmaverunt, tam in acquisitis quam in acquirendis, do, concedo et confirmo, et in perpetuum tenenda precipio. Concedo iterum et confirmo cuncta munimenta que attavus, avus et pater meus eidem monasterio dederunt et omnia illa que ad se pertinere videntur sub tocius libertatis munimine pono, et ab omni inquietudine cujuscunque potestatis et omnium parentum meorum cunctorumque successorum meorum, libera esse concedo, et omnia illa que in carta, quam pater meus eis fieri fecit et sigillo suo firmari precepit, continentur, rata habeo, et Helie, abbati, et monachis Novi Monasterii successoribusque suis in perpetuum tenenda et quiete possidenda concedo. Hujus autem doni et concessionis testes sunt : Ebulo de Maloleonne et Radulphus, frater ejus, et Ugo vicecomes Castri Airaudi et Radulphus, frater ejus, et Segebrandus Chabot, et Saldebrol, constabularius, et alii quamplures. Ut autem firma et illibata permaneat, sigilli mei auctoritate firmari precepi. Hec autem carta data est Pictavis, per manum Bernardi, cancellarii mei, anno m° c° lii° ab Incarnacione Domini, vii° kalendas junii

La charte d’Aliénor du 26 mai 1152, dont une copie se trouve dans la collection de dom Fonteneau, t. XIX, p. 235, ne paraît pas avoir été publiée ailleurs que dans le recueil des Ordonnances des rois de France. Toutefois les auteurs de la Gallia christ. l’ont connue et citée à sa date, dans la chronologie des abbés de Montierneuf. (Tome II, col. 1267.)

.

Quas quidem sex litteras superius insertas omniaque et singula in eis contenta, gratas et ratas grataque et rata habentes, eas et ea volumus, laudamus, approbamus, ratifficamus ac tenore presentium, in quantum prefati religiosi abbas et conventus dicte ecclesie Monasterii Novi eorumque predecessores ipsis rite et debite usi sunt, confirmamus. Mandantes dilectis et fidelibus nostris gentibus nostrum presens tenentibus Parlamentum, et que futura tenebunt Parlamenta, gentibus Compotorum nostrorum ac thesaurariis, nec non generalibus consiliariis super facto omnium financiarum nostrarum, ac senescallo Pictavensi ceterisque justiciariis et officiariis nostris, vel eorum locatenentibus, presentibus et futuris, et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, quatinus omnia et singula in eisdem litteris contenta teneant, custodiant, adimpleant, teneri et custodiri et de puncto in punctum adimpleri et inviolabiliter observari faciant, omnia in contrarium facta, si que sint, ad statum pristinum et debitum reducendo aut reduci faciendo indilate. Quod ut firmum et stabile perpetuis perseveret temporibus, nostrum presentibus litteris fecimus apponi sigillum, in absentia magni ordinatum. Nostro in aliis et alieno jure semper salvo. Datum Pictavis, mense novembris anno Domini millesimo cccc° tricesimo quarto, regni vero nostri decimo tercio

Ces différents actes sont contenus dans de nouvelles confirmations données par Louis XI, à Poitiers, en janvier 1462 n.s., et par Charles VIII, aussi à Poitiers, au mois de février 1487 n.s. Le tout a été publié, d’après la même source (registre JJ. 218), dans le recueil des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XIX, pp. 687-697. La date des lettres de Charles VII y est imprimée 1435 au lieu de 1434, ce qui provient d’une faute de lecture : « quarto » pris pour « quinto ». Ce n’est pas la seule, du reste, que l’on ait à reprocher aux éditeurs dans la publication de ces textes.

.

MXL 9 avril 1435

Lettres confirmant la donation faite par le roi à Artur de Bretagne, comte de Richemont, de la terre et seigneurie de Parthenay et des autres domaines de la succession de Jean Larchevêque, nonobstant les procès pendants au Parlement touchant ladite succession.

X1a 8604, fol. 125 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 90-100

Charles, par la grace de Dieu, etc. Oye l’umble supplicacion et requeste à nous faicte, en la presence de plusieurs seigneurs de nostre sang et lignage et des gens de nostre grant conseil, par nostre très chier et amé cousin Artur de Bretaigne, conte de Richemont, connestable de France, disant que, à certains et justes tiltres et par plusieurs et divers moyens et transpors raisonnablement fondez et cy après declairez, à lui appartiennent et doivent appartenir les terres et seigneuries de Partenay, Voulvent, Mervent, le Couldray Salbart, Secondigny, Chastelaillon, Matefelon, et autres terres appartenans et appendans à ycelles terres et seigneuries, qui jadiz furent et appartindrent à feu Jehan Larcevesque, en son vivant chevalier ; et que d’icelles choses il a jà longuement joy, tant par vertu de certain don et transport, que feu nostre oncle Jehan, derrenier duc de Berry et conte de Poictou, lui fist d’icelles terres et seigneuries, comme à luy forfaictes et confisquées, au moins ce que tenu en estoit de sadicte conté de Poictou, pour cause de la felonnie et rebellion que ledit Larcevesque, qui estoit son vassal et subgect, commist à l’encontre de luy, ainsi que plus à plain est contenu et peut apparoir par lettres d’icellui nostre oncle, faictes et données le sixiesme jour de may l’an mil quatre cens quinze, comme aussi par autre don et transport que feu nostre très chier frere, Loys duc de Guyenne, par ses lettres données le xxiiie jour dudit mois de may, fist d’icelles terres et seigneuries à nostre dit cousin et connestable

Sur le don fait à Artur de Bretagne, comte de Richemont, par le dauphin Louis, duc de Guyenne, des biens confisqués de Jean Larchevêque, sr de Parthenay, cf. notre volume précédent, p. 307, note.

, lesquelles nostre dit frere disoit lui appartenir par vertu du don que fait lui en avoit feu nostre très chier seigneur et pere, cui Dieu pardoint, par certaines ses lettres données le xiiiie jour dudit mois de may, par la forfaicture et confiscacion dudit feu Larcevesque, qui s’estoit constitué et par effect demonstré son rebelle et desobeissant, en lui faisant et à ses vassaulx et subgiez toute guerre et tenant à l’encontre de lui le party de Bourgoigne, et par ce commettant envers lui crime de leze majesté. Lequel nostre cousin le connestable, pour prandre et apprehender la possession des dictes terres et executer les dictes lettres de nostre dit pere, selon leur forme et teneur, se feust par leur bon plaisir et ordonnance, tantost après ces choses, tiré ou dit païs de Poictou et tant feist que par puissance de main armée, à ses grans fraiz et mises, mist en obeissance de nostre dit seigneur et pere toutes les places dessus dictes, excepté seulement les ville et chastel dudit Partenay, qui pour lors demeurerent en leur estat

L’on a vu dans notre volume précédent (p. 286 note) que Jean Larchevêque ne se laissa pas dépouiller sans résistance et que le comte de Richemont fut envoyé en Poitou, avec le titre de capitaine général et la mission de réduire à la soumission le sire de Parthenay et ses alliés. Il s’empara promptement des places secondaires ; celle de Vouvant lui fut livrée par la dame de Parthenay elle-même. Mais Parthenay, une des plus fortes villes du Poitou, avait été mise en état de défense et pouvait tenir longtemps. Richemont en faisait le siège, quand il fut rappelé par des lettres pressantes du roi et du dauphin, au commencement d’octobre 1415. (Sur ces opérations, voy. Ledain, La Gâtine historique, p. 193-194, et E. Cosneau, Le connétable de Richemont, p. 39, 40.)

, parce que icelui nostre dit cousin, en obeissant au mandement de nostre dit seigneur et pere, pour lui faire greigneur service, ala en ce temps à la journée de Giencourt

Sic. Lisez « Azincourt ».

, où il fut prisonnier des Anglois, noz ennemis, qui longuement l’ont detenu et empeschié de sa personne ou païs et royaume d’Angleterre. Pendant lequel empeschement et prison de nostre dit cousin, et après nostre partement de nostre ville de Paris, pour ce que ledit Jehan Larcevesque continua en ses rebellions et desobeissances, nous feismes assieger les diz ville et chastel de Partenay, et après feismes certain contract avec ledit Larcevesque, par lequel il nous transporta la proprieté de toutes les dictes terres, moyennant certaine somme de deniers que paier lui devions, à plusieurs et divers termes et payemens, par tele condicion que, se faulte avoit en aucuns d’iceulx payemens, le dit contract seroit reputé pour nul et demourroient les deniers payez pour les termes escheuz au dit Jehan Larcevesque comme siens, franchement et quictement, sans ce que tenu fust d’aucune chose en restituer ; et fut dit, parlé et accordé, en faisant ledit contract, que les dictes terres et seigneuries estans en la dicte conté de Poictou demourroient unies et annexées oudit conté de Poictou, sans ce que separer les en deussions ne peussions. Et, pour ce que, en ensuivant et continuant les termes et condicions dessus dictes, eussions faiz plusieurs payemens des sommes promises audit Larcevesque, à cause du dit contract, mais depuis, obstans plusieurs grans charges que avions à soustenir, eussions cessé de payer, par aucuns termes, les sommes que, pour raison des diz contraz, devions et estions tenuz paier

C’est par contrat passé à Bourges, le 19 novembre 1419, ratifié le 21 janvier suivant, que le sire de Parthenay vendit définitivement ses domaines au dauphin Charles, régent du royaume, moyennant la somme de 141.000 écus d’or, réserve faite de l’usufruit au vendeur, sa vie durant. (Arch. nat., J. 183, n° 135.) Le dauphin s’était engagé à lui verser, jusqu’au parfait paiement, chaque année, aux termes de saint Jean-Baptiste et de la Toussaint, une somme de 6500 livres, tant pour le principal du transport des terres de Poitou et provinces voisines, que pour le revenu des terres de Mervent, Châtelaillon et le Coudray-Salbart. Les villes, châteaux et forteresses de Vouvant, Mervent, Secondigny, le Coudray-Salbart et Châtelaillon restaient provisoirement en la possession du régent ; mais il était obligé de les rendre à Jean Larchevêque, trois ans après la date des lettres de ratification, ou quatre ans après seulement, mais, dans ce dernier cas, en payant une indemnité supplémentaire, le tout sous peine de nullité du contrat. Les échéances furent régulièrement payées jusqu’à la Toussaint 1422. A la Saint-Jean suivante, Charles, devenu roi, ne put verser que 1500 livres au lieu de 6500. L’évêque de Béziers, Hugues de Combarel, qui devint, peu de mois après, évêque de Poitiers, et Jean Rabateau, furent chargés de remettre cette somme au sire de Parthenay, de lui remontrer en même temps les grandes affaires et nécessités du roi, et de lui demander en conséquence des délais pour les termes à venir. Par acte passé au château de Parthenay, le 26 juin 1423, Jean Larchevêque consentit que les 5000 livres restant dues à cette date ne lui fussent payées qu’à la Saint-Michel suivante, et pour les 6500 livres à verser à la Toussaint 1423, il accorda délai jusqu’à Noël de la même année. De plus, en ce qui touchait la restitution des villes et châteaux de Vouvant, Mervent, le Coudray-Salbart, Secondigny et Châtelaillon, il en prorogeait d’un an l’échéance, c’est-à-dire au 21 janvier 1425. Le même acte donne quittance des 1500 livres reçues le jour même. (X1a 8604, fol. 64 v°.) Ce document avait échappé aux recherches de M. Ledain. Par lettres du 24 octobre 1425, le roi renouvela en faveur du comte de Richemont la donatien des domaines du sire de Parthenay, à condition de parfaire les paiements de la somme stipulée en 1419, puis Jean Larchevêque, par son testament et malgré les sollicitations de ses héritiers naturels, ratifia les dispositions prises pour que son héritage fût transmis à sa mort, sans difficulté, au connétable. (E. Cosneau, op. cit., p. 87.)

.

Pour lesquelles causes et aussi que le dit Jehan Larcevesque nous fit savoir qu’il estoit bien content que icelles terres et seigneuries venissent ès mains de nostre dit cousin, eussions à icelui nostre cousin donné, cedé et transporté la proprieté de toutes les dictes terres et seigneuries, et tout le droit, cause, poursuite et action que, par le dit contract et autrement, avoir y pouvions, pour en joir et user, par lui et ses heritiers masles, procreez et descenduz de sa char, en loyal mariage, et, se aucuns n’en avoit, eussions en ce donné icelles terres et appartenances à nostre très chier et amé neveu, Pierre de Bretaigne, second filz de nostre très chier et amé frere le duc de Bretagne

Le second fils de Jean V duc de Bretagne (1399-1440) et de Jeanne de France, fille de Charles VI, était né le 7 juillet 1418. Il devint duc de Bretagne sous le nom de Pierre II, à la mort de son frère aîné François Ier, le 18 juillet 1450, et décéda lui-même, sans enfants, le 22 septembre 1457, c’est-à-dire avant son oncle Artur, comte de Richemont, de sorte qu’il ne jouit point de la succession de Parthenay. Il avait épousé, en 1431, Françoise d’Amboise, fille aînée de Louis d’Amboise et de Marie de Rieux, qui vécut jusqu’en 1485. Le comte de Richemont succéda à son neveu Pierre, comme duc de Bretagne, sous le nom d’Artur III, et mourut au château de Nantes, le 26 décembre 1458, dans sa soixante-sixième année.

, pour semblablement en joir après le trespas de nostre dit cousin, par nostre dit neveu et ses hoirs masles, procréez en loyal mariage, non obstant les reservacions ou condicions apposées oudit contract, faisans mencion de l’union ou adjonction des dictes terres au demaine dudit conté de Poictou, lesquelles nous ne voulons aucunement nuyre ne prejudicier aus diz don, cession et transport par nous faiz à nos diz cousin et neveu, moyennant que nostre dit cousin payeroit au dit Jehan Larcevesque le reste de ce que lui devions, à cause dudit contract, pourveu toutesvoies que de ce feust d’accord ledit Jehan Larcevesque. Lequel, après ces choses, y donna son consentement et, qui plus est, en faveur de nostre dit cousin, ledit Jehan Larcevesque, après le transport par nous fait d’icelles terres et seigneuries à nostre dit cousin, fut content que le contract d’entre nous et lui, qui, comme dit est, estoit par defaut de payement, rompu et adnullé, demourast entier et en sa force et valeur, et sur ce receut argent et nouveaux payemens de nostre dit cousin, comme toutes ces choses et autres peuvent apparoir, tant par noz lettres comme par celles dudit feu Larcevesque

Il a été dit que Jean Larchevêque mourut au commencement de 1427 ; il serait plus exact de dire vers la fin de cette année. En tout cas il n’était pas encore décédé le 25 juillet 1427, date des plaidoiries prononcées pour lui au Parlement, contre Jean Harpedenne, sr de Belleville, auquel il réclamait pour son château de Vouvant le guet dû, affirmait-il, par les habitants de la Chapelle-Thémer, les Oulières et autres lieux. (Arch. nat., X1a 9198, fol. 290 v°.) Son décès coïncida donc à peu près avec la disgrâce de Richemont.

 ; lequel, à greigneur confirmacion, ratifia et approuva d’abondant par son testament ledit contract, voulant et ordonnant qu’il eust et sortist son plain effect. Et, tout nonobstant et sans avoir regart aux choses dessus dictes, nostre procureur general a de ce mis en procès, en nostre court de Parlement, nostre dit cousin et connestable, tandiz que, par le moyen et pourchaz d’aucuns ses malveillans, qui lors avoient grant gouvernement et auctorité entour nous, il a esté, à sa grant deplaisance, esloigné de nous et de nostre service, soy efforçant nostre dit procureur de debatre et impuner ledit don et transport

La donation de Parthenay au connétable fut attaquée tout d’abord par Marie Larchevêque, comtesse de Tonnerre, sœur de Jean, et par les petits-enfants de son autre sœur Jeanne, femme de Guillaume d’Harcourt, comte de Tancarville. Jacques d’Harcourt, baron de Montgommery, qui avait épousé Marguerite, fille de Jeanne de Parthenay et du comte de Tancarville, avait été mis à mort en 1424 au château de Parthenay, dont il avait voulu s’emparer par trahison. Il laissait un fils et une fille mineurs, qui furent représentés, dans le procès contre Richemont, par leur oncle et tuteur, Christophe d’Harcourt, souverain maître des eaux et forêts de France. Le procureur général intervint pour le roi, aussi bien contre les demandeurs que contre le défendeur. Le connétable, qui avait la saisine et la jouissance des biens litigieux, avait tout intérêt à faire traîner les choses en longueur et à éviter qu’un arrêt définitif fût rendu, tant que le roi lui tiendrait rigueur. Il n’y manqua pas. Après plusieurs ajournements successifs, il demanda encore, le 3 février 1429 n.s. et obtint que sa cause fut maintenue en l’état. Les plaidoiries eurent lieu le 3 janvier 1430 et le 17 mai 1431. Elles sont curieuses, mais extrêmement développées. Nous ne pouvons que les signaler en quelques mots. A ces dates, Richemont n’était pas rentré en grâce. Le procureur général fit valoir contre lui cet argument que c’est au profit du roi que la vente de Parthenay avait été consentie et que Jean Larchevêque étant mort, son héritage devenait ipso facto partie intégrante du domaine de la couronne ; or le domaine est inaliénable. D’autre part, la réunion avait été réclamée dans l’intérêt de l’état du comté de Poitou, par les trois États du pays, et une partie de la somme stipulée par l’acte de vente avait été payée des deniers votés par les États. Ce serait donc aller contre l’intention du roi et du pays que de laisser Richemont en possession de ces importants domaines. D’ailleurs, les lettres de don du 14 octobre 1425 ne pouvaient être considérées comme valables ; elles avaient été obtenues par surprise. A la fin d’une séance du conseil, au moment où les membres s’étaient levés et commençaient à se retirer, le connétable avait exposé sommairement au roi l’objet de sa requête et personne n’avait entendu de quelle affaire il était question. A la mort de Jean Larchevêque, le procureur général avait impétré des lettres royaux enjoignant au sénéchal de Poitou de prendre « reaument et de fait » possession de Parthenay, au nom du roi. Celui-ci commit à cet effet Me Jean Arembert, qui se transporta aux faubourgs de Parthenay et demanda à parler au châtelain, réclamant de lui « obeissance pour faire aucuns exploiz de par et pour le roy ». Le châtelain fit répondre qu’il était malade, ce qui était faux, et ne voulut pas le recevoir. Un sergent de la ville, que Jean Arembert renvoya vers lui, ne revint plus. Alors survinrent trois compagnons « de diverses langues », qui usèrent de « grosses et dures paroles » et déclarèrent qu’il fallait que « Arembert et sa compaignie se partissent et alassent droit à Chinon sans arrester, et que là estoit le conte de Richemont, et de la haste que faisoient les diz compaignons à painne eut Arembert loisir de compter à son hoste ; et de fait fut contraint à prendre le chemin de Chinon, et puis per devia s’en revint à Poictiers ». C’est au mois d’octobre 1427 que ces choses se passaient, car on sait de bonne source que le connétable passa plusieurs jours à Chinon, à cette époque, après sa rupture avec Charles VII et La Trémoïlle. On voit que d’ailleurs Richemont avait bien pris ses mesures et avait eu soin de mettre en temps utile des gens à lui dévoués dans les châteaux de Jean Larchevêque. D’après son récent et consciencieux biographe, c’est dans les premiers jours de novembre, en quittant Chinon, qu’il vint prendre en personne possession de sa seigneurie de Parthenay. Dans sa longue réponse au procureur général, le 17 mai 1431, l’avocat du connétable déclara, entre autres choses, que son client avait payé aux exécuteurs de feu Larchevêque ce qui restait dû de la somme stipulée dans le contrat de vente. Quand Arembert vint à Parthenay, Richemont étant à Chinon, comme il lui fut dit, ses officiers voulurent le faire entrer au château ; mais il s’y refusa, craignant de ne point y être en sûreté, et préféra rester dans les faubourgs. S’il avait été victime de quelque excès, le connétable désavouerait ceux qui s’en seraient rendus coupables, car il ne voulait procéder que par voie de justice, etc., etc. (Arch. nat., X1a 9199, fol. 121, 212 et suiv., 393 v°, 396.) Ces détails inédits sur la transmission de l’héritage de Parthenay nous ont paru mériter d’être mis au jour.

, que ainsi fait avons à ycelui nostre dit cousin, et par ce empescher qu’il ne joysse de ses dictes terres. Sur quoy a esté tant procedé que les parties ont esté appoinctées à bailler leurs causes et raisons par escript, d’un costé et d’autre. En quoy icelui nostre dit cousin a esté et est grandement damnifié et aussi desplaisant de ce que, à l’encontre de nous, on le veult ainsi mettre et tenir en procès, si comme ces choses nous a dictes et remonstrées ; requerant humblement que, consideré ses droiz et tiltres dessus diz, dont il offroit faire prompte foy, nous plaise lui pourveoir sur ce que dit est, par maniere que nostre dit don et transport lui soit fructueux et valable et sortisse son plain effect, selon la teneur de nos dictes lettres sur ce faictes, en le faisant mettre hors dudit procès et imposant sur ce silence à nostre dit procureur, en le recevant, à cause des dictes terres et seigneuries, en nostre foy et hommage.

Savoir faisons que, après ce que bien au long avons fait veoir et visiter par les gens de nostre dit grant conseil les droiz et tiltres de nostre dit cousin touchant le fait dessus dit, et que d’iceulx et de son donné à entendre nous est suffisamment et bien à plain apparu, nous, eu à ce regart et consideracion, et aussi aux très grans, louables et prouffitables services que nous a longuement faiz et que de jour en jour s’efforce, de toute affection, de plus encore nous faire nostre dessus dit cousin et connestable, tant ou fait de noz guerres comme autrement, en toutes manieres à lui possibles ; voulans pour ce le traicter en toutes ses affaires favorablement et en toute doulceur, avons, de nostre certaine science, plaine puissance et auctorité royal, en tant que besoin en est, et par l’advis et meures deliberacions des diz seigneurs de nostre sang et des diz gens de nostre grant conseil, pour ce assemblez en grant nombre, declairé et declairons, par ces presentes, les dictes terres et seigneuries à lui competer et appartenir, aux tiltres et moyens dessus declairez, et nostre dit don et transport ainsi fait des dictes choses à nostre dit cousin et connestable estre bon et valable, et icelui avons confermé, ratifié et approuvé, confermons, ratifions et approuvons, en tant que besoin en seroit, par ces dictes presentes, en voulant et ordonnant icelui nostre cousin et ses diz heritiers masles paisiblement, et aussi nostre dit neveu de Bretaigne et ses diz heritiers masles, en la condicion dessus dicte, joir et user doresenavant des dictes terres et seigneuries contenues et declairées ou dit transport, tout selon la forme et teneur d’icelui, et tous empeschemens et procès au contraire faiz et commanciez par noz procureur, advocaz et autres noz justiciers et officiers, voulons estre ostez ; et tout ce qui auroit esté fait ou prejudice de nostre dit cousin et connestable adnullons et voulons cesser et estre mis au neant. A tous lesquelx avons de ce imposé et imposons perpetuel silence, en decernant oultre que nostre dit cousin, à cause des dictes choses, sera par nous receu, toutes fois que par lui requis en serons, en nos diz foy et hommage. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx conseillers les gens tenans nostre Parlement et qui tendront ceulx à venir, les gens de noz comptes et tresoriers, et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre dit don et transport et de nostre presente declaracion, ordonnance et ratificacion facent, seuffrent et laissent nos diz cousin et neveu et leurs diz hoirs masles joir et user plainement et paisiblement, en tant que à nous touche et peut toucher, par la forme et maniere que dessus est dit, sans leur faire ne souffrir estre fait ne donné, ores ne pour le temps à venir, aucun destourbier ou empeschement au contraire, en quelque maniere ne soubz quelle couleur que ce soit, et que tous empeschemens qui de par nous ont esté mis ès dictes terres et seigneuries ostent et facent cesser. Mandons aussi à nos diz procureur et advocas, et à chascun d’eulx, estroictement enjoignans que dudit procès par eulx commancié, comme dit est, se desistent et departent du tout, sans plus aucunement y proceder ne tenir, à cause de ce, nostre dit cousin en procès, car ainsi nous plaist il et voulons estre fait, de grace especial, se mestier est, non obstant le dit procès et tout ce qui s’en est ensuy, non obstant aussi l’interdiction par nous faicte de non alienner ne mettre les dictes choses hors de noz mains, ne de les separer hors des terres et seigneuries ausqueles elles furent annexées par le contract fait entre nous et le dit Larcevesque, et quelxconques lettres surreptices impetrées ou à impetrer, à ce contraires. En tesmoing de ce, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Donné à Tours, le ixe jour d’avril l’an de grace mil cccc. xxxiiii. avant Pasques et de nostre regne le xiiie

Ce fut près d’un an après seulement, c’est-à-dire le 5 mars 1436 n.s., que le Parlement, sur l’ordre formel du roi, enregistra cette troisième donation. Le comte de Richemont, qui avait obtenu pour la première fois les terres de Parthenay, en mai 1415, put enfin jouir sans conteste de cette riche succession. Les lettres du 9 avril 1435, dont il existe une autre copie, peu correcte, aux Arch. nat., K. 184, n° 21, et une troisième aux Arch. de la Loire-Inférieure (E. 105, cass. 38), ont été publiées in extenso par M.E. Cosneau, Le connétable de Richemont, in-8°, 1886, p. 489.

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Ainsi signé : Par le roy en son conseil, auquel messeigneurs le duc de Bourbon

Charles Ier, né en 1401, fils aîné de Jean Ier, duc de Bourbon de 1434 au 4 décembre 1456, date de sa mort.

et Charles d’Anjou

Charles, troisième fils de Louis II d’Anjou, roi de Naples, né au château de Montils-lès-Tours, le 14 octobre 1414, devint comte du Maine en 1440 et mourut le 10 avril 1473.

, vous, le conte de Vendosme

Louis de Bourbon, second fils de Jean de Bourbon et de Catherine de Vendôme, né vers 1376, succéda en 1412 à sa mère dans le comté de Vendôme, et mourut à Tours, le 21 décembre 1446.

, l’arcevesque de Vienne

Jean de Norry fut archevêque de Vienne de 1417 à 1437.

, les evesques de Poictiers

Hugues de Combarel, évêque de Poitiers de 1424 à 1440.

, de Magalonne

Robert de Rouvres, évêque de Maguelonne du 4 mars 1433 à décembre 1453. (Ci-dessus, p. 23, note 3.)

et de Maillezays

Guillaume de Lucé était probablement évêque de Maillezais à cette époque.

, le bastart d’Orleans, les marechaulx de Rieux

Pierre de Rieux, dit aussi le maréchal de Rochefort, né à Ancenis le 9 septembre 1389, mort en 1438.

et de la Fayette

Gilbert de La Fayette, maréchal de France depuis l’an 1420, mort le 23 février 1462.

, le maistre des arbalestriers

Jean Malet, sire de Graville et de Marcoussis, grand maître des arbalétriers (1427-1449).

, les sires de Bueil

Jean V de Bueil, comte de Sancerre, amiral de France en 1450. (Ci-dessus, p. 67, note 4.)

, de Gaucourt

Raoul VI de Gaucourt, chambellan du roi. (Cf. le vol. précédent, p. 285, note.)

et de Treves

Robert Le Maçon, seigneur de Trèves, mort le 28 janvier 1443. (Vol. précédent, p. 298, note 2.)

, messires Bertrant de Beauvau

Bertrand de Beauvau, sr de Precigné ou Pressigny, nommé fréquemment dans la suite de ce volume.

, Hugues de Noer

Hugues de Noer, aliàs de Noyers, ou de Noé, ainsi que le nomme M. de Beaucourt, appartenait à une famille de Languedoc. Il remplit d’abord auprès du dauphin Charles, comte de Poitou, les fonctions de premier écuyer du corps et de maître de l’écurie. Fait chevalier en 1429, pendant la campagne du sacre, il conserva toujours la faveur de Charles VII et résida à sa cour constamment, avec la charge de conseiller et maître d’hôtel jusqu’à sa mort survenue postérieurement au 25 juillet 1447. (Hist. de Charles VII, t. Ier, p. 60-61.) Nous avons dit précédemment que Hugues de Noer fut seigneur de Sainte-Néomaye en Poitou, dont il rendit aveu au dauphin à Lusignan, le 12 juin 1420. (Voir notre précédent volume, p. 58, note.) Les héritiers de Guillaume de Lodde, chambellan du duc de Berry, qui avait joui de cette terre, en disputaient la possession au nouveau seigneur et le poursuivaient au Parlement pour cette cause, à la date du 2 septembre 1423. (Arch. nat., X1a 9197, fol. 248 v°.)

et Loys de Tromagon, maistres Renier de Boulligny

Voy. ci-dessus, p. 22, note 2.

, Jehan Chastenier

Jean Chastenier, secrétaire du roi Charles VII et à partir d’octobre 1425 greffier de la chambre des aides au Palais de Poitiers. (Cf. vol. précédent, p. 408, note.)

et Jehan Fournier et plusieurs autres estoient. Budé.

MXLI Août 1436

Lettres déclarant perpétuellement unis au domaine immédiat de la couronne les ville, cité et châtellenie de Poitiers, comté et pays de Poitou

Ces lettres, dont l’original se trouve aux archives de la ville de Poitiers (C. 15), se présentent sur notre registre incorporées, dans un vidimus donné par Louis XI, à Toulouse, en mai 1463, de plusieurs chartes de privilèges et exemptions octroyées par les rois ses prédécesseurs aux habitants de Poitiers ; elles sont imprimées dans le recueil des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XV, p. 677-679. Nous avons cherché vainement dans les registres du Trésor des chartes une autre ordonnance de même date exactement, mais de texte différent, qui prononce aussi l’incorporation et l’union de la ville de Poitiers à la couronne, et qu’il n’est pas inutile par suite de signaler ici. Elle porte en même temps que le Parlement, siégeant depuis dix-huit ans à Poitiers, sera rétabli à Paris, et qu’un siège royal sera créé dans la première de ces villes. « Et outre plus, pour icelle nostre dicte ville et cité de Poictiers entretenir en authorité et accroistre en biens et honneur, ayans consideration à ce qu’icelle nostre dite ville et cité est le chef lieu et capital de nostre dit païs de Poictou, nous voulons et ordonnons dès à present en icelle nostre dicte ville et cité estre et y avoir siege royal à tousjours mais, auquel nous voulons et ordonnons estre cogneu et decidé de toutes les causes des regales et exemptions du dit pays, et aussi des regales et exemptions de la Basse Marche, et des cas de nouvelleté qui par nos lettres ou de nos successeurs roys de France seront commis à nos juges du dit pays, à quelque siege que ce soit de nostre dit pays. Et si par vertu d’aucun committimus, adjournement estoit baillé à aucun des autres sieges de la dite seneschaussée, que le seneschal du dit pays ou son lieutenant les puisse, si bon luy semble, evoquer au dit siege de Poictiers pour en recongnoistre illec et decider… Donné en nostre ville de Tours, au mois d’aoust l’an de grace mil cccc. xxxvi. et de nostre regne le xiiiime. » Le texte de ces dernières lettres est transcrit dans une confirmation des privilèges de la ville de Poitiers, donnée en juin 1485 par le roi Charles VIII, et dont l’original, énorme pancarte de 2 mètres 31 centimètres de haut sur 0,57 de large, est conservé dans les archives municipales de Poitiers, A. 29. (Voir aussi Arch. nat., Parl. de Paris, X1a 8637, fol. 130.) Cette seconde ordonnance d’août 1436 a été imprimée isolément, à notre connaissance, au moins trois fois : 1° Girard et Joly, Troisiesme livre des Offices de France, in-fol., 1647, t. I, p. 11 ; 2° Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XIII (1782), p. 226 ; 3° Thibaudeau, Histoire du Poitou, in-12, t. III, p. 358.

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AN JJ. 199, n° 252, fol. 147 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 100-105

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, de la part de noz conseilliers et officiers en noz ville et cité de Poictiers, païs et conté de Poictou, nous avoir esté remonstré comme la dicte ville et cité soit grant et notable ville et une des plus anciennes de nostre royaume, et en laquelle aient jadis esté et encores soient grant nombre de notables eglises et de beaulx et grans ediffices et aussi grans et notables bourgoisies, y ait eu aussi et encores ait grant chastellenie et ressort et plusieurs beaulx droiz seignouriaulx ; soit aussi nostre dit conté et païs de Poictou ung des beaulx et notables contez de nostre dit royaume et l’un des meilleurs et plus fertilles païs d’icellui, et ouquel a plusieurs baronnies et seigneuries, et plus grant nombre de vassaulx, et aussi de villes fermées et de notables forteresses ; ait avec ce en nostre dit conté et païs de Poictou plusieurs et divers pors de mer près de la marche de Bretaigne et ailleurs, et soit icellui assis près et sur la dicte mer joingnant et voisin près du dit païs de Bretaigne, marchissant de plusieurs costez en noz païs de Xantonge, Limosin, Berry et Touraine, et aussi ou païs d’Anjou ; nous aient aussi les prelatz, gens d’eglise, nobles, vassaulx et subgectz de nostre dit païs, et mesmement les bourgois et habitans de nostre dicte ville et cité de Poictiers, à nostre venue en icelle, après la violente occuppacion faicte par nostre adversaire d’Angleterre de nostre païs de Normandie ou d’une partie d’icellui, et après aussi nostre partement de nostre ville de Paris, et feu nostre très chier seigneur et pere, que Dieu absoille, estant soubz la subgection de nostre dit adversaire, en acquictant leur loyaulté envers nous et nostre dit seigneur et pere et la couronne de France, faicte plaine et entiere obeissance de nostre dicte ville et cité et d’icellui nostre païs, nous y aient receu comme faire le devoient, et de leurs corps et chevances nous aient tousjours liberalement aidez et secouruz à la conduite de nostre dite guerre et en noz autres affaires, et se soient noz vassaulx et tous les nobles d’icellui nostre païs continuellement emploiez en nostre service, et autrement nous aient par eulx et chascun d’eulx esté faiz et continuez plusieurs grans et loyaulx services ; et à cause d’iceulx et pour l’accident de nos dictes guerres aient noz subgectz dudit païs euz et soustenuz paciemment et en toute bonne subgection et obeissance plusieurs grans et divers dommaiges. Et avec ce, après nostre dicte venue en nostre dit païs de Poictou, et que avons eu congnoissance d’icellui et des grans et notables seigneuries qui y sont, du grant nombre de subgectz et des autres grans biens dont il est fourny, et pour consideration de sa bonne situation, ayons establi et ordonné en nostre dicte ville de Poictiers nostre Parlement et Court souveraine, en laquelle il a ordinairement sis jusques à present, et par ceulx de nostre dicte ville et cité à nostre dicte court esté reverée et secourue de tout leur povoir, et par le moyen de laquelle avons mieulx sceu et en plus grant et plaine congnoissance du fait de nostre dit conté et des grans et notables droiz et prerogatives qui à cause d’icellui nous appartiennent, ensemble de belles et notables seigneuries, terres et chastellenies qui tenues en sont. Lesquelles choses ainsi à nous remonstrées et adverties, nous ait esté supplié et requis que, comme nos dictes ville, cité et chastellenie de Poictiers, conté et païs de Poictou soient de present nuement et ligement en nostre main, et à nous et à la coronne de France, sans aucun moïen, et les diz bourgois et habitans d’icelle nostre ville et cité, et aussi tous les vassaulx, nobles et autres habitans d’icellui nostre conté, noz hommes et subgectz liges sans autre moyen que de nous ou des diz nobles et vassaulx, nous la dicte ville, cité et chastellenie, païs et conté de Poictou, en chief et en membres, avec toutes les appartenances, pour consideracion des choses dessus dictes, et pour l’evidant bien et prouffit de nous et de nostre dicte seigneurie et couronne, et aussi pour les grans secours et aides que en povons recouvrer à noz besoings et necessitez, comme par experience le avons congneu, vueillons incorporer, retenir, maintenir et entretenir à tousjours en et soubz nostre dicte main et seigneurie de nostre dicte couronne ligement et nuement, sans jamais en faire, pour quelxconques causes ou moiens qui soient ou puissent avenir, ne en quelque maniere que ce soit, aucun transport, separacion ou alienacion.

Pour ce est il que nous, eu sur ces choses grans advis et consideracion, et mesmement à ce que nostre dicte ville et cité de Poictiers a esté et encores est l’une des plus grans, notables et anciennes villes de nostre dit royaume, garnie et decorée de grant nombre de notables eglises, et aussi que nostre dit païs de Poictou est l’un des beaulx et plus grans et notables contez de nostre dit royaume, assis en la pluspart sur la coste de la mer, et ouquel a de plus belles et grans baronnies et seigneuries, et plus grant nombre de vassaulx et de belles chastellenies et ressors, d’autre part aux grans et loyaulx services que noz barons et vassaulx de nostre dit conté, les bourgois et habitans de nostre dicte ville et autres subgectz d’icellui nostre païs nous ont faiz depuis nostre dit partement dudit lieu de Paris, et aux grans secours et aides qu’il nous ont donnez ; pour ces causes et consideracions, et en recongnoissance desdiz services et secours, et aussi de la grant et bonne loyaulté et obeissance que noz diz barons et vassaulx, bourgois et habitans de nostre dicte ville et cité et autres noz subgectz d’icellui païs nous ont gardée et tenue, et aussi de la grant et entiere affection que les avons congneuz avoir à nous et à nostre dicte seigneurie et coronne, par l’advis et deliberacion de plusieurs des seigneurs de nostre sang et lignaige et autres de nostre grant conseil, avons ordonné et declairé, et par ces presentes ordonnons et declairons, par maniere de decret et ordonnance royal, vallables à perpetuité, pour nous et noz successeurs, que pour quelxconques causes, moiens et accidens qui puissent advenir, en quelque maniere que ce soit, nous ne nos diz successeurs ne mettrons ne consentirons mettre nostre dicte ville, cité et chastellenie, conté et païs de Poictou, ne aucuns des membres ou appartenances d’iceulx hors de nostre dicte main, seigneurie et coronne, ne les mettrons, baillerons, ferons, souffrerons ne consentirons mettre ne bailler en ne soubz autre main, seigneurie ou gouvernement que soubz le nostre, nuement et sans moyen quelconque. Promettons en parolle de roy, pour nous et nosdiz successeurs, soubz iceulx nos main et gouvernement les tenir, garder, gouverner et maintenir à tousjours, sans en faire ne souffrir ou consentir faire transport, separacion ou alienacion, pour quelconque cause, moien ou accident que ce soit ou puist estre, ne les mettre ne bailler en ne soubz main ou gouvernement de quelxconques personnes que ce soient, de nostre sang ou lignaige ou autrement, mais voulons, ordonnons, deliberons et declairons, de nostre certaine science et plaine puissance et auctorité royal, par maniere de decret valable à perpetuité, ainsi que dit est, que nos dictes ville et cité, conté et païs de Poictou, et toutes les appartenances et appendances d’iceulx, soient et demeurent à tousjours incorporées, joins et uniz à la coronne et seigneurie de France, et nuement et sans moien, soubz le seul, pur et singulier gouvernement de nous et de nos diz successeurs. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx chancellier, les gens de nostre grant conseil, les gens de nostre parlement, gens de noz comptes, à nostre seneschal de nostre dit conté de Poictou, et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans presens et avenir, et à chascun d’eulx, comme à lui appartendra, que noz presentes ordonnance, decret, declairacion, voulenté et deliberacion, tiennent et facent tenir fermes et estables à tousjours, et les tiennent et gardent, et facent tenir et garder sans enfraindre, selon leur forme et teneur, et sans venir ne souffrir faire ou venir à l’encontre, en quelconque maniere que ce soit. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné en nostre ville de Tours, ou mois d’aoust mil cccc. trente six, et de nostre regne le xiiiime.

MXLII 6 juillet 1437

Lettres autorisant le chapitre de l’église cathédrale de Poitiers à créer un juge lai pour faire les inventaires après décès de ses membres et dignitaires, au lieu et place des officiers royaux qui jusque-là en étaient seuls chargés.

AN JJ. 200, n° 206, fol. 110 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 105-107

Charles, par la grace de Dieu roy de France. A tous ceulx qui ces presentes lettres verront, salut. Receue avons l’umble supplicacion des doyen et chappitre de l’eglise de Poictiers, contenant que, comme après le decès des doyen [dudit] chappitre et autres ayans dignitez, personnaiges et offices, chanoines, chappellains, choriaulz et autres suppostz de la dicte eglise qui trespassent ès maisons appartenans aus diz dignitez, personnaiges, offices, chanoines et autres suppostz dessus diz, aient acoustumé noz gens et officiers faire les inventoires des biens meubles demourez après le decès [des] dessus diz, et souvent advient que soubz umbre de ce, les diz supplians et les heritiers ou executeurs de ceulx qui trespassent ont et souffrent grans dommaiges et diminucion de leurs biens, tant pour les gaiges que prennent nos diz officiers que autrement, et aussi que à ceste occasion adviennent aucunes foiz procès, questions et debatz, par quoy sont empeschées à executer les voulentez des deffuncts et les biens demourez de leurs decès applicquez en autre usaige que leur derreniere voulenté n’estoit, et en plusieurs autres manieres sont les diz supplians travaillez et molestez, et plus seroient, se par nous ne leur estoit sur ce pourveu de nostre begninité et grace. Pour quoy nous ont humblement supplié que sur ce leur voulsissons pourveoir et leur octroyer qu’ilz peussent commettre une personne notable de par eulx, qui en tant que touche le fait des diz inventoires, à moindres fraiz eust puissance de faire ou faire faire iceulx inventoires, toutes foiz que le cas le requiert, et ce tant seulement ès maisons des diz doyen et autres ayans dignitez, personnaiges ou offices en la dicte eglise et autres maisons canoniales à eulx appartenans à cause de la dicte eglise. Pour quoy nous, ayans regard aux grans services que nous ont fait et font de jour en jour les evesques et autres de la dicte eglise, les grans charges que a à supporter la dicte eglise pour le fait de noz guerres, pour consideracion de ce et à la conservacion des biens des diz deffuncts, et desirans estre participans ès prieres et oraisons qui tous les jours se font en icelle, et pour autres causes et consideracions à ce nous mouvans, avons voulu, ordonné et octroyé, voulons, ordonnons et octroyons que les diz doyen et chappitre puissent creer et establir ung juge lay par lequel et ses commis et depputez se facent les inventoires après les decès de chascun des dessus diz ès maisons à eulx appartenans, à cause de la dicte eglise ; auquel juge avons donné et donnons par ces presentes toutes facultez et puissances au regard des diz inventoires, sans ce que nostre seneschal de Poictou, son lieutenant ou autres noz gens et officiers, s’en aient aucunement à empescher au regard des diz inventoires, et quant à ce leur en avons in[ter]dit toute congnoissance, se n’est en cas de ressort et souveraineté. Si donnons en mandement par ces dictes presentes à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, presens et advenir, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulx, si comme à luy appartiendra que de noz presentes voulenté, grace et octroy facent, seuffrent et laissent les dessus diz doyen et chappitre joir et user plainement et paisiblement, [sans] sur ce leur donner aucun destourbier ou empeschement. Car ainsi nous plaist et voulons estre fait, non obstans quelxconques coustumes, restrincions ou mandemens à ce contraires. En tesmoing de ce, nous avons fait mettre à ces presentes nostre seel ordonné en l’absence du grant. Donné à Bourges, le sixiesme jour du moys de juillet l’an de grace mil cccc. trente sept, et de nostre regne le quinziesme

Cette ordonnance de Charles VII est intercalée dans des lettres de confirmation données par Louis XI à Poitiers, au mois de février 1465 n.s. Le texte en a été publié dans le recueil des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XVI, p. 304.

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Ainsi signées : Par le roy en son conseil. Budé.

MXLIII 20 avril 1438

Confirmation des antiques privilèges de l’abbaye de Sainte-Croix de Poitiers.

AN JJ. 211, n° 401, fol. 88 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 107-110

Karolus, Dei gratia Francorum rex. Notum facimus, etc. ad supplicacionem dilectarum nostrarum religiosarum abbatisse et conventus monasterii sanctimonialium Sancte Crucis Pictavensis

Raymonde du Peyrat était alors abbesse de Sainte-Croix de Poitiers ; elle gouverna ce monastère pendant au moins trente ans. Son nom se rencontre dans de nombreux actes des archives de Sainte-Croix, entre le 10 mai 1424 et l’année 1454 inclusivement. D’autre part, Jeanne d’Orfeuille, à qui elle succéda, est dite abbesse encore en 1423, et Isabelle de Couhé l’avait remplacée avant le 27 octobre 1456. (Rédet, Invent. de l’abbaye de Sainte-Croix ; Arch. nat., F2 350 ; Gallia christ., t. II, col. 1303.)

, nonnullas et varias illustrissimorum incliteque recordationis ac felicis memorie Karlomanni et Ludovici, quondam regum, et Karoli, Francorum regis, predecessorum nostrorum, quasdam videlicet originales predicti Karlomanni, una vero transsumpta prefatorum Ludovici et Karoli litterarum, sub sigillo Castelli nostri Parisiensis confecta, super immunitatibus et franchisiis, eisdem supplicantibus per prenominatos reges concessis, litteras inspexisse, quarum siquidem litterarum seriatim successiveque tenores presentibus sunt inserti

Suivent les textes : 1° du diplôme de Carloman, en date du 20 février 885 n.s., publié avec une confirmation de Charles V du 7 juillet 1377, dans notre t. V, p. 36 ; 2° du diplôme de Louis le Bègue, du 4 juillet 878, imprimé avec une confirmation aussi du 7 juillet 1377, dans le même volume, p. 46 ; 3° des lettres de Charles V données au Louvre, le 29 mai 1377, publiées de même dans notre t. V (XXI de la Société des Arch. hist. du Poitou), p. 27.

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Quas quidem litteras preinsertas ac omnia et singula in eis contenta, ratas et gratas ac rata et grata habentes, ratificavimus, approbavimus et confirmavimus, et tenore presentium ex nostris certa scientia plenitudineque potestatis et auctoritate, necnon speciali gracia ratifficamus, approbamus, et eas, in quantum prelibate supplicantes eis rite, juste et debite use et gavise sunt, debite confirmamus et eis de novo, si opus est, impartimur ; decernentes supradictorum Ludovici et Karoli regum transsumpta preinserta litterarum tantorum esse valoris et efficacie, eisque fidem in judicio et extra tantam adhiberi, quemadmodum si ipse supplicantes de originalibus litteris, quas ipse, pretextu guerrarum que in regno nostro, proh dolor ! diutius viguerunt, minimè valent adhibere, fidem facerint et docerent. Quocirca dilectis et fidelibus gentibus nostrum presens tenentibus aut qui futura tenebunt Parlamenta, gentibus compotorum nostrorum, baillivoque Turonensi, ressortorum et exemptionum Andegavie et Cenomanie, nec non senescallis Pictavensi et Xanctonensi ceterisque justiciariis nostris, aut eorum locatenentibus, presentibus et futuris, et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, damus in mandatis quatinus prelibatas supplicantes nostris presentibus ratificatione, confirmatione et gratia uti et gaudere pacifice et quiete faciant et permittant, absque ipsas supplicantes earumque posteras et sequaces impediendo, molestando et inquietando, seu molestari, impediri et inquietari patiendo ; imo impedimenta, si que sint adversus nostre concessionis seriem facta, tollant et amoveant, seu tolli et amoveri faciant visis presentibus, indilate. Que ut stabilitatis perpetue robur obtineant, nostrum in absentia magni ordinatum presentibus apponi jussimus sigillum. Nostro in ceteris et alieno in omnibus juribus salvis. Datum Pictavis

Les éditeurs des Ordonnances font observer avec raison qu’il faudrait corriger Parisius, tous les actes de Charles VII du mois d’avril 1438 étant datés de Paris et non de Poitiers.

, die vicesima mensis aprilis anno Domini m° cccc.xxxviii°, regni vero nostri xvie

La confirmation de Charles VII est imprimée avec une autre de Louis XI, et les trois diplômes y insérés, dans le recueil des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XV, p. 341, d’après le 5e vol. des ordonnances de François Ier enregistrées au Parl. de Paris. (Arch. nat., X1a 8615, fol. 129.) Nous avons à l’aide de cette copie rétabli certains passages supprimés et remplacés par des etc. sur le registre JJ. 211 du Trésor des chartes.

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Sic signatas ; Per regem, dominis delphino Viennensi, duce Borbonie ac Karolo de Andegavia, episcopisque Claromontensi, Magalonensi et Malleacensi, Christophoro de Harcuria, marescallo de Fayeta, Johanne Rabatelli, in Parlamento presidenti, Gaufredo Vassalli, necnon domino de Coetivy et aliis presentibus. Pichon.

MXLIV Février 1439

Nouvelle confirmation des privilèges et statuts des barbiers de Poitiers.

AN JJ. 224, n° 59, fol. 73 et AN JJ. 232, n° 94, fol. 36 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 110-111

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir veu certaines noz lettres par nous donnez durant nostre regne, impetrées par nostre premier barbier et varlet de chambre, Collinet Candillon, et les autres barbiers demourans ès villes de noz pays et conté de Poictou, desquelles la teneur s’ensuit : « Charles, filz du roy de France, regent le royaume, daulphin de Viennoys, duc de Berry, de Touraine et conte de Poictou, etc… Donné en nostre ville de Bourges, ou mois de janvier l’an de grace mil cccc. dix neuf

Les lettres de Charles VII, alors dauphin, de janvier 1420 n.s., avec le texte des statuts et privilèges des barbiers du Poitou, et la confirmation de Jean de France duc de Berry, en date d’août 1410, sont imprimées dans notre précédent volume, p. 355.

 ». Les quelles lettres dessus transcriptes et tout le contenu en icelles nous ayans agreables, avons loué, ratiffié, approuvé et confermé et par la teneur de ces presentes, de nostre grace especial, pleine puissance et auctorité royal, dont nous usons, louons, ratiffions, approuvons et confermons et, en tant qu’ilz en ont acoustumé bien et deuement user et joyr le temps passé. Sy donnons en mandement par ces presentes aux seneschaulx de Poictou et de Xaintonge, bailly de Touraine, des ressors et Exempcions d’Anjou et du Maine, gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, que ledit Collinet Candillon, nostre premier barbier, et les autres barbiers de nos diz ville de Poictiers et pays de Poictou, qui à present sont et qui pour le temps avenir seront, des diz privileiges, franchises et libertez facent, seuffrent et laissent joyr et user plainement et paisiblement, sans les molester, travaillier ou empescher aucunement au contraire ; mais s’aucun empeschement leur avoit esté ou estoit sur ce fait, mis ou donné au contraire, si l’ostent et facent oster et mettre sans delay au premier estat et deu. Et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes, ordonné en l’absence du grant. Sauf en autres choses nostre droit et l’aultruy en toutes. Donné à Poictiers, ou mois de fevrier l’an de grace mil cccc. xxxviii, et de nostre regne le dix septiesme

La seconde confirmation de Charles VII, ainsi que la première, est transcrite en vidimus dans d’autres lettres de Louis XI, de janvier 1462 n.s., de Charles VIII, novembre 1485, et de Louis XII, mai 1499, pour le même effet. Toutes ont été publiées dans le recueil des Ordonnances des rois de France, t. XV, p. 307.

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MXLV Avril 1440

Lettres permettant à Jean de Brisay, chevalier, de faire fortifier son lieu de Brisay.

AN JJ. 176, n° 71, fol. 45 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 111-114

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre amé et feal chevalier Jehan de Brisay, sire du dit lieu de Brisay ou païs d’Anjou

Cette désignation « ou païs d’Anjou » ne peut s’appliquer à la localité de Brizay près l’Isle-Bouchard, dont était alors seigneur, suivant M. Carré de Busserolle, Jean de Brisay précisément. Il ne peut être question que de Brisay, autrement dit la Roche-de-Brisay (cnes de Coussay et de Verrue) en Mirebalais, ce pays faisant, à cette époque et depuis plus de soixante ans, partie du duché d’Anjou. D’après la généalogie la plus récente, Jean de Brisay, seigneur dudit lieu, de Saint-Germain-sur-Vienne, d’Availles, etc., naquit posthume le 9 août 1396 ; il était fils de Gilles de Brisay, mort à son retour de la campagne qui se termina par le désastre de Nicopolis, et de Marguerite de Rochechouart, dame de Saint-Germain, fille d’Aimery, seigneur de Mortemart. Le seigneur de Brisay servit contre les Anglais sous les ordres de Jean de Torsay, sénéchal de Poitou, puis de Louis de Culant, amiral de France. Dans des lettres d’abolition d’août 1447, imprimées ci-dessous, se trouve relaté avec détails un fait de guerre, la levée du siège de la Pérouse, qui eut lieu en 1425, et dans lequel il joua le rôle principal.

Marguerite de Rochechouart, dame de Brisay, était en procès le 17 février 1407 n.s. au sujet de la succession de Jean d’Archiac, son grand-père maternel, contre Louis de Feydeau, chevalier, et Marguerite d’Archiac, femme de ce dernier. (Arch. nat., X1a 54, fol. 155 v°.) A la date du samedi 13 novembre 1423, on lit dans les registres du Parlement : « Comme certaines causes et procès en cas de saisine et de nouvelleté feussent pendans en la court, entre Jehan Brechou, escuier, seigneur de Puissec, et damoiselle Marguerite de Brisay, sa femme ou temps qu’elle vivoit, d’une part, et Marguerite de Rochechouart et messire Jehan de Brisay, chevalier, son fils, d’autre, pendans lesquelz procès ladite damoiselle Marguerite soit alée de vie à trespassement, et depuis ce, soit venu à la cognoissance dudit seigneur de Puissec que ledit messire Jehan de Brisay et Pierre de Pennevaire, tuteur de Léonnet de Pennevaire, filz et héritier d’icelle Marguerite, ont fait certain accord prejudiciable audit sr de Puissec ; et pour ce icelui seigneur de Puissec s’est opposé et oppose à ce que ledit accord soit passé en lad. court, sans à ce estre appellé et oy pour certaines causes et raisons à declairer en lieu et en temps ». (X1a 9197, fol. 262.) Cette Marguerite de Brisay était la plus jeune sœur de Gilles, père de notre Jean de Brisay. On voit par cette citation qu’elle avait épousé en premières noces Jean de Pennevaire et en secondes Jean Brechou, sr de Puissec. (Cf. notre volume précédent, p. 156, note.) Voici encore deux extraits d’un registre criminel du Parlement, relatif à Jean seigneur de Brisay. « Du samedi xixme jour de novembre 1435. La court a defendu et defend à messire Jehan, seigneur de Brizay, à peine de vc marcs d’or, qu’il ne mefface ne face meffaire par voie de fait à Guiart seigneur de Brillac en corps ne en biens, en quelque maniere que ce soit, en lui enjoignant que, se aucune chose lui veult demander, il le poursuive par voie de justice ». — Du 19 avril 1436. « Messire Jehan de Brisay, chevalier, lequel par ordonnance de la court estoit venu et comparu ceans en personne, est elargi partout, quousque, etc., parmi ce qu’il a promis et juré, sub pena convicti ac aliis penis et submissionibus in talibus assuetis, venir et comparoir ceans en personne, toutes et quantes fois qu’il sera ordonné par icelle court. Et pour faire tous adjournemens, etc., a esleu son domicile à Poictiers, en l’ostel de maistre Pierre Desfriches, son procureur. » Malgré cet élargissement, le 26 mai suivant, la cour fit injonction comminatoire au procureur du roi en la sénéchaussée de Poitou de réunir toutes les informations recueillies à la charge des seigneurs de Brizay, de Château-Larcher et autres, coupables de roberies et de pillages au pays de Poitou, et de continuer les poursuites contre eux. (X2a 21, aux dates.) On n’a point trouvé la conclusion de cette affaire. Dans un titre de l’année 1457, Jean de Brisay est qualifié chambellan de Charles VII. Il s’était marié, en 1411, à Jeanne de Linières, dame de la Ferté-Gilbert, fille de Godemart, chevalier, sr de Mennetou, et d’Agnès Trousseau, et mourut après 1470, laissant trois filles et cinq fils. (Voir aussi pour Jean sr de Brisay et sa famille, La baronnie de Mirebeau, du xie au xviie siècle, par E. de Fouchier, p. 160, 161, et le Dictionnaire des familles du Poitou, nouv. édit., t. Ier, p. 790 et suiv.)

, contenant que le dit lieu de Brisay qui est assiz en bon païs et fertile, est, à l’occasion de la guerre et de ce qu’il n’a esté fortifié le temps passé, moult apovry et diminué. Et pour ce, et afin de retraire les corps et biens de lui, de sa femme et enfans et de ses subgiez à seurté, et garder que les gens de guerre, tant de nostre parti que autres, qui vouldroient vivre ou dit païs d’Anjou, ne logent, comme ilz ont fait par cy devant, audit lieu de Brisay, icellui suppliant fortiffieroit voulontiers ledit lieu qui à ce faire est assez avantageux, se sur ce nous plairoit lui donner et octroier noz congié et licence, ainsi qu’il nous a fait dire et remonstrer, en nous humblement requerant iceulx. Pour ce est il que nous, ces choses considerées et les bons et agreables services à nous faiz par ledit suppliant, ou fait de noz guerres et autrement en maintes manieres, fait chascun jour et esperons que encores face, à icellui, pour ces causes et autres à ce nous mouvans, avons de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, donné et octroyé, donnons et octroions par ces presentes congié et licence de clorre et faire clorre, fortiffier et emparer le dit lieu de Brisay de murs, tours, fossez, portes, ponts leveiz, eschiffes, barbacanes et autres choses appartenans, necessaires et convenables à fait de fortifficacion, pourveu que ce ne nous tourne à prejudice et dommage, ne au païs d’environ, et que, non obstant ladicte fortifficacion, les hommes et subgiez d’icellui suppliant ne laissent à faire le guet ou d’ancienneté ilz ont acoustumé et sont tenuz de le faire, si non que ce procede du gré et consentement de cellui ou ceulx à qui la chose touche. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d’Anjou et du Maine, et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de noz presente grace et congié, licence et octroy facent, souffrent et laissent ledit suppliant joir et user plainement et paisiblement, sans sur ce lui mettre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun destourbier ou empeschement au contraire. Car ainsi le voulons et nous plaist estre fait, non obstans quelzconques ordonnances, mandemens, defenses et lettres, impetrées ou à impetrer, au contraire. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre à ces presentes nostre seel ordonné en l’absence du grant. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Poictiers, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. quarente après Pasques, et de nostre regne le xviiime.

Ainsi signées : Par le roy, en son conseil. D. Budé. Visa.

MXLVI Juin 1440

Lettres portant committimus au Parlement des causes du chapitre et de celles des chanoines de l’église cathédrale de Poitiers.

AN JJ. 200, n° 204, fol. 108 v° ; AN JJ. 211, n° 477, fol. 106 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 114-118

Karolus, Dei gracia Francorum rex, ad perpetuam rei memoriam. Quanto celebriores et famosiores ecclesias, potissime cathedrales, que presertim priscis à temporibus erecte feruntur, et omnes earum ministros sublimius extollere et à nimiis oneribus et pressuris liberare et quantum possumus relevare, ac uberibus immunitatibus, privilegiis et libertatibus amplificare et communire prestancius studemus, tanto gracius et accepcius omnipotenti Deo et gloriosis ejus sanctis quibus dedicate sunt obsequium impendere infallibiliter speramus. Sanè cum, sicut accepimus, ecclesia Pictavensis, que de antiquioribus ecclesiis regni nostri et maxime fertur esse prima, in sanguine et honore gloriosissimorum apostolorum Petri et Pauli consecrata et fundata, et sincere dilecti nostri decanus et capitulum ipsius Pictavensis ecclesie, in variis jurisdictionibus et auditoriis, et coram diversis judicibus, pro jurium et pertinenciarum fundacionis, dotacionis et augmentacionis obvencionum et rerum suarum tuicione et conservacione molestantur, vexantur, fatigantur et distrahuntur, in quibus sepe leduntur et diminuuntur, et ita sit quod si, sicut plurime alie cathedrales ecclesie regni nostri, non tenerentur litigare alibi quam in nostro Parlamento, nisi eis placeret, ab ipsis molestacionibus et incommodis opportune preserverentur. Notum facimus universis, presentibus et futuris, quod nos, maximam et sincerissimam gerentes devocionem pariter et affectionem ad ipsam Pictavensem ecclesiam, racione dicte antiquioritatis et maxime prioritatis ipsorum sanctorum apostolorum, ac eciam quia nati sumus et nativitatem nostram traximus in festo cathedre ipsius principis apostolorum, beati Petri, considerantes in mente divina obsequia, oraciones, preces et suffragia que in ipsa ecclesia, pro nostra et regni atque dicionis nostre salute et prosperitate, crebra et sedula sollicitudine celebrantur et fiunt ; revolventes itaque tenaci memoria integram fidelitatem et obedienciam quam erga nos et coronam nostram semper habuerunt ipsius ecclesie jamdicti decanus et capitulum, gratissimaque et optima servicia que nonnulli dicti capituli nobis contulerunt ab ineunte regencia qua functi sumus nunc usque, nobis liberaliter auxiliando de suis facultatibus, bonis et rebus, et aliis multis modis, et ideo cupientes ipsos aliqua speciali prerogativa communiri et eorum fundacionem et dotacionem nedum in integrum conservari, sed eciam adaugeri ; volentes pro tantis meritis singulare munus eis relinquere et fecundius elargiri, eisdem decano et capitulo sepedicte Pictavensis ecclesie, ex hiis et aliis justis et racionabilibus causis nos ad hoc moventibus, supplicante nobis pro ipsis dilecto et fideli consiliario nostro, requestarum hospicii nostri magistro ordinario, magistro Guillermo de Cherpeignes

Guillaume Gouge de Charpaignes, neveu de Martin, évêque de Clermont et chancelier de France de 1421 à 1428. Il était le second fils de Jean Gouge de Charpaignes, originaire de Bourges, trésorier de Jean duc de Berry, mort en 1402. Guillaume fut nommé maître des requêtes de l’hôtel en remplacement de Nicole Fraillon par lettres du 22 novembre 1422 ; il était, comme on le voit ici, sous-chantre et chanoine de l’église de Poitiers. Quelques mois après la date de ces lettres, il fut élu par le chapitre évêque de cette ville, au lieu d’Hugues de Combarel, et confirmé, le 17 mai 1441, par Henri d’Avaugour, archevêque de Bourges. Guillaume Gouge occupa ce siège épiscopal jusqu’en 1449. (Gallia christ., t. II, col. 1199 ; le P. Anselme, Hist. généal., t. VI, p. 398.) Il serait facile de compléter la trop courte notice qui lui est consacrée dans ces deux ouvrages, à l’aide des documents des archives de l’évêché et du chapitre de Poitiers. Nous nous contenterons de citer quelques actes de son administration. Le 17 juillet 1442, Guillaume de Charpaignes reçut l’aveu de la terre de Lezay, à cause de son château de Celle-l’Évêcault, dépendant de l’évêché de Poitiers. (Coll. dom Fonteneau, t. III, p. 641.) Il accorda permission à Pierre Claveurier, son capitaine à Dissay, de faire bâtir un colombier ou fuie en cette localité. (Arch. de la Vienne, G. 79.) Par contrat passé le 21 mai 1447, avec Charles d’Anjou, comte du Maine, ce dernier lui céda le château d’Harcourt à Chauvigny et les terres de la Pérate et de Conflans, en échange desquels il obtenait les seigneuries de Thuré, Saint-Chistophe-sous-Faye et la Tour d’Oyré. (Id., G. 40.)

, succentore et canonico ipsius ecclesie, concessimus et concedimus, de nostra sciencia, speciali gracia, auctoritate ac potestatis nostre plenitudine, per presentes, ut ipsi, tam conjunctim quam divisim, nullatenus teneantur aut compellantur litigare coram aliquo judice seculari regni, preterquam et excepto in nostra curia Parlamenti, nisi eis placuerit, respectu omnium et singulorum et quarumlibet causarum suarum presencium et futurarum, tam agendo quam defendendo, tangencium et que tangent et tangere poterunt quovismodo corpus et fundacionem dicte ecclesie, et ubi dicti de capitulo erunt pars. Nostra tamen existit intencio quod eorum homines et subditi ac alia membra, in hoc quod aliqualiter non tanget jura seu fundacionem ipsius ecclesie, respondebunt et respondere tenebuntur in casu ressorti coram illo baillivorum aut senescallorum nostrorum, in cujus baillivia seu senescallia commorabuntur. Quocirca earumdem tenore mandamus dilectis et fidelibus consiliariis nostris gentibus nostrum presens tenentibus et que nostra futura tenebunt Parlamenta, ceterisque justiciariis et officiariis nostris ac regni nostri, vel eorum locatenentibus, presentibus et futuris, ac ipsorum cuilibet, prout pertinuerit ad eundem, quatinus ipsi et eorum quilibet qui super hoc requiretur, ut ad eum spectabit, nostris presenti gracia et concessione faciant, sinant et permittant dictos de capitulo dicte Pictavensis ecclesie et eorum quemlibet uti et gaudere plene et pacifice, absque eis inferendo vel inferri tolerando quodvis disturbium, molestiam vel impedimentum in contrarium, quod, si à quoquam secus actum fuerit, id, quilibet prout sibi incumbet, tollant, amoveant statim et indilate, visis presentibus, super quibus omnibus et singulis imposuimus ac imponimus perpetuum silencium procuratori nostro generali et omnibus aliis quibuscunque. Et ut perpetua firmitate perseverent, sigillum nostrum in absencia magni ordinatum duximus apponendum hiis presentibus litteris, quarum transcripto seu vidimus confecto sub regio sigillo, quia dicti de capitulo et eorum particulares ac eciam persone singulares hujusmodi Pictavensis ecclesie eisdem litteris indigebunt in pluribus et variis locis in quibus, formidine discriminum et periculorum que sunt et eminere possunt super itineribus, non auderent hoc originale deferre, nos, de ampliori gracia nostra, volumus et decernimus tantam fidem adhiberi sicut hiis originalibus litteris. Nostro tamen in aliis et alieno in omnibus semper jure salvo. Datum in Claromonte in Arvernia, mense junii anno Domini millesimo quadringentesimo quadragesimo, et regni nostri decimo octavo

Ces lettres sont transcrites deux fois sur les registres du Trésor des chartes, la première dans une confirmation de Louis XI, datée de Poitiers, au mois de février 1465 n.s. (JJ. 200, n° 204), la seconde dans une nouvelle confirmation donnée par Charles VIII, l’an 1484, sans indication de lieu ni de mois (JJ. 211, n° 477, fol. 106). Le texte est plus correct dans cette dernière copie. Il a été publié, d’après le registre des ordonnances de Louis XI enregistrées au Parlement de Paris, dans le grand recueil des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XVI, p. 300.

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Sic signatas : Per regem in suo consilio, in quo dominus Karolus de Andegavia

Charles d’Anjou, comte de Mortain et du Maine.

, espiscopus Claromontensis

Martin Gouge de Charpaignes, évêque de Chartres, puis de Clermont (de 1415 au 25 novembre 1444) et chancelier de France. (Cf. le vol. précédent, p. 137, note 2, et 308.)

, admiraldus

Prégent de Coëtivy, sur lequel nous aurons occasion de revenir, avait été créé amiral en 1439, au lieu d’André de Laval, sr de Lohéac, pourvu de l’un des quatre offices de maréchal de France ; il en fit serment par procureur le 26 décembre 1439.

, magister Johannes Rabatelli

Jean Rabateau, président au Parlement de Poitiers. (Voy. ci-dessus, p. 31 note 5.)

, in Parlamento presidens, dominus de Varenna

Pierre de Brézé, sr de la Varenne, devint sénéchal de Poitou à la fin de cette année ou au début de la suivante. Une notice est consacrée à ce personnage, quelques pages plus loin.

et alii erant. J. de Dijon. — Visa. Contentor. J. de la Garde.

MXLVII Juin 1441

Rémission accordée à Jean de Siquenville, écuyer de Gascogne, qui, conduit prisonnier à Montaigu, par ordre du dauphin, pour avoir rançonné plusieurs villages du Poitou et de l’Anjou, s’était évadé pour échapper à la question, et avait exercé des violences contre Philippe François, avec qui il était en procès.

AN JJ. 176, n° 84, fol. 50 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 118-124

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Jehan de Siqueinville, escuier du païs de Gascoigne, contenant que, deux ans a ou environ, le feu sire de Raiz

Gilles de Laval, dit de Rais, seigneur de Rais (ou Retz), fils de Guy de Laval et de Marie de Craon, né vers 1406, orphelin en 1416, fut créé maréchal de France en 1429 et se distingua en beaucoup de combats contre les Anglais. Riche et puissant, il se ruina par des prodigalités insensées. Convaincu de s’être livré à d’abominables pratiques de sorcellerie et à la débauche la plus monstrueuse, il fut condamné au dernier supplice ; après avoir été pendu, son corps fut livré au feu près de Nantes, le 26 octobre 1440, c’est-à-dire moins d’un an après les événements rappelés ici. Son procès a été publié, il y a quelques années, par MM. l’abbé Bossard et R. de Maulde (Paris, Champion, 1886, in-8°). Gilles de Rais avait épousé, par contrat du 1er novembre 1420, Catherine de Thouars, fille et héritière de Miles, seigneur de Pouzauges, Tiffauges, Chabanais et Confolens, et de Béatrix de Montjean. Leur fille unique épousa : 1° Prégent de Coëtivy, sr de Taillebourg, amiral de France, auquel Charles VII fit don des biens confisqués de son beau-père ; 2° André de Laval, sr de Lohéac, aussi amiral, puis maréchal de France. Elle mourut le 1er novembre 1458.

, en son vivant nostre conseiller, chambellan et mareschal de France, soubz lequel le dit suppliant estoit, dist à icellui suppliant qu’il vouloient aler au Mans, et qu’il vouloit qu’il prenist la charge et gouvernement des gens de guerre, que avoit lors une appellée Jehanne, qui se disoit pucelle

Ce passage relatif à Jeanne des Armoises, la fausse Pucelle, a attiré depuis longtemps l’attention des érudits sur les lettres de rémission accordées à Jean de Siquenville. M. Vallet de Viriville les signala, dès l’année 1846, dans un article de la Bibliothèque de l’École des chartes, 2e série, t. III, p. 116, puis dans son Histoire de Charles VII (t. II, p. 366-369), où l’on trouve des renseignements curieux sur la fausse Jeanne, qui était parvenue à tromper même le frère de Jeanne d’Arc. Le maréchal de Rais, qui cependant avait été le compagnon d’armes de la Pucelle en 1429, fut aussi sa dupe, comme on le voit ici, à moins qu’il n’ait eu quelque intérêt à accréditer l’imposture. Jeanne des Armoises fut appelée la Pucelle du Mans, sans doute à cause de l’expédition rappelée dans notre texte, dont le résultat d’ailleurs n’est point connu. On sait que la ville du Mans ne fut reprise sur les Anglais que l’an 1448. Jules Quicherat a publié un fragment important de ces lettres avec d’autres documents sur la « fausse Jeanne d’Arc qui parut de 1436 à 1440 ». (Procès de Jeanne d’Arc, t. V, p. 332 et suiv.) M. Tuetey les a analysées aussi, à un autre point de vue, dans son ouvrage intitulé : Les Écorcheurs sous Charles VII, t. I, p. 124, 125.

, en promettant que, s’il prenoit le dit Mans, qu’il en seroit cappitaine ; le quel suppliant, pour obeir et complaire au dit feu sire de Raiz, son maistre, duquel il estoit homme à cause de sa femme, lui accorda, et print la dicte charge, et se tint par certain temps entour les païs de Poictou et d’Anjou, et pour avoir vivres et patiz pour les soustenir et entretenir jusques au retour de son dit feu maistre, et jusques à ce qu’il eust nouvelles de lui commant il avoit à besongner, icellui suppliant envoya certaines cedulles en plusieurs villaiges estans ès diz païs de Poictou et d’Anjou, et manda aux habitans estans en icelles qu’ilz se venissent appatisser à lui, ou que lui et sa dicte compaignie yroient logier ès diz villaiges. Durant lequel temps qu’il tenoit ainsi les champs, nostre très chier et très amé filz le daulphin de Viennois, que envoyasmes en nostre païs de Poictou

Le dauphin Louis, alors âgé de seize ans seulement, avait été nommé lieutenant du roi en Poitou, Saintonge et gouvernement de la Rochelle, par lettres patentes datées d’Angers, le 12 décembre 1439, avec mission spéciale de faire cesser le pillage des routiers et brigands qui ravageaient ces pays. Ces lettres dont un vidimus de 1440 se trouve aux Archives nat., K. 65, n° 11, et une copie dans la collection de dom Fonteneau, t. XX, p. 233, sont imprimées dans la seconde édition de l’Histoire du Poitou de Thibaudeau, in-8°, t. II, p. 460. Par lettres du même jour, Charles VII avait commis Jean de Montmorin, maître des requêtes de l’hôtel, Pierre de Tuillières, chevalier, et maître Jean Colas, tous deux conseillers au Parlement, en la compagnie de son fils le dauphin, « pour eulx informer de plusieurs pilleries, roberies, rebellions et desobeissances, abuz de justice, tors, griefz, exactions et autres crimes et malefices, commis et perpetrez en nos diz païs par plusieurs de nos subgiez et autres estans en iceulx, et pour en congnoistre, determiner, jugier, composer, condemner et corriger les delinquans civilement ou corporelment, selon l’exigence des cas, par l’ordonnance de nostre dit filz, etc. » M.E. Charavay a publié aussi, d’après l’original faisant partie de sa collection, d’autres lettres patentes (Angers, 21 décembre 1439) commettant Henry Blandin, notaire et secrétaire du roi, à la recette des deniers et finances « qui viendront et ysseront des amendes, composicions, condemnations, confiscacions et autres exploiz de lad. commission des diz conseillers,… lesquelz deniers il baillera à Jean de Xaincoins, receveur general des finances. » (Lettres de Louis XI, roi de France, t. I. Lettres de Louis, dauphin, publ. par Et. Charavay, p. 178.) Un mandement du dauphin, daté de Fontenay-le-Comte, le 29 janvier 1440 n.s., ordonnait audit Blandin de payer la somme de 100 livres à Amaury d’Estissac, chevalier, et à Guillaume d’Avaugour, écuyer, conseillers et chambellans du roi et les siens, qu’il envoyait alors de Fontenay à Angers, ou ailleurs, vers le roi son père, « pour certaines grosses besongnes et matieres par nous à eux commises et chargées, grandement touchans mondit seigneur et nous ». (Id., p. 180, d’après la Bibl. nat., pièces orig., vol. 1080, dossier Estissac.) On peut citer encore un jugement rendu, le 16 février 1440 n.s., par les commissaires enquêteurs en Poitou, adjoints au dauphin, en faveur des maire, bourgeois et habitants de la ville de Niort, sur le fait des abus introduits dans les impositions des tailles, aides et autres subsides. C’est dans cet acte qu’est incorporée la commission du 12 décembre 1439. (Coll. dom Fonteneau, t. XX, p. 233, copié sur un titre de l’hôtel de ville de Niort.) Le dauphin Louis ayant trahi la confiance du roi et fait alliance avec ceux qu’il avait mission de combattre, les actes émanés des commissaires, qui n’agissaient que d’après ses ordres, ne sauraient être très nombreux, surtout en ce qui concerne la répression des gens de guerre.

, pour oster les pilleries et faire vuidier les gens de guerre qui estoient en icellui, après ce qu’il fut venu à sa congnoissance que le dit suppliant tenoit ainsi les champs et appatissoit nos diz païs, envoya prandre le dit suppliant, et fut mené prisonnier ou chastel de Montagu

Le château de Montaigu était la résidence de Jean de Belleville (Harpedenne) et de sa femme, Marguerite de Valois, fille naturelle de Charles VI, oncle et tante par conséquent du dauphin Louis.

, où lors nostre dit filz et son conseil estoient. Et pour ce que les gens du dit conseil d’icelui nostre filz, devant lesquelz il fut mené, le vouloient questionner et examiner sur les choses dessus dictes, et doubtant qu’on voulsist rigoureusement proceder par justice à l’encontre de lui, et pour eschever les perilz et dangiers qui eussent peu avenir en sa personne, il rompy la prison où il estoit et s’en eschappa, combien que de chose qu’il eust fait il ne cuidoit point avoir mesprins ne en estre reprins, veu l’adveu qu’il avoit de son dit feu maistre. Et avecques ce, à l’occasion de ce que ung nommé Philippon François et Macée Françoise, sa suer, eulx disans cousins et heritiers de feu maistre Maurice Hubert

Maurice Hubert, procureur en Parlement, mentionné en cette qualité dès le 18 mars 1400 (Arch. nat., X2a 13, fol. 325), et depuis nommé fréquemment dans les registres de cette cour, tant à Paris qu’à Poitiers, depuis 1418, était né à Saint-Fulgent, dans le Bas-Poitou, et mourut peu après le 14 novembre 1425, date de son testament. Outre ses biens au lieu de sa naissance et à Poitiers, il possédait des terres et maisons à Dercé et à Prinçay en Loudunais. Maurice avait été marié deux fois : 1° à Guyonne Chauvigné, 2° à Marguerite, fille de Simon Marteau, qui lui survécut. Son fils aîné Nicolas, décédé avant lui, était inhumé dans l’église des Frères mineurs de Mirebeau. Le second, Antoine, fut son héritier. Maurice avait eu un frère, Nicolas Hubert, mort sans enfants à Noël, l’an 1400, et enterré dans le cimetière de Saint-Fulgent, dont la veuve, Catherine de la Noue, vivait encore à la fin de 1425, et avait hérité de lui, entre autres biens, de l’hôtel de la Boscherie. Il est question aussi d’un Thibaut Hubert, oncle de Maurice, alors décédé, et de Jeanne Hubert, sa feue tante, qui avait été femme de Guillaume Baclet. Dans son testament, Maurice Hubert se dit « infirme de corps », et parle de certains échanges qu’il avait faits avec son neveu Philippon François, ordonne de nombreuses fondations pieuses et entre dans un curieux détail de ses dettes actives et passives. Ses exécuteurs furent : Marguerite Marteau, sa femme, Jean Marteau, écuyer, son beau-frère, maître Jean Quirit, son cousin, Jean Frenier, curé de Saint-Martin de Maulay, Philippon François, son neveu, et Jean Marron. (X1a 8604, fol. 95 v°.)

, avoient paravant ce mis en procès le dit suppliant par devant nostre seneschal de Poictou ou son lieutenant, à cause de certains heritages assis en nostre païs de Poictou, que avoit ja pieça baillez apperpetuité, à certains tiltres et moyens, au dit suppliant feu Anthoine Hubert, qui disoit iceulx heritaiges à lui competter et appartenir, comme vray heritier du dit maistre Maurice, et desquelz le dit suppliant avoit joy paisiblement l’espace de quatre ans et plus, et jusques à son dit empeschement de prison, et que durant icellui procès, ou quel avoit esté procedé par plusieurs journées devant nostre dit seneschal ou son dit lieutenant, icellui Phelippon se fist mettre en nostre sauvegarde contre le dit suppliant. Lequel, depuis qu’elle lui fut notiffiée, et depuis son dit eschappement de prison et qu’il lui fut rapporté que le dit Phelippon avoit, durant son dit empeschement, telement procedé par contumaces à l’encontre de lui, que par deffaulx il l’avoit subcombé et obtenu gaing de cause contre lui, et que encores non content de ce et qu’il eust et detenist les diz heritaiges, il s’efforçoit et mettoit toute peine et diligence de destruire de tous poins le dit suppliant, et sy le menaçoit de faire grief de son corps, dont le dit suppliant estoit très fort yré et courrocié. Monta ung jour dont il n’est recors à cheval, lui et ung sien varlet, cuidant corrompre son courroux, et s’en ala en son hostel vers sa femme ; et en y alant, passa par l’ostel dont le dit procès sordy et rencontra en son chemin, en ung champ hors dudit hostel le dit Phelippon, qui ainsi l’avoit menacié ; lequel il ne cuidoit point trouver. Entre lesquelz Phelippon et suppliant se meurent paroles et tellement que le dit suppliant lui bailla plusieurs cops de son espée et d’icelle le bleça jusques à effusion de sang. Et si print le dit varlet d’icellui suppliant, en la manche du dit Phelippon, pluseurs lettres royaulx et autres, les quelles il apporta au dit suppliant, son maistre, qui ne savoit que c’estoit ; et incontinant il qui n’est point clerc et lui estant encores meu et eschauffé du dit debat, les geta en ung feu, cuidant non mesprandre, se non envers le dit Phelippon. Et tantost après se party et absenta du païs et s’en ala en nostre service en nostre ville de Louviers

La ville de Louviers fut prise par Xaintrailles, au mois d’octobre 1440 ; les fortifications de cette place furent aussitôt relevées, et quand les Anglais revinrent en force pour s’en emparer de nouveau, ils la trouvèrent en état de défense. (G. Le Bouvier, dit Berry, Chronique, édit. Godefroy, in-fol., p. 412.)

, en laquelle il s’est tousjours depuis tenu et encores fait de present, en exposant chascun jour son corps et faisant fait de guerre de tout son povoir à l’encontre de noz anciens ennemis et adversaires les Anglois. Et se doubte que, à l’occasion des choses dessus dictes ; il ait esté appellé aux droiz de justice et qu’on ait procedé ou vueille l’en proceder contre ses personne et biens par ban et autrement, par quoy il n’oseroit retourner ne converser au païs, ne aler veoir sa femme et mesnage, se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartie. En nous humblement requerant que, attendu ce que dit est et que ce qu’il fist, durant le temps qu’il tint les champs ès diz païs de Poictou et d’Anjou, fut par l’adveu et commandement du dit feu sire de Raiz, et au regard du dit eschappement de prison, fut pour eschever le peril et dangier de sa personne, et que en tous autres cas il a tousjours esté de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans oncques mais avoir esté actaint ou convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, et nous a bien et loyaulment servy ou fait de noz guerres, sans jamais avoir adheré ne tenu autre party que le nostre, il nous plaise les faiz et cas dessus diz, ensemble les circonstances et deppendences lui remettre, quicter et pardonner, et le restituer et remettre à ses biens, droiz et actions, et sur tout lui impartir nostre grace. Pour ce est il que nous, ces choses considerées et les bons et aggreables services que le dit suppliant nous a faiz le temps passé en noz guerres, à l’encontre de nos diz ennemis et autrement, en maintes manieres, fait chascun jour et esperons que encores face, etc., à icelluy suppliant avons les faiz et choses dessus dictes, etc., quictées, remises et pardonnées, etc. Sy donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, etc. Donné à Saint Denis en France, ou mois de juing l’an de grace mil cccc. quarante ung et de nostre regne le xixe.

Ainsi signées : Par le roy, le sire de Saintrailles

Poton de Xaintrailles, le célèbre capitaine, depuis maréchal de France, mort à Bordeaux, dont il était gouverneur, le 7 octobre 1461. Jean de Siquenville servait alors sous ses ordres.

, et autres presens. D. Budé. Visa.

MXLVIII Septembre 1441

Rémission octroyée à Pierre Texier, de Ruffigny, coupable de différents vols, de complicité avec des gens de guerre de Poitou.

AN JJ. 176, n° 59, fol. 41 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 124-127

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Pierre Texier, laboureur, demourant à Ruffigné près Saint Maixant en nostre païs de Poictou, aagé de xxxii. ans ou environ, povres homs chargié de femme et de petiz enfans, contenant que, environ la saint Jehan Baptiste derrenierement passée ot ung an, ledit suppliant qui avoit et a perdu le sien pour les guerres et divisions qui ont esté au dit lieu de Saint Maixent et environ, et par raençonnemens de gens d’armes et autrement, se transporta en la Riviere de Ruffigné, en la compagnie de genz de guerre qui lors estoient à Mauzé pour nous en garnison, durans les dites guerres et divisions, et illec prindrent une jument, laquelle estoit à ung gentil homme du païs, du nom duquel de present ne se recorde. Laquelle jument ledit suppliant mena vendre à Fontenay le Conte ; au quel lieu il la vendi à ung marchant duquel il ne scet aussi le nom. Et pour ce que après ledit larrecin fait, ledit gentilhomme fist demande et poursuite de sa dicte jument, icellui suppliant, soy doubtant de la dicte poursuite, embla de rechief ladicte jument audit marchant qui l’avoit achettée de lui trois reaulx et la rendit audit gentilhomme. Et aussi ung an et demy a ou environ, ledit suppliant se transporta environ Pousauges, et illec embla deux beufz lesquelz il ne savoit à qui ilz estoient. Et pareillement, le jour de saint Pierre derrenierement passé, vindrent au molin de Candé, où estoit ledit suppliant, ung nommé Henry et Raoulet de Caley

Une famille de Calais (Caloys, Calaix), originaire de Sauzé, était établie au xve siècle dans la région voisine. Le premier membre connu, Guillaume, écuyer, demeurant à Sauzé, rendit aveu au duc de Berry, comte de Poitou, le 27 octobre 1404, de son hébergement de Puy-Boyer (auj. Puy-Danché) mouvant de Civray. (Copie du Grand-Gauthier, Arch. nat., R1* 2172, p. 1205.) Le même, dont le nom est écrit « Guillaume Caloys », paya, le 12 septembre 1418, à Pierre Morelon, receveur du dauphin Charles en son comté de Poitou, 60 sous de devoir pour ledit hébergement du « Puy-Bohier, sis en la parroisse de Vaussay », et plusieurs autres menus fiefs en la châtellenie de Civray. (P. 1144, fol. 65.) « Raoulet de Caley » appartenait peut-être à cette famille noble, sur laquelle on peut consulter la nouv. édit. du Dictionnaire des familles du Poitou, t. II, p. 118, 119.

, compaignons de guerre, environ heure de mynuit, lesquelz distrent audit suppliant qu’il alast avecques eulx à Artenay pour prendre deux jumens qui estoient à ung nommé Mery Martin ; lequel leur respondi qu’il estoit content de y aler. Et lors se mistrent tous ensemble à chemin, et quant ilz furent audit lieu d’Artenay, le dit suppliant enseigna et monstra la maison du dit Martin aux dessus diz, en laquelle estoient les dictes jumens ; et lors les diz Henry et Raoulet entrerent en la dicte maison et prindrent les dictes deux jumens, lesquelles ilz emmenerent à l’ostel du dit suppliant. Et quant ilz furent audit hostel, distrent à icellui suppliant que ilz s’en vouloient aler à Faye sur Ardin, pour vendre les dictes jumens, et incontinent qu’elles seroient vendues, ilz lui envoirroient sa part du butin. Et atant se departirent d’ensemble, prenans congié dudit suppliant, et emmenerent les dictes jumens. Et par aucun pou de temps après la dicte feste saint Pierre, le dit suppliant se transporta à Puy de Cerre près Vouvent ou dit païs de Poictou, pour trouver les diz Henry et Raoulet de Caley, pour avoir sa partie du dit butin des dites jumens prises au dit lieu d’Artenay. Auquel lieu de Puy de Cerre il trouva ledit Henry, qui illec avoit autres deux jumens qu’il avoit emblées auprès du Gué de Voluyre, lesquelles il bailla au dit suppliant pour mener à son hostel et les vendre à moitié de gaing. De quoy icelui suppliant se charga, combien qu’il savoit bien certainement qu’il les avoit emblées. Et sur ce se departit du dit Henry et mena les dictes jumens en son hostel. Et pou de temps après les dictes choses faictes, le dit suppliant a esté prins, saisi des dictes jumens et mené prisonnier en noz prisons de Saint Maixent, et icelles jumens prises et emmenées par ceulx qui le prindrent, ès quelles prisons il est encores detenu à grant povreté et misere. Pour occasion desquelles choses le dit suppliant est en voye de miserablement finer ses jours, et ses diz femme et enfans de querir et mendier leurs povres vies, se par nous ne lui estoit sur ce impartie nostre grace, si comme il dit, requerant humblement que, comme les diz cas et choses dessus declarez le dit suppliant ait fait par povreté et indigence de lui et de son dit mesnage, et à ce condescendu par mauvais inductions et par le conseil des diz Henry et Raoulet de Caley, compaignons de guerre, et que en tous autres cas il ait esté et soit de bonne vie, renommée, non actaint ne convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ne reprouche, nous sur ce lui vueillons impartir nostre dicte grace. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde estre preferée à rigueur de justice, audit suppliant avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à nostre seneschal de Poictou ou à son lieutenant, et à tous noz autres justiciers et officiers, etc. Donné à Pontoise, ou mois de septembre l’an de grace mil cccc. xli, et de nostre regne le xixe, seellées de nostre seel ordonné en l’absence du grant.

Ainsi signées : Par le roy, le conte de Tancarville

Guillaume d’Harcourt, comte de Tancarville, vicomte de Melun, baron de Montgommery, seigneur de Montreuil-Bellay, etc., fils de Jacques II d’Harcourt, baron de Montgommery, et de Marguerite de Melun, comtesse de Tancarville, sa seconde femme, rendit de grands services à Charles VII contre les Anglais et l’assista aux sièges de Montereau (1437), de Pontoise (1441), de Rouen (1449), de Caen, Falaise, Cherbourg et Saint-Sauveur-le-Vicomte (1450), etc. On le trouve qualifié souverain maître et général réformateur des eaux et forêts de France dans des actes des années 1452 et 1453. Il vécut jusqu’en 1487. (Cf. le P. Anselme, t. VIII, p. 898.)

, l’admiral

Prégent de Coëtivy, amiral de France depuis 1439.

, maistre Regnier de Boullegny

Renier de Bouligny ou Boullegny (ci-dessus, p. 22, note 2).

, et plusieurs autres presens. Burdelot.

Visa. Contentor. M. de la Teillaye.

MXLIX Novembre 1441

Rémission accordée à Jean Giffondeau, cordonnier de Chauray, ancien fermier des aides en plusieurs paroisses des châtellenies de Saint-Maixent et du Bois-Pouvreau, où il s’était ruiné. Il avait fait fabriquer par un graveur de Poitiers un sceau dont il se proposait de faire usage pour de faux mandements destinés à contraindre ses anciens débiteurs à s’acquitter envers lui.

AN JJ. 176, n° 382, fol. 268 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 127-130

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Giffondeau, povre jeune homme, cordouannier, natif de la parroisse de Chaurray près Nyort en Poictou, chargié de femme et de trois petiz enfans, contenant que, comme le dit suppliant ait eu, tenu et affermé ou temps passé plusieurs fermes des impositions mises sus de par nous de douze deniers pour livre sur toutes denrées et marchandises, et aussi du viiie du vin vendu à detail en plusieurs parroisses assises environ les chastellenies de Saint Maixent et du Bois Povreau, èsquelles fermes il a beaucop perdu, et lui en est deu encores plusieurs restes, et lui a convenu que, pour paier les dictes fermes à noz officiers et receveurs, qu’il ait vendu la plus part de ses biens et heritaiges. Et pour ce qu’il n’avoit pas fait convenir dedens le temps des dictes fermes ses diz debteurs et que après il ne le povoit faire, comme il lui sembloit, sans noz lettres de provision ou de noz esleuz sur le fait de nos aides ou dit païs de Poictou. Pour laquelle cause et afin de contraindre iceulx ses debteurs à lui paier les restes d’icelles fermes, lui estoient necessaires avoir plusieurs mandemens ou commissions de nos diz esleuz, lesquelz mandemens le dit suppliant pour sa povreté n’eust peu paier ne fournir aux despenses qu’il lui eust convenu faire à la poursuite des dictes choses, le dit suppliant se feust trait à Poictiers, devers ung graveur de seaulx nommé Chavrouche

Jean Audebert, dit Chaveroche, de Poitiers, avait été constitué prisonnier en vertu de lettres obtenues par Jacques Jouvenel des Ursins, évêque de Poitiers, « occasione certorum magnorum et enormium criminum, excessuum, delictorum et maleficiorum per ipsum commissorum » (ils ne sont pas spécifiés autrement), et était mené sous escorte à Paris, pour être incarcéré à la conciergerie du Palais, quand son frère Me Guillaume Chaveroche, ayant attaqué ceux qui le conduisaient et blessé grièvement d’un coup de dague le sergent royal, parvint à le délivrer. Le Parlement décréta les deux frères de prise de corps, le 20 juillet 1456, puis, le 28 décembre suivant, les coupables ayant échappé à toutes les recherches, vu les informations faites contre eux, un nouveau mandement fut adressé par la cour au premier huissier ou sergent sur ce requis pour s’emparer d’eux, partout où ils pourraient être trouvés, ou les ajourner à cri public, sous peine de bannissement et de confiscation. (Arch. nat., X2a 27, fol. 161 et 238 v°.) Le graveur de sceaux nommé ici était sans doute parent de ces deux frères Chaveroche.

, dès environ la my aoust derreniere passée, et lui bailla à faire ung seel de la grandeur d’un petit blanc de cinq deniers, en ayant entencion pour eschever les dictes despences d’en vouloir seeller ou faire seeller les diz mandemens, et encharga au dit graveur qu’il meist ou dit seel ung escu à trois fleurs de liz et la lettre à l’environ : Karolus, Dei gracia Francorum rex, pour certain pris et somme d’argent qu’il en paya au dit graveur. Et quant le dit seel fut fait, le dit suppliant le ala querir à l’ostel du dit Chavrouche, et en le prenant du dit graveur, aucuns noz sergens et officiers au dit lieu de Poictiers survindrent illec, qui trouverent le dit suppliant saisi d’icellui seel, sans ce toutesvoies qu’il en eust oncques usé ne seellé aucune chose, le prindrent au corps et le menerent prisonnier en noz prisons de la conciergerie du dit lieu de Poictiers. Et incontinent que le dit suppliant fut illec amené, fut par le lieutenant de nostre seneschal au dit lieu de Poictiers interrogé et enquis par serement de dire verité et quelle entencion il avoit. Auquel fist response et confessa que le dit seel duquel il avoit esté trouvé saisi, il l’avoit fait faire pour ung sien frere, nommé Pierre Giffondeau, sergent du dit lieu de Chaurray, qui, ainsi qu’il disoit, lui avoit chargié de le faire faire, combien qu’il n’en estoit riens. Pour occasion du quel cas il fut dès lors detenu prisonnier ès dictes prisons de la conciergerie, où il a tousjours depuis esté et encores est à present en grant povreté et misere et en voye d’y finir brief miserablement ses jours, se nostre grace et misericorde ne lui est sur ce impartie, si comme il dit, en nous humblement requerant que, attendu qu’il a tousjours esté de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans oncques mais avoir esté actaint ne convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, et aussi que pour le dit cas, il a souffert et enduré grant povreté et misere ès dictes prisons, et en faveur mesmement de ses diz povre femme et petiz enfans, lesquelz à ceste cause sont comme mendians et orphelins, nous lui vueillons sur ce impartir icelle nostre grace. Pour ce est il que nous, consideré ce que dit est, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, à icellui Jehan Giffondeau suppliant avons ou cas dessus dit quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Amboise, ou mois de novembre l’an de grace mil cccc. quarente et ung, et de nostre regne le xxme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Ja. Aude. — Visa. Contentor. E. du Ban.

ML Décembre 1441

Rémission octroyée à Rolland Raulete, homme d’armes de la compagnie du bâtard de Beaumanoir, prisonnier pour avoir rançonné plusieurs marchands de Notre-Dame de Beauchêne en Poitou.

AN JJ. 176, n° 385, fol. 270 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 130-131

Charles etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Roulant Raulete, homme d’armes de la compagnie du bastard de Beaumanoir

On ne trouve, dans les généalogies de la maison de Beaumanoir, aucun renseignement sur ce personnage dont le nom figure assez fréquemment dans les textes de l’époque. Pendant la Praguerie, la compagnie du bâtard de Beaumanoir tenait garnison au château d’Airvault, pour les princes rebelles, et se rendit coupable de pillages et d’excès. Pierre Ruffault, sergent de Richemont, sr de Parthenay, au bailliage d’Autin, et chargé du recouvrement des amendes, fut détroussé quatre fois par ses gens d’armes, qui le battirent et mutilèrent « très enormement » et lui volèrent trois chevaux. (Acte du 20 avril 1443, Arch. nat., R1 192.)

, aagié de xl. ans ou environ, natif du païs de Bretaigne, contenant que le xxiie jour du mois d’octobre derrenier passé, le dit suppliant et plusieurs autres compaignons de guerre se transporterent ès hostelz ou maisons de ung nommé Benoist Ussault, Anthoine Bonnet, Colas Guillebaut et Pierre Riviere, marchans, demourans à Nostre Dame de Beauchesne en Poictou, et illec prindrent six draps de Moilleron, trois jumens et ung cheval, en entencion d’iceulx draps et choses raençonner pour avoir des vivres tant seulement, en passant le païs. Pour occasion du quel cas, jasoit ce que les diz marchans ayent esté satisfaiz et restituez des dictes choses, les chevaulx et biens du dit suppliant ont esté prins et saisiz, et son corps mis et detenu prisonnier en noz prisons au lieu de Chinon, et se doubte que, soubz umbre du dit cas l’en le vueille traicter ou condempner à paier aucune amende ou à souffrir peine corporele, humblement requerant que, attendu que dès le temps de son enfance il se soit continuelment emploié corps et biens en nostre service ou fait de la guerre, et a esté en plusieurs voiages, entreprinses armées et sieges à l’encontre de noz anciens ennemis et adversaires les Anglois, et mesmement au siege derrenierement par nous tenu devant nostre ville de Pontoise

Le siège de Pontoise, où Charles VII fut présent en personne, commença dans les premiers jours de juin et se termina, le 19 septembre suivant, par l’assaut et la prise de cette place.

, et aussi que les diz marchans ont esté restituez des dictes choses, et que oncques mais il ne fut actaint d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, nous lui vueillons sur ce impartir nostre grace. Pour quoy nous, les choses dessus dictes considerées et mesmement les bons et agreables services que le dit suppliant nous a faiz en nos dictes guerres, comme dit est, et esperons que encores face ou temps avenir, à icellui suppliant, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, avons pour les causes dessus dictes et autres à ce nous mouvans, quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces dictes presentes au bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d’Anjou et du Maine, et à tous noz autres justiciers et officiers, etc. Donné à Chinon, ou mois de decembre l’an de grace mil cccc. xli, et de nostre regne le xxme.

Ainsi signé : Par le roy, l’admiral

Prégent de Coëtivy était amiral de France depuis deux ans.

, messire Jehan de Jambes

Ou plutôt de Chambes, chevalier, seigneur de Montsoreau, plus tard premier maître d’hôtel du roi. Il apparaît, vers 1440, comme membre du conseil privé, dont il fit partie jusqu’à la fin du règne de Charles VII, et fut capitaine de la Rochelle, Niort et Talmont. En juin 1454, il fut employé en diverses ambassades à Rome et en Turquie. Jean de Chambes épousa, le 17 mars 1445, Jeanne Chabot, seconde fille de Thibaut IX, seigneur de la Grève, et de Brunissende d’Argenton ; elle était, en 1473, dame d’honneur de Charlotte de Savoie, femme de Louis XI.

et autres presens. D. Budé. — Visa. Contentor. E. du Ban.

MLI 11 janvier 1442

Lettres permettant à Charles d’Oyron, seigneur de Baugé-Menuau en la paroisse de Saint-Pierre de Verché, de fortifier ledit lieu, mouvant de la vicomté de Thouars.

AN JJ. 176, n° 397, fol. 274 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 132-135

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre amé et feal chevalier et chambellan, Charles d’Oyron, seigneur de Baugé Menuau

Ancien fief et seigneurie avec forteresse au xve siècle, relevant de Berrie, dit M.C. Port. Les seigneurs de Baugé ou Baugé-Menuau (autrefois de la paroisse Saint-Pierre, auj. cne des Verchers) étaient en 1460 Guy de Laval, en 1471 Jean d’Oyron, puis Gabriel de Saint-Georges, mari d’Anne d’Oyron, par transaction du 1er janvier 1530. (Dict. hist., géogr. et biogr. de Maine-et-Loire, t. I, 1878, p. 229.) On ne trouve rien sur Charles d’Oyron, prédécesseur de Guy de Laval, et le fief de Baugé-Menuau ne figure pas sur l’Inventaire des fiefs de la vicomté de Thouars, publ. par MM. le duc de La Trémoïlle et Henri Clouzot. Niort, in-4°, 1893.

en la parroisse de Saint Pierre de Verché, contenant que il est seigneur du dit lieu de Baugé Menuau, ou quel lieu de Baugé il a plusieurs hommes levans et couchans, et y a justice et jurisdicion, lesquelz habitans du dit lieu, pour ce qu’ilz sont loing de forteresse et de lieu où ilz puissent avoir leur retrait et refuge, ont esté le temps passé et sont chascun jour telement foulez et domagez de plusieurs compagnies de gens d’armes et de trait, lesquelz ont sejourné et demouré longuement au dit lieu, pris et raençonné les diz habitans à grosses raençons et finances, et encores sejournent et se logent souvent au dit lieu, parce que le dit lieu de Baugé Menuau est assiz en païs fertil et loing de forteresse, et que les diz habitans n’ont où ilz puissent retraire leurs personnes et biens, et à ceste occasion sont telement apovriz les hommes et subgiez du dit suppliant que ilz ne pevent plus supporter les charges qu’ilz ont à supporter, contribuer à noz aides et tailles, ne lui paier ses cens, rentes et autres devoirs ; et à ceste occasion se departent chascun jour du dit lieu de Baugé et s’en vont demourer autre part, en tele maniere que la dicte terre est presque deshabitée, et est en aventure de tous poins demourer depopulée, se les diz habitans n’y ont aucune fortification, où ilz puissent avoir leur retrait et refuge. Lequel suppliant, pour la seurté et retrait de lui, ses diz hommes et subgiez et leurs biens, et afin que sa dicte terre ne demoure du tout deshabitée, fortiffieroit et empareroit voulentiers une place à lui appartenant, estant oudit bourg et village de Baugé Menuau, laquelle est bien avantageuse et aisée à fortiffier, se sur ce nous plaisoit lui donner noz congié et licence, humblement requerant que, attendu que illec environ, à une grosse lieue de toutes pars, n’a aucune forteresse ou les diz habitans puissent avoir retrait et refuge, et que en eulx cuidant retraire aux autres forteresses, ilz sont souvent prins ou chemin, par la distance des lieux, raençonnez et injuriez de leurs personnes, et que la dicte fortifficacion sera profitable pour ses diz hommes et subgiez et autres voisins, et aussi que le dit suppliant a le consentement de fortifier ladicte place de nostre chier et amé cousin le viconte de Thouars

Louis d’Amboise, vicomte de Thouars de 1422 à 1470. (Voy. ci-dessus, p. 60, note 3.)

, dont ladicte terre de Baugé Menuau est mouvant et tenue, il nous plaise lui donner nos diz congié et licence. Pour quoy nous, attendu ce que dit est, voulans pourveoir à la seurté de noz subgiez et de leurs biens, au dit suppliant ou cas dessus dit avons donné et octroyé, et, par la teneur de ces presentes, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité, donnons et octroyons congié et licence de fortifier la dicte place audit lieu de Baugé Menuau de tours, murailles, pons leveiz, pal, fossez, garlandiz, eschiffes, canonnieres, creneaux et autres fortificacions et emparemens defensables et convenables, teles que bon lui semblera et qu’il pourra, pourveu toutes voies que les manans et habitans dudit lieu et autres qui se retrairont en ladicte place seront tenuz de faire guet et garde au lieu où ilz le faisoient paravant, et que ladicte fortificacion ne nous tourne à prejudice ne à autrui. Si donnons en mandement par ces presentes aux bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d’Anjou et du Maine, seneschal de Poictou, et à tous noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que, se appellé nostre procureur oudit bailliage et aucuns nobles du païs et autres en ce expers et congnoissans, telz et en tel nombre qu’ilz verront estre à faire, il leur appert que ladicte fortificacion ne soit dommageable ne ou prejudice de nous et de la chose publique du païs, le dit suppliant de noz presens congié, licence et octroy facent, seuffrent et laissent joïr et user paisiblement, sans le molester, traveiller ne empeschier ne souffrir estre molesté, traveillé ne empeschié, ores ne pour le temps avenir, aucunement au contraire. Et s’aucun empeschement lui estoit sur ce fait, mis ou donné, si l’ostent et mettent ou facent oster et mettre tantost et sans delay au neant et au premier estat et deu. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel, ordonné en l’absence du grant, à ces presentes. Sauf toutes voies en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Bressuyre

Charles VII venant de Saumur, où il se trouvait le 6 janvier 1442 n.s., se rendit à Bressuire. C’est de cette ville qu’il envoya alors faire mettre en sa main, puis évacuer Mareuil et Sainte-Hermine, places occupées par les gens de Georges de La Trémoïlle, qui molestaient les habitants de la contrée. (Le héraut Berry, Chronique de Charles VII, édit. Godefroy, in-fol., p. 417.) Pendant ce séjour à Bressuire, le roi donna, le 17 janvier, des lettres convoquant à Toulouse pour le 1er avril les nobles et les milices du Midi. Il était encore dans cette ville le 19 janvier. (De Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. III, p. 211, 236.)

, le xie jour du mois de janvier l’an de grace mil cccc. xli, et de nostre regne le xxe.

Ainsi signé : Par le roy, le sr de Valens

Il s’agit certainement de Louis de Beaumont, seigneur de Vallans, troisième fils et principal héritier (ses deux frères aînés étant morts jeunes et sans postérité) de Geoffroy de Beaumont, sr de la Chapelle-Thémer, Vallans, etc., et de Catherine de la Haye, qui fut aussi seigneur de la Forêt-sur-Sèvre et de Commequiers par suite de son mariage avec Jeanne, fille de Jean Jousseaume, chevalier, qu’il avait épousée l’an 1440. Chambellan de Charles VII, qui l’avait nommé son lieutenant en Poitou cette année même, il succéda, vers le mois de juillet 1441, comme sénéchal de Limousin à Philippe de Culant, sr de Jaloignes, créé maréchal de France durant le siège de Pontoise. Il fut remplacé lui-même par Jean du Mesnil-Simon, qui fut sénéchal de Limousin peu avant 1445, dit M.A. Thomas. (Les États provinciaux de la France centrale sous Charles VII, t. I, p. 340.) Nous retrouverons Louis de Beaumont sénéchal de Poitou, charge qu’il exerça du 3 avril 1451 n.s. jusqu’en 1460, et il sera l’objet d’une notice plus développée dans notre prochain volume.

, seneschal de Limosin, present. J. Bonin. — Visa. Contentor. A. Chaligaut.

MLII Mars 1442

Rémission en faveur de Guillaume des Aubues, d’Antogné en la vicomté de Châtellerault, qui avait tué Mathé Barbier en se défendant, celui-ci dans une querelle de jeu l’ayant frappé d’un épieu.

AN JJ. 176, n° 400, fol. 275 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 135-137

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Guillaume des Aubues, aagié de xxiii. à xxiiii. ans ou environ, natif de la parroisse d’Antoigné en la viconté de Chastelleraut, contenant comme, le jeudi avant la feste saint Michiel derreniere passée, le dit suppliant au retour du siege de Pontoise

Sur le siège de Pontoise, cf. ci-dessus, p. 131, note 1.

, où il avoit esté en nostre service, s’en vint en l’ostel de frere Guillaume des Aubues, son cousin, prieur de Savigné soubz Faye

Le prieuré de Savigny-sous-Faye, de l’ordre de Saint-Benoît, dépendait de l’abbaye de Saint-Benoît-sur-Loire, ou plutôt de Saint-Benoît de Quinçay. (H. Beauchet-Filleau, Pouillé du diocèse de Poitiers, p. 406.)

, où il avoit demouré de toute sa jeunesse. Ou quel hostel il trouva ung appellé Mathé Barbier, qui, après ce qu’ilz eurent souppé ensemble, l’assailli de jouer aux cartes pour passer la serée. Lequel suppliant, après ce qu’il l’eut pluseurs fois refusé, se y acorda et jouerent ensemble telement qu’il gangna l’argent dudit Mathé ; mais icellui Mathé en ala querir de l’autre, et dist audit suppliant qu’il lui tendroit jeu, et finablement se remistrent à jouer, et regaigna le dit Mathé tout son argent et cellui dudit suppliant. Et la nuit coucherent ensemble bien gracieusement, combien que en jouant le dit Mathé se feust plusieurs fois courroucié, quant il perdoit, juré et detesté Dieu, tirée sa dague et picquée sur la table ou banc par grant felonnie ou desplaisir. Et le landemain disnerent et soupperent aussi ensemble, et le landemain entreprindrent d’aler fureter et prendre des connilz. Le quel jour de lendemain, ilz se partirent à tout chascun ung espiot en leur poing et ung furet, et alerent en la garenne de Scurlé

Il faut évidemment corriger « Scorbé ».

, en laquelle garenne le dit suppliant mist son furet en ung cloteau après ung connil, où il demoura très longuement, telement qu’il ennuya audit Mathé, et dist audit suppliant qu’ilz s’en alassent. Lequel suppliant lui dist qu’il ne laisseroit point son dit furet, et lors le dit Mathé lui dist qu’il avoit encores les cartes dont ilz avoient joué le jeudi precedent et qu’il convenoit doncques qu’ilz jouassent, en attendant le dit furet à yssir de terre. Lequel suppliant lui dist qu’il n’avoit point d’argent et qu’il ne vouloit point jouer, et le dit Mathé lui dist que si avoit cinq solz que le dit prieur lui avoit donnez pour avoir ung bonnet. Et lors se prindrent à jouer eulx deux et telement que le dit suppliant recouvra l’argent que le dit Mathé avoit gangné de lui, dont icellui Mathé ne fut pas content et requist audit suppliant qu’il lui pretast de l’argent pour rejouer, dont il ne voult riens faire. Et lors icellui Mathé commença à se despiter et detester Dieu que si feroit, et gecta son espiot ou baston à l’encontre du dit suppliant, telement qu’il persa sa robe au droit de la cuisse, dont icellui suppliant fut fort espoventé, cuidant estre blecié, et se recula, doubtant que le dit Mathé qui le poursuivoit le frappast de sa dague ou autrement le villenast, car il estoit plus fort que lui, et finablement se retourna contre le dit Mathé et lui donna de l’espiot qu’il avoit parmy la teste, telement qu’il chey à terre. Et lors icellui suppliant, doubtant que le dit Mathé se relevast et le villenast, tira sa dague et l’en frappa parmy la gorge, telement qu’il ala incontinent de vie à trespassement. Dont il fut moult dolent et courroucié et print icellui Mathé par la manche et le rusa

Reuser, ruser, roser, etc., mot que l’on trouve orthographié de plus de douze manières différentes, signifiait mettre en fuite, écarter, repousser (Fr. Godefroy, Dictionnaire de l’anc. langue française.)

hors du chemin et le muça derriere ung buisson oudit boys, et apporta le baston dudit Mathé audit lieu de Savigné. Pour occasion duquel cas le dit suppliant, qui est jeunes homs et en tous aultres cas s’est bien et doulcement gouverné, s’est absenté du païs et n’y oseroit jamais retourner, doubtant punicion de justice, se par nous ne lui estoient noz grace et misericorde impartiz. Pour quoy nous, etc., audit suppliant, etc., avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes aux seneschal de Poictou et bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d’Anjou et du Maine, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Poictiers, ou mois de mars l’an de grace mil cccc. xli. avant Pasques, et de nostre regne le xxe.

Ainsi signé : Par le conseil.

MLIII 23 mai 1442

Don à Bertrand Rataut, chevalier, seigneur de Curzay, de la haute justice dudit lieu, avec permission d’y élever des fourches patibulaires à deux piliers.

AN JJ. 184, n° 592, fol. 401 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 138-142

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre amé et feal chevalier, Bertran Rataut

Il devait être fils de Guillaume Rataut, qui rendit, le 10 mars 1405 n.s., aveu au duc de Berry de son fief de Curzay et de Laudonnière (nom ancien du château de Curzay) dans la mouvance de Lusignan. (Cf. notre t. V, p. 420.) Bertrand avait épousé Marguerite de Cramaut, nièce du cardinal Simon de Cramaut, évêque de Poitiers, seconde fille de Pierre et sœur de Jean, sr de Touffou, veuve en premières noces de Guillaume des Prez. (Id., p. 342 note.) Le cardinal avait légué tous ses biens à Jean de Cramaut, son neveu, sous cette clause que, s’il mourait sans enfants, plusieurs de ses terres deviendraient la propriété de l’évêché de Poitiers. (Id., t. VI, p. 186, note.) Cette éventualité s’étant produite, l’évêque de Poitiers, pour sauvegarder ses droits, fit ajourner, après la mort de Jean, le 21 janvier 1434 et le 1er juillet 1435, tous les héritiers de celui-ci, savoir : Jean de Pressac, Regnaut de Velors et Simonne Tison, sa femme, Bertrand Rataut, chevalier, Jacques Béchade et Jeanne de Prugny, sa femme, Guy de Pressac, archidiacre de Poitiers, Héliot de Pressac, Pierre de Beauvolier et Hermine de Pressac, sa femme, Jean Le Brun, chevalier, et sa femme. (Arch. nat., X1a 9200, fol. 193 v° et 361.) Marguerite de Cramaut, femme de Bertrand, était décédée bien avant son frère. Son mari était remarié alors avec Marguerite Rouault, comme on le voit dans le livre des hommages et aveux de la seigneurie de Parthenay, où on lit : « Messire Bertrand Rataut, chevalier, a fait hommage lige, à cause du chastel de Partenay, de l’hostel et hebergement du Plessis de Veluire, sis en la paroisse du Talu, avec toutes appartenances et appendences. Et en souloit faire hommage messire Miles Rouault, chevalier, père de la femme dudit Rataut. » (R1* 190, fol. 275 v°.) Les généalogies imprimées de la famille Rouault portent que Marguerite était fille de Louis, dit Béthis, mort avant 1400, et sœur de Miles, ce que la chronologie rend tout à fait invraisemblable. Il convient donc de les corriger sur ce point ; elles sont d’ailleurs inexactes sur beaucoup d’autres. Bertrand Rataut était encore tenu à l’hommage envers les sires de Parthenay pour la quatrième partie d’une borderie de terre, vulgairement appelée « la Nouhe-Chappon », qui lui venait des héritiers de feu Guillaume Bertrand, aliàs Gaillart, et tenait d’une part au fief de Saint-Denis et d’autre à celui dudit Rataut, pour son hébergement du Bois de Fenioux, pour le lieu de la Béraudière, mouvant de Secondigny, et pour l’hébergement du Bois-sur-Ardin, mouvant de Parthenay. (Id., R1* 190, fol. 252 v° et 275.)

Bertrand Rataut fut poursuivi au criminel devant le Parlement de Poitiers, de 1430 à 1435, pour violences exercées contre les religieux de l’Absie-en-Gâtine. Le 10 mars 1430, cette abbaye étant vacante par suite du décès de Jean Grimaut, les moines procédèrent à l’élection d’un nouvel abbé. Douze voix se portèrent sur Bernard d’Appelvoisin, cinq ou six seulement nommèrent Louis Rouault. Le premier ayant accepté, l’évêque de Maillezais procéda aux publications, et l’élu se pourvut en cour de Rome pour obtenir sa confirmation. Pendant ce temps, Louis Rouault se fit délivrer subrepticement des lettres royaux ordonnant aux religieux de l’Absie de le recevoir comme abbé et de repousser son rival ; il avait faussement donné à entendre qu’il avait obtenu la majorité des suffrages. Bernard d’Appelvoisin fit opposition. Alors Rouault assembla trente à quarante hommes d’armes et autant d’hommes de trait, la plupart Écossais, qui à cette époque tenaient les champs dans la Gâtine. Cette troupe « embastonnée » de lances, arbalètes et autres armes, avait à sa tête Bertrand Rataut, beau-frère de Louis Rouault, et Joachim de Volvire. Le 5 octobre 1430, à jour couchant, ayant des torches ardentes à la main, ils vinrent attaquer le couvent. Les moines épouvantés s’enfuirent, sauf le prieur claustral, nommé Jean Barbotin. Les agresseurs pénétrèrent dans l’enceinte, constituèrent prisonnier le prieur, s’emparèrent de toutes les clefs, prirent possession de l’abbaye et la mirent au pillage. Ils y tinrent ensuite garnison, et quand un huissier du Parlement vint les sommer de se retirer, ils lui refusèrent l’entrée et menacèrent de le jeter à l’eau. Les sires de Bressuire et de Lezay (André de Beaumont) prirent fait et cause pour Louis Rouault et introduisirent dans l’abbaye des religieux qui n’avaient aucun droit d’y demeurer. Les fauteurs de ces violences étant tous des amis et partisans avérés du connétable de Richemont, il est vraisemblable qu’il faut voir dans cette affaire un épisode de la lutte ouverte entre celui-ci et Georges de La Trémoïlle. Jean Rabateau, avocat du roi au Parlement, requit la punition des coupables dès le 20 novembre 1430. (Arch. nat., X1a 9199, fol. 327 ; voir aussi fol. 372 v°, 386 v° et 415 v° de ce registre.) Le procès dura plusieurs années. Ce ne fut que le 26 février 1435 n.s. que l’arrêt définitif fut rendu. Bien qu’à cette époque Richemont fût rentré en grâce auprès du roi et eût reconquis toute son influence à la cour, Bertrand Rataut et Joachim de Volvire furent condamnés à une amende de 1000 réaux d’or envers le roi et à 400 réaux au profit du prieur claustral et des religieux de l’Absie, et en outre à la restitution de tout ce qui avait été détruit et enlevé de l’abbaye par leurs hommes d’armes. (X2a 20, fol. 80 v°, et X2a 21, à la date du 23 février 1435 n.s. ; cf. aussi fol. 148 v°, 149, 161, 162 v°, et aux dates des 7 et 14 mars 1433 n.s. dans ce même registre X2a 21.) Dans l’intervalle, une action civile se poursuivit au Parlement entre Bernard d’Appelvoisin, Louis Rouault et un troisième prétendant, Bertrand de la Fosse, dit du Retail. Ce dernier était allé à Rome dénoncer la mauvaise administration du dernier abbé, Jean Grimaut, et avait, paraît-il, obtenu du pape la promesse de le remplacer. Inutile de dire que les droits de Bernard furent pleinement reconnus et consacrés par la cour. (Plaidoiries du 15 mai 1431, arrêts des 14 août 1431 et 16 avril 1432 ; X1a 9192, fol. 249 et 284 ; X1a 9201, fol. 35.)

Bertrand Rataut était conseiller et maître d’hôtel d’Artur de Richemont. En cette qualité il fut commis, avec Guillaume de Launay, lieutenant dudit sieur à Parthenay, pour diriger les travaux de réparations à faire aux château, halles, fours, moulins, chaussées, étangs, garennes et maisons de cette ville, par lettres du connétable, datées du château de Parthenay, le 20 mai 1443. (Original. Arch. nat., R1 192.)

, seigneur de Cuerzay en nostre païs de Poictou, contenant que, comme le dit suppliant ait audit lieu de Cuerzay toute justice, reservée l’execucion de la haulte justice, et que il ne y a aucunes forches pour icelle haulte justice exercer, pour ce que icelle execucion nous appartient ; en quoy n’avons comme point ou au moins très petit de proffit ; et il soit ainsi que en icelle terre ait assez de hommes et subgiez dudit suppliant à cause de sa seigneurie dudit lieu, mouvant et tenue de nous en fief et à foy et hommaige, et y adviennent souventes foiz des cas dont, pour faulte de la dicte haulte justice en icelle terre, les malfaicteurs eyadent et eschappent, et pevent evader et eschapper impugniz ; et aussi les habitans de sa dicte terre ne pevent bonnement sans peril avoir recours à nostre haulte justice, pour ce qu’elle est trop loing dudit lieu, et que gens de guerre et autres y courent trop souvent. Et pour ce nous ait humblement suplié que, attendu ce que dit est, nous lui vueillons donner la dicte haulte justice par toute la dicte terre, et lui octroyer faculté et licence de faire [es]lever en sa dicte terre et seigneurie et asseoir unes forches à deux pilliers, et sur ce lui impartir nostre grace et liberalité. Pour quoy nous, ces choses considerées, et aussi les bons et louables services qui ont esté faiz à nous et à noz predecesseurs, en noz guerres et autrement, par ledit Bertran et les siens, et mesmement que nous fait encores continuelement Jacques Rataut

Jacques Rataut, fils de Bertrand, était alors écuyer d’Artur de Richemont, sr de Parthenay, connétable de France, comme on le voit par un fragment de compte de ce personnage (1443-1445), rôle d’octobre 1443, où il est porté pour dix écus de gages. (Publ. par E. Cosneau, Le connétable de Richemont, p. 658.) Par lettres datées de Lusignan, en mai 1462, Louis XI lui octroya de nouveau la permission d’élever des fourches patibulaires en sa terre et seigneurie de Curzay. (Enreg. au Parl., Arch. nat., U. 446, fol. 108, et à la Chambre des comptes, anc. mém. M, fol. 147 v°, Bibl. nat., ms. fr. 21405, p. 151.) Le 1er janvier précédent, Jacques Rataut avait rendu son aveu au roi pour Curzay, le château de Laudonnière, etc. (Arch. nat., P. 1145, fol. 120 v°.) Parmi les titres de la baronnie de Parthenay, on conserve plusieurs quittances de lui, notamment aux dates des 2 novembre 1462, 30 avril 1473, 10 janvier, 16 février et 27 juillet 1474, qu’il souscrivit en qualité de bailli de Gâtine et de capitaine de Parthenay pour le comte de Dunois. Ses gages étaient de 50 livres tournois par an, et il avait comme lieutenant général Jacques Esteau. (Id., R1 192, aux dates.) Jacques était né sans doute du second lit, car il est dit parent de Louis Rouault, évêque de Maillezais, dans un procès criminel intenté contre celui-ci par Gilles Corbeau, sergent du roi, et Jacques de Loumeau. Il s’agissait de la succession d’un prêtre de Mauléon, nommé Jean Gasteau, décédé intestat. L’évêque prétendait que, d’après la coutume, les biens des ecclésiastiques de son diocèse, qui ne laissaient point de testament, lui appartenaient, droit que lui contestait le procureur du roi. Ses gens, voulant se saisir de la succession litigieuse, avaient exercé des violences contre Jacques de Loumeau, à qui était confiée la garde des biens de Jean Gasteau, et contre le sergent royal. (X2a 35, aux 19 et 23 février 1468 n.s.) Ce Louis Rouault est celui-là même qui, en 1430, avait voulu se saisir de force de l’abbaye de l’Absie. (Cf. la note précédente.) Dans l’arrêt du 16 avril 1432, il est qualifié prieur d’Auzay (de Auzayo). Il fut élu abbé de Saint-Pierre de Bourgueil, le 31 octobre 1439, et occupa le siège de Maillezais de 1455 à 1475, tout en demeurant abbé commendataire de Bourgueil.

, son filz, en la compaignie de nostre très chier et amé cousin le conte de Richemont, connestable de France, à icellui suppliant, pour ces causes et autres à ce nous mouvans, avons donné et octroyé et de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, donnons et octroyons par ces presentes ladicte haulte justice à deux pilliers en sa dicte terre de Cuerzay et ès fins et mettes d’icelle. Et voulons et nous plaist que icelle haulte justice et l’execucion d’icelle il puisse faire mettre sus et lever, tenir, avoir et exercer par lui, ses heritiers, successeurs et ayans cause, seigneurs dudit lieu de Cuerzay, avecques tous les officiers qui à haulte justice appartiennent et sont convenables et necessaires, à tous jours, pourveu toutesvoies que lui et ses successeurs seront tenuz de faire foy et hommaige de la dicte haulte justice à nous et à noz successeurs, et de en ressortir en cas d’appel et souveraineté par devant noz juges et officiers. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx gens de noz comptes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieux tenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace, don et octroy facent, seuffrent et laissent ledit suppliant, ses hoirs, successeurs et ayans cause joïr et user plainement et paisiblement à tousjours, sans leur faire, mettre ou donner, ou souffrir estre fait, mis ou donné, ores ne pour le temps avenir, aucun destourbier ou empeschement au contraire. Et quant à ce nous avons imposé scilence perpetuel à nostre procureur et à tous autres, nonobstans l’ordonnance par nous autres foiz faicte de non donner ou aliener aucune chose de nostre demaine

Il est fait allusion sans doute aux lettres du 15 décembre 1438, par lesquelles Charles VII annulait toutes les donations et aliénations du domaine par lui faites et les pensions extraordinaires créées, depuis son départ de Paris en 1418, réservé ce qui avait été réglé par le traité d’Arras. (Coll. des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XIII, p. 293.)

et quelzconques autres ordonnances, revocacions, mandemens ou defenses faictes ou à faire au contraire. Et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Limoges, le xxiiie jour de may l’an de grace mil cccc. quarente et deux, et de nostre regne le vingtiesme.

Ainsi signées : Par le roy, mons. le conte du Maine, le connestable, le sr de la Varenne, maistre Jehan de Troissy

Il a été question précédemment des personnages nommés ici, sauf de Jean de Troissy. Ce dernier était bailli de Sens dès 1428. Attaché à la duchesse de Guyenne, il se montra également dévoué au second mari de celle-ci, le comte de Richemont, dont il fut le conseiller et lieutenant en la connétablie. En juillet 1433, on le trouve à Londres comme ambassadeur du duc de Bretagne auprès du roi d’Angleterre, pour traiter des préliminaires de la paix. A Arras, en janvier-février 1435, il fut l’un des représentants du duc de Bourbon au traité particulier conclu alors entre ce prince et le duc de Bourgogne. (Voy. E. Cosneau, Le connétable de Richemont, p. 157, 461, 575, etc. ; de Beaucourt, Histoire de Charles VII, t. II, p. 462 n., 516 n. ; et Bibl. nat., coll. de Bourgogne, vol. 96, p. 621.)

et autres presens. Fresnoy. — Visa. Contentor. E. Duban.

MLIV 9 février 1443

Rémission accordée à Jean Torigny, cordonnier, demeurant à la Roche-Pozay, coupable du meurtre d’un nommé Pierre Lamoureux, qu’il soupçonnait d’entretenir des relations avec sa femme.

AN JJ. 176, n° 260, fol. 205 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 143-145

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Jehan Torigny, pouvre homme, cordouennier, de l’aage de xxxiii. ans ou environ, chargé de femme et mesnaige, demourant en la ville et parroisse de la Roche de Pousay, prisonnier ès prisons du dit lieu de la Roche de Pousay, contenant que ledit suppliant qui est natif de la viconté de Chastellerault, où il a demouré par aucun temps, depuis peu de temps ença a esté marié ou lieu de ladicte Roche de Pousay et il s’est bien doulcement gouverné et vesqu de son mestier de cordouennier, et pour ouvrer et besongner d’icellui et gaigner sa vie, est alé et venu souvent au lieu de Plainmartin près de la dicte Roche, et s’en party le huitiesme jour de decembre derrenier passé et retourna audit lieu de la Roche de Pouzay, et se rendi en l’ostel de Pierre Lamoureux, ouquel il trouva sa femme à laquelle y demanda se il y avoit du pain en son hostel, et elle lui respondi que non ; et pour ce lui bailla ung grant blanc de x. deniers tournois et, ledit jour, s’en retourna au dit lieu de Plainmartin, pour aler querir de l’argent qu’il y avoit, pour et en entencion de querir et achatter une robe pour sa dicte femme. Et le landemain s’en retourna du dit lieu de Plainmartin audit lieu de la Roche, et se rendit derechief en l’ostel dudit Lamoureux, et y trouva encores sa dicte femme, laquelle lui feist mauvaise chere ; et entendi ledit suppliant que elle dist audit Lamoureux, avecques lequel elle estoit comme dit est, que ceulx qu’il savoit le demandoient, et à ceste occasion lui demanda que ce estoit que elle lui avoit dit et qui estoient ceulx qui demandoient le dit Lamoureux ; et elle lui respondi malgracieusement qu’elle ne lui en diroit riens. Et ce fait, le dit Lamoureux et elle s’en alerent soupper en l’ostel de Mathelin Dupont, comme ilz disoient, et laisserent le dit suppliant en l’ostel d’icellui Lamoureux. Et après qu’ilz eurent souppé, s’en revindrent ou dit hostel, ouquel n’avoit que ung lit, ouquel les diz suppliant et Lamoureux coucherent, et la dicte femme ou meilleu d’eulx, sans faire aucune chere au dit suppliant son mary. Et le landemain, après que ilz furent levez, icellui suppliant demanda à sa dicte femme ung sien cousteau, qu’il avoit autresfois laissé ou dit hostel, le quel il trouva. Et tantost commancerent à tanser icellui suppliant et sa dicte femme, et sourdit parolle entre eulx, entre lesquelles il dist à icelle femme que l’en lui avoit dit que le dit Pierre Lamoureux estoit maquereau et ruffien d’elle. Oyes lesquelles parolles, elle dist audit Lamoureux qu’il le mist hors dudit hostel et que plus n’y vensist. Si print lors icellui Pierre Lamoureux ung gros baston quarré, et voult d’icellui courre sus au dit suppliant et frapper, mais pour doubte qu’il ne feust frappé ou blecié, se avança d’aler par une huisserie où avoit ung huys au dedans dudit hostel, et frema l’uys après lui, et quant il fut passé, pour ce que ledit Lamoureux le suivy [et] alla après pour le frapper et mutiller dudit baston, icellui suppliant tira une dague qu’il avoit à sa sainture, et ainsy comme il ouvry ledit huis au dedens dudit hostel, frappa ledit suppliant icellui Pierre Lamoureux de icelle dague ou costé senestre, tellement qu’il cheut à terre, et, comme l’en dit, oncques puis ne parla et tantost ala de vie à trespassement. Pour le quel cas le dit suppliant a esté emprisonné et mis ès dictes prisons de la Roche de Pousay

Louise de Preuilly, fille d’Eschivard VI, sr de Preuilly, la Roche-Pozay, etc. (mort le 23 avril 1409), hérita du château et de la seigneurie de la Roche-Pozay. Mariée d’abord, vers 1410, à Geoffroy Chasteignier, chevalier, sr de Saint-Georges-de-Rexe, dont elle eut quatre fils, elle devint veuve le 29 octobre 1424, et épousa en secondes noces, par contrat du 18 août 1432, Louis Bonenfant, chevalier, sr de Vaux, chambellan de Charles VII. Un peu avant ce second mariage, Pierre Frotier, l’ancien favori du roi, avait intenté à Louise de Preuilly, dont il avait épousé la nièce, Marguerite de Preuilly, un procès au sujet de la possession de la terre de la Roche-Pozay. (7 juin 1432, Arch. nat., X1a 9192, fol. 292.) Bonenfant soutint les droits de sa femme et le litige occupa plus d’une séance du Parlement durant les années 1435 et 1436. (Voir X1a 9193, fol. 79, 178 v°, 179 ; X1a 9194, fol. 93 v°, 94, 97 v°, 98, 151 v°.) Louise de Preuilly survécut à son second mari. Elle était encore vivante le 19 novembre 1471, alors que Prégent Frotier, fils de Pierre, s’empara du château de la Roche-Pozay et le mit au pillage. (Actes publ. par Carré de Busserolle, Dict. géogr., hist. et biogr. d’Indre-et-Loire, t. V, p. 216.) Après son décès, Pierre Chasteigner, chevalier, son fils aîné du premier lit, fut seigneur de la Roche-Pozay.

, èsquelles il est en dangier de finer ses jours miserablement, se nostre grace et misericorde ne lui est sur ce impartie. Si nous a humblement requis que, attendu les choses dessus dictes et que en tous autres cas il a esté et encores est de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans oncques avoir esté repris, ataint ou convaincu d’aucun cas ou autre villain blasme ou reprouche, nous lui vueillons sur ce impartir nostre dicte grace et misericorde. Pour ce est il que nous, inclinans à la supplicacion dudit suppliant, voulans misericorde estre preferée à rigueur de justice, à icellui suppliant ou cas dessus dit avons remis, quicté et pardonné, etc., parmy ce que il demourra prisonnier en prison fermée, par l’espace d’un moys, au pain et à l’eaue. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes à nostre bailli de Tours et des ressors et Exempcions d’Anjou et du Maine, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, le ixe jour de fevrier l’an de grace mil cccc. quarante et deux, et de nostre regne le xxime.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. M. de la Teillaye. — Visa. Contentor. M. de la Teillaye.

MLV Février 1443

Don à Charles d’Anjou, comte du Maine, du comté de Gien et des villes de Saint-Maixent, Melle, Civray, Chizé, Sainte-Néomaye.

AN JJ. 176, n° 178, fol. 121 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 146-152

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et advenir, comme dès le temps de nostre jeune aage, que feusmes par mariaige conjoings avecques nostre très chiere et très amée compaigne la royne, nous feussions trouvé present à la naissance de nostre très chier et très amé frere et cousin Charles d’Anjou, à present conte du Maine et de Mortaing

Charles d’Anjou, troisième fils de Louis II duc d’Anjou, roi de Sicile, et d’Yolande d’Aragon, né le 14 octobre 1414 au château de Montils-lès-Tours, était le beau-frère de Charles VII. Le roi lui avait fait don du comté de Mortain par lettres datées de Poitiers, juillet 1425 (Arch. nat., X1a 8604, fol. 119 v°) et l’avait nommé son lieutenant-général dans le Maine et l’Anjou. C’est lui qui, d’accord avec Richemont, donna les ordres pour l’enlèvement de La Trémoïlle (juin 1433), et l’honneur lui revient en grande partie d’avoir éloigné de la cour ce favori dont le gouvernement avait été si néfaste. Il remplaça le ministre tombé en disgrâce et, dirigé par sa mère, soutenu par sa sœur la reine de France, il put rendre à Charles VII de réels services. Le 4 août 1440, il avait obtenu du roi René, son frère, la cession du comté du Maine, avec les seigneuries de Château-du-Loir, la Ferté-Bernard, Mayenne et Sablé, qu’il contribua, avec l’aide de Dunois, à reconquérir sur les Anglais. Charles d’Anjou fut aussi, dès l’an 1441, lieutenant-général en Languedoc et en Guyenne. Il venait d’épouser (contrat du 9 janvier 1443) Isabelle de Luxembourg, deuxième fille de Pierre, comte de Saint-Pol et de Brienne. Par ce mariage il devenait le beau-frère du connétable. Le rôle politique et militaire du comte du Maine, durant la première partie de sa vie, a été mis en relief dans deux ouvrages récents. (Beaucourt, Hist. de Charles VII, et Cosneau, Le connétable de Richemont.) On verra ci-dessous, à l’occasion de lettres de juin 1447, publiées dans le présent volume, que Charles d’Anjou eut encore des possessions plus importantes en Poitou, et qu’il y acquit la vicomté de Châtellerault. Il fut l’un des rares favoris de Charles VII que Louis XI conserva près de lui. Fidèle à ce prince pendant la Ligue du bien public, il fut chargé de commander un corps de l’armée royale à Montlhéry ; mais il se conduisit lâchement dans cette bataille, et prit la fuite dès le commencement de l’action. Le roi, pour le punir, le dépouilla de son gouvernement de Languedoc. Cependant il rentra en grâce bientôt après. Charles d’Anjou mourut à Neufvy en Touraine, le samedi 10 avril 1473, et fut inhumé dans l’église cathédrale du Mans.

, qui dès l’eure de sa nativité [par] feue de bonne memoire nostre très chere et très amée mere Yolant, en son vivant royne de Jherusalem et de Sicile, sa mere, nous fut donné et baillé en especial recommandacion ; lequel, incontinent et si tost qu’il fut en aage d’avoir congnoissance des grans afferes que pour lors avions, à l’occasion des guerres de nostre royaume, et qu’il eut puissance de suivir les armes, se tira devers nous et en nostre service, ouquel jusques à present s’est continuellement tenu sans departir, et en touz voyaiges, armées et entreprises que nous avons depuis faictes, se est employé de corps, de chevance et de touz ses autres biens, tant que possible lui a esté, sans riens y espergnier ne avoir regart à domage ou autre inconvenient qui pour ce lui peust advenir, en demonstrant et desclairant par effect la vraye, parfaicte, naturelle et singuliere amour qu’il avoit à nostre personne et au bien et exaltacion de nostre seigneurie, pour laquelle à son povoir relever et descharger des oppressions et domaiges que noz anciens ennemis les Angloys y ont faiz et chascun jour s’efforcent de faire, icelui nostre frere et cousin desirant, ainsi que par experience il a bien monstré, l’expulsion, deboutement et confusion d’iceulx, a dès longtemps de lui meismes et comme nostre lieutenant general sur le fait de la guerre ès païs d’Anjou et du Maine et de la Basse Normandie, entretenu les gens estans ès frontieres des pays dessus diz et encores entretient, et en iceulx fait plusieurs belles destrousses et rencontres sur nos diz ennemis ; et qui plus est, depuis grant temps en ça, non sans grans labeur, paine, travail et soussy, a vertueusement soustenu et encores soustient le fait des frontieres de Evreux, Pontoise, Louviers et autres places estans de present en la frontiere de nosdiz ennemis dudit païs de Normandie. Et d’abondant, pour plus soy monstrer afectionné en nostre dit service et avoir noz afferes à cuer, a tousjours entretenu plusieurs cappitaines et gens de guerre qui continuelment nous ont obei, servi et servent à touz les sieges et entreprises que nous avons faictes à l’encontre de nos diz ennemis ; à l’occasion desquelles charges lui a convenu et convient faire et supporter, en oultre les inestimables perilz de sa personne, plusieurs grans fraiz, mises et despens, sans ce que par nous pour le temps passé ait esté soustenu, payé ne souldoyé, ou avoir eu aide que de po de chose, ne les diz services estre recongneuz ou pour ce fait aucune recompense jusques à present, ainsi que nous y repputons bien à tenuz. Pour quoy nous, aians consideracion ès choses dessus dictes, à la proximité du lignage et affinité en quoy nous attient icelui nostre dit frere et cousin, frere germain de nostre dicte compaigne, et que la plus grant partie de sa terre et seigneurie patrimonial est à present occuppée par nos diz anciens ennemis, et aussi que de ce nous a très humblement et instamment supplié et requis nostre très chier et très amé ainsné filz, le daulphin de Viennoys, affin de tousjours le esmouvoir et astraindre à soy employer de bien en mieulx en nostre dit service et donner aux autres exemple de pareillement faire, à icelui nostre dit frere et cousin, pour ces causes et autres, eu sur ce premierement l’advis et deliberacion des gens de nostre grant conseil, et pour plusieurs consideracions à ce raisonnablement nous mouvans, avons aujourd’uy, de nostre certaine science, puissance especial, grace et auctorité royal, baillé, donné, cedé, transporté et delaissé, baillons, donnons, cedons, transportons et delaissons par ces presentes perpetuelment, par heritaige et à tousjours mais, par donnaison vallable faicte entre les vifs, pour lui, ses hoirs et successeurs masles, descendans legitimement de sa char, et les heritiers masles legitimes descendans d’eulx, tant qu’il y en aura aucuns, pour le temps advenir, les choses et seigneuries qui s’ensuivent et en après desclarées, c’est assavoir les conté, terre et seigneurie de Gien sur Loire, les chasteaux, villes, terres et seigneuries de Saint Maxent, Melle, Civray, Chizet et Saincte Neomaye

L’on a vu dans notre précédent volume, p. 423, que le comté de Gien avait été assigné comme douaire, avec d’autres terres, à Marguerite de Bourgogne, duchesse de Guyenne, remariée à Artur comte de Richemont. Mis en la main du roi, après la disgrâce du connétable, il fut restitué à celui-ci par le traité de Rennes (5 mars 1432). Il avait fait retour à la couronne à la mort de Madame de Guyenne, décédée à Paris, à l’hôtel du Porc-Épic, le 2 février 1442. (E. Cosneau, Le connétable de Richemont, p. 329, 541.) — La terre et seigneurie de Saint-Maixent, dont Charles VII avait fait don à Perrette de la Rivière, dame de la Roche-Guyon, qui avait mieux aimé perdre ses biens que de subir la domination anglaise, appartenait encore à cette dame. Le roi lui donna alors en dédommagement la garde de Corbeil et quinze cents francs de pension. Le P. Anselme prétend que les lettres de don de Saint-Maixent à la dame de la Roche-Guyon portaient la date du 2 janvier 1440. (Hist. généal., t. VIII, p. 622.) C’est une erreur. Perrette de la Rivière et son capitaine du château de Saint-Maixent, nommé Guyot Le Tirant, étaient en procès, les 10 et 26 juillet 1432, contre l’abbaye de Saint-Maixent, qui accusait les officiers de ladite dame d’avoir maltraité les siens. (Arch. nat., X1a 9194, fol. 20 v° ; X1a 9200, fol. 51 v°.) — Melle, Chizé et Civray avaient été assignés par Jean de France, duc de Berry, comte de Poitou, à sa fille aînée Bonne, par acte de novembre 1410, en déduction d’une rente de 4000 livres qu’il s’était engagé à lui servir, lorsqu’il la maria à Bernard VII comte d’Armagnac. (Arch. nat., J. 186 A, nos 75, 76.) La comtesse d’Armagnac avait fait abandon de ces terres, en 1422, à son fils Bernard, comte de Pardiac, depuis comte de la Marche (1435) ; elle mourut au château de Carlat, le 30 décembre 1435. La seigneurie de Melle cependant avait été remise en la main du roi, car il l’engagea à Georges de La Trémoïlle par lettres datées de Mehun-sur-Yèvre, le 20 juillet 1426, enregistrées à la Chambre des comptes de Bourges. (Anc. mémorial H bis, fol. 93, Bibl. nat., ms. fr. 21405, p. 91.) — Quant à la terre de Sainte-Néomaye, nous avons vu que Thibaut Portier, sénéchal de Poitou, la vendit en août 1404 à Guillaume de Lodde, chambellan du duc de Berry, et qu’elle appartenait en 1418 à Hugues de Noer ou de Noyers, qui en fit aveu, le 12 juin 1420, à Charles, dauphin, comte de Poitou. (Voy. notre vol. précédent, p. 57-61, et note de la p. 58.) Les héritiers de Guillaume de Lodde en disputèrent la possession à ce dernier et engagèrent contre lui un procès au Parlement de Poitiers à ce sujet. (Plaidoiries du 2 septembre 1423, X1a 9197, fol. 248 v°.) Nous ignorons si Hugues de Noyers fut dépossédé de Sainte-Néomaye antérieurement au don fait à Charles d’Anjou. Ce qui est certain, c’est qu’il ne mourut qu’après le mois de juillet 1447 et qu’il ne perdit jamais la faveur de Charles VII, auprès duquel il remplissait d’abord les fonctions de premier écuyer du corps, puis celles de maître d’hôtel.

, situez en nostre païs de Poictou, avecques toutes et chascunes leurs appartenances, appendences et deppendences, tant qu’ilz se pevent comporter en long et en large, avec les fons, treffons, fruictz, proffiz, revenues et emolumens, tant en cens, rentes d’argent, de vin, de grain que d’autres choses, hommes et femmes de corps, estangs, eaux, moulins, forestz, boys, prez, dismes, champs, pastures, collacions de benefices, nominacions d’offices qui sont en nostre collacion, fiez, arrierefiez, haulte justice, basse et moyenne, et touz autres droiz et seigneuries que nous avons et avoir povons de droit et de coustume èsdiz conté de Gien, chasteaux, villes et terres dessus dictes, et en chascune d’icelles, sans riens en retenir à nous ne à noz successeurs, en quelque maniere que ce soit, excepté les foiz et hommaiges qu’il et ses successeurs fera à nous et aux nostres, ressort et souveraineté, ensemble les foy et homage qui nous sont deuz à cause des chastel, terre et seigneurie de Partenay, s’ilz sont tenuz de nous, à cause d’aucunes desdictes places, terres et seigneuries tant seulement. Pour toutes lesdictes conté, terres et seigneuries dessus dictes et chascune d’icelles par nous données, baillées, cedées, transportées et delaissées à nostre dit frere et cousin, par la forme et maniere que dit est, avoir, tenir doresnavant et possider comme son propre heritaige et demaine à tousjours mais perpetuelment ; et dès maintenant par la tradicion de ces dictes presentes l’en laissons et faisons vray seigneur, proprietaire et ususfruitier, et nous en desvestons du tout et revestons nostre dit frere et cousin, ses diz hoirs et successeurs masles legitimes, descendans de sa char, et les heritiers masles descendans d’eulx pour le temps advenir. Voulans et expressement consentans qu’il en ait et puisse avoir incontinent, ou quant bon lui semblera prendre et apprehender par luy, ses procureurs ou commis, la possession actuelle, reelle et corporelle. Si donnons en mandement, par la teneur de ces dictes presentes, à nos amez et feaulx les gens tenans nostre Parlement, les gens de noz comptes, les generaulx conseillers par nous ordonnez sur le fait et gouvernement de toutes noz finances, les ballifs de Montargis, de Berry, seneschal de Poictou, les tresoriers sur le fait de nostre demaine, receveur general de toutes nos dictes finances, et à touz noz autres officiers, justiciers, presens et advenir, à leurs lieuxtenans et commis, et à chascun d’eulx, ausquelx appartendra, que de nostre dit don, cession et transport laissent, facent et seuffrent, chascun en droit soy, nostre dit frere et cousin, ses hoirs et successeurs masles, descendans de sa char par mariaige, et les heritiers masles descendans legitimement d’eulx pour le temps advenir, des diz conté de Gien, chasteaux, villes, terres et seigneuries de Saint Maxent, Melle, Civray, Chizec et Saincte Neomaye, ensemble de toutes et chascunes leurs appartenances, appendences et deppendences, joïr et user plainement et paisiblement, sans en ce les perturber ou empeschier en aucune maniere ; car ainsi nous plaist il et voulons estre fait. Et sur ce imposons silence perpetuel à noz advocat et procureur, et à touz noz autres justiciers et officiers, non obstant quelzconques edictz et ordonnances par nous ou aucuns de noz predecesseurs faictes de non desmembrer, vendre, donner, aliener ou transporter nostre demaine ; lesquelles, au regart de cestre nostre presente concession, de nostre plaine puissance et auctorité royal, ne voulons avoir lieu, ne sortir son effect aucunement, dons, pensions, provisions et biensfaiz autresfois par nous faiz ou à faire à nostre dit frere et cousin, et quelxconques autres choses à l’execucion de ces dictes presentes contraires. Ausquelles, en tesmoing de verité et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel ordonné en l’absence du grant. Sauf et reservé en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Montaulban, ou moys de fevrier l’an de grace mil cccc. quarante et deux, et de nostre regne le xxie

Ces lettres de don furent enregistrées au Parlement de Paris, le 23 juillet 1443 (Arch. nat., X1a 8605, fol. 91) et à la Chambre des comptes, le 27 du même mois. (Id., P. 2298, fol. 1237, anc. mém. K, fol. 84.) Le texte, en ce qui concerne le dispositif des lettres, diffère assez sensiblement de celui qui est imprimé ici conformément au registre de la Chancellerie.

.

Ainsi signé : Par le roy en son grant conseil, ou quel monseigneur le daulphin, le conte de la Marche

Bernard d’Armagnac, comte de Pardiac, fils de Bernard VII comte d’Armagnac et de Bonne, fille aînée de Jean de France, duc de Berry, devint en 1435 comte de la Marche et de Castres, lorsque son beau-père se fit religieux du Tiers-Ordre de Saint-François à Besançon, où il mourut, le 24 septembre 1438. Le comte de Pardiac avait épousé Eléonore, fille unique de Jacques de Bourbon, comte de la Marche et de Castres et, à cause de sa seconde femme, roi de Sicile et de Hongrie, et, comme il servit toujours fidèlement Charles VII, ce prince lui fit don de l’apanage abandonné par le père de sa femme. Il mourut vers le commencement de 1462. (Le P. Anselme, Hist. généal., t. I, p. 320, et III, p. 427.) Le comte de la Marche avait joui des terres de Civray, Melle, Gençay et Chizé, dont Bonne de Berry, sa mère, lui avait fait don en 1422.

, l’arcevesque de Vienne

Geoffroy Vassal, originaire d’Angoulême, était conseiller clerc au Parlement de Paris et chancelier de la Sainte-Chapelle de Bourges, lorsque, dans les premiers mois de l’année 1439, il fut nommé archevêque de Vienne en remplacement de Jean de Norry ; il occupa ce siège jusqu’au 30 avril 1444, qu’il fut transféré à celui de Lyon. (Gallia christ., t. XVI, col. 114.)

, l’evesque de Magalonne

Robert de Rouvres, d’abord évêque de Séez, puis de Maguelonne (1433-1453). — Cf. ci-dessus, p. 23, note 3.

, l’admiral et plusieurs autres estoient. J. de la Loere. Visa.

MLVI Mai 1443

Lettres d’anoblissement octroyées à Jean Butaud, Poitevin, en récompense des services militaires qu’il a rendus au roi, particulièrement au siège de Pontoise, en la compagnie du vicomte de Thouars.

AN JJ. 184, n° 594, fol. 402 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 152-156

Karolus, etc. Ad perpetuam rei memoriam. Quos assidua sedulitate nobis fideles et probos ac nostris reique publice commoditatibus officiosos comperimus, ad nobilitatis statum promovere prestanti sollicitamur opera, ut ipsi sublimacione gaudentes, actibus insistere virtuosis accuratiores existant et eorum exemplo ceteri ad consimilia concitentur. Sane cum dilectus noster Johannes Butaudi

On trouve dans la nouv. édit. du Dictionnaire des familles du Poitou, t. I, p. 704, et t. II, p. 86, un fragment de généalogie d’une famille Boutaud ou Butaud, fixée dans les environs de Luçon, à laquelle ce Jean Butaud paraît appartenir. Il pourrait être identifié avec Jean, écuyer, sr de la Papaudière et mari de Françoise de la Bauduère, deuxième fils de Pierre Boutaud, bachelier ès lois, sr de l’Aubouinière (mort en 1438), et de Catherine de la Roche, sœur d’André, évêque de Luçon. Un Jean Butaut est inscrit, en 1418, sur le livre des fiefs du comte de Poitou, pour un devoir de rachat qui lui incombait à cause du lieu de la Pointe, mouvant de Fontenay-le-Comte, appartenant à sa femme Jeanne Allonneau. (Arch. nat., p. 1144, fol. 48 v°.) Le même sans doute, quoique le nom soit orthographié Bouteau, avait rendu, le 18 avril 1404, son aveu pour le fief de Croix-Comtesse (P. 1145, fol. 23, 46). Celui-ci serait plutôt un frère de Pierre, et l’oncle de Jean, anobli en mai 1443. Dans un procès criminel intenté au Parlement, en 1436, par l’évêque de Luçon contre Georges de La Trémoïlle, qui s’était emparé des forteresses de Luçon et de Moutiers-sur-le-Lay, appartenant à l’évêque, s’était arrogé le droit d’y nommer les capitaines et y avait établi des garnisons, on rencontre, parmi les complices également poursuivis, les noms de Pierre et Jean Butaud, le nôtre sans doute et son père. (Arch. nat., X2a 21 ; voir aux dates des 1er février, 15 et 19 mars, 12 et 19 mai, 22 juin, 3 et 30 août 1436.) Nous ne nous étendrons pas ici sur cette affaire intéressante, qui exigerait d’assez longs développements et qui ne paraît s’être terminée que le 10 octobre 1457, par une transaction entre André de la Roche, évêque de Luçon, et les héritiers de Georges de La Trémoïlle. (Cf. collection dom Fonteneau, t. XIV, p. 45, et t. XXVI, p. 407.)

Cette famille du Bas-Poitou ne doit pas être confondue avec une autre originaire de Poitiers, dont un membre, nommé aussi Jean Butaut, était le 14 novembre 1425 notaire et juré de la cour du sceau aux contrats de Poitiers. (X1a 8604, fol. 92 v°.)

, de Pictavia oriundus, erga nos et nostram coronam sinceram semper expleverit fidelitatem integramque probitatem, et occasione dissidiorum bellorumque regni nostri duras luerit penas, graves tulerit vexationes, immensos egerit labores, multa subierit pericula et discrimina, et maxime in obsedione nostra ville nostre Pontisare

Le siège de Pontoise, aux opérations duquel Jean Butaud prit part en la compagnie de Louis d’Amboise, vicomte de Thouars, dura du 4 juin au 19 septembre, jour où la ville fut prise d’assaut par l’armée française. Cette victoire, qualifiée à juste titre l’un des faits les plus mémorables du règne de Charles VII, a été relatée avec beaucoup de précision par M.E. Cosneau, Le connétable de Richemont, p. 320-326.

, in quo se exposuit in comitiva dilecti et fidelis consanguinei nostri vicecomitis de Thouarcio, et aliàs utiliter et laudabiliter nobis servierit et serviat indeffessus ; volentes ejus tantam bonitatem jugi celebritate dignoque cultu extollere, ac nostre libertatis egregio premio decorare, ipsum de thoro legitimo liberisque parentibus procreatum, ac ejus liberos prolemque et posteritatem in et de legitimo matrimonio nascituram utriusque sexus, de nostra speciali gracia, auctoritate regia plenaque potestate, per presentes nobilitamus nobilesque facimus. Volentes et concedentes expresse ut dictus Johannes Butaudi et ejus liberi, proles, posteritas masculina et feminina, nascitura legitima, in actibus judiciariis, secularibus et ceteris quibuscunque ab omnibus et singulis, nomine et re, pro nobilibus habeantur et reputantur, ipsosque reddimus habiles ut privilegiis, libertatibus, prerogativis, honoribus, preeminenciis et aliis juribus, quibus nobiles regni nostri ex nobili genere procreati uti consueverunt, gaudeant libere et pacifice fungantur ; ipsos aliorum nobilium dicti nostri regni ex nobili stipite procreatorum consortio aggregantes, ac si ex utroque parente atque nativitatis primordio nobiles essent producti. Volentes eciam ut ipse Johannes Butaudi dictique sui liberi, proles et posteritas masculina, de legitimo matrimonio procreata, quandocunque et a quovis maluerint milite, valeant milicie cingulo decorari. Concedentes insuper eidem Johanni Butaudi ut ipse et dicti sui liberi, proles et posteritas masculina et feminina legitima, feuda, retrofeuda et res nobiles quascunque à nobilibus et aliis quibuscunque personis acquirere et acquisita ac eciam acquirenda tenere et licite possidere perpetuo possint, absque eo quod illa vel illas nunc vel in futurum vendere aut extra manus suas ponere, seu financiam nobis aut officiariis, sive successoribus nostris, per eos vel eorum alterum pro ipsis rebus nobilibus nec aliàs pro hujusmodi nobilitacione prestare seu solvere cogantur ; quam quidem financiam, premissorum favore, ex habundanciori nostre gracie plenitudine, remittimus, quictamus et donamus eisdem, per presentes. Quocirca dilectis et fidelibus gentibus compotorum nostrorum, et thesaurariis nostris, ac eciam dilecto et fideli secretario nostro magistro Johanni de Xaincoins

Jean Barillet, dit de Xaincoins (auj. Sancoins), nom de la ville du Berry où naquit et vécut son père, fut anobli par lettres de novembre 1446. Successeur de Guillaume Charrier dans la charge de receveur général des finances du roi, il est presque aussi connu que Jacques Cœur par la disgrâce et la confiscation de ses biens, qu’il encourut, plus ou moins justement, peu de temps avant celui-ci. M. de Beaucourt a consacré une notice fort intéressante à ce personnage. (Hist. de Charles VII, t. V, p. 86-91.) Jean de Saincoins était possesseur de la terre d’Oyron dans la mouvance de Thouars. Charles VII, par lettres patentes données à Montbazon, le 9 avril 1451 n.s., en fit don à Guillaume Gouffier, avec d’autres fiefs provenant de la même confiscation.

, thesaurario ac receptori generali omnium financiarum nostrarum, necnon senescallo nostro Pictavensi, ceterisque justiciariis et officiariis nostris, aut eorum locatenentibus, presentibus et futuris, et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, tenore presentium damus in mandatis quatinus memoratum Johannen Butaudi dictosque ejus liberos, prolem et posteritatem masculinam et femininam nascituram, legitimam, et eorum quemlibet, nostra presenti gratia, nobilitacione, concessione, voluntate, remissione, dono et quictancia uti et gaudere libere et pacifice perpetuo faciant et permittant, nec eos contra tenorem presentium ullatenus impediant seu molestent, aut a quoquam quovismodo impediri seu molestari paciantur, quod si quid forsan secus agi contingeret, id ad statum pristinum et debitum reducant seu reduci faciant indilate, visis presentibus, sine alterius expectacione mandati, ordinacionibus, statutis, edictis, consuetudinibus vel usu generali seu locali, inhibicionibus, revocacionibus, litteris, mandatis et defensionibus in contrarium factis vel fiendis, non obstantibus quibuscunque. Que ut perpetue stabilitatis robur obtineant, sigillum nostrum presentibus litteris duximus apponendum. Nostro in aliis et in omnibus quolibet alieno jure semper salvo. Datum Pictavis, in mense maii anno Domini m° ccccmo quadragesimo tercio, et regni nostri vicesimo primo.

Sic signatas : Per regem, domino Karolo de Andegavia

Charles d’Anjou, comte du Maine. (Cf. ci-dessus, p. 146, note.)

, admiraldo

Prégent de Coëtivy, amiral de France, de 1439 à 1450.

et aliis presentibus. M. Beauvarlet. — Visa. Contentor. E. Duban.

MLVII Juin 1443

Lettres permettant à Jean Escoubleau, écuyer, seigneur de Vougnet

Vougnet, aujourd’hui très petit village dépendant de la commune de Ligré, était au xve siècle un fief important, relevant de Champigny-sur-Veude. Il appartenait en 1400 à Simon de Sazilly et fut dévolu plus tard à la famille de Mausson. La dîmerie de ce lieu était la propriété du chapitre de Saint-Mesme de Chinon. (Carré de Busserolle, Dict. géogr., hist. et biogr. d’Indre-et-Loire, t. VI, p. 438.)

en la châtellenie de Chinon, « notable lieu et de grant revenue, et où ledit suppliant a acoustumé faire sa residence, auprès duquel lieu et hostel a bel prieuré parrochial…, de fortiffier ou faire fortiffier ledit lieu de Vougnet et clorre de murs, tours, fossez, portes, pons leveys, barbacannes, barrieres et de toutes autres choses neccessaires pour la fortiffication dudit hostel… Donné à Poictiers, ou mois de juing l’an de grace mil cccc. quarante et trois, et de nostre regne le xxie. — Ainsi signées : Par le roy, monseigneur le duc d’Orleans

Charles duc d’Orléans, fils de Louis, frère de Charles V, et de Valentine de Milan, né à Paris, le 26 mai 1391, mort le 4 janvier 1465. Fait prisonnier à la bataille d’Azincourt, il demeura en Angleterre jusqu’en 1440. Cette longue captivité de vingt-cinq ans et les poésies françaises et anglaises dont il est l’auteur ont rendu son nom célèbre.

, le comte de Dunoys

Jean comte de Longueville et de Dunois, bâtard d’Orléans. (Cf. ci-dessus, p. 52, note 2.)

, Jamet de Tillay

Jamet de Tillay était alors capitaine de Loches (1443). Pendant la Praguerie, il avait rendu au roi un signalé service en enlevant Montrichard aux princes ligués (avril 1440). Ami de Pierre de Brézé, sénéchal de Poitou, il lui dut en grande partie sa fortune. Accusé (et l’enquête prouva que ce n’était pas sans fondement) d’avoir par ses propos calomnieux causé ou hâté la mort de la dauphine Marguerite d’Écosse (1445), il n’en continua pas moins d’avoir les bonnes grâces de Charles VII, qui le créa bailli de Vermandois. (Beaucourt, Histoire de Charles VII, t. IV, p. 107-111, 181, 182.)

et autres plusieurs presens. M. Beauvarlet. Visa. Contentor. E. Duban. »

AN JJ. 184, n° 598, fol. 405 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 156

MLVIII Juin 1443

Lettres permettant à Jean de Marconnay, chevalier, de fortifier son lieu et hôtel de la Barbelinière.

AN JJ. 184, n° 603 bis, fol. 409 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 157-160

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre amé et feal chevalier, Jehan de Marconnay

La généalogie de la famille de Marconnay imprimée dans l’ancienne édition du Dictionnaire des familles du Poitou est remplie d’erreurs graves en ce qui concerne ce Jean de Marconnay. On en fait le fils de Simon vivant en 1337, homme d’armes dans la compagnie de Guillaume Larchevêque, à Angoulême, le 19 juin 1345. Il aurait eu pour mère une Jeanne de Coulombiers, dont il représentait les droits, en 1433, dans une contestation au Parlement de Poitiers, contre Catherine de la Haye-Passavant, dame de Clairvaux. Enfin il aurait été maître d’hôtel de Jean duc de Berry du 26 mai 1401 au 13 juin 1402, sous le nom de Jean de Coulombiers. On le suit jusqu’au 9 novembre 1445, qu’il donna quittance de la dot de 1000 écus d’or apportée par Jeanne Chaperon, en épousant son fils aîné, Simon de Marconnay. Il y a évidemment une génération de sautée dans cette filiation. Jean serait mort plus que centenaire s’il avait eu pour père celui qui lui est attribué. Il fut seigneur de Colombiers, non par sa mère, mais à cause de sa femme, comme nous allons le voir. Dans les registres de comptes de l’hôtel du duc de Berry, on trouve fréquemment mention d’un Jean du Colombier, qualifié maître d’hôtel de ce prince, entre 1398 et 1401, mais ce nom est presque toujours accompagné du titre de chevalier, seigneur de Montgauguier. (Arch. nat., KK. 253, fol. 89 v° ; KK. 254, fol. 10 v°, 42, 68, 96 v°, 123 v°.) Or Jean de Marconnay n’était encore qu’écuyer en 1429 et il ne posséda jamais la seigneurie de Montgauguier.

Un accord enregistré au Parlement de Poitiers, le 30 avril 1421, nous apprend que Jean de Marconnay avait épousé la fille aînée de Briand, sr de Colombiers. Ce dernier, marié à Marguerite de Frontdebeuf, vivait en 1382 (Ledain, Hist. de Bressuire, p. 400, 412) et rendit aveu au duc de Berry pour les moulins de Supplise sur le Clain, mouvant de la tour de Maubergeon, le 15 mars 1406 n.s. (Arch. nat., R1* 2171, p. 162.) Il eut deux fils : Briand, mort jeune, et Jean, dit Blondeau, qui, après le décès de son père et de son frère aîné, le 15 septembre 1408, fit aveu à son tour desdits moulins (P. 1145, fol. 83) et le renouvela au dauphin Charles, comte de Poitou, en 1418 (P. 1144, fol. 7) ; et quatre filles, la première mariée à notre Jean de Marconnay, les deux autres à Simon de Saint-Martin, chevalier, et à Jean Briffaut, dit la Rue, écuyer, et la dernière, nommée Philippe, non encore mariée en 1421, et qui épousa depuis Jean de Couhé, sr de Chergé. L’accord dont il vient d’être parlé fut conclu entre Jeanne Briand, damoiselle, veuve de Jean ou Blondeau, en son vivant écuyer, seigneur de Colombiers, d’une part, et les sœurs et beaux-frères de son mari, d’autre part. Jeanne prétendait avoir en douaire, suivant la coutume, le tiers par indivis de tous les biens et héritages du défunt et la jouissance de tous les conquêts. Elle voulait continuer à demeurer dans le château fort de Colombiers, principale et habituelle résidence de son mari. Or ses beaux-frères s’étaient emparés de toute la succession. Un jour qu’elle avait dû s’absenter pour ses affaires, ils en avaient profité pour s’introduire dans la tour et la forteresse, lui en avaient fermé les ponts et les portes, et avaient fait main basse sur les objets mobiliers et argent monnayé lui appartenant, qu’elle estimait à la somme de 3000 livres. Ils avaient même retenu ses femmes et domestiques. Par la transaction qu’elle accepta, Jeanne Briand dut renoncer, au profit de Jean de Marconnay, à l’hôtel et forteresse de Colombiers et se contenter, pour sa demeure, de l’hébergement des Closures et ses dépendances, dont elle aurait l’exploitation et les fruits, à condition qu’ils ne dépassent pas le tiers des revenus de son feu mari. Jean de Marconnay s’engageait à donner à ses cohéritiers telle compensation que leurs amis aviseraient. Quant aux dettes personnelles du défunt, on s’en remettait, pour leur paiement, au jugement de Guillaume Taveau, chevalier, sr de Mortemer. Il fut aussi accordé que « le trait, arbalestes, canons et autres abillemens de guerre qui à present sont en la dite forteresse de Coulombiers, demoureront en icelle pour sa garde, jusques à ce que autrement en soit ordonné par mondit sr de Mortemer. » Telles sont les principales dispositions de la transaction du 30 avril 1421. (Arch. nat., X1c 121, à la date.)

Nous dirons quelques mots encore d’autres procès soutenus par Jean de Marconnay. Le premier, commencé du vivant de Blondeau de Colombiers, ne prit fin qu’en 1434. Il s’agissait d’un droit de chasse prétendu par ce dernier dans les garennes de Clairvaux et de Scorbé et que lui contestait Goffroy de la Haye, sr de Clairvaux, puis le frère de celui-ci, Guillaume de la Haye. Héritier de Blondeau, Marconnay reprit pour son compte cette affaire pendante à Chinon, devant le lieutenant du bailli des Exemptions. Assigné d’abord le 19 octobre 1423 et le 18 janvier 1424, il fit défaut les deux fois. Ensuite il obtint du roi des lettres de relèvement de ces défauts, et comme le lieutenant du bailli refusa de les entériner, Jean releva appel au Parlement de cette décision ; mais la cour, par arrêt du 4 avril 1425 n.s., le déclara mal fondé et adjugea le bénéfice des deux défauts à Guillaume de la Haye. (Arch. nat., X1a 9190, fol. 338.) Près de dix ans plus tard, on retrouve Jean de Marconnay en présence de Catherine de la Haye, héritière de ses deux frères, Geoffroy et Guillaume décédés, et dame de Clairvaux. La cause n’était pas encore entendue. Enfin, le 23 février 1434 n.s., l’arrêt définitif fut rendu. Il confirmait purement et simplement la sentence du juge de Chinon, qui avait donné entièrement raison à la dame de Clairvaux et condamné son adversaire à l’amende et aux dépens du procès. (X1a 9193, fol. 4.) Le 12 mai 1429, Jean de Marconnay, dit Estelle, écuyer, était ajourné en personne au criminel, ainsi que Catherine de la Motte, damoiselle, Jean Vigeron, écuyer, et Jean Héraut de Coussay, à la requête de Jean Gouffier, chevalier. Par ordonnance de la cour, les premiers furent élargis et admis à se faire représenter par procureur, et il fut défendu à Gouffier de ne procéder ou faire procéder en aucune manière au mariage de Jean de Rouffignac, sous peine de cent marcs d’or. (X2a 21, à la date.) L’an 1435, Jean de Marconnay, qualifié alors chevalier, ayant entrepris de marier Guillemette Berland, contre le gré de son curateur, André Fourré, fut de nouveau ajourné à plusieurs reprises devant le Parlement. Il est question de cette affaire, dont on ne connaît pas la conclusion, aux registres des 7 février, 10 et 22 mars 1435 n.s. (Id., X2a 21, à ces dates.) Il s’agissait sans doute de Guillemine ou Guillemette, seconde fille de Turpin Berland, écuyer, dame en partie des Halles de Poitiers, qui épousa par la suite François Guérinet, écuyer, sr du Verger, général des aides en Poitou.

La généalogie imprimée donne pour femme à Jean de Marconnay Berthelonne de Ry. Si le renseignement est exact, il l’aurait épousée en secondes noces. La Barbelinière, qu’il obtint la permission de faire fortifier par ces lettres de juin 1443, était un château et ancien fief relevant de la baronnie de Thuré dans le duché de Châtellerault. Pierre de Marconnay, second fils de Jean, eut ce fief en partage et fut chef d’une branche dite de la Barbelinière.

, seigneur de la Barbelinire, contenant que audit lieu de la Barbelinire ledit suppliant a toute justice et juridicion haulte, moyenne et basse et tout ce qui s’en deppend, et plusieurs hommes et subgiez couchans et levans, lesquelz à l’occasion des gens d’armes et routiers qui continuelement sont sur le païs, soustiennent plusieurs grans pertes et dommaiges ; et pour ce ledit suppliant, afin de preserver et garder son corps, ses biens et ses diz hommes et subgiez et leurs biens des pilleries et roberies qui par les dictes gens d’armes et routiers leur sont faictes et continuées chascun jour, fortiffieroit et empareroit voulentiers son dit lieu et hostel de la Barbeliniere, lequel est aisié à fortiffier et emparer, en lieu avantageux, se sur ce il nous plaisoit lui impartir nostre grace, si comme il dit, requerant humblement icelle. Pour quoy nous, ces choses considerées, audit de Marconnay suppliant, pour ces causes et en faveur des bons et agreables services que icelui suppliant nous a faiz ou fait de noz guerres, mesmement à nostre siege de Ponthoise

Du 4 juin au 19 septembre 1441. (Cf. ci-dessus, p. 153, note 1.)

, et autrement en maintes manieres fait chascun jour et esperons que encores face ou temps avenir, avons donné et octroyé, donnons et octroyons, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, congié et licence de fortiffier et emparer son dit lieu et hostel de la Barbeliniere de murailles, tours, fossez, barbacannes, eschiffes, pons leveiz et autres choses neccessaires pour ladicte fortification et emparement, tout ainsi que bon lui semblera, pourveu toutesvoyes que ce [ne] nous tourne à prejudice ou dommage, ne à aucun, et que les diz hommes et subgiez, et autres retrayans oudit lieu et hostel, seront tenuz de faire guet et garde là où ilz l’ont acoustumé faire d’ancienneté. Si donnons en mandement par ces dictes presentes à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace, congié et licence facent, seuffrent et laissent ledit suppliant joïr et user plainement et paisiblement, sans lui faire, mettre ou donner ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun empeschement ou destourbier au contraire. Car ainsi nous plaist il et voulons estre fait, non obstans quelzconques editz, statuz, ordonnances, mandemens ou deffenses à ce contraires. Et afin que ce soit ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Poictiers, ou mois de juing l’an de grace mil cccc.xliii, et de nostre regne le xxie.

Ainsi signées : Par le roy, Jamet de Tillay

Sur ce personnage, cf. ci-dessus la note 5, p. 156.

et autres presens. Giraudeau. — Visa. Contentor. E. Duban.

MLIX Juin 1443

Rémission octroyée à Guillaume Giqueau, mercier de Saint-Maixent, coupable d’homicide sur la personne de Pierre de Beauvoir, dans une rixe.

AN JJ. 184, n° 604, fol. 409 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 160-163

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Guillaume Giqueau, povre homme, mercier, demourant en la ville de Saint Maixent en nostre païs de Poictou, contenant que ledit suppliant, Jehan Giqueau, son nepveu, Jehan de Confolent, Laurens Guilleminaut et plusieurs autres, le xvie jour de ce present mois de juing, qui estoit le jour de la Trinité, alerent boire en certain hostel en la dicte ville, ouquel on vendoit vin, lequel suppliant et les dessusnommez, après ce qu’ilz furent oudit hostel, se mirent à jouer pour le vin à ung jeu appellé le jeu du tranchoer

Ou jeu du palet, suivant Fr. Godefroy, qui n’ajoute à cette définition aucune autre explication. Il cite deux textes où ce mot se rencontre, le nôtre de juin 1443 et un second de 1467, emprunté aussi à un registre du Trésor des chartes. (Dict. de l’anc. langue française, t. VIII, p. 12, 13.)

, et ainsi qu’ilz s’esbatoient et jouoyent ensemble audit jeu, survindrent illec ung nommé Pierre de Beauvoir et autres, lesquelz, après ce qu’ilz furent venuz oudit hostel, se prindrent à eulx esbatre et jouer à semblable jeu que le dit suppliant et autres dessus diz jouoyent. Lequel de Beauvoir, après ce qu’il eut joué, dist audit suppliant qu’il avoit dit et tesmoigné que le jeu d’icelui de Beauvoir n’estoit pas bon ; lequel suppliant respondit audit de Beauvoir que, sauve sa grace, non avoit, et qu’il le demandast à ceulx qui illec estoient presens, s’il l’avoit tesmoigné ou non ; lesquelz assistens dirent et tesmongnerent audit de Beauvoir que icelui suppliant n’en avoit oncques parlé. Mais ledit de Beauvoir, non content de ce que les presens lui avoient dit et certifié, dist audit suppliant ces motz ou semblables en effect : « Tu as menty, Breton larron, car tu l’as dit ». Et avec ce, dist audit suppliant plusieurs autres injures et villenies. Lequel suppliant respondi audit de Beauvoir qu’il n’avoit esté ne oncques ne fut larron ne traitre, et qu’il s’en vouldroit bien rapporter au commun fasme et renommée et à ceulx qui le congnoissoient, et dist audit de Beauvoir qu’il mentoit. Lequel de Beauvoir, indigné de ce, s’efforça et lors volt frapper ledit suppliant, et de fait le frappa ; et en procedant de mal en pis injurioit ledit suppliant et le vouloit de rechief frapper, et de fait l’eust frapé, se n’eussent esté aucuns de la compaignie qui se mirent au devant et entre ledit suppliant et ledit de Beauvoir ; mais ce non obstant, ledit de Beauvoir, en perseverant en sa mauvaise voulenté, non content de ce que dit est, voult et s’efforça encores courir sus et fraper ledit suppliant. Lequel voyant que ledit de Beauvoir s’efforçoit de lui courir sus et ne vouloit cesser ne departir de sa mauvaise voulenté, mais perseveroit tousjours en icelle, doubtant qu’il lui feist pis tira ung petit coutel qu’il avoit et d’icelui frapa ledit de Beauvoir par deux fois et lui donna deux coups sur l’oreille et auprès d’icelle. Depuis lesquelz cops ledit de Beauvoir dist plusieurs fois à celui qui vendoit le vin qu’il lui alast querir encores pinte de vin ; lequel respondit audit de Beauvoir qu’il n’en auroit plus et qu’il en avoit trop bu, et qu’il se alast faire appareillier au barbier. Dont ledit de Beauvoir ne volt riens faire ne soy partir dudit hostel, et demandoit tousjours à boire. Pour lesquelz cops et bleceure ledit de Beauvoir, par default de ce qu’il ne se voult faire appareillier au barbier de bonne heure, et par sa negligence ou autrement, ala ledit jour de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est bouté en franchise en l’abbaye de Saint Maixent, de laquelle il n’oseroit partir, pour doubte d’estre prins et que on voulsist proceder contre lui à punicion corporelle, se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartie. Et pour ce nous a humblement fait supplier et requerir que, attendu que ledit de Beauvoir fut aggresseur de paroles et frapa premierement ledit suppliant qui riens ne lui demandoit, etc., il nous plaise lui impartir icelle. Pour quoy nous, attendu ce que dit est, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant ou cas dessus dit avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Poictiers, ou mois de juing l’an de grace mil cccc.xliii, et de nostre regne le xxime.

Ainsi signées : Par le roy, à la relacion du conseil. Pichon. — Visa. Contentor. E. Duban.

MLX Octobre 1443

Lettres permettant à Le Galois de Villiers

Les renseignements sur ce personnage n’abondent pas dans les chroniques de l’époque. On trouve seulement qu’il défendait Janville en Beauce, avec Prégent de Coëtivy, à la tête d’une garnison composée de deux cent cinquante combattants, lorsque le comte de Salisbury, commandant une forte armée anglaise, vint assiéger cette place (juillet 1428). La ville fut prise d’assaut et tous les défenseurs qui ne furent pas tués demeurèrent prisonniers, y compris les deux chefs. (Chronique de Jean Raoulet, publiée à la suite de celle de Jean Chartier, par Vallet de Viriville, 3 vol. in-12, 1858, t. III, p. 198.) Le Galois de Villiers est qualifié capitaine de Sainte-Hermine en Poitou dans des actes de 1445 et 1446. Le lundi 14 juin 1445, un défaut fut prononcé au Parlement, au profit du procureur général, de l’évêque et des chanoines du chapitre cathédral de Luçon, demandeurs en cas d’excès, contre un nommé le Grand Étienne et un autre nommé Perrinet, serviteurs du Galois de Villiers, capitaine de Sainte-Hermine, et un nommé Grand Jehan, capitaine de Saint-Juire, ajournés en personne sur peine de bannissement et de confiscation. (Arch. nat., X2a 24, à la date.) Le 2 juillet suivant, ledit de Villiers au même titre était ajourné en cas d’excès et infraction à la Pragmatique Sanction, ainsi que Jean Giffart, chevalier, et plusieurs autres, à la requête de l’abbé et des religieux de Saint-Michel-en-l’Herm. Ils ne se présentèrent pas et un an après, le 12 juillet 1446, ils firent encore défaut à un nouvel ajournement des mêmes demandeurs. Le Galois de Villiers est toujours qualifié capitaine de Sainte-Hermine. (Id. ibid., aux dates.)

, écuyer d’écurie de Charles VII, bailli de Montargis, de fortifier de murs, tours, palis, fossés, pont-levis, échiffes, barbacanes, etc., son lieu et hôtel de « Lanere » sis à Andilly-les-Marais, à deux lieues de la Rochelle, dont il était seigneur à cause de sa femme, Jeanne de Belleville

L’on a vu que Jean II Harpedenne, sr de Belleville, et Jeanne ou plutôt Jovine de Mussidan, sa seconde femme, eurent deux fils, Jean et Olivier, et deux filles, Jeanne et Marguerite, cette dernière ayant épousé, du vivant de son père, Joachim de Volvire, sr de Ruffec et de Rocheservière, et que ses enfants renoncèrent au nom de Harpedenne et prirent celui de Belleville. (Cf. notre volume précédent, p. 187-189, note.) Lors du décès de son père (juillet 1434), Jeanne de Belleville, celle dont il est question ici, n’était pas encore mariée. Elle demeura d’abord sous la garde et administration de son frère aîné, Jean, seigneur de Belleville et de Montaigu. Le règlement de la succession paternelle et du douaire de Jovine de Mussidan donnèrent lieu à des procès (ci-dessus, p. 45, note), et, d’autre part, Jean avait pour l’établissement de sa sœur des projets que désapprouvaient les autres membres de la famille. Il l’avait promise au Galois de Villiers, sans consulter sa mère ni son frère. A la requête de ceux-ci, le Parlement, par arrêt du 11 janvier 1436 n.s., ordonna que Jeanne serait soustraite à l’autorité de Jean de Belleville et mise en garde, sous la main du roi, par devers messire Guillaume, seigneur d’Argenton, au château d’Argenton, et ce dans dix jours au plus tard, aux dépens dudit Jean, lequel serait tenu de pourvoir au vivre et à l’entretien de sa sœur, conformément à son état, jusqu’à ce qu’autrement en fût ordonné, sous peine de prise de corps et de biens. La cour lui fit en outre défense de traiter du mariage de Jeanne, sans avoir le consentement de Jovine de Mussidan, d’Olivier de Belleville et autres parents et amis de ladite damoiselle. (Arch. nat., X1a 9194, fol. 121 v°.) Le sr d’Argenton ne put accepter la mission dont on le chargea, ou bien Jeanne, pour une cause ou pour une autre, ne demeura que quelques jours près de lui. Toujours est-il que fort peu de temps après cette première décision, la cour confia Jeanne de Belleville d’abord à Jean Rabateau, l’un de ses présidents, puis, le 24 février 1436, à Pierre de Tuillières, chevalier, conseiller du roi, et défendit à ce dernier de ne la laisser communiquer ni avec Jean de Belleville, ni avec Le Galois de Villiers, non plus qu’avec Jovine de Mussidan ou avec toute autre personne se présentant de leur part. Les contrevenants étaient passibles d’une amende de 50 marcs d’or. (Id. ibid., fol. 125.) Cinq jours plus tard, le 29 du même mois, la cour, après avoir fait interroger Jeanne de Belleville pour connaître son sentiment, prononça la levée du séquestre et la laissa libre de ses actions, sauf au procureur du roi et à Jovine, si bon leur semblait, d’exercer des poursuites contre le sr de Belleville et tous autres qui avaient enfreint les défenses « de traicter et faire traicter du mariage de la dite damoiselle ». (Id. ibid., fol. 126.) Les lettres d’octobre 1443 prouvent que, malgré l’opposition de sa mère, Jeanne de Belleville finit par épouser Le Galois de Villiers.

. « Donné à Saumur, ou moys d’octobre l’an de grace mil cccc. quarante et troys, et de nostre regne le xxiime. — Ainsi signé : Par le roy, monseigneur le duc d’Alençon

Jean II duc d’Alençon, comte du Perche, vicomte de Beaumont au Maine, né au château d’Argenton, le 2 mars 1409, mort à Paris en 1476. Une notice biographique lui a été consacrée à l’occasion de la vente et cession qui lui fut faite par Charles VII des ville, château, châtellenie et seigneurie de Niort, par lettres du 28 août 1423. (P. 406 du précédent volume.)

, l’amiral, messire Jehan de Jambes

Sur ce personnage, cf. ci-dessus, p. 131, note 3.

et autres presens. Pichon. »

AN JJ. 176, n° 231, fol. 179 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 163-164

MLXI Avril 1444

Lettres d’amortissement, en faveur de l’abbaye de Notre-Dame du Pin, des lieu et hôtel de Bourg-Versé et du tiers du moulin Bourreau, en la châtellenie de Montreuil-Bonnin, le tout d’un revenu annuel de quinze livres, légué aux religieux par Geoffroy Bonin, bourgeois de Poitiers.

AN JJ. 176, n° 212, fol. 157 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 164-168

Karolus, Dei gracia Francorum rex. Ad perpetuam rei memoriam. Cunctorum nobis subditorum potissime benemeritorum justis supplicacionibus inclinata, nostra regia majestas consuevit se reddere liberalem, maxime dum ad divina obsequia augmentanda et continuenda devota cordis intencione procedunt. Sane nobis expositum extitit per dilectos nostros religiosos, abbatem et conventum ecclesie et monasterii seu abbacie Beate Marie de Pino

Suivant la Gallia christiana, un Jean du Puy fut abbé de Notre-Dame du Pin, monastère de l’ordre de Cîteaux, en 1416, 1418, 1424, 1430 et 1446, sans renseignements plus précis ni indication de sources. (Tome II, col. 1351.) Ce qui est certain, comme on le verra plus loin, c’est que le 5 septembre 1445, l’abbé du Pin se nommait Jean. Les registres du Parlement de Poitiers contiennent quelques arrêts relatifs à cette abbaye. Un différend qu’elle avait avec l’abbé et les religieux de Saint-Cyprien de Poitiers, au sujet de certains droits à Bonneuil-Matours, fut réglé en sa faveur le 15 juillet 1419. (Arch. nat., X1a 9190, fol. 30.) Mentionnons encore un procès de l’abbaye du Pin contre Jean Berthonneau, marchand de Poitiers, touchant le droit de minage des blés vendus et mesurés dans la banlieue de Poitiers (Acte du 31 mars 1423 n.s., id. ibid., fol. 221 v°), et un autre contre frère Jean Tue, religieux de Saint-Jean-de-Jérusalem, précepteur de la commanderie de la Vausseau, auquel elle réclamait une rente de vingt setiers de blé, à la mesure de Montreuil-Bonnin. (Arrêt du 22 juin 1426, X1a 9191, fol. 33 v°.)

, Pictavensis diocesis, regalis fundacionis existentis, quod nuper deffunctus Gaufridus Bonini

L’existence, dans la première partie du xve siècle, d’un notable bourgeois de Poitiers de ce nom est constatée par plusieurs documents authentiques. Dans un acte du 22 avril 1414, on voit que Geofroy Bonin était alors sénéchal du Bois-Pouvreau. (A. Richard, Arch. du château de la Barre, t. II, p. 30.) Le livre des hommages et aveux dus au dauphin Charles, comte de Poitou, dressé en août et septembre 1418, contient l’énumération des devoirs qui incombaient à ce personnage pour les menus fiefs qu’il possédait à Béruges et aux environs. (Arch. nat., P. 1144, fol. 20.) A cette époque, Geoffroy prenait le titre de procureur général pour Mgr le dauphin en la cour ordinaire de Poitiers. Une quittance de lui en cette qualité, datée de Poitiers le 2 janvier 1419 n.s., est conservée à la Bibl. nat. Il reconnaît avoir reçu de Jean Mérichon, receveur général de toutes finances tant en Languedoil qu’en Languedoc, une somme de 40 livres tournois dont le dauphin lui avait fait don pour les causes contenues dans ses lettres patentes du 22 décembre précédent. (Original, coll. des Pièces orig., vol. 404, v° Bonin, n° 6.) Il fut échevin de Poitiers en 1421. Un arrêt du Parlement du 6 mars 1423 n.s. nous fait connaître une contestation que Geoffroy Bonin avait eu à soutenir contre l’abbé et les religieux de N.-D. de Fontaine-le-Comte, et contre Guy Doucet, infirmier de cette abbaye, au sujet des arrérages d’une rente de seigle et des réparations qu’il était tenu de faire à l’hôtel du lieu de la Barbarière (s.d. les Bourballières), appartenant à l’infirmerie de ladite communauté. (Arch. nat., X1a 9190, fol. 213 v°.) Le 15 mars 1427 n.s., il était en procès avec les chanoines de Sainte-Radegonde de Poitiers. (Arch. de la Vienne, G. 1381.) Enfin, le 8 août 1430, il est nommé parmi les témoins qui furent présents au testament d’Herbert de Taunay, maire de cette ville. (Arch. nat., X1a 8604, fol. 98.)

, civis Pictavensis, de propria salute cogitans, cupiens terrena in celestia et transitoria in eterna felici commercio commutare, eidem ecclesie et monasterio, pro certis divinis obsequiis ibidem celebrandis, ad sue et predecessorum suorum animarum salutem, locum et hospicium de Burgo Reverso in castellania de Monsterolio Bonini cum tercia parte unius molendini nuncupati de Bourreau, inter dictos exponentes et ipsum deffunctum, dum vivebat, communi, una cum juribus justicie et juridicionis, deveriis, revenutis et redditibus, pertinenciisque et appendenciis universis eorundem, legavit et donavit, ad valorem et extimacionem quindecim librarum turonensium annui et perpetui redditus. Quas quidem res sic legatas per dictum deffunctum ipsi ecclesie, dicti exponentes devotam intencionem ipsius deffuncti adimplere et in securitatem perpetuam observare cupientes, et in hoc quamplurima servicia per deffunctum ipsi ecclesie in vita sua facta recognoscere volentes, eidem ecclesie admortisare peroptant, ipsam admortisacionem, humiliter implorando, et cum hoc financiam que nobis, racione dicte admortisacionis, in Camera compotorum nostrorum vel alibi taxata atque moderata fuerit, super summa quingentarum quinquaginta duarum librarum turonensium aut alia ipsis exponentibus in recepta nostra ordinaria senescallie Pictavensis debita, propter arreragia quadraginta duarum librarum decem solidorum turonensium annui et perpetui redditus ecclesie dicte per predecessores nostros in dicta nostra recepta ordinaria jamdiu ordinata et assignata, capiendam et solvendam eisdemque deducendam et defalcandam requirentes.

Notum igitur facimus universis, presentibus et futuris, quod nos dictorum exponentium hujusmodi pium et devotum propositum in Domino commendantes, cupientesque piorum et sanctorum operum cooperantes existere, dictorumque divinorum serviciorum effici participes, dictum locum et hospicium de Burgo Reverso in prefata castellania predictamque terciam partem prefati molendini de Bourreau, cum juribus, possessionibus, deveriis, revenutis, redditibus, pertinenciis et appendenciis universis eorumdem, memorate ecclesie de Pino, de nostra certa sciencia, gracia speciali et auctoritate regia, admortisavimus et per presentes admortisamus usque ad dictam valorem et extimacionem quindecim librarum turonensium annui et perpetui redditus ; volentes et concedentes ut res et possessiones predicte et earum quelibet à dictis exponentibus et eorum successoribus tamquam admortisate et ad manum mortuam posite, usibusque divinis redditate à modo teneantur ac in perpetuum pacifice possideantur, solvendo tamen nobis semel propter hoc financiam moderatam. Quam quidem financiam, premissorum intuitu et consideracione volumus et ordinamus, et dictis exponentibus concessimus et concedimus, per dictas presentes, fore capiendam et per ipsos solutam in et super arreragiis predictis, sibi in dicta Pictavensi recepta nostra, ad causam dicti redditus annualis quadraginta duarum librarum decem solidorum turonensium jamdictarum debitis, ad exoneracionem et acquitacionem nostram ipsorum arreragiorum. Quocirca dilectis et fidelibus nostris gentibus compotorum nostrorum et thesaurariis, senescallo nostro Pictavensi ceterisque justiciariis et officiariis nostris, aut eorum locatenentibus, presentibus et futuris, et cuilibet ipsorum, prout ad eum spectaverit, mandantes quatinus nostris presentibus gracia, admortisacione, concessione, ordinacione et voluntate dictos exponentes et eorum successores uti et gaudere perpetuo pacifice et libere faciant et permittant, ordinacionibus, statutis, editis, revocacionibus, mandatis, deffensionibus et restrinctionibus, factis aut fiendis, ad hoc contrariis nonobstantibus quibuscunque. Quod ut firmum et stabile perpetuo remaneat, sigillum nostrum, in absencia magni ordinatum, presentibus litteris duximus apponendum. Salvo tamen in aliis jure nostro et in omnibus quolibet alieno. Datum Montisculis propè Turonis, in mense aprilis anno Domini millesimo quadringentesimo quadragesimo quarto, et regni nostri vicesimo secundo

En conséquence de cet amortissement, par acte passé en chapitre le 5 septembre 1445, Jean, abbé de Notre-Dame du Pin, en son nom et au nom des religieux, déclara que, par suite de conventions conclues avec la Chambre des comptes, il paierait pour toute finance, ou plutôt ferait abandon au roi des arrérages dus à l’abbaye d’une rente de 42 livres 10 sous tournois par an, qui lui était assignée sur la recette ordinaire de la sénéchaussée de Poitou. En outre, il se reconnaissait tenu à l’hommage lige pour l’hôtel du Bourg-Versé et le tiers du moulin Bourreau, mouvant du roi à cause de son château de Montreuil-Bonnin, et dont le revenu est estimé à 15 livres par an. Dans cet acte, rédigé en latin, les lettres du mois d’avril 1444 sont relatées avec précision et le nom du donateur est écrit Gaufridus Bonini très lisiblement. (Original scellé du sceau de l’abbé et de celui du monastère, Arch. nat., J. 426, n° 33.)

.

Sic signatum : Per regem in suo consilio. Courtinelles. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MLXII Mai 1444

Lettres permettant à l’abbesse et aux religieuses de Sainte-Croix de Poitiers de fortifier leurs manoirs de Sainte-Radegonde de Saix et de Pouillé.

AN JJ. 176, n° 207, fol. 152 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 168-171

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de noz bien amées les religieuses, abesse et convent de l’abbaye de Sainte Croix de Poictiers

L’abbesse de Sainte-Croix de Poitiers, à cette époque, se nommait Raymonde du Peyrat, aliàs de Pérat. La Gallia christiana ne fournit aucun renseignement sur elle, et dit simplement qu’elle était abbesse en 1424, 1432 et 1454. (T. II, col, 1303.) Les archives de ce monastère renferment un grand nombre d’actes, entre ces dates extrêmes, relatifs à l’administration de Raymonde. Il serait facile mais trop long de donner la liste de toutes les chartes où il est question d’elle. Les lettres de mai 1444, permettant de fortifier les manoirs de Saix et de Pouillé, ne figurent pas dans ce fonds, du moins autant que l’on en peut juger par l’excellent inventaire manuscrit qu’en a dressé L. Rédet en 1844. (Arch. nat., F2 350.) En revanche, on y trouve d’autres lettres de Charles VII, de mai 1443, autorisant l’abbesse et les religieuses de Sainte-Croix à bâtir une forteresse au village de Maillé près Montreuil-Bonnin (original scellé avec l’attache de Pierre de Brézé, sénéchal de Poitou) ; des lettres royaux obtenues par les religieuses, le 13 juillet suivant, à l’encontre de Laurent Vernon, seigneur de Montreuil-Bonnin, qui s’opposait aux travaux commencés pour fortifier l’hôtel de Maillé, parce que les religieuses n’avaient pas voulu recevoir le capitaine qu’il prétendait y placer (liasse 36) ; un mandement de Charles VII, daté de Poitiers, le 15 juillet 1443, pour maintenir l’abbaye dans le droit de prendre toutes les semaines sept charretées de bois de chauffage dans la forêt de Moulière, suivant l’autorisation qu’elle en avait obtenue des rois, ses prédécesseurs (liasse 95, d’après l’inventaire Rédet). Le même roi avait encore accordé à l’abbesse et aux religieuses de Sainte-Croix une confirmation de tous leurs privilèges, par lettres patentes données à Poitiers, le 20 avril 1438, lettres qui ne sont pas mentionnées non plus dans l’inventaire des archives de cet établissement. Elles furent enregistrées au Parlement le 6 juin 1545 seulement, avec une nouvelle confirmation octroyée par François Ier en juillet 1515. (Arch. nat., X1a 8615, fol. 133.) Ces lettres sont d’ailleurs imprimées dans le recueil des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XV, p. 341.

, estant de fondacion royale, contenant que, pour la seureté, retrait et salvacion d’elles, de leurs mestaiers, hommes et subgiez, et de leurs biens, et pour obvier aux grans roberies, pilleries et dommaiges que elles et leurs diz mestaires, hommes et subgiez seuffrent chascun jour à l’occasion des logeys et courses que les gens de guerre estans en nostre service leur ont fait et font très souvent, elles ont puis nagueres eu entencion et voulenté de faire fortiffier et emparer leurs hostelz de Sainte Ragond de Sayz et de Pouillé, scituez en nostre bailliage de Touraine, et de fait les ont jà fait commencer de fortiffier et amener des matieres pour les parachever, mais elles n’oseroient bonnement plus avant faire besongner ès dictes fortifficacions et emparemens, sans noz congié et licence, doubtans que sur ce nostre procureur en nostre dit bailliaige de Touraine ou autre ne leur y meist ou feist debat, controverse ou empeschement, requerans sur ce nostre provision. Pour ce est il que nous, ces choses considerées, desirans les dictes religieuses qui sont de fondacion royal, comme dit est, et leurs diz mestaiers et subgiez estre preservez et gardez en seureté, tant en leurs personnes que en leurs biens, à icelles religieuses, abesse et convent avons donné et octroyé, donnons et octroyons, de grace especial, par ces presentes, congié et licence de faire fortiffier et emparer leurs diz hostels de Sainte Ragond de Sais et de Pouillé de murs, tours, portaulx, fossez, palliz, pont leveyz, guerites, barbecannes et autres fortifficacions et emparemens, telz que bon leur semblera, et, se mestier leur est et besoing leur fait, d’en icelles forteresses faire comprendre chemins publicques, tant que besoing leur sera, en baillant d’autre terre à eulx appartenans de plus prochaine qu’elles ont des diz chemins, pour faire iceulx chemins, pourveu toutesvoyes que ceulx qui demoureront et habiteront ès dites places ainsi fortiffiées feront guet et garde ou lieu ou d’ancienneté ilz avoient acoustumé le faire. Si donnons en mandement par ces dictes presentes à nostre bailli dudit bailliage de Touraine et des ressors et Exempcions d’Anjou et du Maine, ou à son lieutenant, en commettant, se mestier est, que les dictes religieuses, abesse et convent, et leurs diz mestaiers, hommes et subgiez facent, seuffrent et laissent joïr et user plainement et paisiblement de noz presente grace, congié et licence et octroy, sans leur faire, mettre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun ennuy ou destourbier au contraire. Car ainsi nous plaist il estre fait, non obstans quelzconques ordonnances, mandemens ou deffences à ce contraires. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre à ces presentes nostre seel ordonné en l’absence du grant. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné aux Montiz lez Tours, ou moys de may l’an de grace mil cccc. quarante et quatre, et de nostre regne le xxiime.

Ainsi signées : Par le roy, les sires de Trinel

Sic au lieu de Trainel. Il s’agit de Guillaume Jouvenel des Ursins, chevalier, baron de Trainel, personnage trop connu pour qu’il soit nécessaire d’insister sur sa biographie. Rappelons seulement que, né à Paris le 15 mars 1401 n.s., il fut d’abord conseiller lai au Parlement de Poitiers (provisions du 20 mars 1424 n.s.), bailli de Sens en décembre 1437, puis institué chancelier de France, en remplacement de Renaud de Chartres, par lettres données à Sarry-les-Châlons, le 16 juin 1445. Il exerça cette charge jusqu’à sa mort survenue le 23 juin 1472. Un de ses frères cadets, Jacques Jouvenel des Ursins, fut nommé le 5 novembre 1449 administrateur perpétuel de l’évêché de Poitiers ; nous aurons à nous occuper de lui par la suite. Tous deux étaient fils de Jean Jouvenel des Ursins, président au Parlement de Poitiers, décédé dans cette ville le 1er avril jour de Pâques 1431, et de Michelle de Vitry, qui survécut à son mari jusqu’au 12 juin 1456. Quelques années après la mort de son mari, Mme de Trainel fut victime d’un vol important, commis à l’aide de fausses clefs dans son hôtel à Poitiers. Le principal coupable était un nommé Marcellot. Sa complice Thomasse Regnaud fut prise et avoua à la cour qu’elle avait eu pour sa part « iiiixx pieces d’or, escuz et moutons vielz ». Par arrêt du 7 décembre 1435, elle fut condamnée à être fustigée, trois samedis consécutifs, par les carrefours et places devant Notre-Dame-la-Grande, de la Regraterie et du Pilori, à être tournée, chacun desdits jours, au pilori et à avoir, l’une des trois fois, les cheveux brûlés au pilori ; en outre, à tenir prison fermée dans la fosse de la tour de la Prévôté de Poitiers, pendant trois mois, au pain et à l’eau. Au bout de ce temps elle devait être bannie du royaume à perpétuité. A la suite de cette affaire, défenses furent faites à tous les serruriers de Poitiers et d’ailleurs de ne plus fabriquer désormais des clefs sur empreintes, à moins que ce ne soit par ordre des propriétaires et pour leurs maisons respectives. Le 20 décembre suivant, Guillaume et Jacques Jouvenel vinrent déclarer, sous la foi du serment, que le montant du vol s’élevait à la somme de 500 écus, sur laquelle ils n’avaient recouvré que 120 écus, et, à leur requête, Thomasse fut condamnée en outre à leur restituer le reste et à demeurer en prison jusqu’à ce qu’elle leur eût donné complète satisfaction. (Arch. nat., X2a 21, aux dates.)

et de Maupas

Jean du Mesnil-Simon, alors bailli de Berry, était à cause de Philippe de Rochechouart, sa femme, seigneur de Maupas, titre sous lequel il est ordinairement désigné. Le sire de Maupas était dès l’an 1432 au service de Charles VII, comme valet tranchant. Au commencement de l’année 1445, il fut envoyé, par commission du roi, en Poitou et en Saintonge, pour organiser spécialement dans ces provinces le logement et l’entretien des gens de guerre. (Arch. nat., K. 68, n° 14.) Jean du Mesnil-Simon ne mourut que sous Louis XI qui, par lettres du 2 janvier 1462 n.s., lui conféra le titre de son conseiller et chambellan. (A. Thomas, Les États provinciaux de la France centrale, t. I, p. 339 ; de Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. IV à VI, passim.)

, maistre Jehan Bureau

On connaît les services rendus à Charles VII par Jean Bureau et par son frère Gaspard, comme maître de l’artillerie française. D’abord commissaire au Châtelet de Paris (1425-1435), Jean était receveur de cette ville, lorsqu’il fut commis verbalement par le roi au gouvernement de l’artillerie pour le siège de Meaux (juillet 1439) ; après la prise de cette ville (12 août), il fut titulaire de cette charge qu’il continua d’exercer, quoique pourvu, le 2 mai 1443, de celle de trésorier de France et de maître des comptes. Il était en même temps capitaine de la ville et du marché de Meaux et du château de Beauté-sur-Marne, et fut aussi chambellan du roi. De 1444 à 1446, Jean Bureau fut à plusieurs reprises envoyé dans le Poitou, la Saintonge et l’Angoumois, au sujet de l’imposition des aides pour la guerre et le paiement de la gendarmerie. Il mourut à Paris, le 5 juillet 1463. (Le P. Anselme, Hist. généal., t. VIII, p. 135 ; E. Cosneau, Le connétable de Richemont, p. 292, 293.)

et autres presens. Ja. Aude. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MLXIII Mai 1444

Rémission accordée à Jean Girard, de Thurageau, pour le meurtre de François Brodé, prêtre, qui avait débauché sa femme.

AN JJ. 176, n° 210, fol. 155 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 172-175

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Jehan Girart, demourant en la parroisse de Turagueau en nostre païs de Poictou, contenant que ung nommé Françoys Brodé, le quel demouroit en ladicte parroisse avecques Jehan Brodé, son pere, s’acointa, lui estant clerc solut, de Thomasse, femme dudit Jehan Girart, [laquelle], selon qu’il estoit commune renommée, il maintenoit, et pour ce que ledit Brodé n’en povoit pas bien joyr à son plaisir, pour doubte dudit Girart, son mary, ledit Brodé print ladicte Thomasse et l’osta d’avec ledit Girart, son mary, environ la feste saint Michiel derrenierement passé, et l’emmena en nostre ville de Poictiers, avecques plusieurs biens dudit Jehan Girart qu’ilz emporterent, comme draps de lit, couvrechiefs, toille et argent, dont ledit Girart fut très desplaisant et courroucié, et de desplaisir et courroux qu’il en print, il devint comme tout alteré en son entendement. Depuis les quelles choses, Jehan Rousseau, frere de ladicte Thomasse, assez tost après la dicte feste saint Michiel, trouva ladicte Thomasse, sa seur, avec le dit Brodé qui l’avoit emmené, laquelle le dit Rousseau ramena audit Girart, son mari, cuidant qu’elle le voulsist servir bien et loyaulment. Lequel François qu’il (sic) n’estoit pas lors encores prestre, s’en fouy et emporta les diz biens, excepté les draps de lit, lesquelz par le moyen d’aucuns furent rapportez audit Girart. Et depuis le dit Françoys se fist prestre et retourna demourer en la dicte parroisse du Turagueau, et illec frequenta et conversa avec ladicte Thomasse, comme paravant il avoit fait, dont il despleut audit Girard. Lequel, pour le grant desplaisir et hayne qu’il conceut à l’occasion dessus dicte contre le dit Brodé, et la grant doubte qu’il avoit que le dit prestre retournast à la dicte Thomasse, femme dudit Girard, se adressa au dit Françoys et lui dist qu’il lui deffendoit qu’il n’alast plus en son hostel et s’en gardast bien, car s’il lui trouvoit il le courrouceroit du corps ; et lui dist qu’il se gardast de lui, s’il voulloit, car il le deffioit. Auquel Girard le dit prestre respondi qu’il ne le craingnoit riens, et se garderoit bien de lui, mais qu’il eust deux pas avant lui. Et depuis, certain jour de dimenche ensuivant, le dit Girard ala biller ès champs avec aucuns de ses amis et voisins, et après biller, vindrent boire à une taverne en ladicte parroisse, en l’ostel de Jehan Poitereau, ouquel hostel semblablement ala le dit Françoys Brodé, où il trouva le dit Girart et ses diz voisins qu’ilz beuvoient. Lequel Girart, quand il vit le dit Brodé fut bien courroucié, et oncques, puis qu’il l’eut veu, ne fist bonne chiere, et regarda tousjours se le dit prestre partiroit du dit hostel d’amblée ou autrement, pour aler devers la dicte Thomasse, femme du dit Girart. Lesquelz Girard et Brodé estans en la dicte taverne audit Turagueau, ledit Brodé lequel guetoit et espioit quant le dit Girart entendroit à faire bonne chiere, advisa que le dit Girard ne le regardoit point, et entendoit à boire, et ne lui souvenoit plus des dites choses, et se embla et parti secretement du dit hostel et hastivement s’en ala par devers la dicte Thomasse en une cave où elle estoit, en laquelle on ne veoit goute. Et tantost après, le dit Girart s’avisa dudit prestre et regarda où il estoit, et incontinent qu’il apperceut qu’il n’estoit pas oudit hostel, se partit hastivement dudit hostel et laissa ses compaignons, et s’en alla en la dicte cave, en laquelle avoit du feu ; et si tost que le dit prestre et la dicte Thomasse sentirent le dit Girart descendre en la dicte cave, la dicte Thomasse exteignit le feu, et le dit Brodé prestre s’en cuida fouir, mais il rencontra le dit Girart, lequel le print par la robe, et gecta le dit Girart le dit prestre à terre ; lequel appella à son aide la dicte Thomasse, en disant : « Venez moy aidier, Thomasse m’amye ». Et fist tant le dit prestre qu’il se releva de dessoubz le dit Girart deux foiz, et de rechiefle dit Girart remist à terre le dit Brodé, et quant il fut ainsi à terre soubz lui, le dit Girart print ung petit cousteau à copper pain qu’il avoit, et en frappa le dit Brodé plusieurs foiz par les cuisses et par les jambes et lui coppa les ners des jambes tellement que la mort s’en est ensuie, et environ ung jour après le dit Brodé, à l’occasion des dictes bleceures et cops, ala de vye à trespassement. Lequel Brodé, par avant son dit deceps, en la presence de plusieurs personnes, pardonna sa mort ou dit Girard et pria sa mere, ses freres et tous ses amis que, pour l’amour de Dieu, ilz voulsissent pardonner au dit Girart, et qu’il savoit bien qu’il avoit tenu tort au dit Girart. Pour occasion duquel cas le dit Girart, doubtant pugnicion et rigueur de justice, s’est absenté du païs et n’y oseroit jamais retourner, se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartie, humblement requerant que, attendu que le dit Girart a esté et est homme de bon fame et renommée, non actaint ou convaincu d’aucun villain cas, blasme ou reprouche, que le dit Brodé lui avoit fortrait sa dicte femme et detenu ses biens, et lui avoit le dit Girart deffendu sa maison et qu’il ne le trouvast point dedens, et qu’il le trouva en lieu suspect, seul en la dicte cave avec la dicte Thomasse, sa femme, qu’il lui a pardonné sa mort, qu’il perdi toute pacience quant il trouva le dit Brodé avec sa dicte femme en la dicte cave et fut tout esmeu et desplaisant, il nous plaise lui impartir icelles. Pour quoy nous, attendu ce que dit est, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit Girart, ou cas dessus dit, avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces presentes aux seneschaulx de Poictou et de Xaintonge, gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou moys de may l’an de grace mil cccc. quarante quatre, et de nostre regne le xxiime.

Ainsi signées : Par le conseil. Pichon. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MLXIV Mai 1444

Rémission en faveur d’Etienne Garnier, de l’île de Bouin, qui, intervenant dans une rixe suscitée à Jamet Caillon, par Thomas Lassours, avait frappé ce dernier d’un coup de bâton mortel.

AN JJ. 176, n° 211, fol. 156 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 175-177

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Estienne Garnier, de l’Isle de Boign, contenant que le jour saint Laurens derrenier passé, environ trois heures après mi jour, le dit Garnier et Jamet Caillon laisserent en la maison de Jehan Sauvaige aucuns avirons en garde, et en yssant de l’ostel dudit Sauvaige et ainsi qu’ilz s’en voulloient aler chascun en sa main

Sic. Il faudrait lire sans doute « maison ».

, survindrent Thomas Lassours et sa femme, lequel Lassours ala au devant des diz Caillon et Garnier, et dist au dit Caillon telles parolles ou semblables : « Dictes a vostre [frere

Ce mot a été omis par le scribe.

] qu’il garde bien mon bateau, et se garde que je ne le treuve point dedens, car se je lui trouve, je lui feray mauvaise compaignie ». Auquel le dit Caillon respondit qu’il se donnast garde qu’il diroit, et que cellui qui lui avoit vendu le dit bateau estoit bien souffisant de lui garentir. Lequel Thomas Lassours dist de rechief au dit Caillon et jura le sang de Nostre Seigneur que, s’il trouvoit le frere du dit Caillon dedens ledit bateau, qu’il le tueroit tout plat. Après lesquelles parolles dictes, ledit Caillon dist à ceulx qui illec estoient presens, qu’ilz feussent tesmoings des parolles que disoit le dit Lassours. Lequel, en perseverent en ses parolles aigres et menaces, dist de rechief audit Caillon telles parolles ou semblables : « Tu t’en mesles ! » et non content de ce, frappa le dit Caillon du poign en la poictrine, dont le dit Caillon appella de rechief à tesmoings ceulx qui illec estoient presens ; et s’efforça de rechief le dit Lassours frapper le dit Caillon. Et lors le dit Garnier, le quel tenoit ung baston en sa main, veant que le dit Lassours voulloit frapper le dit Caillon, lequel ne lui meffaisoit en aucune maniere, frappa le dit Lassours du dit baston ung cop sur la temple, tellement qu’il cheut à terre. Et oncques puis ne parla et vesquit depuis aucuns jours, et après ala de vye à trespassement. A l’occasion du quel cas le dit Garnier, doubtant rigueur et pugnicion de justice, s’est absenté du païs et n’y oseroit jamais revenir, ne retourner, ne converser, se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartie, humblement requerant que, attendu qu’il est homme de bon fasme, renommée et honneste conversacion, non actaint ou convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, que le dit Lassours fut agresseur de parolles et par voye de fait et frappa le dit Caillon et le dit Garnier, et le dit Garnier n’avoit pas entencion de le tuer, et n’avoit de par avant aucune hayne contre lui, que le dit cas fut et advint de chaude cole et de cas d’aventure, et par desplaisir que le dit Garnier vit que, sans cause, le dit Lassours avoit frappé le dit Caillon et s’efforçoit encores faire, il nous plaise sur ce lui impartir icelle. Pour quoy nous, attendu ce que dit est, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit Garnier ou cas dessus dit avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces presentes aux seneschaulx de Poictou et de Xaintonge, gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou moys de may l’an de grace mil cccc. quarante et quatre, et de nostre regne le xxiime.

Ainsi signées : Par le conseil. Charretier. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MLXV Mai 1444

Rémission accordée à Regnaut Nepveu, de la Garnache. Ayant fait ouvrir les portes de la place à Alain Rondeau, cousin de sa femme, et à un nommé Jean de Surville, originaire d’Allemagne, tous deux hommes d’armes de la compagnie du sr de Bricqueville, logés aux faubourgs de la Garnache, et ceux-ci ayant enlevé le fils d’un riche marchand allemand, élevé en l’hôtel de l’abbé de l’Isle-Chauvet, pour apprendre le français, ledit Nepveu, rendu responsable de ce fait, courut après les ravisseurs et leur reprit l’enfant, après avoir frappé à mort ledit de Surville d’un coup de javeline.

AN JJ. 176, n° 213, fol. 158 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 7 p. 177-185

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Regnault Nepveu, contenant que, environ le jeudi xxvime jour de fevrier derrenier passé, Regnault de Dresnay

Regnaut du Dresnay appartenait à une ancienne maison de Bretagne, dont une généalogie se trouve dans La Chenaye-Desbois. D’Argentré l’appelle « grand et expérimenté capitaine ». Il était maître d’hôtel de la dauphine Marguerite d’Écosse et assista aux derniers moments de cette princesse (16 août 1445). Le 26 juin de l’année suivante, l’amiral de Coëtivy, Pierre de Brézé, et son lieutenant Regnaut du Dresnay, avec une nombreuse compagnie de gens d’armes, allèrent procéder, au Guildo, à l’arrestation de Gilles de Bretagne et le menèrent à Dinan, près du duc François, son frère, qui le fit périr en prison. (Cosneau, Le connétable de Richemont, p. 382.) Vers cette époque, Regnaut fut nommé bailli de Sens. L’année suivante, il devint capitaine d’Asti, à la suite d’une expédition heureuse qu’il dirigea dans le Milanais, et jusqu’à la fin du règne de Charles VII, il paraît être resté au service du roi en Italie. Il était encore à Asti en 1463. (Journal de Jean de Roye, connu sous le nom de Chronique scandaleuse, publ. par B. de Mandrot, t. II, 1896, p. 213.) On remarquera plus bas que le nom de Dresnay est écrit « Drenezay ». On le retrouve mentionné, sous cette forme, dans un acte du 25 janvier 1446, où il est dit présent aux pourparlers entre Charles d’Anjou, comte du Maine, et Jean VII, comte d’Harcourt, touchant la cession faite au premier de la vicomté de Châtellerault. (Arch. nat., P. 1340, cote 498.)

, chevalier, soy portant lieutenant de nostre amé et feal conseiller et chambellan, le sire de la Varenne, nostre seneschal de Poictou

Pierre de Brézé, seigneur de la Varenne, de Brissac, comte de Maulévrier, était le fils aîné de Pierre, sr de la Varenne, mort avant 1427, disent les auteurs, et de Clémence Carbonnel, qui avait été mariée en premières noces à Roland de Dinan, sr de la Gougerie. Son père était seigneur en partie de Mortagne-sur-Sèvre, avec Isabelle de Vivonne et Jean de La Haye, et à ce titre il soutint un procès au Parlement de Poitiers contre Jean de Sainte-Maure, sr de Montgauguier. (Long et intéressant arrêt du 31 janvier 1420 n.s., Arch. nat., X1a 9190, fol. 75. — Voir aussi une transaction du 7 novembre de la même année, dans la coll. dom Fonteneau, t. VIII, p. 81.) Pierre II prit personnellement part à l’enlèvement de Georges de La Trémoïlle, au château du Coudray (juin 1433), bien qu’à cette époque il fût encore fort jeune, puisque, d’après un acte du Parlement, il était encore sous la tutelle de sa mère, Clémence Carbonnel, le 21 février 1435 n.s. (X1a 9201, fol. 161 v°.) Cependant, dès le 9 juin 1434, on le trouve qualifié capitaine du château de Poitiers : « Cejourd’hui, Guillaume des Hayes, lieutenant du seigneur de la Varenne, cappitaine du chastel de Poictiers, s’est opposé, etc. » (X2a 21, à cette date.) Depuis lors, le nom de Pierre de Brézé apparaît à toutes les pages de l’histoire de Charles VII, soit comme capitaine, soit comme négociateur. Il sut s’élever au premier rang dans la faveur de ce prince, par son habileté, son ambition et aussi par l’influence d’Yolande d’Aragon et des princes de la maison d’Anjou. Nous n’avons naturellement à nous occuper de ce personnage qu’au point de vue de l’histoire du Poitou.

Pendant la Praguerie, l’empressement du sr de la Varenne à servir la cause royale lui acquit de nouveaux titres à la reconnaissance de Charles VII. Lors de la reprise de la ville de Saint-Maixent (3 avril 1440), il était aux côtés du roi. Adversaire heureux du fameux Jean de la Roche, il recueillit la succession de celui-ci comme sénéchal de Poitou, succession qui aurait dû s’ouvrir beaucoup plus tôt, sans l’extrême longanimité du prince. On ne connaît pas la date précise des provisions de Pierre de Brézé. Il est très vraisemblable qu’il dut être investi, au moins verbalement, de sa nouvelle charge dès la dernière rébellion de la Roche, ou en tout cas aussitôt après la défaite et la fuite des conjurés. C’est seulement le 12 mai 1441 que le nouveau sénéchal présenta ses lettres au Parlement : « Ce jour, lit-on sur le registre de la cour, messire Pierre de Brézé, sr de la Varenne, a esté receu à l’office de seneschal de Poictou et a fait le serment en tel cas acoustumé. Et lui a la court enjoinct qu’il face refaire ses lettres en forme acoustumée, ès queles soit mis son nom propre et surnom, et n’y soient point les motz : non obstans opposicions et appellacions, ainsi qu’ilz sont ès lettres de don du dit office, par lui presentées à la court ; et qu’il rapporte ou envoye ses lettres en bonne forme par devers la court, dedans le premier jour d’aoust. » (Arch. nat., X1a 1482, fol. 166.) Il est certain que les provisions étaient très antérieures à cette date. Une ordonnance rendue par le sr de la Varenne en qualité de sénéchal de Poitou, mandant de rétablir l’abbaye de Mauléon dans l’exercice de ses droits sur le prieuré de la Tessoualle, porte la date du 3 février 1441 n.s. (Arch. hist. du Poitou, t. XX, p. 80.) On peut mentionner encore des actes du 31 juillet 1441 et de mai 1443 où il figure dans l’exercice de ses fonctions de sénéchal. (Coll. dom Fonteneau, t. XVI, p. 463 ; Rédet, Invent. ms. des archives de l’abbaye de Sainte-Croix de Poitiers, Arch. nat., F2 350, p. 47.) Dans des lettres patentes de décembre 1444, en faveur d’un nommé Jacques de Boulon, il est dit que celui-ci servait alors « soubz et en la compagnie de nostre amé et feal chevalier, conseiller et chambellan, le sire de la Varenne, seneschal de Poictou, en nostre ville de Louviers ». (JJ. 177, n° 25, fol. 13 v°.) Par lettres datées de Nancy, le 18 octobre 1444, Charles VII, en récompense des services de Pierre de Brézé, lui fit don du revenu des aides et greniers à sel des vicomtés d’Evreux et de Conches (Arch. nat., K. 68, n° 7), et au mois de décembre suivant, il lui donna en outre les seigneuries et châtellenies de Nogent-le-Roi, Anet, Bréval et Montchauvet. (JJ. 177, n° 94, fol. 52.) En décembre 1445, Pierre de Brézé était à Thouars. (Lettres de rémission pour Fleury Viguier, ci-dessous.) Au milieu de l’année suivante, outre le titre de sénéchal de Poitou, il prenait celui de capitaine des châteaux de Poitiers, de Niort et de Nîmes. (Bibl. nat., ms. fr. 26074, nos 5273, 5514, 5524 et 5525.) Dans des rémissions d’octobre et de novembre 1449, on trouve encore son nom accompagné de la qualification de sénéchal de Poitou. (JJ. 180, nos 2 et 12, fol. 1 et 4 v°.) Il conserva cette charge jusqu’à ce qu’il eût été créé par le roi grand sénéchal de Normandie, et il fut remplacé alors en Poitou par Louis de Beaumont, dont les provisions portent la date du 3 avril 1451 n.s. D’ailleurs, en dehors des séjours que fit Charles VII et sa cour dans notre province, de 1440 à 1450, le sire de la Varenne n’y fit que de rares et courtes apparitions. Le champ où se déploya son activité était trop vaste pour qu’il pût s’acquitter personnellement de ses fonctions de sénéchal. On sait qu’il fut tué à la bataille de Montlhéry, dès le début de l’action (16 juillet 1465).

, acompaigné de certain grant nombre de gens d’armes et de trait jusques au nombre de iiM. chevaulx ou environ, logea avec sa dicte compaignie à Beauvoir sur mer, en nostre païs de Poictou ; lequel jour, Rogier de Briqueville

Roger II de Briqueville, capitaine au service de Charles VII, appartenait à une ancienne et illustre maison de Normandie. Fils de Roger Ier, mort en 1404, et de Jeanne Campion, baronne de la Haye-du-Puits, il était, l’an 1448, en procès avec Bertrand de la Rivière, son beau-frère, au sujet de la seigneurie de Sainte-Croix de Grantonne. (Voy. La Roque, Hist. généal. de la maison d’Harcourt, et La Chenaye-Desbois, Dict. de la noblesse.)

, chevalier, acompaigné jusques au nombre de douze compaignons, logea semblablement à l’abbaye de l’Ysle Chauvet en la chastellenie de la Ganache, près dudit lieu de Beauvoir de deux lieues ou environ. Esquelz lieux de Beauvoir et l’Isle Chauvet les diz de Drenezay (sic) et Briqueville, avec leurs gens, demourerent jusques au mercredi ensuivant ; lequel jour de mardi (sic), ilz deslogerent et alerent loger au lieu de Coix en la chastellenie d’Apremont. Et après que ledit de Drenezay et Briqueville, mesmement ledit de Briqueville, firent desloger ung nommé Alain Rondeau, et avec lui ung nommé Jehan de Surville, natif du païs d’Alemaigne, de la compaignie dudit Briqueville, s’en alerent au lieu de la Gasnache, qui est près de la dicte abbaye de l’Isle Chauvet demye lieue ou environ, et logerent leurs chevaulx ès fauxbours du dit lieu de la Ganache, et après qu’ilz eurent logé leurs diz chevaulx, ilz alerent incontinant à la porte de la dicte ville de la Ganache, à la quelle porte estoient le dit Regnault Nepveu, suppliant, mary de la cousine germaine dudit Alain Rondeau, et autres en sa compaignie, qui gardoient la porte de la dicte ville et lieu de la Ganache. Lequel Alain Rondeau dist audit Nepveu qu’il ouvrist ou fist ouvrir la dicte porte à lui et à son compaignon, disant qu’il voulloit aler veoir la femme dudit Nepveu et aussi Ysabeau Rondelle, mere de la femme dudit Regnault. Au quel Alain le dit Regnault Nepveu respondit que, attendu qu’ilz venoient de la compaignie des gens d’armes et qu’il y en avoit plusieurs logez ausdiz faux bours, qu’ilz ne l’oseroient laisser entrer sans congié, mais lui dist qu’il attendist ung pou et qu’il yroit demander congié pour faire ouvrir la dicte porte à lui et à son dit compaignon. Et tantost se parti d’illec le dit Regnault et ala demander congié à Alain Boylesve, qui pour lors avoit la garde et gouvernement de la dicte place de la Ganache pour Edouart Boylesve

Édouard Boylesve, breton d’origine, faisait partie de l’armée de Richard de Bretagne, frère de Richemont, réunie à Dinan, à la fin de juillet 1419, « pour mettre et bouter hors aucunes gens d’armes qui estoient venus piller sur les marches dudit pays », après la prise d’Avranches et de Pontorson. (Dom Morice, Hist. de Bretagne, Preuves, t. II, p. 1104-1105.) Il est probable qu’il servit sous le même Richard en Poitou, quand celui-ci vint soutenir par les armes les prétentions de son frère sur Parthenay. Richard de Bretagne, comte d’Étampes, fut d’ailleurs seigneur de Châteaumur et d’Aizenay (voy. notre vol. précédent, p. 194 n., 258 n., 307 n.), et ses Bretons occupèrent plusieurs années les places de Palluau et des Essarts, confisquées sur Isabelle de Vivonne, veuve de Charles d’Avaugour.

, son frere, cappitaine dudit lieu. Et dist audit Boylesve le dit Nepveu, qui ne se pensoit à aucun mal, mais seulement que à faire audit Rondeau plaisir, que les diz Rondeau et son dit compaignon estoient à la porte, et lui pria qu’il lui pleust donner congié audit Rondeau et à son dit compaignon d’entrer dedens la dicte place et leur faire ouvrir la dicte porte. Lequel Alain Boylesve respondi et dist ces motz ou semblables : « Regnault, je me rapporte bien à vous de les mettre seans, mais croiez que s’ilz ne font chose qui ne soit bonne, que vous en respondrés ». A quoy le dit Regnault respondit qu’il en estoit content ; et après la dicte response et parolles, le dit Regnault retourna à la porte, laquelle il ouvry audit Alain Rondeau et Surville, son compaignon, lesquelz entrerent dedens la dicte forteresse, et les mena le dit Regnault Nepveu à sa maison, en la quelle il les fist boire et manger, et leur fist très bonne chiere ; et beurent et mangerent les diz Rondeau et Seurville en plusieurs autres lieux, tant en l’ostel de l’abbé de l’Isle Chauvet

L’Isle-Chauvet, tout près du Bois-de-Céné, était une ancienne abbaye de l’ordre de Saint-Benoît, sous le vocable de Notre-Dame de l’Assomption, au diocèse de Luçon. Les seigneurs de la Garnache étaient ses principaux bienfaiteurs. La liste des abbés fournie par la Gallia christiana est fort incomplète. Entre Guillaume vivant en 1437 et Alain Loret, nommé dans un acte de 1468, elle n’en mentionne aucun. (T. II, col. 1432.) L’abbé Aillery en indique un autre sous l’année 1448, Jacques Touzeau, qui pourrait être l’abbé dont il est question ici. (Pouillé de l’évêché de Luçon, in-4°, 1860, p. xxxi.)

que aillieurs ; [lequel abbé] leur donna à boire de son vin et lui habandonna largement de ses biens, et leur donna de l’avoinne pour leurs chevaulx. Aussi leur en avoit donné ledit Regnault. Lequel abbé avoit en son hostel, audit lieu de la Ganasche, ung enfant natif d’Alemaigne que on lui avoit baillé pour son serviteur et aussi afin que le dit enfant, qui estoit filz d’un riche marchant dudit païs d’Alemaigne, aprint à parler le langaige françoys. Pendant lequel temps que les diz Rondeau et Surville estoient audit lieu de la Ganasche, le dit Seurville, compaignon dudit Alain Rondeau, qui estoit d’Alemaigne, comme dit est, parla audit enfant et tant fist qu’il le induist, et promist audit Seurville soy en aler avecques lui en la guerre. Et le dit jour de mardi, environ souleil couchant le dit enfant yssy de la dicte ville de la Ganasche et s’en ala ès diz faux bours, en la maison en laquelle estoient les chevaulx des diz Alain Rondeau et Surville, pour soy en aler avecques eulx. Laquelle chose venue à la congnoissance dudit abbé, qu’ilz emmenoient le dit enfant à la guerre, le dit abbé qui estoit obligé le rendre à ses parens et amis, sur peine de certaine grosse somme d’or, fut très grandement doulant et courroucié. Incontinent se transporterent par devers le dit Allain Boylesve, qui avoit le dit gouvernement de la dicte place et forteresse de la Ganasche, en soy complaignant, et lui dist que Alain Rondeau et son compaignon, qu’il avoit mis en la dicte place, emmenoient son petit alement, et qu’il estoit obligé à le rendre à ses parens et amis, et le pria que, s’il se povoit faire, il le lui fist recouvrer. Après lesquelles parolles et complainte dudit abbé, le dit Alain Boylesve dist audit Regnoust Nepveu qu’il avoit fait entrer en la dicte forteresse, à sa requeste, son cousin Alain Rondeau et l’autre qui estoit avec lui, et qu’il lui avoit dit que, s’ilz faisoient aucune chose de mal, qu’il le repareroit, et qu’ilz emmenoient le petit alement de l’abbé de l’Isle Chauvet, qui est filz d’un riche marchant, et estoit le dit abbé obligé de le rendre à ses amis, et que tout ce mal est [venu] par le dit Regnault, suppliant, et qu’il advisast quel remede il y pourroit mettre. Lequel Regnault, suppliant, soy voyant ainsi chargé et que par bonne amour il avoit fait entrer les dessus diz en la dicte ville, et fut de ce très grandement desplaisant et dolent, parce que on lui donnoit charge d’avoir esté cause de ce que les diz Rondeau et Surville emmenoient le dit enfant, par l’entrée que à iceulx Rondeau et de Surville avoit fait en la ville et forteresse de la Ganasche, et à la requeste dudit Regnault, suppliant ; lequel courroucié ainsi fort et tout esmeu de desplaisir et courroux, monta à cheval, avec lui ungautre nommé Conan de Vielchasteau

Conan de Vieuxchâteau ou du Vieuxchâtel, breton, figure comme homme d’armes sur le rôle de la montre passée à Montfort, le 27 juin 1420, des chevaliers, écuyers, hommes d’armes, archers et arbalétriers de la retenue de Jean de Penhoët, amiral de Bretagne, assemblés pour la délivrance du duc Jean V, prisonnier du comte de Penthièvre et de Charles d’Avaugour. Le 5 septembre 1436, le même Conan fit serment de fidélité à Gilles de Raiz, sr de Pouzauges, en qualité de capitaine du château de Saint-Étienne-de-Malmort, auj. Mermorte. (Dom Morice, Hist. de Bretagne, in-fol., Preuves, t. II, col. 1014, 1294.)

pour recouvrer le dit enfant, et chevaucherent fort et redement, et tant firent que, environ jour faillant ou plus nuit, ilz aconceurent les diz Alain Rondeau et Jehan Seurville, son compaignon, et le dit enfant avecques eulx, bien à deux lieues loing dudit lieu de la Ganasche. Et ainsi que le dit Regnault, qui chevauchoit le premier devant le dit Veilchasteau, vint sur les diz Alain Rondeau et Jehan Surville, se adressa audit Surville qui estoit celui qui avoit induit le dit enfant, et frappa le dit Surville d’une javeline par l’espaule senestre, non cuidant le blecier à mort, et print le dit enfant. Après lequel cop ainsi frappé, le dit Regnault et Conan s’en retournerent et emmenerent audit lieu de la Ganasche le dit enfant avecques eulx, et les diz Rondeau et Surville alerent autre part, et se rendirent à coucher à l’ostel de la Rondeliere, qui est bien à ung quart de lieue loing du lieu où fut frappé le dit cop, et demoura le dit Surville malade, tant audit lieu de la Rondeliere que à la Bademouriere par certains jours. A l’occasion du quel cop, environ le viime jour après, le dit Surville, par deffault de gouvernement ou autrement, ala de vye à trespassement. A l’occasion duquel cas, le dit Regnault, doubtant pugnicion et rigueur de justice, n’ose bonnement converser ne demourer seurement au païs, et est en voye de soy absenter d’icellui, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu qu’il est homme de bon fasme, renommée et honneste conversacion, non actaint ou convaincu d’aucun villain cas, blasme ou reprouche, que ledit suppliant avoit esté cause et occasion de faire les diz Rondeau et Surville entrer en la dicte [ville], et que pour la charge que lui donna le lieutenant dudit lieu de la Ganasche d’avoir esté cause dont le dit enfant alement avoit esté emblé audit abbé, il fut esmeu et desplaisant pour ce que, soubz umbre de bonne foy et de cuider faire plaisir audit Rondeau, et cuidoit que le dit Rondeau feust venu en la dicte ville de la Ganasche pour veoir la femme dudit suppliant et autres ses parens et amis, qu’il ne cuidoit pas tuer le dit Surville et frappa le dit cop de la javeline de chaude colle et de plain bont qu’il fut arrivé sur les diz Surville et Rondeau, que les premiers mouvemens ne sont pas en la puissance de l’omme, il nous plaise sur ce lui impartir icelles. Pour quoy nous, attendu ce que dit est, etc., audit suppliant avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces presentes aux seneschaux de Poictou et de Xaintonge, gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou moys de may l’an de grace mil cccc. quarante et quatre, et de nostre regne le xxiime.

Ainsi signé : Par le conseil. P. Pichon. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MLXVI Août 1444

Rémission en faveur de Jean de Noyers, écuyer, coupable d’un meurtre.

AN JJ. 177, n° 3, fol. 1 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 185-187

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan de Noyers, escuier, aagé de xxxv. ans ou environ, chargié de femme et de sept petiz enfans, contenant que, environ la feste de saincte Katherine derreniere passée, le dit suppliant leva et acueilly ung nommé Laurens Jagueneau et Simonne Girardelle, sa femme, pour demourer en son hostel et le servir jusques à la feste saint Jehan Baptiste lors ensuivant et derreniere passée ; lesquelx Laurens et sa femme promisdrent servir le dit suppliant et sa femme bien et convenablement jusques audit terme, en les paiant de leurs salaires sur ce promis et accordé entre eulx, mais ce non obstant, le dit Laurens, qui est homme de legier couraige et de sa voulenté n’a peu parachever son dit service et s’en est alé sans le congié du dit suppliant, et sans avoir fait que la moitié de son dit service ou environ, et delaissa sa femme en l’ostel d’icellui suppliant, laquelle y a parachevé et demouré tout le temps de son dit service et certain temps oultre. Et il soit ainsi que, le xxime jour de juillet derrenier passé, la dicte Simonne, femme dudit Laurens, estant en ung champ appartenant audit suppliant, où elle seyoit des blez avec plusieurs autres, survindrent illec Guillemete Girardelle, mere, et le dit Laurens, mary d’icelle Simonne, lesquelx avoient chascun ung gros baston en leur main ; et incontinant qu’ilz furent près de la dicte Simonne, commancerent à frapper sur elle des diz bastons tant qu’ilz peurent. Et durant ce debat, le dit suppliant, qui venoit d’une sienne maison ou hostel appellé le Pas, arriva sur eulx et ne savoit riens de ce que dit est. Et si tost que la dicte Simonne vit icellui suppliant, couru vers lui en cryant et disant telles paroles ou semblables : « Monseigneur, ne me laissez pas batre ». Et adonc le dit suppliant leur demanda pourquoy ilz la batoyent ; lesquelx ne lui vouldrent dire la cause, ains frappoient tousjours sur elle, en disant plusieurs injures audit suppliant. Lequel indigné et courroucié tant de la dicte bateure que des dictes injures, se tray vers une haye ou closture de blez, parce qu’il n’avoit point de baston, et tira de la dicte haye ou closture ung baston, et incontinant qu’il ot ledit baston, s’aprocha des diz Guillemete, mere, et Laurens, mary de la dicte Simonne, qui incessanment frappoient sur icelle Simonne, en disant injures audit suppliant. Et quand le dit Laurens vit le dit suppliant approchier de lui, s’en fouy et la dicte Guillemete demoura, qui tousjours disoit et continuoit les dictes injures audit suppliant. Et lors icellui suppliant qui estoit fort eschauffé et esmeu, frappa la dicte Guillemete deux cops dudit baston, telement qu’elle chey à terre, et ce jour mesme ou le landemain, par son mauvaiz gouvernement ou autrement, et mesmement qu’elle estoit aagée de cinquante à soixante ans ou environ, ala de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas ainsi avenu que dit est, le dit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du pays et n’y oseroit jamais retourner, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, et pour ce nous a humblement fait supplier et requerir que, attendu que en tous autres cas le dit suppliant s’est toujours bien et doulcement gouverné, sans avoir fait ou commis ne esté actaint d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, et n’a esté fait ledit cas de guet apensé, mais de chaude cole, nous lui vueillons sur ce impartir nos dictes grace et misericorde. Pour ce est il que nous, etc., audit suppliant, en faveur de ses diz femme et enfans, avons ou cas dessusdit quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Bar sur Aube, ou mois d’aoust l’an de grace mil cccc. quarante quatre, et de nostre regne le vint deuxiesme.

Ainsi signé : Par le conseil. Beauvarlet. — Contentor. P. Le Picart. Visa.

MLXVII Août 1444

Rémission accordée à Jean Buignon, écuyer, de la châtellenie de Vouvant, coupable d’homicide involontaire sur la personne de sa femme, Jeanne de la Touche.

AN JJ. 177, n° 4, fol. 2 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 187-189

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Jehan Buignon

Ce nom de Buignon, que l’on trouve aussi sous la forme Beugnon ou du Beugnon, a été porté par plusieurs familles dont l’origine n’a pas été exactement déterminée. Il a été question dans notre précédent volume, p. 316 note, d’un Guillaume Buignon, fils de Jean, qui rendit hommage au connétable de Richemont, le 31 mars 1428, pour son hébergement du Plait en la paroisse de la Peyratte, mouvant de Parthenay ; mais l’on ne saurait dire s’il appartenait à la même famille que les Buignons, seigneurs de la Fauconnière, en la châtellenie de Vouvant, nommés dans cet acte d’août 1444. A la même époque vivait un autre Jean Buignon, demeurant à Mirebeau, paroisse Notre-Dame, qui avait épousé Guillemette Reppin, veuve en premières noces de Guillaume Martin, dit Pasquaut, et était en procès, au sujet du douaire de sa femme, avec les deux enfants du premier lit de celle-ci, Pierre Pasquaut et Jeanne, mariée à Guyot de Redon. (Accord du 23 mai 1421, Arch. nat., X1c 121.) Le même passa encore, le 20 octobre 1429, une transaction avec Pierre Tetereau, de Blalay. (Id., X1c 138.) Quant aux srs de la Fauconnière, à l’aide des quelques notes recueillies par MM. Beauchet-Filleau, on peut établir une partie de leur filiation. Nicolas Buignon, sr de la Fauconnière, fils de Guillaume, habitant la paroisse de Menomblet, dont l’existence est constatée le samedi avant la S. Cyprien 1379, dans un acte reçu par le garde du sceau de Vouvant, parmi les témoins duquel figure un Jean Buignon, était évidemment l’ancêtre de celui à qui furent accordées ces lettres de rémission. Des huit enfants de ce dernier et de Jeanne de la Touche, on en connaît au moins trois : Guillaume, nommé ici, Jean, l’aîné, mort avant 1497, et Jacques, qui hérita de lui. Celui-ci, qualifié écuyer, sr de la Fauconnière, dans son testament daté du 16 avril 1497, avait eu une fille, Huguette, qui avait épousé Constantin de Saint-Simon. Veuf en 1499, ce dernier était alors en instance, au nom de ses enfants mineurs, pour faire annuler le testament de son beau-père, qui avait légué ses biens patrimoniaux à Regnaut de Meulles, écuyer, sr du Fresne. (Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. I, p. 518, 519.)

, l’ainsné, escuier, de la chastellerie de Vouvent en Poictou, chargié de huit enfans, contenant que le dit Buignon est né et extrait de noble lignée, et fut jà pieçà conjoinct par mariage à une nommée Aumoins (sic) de l’ostel de la Forest sur Seyvre, qui depuis est alée de vie à trespassement ; et après fut marié secondement à Jehanne de la Tousche, ou quel mariage ilz ont demouré par long temps, durant lequel ilz ont eu grant amour ensemble et se sont maintenuz ou dit mariage bien et honnorablement, ainsi qu’il appartient de faire ; et a eu la dicte Jehanne viii. enfans, lesquelz sont tous en vie et la plus part d’eulx sont encores mineurs, et aucuns en pupilarité. Et il soit ainsi que, le xviime jour du mois de juillet derrenier passé, le dit Jehan Buignon, l’ainsné, estant au lieu de la Fouconniere, dont il est seigneur, vit que Guillaume Buignon, l’un de ses enfans, faisoit certaines choses qui estoient à sa desplaisance, et pour ce l’en voult chastier, comme faire devoit ; et ainsi qu’il batoit ou vouloit batre son dit enfant, la dicte Jehanne de la Tousche, sa femme et mere dudit enfant, illec present, ayant pitié de luy, comme mere, s’efforça de vouloir oster audit Jehan Buignon, son mary, icellui enfant, et en ce faisant icellui Buignon, lequel avoit un costeau en sa main, ainsi que la dicte de la Tousche bota ledit Buignon pour rescourre le dit enfant, mist le dit couteau entre deux et au devant de sa dicte femme, et telement qu’il la frappa dudit coteau jusques au près du cuer, ce qu’il ne cuidoit pas faire. Et en fut très doulant et courroucié, et encores est ; et tantost après, icelle Jehanne de la Tousche ala de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas ainsi avenu, comme dit est, le dit Jehan Buignon, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du pays et a delaissié et habandonné ses diz enfans, et n’y oseroit jamais retourner, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties. Et pour ce nous ont les diz supplians humblement fait requerir que, attendu que en tous autres cas il s’est bien et doulcement gouverné, sans avoir fait ou commis, ne esté actaint ou convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reproche, la grant amour qui estoit entre le dit Jehan Buignon et la dicte Jehanne de la Tousche, sa femme, et que le dit cop a esté par fortune et aventure et en chaude cole, et non pas de propoz deliberé, si comme iceulx supplians dient, nous vueillons sur ce impartir audit Jehan Buignon nos dictes grace et misericorde. Pour ce est il que nous, les choses dessusdictes considerées, voulans misericorde estre preferée à rigueur de justice, audit Jehan Buignon, ou cas dessus dit et en faveur de ses diz enfans, avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes aux seneschal de Poictou, bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d’Anjou et du Maine, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Bar sur Aube, ou mois d’aoust l’an de grace mil cccc. quarante quatre, et de nostre regne le vint deuxiesme.

Ainsi signé : Par le conseil. Beauvarlet. — Contentor. P. Le Picart. Visa.

MLXVIII Août 1444

Rémission en faveur de Gillet Bezançon, serviteur de Louis de La Trémoïlle, comte de Joigny

Il était fils de Guy de La Trémoïlle, comte de Joigny, baron de Bourbon-Lancy, sr d’Antigny, Usson, etc., mort en 1438, et de Marguerite de Noyers, héritière du comté de Joigny. Il participa aux premières opérations du siège de Pontoise, mais prit congé de Charles VII et se retira avec ses gens d’armes (août 1441) un mois avant la prise de cette ville. (De Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. III, p. 188.) Louis comte de Joigny mourut vers 1467, sans avoir été marié.

, chambellan du roi, coupable de meurtre sur Henriet Toullon, sergent dudit comte à Bourbilly près Semur en Auxois, qu’il avait surpris la nuit avec ses complices en train de vider l’étang de Bourbilly, pour en prendre le poisson. « Donné à Paris, ou mois d’aoust l’an de grace mil cccc. xliiii, et de nostre regne le xxiie, pourveu que ledit Gilet suppliant tendra prison fermée en noz prisons ou dit bailliage de cy à deux mois, au pain et à l’eaue. »

AN JJ. 176, n° 142, fol. 85 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 190

MLXIX Novembre 1444

Rémission accordée à Louis de Brachechien, écuyer, pour le meurtre de Jean Moreau, avec lequel il s’était pris de querelle.

AN JJ. 177, n° 19, fol. 10 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 190-192

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Loys de Brachechien

Un Louis de Brachechien, très probablement le même, était en 1430 seigneur de la Poupardière en Saint-Marsault (B. Ledain, Hist. de Bressuire, p. 239) et rendait, le 30 août 1452, un aveu au seigneur de Lesmantruère pour sa seigneurie de la Baudouinière. Vers la même époque, il est dit mari de Jeanne Boussiron. Les Brachechien étaient une famille d’ancienne noblesse du Bas-Poitou, éteinte au xviie siècle. (Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., t. I, p. 720.)

, escuier, seigneur dudit lieu, natif de nostre païs de Poictou, contenant que, le dixiesme jour d’octobre derrenier passé ou environ, ainsi qu’il aloit veoir de son hostel certaines pieces de terres et autres ses heritages, il trouva ung appellé Jehan Moreau

Un Jean Moreau, écuyer, seigneur de la Mosnerie, marié à Marguerite Pain, possédait en 1440 le fief de la Dreille en Moncoutant et la sergenterie fieffée dudit lieu de Moncoutant. (Ledain, Hist. de Bressuire, p. 405, 411.) Était-ce un autre voisin de mêmes nom et prénom, ou doit-on l’identifier avec la victime de Louis de Brachechien ? L’on a vu ci-dessus qu’un Jean Moreau faisait partie, en avril 1431, de la compagnie de Jean de La Rochefoucauld, sr de Barbezieux (p. 16.)

et ung sien varlet, qui labouroient ou achevoient de labourer une piece de terre joignant à une autre qui estoit sienne, et ressyonnoient ou mengoient après disner. Ausquelz il demanda s’ilz avoient riens prins du sien. Et sur ce s’entreprindrent de paroles rigoreuses, lui et le dit Moreau, telement que icellui suppliant, qui avec soy n’avoit porté dague, espée, coutel ne baston, print le coutel dudit Moreau, dont il coppoit son pain, et aussi le dit Moreau print sont aguillée de quoy il touchoit ses beufz, et le rompi en deux, et print la plus grosse piece ou avoit du fer au bout, pour nettoyer sa charrue ou areau, et corurent sus l’un à l’autre, et se entreprindrent au corps. Et en ce faisant, le dit suppliant en embrassant le dit Moreau, ou au moins eulx estans ainsi embrassez, le frappa du dit couteau, tant par le visage, par le costé, que par derriere. Lequel tantost demanda le prestre, qui lui fut alé querir, et après qu’il eut esté confessé, des diz cops ala de vie à trespassement, combien que, en eulx ainsi debatant le dit Moreau ou son dit varlet donnerent au dit suppliant ung ou pluseurs cops de baston sur la teste, telement qu’ilz lui firent une grant playe. Pour occasion duquel cas, icellui suppliant, qui est chargé de femme et de dix enfans, dont il y en a quatre bien petiz, et en tous autres cas s’est bien gouverné, sans avoir esté actaint ne convaincu d’aucun villain cas, blasme ou reprouche, s’est absenté du païs et n’y oseroit jamais retourner, doubtant punicion et rigueur de justice, se par nous ne lui estoient sur ce noz grace et misericorde imparties, humblement requerant iceulx. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, à icellui avons le fait et cas dessusdit, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, quicté, remis et pardonné, etc., parmy ce toutesvoies qu’il a paié comptant en nostre chancellerie la somme de dix escuz d’or courans à present, pour convertir en prieres et oroisons et autres euvres charitables pour l’ame dudit deffunct. Sy donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Nancey en Lorraine, ou mois de novembre l’an de grace mil cccc. xliiii, et de nostre regne le xxiiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du grant conseil. Chaligault. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MLXX Décembre 1444

Rémission accordée à Jean Couillart, de Jarzay, qui, en prenant fait et cause pour sa femme, avait frappé à mort le père de celle-ci, Huguet Lahou.

AN JJ. 176, n° 356, fol. 259 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 192-194

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receu la supplicacion de Jehan Couillart, povre homme, laboureur du lieu de Jarzey ou bailliage de Touraine

C’est Jarzay en Mirebalais. Le village dépendait anciennement de la paroisse de Craon ; le fief et la haute justice relevaient de la baronnie de Mirebeau.

, chargié de femme et de plusieurs petiz enfans, contenant que à certain jour, environ la feste de Toussains derreniere passée, feu Huguet Lahou, pere de la femme dudit suppliant, lequel estoit yvre et fort eschauffé, ala en l’ostel d’icellui suppliant, où estoit sa dicte femme, à laquelle il demanda bien impetueusement aucunes paelles et utenciles d’ostel, qu’il disoit qu’elle avoit, et elle lui respondi bien doulcement et humblement, comme à son pere, qu’elle n’en avoit nulles et ne savoit que c’estoit. Et le dit feu Huguet en jurant et faisant grant serement, lui dist qu’elle les lui bailleroit ou il la batteroit tant qu’il la fouleroit de coups, et durant leurs paroles et debat, survint ledit suppliant, qui demanda audit feu Huguet que c’estoit qu’il demandoit à sa dicte femme, et il lui respondi qu’il lui demandoit des utenciles, et qu’elle les lui bailleroit, ou la bateroit tant qu’il la feroit morir, ou paroles en substance, dont le dit suppliant fut mal content, et dist au dict deffunct qu’il ne la bateroit point et qu’elle n’estoit plus en son chastiement ; et icellui deffunt dist que si feroit et le dit suppliant avec, se il en parloit. Et de fait tira tantost ung grant coustel qu’il avoit pendu à sa sainture, et le dit suppliant et sa dicte femme, voulans et cuidans evader la fureur et male voulenté dudit feu Huguet, se encommancerent à fuir, et icellui feu Huguet après eulx, tenant son dit coustel nu, et en fuiant le dit suppliant trouva ung croq à nestoier les bestes ; et quant il vit qu’il ne povoit plus fuir, doubtant que le dit deffunct le tuast et sa dicte femme, ou l’un d’eulx, retourna contre icellui deffunct qui estoit homme noiseux, yvrongne et rioteux, et dudit croq le frappa seulement ung cop sur la teste à effusion de sang, dont le dit deffunct chey à terre, et après en fu relevé et sa playe appareillée par ung barbier. Et le jour mesme par son yvresse il se desappareilla et osta ce que on y avoit mis sur icelle playe ; et pour cuider courir sus audit suppliant et à sa dicte femme, yssy hors de son hostel et commança à seignier plus fort que paravant, et tellement que à l’occasion du dit coup et par son petit gouvernement il trespassa le lendemain. Et ledit povre suppliant se absenta, pour doubte de rigueur de justice, et furent tant pou de biens qu’il a arrestez et mis en main de justice, et est en voye que lui et sa dicte femme et leurs petiz enfans soient desers et mandians à tousjours, se nostre grace et misericorde ne lui est impartie, requerant humblement, etc. Pour quoy nous, attendues ces choses, voulans misericorde preferer à rigueur de justice et ayans pitié et compassion des diz femme et petiz enffans, audit Jehan Couillart suppliant avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au bailli de Touraine et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou mois de decembre l’an de grace mil cccc. xliiii, et de nostre regne le xxiiie.

Ainsi signé : Par le conseil. Valengelier. — Visa. Contentor. M. de la Teillaye.

MLXXI Décembre 1444

Lettres de rémission en faveur de Guillaume Prioux, marchand boucher, demeurant à Etables, qui en se défendant avait frappé mortellement un nommé Guillaume Barbotin.

AN JJ. 177, n° 23, fol. 12 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 194-197

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Guillaume Prioux, marchant boucher, natif de la chastellenie de Mirebeau, chargié de jeune femme et de six petis enfans, contenant que, le xvime jour d’aoust derrenier passé ou environ, il se party du lieu d’Estables, où il demouroit, pour aler ou village de Pousieux qui en distoit d’un quart de lieue ou environ, pour ses besongnes et affaires, et en sa compaignie ung appellé Guillaume Orriau, dit Petit, et en y alant, passerent par devant la maison d’un appellé Jehan Gantourneau, devant laquelle estoit la femme d’icellui Gantourneau, qui leur demanda où ilz aloient. Lesquelz lui dirent qu’ilz aloient au dit lieu de Pousieux. Et lors elle leur dist que en sa maison avoit gens qui aussi y vouloient aler, et se boterent en ladicte maison où ilz trouverent deux femmes, l’une appellée Guionne Maillete, autrement dicte la Palotiere, et l’autre femme de Guillemin l’Escossays, qui buvoient ensemble, et se mirent à boire avecques elles ; et après s’en alerent ou dit village de Pousieux, en l’ostel d’un appellé Perrin Blandin, cuidans qu’il y eust vin à vendre. Et pour ce qu’il n’en y avoit point, en envoierent querir à la taverne, et après ce que eulx et ung appellé Perrinet de Preaux, qui se mist avecques eulx, eurent beu, le dit suppliant dist aux autres de la compaignie qu’il vouloit aler au village du Brueil, et les dictes femmes et autres de la dicte compaignie dirent que aussi vouloient ilz. Et tantost se mirent les dictes femmes et le dit Perrinet de Preaux à chemin et se rendirent audit lieu du Brueil, en l’ostel du dit Guillemin l’Escossays. Auquel lieu ledit suppliant et le dit Guillaume Orriau, après ce qu’ilz eurent fait leurs besongnes ou dit village de Pousieux, alerent et trouverent les dictes femmes et le dit Perrinet de Preaux, qui avoient appareillé à soupper. Et après ce qu’ilz eurent souppé ensemble, issirent de la dicte maison les diz suppliant, Orriau et Perrinet, et aussi la dicte Palotiere. Et illec survint le dit Perrin Blandin, qui parla en secret à icelle Palotiere. Et lors iceulx suppliant, Orriau et Perrinet se acheminerent pour eulx en retourner audit lieu d’Estables, chascun en sa maison, et entreprindrent qu’ilz passeroient par devant l’ostel de la Papinere, où demouroit le dit Perrinet. Et ainsi qu’ilz s’en aloient, les diz Perrin Blandin et la dicte Palotiere se mirent de rechef en leur compaignie ; et quant ilz furent devant l’ostel dudit Perrinet, nommé la Papinere, le dit suppliant dist qu’il oyoit gens venir à cheval. Et lors icelle Palotiere lui dist que elle croyoit que ce feust Jehan Miole, prebstre, qui la venoit querir, et se mirent en la court dudit lieu de la Papinere, et tantost vint icellui Miole, acompaigné de Guillaume Barbotin, qui avoit espousée sa suer, et parlerent audit Perrinet de Preaux et Perrin Blandin. Et tantost que la dicte Palotiere les entendi, elle sailly hors, et après elle ledit suppliant. A laquelle le dit Miole demanda se elle vouloit aler avecques lui ; laquelle lui respondi que oy. Et lors il dist au dit Perrinet de Preaux qu’il la montast derriere lui, lequel lui dist que non feroit, car elle pesoit trop ; et tantost le dit suppliant dist qu’il la monteroit bien, et de fait la mist à cheval derriere icellui prebstre. Et quant il l’eut montée, il dist audit prebstre qu’il leur donnast le vin, et print son cheval par la bride, dont icellui prebstre ne fut pas bien content, et par très grant despit fut par aucun temps en regardant le dit suppliant, sans lui mot dire, et après en jurant et detestant Dieu lui dist que, se il lui en demandoit plus riens, il lui fendroit de son espée la teste jusques aux dens. Et lors le dit suppliant, voyant le dit prebstre ainsi mal meu, lascha la bride du cheval, et se mirent à chemin lui et le dit Orriau, pour eulx en aler ; et après eulx vint le dit Perrinet de Preaux. Et quant ilz eurent cheminé ainsi comme ung gect de pierre, retournerent de rechief devant l’ostel d’icellui Perrinet, où ilz trouverent encores le dit Miole, prebstre, Guillaume Barbotin, son serourge, et la dicte Palotiere. Et incontinant icellui prebstre sans mot dire, son espée au poing toute nue, courut sus audit suppliant, et de fait l’eust villenné, se ce ne feust ce que il se reculoit, contregardoit tousjours en lui disant qu’il ne le voulsist fraper ne blecier. Et quant il vit que le dit prebstre ne se vouloit cesser, il trouva maniere de soy joindre au corps dudit prebstre, et lui osta la dicte espée. Et lors le dit Guillaume Barbotin, serourge d’icellui prebstre, print des pierres et les gecta contre le dit suppliant, pour le cuider fraper par la teste ou ailleurs, et avec ce print ung baston et en frapa ledit suppliant sur le braz ; lequel, soy voyant ainsi frappé, couru sus audit Barbotin, lequel se mist en la maison dudit Perrinet, voulant tousjours dudit baston frapper le dit suppliant, lequel en rabatant les coupz d’icellui baston ou autrement, frapa le dit Guillaume Barbotin de la dicte espée sur la teste ung seul coup, duquel icellui Barbotin, huit jours après ou environ, ala de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas, le dit suppliant qui en tous autres cas s’est bien et doulcement gouverné, sans avoir esté actaint ne convaincu d’aucun villain cas, blasme ou reprouche, s’est absenté du pays, et n’y oseroit jamais retourner, doubtant pugnicion et rigueur de justice, par quoy ses femme et enfans seroient en avanture de venir à mandicité, se sur ce ne lui estoient noz grace et misericorde impartiz, si comme il dit, requerant humblement iceulx. Pour quoy nous, ces choses considerées, etc., à icellui suppliant, etc., avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, aux seneschal de Poictou et bailli de Touraine, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Nancey le Duc, ou moys de decembre l’an de grace mil iiiic xliiii, et de nostre regne le xxiiie, soubz nostre seel ordonné en l’absence du grant.

Ainsi signé : Par le conseil. J. Aude. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MLXXII Janvier 1445

Rémission accordée à Philippe Dandonelle, femme de Jean Meschinot, demeurant à Pouzauges, poursuivie par les officiers du lieu pour infanticide.

AN JJ. 177, n° 26, fol. 14 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 197-200

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue la supplicacion des parens et amis charnelz de Philippe Dandonelle, femme de Jehan Meschinot

M. Vallet de Viriville, dans un article de la Nouvelle biographie générale sur le poète français Jean Meschinot, auteur de satires contre Louis XI, grand-maître d’hôtel et poète d’Anne de Bretagne (né vers 1415, mort le 12 septembre 1491), a proposé l’identification de ce personnage avec notre Jean Meschinot, de Pouzauges, et il donne en note un résumé des présentes lettres de rémission, avec commentaires (t. XXXV, p. 140). Récemment M.A. de La Borderie a combattu les conclusions de son devancier et démontré que le poète Meschinot était fils de Guillaume, seigneur des Mortiers, fief situé en la paroisse de Monnières et relevant de la baronnie de Clisson. « Cette situation des Mortiers bien constatée, dit-il, confirme pleinement l’extraction bretonne de notre poète, sa résidence originelle et constante au pays nantais, et coupe court par conséquent aux tentatives d’assimilation qu’on a voulu faire entre lui et un Jean Meschinot, originaire du Poitou (cette origine n’est pas affirmée dans la rémission), possessionné et domicilié à Pouzauges, lequel eut en 1444 des aventures conjugales fort peu enviables. Nulle preuve même que ce Meschinot et le nôtre fussent de la même famille. » (Jean Meschinot, sa vie et ses œuvres, ses satires contre Louis XI, dans la Bibliothèque de l’École des chartes, t. LVI, 1895, 1re livraison, p. 104.)

, demourant à Pousauges, en nostre pays de Poictou, contenant que la dicte Philippe Dandonelle, qui oncques mais n’avoit esté mariée, fut conjoincte par mariage avec le dit Jehan Meschinot, environ la feste de Nostre Dame de my aoust derreniere passée, et combien que, au temps dudit mariage et bien long temps paravant, la dicte Philippe feust grosse et enxaincte d’enfant, et d’autre homme que dudit Jehan Meschinot, neantmoins elle le tint si couvertement que oncques le dit Jehan Meschinot n’en sceut ne n’en apparceut aucune chose, tant pour la honte et vergongne qu’elle craignoit encourre du peuple, que aussi par la malice qu’elle doubtoit que lui en donnast ou peust donner son dit mary, et en cestui point se tint si couvertement, jusques au mardi après la feste de Toussains ensuivant et derrenierement passée, que elle, estant ou lict en la compaignie de son dit mary, par devers le soir, qu’il fut endormy, enfanta d’une fille au desceu de son dit mary, la quelle incontinant elle la baptiza au mieulx qu’elle peut ; et ce fait, pour le doubte et craincte qu’elle avoit de son dit mary, honte et vergongne de ce qu’elle estoit nouvellement mariée, et pour cuider couvrir son forfait, print l’enfant à travers à une de ses mains à la teste et de l’autre à la gorge et telement qu’elle le occist. Et ceste chose fist en telle maniere que son dit mary n’en sceut riens, jusques à ce que aucuns [qui] avoient sceu secretement ou autrement, paravant ou après ledit mariage, qu’elle estoit enxaincte et presque preste d’accoucher, et se merveillerent bien comment elle estoit ainsi delivrée et que estoit devenu sa grosse. Pour laquelle cause, la dicte Philippe fut prinse par les gens et officiers du seigneur dudit lieu de Pousauges

Après l’exécution de Gilles de Raiz (26 octobre 1440), qui était seigneur de Pouzauges du chef de Catherine de Thouars, sa femme, celle-ci se remaria avec Jean II de Vendôme, chevalier, vidame de Chartres, auquel elle apporta ladite seigneurie. Ce Jean de Vendôme est qualifié seigneur de Pouzauges dans deux actes, l’un du 26 mai 1447, l’autre du 21 octobre 1452, relatifs à un différend qu’il eut avec l’abbé et les religieux de la Grenetière, à l’occasion d’une rente de cinquante setiers de blé, léguée à ladite abbaye par feu Marie de Thouars, dame de Pouzauges, sœur de Catherine, sur la châtellenie de Beaurepaire. (Coll. dom Fontenau, t. IX, p. 301, 303.) Du premier lit, Catherine de Thouars n’avait eu qu’une fille, Marie de Laval, dame de Raiz, qui épousa : 1° Prégent de Coëtivy, sr de Taillebourg, amiral de France ; 2° André de Laval, sr de Lohéac, aussi amiral et maréchal de France, et mourut le 1er novembre 1458, sans laisser d’enfants. De son second mariage, la dame de Pouzauges, qui vivait encore en 1460, eut un fils et une fille. Jean III, vidame de Chartres, bailli de Berry, fut seigneur de Pouzauges après la mort de son père et de sa mère ; il décéda postérieurement au 24 février 1482 n.s. (Le P. Anselme, Hist. généal., t. III, p. 632.)

, et mise en leurs prisons, enquise et interroguée sur ledit cas, ainsi qu’ilz virent à faire ; la quelle, après plusieurs interrogatoires et questions qu’elle avoit fait de la dicte grosse, leur dist et confessa le dit cas estre avenu et avoir esté fait par la maniere devant dicte. Et combien que la dicte femme soit jeune femme, de bonne et honneste conversacion en tous autres cas, et sans oncques mais en avoir esté actaincte ne convaincue, et que son dit mary l’ait tousjours eue et ait en très grant amour, non obstant le cas dessus dit, sur l’esperance qu’il a que le temps avenir elle lui soit bonne et loyalle femme, toutesvoyes les gens et officiers dudit lieu de Pousauges pour le dit cas l’ont detenu et detiennent prisonniere à grant povreté et misere de son corps, et en grant dangier de miserablement finer ses jours, se nostre grace et misericorde ne lui sont sur ce imparties, requerans humblement ses diz parens et amis charnelz que, veu sa jeunesse et que en tous autres cas elle s’est bien et preudommement gardée et gouvernée, et l’amour et alience qui, non obstant le dit cas, est entre elle et son dit mary, il nous plaise lui remettre et pardonner le dit cas et sur ce lui impartir nostre grace. Pour quoy nous, voulans misericorde estre preferée à rigueur de justice, à la dicte Philippe Dandonelle avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces presentes aux bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d’Anjou et du Maine, seneschal de Poictou, gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Nancey en Lorraine, ou mois de janvier l’an de grace mil cccc. quarante et quatre, et de nostre regne le xxiiime.

Ainsi signé : Par le conseil. Chaligaut. — Visa. Contentor. Ja. de la Garde.

MLXXIII Janvier 1445

Rémission octroyée à Antoine de La Maudaye, lieutenant de Parthenay, et à Maurice Pia. Ils avaient fait pendre sans jugement à la Ferrière en Gâtine un homme de guerre qui avait abandonné la compagnie du capitaine Adam de la Rivière et vivait sur le pays.

AN JJ. 177, n° 147, fol. 97 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 200-203

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Anthoine de la Maudeaye

Antoine de La Maudaye n’est pas autrement connu. Son nom n’est même pas mentionné par le savant auteur de l’histoire de Parthenay.

, escuier, et Morice Pia, contenant que, ou mois de decembre en l’an mil cccc. xliii. derrenier passé, et pour lors que nous envoyasmes à Grantville

En 1436, Granville n’était encore qu’un rocher presque tout environné de mer, où il n’y avait aucun édifice ni habitation, sauf une église dédiée à Notre-Dame qui était un lieu de pèlerinage très fréquenté et servait de paroisse à plusieurs villages et hameaux d’alentour. Les Anglais, alors complètement maîtres de la Normandie, créèrent en cet endroit « ville et chastel comme en la plus forte et avantaigeuse place et clef de pays par mer et par terre, que l’on peust choisir et trouver afin de tenir ledit pays de Normandie et les marches voisines en subgection ». Cette place ne leur servit pas longtemps. Elle fut, au milieu de l’année 1442, réduite en l’obéissance de Charles VII, qui y mit pour capitaine Jean de Lorraine, la fit emparer et fortifier à nouveau, et la munit abondamment de gens de guerre, d’artillerie et de vivres. En outre, par lettres données à Chinon en [mars] 1446 n.s., il octroya à tous ceux qui voudraient venir demeurer dans la nouvelle ville la concession gratuite de terrains à bâtir et l’exemption de toutes aides, tailles, emprunts, subventions et autres impôts quelconques. (JJ. 177, n° 164, fol. 110. Ordonnances, t. XIII, p. 459.) C’est de ces lettres que sont extraits les renseignements qui précèdent. « Richemont fondait de grandes espérances sur cette place, admirablement située pour favoriser les attaques dirigées de la Bretagne sur le Cotentin. Il mit donc à Granville une forte garnison sous Geoffroy de Couvran, Olivier de Broon et Adam de la Rivière, puis il revint à Parthenay, déc. 1443. » (E. Cosneau, Le connétable de Richemont, p. 345.)

entre autres capitaines Geuffroy de Couvran, chevalier, Olivier de Broon et Adan de la Rivière

Ces trois capitaines étaient originaires de Bretagne et au service d’Artur comte de Richemont. En 1449, Geoffroy de Couvran et Olivier de Broon conduisirent les cent lances du connétable à l’attaque de Saint-James de Beuvron, qui fut pris le 29 juin. Richemont récompensa le premier en lui donnant une pension annuelle de 100 écus d’or sur les revenus de la terre de Gavray. Dans des actes du 16 mars 1450 n.s. et du 8 octobre 1456, Couvran est qualifié capitaine de Coutances. (Bibl. nat., coll. Fontanieu, vol. 121-122 ; Pièces originales, vol. 919, dossier Couvran, n° 13.) Il combattit à Formigny à la tête d’une compagnie de cinquante lances des ordonnances. Olivier de Broon tenait garnison à Carentan, en 1449, et était capitaine d’une compagnie de quarante lances.

, capitaines de gens d’armes soubz nostre très chier et amé cousin le conte de Richemont, connestable de France, icellui nostre cousin commanda et ordonna de par nous audit Anthoine, lieutenant de Partenay, que, s’il trouvoit nulz des gens des diz capitaines qui, sans vouloir aler avec eulx, retournassent vivans et robans sur le pays, qu’il les preneist ou fist prendre comme gens habandonnez et les amenast à justice, pour en faire telle punicion et justice que au cas appartiendroit ; et que tantost après, lui feust rapporté qu’il y avoit des gens desdiz capitaines qui s’en retournoient, vivoient, sejournoient, roboient et prenoient sur le pays de Gastine, assez près dudit Partenay, ce que bon leur sembloit. Après lequel rapport, ledit Anthoine appella ledit Morice, en lui disant : « Vien t’en avec moy », monterent à cheval et s’en alerent savoir quelz gens c’estoient. Et quand ilz furent à Eron, trouverent deux hommes de guerre, l’un mareschal et l’autre trompette, qui se disoient estre à Adan de la Riviere, l’un des diz capitaines, qui estoit alé audit lieu de Grantville. Et pour ce qu’ilz s’en retournoient sans estre alez avec leur dit capitaine, ilz les prindrent et menerent jusques en ung villaige nommé la Ferriere en Gastine, et illec les baillerent en garde aux bonnes gens et s’en alerent savoir s’ilz en trouveroient plus nulz autres, et jusques au landemain qu’ilz retournerent audit lieu de la Ferriere. Et pour ce qu’ilz sceurent que les diz mareschal et trompette s’en alloient et avoient, comme l’on disoit, prins et receu gaiges et souldées pour aler audit lieu de Grantville, ouquel voiage ilz avoient habandonné leur dit maistre, et aussi que les bonnes gens du païs disoient qu’ilz estoient mauvaiz garnemens et feroient du mal beaucoup qui les en laisseroit aler, iceulx supplians firent pendre en ung grant chemin publicque, près dudit lieu de la Ferriere, la dicte trompette par ledit mareschal, son compaignon, à ung jour de mercredi, jour des Quatre temps devant Noel ou dit an. Et le jeudi ensuivant, laisserent aler le dit mareschal, et lui osterent ce qu’il avoit, comme personne habandonnée. Lequel se departist d’eulx et s’en ala où bon lui sembla, telement que oncques depuis n’en oyrent nouvelles. Et combien que ce qu’ilz en firent estoit pour faire et acomplir, comme il leur sembloit, ce que nostredit cousin le connestable avoit de par nous commandé et ordonné audit Anthoine, suppliant, neantmoins iceulx supplians doubtent que, pour occasion dudit cas et de ce qu’ilz firent la dicte execucion, sans mener à justice lesdiz malfaicteurs, ilz ne soient ou puissent estre et encourir en dangier de justice, se ilz n’en avoient de nous noz lettres de grace et remission, ainsi qu’ilz nous ont fait dire et remonstrer, en nous humblement requerant que, attendu ce que dit est et qu’ilz sont gens paisibles et de bonne renommée et honneste conversacion, sans oncques avoir esté reprins ne convaincuz d’aucun vilain cas, blasme ou reprouche, et que ledit Anthoine longtemps nous a servy en noz guerres à l’encontre de noz ennemys et adversaires, il nous plaise sur ce leur impartir nostre grace. Pour quoy nous, les choses dessus dictes considerées et que ce que les diz supplians firent en ceste partie fut et estoit fait, comme il leur sembloit, pour obeir à ce que nostre dit cousin le connestable leur avoit commandé et ordonné, etc., avons aus diz supplians et à chascun d’eulx, etc., remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Nancey en Lorraine, ou mois de janvier l’an de grace mil cccc. xliiii, et de nostre regne le xxiiime.

Ainsi signé : Par le roy, en son conseil. Gilet. — Visa. Contentor. E. Duban.

MLXXIV Avril 1445

Rémission accordée à Jean Bourjau, maréchal, demeurant à Montoiron, qui avait tué l’amant de sa femme, un prêtre nommé Guillaume Dumesnil.

AN JJ. 176, n° 366, fol. 263 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 203-205

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Bourjau, mareschal, aagé de xxxvi. ans ou environ, demourant en la parroisse de Saint Ambroys de Montoiron en la viconté de Chasteleraut, chargé de pluseurs petis enfans, contenant que, comme feu Guillaume Du Mesnil, prebstre, en son vivant, eust prins à ferme à deux ans le prieuré dudit lieu de Montoiron

Le prieuré de Saint-Fulgence de Montoiron était à la collation de l’abbé de Saint-Savin, de même que les deux cures de Saint-Ambroise et de Saint-Pierre, réunies dès le xviie siècle (Beauchet-Filleau, Pouillé du diocèse de Poitiers, p. 321.)

, durant lequel temps se feust acointié de la femme dudit suppliant, et de ce fut adverti le dit suppliant par aucuns de ses amis ; laquelle chose eust le dit suppliant bien et doulcement supportée, pour obvier à plus grant scandale et inconvenient, et jusques à la vigille de la mi aoust derreniere passée, que le dit suppliant estoit alé audit lieu de Chasteleraut, distant dudit lieu de Montoiron de deux lieues ou environ ; et sur le soir qu’il s’en retourna en son hostel, trouva que sa femme avoit tué deux grosses poules pour mettre en rost, et lors demanda qui c’estoit qui souppoit avec elle, et elle respondit que le dit Guillaume Du Mesnil y devoit venir et qu’il avoit apporté l’une des dictes poules. Et depuis soupperent tous ensemble, et après soupper, dit le dit suppliant audit Du Mesnil : « Nous avons souppé et gallé ensemble et fait bonne chiere, mais je vous pry que plus ne viengnés ceans en mon hostel, car on m’a rapporté que maintenez ma femme, dont mon mesnage est fort vilipendé. » Et le iiie jour de fevrier ensuivant et dernierement passé, le dit suppliant estant audit lieu de Montoiron avec sa dicte femme, sur le soir, en l’ostel d’un appellé Chicart, qui vend pain et vin, après ce que la dicte femme y ot esté une piece, dist audit suppliant, son mary : « Je m’en vois à mon mesnage, venez vous coucher quant bon vous semblera ». Et peu après, print le dit suppliant par la main une petite fille qu’il avoit et s’en ala en son hostel pour soy coucher, et se despoilla en pourpoint ; et pour ce que sa dicte femme n’y estoit, s’en sailly en sa vigne près le dit hostel, et vit au long du mur le dit Du Mesnil et sa femme qui estoient ensemble. Et quant les apperceut, dist audit Du Mesnil : « Laisse ma femme et t’en va. Je te pardonne tout, combien que tu soyes cause de la perdicion de mes enfans ». Dont le dit Du Mesnil ne fut content, et frappa d’une pierre qu’il tenoit le dit suppliant par la poictrine, et lui bailla ung cop de baston, le print à la gorge et aux cheveux. Et en ce conflit, doubtant le dit suppliant que le dit Du Mesnil [le] tuast ou navrast à tousjours, print icelluy suppliant ung grant cousteau ou bastardeau, que le dit Du Mesnil avoit à sa sainture, dont le frappa au travers des coustes, et depuis le dit coup, s’en ala le dit Du Mesnil le port d’une arbalestre loing ou environ, menant et conduisant avec lui la femme d’icelluy suppliant, et après cheut à terre et se fist mener en une charrette dudit [lieu] de Montoiron jusques au lieu d’Availle, où il demoura et a vesqu par xxxii. jours. Et ce pendant le dit suppliant [l’a] esté veoir et sont pardonnez l’un à l’autre, et de ce signa le dit Du Mesnil une lettre de sa main et la fist signer à ung notaire de court laye. Et depuis, par deffaut de gouvernement ou autrement, est trespassé le dit Du Mesnil. Pour lequel cas et pour doubte que l’en ne procede contre icelluy suppliant à la prinse de sa personne et par voye extraordinaire, s’est le dit suppliant absenté et ne se ose monstrer, aler ne converser au pays, par quoy lui et ses diz enfans sont en voye d’estre du tout destruiz et desers, de devenir mendians et deguerpir le pays, se noz grace et misericorde ne luy sont sur ce imparties, humblement requerant, etc. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant avons ou cas dessusdit quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou moys d’avril l’an de grace mil cccc. quarante cinq, et de nostre regne le xxiiime.

Ainsi signé : Par le conseil. Tarenne. — Visa. Contentor. M. de la Teillaye.

MLXXV Juin 1445

Rémission en faveur de Thomas Lambert, de Saint-Vincent-la-Châtre, qui, aux noces de la fille de Jean Aymer, de Moissac, s’étant pris de querelle avec une bande d’anciens compagnons de guerre qui voulaient prendre part au festin, quoique non invités, avait en se défendant frappé l’un d’eux, nommé Robin la Trompette, d’un bâton ferré dont il était mort plusieurs jours après.

AN JJ. 176, n° 372, fol. 265 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 205-208

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Thomas Lambert, dit Brigueron, jeune simples homs de labour, de la parroisse de Saint Vincent de la Chartre en la chastellenie de Lezay, ou pays de Poictou, chargé de jeune femme, contenant que comme, ung jour de jeudi après la saint Mandé derrenierement passée

Le 18 novembre, jour de la fête de saint Mandé, tomba un mercredi en 1444.

ou environ, eussent et aient esté faictes ou lieu de Moissac en la dicte chastellenie de Lezay, en l’ostel de Jehan Aymer

On remarquera que ce Jean Aymer habitait la région où plusieurs membres de la famille noble de ce nom avaient leurs possessions. A cette époque vivaient Jean Aymer, valet, sr de Sainte-Rue et de Lallier (paroisse de Saint-Médard), et son cousin, aussi nommé Jean Aymer, sr de la Chaume. (Voy. Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., t. I, p. 214, 218.)

, les nopces des espousailles de Jehan Aubery, laboureur, et de Guillemette Aymere, fille dudit Jehan Aymer, ausquelles nopces le dit suppliant, qui y avoit esté invité, fust venu pour honnorer et faire valoir la feste de son povoir. Et environ minuyt, après ce que les espoux et espousée se furent retraiz, eust le dit suppliant veu que ung appellé Robin la Trompette, demourant lors à Saint Maixant, qui longuement avoit frequenté la guerre, et autres compaignons estans lors ou dit hostel ouquel se faisoient les dictes nopces, avoient sans congié prins ou dit hostel, pour manger et banquetter, de la poullaille, et non contens de ce, pour ce qu’ilz s’efforçoient par leur oultraige de rechief en prendre et ravir de l’autre oudit hostel, sans le sceu et voulenté de ceulx à qui il appartenoit, le dit suppliant et autres eussent dit gracieusement audit Robin la Trompette et autres de sa compaignie que s’estoit très mal fait de prendre ladicte poullaille et qu’il souffisoit de ce qui en avoit esté fait. A quoy le dit Robin la Trompette, qui avoit et portoit son espée soubz son bras, eust dit et respondu bien arrogamment qu’ilz en auroient encores, et se esmeut entre eulx noise de paroles seulement, laquelle ung peu appaisiée, s’en voulu aler le dit suppliant, et de fait eust prins congié, mais le dit Robin la Trompette et ses diz compaignons, qui ne queroient que noise et riote, commancerent à courir et à frapper sur ceulx qui les avoient blasmez, comme le dit suppliant, et les aucuns à suivir et aler après icellui suppliant, lequel ce voyant et qu’il ne povoit seul contrarier à eulx ne les evader, doubtant leur fureur, mesmement dudit la Trompette qui avoit longuement suivy et frequenté la guerre, s’en fust retourné avecques les autres, ausquelx ledit la Trompette et ses compaignons couroient sus, et se fussent entrebatuz, et en y ot d’un costé et d’autre de bleciez, et en eulx combatant eust ledit suppliant prins et recouvert de la main d’un certain sergent ung baston ferré, duquel icellui suppliant en soy defendant des diz Robin la Trompette et ses compaignons, frappa et bleça icellui la Trompette par la hanche, dont il a esté fort malade. Et depuis a esté par plusieurs journées par la dicte ville de Saint Maixent, et disoit lors qu’il estoit guery de la dicte bleceure, mais depuis par son mauvais gouvernement il est rencheu malade au lit, ouquel il a esté l’espasse de trois sepmaines ou environ, et après est alé de vie à trespassement. A l’occasion duquel cas, le dit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du pays et n’y oseroit jamais bonnement ne seurement demourer ne converser, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu ce que dit est et que le dit suppliant a tousjours esté de bonne vie, etc., et que depuis le dit cas advenu le dit la Trompette a vesqu six sepmaines ou environ, nous lui vueillons sur ce impartir nos dictes grace et misericorde. Pour ce est il que nous, consideré ce que dit est, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, avons ou cas dessus dit, quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou mois de juing l’an de grace mil cccc. xlv, et de nostre regne le xxiiie.

Ainsi signé : Par le conseil. Bonney. — Visa. Contentor. N. Aymar.

MLXXVI Août 1445

Lettres d’abolition en faveur de Jean Marsillac, qui avait pris part, sous Jean de la Roche, sénéchal de Poitou, notamment à Niort et à Saint-Maixent, à des entreprises contre l’autorité du roi.

AN JJ. 177, n° 182, fol. 124 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 208-210

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Jehan Marsillac, demourant à present à Aunay en nostre pays de Poictou, contenant comme par long temps il nous ait servy ou fait de noz guerres à l’encontre des Anglois, noz anciens ennemys et adversaires, en la compaignie de feu Jehan de la Roche et autres capitaines et chiefz de guerre, et en ce faisant a tenu les champs avec les autres gens de guerre, où il a vesqu sur noz païs et subgiez, iceulx avecques leurs biens, bestial et autres biens prins, et raençonnez les marchans venans et alans aux foires et marchiez, et autres gens, dont il a esté par plusieurs et diverses foiz à en destrousser, batre et navrer. Fut aussi icellui suppliant en la compaignie dudit feu Jehan de la Roche à l’encontre de nous et nos diz subgiez, lorsque les aucuns des seigneurs de nostre sang et lignaige furent à nous desobeissans, en tenant contre nostre voulenté nostre ville de Nyort, à Saint Maixant et autres villes, ou païs de Bourbonnois

Jean de la Roche, sr de Barbezieux, n’avait jamais cessé, même depuis que Georges de La Trémoïlle l’avait fait nommer sénéchal de Poitou (ci-dessus, p. 33), de faire preuve vis-à-vis du pouvoir royal d’une indépendance qui alla souvent jusqu’à la rébellion. Ses antécédents le prédisposaient naturellement à se joindre aux promoteurs de l’insurrection féodale et militaire qu’on appelle la Praguerie. Le centre d’action des mécontents, dans la province où il continuait à être le premier officier de Charles VII, fut Niort qui appartenait au duc d’Alençon, l’un des instigateurs, avec le duc de Bourbon, de cette prise d’armes contre la royauté. Jean de la Roche était le lieutenant tout désigné de ce prince, et quand la révolte éclata, dès le mois de février 1440, il se jeta dans le mouvement et le seconda de tous ses efforts. On connaît le rôle qu’il joua dans ces événements, et particulièrement sa participation à la prise des villes de Melle et de Saint-Maixent. (Voy. A. Richard, Recherches sur l’origine de la commune de Saint-Maixent, p. 16-18 ; E. Cosneau, Le connétable de Richemont, p. 302-307 ; de Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. III, p. 120-125 ; Clément Simon, Un capitaine de routiers sous Charles VII, Jean de la Roche, dans la Revue des questions historiques, juillet 1895, p. 41-65.) Après la défaite des rebelles dans le Poitou, Jean de la Roche parvint à s’échapper et gagna le Bourbonnais, où les princes révoltés et leurs partisans vinrent se grouper autour du duc de Bourbon. En chemin, fidèle à ses habitudes de routier, le sr de Barbezieux menaça Saint-Jean-d’Angély, et la ville, « pour avoir abstinence de guerre de lui et de ses gens », se résigna à lui payer une contribution de 58 livres 10 sous. (Registre de la recette et dépense de Jean d’Abbeville, receveur de la ville, pour 1440-1441. Arch. communales de Saint-Jean-d’Angély, CC. 27.) Dans l’introduction du présent volume on trouvera quelques renseignements complémentaires sur ce point d’histoire.

, en commettant en ce crime de leze magesté. Et ce pendant fist icellui suppliant plusieurs maulx et oppressions à nos diz païs et subgiez, et aussi depuis en tenant les champs comme les autres gens de guerre, en commettant et perpetrant plusieurs et divers crimes, deliz, excès et malefices, desquelz le dit suppliant ne sauroit et ne pourroit bailler la declaration au vray, ne aussi en faire satisfaction. Et d’iceulx cas icellui suppliant dit par nous avoir esté octroyé abolicion generale aus diz gens de guerre

On verra que ces lettres d’amnistie générale sont visées encore dans plusieurs des nombreuses lettres de rémission particulière octroyées à des gens de guerre durant les années 1445 et 1446, et imprimées ci-dessous. Leur existence ne peut donc faire de doute, quoique le texte n’en ait pas été retrouvé. Elles sont antérieures au 20 avril 1445, car il en est question dans un sauf-conduit délivré à cette date par le connétable au bâtard de Limeuil, chargé de ramener dans leurs foyers un détachement de cent soixante cavaliers et leur bagage, licenciés par ordonnance du roi, sans qu’ils soient inquiétés en aucune manière, « nonobstant les crimes, deliz ou malefices quelconques par eulz ou l’un d’eulx commis et perpetrez le temps passé, à cause de la guerre, lesquelz mondit seigneur le roy leur a remiz, quicté et pardonné par son ordonnance ». (Bibl. nat., ms. fr. 4054, fol. 46. Publ. dans la Bibliothèque de l’École des chartes, t. VIII, 1846, p. 124 note.)

. Neantmoins icellui suppliant, pour ce que d’icelle abolicion ne sauroit faire obstencion, doubte estre ou temps avenir approuché desdiz cas ou d’aucuns d’iceulx et en estre compellé et contraint par justice, et que l’en puisse ou vueille l’en contre lui rigoureusement proceder, se nostre grace et misericorde ne lui estoient par nous sur ce impartiz, humblement requerant icelles. Pour quoy nous, ce que dit est consideré, non voulans avoir regard aux maulx ainsi faiz et perpetrez, à cause des guerres et divisions qui longuement ont duré en nostre dit royaume, mais misericorde preferer à rigueur de justice, consideré aussi que icellui Jehan Marsillac nous a fait plusieurs services ou dit fait de noz guerres à l’encontre de nos diz ennemys et adversaires les Anglois, à icellui Jehan Marsillac, suppliant, avons quicté, remis, pardonné et aboly, etc., tous et chascuns les cas, crimes, excès et deliz quelzconques par lui faiz, commis et perpetrez en ensuivant et frequentant lesd. guerres et durans icelles, etc., excepté toutesvoyes tout meurdre fait d’aguet apensé, boutement de feux, violement et ravissement de femmes et de filles et crime de sacrilege, que ne voulons en ce estre comprins ne entenduz, etc. Si donnons par ces mesmes presentes en mandement à noz amez et feaulx conseillers les gens tenans et qui tendront nostre Parlement, aux prevost de Paris, bailliz de Vermendois, de Sens, de Montargis, de Saint Pere le Moustier, de Touraine et des ressors et Exemptions d’Anjou et du Maine, seneschaulx de Poictou, de Lymosin, de Xanctonge et gouverneur de la Rochelle, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Sens, ou mois d’aoust l’an de grace mil cccc. xlv, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. Rolant. — Visa. Contentor. Charlet.

MLXXVII 27 octobre 1445

Rémission accordée à Julien Denyau, de Saint-Pierre de Roussay, poursuivi à Poitiers, comme complice d’un faux fabriqué par Hugues Russon, prêtre, chapelain à Tiffauges.

AN JJ. 177, n° 95, fol. 53 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 210-214

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Julien Denyau, laboureur, demourant en la parroisse de Saint Pierre de Roussay sur les marches d’Anjou, contenant que, deux ans a ou environ, le dit suppliant, ou nom des habitans du dit lieu, impetra en nostre chancellerie à Paris certaines noz lettres, par lesquelles avons donné congié et licence ausdiz habitans de mettre sus et imposer sur eulx mesmes la somme de deux cens livres tournois, pour icelle employer ès fraiz et mises qu’ilz avoient fait et encores leur convenoit faire à la poursuite de certain procès, pendant par devant noz amez et feaulx conseillers les generaulx sur le fait de la justice des aides à Paris, entre le procureur et receveur de nostre très chier et très amé frere et cousin le roy de Jherusalem et de Secille

René d’Anjou, duc d’Anjou, de Lorraine et de Bar, comte de Provence, roi de Sicile et de Jérusalem, né à Angers, le 16 janvier 1409, mort à Aix en Provence, le 10 juillet 1480. Deuxième fils de Louis II et d’Yolande d’Aragon, il avait succédé, le 15 novembre 1434, à Louis III, son frère aîné, comme duc d’Anjou.

, demandeurs, d’une part, et les diz habitans, defendeurs d’autre, pour raison de certaines tailles excessives qu’ilz vouloient exhiger sur les diz habitans

Dans ce procès, les habitants de Roussay faisaient cause commune avec ceux des paroisses voisines du Longeron, de la Romagne, de Torfou et de Montigné, et étaient demandeurs en cas d’excès. Le 16 novembre 1442, ils se firent adjuger un premier défaut contre Person Muguet, receveur dudit aide, et les collecteurs nommés Henri Lallemant, Regnaut Duboulay, Perrot Huguet, Jean Lassis, poulailler, et Jamet Aubin, boucher. Le 28 du même mois, malgré la requête du procureur de ces derniers, le défaut fut maintenu au profit des demandeurs qui étaient venus à Paris « à grans fraiz et despens », tandis que les défendeurs, quoique personnellement ajournés, s’étaient abstenus de comparaître. Le 1er décembre suivant, un nouveau défaut fut adjugé auxdits habitants contre Hardouin Fresneau, me Jean Fournier et Pierre Dudoit, se disant commissaires en cette partie. Du même jour : « Veue certaine requeste faicte par les manans et habitans ès parroisses de Roussay, Tourfoul, Longeron, Montigné et la Romaigne, touchant la delivrance d’aucuns d’eulz estans prisonniers à Angiers, à l’occasion de certaine taille mise sus par le roy èsd. parroisses ; appoinctié que, en baillant par les diz supplians bonne et seure caucion, en la ville d’Angiers, de paier à l’ordonnance de la court les sommes pour lesquelles ilz sont prisonniers, ilz seront mis à plaine delivrance. Et pour ce faire, sera faicte commission adressant au bailli de Touraine ou à son lieutenant, et au premier huissier, sergent, etc., pour contraindre Person Muguet, receveur dudit aide, qu’il les mette à plaine delivrance, et ou cas qu’il en seroit reffusant, que l’executeur d’icelle le face, à son reffuz, en recevant ladicte caucion. » (Arch. nat., reg. de la Cour des aides, Z1a 13, fol. 114, 115 v°, 116 v°.) Il y a lacune de février à novembre 1443, et l’on n’a point trouvé la conclusion de cette affaire. Les monnayers de la Monnaie d’Angers se pourvurent aussi contre Person Muguet, receveur, qui les avait taxés malgré leurs privilèges, et l’on voit qu’il s’agissait des aides imposées en décembre 1440 et en juillet 1441 par le roi de France, dans les pays de l’obéissance du duc d’Anjou et d’accord avec lui, pour les besoins de la guerre. Les habitants de Roussay et des autres paroisses tendaient à obtenir une réduction de leur quote-part qu’ils jugeaient excessive. (Plaidoirie du 12 janvier 1443 n.s., id. ibid., fol. 123.)

 ; lesquelles lettres le dit suppliant presenta au bailli de Touraine, ou à son lieutenant, auquel les dictes lettres s’adreçoient. Lequel leur donna ses lettres executoires adreçans au premier nostre sergent, auquel estoit mandé par les dictes lettres executoires dudit bailli mettre à execution nos dictes lettres. Lequel suppliant presenta icelles noz lettres et celles dudit bailli à Françoys Guybert, sergent dudit bailliage, lequel sergent regarda et leut les dictes lettres, et pour ce que le dit sergent vit par les dictes lettres que n’avions donné faculté aus diz habitans de mettre sus, pour frayer à ce que dit est, que deux cens francs seulement, il dist audit suppliant qu’il portast à Hugues Russon, prebstre à Thiffauges, et lui fist mettre deux cens francs davantaige dedans, car desjà les gens de la dicte parroisse ont despendu cent escuz pour la delivrance des gens de la dicte ville qui estoient prisonniers à Angiers, et plus, et si ne fait que commancer le procès, et ne pourroit fournir la dicte somme de deux cens livres à la moictié des despenses qu’il leur convendra faire à le poursuir ; et que le dit prebstre feroit très bien la besoingne ; car il ne l’oseroit faire lui mesmes, pour ce que sa main seroit congneue. Et atant se departit le dit suppliant et reprint nos dictes lettres et celles dudit bailli, et par le conseil dudit sergent, les porta audit prebstre, et lui dist que le dit sergent lui avoit conseillé venir par devers lui, pour lui faire adjouster èsdictes lettres, oultre les diz deux cens francs, autres deux cens francs, et pria le dit prebstre qu’il le fist ; et pour ce faire lui donna iii. solz iiii. deniers tournois. Lequel prebstre print les dictes lettres et y adjousta deux cens francs, et fist certaine rasure qui après a esté congneue. Lequel suppliant print les dictes lettres et les retourna audit sergent, lequel, par vertu d’icelles, mist sus la dicte somme de quatre cens livres tournois, et rebailla les dictes lettres audit suppliant. Laquelle somme par vertu des dictes lettres fut levée sur les diz habitans et employée aus diz fraiz et mises. Et que, depuis ung mois ença, nostre procureur en la seneschauciée de Poictou a fait adjourner les commissaires, ou ceulx qui avoient receue la dicte somme de iiiic livres tournois, à certain jour ensuivant par devant le dit seneschal de Poictou ou son lieutenant, pour oyr et veoir le compte de la dicte somme mise sus. Auquel jour iceulx commissaires comparurent et exhiberent leurs dictes lettres, par vertu desquelles avoient mis sus la dicte somme de iiiic l.t. Et si tost que nostre dit procureur vit les dictes lettres, apperceut la dicte adicion de iic l.t. et la dicte rasure. Et viii. jours après, nostre dit procureur fist adjourner les diz comissaires à certain jour brief à escheoir, pour lui respondre sur la dicte adicion et radicion ; et aussi a fait adjourner le dit suppliant sur ce que dit est. Lequel doubtant rigueur de justice, s’est absenté du pays et n’y oseroit jamais retourner, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu que le dit suppliant est homme simple et ygnorant en telles matieres, et n’est clerc ne lettré, ne aucunement ne scet lire ne escripre, porta les dictes lettres au dit chappellain par le conseil du dit sergent, comme le dit sergent a confessé devant gens dignes de foy, au lict de la mort, lequel est nagueres trespassé, et que le dit suppliant ne fist pas la dicte adicion et rasure ès dictes lettres, mais la fist le dit prebstre devers lequel le dit sergent avoit envoyé le dit suppliant, etc., il nous plaise sur ce lui impartir nostre grace. Pour quoy nous, etc. au dit suppliant avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces presentes au bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d’Anjou et du Maine, seneschal de Poictou, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, le xxviie jour d’octobre l’an de grace mil cccc. xlv, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Charretier. — Visa. Contentor. Et. Du Ban.

MLXXVIII Novembre 1445

Rémission en faveur de Barthélemy Bonnet, de Villaine en la paroisse d’Azay-le-Brulé, coupable de meurtre sur la personne de Jean Cantinole, avec lequel il avait eu querelle parce qu’il voulait l’empêcher de maltraiter deux enfants, ses cousins.

AN JJ. 177, n° 106, fol. 61 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 214-217

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Bartholomy Bonnet, laboureur, filz de feu Guillaume Bonnet, demourant à Villennes en la parroisse d’Azay près nostre ville de Saint Maixant, contenant que, en ce present mois de novembre, ainsi que le dit suppliant aloit avec les beufs et charrete de son dit pere à certains boys appellez les bois de la Chaslonniere, pour querir du dit bois pour eulx chaulfer, le dit suppliant, en alant au dit bois, rencontra ou grant chemin par lequel l’en va en la dicte ville de Saint Maixant, deux jeunes enfans, dont l’ainsné n’avoit point plus de xiiii. ou xv. ans, l’un desquelz se fait appeller Pierre Bonnet, filz de Bartholomy Bonnet, et l’autre Guillaume Bonnet, filz de Jehan Bonnet, demourant à la Brosse d’Azay, ses cousins germains ; lesquelz venoient du dit boys de la Chaslonniere, et sur quatre jumens amenoyent du bois pour eulx chauffer, avec lesquelz enfans il trouva feu Jehan Cantinole, lequel aussi demouroit en la dicte ville de Saint Maixent, et lequel dist aus diz enfans qu’ilz avoient prins le dit bois qui estoit sur les dictes jumens en ung sien marreau de boys qu’il avoit ou dit boys de [la] Chaslonniere, et appelloit les diz enfans larrons. Et non content de ce, se print à une des dictes jumens, la quelle appartenoit et estoit au dit pere du dit suppliant, et couppa les anneaulx où se tenoient les crochez, èsquelz ilz amenoient le boys sur la dicte jument, en telle maniere qu’il fist cheoir la dicte jument et le dit boys dont elle estoit chargée en une fange estant ou dit chemin, et avec ce s’efforça et voult courir sus de fait aus diz enfans, ou à l’un d’eulx. Lequel suppliant, veant le dit Cantinole esmeu de mal faire, doubtant qu’il courust sus, batist ou injuriast de leurs personnes ses diz cousins, se avança et ala vers le dit Cantinole, au quel il dist le plus gracieusement qu’il peut que c’estoit mal fait à lui de vouloir courir sus ainsi à ses diz cousins et de ainsi avoir couppé les diz anneaulx et fait ce que dessus est dit. Lequel Cantinole respondi bien oultrageusement audit suppliant, en lui disant qu’il ne demourroit point pour lui, et en regniant nostre Createur plusieurs foiz le voult et s’efforça frapper d’une cognée qu’il avoit entre ses mains, mais le dit suppliant, veant son mauvaiz et felon couraige, print ung coutel de deux piez de long qu’il avoit à son cousté et le tira hors de la gueyne, et lui dist que s’il le frappoit de la dicte cognée, qu’il le frapperoit dudit coutel. Mais ce non obstant, le dit suppliant, doubtant que le dit Cantinole le frappast, pour ce qu’il ne vouloit cesser et s’efforçoit le frapper de la dicte cognée, le dit suppliant, pour evader audit Cantinole, commança à fouyr envers la dicte charrete qu’il avoit amenée pour emporter du dit boys, et en fuyant, ainsi qu’il fut près de la dicte charrete, le dit Cantinole lui gecta la dicte cognée après ses jambes, de laquelle il l’eust tué, s’il l’eust actaint, ou l’eust mutilé. Le quel suppliant, veant la obstinacion du dit Cantinole, remist son dit coutel en sa dicte gueyne, et print ung pal de la dicte charrete, et dist au dit Cantinole qu’il cessast de plus lui courir sus, mais le dit Cantinole n’en voult rien faire, ains persevera en son mauvaiz propoz. Lesquelles choses veans le dit suppliant, et que le dit Cantinole ne vouloit cesser de tousjours le frapper, en regniant folement nostre Createur, pour doubte qu’il le tuast ou murtrist, considerant que autrement ne lui povoit evader, sans entencion de le vouloir tuer, mais afin qu’il peust eschapper d’ilec et eschever sa fureur, frappa le dit Cantinole ung seul coup sur la teste du dit pal ; duquel cop le dit Cantinole, ce dit jour, ala de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas, le dit suppliant qui est jeunes homs de l’aage de xxii. ou xxiii. ans ou environ, marié avec une jeune femme de xviii. ans, qui en tous ses autres faiz, a esté de bonne fame, renommée et honneste conversacion, sans oncques mais avoir esté reprins, actaient ou convaincu d’aucun villain cas, blasme ou reprouche, pour doubte de rigueur de justice, s’est absenté du pays et n’y oseroit jamais retourner, se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartie, humblement requerant que, attendu que le dit suppliant, le quel, comme dit est, aagié de xxii. ou xxiii. ans ou environ, chargié de jeune femme de l’aage de xviii. ans ou environ, a delaissée sa dicte femme sans aucun gouvernement, que le dit cas est avenu d’aventure et n’avoit le dit suppliant paravant le dit debat aucune malveillance ou noise avec le dit Cantinole, et fut icellui Cantinole agresseur et injuria les cousins du dit suppliant et les appella larrons, et s’efforça de leur courir sus, etc., il nous plaise sur ce lui impartir icelles. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, au dit suppliant ou cas dessusdit avons remys, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces presentes au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois de novembre l’an de grace mil cccc. quarante et cinq, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. N. Du Brueil. — Visa. Contentor. E. Du Ban.

MLXXIX Décembre 1445

Lettres d’abolition octroyées à Jean de Fresneau, écuyer, pour les pillages, détrousses, mises à rançon et autres excès dont il s’est rendu coupable pendant les campagnes auxquelles il a pris part depuis vingt-cinq ans.

AN JJ. 177, n° 112, fol. 65 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 217-220

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Jehan de Fresneau, escuier, contenant que dès son jeune aage il nous a servi ou fait de noz guerres, l’espace de vint cinq ans ou environ, tant soubz noz très chiers et amez cousins le conte de la Marche

Il s’agit peut-être de Jacques de Bourbon, comte de la Marche et de Castres, lieutenant général en Languedoc de mars 1424 à avril 1425, qui se fit cordelier à Besançon en 1435, après la mort de sa seconde femme Jeanne, reine de Naples et de Sicile, et dont le décès arriva le 24 septembre 1438, ou plus vraisemblablement de son gendre Bernard d’Armagnac, comte de Pardiac, qui lui succéda comme comte de la Marche et dont le rôle militaire fut beaucoup plus actif. (Voy. ci-dessus, p. 152, note 1.)

, le sire de Lebret

Charles II, sire d’Albret, comte de Dreux, vicomte de Tartas, né en 1401 ou 1402, mort en 1471, fils de Charles Ier d’Albret, connétable de France, et de Marie de Sully (cf. notre précédent volume, p. 39 note). Il avait pour femme Anne, fille de Bernard VII comte d’Armagnac et de Bonne de Berry, et leur plus jeune fille, Jeanne, avait épousé le connétable de Richemont, sire de Parthenay, le 29 août 1442, et mourut à Parthenay à la fin de septembre 1444.

, nostre amé et feal chevalier Jehan seigneur de Brizay

Jean seigneur de Brizay ou Brisay en Mirebalais a été l’objet d’une courte notice biographique ci-dessus, p. 111, note 2.

, et autres estans soubz nos diz cousins, de feu Jehan de la Roche, en son vivant nostre seneschal de Poictou, que de plusieurs autres capitaines et gens de guerre, en quoy il a employé son temps et sa jeunesse, et a esté à plusieurs sieges, rancontres et prises de places sur noz anciens ennemys et adversaires les Anglois, en garnison en plusieurs places et frontieres de nos diz ennemys, en quoy il a despendu grant partie de sa chevance, sans avoir eu de nous aucune recompensacion. Durant lequel temps qu’il a suivy la guerre, pour ce que les capitaines soubz lesquelz il estoit ne lui bailloient point d’argent, dont il peust avoir sa vie, chevaulx, harnois ne autres choses à lui neccessaires, il a tenu et esté contraint tenir les champs, a vesqu sur iceulx et a couru en compaignie d’autres, et fait courir ses varletz et serviteurs de guerre, pillé, robé, destroussé et raençonné toutes manieres de gens qu’ilz ont trouvé sur les chemins et ailleurs, tant nobles, gens d’eglise, bourgois, marchans, gens de pratique et toutes autres manieres de gens, de quelque estat ou condicion qu’ilz feussent, leur a osté leurs chevaulx et autres monteures, leur or, argent, robes, chapperons, saintures, denrées, marchandises et autres biens quelzconques qu’ilz trouvoient sur eulx, vendu et butiné leurs chevaulx, biens et autres destrousses, et a eu le dit suppliant part ès destrousses, pilleries et roberies que ont fait les diz varletz, serviteurs et compaignons de guerre, les [a] soustenuz ès dictes pilleries, couru foires et marchez, et icelles pillées, pris et enmené bestial, partie d’icellui mengié et l’autre vendu et butiné, et fait ce que bon leur a semblé, et aucunes foiz raençonné à plusieurs sommes de deniers, autant ou plus que ne valoit le dit bestial, et aucunes foiz icellui raençonné à vivres et autres choses. Et a esté en compaignie de plusieurs gens de guerre, qui ont assailly eglises fortes, et icelles et iceulx qui estoient dedans prins et raençonné par force, prins à prisonniers les diz estans dedans icelles eglises, comme s’ilz feussent noz ennemys, et icelles eglises pillées, et pour la resistance que faisoient ceulx qui estoient dedans les dictes eglises, lesdiz gens de guerre y ont bouté le feu et aucunes foiz y a eu murtres, sans ce toutesvoyes que le dit suppliant ait commis le dit murtre en sa personne, bouté ledit feu, pillé les dictes eglises ne les biens d’icelles, combien qu’il ait esté present et aucunes foiz aidé à piller les biens des habitans qui estoient retraiz ès dictes eglises ; et puet estre que, durant le dit temps qu’il a suivy les dictes guerres et tenu les champs, en la compaignie de plusieurs cappitaines et autres gens de guerre, que aucuns ont violé femmes, non pas qu’il ait esté present ne consentant à ce. Et aussi durant le dit temps qu’il a suivy les dictes guerres, il a prins à prisonniers plusieurs de nos subgiez et iceulx raençonnez à plusieurs sommes de deniers, vivres et autres choses, iceulz batuz et appatissiez burgades, villages, abbayes, prieurez et autres maisons, et fait et commis plusieurs autres cas, crimes et deliz. Lequel suppliant se veult retraire et faire labourer, vivre du sien et remettre sus son heritaige, mais il doubte que, à l’occasion des choses dessus dictes, aucuns lui voulsissent ou temps avenir donner charge, et que noz officiers ou autres voulsissent contre lui proceder par rigueur et punicion de justice et le tenir et mettre en grant involucion de procès, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu qu’il a esté tousjours nostre vray et loyal subgiet et obeissant, et tenu nostre party sans varier, et nous a servy ou fait de noz guerres, où il a employé sa personne et ses biens, sans en avoir eu de nous aucune remuneracion, qu’il a entencion et vouloir de soy retraire et vivre du sien, comme homme de bien doit faire, et n’a personnelment bouté feu, forcé femmes, violé eglises, ne fait meurtre, ne esté consentant, supposé qu’il y ait esté aucunes foiz present, il nous plaise sur ce lui impartir icelles. Pour quoy nous, attendu ce que dit est et voulans misericorde preferer à rigueur de justice, au dit suppliant ou cas dessus dit, pour consideracion des bons et agreables services qu’il nous a fait ou fait de noz guerres et autrement, avons remis, quicté, aboly et pardonné, etc., remettons, quictons, pardonnons et abolissons les faiz et cas dessus diz avec autres quelzconques, que le dit suppliant, à l’occasion des dictes guerres et durans icelles, et le temps qu’il a servy, il a fait, commis et perpetré, lesquelz voulons ici estre tenuz pour exprimez, sans ce qu’il soit besoing d’en faire autre declaracion, avec toute peine, amende et offense corporelle, criminelle et civile

On remarquera qu’il n’est fait ici aucune réserve de réparation civile, omission qui est fort rare dans les lettres de rémission ou d’abolition.

, etc. Si donnons en mandement par ces presentes aux seneschaulx de Poictou, de Xainctonge et de Lymosin, bailliz de Berry, de Touraine et à touz nos autres justiciers, etc. Donné à Razilly lez nostre ville de Chinon, ou mois de decembre l’an de grace mil cccc. xlv, et de nostre regne le xxiiiime

Le texte des lettres d’abolition octroyées à Jean de Fresneau a été publié, sauf les signatures ci-dessous, par M.A. Tuetey, Les Écorcheurs sous Charles VII, 2 vol. in-8°, 1875, t. II, p. 471.

.

Ainsi signé : Par le roy, le mareschal de la Fayette, les sires de la Varenne, de Precigny

Gilbert de La Fayette, maréchal de France depuis l’an 1421, décédé le 23 février 1462 (cf. ci-dessus, p. 99, note 10) ; Pierre de Brézé, sire de la Varenne, sénéchal de Poitou de 1441 à 1451 (voir sa notice, p. 178, note 2) ; Bertrand de Beauvau, sr de Pressigny (id., p. 99).

et de Blainville

Il s’agit de Jean d’Estouteville, seigneur de Blainville, puis de Torcy après la mort de son père, Guillaume, grand maître et général réformateur des eaux et forêts de France, décédé le 19 novembre 1449, auquel sa femme, Jeanne de Mauquenchy, avait apporté en mariage la terre de Blainville. Jean, né en 1405, fut chambellan de Charles VII, prévôt de Paris le 27 mai 1446 et grand maître des arbalétriers de France en 1449. Il se distingua à la conquête de la Normandie (1450) et servit fidèlement Charles VII et Louis XI ; on le trouve encore combattant à Guinegate (1479) ; il mourut fort âgé le 11 septembre 1494. (Le P. Anselme, Hist. généal., t. VIII, p. 87, 98.)

, maistre Jehan Bureau

Sur Jean Bureau, maître de l’artillerie, voy. ci-dessus, p. 172, note 3.

et autres presens. J. de La Loere. — Visa. Contentor. E. Du Ban.

MLXXX Décembre 1445

Rémission accordée à Fleury Viguier, « povre compaignon de guerre, aagié de xxxvi. ans ou environ ». Douze ans auparavant, étant au service de Guillaume Philippes, écuyer, alors capitaine du château et place forte de Brissac, il avait causé la mort d’un habitant d’un lieu voisin nommé Vauchrétien, réfugié dans le fort, en le frappant à coups de pied parce qu’il s’était endormi étant de garde. Depuis, ledit Viguier avait quitté le pays, mais était resté au service du roi « ou fait de la guerre, tant en la compaignie de feu Gauthier de Brusac, ses ne pveuz

La famille noble de Brusac était originaire du Périgord ; une de ses branches s’établit au xve siècle dans le Châtelleraudais. C’est précisément à cette branche qu’appartenait le Gautier de Brusac nommé ici, et qui est connu d’ailleurs comme chef de routiers. Écuyer d’écurie de Charles VII, sénéchal de Limousin de 1437 à 1439 environ, on voit ici qu’il était mort antérieurement au mois de décembre 1445. Le 23 avril 1439, il donna quittance de 2042 livres que les États de Limousin lui avaient votées à titre de remboursement ; il avait avancé cette somme de ses deniers pour faire évacuer le château de Courbefy. (A. Thomas, Les États provinciaux de la France centrale, t. I, p. 229 ; t. II, p. 96, 101.)

Les services de Gautier sont rappelés dans des lettres de légitimation octroyées plusieurs années après son décès, par Charles VII (Saint-Priest en Dauphiné, février 1457 n.s.), à Jean de Brusac, fils bâtard qu’il avait eu d’une nommée « Thievrine Dulieul » ou plutôt Dubreul. (JJ. 191, n° 244, fol. 132.) Il paraît qu’il eut un autre fils naturel, nommé Guillaume de Brusac, légitimé en 1478 et qualifié chevalier, chambellan du roi en 1481. (Bibl. nat., Pièces orig., vol. 542, cité par le Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., t. II, p. 60.) Les neveux de Gautier étaient les fils de son frère aîné Mondot de Brusac, c’est-à-dire Mondot II, chevalier, vivant en 1439 ; Pierre, qualifié aussi écuyer d’écurie du roi en 1444 et renommé capitaine de routiers, et Guyot ou Guynet, écuyer, sr des Prés et de la tour d’Asnières en Châtelleraudais (sur lequel voy. Arch. de la Vienne, G. 714). Une partie des exploits de Gautier et de Pierre de Brusac sont rapportés par M.A. Tuetey dans son ouvrage intitulé Les Écorcheurs sous Charles VII, 2 vol. in-8°, 1875.

, que de nostre amé et feal conseiller et chambellan le sire de la Varenne

Pierre de Brézé, sr de la Varenne, sénéchal de Poitou, a été l’objet d’une notice ci-dessus, p. 178, n. 2.

, et encores est soubz lui en la ville de Thouars, par l’ordonnance de nous, en la compaignie de Jacques de Cleremont

La présence de Jacques de Clermont en Poitou, à la tête d’une compagnie de cent lances des ordonnances, à la fin de l’année 1445, est constatée dans deux autres actes. (Bibl. nat., Pièces orig., vol. 783, dossier Clermont, nos 18 et 19.)

, avec les autres gens de guerre estans de present en la dicte ville à noz gaiges et souldes… Donné à Chinon, ou mois de decembre l’an de grace mil cccc. xlv, et de nostre regne le xxiiiie. »

AN JJ. 177, n° 118, fol. 68 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 221

MLXXXI Décembre 1445

Rémission octroyée à Louis d’Authon, écuyer, et à Gillet Ogier, son page. A la suite d’une discussion d’intérêt au sujet de la possession des deux tiers de l’hôtel et du fief de Fosse-Grande en la paroisse de Liniers, qu’il avait eue avec Jean Pontenier, de Poitiers, ledit d’Authon et son adversaire avaient mis l’épée à la main et dans le combat, ce dernier avait été frappé mortellement.

AN JJ. 177, n° 122, fol. 74 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 222-230

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Loys du Ton

Sic, faute de copiste pour d’Auton. Cette correction est indiquée par le registre du Parlement, où sont transcrits des actes de la procédure faite à l’occasion de l’entérinement de ces lettres de rémission, et dont il sera question dans une note ci-dessous (p. 229). Il s’agit de Louis d’Authon, écuyer, seigneur de Béruges, Charlée, Fosse-Grande, etc., représentant d’une branche poitevine de la famille d’Authon, originaire de Saintonge, à laquelle appartenait Jean d’Authon, abbé d’Angle en Poitou, le célèbre historiographe de Louis XII. Notre personnage paraît être le fils de Jean d’Authon, écuyer, sr de Béruges, dont on connaît une transaction conclue, le 26 novembre 1424, avec le prieur de Béruges au sujet de la dîme sur la terre de Jalais. (Coll. dom Fonteneau, t. I, p. 283.) Un aveu du fief de Rudepère, relevant de la châtellenie de Montgamé, fut rendu au chapitre de l’église cathédrale de Poitiers par un Jean d’Authon, écuyer. (Arch. de la Vienne, reg. G. 215.) Louis d’Authon vendit Béruges à André Chaillé, bourgeois et échevin de Poitiers (Bulletin de la Société des Antiquaires de l’Ouest, ann. 1887, p. 297), et fit aveu du fief de Fosse-Grande, en 1477, à Renaud de Montléon, écuyer, sr de Touffou. Il avait épousé Jeanne Bigot, fille d’Étienne et de Guillemette Berland. On ne connaît pas le nom ni la destinée des quatre enfants dont il était le père dès l’âge de vingt-sept ans.

, escuier, aagié de vint sept ans ou environ, chargié de jeune femme et de quatre petis enfans, et de Gilet Ogier

Ce nom est écrit Augier dans le registre du Parlement X2a 27, fol. 21 v°.

, son paige, natif de la ville de Chastellerault, aagié de dix sept ans ou environ, contenant que le dit Loys est né et extrait de noble lignée, vivant noblement, et nous a servy ou fait de noz guerres à l’encontre de noz anciens ennemys et adversaires les Anglois, en plusieurs lieux et voiages, et que les deux parties de l’ostel de Fosse Grant

Le fief de Fosse-Grande, mouvant de Touffou, paraît avoir été acquis dans la suite par l’abbaye de Montierneuf de Poitiers.

en la chastellenie de Touffou, en nostre pays de Poictou, lui compettent et appartiennent, et pour estre paié des cens, rentes et autres devoirs à lui appartenans à cause dudit hostel, le dit suppliant fist publier et dire à l’eglise du lieu de Linieres que ceulx qui lui devroient, à cause dudit hostel, les diz cens, rentes et autres choses, venissent et feussent prestz de lui paier les diz cens et rentes, le dimanche après la saint André derrenierement passée, ainsi qu’il estoit acoustumé de faire. Lequel suppliant se transporta audit lieu le dit dimanche, et après ce qu’il eut oye la messe le dit jour de dimanche, trouva le varlet de Jehan Pontenier

Un Jean Pontenier fut chargé, l’an 1384, avec Léger Torgné, en qualité de commissaire nommé par le sénéchal de Poitou, de procéder à une information sur des entreprises faites par Aimery de Curzay sur la juridiction de Rouet, au détriment du chapitre de Notre-Dame-la-Grande de Poitiers. (Arch. de la Vienne, G. 1144.) Jeanne Pontenier, fille de Jean et de Jeanne Masson, avait épousé Georges Cocheron. Son mari rendit aveu à cause d’elle, le 27 décembre 1408, au duc de Berry d’un hébergement mouvant de la tour de Maubergeon, qui lui venait de Lucas des Forges, et pour lequel était dû l’hommage lige et le service d’un homme de pied, armé et équipé, pendant quarante jours, entre la Loire et la Dordogne. (Arch. nat., P. 1145, fol. 83 v°.) Jean Pontenier, garde du sceau aux contrats de la ville de Poitiers, apposa en cette qualité son sceau au testament d’Herbert de Taunay, maire de cette ville, le 8 août 1430. (Id., X1a 8604, fol. 97 v°.) Un personnage du même nom était notaire à Poitiers, le 7 août 1432. A cette date, il souscrivit un bail à ferme des moulins de la ville situés sur le Clain, passé par les maire, échevins et bourgeois à Jean Cailler l’aîné pour deux ans, et moyennant cinquante setiers de froment par an. (Arch. de la ville de Poitiers, F. 70.) Nous ne savons quel lien de parenté existait entre ces Pontenier et la victime des violences de Louis d’Authon. Jean Pontenier ne laissa que deux filles : Jeanne, mariée avant l’année 1455 à Pierre Groleau, licencié ès lois, et Radegonde, femme de Jean Favereau, aussi licencié ès lois. (Arch. nat., X2a 27, fol. 21 v°.)

, de Poictiers, lequel le salua en lui disant telles paroles : « Monseigneur, Dieu vous doint bonjour » ; auquel le dit Loys suppliant respondi semblables paroles : « Dieu vous doint bonjour, mon amy ». Et dist au dit Loys que son maistre, Jehan Pontenier, l’attendoit en l’ostel de Charles ; auquel le dit Loys respondi qu’il feust le bienvenu. En alant ouquel hostel dudit Charles, le dit Loys trouva le dit Jehan Pontenier ou chemin, et en sa compaignie estoit ung nommé Jehan Potereau, chastellain de Chauvigny, et autres gens de plat pays, et saluerent les diz Pontenier et Loys suppliant l’un l’autre, et baillerent la main l’un à l’autre, et se firent bonne chiere. Ausquelz Pontenier et Potereau le dit Loys demanda se ilz avoient disné, auquel ilz respondirent que oïl, et lors le dit Loys leur dist qu’il ne faisoit que venir de la messe et qu’il estoit jeun, et les pria qu’ilz alassent disner avec lui, et qu’il avoit fait appareiller son disner en l’ostel dudit Charles. Lesquelz respondirent que ilz en avoient fait. Après lesquelles paroles, le dit Loys ala en la maison dudit Charles, et incontinant qu’il fut en la dicte maison, il en entra en ung jardin et ala poser deux laniers

Oiseau de proie, espèce de faucon dégénéré que l’on dressait pour la chasse au vol. (F. Godefroy, Dictionnaire de l’anc. langue française.)

, qu’il avoit, à la perche, et après s’en entra en la dicte maison pour disner et se mist devers le feu, pour ce qu’il faisoit froit. Et lui estant tout droit et soy chauffant, le dit Pontenier qui illec estoit present avec le dit Potereau, commança à parler de l’ostel de Foussegrant et des cens et rentes dudit hostel ; et dit ledit Pontenier audit Loys que il se attendoit que Jacques du Pellonier, mary de la seur dudit Loys, se rendist illecques à eulx, pour les mettre hors de debat, et que il lui avoit escript qu’il se y rendist. Lequel Loys respondi audit Pontenier que ledit Jaques lui en avoit bien escript, mais que à la verité il ne vouloit point obtemperer à ses dictes lettres, et que aussi ne vouloit point que le dit Jaques lui vendist ne transportast ses heritaiges, et que il estoit bien vray que le dit du Pellonier et sa femme, seur dudit Loys suppliant, et à cause d’elle y avoient la tierce partie, et en la dicte tierce partie il ne mettoit point d’empeschement qu’il ne la lui peust bien avoir vendue, mais que au regard des dictes deux pars qui lui appartenoient et estoit son vray heritaige, il les leveroit, et qu’il avoit fait assavoir à l’eglise de Linieres, à tous ceulx qui devoient les diz cens et rentes à cause dudit hostel de Foussegrant, qu’ilz lui venissent paier audit jour tout ce qu’ilz en devroient à cause des dictes deux pars dudit hostel de Foussegrant, ainsi qu’il estoit acoustumé estre fait audit jour. Lequel Pontenier qui estoit affectionné d’avoir le dit lieu de Foussegrant, pour ce qu’il avoit acquis plusieurs beaulx et notables heritages illecques environ et touchant aus dictes terres et bois de Foussegrant, dist qu’il les avoit levez et qu’il en estoit possesseur, et garentiroit bien à ceulx qui les lui avoient paiez. Et lors le dit Loys dist audit Pontenier que ceulx qui les avoient paiez audit Pontenier les lui paieroient une autre foiz, et que, se ilz ne les lui paioyent, qu’il les feroit adjourner aux Requestes à Paris. Et lors le dit Pontenier dist qu’il en prendroit le garendiement, en tirant à garant Jacques du Pellonier. En disant lesquelles parolles, survindrent illecques deux ou trois personnes qui devoient aucuns desdiz cens, et entre lesquelz estoit ung nommé Huguet Seguyn. Lequel demanda audit Loys où se paieroient les diz cens, et qu’il en devoit et qu’il les vouloit paier. Et lors le dit Pontenier dist audit Seguyn qu’il avoit mis le feu ès estoupes ; et dist le dit Pontenier qu’il se opposoit, afin que le dit Loys ne levast les diz cens et rentes. Auquel le dit Loys dist qu’il ne le mettroit point hors de sa possession desdictes deux parties de ses diz cens et rentes, et qu’il leveroit ce qu’il lui en estoit deu, et pour ceste cause estoit venu illecques, et fait assavoir que on les lui venist paier. Lequel Pontenier le contredist, et dist audit Loys qu’il ne leveroit pas sesdiz cens et rentes, et qu’il avoit baillé bonne recompensacion audit Jaques. Et veant le dit Potereau, chastellain de Chauvigny, le dit debat qui commançoit entre eulx, leur dist et pria qu’ilz n’eussent point de debat entre eulx et qu’ilz s’en soubmissent du tout sur le dit Jaques. Lequel Loys, en voulant monstrer que les dictes deux parties lui appartenoient raisonnablement et qu’il ne vouloit point de question ne de noise audit Pontenier, mais lui monstrer par le dit Jaques, de qui il se disoit avoir le droit que lesdictes deux parties lui appartenoient, dist qu’il estoit content qu’ilz alassent par devers le dit Jaques au giste, pour savoir se il les pourroit accorder, mais que pourtant le dit Pontenier qui disoit qu’il avoit levé les diz cens, s’il vouloit demourer en possession desdictes deux parties, ne les leveroit pas, mais les leveroit le dit Loys. Et lors le dit Pontenier recusa et se excusa d’aler par devers le dit Jaques du Pellonnyer si prestement, disant qu’il estoit empeschié pour les besongnes de nostre amé et feal conseiller l’evesque de Poictiers

Guillaume Gouge de Charpaignes fut évêque de Poitiers de 1441 à 1449. (Cf. ci-dessus, p. 116, note.)

, en contredisant et disant que le dit Loys ne leveroit point les diz cens et rentes. Lequel Loys voyant l’affection indeue que le dit Pontenier avoit sur son heritaige, et le vouloit avoir par voye oblique, à l’occasion de ce qu’il avoit plusieurs autres heritaiges illec environ et touchans aux terres et bois de Foussegrant, comme dit est, et qu’il avoit esté content d’aler par devers le dit Jaques du Pellonyer, pour monstrer clerement quel droit ou tiltre le dit Pontenier avoit ès dictes deux parties dudit heritaige, lesquelles veritablement appartiennent audit Loys, fut mal content des termes en quoy il avoit veu et veoit le dit Pontenier, et lui dist telles paroles ou semblables : « Villain,…

Sic. Quelques mots omis par le scribe.

et vous avoir mon heritaige et sans cause ». Et incontinant le dit Ponthenier lui dist qu’il avoit menty et l’appella ribault, et tira son espée toute nue contre le dit suppliant, lequel n’avoit lors cousteau, dague, espée ne baston, et fut triste et merencolieux de ce que le dit Pontenier l’avoit desmenti et appellé ribaut, et avoit tiré l’espée nue sur lui, et regarda entour de lui se il y avoit aucun baston ou autre chose pour soy deffendre dudit Pontenier, lequel tenoit tousjours son espée nue en sa main, et se esmeut si très fort que à peine le povoit on tenir, et disoit qu’il n’estoit point villain. Et ce pendant le dit Loys yssi hors de la maison et trouva ung pal de palisse, et incontinant qu’il fut hors dudit hostel, la porte dudit hostel fut fermée. Lesquelz Loys et Pontenier le dit Potereau, chastellain, prioit et requeroit pour Dieu qu’il n’y eust point de noise entre eulx. Lequel Loys entra oudit hostel et le dit Pontenier appella son varlet, lequel ala à luy et mist son espée nue au poing. Lequel Loys qui trouva son espée en la dicte maison, yssi à l’uys et, rencontré devant lui le dit Pontenier et son varlet, qui avoient leurs espées nues, appella le dit Loys le dit Gilet Ogier, paige ou valeton de l’aage de xvii. ans ou environ, son paige, et tirerent aussi les diz Loys et page leurs espées, et les tindrent chascun la sienne ou poing. Et quand ilz furent ainsi l’ung devant l’autre, le dit Loys dist audit varlet dudit Pontenier trois ou quatre foiz qu’il estuiast son espée, et que au regard dudit Pontenier, son maistre, il ne lui en chaloit, et vouloit la noise estoupper entre eulx encommancié en la dicte maison. Lequel varlet n’en voult riens faire, et aussi le dit Pontenier, son maistre, ne le vouloit pas, mais lui deffendoit. Et lors le dit Loys dist audit Gilet, son page, qu’il la lui fist estuier. Lequel Gilet, par commandement dudit Loys, son maistre, à tout une petite espée qu’il avoit, s’adreça au varlet dudit Pontenier. Lequel ala à son varlet, et semblablement le dit Loys ala au sien, et se entremeslerent ensemble, et chargerent si fort les diz Pontenier et son varlet sur le dit Loys qu’ilz le firent tomber par deux ou trois foiz à terre et sur une glace, et le frapperent de leurs espées, tant d’estoc que de taille, plusieurs coups, tant que le dit Loys eust couppé le bourrelet de son chapperon, et lui baillerent d’un estoc au long de la poictrine que, se n’eust esté son pourpoint qui estoit gros, il eust esté mort, et furent dudit coup sa robe et pourpoint perciez ; et aussi eut les trois doys de la main senestre fort bleciez et le posse de la main destre coppé avecques autres coups si avant que le dit pousse ne tient que à ung peu de peau. Et dient les cyzurgiens (sic) et barbiers qu’il est en adventure d’en perdre la main. Et se ne feust qu’il se couvroit de son espée, le dit Pontenier et son dit varlet, qui de bien près le servoient et suyvoient, l’eussent tué. Lequel Loys, soy voyant ainsi mutilé et blecié et qu’il perdoit tout le sang, dist et crya audit Gilet, son page : « Helas, je suis mort ! » par ce que les diz Pontenier et son varlet le suyvoient de près et le chargoient. Et lors print à soy deffendre et ferir le plus asprement qu’il peut, telement que avec l’aide dudit Gilet, son page, le varlet dudit Pontenier s’en print à fouyr en la maison dudit Charles, et clouy l’uis après lui, ou autre estant en icelle maison. Et aussi se cuida le dit Pontenier retraire en icelle maison, laquelle il trouva close. Auquel Pontenier le dit Loys ainsi mutilé et eschauffé et le dit Gilet, en le suyvant, baillerent ung cop ou deux sur la teste avec autres coups qu’ils lui baillerent autre part, tellement que le dit Pontenier tumba à terre ; et depuis qu’il fu tumbé et blecié, le dit Loys qui estoit tout esmeu, blecié et tout alteré en son entendement, le frappa de l’espée qu’il tenoit par les jambes et le fist frapper par le dit Gilet par les piez et par les jambes plusieurs coups, et lui eust encores donné autres coups de son espée tant sur la teste que autres parties de son corps, se n’eussent esté les assistans qui les desmeurent et empescherent. De laquelle bateure le dit Pontenier, six ou sept heures après, ala de vie à trespassement. A l’occasion duquel cas le dit suppliant, doubtant pugnicion ou rigueur de justice, s’est absenté du pays et n’y oseroit jamais retourner, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties ; humblement requerant que, attendu que le dit Pontenier tira le premier à l’espée et son dit varlet, desmenty le dit suppliant et l’appella ribaut, que le dit Loys tendoit de son povoir à appaisier le dit debat, et se condescendi, pour avoir accord entre lui et le dit Pontenier, aler par devers le dit du Pellonyer, duquel le dit Pontenier disoit avoir le dit transport, et à quoy le dit Pontenier ne voult condescendre, combien que au commencement il en feust d’acord, que les diz supplians n’avoient audit Pontenier paravant aucun debat, hayne ou malvueillance, mais le semonny le dit Loys à disner avec lui, le dit jour de dimanche, par quoy [appert] que entre eulx n’avoit aucune hayne precedente, et que le dit Loys est homme de bon fame, renommée et honneste conversacion, non actaint ou convaincu d’aucun villain cas, blasme ou reprouche, et nous a servy au fait de noz guerres à l’encontre de nos ennemys et adversaires les Anglois, en plusieurs lieux et voyages, ès quelz il a largement frayé et despendu du sien, et ont ses predecesseurs et lui tousjours gardée leur loyaulté envers nous, que le dit cas est advenu de chaude cole, et ne sont premiers mouvemens en la puissance d’omme, et ne se povoit le dit Loys arrester ne restraindre de courir sus audit Pontenier, quant il se vit ainsi blecié et mutilé, qu’il est dolant et desplaisant dudit cas et ne cuidoit pas ainsi avoir blecié le dit Pontenier, que le dit Gilet est ung jeune page qui cuidoit aidier audit Loys, son maistre, né et extrait de bons parens, non actaint d’aucun villain cas, il nous plaise sur ce leur pourveoir. Pour quoy nous, etc., aus diz supplians et chascun d’eulx, etc. avons remis, quicté et pardonné, etc

La veuve et les héritiers de Jean Pontenier s’opposèrent à l’entérinement et à l’exécution des lettres de rémission obtenues par Louis d’Authon. Dix ans après, cette affaire n’était pas encore réglée, et l’on ne peut savoir comment elle le fut. Peu de temps après le meurtre, les deux filles du défunt, Jeanne et Radegonde, et leurs maris, Pierre Groleau et Jean Favereau, tous deux licenciés ès lois, avaient obtenu des lettres ordonnant de prendre au corps et de constituer prisonniers au Palais à Poitiers Louis d’Authon et ses complices, accusés d’assassinat avec guet-apens et de propos délibéré, ou, s’ils ne pouvaient être saisis, de les ajourner sous peine de bannissement et de confiscation de leurs biens. En vertu de ces lettres, d’Authon et son valet Augier furent assignés à comparaître devant le sénéchal de Poitou, ou son lieutenant à Poitiers. Ne s’étant point présentés au jour dit, ils furent ajournés de nouveau à deux reprises différentes. Le 8 mars 1446, L. d’Authon fit produire par son procureur les lettres de rémission et de grâce qu’il s’était fait délivrer dans l’intervalle, et réclamer leur enregistrement. Ses adversaires s’opposèrent à l’entérinement et, les parties ouïes et appointées en droit, le sénéchal rendit une sentence, le 28 mai 1446, par laquelle il était ordonné que le meurtrier se présenterait en personne pour requérir le profit de sa rémission. Le procureur de Louis d’Authon releva appel de ce jugement aux jours de Poitou du Parlement commencé en novembre de cette même année. La cour une fois saisie, l’appelant fit défaut, obtint des remises successives, et d’autres empêchements étant survenus aux opposants, les procédures restèrent longtemps suspendues. Sur une nouvelle requête des héritiers de Jean Pontenier, le Parlement manda le 20 mars 1455 n.s. à son premier huissier ou à tout sergent royal d’ajourner derechef et personnellement Louis d’Authon et Gilles Augier, pour répondre au procureur général à toutes fins et aux plaignants à fin civile seulement, sous peine de bannissement et de confiscation et d’être convaincus et punis de l’homicide susdit. Le 28 juin suivant, d’Authon, prétendant que, pour les besoins de sa cause, il lui était nécessaire d’obtenir certaines pièces de procédure autrefois faite devant le sénéchal de Poitou, et craignant de se les voir refuser, se fit délivrer par la cour un compulsoire adressé au sénéchal, à son lieutenant et à son greffier, leur enjoignant d’envoyer de suite à Paris les pièces en question, closes et scellées, par un messager sûr, et aux frais du requérant. (Arch. nat., X2a 27, fol. 21 v° et 43 v°.) Ensuite on perd les traces de cette affaire, et l’on ne peut que constater que, dix ans après le crime, aucune réparation n’avait encore été accordée aux enfants de la victime.

. Si donnons en mandement par ces presentes au seneschal de Poictou, ou à son lieutenant, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois de decembre l’an de grace mil iiiic xlv, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion de son grant conseil. Pichon. — Contentor. E. Du Ban. Visa.

MLXXXII Janvier 1446

Rémission accordée à Charles de Varennes, écuyer, servant en la compagnie du sire d’Orval, pour un meurtre commis à la suite d’une querelle, pendant la dernière expédition d’Allemagne, sur un homme de sa compagnie.

AN JJ. 177, n° 133, fol. 88 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 230-235

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Charles de Varennes, escuier

Ces lettres étant adressées au sénéchal de Poitou en première ligne, on doit admettre que ce Charles de Varennes avait sa principale résidence dans les limites du ressort de la sénéchaussée. Nous n’avons par ailleurs rien trouvé relativement à ce personnage. Les registres du Trésor des chartes contiennent une rémission en faveur sans doute d’un membre de la même famille, mais que nous n’avons pas publiée, parce qu’elle est à l’adresse du sénéchal de Saintonge. Pierre de Varennes, qualifié chevalier, s’était rendu coupable du meurtre de frère Jean Bouer, prieur de Tonnay-Boutonne, « homme brigueux, rioteux, efforceur de femmes, etc. » Les lettres qui lui furent octroyées, en mars 1380, relatent avec détail et précision les services militaires de ce Pierre de Varennes, sa participation à la bataille de Cocherel, sa prise avec Du Guesclin, etc. (JJ. 116, fol. 154.)

, aagé de vint trois ans ou environ, contenant que, ou mois de septembre mil iiiic xliiii, le dit suppliant et Jehan Esgrin, son cousin germain, estans ou païs d’Almaigne, en la compaignie de nostre chier et amé cousin le sire d’Orval, ou voyage qui derrenierement a esté fait ou dit païs d’Almaigne

Arnaud-Amanieu d’Albret, seigneur d’Orval, était le troisième fils de Charles II sire d’Albret et d’Anne d’Armagnac. Dans des quittances des 18 avril 1448, 15 octobre 1449 et 14 juin 1451, scellées de son sceau, mentionnées par le P. Anselme, t. VI, p. 217, il est qualifié « Amenion de Lebret, seigneur d’Orval, capitaine de cent lances et des archers de la grande retenue du roi ». Le sire d’Orval fut aussi conseiller et chambellan de Charles VII et lieutenant général pour le roi en Roussillon, où il mourut l’an 1463. Le voyage d’Allemagne dont il est question ici est l’expédition dirigée par le dauphin Louis dans la Haute-Alsace, sous prétexte de porter secours à la maison d’Autriche contre les Suisses, mais dans le but plus réel de débarrasser le royaume des compagnies d’aventuriers qui le désolaient et, se trouvant sans emploi depuis la trêve conclue avec l’Angleterre, se livraient plus que jamais au pillage. L’armée du dauphin, dont le sire d’Orval était l’un des principaux capitaines, se composait en effet de routiers de toutes les nations et comprenait trente mille hommes au moins. Elle s’était concentrée à Langres au mois de juillet 1444. M.A. Tuetey a fait de cette campagne une étude très approfondie et abondamment documentée. (Les Écorcheurs sous Charles VII, 2 vol. in-8°, t. I, p. 148 et s.)

, nostre dit cousin et sa compaignie, logiez en une ville dudit païs nommé en françois le Petit Ague, le dit suppliant et le dit Esgrin furent logiez ensemble en la dicte ville, en la maison d’un homme d’icelle nommé en alment Aguez, lequel estoit charpentier. Et soit ainsi que nostre dit cousin et sa dicte compaignie estans ainsi logiez en icelle ville, ung nommé Philippon de Rodes de la dicte compaignie, pour ce qu’il se congnoissoit à prendre places par eschielles, et qu’il ne povoit avoir ne faire eschielles, sans aide de charpentier, requist à nostre dit cousin qu’il lui feist avoir ung charpentier, car autrement il ne povoit faire ses eschielles et habillemens qu’il vouloit faire. Et alors icellui nostre cousin commanda audit suppliant et Esgrin, son cousin, qu’ilz baillassent audit Philippon leur hoste pour aidier à faire aucuns habillemens que lui faloit faire ; ce que les diz Charles et Esgrin firent voulentiers. Et ce pendant que le dit charpentier besongnoit avecques le dit Phelippon, furent prinses, comme l’en disoit, deux robes de violet en l’ostel dudit charpentier, lesquelles estoient à lui et à sa femme. Laquelle, si tost qu’elle s’en apparceut, elle le courut dire à son mary ou dit logeiz dudit Phelippon de Rodes, et incontinant le dit charpentier laissa la besongne dudit Phelippon et s’en vint en son hostel, acompaigné dudit Phelippon, pour faire ausdiz Charles et Esgrin la complainte de sa perte. Lesquelz ilz trouverent en son hostel, leur logeiz, comme dit est, et adone fist dire le dit charpentier ausdiz suppliant et Esgrin par ung truchement comment on lui avoit prins deux robes de violet, de quoy il en avoit une pour lui et l’autre pour sa femme ; lesquelz lui respondirent qu’ilz en estoient bien marriz et qu’ilz ne savoient qui ce avoit fait, et que du commancement qu’ilz logerent en son hostel, qui lui baillerent de trois chambres qui y estoient l’une fermant à clef, en laquelle ils ne aloient ne ne venoient, ne varletz ne paige qu’ilz eussent, et pour le supporter couchoit lui et sa femme en bon lict, et couchoient en la paille, et qu’ilz ne l’endureroient plus, et que dores en avant ilz coucheroient comme lui, et ses biens auroient devers eulx, afin qu’il ne perdist plus riens qu’ilz ne sceussent comment ; et ce qu’ilz lui avoient souffert, ce n’estoit que de leur grace, en tant que les autres de la dicte compaignie et garnison estant en icelle ville, ne laissoient riens à leur hoste. Et sur ce print les parolles le dit Phelippon, en disant que c’estoit mal fait et qu’ilz feroient que folz, s’ilz prenoient riens du sien et qu’ilz s’en donnassent bien garde comment ilz feroient, et qu’ilz n’avoient si bon cheval qu’il n’y encourust (sic), veu que nostre dit cousin le sr d’Orval lui avoit baillé. A quoy respondirent les diz supplians et Esgrin qu’il entreprenoit les paroles trop haultes et qu’il n’en avoit que faire, veu qu’ilz n’entreprenoient riens sur lui, et qu’il s’en avoit beau passer. Lequel Phelippon respondi que pour eulx il n’en laisseroit jà à parler et que ainsi n’yroit il pas. Et le dit suppliant lui dist qu’il s’en alast bien tost à leur logeiz et qu’il ne les otra[ge]ast plus de paroles ou autrement il le feroit marry, et qu’il n’y arrestast plus. Dont le dit Philippon commança à soubrire et secouer la teste, en disant que bien poy le craingnoit. Le quel suppliant, voyant que le dit Phelippon se mocquoit de lui, comme il lui sembloit, tira une dague qu’il avoit et vint vers icellui Phelippon et lui cuida donner de la dicte dague, et lui en eust donné, se n’eust esté le dit Esgrin qui se mist au devant ; et en ce debat et [pendant] que on les departoit, plusieurs oultrageuses paroles se disoient d’un cousté et d’autre. Et après se departit le dit Phelippon, en disant qu’il en y auroit de merriz. Et demourerent les diz suppliant, Esgrin et plusieurs autres devant leur logeiz. Et pour les dictes paroles que le dit Phelippon avoit dictes, icellui suppliant esmeu et courroucié ala tantost prendre ung espieu qui estoit appuyé à la porte de son logeiz, et s’en sailly dehors en la rue. Et ainsi qu’il sailloit hors, ung nommé le Bourc de Bieu, armé d’un jacques et une espée seinte, commança à prendre parolles pour le dit Phelippon, en le soustenant, disant que c’estoit mal fait, et que le dit Phelippon estoit bien homme de bien et que à grant peine se laisseroit il oultraiger sans qu’il ne s’en venjast. Lequel suppliant esmeu, comme dit est, dist audit Bourc de Bieu : « T’en fault il parler ? Se tu ne t’en voiz bientost d’icy, je te donneray de cet espieu que je tien sur la teste ; et t’en va bien tost. » Lequel Bourc de Bieu se remua environ deux toises ou trois de là, en parlant tousjours et disant qu’il ne s’en iroit point de là ou il estoit et qu’il n’en laisseroit jà à parler, et que lui et le dit Phelippon logeoyent ensemble, et pour ce en parleroit. Lequel suppliant se esmeut à aler contre le dit Bourc de Bieu pour le frapper, lequel Bourc de Bieu tourna le doz pour fouyr, et le dit suppliant faigny d’aler après, et toutesvoyes il ne le suivit point pour ceste foiz. Et quant le dit Bourc de Bieu fut tourné et vit que le dit suppliant ne le suivoit point, il tourna le visaige contre icellui suppliant, en disant tousjours parolles agressans et actaignans comme dessus. Lequel suppliant, ainsi esmeu comme dit est, commança à dire en alant contre le dit Bourc : « Truant, en parleras tu meshuy ? » Lequel Bourc tourna le doz, comme s’il s’en voulsist fouyr, et le dit suppliant le poursuit et le frappa du manche dudit espieu qu’il tenoit en sa main sur la teste ung coup. Duquel cop ilz tumberent tous deux à terre ; et se releva incontinant le dit suppliant. Et le dit Bourg fut relevé et emmené ou logeiz de Raymonnet du Chastel, que on disoit estre son oncle. Et la nuyt ensuivant, icellui Bourg par faulte d’appareil, bon gouvernement ou autrement, ala de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas icellui suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté et ne ose seurement converser ne repairer entre gens et mesmement ses parens et amys, ne n’oseroit, se nostre grace ne lui estoit sur ce impartie, si comme il dit, en nous humblement requerant que, attendu que icellui suppliant nous a bien servi ou fait de noz guerres et autrement, et aussi ont fait plusieurs ses parens et amys, que le dit fait est advenu de chaude colle, et que lesdiz Phelippon et Bourc de Bieu avoient esté et estoient agresseurs de paroles, consideré aussi le jeune aage dudit suppliant et que lui qui est noble et jeune homs griefve chose lui estoit d’avoir esté et d’estre ainsi injurié de paroles, etc., nous lui vueillons sur ce nostre grace impartir. Pour quoy nous, les choses dessus dictes considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes au seneschal de Poictou, aux bailliz de Berry et de Saint Pere le Moustier, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois de janvier l’an de grace mil cccc.xlv, et de nostre regne le xxiiiie

M. Tuetey a imprimé le texte de ces lettres de rémission parmi les pièces justificatives de son ouvrage Les Écorcheurs sous Charles VII, t. II, p. 395.

.

Ainsi signé : Par le roy, vous, le conte de Tancarville, les sires de la Varenne, de Precigny

Il a été question à plusieurs reprises de ces trois personnages dans les pages qui précèdent.

et de Maupas

Jean du Mesnil-Simon, seigneur de Maupas à cause de Philippe de Rochechouart, sa femme. (Cf. ci-dessus, p. 171, note 2.)

presens. — Visa. Rolant. Contentor. E. Du Ban.

MLXXXIII Janvier 1446

Rémission octroyée à Méry Lorin, clerc, à Simon Lorin, son frère, et à deux autres habitants de Thuré près Châtellerault, ses complices, coupables de meurtre avec guet-apens sur la personne de Jean Girault, qui lui-même, neuf ou dix mois auparavant, avait fait battre et mutiler d’une oreille ledit Méry Lorin.

AN JJ. 177, n° 135, fol. 90 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 235-239

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Bery (sic) Lorin, clerc, prisonnier ès prisons de nostre amé et feal conseiller l’evesque de Poictiers, Simon Lorin, son frere, jeunes homs, aagié de xx. ans ou environ, Jehan de Lavau, simples homs de labour, chargié de femme et d’enfans, et de Pequin Pateau, aussi homme de labour, chargié de femme et de sept petiz enfans, tous natifz de la parroisse de Thuré près Chastelleraut, contenant que, depuis ix. ou x. mois ença, le dit Mery Lorin fut assailly par Jehan Girault, dit Triboulemesnaige, Perrinet du Chasteigner, Thibelon Foulquet et par ung appellé Berton, autrement Ogier, et par eulx telement batu, au pourchaz d’un appellé Heliot Giraut, frere du dit Triboulemesnaige, qu’ilz lui firent xxii. ou xxiii. playes en sa personne, dont il y avoit les aucunes en la teste, et entre celles de la teste lui coupperent ou près une oreille, par quoy lui qui estoit deliberé estre homme d’eglise est inhabille à jamais l’estre. Dont icellui Mery print en lui si grant desplaisance et merencolie qu’il en estoit comme à demy hors de son entendement, et a, à cause de la dicte bateure, esté bien six mois au lict malade. Et depuix le dit cas avenu, a fait faire diligence par justice de faire punir les diz malfaiteurs ; les quelz en ont par la court du dit lieu de Thuré esté longuement detenuz en procès, où il a despendu largement du sien, et pour ce que on [n’]en faisoit expedicion estoit très fort courroucié, comme tout merencolieux. Et advint que, lui estant ainsi courroucié et comme deux ou trois jours après Noel, le dit Mery estoit ou cymetiere du dit lieu de Thuré, vit le dit Jehan Giraut et oyt que le curé ou vicaire du dit lieu le semonnoit et prioit de soupper avec lui, et entendit que le dit Jehan s’accorda d’y aler, et lors le dit Mery s’en ala en sa maison, et dist au dit Simon Lorin, son frere, suppliant, qu’il preinst ung espieu en sa main et alast dire au dit Jehan de Lavau, suppliant, son compere, qu’il preinst sa juisarme en sa main, et que le dit Girault souppoit avec le dit vicaire, et qu’ilz se venissent rendre à lui en certaine piece de terre appartenant à Regnault Le Doulx. Et aussi dist le dit Mery au dit Pequin Pateau, suppliant, qui estoit ilec, qu’il preinst sa juysarme et alast avec lui, et que le dit Jehan Girault estoit avec le dit vicaire à soupper, et qu’ilz alassent en la dicte piece de terre, et que là les diz Jehan de Lavau et son frere se devoient rendre, ce que le dit Pequin lui accorda de faire. Et de fait alerent en la dicte piece de terre, où les diz Symon Lorin et Jehan de Lavau se vindrent rendre à eulx. Et adonc le dit Mery Lorin va dire à tous les diz autres supplians telles paroles ou semblables en substance : « Vous savez comment j’ay esté ainsi injurié, mutilé et batu par le pourchaz de Jehan Giraut. Il souppe avec le vicaire. Je vous prie, alons le guetter sur son chemin, quant il vendra en sa maison, et je lui feray semblablement qu’il m’a fait faire ». Et atant se partirent tous ensemble et alerent avec le dit Mery jusques en ung lieu appelé Champbrenault qui est entre petiz boys, et ilec les fist le dit Mery embuschier [à] l’orée d’un chemin, attendans quant le dit Girault vendroit. Et attendirent ilec quelque demye heure, et pour ce qu’il ne venoit point, ilz se mirent à chemin pour eulx en retourner ; et ainsi qu’ilz s’en retournoient, ilz oyrent bruit de gens, et adonc le dit Mery va dire : « Veez le cy venir », et se mist icellui Mery [ou milieu] du chemin. Et ainsi qu’il y estoit, [vit] le filz du dit Giraut qui venoit le premier contre le dit Mery, et demanda qui c’estoit, et le dit Mery respondit : « Mais toy ? » Et lors le dit filz l’attendit et dist telles parolles ou semblables : « Nous sommes mors ». Et le dit Jehan s’avança pour venir au cry de son dit filz. Et quant le dit Mery vit qu’il fut en son avantaige, il tira une espée qu’il avoit et en donna au dit Jehan Girault ung cop sur la teste, dont il cheut à terre, et en après le dit Mery lui donna ung autre cop ou deux par les jambes, et les diz autres supplians aussi frapperent sur lui, sans ce qu’ilz saichent proprement, pour ce que on ne veoyt goute, par quel endroit ce fut, et le batirent très fort et atant se departirent, non saichans qu’il fust mort, mais cuidans ne l’avoir que batu. Et toutesvoyes il leur a esté rapporté qu’il a esté trouvé tout mort en la place. Depuis lequel cas avenu, le dit Jehan de Lavau fut prins prisonnier et mené ès prisons de Chastellerault, de par le dit evesque de Poictiers, comme seigneur temporel et hault justicier du dit lieu de Thuré. Et le dit Mery fut tantost après aussi prins par ceste ville de Chinon, où il estoit venu vers nous pourchasser sa grace et remission et celle des diz autres supplians, et mis ès prisons du dit lieu de Chinon par le prevost de noz mareschaulx ; des quelles il a esté rendu au dit evesque de Poictiers, comme son clerc, qui de present le tient en ses prisons. Et sont les diz de Lavau et Lorin encores detenuz ès prisons du dit evesque de Poictiers, où ilz sont en dangier de finer miserablement leurs jours. Et les diz Simon Lorin et Pequin Pasteau s’en sont fouyz et absentez du pays, et n’y oseroient jamais repairer ne converser, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, si comme dient les diz supplians. Et pour ce nous ont iceulx supplians humblement supplié et requis que, attendu la mutilacion du dit Mery Lorin, la jeunesse de son dit frere, qu’il n’a que xx. ans, comme dit est, et aussi en pitié et compassion des femmes et enfans des diz autres deux supplians, et que jamais iceulx supplians ne aucuns d’eulx ne furent reprins, convaincuz ou condempnez d’aucun autre vilain cas, blasme ou reprouche, ains ont esté et sont en tous autres cas bien famez et renommez, nous leur vueillons sur ce impartir nosd. grace et misericorde. Pour quoy nous, inclinans à la supplicacion des diz supplians, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, etc., leur avons remis, quictez et pardonnez, etc. Si donnons en mandement par ces presentes à noz seneschal de Poictou et bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d’Anjou et du Maine, et à tous noz autres justiciers, etc. Et pour ce que les diz supplians, qui sont plusieurs, pourroient avoir à besoingner de ces presentes chascun à par soy et en divers lieux, nous voulons que au vidimus d’icelles, fait soubz seel royal, plaine foy soit adjoustée comme à l’original. Donné à Chinon, ou mois de janvier l’an de grace mil iiiic xlv, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, monseigneur le daulphin, le conte de Foix

Gaston IV comte de Foix et de Bigorre, né en 1423, fils aîné de Jean de Grailly, comte de Foix, et de Jeanne d’Albret, sa seconde femme, succéda à son père l’an 1436. Il prit part à la journée de Tartas (1442), fut en Guyenne lieutenant de l’armée royale, commandée par Dunois, et avec laquelle ils firent la conquête des villes de Dax, Bordeaux et Bayonne, l’an 1453. Gaston de Foix se distingua encore à la bataille de Castillon, gagnée sur les Anglais, où furent tués Talbot et son fils. Il mourut à Roncevaux, le 21 juillet 1472. (Voir H. Courteault, Gaston IV comte de Foix, un vol. in-8°, Toulouse, 1895.)

, vous, l’arcevesque de Reims

L’archevêque de Reims était alors Jacques Jouvenel des Ursins. Né le 14 octobre 1410, fils de Jean Jouvenel et de Michelle de Vitry (voy. ci-dessus, p. 171), archidiacre de Paris, président de la Chambre des comptes, il fut créé archevêque de Reims, après le décès de Renaud de Chartres, le 25 septembre 1444 ; il conserva ce siège jusqu’en 1449, et, le 5 septembre de cette année, fut nommé administrateur de l’évêché de Poitiers et du prieuré de Saint-Martin-des-Champs à Paris. Jacques Jouvenel mourut à Poitiers, le 12 mars 1457.

, les srs de la Varenne, de Pressigny et de Maupas, et autres presens. Giraudeau. — Visa. Contentor. E. Duban.

MLXXXIV Janvier 1446

Rémission en faveur d’Osanne Boisseleau, femme de Guillaume Herbetin, prisonnière à Montaigu depuis trois ans pour crime d’infanticide.

AN JJ. 177, n° 137, fol. 91 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 239-241

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Ozanne Boisselelle, aagiée de xxv. ans ou environ, femme de Guillaume Herbetin, povre homme de labour, contenant que, trois ou quatre ans [a] ou environ, la dicte suppliante, paravant qu’elle fust conjoincte par mariage avec le dit Herbetin, elle estoit demourant en l’ostel de Nicolas Regnault et sa femme, ès forsbourgs de Montagu, durant lequel temps ung nommé Racinoux, qui estoit aussi demourant ès diz forsbourgs, se accointa d’elle et telement qu’il la congneut charnelment et l’engrossa d’enfant. Et après, elle estant grosse, environ la feste de Noel ensuivant, fut conjoincte par mariage avec le dit Herbetin, et le dit mariage consommé et acomply, s’en alerent demourer ou bourg de Basoges en la chastellenie de Montagu, où estoit demourant le dit Herbetin et sa mere. Et environ la feste de Penthecoste après ensuivant, ung certain jour, la dicte suppliante estoit demourée en l’ostel de son dit mary toute seule, et icellui son mary et sa mere estoient alez aux champs, saichant icelle suppliante estre près de son terme de avoir enfant, ce qu’elle avoit tousjours celé à son dit mary, disant qu’elle estoit malade du mal monsieur saint Fiacre

On invoquait particulièrement saint Fiacre pour obtenir la guérison des tumeurs (viscum S. Fiacre, fix S. Fiacre). Cf. Acta Sanctorum (Bollandistes), août, t. VI, p. 599.

, et soubz umbre d’icelle maladie avoit fait difficulté d’aler aux champs, et estoit demourée à l’ostel. Et incontinant que la dicte mere et son mary furent hors de la dicte maison, la dicte suppliante s’enferma en icelle, et tantost après qu’elle fut enfermée, ot un enfant masle ; lequel, pour les destresses qu’elle avoit souffertes et endurées, nasqui tout mort, au moins n’y congnoissoit point de vie. Et tantost après qu’elle ot eu le dit enfant, la mere de son dit mary vint à la porte de son dit hostel, et ainsi qu’elle sonna à la dicte porte, la dicte suppliante mussa le dit enfant soubz la coette du lict, pour doubte que la dicte mere le vist ou s’en apparceust. Et après ce qu’elle s’en fut alée, la dicte suppliante print son dit enfant tout mort et l’emporta en ung vergier, et le gecta en ung puiz. A l’occasion duquel cas, la dicte suppliante a esté prinse par la justice du dit lieu de Montagu, où elle est detenue en prison fermée, à grant pouvreté et misere, et est en voye de y miserablement finer ses jours, se noz grace et misericorde ne lui sont sur ce imparties. Et pour ce nous a humblement fait supplier et requerir que, attendu que, pour la doubte et crainte de son dit mary, elle supporta plusieurs grans douleurs, afin qu’il n’apparceust qu’elle fust grosse d’enfant, que son dit enfant est né mort, au moins n’y congneut point de vie, qu’elle a jà par trois ans ou environ esté prisonniere à grant misere, nous lui vueillons sur ce subvenir de nos dictes grace et misericorde. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde estre preferée à rigueur de justice, à icelle suppliante avons ou cas dessus dit quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois de janvier l’an de grace mil cccc. xlv, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Rolant. — Visa. Contentor. E. Duban.

MLXXXV Février 1446

Rémission en faveur de François de Montcatin, capitaine de la Roche-sur-Yon, qui, entre autres méfaits, avait fait emprisonner sans motif et dépouiller Geoffroy Le Ferron, trésorier de France, et avait résisté à main armée à Guy d’Aussigny, lieutenant et chambellan du roi, envoyé à la Roche-sur-Yon pour le mettre en état d’arrestation.

AN JJ. 177, n° 159, fol. 106 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 241-252

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de François de Montcatin

Cet aventurier italien qui avait surpris la faveur du roi René, duc d’Anjou, en lui faisant croire qu’il connaissait un secret pour fabriquer les métaux précieux, n’était qu’un repris de justice. Incarcéré à Nantes et convaincu une première fois d’avoir usé de sortilèges et évoqué les malins esprits, il avait été condamné à la prison perpétuelle. Comment parvint-il à s’échapper, à obtenir la capitainerie de la Roche-sur-Yon et eut-il encore le crédit de se faire délivrer ces lettres de rémission, après les violences qu’il avait exercées contre un trésorier de France et sa rébellion à main armée contre un lieutenant du roi ? Toujours est-il que François de Montcatin ne profita guère de la grâce royale. Ses crimes avaient passé la mesure. La plainte que Geoffroy Le Ferron avait déposée contre lui donna lieu à un procès dont le Grand conseil s’attribua la connaissance. Les antécédents de l’aventurier étaient notoires. On le jugea non seulement sur l’affaire de la Roche-sur-Yon, mais sur l’ensemble des actes criminels relevés contre lui, et il fut condamné au supplice du feu, « tamquam hereticus ac demonum invocator, ex nostra et magni nostri consilii ordinacione, expost combustus et ad mortem executatus fuerat », lit-on dans l’arrêt rendu, plusieurs années après, contre ses complices (Arch. nat., X2a 26, fol. 272) et dont il sera question plus longuement dans une autre note (ci-dessous, p. 247). L’exécution de François de Montcatin, d’après ce texte, paraît avoir eu lieu vers la fin de mars 1446 ou au commencement du mois suivant, en même temps sans doute que celle de Jacques Chabot.

, natif de Montcatin en Toscanne, capitaine de la Roche sur Yon pour nostre très chier et très amé frere le roy de Sicille, duc d’Anjou

Au sujet de la possession de la châtellenie de la Roche-sur-Yon par le duc d’Anjou, cf. notre t. VI, p. 233, note 3.

, contenant que, ung an après que nostre dit frere le remist en son service, il se accointa de son confesseur, par lequel il fist dire à nostre dit frere qu’il savoit maniere de faire argent d’arquemye, et qu’il feroit merveilles de y besoingner qui lui vouldroit bailler place pour ce faire. A quoy, sur son donné à entendre, nostre dit frere acquiessa et lui bailla la capitainerie de la dicte Roche sur Yon, et, en la presence de nostre dit frere, en la ville d’Angiers, pour acomplir ce qu’il avoit promis dudit argent d’arquemye, il print ung lingot d’argent, le mist en son pongnet bien à la moitié, puis rebrassa ses manches de sa robe, et ce fait le tira entre deux doiz, le laissa cheoir en ung croiset à fondre argent et mist ung charbon dessus, en maniere que nostre dit frere ne s’en apparceust point. Et ainsi par plusieurs foiz en a abusé, et lui porta son fait et conduite envers nostre dit frere le confesseur, l’aumosnier et ung surnommé Cotignon, soubz umbre de ce que le dit suppliant leur promettoit que, se son dit fait aloit bien, qu’il leur monstreroit et feroit quelque bien de la science de la dicte arquemye. Et depuis, c’est assavoir environ la veille de la Conception de Nostre Dame mil cccc. xliiii, arriva audit lieu de la Roche sur Yon Geuffroy Le Feron

Geoffroy Le Ferron est dit homo notabilis, originaire de Nantes ; il avait été, à cause de sa bonne renommée et de sa compétence spéciale, retenu en qualité de conseiller du roi et trésorier de France, et s’était toujours bien comporté dans l’exercice de cette charge. Le lieu du Souchet lui appartenait. Il possédait aussi les terres de Saint-Étienne-de-Mermorte et des Jamonnières qu’il avait achetées de Gilles de Raiz, et pour lesquelles il eut un procès avec Prégent de Coëtivy, auquel Charles VII avait fait don des biens confisqués du feu maréchal, après la condamnation de celui-ci, d’où l’origine du différend. L’amiral d’ailleurs était encore en bons termes à cette époque (déc. 1444) avec Le Ferron et l’avait chargé de l’administration de ses biens et de ses intérêts en Bretagne, ce qui explique pourquoi celui-ci emportait dans sa valise des blancs-seings de ce haut personnage. (X2a 26, fol. 274.) Leur litige ne put être réglé à l’amiable, et même il s’envenima tout à coup par suite d’un acte de violence exercé par des gens de l’amiral contre les propriétés de Geoffroy. Vers la fin de 1448, Guillaume Lescu à la tête d’une bande armée, se disant envoyés de Coëtivy, envahit les lieux du Souchet, des Jamonnières et de Saint-Étienne-de-Mermorte ; ils brisèrent les portes et les fenêtres des manoirs, en arrachèrent les panonceaux royaux, marque de la sauvegarde dont Le Ferron jouissait comme trésorier de France, mirent tout à sac et occupèrent les habitations. Il n’était pas facile à un sujet du roi de France de se faire rendre justice en Bretagne. Le sénéchal de Poitou fut chargé de l’information, mais ne put procéder efficacement. Jean Baillet, conseiller au Parlement, fut commis pour continuer les procédures, faire ajourner Coëtivy et ceux qui par son ordre s’étaient rendus coupables de ces excès, et de mettre les terres litigieuses sous la main du roi. (Lettres du 6 septembre 1449, X2a 26, fol. 32, 33.) Prégent de Coëtivy, retenu pour le service du roi, en compagnie du duc de Bretagne et du connétable de Richemont, et opérant alors en Normandie dont la conquête s’accomplissait avec son concours efficace, obtint de Charles VII à Caudebec, le 8 décembre 1449, des lettres d’état renvoyant son procès à un an. (Arch. hist. de la Saintonge et de l’Aunis, t. VI, 1879, p. 54.) L’amiral fut tué à Cherbourg avant la fin de cette année, et Geoffroy Le Ferron continua les poursuites et exerça ses revendications contre la veuve et les héritiers. On retrouve la trace de cette procédure sur les registres de la cour, aux dates des 14 août 1450, 15 septembre 1451, 26 février, 27 mars, 9 juin et 29 décembre 1452. (X2a 25, au 27 mars 1452 n.s. ; X2a 26, fol. 91 v°, 139, 170, 181 v°, 216.)

Le trésorier de France ne craignait pas de s’attaquer aux puissants et de s’attirer leurs persécutions. Le duc de Bretagne lui devait une somme considérable, qu’il refusait de lui payer. Le Ferron, en appela au roi de France. Comme il s’était mis hors des atteintes directes du duc, ce fut son frère Jean et son beau-frère Jamet Thomas, demeurant à Nantes, qui devinrent les victimes de la vengeance des officiers de ce prince. Le 20 juillet 1448, Jean de Vannes, capitaine des archers du duc, Yves Brezillac et d’autres hommes armés se saisirent de Jean et le conduisirent à Vannes, où il fut longtemps retenu prisonnier et maltraité, frappèrent et blessèrent Jamet Thomas et jetèrent hors de leur hôtel les gens et les serviteurs du frère et du beau-frère. Une information fut faite d’abord à Montaigu, par ordonnance du sénéchal de Poitou, puis à plusieurs reprises des décrets de prise de corps et des ajournements devant la cour du Parlement furent publiés contre les coupables. (Actes des 23 décembre 1448 et 18 mars 1449, X2a 26, fol. 5, 6 v°, 9.)

, et vint denoncier audit suppliant sa venue ung nommé François Byecte

Ce François Biette et Guillaume Levron, mari de Jeanne, nommée deux lignes plus bas, furent compris dans les poursuites exercées contre les complices du capitaine de la Roche-sur-Yon.

. La quelle chose venue à sa congnoissance, soubz umbre de ce que une femme nommée Jehanne Leuvronne lui avoit mandé que le dit Geuffroy lui avoit demandé où estoit le jardin du chastel, et qu’il se doubtoit qu’il voulsist à ceste cause faire quelque chose contre lui, veu que autresfoiz le dit Feron avoit esté cause de sa prison à Nantes, icellui suppliant arresta le dit Ferron ou chastel du dit lieu de la Roche sur Yon, et, environ deux heures après, envoia querir par ung de ses varletz la boiste dudit Ferron en l’ostellerie où il estoit logié en la ville. Et quant il la tint, la mist en ung coffre en la maison neufve qu’il a fait faire ou dit chastel. Ouquel le lendemain vint Jaquet Chabot

Jacques Chabot, écuyer, sr de Pressigny, fils aîné de Tristan et de Jeanne de Rezay. Il fut le principal complice du capitaine de la Roche-sur-Yon dans cette affaire de violence et de séquestration contre Geoffroy Le Ferron. Il s’était rendu coupable de beaucoup d’autres crimes, y compris le rapt d’Agnès ou Anne de Chaunay, pour lequel il fut poursuivi, ainsi que ses deux frères, Germain et Léon, par le père de celle-ci, François de Chaunay, seigneur de Champdeniers, comme on le verra plus loin, à l’occasion des lettres de rémission obtenues par Germain et Léon Chabot, en avril 1446 (après le 16), imprimées quelques pages plus loin. Après avoir longtemps échappé aux sergents chargés de le prendre au corps, Jacques fut enfin mis en état d’arrestation, postérieurement au 3 février 1446 n.s. (Arch. nat., X2a 24. A cette date, il faisait dire au Parlement par son parent Louis Chabot, sr de la Grève, qu’il était tombé de bateau dans la Loire.) Une commission, composée de membres du Grand Conseil et de conseillers au Parlement, instituée pour le juger, le condamna à mort et le fit exécuter, on ne sait exactement à quelle date, mais sûrement à la fin de mars ou au commencement d’avril 1446, comme on le verra dans un autre endroit.

, lequel ennorta le dit suppliant de faire mourir le dit Geuffroy, à quoy il ne se voult consentir. Et après entrerent en parole de la boiste dudit Geuffroy, la quelle fut actainte du dit coffre, et l’ouvry le dit Chabot, en la presence dudit suppliant, et eulx deux visiterent les lettres qui estoient en la dicte boiste, et entre les autres trouverent ung blanc signé de nostre amé et feal chevalier, conseiller et chambellan, le sire [de] Coictivy, admiral de France

Lorsqu’il fut arrêté et incarcéré à la Roche-sur-Yon, Geoffroy Le Ferron se rendait précisément à Taillebourg, auprès de Prégent de Coëtivy, amiral de France. (Arch. nat., X2a 25, à la date du 30 mars 1452 n.s.) Ce célèbre capitaine breton, né vers 1400, était le fils aîné d’Alain de Coëtivy et de Catherine du Chastel. Il dut sa haute fortune en grande partie à l’amitié du connétable de Richemont dont il était le familier, et fut mêlé souvent aux événements de l’histoire du Poitou. Par le traité de Rennes (1432), il fut chargé de garder la place de Mauléon, et Charles VII s’engagea à ne pas le remplacer comme capitaine avant dix ans. (Texte publié par E. Cosneau, Le connétable de Richemont, p. 544.) Il aida puissamment à la réussite de la coalition contre Georges de La Trémoïlle et assista à la journée de Sillé, aux côtés du connétable, rentré en grâce auprès du roi. Créé amiral de France au lieu d’André de Laval, sr de Lohéac (août 1439), il servit fidèlement Charles VII pendant la Praguerie, et particulièrement à la reprise de Saint-Maixent, assiégea et prit la ville de Creil (mai 1441), se distingua aux sièges de Pontoise et du Mans, s’empara de la ville de Coutances, assista Richemont à la bataille de Formigny, et finalement fut tué d’un coup de canon, dans la tranchée, au siège de Cherbourg (août 1450). Tel est le résumé succinct des services rendus à Charles VII par l’amiral de Coëtivy ; il en fut largement récompensé. Outre le gouvernement de la Rochelle, les capitaineries de Granville et de Lesparre, sa charge d’amiral et de nombreuses libéralités pécuniaires, le roi lui fit don des terres et seigneuries de Raiz, Ingrande et Champtocé (22 avril 1443), confisquées sur le maréchal Gilles de Raiz, de la terre et seigneurie de Taillebourg (12 mai 1443), où fut élevée, sous sa garde, Marie, fille de Charles VII et d’Agnès Sorel. Par lettres datées de janvier 1450 n.s., à Jumièges, le roi lui donna encore la terre de Lesparre. (JJ. 180, n° 19, fol. 8.) Il avait épousé, en juin 1442, Marie de Laval, fille de Gilles de Raiz, dont il n’eut point d’enfants. M. Paul Marchegay a publié des documents très curieux, dont quelques lettres missives, relatifs à Prégent de Coëtivy, seigneur de Taillebourg, tirés du chartrier de Thouars. (Arch. hist. de la Saintonge et de l’Aunis, t. VI, 1879, p. 23-88.) On trouve encore des renseignements intéressants sur l’amiral de Coëtivy, et particulièrement touchant son gouvernement à la Rochelle, dans plusieurs affaires criminelles qu’il engagea au Parlement de Paris contre Arnaud Gaillard (X2a 24, aux dates des 1er juin, 15 juillet, 16 et 23 décembre 1445, et 4 mars 1448 n.s.), et surtout dans son procès contre Maurice de Pluscalec. (23 juin 1447, X2a 23, fol. 356 v° ; 26 novembre 1448, X2a 25.) Ses héritiers, nommés dans un acte du 27 mars 1452 n.s., furent sa femme Marie de Raiz, remariée alors à André de Laval, sr de Lohéac, maréchal de France, Alain de Coëtivy, cardinal d’Avignon, Olivier de Coëtivy, chevalier, sénéchal de Guyenne, et Christophe de Coëtivy, écuyer, ses frères. (X2a 25, à cette date.)

. Et dist lors le dit Chabot audit suppliant que, s’il vouloit, que on joueroit bien de ung tour audit Ferron, où il aroit grant dommaige. A quoy le dit suppliant respondy qu’il estoit content et qu’il ne lui chaloit que on lui fist, mais qu’il ne mourust. Et adonc le dit Chabot fist une faulse lettre, de laquelle le dit suppliant fit emplir le dit blanc, et fut mis ou fons de la dicte boiste, la quelle le dit Chabot fist reporter envelopée en ung manteau en la ville. Et tantost après la renvoya, par son page, refermée, audit suppliant, qui la remist en son dit coffre. Et le landemain par le conseil dudit Chabot, fist icelluy suppliant venir devers lui ou chastel le juge, l’advocat fiscal, le procureur, le greffier dudit juge et plusieurs autres des plus notables de la dicte ville, et en leur presence fist venir le dit Ferron, lui fist apporter la dicte boiste, lui demanda se c’estoit la sienne ; lequel respondit que oyl. Et lors lui en demanda la clef, laquelle lui fut baillée par ung des varletz dudit Ferron. Lequel, ce fait, il fist retraire, et, presens les dessus diz, ouvry la dicte boeste, leut et fist lire les lettres qui estoient dedans, et, entre les autres, celle qui avoit esté ainsi faulsement escripte oudit blanc ; laquelle lettre, pour la mauvaistié contenue dedans

Nous connaissons, par l’arrêt du 18 mai 1453, le contenu ou plutôt le sens général de la lettre que Jacques Chabot et Montcatin avaient imaginé de contrefaire et de transcrire au-dessus de la signature de l’amiral de Coëtivy. Elle était adressée à Charles d’Anjou, comte du Maine, et exprimait des sentiments de révolte contre le roi et son gouvernement, soi-disant partagés par les princes du sang : « pessima et sediciosissima verba, nos regnumque nostrum ac ceteros alios de sanguine nostro tangencia », paroles suffisantes, si elles avaient été l’expression de la vérité, pour perdre complètement (destruere) Prégent, Le Ferron et tous les autres. (X2a 26, fol. 272.)

, chascun des dessus diz leurent en blasmant très fort le dit Ferron de porter teles lettres. Non obstant toutes les quelles choses, le dit suppliant a detenu le dit Ferron prisonnier, et de lui a eu unze cens escuz d’or, une douzaine de tasses d’argent du poix de xxiiii. marcs et demy, drap de velours, avecques dix neuf francs cinq solz moins qui estoient en la boeste dudit Ferron, qui furent despenduz au dit lieu de la Roche sur Yon en despense de bouche

Dans les présentes lettres, les mauvais traitements infligés à Geoffroy Le Ferron par le capitaine de la Roche-sur-Yon et ses complices sont exposés très sommairement et fort atténués, ce qui se comprend naturellement. Dans l’arrêt, au contraire, ils sont relatés minutieusement et pour ainsi dire jour par jour, heure par heure, de telle sorte qu’ils tiennent quinze pages du registre du Parlement. Pour compléter un peu ou rectifier la version par trop insuffisante, fournie par le principal coupable, nous signalerons les passages essentiels du texte de l’arrêt, basé sur les informations judiciaires. Parti de Nantes, le 5 décembre 1444, en compagnie d’un nommé Guillaume Rousseau, qui se rendait aussi auprès de l’amiral de Coëtivy, de la part de Guillaume de La Loherie, juge de Bretagne, Le Ferron s’arrêta au Souchet, puis à Machecoul. Le chemin le plus court pour se rendre à Taillebourg, les conduisit à la Roche-sur-Yon, où ils arrivèrent le 7, à heure de vêpres. De l’hôtellerie où ils étaient descendus, ils allèrent se promener dans la ville et rencontrèrent près de la rivière, dans le voisinage d’un petit pont en ruine, trois ou quatre hommes de la garnison, dont Jean de La Brunetière, le jeune, que Le Ferron connaissait, et Alain de Coëtquen. Il les mena chez son hôte et leur offrit à boire. Le soir, ceux-ci revinrent et lui dirent que le capitaine François de Montcatin le priait de se rendre au château ; il les y accompagna. Après une scène avec un prêtre, nommé Eustache Blanchet (depuis convaincu de sorcellerie), qui lui adressa de grossières menaces, il fut mis en présence du capitaine, avec lequel il échangea d’abord quelques paroles de politesse. Puis il lui dit : « Seigneur capitaine, vous m’avez mandé de venir vous trouver, pour vous donner des nouvelles. Je n’en connais point, sinon que j’ai quitté le duc de Bretagne à Nantes et que je dois retourner près de lui à Vannes, avant la Noël prochaine. Si vous ne désirez rien autre chose de moi, je vous prierai de me donner congé. » Montcatin l’interrogea alors sur le but de son voyage, puis subitement, changeant de ton : « Il ne vous suffit pas, lui dit-il, de m’avoir fait autrefois arrêter à Nantes ; maintenant vous venez m’espionner. Mais la place n’est pas si facile à prendre, et je saurai bien me venger de vous, avant que vous n’en sortiez. » Sur ce, Le Ferron protesta que jamais il ne lui avait fait mal ni déplaisir, et que même il avait fait son possible, à l’époque dont il parlait, pour obtenir sa mise en liberté ; qu’il n’était pas venu l’espionner, et ne voudrait pour rien au monde faire chose qui déplût au roi de Sicile, ou à quelqu’un de ses officiers. Et s’adressant aux assistants, il déclara que, si quelqu’un l’accusait et se constituait partie contre lui, il répondrait, autrement qu’on le laissât partir, d’autant qu’étant trésorier de France, s’il avait fait quelque chose de répréhensible, c’était aux maîtres des requêtes de l’hôtel du roi, ou autres ses officiers, à en connaître. Ensuite, comme Montcatin feignait de ne pas croire qu’il fût officier du roi de France, il lui dit que dans la valise restée chez son hôte se trouvaient ses provisions et d’autres papiers, et qu’il le laissât les aller chercher. Ce à quoi le capitaine se refusa et jura qu’il ne sortirait point du château.

Le Ferron fut alors, avec un de ses valets, enfermé dans une tour du donjon, sous la garde de quelques-uns de ceux qui avaient assisté à cette scène. Sa captivité dura pendant deux mois et demi. Le second jour, il comparut de nouveau devant Montcatin qui feignit d’avoir trouvé contre sa victime une preuve terrible et ordonna de le conduire dans une basse fosse très profonde, humide et obscure. Au bout de sept ou huit heures, Blanchet vint l’y trouver et lui dit : « Ribaut, avouez, ou vous allez mourir ! » Geoffroy fut ensuite retiré et enfermé dans un cachot moins profond, mais où il eut à souffrir cruellement du froid, très rigoureux en cette saison, sans pouvoir obtenir de ses bourreaux un manteau ni une couverture. Quelques jours plus tard eut lieu, devant une nombreuse assemblée, composée, outre Jacques et Germain Chabot et les autres familiers du capitaine, de tous les officiers de justice de la châtellenie, la fameuse scène de l’ouverture de la valise et de la lecture de la fausse lettre de Coëtivy au comte du Maine, longuement décrite dans l’arrêt. Tout cela avait pour but naturellement de jeter l’effroi dans l’âme du prisonnier et de l’amener à offrir une grosse rançon. Comme il ne s’y décidait pas de lui-même, Montcatin descendit dans son cachot, lui adressa de violents reproches, et finalement lui déclara qu’il n’avait pas d’autre moyen de recouvrer sa liberté que de racheter son crime par une amende de 25,000 écus d’or, et que, s’il ne consentait pas immédiatement à payer cette somme, il serait mis à mort avant qu’il fût deux jours. Devant ces menaces, Le Ferron essaya d’entrer en arrangement ; il remontra qu’il lui était de toute impossibilité d’arriver jamais à se procurer une rançon aussi énorme ; il offrit 500 écus, à condition qu’on le conduisit à la justice du roi de Sicile. Ce n’était point l’affaire du capitaine ; aussi il persista dans ses exigences et dans ses menaces. Blanchet et les autres vinrent à leur tour essayer de l’intimider et n’en purent rien obtenir. Alors, au milieu de la nuit, le valet qui lui apportait ordinairement à manger, vint le réveiller, lui dit de se préparer à mourir, et lui proposa l’assistance d’un prêtre. Geoffroy, croyant en effet sa dernière heure venue, accepta l’offre et demanda en plus du papier et de l’encre. Des hommes pénétrèrent alors dans le cachot, le dépouillèrent de sa tunique, lui lièrent les mains, le menerent nu-tête à une fenêtre du château ouvrant sur la rivière, et firent mine de le précipiter. Ces tortures et d’autres qu’on lui infligea finirent par décider le malheureux prisonnier à signer une cédule, par laquelle il s’engageait à donner pour rançon 1000 écus d’or vieux, douze tasses d’argent et beaucoup d’autres objets précieux. Il écrivit à son ami Jacques du Plessis, chevalier, sr de la Bourgognière, qui lui apporta la somme. Au moment de la remettre à Montcatin, Le Ferron réclama de nouveau qu’on le remît entre les mains des officiers de justice d’Angers, et comme le capitaine s’y refusa, il eut la force d’âme d’ordonner à du Plessis de remporter l’argent. Montcatin, furieux, redoubla de mauvais traitements contre son prisonnier.

Les officiers du roi de Sicile furent enfin informés de ce qui se passait. Jean de La Forêt, connétable d’Anjou, muni d’une commission signée du duc, se présenta à la Roche-sur-Yon et intima l’ordre au capitaine de lui livrer Le Ferron, pour le conduire devant le conseil ducal. Montcatin refusa, en déclarant qu’il le mènerait lui-même. Puis ostensiblement il fit sortir Geoffroy de son cachot, s’arma, monta à cheval avec les gens de sa suite, laissa le château à la garde de La Brunetière, l’aîné, sr du Ponceau, et sortit de la place avec son prisonnier. La troupe s’engagea dans la forêt de la Roche-sur-Yon. Cette sortie n’était qu’une feinte. On rentra de nuit par une poterne dans le château, et Le Ferron fut de nouveau incarcéré et durement traité. Douze jours plus tard, se produisit la tentative inutile de d’Aussigny, qui dut battre en retraite. Le récit nous en sera fourni plus complet par un autre document. Pendant que ce drame se déroulait contre ceux qui voulaient le délivrer, le trésorier de France, toujours dans sa basse-fosse, était à demi mort de froid et de privations. Ce n’était pas l’intérêt de son bourreau de l’y laisser périr. Montcatin l’en fit tirer évanoui et placer devant un feu bienfaisant qui le ranima. Se sentant un peu mieux, mais d’une extrême faiblesse, Le Ferron demanda à mettre sa conscience en règle avec Dieu, et, à défaut de prêtre, se confessa au sr du Ponceau. Peu après l’expédition manquée de Guy d’Aussigny, arrivèrent à la Roche deux nouveaux personnages, porteurs d’un second mandement de mise en liberté, signé du roi de Sicile. C’étaient un écuyer de la maison de ce prince, nommé Le Bègue, et L. de La Croix, son procureur général d’Anjou. Devant eux, le capitaine, pour donner couleur à son refus, produisit la fausse lettre qu’il avait fabriquée avec Jacques Chabot, et déclara que de toute façon il ne laisserait pas aller son prisonnier, sans la rançon dont il lui avait extorquée la promesse. La somme lui fut versée et il se décida enfin à remettre Le Ferron entre les mains des deux officiers d’Anjou. Celui-ci voulut obtenir la restitution de sa valise et de son contenu ; mais Montcatin se débarrassa de cette réclamation, en prétendant que le tout avait été emporté par un serviteur du trésorier, ce qui était absolument faux.

Dès le lendemain de son arrivée à Angers, Le Ferron porta plainte à la Chambre des comptes d’Anjou, où se trouvaient le juge d’Anjou, l’archidiacre d’Angers et plusieurs autres membres du conseil ducal, demandant justice contre le capitaine de la Roche-sur-Yon ; mais ceux-ci craignaient de se compromettre et, malgré ses instances réitérées, il ne put rien obtenir d’eux. Tout ce qu’on lui accorda, ce fut, après avoir déposé une forte caution que ses frères Jean et Yvonnet apportèrent, d’être conduit sous escorte auprès du roi René, qui se trouvait alors à Nancy avec Charles VII. Il fut détenu pendant quelque temps dans cette ville. Alors le roi de France, instruit de son cas, en saisit la cour de Parlement. Quand les premières informations eurent fait connaître la gravité de cette affaire, elle fut évoquée devant le Conseil du roi, qui condamna à mort et fit exécuter les deux principaux coupables, François de Montcatin et Jacques Chabot, pour ce crime et les autres dont ils étaient chargés, puis renvoya devant le Parlement leurs complices dont il sera question ci-dessous, dans une note à propos de Jean de La Brunetière, l’un d’eux. (Voy. Arch. nat., X2a 26, fol. 272 r° à 280 v°.)

. Et ou mois de janvier oudit an mil iiiic xliiii, nostre amé et feal chevalier et chambellan, Guy d’Ossigny

Guy d’Aussigny, d’Aussigné ou d’Auxigny, chevalier, chambellan du roi, exerçait alors la charge de lieutenant du roi ès pays de Poitou, Saintonge, gouvernement de la Rochelle et Angoumois, et de conservateur des trêves. Il se qualifie ainsi dans un acte signé de sa main, le 20 juillet 1445, par lequel il certifie que Gabriel Miette, receveur du roi à Pons, Arvert, Broue, élection de Marenne et Mornac, a accompli par son commandement plusieurs voyages aux villes de Plassac et de Breuil, naguère appartenant à Jacques de Pons, vers les gens qui tiennent ces places contre le roi, tant pour faire les exploits des lettres du roi données à l’encontre des rebelles, que pour essayer par divers moyens de remettre et réduire lesdites places en l’obéissance du roi ; que ledit Miette a vaqué à ses opérations, lui second et avec deux chevaux, durant six semaines, et qu’il l’a taxé à 32 livres tournois, qu’il prendra sur sa propre recette. (Bibl. nat., Pièces originales, vol. 150, dossier Aussigny, n° 3.) On trouve aussi Guy d’Aussigny, qualifié, dans cet acte et dans d’autres, seigneur de Trêves en Anjou. Cette baronnie appartenait à Robert Le Maçon, chancelier de France, décédé sans enfants le 28 janvier 1443 n.s. La seconde femme de ce dernier, Jeanne de Mortemer, fille de Jean, seigneur de Couhé, s’était remariée avec Guy, et c’est à cause d’elle qu’il prenait le titre de seigneur de Trêves. Son mariage avait eu lieu avant le 19 mars 1444 n.s., car à cette date il était présent à un traité passé entre son beau-père, d’une part, Jean Coussot, abbé, et les religieux de l’abbaye de Notre-Dame de Valence, d’autre. (Coll. dom Fonteneau, t. XXVII, p. 741.) Guy d’Aussigny ne jouit pas d’ailleurs sans contestation de la baronnie de Trêves. Il plaidait, en 1449, contre Jean d’Étrépigny, héritier de Jeanne Cochon, première femme de Robert Le Maçon, et contre Élie Dollée et la femme de celui-ci, qui se portaient aussi pour héritiers du chancelier. Un appointement conclu entre les parties, l’an 1454, régla que l’usufruit seulement de la terre de Trêves appartiendrait à Guy et à Jeanne de Mortemer, et la propriété aux héritiers. Annette d’Aussigny, sœur de Guy, sans doute, était en 1446 veuve de Pierre Bessonneau, grand maître de l’artillerie de Charles vii.

, acompaigné de cinquante hommes de guerre ou environ, arriva devant la dicte place de la Roche sur Yon, pour illec prendre le dit suppliant et ses serviteurs. Auquel icellui suppliant demanda s’il avoit mandement de nous de ce faire, offrant en ce cas lui obeir. A quoy nostre dit chambellan lui respondi que non, mais comme lieutenant de nous il avoit puissance. Et pour ce que sur ces termes, le dit suppliant ne voulu faire obeissance à nostre dit chambellan, icellui nostre chambellan s’efforça de prendre la dicte place. Et ce voyant le dit suppliant, doubtant la fureur de nostre dit chevalier, s’il advenoit que la dicte place fust prinse, dist à ses gens que chascun se deffendist, mesmement que nostre dit chevalier ne faisoit point apparoir de la dicte commission ou mandement de nous pour ce faire. Et lors icellui suppliant, acompaigné de treize ou quatorze hommes, sailly dehors la dicte place, et en combatant l’un de ses dictes gens tira ung trait, de quoy il frappa ung des gens de nostre dit chevalier qui en mourut. Et ce fait, se departy nostre dit chevalier et chambellan et ses dictes gens

Le récit de la rébellion du capitaine de la Roche-sur-Yon contre les ordres du lieutenant du roi de France n’est pas plus exact ici que celui de l’emprisonnement et des tortures auxquels il soumit Geoffroy Le Ferron. Les actes du procès fait au Parlement pour s’opposer à l’entérinement des lettres de rémission octroyées à Germain Chabot, l’un des complices de François de Montcatin, nous permettent de rétablir les faits. Les parents de Le Ferron n’ayant pas réussi en faisant intervenir les officiers du duc d’Anjou, s’adressèrent au lieutenant du sénéchal de Poitou ; mais il leur fut répondu que « en la dite place de la Roche y avoit gens de guerre qui usoient de voye de fait », et qu’on ne pourrait arriver à un bon résultat par les voies légales. C’est pourquoi il leur fut conseillé de demander l’appui du sr d’Aussigny. Celui-ci, « après que les officiers du roi de Sicile lui eurent donné totale obeissance », se fit accompagner de Jean Chèvredent, procureur général de Poitou, et se transporta avec sa compagnie devant la Roche-sur-Yon, où il fit les commandements nécessaires pour s’en faire ouvrir les portes. Mais il ne put s’avancer au delà d’un boulevard, où Montcatin et cinquante hommes armés vinrent le trouver. D’Aussigny déclara au capitaine qu’il était lieutenant du roi et comme tel venait vers lui, pour se faire remettre le prisonnier avec les charges qui existaient contre celui-ci, s’il y en avait toutefois. Après un premier refus formel, il tenta de parlementer, mais voyant que les gens d’armes qui entouraient Montcatin prenaient une attitude menaçante, il se retira et alla loger avec sa compagnie dans deux hôtelleries des faubourgs, après avoir déclaré qu’il y attendrait qu’on lui fît soumission. Puis, ayant fait faire une nouvelle démarche aux portes, on lui fit dire que, s’il voulait donner un sauf-conduit à Germain Chabot, celui-ci entrerait en pourparlers avec lui. Le sauf-conduit fut accordé. Chabot vint trouver d’Aussigny, dîna et soupa avec lui ; il coucha même dans l’hôtellerie. Le lendemain de bon matin, il rentra dans la place, soi-disant pour ménager un appointement entre le capitaine et le lieutenant du roi de France. Il retourna peu de temps après vers d’Aussigny et lui dit qu’il avait trouvé Montcatin en bonnes dispositions, « mais que Le Ferron estoit un mauvais garniment », et que le capitaine ne le délivrerait pas avant d’avoir nouvelles du roi, auquel il en avait écrit, qu’il était prêt à traiter sur cette base et à échanger sa signature avec celle d’Aussigny. Celui-ci bailla alors son scellé à Chabot, qui l’emporta en ville et ne revint plus. Le procureur de Poitou fut envoyé aux portes, pour savoir s’il aurait réponse ; il les trouva fermées et ne put se faire ouvrir. Ce fut à ce moment que quatre-vingts hommes armés sortirent de la place, vinrent aux faubourgs devant les logements de d’Aussigny et de sa compagnie, et se mirent à tirer. Un homme frappé d’un vireton fut tué sur le coup, un autre grièvement atteint mourut peu après. Guy d’Aussigny lui-même et cinq ou six personnes de son escorte furent blessés. Les assaillants rentrèrent ensuite dans la place, et d’Aussigny se retira avec ses gens d’armes. (Arch. nat., X2a 25, sous les dates du 22 juin 1451 et du 30 mars 1452 n.s.)

La résistance armée du capitaine de la Roche-sur-Yon au lieutenant du roi et à ses gens est relatée encore dans deux autres actes publiés ci-dessous. (Lettres de rémission accordées, en avril 1446, aux deux frères Germain et Léon Chabot, et, en mai 1446, à Jean de La Brunetière, écuyer.)

. Pour occasion desquelz cas, le dit suppliant doubte que par rigueur de justice il ne lui conviengne miserablement finer ses jours, se nostre grace et misericorde ne lui sont sur ce imparties, si comme il dit, requerant humblement que, attendu que en tous ses autres faiz, il a esté tousjours de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans oncques mais avoir esté actaint ou convaincu d’aucun villain cas, blasme ou reprouche, nous lui vueillons subvenir de nostre dicte grace. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans grace et misericorde preferer à rigueur de justice, au dit suppliant avons quicté, remis et pardonné, etc., satisfaction toutesvoyes faicte à partie civilement tant seulement, se faicte n’est, et mesmement faicte à Geuffroy Le Ferron dessus nommé. Si donnons en mandement, par ces presentes, à noz amez et feaulx conseillers les gens tenans nostre present Parlement à Paris, aux seneschal de Poictou, bailli de Touraine et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou moys de fevrier l’an de grace mil cccc. xlv, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, les contes de Foix

Gaston IV, comte de Foix et de Bigorre de 1436 au 21 juillet 1472, date de sa mort. (Cf. ci-dessus, p. 239, note 1.)

et de Tancarville

Le comte de Tancarville, ci-dessus, p. 127, note 1.

, les sires de la Varenne, de Blanville, de Pressigny, de Maupas

Il a été question à plusieurs reprises, dans les pages qui précèdent, des sires de la Varenne, de Blainville, de Pressigny et de Maupas.

et autres presens. G. Herbert. — Visa. Contentor. E. Duban.

MLXXXVI Mars 1446

Lettres d’abolition en faveur de Guillaume Perceval, écuyer d’écurie du roi, et de deux de ses serviteurs, Guillaume Mosnier et Jean de Launay, pour tous les excès, crimes ou délits dont ils ont pu se rendre coupables à la guerre, depuis trente ans.

AN JJ. 177, n° 170, fol. 113 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 253-256

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Guillaume Perseval

Guillaume Perceval avait fait partie de la compagnie de Jean de la Roche (La Rochefoucauld), sr de Barbezieux, et est nommé dans les lettres de rémission octroyées, le 9 avril 1431, à celui-ci et à tous ceux qui servaient sous ses ordres, pour tous les excès dont ils s’étaient rendus coupables. (Ci-dessus, p. 12.) Le service qu’il fait valoir de l’assistance prêtée à Charles VII pour reprendre la ville de Melle démontre que Perceval avait rompu avec son chef et ne l’avait pas suivi dans sa rébellion, lors de la Praguerie. Cette preuve de soumission au roi lui valut sans doute, comme récompense, la charge d’écuyer d’écurie, dont il se qualifie ici. Quel était ce personnage, sur lequel les renseignements n’abondent pas ? Peut-être est-il possible de lui constituer un état civil plus précis. Dans la région voisine de Melle, on trouve établie à cette époque une famille de Montferraut, Monferrauld, Monferaut, que l’on a lu parfois, à tort, croyons-nous, Montferrant, ce nom paraissant devoir être identifié avec Monfrault, ancien fief, aujourd’hui hameau dépendant de Celle-l’Évêcault. Plusieurs membres de cette famille prirent, dès le milieu du xive siècle, le surnom de Perceval ou Percevau. Un mandement au sénéchal de Poitou, en date du 30 mars 1451, lui ordonne de faire exécuter un arrêt du Parlement condamnant Hugues Chevalier à payer 25 livres à « Jean de Montferraut, dit Percevau ». (Arch. nat., X1a 13, fol. 22 v°.) Sur le Grand-Gauthier est transcrit un aveu de terres, menus fiefs et rentes tenus du comte de Poitou, à cause de Saint-Maixent, rendu le 12 février 1405 n.s., par « Jehan de Montferraut » (R1* 2172, p. 869.) On voit en outre dans le livre des hommages dus à Charles dauphin, comte de Poitou, en 1418, que Jean Jourdain, « à cause de Philippe de Montferaut, sa femme, fille de feu Jehan de Monferaut », devait hommage lige, 9 livres de plait et 36 sols de service au chef de l’an pour les fiefs qu’il possédait à Villeneuve et à Virsay, paroisse d’Aigonnay dans la mouvance de Saint-Maixent. (P. 1144, fol. 35 v°.) Dans un aveu du 10 juillet 1418, le nom de cette dame est écrit « Philippe de Montferraut ». (P. 1145, fol. 113.) Citons encore un arrêt du Parlement de Poitiers, du 12 septembre 1422, rendu au profit de Colette Alard, veuve de Robin Vaillant, bourgeois de Poitiers, contre « Aimery de Montferraud, écuyer, demeurant près Melle », inculpé de violences et pillages commis au détriment du fermier du lieu de « Montferraud », appartenant à ladite Colette (X1a 9190, fol. 192 v°.) D’autre part, un Perrot Percevaux assista au siège de Parthenay contre Jean Larchevêque, en 1415, comme on le voit par une quittance de gages. (Bibl. nat., coll. Clairambault, reg. 85, pièce 6661.) Ces remarques viennent à l’appui de l’identification, que nous proposons, de Guillaume Perceval, écuyer d’écurie de Charles VII, avec Guillaume de Monferaud (et non Montférand), dit Perceval, écuyer, seigneur de Lusseray et de la Varenne, connu par un échange qu’il passa, le 5 juillet 1459, avec un nommé Michau Gigou, hôtelier de Brioux, et ses enfants. (Invent. des Arch. du château de la Barre, par A. Richard, t. II, p. 278.) Lusseray se trouve entre Brioux et Melle ; la Varenne est aujourd’hui un hameau de la commune de la Bataille, autrefois place forte, dont, comme on le voit dans notre texte, l’écuyer d’écurie fut capitaine. Tout cela concorde parfaitement et permet d’expliquer comment Guillaume Perceval put mettre l’influence dont il usait dans la contrée au service du roi et aider efficacement à remettre la ville de Melle en l’obéissance de Charles VII.

, nostre escuier d’escuirie, et de Guillaume Mosnier et Jehan de Launay, ses serviteurs, contenant que, puis trente ans ença ou environ, le dit Perseval a esté capitaine et a eu charge et gouvernement de certain nombre de gens de guerre qu’il a tenuz soubz lui, et lesquelz en sa compaignie et autrement souventes foiz ont tenu les champs et vescu sur et aux despens de nostre peuple, en prenant vivres en telle quantité que bon leur sembloit, sans ordre quelconque, pillant aussi, robant et destroussant toutes manieres de gens qu’ilz povoient trouver et raençonner à leur avantaige, ont aussi raençonné plusieurs villes et lieux de nostre obeissance et prins et exigé des habitans en iceulx grans sommes de deniers, pour empeschier que les dictes gens de guerre ne alassent logier et vivre ès dictes villes et lieux, prins et constituez prisonniers en griefves et dures prisons plusieurs de noz subgiez, et iceulx raençonnez à grans et excessives sommes, comme s’ilz eussent esté noz ennemys, ont abatu et demoly maisons, bouté feux, violé eglises, tué et murdri gens, et fait plusieurs autres maulx. A aussi le dit Perseval par aucun temps esté capitaine de la place et forteresse de la Bataille, durant lequel temps, à l’occasion de ce que Guion Flatereau, demourant audit lieu de la Bataille, ferma une foiz la porte de la dicte forteresse audit Perseval, afin que point n’y entrast, icelluy Perseval print le dit Flatereau et le raençonna à deux tonneaulx de vin que lors il en eut. Et si a bien dix ou douze ans ou environ que icellui Perseval print Pierre d’Arragon, demourant à Saint Savinien sur Charente, dont le dit Perseval estoit lors capitaine, et le raençonna à quarante escuz d’or, pour ce qu’on disoit que le dit d’Arragon vouloit livrer et mettre la dicte place ès mains de certaines gens de guerre du païs de Bretaigne, qui lors faisoient guerre audit Perseval

Après l’arrestation et la condamnation de Louis d’Amboise, vicomte de Thouars (8 mai 1431), des garnisons bretonnes furent envoyées par Artur comte de Richemont, sous la conduite des srs de Rostrenen et de Beaumanoir, dans les places de Châtelaillon, Marans, Benon, et dans l’île de Ré, et, d’autre part, le sire d’Albret, lieutenant général du roi, et le sénéchal de Saintonge vinrent les combattre. C’est un épisode de cette lutte qui est rappelé en cet endroit.

 ; et lesquelz xl. escuz icellui Perseval a depuis restituez et paiez. Et en icellui temps mesmes print et osta ledit Perseval, de son auctorité, sans paier, du curé de Nouaillé ung sien cheval du pris de v. escuz d’or. De tous lesquelz cas ou de la pluspart d’iceulx les diz Guillaume Mosnier et Jehan de Launay, ses serviteurs, ont esté consentans ou presens à iceulx commettre et perpetrer. Et se doubtent les diz supplians que, à l’occasion d’iceulx, on en peust ou voulsist, ores ou pour le temps avenir, faire contre eulx aucune poursuite, et les mettre en justice, se nostre grace et misericorde ne leur estoit sur ce impartie, ainsi qu’ilz nous ont fait dire et remonstrer, requerans humblement, comme ces choses aient esté faictes soubz umbre de la guerre et que le plus souvent ilz n’aient esté paiez de leurs gaiges et par ce ayent esté contrains de faire les diz maulx, nous plaise les diz cas leur abolir, quicter et pardonner, et sur ce leur impartir nostre grace. Pour ce est il que nous, ces choses considerées et les grans et bons services que iceulx supplians nous ont faiz en autres manieres, tant du fait de noz guerres comme autrement, le temps passé, et mesmement à la reducion, par le dit Perseval et par son moyen faicte, puis six ans ença, en nostre obeissance des ville et chastel de Melle

On n’a que peu de renseignements sur l’occupation de Melle, au commencement de l’année 1440, par les princes ligués contre le roi. Dans un mémoire qui contient la relation officielle des événements de la Praguerie, il est dit que le duc d’Alençon et Jean de La Roche prirent le château et la ville et y mirent une grosse garnison des gens d’armes dudit de La Roche. (Chronique de Mathieu d’Escouchy, édit. de Beaucourt, t. III, p. 12.) Cette prise de possession eut lieu probablement sans coup férir, car la place appartenait à Georges de La Trémoïlle, l’un des fauteurs de la rébellion. Elle lui avait été donnée par Charles VII, comme sûreté et garantie d’un prêt de 6000 écus d’or, par lettres datées de Mehun-sur-Yèvre, le 20 juillet 1426, enregistrées à la Chambre des comptes de Bourges, le 3 août 1428 (anc. mém. H bis, fol. 93, mentionné dans Arch. nat., PP. 135, p. 154, et Bibl. nat., ms. fr. 21405, p. 91), et le don lui en fut confirmé dans un accord du 28 septembre 1435. (J. 475, n° 91.) Mais on ne sait combien de temps exactement les gens de J. de La Roche y restèrent et dans quelles circonstances la ville rentra dans le devoir. La mention qui s’en trouve ici n’est donc pas dénuée d’intérêt.

, font de jour en jour, et esperons que encores facent ou temps avenir, et pour autres causes et consideracions à ce nous mouvans, avons à iceulx supplians et à chascun d’eulx quicté, remis, pardonné et aboly, etc. tous les cas et crimes dessus diz et tous autres par eulx commis le temps passé, ou dit fait de la guerre, jusques au jour de la dicte reducion faicte en nostre dicte obeissance des dicte ville et chastel de Melle, avec toute peine, offense et amende, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à nos amez et feaulx conseillers les gens tenans nostre Parlement, aux seneschaulx de Poictou et de Xanctonge et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois de mars l’an de grace mil cccc.xlv, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, l’evesque de Castres

Il s’agit d’un personnage bien connu par l’influence qu’il exerça sur Charles VII, qui avait été son élève à partir de 1412 et dont il devint le confesseur. Né vers 1380, à Blois, Gérard Machet était proviseur du collège de Navarre en 1418, quand les Bourguignons s’emparèrent de Paris. Il s’enfuit avec le dauphin, fut pourvu de l’évêché de Castres en 1432, revêtu de la pourpre en 1440, et mourut à Tours le 17 juillet 1448.

et autres presens. E. Chevalier. — Visa. Contentor. E. Du Ban.

MLXXXVII Mars 1446

Rémission accordée à Philippon Thibault, coupable de meurtre sur la personne du sr Charretier, curé de Leugny, qui avait débauché sa femme.

AN JJ. 177, n° 173, fol. 115 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 257-258

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Philippon Thibault, pouvre homme, laboureur, chargié de femme et de cinq enfans, contenant comme, puis ung an ença, il eust esté adverti et aussi qu’il estoit fame et renommée au païs, et mesmement en la paroisse de Luigné Saint Remy, en laquelle il demeure, que feu Charretier, en son vivant prebstre et curé de la dicte parroisse, communiquoit avec sa femme et la maintenoit charnellement, dist audit curé qu’il se voulsist sur ce depporter, dont icelluy curé, saichant le dit suppliant estre simple et de petite apparance, ne tint compte et ne delaissa à habiter charnellement avecques la dicte femme d’icellui suppliant. Lequel suppliant, de ce très desplaisant, se donna ung pou en garde du mauvaiz et dempnable contenement d’icellui curé, et tant que il trouva aux champs, auprès de son hostel, le dit curé et sa dicte femme ensemble boutez en ung buisson. Si s’avança le dit suppliant et ala vers le dit buisson et apperceut que le dit curé avoit ses chaulses avallées sur les genoilz. Et quant icellui curé l’advisa aler vers icellui buisson, il commança à s’en fuyr et le dit suppliant après lui jusques à une montaigne, sur laquelle le dit curé cheut par le moyen de ses dictes chaulses avalées, sur lesquelles il marcha, et le dit suppliant l’aprehenda et lui donna plusieurs coups du tranchant d’une serpe, tant sur la teste que en autres parties du corps. A l’occasion desquelz coups, le dit curé, par mauvaiz gouvernement ou autrement, ala de vie à trespassement, et pendant ce qu’il gèut malade pour cause d’iceulx coups, il pardonna audit suppliant le dit cas, ainsi que ses amys ou les aucuns d’eulx ont congneu qu’il est contenu en son testament ou ordonnance de derreniere voulenté. Et depuis le dit suppliant a fait satisfacion à partie et fondé certain obit perpetuel en l’eglise parrochial de Luigné sur Creuse

Les deux dénominations de Luigné-Saint-Rémy mentionné au commencement de l’acte, et de Luigné-sur-Creuse dont il est question ici, semblent de prime abord ne pouvoir s’appliquer à la même localité ; Luigné-sur-Creuse est évidemment Leugny, dont l’église était sous le vocable de Saint-Hilaire, mais on ne saurait voir Luigné-Saint-Rémy dans la paroisse de Leigné-les-Bois, qui est placée sous le patronage de S. Rémy, mais éloignée de la Creuse ; il semble donc rationnel d’admettre que le nom de Saint-Rémy a été parfois ajouté à celui de Luigné par ce motif que les deux paroisses de Leugny et de Saint-Rémy-sur-Creuse sont contiguës.

, et sur ce s’est obligié au curé de la dicte eglise et à ses successeurs en certaine rente. Et par ces moyens et autres declarez ès lettres sur ce faictes, iceulx amys dudit deffunct curé l’ont quicté dudit cas. Et neantmoins icellui suppliant doubte que, pour cause d’icellui, il soit ores ou pour le temps avenir molesté ou empeschié en son corps ou en ses biens, par rigueur de justice ou autrement, se nostre grace ne lui est sur ce impartie, comme il dit, en nous humblement requerant, que, attendues les choses dessus dictes et qu’il a esté toute sa vie de bonne vie, renommée et honneste conversacion, jusques alors d’icellui cas advenu, et la charge d’enfans qu’il a, il nous plaise nostre dicte grace lui eslargir. Pour ce est il que nous, ces choses considerées, etc., avons audit suppliant quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces dictes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois de mars l’an de grace mil cccc.xlv, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Rippe. — Visa. Contentor. E. Du Ban.

MLXXXVIII Avril 1446 (avant le 17)

Lettres d’abolition en faveur de Bernardon Rousseau, écuyer poitevin, qui avait servi le roi dans toutes les récentes campagnes, mais s’était rendu coupable de pillages, détrousses et rançonnements.

AN JJ. 176, n° 433, fol. 288 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 258-261

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Bernardon Rousseau, escuier, contenant que dès son jeune aage il s’est emploié en nostre service ou fait de nos guerres à l’encontre des Anglois, noz anciens ennemis, en la compaignie de plusieurs capitaines et gens de guerre, sans avoir tenu autre party que le nostre ne fait guerre à l’encontre de nous, et mesmement a esté ou voyaige que feismes à nostre sacre et couronnement, et depuis assegé par nos diz adversaires en nostre ville de Saint Denis

Saint-Denis en France, où commandait le maréchal de Rieux, fut assiégé pendant un mois et demi par Th. de Scales, Talbot et Willougby. Après une belle défense, la famine contraignit les défenseurs de la place à capituler ; ils l’évacuèrent le 4 octobre 1436, avec armes et bagages. (Cf. Journal d’un bourgeois de Paris, édit. Tuetey, p. 306-308.)

 ; a aussi esté à la conqueste de nostre païs de Caux et au remparement de la ville de Louviers

Louviers fut occupé, vers le mois d’octobre 1410, par Xaintrailles, qui avait pour lieutenants Salazar et Antoine de Chabannes. La ville était désemparée ; « ilz la remparerent et fortifierent du mieulx qu’ilz peurent ». (Jean Chartier, Chronique de Charles VII, édit. Vallet de Viriville, t. II, p. 7.)

, où il s’est depuis tenu longtemps en garnison, et avecques ce a esté ès sieges qui ont esté tenuz de par nous devant les villes de Monstereau, Meaulx et Pontoise

Les sièges de Montereau (1er septembre-22 octobre 1437), de Meaux (20 juillet-12 août 1439) et de Pontoise (6 juin-19 septembre 1441), où le roi prit une part personnelle importante, nécessitèrent de grands efforts, furent couronnés d’un plein succès et peuvent compter parmi les événements militaires les plus marquants du règne de Charles VII.

, et en plusieurs autres voyaiges et armées, pendens et durans lesquelz temps icellui suppliant a euz et soustenuz plusieurs maulx, travaulx et durtez en sa personne. Et si a eu de grans pertes et dommaiges en chevaulx, harnois et autres biens, et à la dicte cause souventes foiz cheu en grant soufferté et necessité, et tant que, pour soy entretenir en estat, il a esté astraint de tenir les champs, vivre sur noz païs et subgetz, couru et fait courir ses varlez et serviteurs, pillé, robé, destroussé et raençonné toutes manieres de gens qu’il a trouvé sur les chemins et aillieurs, tant gens d’eglise, nobles, bourgois, marchans que autres gens quelxconques, de quelque estat qu’ilz feussent, leur osté leurs chevaulx et autres monteures, or, argent, joyaulx, robbes, chapperons, marchandises, denrées et autres biens quelxconques, qu’ilz trouvoient sur eulx ou avecques eulx, vendu et butiné leurs diz chevaulx, biens et autres destrousses, et a eu et prins sa part ès dictes destrousses, pilleries et roberies, que ont fait ses diz compaignons et serviteurs de guerre, les a soustenuz, supportez et favorisez ès dictes pilleries, a couru et esté à courir marchiez et foires, et icelles pillées, prins et enmené bestiail, partie d’icellui mengié, l’autre vendu et butiné et fait ce que bon lui a semblé, et aucunes foiz raençonné à vivres et autres choses. Et peut estre que, durant le dit temps qu’il a suivi les dictes guerres et tenu les champs, en compaignie de gens d’armes, que lui et aucuns de ses gens ont prins prisonniers plusieurs de noz subgiez, iceulx raençonnez à plusieurs sommes de deniers, vivres et autres choses, iceulx batuz et appatissez, et fait et commis autres grans cas, crimes et deliz, ainsi que gens d’armes avoient accoustumé de faire, qu’il ne pourroit bonnement dire ne exprimer. Toutesfois ne fut il jamais à ravissement de femmes, meurdre, sacrilege, ne à boutemens de feuz. Et combien que le dit suppliant ait bonne voulenté et entencion de s’en tenir doresenavant sans plus retourner à la guerre, neantmoins il doubte que aucuns sur lesquelx ont esté faiz les diz maulx, pilleries, roberies, destrousses et autres choses dessus declarées, en voulsissent ès temps advenir faire poursuite par justice à l’encontre de luy, et que par ce moien on lui voulsist ès temps advenir donner aucun destourbier ou empeschement, ou aucunement le molester et rigoreusement proceder à l’encontre de lui, ou le punir corporellement, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu les diz services par lui à nous faiz et ceulx qu’il nous fait encores chascun jour et a bon vouloir de faire, quant le cas y escherra, et que, pour soy entretenir en nostre service, il a esté contrainct à faire et commettre les diz maulx, excès ou delitz, ou plusieurs d’iceulx, et aussi que depuis qu’il s’est ainsi retraict, il s’est bien et grandement gouverné et a esperance de faire ès temps avenir, il nous plaise lui impartir icelles. Pour quoy nous, les choses dessus dictes considerées, voulans en ceste partie misericorde preferer à rigueur de justice, et envers lui recongnoistre les diz services, et pour donner exemple aux autres de eulx liberalement emploier ès temps advenir en nostre service, se le cas le requiert, à icellui Bernardon Rousseau avons aboly, remis, quicté et pardonné, etc., pourveu toutes voies qu’il n’ait esté à ravissement de femmes, meurdre, violement d’eglise ne boutement de feuz. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx les gens de nostre Parlement, aux prevost de Paris et seneschaulx de Poictou et Xantonge, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil iiiic xlv. avant Pasques, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, vous et autres presens. Chaligaut. Visa. Contentor. E. Du Ban.

MLXXXIX Avril 1446 (avant le 17)

Abolition en faveur de Jean Maurat, homme de guerre poitevin, pour les pillages, détrousses et autres excès auxquels il a pris part durant les guerres.

AN JJ. 177, n° 178 bis, fol. 119 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 261-263

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Jehan Maurat

On constate à la même époque l’existence d’un bourgeois de Poitiers, nommé Pierre Maurat, qui fut commis, de 1446 à 1449, avec d’autres bourgeois, par les maire et échevins, à la distribution des deniers de la ville. (Arch. municipales de Poitiers, J. 979 et suiv., 1014, K. 5.)

, homme de guerre, natif du païs de Poictou, contenant que, dès son jeune aage, lui desirant nous servir, se soit exposé et nous ait continuelment servy ou fait de noz guerres, soubz plusieurs capitaines et autres ayans charge de gens d’armes, tant de par nous que autrement, en plusieurs et divers voiages et armées, et aussi en plusieurs sieges par nous ou de par nous tenuz devant plusieurs villes, places et forteresses qui estoient detenues et occuppées par noz anciens ennemys et adversaires les Anglois, et autrement en plusieurs et maintes manieres, ès quelz services il a euz et soustenuz plusieurs maulx, travaulx, et duretez en sa personne, pertes et dommaiges de chevaulx, harnoiz et autres biens, et à ceste cause souventes foiz cheu en grant neccessité et telement que, pour soy entretenir en nostre dit service, il a fait et commis et a esté en compaignie de faire et commettre plusieurs pilleries, roberies, raençonnemens et destrousses, tant de jour que de nuyt, sur plusieurs laboureurs, marchans et autres noz subgiez alans et venans par les chemins, en divers lieux et païs de nostre royaume, et fait plusieurs autres maulx, excès et deliz, ainsi que lors estoient coustumiers de faire noz autres gens de guerre tenans les champs. Et combien que icelluy suppliant soit encores de nostre charge et retenue et à noz gaiges et souldes, et que ayons aboly generalment à tous noz gens de guerre de toutes les choses commises de tout le temps passé jusques à noz derrenieres ordonnances

Il est fait allusion ici sans doute à la grande ordonnance donnée à Orléans, le 2 novembre 1439, pour la réforme de l’armée l’établissement d’une force militaire permanente et la répression des violences et excès commis par les gens de guerre (Coll. des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XIII, p. 306), et à l’ordonnance de 1445 instituant les compagnies d’ordonnances, dont on n’a plus le texte. Sur cette création, cf. de Beaucourt, Histoire de Charles VII, t. IV, p. 387 à 405.

, et que depuis il se soit bien gouverné, toutesvoyes il doubte que aucuns sur qui ont esté faictes les dictes destrousses, pilleries, roberies et autres choses dessus dictes, en voulsissent ou temps avenir faire poursuite par justice à l’encontre de lui, et que par ce moyen on le voulsist mettre et constituer prisonnier, comme aucuns se sont efforcez faire, ou autrement contre lui rigoureusement proceder et par avanture à pugnicion corporelle, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu les diz services à nous faiz par le dit suppliant, comme encores fait chascun jour et a bon vouloir de faire, et que, pour soy entretenir en nostre dit service, il a esté comme contrainct à faire et commettre les diz excès et deliz, ou plusieurs d’iceulx, aussi que depuis les dictes ordonnances derrenieres, il s’est bien et honnestement gouverné et a esperance de faire, il nous plaise lui impartir icelles. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans en ceste partie misericorde estre preferée à rigueur de justice, et envers lui recongnoistre les diz services, à icellui Jehan Maurat suppliant avons quicté, remys, pardonné et aboly, etc., reservé ravissement de femmes, sacrilege et boutemens de feu, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil iiiiexlv, et de nostre regne le xxiiiie, avant Pasques.

Signée : Par le roy, à la relacion du conseil. J. Jaupitre. — Visa. Contentor. Charlet.

MXC Avril 1446 (avant le 17)

Lettres d’abolition en faveur de Jean Guilloton, marchand de Mareuil-sur-Lay, pour sa participation en qualité d’arbalétrier à la guerre privée et aux entreprises faites par les garnisons de Mareuil et de Sainte-Hermine contre les places de Mervent et autres, et contre les Bretons qui les défendaient.

AN JJ. 177, n° 180, fol. 122 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 263-266

Charles, etc. Savons faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Jehan Guilloton, aagé de xxxiii. ans ou environ, marchant demourant à Marueil en Poictou, chargié de jeune femme et d’un enfant, contenant que, xiiii. ou xv. ans a ou environ que le dit suppliant estoit jeune compaignon, lui fut fait commandement à grosse peine par le capitaine et les gens de guerre qui lors estoient en la dite place de Marueil, qu’il se armast pour la deffence

Le texte porte par erreur « descente ».

de la dicte place, pour ce que lors il y avoit plusieurs cappitaines bretons et autres qui faisoient très forte guerre au dit lieu de Marueil, Saint Hermine et ou païs d’environ

Les places fortes de Mareuil-sur-Lay et de Sainte-Hermine appartenaient à Georges de La Trémoïlle. Les gens d’armes qu’il y entretenait furent, de 1428 à 1432, en guerre perpétuelle avec les garnisons bretonnes de Vouvant, Mervent, Fontenay-le-Comte et autres qui tenaient pour le connétable de Richemont, sr de Parthenay. Il est question de cette lutte en plusieurs autres endroits de ce volume. Lors de la Praguerie, ces deux villes furent occupées par les rebelles et elles ne rentrèrent en l’obéissance du roi qu’au mois de janvier 1442. (Berry, Chronique de Charles VII, édit. Godefroy, in-fol., p. 417.)

, et y vouloient logier, prendre les dictes places et faire plusieurs maulx. Lequel suppliant qui, comme dit est, estoit lors jeune, chault et bouillant, et cuidant bien faire en obeissant aus diz cappitaines et gens de guerre, se habilla et fut arbalestier et ala, avec les dictes gens de guerre de la dicte place de Marueil, Saint Hermine et autres, à l’encontre des diz Bretons et autres qui vouloient porter mal ès dictes places, et fut en plusieurs courses avecques eulx et à plusieurs raencontres. Et depuis a esté avec d’autres gens de guerre, en la compaignie desquelz il a esté à prendre plusieurs gens qui tenoient le party des diz Bretons et autres, et aussi leurs bestiaulx, et à les en enmener au dit lieu de Marueil prisonniers, et leur faisoient pareille guerre ou aussi forte et plus que lesdiz Bretons et ceulx de leur party et autres ne leur faisoient. Pendant et durant le temps de laquelle guerre, les diz gens de la dicte place de Marueil, lui estant en leur compaignie, entrerent en l’eglise de Mairevant qui tenoit le party des diz Bretons, où ilz blecierent aucunes gens, toutes voyes n’en y eut il aucuns mors, au moins qu’il ait sceu, et n’entra point dedans la dicte place, et d’icelle emmenerent plusieurs prisonniers audit lieu de Marueil et autre part où ilz furent raençonnez. Et a esté le dit suppliant en d’autres courses, tant avecques les diz gens d’armes dudit Marueil que autres, où ont esté faiz plusieurs autres grans maulx, èsquelz toutesvoyes n’a point esté fait, qu’il ait sceu, de meurdre, ravy de femmes, bouté feux ne fait aucun sacrilege autre que de la dicte eglise de Mairevant, où il ne entra oncques dedans, comme dit est, ne ne fut en cause principale de le faire ne de l’entreprendre, ne aussi ne en amenda qui vaulsist point plus de deux escuz, qui ne valoient pas plus de lx. solz tournois ou environ ; qui lui furent donnez par le dit cappitaine de Marueil. Et a le dit suppliant depuis vescu par aucun temps sur les champs et fait des maulx, comme gens d’armes ont acoustumé de faire, pour avoir des vivres et les neccessitez de lui et de ses compaignons. Et combien que en tous autres cas le dit suppliant soit bien famé et renommé, et n’ait jamais esté actaint d’aucun autre vilain cas, blasme ou reprouche, neantmoins il doubte que aucuns ses hayneux et malveillans ou autres ne le vueillent à l’occasion de ce accuser vers justice, et que justice à cause de ce ne le vueille aucunement vexer ou travailler, qui seroit en son très grant dommaige et prejudice. Et pour ce nous a le dit suppliant humblement supplié et requis que, les choses dessus dictes considerées, et qu’il a ferme propox et voulenté de non jamais retourner à la guerre, mais de soy en retraire du tout et vivre doresenavant en son mesnaige, nous lui vueillons sur ce impartir nosd. grace et misericorde. Pour ce est il que nous, les choses dessus dictes considerées et les temps divers qui ont couru en nostre royaume et mesmement en nostre dit païs de Poictou, où les diz cas sont avenuz, et eu pitié et compassion de ses diz femme et enfant, nous à icellui suppliant ou dit cas les faiz et cas dessus declairez, lui avons aboliz, remis, quictez et pardonnez, etc. Si donnons en mandement à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois de avril l’an de grace mil iiiic xlv, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, vous et autres presens. Chaligaut. — Visa. Contentor. Charlet.

MXCI Avril 1446 (avant le 17)

Lettres d’abolition octroyées à Jean Chauvet, lieutenant du capitaine de Charroux, pour les pillages, détrousses et tous autres excès dont il a pu se rendre coupable pendant les guerres.

AN JJ. 177, n° 184, fol. 125 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 266-270

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Jehan Chauvet, dit Piedebeuf, lieutenant du capitaine de l’abbaye de Charroux en Poictou

Vers cette époque, le capitaine de l’abbaye de Charroux était Foucaud Du Teil, écuyer ; il est nommé comme présent, le 3 février 1445 n.s., à un traité conclu entre Robert de La Goupillière, abbé de la Réau, et Jeanne d’Oyrenval, dame de Mauprevoir, au sujet des bois de l’abbaye de la Réau. (Coll. dom Fonteneau, t. IV, p. 483.)

, chargié de femme et de quatre petiz enfans, contenant que, lui estant en l’aage de xvi. ou xviii. ans ou environ, fut page et serviteur de feu nostre cousin [le sire d’] d’Orval

Guillaume d’Albret, seigneur d’Orval, second fils de Charles Ier, sire d’Albret, comte de Dreux, connétable de France, et de Marie de Sully, fut tué à la bataille de Rouvray en Beauce, dite la journée des harengs, le 12 février 1429. Il était âgé d’environ vingt-cinq ans.

, et quant fut puissant pour porter harnoiz, se arma en la compaignie de nostre dit feu cousin et nous servit en noz guerres ; et quant icellui nostre cousin fut trespassé, fut avec nostre amé et feal chambellan Jehan Foucault

Jean Foucault, chevalier, seigneur de Saint-Germain-Beaupré, d’une famille établie dans le comté de la Marche. Lors de la prise de Laval par Talbot (9 août 1428), il tomba au pouvoir des Anglais. Capitaine de Lagny, qu’il défendit, en 1430, contre les efforts de Jean, duc de Bedford, il conserva cette place à Charles VII. On le trouve, pendant fa Praguerie, capitaine de Corbeil pour le duc de Bourbon ; le roi ne lui tint pas rigueur, car il lui donna, l’année suivante, la garde du bois de Vincennes. Jean Foucault partit en novembre 1448, avec un contingent d’hommes d’armes français, pour soutenir les droits du duc d’Orléans sur le Milanais. Ce prince l’établit podestat d’Asti, où il mourut sans enfants, l’an 1465.

, chevalier, tant à Montjehan ou païs d’Anjou, à Laigny près Paris, que ailleurs. Et depuis en continuant tousjours nostre dit service ou dit fait de la guerre, fut avec nostre cousin d’Alebret

Charles II, sire d’Albret, de 1415 à 1471. (Voy. ci-dessus, p. 217, note 2.)

à ung siege qu’il tint devant Marueil

Mareuil soutint deux sièges vers cette époque, le premier en 1435, le second en 1438. Les opérations, en 1435, furent dirigées par Jean de la Roche, sénéchal de Poitou, et Jean de Penthièvre, vicomte de Limoges ; mais ils subirent un échec. (A. Thomas, Les États provinciaux de la France centrale sous Charles VII, t. I, p. 140, et II, p. 75.) A la fin de février 1438, dit M. de Beaucourt, le roi partit pour la Saintonge. Il s’agissait de préparer les voies à une expédition en Guyenne concertée de longue main. On fortifia toutes les places de Saintonge. Le sire de Mareuil, sénéchal de cette province, eut mission d’attaquer Mareuil. De pleins pouvoirs furent donnés au sire d’Albret pour recevoir la soumission des villes et forteresses de la Guyenne. (Hist. de Charles VII, t. III, p. 15.) D’autre part, on voit, par une quittance de Geoffroy de Mareuil, du 6 février 1438, que les États du Limousin lui avaient alloué une somme de 500 livres « pour lui aider à delivrer et recouvrer son chastel, à présent occupé et detenu par les Anglois, qui ont fait et font de jour en jour guerre et grans maulx et dommages aux habitans dudit pays ». (Bibl. nat., pièces originales, dossier Mareuil ; A. Thomas, op. cit., t. II, p. 82.) C’est à ce dernier siège sans doute que Jean Chauvet fut blessé.

, lors occuppé par nos anciens ennemys et adversaires les Anglois, ouquel siege il fut blecié d’une lance, et fut amené malade ou chastel de Courbefin, que lors tenoit nostre dit cousin d’Alebret, et demoura ilec longuement malade. Et quant fut comme gary, pour ce qu’il avoit tout despendu le sien et qu’il n’avoit de quoy se remettre sus, ala par l’intercession des compaignons de la garnison dudit Corbefin

Le château de Courbefy en Limousin était un refuge de routiers. En 1435, Odet de la Rivière, seigneur de Château-Larcher, l’occupait et s’y conduisait comme en pays ennemi. Les États du pays durent traiter avec lui à prix d’argent, pour lui faire évacuer la place avec ses gens. Un autre capitaine, Jean de Saintoux, prit possession de Courbefy et y commit les mêmes excès. A la suite des plaintes des habitants rançonnés et pillés, il fallut de nouveau négocier, a fin de la faire déloger de bonne grâce ; les États du Haut-Limousin furent contraints de lui compter 1400 réaux d’or pour obtenir son éloignement. (A. Thomas, op. cit., t. I, p. 83, 149, 150 ; t. II, p. 99.)

sur les champs courir et se tint ilec environ deux ans. Et après, et quelque xii. ans

« xii ans » doit être une erreur de transcription. Pour faire concorder les chiffres avec les faits exposés ci-dessus, il faudrait plutôt lire « vii ans. »

a ou environ, icellui suppliant se retrahy et maria, et depuis ne s’est entremis du fait de la guerre, si non pour venir à noz mandemens ou de ceulx de noz officiers, quant les cas l’ont requis, ne oncques ne servit feu Jehan de la Roche, ne autres tenans nostre parti contraire, excepté environ ung mois qu’il fut avecques eulx ou païs de Limousin, a bien sept ans ou plus, mais a de sa puissance tousjours esté contre tous ceulx qu’il savoit à qui nous faisions et avons fait et fait faire guerre. Pendans et durans lesquelz temps, icellui suppliant a esté en plusieurs autres sieges, rencontres et prinses de places sur nos diz ennemys, en garnison en plusieurs frontieres à l’encontre de nos diz ennemys, où il a despendu grant partie de sa chevance, sans aucunes fois avoir eu de nous aucune soulde ou bien fait, dont il peust avoir la vie de lui, ses gens et serviteurs, ne aussi achetté chevaulx, harnoiz ne autres choses à lui neccessaires et à ses dictes gens. Par quoy a esté contrainct, pour s’entretenir en nostre dit service ou dit fait de la guerre, et lui a convenu tenir les champs, vivre sur noz païs et subgiez, couru et fait courir ses varletz et serviteurs sur les chemins, pillé, robé, destroussé et raençonné toutes manieres de gens qu’ilz ont trouvé sur lesdiz champs et ailleurs, tant gens d’eglise, nobles, gens de pratique, bourgois, marchans, que autres, leur osté leurs chevaulx et monteures, leur or, argent, robes, joyaulx, denrées et marchandises et autres biens quelzconques qu’ilz trouvoient sur eulx, vendu et butiné leurs chevaulx, biens et destrousses et prins part ès dictes destrousses et pilleries que avoient fait ses diz serviteurs, les a soustenuz, supportez et favorisez èsdictes pilleries et roberies ; a esté lui et ses gens à courir foires et marchiez et à icelles piller, pris et emmené beufz et vaches et autres bestial, partie d’icellui mengié et l’autre partie vendu et butiné ou raençonné, ou fait ce que bon lui a semblé. Et a icellui suppliant fait et commis autres grans cas et deliz, ainsi que gens de guerre avoient accoustumé de faire, qu’il ne pourroit bonnement dire ne exprimer. Et combien que icellui suppliant ait bonne voulenté et entencion de soy doresenavant tenir des dictes pilleries et roberies et de s’en distraire du tout, ainsi qu’il a fait depuis x. ou xii. ans ença, comme dit est, neantmoins il doubte que aucuns sur lesquelz ont esté faiz les diz maulx, pilleries, roberies, destrousses et autres choses dessus declairées, ne voulsissent ès temps avenir faire poursuite par justice à l’encontre du dit suppliant, et que par ce moyen on lui voulsist èsdiz temps avenir donner aucun destourbier ou empeschement, ou autrement le molester et rigoureusement proceder à l’encontre de lui, ou le pugnir corporelment, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties ; humblement requerant que, attendu lesdiz services à nous faiz par le dit suppliant et ceulx qu’il nous fait encores chascun jour, et a bon vouloir de faire, quant le cas s’i offrera, et que pour soy entretenir en nostre dit service, il a esté contrainct à faire et commettre lesdiz maulx, excès et deliz, ou plusieurs d’iceulx ; aussi que depuis qu’il s’est ainsi retrait, il s’est bien et grandement gouverné et a esperance de faire ès temps avenir, il nous plaise lui impartir icelles. Pour quoy nous, les choses dessus dictes considerées, voulans en ceste partie misericorde preferer à rigueur de justice et envers lui recongnoistre les diz services, et pour donner exemple aux autres d’eulx liberalment employer en nostre service, si le cas le requiert, à icellui Jehan Chauvet, suppliant, avons aboly, remis, quicté et pardonné, etc., reservé ravissement de femmes, meurdre, sacrileige et boutemens de feux, etc. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes aux seneschaulx de Xanctonge et gouvernement (sic) de la Rochelle, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois de avril l’an de grace mil cccc. xlv, et de nostre regne le xxiiiie.

Par le roy, vous et autres presens. Chaligaut. — Visa. Contentor. Charlet.

MXCII Avril 1446 (avant le 17)

Lettres d’abolition en faveur de Guillaume Guérin, demeurant à Frosse, près Mareuil-sur-Lay, pour les crimes et délits dont il s’est rendu coupable pendant les guerres, et en particulier pour les excès qu’il a commis au service de G. de La Trémoïlle, contre les partisans du comte de Richemont.

AN JJ. 177, n° 185, fol. 126 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 270-273

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Guillaume Guerin, natif du païs de Poictou et à present demourant ou villaige de Frosses près Marueil, ou dit païs de Poictou, contenant que dès son jeune aage et le commancement des guerres il nous a servy en nos dictes guerres et fut au siege que, après nostre partement que feismes de nostre ville de Paris l’an iiiic xviii, tenismes devant le Pont Saint Esperit

L’événement rappelé ici remonte au voyage de six mois (21 déc. 1419-8 juin 1420) que le dauphin Charles accomplit en Languedoc, où la faction bourguignonne dominait encore presque complètement, et qu’il réussit à soustraire à cette influence. La ville du Pont-Saint-Esprit était occupée alors par les Bourguignons du prince d’Orange. Dès le commencement de mars 1420, Louis de Culant et Guillaume de Meulhon, sénéchal de Beaucaire, avaient mis le siège devant la place. Charles y arriva le 2 mai. De Nîmes, il avait envoyé un de ses maîtres d’hôtel chercher à Aix la grosse bombarde de cette ville ; le 7 mai l’assaut fut donné et la garnison forcée de se rendre. (Dom Vaissète, Hist. de Languedoc, nouv. édit., Toulouse, Privat, t. IX, 1885, p. 1059 ; de Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. I, p. 201.)

, soubz ung capitaine appellé Jehan Fol

Ce capitaine de routiers n’est pas tout à fait un inconnu ; il a laissé dans plusieurs provinces le souvenir des ravages de ses bandes. Pendant le voyage de Tartas (juin 1442), Jean Fol quitta avec 400 hommes l’armée royale, dans laquelle il était enrôlé, pour aller se loger dans le Beaujolais, où il exerça de grandes dévastations. (Arch. nat., X2a 24, aux dates des 1er et 6 août 1448.) Deux ans plus tard, on le retrouve faisant partie de l’armée que le dauphin Louis conduisit en Suisse, et une enquête judiciaire sur les dommages et excès commis par ces troupes, dans le ressort des terres de Luxeuil et de Faucogney, nous apprend que les gens de ce routier boutèrent le feu dans la ville de Sainte-Marie, en août 1444, y brûlèrent six maisons, prirent une grande partie du bétail, rançonnèrent les habitants, etc. Le 1er novembre suivant, il adressa avec Amé de Valpergue une curieuse sommation, pleine de menaces, aux habitants de Strasbourg. (A. Tuetey, Les Écorcheurs sous Charles VII, t. I, p. 162, 184, 311, 312 ; t. II, p. 346, 349.)

, et nous servit le seurplus dudit voiage, et fut au siege de Cravant

Les Français s’étaient emparés de Cravant-sur-Yonne, vers le 24 juin 1423, mais ils furent bientôt forcés de rendre cette ville aux Bourguignons. Charles VII fit alors marcher de ce côté l’armée qui devait aller en Champagne porter secours au sr de Coëtivy. Les ennemis, de leur côté, s’avancèrent en armes ; une bataille s’engagea le 31 juillet. Les Français, commandés par le connétable d’Écosse, Jean Stuart, comte de Darnley, furent complètement battus et subirent des pertes considérables.

, et depuis a esté de la garde de nostre corps, ou temps que nostre amé et feal conseiller et chambellan le sire de Pruilly

Il s’agit de Pierre Frotier, sr de Melzéard et de Mizeré en Poitau, baron de Preuilly et du Blanc, à cause de son mariage (vers 1422) avec Marguerite, fille de Gilles de Preuilly, sr de la Roche-Pozay, qui fut premier écuyer du corps de Charles VII, et maître de son écurie, puis éloigné de la cour, le 5 juillet 1425, en même temps que le président Louvet. (Voy. une notice sur ce personnage, dans notre précédent volume, p. 364, note 2.)

en avoit la charge. Et en après nous a servy en nos dictes guerres, soubz plusieurs noz capitaines et chiefz de guerre, sans jamais avoir servy capitaine ne autre qui ait esté à l’encontre de nous. Et aussi a esté icellui suppliant soubz nostre amé et feal cousin le sire de La Trimoïlle, ou ses capitaines, qui estoient en ses places de Poictou, et avec les diz capitaines esté à faire guerre à certains capitaines de Bretons, qui lors nous faisoient guerre et à nostre dit cousin de La Tremoïlle

Les faits visés en cet endroit se rapportent à la période de lutte ouverte entre Georges de La Trémoïlle et le connétable de Richemont (1427-1433).

, et s’est employé en nos dictes guerres tout au mieulx qu’il a peu, et ce jusques à ce qu’il s’en est retrait du tout, qui a esté puis vii. ou viii. ans ença. Pendant et durant lequel temps, icellui suppliant a eu et soustenuz plusieurs maulx, travaulx et durtez en sa personne, pertes et dommaiges de chevaulx, harnois et autres biens, et à ceste cause souventes foiz cheu en grant neccessité, et telement que pour soy entretenir en nostre dit service, il a esté contraint tenir les champs, vivre sur noz subgiez et païs, couru et fait courir, etc.…

La suite, sauf des variantes insignifiantes, est semblable au texte des lettres précédentes données en faveur de Jean Chauvet (ci-dessus, p. 268-269).

ce que bon lui a semblé, et aucunes foiz raençonné à vivres et autres choses. Et peut estre que, durant le dit temps qu’il a suivy les dictes guerres et tenu les champs, acompaigné de gens d’armes, que aucuns de ses gens ont prins prisonniers plusieurs de noz subgiez et iceulx raençonnez à plusieurs sommes de deniers, vivres et autres choses, iceulx batuz et appatissez. Et aussi fut une foiz avecques autres gens de guerre et communes à courre devant Mervant, où avoit gens qui lors tenoient le parti des Bretons, qui faisoient guerre ès places de Marueil et Saint Hermine

Ces places appartenaient à Georges de La Trémoïlle. Mareuil-sur-Lay avait pour capitaine Louis Frontdebeuf et Sainte-Hermine était sous le commandement de Guillaume Chabot, comme on le verra quelques pages plus loin.

, et à prendre l’eglise dudit lieu de Mervant

Cette affaire, dont un épisode est rappelé aussi dans des lettres de même date en faveur de Thibaut Paynnot, écuyer, publiées ci-dessous, se rapporte encore à la guerre entre La Trémoïlle et Richemont, qui désola le Poitou pendant environ six ans. Jean de la Roche, sénéchal de Poitou, instrument du favori, dont les routiers soulevaient alors les réclamations du duc de Bretagne, et Pierre Regnaud de Vignolles, frère de la Hire, avertis que la garnison de Mervent était peu nombreuse, se dirigèrent secrètement de ce côté et surprirent la place le jour de la Pentecôte (8 juin) 1432. Le capitaine de Mervent se nommait Louis Moisan. Richemont, prévenu aussitôt, réunit toutes ses forces à Vouvant. Huit jours après, Mervent était assiégée par Prégent de Coëtivy, lieutenant du connétable, et réduite à capituler. (Bibl. nat., ms. fr. 8819, fol. 1, 47 v° et 51 v° ; ms. fr. 11542, fol. 20 ; E. Cosneau, Le connétable de Richemont, p. 192.) Depuis le décès de Jean Larchevêque, la ville de Mervent, faisant partie de la succession de Parthenay, était en la possession d’Artur de Richemont. Cependant, jusqu’au jour où Charles VII lui confirma pour la seconde fois la donation de l’héritage de Jean Larchevêque, c’est-à-dire jusqu’au 9 avril 1435 n.s. (ci dessus, p. 90), il n’en jouit pas sans contestation. Nous avons dit, dans une note du précédent volume, que Jean Harpedenne, sr de Belleville, réclamait Mervent qui lui avait été donné, disait-il, par Charles VII, en payement d’une somme de 15,000 livres qu’il lui avait prêtée, et qu’après la mort de J. Larchevêque, sr de Parthenay, il continua les poursuites à ce sujet contre les héritiers de celui-ci et particulièrement contre le connétable, détenteur de cette place. (P. 187, note.) Ce procès durait encore en mai 1432, quand Richemont, en vertu du traité de Rennes, obtint un ajournement jusqu’à la S. Martin d’hiver 1433. (Arch. nat., X1a 9200, fol. 36, 42, 147 v°.) Avant l’expiration de ce délai, le connétable parvint à se débarrasser de La Trémoïlle, son mortel ennemi, rentra en grâce auprès du roi et, par les lettres du 9 avril 1435, Charles VII ordonna qu’on cessât tout procès contre Richemont et qu’on le laissât jouir paisiblement de tous ses domaines. (Ci-dessus, p. 95 et note.)

 ; mais il n’entra point dedans la dicte eglise ne n’y fist quelque mal. Et a icellui suppliant fait et commis autres grans cas et deliz, etc., etc.

La suite comme aux lettres d’abolition en faveur de Jean Chauvet (ci-dessus, p. 269.)

, à icellui Guillaume Guerin, suppliant, avons aboly, remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, aux seneschaulx de Poictou, Xanctonge et gouverneur de la Rochelle, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil iiiic xlv, et de nostre regne le xxiiiie, avant Pasques.

Ainsi signé : Par le roy, vous, les sires de la Varenne

Pierre de Brézé, sire de la Varenne, sénéchal de Poitou. (Voy. ci-dessus, p. 178, note 2.)

et de Precigny

Louis de Beauvau, seigneur de Pressigny, grand sénéchal de Provence, premier chambellan de René d’Anjou, roi de Sicile, mort en 1462.

et autres plusieurs presens. Chaligaut. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MXCIII Avril 1446 (avant le 17)

Lettres d’abolition en faveur de Jean bâtard de La Trémoïlle, seigneur de Chamerolles, pour tous les crimes, délits et excès dont il a pu se rendre coupable pendant les campagnes auxquelles il a pris part, « sauf et reservé toutesvoyes sacrilege, s’aucun en a fait et commis de sa personne seulement, et aussi de efforsement de femmes, que cy ne voulons estre comprins

Ces lettres sont rédigées en termes généraux et ne contiennent aucun fait précis. Nous ne croyons pas utile d’en donner le texte, pour cette raison, et aussi parce que nous publions beaucoup d’autres lettres d’abolition, de la même date, dont les formules et les expressions pour la plupart sont reproduites dans celles-ci. Nous ne connaissons à cette époque qu’un seul Jean, bâtard de La Trémoïlle, fils du célèbre Georges de La Trémoïlle et d’une femme nommée Marie Guypaud. C’est lui vraisemblablement dont il s’agit ici. Suivant MM. de Sainte-Marthe et les généalogistes qui, d’après eux, se sont occupés de l’histoire de cette maison, Jean fut légitimé par son père, le 4 mars 1446. Il lui donna le même jour le château et la châtellenie de « l’Herbergement-Ydreau », dans le Bas-Poitou, nom sous lequel est connue la branche dont il fut le chef. Le texte de l’acte de donation a été copié par dom Fonteneau sur l’original conservé dans le chartrier de Thouars, ainsi que la confirmation qui en fut faite par Louis de La Trémoïlle, fils aîné de Georges, le 14 juin 1451. (Coll. dom Fonteneau, t. XXVI, p. 393, 403.) Jean de La Trémoïlle commanda l’arrière-garde à la bataille de Formigny et fut ensuite gouverneur et capitaine de Craon et de Châteauneuf. Le 7 juin 1456, il était appelant au Parlement de Paris d’une sentence rendue par le bailli de Touraine au profit de Jean Briand. (Arch. nat., X2a 28, à la date.) Au mois de janvier 1467 n.s., Louis XI lui accorda des lettres de légitimation (JJ. 200, n° 149), qui seront imprimées dans notre recueil, à leur date ; elles ne contiennent d’ailleurs aucun nouveau renseignement sur notre personnage. Il mourut en 1490, laissant de Thomine Jousseaume deux fils : René, sr de l’Hébergement Ydreau, Jean, mort sans postérité, et Marie, femme d’Innocent Goulard, chevalier, seigneur du Bois-Bellefemme. Le don des château et châtellenie de l’Hébergement fut confirmé au profit de cette dernière et de ses descendants en légitime mariage, par acte de Louis de La Trémoïlle, daté du 8 octobre 1473. (Coll. dom Fonteneau, t. XXVI, p. 465.)

… Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. xlv, et de nostre regne le xxiiiie. »

AN JJ. 177, n° 186, fol. 126 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 274

MXCIV Avril 1446 (avant le 17)

Abolition en faveur de Pierre Godet, marchand, demeurant à Sainte-Pezenne, qui avait pris part, plusieurs années auparavant, aux hostilités exercées par les garnisons de Mareuil-sur-Lay et de Sainte-Hermine contre les Bretons du comte de Richemont.

AN JJ. 177, n° 188, fol. 128 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 275-277

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Pierre Godet, aagé de quarante cinq ans ou environ, marchant, demourant à Saincte Pasenne en Poictou, chargié de femme et enfans, contenant que, environ xx. ou xxxv. ans [a], le dit suppliant qui estoit encores jeune homme se mist à servir le capitaine qui lors estoit à Marueil ou dit païs de Poictou, et depuis a servy les autres capitaines subsequens de la dicte place et autres, dont aucun d’eulx n’a tenu parti contraire de nous. Ouquel service faisant et pour garder la dicte place et le païs d’environ, il s’est souventes foiz habillé et armé et suy les compaignons de guerre de la dicte place de Marueil, Saint Hermine et autres, à l’encontre des Bretons et autres gens, quelz qu’ilz feussent, qui vouloient faire mal ès dictes places, terres et subgiez d’icelle, et fut en plusieurs courses et raencontres avecques eulx et autres. Et depuis a esté avec d’autres gens de guerre, en la compaignie de ceulx de ladicte place et d’autres places, avec lesquelz il a esté à prendre plusieurs gens qui tenoient le parti des diz Bretons et autres qui vouloient mal ès dictes places et païs, et aidé à prendre prisonniers et emmené plusieurs gens et leur bestial au dit lieu de Marueil et ailleurs, et faisoient guerre l’un à l’autre la plus forte qu’ilz povoient. Pendant et durant laquelle guerre, les gens de la dicte place de Marueil, lui estant en leur compaignie, vindrent dudit lieu de Marueil et Saint Hermine à Mairevant

Au sujet des hostilités entre les places fortes de Mareuil-sur-Lay et Sainte-Hermine d’une part, Mervent, Vouvant, etc., d’autre, voy. ci-dessus, p. 264, 272, et les notes.

, et entrerent par force en l’eglise dudit lieu, où estoient retraiz plusieurs gens qui tenoient le parti desdiz Bretons et de ceulx qui leur estoient contraires et les favorisoient, où ilz blecerent aucunes gens. Toutesvoyes il n’y en eut nulz tuez ne meurdriz, au moins qu’il ait peu savoir, et n’entra point ledit suppliant dedans ladicte eglise. De laquelle eglise ilz emmenerent plusieurs personnes et biens audit lieu de Marueil et autre part, où ilz furent raençonnez et les diz biens butinez. Et aussi a esté ledit suppliant en d’autres courses, tant avec les diz gens d’armes dudit Marueil, Saint Hermine, que autres où ont esté faiz plusieurs grans maulx, pilleries, roberies, raençonnemens et autres, èsquelz toutesvoyes n’a point esté fait, qu’il ait sceu, de meurdre, ravissement de femmes, bouté feux ne fait aucun sacrilege autre que de la dicte eglise de Mairevant, où il n’entra oncques, comme dit est, ne ne fut en cause principale de le faire ne de l’entreprendre, ne aussi n’en amenda qui vaulsist [plus de] deux ou trois escuz ou environ qui lui furent donnez par ledit capitaine de Marueil. Et aussi a aucunes foiz levé, cueilly et receu plusieurs vivres de blez, vins et autres choses des subgiez et voisins de la dicte place de Marueil, et aucunes foiz de l’argent par l’adveu, commandement et consentement desdiz capitaines, lesquelz ilz disoient estre pour la garde de ladicte place et soustennement des gens de guerre estans en icelle, pour la garde dudit païs. Et a ledit suppliant vesqu depuis sur les champs aucunes foiz et fait des maulx comme gens d’armes ont acoustumé de faire, pour avoir des vivres et leurs neccessitez. Et combien que en tous autres cas ledit suppliant soit bien famé et renommé, et n’ait jamais esté actaint d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, neantmoins il doubte que aucuns ses hayneux et malveillans ou autres ne le vueillent, à l’occasion de ce, accuser vers justice, et que justice à cause de ce ne le vueille aucunement vexer et travailler, qui seroit en son très grant dommaige et prejudice. Et pour ce nous a ledit suppliant humblement supplié et requis que, les choses dessus dictes considerées et que avons voulu telz cas de guerre estre aboliz, et qu’il a ferme propoz et voulonté de non jamais retourner à la guerre, mais de soy retraire du tout et vivre doresenavant en son mesnaige, nous lui vueillons sur ce impartir nos dictes grace et misericorde. Pour ce est il que nous, etc., à icellui suppliant les faiz et crimes dessus diz et autres, etc., reservé toutesvoyes ravissement de femmes, sacrilege, excepté celui de Mairevant dessus dit, boutement de feux et meurdre, lesquelz ne voulons y estre comprins, ou cas qu’il les auroit faiz de sa personne, lui avons aboliz, remis, quictez et pardonnez, etc. Si donnons en mandement à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. xlv, et de nostre regne le xxiiiie, avant Pasques.

Ainsi signé : Par le roy, vous et autres presens. Chaligaut. — Visa. Contentor. Charlet.

MXCV Avril 1446 (avant le 17)

Rémission accordée à Louis Yvain, ouvrier des monnaies du serment de France, qui avait travaillé à l’atelier clandestin établi à Angoulême par Jean de La Roche, sénéchal de Poitou.

AN JJ. 177, n° 190, fol. 129 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 277-280

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Loys Yvain, ouvrier de noz monnoyes du sermant de France, de droit estoc et ligne, chargié de femme et de six enfans, demourant près nostre ville de la Rochelle, contenant que, xv. ans a ou environ, feu Jehan de la Roche, lors vivant et estant seneschal de Poictou et capitaine d’Angolesme, qui se disoit avoir lettres de congié et licence de nous de povoir faire ouvrer et monnoyer certaine quantité d’argent en autre monnoye que ès nostres

Jean de La Rochefoucauld, sr de Barbezieux, ainsi que plusieurs autres seigneurs de la région, avait usurpé le droit de battre monnaie. Il avait installé un atelier monétaire à Angoulême qui fonctionnait en 1428 et antérieurement et y faisait forger des monnaies d’or et d’argent au coin de la monnaie royale, mais de moindre poids et d’aloi inférieur. Des ateliers semblables existaient à la même époque à Parthenay, à Montignac, à Bourg-Charente, à Fourras et en d’autres villes. Charles VII les dénonça et prescrivit leur suppression dans une ordonnance du 28 mars 1431 n.s. (Voy. ci-dessus, p. 8, note 2.) On trouve d’autres renseignements curieux sur la monnaie de Jean de La Roche dans une rémission octroyée à Arnaud Gaillard, de Pons (Poitiers, juin 1443). Thibaut de La Goublaye, officier de la maison de Jacques, sire de Pons, logé dans cette ville, en l’hôtel d’Arnaud Gaillard, après s’être informé de l’état de celui-ci, lui dit que, puisqu’il s’entendait bien au fait du change et de la monnaie, il aurait tout profit à venir avec lui à Angoulême, où il lui ferait avoir un poste lucratif à l’atelier de Jean de La Roche. C’était à l’époque du mariage de Jacques de Pons avec feu Isabeau de Foix, « xv. ans a ou environ », lit-on dans ces lettres, c’est-à-dire en 1428. Gaillard, qui n’avait alors que vingt-deux ans, accepta cette offre, sans autre information. Thibaut lui avait, paraît-il, donné à entendre que le sr de Barbezieux avait permission du roi « de forgier monnoie ». Il fut d’abord l’associé du maître de la monnaie d’Angoulême, mais, comme il n’avait pas grands moyens pour faire marcher l’atelier, on le chargea d’« exploicter la dite monnoye et d’en porter par le pays, et y fit et exerça fait de change, tant en Sainctonge, Angoumois que en Poictou ». Puis, considérant qu’à l’avenir il pourrait être inquiété, Thibaut n’ayant pas voulu lui montrer le prétendu mandement qui autorisait cette fabrication, il cessa tout commerce avec ce dangereux établissement et entraîna même dans sa désertion le tailleur (graveur) et le maréchal qui forgeait les coins de la monnaie d’Angoulême. Ces départs désorganisèrent l’atelier qui fut en chômage pendant quelque temps. Depuis néanmoins Arnaud Gaillard se fourvoya encore dans les ateliers clandestins de Fourras et de Montignac. Dans ce dernier, « ung nommé Taillepié, de Saint Maixent, lequel pour lors y faisoit monnoye et avoit de pieça congnoissance avec ledit suppliant, lui manda et fit savoir que audit Montignac l’on faisoit monnoye par nostre congié, etc. » (JJ. 184, n° 599, fol. 405 v°.)

, se bon lui sembloit, fist signiffier et savoir ce que dit est à plusieurs ouvriers et monnoyers du serement de France, lors demourans ou estans audit lieu de la Rochelle, lesquelz voyans que nostre monnoye de la dicte ville de la Rochelle estoit en chommaige et que l’en ne besongnoit point, et mesmement ledit suppliant, qui ne savoit autre mestier ne n’avoit autre maniere de vivre que du fait des dictes monnoyes, ala devers le dit de la Roche et y demoura certaine espace de temps, et cuidant que le dit de la Roche eust puissancé, congié et licence de nous de faire ouvrer et monnoyer la quantité d’argent qu’il se ventoit lui avoir par nous esté octroyée, besoingna ès dictes monnoyes du dit de la Roche, audit lieu d’Angolesme, par certain temps et jusques à ce que ledit suppliant entendit que par nous ou les generaulx maistres de noz monnoyes, les ouvriers et monnoyers de nostre monnoye de la Rochelle, de laquelle il estoit, avoient esté mandez pour besoingner en la dicte ville de la Rochelle, et que avions fait faire defence de non plus besoingner ès dictes monnoyes du dit de la Roche, qu’il s’en vint dudit lieu d’Angolesme au dit lieu de la Rochelle ; et pour ce qu’il n’avoit apporté avecques lui ses ostilz qu’il y avoit portez pour besoingner, retourna au dit lieu d’Angolesme et cuida les en emporter, ce que vint à la congnoissance dudit feu Jehan de la Roche, qui par force et contraincte le fist encores besoingnier en sa dicte monnoye. Mais peu après il s’embla et laissa tous ses diz ostilz au dit lieu d’Angolesme, lesquelz y sont encores, et s’en vint du tout au dit lieu de la Rochelle, sans plus retourner au dit lieu d’Angolesme. Et combien que le dit feu de la Roche eust en son vivant remission et abolicion du dit cas

En effet, le crime de fabrication de fausse monnaie à Angoulême est visé dans les lettres d’abolition générale accordées à Jean de La Roche, le 28 mars 1431 n.s. (ci-dessus, p. 17).

, tant pour lui que pour les ouvriers, monnoyers et autres gens qui avoient besoingné ès dictes monnoyes, et que soubz icelle ledit suppliant soit comprins, neantmoins icellui suppliant doubte que justice ores ou pour le temps avenir ne le voulsissent (sic) pugnir dudit cas ou pour occasion d’icellui autrement le vexer ou travailler, qui seroit en son très grant dommaige et prejudice, si comme il dit. Requerant humblement que, les choses dessus dictes considerées, et en reverance de Nostre Seigneur Jhesu Crist qui souffrist mort et passion à tel jour qu’il est aujourd’uy, nous lui vueillons sur ce impartir noz grace et misericorde. Pour ce est il que nous, ces choses considerées, etc., à icellui suppliant le fait et cas dessus declairé avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx conseillers les generaulx conseillers de noz monnoyes et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. xlv, et de nostre regne le xxiiiie avant Pasques.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. Giraudeau. — Visa. Contentor. Charlet.

MXCVI Avril 1446 (avant le 17)

Lettres d’abolition en faveur d’Olivier Harpedenne, dit de Belleville, seigneur de Mirambeau, pour tous ses excès de guerre, et particulièrement pour sa complicité dans la rebellion de Jean de La Roche, sénéchal de Poitou, contre l’autorité royale.

AN JJ. 177, n° 196, fol. 132 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 280-286

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre amé et feal chevalier et chambellan, Olivier de Harpedenne, dit de Belleville

Olivier était le fils cadet de Jean II Harpedenne, seigneur de Belleville, et de Jovine de Mussidan. (Voy. notre vol. précédent, p. 187 note.) Après la mort de ce dernier, Jean de Belleville, son fils aîné (ci-dessus, p. 45, note), mit la main sur tous les biens de la succession, prétendant que son frère avait été déshérité. Il lui fit offrir cependant la terre et le manoir de Saint-Hilaire-le-Vouhis. Olivier refusa cette aumône, réclama la part qui lui devait revenir légitimement et poursuivit son frère en Parlement. La cause fut plaidée le vendredi 26 août 1435. Jean de Belleville posait en principe qu’un père avait le droit de déshériter son fils, quand celui-ci s’était rendu coupable d’ingratitude envers lui ou avait contracté alliance avec ses ennemis, et que, d’après la coutume, il était toujours loisible au père de donner à l’un de ses fils tous ses conquêts. Feu Jean Harpedenne se montra toujours bon pour ses enfants et leur donna de l’instruction. Cependant Olivier s’accointa d’aucuns routiers et pénétra avec eux au château de Nuaillé ; il prit les meubles de son père qui s’y trouvaient et aussi ceux des bonnes gens qui s’y étaient retirés, emprisonna plusieurs des habitants de cette seigneurie et les mit à rançon. De plus, il s’allia avec les Chabot qui faisaient la guerre à Jean Harpedenne et avec eux courut et pilla les terres et rançonna les sujets de celui-ci. Il en fit tant que son père déclara qu’il serait privé de toute participation à l’héritage de ses biens patrimoniaux. L’aîné s’entremit pour réconcilier le sr de Belleville et Olivier. Ce dernier, rappelé à Montaigu, grâce à son frère, s’y rendit, mais ce fut pour s’emparer de la vaisselle et des chevaux. C’est pourquoi Jean Harpedenne persista dans son intention de le déshériter. Malgré tout, Jean tenta encore un rapprochement entre son cadet et leur père, et maintenant encore il voudrait qu’Olivier eût sa part in hereditagio paterno et materno et rebus avitinis ; mais, conformément aux dispositions paternelles, ce qui ne satisfait pas son frère, Jean Harpedenne par son testament avait marqué la volonté formelle que Montaigu et les autres terres qui lui venaient de sa mère (Jeanne de Clisson) demeurassent à l’aîné, et qu’il en fût ainsi de génération en génération. Charles VII avait ratifié ces dispositions en mariant sa sœur naturelle, Marguerite de Valois, à Jean de Belleville. D’autre part, à l’occasion de ce mariage, Jean Harpedenne avait donné tous ses conquêts à son fils aîné, et l’en avait mis en possession de son vivant. Celui-ci en avait fait les foi et hommage et, du consentement paternel, il avait reçu les serments d’obéissance des capitaines de Nuaillé et de Mirambeau. Jean alléguait encore d’autres griefs contre Olivier. Celui-ci, après la mort de leur père, aurait pris « par eschiele » la Motte-Fresneau, pillé et rançonné les habitants. Il avait fait de même à Nuaillé, et ne s’en était départi que quand il fut avisé que son frère marchait contre lui. Mécontent à juste titre de cette façon d’agir, Jean ne voulait plus recevoir son frère. Au retour de sa dernière expédition, Olivier descendit non pas au château de Montaigu, mais dans une hôtellerie de la ville, où il brisa les portes et les fenêtres.

Olivier de Belleville nia la plupart des allégations de son frère. Il n’avait point pris Nuaillé de force, mais, ayant appris qu’il y avait des gens de guerre étrangers dans la place, il s’y était rendu pour la préserver et au besoin pour résister aux occupants. Des malveillants, par leurs rapports mensongers, avaient excité son père contre lui. Il peut se faire qu’il lui ait gardé rancune quelque temps. Mais à son lit de mort, ayant toute sa connaissance et « l’entendement sain », il déclara qu’il voulait que chacun de ses enfants eût son droit. Quand Olivier apprit le décès de son père, il revenait de la guerre, blessé et malade de la « boce ». Arrivé à Montaigu, Jean de Belleville ne voulut pas le recevoir ni le laisser entrer au château ; il le menaça même de le frapper d’une hache. Celui-ci fut donc bien forcé d’aller coucher à l’hôtellerie, où d’ailleurs il ne brisa ni porte ni fenêtre. De là il alla loger chez sa sœur Marguerite à Rocheservière (celle-ci était mariée à Joachim de Volvire). A la Motte-Fresneau, où il se rendit ensuite, il fut reçu par le capitaine et demeura quelque temps dans la place sans faire aucun mal ; son frère vint et l’en chassa. Il fallait bien cependant qu’on lui donnât asile ici ou là, Jean de Belleville ne lui laissant lieu « où se retraire ». (Arch. nat., X1a 9200, fol. 380.) Tel est, d’après les plaidoiries, le résumé des griefs mutuels des deux frères.

Peu de jours après, par arrêt du 4 septembre 1435, le Parlement accorda au demandeur une première provision de 500 livres tournois, que Jean ne se décida à payer qu’après de nouvelles poursuites et à la fin de décembre seulement. Il consigna la somme entre les mains de Guillaume Maynart, à la Rochelle, et le lieutenant du gouverneur de cette ville en donna avis et certificat à la cour, l’informant que le dépositaire était prêt à remettre l’argent à l’ayant droit, quand il plairait à celui-ci. Un nouveau jugement, rendu le 12 janvier 1436 n.s., décida qu’Olivier devait accepter cette consignation et se payer ainsi de la provision qui lui avait été accordée, lui réservant son action en dommages et intérêts pour le retard apporté au payement. (X1a 9194, fol. 122.)

Puis, le 4 août 1436, la cour rendit un arrêt de récréance, accordant à Olivier de Belleville la jouissance provisionnelle, pendant la durée du procès, d’une partie des revenus de la succession paternelle : deux douzièmes sur les seigneuries de Montaigu, Belleville, Vendrines, la Lande, la Chapelle-Thémer et autres héritages nobles assis entre la Dive et la Sèvre et entre la Sèvre et la mer, et aussi dans les châtellenies de Vouvant, Mervent et Fontenay-le-Comte ; un douzième sur les terres nobles situées dans la Gâtine, réservé au défendeur le choix d’un château ou manoir noble par prérogative d’aînesse ; sur les terres de Nuaillé, Longèves, Loiré, le Breuil-Bertin, la Motte-Fresneau et autres, sises au gouvernement de la Rochelle et en Saintonge, deçà la Charente, Jean eut le cinquième et le principal château, et Olivier préleva le quart du restant ; en ce qui concernait les biens meubles et héritages roturiers, où qu’ils fussent situés, la cour en adjugeait à ce dernier le quart, et décidait que toutes ces récréances se prendraient à dater du 9 juillet 1435. (X1a 9194, fol. 144 ; voir aussi X1a 9193, fol. 106 v° et 159 bis.) Étant donné que, à toute mutation de seigneur, une année du revenu des fiefs appartenait au suzerain, à cause du droit dit de rachat, on peut induire, de la date fixée par cet arrêt comme terme initial de la provision accordée à Olivier, que Jean II Harpedenne, seigneur de Belleville, décéda le 8 ou le 9 juillet 1434.

Le procès entre les deux frères dut se terminer, comme le différend entre Jovine de Mussidan et son fils aîné (ci-dessus, p. 45, note), par un accord, aux termes duquel Olivier de Belleville fut mis en possession, entre autres biens provenant de son père, de la seigneurie de Mirambeau, dont il prend le titre dans ses lettres d’abolition. La terre de Mirambeau et celle de Cosnac avaient été vendues, le 10 octobre 1415, par François de Montbron, vicomte d’Aunay, et Louise de Clermont, sa femme, à Jean II Harpedenne, sr de Belleville, moyennant le prix de 8.000 écus d’or. (Cf. notre t. V, p. 206, note.)

, seigneur de Mirambeau, contenant qu’il nous a, ou temps passé, servy ou fait de noz guerres à l’encontre de noz anciens ennemys et adversaires les Anglois, tant en la frontiere de Xanctonge et de Bourdeaux, que autre part, en plusieurs lieux et voiages, acompaigné de plusieurs gens de guerre qui estoient soubz lui et soubz son gouvernement, tant en la compaignie de feu Jehan de la Roche, en son vivant nostre seneschal de Poictou, que d’autres ; depuis lequel temps, il a tenu aussi plusieurs gens de guerre en la dicte ville de Mirambeau, laquelle est en la frontiere de nos diz ennemys et adversaires les Anglois et une des villes et places de nostre obeissance plus prouchaine de la ville de Bourdeaux. Durant lequel temps, qu’il a tenu gens d’armes et qu’il s’est armé, les dictes gens de guerre qu’il a tenuz avecques lui ont fait plusieurs courses, destrousses et pilleries sur noz subgiez, pillé, robé et destroussé gens d’eglise, nobles, marchans et autres de divers estaz, et les ont mis à pié et osté leurs chevaulx, or, argent, et ce qu’ilz avoient avec eulx, vendu et butiné leurs chevaulx et biens, aguettez chemins et couru foires et marchiez, pillé, robé, destroussé et raençonné marchans et autres manieres de gens qu’ilz povoient raencontrer, fait logeiz sur noz hommes et subgiez, prins bestial et raençonné nos diz subgiez à argent, vivres et autres choses, prins et emmené bestial et autres biens qu’ilz trouvoient sur les champs et ès lieux où ilz estoient logiez, raençonné nos diz subgiez, et partie dudit bestial et biens mengié, vendu et butiné, et l’argent applicqué à leur prouffit. La quelle chose ledit suppliant a souffert et toleré à ses dictes gens et autres qui estoient avecques lui, et des dictes choses prinses a eu sa part, et à icelles ou partie d’elles faire a esté present en sa personne. Et que, durant certaine division d’entre nous et aucuns de nostre sang et lignage, pieça appaisée, durant laquelle ledit feu Jehan de la Roche et aucuns autres tindrent nostre ville de Nyort en desobeissance envers nous, ledit suppliant fut avec ledit Jehan de la Roche, duquel ledit suppliant estoit cousin germain

Jean de La Rochefoucauld, sr de Barbezieux, sénéchal de Poitou, et Olivier de Belleville ne pouvaient être cousins germains que du côté maternel. La mère de Jean de La Roche, mariée dès 1382 et morte en 1404, était Rosine de Montaut, fille et héritière de Raymond de Montaut, seigneur de Mussidan, Montendre, Montguyon, Sainte-Néomaye (dont il fut débouté) et Blaye, partisans des Anglais (sur lequel, voy. notre t. IV, p. 150, note), et de Marguerite d’Albret. D’autre part, on a vu que la seconde femme de Jean II Harpedenne, sire de Belleville, mère de Jean et d’Olivier Harpedenne, dits de Belleville, se nommait Jovine de Mussidan (cf. notre t. VII, p. 188, note, et ci-dessus p. 45, note). On pourrait en conclure que cette dernière était la sœur de Rosine de Montaut-Mussidan. Cependant, dans une plaidoirie contre Jean de Belleville, son fils aîné, au sujet de son douaire, Jovine dit « qu’elle est de l’ostel d’Armeignac et de Lebret (Albret) et estoit seule fille et heritiere du seigneur de Mucidan, de Blaye, de Sainte, Nomoye, du Couldray-Salebart et d’aultres plusieurs belles terres ». (Arch. nat., X1a 9200, fol. 370 v°.) Cette assertion pourrait s’expliquer en ce sens que les sœurs de Jovine étaient alors décédées et qu’elle restait seule fille du sr de Mussidan ; elle était bien de la maison d’Albret, mais par sa mère. Une autre fille de Raymond de Montaut, sr de Mussidan, Marthe, avait épousé, le 5 février 1396 (1397 n.s.) Nicolas de Beaufort, seigneur de Limeuil, tige des vicomtes de Turenne de cette maison.

et parent prouchain, en la dicte ville de Nyort, et aussi en celle d’Angolesme

Il résulte de ce passage qu’après son échec à Saint-Maixent et après avoir été obligé d’évacuer Niort (avril 1440), Jean de La Roche avait dû se réfugier à Angoulême, dont il était capitaine.

et autres lieux et places le suivy, l’acompaigna et favorisa, et fut durant ledit temps ledit suppliant cause de faire prendre, courir et pillier plusieurs villes et lieux qui obeissoient à nous. Et a, depuis qu’il tient ladicte ville de Mirambeau, prins appatiz et abstinence de guerre, sans nostre congié et licence, avec nos diz ennemys et adversaires les Anglois, pour sa dicte terre de Mirambeau et autres. Et aussi a depuis aucun temps ença esté devant la place de Maconville

Sic. Il s’agit peut-être de Macqueville, localité du canton de Matha dans la Charente-Inférieure.

, appartenant à nostre amé et feal chambellan le viconte d’Aunoy

François de Montbron, baron dudit lieu et de Maulévrier, vicomte d’Aunay par suite de son mariage avec Louise de Clermont (25 mai 1403), a été l’objet d’une courte notice dans notre précédent volume (p. 79, note 2), que nous avons promis de compléter. Pour ne pas nous étendre démesurément, nous nous contenterons de renvoyer aux registres du Parlement où il est question de ce personnage, sans même entrer dans le détail de son curieux procès criminel contre le sire de Sainte-Sévère. (Arrêt du 4 avril 1426, X2a 21, fol. 46 v°, 47.) Le vicomte d’Aunay fut encore poursuivi au civil par Colette Coustaut, veuve de Jean François, écuyer, comme tutrice de leurs enfants, Guillon, Louis et Aliénor, au sujet des fiefs de Saint-Georges, le Grand-Pontereau et de certaines terres mouvant du seigneur de Chantemerlière. (Plaidolries des 14 juin et 7 juillet 1423, arrêt du 15 juillet 1424, X1a 9190, fol. 300 v° ; X1a 9197, fol. 212, 224 v°, 250.) Il eut aussi à soutenir un long procès criminel contre Hardy Savary, chevalier, qui se plaignait d’excès et violences dont il avait été victime de la part des officiers de la baronnie de Maulévrier, dans sa seigneurie de « la Crislouère », la Crilloire (17 juin et 3 novembre 1427, 19 février 1428, 14 août 1428, 21 novembre 1429, X2a 18, fol. 138 et 176 ; X2a 21, fol. 74, 84 v°, 96 v°, et le même registre, aux dates des 6 avril, 10 juin, 17 juillet et 12 décembre 1433 ; arrêt du 8 avril 1434, X2a 20, fol. 57.) Voir aussi deux actes relatifs au vicomte d’Aunay dans la coll. de dom Fonteneau, le premier du 10 juillet 1412, le second du 11 juin 1438. Citons enfin un aveu rendu par Guillaume Odart, pour une partie de la seigneurie de Cursay, à François de Montbron, comme baron de Maulévrier, le 3 juin 1447. (Arch. nat., P. 3412, fol. 7.) Le vicomte d’Aunay vivait encore en 1470.

, duquel ledit suppliant a espousé la fille

François de Montbron eut quatre fils et sept filles. La plus jeune, Brunissende, avait épousé Olivier de Belleville, le 8 décembre 1438. Elle se remaria à Arnaud de Bourdeilles qui, dit le P. Anselme, fit hommage, le 26 septembre 1456, de la terre de Mirebel (sans doute Mirambeau) au nom des trois enfants du feu seigneur de Belleville, ce qui prouverait que Brunissende de Montbron n’eut pas de postérité de son premier mari. Elle était de nouveau veuve en 1477.

 ; et pour ce que ledit viconte avoit audit suppliant donné la capitainerie et baillié le gouvernement de ladicte place et autres, et que les habitans dudit lieu de Maconville ne vouloient faire ouverture de ladicte place, à lui et à ses dictes gens qui estoient avecques lui, il print et entra dedans ladicte forteresse, et y furent faictes aucunes pilleries, lesquelles il souffry et fist faire. Et avec ce print et emprisonna pieça ledit suppliant le prieur de Saint Sauveur de Maillié

Sic. Lisez « Nuaillé ».

, et aussi ung nommé Michau Le Vannier, et les tint par aucun temps prisonniers, et après les raençonna à certaine somme de deniers. Et plusieurs autres pilleries, roberies, courses, destrousses et raençonnemens a fait et souffert faire par ses gens et autres, en tenant les champs et vivant sur iceulx, et autrement, en plusieurs manieres. A l’occasion desquelz cas ledit suppliant, qui de tout son povoir a voulenté de soy retraire et nous servir, comme il a fait le temps passé, et vivre paisiblement comme homme de bien doit faire, doubte que noz gens et officiers vueillent contre lui proceder rigoureusement et tendre à pugnicion, si nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartie, humblement requerant, etc., icelles. Pour quoy nous, etc., audit suppliant, en faveur des bons et agreables services que son pere et ses predecesseurs nous ont faiz, le temps passé, en plusieurs et maintes manieres, avons quicté, remis, pardonné et aboly, etc., tous et chacuns les faiz, cas, crimes, deliz et malefices dessus diz et autres qu’il a et puet avoir faiz, commis et perpetrez le temps passé, ou qui ont esté commis en sa compaignie, lui present ou consentant, pendant ce qu’il suivoit nos dictes guerres et durant le temps d’icelles, et autrement, tout ainsi comme s’ilz estoient non faiz et non advenuz, et lesquelz voulons ici estre tenuz pour exprimez, exceptez et reservez toutesvoyes meurdre d’aguet apensé, boutement de feux, ravissement de femmes et de filles et violer eglises, lesquelz cas ne voulons y estre comprins ne entenduz, avec toute peine, amende et offense corporelle, criminelle et civile, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, aux seneschaux de Poictou et de Xanctonge, gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. xlv, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, ès requestes par lui tenues. Pichon. — Visa. Contentor. Charlet.

MXCVII Avril 1446 (avant le 17)

Lettres d’abolition en faveur d’Alain Eschellé, écuyer, demeurant à la Mothe-Saint-Héraye, pour les violences, pillages et tous autres excès de guerre dont il a pu se rendre coupable depuis la bataille d’Azincourt.

AN JJ. 177, n° 242, fol. 161 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 286-290

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre amé Alain Eschellé

Ce nom se trouve aussi écrit Eschallé ou de Leschallé (Invent. des arch. du château de la Barre, t. I, p. 260.) Les principaux faits de la biographie d’Alain Eschellé sont énumérés dans ces lettres d’abolition. On peut y ajouter qu’il fut garde de la ville de Montivilliers et donna une quittance de gages en cette qualité, le 12 juin 1416. Un autre document de même nature, en date du 13 novembre 1418, scellé du sceau du même personnage, montre qu’il était alors au service du dauphin contre les Anglais. Ses armoiries étaient : un écu d’hermines, à trois têtes de lion arrachées, accompagnées d’une étoile au canton dextre ; penché, timbré d’un heaume, cimé d’une tête de lion. (G. Demay, Invent. des sceaux de la collection Clairambault, 2 vol. in-4°, t. I, p. 354. Cet auteur a pris à tort les têtes de lion de ce blason pour des têtes de singe.) Alain, qualifié écuyer, fit aussi partie, au mois d’août 1419, de l’armée réunie par le comte de Vertus et Jean de Torsay, pour réduire la ville de Parthenay en l’obéissance du dauphin. Il avait sous ses ordres vingt autres écuyers et seize archers. Un de ses parents, Jean Leschallé, écuyer, servait dans la même armée, avec dix-huit écuyers et douze archers. (Dom Morice, Hist. de Bretagne, in-fol. Preuves, t. II, col. 992.)

, escuier, demourant à la Mote Saint Eraye en nostre païs de Poictou, contenant qu’il nous a, ou temps passé, bien et loyaument servi ou fait de noz guerres à l’encontre de noz anciens ennemis et adversaires les Anglois et autres, et a esté en plusieurs lieux, journées et voiages, chief, capitaine et acompaigné de plusieurs gens de guerre qui estoient soubz lui et soubz son gouvernement à la journée d’Agincourt, soubz et en la compaignie de feu nostre cousin le duc d’Alençon

Jean Ier duc d’Alençon, comte du Perche, vicomte de Beaumont, etc., surnommé le Sage, né au château d’Essay, le 7 mai 1385. A la journée d’Azincourt (25 octobre 1415), où il avait le commandement de l’armée, il succomba, mais après avoir vaillamment combattu et tué de sa main le duc d’York.

, en laquelle il fut prins par nos diz ennemis les Anglois et mené prisonnier à Calays, où il fut detenu par aucun temps et mis à grosse finance et raençon, laquelle il lui convint paier, et aussi en la ville du Mans où il fut par nostre ordonnance et commandement en garnison, soubz le feu sire de Fontaines

Jean sire de Fontaines en Anjou (Fontaine-Guérin), que les Chroniques appellent, à cause du fief, Guérin de Fontaines, combattit victorieusement à Baugé (22 mars 1421), fut capitaine du Mans, au mois de mai de la même année, et mourut vers 1428. (C. Port, Dict. hist. de Maine-et-Loire, v° Fontaines [Hardouin de].) Le Jouvencel dit que le sire de Fontaines fut tué à Cravant. Sa fille Renée épousa Jean de Daillon, favori du dauphin Louis, le 28 juin 1443, et lui porta la terre de Fontaines, car celui-ci, dans un acte de mars 1444 n.s., est qualifié écuyer, sr de Fontaines. (Le Jouvencel par Jean de Bueil, édit. C. Favre et Lecestre, t. I, p. xcix et note.)

, en laquelle ville il fut, à une saillye ou escarmouche qu’il fist, prins par nos diz ennemis et mené prisonnier à Bellesme. Et depuis, en s’efforçant et cuidant reduire la ville de Bourg en nostre obeissance, laquelle aucuns estans en icelle lui devoient bailler et livrer, il fut trahy et prins et avec lui bien viiic hommes de guerre

On n’a rien pu trouver sur cette affaire de Bourg, qui semble cependant avoir eu une certaine importance, puisqu’il y eut huit cents prisonniers. Le P. Anselme, dans les quelques lignes qu’il consacré à Jean de La Rochefoucauld, sr de Barbezieux (le sénéchal de Poitou), dit qu’il rendit de grands services à Charles VII dans les guerres contre les Anglais, et particulièrement à la défense de la ville de Bourg. S’agit-il de Bourg-sur-Charente ou de Bourg-sur-Gironde ? Cette dernière place qui resta au pouvoir des Anglais jusqu’au 29 mai 1451, que Dunois la força à capituler, pourrait avoir été le but de cette attaque infructueuse, à une date et dans des circonstances restées inconnues.

. Et pareillement fut à la journée de Verneuil ou Perche, en la compaignie de nostre très chier et très amé cousin le duc d’Alençon

A Verneuil (17 août 1424), Jean II duc d’Alençon, fils de Jean Ier (tué à Azincourt) et de Marie de Bretagne, fut fait prisonnier par les Anglais ; il ne recouvra la liberté qu’en 1427, après avoir payé une grosse rançon. (Sur ce personnage, cf. le vol. précédent, p. 406, note.)

, où il fut de rechief prins par nos diz ennemis et mené prisonnier à Danfront ; et aussi fut en nostre compaignie, ou premier voiage que feismes en nostre païs de Languedoc

Cette expédition dirigée par Charles VII, alors qu’il était encore dauphin, fut marquée par les sièges et la réduction des villes de Nîmes et du Pont-Saint-Esprit. Parti de Lyon le 21 décembre 1419, Charles était de retour à Poitiers le 8 juin 1420. (Cf. de Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. I, p. 196-202.)

, et tint et mist le siege de par nous devant plusieurs villes et places dudit païs, qui lors estoient à nous rebelles et desobeissans. Pendant lequel temps qu’il a suivi les guerres, tenu gens d’armes et qu’il s’est armé, lesdiz gens de guerre qu’il a tenuz avec lui en nostre service, ont fait plusieurs courses, destrousses, pilleries et roberies sur noz subgiez, pillé, robé et destroussé gens d’eglise, nobles, marchans et autres de divers estaz, et les ont mis à pié et osté leurs chevaulx, or, argent, robes et ce qu’ilz avoient avec eulx, vendu et butiné leurs chevaulx et biens, aguettez chemins et courre foires et marchez, pillé, robé et destroussé toutes autres manieres de gens qu’ilz povoient rencontrer, fait logeiz par force sur noz hommes et subgiez et autres en nostre obeissance, prins bestial et raençonné nos diz subgiez à argent, vivres et autres choses, prins et emmené bestial et autres biens qu’ilz trouvoient sur les champs et ès lieux où ilz estoient logiez, et partie dudit bestial et biens mengié, vendu et butiné, et l’argent applicqué à leur proufit, fourragé et appatissé villaiges, bourgades et autres lieux et manoirs. Laquelle chose ledit suppliant a souffert et tolleré à ses dictes gens et autres qui estoient avec lui, et des dictes choses a prins et eu sa part, et à icelles ou partie d’elles faire a esté present en sa personne. Lesquelles courses, destrousses et raençonnemens il a fait et souffert faire par ses dictes gens et autres, en tenant les champs et vivant sur iceulx et autrement en plusieurs manieres, parce que autrement il n’avoit de quoy soy entretenir ne les gens de guerre de sa compaignie, et que ne leur payons aucuns gaiges. A l’occasion desquelles courses, destrousses, pilleries, raençonnemens et autres choses dessus dictes ledit suppliant, lequel s’est dès pieça retrait et veult vivre paisiblement, comme homme de bien doit faire, doubte que pour lesdiz cas ou aucuns d’eulx noz gens et officiers vueillent ou temps avenir contre lui proceder rigoureusement et tendre à punicion corporelle, et que à ceste cause il fust contraint et lui convenist soy absenter du pays, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties ; humblement requerant que, attendu que le dit suppliant nous a bien longuement servi ou fait de noz guerres, etc., il nous plaise sur ce lui impartir icelles. Pour quoy nous, etc., audit suppliant, en faveur des bons et agreables services qu’il nous a faiz le temps passé ou fait de noz guerres, et pour consideracion des prisons qu’il a souffertes et des grans raençons qu’il lui a convenu paier à noz diz ennemis, pour soy delivrer de leurs mains et eschapper de leurs prisons, avons quicté, remis, pardonné et aboly, etc., tous et chascuns les faiz, cas, crimes, deliz et malefices dessus diz, et autres quelzconques, etc., lesquelz nous voulons ici estre tenuz pour exprimez, et voulons qu’ilz soient regectez, comme s’ilz estoient non faiz et non advenuz, exceptez et reservez toutesvoyes meurdre d’aguet apensé, boutement de feux, ravissement de femmes et de filles et violer eglise, etc. Si donnons en mandement aux seneschaulx de Poictou et de Xanctonge, gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. xlv, et de nostre regne le xxiiiie, avant Pasques.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. Rolant. — Visa. Contentor. E. Duban.

MXCVIII Avril 1446 (avant le 17)

Rémission octroyée à Thibaut Paynnot, écuyer, demeurant en l’île de Magné près Niort, pour tous les excès qu’il avait pu commettre pendant les expéditions militaires auxquelles il avait pris part.

AN JJ. 177, n° 245, fol. 163 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 290-296

Charles, etc., savoir faisons, etc., nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre amé Thibaut Paynnot, escuier, demourant en l’Isle de Maigné près Nyort, contenant que, comme dès son jeune aage, en ensuivant le fait des nobles, nous ait bien et loyaument servy ou fait de noz guerres à l’encontre de noz anciens ennemis et adversaires les Anglois, tant soubz et en la compaignie de feu Anthoine de Vivonne

Antoine de Vivonne, co-seigneur de Bougouin et d’Iteuil, dont il fit hommage en 1425, fils aîné de Jean, seigneur de Bougouin, et de Marguerite de la Rochandry. Son dévouement à Richemont lui valut la haine de La Trémoïlle et lui coûta la vie. Par arrêt du Parlement en date de Poitiers, le 8 mai 1431, il fut condamné à mort pour avoir entrepris contre l’autorité du roi, en complotant de se saisir, de concert avec le vicomte de Thouars et le sire de Lezay, de la personne de La Trémoïlle. Dans cet arrêt sont aussi visés d’autres crimes, pour lesquels il avait obtenu des lettres de rémission. (Original, Arch. nat., J. 366, n° 3.) Antoine de Vivonne fut décapité ce même jour, ainsi qu’André de Beaumont, sr de Lezay. Il avait épousé Jeanne de Martreuil, fille de Guillaume, sr d’Aysie, dont il n’eut pas d’enfants. Charles VII fit don de ses biens confisqués à Jean, sr de Bougouin, et à François de Vivonne, ses frères, par lettres patentes du 7 octobre 1434, entérinées au Parlement de Poitiers, le 22 janvier 1435 n.s. (X1a 9194, fol. 88 v°.)

, de Loys Frondebeuf, jadiz cappitaine de Marueil

Capitaine de Mareuil-sur-Lay pour Georges de La Trémoïlle, Louis Frontdebeuf, d’une famille noble du Bas-Poitou, prit part aux entreprises contre les places du connétable de Richemont, de 1427 à 1433. Le chartrier de Thouars renferme, ou du moins renfermait un acte de ce personnage, daté du 8 janvier 1431 (s.d. 1432 n.s.), mentionné dans Les fiefs de la vicomté de Thouars, d’après l’inventaire de J.-Fr. Poisson en 1753, publié par le duc de La Trémoïlle et Henri Clouzot (Niort, 1893, in-4°, p. 47). Il s’agit d’une procuration donnée par Louis Frontdebeuf, à cause de Gillette de Mirebeau, sa femme, pour faire hommage d’un fief consistant en une maison à Thouars, des vignes à Ligron et des prés à Villegeay, relevant de la vicomté de Thouars à hommage lige.

, et de Guillaume Chabot

Guillaume Chabot, écuyer, 4e fils de Géheudin, chevalier, seigneur de Pressigny, la Roussière, etc., et de Jeanne de Sainte-Flaive. Du père il a été question longuement dans notre t. VI des extraits du Trésor des chartes, p. 66, 85 ; on a vu qu’il eut neuf enfants. Quant à Guillaume, nous avons aussi rencontré son nom précédemment. Renchérissant sur les mœurs corrompues des gens de guerre de la première moitié du xve siècle, il se distingua, ainsi que ses frères, Tristan, Perceval et Louis, par ses violences et ses rapines. Dès l’année 1411, Guillaume et Louis avaient eu des démêlés avec la justice, à propos d’un vol à main armée dont ils s’étaient rendus complices au préjudice de l’évêque et du chapitre de Maillezais ; de 1423 à 1430, les quatre frères furent l’objet de poursuites au Parlement de la part de Jacques de Surgères, sr de la Flocellière, dont ils avaient pillé et incendié l’hôtel de la Coudraye à Luçon, ville où Tristan commandait pour La Trémoïlle. (Cf. notre précédent vol., p. 2, note, et p. 194, note.) Nous mentionnerons encore quelques-uns des méfaits de Guillaume, d’après les registres du Parlement. Il eut à soutenir un très long procès (1430-1446) contre Jean Jousseaume, sr de la Geffardière, comme tuteur des enfants mineurs de feu Jean Jousseaune, écuyer, seigneur de la Forêt-sur-Sèvre et de Commequiers. Perceval Chabot, qui avait épousé Jeanne de L’Isle, la veuve de ce Jean, sr de la Forêt, s’était emparé de force du château de Commequiers au détriment des mineurs, et y maintenait une troupe armée. Dans cette affaire, Guillaume avait été complice des violences de son frère. Cette procédure est beaucoup trop longue pour que nous entrions dans de plus grands détails, et nous nous contenterons de renvoyer aux registres où ils sont consignés. (Arch. nat., X1a 8604, fol. 147 ; X1a 9192, fol. 196 ; X2a 20, fol. 67 ; X2a 21, fol. 130 v°, et à la date du 9 mars 1436 n.s. : X2a 22, aux dates des 20 août et 19 décembre 1437, 16 janvier, 2 mars et 16 juillet 1439 ; X2a 23, fol. 60 v°, 247, 268 v°.) Guillaume et Perceval s’étaient rendus coupables de crimes plus graves contre Jean Buor, chevalier, seigneur de la Gerbaudière, et Maurice Buor, son fils. Ajournés pendant plusieurs années, ils refusèrent de comparaître, firent constamment défaut et se laissèrent condamner par contumace, le 7 juin 1432. Ils avaient à répondre d’un vol à main armée commis, au mois de novembre 1421, dans une maison de la Chaize-le-Vicomte appartenant à Jean Buor, qui était capitaine de cette place pour le vicomte de Thouars. Dans le même temps, vers la saint Martin de cette année, Maurice Buor, alors jeune écuyer, âgé d’environ dix-huit ans, se rendant, avec un serviteur, de la Chaize aux Herbiers, près des parents de sa femme, fut attaqué en route par une douzaine d’hommes à la solde des deux frères Chabot, non loin de l’Herbergement, dont Perceval était capitaine. Il fut frappé et blessé grièvement d’un coup de lance par le milieu du corps ; tombé à terre, ses agresseurs lui portèrent de nouveaux coups, le dépouillèrent de son cheval, de celui que montait son serviteur, de ses armes et de 1000 écus qu’il portait sur lui. Les malfaiteurs, qui avaient à leur tête un nommé Estourneau, connu pour être lieutenant des Chabot à l’Herbergement, se réfugièrent avec le produit de leur vol dans les forteresses de Puybéliard et de Saint-Michel-en-l’Herm, où commandaient aussi Guillaume et Perceval. (X2a 20, fol. 51 ; X2a 21, fol. 182.) Dans d’autres notes de ce volume, on trouvera encore des renseignements de même nature sur les agissements des frères de Guillaume Chabot. Après s’être fait, pendant plusieurs années, l’instrument des haines de Georges de La Trémoïlle, Guillaume Chabot finit par devenir son ennemi. L’évêque de Luçon poursuivant La Trémoïlle qui s’était arrogé le droit de mettre des garnisons dans cette place et dans celle de Moutiers-sur-Lay, et d’en nommer les capitaines, contrairement aux justes prétentions de l’évêque, ces deux forteresses furent placées sous la main du roi, pendant la durée du litige, et Guillaume accepta, avec un de ses frères, de garder Luçon au nom de la cour. Georges voulut alors impliquer les deux frères dans le procès qu’il soutenait contre l’évêque et les fit assigner en personne devant le Parlement. L’avocat de ceux-ci représenta qu’en résistant aux entreprises de La Trémoïlle, ils n’avaient fait qu’exécuter leur commission. (Acte du 15 mai 1439, X2a 22, à la date.) On peut voir d’autres documents relatifs à Guillaume Chabot, mentionnés dans la généalogie de cette maison. (Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. II, p. 189.)

, pour lors qu’il estoit cappitaine de Saint Hermine, pour le feu sire de la Trimoïlle

Remarquons en passant que Georges de La Trémoïlle est dit défunt dans ces lettres d’avril (avant le 17) 1446, alors que la date de son décès indiquée par tous les auteurs serait le 6 mai de cette année.

, que de nostre amé et feal cousin le sire de Thouars

La présence de Louis d’Amboise, vicomte de Thouars, au siège de Pontoise est mentionnée déjà dans un autre acte publié dans ce volume.

au siege de Pontoise, de Brusac

Gautier de Brusac, écuyer d’écurie de Charles VII, ou plutôt son neveu, Pierre de Brusac. (Voy. ci-dessus, p. 221, note 1, à propos d’un acte de décembre 1445, dans lequel Gautier est dit décédé.)

et de Jehan de Breszé

Un oncle et un frère de Pierre de Brézé, sr de la Varenne, sénéchal de Poitou, portant tous deux le prénom de Jean, se distinguèrent dans les guerres de Charles VII. Le premier ayant été tué à la prise d’Evreux, l’an 1442, c’est plutôt du second qu’il s’agit ici. Jean de Brézé, troisième fils de Pierre Ier et de Clémence Carbonnel, fut capitaine de Louviers, bailli de Gisors, dirigea l’entreprise sur le Pont-de-l’Arche, assista au siège de Château-Gaillard en 1449 et accompagna le sire de la Varenne, son frère, dans l’expédition qu’il conduisit en Angleterre, l’an 1457.

, durant le voiage de Conches

Il y eut plusieurs « voyages » de Conches pendant le règne de Charles VII. Il est sans doute fait allusion ici à l’expédition dirigée par Pierre et Jean de Brézé et Robert de Flocques, et qui eut pour résultat la prise de cette place (octobre 1440) et le relèvement de ses fortifications. (Le héraut Berry, Chronique, édit. Godefroy, p. 412.)

, et autres noz cappitaines et chiefz de guerre, tant au siege d’Orleans

C’est-à-dire le siège que Jeanne d’Arc victorieuse contraignit les Anglais à lever (8 mai 1429).

que en plusieurs et divers lieux, et maintes bonnes besongnes, entreprises, rencontres et destrousses faictes sur et à la confusion de nos diz ennemis et adversaires ; èsquelles choses et services il a frayé et despendu la plus part de sa chevance, sans avoir eu de nous aucune soulde, gaiges ou recompensacion, dont il peust avoir soustenu la vie de lui, ses varletz et serviteurs, ne aussi avoir acheté chevaulx, harnoiz et autres choses à lui necessaires pour soy entretenir en nostre dit service. A laquelle cause, il a esté contraint de tenir les champs et vivre sur noz païs et subgiez, et à courir et faire courir ses varletz, et serviteurs, piller, rober, raençonner et destrousser toutes manieres de gens qu’ilz ont trouvé sur les champs et ailleurs, tant gens d’eglise que nobles, praticiens et autres, de quelque estat ou condicion qu’ilz feussent, les prendre prisonniers et rançonner, leur oster chevaulx, harnoiz et autres monteures, or, argent, robes, joyaulx, denrées, marchandises et autres biens et choses quelzconques, qu’ilz trouvoient sur eulx, vendu et butiné icelles destrousses, dont il a eu sa part et porcion ; et aussi souventes foiz a esté à courir foires et marchez, et à iceulx piller, y prendre et emmener gens, bestial, denrées, marchandises et autres choses quelzconques, les raençonner et butiner, et de ce eu sa part et porcion, qu’il a appliqués à son proufit, et en a fait et disposé à son plaisir et voulenté, comme de chose prinse sur noz ennemys. Et avecques ce, a plusieurs fois esté avecques gens de guerre à son entreprise, et autrement, à plusieurs courses faictes sur gens de nostre party, à assaillir chasteaulx, eglises, bastilles et autres places fortes tenans nostre party, d’emblée, par force et autrement, où se sont ensuiz bateures, navreures et mutilacions, pilleries, roberies, prinses et raençonnemens de gens, bestial, nourritures et autres choses. Et puet estre que, pendant qu’il a ainsi suivy les dictes guerres, lui, ses gens, varletz et serviteurs, ont, en traversant païs et autrement, couru, appatissé et raençonné par plusieurs foiz et à diverses personnes de deniers et autres choses, sur aucuns de noz subgiez et obeissans de tous estaz, et iceulx batuz, navrez et mutilez, et fait et commis plusieurs autres maulx, excès, deliz et malefices, lesquelz bonnement ne pourroient estre cy exprimez ne declairez. Et toutes voyes, entre autres choses, durant le temps qu’il estoit soubz et en la compaignie dudit Frondebeuf et que certaine discencion et malvueillance estoit entre nostre très cher et très amé cousin le connestable de France et le feu sire de la Trimoïlle, le dit suppliant fut à plusieurs courses faictes de la part du dit feu sire de la Trimoïlle et par ledit Frondebeuf, ses gens et autres, à l’encontre de certaines gens de guerre, bretons et autres qui lors tenoient les places de Voulvant, Fontenay le Conte, Mervant, Paluau, les Essars et Bournereau

Vouvant, Fontenay-le-Comte et Mervent appartenaient au connétable de Richemont, la première et la troisième comme faisant partie de la succession de Parthenay, qui lui avait été donnée à plusieurs reprises, et Fontenay à cause de sa femme, la duchesse de Guyenne, à laquelle Charles VII l’avait engagée à titre de douaire, le 9 mars 1425 (vol. précédent, p. 423). Quant aux trois autres places, elles faisaient partie de la confiscation d’Isabelle de Vivonne, veuve de Charles de Bretagne, sr d’Avaugour, qui avait été attribuée à Richard de Bretagne, comte d’Étampes, frère du connétable, et donnèrent lieu à un long procès entre la dame d’Avaugour, d’une part, Richard, puis, après sa mort (1438), son fils François, comte d’Étampes, d’autre part. (Voy. les plaidoiries du 29 juillet 1434, Arch. nat., X1a 9200, fol. 27.)

, qui, ou contempt dudit feu sire de la Trimoïlle, faisoient grant guerre au dit Frondebeuf et autres aliez d’icellui sire de la Trimoïlle ; et mesmement en faisant certaine course au dit lieu de Mervant

L’entreprise exécutée par Jean de La Roche et le frère de La Hire contre la place de Mervent, en juin 1432, a été relatée quelques pages plus haut (p. 272, et note 4).

, fut le dit suppliant à piller, voler, prendre et raençonner gens, bestial et nourriture, tant en l’eglise du dit lieu, où les bonnes gens d’ilec s’estoient retraiz que dehors, et a eu sa part d’une partie du butin d’icelle course. Et pour cause de certaines promesses à lui faictes pour avoir travaillé et esté par devers certaines gens de guerre pour aucuns parroissiens de certaines parroisses du païs d’Aulniz, et mesmement de Marcillé, icellui suppliant, pour cause d’icelles promesses non acomplies, comme promis lui avoit esté, a aucunes foiz prins par maniere de marque certaines sommes d’or et d’argent et autres choses, jusques à la valeur ou environ de ce qu’il lui estoit deu des dictes promesses par les dictes parroisses. Et aussi a le dit suppliant esté à plusieurs et diverses foiz à prendre aucuns de noz subgiez, de nuyt et de jour, en leurs hostelz et autrement, et iceulx menez aux logeis et compaignies dont il estoit, où ilz ont esté raençonnez tant pour aucunes offenses qu’ilz avoient faictes envers lui, que autrement. Et combien que le dit suppliant n’ait servy aucun seigneur ne capitaine, ou fait de la dicte guerre, à l’encontre de nous, et qu’il ait bonne intencion et voulenté de soy desormaiz retraire et abstenir de telz malefices, neantmoins il doubte rigueur de justice, et que aucuns sur lesquelz les diz cas ont esté perpetrez et commis voulsissent, de present et ou temps avenir, faire poursuite par justice à l’encontre de lui, et que par ce moyen on lui voulsist donner aucun ennuy, destourbier ou empeschement, ou autrement le molester ou rigoureusement traictier, ou proceder à l’encontre de lui et de ses biens, se nostre grace ne lui est sur ce eslargie, si comme il dit, humblement requerant que, attendu et consideré ce que dit est, et mesmement en faveur d’iceulx services, ainsi par lui à nous faiz èsquelz il a de jour en jour continué, et que pour entretenir lui, ses diz varletz et serviteurs en nostre dit service, il a esté contraint à commettre les diz excès et malefices, ou plusieurs d’iceulx, et que en tous autres cas il a tousjours esté de bonne renommée et honneste conversacion, il nous plaise sur ce nostre grace favorablement lui impartir. Pour quoy nous, ces choses considerées et mesmement que le dit suppliant n’a, comme il dit, servi aucun seigneur ou cappitaine ou fait de la guerre à l’encontre de nous, voulans en ce cas preferer misericorde à rigueur de justice et au dit suppliant recongnoistre ses diz services, à icellui avons quicté, remis, pardonné et aboly, etc., pourveu toutesvoyes qu’il n’ait, en sa personne, fait ou commis ravissement de femmes ou de filles, violences d’eglises, omicide voluntaire sur noz subgiez, ne bouté feu, etc. Si donnons en mandement par ces presentes aux seneschaulx de Poictou et de Xaintonge, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil iiiic quarante cinq avant Pasques, et de nostre regne le xxiiiime.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. Rolant. — Visa. Contentor. E. Duban.

MXCIX Avril 1446 (avant le 17)

Lettres d’abolition en faveur d’Hélyot Bonnel, homme de guerre, natif du Périgord, pour tous les excès dont il s’est rendu coupable pendant le long temps qu’il servit « soubz feu Jehan de la Roche et autres capitaines, tant qu’ilz ont esté noz vraiz obeissans et tenu nostre party. Toutesfoiz n’a il point esté avec ledit de la Roche ne aucuns des diz autres capitaines, tant qu’ilz ont esté à l’encontre de nous… Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc.xlv, et de nostre regne le xxiiiie, avant Pasques ».

AN JJ. 178, n° 64, fol. 40 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 297

MC Avril 1446 (avant le 17)

Lettres d’abolition octroyées à Léonard Boinchaut, écuyer, pour tous les excès dont il s’est rendu coupable pendant les dernières guerres.

AN JJ. 178, n° 129, fol. 80 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 297-300

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receue l’umble supplicacion de Leonard Boinchaut, dit la Picque, escuier, contenant que dès son jeune aage il a commancié à suir les guerres et en icelles nous a serviz par long temps, tant à nostre sacre et couronnement, en la frontiere de noz ennemis et adversaires les Anglois, à l’encontre d’iceulx et d’autres tenans lors leur party, oultre les rivieres de Seine et Yonne, où il fut et demoura continuelment par l’espace de trois ou quatre ans, monté et souffisamment habillé en la compaignie du feu sire de Boussac, lors mareschal de France

Jean de Brosse, seigneur de Boussac et de Sainte-Sévère, dit le maréchal de Boussac, né en 1375, conseiller et chambellan de Charles VII, avait été nommé maréchal de France en juillet 1426, grâce au connétable de Richemont, dont il servit le plus souvent les intérêts. Il mourut en 1433. Sa fille Marguerite épousa Germain de Vivonne, sr d’Aubigny, et lui apporta les terres d’Ardelay et de la Châtaigneraye. (Cf. notre vol. précédent, p. 282, note.)

, et durant icellui temps y despendy bien largement du sien, fut très fort navré et blecié à une rencontre où il se trouva sur nos diz ennemys et y eut beaucop d’autres maulx et charges à supporter. Et depuis le trespas dudit sire de Boussac, nous a serviz en la frontiere d’Angosmoys et semblablement en la guerre que fist à l’encontre de nous et de noz loyaulx vassaulx et subgiez feu Jehan de la Roche, sans jamais avoir tenu autre party que le nostre ne servi autre, quel qu’il soit, à l’encontre de nous. Et combien que, en mettant et donnant ordre sur le fait de la pillerie et maniere de vivre que ont longuement tenue noz gens de guerre, ayons pardonnez et aboliz tous cas, crimes et deliz advenuz à cause de la guerre et durant icelle, neantmoins, obstant ce que ledit suppliant, lui estant en la dicte guerre et mesmement à Loue

Sic. Il faut évidemment lire Alloue, place située non loin de Saint-Germain-sur-Vienne.

et Saint Germain, durant ledit temps que icellui de la Roche faisoit guerre à nous et nos diz subgiez, a plusieurs fois esté courir, avecques autres tenans nostre party, devant aucunes places tenans lors le parti dudit de la Roche, et que des environs d’icelles et d’autres places et pays à nous obeissans ilz prindrent et emmenerent bestial et autres vivres, emprisonnerent gens, iceulx raençonnerent, pour eulx aidier à vivre, et firent autres maulx que faisoient lors gens de guerre ; et aussi qu’ilz courirent, pour aucun debat estant lors entre ceulx des dictes places de Loue et Saint Germain, et les manans et habitans de Saint Junien en Lymosin, devant ledit Saint Junien et y prindrent deux ou trois hommes qu’ilz raençonnerent à argent ; et aussi pour ce que, quinze ans a ou environ, pour certaine discencion et question qui se meut entre ledit suppliant, lors estant capitaine de Chasteau Poensac oudit pays de Lymosin, et Galehault de Saint Savin

La famille de Saint-Savin était possessionnée en Poitou et dans le Limousin, particulièrement dans cette dernière province. Pierre de Saint-Savin, écuyer, rendit un aveu à Jean de France, duc de Berry et comte de Poitou, le 12 mars 1404 n.s., pour son hébergement de l’Age-Gandelin (commune de Leigne) et autres fiefs mouvant de Montmorillon. (Copie du Grand-Gauthier, Arch. nat., R1* 2171, p. 617.) Jean de Saint-Savin, chevalier, sr de la Grange, fut pourvu par lettres données à Paris, le 24 juillet 1418, des offices de sénéchal de Limousin et de capitaine d’Esse. Le 6 août suivant, le roi manda au Parlement que le nouveau sénéchal était dans l’impossibilité de venir faire à la cour le serment requis et accoutumé, mais que néanmoins il devait jouir dudit office et des gages y attachés. (X1a 63, fol. 11 v°.) Quant à Galehaut, nommé ici à l’occasion du siège de Château-Ponsac, il est mentionné à plusieurs reprises, mais avec peu de détails, sur le registre criminel et sur le registre civil du Parlement de l’année 1435. Le mercredi 18 mai, « messire Galaut de Saint-Savin, chevalier », assura de lui et des siens Jean Archambaut, prêtre, Raymond de Vallée, prêtre, et Jean Gigaut le jeune, et les leurs, aux us et coutumes de France. Et le 28 du même mois, on lit que Jean Gigaut s’est départi ès mains de maistre Guillaume Letur dudit assurement. (X2a 21, aux dates.) Le 15 juillet suivant, Galehaut de Saint-Savin, qui était appelant d’une sentence du sénéchal de Limousin, en matière civile, donnée au profit de Jean Aigrespée, écuyer, veuf d’Anne de Saint-Savin, comme curateur de ses trois fils, Audebert, Jean et Ithier, et ayant le bail et gouvernement de ses deux filles Marguerite et Jacquette, fit requérir la cour de l’admettre au bénéfice des lettres d’état accordées à tous ceux qui se rendaient, pour le service du roi, à Arras, où avaient lieu le congrès et les négociations qui aboutirent à la conclusion du traité de paix avec le duc de Bourgogne. Galehaut offrait de fournir un certificat du comte de Vendôme, à la suite duquel il prenait part à ce voyage. Le 27 juillet, la cour décida qu’il aurait un délai de huit jours pour en faire la preuve, soit par lettres, soit par témoins, malgré l’opposition de l’avocat de la partie adverse, motivée sur ce qu’il s’agissait d’un procès écrit ne donnant lieu à aucune nouvelle information, et dans lequel il ne restait plus qu’à conclure. (X1a 9201, fol. 193 ; X1a 9194, fol. 108.)

, chevalier, icellui de Saint Savin vint par maniere de siege devant la dicte place, acompaigné de plusieurs tant gens de guerre que commune, cuidans et eulx efforçans prendre icelle, et y furent deux ou trois jours, durant lesquelz et à autres foiz qu’ilz vindrent de nuit, cuidans prendre d’emblée la dicte place, furent par ceulx de dedens tuez cinq ou six personnes de la compaignie d’icellui de Saint Savin, et prins et butinez aucuns biens estans en la dicte place, appartenans à aucuns tenans la partie dudit de Saint Savin, que applicquerent à eulx le dit suppliant et ses compaignons ; il doubte que, ores ou au temps avenir, on le peust ou voulsist, à l’occasion des choses dessus dictes, apprehender et contre ses personne et biens rigoureusement proceder, se nos grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, ainsi qu’il nous a fait dire et remonstrer, en nous humblement requerant que, attendu les choses dessus dictes, que, puis la dicte ordonnance par nous faicte, il s’est bien doulcement et paisiblement gouverné comme gentilhomme de bien doit faire, il nous plaise les choses dessus dictes et autres par lui commises et perpetrées, durant le dit temps qu’il a ainsi suivy la guerre, lui remettre, quicter, pardonner et abolir, et sur ce nostre grace lui impartir. Pour ce est il que nous, ce consideré et les services à nous faiz par ledit suppliant ou dit fait de la guerre, tant en la compaignie dudit feu sire de Boussac que depuis, en la compaignie de nostre très chier et amé cousin le conte de le Marche

Bernard d’Armagnac, comte de Pardiac, fils de Bernard VII comte d’Armagnac, pourvu par Charles VII du comté de la Marche, en 1435, au lieu de son beau-père (ci-dessus, p. 152, note 1).

, ou voiage et armée que derrenierement avons faiz en nostre pays de Guienne et autrement en maintes manieres, à icellui suppliant, pour ces causes et autres à ce nous mouvans, avons quicté, remis, pardonné et aboly, etc., pourveu toutes voyes qu’il n’ait en personne commis aucun meurdre, ravy femmes ou filles, bouté feux ne pillé eglises, lesquelz quatre cas en exceptons et reservons. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes aux seneschaulx de Poictou, Xanctonge et Limosin, et gouverneur de la Rochelle, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois de avril l’an de grace mil cccc. quarante et cinq, et de nostre regne le xxiiiie, avant Pasques.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. Rolant. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MCI Avril 1446 (avant le 17)

Rémission en faveur de Louis de Segrie, écuyer, de la Motte-d’Usseau, qui avait fait mettre à mort le nommé Baudart, séducteur de sa femme, et l’instigateur de cette trahison, maître Guérin, et maltraité François Gébert, parce qu’il avait obtenu de sa fille bâtarde une promesse de mariage, signée de sa main.

AN JJ. 179, n° 202, fol. 113 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 301-309

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre amé Loys de Segrie, escuier

L’an 1433, les officiers du vicomte de Châtellerault, en tête desquels est nommé Louis de Segrie, s’étaient rendus coupables de « grans desobeissances et autres excès, crimes et delictz, en la ville de Chastelairaut et ailleurs, tant sur l’execucion des arrestz de la court et autres lettres royaux, et contre les executeurs d’icelles. » Les poursuites étaient motivées, entre autres, par des violences exercées contre un huissier du Parlement qui s’était présenté, avec mission de se faire délivrer une jeune héritière de Poitiers séquestrée à Châtellerault. Il s’agissait de Guillemine Berlant, dame des Halles de Poitiers, fille née posthume de Turpin Berlant, mort devant Gallardon, qui, étant sous la tutelle de son aïeule maternelle, Jeanne Boutaut, avait été enlevée par Pierre Berlant, son oncle. (Voir Arch. nat., X1a 9200, fol. 206, 230, 241 v°, aux 18 février, 4 et 31 mai 1434.) La cour ne pouvait laisser braver aussi audacieusement son autorité ; d’autre part, elle était tenue à de grands ménagements vis-à-vis d’un puissant personnage comme le vicomte de Châtellerault, qui couvrait ses officiers. Dans d’autres circonstances, elle avait rencontré la même résistance à ses ordres, et la répression n’avait pas toujours été possible. Un échec était encore à craindre cette fois. Aussi les curieuses délibérations consignées sur le registre du conseil au sujet de cette affaire montrent bien l’extrême embarras de la cour. Le 8 février 1434 n.s., elle donna toute liberté au premier président d’écrire à Jean d’Harcourt, de lui faire toutes les remontrances, de lui déclarer que les informations seraient poursuivies et que le roi serait instruit de la gravité et des conséquences de cette rébellion. Le lendemain, on se ravise et on charge Hugues de Combarel, évêque de Poitiers, et Maurice Claveurier, lieutenant du sénéchal, de voir, « sans aucunement parler de par la court, se ilz pourront traictier doucement avec monseigneur de Chastelairaut et ses gens et officiers que icellui seigneur souffre et permette que les officiers du roy, en executant exploits de justice, aient plainiere obeissance en sa terre, et que pour faire led. traictié, ilz facent et puissent faire venir en la ville de Poictiers Loys de Segrie et autres en tel nombre que bon leur semblera, ausquelx, pendant icellui traictié, ne sera fait ne donné aucun empeschement par la court. » Les négociations ne réussirent sans doute pas. Car, le 17 février, le Parlement se décida à décréter de prise de corps Louis de Segrie, Pierre Farcy, Jean des Hayes, juge de Châtellerault, et Jean Tréfilier, maître d’hôtel de Jean d’Harcourt. Cependant, il ne fallait pas songer à s’en emparer de fait. On eût été obligé de recourir à la force armée et de faire le siège de la place. On se contenta donc d’ajourner, à cri public, les officiers du vicomte à comparaître devant la cour. Enfin le 2 mars, revenant encore sur cette dernière mesure, la cour, dans une nouvelle délibération, conclut à ne rien faire, « jusqu’à ce qu’elle ait sceu quelle obeissance aura esté donné audit lieu de Chastelairaut sur l’execucion de certain adjornement en cas d’appel pour Me Robert des Roches. » C’était une défaite. En ce qui touchait le procès intenté par les parents de Guillemine Berlant contre ceux qui la détenaient de force, les parties pouvaient continuer leurs poursuites et requérir ce que bon leur semblerait. En attendant, on avertirait décidément le roi et son conseil de ce qui se passait à Châtellerault. (X2a 21, aux 8, 9 et 17 février et 2 mars 1434 n.s. ; cf. aussi Didier Neuville, Le Parlement de Poitiers, Revue historique, t. VI, janvier-avril 1878, p. 309.)

, contenant que ledit suppliant, pour acquicter sa loyaulté envers nous, tantost après que les Anglois, noz anciens ennemis et adversaires, furent, après la piteuse journée d’Agincourt, descenduz en nostre païs de Normandie, il se retrahy en nostre party et obeissance, soubz feu nostre cousin le conte d’Aubmarle

Le comte d’Aubmarle. Il s’agit de Jean d’Harcourt, comte d’Aumale et de Mortain, né le 9 avril 1396, fils de Jean VII (voir la note suivante) et de Marie d’Alençon. Ordonné capitaine des ville et château de Rouen et de la forteresse de Mont-Sainte-Catherine, le 15 avril 1417 (anc. mém. de la Chambre des Comptes H, fol. 86), puis lieutenant et capitaine général en Normandie, il se signala à la journée d’Azincourt, au combat de Cravant et à la bataille de Verneuil (17 août 1424), où il fut tué. Le comte d’Aumale ne laissa qu’un fils bâtard, Louis d’Harcourt, dit le bâtard d’Aumale, qui devint archevêque de Narbonne en 1452.

, lequel il servit jusques à la mauvaise journée de Vernueil où il trespassa, et deux des freres dudit suppliant en son service ; après la mort duquel conte d’Aubmarle, ledit suppliant se retrahy au lieu de la Mote d’Usseau près Chastelheraud, où estoient ses femme et mesnage, et n’avoit lors icellui suppliant aucune charge ou occuppacion, si non que nostre cousin le conte de Harecourt qui à present est

Jean VII comte d’Harcourt et d’Aumale, redevenu vicomte de Châtellerault à la mort de son frère Louis, archevêque de Rouen, en 1422 (cf. notre vol. précédent, p. 437 note), avait fait ses premières armes au siège de Taillebourg (1385), où il fut fait chevalier de la main du duc Louis de Bourbon, son oncle, qu’il accompagna dans l’expédition de Barbarie (1390). Il se distingua à Azincourt, où il resta prisonnier des Anglais. Il mourut le 18 décembre 1452, à l’âge de quatre-vingt-deux ans, ne laissant que deux filles légitimes de son mariage avec Marie, fille de Pierre II comte d’Alençon et du Perche, mariée le 17 mars 1389, décédée avant 1418. Nous retrouverons ci-dessous Jean VII d’Harcourt à l’occasion de lettres de juin 1447, où il est question de la vente qu’il fit à Charles d’Anjou de la vicomté de Châtellerault. Citons ici quelques actes inédits concernant ce personnage. Le comte d’Harcourt ayant obtenu de Charles VII des lettres portant qu’il tiendrait en pairie, sa vie durant, la vicomté de Châtellerault et la terre de Mézières-en-Brenne, le Parlement en repoussa l’entérinement par arrêt motivé en date du 21 juin 1429. (Arch. nat., X1a 9199, fol. 170.) Une contestation s’était élevée entre Hugues de Combarel, évêque de Poitiers, et Jean d’Harcourt au sujet d’un boulevard et d’une palissade que ce dernier avait récemment fait construire sur une motte entre son château d’Harcourt à Chauvigny et le château de l’évêque. Or cette motte devait rester neutre, la possession en ayant depuis un temps immémorial été réclamée par les deux parties, sans que la question ait été réglée. De plus, le comte avait fait ouvrir dans son dit château une poterne qui gênait son voisin. Un accord amiable termina ce différend, le 30 juin 1435. Le vicomte de Châtellerault consentit à faire démolir le boulevard et la palissade, et les deux parties s’engagèrent réciproquement à n’édifier jamais aucun ouvrage sur la motte de terre contestée. En revanche et par déférence, l’évêque consentit que la poterne subsistât, tant que vivrait Jean d’Harcourt. Mais aussitôt après le décès de celui-ci, elle serait murée, et le capitaine actuel du château et ses successeurs devaient jurer qu’ils la feraient fermer à la mort de leur seigneur. Celui-ci promit en outre de ne jamais mettre en garnison dans le château d’Harcourt des ennemis de l’évêque. Fait à Châtellerault le 19 février 1435 n.s., cet accord fut enregistré au Parlement le 30 juin suivant. Il est signé de Jean Bonneau, secrétaire de l’évêque, et de Pierre Thoreau, secrétaire du comte, en présence de Geoffroy Vassal, chantre de l’église de Poitiers, conseiller du roi, Jean Chastaignier, général des finances, Guillaume Charrier, doyen de l’église de Mehun-sur-Yèvre, receveur général des finances, Maurice Claveurier, lieutenant du sénéchal de Poitou, Jean d’Annebaut, Jean de Troussenville, Pierre d’Aloigny, Jean de Jaunay, Séguin de Puygiraut, chevaliers, Jean Havart, Janotin Adam et François de Combarel, écuyers. (X1c 149, au 30 juin 1435.) Par acte du 25 juillet 1439, daté aussi de Châtellerault, Jean d’Harcourt, qui venait de fonder une messe quotidienne à perpétuité pour le salut de son âme, au grand autel de l’église Notre-Dame de cette ville, y ajouta cette disposition que quatre enfants de chœur viendraient, à l’issue de chaque messe, chanter un Recorderis avec les oraisons qui y appartiennent, et il leur donna à cet effet une rente annuelle et perpétuelle de cent sous et une autre de même somme aux doyen et chapitre, outre la rente affectée à la fondation primitive. (Arch. nat., K. 184, n° 22.)

, le mandoit aucunes foiz aler devers lui pour ses affaires, où il aloit, et avoit ung appellé maistre Guerin qui avoit toute auctorité et gouvernement avec lui ; lequel pria très affectueusement et instamment le dit suppliant qu’il prenist à sa charge et despence et avec lui audit lieu de la Mote ung sien parent, nommé Baudart, ce que, pour complaire audit maistre Guerin et aussi à nostre dit cousin de Harecourt, qui à la requeste ou pourchaz dudit maistre Guerin l’en prioit et requeroit, ledit suppliant octroya audit maistre Guerin. Et fut ledit Baudart avec ledit suppliant audit lieu de la Mote à sa table et pareilz despens et couchié et levé comme lui, par l’espace de deux ans ou environ, sans avoir charge ou occupacion aucune. Le quel Baudart estant ainsi en l’ostel dudit suppliant, par l’advertissement et introducion dudit maistre Guerin, comme par ce que dit sera cy après est à presumer, se accointa de la femme dudit suppliant, ou grant deshonneur dudit suppliant et de sa dicte femme, et fist tant que icelle femme lui bailloit l’or, argent et autres biens dudit suppliant sans compte ne mesure, pour ce qu’elle en avoit la garde et administracion. Lesquelz or, argent et autres biens dudit suppliant, les diz Baudart et maistre Guerin despendoient audit lieu de Chastelheraud et ailleurs, où bon leur sembloit. Et non contens de ce, en faisoient leurs farses et mocqueries à part et scandallisoient l’estat et honneur dudit suppliant et de sa dicte femme et d’aucuns de leurs parens et amys, qui le savoient bien et qui longuement le porterent en eulx, sans en advertir ledit suppliant. Toutesvoies, pour la grant honte et dommaige que deux des parens et amys dudit suppliant et de sadicte femme congneurent estre en la matiere, et aussi qu’il leur faisoit mal de ce que les diz Baudart et maistre Guerin despendoient ainsi les diz biens dudit suppliant, se tirerent par devers ledit suppliant et lui disdrent et declairerent le cas, eulx courrouciez et plourans de ce qu’il failloit qu’ilz le lui deissent, et à la dicte cause les perdit ledit suppliant tous deux tantost après ; car l’un s’en ala en Rodes et l’autre en la guerre, où ilz moururent. Et advint de cas d’aventure que, en ce temps, ledit maistre Guerin fut en la male grace et malvueillance de nostre dit cousin de Harecourt, ce que le dit suppliant sceut ; et à la dicte cause et pour soy vengier desdiz cas, trouva moyens d’encores plus le mettre en ladicte malvueillance de nostre dit cousin de Harecourt et de tous ceulx qu’il povoit savoir qui avoient puissance de luy nuyre. Et tant fist et pourchaça icellui suppliant que ledit maistre Guerin fut mis en prison à Masieres ; lui estant èsquelles prisons, ledit suppliant se transporta par devers lui et lui remonstra les plaisirs qu’il avoit faiz à lui et audit Baudart, qu’il disoit estre son cousin, et la trayson et deshonneur qu’ilz lui avoient faiz, ce que ledit maistre Guerin ne lui confessa mie, ains les lui desnya. Et peu de temps après ce, ledit maistre Guerin estant èsdictes prisons, ledit Baudart qui plus ne demouroit avec ledit suppliant audit lieu de la Mote, vint par devers icellui suppliant, à Chastelheraud et audit lieu de la Mote par diverses foiz, pour pourchacer la delivrance dudit maistre Guerin estant ainsi en prison audit lieu de Masieres, par l’auctorité et commandement de nostre dit cousin. Et advint à certain jour que le dit Baudart se transporta devers icellui suppliant, audit lieu de la Mote, pour pourchacer la dicte delivrance dudit maistre Guerin ; et quant le dit suppliant le y apparceut, il faingny aler dehors devant jour, et ordonna à deux ou trois de ses gens ou parens, et mesmement à ceulx qui l’avoient adverty dudit cas, d’eulx donner garde de sa femme et dudit Baudart, et que, s’ilz les trouvoient ensemble, de les tuer. Et cela fait, ledit suppliant se party, et incontinant qu’il fut party, ledit Baudart se ala couchier avec la femme dudit suppliant, et y fut trouvé par ceulx qu’il avoit ainsi ordonnez pour eulx en prendre garde. Lesquelz le cuiderent tuer et de fait l’eussent faiz, comme est à presumer, s’il ne se feust mis en resistance et defense. A l’occasion desquelles choses s’eleva grant bruit audit lieu de la Mote, et telement que ledit suppliant qui n’estoit pas loing oy ledit bruit et à ladicte cause retourna, et trouva que ledit Baudart estoit frappé à mort et mauldisoit ledit maistre Guerin, son cousin, qui à ce l’avoit exorté, adverty et conduit ; et tantost après ledit Baudart ala de vie à trespassement. Laquelle chose veant, ledit suppliant et qu’il doubtoit qu’il fust bruit de la mort dudit Baudart, et qu’il n’en feust apprehendé par justice, le fist giecter et mettre en ung vieil puys. Lequel cas ainsi fait et advenu, ledit suppliant qui avoit esté present et oy comment le dit Baudart avoit ainsi accusé ledit maistre Guerin de lui avoir ainsi fait faire lesdictes traysons et mauvaitiez, fut plus indigné que devant à l’encontre d’icellui maistre Guerin, et à ladicte cause, de tout son povoir procura ses mal et mort vers nostre dit cousin de Harecourt. Et après ce que nostre dit cousin de Harecourt, comme hault justicier, eut auctorisée la mort dudit maistre Guerin, ledit suppliant trouva maniere de l’excecuter et faire excecuter par ceulx de sa compaignie, après ce qu’ilz furent acertenez de la voulenté de nostre dit cousin de Harecourt, en la maniere qui s’ensuit : c’est assavoir que ledit suppliant et ceulx de sa dicte compaignie se transporterent audit lieu de Masieres, où le dit maistre Guerin estoit emprisonné, et le firent monter à cheval en disant qu’ilz le menoient à Chastelheraud ou audit lieu de la Mote. Et ainsi qu’ilz furent auprès d’un chastel appellé Singay, ledit suppliant et autres de sa compaignie le misdrent et tirerent hors du chemin ; et quant ledit suppliant vit qu’il fut assez loingnet (sic) et hors dudit chemin, il commança à reprouchier audit maistre Guerin les traysons et maulx que lui et ledit Baudart lui avoient faiz, et ne lui parla ledit suppliant aucunement du fait de sa dicte femme, pour le grant mal et desplaisir qu’il en avoit au cuer et grant honte qu’il avoit d’en parler devant les assistans. Et après que ledit suppliant lui eut fait ainsi lesdiz reprouches, il tira oultre son chemin et l’abandonna et laissa à ceulx qui le conduisoient, et s’en ala devant, pensant bien que ceulx qui le menoient lui feroient mauvaise compaignie. Et depuis le dit suppliant ne vit ledit maistre Guerin. Mais certain peu de temps après, ceulx à qui le dit suppliant l’avoit ainsi laissé, quant il les eut retrouvez, lui disdrent qu’il leur estoit eschappé, et l’autre lui dist autres parolles ; et ne leur en demanda ledit suppliant plus, car assez il pensoit et ymaginoit en soy comme il en estoit alé. Desquelz cas ainsi advenuz ledit suppliant se tient autant coulpable et plus que se lui mesmes les avoit commis et perpetrez, mais la douleur qu’il avoit du fait de sa dicte femme, qui lui sembloit estre chose insupportable, le mist hors de tout entendement et bonne voulenté, et telement qu’il les fist faire et commettre, ainsi qu’ilz sont advenuz et cy dessus declairez. Et encores est depuis advenu que ung appellé François Gebert, à present demourant à Chinon et lors estant à l’Isle Bouchart, eut grant accez à la fille bastarde dudit suppliant, et telement qu’il fut rapporté audit suppliant que ledit Gebert l’avoit fiancée et avoit une cedule escripte et signée de la main d’elle, par laquelle elle le promettoit prendre à mary, dont le dit suppliant fut fort courroucié et merry ; et à la dicte cause se transporta ledit suppliant en la chambre dudit Gebert et de sa mere, et y cercha et fist cercher, ès coffres et linges qui y estoient, savoir se ladicte cedulle y estoit ou non, et pour ce qu’il ne trouva pas ladicte cedulle, fist, ou courroux qu’il estoit, prendre ledit Gebert et le mettre en prison de son auctorité. Et pour ce que ledit suppliant doubta fort que ledit Gebert ne voulsist poursuir ladicte bastarde pour mariage, icellui suppliant, pour en tenir ledit Gebert en subgiection, le fist obligier envers ung appellé Heudreville en certaine grant somme de deniers, dont ledit suppliant n’a riens eu ne de certains autres biens dont ledit Gebert l’accusoit avoir prins en son hostel et en l’ostel de sa dicte mere. A l’occasion desquelz cas ainsi commis et perpetrez que dit est, ledit suppliant doubte que justice le vueille, ores ou pour le temps avenir, poursuir, prendre, apprehender et pugnir, qui seroit en son très grant grief, prejudice et dommaige, si comme il dit, et pour ce nous a humblement supplié et requis que, les choses dessus dictes considerées et les bons et agreables services que ledit suppliant et les siens nous ont faiz et aux nostres, ou fait de noz guerres et autrement, nous lui vueillons sur ce impartir noz grace et misericorde. Pour quoy nous, en regard aux choses dessus dictes, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant, etc., avons remis, quicté et pardonné, etc., satisfacion faicte à partie civilement tant seulement, se faicte n’est, etc. Si donnons en mandement par ces presentes à nostre bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d’Anjou et du Maine, et à tous noz autres justiciers, etc., qu’ilz facent ledit Loys de Segrye, suppliant, joir et user, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil. cccc. quarante cinq, et de nostre regne le xxiiiie, avant

Le texte porte après, mais le lieu de la date motive suffisamment notre correction.

Pasques.

Ainsi signé : Par le roy, Monseigneur le daulphin, vous, le conte de Tancarville

Guillaume d’Harcourt, comte de Tancarville, vicomte de Melun, etc. (Voir ci-dessus, p. 127, note.)

, le sire de la Varenne

Pierre de Brézé, sr de la Varenne, sénéchal de Poitou. (Ci-dessus, p. 178, note 2.)

, maistre Helyes de Pompador

Élie de Pompadour, d’une famille noble du Limousin, fut d’abord conseiller au Parlement de Poitiers. Charles VII ayant mandé à la cour qu’il désirait le pourvoir d’un office de conseiller clerc, celle-ci répondit, le 30 décembre 1429, que s’il plaisait au roi lui en donner lettres, elle le tenait pour élu. Pompadour fut reçu le 29 janvier suivant. Nommé évêque d’Alet le 18 février 1448, il fut transféré le 29 novembre 1454 au siège épiscopal de Viviers, qu’il occupait encore en 1478.

, messire Jehan Le Boursier

Jean Le Boursier, chevalier, seigneur d’Esternay, conseiller et chambellan du roi, fut aussi pourvu, vers 1449, de la charge de général des finances qu’il exerçait encore le 13 décembre 1460. Pendant les dix dernières années du règne de Charles VII, il fut mêlé à un grand nombre de négociations diplomatiques et remplit diverses ambassades importantes. (Cf. de Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. IV à VI, passim.)

, chevalier, et plusieurs autres presens, Giraudeau. — Visa. Contentor. E. Froment.

MCII Avril 1446 (après le 16)

Lettres d’abolition en faveur de Colas Sicaud, écuyer, serviteur du dauphin, pour les pillages, détrousses et autres excès commis à la guerre, sous Jean de La Roche et autres capitaines, en divers lieux du royaume.

AN JJ. 177, n° 198, fol. 134 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 309-312

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre bien amé Colas Sicaud, escuier, serviteur de nostre très chier et très amé filz le daulphin de Viennoys, contenant que dès son jeune aage, en ensuivant le fait des nobles et mesmement de ses predecesseurs, il nous a bien et loyaument servy ou fait de noz guerres à l’encontre de noz ennemys et adversaires les Anglois, et en icellui nostre service a exposé son corps en maintes bonnes besoingnes, sieges, raencontres et destrousses faictes sur et à la confusion de nos diz ennemys, et frayé et despendu la pluspart de ses biens et chevance, tant soubz et en la compaignie de feu Jehan de la Roche, en son vivant nostre seneschal de Poictou et capitaine de gens d’armes et de trait, ès frontieres de Bourdeloys et ailleurs en divers lieux de nostre royaume, que soubz plusieurs autres noz cappitaines et chiefz de guerre et mesmement soubz nostre dit fils, à la prinse de la bastille de Dyeppe

Talbot étant venu assiéger Dieppe, en novembre 1442, avait fait construire devant la place une formidable bastille. La garnison française put néanmoins être ravitaillée et résista pendant neuf mois aux efforts des Anglais. Enfin parut une armée sous les ordres du dauphin, investi de la charge de lieutenant général dans les pays entre la Seine et la Somme ; il était assisté de Dunois, de Gaucourt et du comte de Saint-Pol. Dieppe fut délivrée le 14 août 1443.

, et ailleurs ; èsquelles choses et services il a, comme dit est, grandement frayé et despendu du sien, sans avoir eu de nous aucune soulde ou recompensacion, dont il peust avoir soustenu la vie de lui, ses gens et serviteurs, ne aussi avoir acheté chevaulx, harnoiz et autres choses à lui neccessaires. A laquelle cause il a esté contraint de tenir les champs et vivre sur noz païs et subgiez, etc…

La suite, sauf variantes sans importance, comme ci-dessus (lettres d’abolition pour Jean Chauvet, p. 268-269).

, ce que bon lui a semblé. Et avecques ce, a par plusieurs foiz esté avecques autres gens de guerre à son entreprise et autrement, à plusieurs courses et destrousses faictes sur gens de guerre de nostre party, prinses de chasteaulx et places fortes sur nostre dit party par force, d’emblée ou autrement, où se sont ensuiz certains meurdres et omicides ; et iceulx chasteaux et places ainsi prins ont par eulx esté pillez, robez et raençonnez et autrement en ont fait et disposé à leurs plaisirs et voulentez. Et puet estre que, pendant et durant le temps qu’il a ainsi suivy lesdictes guerres, lui et ses dictes gens, varletz et serviteurs ont appatissé et raençonné à plusieurs sommes de deniers, vivres et autres choses aucuns de noz subgiez, et iceulx navrez, mutilez, et fait et commis plusieurs autres grans cas, crimes et deliz, lesquelz bonnement ne pourroient cy estre declarez ne exprimez. Et toutesvoyes, pendant et durant le temps qu’il estoit soubz ledit Jehan de la Roche, lui estant capitaine d’Empuré, tant de par ledit Jehan de la Roche que de par feu Amaury de Thigné, lors seigneur dudit lieu d’Empuré, icellui Amaury et ung nommé Thevenin de Beauvillier, serviteur dudit Amaury, bouterent hors les gens d’icellui suppliant, en son absence, de ladite place d’Empuré, et ledit suppliant mesmes, quant il y fut venu, pour ce que le paige d’icellui suppliant avoit bouté en ladicte place ung des paiges de Jehan de la Roche, pour y repaistre et passer la nuit seulement. Et depuis ce, ledit suppliant trouva maniere de reprendre ladicte place d’Empuré sur ledit Amaury, seigneur de Tigné, et en bouta hors le dit Amaury et ses gens, ainsi qu’il avoit fait lui et sesdictes gens. Et en ce faisant, icellui suppliant bailla audit Thevenin de Beauvillier, serviteur dudit Amaury, deux cops d’espée sur la jambe et ung autre coup sur le pié, lequel il lui abati tout jus, dont icellui Thevenin morut. Et aussi fut en la compaignie d’un nommé Thomes Gras, natif d’Escoce, et d’autres, lorsque icellui Thomes donna à ung nommé Guillaume Chapperon, lors lieutenant et garde de Syvray

Guillaume Chaperon appartenait sans doute à la famille Chaperon de la Chaperonnière, originaire d’Anjou, dont plusieurs branches étaient établies, au xve siècle, dans le Mirebalais et au comté de Civray, suivant MM. Beauchet-Filleau, qui ont publié une partie de sa généalogie. (Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., t. II, p. 242.) On y trouve deux Guillaume vivant dans les premières années du xve siècle, mais ni l’un ni l’autre ne semblent pouvoir être identifiés avec le lieutenant de Civray. On verra, quelques pages plus loin, que le capitaine de cette place était, entre 1430 et 1440, Pierre de Gamaches. Un Jean Chaperon, sr de Bernay et de la Fouchardière, fut aussi, vers la fin du xve siècle, capitaine de Civray. Le capitaine de Mirebeau en 1435 se nommait Auvergnais Chaperon, chevalier ; il eut des démêlés avec le Parlement à propos d’un prisonnier nommé Alain Moreau, qu’il détenait au château de Mirebeau, sur l’ordre de Charles d’Anjou, et que la cour voulait le contraindre d’amener à Poitiers. (Arch. nat., X2a 21, aux 14 et 15 janvier 1435 n.s.)

, pour le capitaine d’ilec, ung cop d’espée sur la teste, dont il morut v. ou vi. jours après ensuivant. Et si fist icellui suppliant batre par ses gens et serviteurs ung nommé Gilet Nepveu, sergent de la prevosté de Lodun

Gillet Nepveu fut poursuivi au Parlement, avec deux autres sergents de la reine de Sicile à Loudun, Pierre Actonnet et Perrin Clément, Nicole Chauvet, juge, et Jean Aimé, prévôt du lieu, par Jean Grabot, prêtre, administrateur ou aumônier de la Maison-Dieu ou Aumônerie de Loudun. Ce dernier avait été condamné, par sentence du juge de la reine de Sicile, parce qu’il ne remplissait pas les devoirs de sa charge et dilapidait les biens des pauvres et des malades. Bien qu’il eût relevé appel, ses biens avaient été saisis et le temporel de la Maison-Dieu mis sous la main de la dame de Loudun. C’est pourquoi l’aumônier avait assigné, comme coupables d’« excès et attentats », le juge, le prévôt et les sergents de ladite dame, qui avaient ordonné ou exécuté la saisie. Cette affaire se termina par une transaction, enregistrée à la cour, le 7 février 1435 n.s. (Arch. nat., X1c 149, à la date.) On trouve dans cet acte des détails intéressants sur les revenus (plus de 360 setiers de froment, vingt pipes de vin et 50 livres en deniers par an) et sur le fonctionnement de cet important établissement charitable.

, jasoit ce que d’icelle bateure ne s’ensuit mort ne mehaing. Et combien que ledit suppliant ait bonne voulenté et entencion de soy desormais retraire et abstenir de telz malefices, neantmoins il doubte que aucuns, sur lesquelz lesdiz cas ont esté perpetrez, en voulsissent ou temps avenir faire poursuite par justice à l’encontre de lui, etc., se nostre grace ne lui estoit sur ce impartie, si comme il dit, en nous humblement requerant, etc. icelle lui impartir favorablement. Pour quoy nous, etc., à icellui suppliant ou cas dessus dit avons quicté, remis, pardonné et aboly, etc., pourveu toutesvoyes qu’il n’ait en sa personne fait ou commis ravissement de femmes ou de filles, omicide voluntaire, sacrilege, bouté feu ne esté cause principal de le faire. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes aux seneschaulx de Tholose, de Poictou et de Xanctonge, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc.xlvi, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. Chevalier. — Visa. Contentor. Charlet.

MCIII Avril 1446 (après le 16)

Lettres d’abolition accordées à Jean Boitet, de Villefollet en Poitou, pour les pillages, violences et autres excès par lui commis pendant les guerres.

AN JJ. 177, n° 204, fol. 136 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 312-314

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Boitet, demourant à Villefolet en nostre païs de Poictou, chargié de femme et de trois petis enfans, aagé de xxxviii. ans ou environ, contenant que dès pieça il s’est emploié ou fait de noz guerres, et nous a servy ès voiages et armées que avons faictes et fait faire ès parties d’Almaigne, à Dyeppe, Avranches et Grantville

Le maréchal de Rieux s’était emparé de Dieppe le 28 octobre 1435 ; Avranches, assiégée au mois de décembre 1439 par Richemont, n’avait pu être prise à cause de l’indiscipline des routiers ; Granville fut l’objet d’une tentative des Français en juillet ou août 1441, et ne fut enlevée aux Anglais qu’en novembre 1442. Mais ces places avaient été défendues ou attaquées à plusieurs reprises pendant les années précédentes, de sorte qu’il serait difficile de déterminer à quelles opérations il est fait allusion ici.

, et si fut à aidier à garder la ville d’Orleans, quant les Anglois tindrent le siege devant ; et oultre plus a aidié à conquester et reduire en nostre obeissance les places de la Forse, du Cor

En 1435, les États du Haut-Limousin se préoccupèrent d’obtenir la soumission de plusieurs places situées dans le voisinage de leur pays, et entre autres du château d’Aucor dans le Périgord, « que les Anglois avoient nagueres pris d’emblée », dont les garnisons leur causaient de graves préjudices. A plusieurs reprises, ils députèrent vers Jean de La Roche, sénéchal de Poitou, pour lui offrir les moyens pécuniaires d’entreprendre le siège de ce repaire de pillards. De son côté, le vicomte de Limoges (Jean de Penthièvre) paya comptant au sénéchal la somme de 750 livres pour l’aider dans ce projet, et Aucor fut repris de vive force aux Anglais avant la mi-août 1435. (Cf. A. Thomas, Les États de la France centrale sous Charles VII, t. I, p. 139, 140, 246 ; II, p. 64, 65, 68, 76.)

, d’Aubeterre

Par quittance du 4 novembre 1434, Jean de La Roche, écuyer d’écurie du roi et sénéchal de Poitou, reconnaît avoir reçu la somme de 2000 livres octroyée par les gens des trois États des pays de Poitou et de Saintonge, et faisant partie de l’aide imposée au mois d’août précédent pour mettre le siège devant la ville d’Aubeterre, « lors detenue et occupée par les Anglois ». (Bibl. nat., mss. Clairambault 194, n° 7689.) C’est donc vraisemblablement vers la fin de 1434 que cette ville fut recouvrée, quoique les chroniqueurs n’en parlent pas. Fut-elle reprise peu de temps après, ou le château demeura-t-il seul au pouvoir des Anglais ? Ce qui est certain, c’est que le château tomba au pouvoir des Français le 11 mai 1450 ; il fut livré à Jean Bureau par Bertrand de Grantmont et ses compagnons. (De Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. V, p. 43, note.)

et de Marueil

Mareuil, assiégé inutilement, en 1435, par Jean de La Roche, fut réduit à l’obéissance du roi trois ans plus tard. (Voir ci-dessus, p. 267, note 3.)

, seans en nostre païs de Guienne, en et soubz les charges et compaignies de plusieurs chiefz et cappitaines de nos dictes guerres, sans ce qu’il ait tenu autre parti que le nostre ne fait guerre à l’encontre de nous ; et en ce faisant a despendu la pluspart de ses biens. Et aucunes foiz, quant il n’a eu de quoy vivre, a vesqu sur noz païs, tenant les champs et autrement, extraordinairement et excessivement, en prenant et raençonnant plusieurs de noz subgiez, leurs biens, bestiaulx, maisons et autres appartenances, et fait plusieurs inconveniens, pilleries, courses, roberies, à assaulx et prinses de places et plusieurs bateries et raencontres, et faiz autres dommaiges dont il ne se sauroit remembrer. Et doubte que, à l’occasion d’iceulx cas, il puisse ores ou pour le temps avenir estre molesté, travaillé ou empeschié en corps ou en biens, se nostre grace ne lui est sur ce impartie, en nous humblement requerant, etc. Pourquoy nous, etc., à icellui suppliant avons remis, quicté, pardonné et aboly, etc. les faiz, cas et crimes generalement dessus declarez, tout ainsi et par la forme et maniere que s’ilz feussent particulierement et diviseement narrez et speciffiez, ensemble quelzconques autres par lui commis, en suivant lesdictes guerres, comme se iceulx cas estoient non advenuz, excepté toutesvoyes meurdre d’aguet appensé, violemens et ravissemens de femmes et de filles, boutemens de feux et crime de sacrilege, et l’avons restitué, etc. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx conseillers les gens de nostre Parlement, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois de avril l’an de grace mil cccc.xlvi, et de nostre regne le xxiiiime.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. Rolant. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MCIV Avril 1446 (après le 16)

Lettres d’abolition accordées à Pierre de Volon, écuyer, pour les pillages, détrousses et autres excès dont il s’est rendu coupable pendant les campagnes auxquelles il a pris part.

AN JJ. 177, n° 205, fol. 137 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 314-317

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receue l’umble supplicacion de Pierre de Volon

Pierre de Volon ou de Voulon, écuyer, sur la famille duquel on ne possède que fort peu de renseignements, avait épousé Marie Janvre et avait, à cause d’elle, des possessions dans la Gâtine. Le 30 septembre 1434, il rendit aveu au connétable de Richemont de fiefs mouvant de la baronnie et du château de Parthenay, qu’il tenait à foi et hommage plein, avec la justice moyenne et basse, savoir son. « lieu et herbergement appellé Longeviniere et ses appartenances et appendences, assis en la parroisse de Mazeres, consistant tant en maisons, vergers, prés, bois, terres, etc., tenans d’une part au bois de Nucheze, d’autre aux terres de la Berthoniere, etc. ; item, une piece de pré, contenant demi quartier ; item, une piece de terre contenant une boicellée ou environ, tenant, d’une part, au chemin du Chaigne (le Chêne) à Partenay, etc., d’autre, aux terres de la Ferretiere, lesd. choses franches de disme et autres devoirs. » (Arch. nat., R1* 190, fol. 179 v°.) Ces biens appartenaient à Marie Janvre. A cette époque, c’est-à-dire dans la première moitié du xve siècle, la famille de Voulon habitait, ce semble, la région comprise entre Couhé, Melle et Civray. Dans une transaction intervenue à la suite de procès, le 11 septembre 1477, entre Helis de Mézieux, veuve de Thomas Acquez, et ses enfants, d’une part, et Jeanne du Vergier, femme de Jean de la Brousse, écuyer, d’autre, par laquelle les premiers abandonnent au profit de celle-ci, moyennant 115 écus d’or, leurs prétentions sur un hôtel ou hébergement, entouré de douves, sis au village du Grand-Serze (Mairé-l’Évescault), il est dit que cet hôtel avait appartenu à Jean d’Auton, puis à feu Jean de Voulon, seigneur du Breuil de Paretz, et enfin à un autre Jean de Voulon qui l’avait vendu à Thomas Acquez. (A. Richard, Arch. du château de la Barre, t. II, p. 434.)

, escuier, contenant que tout son temps et dès son jeune aage il nous a bien et loyaument servy ou fait de noz guerres à l’encontre de noz anciens ennemys et adversaires les Anglois, sans oncques avoir tenu autre parti que le nostre, et en icelles se soit trouvé en plusieurs sieges, rencontres, entreprises et bonnes besongnes faictes sur iceulx et à leur confusion, tousjours bien souffisamment monté et habillé selon son estat, en quoy il a grandement frayé et despendu du sien propre, et exposé son corps en plusieurs perilz et dangiers, sans avoir eu de nous aucune soulde ou recompensacion, dont il se peust estre entretenu en nostre dit service, et aussi avoir acheté chevaulx, harnoiz et autres habillemens à lui neccessaires ; à laquelle cause il a souventes foiz esté contraint à tenir les champs, vivre sur noz pays et subgiez, courir et faire courir, etc.

La suite, sauf de légères modifications, comme dans les lettres d’abolition en faveur de Jean Chauvet (ci-dessus, n° MXCI, p. 268).

. Et aussi s’est trouvé et peu trouver souventes foiz à plusieurs courses et destrousses faictes sur gens de guerre de nostre parti, prinses de places, chasteaulx et forteresses par force, d’emblée et autrement, èsquelles estoient ceulx dedens prins prisonniers et mis à raençon, ainsi que s’ilz feussent ennemis. Et aucunes foiz, pour la resistance qui se y faisoit par lesdiz de dedans, se sont ensuiz enormes bleceures et mutilacions de personnes. Et avecques ce ont esté pillées et robées, et les biens en icelles prins, venduz, butinez, distribuez et applicquez chascun à sa part et porcion, à son singulier proufit. Et generalment ait esté et se soit trouvé, pendant et durant qu’il a esté ainsi suivant lesdictes guerres en nostre service, tenant les champs sur nos diz païs et subgiez, à faire, commettre et perpetrer tous et chacuns les crimes et malefices que pevent et pourroient avoir faiz et commis, et que ont esté et sont coustumiers de faire gens de guerre. A l’occasion desquelz cas, crimes et malefices, ledit suppliant doubte justice ou temps avenir lui estre rigoureuse, et que à ceste cause on lui vueille mettre ou donner empeschement en corps ou en biens, se nostre grace ne lui estoit sur ce impartie, si comme il dit. En nous humblement requerant que, attendu que en tous autres cas il a tousjours esté homme de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans oncques mais avoir esté actaint ou convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise sur ce icelle nostre grace lui impartir. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, et mesmement en faveur d’iceulx services ainsi à nous faiz par ledit suppliant, à icellui avons remis, quicté, pardonné et aboly, etc. les faiz et cas devant diz, ensemble tous autres qu’il a ou pourroit avoir faiz et commis en tout le temps passé jusques à present, en quelque maniere que ce soit ou ait esté, pendant et suivant lesdictes guerres, jasoit ce que autre declaracion ou specifficacion que dit est n’en soit faicte en ces presentes, etc., pourveu toutes voyes qu’il n’ait en sa personne fait ravissement de femmes, sacrilege, commis omicide voluntaire, bouté feu ne esté cause principal de le faire. Si donnons en mandement par ces presentes aux seneschaulx de Poictou, de Xaintonge et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois de avril l’an de grace mil cccc. xlvi, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, vous, les sires de la Varenne et de Precigny

Pierre de Brézé et Bertrand de Beauvau. (Ci-dessus, p. 178, note 2, et p. 273, note 3.)

et autres plusieurs presens. Chaligaut. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MCV Avril 1446 (après le 16)

Lettres de rémission en faveur des deux frères Germain et Léon Chabot, écuyers, coupables de complicité dans le rapt d’Annette de Chaunay et dans divers autres crimes pour lesquels Jacques Chabot, leur frère, avait été condamné à mort et exécuté.

AN JJ. 177, n° 213, fol. 141 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 317-323

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Germain Chabot et Lyon Chabot

Jacques était l’aîné, Germain le deuxième, et Léon le troisième fils de Tristan Chabot, seigneur de Pressigny et de la Roussière, et de Jeanne de Rezay. On conserve aux Archives nationales deux aveux rendus par Germain Chabot, le 13 mai 1450, au comte de Richemont, sr de Parthenay, connétable de France, le premier pour « son lieu et herbergement de la Roussiere, appartenances et dependences » ; le second à cause de « son lieu et herbergement de Pressigné en Gastine », ces deux fiefs mouvant du château et de la châtellenie de Parthenay. (R1* 190, fol. 54, r° et v°.) Dans le même registre on voit que Germain devait aussi l’hommage plein pour une masure et dîmée de terre, appelée la Chauvière-lès-Nouzières, sises dans les paroisses de Verruye et de Vouhé (fol. 255). Il mourut après le 25 septembre 1469, sans enfants. Son frère Léon hérita des seigneuries de Pressigny et de la Roussière et décéda au commencement de l’année 1485, avant le 6 mai, laissant un fils et deux filles de Catherine Chenin, fille unique de Gauvain, seigneur de la Jarrie.

, freres, escuiers, contenant que, neuf ou dix ans a ou environ, soubz umbre ou couleur de ce que feu Jaques Chabot, leur frere, disoit et maintenoit que feu Guillaume Barbastre

Guillaume Barbastre appartenait à une famille noble du Bas-Poitou, dont la généalogie n’a pas été dressée. Aux noms mentionnés par le Dictionnaire des familles du Poitou (nouv. édit. t. I, p. 264), et à ceux que l’on trouve dans nos précédents volumes, nous pouvons ajouter celui de Jean Barbastre, écuyer, qui servait, avec seize écuyers sous ses ordres, dans la compagnie de Guillaume Bataille, chevalier, retenue au nombre de soixante hommes d’armes par Charles, dauphin et régent, dont une montre fut reçue à Ruffec, le 28 décembre 1418, avec mandement de Macé Héron, trésoriers des guerres, pour le payement de leurs gages, même date. (Bibl. nat., Pièces originales, vol. 187, n° 4048, pièces 2 et 4.) Les seize écuyers nommés dans cette montre étaient : Mérigot du Teil, Jean du Puy, Pierre Prévost, Jean Lardre, Guillaume de La Faye, Héliot Dumas, Jean de Nollet, Pierre de la Roche, Jean le Goujat, Domin Brun, Jean Normandeau, Renaud Meschin, Pierre Rataut, Jean de Poitou, Jean Picaut et René Guillon.

, en son vivant escuier, lors estant à la Roche sur Yon, avoit congneue charnellement une leur parente et à cause de ce lui vouloit mal de mort, ledit Lyon, estant lors avec et en la compaignie dudit feu Jaques, son frere, voulant lui complaire et de ce le vengier, donna, en hayne de ce que dit est, en la ville de la Roche sur Yon, ung coup de dague audit Barbastre, par le moyen duquel il ala pou d’ilec après de vie à trespassement. Et aussi furent les diz Germain et Lyon, supplians, à certaine assemblée que ledit feu Jaques, leur frere, fist, ung an et demy a ou environ, audit lieu de la Roche sur Yon, de xx. à xxv. hommes de guerre, armez et embastonnez d’espées, d’arcs et javelines, qui furent par eulx menez à la Mote de Bauçay ou païs de Lodunoys, et eulx saichans que François de Chaunoy

François de Chaunay, fils unique de Guillaume et de Marie de Bauçay, fut seigneur de Chaunay, Javarzay, Champdeniers et la Motte-de-Bauçay. Il changea le nom de ce dernier fief, qui lui venait de sa mère, en celui de la Motte-Champdeniers. Catherine de La Rochefoucauld, qu’il avait épousée vers 1420, était fille de Guy, seigneur de La Rochefoucauld, et de Marguerite de Craon. Ils n’eurent qu’une seule fille, Anne ou Annette, dont le rapt par Jacques Chabot, sr de Pressigny, aidé de ses deux frères, est rapporté ici. On voit que cette violence fut exécutée vers la fin d’octobre 1444. Nous sommes obligé de nous en tenir au récit sommaire qui en est fait dans la rémission octroyée à Germain et Léon Chabot. François de Chaunay poursuivit bien les ravisseurs au Parlement de Paris, mais le principal coupable ayant été soustrait à la juridiction de la cour et jugé par le grand conseil, on ne trouve que les débuts de ce procès, et non les plaidoiries ni l’arrêt, qui auraient permis de contrôler la version fournie par les accusés. La première trace qu’on en relève sur les registres du Parlement remonte au 11 mars 1445 n.s. A cette date, le procureur général et François de Chaunay se firent adjuger un premier défaut contre les frères Chabot, qui n’avaient pu être pris au corps et s’étaient gardés de comparaître, quoique ajournés sous peine de bannissement et de confiscation. Les autres complices poursuivis étaient : Mathurin Dupuy, Jacques de La Boutaille, Colas Jay, un nommé Jacquet, Colas Bernard, maître Eustache [Blanchet], Olivier Hémonnet, Jean de Saint-Caudon, un appelé le Grand Jehannin, [Guillaume] Levron, Me Alain [de Coëtquen], André Nanin et Benoit Texier. Plusieurs de ceux-ci ayant été compromis aussi dans l’affaire de séquestration de Geoffroy Le Ferron par François de Montcatin, capitaine de la Roche-sur-Yon (voy. ci-dessus, p. 247, note, et p. 251, note), nous avons pu rétablir leurs noms quelque peu défigurés sur ce registre. Le 15 avril suivant, jour de nouvelle assignation, Jean David, tondeur de draps, demeurant à la Roche-sur-Yon, vint essoiner Jacques Chabot. Il affirma à la cour, sous la foi du serment, que le mardi 6 avril précédent il avait laissé dans cette ville Jacques au lit malade. Celui-ci, étant à la chasse, le lendemain de Quasimodo, était tombé dans un fossé, son cheval sur lui, et s’était demis le pied et rompu une côte. Le procureur du roi demanda que cette excuse ne fût pas admise et qu’un nouveau défaut fût prononcé contre le défaillant, vu la gravité du cas pour lequel il était ajourné, « qui est pour la prise de la forteresse dudit messire François de Chaunay et le ravissement de sa fille, ainsi que portent les informations ». Rapiout, avocat de Jacques Chabot, répliqua qu’il n’y avait pas rapt, mais simplement séquestration, Anne de Chaunay ayant été promise en mariage à son client, « ainsi qu’il dit apparoir par le contrat, dont il offre faire prompte foy ». Il s’écoule ensuite plus de neuf mois avant qu’il soit de nouveau question de cette affaire. Le lundi 31 janvier 1446 n.s., Jean Pelu, dit Essilles, poursuivant de Louis Chabot, seigneur de la Grève, apporta à la cour une nouvelle prétendue essoine. Le 23 janvier, à sept heures du matin, dit-il, il avait vu « ledit Jacques en une chambre au chasteau de Montsoreau, lequel estoit malade au lit de ce que, le jour précédent, il estoit tombé de basteau dans la Loire et avoit failli se noyer, et n’avoit point d’autre maladie, mais à cause de ladite cheute et qu’il avoit beu largement de l’eaue et lors avoit fort gelé, il estoit griefment malade, etc. » Ce qui n’empêcha pas que, le 3 février suivant, la cour adjugea un nouveau défaut contre Jacques Chabot et ses frères. (Arch. nat., X2a 24, aux dates susdites.) Dès lors il n’est plus question de ce procès sur les registres. Jacques ayant été condamné à mort par le conseil et exécuté, il ne fut sans doute pas fait de nouvelles poursuites contre ses complices, et Germain et Léon Chabot jouirent de tout le bénéfice de leur rémission.

Quant à Annette de Chaunay, elle épousa, le 27 juin 1448, Jean de Rochechouart, chevalier, auquel elle porta tous les domaines de sa famille. On trouve dans le registre des hommages et aveux dus au connétable de Richemont que Jean de Rochechouart, au nom d’Anne de Chaumay, sa femme, fit hommage lige, à cause du château de Parthenay, de « hostel, fort lieu et terre de Champdeniers. Et paravant en faisoit hommage mre François de Chaunay, chevalier, père de la dite Anne. » (R1* 190, fol. 270 v°.) Celle-ci décéda à Javarzay, le 14 juillet 1477, suivant le Dictionnaire des familles du Poitou, 2e édit., t. II, p. 332.

, escuier, seigneur dudit lieu de la Mote, estoit absent dudit chastel de la Mote de Bauçay, entrerent de nuit par eschielles en la basse court dudit chastel, et en icelle s’embuscherent et au matin, au point du jour, après l’ouverture faicte dudit chastel, se bouterent dedans ; et illecques print et ravy ledit feu Jaques par force et violence Agnette de Chaunoy, fille dudit François et de Katherine de la Rochefoucault, sa femme, lors estant couchée en son lict avecques ladicte Katherine, sa mere, et icelle par force et violence, oultre le gré et voulenté d’icelle Agnette et de sa dicte mere, la fist monter sur son cheval derriere lui, et la mena audit lieu de la Roche sur Yon, et oudit lieu, cinq ou six jours après l’espousa. Et le jour meismes desdictes espousailles, la mena ou chastel de Bran sur la mer en nostre païs de Poictou, où il la detint par aucun temps ; et depuis la transporta de lieu en autre, pour doubte qu’elle feust trouvée et sur lui recouvrée par justice ou par les parens et amis d’icelle Agnette. Ausquelles choses faictes par ledit feu Jaques Chabot, les diz Germain et Lyon, supplians, furent presens et l’acompaignerent, conforcerent et favoriserent, soubz umbre de ce que le dit feu Jaques disoit que entre lui et le dit de Chaunoy, pere de la dicte Agnette, avoit eu paroles et traictié de mariage desdiz feu Jaques Chabot et Agnette, et que depuis lui avoit esté rapporté que le dit de Chaunoy, pere de la dicte Agnette, vouloit icelle marier à ung autre homme, et le fruster dudit mariage. Et avecques ce furent lesdiz supplians, certain temps a, en la compaignie de François de Montcatin, capitaine dudit lieu de la Roche sur Yon, dudit feu Jaques Chabot et autres armez et embastonnez, à courir sus par voye de fait et main forcée à nostre amé et feal Guy d’Auxigny, chevalier, lors nostre lieutenant ou païs de Poictou, ès marches de deça la riviere de Loire, et à ses gens qui là estoient venuz requerir nostre amé et feal Geffroy Le Ferron, l’un de noz tresoriers, lors prisonnier ou dit chastel de la Roche sur Yon, et que ou conflict avoient esté tuez deux hommes des gens dudit d’Auxigny

On peut lire ci-dessus la relation détaillée des mauvais traitements infligés à Geoffroy Le Ferron et des voies de fait exercées contre Guy d’Aussigny par Fr. de Montcatin, capitaine de la Roche-sur-Yon (p. 247, note, et p. 251, note). On y verra la part de complicité de Jacques et de Germain Chabot dans ces violences. Ils furent tous deux compris dans le procès engagé au Parlement par le trésorier de France, après qu’il eut recouvré sa liberté, pour obtenir réparation de ses persécuteurs. Quand Germain eut obtenu ces lettres de rémission, sa cause se trouva séparée de celle des autres inculpés ; mais Le Ferron et le procureur général firent opposition à l’entérinement de cette grâce, tout d’abord devant le sénéchal de Poitou. L’affaire, renvoyée au Parlement en mai 1448 seulement (dans des plaidoiries du 11 mai 1451, il est dit que le renvoi de ladite cause fut fait il y a trois ans), traîna en longueur, Germain ayant épuisé toutes les échappatoires, tous les moyens possibles d’atermoiement, excuses pour des raisons de maladie, plus ou moins réelles, lettres d’état, mises en défaut pures et simples, puis obtention de lettres de relèvement des conséquences de ces défauts, et ensuite déclinatoire de compétence et requête à fin de renvoi au sénéchal. Nous n’entrerons point dans le détail de ces innombrables incidents de procédure. Enfin il se constitua prisonnier et la cause put être plaidée au fond le 30 mars 1452. Il ne s’agissait que de l’un des trois points visés par les lettres de rémission, c’est-à-dire les faits criminels relevés au préjudice de Geoffroy Le Ferron et de Guy d’Aussigny. Germain était défendu par Cousinot qui, malgré les efforts de l’avocat général Dauvet, obtint que son client serait admis au bénéfice de la remise de la peine criminelle. Cependant il ne put lui éviter une forte amende et la réparation civile. Germain Chabot fut condamné à payer 300 livres parisis à Le Ferron et à tenir prison jusqu’à ce qu’il eût complètement désintéressé la partie civile. Mais ce n’était pas fini. Chabot, qui ne pouvait payer cette somme, après tout ce qu’il avait déboursé pour les frais de son procès et pendant les quatre derniers mois surtout qu’il avait été obligé de séjourner à Paris, ne se souciait pas de rester indéfiniment prisonnier. Il préféra « briser son arrêt », s’échappa, retourna en Poitou et reprit du service à l’armée de Guyenne. Alors commença un nouveau procès. Le Ferron obtint un décret de prise de corps contre son adversaire pour infraction de prison et défaut de payement, et les procédures durèrent encore du 28 novembre 1452 au 26 février 1454. Germain ne put être arrêté, ne se présenta pas aux ajournements, se laissa condamner trois fois par défaut, eut encore le crédit de se faire délivrer des surséances fondées sur son absence forcée pour le service du roi, et des lettres de pardon de son infraction à l’arrêt de la cour. Il offrit toutefois la caution de Louis de Beaumont, sénéchal de Poitou, et de Louis de Rezay, son cousin maternel ; le montant de l’amende fut déposé en main de justice, et Geoffroy Le Ferron parvint, après de longues années et des dépenses considérables, à être mis en possession des 300 livres parisis qui lui avaient été adjugées. (Voir le registre X2a 25, aux 8 juin 1450, 11 mai, 17 et 22 juin 1451, 30 mars et 28 novembre 1452, 26 février et 7 mai 1453, 21 et 26 février 1454.) Nous verrons ailleurs la réparation qu’il obtint des autres complices de François de Montcatin. (Rémission en faveur de Jean de La Brunetière, ci-dessous, mai 1446, p. 352.)

. Pour occasion desquelz cas et autres grans et enormes excès et deliz, plus à plain declairez en certaine sentence, puis nagueres donnée par les gens laiz de nostre grand conseil et aucuns des gens de nostre court de Parlement, le dit Jaques Chabot a esté executé par justice

Le texte de la sentence rappelée ici n’a pas été retrouvé. Il a été dit qu’elle dut être rendue vers la fin de mars 1446 (ci-dessus, p. 244, note 2), en tout cas postérieurement au 3 février, puisqu’à ce moment Jacques Chabot était encore en liberté, et antérieurement à la date des présentes lettres (17-30 avril) dans lesquelles son exécution est constatée formellement. On sait, d’autre part, grâce à une brève mention d’un état de procès politiques, sous Charles VII, que Montcatin et Chabot furent jugés à Chinon en 1446. (De Beaucourt, Histoire de Charles VII, t. V, p. 86.) Le roi et le grand conseil séjournèrent dans cette ville de janvier à avril.

. Et pour ce, les diz supplians, ses freres, doubtans que, pour avoir esté avecques et en sa compaignie à faire et commettre les choses dessus dictes, on vueille semblablement contre eulx rigoureusement proceder par justice, se sont absentez du païs, ou ilz faisoient leur demeure et n’y oseroient jamais retourner, converser ne repairer, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, humblement requerans que, attendu qu’ilz ne firent pas les dictes assemblées, noises et debas dessus diz, ne n’estoit pas pour leur fait, et que ce qu’ilz en ont fait et commis a esté pour complaire audit feu Jaques Chabot, leur frere, qui de ce les requist, ce que autrement ilz n’eussent jamais fait, qu’ilz sont gens nobles et de bon hostel, et nous ont long temps servy, eulx et leurs parens ou fait de noz guerres et autrement, en diverses manieres, que en tous autres cas ilz ont tousjours esté gens de bon gouvernement et honneste conversacion, sans oncques mais avoir esté actaint ou convaincuz d’aucuns autres villains cas, blasmes ou reprouches, il nous plaise leur impartir icelles. Pour quoy nous, ces choses considerées et les bons et agreables services que les diz supplians nous ont par long temps faiz ou fait de noz guerres et autrement entour nous, en plusieurs et maintes manieres, voulans pour ce misericorde estre preferée en ceste partie à rigueur de justice, à iceulx Germain Chabot et Lyon Chabot, freres, supplians, et à chascun d’eulx, avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc.xlvi, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, les sires de la Varenne, de Precigny et de Blainville

Pour ces trois personnages, cf. ci-dessus, p. 178, note 2, 220, note 4, et 273, note 3.

, messire Regnault du Dresnay

Regnaut du Dresnay, lieutenant de Pierre de Brézé, sénéchal de Poitou. Il a été l’objet d’une note dans un autre endroit du présent volume (ci-dessus p. 178, note 1).

et autres presens. De La Loere. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MCVI Avril 1446 (après le 16)

Lettres d’abolition en faveur de Pierre Massias, compagnon de guerre, demeurant à Tillou en Poitou, pour les pillages et excès dont il s’est rendu coupable pendant les campagnes auxquelles il a pris part.

AN JJ. 177, n° 216, fol. 143 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 323-326

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Pierre Massias, compaignon de guerre, aagié de quarante ans ou environ, à present demourant en la parroisse de Taillou en Poictou, contenant que dès son jeune aage il nous a servy en noz guerres, tant en la compaignie et soubz Jehan de la Chappelle

Le Dictionnaire des familles du Poitou mentionne plusieurs personnages du nom de Jean de La Chapelle, vivant à cette époque, entre autres Jean, seigneur de la Forêt, fils de Gautier de La Chapelle, dit de Chiré, et de Jeanne Esgrain, dame de la Forêt, habitant le pays de Lusignan. (Nouv. édit., t. II, p. 240.) Mais rien ne permet d’identifier ce dernier ou l’un des autres avec le capitaine Jean de La Chapelle nommé ici.

, de Gaultier de Brusac

Sur Gautier de Brusac, cf. ci-dessus, p. 221, note.

, que d’autres capitaines, et mesmement nous servit ou voiage que feismes pour nostre sacre et couronnement, et ès armées qui furent faictes pour les sieges de Mussy l’Evesque

Les historiens disent que la ville de Mussy-l’Évêque ou Mussy-sur-Seine fut réduite à l’obéissance de Charles VII au mois d’avril 1431, mais sans fournir aucun détail sur cette opération militaire. En juillet suivant, le maréchal de Bourgogne réunissait des troupes pour faire le siège de cette ville, mais il en fut détourné par d’autres soins du côté du Nivernais et se contenta de commettre Jacques d’Aumont à la garde de Châtillon-sur-Seine, pour obvier aux courses que les soudoyers de la garnison de Mussy faisaient dans les environs. (Boutiot, Hist. de la ville de Troyes, t. II, p. 536.)

, Sillé le Guillaume

Il ne peut être fait allusion ici qu’à la journée de Sillé-le-Guillaume (février 1434), où Richemont réunit une armée imposante pour obliger le comte d’Arundell à lever le siège de cette place et à rendre les otages qu’il avait reçus en gage de soumission, si la ville n’était pas secourue dans un délai de six semaines. Les Français s’étant présentés au jour fixé en plus grande force que les Anglais, le comte d’Arundell s’éloigna et renvoya les otages. (E. Cosneau, Le connétable de Richemont, p. 207 et suiv.)

, d’Avranches

Ce fut au mois de décembre 1439 que Richemont marcha sur Avranches avec le maréchal de Lohéac et le duc d’Alençon, et mit le siège devant cette ville. Le manque d’artillerie et d’argent, d’une part, et d’autre part le grand nombre de routiers qu’il avait emmenés avec lui, pour en débarrasser les environs de Paris, et dont l’indiscipline ordinaire était encore accrue par le mécontentement causé à tous les gens de guerre par la récente ordonnance promulguée à Orléans pour la réforme de l’armée, furent cause de l’échec complet du connétable. (Id. ibid., p. 299-300.)

que en autres lieux, voiages et armées. Et aussi nous a servy soubz feu Jehan de la Roche, au temps qu’il vivoit, et Guiot de la Roche, son frere, et esté de leur compaignie. Toutesvoyes ne se arma il jamais à l’encontre de nous ne d’autres, tant que leur faisions guerre, ne ne les servit ne autres capitaines quelzconques, tant qu’ilz ont esté à l’encontre de nous et des nostres, et seulement les a serviz tant qu’ilz nous obeissoient et estoient en nostre bonne grace. Et s’est icellui suppliant emploié en nos dictes guerres tout au mieulx qu’il a peu, jusques à ce qu’il s’en est retrait, qui a esté puis trois ans ença. Pendans et durans lesquelz temps, icellui suppliant a euz et soustenuz plusieurs maulx, peines, travaulx et duretez en sa personne. Et si a eu de grans pertes et dommaiges en chevaulx, harnoiz et autres biens, et à ladicte cause souventes foiz cheu en grant souffretté et neccessité, et tant que pour soy entretenir en estat, il a esté astraint de tenir les champs, vivre sur noz païs et subgiez, etc…

La suite comme dans les lettres d’abolition octroyées à Jean Chauvet (ci-dessus, n° MXCI, p. 268.)

, ce que bon lui a semblé. Et puet estre que, durant ledit temps qu’il a suivy les dictes guerres et tenu les champs en compaignie de gens d’armes, que lui et aucuns de ses genz ont prins prisonniers plusieurs de noz subgiez, iceulx raençonnez à plusieurs sommes de deniers, vivres et autres choses, iceulx batuz et appatissez, et fait et commis autres grans cas, crimes et deliz, ainsi que gens d’armes avoient acoustumé de faire, qu’il ne pourroit bonnement dire ne exprimer. Toutes foiz ne fut il jamais à ravissement de femmes, meurdre, sacrilege, ni boutemens de feuz. Et combien que le dit suppliant ait bonne voulenté et entencion de s’en tenir doresenavant, sans plus retourner à la guerre, neantmoins il doubte que aucuns, sur lesquelz ont esté faiz les diz maulx, pilleries, roberies, destrousses et autres choses dessus declairées, en voulsissent ès temps avenir faire poursuite par justice à l’encontre de lui, et que par ce moyen on lui voulsist ès temps avenir donner aucun destourbier ou empeschement, ou aucunement le molester et rigoureusement proceder à l’encontre de lui, ou le punir corporellement, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu, etc., il nous plaise lui impartir icelles. Pour quoy nous, les choses dessus dictes considerées, etc., à icellui Pierre Massias, suppliant, avons aboly, remis, quicté et pardonné, etc., pourveu toutesvoyes qu’il n’ait esté à ravissement de femmes, meurdre, violement d’eglise, ne boutemens de feuz. Si donnons en mandement aux seneschaulz de Poictou, Xanctonge et gouverneur de la Rochelle, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil iiiicxlvi, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, vous et autres. Chaligaut. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MCVII Avril 1446 (après le 16)

Lettres d’abolition en faveur de Jean Marin, homme de guerre, du Poitou, pour tous les pillages et violences auxquels il a pris part, depuis qu’il fut en âge de porter les armes.

AN JJ. 177, n° 217, fol. 144 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 326-328

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de Jehan Marin, homme de guerre, aagé de xxxv. ans ou environ, de nostre païs de Poictou, contenant que, dès son jeune aage il s’est emploié en nostre service ou fait de nos guerres, ès frontieres de nostre païs de Guienne, soubz et en la compaignie de plusieurs capitaines et gens de guerre, sans avoir tenu autre parti que le nostre, ne fait guerre à l’encontre de nous. Et a esté au recouvrement des places de Bathefol

Richard de Gontaut avait obtenu de Charles VII, en 1431, des lettres de restitution de la terre de Badefol de Cadouin ; cependant la place fut occupée par Gantonnet d’Abzac, partisan des Anglais jusqu’en 1435, que Richard l’assiégea et fit la garnison prisonnière. (L. Dessalles, Hist. du Périgord, in-8°, t. II, p. 426, 428.) Des lettres de rémission d’avril 1446 en faveur de Jean de Santos, sr de Coignac, contiennent des renseignements sur la prise de cette ville et d’autres places du Périgord, entre autres Bannes. (JJ. 178, n° 219.)

, Banes, Castelno de Barbeguieres, et aussi à Avrenches, en la compaignie du bastard de la Trimoïlle

Jean, fils bâtard de Georges de La Trémoïlle. (Ci-dessus, p. 274, note.) Louis d’Estouteville avait essayé de surprendre Avranches, dont Sommerset était capitaine, en juillet-août 1441, et cette ville fut encore les années suivantes le but d’autres tentatives infructueuses ; elle ne fit sa soumission qu’en mai 1450.

, et si a residé et sejourné ès sieges que avons tenuz et fait tenir devant les lieux dessus diz et autres occuppez par noz ennemys, et s’est trouvé et exposé en plusieurs autres faiz et exploiz de guerre, en plusieurs parties de nostre royaume. En quoy il a despendu et fraié grant partie de ses biens, à petite recompensacion et sans soulde de nous. Et pour ce il s’est habandonné legierement à vivre extraordinairement en plusieurs contrées de nostre dit royaume sur les champs ou plat païs, sur nostre peuple et subgiez, en prenant et raençonnant, batant et destroussant, ou, s’il ne l’a fait, a esté present à plusieurs et diverses foiz prendre et destrousser, batre et raençonner gens et bestiaulx, maisons, grains et autres biens, et fait des maulx, inconveniens, pilleries et larrecins sur nostre dit peuple et subgiez, dont il ne se pourroit remembrer. Et doubte ledit suppliant que, pour cause desdiz cas et malefices, il soit ou puisse estre, ores ou pour le temps avenir aprehendé, contraint ou molesté en corps ou en biens, à requeste de partie, par rigueur de justice ou autrement, et que par ce il peust miserablement finer ses jours, se nostre grace ne lui estoit sur ce impartie, si comme il dit, en nous humblement requerant que, eue consideracion aux services par lui à nous ainsi faiz que dessus est dit, et que avons donné abolicion generale à tous ceulx qui ont suivy noz guerres, il nous plaise nostre dicte grace lui eslargir. Pour quoy nous, etc., à icellui suppliant avons quicté, remis, pardonné et aboly, etc., les faiz, cas et crimes dessus declairez et quelzconques autres, jasoit ce qu’ilz ne soient en ces presentes exprimez et que s’ilz feussent non advenus, etc., excepté toutes voyes meurdre commis d’aguet apensé, boutemens de feux, violence et ravissement de femmes et de filles, et crime de sacrilege, etc. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx conseillers, les gens de nostre Parlement, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. xlvi, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. Rolant. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MCVIII Avril 1446 (après le 16)

Lettres d’abolition en faveur de Jean Raymon, écuyer, panetier du dauphin, et de Bernard de La Fosse, écuyer, pour tous les excès de guerre par eux commis depuis l’abolition qui leur avait été octroyée, comme complices de Guy de La Roche dans la rébellion des princes contre l’autorité royale.

AN JJ. 177, n° 220, fol. 145 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 328-331

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de noz bien amez Jehan Raymon, escuier

Jean Raymon (Raymond ou Rémon) était capitaine de Frontenay-l’Abattu en 1435. Cette place avait été donnée par lettres de Charles V, du mois de septembre 1378, ainsi que le comté de Benon, à Pernelle vicomtesse de Thouars, en échange des deux tiers du comté de Dreux. (Cf. notre t. V, p. 82 et suiv.) Elle passa, à la mort de celle-ci, avec le reste de sa succession, à Pierre d’Amboise, puis à Louis d’Amboise, et par conséquent fut confisquée, de même que les autres biens du vicomte de Thouars, par l’arrêt du 8 mai 1431. On sait qu’une partie de cette confiscation fut donnée à Georges de La Trémoïlle, qui se réserva, en outre, la garde des places qui devaient revenir au sr de Jonvelle, son frère, dont la femme était une sœur de Louis d’Amboise. On peut en conclure que le favori de Charles VII usait de Frontenay comme de sa seigneurie, et par suite que Jean Raymon était à son service. Le 10 mars 1435, la cour de Parlement ordonna que le capitaine de Frontenay-l’Abattu comparaîtrait, le 1er avril suivant, en personne, pour répondre au procureur du roi et à messire Jean Le Boursier, chevalier, « sur certains excès qu’ilz lui imposoient à cause de la prise d’un cheval, et proceder, etc. » Puis, le 12 mai, Jean Raymon fut admis à se faire représenter par procureur et promit de venir à toute réquisition, sous les peines accoutumées. Il élut domicile à Poitiers, en l’hôtel de me Pierre Desfriches, son procureur. (Arch. nat., X2a 21, aux dates.) On ne trouve pas la suite de cette affaire. Après la défaite de la Praguerie en Poitou, Raymon demeura pendant plus de deux ans encore en état de rébellion, sous Guyot de La Rochefoucauld, sr de Verteuil, comme on le verra dans d’autres endroits de ce volume. Il était encore panetier du dauphin Louis en 1451, et fut mêlé aux négociations du mariage de ce prince avec la fille du duc de Savoie. (Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. V, p. 142.) Suivant La Chenaye-Desbois, Jean Raymon appartenait à la famille de Raimond, originaire du Comtat-Venaissin, était fils de Philippe de Raimond et de Luce de Sabran, et mourut sans alliance. (Dict. de la noblesse, nouv. édit., t. XVI, p. 726.)

, panetier de nostre très chier et très amé filz le daulphin de Viennois, et Bernard de la Fosse

Bernard de La Fosse est nommé dans les lettres d’abolition du 9 avril 1431, comme faisant alors partie de la compagnie de Jean de La Roche et devant bénéficier avec lui de la grâce royale (ci-dessus, p. 15).

, aussi escuier, contenant comme ja pieça Guy de la Roche, escuier, seneschal d’Angolesme, à l’occasion de ce que lui et autres ses complices avoient tenues plusieurs places et forteresses en noz païs de Poictou, Xanctonge, Lymosin et autres, à nostre desplaisir, et dont il estoit pour ce encouru en nostre indignacion et malegrace, il obtint noz lettres d’abolicion, tant pour lui que pour ses diz complices, en laquelle les diz supplians estoient comprins

Les lettres de rémission dont il est question avaient été octroyées, le 14 septembre 1440, à Jean de La Roche, Guyot de La Roche, son frère, et à plusieurs autres chevaliers et écuyers qui avaient pris part à la Praguerie. Le texte ne s’en est pas conservé, mais elles sont mentionnées d’une façon plus explicite dans l’abolition accordée audit Guy de La Roche et à plusieurs de ses complices en juin 1446 (ci-dessous, n° MCXIX, p. 364). Ce que Jean Raymon ne rappelle pas, c’est que depuis il avait continué à porter les armes contre le roi et s’était rendu coupable de nouveaux actes de violence et de pillage, pour lesquels il avait encouru une condamnation au bannissement et à la confiscation. (Lettres données à Niort, le 24 janvier 1442 n.s., dont il sera parlé plus loin.)

. Et tantost après le dit Raymon, suppliant, desirant de tout son cuer nous faire service et demourer en nostre bonne grace, s’en vint par devers nous, et depuis fut avec et en la compaignie de nostre dit filz ou voyage qu’il fist pour lever la bastille que les Anglois, noz anciens ennemis et adversaires, tenoient devant nostre ville de Dyeppe

Il s’agit de la formidable bastille que Talbot avait fait construire et armer, dit-on, de deux cents pièces d’artillerie pour battre la place de Dieppe. Le dauphin, dépêché au secours de cette ville, força les Anglais à lever le siège, le 15 août 1443 (cf. ci-dessus, p. 309, note). Au printemps suivant, Charles VII envoya son fils dans le midi contre Jean IV, comte d’Armagnac, et le capitaine espagnol Salazar qui commandait pour ce seigneur dans le Rouergue et l’Armagnac. Jean Raymon accompagna aussi le dauphin dans son expédition contre les Suisses (1444-1445), comme il le dit plus bas. M. Tuetey a publié un état de la maison de Louis pendant cette campagne, et Raymon y est nommé en effet, avec la qualité de panetier. (Les Écorcheurs sous Charles VII, t. I, p. 159.)

, et eut charge de certaine compaignie de gens de guerre qu’il entretint soubz lui le dit voiage, de l’ordonnanee de nostre dit filz, et depuis a esté avec icellui nostre filz, à la dicte charge de gens, ès voiages qu’il a faiz tant en Rouergue et ailleurs, pour l’execucion faicte, de nostre ordonnance, par nostre dit filz ès terres et païs de nostre cousin le conte d’Armaignac, et ou voiage d’Almaigne, pendant lequel temps ledit Jehan Raymon et les gens de sa charge et compaignie, et ledit Bernard de la Fosse, ont tenu les champs, vesqu sur nostre peuple, batu, rançonné et fait plusieurs autres maulx et deliz que faisoient communement pour lors les gens de guerre, tenans les champs, et doubtent que, ou temps avenir, on voulsist pour occasion de ce leur faire aucunes questions et demandes, et que par ce moyen ilz cheussent en dangier de justice, se nostre grace ne leur estoit sur ce impartie, humblement requerant que, attendu ce que dit est, et qu’ilz n’avoient point d’ordonnance ne de paiement, par quoy ilz ont esté contrains à faire et souffrir faire des maulx et choses dessus dictes sur nos diz païs et subgiez, qu’ilz nous ont par longtemps bien et loyaument servy ou fait de noz guerres et autrement, en maintes manieres, et que de ce on a encores fait aucune poursuite à l’encontre d’eulx, il nous plaise leur impartir nostre dicte grace. Pour quoy nous, ces choses considerées et les bons et agreables services que les diz supplians nous ont, comme dit est, faiz ès dictes guerres, voiages et armées, et esperons que encores facent ou temps avenir, ausdiz Jehan Raymon et Bernard de la Fosse, supplians, et à chascun d’eulx, avons quicté, remis, pardonné et aboly, etc., les faiz et cas devant diz et tous autres cas, excès, deliz par eulx et de leur adveu et consentement commis et perpetrez, depuis la date desdictes lettres d’abolition octroyées au dit Guy de la Roche et à eulx, ausquelles ne voulons aucunement estre desrogié, mais les voulons demourer en leur vertu jusques à present, excepté meurdre d’aguet apensé, boutement de feu, ravissement de femmes et sacrileige, etc. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes aux seneschaulx de Poictou et de Xanctonge, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. xlvi, et de nostre regne le xxiiiie

Le texte de ces lettres d’abolition est imprimé dans Les Écorcheurs sous Charles VII, par A. Tuetey, t. II, p. 409, 410.

.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. Rolant. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MCIX Avril 1446 (après le 16)

Lettres d’abolition octroyées à Jean de Vivonne, sr de Bougouin, chambellan du roi, pour les pillages, violences et tous autres excès dont il avait pu se rendre coupable pendant les guerres.

AN JJ. 177, n° 224, fol. 148 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 331-333

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre amé et feal chevalier et chambellan, Jehan de Vivonne, seigneur de Bougouyn

Second fils de Jean de Vivonne, seigneur de Bougouin et d’Iteuil, et de Marquise de la Rochandry. Son père vivait encore au milieu de l’année 1420. Il fut en procès au Parlement contre Guillaume seigneur de la Rochandry (ou de la Rochechandry), touchant le quart par indivis des terres d’Iteuil, Bougouin, la Jarrie, Mairé, etc. (Arrêt du 3 décembre 1412, Arch. nat., X1a 59, fol. 380), et plus tard contre Jean Larcher, bourgeois de Poitiers, et contre sa femme, Jeanne Sperlinton, au sujet d’une rente qu’il avait vendue à cette dernière, lorsqu’elle vivait avec son premier mari, Jean Guerin, dit Nau. (Arrêt du Parlement de Poitiers, le 25 mai 1420, X1a 9190, fol. 102.) Le fils aîné du sr de Bougouin et d’Iteuil était Antoine de Vivonne, qui fut décapité avec André de Beaumont, le 8 mai 1431, en conséquence d’un arrêt du conseil du roi rendu à l’instigation de Georges de La Trémoïlle. Ses biens, qui avaient été confisqués, furent rendus par Charles VII à ses deux frères, Jean seigneur de Bougouin (à qui sont octroyées les présentes lettres d’abolition) et François, par lettres du 7 octobre 1434, entérinées au Parlement de Poitiers, le 22 janvier 1435 n.s. (X1a 9194, fol. 88 v°). Le 5 mai 1434, Jean de Vivonne, chevalier, sr de Bougouin, Jean de Nozières, écuyer, et Jean Massart, poursuivis en matière criminelle par le procureur général et ajournés à comparaître en personne devant la cour, obtinrent d’être admis par procureur, à condition de se représenter à toute réquisition sub pena convicti, et, pour faire tous exploits et ajournements, ils firent élection de domicile à Poitiers, en l’hôtel de Pierre Desfriches. (X2a 21, à la date.) Le registre n’est pas plus explicite. On retrouve la trace de Jean de Vivonne en 1459. Il épousa Marie, fille de Laurent Vernon, seigneur de Montreuil-Bonnin, dont il eut Laurent, sr de Bougouin, Jean, sr d’Iteuil, et Nicole, mariée à Artus de Vivonne, seigneur de Fors.

, aagé de xxxiiii. ans ou environ, contenant que dès xx. ans a ou environ il a frequanté les armes et a esté à plusieurs sieges qui ont esté tenuz, raencontres, exploiz et bonnes besongnes qui touchant le fait de noz guerres ont esté faictes de par nous sur les Anglois, noz anciens adversaires, sans avoir fait guerre à l’encontre de nous ni tenu autre parti que le nostre, et en lui voulentiers exposant en icelles guerres, soubz plusieurs noz chiefz. Et aucunes foiz estant avec noz capitaines de guerre, a frayé et despendu du sien largement et tant que souvent il n’eust peu bonnement entretenir son fait et estat, et aucuns compaignons sur les champs, [sinon] aux despens de nostre peuple et subgiez, pour ce qu’il n’avoit aucun aide, souldée ou bienfait de nous. Et en vivant ainsi sur les champs que dit est, ont fait ses diz compaignons de guerre, en sa presence et absence, et lui mesmes, en plusieurs parties et contrées de nostre royaume et sur nostre dit peuple et subgiez, plusieurs courses, pilleries, larrecins, roberies, destrousses, raençonnemens de biens, bestiaulx, gens, grains et labours, et ont prins et osté de fait et par force à plusieurs de noz diz subgiez leur or, argent, monnoyé et à monnoyer, et autres leurs biens quelzconques, qu’ilz ont peu trouver et apprehender, et fait d’aultres maulx et dommaiges, dont le dit suppliant ne se sauroit recorder, et pour ce il doubte que, à l’occasion des diz cas, malefices, crimes et deliz perpetrez par lui et ses diz gens, on lui puisse faire ou donner en son corps ou biens, ores ou pour le temps avenir, à requeste ou poursuite de partie, par rigueur de justice ou autrement, griefz, dommaiges, molestes, destourbiers ou empeschemens, et que miserablement il peust finer ses jours, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, en nous humblement requerant, etc. Pour quoy nous, ayans regard aux services à nous faiz par le dit suppliant, en nos dictes guerres, et esperons qu’il fera ou temps avenir, avons quicté, remis, pardonné et aboly, etc., excepté toutesvoyes meurdre d’aguet apensé commis, boutemens de feux, violence et ravissement de femme et de filles et crime de sacrileige, que ne voulons en ce estre comprins, etc. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx conseillers les gens de nostre Parlement, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. xlvi, et de nostre regne le xxiiiie, après Pasques.

Ainsi signé : Par le roy, vous et autres presens. Chaligaut. — Visa. Contentor. E. Duban.

MCX Avril 1446 (après le 16)

Lettres d’abolition octroyées à Jacques de Pons, chevalier, pour crime de lèse-majesté. Il avait fait alliance avec les Anglais, était entré en rébellion contre Charles VII, à l’obéissance duquel il avait soustrait Plassac, Royan et autres villes et places fortes

Emprisonné pour tous ces crimes en la Conciergerie du Palais à Paris, par ordre du Parlement et malgré le traité passé entre lui et le roi à Tours, dans lequel une abolition générale lui était promise moyennant la reddition de Royan, Jacques de Pons s’était échappé grâce à la complicité de plusieurs gentilshommes de sa maison, le 28 février de l’année 1445. Le même registre JJ. 177 contient le texte de lettres de rémission accordées à l’un de ses serviteurs, Pierre des Hayes, dit le Grand Pierre, pour complicité dans cette évasion (n° 189, fol. 128 v°). Jacques, né en 1413, était le fils de Renaud VI, sire de Pons, et de Marguerite de La Trémoïlle, sa seconde femme (cf. notre précédent vol., p. 61 note), et par conséquent neveu de Georges de La Trémoïlle. Il trempa avec celui-ci dans la rébellion des princes ligués contre l’autorité du roi, et après la soumission de ceux-ci, il continua la résistance avec Guy de La Rochefoucauld, sr de Verteuil, sénéchal d’Angoulême, et plusieurs autres, ce qui lui valut d’être condamné une première fois au bannissement et à la confiscation par lettres données à Niort, le 24 janvier 1442 n.s. (cf. ci-dessous, n° MCXIX et p. 367, note), à moins qu’il ne se rendît à merci dans un délai de dix jours. Il attendit pour demander grâce que l’armée de Charles VII fût à ses portes et abandonna alors les places qu’il prétendait tenir en gage de la couronne. (Berry, Chronique de Charles VII, édit. Godefroy, in-fol., p. 417.) Par acte du 8 mars 1442 n.s. il fit le serment d’être désormais bon et loyal sujet du roi, de ne point arrêter ses deniers, de ne pas lever ou avouer de gens d’armes, sans sa permission, etc. (J. 389, n° 10.) Sa soumission, comme le prouvent les lettres d’abolition d’avril 1446, ne fut que momentanée. Entre son évasion de la Conciergerie et la date de cette rémission, le Parlement avait rendu contre lui un arrêt le condamnant par contumace au bannissement et à la confiscation, le 12 juillet 1445. Le texte des lettres d’avril 1446 est imprimé, d’après un texte assez défectueux, avec les procès-verbaux de la publication qui en fut faite à Saint-Jean-d’Angély, à Saintes et à Cognac, dans le t. XXI des Archives hist. de la Saintonge et de l’Aunis (1892), p. 250. Peu de temps après, Jacques de Pons conspira de nouveau contre l’autorité royale et encourut une troisième condamnation. (Arrêt du 28 juin 1449.) L’île d’Oleron, Marennes, la Tour de Brou, confisqués avec ses autres possessions, furent donnés en 1451 par Charles VII à André de Villequier. Le sire de Pons se réfugia alors en Espagne et ne rentra dans le royaume qu’à l’avènement de Louis XI, dont il fut le chambellan et qui, par lettres du 2 juin 1472, annula les arrêts rendus contre lui et lui restitua les terres qui lui avaient été prises. (Arch. hist. de la Saintonge, t. XXI, p. 306.) Il avait épousé Isabelle de Foix, fille de Gaston de Foix, captal de Buch.

. Dans ces lettres, où sont visés aussi les pillages, violences et tous excès de guerre, sont compris nommément les hommes d’armes de la compagnie et autres complices du sire de Pons, au nombre de plus de cent, parmi lesquels on peut relever quelques noms qui intéressent plus ou moins directement l’histoire du Poitou, ceux entre autres de Pierre de Saint-Gelais

Il est question plus amplement de ce personnage dans des lettres d’abolition de juin 1446, publiées ci-dessous, qui lui furent octroyées en même temps qu’à Guy de La Roche (p. 365).

, Chauchon de Thouars, Jean de Vaux

Il était fils d’Hugues de Vaux, chevalier, sur la famille duquel se trouvent des renseignements dans un arrêt du Parlement du 11 août 1377, rendu dans un procès qu’il soutint contre Jean Rabateau, curateur d’Hugues de Saint-Amand, fils de Poinçonnet et de Jeanne Bertrand. (Arch. nat., X1a 44, fol. 359 v°.) Dans des lettres patentes datées de Poitiers, mars 1442 n.s., Jean de Vaux, écuyer, est dit seigneur en partie et capitaine de la forteresse de Varèze, près Saint-Jean-d’Angély. (JJ. 176, n° 399, fol. 275.) Jean et son frère Pierre de Vaux avaient vendu, le 27 juin 1441, l’hôtel et hébergement de la Guillauderie, paroisse de Génac en Augoumois, provenant de la succession de feu leur père, Hugues de Vaux, à Richard Planté, dudit lieu de Génac. Puis, dans un pressant besoin d’argent, le premier chercha un nouvel acquéreur, lui dit que cette terre lui appartenait encore, et se la fit payer une seconde fois. Poursuivi pour abus de confiance, il obtint des lettres de rémission à Tours, au mois de février 1447 n.s. (JJ. 178, n° 125, fol. 79.)

, Jean de Sainte-Hermine

Jean de Sainte-Hermine, chef de cette famille, était seigneur de La Fa, Tourtron, Saint-Même, Marsac, Usson, etc. Marié, le 25 octobre 1425, à Marguerite Goumard, fille de Bertrand, sr d’Échillais, il en eut un fils, Élie, et quatre filles dont la troisième, Françoise, épousa Jean de Rabaine, écuyer, nommé plus bas. (Dict. des familles du Poitou, 1re édit., t. II, p. 656) Le 18 juin 1439, Jean de Sainte-Hermine, Jacques de Pons et autres leurs complices étaient poursuivis au criminel par Jean Rabateau, président au Parlement, comme chargé de la garde et gouvernement de la terre de Soubise, et Bertrand Larchevêque, écuyer, sr de Soubise, fils mineur de Guy Larchevêque. Il s’agit d’une adjudication de défaut contre les inculpés, de sorte que l’affaire n’est pas précisée. (Arch. nat., X2a 22, à la date.)

, Lambert et Jean de Rabaine

Lambert de Rabaine, seigneur de Gémozac, mari d’Anne de Montilieu, fils aîné de Guillaume, écuyer, sr de Gémozac, Rabaine en Pons, Jazennes, etc., et de Marguerite Ardillon. Son fils aîné, qui épousa Françoise de Sainte-Hermine, se nommait Jean. Mais il est plus vraisemblable que le Jean de Rabaine mentionné parmi les complices de Jacques de Pons est non pas le fils, mais le frère cadet de Lambert, nommé aussi Jean, chef de la branche de Jazennes, qui épousa Éliette Forestier. (Généalogie des Rabaine, par Ch. Dangibeaud, Arch. hist. de la Saintonge et de l’Aunis t. XIX, 1891, p. 59, 60.) Lambert vivait encore le 14 novembre 1473 et rendit, à cette date, hommage au sire de Pons pour les fiefs qu’il possédait à Pons, Pérignac, Chadenac et Biron. (Id., p. 107.)

, etc. « Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc.xlvi, et de nostre regne le xxiiiie. — Ainsi signé : Par le roi en son conseil. De la Loere. »

AN JJ. 177, n° 238, fol. 157 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 333-335

MCXI Avril 1446 (après le 16)

Lettres d’abolition en faveur de Guillaume Vincent, originaire de Normandie, demeurant à Villeneuve-la-Comtesse, ancien homme d’armes de la garde du corps du roi, pour les violences et excès de guerre auxquels il a pris part, notamment en la châtellenie de Civray.

AN JJ. 178, n° 14, fol. 9 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 335-339

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receue l’umble supplicacion de Guillaume Vincent, demourant à Villeneufve la Contesse en nostre païs de Poictou, aagé de quarante cinq ans ou environ, contenant qu’il est natif de nostre païs de Normendie, du lieu de Saint Saen en l’arceveschié de Rouen, et dès le temps de sa jeunesse et incontinant après la prise de nostre ville de Rouen

La ville de Rouen fut prise par les Anglais le 19 janvier 1419.

, il s’en vint demourer en nostre parti, avec nostre amé et feal Guillaume Blocet

Guillaume Blosset, sr de Saint-Pierre en Caux, est appelé le Borgne de Blosset par les chroniqueurs. Le 18 janvier 1418, il se qualifiait, dans une quittance de gages, écuyer, capitaine des hommes d’armes et de trait du château et de la ville de Neufchâtel-d’Ellecourt, et dans un autre acte de même nature, du 31 octobre 1430, il est ainsi désigné : Guillaume Blosset, dit le Borgne, chevalier, chambellan du roi. (Bibl. nat., coll. Clairambault, vol. 140, nos 2725 et 2727.) Jean Chartier, dans sa Chronique de Charles VII, raconte que l’an 1432, le Borgne de Blosset, sr de Saint-Pierre, Pierre de Beauvau, Gautier de Brusac et plusieurs autres vinrent combattre les Anglais qui faisaient le siège de Saint-Cénery. (Edit. Vallet de Viriville, t. I, p. 136 et s.)

, chevalier, seigneur de Saint Pierre, et le servy en la ville de Compiengne, par l’espace de deux ans ou environ comme page ; et après se mist avec feu Guillaume, aussi en son vivant chevalier, seigneur de Gamaches

D’après ce texte, Guillaume de Gamaches serait décédé vers l’an 1434. Les généalogistes ne donnent pas la date de sa mort. Il était le fils aîné de Guillaume Ier, seigneur de Gamaches en Vexin, et de Marie de Fécamp. Bailli de Rouen le 3 août 1415, prisonnier à Azincourt, il fut capitaine de la ville de Compiègne, du 21 juillet 1418 au 18 juin 1422. Pris de nouveau au combat de Cravant (1423), le roi lui donna, l’année suivante, pour le dédommager, la charge de grand maître et général réformateur des eaux et forêts de France, qu’il exerçait encore en 1428, dit le P. Anselme (Hist. généal., t. VIII, p. 690. Cf. aussi le Dict. de la noblesse de la Chenaye-Desbois).

, avec lequel il demoura par longtemps en nostre service, jusques au decès dudit de Gamaches qui fut douze ans [a] ou environ. Et depuis se mist et demoura avec Pierre de Gamaches, frere dudit seigneur de Gamaches, en son vivant cappitaine et ayant la garde de par nous du chastel de Chivray

Le capitaine de Civray était le septième fils de Guillaume de Gamaches et de Marie de Fécamp. Il est qualifié écuyer, capitaine du château de Saint-Jean-d’Angély et du Pont de Saintes, dans une quittance qu’il donna, le 28 mai 1439, de 600 livres de pension que Charles VII lui avait octroyée, à la survivance de sa mère, par lettres datées de Saint-Jean-d’Angély, le 7 mars 1438 n.s. ; il donna une autre quittance de cette somme le 8 octobre 1443. (Id. ibid.) On voit ici que sa mort arriva vers cette époque.

, avec lequel il a demouré jusques à son trespas, qui fut trois ans a ou environ. Pendant et durant lequel temps il s’est armé, dès que il a esté en aage de ce faire, et s’est tousjours employé en nostre service au mieulx qu’il a peu, et suivy la guerre en tenant tousjours nostre party, sans avoir jamais varié ne fait guerre à l’encontre de nous. Et mesmement fut à la bataille de Vernueil

Le 17 août 1424. Un autre frère de Guillaume et Pierre de Gamaches, Gilles, fut tué dans ce combat.

, où il fut fort blecié et prins par les Anglois, nos anciens ennemis, et mis à grosse finance et raençon, et fut à lever le siege de Compiegne en la compaignie de nostre amé et feal conseiller Philippe de Gamaches, à present abbé de Saint Denis en France

Les généalogistes précités disent que Philippe de Gamaches, autre frère des précédents, était abbé de Saint-Faron de Meaux en 1420, qu’il défendit courageusement cette ville, lorsqu’elle fut assiégée par Henri V (octobre 1421-mai 1422) et qu’il y demeura prisonnier. On ignorait qu’il eût servi dans l’armée, avant d’être placé à la tête de l’abbaye de Saint-Denis. Il en fut abbé de 1443 au 28 janvier 1464 n.s., date de sa mort. (Gallia christ., t. VII, col. 404.)

. Et aussi fut en nostre compaignie à nostre sacre et couronnement, ou quel temps il estoit de la garde de nostre corps en l’estat de hommes d’armes. Et depuis s’est trouvé en plusieurs faiz de guerre à l’encontre de nos diz ennemiz, tant en rencontres et sieges que autrement. Mais neantmoins, à l’occasion de ce que, durant le temps dessus dit qu’il a ainsi suivy les guerres, il a, pour soy entretenir en icelles, trouvé manieres plusieurs foiz d’avoir argent, vivres et autres choses, tant par raençons de bonnes gens, bestial et autres choses, que par destrousses de gens de tous estaz et autrement, et a vescu et fait comme ont acoustumé faire gens de guerre, en pillant, robant et faisant plusieurs maulx sur noz subgiez et autres ; et aussi que, seize ans a ou environ, pour resister aux grans entreprises, maulx, pilleries et dommaiges, que faisoient chascun jour sur noz subgiez de la chastellenie dudit lieu de Chivray et autres d’environ ung nommé Beaumenoir

Jacques de Dinan, sr de Beaumanoir, chambellan d’Artur de Richemont, avait été envoyé par celui-ci, l’an 1431, ainsi que le sire de Rostrenen, pour recouvrer les places de Marans, Benon et l’île de Ré, confisquées sur Louis d’Amboise, vicomte de Thouars, par l’arrêt du 8 mai 1431, et données à Georges de La Trémoïlle. Les lieutenants du connétable furent combattus par une armée dirigée par le sire d’Albret et l’amiral de Culant, et durent se retirer à Fontenay-le-Comte. C’est pendant cette campagne que la forteresse de Villaret fut prise, sans doute, par des Bretons qui étaient venus dans le pays avec les sires de Beaumanoir et de Rostrenen.

, cappitaine de certain nombre de gens d’armes, et aussi ung nommé Grosse Teste, avec lequel se tenoit et frequentoit ensuivant la guerre ung appellé Martin Bourreau, comme s’ilz eussent esté Anglois, et par lesquelz qui avoient esté habandonnez par nous, pour les grans maulx qu’ilz faisoient, fut prinse par force et puissance la forteresse de Villeret en la chastellenie dudit lieu de Chivray, en laquelle estoit lors ledit suppliant, lequel ilz detindrent prisonnier et y perdi du sien environ la somme de cent escuz ; ledit Pierre de Gamaches, lors cappitaine dudit lieu de Chivray, avec lequel demouroit lors ledit suppliant, comme dit est, se mist sus et assembla certain nombre de compaignons, par aucuns desquelz fut prins ledit Bourreau, l’un desdiz gens de guerre, malfaiteurs et habandonnez, et mis en prison, et lui cousta environ xv. ou xvi. escuz en toutes choses, dont ledit suppliant ot son cheval qui povoit valoir trois escuz ou environ, il doubte que on voulsist ou temps avenir proceder contre lui rigoureusement, se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartie, humblement requerant icelle. Pour quoy nous, ces choses considerées et mesmement lesdiz services à nous faiz par ledit suppliant, etc., à icellui avons quicté, remis, pardonné et aboli, etc., les faiz, cas et crimes dessus declairez et quelzconques autres par lui commis, durant le temps qu’il a suivy lesdictes guerres, jasoit ce qu’ilz ne soient en ces presentes exprimez, etc., excepté toutes voyes meurdre commis d’aguet apensé, boutemens de feux, violence et ravissement de femmes et de filles et crime de sacrilege, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx conseillers les gens de nostre Parlement, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. xlvi, et de nostre regne le xxiiiime, après Pasques.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. Rolant. — Visa. Contentor. E. Duban.

MCXII Avril 1446 (après le 16)

Lettres d’abolition accordées à Jean du Puy-Aurabier. Servant sous Jean de Montsorbier, il avait été détroussé par les gens de Jean de La Roche, et n’ayant pu obtenir de son capitaine la restitution de ce qu’il avait perdu, il s’était mis sous les ordres de Denis de Saint-Savin, qui occupait alors l’abbaye de la Réau, et avait, entre autres excès, rançonné plusieurs habitants de Vaux.

AN JJ. 178, n° 24, fol. 16 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 339-343

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre amé Jehan du Puy Aurabier

Le Puy-au-Rabier ou le Puy-Rabier était un ancien fief relevant de la châtellenie de Bernay, qui appartenait avant le xve siècle au chapitre de Saint-Hilaire de Poitiers. Les renseignements sur la famille à laquelle il a donné son nom font défaut.

, contenant que, dès son jeune aage et qu’il s’est peu armer, il a suivy les guerres, ès quelles il nous a tousjours servi et tenu nostre parti, sans jamais varier ne fait guerre à l’encontre de nous. Et pour ce que, durant le temps qu’il a suivy lesdictes guerres, il a raençonné, pillé, robé et destroussé plusieurs noz subgiez et autres de tous estaz et fait plusieurs maulx, comme ont acoustumé faire gens de guerre ; et aussi que longtemps a, pour estre compensé et restitué de certaine destrousse que firent jà pieça sur lui les gens de feu Jehan de la Roche, en alant avec Jehan de Montsorbier

Jean de Montsorbier figure en qualité d’huissier d’armes du dauphin Charles, comte de Poitou et régent, sur un registre de comptes de ce prince de l’année 1420. (Arch. nat., KK. 53, fol. 5-7.) Il était fils, ce semble, d’autre Jean de Montsorbier, écuyer, et de Marie de Fontenioux. Celui-ci rendit aveu à Jean duc de Berry, le 5 juillet 1404, de l’hébergement d’« Orilheau » (Orillac) au village de Brion, mouvant de Gençay, qui appartenait à sa femme. (Id., R1* 2171, p. 560.) Jean de Montsorbier le jeune, qualifié alors valet, est inscrit sur les livres des hommages dus au dauphin comte de Poitou, en août 1418, pour ce même fief d’Orillac, pour un cens de 12 deniers que lui devait Pierre Blanchart, et aussi pour son fief dit de Jousserant, sur la route de Mazerolles à l’Orme-Jousserant. (Id., P. 1144, fol. 29 v°, 30 v°.) Philippe de Montsorbier, alors veuve d’Huguet du Chillou et tutrice de ses trois filles mineures, Jeanne, Marguerite et Huguette, rendit aveu, le 10 octobre 1418, au comte de Poitou, des deux hébergements dudit lieu du Chaillou, mouvant de Lusignan ; et deux autres aveux des mêmes fiefs, l’un du 3 août 1423, l’autre du 18 octobre 1447, sont transcrits sous les noms de Jeanne du Chillou et de Jean Caunys, écuyer, son mari. (P. 1145, fol. 68, 70 et 71.)

Le lieu de Montsorbier qui donna son nom à cette famille, connue dès le xiie siècle, était un ancien fief relevant de Gençay. Un Guillemot de Montsorbier, frère ou cousin de Jean dont il est question dans ces lettres, livra, un peu avant le mois de mars 1429 n.s., au comte de Richemont ou aida celui-ci à prendre le château de Gençay, qui appartenait à Georges de La Trémoïlle. Mandé près du roi à Poitiers au sujet de cette affaire, et craignant à justre titre pour sa sûreté, il ne consentit à s’y rendre que quand on eut remis entre ses mains Simon Mouraut, échevin, et deux autres bourgeois de Poitiers, comme otages. Guillemot les fit enfermer dans la prison du château et exigea, avant de les remettre en liberté, une forte rançon. Sur le refus de Mouraut, il le fit mener prisonnier de Gençay à Parthenay (juin 1429), et finalement celui-ci dut payer 300 réaux d’or à Montsorbier et 1500 à d’autres. Une fois libéré, il porta plainte au Parlement. Guillemot ne se laissa pas prendre et se garda bien de venir aux ajournements. Après avoir obtenu quatre défauts contre son adversaire, Mouraut le fit condamner par contumace à lui restituer les sommes extorquées, à 500 réaux de dommages et intérêts, et à une amende de 500 réaux envers le roi, à tenir prison fermée jusqu’au complet payement, etc. (Arrêt du 30 janvier 1434 n.s., prononcé le 13 février suivant, X2a 20, fol. 66 v° ; X2a 21, au 30 janvier. Voy. aussi Arch. de la ville de Poitiers, J. 849.) Dans l’intervalle, avait été arrêté à Poitiers un nommé me Thomas Pelet, qui confessa qu’un jour, à Gençay, Montsorbier lui avait demandé s’il ne lui « sauroit faire chose moyennant laquelle il ne fut en doubte d’homme ». Pour lui donner satisfaction, Thomas, de retour à Poitiers, avait fabriqué « un veu de plomb en certain point des planetes (sic) ». A ce vœu, il y avait deux trous, l’un à l’endroit du cou, l’autre à l’endroit du ventre ; à l’intérieur, il avait placé un écriteau en parchemin vierge, sur lequel étaient inscrits les noms du roi, de plusieurs princes du sang et « d’aucuns du conseil ». Il l’avait fait baptiser à Saint-Porchaire et l’avait ensuite porté à Montsorbier. La connaissance de ce crime appartenait à l’évêque de Poitiers. La cour remontra à celui-ci la « grandeur du cas » et l’invita à faire son devoir. L’évêque envoya à Parthenay demander à Richemont de lui livrer le coupable. Le connétable protesta de sa soumission aux lois de l’Église, mais fit observer que Guillemot de Montsorbier avait des ennemis à Poitiers et qu’il serait préférable qu’on le mit en jugement à Parthenay même ; puis, le promoteur de l’évêque insistant, il proposa Thouars. Les négociations ne purent aboutir. Le procureur général, estimant que Hugues de Combarel, évêque de Poitiers, n’avait point fait tout ce qu’il devait, le mit en cause, ainsi que Pierre, abbé de Saint-Maixent, son vicaire, Jean de la Marche, son official, Jean Menguy et Pierre Ferrandeau, ses promoteurs. Cette curieuse affaire fut plaidée au Parlement le 11 mai 1430. (X1a 9199, fol. 273 v°.) Montsorbier, cependant, sut rester hors d’atteinte ; même, lorsque le connétable fut rentré en grâce auprès de Charles VII, il obtint sa rémission pure et simple, comme on le voit par cet extrait des registres du conseil du Parlement de Poitiers : « Du jeudi 4 fevrier 1434 n.s. Deliberé et conclut a esté par la court que, pour le bien et transquillité du païs de Poictou et de la chose publique du royaume, est expedient obtemperer aux lettres de remission et abolicion données par le roy à Guillemot, estant de present au chastel de Chauvigny, et à ceulx qui sont avec lui, et que s’il vient cy en personne, pour faire le serement dont ès dictes lettres est faicte mencion, la court y obtemperera. » (X2a 21, à la date.)

, lequel avant qu’il le peust mener avec lui, lui promist de lui restituer et rendre tout ce qu’il perdroit, lui estant en sa compaignie, dont, après ladicte destrousse faicte, ledit de Montsorbier fut reffusant, sur ce plusieurs foiz sommé et requis par ledit suppliant ; lequel, pour trouver maniere d’estre recompensé sur ledit de Montsorbier de sa dicte destrousse, s’en ala avec aucuns des gens de guerre de la charge de nostre amé et feal Denis de Saint Savin, chevalier

Bien qu’il ne soit pas nommé sur le petit tableau généalogique des seigneurs de la Tour-aux-Cognons de la famille de Saint-Savin, de 1325 à 1538, dressé par M. le baron d’Huart (Persac et la châtellenie de Calais, études hist. sur la Marche de Poitou, Mémoires de la Société des Antiquaire de l’Ouest, t. X de la 2e série, 1887, p. 434), Denis appartenait indubitablement à cette branche. Il paraît être le fils aîné de Pierre, écuyer, sr de la Tour-aux-Cognons (1380-1406) ; mais on ne saurait dire quels liens de parenté l’unissaient aux membres de cette famille nommés ci-dessus, p. 298, et à ceux dont il va être question dans la présente note.

Le 16 janvier 1422 n.s., Denis de Saint-Savin, alors écuyer, était prisonnier à la Conciergerie du Palais de Poitiers. La cour avait confié à la garde de Guillaume Taveau, chevalier, sr de Mortemer et de Lussac, et de sa femme, une demoiselle nommée Jeannette de Faugère, en attendant l’issue d’un procès pendant à cause du bail et tutelle de celle-ci. Denis, qui la voulait épouser, n’avait pas hésité à l’enlever des mains de ceux qui avaient charge de la protéger contre ses entreprises, condamnées par une partie de la famille. Jeanne était d’ailleurs consentante et le mariage fut célébré aussitôt. Les jeunes époux furent poursuivis à la requête du procureur général, ainsi que « Madame Bienvenue Orlue », Jean de Saint-Savin et Jeanne Palardy, mère de ladite Jeanne de Faugère et veuve de Gilles de Saint-Savin (sans doute son second mari). Le 17 janvier, Denis obtint son élargissement parmi la ville de Poitiers, en attendant l’enquête, et promit de se présenter en personne à toute réquisition, sous peine de 1000 écus d’or. La cour accorda aussi la récréance des biens saisis, interdit l’aliénation des immeubles et décida que les garnisaires qui avaient été mis en « l’ostel de la Tour aux Connioux » en seraient retirés, après payement par les inculpés de leurs dépenses et salaires, et à condition que tous les défendeurs se constitueraient pleiges l’un pour l’autre. Les 18 et 19 janvier, les cinq inculpés firent les soumissions requises. (Arch. nat., X1a 9197, fol. 19 v° et 20.)

, lors estant en l’abbaye de la Reau ; et lui estant audit lieu, aucuns des diz gens de guerre alerent courir au lieu de Vaulx, avecques lesquelz ledit suppliant s’en ala. Et quant ilz furent audit lieu de Vaulx, les diz gens de guerre prindrent les bonnes gens d’icellui lieu, tant dedans l’eglise que dehors, par faulte de paiement d’appatiz, comme ilz disoient. Depuis laquelle prinse ainsi faicte, lesdiz gens de guerre sont tous ou la pluspart alez de vie à trespassement. Par quoy ledit suppliant doubte que les dictes bonnes gens dudit lieu de Vaulx, qui lors furent prins ou autres lui vueillent aucune chose demander, combien qu’il n’y eust lors ne depuis part ne butin, et aussi qu’on vueille à la dicte cause proceder contre lui rigoureusement, se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartie, humblement requerant icelle. Pour quoy nous, ces choses considerées, mesmement les diz services à nous faiz par le dit suppliant, voulans, en recongnoissance d’iceulx, favorablement incliner à sa requeste et preferer misericorde à rigueur de justice, aussi qu’il ne savoit riens que les diz gens deussent aler audit lieu de Vaulx prendre les dictes bonnes gens, ne n’y a eu part ne butin, à icellui suppliant avons quicté, remis, pardonné et aboly, etc. les faiz, cas et crimes devant diz et quelzconques autres par lui commis, durant le temps qu’il a suivy lesdictes guerres, jasoit ce qu’ilz ne soient en ces presentes exprimez, etc., excepté toutesvoyes cas de meurdre commis d’aguet apensé, boutemens de feux, ravissement de femmes et de filles et crime de sacrilege, autre que le cas dessus declairé, etc. Si donnons en mandemant, par ces dictes presentes, à noz amez et feaulx conseillers les gens de nostre Parlement, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. xlvi, et de nostre regne le xxiiiie, après Pasques.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. Rolant. — Visa. Contentor. E. Duban.

MCXIII Avril 1446 (après le 16)

Lettres d’abolition en faveur de Guillaume de La Forêt, écuyer, homme d’armes de la compagnie de Joachim Rouault, pour un meurtre récent par lui commis à Coulonges et pour tous les excès de guerre dont il s’est rendu coupable depuis dix ans.

AN JJ. 178, n° 93, fol. 61 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 343-347

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receue l’umble supplicacion de Guillaume de la Forest

Cet écuyer appartenait à la famille de La Forêt-Montpensier plutôt qu’à celle de La Forêt-sur-Sèvre. Un Guillaume de La Forêt était en 1415 l’un des gentilshommes de la suite de Jean Larchevêque, sr de Parthenay ; il fut l’objet avec Jean Sauvestre, Guillaume Chabot et autres, de poursuites au criminel de la part d’Amaury de Liniers, sr d’Airvault et de la Meilleraye, de Maubruny de Liniers, son fils, et des frères Jean et Charles Légier, écuyers. (Jugement par défaut du 30 août 1415, Arch. nat., X2a 17.)

, escuier, demeurant en nostre païs de Poictou, aagé de xxx. ans ou environ, contenant que, depuis dix ans ença, ledit suppliant a continué et frequanté la guerre, soubz plusieurs capitaines de gens d’armes et de trait de nostre royaume et obeissance, et derrenierement soubz nostre bien amé Jouachin Rouault

Ce personnage célèbre dans l’histoire militaire du xve siècle était le fils aîné de Jean Rouault, seigneur de Boisménart (né en 1384, mort en 1435), et de Jeanne du Bellay, dame du Colombier. Il était déjà premier écuyer du corps et maître de l’écurie du dauphin Louis, alors âgé de douze ans, le 12 mars 1436, comme il se voit dans un compte de divers achats de l’écurie de ce prince. (Bibl. nat., coll. Clairambault, vol. 196, p. 8029.) Depuis lors, Joachim Rouault prit part à tous les faits de guerre qui marquèrent la seconde partie du règne de Charles VII. Ce n’est point le lieu de tracer sa biographie, même sommaire. Il ne paraît point d’ailleurs avoir été mêlé particulièrement aux événements de l’histoire du Poitou, son pays, quoiqu’il ait été un instant sénéchal de cette province (1461). Nous le retrouverons sans doute plus tard. Louis d’Amboise, vicomte de Thouars, lui avait vendu sous garantie la seigneurie de la Chaize-le-Vicomte. Ayant été troublé dans cette possession par Guy de Montfaucon, chevalier, et Anne Sauvestre, sa femme, le vicomte de Thouars lui donna à la place la terre et châtellenie de Gamaches en Vimeu, avec quelques rentes, par acte du 11 juin 1459. (Coll. dom Fonteneau, t. XXVI, p. 423, d’après le chartrier de Thouars.) Dès lors Joachim Rouault est plus connu sous le nom de M. de Gamaches, lieu où lui et ses descendants résidèrent plus fréquemment que dans leurs seigneuries de Poitou. Le 3 août 1461, Louis XI, qu’il avait toujours servi fidèlement, pendant qu’il était dauphin, le créa maréchal de France. Deux ans avant sa mort, il tomba en disgrâce. Une commission réunie à Tours pour le juger le condamna, par arrêt du 16 mai 1476, à 20.000 livres d’amende, à la privation de ses charges et au bannissement du royaume. Cependant Joachim mourut dans son pays et en possession de ses biens, dont il disposa librement par son testament. Il avait épousé Françoise de Volvire, fille de Joachim, baron de Ruffec, et de Marguerite Harpedenne de Belleville (cf. ci-dessus, p. 163, note 2), dont il eut un fils et trois filles.

, premier escuier de corps et maistre de l’escuirie de nostre très chier et très amé filz le daulphin de Viennois, sans jamais avoir esté à l’encontre de nous ne tenu autre party que le nostre. Durant lequel temps, il a fait plusieurs courses sur noz subgiez, avec autres, et iceulx destroussez et vescu sur le plat pays, comme les autres gens de guerre estans et vivans sur les champs. Et depuis certain temps ença, ledit suppliant, voulant soy retraire sur le sien et vivre comme escuier de bien doit et est tenu de faire, s’est retourné audit païs de Poictou, avec ses frere, parens et amis, qui sont demourans à Thouars oudit païs, où il a esté par aucun temps. Pendant lequel temps, le dimanche après la feste de saint Jehan Baptiste derreniere passée, le dit suppliant se transporta à Coulonges, distant dudit lieu de Thouars de deux lieues ou environ, pour visiter et veoir ses besoingnes qu’il a audit lieu de Coulonges. Et pour ce que, le jour precedent, il avoit adiray ung cheval, fist dire par le chappellain ou curé d’icelui lieu qui disoit vespres, que, s’il avoit aucuns qu’il sceust nouvelles dudit cheval, qu’il le fist savoir audit suppliant et il lui paieroit voulentiers le vin. Et lors ou incontinant après, ung nommé Geuffroy Dorbe

Il faut lire plutôt Dobe ou Dobé. Nous avons ailleurs donné quelques renseignements sur cette famille du Thouarsais, dont le chef, Jean Dobe, fut reconnu noble par jugement des commissaires du roi en Poitou pour la recherche des francs-fiefs et nouveaux acquêts, le 13 juin 1394. (Voir notre t. VI, p. 168-174.) Un accord du 6 août 1420, enregistré au Parlement le 17 février suivant, fournit quelques notions nouvelles sur ce personnage et sa famille, habitant, comme Geoffroy Dobe, dont il est question ici, la paroisse de Coulonges-Thouarsais. Marie Moysen, alors veuve de Jean Dobe, et tutrice de leur fils Amaury, était en contestation avec Jean Prévost, du bourg de Saint-Jacques près Thouars, au sujet de la succession de Guillemette Dobe (le nom féminisé est écrit Dobée, ce qui implique la prononciation Dobé au masculin), décédée « sans hoirs de sa chair ». Marie Moysen avait et tenait tous les biens de la défunte, et Jean Prévost en réclamait un douzième, comme représentant en partie les droits de feu Colin Bernard, aïeul de ladite Guillemette. Le litige portait aussi sur les arrérages d’une maison et verger au bourg Saint-Jacques, que ledit Prévost tenait à rente de Jean Dobé, et pour laquelle il prétendait avoir baillé à celui-ci une autre maison avec verger, sis à Coulonges, d’un revenu annuel à peu près égal. (Arch. nat., X1c 121, à la date du 17 février 1421 n.s.)

, dudit lieu de Coulonges, demanda audit de la Forest de quel poil il estoit, et il lui respondit en farsant qu’il avoit la queue blanche ; et sans autre chose dire, s’en saillirent de l’eglise où ilz estoient. Et ainsi que ledit suppliant parloit à aucunes personnes, ausquelles il avoit à besoingner, ledit Geuffroy Dorbe vint tout eschauffé vers ledit suppliant et lui dist bien arrogamment teles parolles ou semblables en substance : « Guillaume de la Forest, paiez moi de mes amendes, en quoy vous me estes tenu pour raison du plait que vous et vostre frere avez eu ». A quoy ledit suppliant respondy qu’il ne savoit que c’estoit. Et lors icellui Dorbe dist qu’il le feroit executer en une metayerie appellée la Coldre, appartenant audit suppliant et son dit frere, pour les dictes amendes. Et icellui suppliant dist qu’il feroit que fol et qu’il pourroit bien avoir tort, mesmement qu’il n’estoit point officier, ou autres paroles semblables. Et illec s’entreprindrent de paroles l’un contre l’autre, telement que ledit suppliant, qui est jeune et chault, tira une dague qu’il avoit et en frappa du plat d’icelle ledit Dorbe par le visaige. Lequel print une pierre et la cuida gecter audit suppliant, mais il fut empeschié par ceulx qui estoient illec presens. Et adonc s’en party et s’en ala en son hostel qui estoit près d’ilec, en menassant ledit suppliant ; et quant il fut en sondit hostel, il print ung groz baston et s’en retourna vers ledit suppliant ; et quant il fut près d’icellui suppliant, il haulsa son baston et le cuida frapper sur la teste, et il receut le cop sur le braz. Et lors ledit suppliant se cuida joindre audit Dorbe, afin que plus il ne le frappast, mais il fut prins et detenu par ceulx qui illec estoient, et derechief ledit Dorbe frappa dudit baston icellui suppliant parmy le cousté. Lequel suppliant, soy veant ainsi envillenny et batu, fist tant qu’il se eschappa des mains de ceulx qui le tenoient, et tira sa dague, et ala contre icellui Dorbe et le frappa de ladicte dagne ung seul coup par dessoubz la mamelle, et incontinant ledit Dorbe s’en ala en son hostel, et demie heure après, par son mauvais gouvernement ou autrement, ala de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas ainsi advenu que dit est, ledit suppliant doubtant rigueur de justice, s’est absenté du païs, et n’y oseroit jamais retourner, se noz grace et misericorde ne lui estoient imparties, tant sur icellui cas que sur plusieurs destrousses, pilleries et roberies par lui faictes, lui suivant la guerre comme sur les champs, en la compaignie d’autres. Et pour ce nous a humblement fait supplier et requerir que, attendu que le dit suppliant, dès ce qu’il s’est peu armer, s’est employé en nostre service ou fait de la guerre, et a entencion de faire toutes et quantes foiz qui sera mestier, qu’il est jeune et chault et a esté fait le cas dessus dit de chaude colle, il nous plaise lui impartir sur ce nos dictes grace et misericorde. Pour quoy nous, etc., audit suppliant avons quicté, remis, pardonné et aboly, etc., le fait et cas dessus dit et tous autres, etc., faiz ou commis, lui suivant la guerre, excepté seulement boutement de feux, forsement de femmes, sacrilege et murdres autres que cellui dessus declairé, etc. Si donnons en mandement à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. quarante et six, après Pasques, et de nostre regne le xxiiiime.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. Rolant. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MCXIV Avril 1446 (après le 16)

Lettres d’abolition octroyées à Pierre Pommier, de Ménigoute, homme d’armes de la compagnie du sire de Culant, pour tous les excès dont il s’est rendu coupable durant les guerres.

AN JJ. 178, n° 105, fol. 69 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 347-349

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Pierre Pommyer

Le registre JJ. 178 contient des lettres semblables et de même date, en faveur d’un Étienne Pommyer, peut-être parent de celui-ci ; mais elles sont conçues en termes vagues, ne permettant pas d’identifier sûrement le personnage et ne donnant pas de renseignements précis sur les expéditions auxquelles il prit part. Elles sont adressées à la fois au prévôt de Paris, aux baillis de Vermandois, de Sens et de Saint-Pierre-le-Moutier, aux sénéchaux de Poitou et de Limousin. (N° 70, fol. 43 v°.) — Un Christian Pommier (aliàs Paulmier), écuyer, sr de Seyvre, ayant pour femme Jeanne Légier et vivant le 8 mai 1498, est dit fils de feu Pierre Pommier et de Marie du Retail, celle-ci alors remariée à Jacques de Poignes, écuyer, sr de la Chapelle. (Voy. A. Richard, Inventaire des arch. du château de la Barre, t. I, p. 140, 148, ouvrage dans lequel sont nommés plusieurs autres membres de la famille Pommier.)

, homme de guerre, natif de nostre pays de Poictou, de la parroisse de Menigoute, estant à present de la retenue et compaignie de nostre amé et feal chevalier, conseillier et chambellan, le sire de Culant

Charles seigneur de Culant, neveu de l’amiral Louis de Culant, chambellan du roi, gouverneur de Mantes et de Paris, mort en 1460. Il s’était distingué, sous les yeux de Charles VII, au siège de Montereau (sept. 1437). Nommé grand-maître de France en 1449, il fut dépouillé de cet office l’année suivante, à la suite de malversation dans le maniement des fonds destinés à la solde des troupes. Des lettres lui furent accordées, à Tours, au mois de mars 1451 n.s., portant remise des peines qu’il avait encourues pour ce crime et aussi pour avoir prêté l’oreille, à l’âge de 18 ou 19 ans et n’étant que sr de la Crète, à un projet formé contre la vie de son oncle l’amiral. Un nommé Guillaume Pepin lui avait proposé de prendre Louis de Culant et de le faire étrangler, afin d’hériter de toutes ses terres et possessions, « à quoy il presta oreilles et le oy sans le reprimer ». L’amiral depuis se saisit dudit Pepin, l’emprisonna à Châteauneuf, puis au château de la Croisette, et le fit périr sans jugement. Ces lettres ont été publiées par M. Tuetey, Les Écorcheurs sous Charles VII, t. II, p. 449-454. Louis, fils de Charles de Culant, devint seigneur de Mirebeau en 1486, et sa fille Marguerite épousa, le 27 novembre 1455, Louis de Belleville (Harpedenne), dont il sera question dans la suite de notre publication. (Cf. aussi le Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., t. II, p. 766.)

, contenant que, comme il nous ait par longtemps servi ou fait de noz guerres, tant en la compaignie dudit sire de Culant que de plusieurs autres capitaines, et lui estant en nostre service et en la compaignie des diz capitaines, a en ce royaume sur plusieurs noz subgiez estans et demourans en plusieurs et divers païs d’icellui, pillé, robé, destroussé marchans, batu et navré gens de divers estaz, raençonné gens, villes, villaiges, chevaulx, beufz et autre bestial gros et menu, et fait plusieurs autres grans maulx dont il ne lui souvient, et lesquelz cas il ne sauroit ne pourroit reciter. A l’occasion desquelz maulx et dommaiges ainsi faiz à nos diz subgiez, il doubte que ou temps à venir on lui en voulsist aucune chose demander, et pour ce nous a humblement fait supplier et requerir que, attendu qu’il nous a le temps passé bien et loyaument servi ou fait de noz guerres, sans avoir jamais tenu autre party que le nostre, et que les maulx qu’il a ainsi faiz a esté à l’occasion de nostre dit service et parce qu’il n’avoit de nous aucuns gaiges, souldes ne autres biens faiz dont il se peust entretenir en nostre dit service, que de sa voulenté il faisoit et pour soy plus honnorablement entretenir en nostre dit service, il a fait lesdiz maulx, et aussi qu’il nous a pleu octroyer abolicion generale à tous les compaignons et gens de guerre qui nous ont servy oudit fait de la guerre, qui se vouldront retraire et vivre ainsi que gens de bien doivent faire, sans plus retourner à la pillerie ne continuer la mauvaise vie qu’ilz ont menée le temps passé ; et que ledit suppliant est du tout deliberé et disposé, à l’aide de Dieu, de bien vivre et de soy garder de plus rencheoir ès maulx qu’il a faiz, ne en aucuns d’iceulx, qu’il nous plaise lui extendre nostre grace et misericorde sur ce. Pour quoy nous, ces choses considerées et les bons et agreables services que ledit suppliant nous a faiz le temps passé ou fait de noz guerres, et esperons que encores face ou temps avenir, voulans en ceste partie, en faveur des choses dessus dictes, misericorde estre preferée à rigueur de justice, audit suppliant avons quicté, remis, pardonné et aboly, etc., excepté toutesvoyes meurdre d’aguet apensé, ravissement de femmes, violé eglises et boutemens de feux, lesquelz quatre cas ne voulons estre comprins en ceste presente abolicion. Si donnons en mandement à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. quarante six, et de nostre regne le xxiiiie, après Pasques.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Rolant. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MCXV 29 avril 1446

Lettres portant permission à Jean Robin, écuyer, seigneur de la Roulière et de la Poupardière, d’avoir auxdits lieux une garenne à lapins.

AN JJ. 177, n° 211, fol. 140 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 349-352

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre bien amé Jehan Robin

Les preuves de noblesse de la famille Robin, possessionnée en Poitou et en Anjou, remontaient, dit d’Hozier, à Jean Robin, écuyer, sr de la Tremblaie, vivant avant l’année 1465. (Armorial général, 1er reg., p. 466.) Ce Jean Robin paraît être le même que le bénéficiaire des présentes lettres. Il était aussi seigneur des Rodardières, relevant à hommage lige de la châtellenie de Chiché, suivant un texte de 1420, cité par M.B. Ledain (Hist. de Bressuire, dans les Mémoires de la Société de statistique des Deux-Sèvres, p. 428). En 1495, Pierre de Montalembert, sr de Granzay, et sa femme, Marguerite de Beauvillier, dans le partage de la succession d’un Jean Robin, capitaine de la garde française, réclamaient la terre de la Bellinière. (Arch. nat., X2a 61, à la date du 1er décembre 1495.)

, escuier, seigneur de la Rolaire et de la Popardiere, contenant que ledit suppliant est homme noble, extrait d’ancienne et noble lignée, et tout son temps lui et les siens ont bien et loyaument servy à nous et aux nostres, ou fait de noz guerres et autrement, en maintes manieres ; et combien que chose loisible et convenable soit à tout homme noble avoir en ses terres et seigneuries aucun deduit appartenant à noblesse, et que en ses dictes terres, lieux et seigneuries de [la] Rolaire et la Popardiere, qui sont joignans et confrontans ensemble, ès quelles il a justice et juridicion basse, ait ung bel lieu près de son hostel propice et bien convenable à faire très belle garenne de conninx, sans ce qu’il peust prejudicier à aucune autre terre et seigneurie que à la sienne, ne que iceulx conninx saillissent ou peussent saillir hors des fins et mettes de ses dictes terres et seigneuries, mesmement que ledit lieu est cloz de toutes pars d’eaue vive, fors d’une, laquelle est presque toute en landes, et ce qui en est labouré et cultivé est et le tient en sa main et non autre. Et pour ce qu’il auroit grant desir, tant pour son plaisir et deduit que cellui de ses successeurs le temps avenir, de icelle garenne y faire ou faire faire, construire et ediffier, ait obtenu du seigneur, duquel il tient les dictes terres et seigneuries en foy et hommaige, les congié et licence en tel cas appartenans, toutesfoiz il n’oseroit bonnement ce faire, sans premierement avoir sur ce de nous congié et licence et consentement, si comme il dit, humblement requerant que, attendu, comme dit est, que les dictes terres et seigneuries de la Rolaire et la Popardiere sont ainsi joignans ensemble que dit est, et ledit lieu propre et convenable à faire ladicte garenne à conninx, il nous plaise sur ce iceulx noz grace et congié, licence et consentement lui octroyer. Pour ce est il que nous, ces choses considerées, inclinans par ce que dit est favorablement à la supplicacion et requeste dudit suppliant, à icellui ou dit cas, et mesmement en faveur d’iceulx services ainsi par lui et ses diz predecesseurs à nous et aux nostres faiz en noz guerres et autrement, avons donné et octroyé, donnons et octroyons de grace especial par ces presentes congié, licence et auctorité de faire ou faire faire, construire et ediffier en ses dictes terres et seigneuries de [la] Rolaire et la Popardiere, ainsi tenans et joignans ensemble, ou lieu dessus dit ladicte garenne, et pour ce faire, player ou faire player buissons, espines, faire terriers, clappiers et autres choses necessaires et convenables à garenne, pourveu toutesvoyes qu’il en ait, comme dit est, congié dudit seigneur, duquel il tient à foy et hommaige lesdictes terres et seigneuries, et que ce ne porte aucun dommaige ou prejudice à autre que à lui mesmes ou à ses hommes et subgiez. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que se, appellez ceulx qui feront à appeller, il leur appert deuement de ce que dit est ou tant que souffire doye, icellui Jehan Robin, suppliant, et les siens perpetuelment et à tousjours, ou dit cas, de noz presens grace, octroy, licence et consentement facent, seuffrent et laissent joir et user plainement et paisiblement, sans lui faire, mettre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné, ores ne pour le temps avenir, aucun ennuy, destourbier ou empeschement au contraire, en faisant ou faisant faire icelle garenne, crier et publier ou et ainsi qu’il appartendra ; et avecques ce, deffendent ou facent deffendre de par nous, sur les peines en tel cas acoustumées, à toutes personnes, de quelque estat ou condicion qu’ilz soient, qu’ilz ne soient tant hardiz de chacer à chiens, furetz, harnoiz, filez ne autrement, en maniere quelconque, en ladicte garenne, ne ès deppendences ou reffoul d’icelle, ou prejudice dudit suppliant, et sans son congié et consentement. Et tout ce qui seroit ou auroit esté fait au contraire reparent et ramenent ou facent reparer et ramener, et mettre sans delay au premier estat et deu, ainsi que, selon et en tel cas, est acoustumé et requis. Et afin, etc., nous avons, etc. Sauf, etc. Donné à Razillé près Chinon, le penultime jour d’avril l’an de grace mil cccc.xlvi, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, vous, les sires de la Varenne et de Precigny, Jehan de Bar

Jean de Bar, seigneur de Baugy, était général des finances en exercice l’an 1444 ; il conserva cette charge jusqu’au 4 octobre 1452, qu’il fut remplacé par Pierre Doriolle. Jean de Bar fut employé aussi dans plusieurs ambassades et négociations par Charles VII, durant cette période de son règne. (De Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. III-V, passim.)

et autres presens. Rolant. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MCXVI Mai 1446

Rémission octroyée à Jean de La Brunetière, écuyer. Obéissant à François de Montcatin, capitaine de la Roche-sur-Yon, il avait résisté de vive force à Guy d’Aussigny, qui venait prendre possession de cette ville au nom du roi.

AN JJ. 177, n° 208, fol. 138 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 352-355

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre chier et bien amé Jehan de la Brunetiere

Il s’agit de Jean de La Brunetière, écuyer, seigneur du Ponceau, fils aîné d’Olivier et de Marguerite de Mauges, qui appartenaient à une famille noble, originaire des confins de l’Anjou et du Poitou. (Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., t. II, p. 58.) On a vu la part de complicité de ce personnage dans l’incarcération et les mauvais traitements infligés par le capitaine de la Roche-sur-Yon à Geoffroy Le Ferron, trésorier de France, pour lui extorquer une grosse rançon (ci-dessus, p. 247, note). Il avait été ajourné d’abord à la cour d’Angers, le 9 décembre 1445, se présenta, fut incarcéré dans les prisons du chapitre, puis mis en liberté moyennant une caution de 500 livres tournois, que Jean de La Roche, écuyer, sr de la Menatière, et Robin Gauterin, écuyer, sr de la Porte, fournirent pour lui. (X2a 26, fol. 272 v°.) Le sr du Ponceau fut ensuite poursuivi au Parlement avec les autres complices et fit défaut. Son fils, Jean de La Brunetière, le jeune, fut aussi gravement compromis dans cette affaire ; après une longue procédure, ce dernier fut condamné par contumace au bannissement, à la confiscation et à une forte amende au profit de la victime. (Cf. la note 2 de la p. suivante.) Le sr du Ponceau, le père, mourut en 1448, bien avant la fin du procès. Dans la requête adressée par Le Ferron à la cour, le 29 mai 1449, afin que les poursuites fussent continuées contre la veuve et les héritiers du défunt (le Dict. des familles du Poitou le dit par erreur décédé sans alliance), on lit que Jean de La Brunetière, sr du Ponceau, ab anno citrà dies suos clausit extremos. (Arch. nat., X2a 26, fol. 17 v° et 33.) Un frère de celui ci, Guillaume de La Brunetière, était, en 1420 et 1421, écuyer de François comte de Montfort, depuis duc de Bretagne, et l’an 1424, il fut chargé par ce prince de la garde du château de Succinio près Vannes. (Dom Morice, Hist. de Bretagne, Preuves, t. II, col. 1065, 1085.) C’est ce qui explique l’intervention du duc pour faire obtenir au sr du Ponceau ces lettres de rémission. Plusieurs années après, le 12 mai 1469, on retrouve un Jean de La Brunetière prisonnier à la conciergerie du Palais à Paris, appelant d’une sentence du sénéchal de Poitou, qui l’avait condamné à 50 livres parisis d’amende envers le roi, à 50 livres parisis envers partie et à tenir prison, parce qu’il était convaincu d’avoir usé de contrainte contre un nommé Jean Champtefain, après l’avoir fait venir de force à « Orson », pour obtenir de lui un acte de renonciation à une rente de 240 écus et de seize charges de seigle. (X2a 35, à la date.)

, escuier, contenant que, ung an et demy a ou environ, quoy que soit, durant le temps que estions ès marches de Lorraine, nostre amé et feal chevalier, Guy d’Auxigny, seigneur de Treves, vint avec puissance de gens et à port d’armes devant la place et forteresse de la Roche sur Yon, où le dit de la Brunetiere estoit lors demourant, pour icelle place et forteresse assaillir, comme l’en disoit. A l’encontre duquel d’Auxigny François de Montcatin, capitaine de la dicte forteresse, fist une saillie, en la compaignie duquel de Montcatin estoit ledit de la Brunetiere, et à icelle saillie fut tué ung homme de la compaignie dudit d’Auxigny ; lequel de la Brunetiere ne le tua ne frappa, ne par lui morut, mais seulement fut en la compagnie dudit de Montcatin. A la quelle cause il doubte que, pour le temps avenir, on ne lui en donne, en corps ou en biens, aucun destourbier ou empeschement, et pour ce nous a fait requerir que, comme le temps passé il nous ait servy à l’encontre de noz ennemys, ou fait de noz guerres, à l’occasion desquelles il ait esté par plusieurs foiz prisonnier et mis par eulx à grosses et excessives raençons, aussi qu’il ne fut pas cause de la dicte saillie ne dudit meurdre, mais seulement estoit en la compaignie dudit de Montcatin

Aussitôt après qu’il eut recouvré sa liberté, Geoffroy Le Ferron déposa une plainte entre les mains du roi contre François de Montcatin et ses complices. La première mention du procès intenté à ceux-ci par Geoffroy et le procureur du roi en Parlement est un défaut adjugé à ceux-ci, le 14 décembre 1445, contre les coupables qui n’avaient pu être pris au corps et s’étaient gardés de comparaître à l’ajournement. (Arch. nat., X2a 24, à la date.) L’affaire fut évoquée au grand conseil, qui par arrêt condamna à mort le capitaine de la Roche-sur-Yon et son principal complice, Jacques Chabot, chargés d’ailleurs d’autres crimes. Ils furent exécutés vers la fin de mars 1446. (Cf. ci-dessus, p. 249, note.) Puis Jean de La Brunetière mourut en 1448, avant d’avoir obtenu l’entérinement de ses lettres de rémission. Les autres complices de François de Montcatin, renvoyés devant la cour de Parlement, étaient : Jean de La Brunetière, fils, Guillaume Chabot (celui-ci paraît avoir été mis hors de cause), Germain Chabot, qui, grâce à des lettres de rémission, fut l’objet d’une poursuite spéciale (opposition à l’enregistrement de ces lettres, ci-dessus, p. 321, note), Eustache Blanchet, prêtre, Jean Moreau, avocat fiscal du duc d’Anjou en la châtellenie de la Roche-sur-Yon, François Biette, Guillaume Levron, Alain de Coëtquen, Gervais Courtelance, Jean de Beauce, dit Gredin, Guillaume Bouchart, changeur à Angers, Olivier Hémonnet, Étienne Morin, Pierre Barateau, Baltazar Planque. Ajournés à plusieurs reprises devant la cour, ils firent constamment défaut (le 1er défaut adjugé au profit de Geoffroy Le Ferron est du 11 janvier 1448 n.s., et le dernier du 2 mars 1451 n.s.). Le Parlement ne rendit son arrêt définitif que le 18 mai 1453, portant condamnation de tous les contumaces solidairement à restituer à Geoffroy Le Ferron les biens qui lui avaient été pris, soit 1100 écus d’or, 24 marcs d’argent vermeil représentant le poids de douze tasses, plus 212 écus pour les autres objets précieux qu’il avait dû livrer pour sa rançon, à faire amende honorable au roi et au trésorier de France en la cour de Parlement et à la Roche-sur-Yon, en place publique et à jour de marché, en chemise, nu-tête et pieds nus, tenant chacun une torche de cire ardant, du poids d’une livre, en déclarant que faussement, mauvaisement et damnablement ils avaient commis et perpétré les excès, crimes et malefices énoncés. Jean de La Brunetière, le jeune, et Eustache Blanchet devaient payer chacun 300 livres d’amende à Le Ferron et autant au roi ; Guillaume Levron, Gervais Courtelance, Alain de Coëtquen, Olivier Hémonnet, Étienne Morin et Jean de Beauce, dit Gredin, chacun 200 livres à Geoffroy, et 200 au roi, et ils étaient tenus de rester en prison jusqu’au parfait payement desdites sommes. Les autres ne sont pas nommés. La cour condamnait en outre tous ces complices de François de Montcatin au bannissement perpétuel et à la confiscation de leurs biens, sur lesquels devaient être prélevées premièrement les amendes prononcées contre eux. (Arch. nat., X2a 26, fol. 272 r° à 280 v°.)

, comme dit est, et que en tous autres cas il a esté homme de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans jamais avoir esté actaint d’aucun vilain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise sur ce lui impartir nostre grace. Pour quoy nous, ces choses considerées et les bons services que nous a faiz en nos dictes guerres le dit de la Brunetiere, les grans peines et miseres qu’il a eues et soustenues ès dictes prisons, et les grans et excessives raençons que nos diz ennemis ont à ceste cause de lui exigées, ainsi qu’il nous a fait remonstrer, voulans pour ces causes et en faveur aussi de nostre très chier et très amé nepveu le duc de Bretaigne

François Ier comte de Montfort, né le 11 mai 1414, fils aîné de Jean V et de Jeanne de France, fille de Charles VI, avait succédé à son père comme duc de Bretagne, le 28 août 1442. Marié d’abord à Yolande, fille de Louis II, duc d’Anjou, roi de Sicile, et d’Yolande d’Aragon (morte en 1440), il épousa en secondes noces, le 30 octobre 1441, Isabelle Stuart, fille de Jacques Ier, roi d’Écosse, et mourut le 18 juillet 1450, ne laissant que deux filles, Marguerite, mariée le 16 novembre 1455 à François comte d’Étampes, puis duc de Bretagne, et Marie, femme de Jean II de Rohan.

, qui de ce nous a requis, misericorde preferer à rigueur de justice, à icellui de la Brunetiere, suppliant, avons ou dit cas quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces presentes aux seneschal de Poictou et bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d’Anjou et du Maine, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Razillé près Chinon, ou mois de may l’an de grace mil cccc. xlvi, et de nostre regne le xxiiiime.

Ainsi signé : Par le roy, monseigneur le daulphin, monseigneur le duc de Bretaigne, vous, les sires de la Varenne, de Pressigny, de Blanville et plusieurs autres presens. Giraudeau. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MCXVII Mai 1446

Rémission en faveur d’Emery Arrignon, dit l’Espinaye, écuyer, qui, trente-deux ans auparavant, s’était rendu complice d’un enlèvement fait à Saint-Maixent par Alexandre de Torsay, capitaine de Pamproux

L’enlèvement rapporté ici remontait à l’an 1412, pendant l’expédition dirigée par les sires d’Heilly et de Parthenay, lieutenants du duc de Bourgogne, pour soustraire le Poitou à l’obéissance de Jean duc de Berry. Aimery Arignon, qui était âgé de dix-huit ans alors, en avait donc plus de cinquante en 1446. Le Dict. des familles du Poitou (nouv. édit., t. II, p. 103, 104), qui ne cite point d’autre source que la présente rémission, suppose que ce personnage était le fils d’un premier mariage de Jean Arignon, sr de l’Espinaye, qui épousa, en 1428, Marie d’Argenton, veuve de Jean de Torsay, sénéchal de Poitou. (Cf. notre précédent vol., p. 370 n., 371 n.) Étant donné ces dates certaines, il semble plus admissible de considérer Aimery comme le frère cadet que comme le fils de Jean. Le mariage de ce dernier avec Marie d’Argenton lui causa bien des ennuis. Dans des poursuites criminelles qu’il dut exercer contre André de Beaumont et Jeanne de Torsay, sa femme, l’avocat d’Arignon déclare que son client « est notable escuier, extrait de grant et notable chevalerie, a bien servy le roy en ses guerres et a esté prisonnier bien huict ans en Angleterre ». Il avait été au service de Jean de Torsay, et son adversaire prétendait que, du vivant de celui-ci, il avait eu des relations avec sa femme. Beaumont accusait d’ailleurs Marie d’Argenton d’inconduite notoire et offrait de donner la liste de ses nombreux amants. Pendant le siège de Parthenay, ajoutait-il, elle avait offert à Gilles d’Appelvoisin de lui livrer son mari, pour qu’il le fit mettre à mort. D’autre part, suivant Arignon, Beaumont, après le décès de Jean de Torsay, était entré de force avec ses gens d’armes dans le château de la Mothe-Saint-Heraye, s’était emparé de sa belle-mère et l’avait tenue enfermée, pendant huit jours, dans une chambre dont il avait fait murer l’entrée. Il l’avait dépouillée de ses bijoux et de son argent, et l’avait contrainte par la menace à lui faire une donation de tous ses biens. Le roi, informé de ces violences, avait envoyé à la Mothe, pour les faire cesser, les srs de Mortemart, de Gaucourt et de Bazoges ; mais l’accès de la place leur avait été interdit. Puis Beaumont l’avait fait venir, lui Arignon, l’avait constitué prisonnier, lui avait imposé le mariage avec sa belle-mère et lui avait extorqué une ratification de l’abandon de toute sa fortune. Le défendeur répliquait que le contrat avait été négocié par Méry de Magné, qui en avait eu 1100 écus, disant qu’il fallait marier Marie d’Argenton « où elle ardoit », etc. Ces plaidoiries, très curieuses, sont beaucoup trop développées pour qu’on puisse les analyser jusqu’au bout. (Voy. Arch. nat., X2a 18, fol. 201, 207 v°, 208, 239, aux 8, 15 et 22 mai 1430 ; X2a 20, fol. 30 v° ; X2a 21, fol. 145.) On sait comment, un an après à peine, André de Beaumont mourut décapité. Le nouveau mari de Jeanne de Torsay, Jean de Rochechouart, sr de Mortemart, transigea avec Jean Arignon et Marie d’Argenton. L’accord conclu à la Mothe-Saint-Héraye, le 22 février 1432 n.s., et entériné au Parlement le 1er avril suivant, nous a été conservé. Entre autres conventions, il ratifie un contrat de donation entre-vifs de l’hôtel, terre et seigneurie de Tillou avec l’hôtel du Jouc, passé par Marie au profit de son époux, à condition que celui-ci et ses descendants tiendront ces fiefs du seigneur de Gascougnolles et lui en devront l’hommage. (X1c 143, au 1er avril 1432.) Jean Arignon se qualifie dans cet acte « escuyer, seigneur de l’Espinée, de Heriçon et de Gascoignolles ». Il vendit la terre de Tillou à Jean de La Roche, sr de Barbezieux, sénéchal de Poitou, par acte du 22 août 1437. Le sr de l’Espinaye et sa femme, ainsi que le sr de Mortemart et Jeanne de Torsay, furent poursuivis encore par Jean de Martreuil, exécuteur du testament d’Itier de Martreuil, évêque de Poitiers, en restitution d’une somme de 3000 livres que l’évêque avait autrefois prêtée à Jean d’Argenton, sr d’Hérisson, et à Charlotte de Melle, père et mère de Marie d’Argenton. (Plaidoirie du 6 avril 1434, X1a 9200, fol. 219 v°.)

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AN JJ. 177, n° 219, fol. 145 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 356-361

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Emery Arrignon, dit l’Espinaye, escuier, demourant à Ardilleres en la chastellenie de Surgeres ou païs de Xanctonge, chargié de femme et petiz enfans, contenant que, xxxiii. ans a ou environ, ledit Emery, lors estant en l’aage de xviii. ans ou environ et demourant avecques feu frere Jehan de Torçay, pour le temps abbé de Moustier Neuf de Poictiers

La Gallia christiana dit qu’Aimery de Courcy gouvernait encore l’abbaye de Montierneuf en 1409 et que son successeur, Jean de Torsay, est mentionné pour la première fois dans une charte de l’église de Saint-Hilaire de Poitiers, de l’année 1413. Il est cité encore comme abbé dans des actes de 1416 et de 1424, mourut en fonctions le 1er ou le 10 août 1439 et fut inhumé le lendemain devant le grand autel, du côté gauche. Il avait fait édifier une salle neuve près l’enclos de vignes de l’abbaye. (Tome II, col. 1270.) On voit ici que Jean de Torsay était frère d’Alexandre. Comme lui, sans doute, il était enfant naturel.

, lequel il servoit, icellui de Torçay, abbé dessus dit, lui commanda comme à son serviteur qu’il alast avec et en la compaignie de Alixandre de Torçay

Alexandre bâtard de Torsay, écuyer, était le 14 décembre 1418 au siège devant Tours, témoin une quittance de gages scellée de son sceau, pour services de guerre contre les Anglais. (Bibl. nat., coll. Clairambault, t. 106, p. 8291.) Suivant le P. Anselme, il était fils de Guillaume de Torsay, chevalier (père du maître des arbalétriers) et d’une nommée Pernelle Portier, et aurait été légitimé en 1433. C’est possible. Toutefois il ne faut pas oublier combien est inexact et insuffisant le fragment de généalogie de la famille de Torsay que donne cet auteur (Hist. généal., t. VIII, p. 71). Nous avons montré qu’Alexandre pouvait aussi bien être un fils naturel du sénéchal, qui eut des relations illégitimes avec Marguerite de Ventadour. (Cf. notre vol. précédent, p. 247, note, 371, note.) D’autre part, l’hébergement de Vix, clos de murs, mouvant de Saint-Maixent, appartenant à Jean de Torsay, sr de la Mothe-Saint-Héraye, qui en fit aveu le 21 janvier 1410 n.s. (Arch. nat., R1* 2172, fol. 805), était, en août 1418, la propriété d’Alexandre bâtard de Torsay. (P. 1144, fol. 38 v°.) Il semble que ce dernier vivait encore en mai 1446, puisque son nom n’est point ici, comme celui de son frère, précédé du mot « feu ».

, son frere, et qu’il fist ce qu’il lui ordonneroit ou commanderoit. Lequel Emery, en obeissant audit abbé, son maistre, s’en partit du dit lieu de Poictiers, en la compaignie d’icellui Alixandre et de plusieurs autres, et d’ilec alerent au lieu de Pamprou, duquel estoit capitaine ledit Alixandre, et landemain ou certain jour après, dont n’est recors ledit Emery, icellui Emery, Alixandre et autres, jusques au nombre de douze, se partirent du lieu de Pamprou et alerent en la ville de Saint Maixant, et illec se logierent en une hostellerie. Et estoient ledit Alixandre et ung autre, armez de haubregons, pour ce que c’estoit lors temps de guerre, et de leurs espées, et ledit Emery avoit son espée seinte seulement, et estoit environ l’eure d’entre prime et tierce. Et incontinant ou peu après qu’ilz furent logiez, ledit Alixandre ala faire sa barbe à l’ostel d’un barbier, lequel demouroit devant l’ostel de feue Jehanne Mangnée, lors veufve de feu maistre Guillaume Andraut

Jeanne Maigné, paya, le 18 septembre 1418, à Pierre Morelon, receveur du comte de Poitou, 15 sous de devoir pour son fief de Gentray. (Arch. nat., P. 1144, fol. 41.)

Elle fonda, le 19 novembre 1437, une chapellenie de Notre-Dame desservie dans le grand cimetière de Saint-Maixent ; sa fille Jeanne épousa Étienne Gillier, auquel elle apporta la seigneurie de la Villedieu.

, et dist au barbier que ledit feu maistre Guillaume avoit esté du conseil de son pere, qu’il lui avoit baillé certaines lettres, lesquelles il estoit venu querir, et lui demanda comment il les pourroit recouvrer. Lequel barbier lui respondit que son clerc estoit oudit hostel, duquel il recouvreroit bien ses dictes lettres ; et de fait ledit barbier envoya par deux foiz sa femme ou dit hostel, lequel estoit fermé et ne parla à aucune personne. Et ne savoit lors ledit Emery que vouloit faire ledit Alixandre, ne quelle entencion il avoit. En faisant la barbe duquel, arriverent illec ung nommé Macé et ung autre, dont n’est recors le dit suppliant du nom. Et après que ledit Alixandre eut fait sa dicte barbe, print une petite eschelle qu’il trouva en l’ouvrouer dudit barbier et la porta, ou fist porter audit Macé, contre le mur dudit hostel de ladicte vefve, en droit d’une fenestre, laquelle estoit ouverte, et commanda audit Emery que montast pour entrer dedans parmy ladicte fenestre. Lequel monta, cuidant que ce feust pour parler audit clerc et recouvrer les dictes lettres, et y entra ; et quant il fut par dedans, incontinant, ladicte vefve survint illec et lui demanda qu’il queroit leans, et qu’elle estoit femme vefve. Et le dit Emery respondit qu’il y avoit ung gentilhomme, lequel demandoit le clerc de leans, et vouloit parler à lui, pour recouvrer des lettres. En disant lesquelles parolles, ledit Alixandre après entra parmy la dicte fenestre, et print la dicte femme parmy le braz et la mena embas à la porte de l’entrée dudit hostel ; laquelle elle ouvry ou fist ouvrir, et ne se recorde le dit Emery quelles paroles disoit le dit Alixandre à la dicte vefve, car il ne savoit à quelle fin ledit Alixandre la menoit ne que il vouloit, et croyoit qu’il ne deust demander que lesdictes lettres et ledit clerc pour les recouvrer. Et incontinant que la dicte porte feust ouverte, ilz trouverent les chevaulx prestz devant ledit hostel, duquel ledit Alixandre mist dehors ladicte veufve, laquelle disoit plusieurs paroles, desquelles ledit Emery ne se recorde, pour ce qu’il a si long temps qu’il ne l’a peu avoir à memoire. Et tantost ledit Alixandre et ledit Macé prindrent ladicte veufve et la misdrent à cheval, par devant ung nommé Jehan de la Roche

Il ne s’agit point évidemment de Jean de La Roche, sr de Barbezieux, qui devint sénéchal de Poitou. Dans un aveu du 11 novembre 1403, rendu pour « la Roche-Malemonde », mouvant de Saint-Maixent, par Pierre Renard, à cause de sa femme, Jeanne de La Roche, il est question d’un Jean de La Roche vivant alors. (R1*, 2172, p. 755.) Mais il y avait dans la région d’autres personnages de ce nom : Jean de la Roche, fils de Bertrand et de Huguette de Vivonne (X1a 9190, fol. 299) ; un autre, seigneur de la Roche près Mouilleron (P. 1145, fol. 439 v°) ; un autre, paroissien de Lusseray (Arch. du château de la Barre, t. II, p. 279), etc.

, lequel ne la tint gueres fort, et assez tost elle cheu à terre dudit cheval. Et ce fait, incontinant ledit Alixandre leur dist : « A cheval, à cheval ! » Après lesquelles paroles dictes, monterent tous à cheval hors de leurs hostelz, embastonnez. Ledit Alixandre et ceulx de sa compaignie tirerent leurs espées en leurs mains, et s’en alerent envers la porte de la dicte ville, au dehors d’icelle ; et y avoit paravant aucuns de la dicte compaignie, afin de garder que l’en ne fermast les portes de la dicte ville. Qui ilz estoient ledit suppliant ne se recorde. Mais ne trouverent aucun empeschement à eulx en aler, et saillirent dehors, et s’en retournerent d’ilec audit lieu de Pamprou. De laquelle chose, ainsi que ledit suppliant a depuis oy dire, ledit Alixandre obtint grace pour tous

Nous n’avons point trouvé ces lettres de rémission octroyées à Alexandre de Torsay et à ses complices.

, qui fut veriffiée à Poictiers, et croit qu’il fut present, mais proprement n’est de ce pas bien recors, pour ce qu’il a si long temps et qu’il estoit jeune, comme dit est. A l’occasion duquel cas, ledit suppliant qui lors estoit jeune, et ne savoit riens d’icellui, et n’en fut oncques content, mais très desplaisant, doubte que, non obstant ladicte grace ainsi prinse par ledit Alixandre, pour lui et tous les autres, qui a esté veriffiée au dit Poictiers, que pour le temps avenir justice lui feust rigoureuse, et que à ceste cause on lui voulsist mettre ou donner aucun empeschement en corps ou en biens, si nostre grace ne lui estoit sur ce impartie, si comme il dit, en nous humblement requerant que, attendu qu’il a tousjours, et devant et depuis, esté homme de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans oncques mais avoir esté actaint ou convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, il nous plaise icelle nostre grace piteablement lui eslargir. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant ou cas dessus dit avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois de may l’an de grace mil cccc. xlvi, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Bochetel. — Visa. Contentor. Charlet.

MCXVIII Mai 1446

Rémission octroyée à Etienne Lévêque, pour un meurtre accompli, à la suite d’une querelle, sur la personne de Jean Dujardin qui voulait lui interdire l’accès et le déposséder d’un bois, dont ils étaient co-propriétaires, à Saint-Georges-lès-Baillargeaux.

AN JJ. 177, n° 226, fol. 149 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 361-364

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Estienne Levesque, povre homme de labour, aagé d’environ trente ans, chargié de femme et de trois petiz enfans, contenant que, à cause de sa femme lui compette et appartient la quarte partie d’une piece de bois situé et assis en la terre du prevost de Saint George, et à ung nommé Jehan Badaaon, frere de sa dicte femme, une autre quarte partie. Ce non obstant, puis nagueres, il a entendu que ung nommé Jacques Lejay, demourant audit lieu de Saint George, jasoit ce qu’il n’eust en icellui bois que la moictié, avoit icellui tout vendu à ung nommé Jehan Dujardin, et que icellui Dujardin l’avoit entierement fait coupper et avoit entencion de le faire mener en son hostel. A ung jour de mardi xviime jour de ce present mois de may, et pour pourveoir à ce, veans que en ce faisant on leur faisoit tort, et que lui et le frere de sa dicte femme pourroient perdre la part de leur dit bois et le bon droit qu’ilz y pretendoient avoir, avecques ce qu’ilz seroient desappoinctez de leur possession, s’il le souffroyent, conclurrent et proposerent entre eulx de aler audit jour de mardi, avec leurs beufz et charettes audit bois, pour en avoir leur part. Et de fait, pour entretenir leur dicte possession, en alerent querir et en admenerent deux charrettées, et pour en avoir plus largement y alerent à tout deux charettes de rechief, et en leur compaignie ung nommé Denis Espiart, avec ung jeune enfant, aagé de xiiii. à xv. ans. Lesquelz trouverent ledit Dujardin à l’entrée dudit bois, qui leur demanda où ilz aloient. A quoy ilz respondirent que la moictié dudit bois leur appartenoit, c’est assavoir audit suppliant et audit Badaon, frere de sa dicte femme, à chascun d’eulx une quarte partie, et que ilz le vouloient emmener en leurs maisons. Lors icellui Dujardin leur dist qu’ilz n’entreroient point audit bois, et de fait se efforça de perturber et empeschier les beufz attelez ausdictes charettes de y entrer, d’une coignée qu’il tenoit en sa main ; mais non obstant lequel empeschement, ledit suppliant et autres dessus diz toucherent leurs diz beufs et entrerent en icellui bois. Laquelle chose veant, ledit Dujardin, saichant que certain nombre de bouviers et charretiers venoient pour mener pour lui ledit bois, tira au devant d’eulx et dist à l’un d’eulx qu’il alast querir des sergens dudit lieu de Saint George, pour empeschier iceulx suppliant, ledit frere de sa dicte femme et autres dessus diz, afin qu’ilz n’emmenassent d’icellui bois. Et ce fait, retourna audit bois, une coignée en sa main, et trouva que iceulx suppliant, ledit frere de sa dicte femme et autres dessus diz chargoient d’icellui bois en l’une de leurs charrettes, dedans laquelle estoit ledit Denis Lespiat (sic), et au bas estoient iceulx suppliant et Badaon. Et afin qu’ilz n’emmenassent point, quant les perches dudit bois estoient en ladicte charette, icellui Dujardin les tiroit à terre le plus qu’il povoit, et de fait les y eust toutes mises, se ne feust ce que le dit Espiart les contretenoit à l’encontre de lui. Et qui plus est, pour ce que ledit Dujardin ne povoit gecter à terre tout ledit bois estant desjà chargié en ladicte charrette, vint ou lieu où estoient iceulx suppliant et Badaon, qui prenoient les dictes perches de bois, l’un par ung bot, l’autre par ung autre, pour les chargier, et se mettoit au travers ou milieu le ventre dessoubz, afin qu’ilz ne meisssent les dictes perches en ladicte charrette, et telement se y tenoit que iceulx suppliant et Badaon l’enlevoient bien hault, et tousjours cryoit tant qu’il povoit à haulte voix : « Au meurdre ! » jassoit ce qu’ilz ne le touchassent. Pour lequel empeschement que faisoit le dit Dujardin aux dessus diz, ilz delaisserent à chargier la dicte charrette, pour en chargier une autre qui n’estoit pas loing d’ilec, où ilz mirent des dictes perches ; et pendant ce qu’ilz les y mettoient, icellui Dujardin, veant qu’ilz avoient laissé à chargier la premiere charrette, monta dedans icelle et en getta jus une partie des perches et bois qui y estoient, et après ce en descendit et s’advisa qu’il y avoit ung instrument nommé crochere

Fr. Godefroy définit ce mot : instrument en forme de croc, puis, citant précisément ce passage des présentes lettres, il lui donne dans ce cas particulier le sens de « joug ». (Dict. de l’anc. langue française.)

, sans lequel les beufz estans à ladicte charrette ne pourroient charroier, lequel il print et icellui mist sus une piece de bois, et se mist d’un genoil à terre pour la copper de sa coignée, qu’il tenoit en sa main. Laquelle chose veant, le dit suppliant, indigné et courroucié de l’empeschement que leur faisoit ledit Dujardin sans cause, afin qu’il ne coppast ladicte crochere, se approcha hastivement près de lui, sans avoir voulenté de lui mal faire, et en y venant, trouva ung baston en son chemin, lequel il print et en cuida bailler par les espaules audit Dujardin, qui coppoit ladicte crochere ; mais icellui Dujardin se baissa pour fouyr ledit cop et fut actaint parmy la teste d’un coup seulement, par le moyen duquel il ala, la nuit ensuivant, de vie à trespassement. A l’occasion duquel cas, icellui suppliant, lequel est chargié, comme dit est, de femme et de trois petis enfans, et a esté et est tout son temps homme paisible, de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans oncques avoir esté actaint ne convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, ne avoir esté rioteux ou noiseux à personne quelconque, mais vivant bien et doulcement de son labour, n’oseroit jamais bonnement ne seurement demourer ne converser ou païs, ainçoiz l’en convendra piteusement aler mendier sa vie, et aussi à ses dicte femme et enfans, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, si comme il dit, humblement requerant icelles. Pour ce est il que nous, voulans en ceste partie misericorde estre preferée à rigueur de justice, audit suppliant avons oudit cas quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes aux seneschaulx de Poictou et de Xanctonge, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois de may l’an de grace mil cccc. xlvi, et de nostre regne le xxiiiime.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion de conseil. Rippe. — Visa. Contentor. E. Duban.

MCXIX Juin 1446

Lettres d’abolition octroyées à Guy de La Roche, écuyer, Pierre de Saint-Gelais, chevalier, Olivier et Jacques Perceval, Christophe Pot, Jacques Levraut, Guillaume Béjarry, et plusieurs autres qui avaient occupé Niort contre le roi, pendant la rébellion des princes, et depuis avaient persisté dans leur résistance et s’étaient rendus coupables de plusieurs crimes.

AN JJ. 178, n° 95, fol. 62 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 364-379

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receue l’umble supplicacion de noz chiers et bien amez Guy de la Roche

Guy de La Roche, ou mieux de La Rochefoucauld, frère de Jean, sénéchal de Poitou, était fils de Guy, seigneur de Barbezieux et de Verteuil (vivant de 1378 à 1432), et de sa troisième femme, Jeanne de Rougemont, veuve en premières noces de Guillaume Sanglier, sr de Bizay. (Cf. Arch. nat., X1a 9191, fol. 32 v°.) Son frère, qu’il avait trop fidèlement suivi, lui légua par son testament Faye et Montendre. A la suite des événements rappelés dans ces lettres d’abolition, après que, jugeant une plus longue résistance impossible, il eut été réduit à faire sa soumission définitive, Guy de La Roche servit sous le dauphin Louis, dans son expédition contre les Suisses. Après la bataille de Saint-Jacques (26 août 1444), il prit ses quartiers d’hiver à Ensisheim en Alsace, où il commandait à mille chevaux. (A. Tuetey, Les Écorcheurs sous Charles VII, t. I, p. 292.) Plus tard, il fit partie de l’armée qui reconquit la Guyenne et assista à la bataille de Castillon (7 juillet 1453) ; il en envoya même une relation à Angoulême, dont il était toujours sénéchal, relation reproduite en partie dans une lettre sans nom d’auteur qui a été publiée dans la Bibl. de l’École des Chartes, 2e série, t. III, p. 246. (Voir aussi Dessalles, Hist. de Périgord, t. II, p. 456.)

, escuier, seneschal d’Angolesme, Pierre de Saint Gellays, chevalier

Pierre de Saint-Gelais, chef de la branche de Montlieu, cinquième fils de Charles IV, seigneur de Saint-Gelais, et d’Yolande Bouchard, partagea avec ses frères la succession paternelle le 14 mars 1435. L’on a vu que dès 1431 il faisait partie de la compagnie de Jean de La Roche et fut compris dans les lettres de rémission octroyées à son chef à cette époque (ci-dessus, p. 13). Il le suivit encore dans la rébellion de la Praguerie, se compromit avec Jacques de Pons (ci-dessus, p. 334) et prit part à tous les excès rappelés dans les présentes lettres. Après cette jeunesse orageuse, il devint conseiller de Charles duc d’Orléans, qui le nomma son chambellan ordinaire et le créa chevalier de l’ordre du Porc-Épic. A la mort de ce prince, il s’attacha à Jean, comte d’Angoulême, son frère, dans le testament duquel son nom est mentionné. Pierre de Saint-Gelais épousa Philiberte de Fontenay, dont il eut cinq fils, tous célèbres à divers titres. Il eut de plus un fils naturel, Mellin de Saint-Gelais, le poète bien connu. Pierre testa en 1470. (Dict. des familles du Poitou, 1re édit., t. II, p. 331.)

, Olivier Perceval, Jaques Perseval

Olivier et Jacques Perceval étaient, suivant toute apparence, parents de Guillaume Perceval dont il est question ci-dessus, p. 253, note.

, Christofle Pot

Christophe Pot n’est point nommé dans la généalogie de cette maison donnée par La Thaumassière, dans son Histoire du Berry, in-fol., p. 632 et suiv.

, Jehan Saubert, Fouquet de Nantueil, Jehannot Guy

Plusieurs membres de cette famille ont été cités dans nos précédents volumes. Un Pierre Guy est qualifié capitaine de Mauprevoir dans un acte du 3 février 1445 n.s. (Coll. dom Fonteneau, t. IV, p. 483.)

, Jehan Reculat, Jehan de Sonneville, Perrinet Du Bois

Perrinet Du Bois est nommé parmi les hommes d’armes de la compagnie de Jean de La Roche, dans les lettres de rémission de 1431 (ci-dessus, p. 14). On trouve un Pierre Du Boys compris dans les poursuites intentées, en 1456, par Pierre de Mourry, sous-doyen de Saint-Hilaire-le-Grand de Poitiers, contre André et Jean de Conzay, frères, Michel et Maurice Claveurier, frères, Pierre Petit, André Havet et Hervé Prévost, qu’il accusait d’avoir pénétré de nuit par escalade dans son hôtel. (X2a 28, aux dates des 15 et 29 novembre, 2 et 9 décembre 1456, 5 décembre 1458.)

, Petit Andrieu, Jaques Levraut

Jacques Levraut appartenait sans doute à la famille de Pierre Levraut, écuyer, établie dans la Gâtine, dont il a été question dans notre précédent volume (cf. entre autres, p. 129, note). Ce Pierre était père de six enfants tout jeunes en novembre 1408. (Id., p. 161.)

, Guillaume Bejarry

Ce personnage paraît devoir être identifié avec Guillaume Béjarry, écuyer, sr de la Louerie, qui épousa, d’après MM. Beauchet-Filleau, le 11 février 1448, Marie Grignon, fille d’André, écuyer, sr de la Grignonnière. (Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., t. I, p. 411.) Il était fils, ou plutôt frère de Maurice Béjarry, écuyer, fils de feu Jean, qui le 4 août 1436 était en procès contre Pierre Béjarry, fils de feu Guillaume, touchant la possession du tiers par indivis des biens de Pierre Travers et du quart de ceux de Catherine des Noues. (Arrêt de cette date, X1a 9193, fol. 156.) Cette dernière avait épousé en premières noces Michel Béjarry, grand-père de Pierre, et elle eut d’un second lit Jeanne Ouvrard, mariée à Guillaume Béjarry, grand-père de Maurice.

, Jaquet de Noeszé, contenant que lesdiz supplians nous ont longuement servy ou fait de noz guerres, et les aucuns dès leur jeune aage, à l’encontre de noz anciens ennemis et adversaires les Anglois, tant en la compaignie de feu Jehan de la Roche, en son vivant nostre seneschal de Poictou, que depuis son decès, en plusieurs lieux et voiages, c’est assavoir ledit Guiot à grant compaignie de gens d’armes et de trait, lesquelz ont longuement vescu sur les champs, en noz païs de Poictou, Xanctonge, Lymosin et Angoumois, Berry et autres païs. Pendant lequel temps qu’ilz ont tenu les champs et autrement, ilz ont fait, commis et perpetrez plusieurs courses, destrousses, raençonnemens, pilleries, roberies, meurdres, forcé femmes, bouté feux et fait et commis plusieurs autres maulx et crimes ; à l’occasion desquelz nous octroyasmes l’an iiiic xxxi. ou environ

Le 9 avril 1431, ci-dessus, p. 8-20.

, noz lettres d’abolicion ausdiz Jehan de la Roche, de Saint Gellays et Percevaulx, et plusieurs autres nommez ès dictes lettres d’abolicion, qui de tous lesdiz crimes et autres declairez plus à plain ès dictes lettres d’abolicion [furent absolz]. Et depuis, pour ce que les gens dudit feu Jehan de la Roche avoient couru et fait plusieurs pilleries, roberies et destrousses, crimes et deliz, et aussi que lesdiz Jehan et Guy de la Roche, de Saint Gellays, Percevaulx et autres avoient esté en garnison en la ville de Nyort, en laquelle ilz avoient tenu plusieurs gens de guerre, qui avoient prins plusieurs places sur noz gens, desquelles ilz avoient fait guerre à nous, noz païs et subgiez, et faiz plusieurs autres maulx et dommaiges, lesdiz feu Jehan de la Roche, Guy, son frere, de Saint Gellays, les Percevaulx et autres, le xiiiime jour de septembre l’an mil cccc. quarante

Le texte de ces premières lettres d’abolition, qui devaient contenir des renseignements précieux sur les agissements du sénéchal de Poitou, de son frère et de leurs principaux complices, pendant la Praguerie, n’a malheureusement pas été conservé.

, obtindrent de nous noz autres lettres d’abolicion. Après l’octroy et expedicion desquelles lesdiz Guy de la Roche, Pierre de Saint Gellays, Brunet de Saint Cire

Voy. ci-dessous, p. 373, note 2.

, Olivier et Jaques Percevaulx, Jehan Raymond

Cf. la notice consacrée à Jean Raymond, ci-dessus, p. 328.

, Perret de la Guirande

Ce personnage faisait aussi partie de la compagnie de Jean de La Roche en 1431 (ci-dessus p. 12).

, Alixandre Morton et autres estans avec ledit de la Roche, par le moyen des places qu’ilz tenoient en noz païs de Poictou, Xanctonge, Lymosin et Angolmois en desobeissance envers nous, eussent esté par nous banniz de nostre royaume, ensemble leurs complices, et eussions prinses et mises en nostre main plusieurs places qu’ilz y tenoient

Par lettres données à Niort le 24 janvier 1442 n.s., qui se trouvent reproduites dans un arrêt du Parlement en faveur de Prégent de Coëtivy contre Maurice de Pluscalec. (Arch. nat., X2a 23, fol. 259.) Elles visaient nommément le sire de Pons, Guyot de La Roche, Maurice de Pluscalec, Bricet de Saint-Cyre, chevaliers, Pierre de Saint-Gelais, Jean Raymond, Olivier et Jacques Perceval, frères, et Pierre Béchet. Les crimes qui leur étaient reprochés y sont ainsi spécifiés : « Ils ont, dès longtemps a, contre plusieurs inhibicions et defenses à eulx faictes de par nous, assemblé gens d’armes et de trait et autres gens de guerre en grant nombre, et les ont mis et esleuz en armes en grant compaignie, et se sont mis sur les champs en noz païs de Poictou et de Xanctonge et païs voisins, contre noz voluntez et ordonnance, et ont prins et assailly forteresses et icelles pillées et robées, prins et rançonné noz subgetz, leur bestail et autres biens, ars et brulé, abatu et demoly maisons et edifices, appatissé villes, forteresses et villaiges, pillé et desrobé eglises, ravy et violé femmes, murtry et occis plusieurs personnes, guecté les chemins jour et nuyt, et desrobé et destroussé les passans, et fait plusieurs autres grans maulx, oppressions et inconveniens à noz subgetz, en faisant guerre à nos diz païs et subgetz, et tous aultres maulx que ennemis ont acoustumé de faire, comme ce est tout notoire et publique, combien que autres foiz leur aions, ou à plusieurs d’iceulx, donné grace et remission ou abolicion de semblables cas, crismes et autres par eulx jà pieça commis et perpetrez…, nonobstant ce en venant contre leur promesse…, ilz ont perseveré et continué èsdiz malefices et tirannies de plus en plus… Pour ce avons dit et declairé, disons et declairons par ces presentes les diz sire de Pons, Guiot de La Roche et les autres dessus diz et chascun d’eulx et leurs diz gens, alliez et complices, fauteurs et adherans, estre depopulateurs et crimineulx de crime de lese magesté envers nous et la chose publique de nostre royaume, et telz les declairons par ces presentes et les bannissons à jamais de nostre royaume, et declairons tous et chascuns leurs biens et de chascun d’eulx, tant meubles que immeubles, chasteaulx, villes, forteresses, terres, seigneuries, possessions et autres biens quelzconques estre confisquez et appartenir à nous, reservé que, s’ilz ou aucuns d’eulx se retornent devers nous dedans dix jours après la publication de ces presentes, en nous requerans misericorde et pardon, nous, voulans tousjours misericorde preferer à rigueur de justice, les recevrons à grace et merci, etc., etc. » Ces lettres très longues ont été publiées in extenso par M. Tuetey. (Les Écorcheurs sous Charles VII, t. I, p. 127 note). Charles VII annonçait en même temps qu’il réunissait une armée pour punir ces malfaiteurs, en purger le pays, assaillir et prendre leurs places et forteresses, et mandait à ses officiers et vassaux de Poitou et de Saintonge de se joindre à lui pour cette expédition. En effet, le délai écoulé, le roi voulant donner une prompte sanction à sa déclaration, s’avança jusqu’à Saint-Jean-d’Angély et Saintes. A l’approche de l’armée royale, le sire de Pons demanda à faire sa soumission et rendit les places qu’il occupait. « Après ce fait, le roy envoya une partie de son ost devant Taillebourg, et entrerent les gens du roy dedans la ville par force. Et là fu pris le capitaine de lad. ville, nommé Morice de Pruscalec, qui fu mené en la ville de la Rochelle, et furent decapitez ou pendus ses gens, qui furent pris par force en lad. ville, pour les maux innombrables qu’ilz avoient faiz. Le roy mit gens de par luy en lad. ville pour sa garde et la seureté du païs, puis il… vint à Ruffec (où il passa les fêtes de Pâques, 1er avril 1442) et fit mettre le siege devant le chasteau de Vertueil, qui est sur la riviere de Charente, que tenoit pour Guiot de La Roche ung gentilhomme du pays ; et avoit mis le dit Guiot deux cens hommes de guerre dedans led. chasteau, lesquelz tinrent contre le roy et sa volonté ; mais tantost ilz furent si approchez de fossez, de bombardes et d’engins volans, qu’ilz se rendirent au roy, sous cette condition qu’ilz ne se devoient jamais armer contre luy ny sa seigneurie. Et pour le roy avoient la charge de lad. besongne, mons. Prégent de Coëtivy, amiral de France, mre Philippe de Culant, mareschal, et mre Pierre de Brezé, seneschal de Poitou. Et après la reduction de lad. place, par l’ordre du roy, elle fut aussitôt abbatue et demolie. » (Le héraut Berry, Chronique de Charles VII, édit. Godefroy, in-fol., p. 417, 418.) C’est le château de Verteuil qui fut alors détruit et rasé. Quatre ans plus tard, Guy de La Roche, sous prétexte que les habitants du pays n’avaient plus où se refugier en cas de péril et en temps de guerre, commença à fortifier le pont de la ville construit sur la Charente, puis demanda au roi et obtint par lettres données à Maillé en Touraine, novembre 1446, l’autorisation de compléter les travaux de défense de cette nouvelle forteresse ; il lui fut permis de faire une double enceinte au bout du pont, d’y élever un mur et des tours, devant lesquels devait être creusé un fossé avec pont-levis, porte, etc. Guy est qualifié dans cet acte de seigneur en partie de Verteuil-sur-Charente et d’écuyer d’écurie du roi. (JJ. 178, n° 67, fol. 42 v°.)

 ; lesquelz se retrahirent en la ville d’Angolesme, en laquelle ilz s’estoient tenuz et tindrent par aucun temps à l’encontre de nous, et à nostre très grant desplaisance, en faisant d’icelle ville et d’autres places qu’ilz tenoient destrousses, courses, pilleries, roberies, raençonnemens et prises sur noz subgiez, comme sur noz ennemys, meurdres et boutemens de feux et autres maulx et crimes innumerables, tant par eulx que par leurs gens, sur noz païs et subgiez, et mesmement firent certaine destrousse sur aucuns de noz gens estans soubz le bastard de Culant

Sur les généalogies imprimées de la maison de Culant, on ne trouve qu’un bâtard avec lequel ce personnage puisse être identifié. C’est Pierre, fils naturel de Guichard de Culant et de Jeanne de Salignac, et par conséquent frère de Louis, amiral de France. « Il servait à la garde du corps du roi avec certain nombre de gens d’armes et de trait en 1423 et sous le seigneur de Quitry à Mehun, le 15 février 1427 n.s. » (Le P. Anselme, t. VII, p. 81 ; La Chenaye-Desbois, v° Culant.) M. Tuetey a publié des lettres de Charles VII du 15 septembre 1438, mandant à Poton de Saintrailles, Gautier de Brusac, le bâtard de Culant et plusieurs autres, qui « depuis un an ença s’estoient transportés en Bourgogne, où ilz faisoient maulx et dommages irreparables », de cesser leurs excès et oppressions. (Les Écorcheurs, t. I, p. 39, 40.)

et autres, et en avoient plusieurs esté penduz, nayez, mors et mutilez, tant d’un costé que d’autre ; et s’estoit [ledit] de la Roche servy et aidé, ès choses dessus dictes, d’aucuns Anglois estans en la frontiere de Guienne à l’encontre de nous, comme souldoyers. Desquelz crimes et deliz que avions très à cuer et en grant desplaisance, lesdiz Guy de la Roche et autres dessus nommez, voyans que les avions du tout prins en indignacion, doubtans ou temps avenir que on voulsist proceder contre eulx par pugnicion corporelle ou autrement rigoureusement, nous firent humblement supplier et requerir qu’il nous pleust les acueillir en nostre grace et benivolence, et leur pardonner et abolir les faultes, crimes et choses dessus dictes, et les mettre hors de nostre cuer, et qu’ilz estoient prestz de faire ce qu’il nous plairoit, et obeir d’ilec en avant à nous et à noz commandemens, et estre bons et loyaulx envers nous. Oye laquelle requeste et aussi en faveur de nostre très chier et très amé frere et cousin le duc d’Orleans, duquel ilz sont serviteurs, qui de ce nous fist prier et requerir par nostre chier et amé cousin le bastard d’Orleans, lequel à ceste cause vint par devers nous par plusieurs foiz

Pendant la longue captivité de Jean d’Orléans, comte d’Angoulême, en Angleterre, où il fut retenu de novembre 1412 à 1445, plus de trente-deux ans, comme otage de son frère, Charles duc d’Orléans, Jean de La Roche et après lui son frère Guy commandèrent en maîtres absolus dans la ville d’Angoulême (le premier en était capitaine, le second était sénéchal d’Angoumois) ; après la défaite de la Praguerie, ils en firent le centre de la résistance et le refuge de ceux qui refusaient de se soumettre. Le héraut Berry rapporte qu’en avril 1442, pendant que Charles VII était à Ruffec, le duc d’Orléans lui envoya le comte de Dunois, auquel il avait donné charge « d’oster de la cité d’Angoulesme Guyot de La Roche et tous ses gens, lesquelz faisoient moult de maulx aud. pays, tant de Poictou, de Xanctonge, comme ès environs », et que plusieurs de ceux-ci demandèrent un sauf-conduit pour se rendre auprès du duc d’Orléans, ce qui leur fut accordé. (Chronique, édit. Godefroy, p. 418.)

, et aussi en faveur et pour consideracion des bons et agreables services que les predecesseurs dudit Guy nous avoient faiz, et esperions que lui et autres nous feissent, nous à icellui Guy de la Roche et autres dessus nommez, et à tous leurs gens, serviteurs, compaignons de guerre et autres de leur compaignie, et de chascun d’eulx, de quelque estat, nacion ou condicion qu’ilz feussent, et qui les avoient aidiez, soustenuz, favorisez et confortez à l’encontre de nous, durant les dictes divisions, et aussi aux maire, bourgois et habitans de la dicte ville d’Angolesme, en tant que, à l’occasion des choses dessus dictes, ilz pourroient avoir mespris ou forfait envers nous, en quelque maniere que ce feust ; pour ces causes et autres à ce nous mouvans, quictasmes, remismes, pardonnasmes et abolismes toutes manieres de destrousses qu’ilz ou leurs gens avoient ou povoient avoir faictes, durant les dictes divisions, tant sur les gens dudit bastard de Culant que autres noz gens, serviteurs et subgiez, meurdres, larrecins, boutemens de feux, ravissement de femmes, sacrileges, pilleries, roberies, et aussi tout ce que ledit Guy povoit avoir fait envers nous, en tant qu’il avoit souldoyé nos diz ennemys et s’en estoit servy à l’encontre de nous, comme dit est, et generalment tous autres cas, crimes, deliz et malefices qu’ilz ou aucuns d’eulx, ou leurs diz gens quelzconques, avoient ou povoient avoir faiz, diz, commis ou perpetrez à l’encontre de nous, de nostre magesté royal, ne à aucun de noz subgiez, soubz umbre desdictes divisions ne autrement, en quelque maniere que ce feust, de tout le temps passé jusques alors, et les rapelasmes, remismes et restituasmes en nostre bonne grace et bienvueillance, à leur bonne fame et renommée, au païs et à tous leurs biens, meubles et heritaiges, debtes, maisons, possessions, terres, seigneuries et autres biens quelzconques, quelque part qu’ilz feussent situez et assis. Non obstant quelzconques criz, publicacions, bannissemens, confiscacions de corps et de biens, qu’ilz ou aucuns d’eulz povoient avoir commis envers nous, dons ou transpors que aurions ou pourrions avoir de leurs diz biens, terres, seigneuries et heritaiges, par le moyen et à l’occasion des choses dessus dictes, en quelque maniere que ce feust. Lesquelz nous par nos dictes lettres d’abolicion revocquasmes et adnullasmes, en ostant et levant de et sur leurs diz biens nostre main, ou cas qu’elle auroit esté mise et apposée en aucuns d’iceulx biens, pour occasion de ce que dit est. Et voulusmes les choses dessus dictes et chascunes d’icelles estre dictes et reppellées comme non faictes, dictes et non avenues, sans ce que les dessus diz ne aucuns d’eulx feussent tenuz d’iceulx cas autrement specifier ne declairer, ne que à l’occasion ne par le moyen des choses dessus dictes ne d’aucunes d’icelles, nostre procureur ne autres quelzconques leur en puisse aucune chose impugner ne demander, ne à aucun d’eulx, ne à leurs diz compaignons ne autres gens quelzconques, lors ne ou temps avenir, par juste requeste de partie ne autrement, en quelque maniere que ce feust. Et quant à ce imposons silence perpetuel à nostre dit procureur et à tous autres quelzconques, et [avons] voulu que nostre seneschal de Poictou feist publier nos dictes lettres d’abolicion, et enregistrer en sa court ordinaire de Poictiers, afin de memoire perpetuel, et que au vidimus d’icelles fait soubz seel royal ou auctentique plaine foy feust adjoustée comme à l’original des dictes lettres. Et avec ce, de nostre plus ample grace, leur octroyasmes que la dicte publicacion de nos dictes lettres d’abolicion, qui seroit faicte en la court dudit seneschal leur vaulsist et à chascun d’eulx pleniere verifficacion et enterinement des dictes lettres d’abolicion, comme se faicte estoit en nostre court de Parlement, sans ce qu’ilz ne aucun d’eulx feussent tenuz de presenter en personne ne autrement nos dictes lettres, pour avoir l’enterinement d’icelles, ne les veriffier ne enteriner autrement, ne pour ce comparoir en personne par devant ledit seneschal ne ailleurs par devant quelzconques juges, en quelzconques juridicions que ce feust, si comme par les dictes lettres d’abolicion l’en dit ces choses et autres plus à plain apparoir.

Depuis laquelle publicacion de nos dictes derrenieres lettres d’abolicion, les diz Guy et autres dessus nommez ont obey à nous, et nous ont servi tant ou voiage de Chartres, en la compaignie de nostre chier et feal cousin le bastard d’Orleans, conte de Dunoys, au siege de Galardon

Galardon, que Charles VII encore dauphin avait enlevé d’assaut aux Bourguignons, le 25 juin 1421, paraît être resté jusques vers le mois d’août 1442 au pouvoir du roi de France. A cette époque, François Surienne, dit l’Aragonais, célèbre chef de routiers au service de Henri VI, s’en empara ainsi que de Courville. Quelques mois plus tard, Dunois vint attaquer Galardon et conclut avec Surienne une convention par laquelle celui-ci s’obligeait, moyennant onze mille saluts d’or, à démolir les fortifications de cette place et à évacuer Courville. (E. Cosneau, Le connétable de Richemont, p. 342, 343 et note. — Cf. les sources citées en cet endroit.)

, et en retournant dudit voiage passa ledit Guy par les pays de Nyvernois, Berry, Limosin, Poictou et autres, ayant l’enseigne de nostre dit cousin, acompaigné de plusieurs capitaines de gens d’armes et de trait, c’est assavoir du Roucin, Dymanche de Court, Ravenel

Le capitaine Roucin ou Roussin, Dimanche de Court et Jean de Ravenel étaient trois chefs de routiers bien connus par leurs excès et dont les noms reviennent fréquemment dans les textes de l’époque. Dans le courant de l’année 1443, se rendant au siège de Dieppe, où ils devaient rejoindre le dauphin, ils traversèrent la Picardie et s’y livrèrent comme d’habitude au pillage. Le comte d’Étampes reçut ordre du duc de Bourgogne d’en débarrasser le pays. Guy de Roye et Valeran de Moreuil, qui formaient l’avant-garde de sa petite armée, surprirent les routiers à Montagu en Laonnois et les mirent en déroute. Au nombre des prisonniers saisis par Guy de Roye se trouva Dimanche de Court ; mais sa détention ne fut pas de longue durée. L’année suivante on retrouve ces trois chefs associés à Robert de Sarrebrück, damoiseau de Commercy, pour ravager la Lorraine. Ils firent partie de l’armée du dauphin dans sa campagne contre les Suisses ; Dimanche de Court y conduisait les Gascons. Il obtint des lettres de rémission pour tous ses excès de guerre, à Sens en août 1445, et Ravenel, à Chinon en août 1466. Le texte en a été publié par M. Tuetey (Les Écorcheurs sous Charles VII, t. I, p. 56, 84, 162, 166 ; t. II, p. 402 et 435). Dans un acte de 1450, Jean de Ravenel est qualifié écuyer, valet tranchant du roi et de la garde de son corps. (Chronique de Mathieu d’Escouchy, édit. de Beaucourt, t. III, p. 378.)

et autres ; et oyt ledit Guy nouvelles de la prinse de Chevetonne, qui estoit à feu Brisset de Saint Cire

Ce personnage est appelé tantôt le bâtard de Saint-Cyre, tantôt Bricet ou Brisset de Saint-Cire, chevalier. Son nom apparaît pour la première fois en 1429, dans un compte de Jean d’Abbeville, receveur de la ville de Saint-Jean-d’Angély, où il est question du payement de la dépense faite pour loger dans cette ville le bâtard de Saint-Cyr, lieutenant de Jean de La Roche. (Arch. de la ville de Saint-Jean-d’Angély, CC, 8.) On a vu qu’il bénéficia des lettres d’abolition octroyées, le 9 avril 1431, à son chef (cf. ci-dessus, p. 12). Les registres criminels du Parlement précisent deux des nombreux méfaits des dernières années de la carrière, trop bien remplie, de cet incorrigible routier. Le mercredi des Quatre-temps de Carême, l’an 1442 n.s., Charles de Lisac, écuyer, se rendant avec plusieurs personnes de sa suite, par ordre de Charles d’Anjou, comte du Maine, de Saint-Jean-d’Angély à Melle, rencontra, entre la Villedieu d’Aunay et Brioux, dix compagnons de guerre de la ban le de Brisset de Saint-Cyr, armés d’arbalètes, qui guettaient le chemin, et tomba entre leurs mains. Dépouillé de ses chevaux, de son argent, de ses armes et de tout ce qu’il portait, il fut mené d’abord dans la forêt d’Aunay, puis dans un village d’Angoumois distant de deux lieues, et enfin en la ville d’Angoulême. Sur l’ordre de Brisset, Lisac fut enchaîné de gros ceps de fer du poids de cent livres et jeté dans une basse fosse infecte de la Tour du Châtelet d’Angoulême. Il y demeura quatorze jours sans couverture, dans la plus extrême détresse. Au bout de ce temps, un soir, à sept heures, Brisset l’en fit extraire et comparaître devant lui ; là il lui déclara qu’il ne lui rendrait la liberté que contre une rançon de 2000 réaux d’or. Le prisonnier ayant refusé de souscrire à cette exigence, fut ramené dans le caveau par six ou sept hommes qui le brutalisèrent. Un chanoine de l’église de Limoges, détenu aussi dans cet endroit, fut frappé, en sa présence, de plusieurs coups d’un gros bâton et ses bourreaux lui disaient : « Vilain matin, ne paieras-tu la somme qu’on te demande ? » Craignant d’avoir à subir le même traitement, dont il était d’ailleurs verbalement menacé, Charles de Lisac se décida à se racheter moyennant 1000 réaux. Alors Brisset lui fit écrire et signer plusieurs lettres, adressées à Charles comte du Maine, au sr de la Bussière et à Jean de Lisac, premier huissier d’armes du roi, son frère ; on y lisait qu’au moment d’être jeté dans la Charente, des amis étaient intervenus et avaient obtenu qu’on lui fît grâce de la vie au prix de la somme en question ; et il suppliait qu’on la lui envoyât sans retard. Sur ces entrefaites, le bâtard d’Orléans arriva à Angoulême et nomma capitaine du Châtelet de cette ville un certain Pierre Boisseau. Dès lors privé d’autorité et craignant que son prisonnier ne fût mis en liberté, Brisset le fit transporter, toujours enchaîné, dans la maison d’un de ses serviteurs, où il vint bientôt le trouver, accompagné de Pierre de Saint-Gelais, d’Olivier Perceval et autres, et le fit conduire de nuit dans a fosse du doyen d’Angoulême, où sont ordinairement enfermés les condamnés. Lisac resta dans cette nouvelle prison du vendredi matin au samedi dix heures du soir, sans boire ni manger. Enfin on le délivra, en lui faisant promettre, par manière de moquerie, de ne point faire couper sa barbe et ses cheveux jusqu’à ce qu’il eût fait sa révérence à Mgr Charles d’Anjou. Naturellement Charles de Lisac porta plainte. Nous ne raconterons pas toutes les procédures. Brisset de Saint-Cyr était le 23 août dans les prisons du Châtelet de Paris, d’où il fut transféré à la Conciergerie ; le 29, la cour le mit en liberté sous caution, et moyennant l’engagement de se constituer de nouveau prisonnier le 1er décembre suivant ; mais on ne le revit plus, et il fut condamné par défaut, mais non définitivement, par arrêt du 17 juillet 1444. (Arch. nat., X2a 23, fol. 233 v°.) Sa mort interrompit les poursuites. On voit ici qu’il était allé de vie à trépas, on ne dit pas comment, avant le mois de juin 1446. Il était encore vivant le 7 décembre 1445, comme le prouve un autre acte du Parlement, dont il va être question.

Le récit fait dans les présentes lettres d’abolition de la prise, bientôt suivie d’une reprise du château de Chefboutonne, manque de clarté. On y paraît dire que cette place appartenait légitimement à Brisset de Saint-Cyr, et que ceux qui l’en avaient dépossédé par la force l’avaient fait en violation de tout droit. Or la vérité est bien différente. L’an 1436, François de Montbron, vicomte d’Aunay, et sa femme Louise de Clermont, dans un pressant besoin d’argent, avaient vendu ou plutôt engagé au bâtard de Saint-Cyr, moyennant une redevance annuelle de 164 écus d’or, leurs château, terre et seigneurie de Chefboutonne, sous cette condition expresse qu’ils en reprendraient possession dans les six ans, en lui payant la somme de 1640 écus. En 1439, ils offrirent de se dégager ; Brisset refusa d’accepter la somme convenue, qui fut alors consignée en main de justice à Niort. Le sénéchal de Poitou, saisi de la contestation, rendit une sentence condamnant le défendeur à prendre l’argent et à restituer Chefboutonne, après avoir payé aux demandeurs 200 livres pour les fruits et revenus de la terre depuis le jour où l’offre de rachat lui avait été signifiée. Brisset releva appel au Parlement, qui confirma la décision du sénéchal par arrêt du 26 juillet 1444, et ajourna les parties à Niort, le 15 septembre suivant, pour la mise à exécution. Saint-Cyr ne se rendit pas à l’assignation ; on dut surseoir. A deux reprises différentes, le 20 avril et en septembre 1445, la cour lui fit faire par huissier sommation d’obéir. Il persista dans son refus et continua d’occuper Chefboutonne, au mépris de la justice et du roi, et au grand préjudice du vicomte d’Aunay. Enfin, sur une nouvelle requête de ce dernier, le Parlement envoya au sénéchal de Poitou, le 7 décembre 1445, un mandement lui enjoignant expressément de faire mettre à exécution l’arrêt du 26 juillet 1444 par tous les moyens, même par la force armée, et de procéder contre le bâtard de Saint-Cyr et ses adhérents, pour toutes leurs rébellions et désobéissances intolérables, par emprisonnement de leurs personnes et saisie de leurs biens. (X2a 23, fol. 243 v°.) C’est évidemment en vertu de ce mandat et très légitimement que le château de Chefboutonne fut remis définitivement en possession de son vrai propriétaire. Toutefois, d’après l’ordre et les dates des faits rapportés dans nos lettres de juin 1446, la reprise de Chefboutonne par Guy de La Roche aurait eu lieu dans l’intervalle entre la sentence du sénéchal de Poitou et l’arrêt confirmatif de la cour, et il faudrait alors supposer que François de Montbron avait voulu devancer les lenteurs de la justice, en s’emparant de son bien, avant que le Parlement eût prononcé en dernier ressort, ce qui est fort possible, mais ne légitime en aucune façon ce nouvel acte de violence du sénéchal d’Angoulême, au moment où il aurait dû songer, avant tout, à faire oublier ses anciennes révoltes contre l’autorité du roi.

, en son vivant chevalier. Et dedans la dicte place, estoient aucuns gens d’armes. Et se transporta audit lieu de Chevetonne, acompaigné de plusieurs gens de guerre, et fut prinse ladicte place et les compaignons qui lors estoient dedans ; desquelz les aucuns furent penduz et les autres menez en nostre ville de Poictiers, pour en faire justice et pugnicion. Et depuis nous a ledit Guy servy et les autres en la compaignie de nostre très chier et très amé filz le daulphin de Viennois, ou voiage d’Alemaigne

C’est-à-dire dans la campagne contre les Suisses, en 1444-1445. (Cf. ci-dessus, p. 364, la note relative à Guyot de La Roche.)

et autre part, où il nous a pleu les emploier, tant en la frontiere de nos diz ennemis en Guienne, Bourdeloys que ailleurs, où il nous a pleu l’emploier, à grans charges et compaignies de gens d’armes et de trait. Lesquelz ont tenu les champs et vescu sur iceulx, pillé, robé, raençonné et destroussé toutes manieres de gens, tant nobles, gens d’eglise, marchans que toutes autres manieres de gens, qu’ilz ont peu trouver et raencontrer, couru foires et marchiez, aguetté chemins, de jours et de nuiz, prins bestial, vendu, mengié, butiné et raençonné, assally eglises et forteresses, pour avoir des vivres et autrement, èsquelz assaulx y a eu aucunes gens mors et aucuns bleciez, prinses les dictes places par force et bouté feux en icelles pour les avoir, prins femmes par force, et raençonné noz subgiez, comme s’ilz eussent esté noz ennemys, et fait plusieurs autres pilleries, roberies, crimes, maulx et dommaiges à nos diz subgiez. Et depuis noz defenses faictes que aucuns, sans nostre congié et licence, ne tenist compaignie de gens d’armes et de trait sur les champs, si non ceulx à qui aurions donné charge et ordonnance

Allusion à l’édit portant création des compagnies d’ordonnance dont le texte n’a pas été conservé, mais qui fut rendu au commencement de 1415. (De Beaucourt, Hist. de Charles VII, t. IV, p. 387-405.)

, a le dit Guy tenu compaignie de gens de guerre sur noz subgiez et païs, lesquelz ont fait pilleries, roberies et autres maulx et crimes dessus diz. Pour occasion desquelz ilz doubtent que ou temps avenir, on vueille contre eulx proceder à pugnicion ou autrement, se nostre grace et misericorde ne leur estoit sur ce impartie, si comme ilz dient, humblement requerans icelle. Pour quoy nous, attendu ce que dit est, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, ausdiz supplians et à leurs gens et serviteurs, compaignons de guerre et autres de leur compaignie, et de chascun d’eulx, de quelque estat, nacion ou condicion qu’ilz soient, et qui les ont aidez, soustenuz, favorisez et confortez et les noms desquelz ledit Guiot sera tenu de bailler ou faire bailler en escript par devers nostre dit seneschal de Poictou, ou son lieutenant à Poictiers, dedans ung an prouchainement venant, avons remis, quicté, aboly et pardonné, et de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, remettons, quictons, pardonnons et abolissons les faiz et cas dessus diz et autres quelzconques, qu’ilz et chascun d’eulx ont faiz, commis et perpetrez, ou consenty et commandé faire, commettre et perpetrer, durant les dictes guerres et autrement, en quelque maniere que ce soit ou puisse estre, le temps passé jusques à present, et lesquelz nous voulons estre cy tenuz pour exprimez, sans ce qu’il soit besoing ne qu’ilz soient tenuz en faire autre declaracion ne autrement les speciffier ne declairer, et lesquelz nous voulons et tenons icy pour exprimez, avec toutes peines, amendes et offenses corporelles, criminelles et civiles, en quoy ilz et chascun d’eulx, et leurs gens et serviteurs, compaignons de guerre et autres qui les ont aidiez, favorisez et confortez, pourroient estre encouruz envers nous et justice, et les avons restituez et restituons à leur bonne fame et renommée, au païs et à leurs biens non confisquez. Et sur ce imposons silence perpetuel à nostre procureur. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx conseillers les gens tenans et qui tendront nostre Parlement, aux seneschaulx de Poictou, Xanctonge, Lymosin, gouverneur de la Rochelle, et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que les diz Guy de la Roche, Pierre de Saint Gellays, Olivier et Jaques Percevaulx, Christofle Pot, Jehan Faubert

On lit plus haut « Saubert ».

, Fouquet de Nantueil, Jehannot Guy, Jehan Reculat, Jehan de Someville

Plus haut « Sonneville ».

, Perrinet Du Bois, Petit André, Jaques Levraut, Guillaume Bejarry

Le texte porte en cet endroit « Le Jarry », qui est une faute évidente.

, Jaques de Noiszé, et chascun d’eulx, et tous leurs gens et serviteurs, et autres de leur compaignie, et chascun d’eulx, tant en particulier comme en general, facent, seuffrent et laissent joïr et user paisiblement et à plain de nostre presente grace, pardon, quictance, abolicion et octroy, sans leur faire mettre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné, ores ne pour le temps avenir, aucun arrest, ennuy, destourbier ne empeschement, en corps ne en biens, ne à aucun d’eulx, en quelque maniere que ce soit ou puisse estre, ainçois se fait, mis ou donné leur avoit esté ou estoit fait au contraire, si les mettent ou facent mettre tantost et sans delay, chascun en son endroit, au premier estat et deu, et à plaine delivrance. Et noz presentes lettres face ledit seneschal de Poictou, lequel nous avons à ce commis et commettons, publier et enregistrer en sa court ordinaire de Poictiers ; au vidimus des quelles fait soubz seel royal ou auctentique, nous voulons plaine foy estre adjoustée, comme à ce present original. Et de nostre plus ample grace voulons et nous plaist, et audit Guy de la Roche et autres dessus nommez, et à tous autres de leur compaignie, aliez, favorisans et complices, avons octroyé et octroyons, par ces presentes, que la dicte publicacion de ces dictes presentes, qui sera faicte en la court dudit seneschal, en la maniere devant dicte, leur vaille et à chascun d’eulx pleniere verificacion et enterinement de ces dictes presentes, comme se faicte estoit en nostre court de Parlement, sans ce que ilz ne aucun d’eulx soient tenuz presenter ces dictes presentes pour avoir l’enterinement d’icelles

On remarquera cette dispense, qui ne se retrouve pas dans les lettres de même nature.

, ne autrement les veriffier ou enteriner, ne pour ce comparoir ailleurs que par devant ledit seneschal ou son lieutenant, ne devant quelconque autre juge ne en quelque juridicion que ce soit. Et afin, etc. nous avons, etc. Sauf, etc. Donné à Razilly lez Chinon, ou mois de juing l’an de grace mil cccc. xlvi, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, vous, les contes de Foix

Le comte de Foix, cf. ci-dessus, p. 239, note 1.

, de Laval

Gui XIII, dit XIV, sire de Laval, de Vitré, etc., fils de Jean de Montfort et d’Anne de Laval. C’est en sa faveur que la baronnie de Laval fut érigée en comté par lettres du 17 août 1429. Il avait épousé, le 1er octobre 1430, Isabelle, fille de Jean V (ou VI) duc de Bretagne et de Jeanne de France, fille de Charles VI, et l’avait perdue en 1442.

, les sires de la Varenne, de Pressigny, de Blanville

Les sires de la Varenne, de Pressigny et de Blainville sont mentionnés fréquemment dans les pages précédentes.

et plusieurs autres presens. Giraudeau. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MCXX Juillet 1446

Lettres d’abolition octroyés à Raymond Chauveteau, homme d’armes poitevin, pour tous les excès dont il a pu se rendre coupable durant les guerres.

AN JJ. 176, n° 436, fol. 289 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 379-381

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Raymon Chauveteau, natif de nostre païs de Poictou, contenant que dès son jeune aage il nous a servy ou fait de noz guerres à l’encontre des Anglois, noz anciens ennemis, soubz et en la compaignie de feu Jehan de la Roche et de Guiot de la Roche, son frere, et de plusieurs noz capitaines et chefz de guerre, en maintes manieres, mesmement à lever le siege que nos diz ennemis tindrent pieça devant Aubeterre

Il est déjà question ci-dessus, p. 313 et note 3, du siège d’Aubeterre, dont on ne trouve point de mention dans les chroniques de l’époque.

, où il fut blecié d’un traict en la cuisse, dont il a esté malade par l’espace de v. ans ; et aussi nous a servy ès voiages et armées d’Avrenches

En février 1435, Avranches fut assiégée par le duc d’Alençon, qui fut repoussé par le comte d’Arundel et Th. Scales. Il est sans doute fait allusion à cet événement plutôt qu’à une autre tentative, plus infructueuse encore, dirigée en décembre 1439 contre cette place par le connétable de Richemont et le même duc d’Alençon.

et Marueil, Aucor

Mareuil soutint deux sièges, en 1435 et en 1437, tous deux conduits par Jean de La Roche, sénéchal de Poitou (cf. ci-dessus, p. 267, note 3). La place d’Aucor fut reprise aux Anglais en cette même année 1435 (id. p. 313, note 2).

, en Normandie, Gascongne et ailleurs. Et avecques ce s’est souventes foiz trouvé en plusieurs entreprinses, destrousses, rencontres et autres bonnes besongnes qui ont esté faictes sur nos diz ennemis ; durant lequel temps, icellui suppliant est souventes foiz alé et venu par les païs et tenu les champs, en la compaignie desdiz capitaines et de leurs dictes gens, et sur noz subgiez, tant gens d’eglise, nobles, marchans, laboureurs, gens et bestail, que autres de divers estatz, a pris, pillé, robé et rançonné, batu, navré noz subgiez, espié chemins et aucunes foiz esté present quant autres de la compaignie où il estoit ont fait et commis meurdrez et boutez feuz, sans ce toutesfoiz qu’il ait esté fait par lui ne de son consentement, et a fait et esté consentant de faire plusieurs autres maulx, excès, deliz et malefices, que noz autres gens de guerre faisoient au temps qu’ilz tenoient les champs sur nos diz païs et subgiez, lesquelx à present il ne sauroit declarer ne exprimer. Et combien que nous ayons octroié abolicion generale à tous noz gens de guerre de toutes les choses avenues paravant noz ordonnances derrenierement faictes sur le fait de noz gens de guerre

A propos de l’abolition générale octroyée aux gens de guerre, cf. la note ci-dessus, p. 209.

, toutesvoies il doubte que, à l’occasion des choses dessus dictes, aucuns par haine ou autrement voulsissent, ou temps avenir, contre luy rigoreusement proceder par justice ou autrement, et qu’il ne s’ose bonnement jamais tenir seurement au païs, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu les services par lui à nous faiz, où il a emploié corps et chevance, et le temps de sa jonnesse, aussi que, le temps passé, toutes gens de guerre tenans les champs faisoient les maulx dessus diz, et n’eust peu ledit suppliant vivre ne soy entretenir sur les champs, veu que lui ne autres n’estoient point souldoiez, et que aussi que nous avions donné abolicion generale à tous nos diz gens d’armes des maulx et choses par eulx faictes et commises par avant noz ordonnances, par nous faictes sur le fait et entretenement de noz gens de guerre, il nous plaise lui pardonner et abolir les choses dessus dictes et sur ce luy impartir nostre grace. Pour quoy nous, ces choses considerées et mesmement les diz services par lui faiz, voulans aucunement iceulx recongnoistre envers ledit suppliant et en faveur d’iceulx, misericorde estre en ceste partie preferée à rigueur de justice, au dit Raymon Chauveteau, suppliant, avons, pour ces causes et autres à ce nous mouvans, quicté, remis, pardonné et aboly, etc. tous les faiz et cas devant diz, avecques toutes les pilleries, roberies, destrousses, courses, larrecins, excès, crimes, malefices et deliz qu’il a faiz, consenty ou esté present à faire, soubz umbre et à l’occasion de la guerre, de tout le temps passé jusques à present, tout ainsi comme s’ilz estoient chacun particulierement specifiez et declarez en ces dictes presentes, etc., reservé seulement meurtre d’aguet appensé, ravissement et violence de femmes, boutement de feuz et sacrileige. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Rasilly près Chinon, ou mois de juillet l’an de grace mil cccc.xlvi, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, le sire de Precigny

Bertrand de Beauvau, sr de Pressigny.

et autres presens. J. de la Loere. — Visa. Contentor. E. Du Ban.

MCXXI Août 1446

Lettres d’abolition octroyées à Jean de Longpré, archer de Montaigu, prisonnier au Châtelet de Paris, pour les violences, détrousses et autres excès par lui commis lors des hostilités entre les garnisons de Montaigu et de Belleville, d’une part, et les Bretons, maîtres de Palluau, des Essarts et de Châteaumur, d’autre, dans la guerre qui eut lieu entre le sire de Belleville et le sr de Rais, à Tiffauges, et autres circonstances.

AN JJ. 178, n° 21, fol. 13 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 381-389

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan de Longpré, dit Heurtebise

Dans une plaidoirie de Nicolas Queyré, sénéchal de Montaigu, contre son seigneur, Jean de Belleville, plaidoirie citée ailleurs (ci-dessus, p. 46, note), on lit que le 9 janvier 1446 n.s. un serviteur de ce dernier, « appellé Hurtebise », alors en rupture de ban, se mit en embuscade avec un autre « banni » à la porte Jaillet à Montaigu, et mit, sur l’ordre de son maître, ledit sénéchal en arrestation non motivée, au moment où il pénétrait dans la place. (Arch. nat., X2a 24, à la date du 28 février 1447 n.s.) Il s’agit évidemment de ce « Jehan de Longpré, dit Heurtebise ».

, natif du païs de Lorraine, demourant à Montagu en nostre païs de Poictou, varlet de guerre, chargié de trois petis enfans, prisonnier en nostre Chastellet de Paris, contenant que ledit de Longpré s’en vint, lui estant jeune enfant, dudit païs de Lorraine demourer en France et se mist à estre page et servir les gens d’armes estans en nostre service et y demoura par long temps avecques feu le sire de Culant

Louis baron de Culant, seigneur de Châteauneuf, amiral de France de 1422 environ à 1437, décéda l’an 1444. En septembre 1431, il avait aidé le sire d’Albret à reprendre les places de Marans et de Benon où Richemont avait envoyé les srs de Beaumanoir et de Rostrenen, après l’emprisonnement du vicomte de Thouars. Dans des lettres de rémission accordées à son neveu Charles de Culant, on apprend que l’amiral fit prendre un nommé Guillaume Pépin, qui avait conspiré contre sa vie, l’enferma d’abord à Châteauneuf, puis au château de la Croisette, et le fit mourir en prison, sans jugement. (A. Tuetey, Les Écorcheurs sous Charles VII, t. II, p. 453.)

, en son vivant admiral de France, et estoit arbalestrier. Et xviii. ans a et plus, à l’occasion de ce que le seigneur de Belleville et de Montagu estoit lors absent du païs, en nostre service, à la journée de Montargis

La ville de Montargis était assiégée par les comtes de Suffolk et de Warwick (juillet 1427). Le bâtard d’Orléans et La Hire surprirent les Anglais, firent entrer un convoi de vivres dans la place, et secondés par les habitants et la garnison, mirent les assiégeants en pleine déroute (5 septembre). Voy. Chroniques de Monstrelet, t. IV, p. 271-275 ; de Cousinot, p. 243-247 ; de Lefèvre de Saint-Rémy, t. II, p. 130, 131, etc.

, et que les Bretons faisoient guerre audit lieu de Montagu, lui convint mettre des gens en garnison audit lieu de Montagu pour resister à l’encontre desdiz Bretons

Le connétable de Richemont, sr de Parthenay, était en guerre avec Jean II Harpedenne, sr de Belleville, à la suite d’un procès commencé contre Jean Larchevêque, auquel le sr de Belleville réclamait Mervent. (Cf. notre vol. précédent, p. 187, note, et Cosneau, Le connétable de Richemont, p. 488.) Les faits rappelés ici remontent aux années 1427-1428.

, lesquelz pilloient et roboient toutes ses terres ; et admena avecques lui ledit de Longpré et autres audit lieu de Montagu et y a depuis demouré. Et certain temps après que ledit suppliant fut audit lieu de Montagu, il se maria avecques une jeune femme de la chastellenie dudit lieu, laquelle depuis ung an ença est alée de vie à trespassement. Et est ledit suppliant chargé de trois petis enfans, tous en bas aage ; durant lequel mariage dudit suppliant, il a tousjours demouré audit lieu de Montagu avecques sa dicte feue femme, et avoit la garde d’une des portes de la dicte ville de Montagu, sans aucunement partir de la dicte ville ; et s’est bien et gracieusement gouverné et vesqu sans faire tort à nullui. Et quant ledit sr de Belleville venoit en nostre service ou fait de noz guerres, il admenoit le dit suppliant en sa compaignie, pour ce qu’il estoit très bon arbalestier et vaillant homme de son corps. Et pour ce que les diz Bretons faisoient guerre au dit lieu de Montagu et audit seigneur de Belleville, et tenoient grosses garnisons ès places de Paluya et les Exars, à Chasteaumur, Cliczon et autres places

Les places de Palluau et des Essarts avaient été confisquées sur Isabeau de Vivonne et son mari, Charles de Blois, dit de Bretagne, sr d’Avaugour, à cause de leur complicité dans la prise par trahison du duc Jean V (ou VI) de Bretagne, à Chantoceaux, l’an 1420, et données à Richard de Bretagne, comte d’Étampes, frère d’Artur de Richemont, qui était aussi seigneur de Châteaumur. Les garnisons de ces villes étaient composées de Bretons à la solde de Richard, qui se signalèrent par leurs déprédations. Olivier de Beaulieu était capitaine de Châteaumur pour le comte d’Étampes et avait pour lieutenant Jean de Beaulieu, son frère, en 1430 et pendant les années suivantes. On trouve des renseignements sur les excès auxquels se livrèrent ces Bretons dans les procès intentés par Jacques de Surgères, sr de la Flocellière, à Olivier et Jean de Beaulieu et leurs complices (deux arrêts du 13 septembre 1434, X2a 20, fol. 73, 74 ; X2a 21, à la date du 9 septembre 1434), et par Isabeau de Vivonne à Richard de Bretagne, comte d’Étampes. (Plaidoiries du 29 juillet 1434, X1a 9200, fol. 271 ; arrêts du 24 février 1436, X1a 9193, fol. 125, et du 18 juillet 1436, X2a 21, à la date.)

, et couroient, pilloient et raençonnoient les terres de Montagu et de Belleville, ledit seigneur de Belleville pour ces causes mist garnison ès diz lieux de Montagu et Belleville. Durant lesquelles guerres et divisions, ledit de Longpré et autres de la garnison de Belleville, jusques au nombre de xvii, partirent à ung matin pour aler courir sur les dictes marches de Bretaigne et vindrent en deux ou trois villaiges d’emprès Montebert, et illec vouldrent prendre vivres, et prindrent deux jumens et autres bagues, pour en avoir des vivres. Et en eulx retournant, les Bretons qui estoient assemblez de soixante à quatre vins, qui estoient gens de plat pays, les rencontrerent et les assaillirent environ jour couchié, et pour les enclourre fermerent les chemins de barrieres de grans perches, tellement qu’ilz ne peurent aler plus avant. Et lors, quant ilz se virent ainsi chaciez et en dangier de mort ou d’estre prins, ilz se misdrent parmy lesdiz Bretons et se combatirent ensemble, ainsi qu’ilz peurent et de nuit, et tellement que les trois des [dix] sept compaignons, de la compaignie desquelz estoit ledit suppliant, furent bleciez et ung de leurs chevaux tué, et pareillement blecerent plusieurs des diz Bretons, mais ne scet combien, et en fut tué deux, et l’un des diz Bretons blecié fut admené prisonnier à l’Abergement près dudit Montagu, où ilz retournerent couchier. Et le landemain ceulx de la dicte garnison de Belleville enmenerent ledit prisonnier audit lieu de Belleville, où ilz le garderent longuement, pour estre recompensez dudit cheval qui avoit esté tué, telement qu’il y morut, ainsi que oït dire ledit suppliant, lequel demouroit à Montagu. Et que du temps que nostre très chier et amé cousin, le conte de Penthievre, tenoit le siege contre les Anglois, noz anciens ennemis, en Pierregort, qui fut en l’an mil cccc.xxxvii

Il s’agit, selon toute vraisemblance, de la place de Mareuil que Jean de La Roche, sénéchal de Poitou, et le comte de Penthièvre assiégèrent l’an 1437 (ci-dessus, p. 267 et note 3). Jean de Blois, dit de Bretagne, d’abord seigneur de Laigle, puis comte de Penthièvre et vicomte de Limoges après la mort de son frère aîné Olivier (1433), était le second fils de Jean de Blois, dit de Bretagne, comte de Penthièvre, seigneur d’Avaugour, etc., et de Marguerite de Clisson, fille puînée du connétable Olivier de Clisson. Il servit les intérêts de Georges de La Trémoïlle contre Richemont et prit part aux hostilités qui troublèrent une partie du Poitou de 1428 à 1433. (Cosneau, Le connétable de Richemont, p. 154 et suiv., 533.) En 1448, il fit son accommodement avec François Ier, duc de Bretagne. Charles VII l’établit, en 1450, lieutenant général de son armée de Guyenne, avec laquelle il prit les villes de Bergerac et de Castillon et se distingua à la bataille de Castillon (1453) et à la réduction de Bordeaux. Jean comte de Penthièvre mourut en 1454, sans postérité de Marguerite de Chauvigny.

, le dit suppliant ala avec autres gens de guerre, jusques au nombre de xiii. compaignons de guerre, en la compaignie du bastard de la Trimoïlle

Jean bâtard de La Trémoïlle, fils de Georges (cf. ci-dessus p. 274, note).

, qui assembloit gens, pour aler secourir le siege que tenoit nostre dit cousin de Penthievre. Et ainsi que lesdiz compaignons vouldrent partir dudit Montagu, trouverent à Saint George, en l’ostellerie Herbretin, maistre Guillaume Prate, archediacre de Thouars, et prindrent deux chevaulx et lui osterent xxiii. royaulx, et enmenerent lesdiz chevaulx à la place de l’Abergement Ydereau, qui est au feu sire de la Trimoïlle. Et le landemain au matin, ledit seigneur de Belleville envoya devers eulx ung de ses gens et fist rendre lesdiz chevaulx audit archediacre, mais ledit argent fut departi entre eulx, et en eut ledit suppliant à sa part ung royal et demy. Et depuis, et environ l’an mil cccc.xxxviii, durant la guerre qui estoit lors entre ledit seigneur de Belleville et le feu sire de Raix, lequel tenoit à Thiffauges en garnison

Gilles de Rais, maréchal de France, était seigneur de Pouzauges et de Tiffauges à cause de sa femme, Catherine de Thouars (ci-dessus, p. 199, note). Nous n’avons point d’autres renseignements sur la guerre entre lui et Jean de Belleville, en 1438. Mais on peut remonter à l’origine de leur querelle. L’an 1428, Jean Harpedenne, sr de Belleville et de Montaigu, poursuivait au Parlement le sire de Rais et sa femme, qui, disait-il, tenaient de lui, à cause de sa ville, château et baronnie de Montaigu, le lieu et châtellenie de Beaurepaire (dont ils avaient hérité de Marie de Thouars, sœur de Catherine), au devoir de 50 livres tournois et une obole d’or à mutation de seigneur. Ceux-ci s’étant refusés à lui faire la foi et hommage et à lui payer cette redevance, il avait fait saisir leur fief. La cour, par arrêt du 20 mai 1428, ordonna une enquête et fit récréance, pour la durée du procès, de la terre litigieuse au profit des défendeurs. (Arch. nat., X1a 9191, fol. 95.)

, qui ne distoit de Montagu que de trois lieues, Thomas Fessart et Loys de Bromers, cappitaines de gens d’armes, qui avoient audit lieu de Thiffauges iiic chevaulx et plus ; et le dit seigneur de Belleville tenoit audit Montagu Gascon de Lesgo, cappitaine dudit Montagu, qui povoit avoir vixx chevaulx et plus, et faisoient guerre d’un cousté et d’autre, et appatissoient les terres de ceulx qui leur estoient contraires. Et pour ce que ceulx de la parroisse du Longeron, qui est de la chastellenie de Thiffauges, s’estoient appatissez audit Gascon à la somme de cent escuz, ledit Gascon pour en estre paié, envoia ledit suppliant et six autres de la dicte garnison de Montagu pour prendre les commissaires, et de fait prindrent ung homme du villaige du Pouet qui est de la paroisse dudit Longeron, et l’admenerent audit Montagu devers ledit Gascon, qui par ce moyen fut paié desdiz cent escuz sur ladicte parroisse, et après fut delivré. Et avecques ce, environ le mois (sic) mil iiiicxxxix. que le conte d’Autiton

Jean comte de Huntington, débarqué à Bordeaux au mois de juillet 1439, ne tarda pas à reconquérir une partie des places où les Français avaient mis des garnisons l’année précédente. Cependant son expédition en Saintonge ne paraît pas avoir été couronnée de succès. Jacques sire de Pons, dans sa requête pour obtenir les lettres d’abolition d’avril 1446 (JJ. 177, n° 238, fol. 157), rappela qu’il avait, dans cette circonstance, résisté au comte de Huntington et neutralisé son effort. Dans un acte daté de Fronsac, le 7 mai 1440, portant don à Jean de La Cropte, écuyer, Huntington prend les titres de lieutenant général et gouverneur de Guyenne et d’amiral d’Angleterre. (Original, Arch. nat., K. 66, n° 18.) C’est lui qui dirigea, cette année même, les opérations du siège de Tartas, qu’il réduisit à capituler. Henri VI, par lettres données à Paris, le 12 juillet 1427, avait fait don au comte de Huntington du comté d’Ivry, confisqué sur Artur de Richemont. (E. Cosneau, op. cit., p. 529.)

, Anglois, estoit descendu ès parties de Xanctonge et que les seigneurs du païs firent mander, ledit seigneur de Belleville mena ses gens celle part et en s’en retournant audit lieu de Montagu, xxiiii. de ses gens voulurent passer par le bourg de Saint George, ouquel bourg y avoit des Bretons pour la garde de ladicte forteresse, qui empescherent le passaige des dessus diz et tirerent contre eulx, et tellement que le cheval du bahu dudit seigneur de Belleville fut blecié. Et lors les diz xxiiii. descendirent à pié et rebouterent ceulx de la dicte forteresse jusques dedans la place, et en les chassant, fut tué d’un trait ung de ceulx qui estoient ès creneaulx de la dicte forteresse, et la ledit supplianl confessé l’avoir fait ; quoyque soit, tira de l’arbaleste à l’encontre de lui, comme les autres de sa compaignie. Et depuis quatre ans ença, et ou temps que Bonneville tenoit la place de Vendrines, que lui avoit baillé ledit seigneur de Belleville, icellui Bonneville commist ung lieutenant à la garde d’icelle, et s’en vint en France où il fut long temps. Et pour ce que ledit lieutenant recevoit en la dicte place gens de guerre qui pilloient et couroient les terres dudit seigneur de la Trimoïlle, icellui seigneur de la Trimoïlle

Sans doute il s’agit toujours du bâtard de La Trémoïlle, et non de Georges seigneur de La Trémoïlle, son père.

rescrivit au dit seigneur de Belleville qu’il fist vuidier ceulx de la dicte place, ou autrement qu’il y mettroit le siege et raseroit la place. Après lesquelles choses, ledit seigneur de Belleville mist hors de la dicte place ledit lieutenant et y en mist ung autre pour lui. Et quant ledit Bonneville fut retourné et qu’il trouva autre lieutenant en ladicte place que cellui qu’il y avoit commis, il reprist la dicte place sans le congié dudit seigneur de Belleville, et chassa hors ledit lieutenant, dont ledit seigneur de Belleville fut malcontent et deliberé de reprendre ladicte place ; et pour ce faire, il partit de Montagu pour aler à Chavergnes

Sic. Lisez « Chavagnes. »

, qui diste dudit lieu de Vendrines de deux lieues ou environ, et en sa compaignie estoit ledit suppliant. Et par aucuns des gens dudit seigneur de Belleville ledit de Bonneville fut prins et gardé audit lieu de Vendrines, jusques à ce que ledit seigneur de Belleville y ala. Et lequel fist mener ledit de Bonneville audit lieu de Montagu par ledit suppliant. Et que durant les guerres qui lors estoient ou païs, ledit suppliant fut en plusieurs lieux pour amasser vivres et lever appastiz, qui leur estoient assignez pour leurs vivres, tant en la chastellenie de Montagu que ailleurs, et a esté en plusieurs destrousses en la compaignie de plusieurs gens de guerre, destroussé plusieurs gens de divers estaz, couru foires et marchiez et espié et aguetté chemins, et fait plusieurs autres pilleries, roberies, rençonnemens, destrousses et autres choses, durant les dictes guerres et divisions. Pour occasion desquelz cas, ledit suppliant est detenu prisonnier en nostre Chastellet de Paris, et doubte que on vueille contre lui proceder rigoureusement et à pugnicion, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant que, attendu qu’il nous a servi ou fait de noz guerres et est prest de faire, et que les choses dessus dictes qu’il a faictes et commises ont esté à l’occasion de la guerre, etc., et que nous avons donné abolicion à tous ceulx qui nous ont servi ou fait de noz guerres, et n’a tenu autre parti que le nostre, ne servi cappitaine ne autre qui ait esté contraire à nous, il nous plaise sur ce lui impartir icelles. Pour quoy nous, attendu ce que dit est, voulans preferer misericorde à rigueur de justice, audit suppliant avons remis, quicté, pardonné et aboly, etc., excepté toutesvoyes meurdres d’aguet apensé, autre que celui dont dessus est faicte mencion, boutement de feux, violement d’eglises et ravissement de femmes, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, aux prevost de Paris, seneschaulx de Poictou et de Xanctonge, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Saint Martin de Candé, ou mois d’aoust l’an de grace mil cccc.xlvi, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Rippe. — Visa. Contentor. E. Duban.

MCXXII Août 1446

Rémission accordée à Gilles Chevaleau, écuyer, de Niort, pour avoir frappé Pierre, fils de Jean Isambert, avec lequel il avait assurement.

AN JJ. 178, n° 18, fol. 11 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 389-391

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre bien amé Gilet Chevaleau

La généalogie des Chevaleau, seigneurs de la Tiffardière et de Boisragon, publiée dans la nouv. édit. du Dictionnaire des familles du Poitou (t. II, p. 423), ne commence qu’à Jean qui épousa, vers 1460, Jeanne Rogre. Suivant toute vraisemblance, Gilles appartenait à cette famille.

, escuier, ayant ses terres et possessions à Nyort, à Chisy et ailleurs ou païs d’environ, contenant que je pieça ledit suppliant donna en justice et en forme de droit asseurement à Jehan Ysambert, demourant en la parroisse de Secondigné en la chastellenie de Chisy et à sa famille, droiz, choses, possessions et biens quelzconques, comme par lettre sur ce faicte puet plus à plain apparoir ; et soit ainsi que, le jour de la feste saint Estienne en ce present mois d’aoust, Pierre Ysambart, filz dudit Jehan Ysambart, lequel menoit et conduisoit une charette atellée de beufz et chargée de bois, voult passer par dessus certain pont que ledit suppliant avoit fait faire de cloyes et de menues pieces de bois sur une petite riviere qui passe à Secondigné, pour passer du foing, et pour doubte que ledit pont ne feust rompu ou trop folé, en maniere que la besoingne dudit suppliant n’en feust retardée, icellui suppliant se mist au devant des beufz qui menoient ladicte charette, et les garda de passer par dessus le dit pont. Et lors le dit Pierre Ysambart print son chemin et voult passer par les prez dudit suppliant, et de fait passa par aucuns et s’efforçoit passer par autres, qui encores estoient à faucher, ès quelz prez n’avoit ne n’a aucun chemin. Et adonc ledit suppliant voyant que ce lui portoit et povoit porter grand interest et dommaige, pour obvier à ce, se mist derechief au devant desdiz beufz et charrette, oultre le gré et vouloir dudit suppliant, et de fait après plusieurs paroles et manieres de faire, ledit Ysambart, meu de mauvaiz et felon couraige, frappa ledit suppliant très durement et malicieusement du gros bot d’un aguillon sur la teste, et ce fait, se print à courre et fouyr tant qu’il peut, et ledit suppliant après, et en courant ledit Pierre Ysambart se abucha et chey à terre, et en cheant le dit suppliant qui le suivoit de près et qu’il le cuidoit frapper d’un baston sur la teste, le frappa sur la queue de sa robe seulement ; et lors ledit Pierre Ysambart ainsi cheu se retourna et print ledit suppliant par les jambes et le fist cheoir sur lui. Adonc ledit suppliant qui estoit fort esmeu et courroucié de ce que ledit Ysambart l’avoit ainsi frappé, doubtant que icellui Ysambart eust aucun cousteau ou autre ferrement, dont il le grevast en sa personne, le print par la gorge et le esgratigna ung peu, et ce fait, se leverent et departirent sans plus proceder l’un contre l’autre. Et combien qu’il n’y ait eu mort ne meshaing, et que ledit Pierre Ysambart ait esté premier invaseur, toutesvoies pour ce que ledit Pierre Ysambart est de la famille dudit Jehan Ysambart, et que ledit suppliant ne pourroit prouver que ledit Pierre Ysambart le frappast premierement, icellui suppliant doubte que noz procureur et justiciers vueillent, pour cause de l’infraction dudit asseurement, rigoureusement proceder à l’encontre de sa personne et de ses biens, si comme il dit, humblement requerant nostre grace lui estre sur ce prealablement impartie. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans preferer misericorde à rigueur de justice, audit suppliant ou cas dessus dit avons quicté, pardonné et remis, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Saint Martin de Candé, ou mois d’aoust l’an de grace mil cccc.xlvi, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Charlet. — Visa. Contentor. E. Duban.

MCXXIII 16 septembre 1446

Lettres interdisant au Parlement, au sénéchal de Poitou et au bailli de Touraine de prendre connaissances des causes et procès des sujets de François duc de Bretagne.

AN JJ. 178, n° 37, fol. 25 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 391-392

Charles, etc. A noz amez et feaulx conseillers les gens tenans nostre present Parlement et qui tendront icellui pour le temps avenir, aux seneschal de Poictou et bailli de Touraine, et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieux tenans, salut et dilection. De la partie de nostre très chier et très amé nepveu François, duc de Bretaigne

François Ier, fils aîné de Jean V (ou VI), duc de Bretagne, et de Jeanne de France, fille de Charles VI, né le 11 mai 1414, successeur de son père en 1442, mort le 18 juillet 1450. (Cf. ci-dessus p. 355, note.)

, nous a esté en complaignant exposé que, jasoit ce que ses subgiez de son dit duchié et païs de Bretaigne ne doient estre contenuz en nostre court de Parlement ne devant autres justiciers ou officiers en nostre royaume, en simple querelle ne en cas d’appel, ou deffault de droit des seneschaulx ou commis de nostre dit nepveu, neantmoins puis nagueres ont esté donnez et faiz adjournemens en simple querelle contre lui et ses subgiez, et aussi en cas d’appel de ses diz seneschaulx ou commis, qui est attempter directement contre ses previleges et libertez, et les us et coustumes dudit païs de Bretaigne, ou grant grief, prejudice et dommaige de lui et de ses subgiez ; requerant humblement sur ce nostre provision. Pour ce est il que nous, ces choses considerées, voulans pourveoir à nostre dit nepveu et à ses diz subgiez, ainsi que raison est, vous mandons et defendons bien expressement, et à chascun de vous, si comme à lui appartendra, que contre ne ou prejudice de ses previleges, franchises, libertez et graces, octroyez par nous et nos diz predecesseurs, et dont ilz auroient deuement usé, vous ne faictes ou souffrez estre fait aucune chose au contraire ; ainçois, se trouvez aucune chose avoir esté faicte ou attemptée contre ne ou prejudice d’iceulx, appellez ceulx qui pour ce seront à appeller, le faictes reparer et remettre au premier estat et deu. Et tout sans prejudice de noz droiz de ressort et souveraineté, et autres qui nous doivent et pevent competer et appartenir audit duchié. Donné à Razillé près Chinon, le xvie jour de septembre l’an de grace mil cccc.xlvi, et de nostre regne le xxiiiie

Ce mandement est imprimé, d’après la même source, dans le recueil des Ordonnances des rois de France, in-folio, t. XIII, p. 169.

.

Ainsi signé : Par le roy. E. Chevalier.

MCXXIV 4 octobre 1446

Rémission octroyée à Pierre Rolant, de Luçon, qui avait enfreint l’assurement donné, en la cour temporelle de l’évêque de Luçon, à son neveu Pierre Deloix avec lequel il était en discussion d’intérêts.

AN JJ. 178, n° 45, fol. 29 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 392-394

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Pierre Rolant, demourant à Luxon en nostre païs de Poictou, chargié de femme et d’enfans, contenant que, à l’occasion de ce que Pierre Deloix, nepveu dudit suppliant, s’efforçoit sourprendre sur l’eritage dudit suppliant et l’applicquer à soy, ledit suppliant, pour cuider empescher et trouver provision que ledit Deloix ne lui donnast aucun empeschement en aucuns de ses heritages, il demanda asseurement dudit Deloix, son nepveu, en la court temporelle de nostre amé et feal conseiller l’evesque de Luçon

L’évêque de Luçon était alors Nicolas, frère du célèbre Jacques Cœur. D’abord chanoine de la Sainte-Chapelle de Bourges, il succéda à Jean Fleury, vers le mois de décembre 1441, sur le siège épiscopal de Luçon, qu’il occupa jusqu’à sa mort, le 1er octobre 1451. Il fut inhumé dans l’église métropolitaine de Bourges. (Gallia christiana, t. II, col. 1410.)

, ou autre court ; duquel suppliant ledit Deloix requist pareillement avoir asseurement, et asseurerent en ladicte court l’un l’autre. Depuis les quelles asseuretez ainsi donnez l’un à l’autre, comme dit est, les diz suppliant et Deloix se sont, ou mois de septembre derrenier passé, que l’en faisoit vendenger, trouvez en une piece de vigne assis en la parroisse dudit lieu de Luxon, laquelle piece de vigne chascun des diz suppliant et Deloix disoient à eulx appartenir, et eulx estans en la dicte vigne, et que chascun d’eulx se ventoit de la faire vendenger et en prendre les fruiz, paroles et debatz sourdirent entre eulx et s’entreprindrent de langaiges. Après lesquelz et durant iceulx, ledit suppliant esmeu des langaiges dudit Deloix, son nepveu, le frappa d’un baston qu’il tenoit en sa main sur le bras ; lequel Deloix, après le dit cop à lui baillié par ledit suppliant, se print à lui et rompit le lasset des cousteaulx dudit suppliant qui pendoient à sa seinture, et tira l’un des cousteaux dudit suppliant et l’en cuida frapper. Et en soy prenant au corps dudit suppliant, pour le cuider frapper dudit cousteau, mist son doy en la bouche dudit suppliant, lequel il lui estreigny très fort aux dens, dont ledit suppliant fut après très dolant et courroucié. A l’occasion duquel cas et seureté enfrainte, ledit suppliant doubte que on voulsist contre lui proceder à pugnicion corporelle, ou qu’il feust contraint de laisser et habandonner le païs, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, humblement requerant que, considéré que en ce n’a mort ne mutilacion et que ledit suppliant frappa ledit Deloix, son nepveu, en chaude colle et n’avoit entencion de lui meffaire, quant il ala à ladicte vigne, et qu’il fust esmeu pour les paroles dudit Deloix, son nepveu, lequel devoit endurer dudit suppliant, comme il lui sembloit, il nous plaise sur ce lui impartir icelle. Pour quoy nous, attendu ce que dit est, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant avons ou cas dessus dit remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, aux seneschaulx de Poictou, de Xanctonge et gouverneur de la Rochelle, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, le quatreyeme jour d’octobre l’an de grace mil cccc. quarante six, et de nostre regne le xxiiiime.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. M. Guernadon. — Visa. Contentor. Ja. de La Garde.

MCXXV Octobre 1446

Lettres d’amortissement d’un terrain destiné à l’agrandissement du cimetière de la paroisse Notre-Dame de Légé en Poitou.

AN JJ. 178, n° 50, fol. 32 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 394-396

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des manans, habitans et parroissiens de la parroisse de Nostre Dame de Ligé en nostre païs de Poictou, contenant que ladicte parroisse s’est puis certain temps ença fort peuplée et habitée, et joingnant l’eglise de la parroisse dudit lieu a ung cimetiere d’ancienneté, lequel est à present bien petit, et à l’un des boutz d’icelui y a ung mur, à l’occasion duquel convient à iceulx supplians, quant ilz veulent faire aucune procession, prendre bien long tour et passer par certain chemin ancien au bout par dehors dudit cimetiere, et lequel est mal aisié, et aucunes foiz y a plusieurs inmondices. Et pour ce iceulx supplians augmenteroient et acroistroient voulentiers leur dit cimetiere du dit chemin ancien qui n’est large que d’une toise et demie et de long de sept à huit toises ou environ, et romproient ledit mur, qui est joingnant d’icelui, pour faire leur tour et procession plus aisiement, s’il nous plaisoit de ce faire leur donner congié et licence, et admortir ledit chemin, et sur ce leur impartir nostre grace ; en nous humblement requerant que, consideré que c’est pour le bien et augmentacion du service divin, et qu’ilz sont contens de bailler au plus près autant d’aussi bonne ou meilleure place pour faire le dit chemin que le dit ancien, et recompensant ceulx qui y ont interestz, il nous plaise iceulx noz congié et licence leur donner et avec ce admortir le dit chemin ancien, et sur ce leur impartir nostre grace. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans l’augmentacion du dit service divin, et aussi pour la singuliere devocion que avons à la glorieuse Vierge Marie dont la dicte eglise est fondée, et aussi à ce que soyons participans ès prieres et biens faiz qui doresenavant seront faiz en icelle eglise, ausdiz supplians avons donné et donnons par ces presentes congié et licence de abatre ou faire abatre et demolir ledit mur, et de accroistre et augmenter ledit cimetiere du dit chemin ancien, des longueur et largeur dessus dictes ou autre telle qu’ilz verront estre à faire. Et laquelle place ou chemin nous avons admortie et admortissons de grace especial, pleine puissance et auctorité royal, par ces presentes, et voulons qu’ilz la tiengnent oudit cimetiere comme admortie et à Dieu dediée, parmi ce qu’ilz seront tenuz de faire ou faire faire autour du dit cimetiere ung autre chemin, bon et aussi aisié et convenable que le dessus dit, et de recompenser raisonnablement ceulx qui en ce auront interest. Si donnons en mandement, par ces presentes, à noz amez et feaulx les gens de noz comptes et tresoriers, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieux tenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de noz presens grace, don, congié, licence, admortissement et de tout le contenu en ces dictes presentes ilz facent, seuffrent et laissent les diz supplians et leurs successeurs joïr et user pleinement et paisiblement, sans leur faire, mettre ou donner ne souffrir estre fait, mis ou donné, ores ne ou temps avenir, aucun destourbier ou empeschement au contraire, mais, se fait, mis ou donné leur estoit en aucune maniere, le reparent et remettent ou facent reparer et remettre sans delay au premier estat et deu. Car ainsi nous plaist il estre fait. Et afin que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Rasilly près Chinon, ou mois d’octobre l’an de grace mil cccc. quarante et six, et de nostre regne le xxiiiime.

Ainsi signé : Par le roy, vous, l’arcevesque de Reims

Jacques Jouvenel des Ursins, alors archevêque de Reims, évêque de Poitiers en 1449. (Cf. ci-dessus, p. 239, note 2.)

, les sires de la Varenne et de Precigny

Pierre de Brézé et Bertrand de Beauvau (ci-dessus, p. 178, note).

, et autres presens. De la Loere. — Visa. Contentor. Ja. de La Garde.

MCXXVI Octobre 1446

Rémission accordée à Thomin Guichart, homme de guerre, originaire de Normandie, demeurant à Mauléon en Poitou, qui avait frappé mortellement un passant, habitant de Saint-Mesmin, parce que, lui ayant demandé son chemin, il s’était moqué de lui.

AN JJ. 178, n° 51, fol. 32 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 396-399

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Thomin Guichart, jeune homme de guerre, natif du païs de Normandie, logié à Mauleon en la seneschaucée de Poictou, contenant que, la veille de la feste saint Michiel derrenierement passée, ledit suppliant se partit dudit lieu de Mauleon, pour cuider aler au lieu des Arbiers

Sic. Lisez des Herbiers.

, à trois lieues ou environ dudit lieu de Mauleon, querir la selle d’un sien cheval qui nagueres avoit esté mort audit lieu des Arbiers, et en soy en alant, ledit suppliant qui n’est pas du païs et ne savoit les chemins, se esgara. Et quant il se vit ainsi esgaré et hors de son chemin, fut bien esbahy et print fort à chevaucher et tant qu’il aconsuivit quatre hommes qui menoient des potz de terre en charrettes ; ausquelz ledit suppliant demanda s’ilz savoient le chemin aux Arbiers. Lesquelz lui respondirent que non et qu’ilz n’estoient pas du païs, et ne lui sauroient enseigner. Et lors icelui suppliant vit ung homme nommé Ylaire Bergeron, de la parroise du Vieil Saint Mesmin, à trois lieues ou environ du dit Mauleon, qui aloit devant lui, et demanda ausdiz quatre hommes : « Celuy qui va devant vous en scet il riens ? » A quoy ilz respondirent qu’ilz ne savoient. Et adonc icelui suppliant chevaucha si fort qu’il aconsuivy ledit Ylaire Bergeron près de la ville de la Closseliere

Sic. Lisez la Flosselière.

, auquel il demanda s’il savoit point où estoit le chemin aux Arbiers. Lequel Ylaire lui respondi par maniere de moquerie ces paroles ou autres semblables en effect et substance : « Helas ! sire, vous ne le savez mie. » Et adonc ledit suppliant lui respondi que vraiement il ne le savoit point et que s’il l’eust sceu, il ne lui eust point demandé. Et lors ledit Ylaire lui dist : « Vecy deux chemins, prenez lequel que bon vous semblera, et autre chose ne vous en diray. » Et quant icelui suppliant vit qu’il estoit ainsi esgaré, et qu’il ne lui vouloit point enseigner ledit chemin, mais se moquoit de lui, quant il le demandoit, fut de ce fort courroucé et marry, et illec eschauffé, mal meu et tempté de l’ennemi, tira ung espée qu’il avoit, et en cuida donner du plat audit Ylaire ; mais de male aventure elle lui tourna en la main et le frappa de courage marry ung seul cop sur la teste ; duquel cop ledit Ylaire cheut à terre, et fut mené en son hostel audit lieu de Saint Mesmin, ouquel, deux ou trois jours après, par faulte de garde, bon gouvernement ou autrement, il ala de vie à trespas. Pour occasion duquel cas, ledit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du païs et n’y oseroit retourner, demourer ne converser, se sur ce ne lui estoient imparties noz grace et misericorde, si comme il dit, en nous humblement requerant que, ce consideré et que le dit suppliant nous a tousjours bien et loyalment servi ou fait de noz guerres, et a laissié et habandonné tous ses biens et heritaiges qu’il avoit ou dit pays de Normandie, pour nous servir et estre et demourer soubz nous et en nostre obeissance, et encores a entencion de nous bien et loyalment servir, et qu’il a fait et commis les fait et cas dessus diz par temptacion de l’ennemi et par eschauffement et de courage mal meu, et que, quant il trouva ledit Bergeron, il estoit fort marry et courroucié de la fortune qui lui estoit avenue de son cheval qui peu de temps par avant avoit esté mort, et dont il aloit querir la selle, comme dessus est dit, et aussi que en tous autres cas il a esté et est de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans oncques avoir esté reprins d’aucun villain cas, blasme ou reprouche, nous lui vueillons sur ce impartir nosdictes grace et misericorde. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans en ce cas misericorde estre preferée à rigueur de justice, au dit suppliant avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’octobre l’an de grace mil cccc. quarante six, et de nostre regne le xxiiiime.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Pregrimaut. — Visa. Contentor. Charlet.

MCXXVII Octobre 1446

Rémission octroyée à « Jean Ruaud, dit Verraud, jeune homme demourant en la ville de Bourgonneuf, de nostre chastellenie et ressort de Montmorillon, en nostre païs et conté du Poictou

La localité mentionnée ici ne pouvant être identifiée qu’avec Bourganeuf dans la Marche, ces lettres n’ont pour nous d’autre intérêt que de fournir un renseignement sur l’étendue de la châtellenie de Montmorillon. C’est pourquoi nous nous contentons d’en publier ce court extrait.

 », pour le vol d’un « beuf rouge appartenant au seigneur dudit lieu de Bourgonneuf, lequel il faisoit tenir en ung sien pré, nommé le pré de l’Ospital » ; et plusieurs autres vols commis au préjudice du commandeur et d’autres habitants de cette ville. « Si donnons en mandement par ces presentes au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné aux Roches Tranchelyon, ou mois d’octobre l’an de grace mil quatre cens quarante six et de nostre regne le xxiiiie. »

AN JJ. 178, n° 57, fol. 56 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 399

MCXXVIII Novembre 1446

Rémission octroyée à Jean et Olivier Berlant, et à leur père Jean, seigneur de Jeu, à cause du meurtre de Jean de la Gaubertière, avec lequel ils étaient en procès touchant la possession de la métairie de la Brosse, mouvant dudit Jeu.

AN JJ. 178, n° 185, fol. 108 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 399-404

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Berlant

Jean Berlant, écuyer, seigneur de Jeu, né en 1386, puisqu’il avait soixante ans à la date de ces lettres, marié vers 1420 à Catherine de Jeu. D’après la généalogie imprimée dans la nouv. édit. du Dictionnaire des familles du Poitou, il aurait été fils d’autre Jean, écuyer, sr de Jeu, et de Jeanne de Jeu. Il y a là une erreur que permet de rectifier le texte d’un accord du 29 août 1429, homologué au Parlement de Poitiers. (Arch. nat., X1c 138, à la date.) On lit dans cet acte que feu Simon Berlant, fils et héritier de feu Pierre Berlant, avait été en procès avec Gilles Bourgeois à propos de certains biens meubles et immeubles qui avaient appartenu à Philippe Boulanger, mère de Perrette Chauvais, femme dudit Gilles et depuis décédée, dont ledit Pierre Berlant avait eu autrefois la tutelle. Simon Berlant était mort avant le règlement de cette contestation, et ses enfants furent assignés devant le sénéchal de Poitou par Gilles Bourgeois. Ceux-ci étaient : Jean, Ithière, mariée dès lors à Jean de Couhé, écuyer, et Marie, qui épousa plus tard Pierre Prévost (avant le 7 avril 1432, Invent. des arch. du château de la Barre, t. II, p. 441). De ce texte il résulte que l’on doit réunir le § VI, dit branche de Châtellerault de la généalogie donnée par MM. Beauchet-Filleau, au § IV, branche de Jeu. On voit dans la rémission de novembre 1446 que Jean Berlant, sr de Jeu, eut au moins deux fils, Jean, le jeune, et Olivier. L’aîné était marié, depuis l’année précédente environ, avec Marie de Combarel, fille de François, chevalier, sr de Noaillé et de la Chèze, capitaine de Chauvigny, et de Jacquette de Mons. On ne sait rien du cadet.

, l’ainsné, aagé de soixante ans ou environ, Jehan et Olivier les Berlans, freres, enfans dudit Jehan Berlant, contenant que à eulx compete et appartient la terre et seigneurie de Jeu, en laquelle pieça ilz misdrent ung mestayer, leur fermier, nommé Michault Denis, lequel pour labourer la mestayerie de la Broce, qui lui appartenoit et en avoit joy de long temps, s’estoit retrait et alé audit lieu de la Broce, pour faire ses vignes, auquel lieu ung nommé Jehan de la Gobertiere

La Gaubertière était un ancien fief mouvant de Montreuil-Bonnin, dont était seigneur, le 8 octobre 1364, un nommé Guillaume Pannet. (Aveu de cette date, Arch. nat., P. 1145, fol. 35 v°.) Il avait donné son nom à une famille, dont quelques membres, outre celui dont il s’agit ici, sont mentionnés dans des textes des premières années du xve siècle. Un autre Jean, aliàs Jacques, de la Gaubertière était prieur de Saint-Clémentin, et eut procès contre Jean de la Haye, écuyer, seigneur de Passavant, Clément de Montours, écuyer, Guillaume de Soussay, Jean Raflet, Nicolas Martineau, de Bressuire, etc. (Voir deux arrêts, l’un du 18 janvier 1413 n.s., le second, long et intéressant, du 18 janvier 1416 n.s., X1a 59, fol. 302 v° ; X1a 61, fol. 161 v°.) Nicolas de la Gaubertière était seigneur de la Chalopinière en Cirières, l’an 1393. (B. Ledain, Hist. de Bressuire, p. 404.) Pierre de la Gaubertière était garde du sceau aux contrats de la Roche-sur-Yon, de 1390 à 1394. (Cartulaire d’Orbestier, p. 246 et 327, note.)

, qu’il disoit avoir droit en ladicte mestayerie de la Broce, batit très enormesment ledit fermier, telement qu’il en fut longuement malade et en dangier de sa vie, et le chassa hors de sa dicte mestayerie. Laquelle chose venue à la congnoissance…

Sic. Un membre de phrase a été omis ici par le copiste.

, desplaisans dudit oultraige, conceurent hayne, et se meurent à ceste cause paroles entre ledit Jehan Berlant le jeune et le dit Jehan de la Gaubertiere, qui à ceste occasion print asseurement dudit Jehan Berlant. Et depuis, iceulx supplians qui pretendoient droit en la dicte mestayerie de la Broce, tant parce qu’elle estoit d’ancienneté du fief et hommaige dudit lieu de Jeu, que aussi par laiz et transport dudit Michault Denis, ou autrement, obtindrent noz lettres patentes de complainte en cas de saisine et de nouvelleté, lesquelles ilz firent executer et mettre ladicte mestayerie en nostre main et gouvernement soubz icelle, jusques à ce que par justice en feust autrement ordonné. Et à l’excecution d’icelles estoit present ledit Jehan Berlant, le jeune, qui soubz umbre de ce que les commis de par nous au gouvernement de la dicte mestayerie, quelque commandement qu’ilz feissent faire audit Jehan de la Gaubertiere de partir, ne vouloit vuidier, requist à Thomassin Valut

Les deux dernières lettres de ce nom sont douteuses. On pourrait lire aussi bien Valné ou Value. Ce qui nous a porté à l’imprimer sous cette forme Valut, c’est que l’on trouve dans un compte du 23 avril 1448 le nom d’un Guillaume de Velut (très lisiblement écrit), aussi sergent de la ville de Poitiers, qui avait été chargé à cette date d’aller mettre en état d’arrestation le capitaine de la Meilleraye et de l’amener à Poitiers. (Arch. nat., KK. 337, fol. 33 v°.)

, nostre sergent, qui avoit excecuté les dictes lettres de complainte, lequel il trouva en la ville d’Angle en Poictou, en la halle d’ilec, qu’il y pourveust en maniere que ledit fermier dudit Gaubertiere vuidast, ou semblables paroles dit en effect audit sergent. Laquelle chose Estienne Perrot, pere de la feue femme dudit Gaubertiere, illec present, contredit. Sur quoy paroles hayneuses se meurent entre ledit Jehan Berlant, le jeune, et ledit Perrot, et entre autres paroles ledit Jehan Berlant dist audit Estienne Perrot qu’il queroit tousjours debat et qu’il estoit mauvais vilain ; et le dit Estienne Perrot dist audit Jehan Berlant qu’il n’estoit vilain, mais comme… (sic). Et ledit Jehan Berlant lui dist que se ledit Perrot vouloit dire qu’il feust vilain comme lui, que il mentoit, et se voulu approucher d’icellui Estienne Perrot, mais ung gentilhomme [nommé] Caraleu l’empescha qu’il ne le ferist que ung cop. Et lors le dit Estienne Perrot le frappa d’un baston sur la teste. Et après ledit Jehan Berlant le frappa de son espée et le bleça ung peu ou braz, et tantost après, ainsi que ledit Jehan Berlant, le jeune, s’en vouloit aler audit lieu de Jeu et estoit prest de monter à cheval, le dit Gaubertiere survint tout esmeu et tenant en sa main une grant espée toute nue, voulu courir sus audit Jehan Berlant, le jeune, mais le dit Caraleu, qui illec estoit et autres presens l’en garderent ; dont ledit Gaubertiere fut très mal content, et dist qu’ilz se trouveroient ailleurs qui n’y aroit pas tant de tesmoings, et dist plusieurs injures et menaces audit Jehan Berlant, le jeune. Et voyant qu’il ne povoit illecques acomplir sa voulenté, s’en ala en disant que ainsi ne demourroit pas, et qu’il en y auroit qui demourroient sur les carreaulx, avant qu’il feust Noel, ou parolles semblables en effect. Durant lesquelles, ledit Jehan Berlant demanda à ung notaire illec present instrument de ce que ledit Gaubertiere le menaçoit, veu qu’il estoit en seurté de lui. Et après ledit Jehan Berlant tantost monta à cheval, pour s’en aler audit lieu de Jeu. Et quant il fut sur le chemin, il vit ledit Gaubertiere qui chevauchoit par ung autre chemin, tirant au chemin par où aloit icellui Jehan Berlant, le jeune, lequel estoit seul. Et lors se doubta et s’en couru audit lieu de Jeu, et dist audit Olivier Berlant, son frere, que les diz Estienne Perrot et Gaubertiere lui avoient fait oultraige audit lieu d’Angle, en la maniere dessus dicte, et l’avoient voulu batre, et que il avoit veu ledit Gaubertiere ou chemin illec près, qui le suivoit ne savoit pour quoy ne à quelle intencion, combien que se feust le chemin pour s’en aler en son hostel. Et tantost ledit Olivier Berlant, courroucié des choses dessus dictes, monta à cheval et s’en ala avec ledit Jehan Berlant le jeune, son frere, au chemin par lequel aloit le dit Gaubertiere, près dudit hostel de Jeu. Et tantost que ledit Gaubertiere les vit, s’avança lors vers eulx et tira son espée toute nue en son poing, en criant : « A mort ! » Et lors les diz freres, dont l’un avoit une espée qu’il tira toute nue, et l’autre avoit une javeline et espée, de laquelle javeline ledit Olivier qui la tenoit fery ledit Gaubertiere ou cousté, où il fut ung petit bleciez. Et lors ledit de la Gaubertiere print la dicte javeline et l’osta audit Olivier, et l’en bleça en la main. Et lors se joingnirent ensemble chascun son espée toute nue, en frappant l’un sur l’autre, et d’un cop que ledit Gaubertiere cuida frapper sur la jambe dudit Olivier, lui couppa son esperon, et les diz freres le frapperent plusieurs coups en plusieurs parties de son corps. Durant lequel debat, Jehan Berlant, l’ainsné, pere des diz freres, voulant eschever l’inconvenient, couru illec sans aucun baston, en cryant et disant à ses enfans ces parolles ou semblables : « Ne le tuez pas, ne le tuez pas ! mais couppez lui les bras et les jambes ! » Pour occasion desquelz coups, ledit Gaubertiere tantost après ala de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas, les diz supplians, doubtans rigueur de justice, se sont absentez du pays, où ilz n’oseroient repairer ne converser, se nostre grace et misericorde ne leur estoit sur ce impartie. Requerans humblement que, attendu que ledit cas est advenu de mal aventure, qu’ilz sont extraiz de noble lignée et nous ont loyaument serviz ou fait de noz guerres, à leur povoir, etc., nous leur vueillons subvenir de nostre grace et misericorde. Pour quoy nous, voulans iceulx grace et misericordre preferer à rigueur de justice, ausdiz suplians avons quicté, remis et pardonné, etc., satisfaction faicte à partie civilement tant seulement. Si donnons en mandement, par ces presentes, aux seneschaulx de Poictou et de Xanctonge et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou mois de novembre l’an de grace mil cccc.xlvi, et de nostre regne le xxve.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. N. du Brueil. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MCXXIX Janvier 1447

Lettres d’amortissement, en faveur de l’abbaye de Saint-Laon de Thouars, d’une rente annuelle de 200 livres donnée par feu Marguerite d’Ecosse, femme du dauphin Louis, pour la fondation d’une chapelle dans ledit monastère.

AN JJ. 178, n° 111, fol. 72 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 404-408

Karolus, etc. Ad perpetuam rei memoriam. Preclari meriti opus haud dubium agere credimus, si his que divini cultus augmentum concernunt et Christi fidelium pia vota exequntur, regie liberalitatis gratiam impartimur. Sane pro parte dilectorum nostrorum Nicolai, abbatis moderni, atque conventus monasterii Sancti Launi de Thoarcio

L’abbé de Saint-Laon de Thouars, Nicolas Lecocq (quelquefois nommé Leroy), avait succédé depuis peu de temps à Nicolas Gadart (et non Gadieu ou Godier, comme l’appelle la Gallia christ., t. II, col. 1345), ce dernier mentionné dans des actes de 1430, 1436 et 1444, dans ces deux derniers absque cognomine. Nicolas II gouvernait l’abbaye en 1446 et est assez fréquemment cité dans les textes entre cette date et le 14 janvier 1481. L’abbaye de Saint-Laon était en procès, le 3 juillet 1380, contre l’abbé de la Trinité de Mauléon, au sujet du prieuré de Beaulieu. (Permission de conclure un accord. X1a 29, fol. 76.) A la date du 27 mai 1419, les registres du Parlement de Poitiers contiennent un long arrêt rendu entre les Frères prêcheurs de Thouars et Saint-Laon. (X1a 9190, fol. 59.) L’abbé Nicolas Lecocq poursuivit au criminel un nommé Nicolas Morin, praticien en cour laie. (Actes des 10 décembre 1467, 22 avril et 11 août 1468, X2a 35.) Rappelons aussi que le 17 juillet 1447, Louis d’Amboise, vicomte de Thouars, fit élection de sépulture dans l’église de cette abbaye et y fonda un service et des messes. (Coll. dom Fonteneau, d’après le chartrier de Thouars, t. XXVI, p. 399.)

, ordinis Sancti Augustini, Pictavensis dyocesis, nobis extitit nuper expositum quod deffuncta carissima filia nostra, carissima Margareta, quondam serenissimi principis fratris, consanguinei et confederati nostri Jacobi, Scotorum regis, primogenita, uxorque, dum ageret in humanis, precarissimi primogeniti nostri Ludovici, delphini Viennensis

Marguerite, fille aînée de Jacques I Stuart, roi d’Écosse, avait été fiancée par traité conclu à Chinon, le 30 octobre 1428, et mariée à Tours, le 24 juin 1436, avec dispense de l’archevêque de Tours, parce que le dauphin Louis n’était pas encore entré dans sa quatorzième année et que la jeune épouse avait à peine douze ans accomplis. La dauphine, après huit ans d’une union qui ne lui apporta qu’une profonde tristesse, mourut à Châlons-sur-Marne, le 16 août 1445, sans postérité. M. de Beaucourt entre dans quelques détails au sujet d’une enquête ordonnée sur les causes de ce décès, qui parut mystérieux. (Hist. de Charles VII, t. IV, p. 106-111, 181.) Le corps de Marguerite d’Écosse fut déposé dans la cathédrale de Saint-Étienne de Châlons, où il demeura jusqu’au 31 octobre 1479. Il fut alors transporté à l’abbaye de Saint-Laon de Thouars, et y fut inhumé le dimanche 14 novembre suivant, dans un tombeau, à droite de la chapelle de la Vierge. Ce fait était rappelé dans l’épitaphe de l’abbé Nicolas Lecocq : « Hic jacet Nicolaus, miseratione divina abbas hujus regalis monasterii, qui dum vixit, anno scilicet 1479, Margaritam, Jacobi regis Scotorum filiam, Ludovici XI, dum esset delphinus Viennensis, uxorem, sepelivit in capella Sepulcri Domini nostri J.-C. à se ædificata, ultimus regularium abbas. » (Gall. christ., loc. cit.)

, pio laudabilique ducta proposito ac de salute sua cogitans, ad omnipotentis Dei gloriam et laudem, ac in honorem gloriose virginis Marie, cappellaniam seu cappellam quamdam in monasterio predicto extrui et edificari atque vocabulo Dominici Sepulcri ordinavit appellari, instituitque preterea ut qualibet die dominica missa de ipsa Virgine beatissima alta voce decentique ritu per religiosos antedictos, vita sua durante, et post ejus obitum, cessante illa missa, alia pro deffunctis per generalem ecclesie institucionem dici consueta, cum ministerio dyaconi atque subdyaconi, qualibet die lune, pro remedio ac salute anime sue suorumque predecessorum perpetuo haberet celebrari. Ordinavit insuper quod eisdem anno et die quibus genitor suus ab hac luce subtractus est, anniversarium solenne cum tedis et cereis atque campanarum assueto sonitu perpetuis ibidem fieret temporibus. Pro cujus quidem cappelle structura perfectiorique debito et missarum atque anniversarie commemoracionis prefatis fundacione dotacioneque perneccessariis, quarum admortizationem oportunam eadem filia procurare promiserat, iidem abbas et conventus à prenominata filia certum pignus valoris seu extimacionis sexcentorum aureorum

Ce gage consistait en un Livre d’heures de Notre-Dame richement enluminé, que Marguerite avait mis en dépôt entre les mains de l’abbé, et qui fut rendu au roi Charles VII, l’an 1459. Nicolas Gadart, le prédécesseur immédiat de l’abbé Nicolas Lecocq, avait fait commencer les travaux de la chapelle, avant d’avoir reçu la somme promise, mais ils restèrent longtemps en suspens. Par lettres données en chapitre le 25 septembre 1459, l’abbé et les religieux de Saint-Laon prirent l’engagement de continuer et d’achever cet édifice, qui, suivant l’intention de la fondatrice, devait être sous le vocable du Saint-Sépulcre et reproduire le tombeau de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et de célébrer le service anniversaire de la dauphine et les messes tous les lundis de l’année. Dans cet acte sont rappelées les présentes lettres d’amortissement. (Original scellé de deux sceaux, celui de l’abbé et celui du monastère, Arch. nat., J. 467, n° 104.) A cet engagement est annexée une quittance de l’abbé Nicolas II, en date du 18 novembre 1459. Il reconnaît avoir reçu, ce jour, de Mathieu Beauvarlet, notaire et secrétaire du roi, commis à la recette générale des finances, la somme de 825 livres tournois, pour 600 écus d’or que feu Mme la dauphine nous donna en son vivant pour fonder en notre église, pour le salut de son âme, une messe chaque lundi de l’année, un Ne recorderis à l’issue de ladite messe, et un anniversaire perpétuel pour le roi d’Écosse son père, « pour seurté de laquelle somme elle nous bailla en depost certaines heures bien riches qu’elle avoit, lesquelles nous avons rendues au roy. » (Original scellé, id., n° 104 bis.)

usualium tunc temporis receperunt. Quorum pars una in explemento ipsius edifficii, reliqua vero in fundacione dotacioneque predictis deberet converti. Postmodum vero ipsa filia morte immatura prerepta, ejus pia intencio, prout superius declaratum est, nequivit adimpleri, quamquam iidem exponentes divini cultus obsequium modo pretacto actenus continuaverint, supplicantes humiliter per nos super his provisione oportuna graciosaque sibi provideri. Hinc est quod nos, premissis consideratis, desiderantes divinum cultum semper adaugeri, ac ipsius filie salubrem intencionem effectum plenarium sortiri, contemplacione eciam inite pridem affinitatis ac regie prosapie, utque preterea nos ac successores nostri hujus modi spiritualium bonorum participes imposterum efficiamur, habita quoque consilii nostri deliberacione matura, eisdem abbati et conventui ut ducentas libras Turonensium annui et perpetui redditus per eosdem acquisitas aut acquirendas, simul vel successive, ad fundacionem et dotacionem sepedictas et missarum anniversariique solennium atque ceterorum predeclaratorum debitum complementum, possint et valeant habere ac retinere, et perpetuo, tanquam rem suam propriam ecclesiasticam, possidere, absque eo quod eas extra manus suas ponere teneantur, nec quod ad hoc de cetero cogi possint quoquomodo, ex nostra certa scientia, auctoritate regia, potestatis plenitudine et gratia speciali concessimus atque concedimus per presentes, solvendo tamen semel per eosdem abbatem et conventum, nobis aut successoribus nostris, moderatam propter hoc financiam. Quocirca tenore presentium damus in mandatis dilectis et fidelibus gentibus camere compotorum nostrorum atque thesaurariis, senescallo Pictavie, ceterisque justiciariis et officiariis nostris, aut eorum loca tenentibus, presentibus et futuris, et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, quatinus prenominatos abbatem et conventum, ac eorum successores, nostris presentibus gratia atque concessione uti et gaudere plene, libere atque pacifice faciant et permittant, nullum impedimentum, vexacionem aut disturbium super his sibi prestando, faciendo, aut a quoquam prestari vel fieri deinceps permittendo. Quoniam sic fieri volumus, statutis ac editis in contrarium non obstantibus quibuscumque. Quod ut firmum et stabile perpetuo perseveret, nostrum litteris presentibus fecimus apponi sigillum. Nostros in aliis et alieno in omnibus jure semper salvo. Datum in Montiliis prope Turonis, mense januarii anno Domini millesimo ccccmo xlvito, regni vero nostri xxvto.

Sic signatas : Per regem, vobis, comite Ebroicensi

Jean Stuart, comte d’Aubigny, connétable d’Écosse, à qui Charles VII avait fait don du comté d’Evreux, par lettres de janvier 1427, était mort au service du roi, le 12 février 1429. Le comté avait alors fait retour au domaine. Quand la ville d’Evreux fut reprise sur les Anglais, le 15 septembre 1441, Pierre de Brézé reçut de Charles VII le titre de comte d’Evreux, suivant M. de Beaucourt (Hist. de Charles VII, t. III, p. 292.) C’est donc lui qui est désigné ainsi en cet endroit.

, domino de Precigniaco

Bertrand de Beauvau, sr de Pressigny (ci-dessus, p. 273, note 3).

, magistro Johanne Burelli

Jean Bureau (ci-dessus, p. 172, note 3).

et aliis presentibus. Giraudeau. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MCXXX Février 1447

Lettres d’abolition données en faveur de Bertrand de Chanac, écuyer, capitaine de Château-Larcher pour le seigneur du lieu, de tous les excès, rançonnements et exactions dont il s’est rendu coupable dans ladite place.

AN JJ. 178, n° 132, fol. 82 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 408-413

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre amé Bertran de Chanac, escuier, contenant que despieça le seigneur de la place de Chastelachier

Bertrand est appelé ailleurs bâtard de Chanac ou Chenac. Il était probablement fils naturel d’Élie de Chanac, chevalier, seigneur de Château-Larcher et de Bourg-Archambault, mort avant le mois de septembre 1419, et par suite le beau-frère d’Odet de Rivière, sr de Château-Larcher, qui lui donna la capitainerie de cette place. Au commencement de juin 1434, Bertrand apporta à Poitiers, à Maurice Claveurier, lieutenant du sénéchal de Poitou, une lettre de menaces et de défi que lui adressait le seigneur de Château-Larcher. Claveurier porta plainte au Parlement, le 7 juin. « Veues par la court, lit-on sur le registre, certaines lettres escriptes par Odet de Riviere,… par lesquelles, entre autres choses il se vante de faire forte guerre, se icellui lieutenant ne lui rend un sien serviteur, tenu prisonnier en la prevosté de Poitiers, à cause de certaine destrousse par lui et autres faite, comme l’en dit, sur les gens et serviteurs du lieutenant du capitaine du chastel de Poitiers, et oy le rapport dudit Claveurier sur le fait et gouvernement dudit Bertran et sur la maniere rigoureuse qu’il tint en parlant à lui sur le fait desd. lettres, deliberé et conclu a esté par la court que icellui Bertrand bastard de Chenac sera emprisonné en la Conciergerie du Palaiz et interrogué au long par mres Pierre de Tuillières et Philippe des Courtilz sur son estat, vie et gouvernement, et que, se par sa confession ou autrement il est trouvé coulpable d’aucuns cas que l’en lui impose, on lui fera procès ainsi qu’il appartiendra. — Et avec ce a esté appoinctié et ordonné que le procureur du roy prendra lettre à la chancellerie, narration faicte du fait et cas des lettres dessus dictes et des autres excès et malefices commis par ledit Odet de Riviere et Ponchon de Riviere, son frere, et leurs serviteurs, par lesquelles sera mandé et commis que, informacion precedent, les coulpables seroient prins et amenez prisonniers en la Consiergerie, se faire se peut, sin autem adjornez à ban, etc., à Poictiers, Gençay, Vivonne et ailleurs, etc., à comparoir ceans en personne pour ester à droit. » (Arch. nat., X2a 21, date du 7 juin 1434.) Le 9 juin, Guillaume des Hayes, écuyer, lieutenant du sr de la Varenne, capitaine du château de Poitiers, se présenta à la cour et déclara s’opposer à la mise en liberté de Bertrand. Celui-ci resta enfermé à la Conciergerie jusqu’au 19 juin, qu’il obtint son élargissement par la ville de Poitiers et s’engagea à n’en point franchir les portes, sans le congé de la cour. Puis, le 23, il fut élargi partout, « parmi ce qu’il a promis et juré en foy de gentilhomme et sur son honneur, à peine d’estre convaincu des cas à lui imposez, plus de payer 500 livres tournois et autres peines accoustumées, de comparoir ceans en personne toutes les fois que la court l’ordonnera ». Jean Raveneau, écuyer, capitaine de Vivonne, se constitua pleige et caution de ladite somme, et Bertrand de Chanac fit élection de domicile à Poitiers, chez Yves Fougère, son procureur. (X2a 21, aux dates.) Le même registre contient d’autres délibérations curieuses relatives à cette affaire et au seigneur de Château-Larcher. Nous les réservons pour l’introduction de ce volume.

L’année suivante, Odet de Rivière occupait le château de Courbefy en Limousin et, bien qu’il le tînt pour le roi, il s’y conduisait comme en pays ennemi. Les États durent traiter avec lui à prix d’argent pour lui faire évacuer la place avec ses gens. Mais tous les capitaines se valaient. Il fallut encore promettre à son successeur 200 francs pour obtenir que, pendant une saison, les hommes de la garnison s’abstinssent de piller et d’appatisser les gens du pays. (A. Thomas, Les États de la France centrale sous Charles VII, t. I, p. 149 ; t. II, p. 66, 68, 70.) Odet avait épousé Blanche, fille d’Élie de Chanac et de Marie de Culant, et son beau-frère, Guy de Chanac, étant mort jeune et sans alliance, il avait hérité des seigneuries de Bourg-Archambault et de Château-Larcher ; il était, paraît-il, originaire de Gascogne. (Voir Château-Larcher et ses seigneurs, par l’abbé Drochon, Mémoires de la Société des Antiquaires de l’Ouest, t. XXXIX, 1875, p. 63.) Deux textes inédits nous fourniront de nouveaux renseignements sur la succession d’Élie de Chanac. Celui-ci, « à la requête de plusieurs barons, chevaliers, escuiers, bourgois de bonnes villes et autre peuple du païs de Limosin, et pour la pitié qu’il avoit des maulx que faisoient chascun jour les Anglois estans lors ou chastel de Moncele à quatre lieues de Limoges », leur avait prêté la somme qu’ils s’étaient engagés à payer pour obtenir l’évacuation de cette forteresse. Il avait mis à leur disposition de la vaisselle d’argent et des joyaux (dont l’énumération) pour une valeur de 604 livres. Jean de Comborn, sr de Treignac, Louis de Pierre-Buffière et trois autres gentilshommes avaient donné caution de cette somme. Élie de Chanac mourut avant d’être remboursé. Sa veuve, Marie de Culant, agissant en son nom et comme ayant le bail, garde et gouvernement de ses enfants mineurs, mit en cause le sr de Treignac, lui réclamant le cinquième de l’argent prêté. Celui-ci, ayant d’abord refusé, fut assigné devant la cour souveraine de Poitiers, le 25 février 1419 n.s. Le 11 septembre suivant, il reconnut sa dette et se déclara disposé à payer la part qui lui incombait comme garant. (Arch. nat., X1c 118.) Le second acte est le règlement consenti, après plus de quinze ans, du douaire de Marie de Culant. Odet de Rivière et Blanche, sa femme, reconnaissaient que leur mère avait droit à la jouissance viagère de la moitié des biens roturiers et du tiers des biens nobles de son mari situés en Poitou, et du château de la Tour de Tilly pour sa demeure. Mais elle avait touché, disaient-ils, et appliqué à son profit, depuis la mort d’Élie, les revenus de tous les héritages du défunt, sis en pays de droit écrit, où le douaire n’existe pas, revenus qui s’élevaient à une grosse somme, et ils demandaient qu’elle en rendît compte. De plus, Marie avait eu la tutelle de feu Guy de Chanac, chevalier, et de Blanche, ses enfants, et elle aurait dû faire dresser un inventaire des biens et titres de ceux-ci, ce qu’elle n’avait pas fait. Elle avait usé à sa guise de ces biens et n’avait même pas entretenu et réparé les maisons et châteaux, si bien qu’à la fin de la tutelle tout tombait en ruine. Sa fille et son gendre demandaient qu’elle fît faire les réparations nécessaires, et rendît les titres ainsi que la moitié des meubles de son mari. Ils lui réclamaient en outre une rente de 30 livres qu’elle avait vendue à Jean Larcher, de Poitiers, et une autre de même somme, appartenant à ses enfants et que leur oncle Louis de Culant, amiral de France, était tenu de leur servir, etc. Marie de Culant, d’autre part, prétendait qu’elle devait être héritière de son fils Guy, pour une partie des meubles, et qu’Odet et sa femme s’étaient saisis du tout. Enfin, par accord du 28 août 1434, les sr et dame de Château-Larcher s’engagèrent à assigner, le 15 septembre suivant, à leur mère la valeur de moitié des biens roturiers et du tiers des biens nobles sur les terres les plus rapprochées de Tilly, avec moitié de tous les conquêts. Comme Tilly avait été acquis pendant le mariage et que la moitié en revenait à Marie à titre d’héritage, ils lui en abandonnaient l’autre moitié pour en jouir sa vie durant et y faire sa résidence, sans partage ni contestation. (X1c 148.)

en Poictou lui bailla l’administracion et garde d’icelle place, laquelle il a tenue et gardée jusques au decès dudit seigneur, sans pour ce avoir eu aucuns gaiges d’icellui seigneur ne d’autre, ne autres proufiz que les droiz de guetz appartenans en la dicte place, qui estoit pou de chose au regard des despenses, fraiz et mises qu’il a convenu faire audit suppliant, à cause de ladicte garde ; par quoy il ne se y est peu si licitement entretenir qu’il eust bien voulu, et a fait et souffert faire par ceulx qui estoient avecques lui en ladicte place et autrement plusieurs extorcions et prinses de biens, utenciles d’ostel et autres choses sur plusieurs noz subgiez, et mesmement le temps pendant qu’il estoit comme capitaine en icelle place, pour ce que aucunes gens qui y avoient certains leurs biens retraiz, avoient batu ung des gens de la garde d’icellui chastel telement que on esperoit qu’il decedast, le dit suppliant, par le commandement dudit seigneur de la dicte place ou autrement, fist prendre et porter ou donjon d’icelle place tous les biens qui appartenoient à icelles gens, qui à present en font question à icellui suppliant. Et avecques ce il, congnoissant qu’il avoit deux filles, pupilles en la terre et seigneurie d’icellui seigneur de Chastellachier, il fist mener l’ainsnée d’icelles filles en la dicte place, avec une damoiselle de bien, pensant qu’elle se voulsist condescendre à mariage selon le plaisir et voulenté d’icellui seigneur, ce qu’elle ne voult faire ; et pour ce s’en retourna en son hostel et fut mariée ailleurs à sa voulenté. Et aucun temps après, vint à la congnoissance d’icellui seigneur de Chastellachier que le mary d’icelle fille avoit trouvé certaine somme d’or et d’argent ou vielles murailles, en la dicte seigneurie de Chastellachier ; pourquoy icellui seigneur, auquel les espaves qui adviennent en sa seigneurie appartiennent, fist venir devers lui en la dicte place icellui mary de ladicte fille et le fist composer, pour raison d’icellui or et argent trouvé, à lui pour la somme de dix huit escuz d’or, à certain jour nommé, auquel il ne paya ladicte somme ; et pour ce ordonna icellui seigneur audit suppliant et à son receveur qu’ilz le feissent paier d’icelle somme de dix huit escuz ; laquelle chose fist le dit suppliant et receut pour le dit seigneur la dicte somme de xviii. escuz. Et oultre plus, pour ce que ung autre homme qui avoit retrait de ses biens en la dicte place et avoit procès au seigneur d’icelle, pour cause de certains devoirs qu’il ne vouloit paier audit seigneur, et ne vouloit aussi paier sa porcion de certains fraiz qui avoient esté faiz par le dit suppliant, pour faire remettre en point et usaige certains habillemens de guerre estans en icelle place, icellui suppliant saisi et arresta certains biens appartenans audit homme, et tant qu’il lui fist paier ce qu’il en devoit. Et depuis ces choses ainsi advenues, mandasmes et ordonnasmes mettre gens de guerre en garnisons ès places d’icellui païs, pour faire faire guerre à aucuns qui pour lors occuppoient contre nostre voulenté la forteresse de Gençay

Le château de Gençay avait été enlevé à La Trémoïlle, vers le commencement de l’année 1428, et livré au connétable de Richemont, son ennemi. Avait-il été pris de force ou par trahison ? Les renseignements sur les circonstances de cet événement font défaut. On sait seulement que Georges de La Trémoïlle était tombé alors entre les mains de celui qui avait fait le coup et avait obtenu de racheter sa vie et sa liberté, moyennant la somme énorme de 10000 écus d’or. Charles VII d’ailleurs le remboursa libéralement par lettres données à Chinon le 7 février 1429 n.s. (Bibl. nat., ms. Clairambault 204, pièce 8763.) Dans une note relative à Guillaume de Montsorbier (ci-dessus, p. 340), l’on a vu que ce personnage occupait Gençay en 1429, et qu’il y a beaucoup d’apparence que c’est lui qui livra cette place à Richemont. Elle ne fut pas restituée à son propriétaire avant le milieu de 1432. (Voy. l’introduction du présent volume.) C’est pendant cet intervalle que se produisirent les faits visés ici.

 ; lesquelz gens de guerre vivoient sur le païs gracieusement. Si mist icellui suppliant des gens de guerre en la dicte place de Chastellachier, qui se y tindrent par aucuns temps et vesquirent sur les habitans dudit païs et ès environs, en faisant guerre aus diz adversaires et prenans gens prisonniers et raençonnans les biens, vivres et autres choses, prenans patiz sur le pays, occuppé par les diz adversaires, environ le dit Gençay, et autrement, ainsi que faisoient iceulx adversaires sur les tenans nostre party, et à l’environ dudit Chastellachier. Après lesquelles choses passées, le dit seigneur de Chastellachier obtint de nous don de certaine somme de deniers, à icelle avoir sur la taille pour lors de par nous imposée en sa seigneurie de Chastellaicher. Et pour ce qu’il eut besoing d’argent, il commanda audit suppliant qu’il fist diligence d’avoir argent par les commissaires ordonnez à lever icelle taille, ce que fist ledit suppliant. Mais le dit seigneur de Chastellachier ne fist nulle diligence de recouvrer acquict pour les diz commissaires, qui pour ce font question audit suppliant de la somme qu’ilz lui baillerent, ainsi que dit est. A l’occasion desquelz cas, ainsi que dessus est declairé, commis et perpetrez, le dit suppliant est à present poursuy par plusieurs personnes, et pourra plus encores estre ; et doubte que icelles personnes le vueillent mettre et envelopper à ceste cause en plusieurs et sumptueux procès et en divers lieux, se par nous ne lui estoit sur ce donnée provision, si comme il dit. Nous humblement requerant que, eu regard aux services par lui à nous faiz ou fait de noz guerres contre les diz adversaires, qui adoncques estoient audit Gençay, que en plusieurs lieux de nostre royaume, et aussi que en soy exposant en nos diz services, il n’a eu de nous aucun don ou bienfait, qu’il a tousjours tenu nostre party sans varier, et que avons donné abolicion generalle à tous les gens d’armes et de trait qui se sont exposez en nostre dit service ès dictes guerres, il nous plaise sur ce lui impartir nostre grace. Pour quoy nous, ayans consideracion aux services à nous par le dit suppliant faiz, ainsi que par aucuns de noz serviteurs estans autour de nous en avons esté informez, etc., avons audit suppliant aboly, quicté, remis et pardonné, etc., reservé meurdre, ravissement de femmes ou de filles, sacrilege et boutement de feux, que ne voulons estre comprins en ceste nostre presente abolicion, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou mois de fevrier l’an de grace mil cccc. quarante et six, et de nostre regne le xxvme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. De la Loere. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MCXXXI Mars 1447

Lettres d’abolition générale octroyées à tous les habitants des villes et campagnes du Poitou et aux officiers royaux du pays, moyennant une composition pécuniaire de 18,000 livres.

AN JJ. 178, n° 194, fol. 113 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 413-418

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receue l’umble supplicacion des manans et habitans ès bonnes villes et plat pays de nostre pays et conté de Poictou, et aussi de noz officiers oudit pays, contenant que plusieurs des diz habitans ont esté le temps passé commissaires et colecteurs à lever de par nous plusieurs tailles, aides et subsides à nous octroyez et levez en nostre dit pays de Poictou, et que aucunes foiz les diz commissaires et colecteurs ont mis et imposé oultre et par dessus les sommes ausquelles les habitans des chastellenies et parroisses dont ilz estoient commissaires et colecteurs avoient esté tauxez et imposez par noz esleuz de Poictou ou autres commis de par nous, aucunes sommes de deniers ; et icelles sommes ont levées, exigées et applicquées à leur proufit ou autrement en [ont] fait à leur plaisir et voulenté. Ont aussi les aucuns des diz habitans marchandé et donné cours à monnoyes d’or defendues de par nous, en venant contre noz defenses et commandemens. Et avecques ce, ont fait et passé plusieurs contractz fains et simulez, tant en acquisicions de heritaiges, rentes et revenues comme autrement en plusieurs et diverses manieres. Et en oultre ont baillé, presté et avancé argent à heure ou à temps, pour en avoir proufit de ceulx ausquelz ilz le prestoient. Ont aussi les aucuns des diz habitans, officiers, vassaulx et subgiez du dit pays de Poictou commises et perpetrées plusieurs faultes, crimes et abuz en fait de justice, touchant les excecutions de noz tailles et aides, mis et levé de leur auctorité plusieurs tailles, aides, pastiz et autres subvencions, et commis autres cas criminelz, dont la congnoissance appartenoit et devoit appartenir à noz juges. Et pareillement aucuns officiers ont mis et imposé ou consenti mettre et imposer, à la requeste d’autres et sans avoir exprès mandement ou commandement de nous, plusieurs grandes sommes de deniers avec noz tailles, et icelles sommes ont tolleré et souffert prendre sans le nous faire savoir. Et aussi ont levé grandes sommes de deniers soubz couleur des fraiz ou autrement. Ont aussi, eulx et autres, prins et exigé excessifz salaires pour leurs journées, voiages, escriptures, indicacions de procès et autrement en diverses manieres, pour le fait et excercice de justice. Et semblablement aucuns noz receveurs tant des tailles et aides, comme de nostre demaine en icellui pays, ont promis et exigé salaires excessifz de leurs quictances. Et aussi ont les aucuns prins et tenu de nous aucunes fermes à meindres pris qu’elles ne valoient. N’ont aussi noz officiers ordinaires et autres fait diligence et poursuite de noz causes pour actaindre les cas de noz droiz, ne fait telles pugnicions des delinquans, malfaiteurs et detenteurs de noz diz droiz, qu’ilz estoient tenuz faire. Ont aussi recelé et teu aucuns crimes et deliz et autres excès pour argent ou autrement, en telle maniere que les cas sont demourez impugniz et nos diz droiz diminuez, au moins n’ont mis les delinquans et malfaicteurs en telles amendes envers nous que le cas le requeroit. Et souventes foiz ont prins dons d’argent ou autre chose à l’equipolant des diz malfaicteurs et delinquans, et d’autres, pour les mettre et constituer en meindres amendes ou autrement qu’ilz ne devoient estre mis et condempnez, ou pour avoir plus legieres composicions pour les lettres de justice ou expedicion de plusieurs lettres, que avions données à plusieurs des habitans de nostre dit pays de Poictou, et les dictes amendes et composicions, après qu’elles avoient esté adjugées et declairées, ont diminuées et mis après à meindres sommes. Et avec ce, ont recelé et recepté aucuns de noz officiers ou fermiers leurs exploiz et adjournemens, et pour ce faire ont prins proufit des parties. Pour lesquelles causes et autres, les diz supplians doubtent que plusieurs particuliers des diz habitans peussent, à l’occasion des diz cas ou aucuns d’iceulx, cheoir en dangier de justice et d’iceulx estre puniz, se sur ce ne leur estoit pourveu de nostre grace, en nous suppliant et requerant humblement que des diz cas leur vueillons donner abolicion et quictance generale, et tout leur remettre et pardonner, moyennant la somme de dix huit mil livres tournois, laquelle nous ont liberalment offerte pour reparacion et satisffacion des charges et faultes dessus dictes.

Pour ce est il que nous, attendans la grant loyaulté et vraye obeissance que tousjours les diz supplians ont eu envers nous et nostre seigneurie, et les bons et grans services, aides et secours de finances que en maintes manieres ilz nous ont faiz, le temps passé, en noz neccessitez et affaires bien liberalment. Considerans aussi les autres grans charges que ilz ont, ou temps passé, eues et encores de present ont à supporter en plusieurs manieres, tant pour le fait et soustenement de noz gens de guerre et de noz tailles et aides, comme autrement, en maintes manieres ; voulans pour ces causes et autres plusieurs à ce nous mouvans, iceulx estre favorablement traictiez et leur subvenir en leurs besongnes et affaires, par l’advis et deliberacion des gens de nostre grant conseil, avons à iceulx supplians et à chascun d’eulx, de quelque estat ou condicion qu’ilz soient, tant en general que en particulier, quicté, remis, pardonné et aboly, et par ces presentes, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, quictons, remettons, pardonnons et abolissons tous les cas, crimes, deliz, meffaiz, faultes et offenses dessus dictes, que eulx ou aucuns d’eulx ont eu et pevent avoir faiz, commis et perpetrez, en quelque maniere que ce soit, ou temps passé jusques aujourduy, avec toutes peines, amendes et offenses corporelles, criminelles et civiles, et toutes actions et interestz, en quoy ilz ou aucuns d’eulx sont ou pourroient estre encouruz envers nous et justice, à l’occasion des choses dessus dictes, et tout ainsi comme si les cas estoient exprimez et declarez specifiement et particulierement en ces dictes presentes, et sans ce que, ores ne pour le temps avenir, aux dessus diz ou aucuns d’eulx en soit ne puisse estre pour ce par nous ne par justice faicte aucune demande, action, reprouche ne poursuite, au regard de nous et de noz interestz, jaçoit ce que desjà aucuns en soient accusez et traiz en causes et procès ; lesquelz procès nous mettons et voulons estre mis du tout au neant par ces presentes, non obstant que tous les cas, seurprinses, crimes et deliz dessus diz ne soient particulierement speciffiez et declairez en ces mesmes presentes. Et lesquelz habitans, qui ès manieres dessus dictes auroient delinqué contre nous et nostre justice, et dont ilz pourroient estre accusez à l’occasion des dictes choses, leurs circonstances et deppendances, par quelque cause que ce soit, voulons estre quictes et deschargiez entierement, et les en quictons et deschargons absolument et chascun d’eulx, et generalment de tout le temps passé jusques à ores, de tous cas deppendans des choses dessus dictes, moyennant qu’ilz nous paieront la dicte somme de xviiim livres tournois, laquelle voulons estre receue par le changeur de nostre tresor

Le compte très complet et détaillé de la recette de cette somme offerte par le tiers état du Poitou à titre de composition, et de l’emploi qui en fut fait, est conservé aux Archives nationales (KK. 337). C’est un document extrêmement intéressant et qui va être publié intégralement dans le tome XXXI des Archives historiques du Poitou.

. Et ne voulons que pour le temps avenir ce leur tourne à charge [ne] reprouche en honneurs, franchises, privileges et libertez, en quelque maniere que ce soit, en les mettant et restituant, en tant que mestier est, à leur bonne fame et renommée et à leurs biens, s’aucuns estoient pour ce prins ou empeschiez. Et voulons et nous plaist, de nostre dicte grace, que ces dictes presentes lettres vaillent et soient de tele valeur et effect, comme de tous les diz cas, crimes et deliz, et aussi les noms et surnoms des diz supplians à qui la chose puet touchier, estoient especialment et particulierement speciffiez, escrips, denommez et declairez en icelles, et sortissent leur planier effect en tous cas, non obstant la dicte specificacion et declaracion des diz cas et crimes, laquelle nous ne voulons aucunement deroguer à la dicte generalité. Et sur ce imposons silence perpetuel à nostre procureur. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx conseillers les gens tenans et qui tendront noz parlemens, les gens de noz comptes et tresoriers, au seneschal de Poictou, et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace, remission, pardon et abolicion, facent, seuffrent et laissent joïr et user plainement et paisiblement les diz supplians et chascun d’eulx, comme leur pourra touchier, sans leur faire ne souffrir estre fait, mis ou donné aucuns troubles, molestes ou empeschemens au contraire ; ainçois, se faiz, mis ou donnez leur estoient, en corps ou en biens, le facent reparer, et tout mettre ou facent mettre au premier estat et plaine delivrance, incontinant veues ces presentes. Toutes voyes nous n’entendons pas que, se par informacion deuement faicte, il appert que aucuns noz officiers en recepte ou autres ayent recelé aucuns de noz deniers, et ne nous en aient tenu compte, ainsi qu’il appartient, que, par le moyen de ceste presente abolicion, ilz en demeurent quictes, mais voulons qu’ilz soient tenuz et contrains à les nous rendre et restituer. Et pour ce que de ces presentes l’on pourra avoir à faire en divers lieux, nous voulons que aux vidimus qui faiz en seront soubz seaulx royaux, plaine foy soit adjoustée comme à ce present original. Auquel, afin que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel. Sauf, etc. Donné aux Montilz lez Tours, ou mois de mars l’an de grace mil cccc. xlvi, et de nostre regne le xxvme.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. E. Chevalier. — Visa. Contentor. Ja. de La Garde.

MCXXXII Mars 1447

Rémission octroyée à Jeannette, native de l’île de Bouin, femme de Nicolas Rollant, de l’île de Noirmoutier, pour un infanticide dont elle s’était rendue coupable, vingt-cinq ans auparavant, de complicité avec Jean Jouaye, prêtre, son séducteur.

AN JJ. 178, n° 134, fol. 83 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 419-422

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehannete, femme de Nicolas Rollant, aliàs Bertouet, demourant en l’isle de Noirmoustier, native de l’isle de Bouyng, contenant comme, xxv. ans a ou environ, elle estans lors en l’aage de xvii. à xviii. ans ou environ, par la temptacion de l’ennemy, et aussi par le pourchaz et enhortacion d’un nommé Jehan Jouaye, prebstre, se consenti à la voulenté du pechié de la chair, et ala demourer en l’ostel dudit Jehan Jouaye, et y demoura l’espace d’un an ou environ, durant lequel temps ledit Jouaye engrossa ladicte suppliante, et l’envoya, sur le terme d’enfenter, en une maison où demouroit une femme vefve assez près du bourg de Bouyng, en laquelle maison vindrent par nuit deux freres nommez les Mauchas, qui prindrent ladicte suppliante, la batirent et l’emmenerent avecques eulx en ung lieu nommé la Gouppillace, qui est oudit isle de Bouyng, et coucha l’un des diz freres avecques elle. Et le landemain au matin, ladicte suppliante retourna en ladicte maison de ladicte vefve et envoya querir ledit Jouaye ; lequel vint à elle et de là la fist aler en sa maison. Et brief temps après elle eut enfant par nuyt, en l’ostel d’icellui Jouaye, lequel receut le dit enfant, car il n’y avoit que eulx deux. Et tantost qu’il fut né, icellui Jouaye mist ledit enfant sur ung pou de paille, emmy ladicte maison. Et lors se print le dit enfant à crier. Et demanda à la dicte suppliante : « Que feray je de cest enfant ? Or voy je bien que j’en seray deshonnoré ». Laquelle lui dist qu’il en fist ce qu’il lui plairoit, et qu’il estoit sien. Et tantost il print le dit enfant et l’enveloppa en ung drap linge, teste et tout le corps. Et puis lui demanda se elle pourroit cheminer. Laquelle lui dist qu’elle creoyt qu’elle chemineroit bien ung peu. Et adonc lui dist qu’elle tendist le geron de sa robbe, pour y mettre ledit enfant, en disant à la dicte suppliante qu’elle estraingnist bien son geron, afin que l’on ne l’oyst crier. Et la nuit se departirent de la dicte maison, et print le dit Jouaye une pelle en sa main et dist à la dicte suppliante : « Viens après moy ». Lesquelz s’en alerent ensemble, portant ledit enfant, assez près du cymetiere dudit lieu de Bouyng, en terre prophanne. Et là fist le dit Jouaye une fosse et dist à la dicte suppliante qu’elle mist l’enfant dedans. Laquelle ouvry son geron et le gecta dedans ladicte fosse, où il fut enterré par le dit Jouaye, et de là s’en retournerent ensemble en la dicte maison. Et ne sceut point la dicte suppliante se le dit enfant estoit mort ou vif, quant elle le gecta en ladicte fosse, ne s’il estoit masle ou femelle. Et aussi ne sceut s’il fut baptisé, pour la maladie d’enfenter qu’elle enduroit, non obstant que, tantost qu’elle eut le dit enfant, elle apparceut bien de l’eaue en une escuelle d’estain près dudit enfant. Et tantost après le dit fait advenu, la dicte suppliante vint en l’isle de Noirmoustier, où elle demoura certain temps cheux Jehan Anglois et avecques Jehan Birart. Et en icellui temps fut accordée et fiancée, de main de prebstre, avec son dit mary qu’elle a de present. Et après ce qu’elle fut fiancée, elle s’en ala audit isle de Bouyn, au curé dudit lieu dont elle estoit parroissienne, pour avoir congié de lui espouser. Et incontinant qu’elle fut arrivée audit isle de Bouyn, elle fut prinse par les officiers de la court seculiere dudit lieu de Bouyn et mise en arrest au chasteau et forteresse dudit lieu de Bouyn ; et elle estant en arrest, elle trouva la porte dudit chasteau ouverte et s’en sailly hors, et s’en retourna audit lieu de Noirmoustier. Et assez tost après les diz officiers dudit lieu de Bouyn poursuirent la dicte suppliante audit Noirmoustier, en requerant aux officiers dudit Noirmoustier qu’elle feust mise prisonniere au chasteau dudit lieu, et que après elle leur feust baillée et delivrée ; ce que les diz officiers dudit lieu de Noirmoustier firent ; et adonc l’emmenerent les diz officiers dudit lieu de Bouyn, et la misdrent en prison fermée au chasteau dudit lieu de Bouyn, et là fut detenue la dicte suppliante environ demy an, en grant povreté. Durant lequel temps elle fut menée en jugement devant la justice dudit lieu ; mais elle ne scet pas bien se elle fut condempnée à mort ou non. Et elle estant prisonniere, elle brisa et rompit les dictes prisons dudit lieu de Bouyn, environ jour faillant, et s’en retourna audit lieu de Noirmoustier avecques son dit mary, où icelle suppliante s’est tousjours, depuis xxiiii. ans ença ou environ qu’elle fut espousée, tenue et demourée avec lui, et a eu aucuns enfans de son dit mary. Et oncques puis elle ne commist ne perpetra autres cas criminelz. Et elle estant avecques son dit mary, le xviiie jour du mois de janvier derrenier passé ou environ, les officiers dudit lieu de Noirmoustier prindrent de rechief la dicte suppliante et la misdrent en prison audit chasteau de Noirmoustier. Et le landemain, durant les assises dudit lieu, fut condempnée par le seneschal du dit lieu à mourir par justice, pour les causes dessus dictes. Et environ le tiers jour du mois de fevrier après ensuivant et derrenier passé, partie des diz officiers vouldrent mener executer la dicte suppliante, ainsi que condempnée estoit par la dicte justice. Et tantost qu’elle fut defferré, elle dist et proposa aus diz officiers qu’elle estoit grosse d’enfant, et adonc fut laissiée en la dicte prison et derechief enferrée, où elle est encores en grant misere et en aventure d’y finer brief ses jours, se nostre grace et misericorde ne lui est sur ce impartie, si comme elle dit, en nous humblement requerant que, attendu que, etc., ce qu’elle fist, elle le fist par ignorance, veu son jeune aage, et par l’enhortement dudit Jouaye, pour ce qu’elle estoit en sa subgection, et que en la maladie où elle estoit d’enfenter, elle ne savoit qu’elle faisoit, et que ledit cas est advenu passé a xxv. ans, etc., nous lui vueillons sur ce impartir nostre grace et misericorde. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, etc., à icelle Jehannette suppliante, ou cas dessus dit, avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces presentes au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou mois de mars l’an de grace mil iiiie xlvi, et de nostre regne le xxve.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Tribolé. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MCXXXIII Mars 1447

Rémission octroyée à Louis Raoul, paroissien de Saint-Philibert de Luçon, coupable de meurtre sur la personne de son beau-frère, Guillaume Boyneau.

AN JJ. 178, n° 147, fol. 88 v° P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 422-424

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receue l’umble supplicacion de Loys Raoul, povre homme, laboureur de braz, chargié de femme et d’enfans, parroissien de Saint Philebert de Luçon ou païs de Poitou, contenant que jà pieça ledit suppliant et feu Guillaume Boyneau espouserent les deux seurs germaines et demourerent ensemble communs en biens par long temps, en l’ostel du feu sire de la Floceliere, audit lieu de Luçon

Jacques II de Surgères, seigneur de la Flocellière, chambellan de Charles VII, mort entre le 2 décembre 1435, date de son testament, et le 21 mai 1437. (Cf. notre vol. précédent, p. 193, note.) Sa maison de Luçon s’appelait l’hôtel de la Coudraye et avait été saccagée et incendiée par Tristan Chabot, capitaine de Luçon pour Georges de La Trémoïlle, avec la complicité de ses trois frères. Le sr de la Flocellière les poursuivit à ce sujet au Parlement de 1423 à 1431. (Arch. nat., X2a 18, fol. 5, 216, 261 v° ; X2a 19, fol. 28 v° ; X2a 20, fol. 15 v° ; X2a 21, fol. 2 v°, 72 v°.)

, faisant leurs labouraiges en paix, sans avoir debat ne contemps l’un à l’autre, jusques à six ans a ou environ que, ung jour de dimanche devers le soir, ainsi que les diz suppliant et Bouyneau donnoient à mengier à leurs beufz trayans et les gouvernoient comme ilz avoient acoustumé de faire, iceulx suppliant et Bouyneau, qui ledit jour avoient esté par longue espace de temps en la taverne, et beu excessivement et oultre raison, eurent paroles de controverse ensemble en gouvernant leurs diz beufz, pour occasion de ce que le dit feu Bouyneau ne vouloit aler querir du foin pour leurs diz beufz, ainsi que faisoit ledit suppliant ; lequel fut de ce desplaisant, pour ce que ledit feu Bouyneau estoit marié à la plus jeune des dictes seurs, et estoit ledit suppliant plus aagé dudit Bouyneau, et avoit le gouvernement de l’ostel par dessus lui. Lequel feu Bouyneau, desplaisant de ce que ledit suppliant lui remonstroit ce qu’il devoit et estoit tenu faire, print ledit suppliant au corps et le gecta soubz lui à terre. Et pour le cry qui fut entre eulx, survindrent deux des femmes dudit hostel, c’est assavoir Michelle Brillouete

Les auteurs du Dictionnaire des familles du Poitou (2e édit., t. I, p. 782) mentionnent une dizaine de membres de cette famille du Bas-Poitou, qui tira probablement son nom du bourg de Saint-Étienne de Brillouet dans la Vendée.

, vefve de feu Berthomé Charruya, pere des femmes desdiz suppliant et Bouyneau, et la femme dudit suppliant, lesquelles les departirent. Et ce fait, le dit feu Bouyneau, qui fut meu de mauvais couraige, incontinant qui fut levé, print une fourche de fer à deux broz et en frappa ledit suppliant sur la teste très enormeement et tellement qu’il le deut veoir à terre dudit cop. Lequel suppliant, soy voyant ainsi frappé et que ledit feu Bouyneau s’efforçoit encores de le vouloir frapper, et lui couroit hastivement sus, tira ung couteau de quoy il avoit acoustumé trancher son pain et en frappa le dit feu Bouyneau parmy le ventre, à l’occasion duquel cop ledit feu Bouyneau ala tantost après, par faulte de gouvernement ou autrement, de vie à trespassement. A l’occasion duquel cas, le dit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du pays et n’y oseroit jamais retourner, se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartie, humblement requerant que, attendu que en tous autres cas le dit suppliant a esté et est homme de bonne fame, renommée, etc., que le dit Bouinneau fut aggresseur de la voye de fait et que le dit suppliant, quant ledit Bouinneau l’eust ainsi feru, s’efforça de le ferir, fut fort esmeu et troublé, aussi que premiers mouvemens ne sont pas en la puissance de l’omme, et que ledit cas est avenu de chaude cole, il nous plaise sur ce lui impartir icelle. Pour quoy nous, attendu ce que dit est, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant avons, ou cas dessus dit, quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes aux seneschaulx de Poictou et de Xanctonge, gouverneur de la Rochelle, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou mois de mars l’an de grace mil cccc. quarante et six, et de nostre regne le xxve.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Tribolé. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MCXXXIV Mars 1447

Lettres autorisant Pierre Fleury, chevalier, chambellan du roi, seigneur de Bouillé-Saint-Paul, à continuer et achever les fortifications dudit lieu.

AN JJ. 178, n° 148, fol. 89 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 424-427

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre amé et feal chevalier et chambellan, Pierre Fleury, seigneur de Bouylé Saint Pol en la viconté et seigneurie de Thouars

Le fief de Bouillé-Saint-Paul, relevant de la vicomté de Thouars à hommage lige, était en possession, dès le premier tiers du xive siècle, de la famille Fleury, dont le nom est le plus souvent écrit Flory, établie dans le nord du Poitou et en Anjou. Martin Fleury ou Flory, de Bouillé-Saint-Paul, qui figure dans un bail à cens de l’année 1321, se qualifie seigneur de ce lieu dans un acte du 25 novembre 1332, et cette seigneurie se transmit de père en fils jusqu’à Pierre Fleury, en faveur duquel furent données les lettres de mars 1447, comme on le voit dans l’inventaire des archives de la châtellenie de Bouillé-Saint-Paul. (Mis de l’Estourbeillon, Inventaire des archives du château de Sainte-Verge près Thouars, Vannes, 1895, in-8°, p. 2-17.) Le texte des lettres de Charles VII accordant à Pierre Fleury le droit de fortifier son château est imprimé dans cet ouvrage, ainsi que leur entérinement à la cour de la sénéchaussée de Poitiers, le 16 novembre 1449 (p. 10 et 12). Guillaume Fleury, écuyer, seigneur de Bouillé-Saint-Paul, père de Pierre, vivait encore le 8 avril 1425 et décéda avant le 16 février 1430. Il était aussi, en 1416, seigneur de la Sansonnière, paroisse de Saint-Georges-des-Sept-Voies. (C. Port, Dict. hist. et géogr. de Maine-et-Loire, t. III, v° Sansonnière.) Notre Pierre Flory ou Fleury donna en dot à sa fille Isabeau cet hôtel de la Sansonnière, avec 25 livres de rente et 200 écus d’or au coing du roi, en la mariant avec Jean de l’Esperonnière, écuyer, seigneur de la Roche-Bardoul et de la Sorinière (paroisse de Nueil-sous-les-Aubiers), par contrat du 2 février 1455, reçu par J. Guérineau et C. Jousseau, notaires en la cour de Thouars. Dans cet acte, Isabeau est dite fille de mre Pierre Flory, chevalier, seigneur de Bouillé-Saint-Paul, et de Françoise de Meulles, sa première femme. (Th. Courtaux, Hist. généal. de la maison de l’Esperonnière, in-8°, Paris, 1889, p. 22.) Pierre Fleury vécut jusqu’en 1470. Sa fille aînée, Marie, avait épousé Guillaume Grossin, dont elle était veuve en 1448. La seigneurie de Bouillé-Saint-Paul passa à leur fils Guillaume II et resta dans la famille Grossin jusqu’en 1567. (Mis de l’Estourbeillon, op. cit., p. 17-48.).

, contenant que, pour obvier aux grans dommaiges et inconveniens qui eussent peu avenir à lui et aux gens et habitans dudit lieu de Bouyllé Saint Pol, durant les guerres qui ont eu cours en cestui nostre royaume, et mesmement depuis vint ans ença, il, moyennant le congié qu’il a sur ce obtenu du seigneur viconte et chastellain de la dicte seigneurie de Thouars, où ledit lieu de Bouyllé Saint Pol est assiz, a fait encommencier dès pieça forteresse audit lieu de Bouyllé, qui à ce est bien propice et assez avantaigé. A l’occasion duquel commancement de fortifficacion, nostre procureur en Poictou l’a fait convenir et approuchier par devant nostre seneschal de Poictou, ou son lieutenant, et veult tendre, comme l’en dit, que icellui suppliant face demolir ce qu’il a ainsi encommancié de fortiffier au dit lieu de Bouyllé, comme dit est ; laquelle chose tourneroit au grant dommaige et prejudice de lui et desdiz manans et habitans, comme il dit. Si nous a requis que, attenduz les biens, proufiz et utilitez qui sont advenuz aux habitans et demourans ou païs d’environ le dit lieu de Bouillé Saint Pol, à cause dudit commancement de fortifficacion, et qui plus pourront avenir, se icelle fortifficacion est convenablement parachevée, dont sont contenz lesdiz manans et habitans ; et aussi que le dit seigneur viconte et chastellain de Thouars lui a donné congié et licence sur ce, il nous plaise lui donner aussi le nostre, et agreer ledit commancement de fortifficacion, et vouloir que icelle fortifficacion soit achevée et acomplie, et sur ce lui pourveoir de nostre grace. Pour ce est il que nous, consideré ce que dit est, avons ou cas dessusdit audit suppliant octroyé et octroyons, de nostre grace especial, par ces presentes, congié et licence de clorre ou faire clorre et fortiffier de murs, tours, fossez et autres choses neccessaires à forteresse ledit lieu et place de Bouyllé Saint Pol, avons agreé et agreons le commancement de fortifficacion que jà y a esté ainsi fait que dit est. Et sur ce imposons silence perpetuel à nostre dit procureur, pourveu que ce ne nous soit à dommaige ne prejudice au païs d’environ, et que non obstant ladicte fortificacion, les manans et habitans dudit lieu de Bouyllé facent le guet aux lieu ou lieux où ils l’ont acoustumé de faire, et que à ce se consente le seigneur chastellain en la chastellenie duquel ledit lieu est assis. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que, se appellez des nobles du pays et des gens à ce congnoissans et autres qui feront à appeller, il leur appert de ce que dit est, ilz laissent et seuffrent ledit suppliant joïr et user de noz presens grace, congié et licence, sans sur ce lui donner ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun destourbier ou empeschement au contraire. Car ainsi nous plaist il estre fait. Et afin, etc., nous avons, etc. Sauf, etc. Donné aux Montilz lez Tours, ou mois de mars l’an de grace mil cccc. quarante et six, et de nostre regne le xxve.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil. E. Chevalier. — Visa. Contentor. P. Le Picart.

MCXXXV Avril 1447

Lettres de rémission accordées à Etienne de Blet, écuyer, seigneur du Treuil en la châtellenie de Vivonne, et à Jean Delahaye, son valet, coupables de l’assassinat de Jean de Curzay, seigneur de Goupillon.

AN JJ. 178, n° 159, fol. 94 P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 427-432

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receue l’umble supplicacion de Estienne de Blet

On trouve un Louis de Blet, qualifié varlet des grands chevaux de Jean duc de Berry dans des lettres de rémission de mai 1400, accordées à plusieurs officiers de l’hôtel de ce prince, dont Moreau de Monlon, son grand écuyer, pour complicité dans un viol commis au séjour de Nesle, à Paris. (JJ. 155, n° 97, fol. 54 v°.) Il était vraisemblablement de la même famille, originaire de Berry, quoique son nom ne figure pas dans la généalogie de la branche établie au nord du Poitou. (Dict. des familles du Poitou, 2e édit., t. I, p. 549.) Étienne, sr du Treuil, la Petite-Épine, etc., était le deuxième fils de Robin, baron de Blet, chevalier, grand maître d’hôtel du duc de Berry, et de sa seconde femme, Alix de Gourjault, dame de la Misselière et dame d’honneur de la duchesse. Le 24 novembre 1429, il transigeait avec Jean, son frère aîné, et le 31 août 1456, il rendait un aveu à Charles comte du Maine, seigneur de Civray. La seigneurie de la Petite-Épine, mouvant de la Cour-d’Usson, lui venait de Jeanne de Saint-Savin, dame de la Tour-aux-Cognons, sa femme. Étienne de Blet mourut avant le 13 août 1483.

, escuier, seigneur du Trueil en la chastellenie de Vivonne, en nostre païs de Poictou, et Jehan Delahaye, son varlet, contenant que comme, à cause dudit hostel du Trueil, ledit de Blet ait plusieurs beaulx dommaines et heritaiges, entre lesquelz y a ung pré appellé le Pré de la Barre, ouquel pré icellui de Blet trouva par plusieurs foiz grant quantité de porceaulx et mesmement ung certain jour y en trouva quinze ou seize qui gastoient son dit pré. Et lors icellui de Blet dist audit Delahaye, son varlet, qu’il les alast mettre hors dudit pré, ce qu’il fist et en bleça aucuns, comme il rapporta audit de Blet, suppliant, son maistre. Lesquelz porceaulx ou les aucuns d’eulx estoient et appartenoient, comme il fut dit audit de Blet, aux seigneur et dame de Goppillon. Et pour ce icellui suppliant envoya par plusieurs foiz par devers eulx les prier et requerir qu’ilz voulsissent faire garder leurs diz porceaulx et qu’ilz lui avoient fait et faisoient chascun jour de grans dommaiges, mais ilz n’en tindrent compte et donnerent de grans menaces audit suppliant, à l’occasion de ce que aucuns de leurs diz porceaulx avoient esté bleciez, comme ung nommé Belet dist et rapporta depuis à icellui suppliant. Auquel ledit suppliant dist que, s’il avoit fait aucun dommaige ou desplaisir ausdiz seigneur et dame de Goppillon, qu’il estoit prest de l’amender et que pour riens il ne vouldroit estre malvueillant d’eulx ne d’autres. Et depuis, à l’occasion des choses dessus dictes, ou mois de septembre derrenier passé ot ung an, se meurent certaines grosses paroles entre la femme dudit de Blet, suppliant, et la dame de Goppillon, et telement que icellui de Blet qui estoit present va dire à la dicte dame de Goppillon qu’elle ne demandoit que noise et qu’elle s’en alast son chemin, et que, s’elle estoit aussi bien homme comme femme, qu’il lui donneroit deux cops de baston. Et à tant se departirent. Et deux ou trois heures après ou environ, Jehan de Curzay

On n’a guère d’autres renseignements sur cette branche de la maison de Curzay que ceux qui se trouvent dans ces lettres de rémission. MM. Beauchet-Filleau citent un aveu du fief de Goupillon près Vivonne, rendu par le père de ce Jean de Curzay, nommé aussi Jean, écuyer, le 6 décembre 1410, et lui donnent un fils, Philippe, mentionné dans des aveux de la même seigneurie, des 1er mai 1458, 13 juillet 1462 et 4 avril 1482. (Op. cit., t. II, p. 783.)

, filz de ladicte dame de Goppillon, et ledit Belet vindrent à l’ostel dudit de Blet, suppliant, armez et embastonnez d’armes invasibles et deffendues, comme espées, dagues, javelines et une arbaleste d’acier, que icellui de Curzay avoit toute bandée et le vireton dessus. Et quant ilz furent devant la grant porte dudit hostel, se arresterent et commancerent à crier à haulte voix audit de Blet, suppliant, qui veoient : « Faulx traitre, vilain chien, murtrier, par le sang Dieu, nous te tuerons ! » Et cuida icellui de Curzay deux ou trois foiz lascher le vireton contre le dit de Blet, suppliant, mais il se mist derriere sa femme qui ilec estoit presente, et après se retrahy en sa maison, et print une javeline et vint vers les diz de Curzay et Belet, et incontinant qu’il fut hors la grant porte de son dit hostel, icellui de Curzay lascha le dit vireton qui vint cheoir entre les jambes dudit de Blet, suppliant. Et lors icellui suppliant gecta sa javeline qu’il avoit contre ledit Belet et ne le bleça aucunement ; et depuis la recouvra. Et après icellui Belet descendy de dessus son cheval et vint contre ledit suppliant, et en venant l’un contre l’autre, de leurs javelines ledit Belet chey à terre, et pour ce icellui suppliant gecta sa javeline et se joigny audit Belet ; et incontinant ledit de Curzay vint aidier à icelui Belet, son compaignon, et telement qu’ilz blecerent le dit suppliant en deux ou trois lieux, et mesmement lui mist ledit de Curzay l’espée ou cousté bien demy pié ou environ. Et ce fait, s’en alerent les diz de Curzay et Belet, et laisserent illec ledit de Blet, suppliant, tout blecié, dont il fut au lict malade par l’espace d’un moys ou environ. A l’occasion desquelles choses icellui de Blet, suppliant, qui est gentilhomme, veant qu’il avoit esté batu, villenné et injurié au dedans de son dit hostel, fut meu de soy vengier et espia avecques autres, qu’il avoit assemblez par plusieurs et diverses foiz, les diz de Curzay et Belet, pour leur faire comme ilz lui avoient fait, mais oncques il ne peut trouver opportunité de le faire. Et après, ou mois de fevrier derrenierement passé, ung jour de mercredi, icellui de Blet et son varlet, supplians, s’en partirent dudit lieu du Trueil, armez et embastonnez de gisarmes, javelines, espées et dagues et vindrent devers le soir audit lieu de Goppillon, dont est seigneur le dit de Curzay, pour le cuidier envillenner et batre comme il avoit fait le dit de Blet, mais pour ce qu’il y avoit gens estrangiers en l’ostel, s’en retournerent. Et le landemain, environ une heure après jour couchié, retournerent de rechief les diz supplians audit hostel de Goppillon, et quant ilz y furent, trouverent les portes closes, et pour ce tournerent à l’entour de l’ostel, et trouverent une fenestre crosée que icellui suppliant ouvry, et entra dedans une chambre dudit hostel, et aussi fist son dit varlet ; et après ouvrirent une porte et entrerent là où estoit ledit de Curzay, auquel icellui de Blet va dire : « Sus, ribault, traitre, murtrier ». Et lors ledit de Curzay se gecte soubz ung banc, et sa mere sur lui, laquelle ledit Jehan Delahaye, suppliant, osta, et ce non obstant se y remist, dont ledit de Blet l’osta pareillement et frappa sur le dit de Curzay plusieurs coups d’espée, et telement qu’il lui fist neuf ou dix playes, tant sur la teste que en autres parties de son corps, les aucunes desquelles on dit estre en lieu mortel, et par le moyen d’icelles le dit de Curzay estre mutilé en plusieurs de ses membres. Et après s’en alerent les diz supplians audit lieu du Trueil. Et le landemain, nostre bien amé Aymery de Rochechouart, seigneur dudit lieu de Vivonne

Il s’agit sans doute d’Aimery, second fils de Jean Ier de Rochechouart, seigneur de Mortemart, Vivonne, Saint-Germain-sur-Vienne, et de sa première femme, Jeanne Turpin de Crissé, sur lequel les généalogistes ne disent rien, sinon qu’il mourut sans avoir été marié.

, acompaigné de plusieurs gens ses serviteurs et autres, vint audit lieu du Trueil, où il trouva les diz supplians, lesquelz il print et mena en prison au lieu de Cercigny ; et en les menant, va dire à icellui de Blet, suppliant, que c’estoit mal fait de batre les gens. Lequel qui estoit encores tout troublé, esmeu et courroucié, et ne savoit qu’il faisoit, dist qu’il les vouldroit avoir tuez tous deux, et il deust estre incontinant pendu ; et aussi dist, en le menant en prison, qu’il vouldroit estre mené au gibet, et il en eust autant fait audit Belet. Et depuis a esté ledit de Blet, suppliant, comme appellant dudit seigneur de Vivonne, amené en noz prisons de Poictiers, èsquelles il est de present detenu à grant povreté et misere, et aussi ledit Delahaye, son dit varlet, au dit lieu de Vivonne, ès quelles ilz sont en voye de miserablement finer leurs jours. Et doubtent que à l’occasion de la dicte bateure et excès dessus diz, combien que aucune mort ne s’en est ensuye ne ensuivra, comme ont dit et rapporté plusieurs cizurgiens et barbiers qui ont veu et visité le dit de Curzay, et aussi que, à la requeste de la dicte dame de Goppillon, mere dudit de Curzay, ledit de Blet avoit esté autresfoiz adjourné en personne de sa femme (sic), par devant ledit seigneur de Vivonne ou sa justice, et aussi, à la requeste dudit Belet, par devant nostre seneschal de Poictou, ou son lieutenant, pour donner asseurté à icelle dame de Goppillon et audit Belet, et à leurs familles et biens, nostre procureur vueille tendre à l’encontre d’eulx à pugnicion corporelle, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties. Et pour ce nous ont humblement fait supplier et requerir que, attendu que paravant les diz de Curzay et Belet avoient mutilé et blecié ledit de Blet, suppliant, par quoy il fut meu de soy vengier, et quelques paroles qu’il ait dictes et proferées, en le menant en prison, il ne vouldroit qu’elles feussent sorties effect, et les dist en chaleur et trouble, tant à l’occasion des choses dessus dictes que pour ce qu’on avoit prins tous ses biens avec sa personne, que, comme dit est, aucune mort ne s’en est ensuye, et sont toutes lesdictes playes curées et consolidées, que oncques ledit de Blet ne donna asseurté judiciaire aus diz dame de Goppillon et Belet et n’y eut seulement que adjournement baillé, que icellui de Blet s’est tout son temps employé en nostre service, ou fait de la guerre contre noz anciens ennemis et adversaires les Anglois, où il a tousjours continuelment esté, en la frontiere oultre la riviere de Seine, excepté puis peu de temps ença qu’il s’en est venu demourer en nostre païs de Poictou dont il est natif, il nous plaise impartir sur ce aus diz supplians nos dictes grace et misericorde. Pour quoy nous, etc., aus diz supplians, etc., avons quicté, remis et pardonné, etc., en faisant par lesdiz supplians audit de Curzay tele satisfacion et amende qu’il appartendra. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Mehun sur Evre, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. xlvii. après Pasques, et de nostre regne le xxvme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Beauvarlet

Mathieu Beauvarlet, notaire et secrétaire du roi, commis à la recette générale des finances.

. — Visa. Contentor. Ja. de La Garde.