Otinel

Geste

Otinel: Transcription du témoin B (ms de Cologny-Genève) de la Chanson d'Otinel , éd. par Jean-Baptiste Camps, , Cologny Bodmer Cod. Bodmer 168 B Waldef Gui de Warewic Otinel Angleterre (Yorkshire?) Deuxième moitié ou dernier tiers du XIIIe

  1. kKiJ vuolt oiı̈r chañcuñ dδe beau sſem̃blañt1
  2. dDuñt biıen suntſ̃t faiıt lesſ vuer͛sſ par cunsſonañt2
  3. oOre laiısſt la noiısſe .sſiı sſe treiıe avuañt
  4. dDiırum̃ la flur dδe la gesſte vuallañt
  5. dDel fiız pepiın le noble cumbatant
  6. dDesſ dδuze persſ quiͥ sſ'entramereñt tañt
  7. k'unc ne sſevuerereñt3 treͤsſk'a un jıor pesſañt
  8. ke gGuenesſ lesſ traͣiı́̈ odδ la sſalvuage geñt4
  9. uvn jıor murureñt viıñt miılliıer e sſet .ceñt
  10. dDe cel barnage,dδuñt charlesſ ot dδoel graͣnt .
  11. ciıl jı́ugleor n'eñ dδiıeñt tañt ne quaͣnt :
  12. tuiı́t l'ont leiısſsſé k'iıl ne sſevueñt niı́̈ent
  13. lLiı plusſur dδanger e dδe l'autriı chañtañt5
  14. lLesſ parolesſ menuesſ qͥu'il6 vuoñt cuntroͦvuant,
  15. mMesſ iıl ne sſevueñt miıe le graͣnt dδesſturbemeñt
  16. k'avuiıñt a charlemaiıne sſiı sſubiıtemeñt .
  1. sSeiıñgnursſ ço fu le jıor dδuñt liı iıñnoceñt sſuñt .
  2. aA pariısſ est÷ eñ fraͣnce charlesſ dδe clermuñt
  3. uv tiınt sſa curt plenere,.liı dδuze per iı sſuñt .
  4. multMl̃t par esſt la jıoiıe graͣnt que liı baruñsſ iı funt .
  5. uvn plaiı ont esſtabliı k'eñ esſpaniı́e iıruñt
  6. sSur le reiı mMarsſiıliıe,.le sſeremeñt iı funt .
  7. ço ert apre͛sſ avuer͛iıl,quaͣnt her͛be fresſche avuer͛uñt .
  8. eiı́nz que fiıneñt lur parole,telesſ novuelesſ oruñt
  9. dDuñt viıñt mMiıl chevualer͛ dδe noz fraͣnceiısſ muruñt,
  10. sSiı dδam̃pne dδeu n'eñ peñsſe quiͥ sſusſteñt tut le muñdδ .
  1. unN sſaraziıñ dδ'esſpaiıne quiͥ otüel a nun,
  2. mMesſsſagier͛ gGarsſiıe,.biıen resſem̃ble barun,
  3. par miı pariısſ chevualche a coiıte dδ'esſpurun .
  4. qQuaͣnt viıent al paleiısſ,sſiı dδesſceñt al perun,
  5. lLesſ dδesſgrez moñte,sſiı dδemandδe charlun ;7
  6. oOgiıer eñcuntre e gGalter e naiı́mun :
  7. sSeiıgnur,faiıt liı paen,kar me musſtrez charluñ !
  8. mMesſsſagier͛ sſuiı́ un reiı quiͥ nel aiı́me un butuñ .
  9. premer͛ iı a parlé gGalter,ciıl dδe valun :
  10. veiı́ le tu la uv sſet a cel fluriı gernun .
  11. celuiı́ o la graͣnt barbe a cel veiır peliıçun,
  12. ço esſt rRollandδ sſiı niı́ésſ el vuer͛meiıl ciıclatun .
  13. dDe l'altreͤ part veez uv sſiı́et sſon compaiıgnuñ,
  14. lLe geñtiıl cunte quiͥ oliıvuer͛ a nun .
  15. ço sſuñt liı dδuze piıer quiͥ lur sſuñt eñviı́run .
  16. mMahun,faiıt liı paen,ore conusſ jıo charluñ .
  17. [ col. 211b ]
  18. mMal feu e male flam̃be liı ardδe le meñtuñ,
  19. ke liı feñdδe le piız dδesſk'al talun .
  1. lLiJ sſaraziı́n en viıent dδevuañt le reiı́ :
  2. charlesſ,feiıt iıl,ore enteñt versſ8 meiı́ .
  3. mMesſsſagier͛ sſuiı,ço quiͥdδ,al meiıllur reiı́
  4. k'unquesſ feüsſt en la paiıene leiı́ .
  5. nNe te sſalu,k'a dδreiıt faiı́re nel dδeiı :
  6. fForfaiıt en esſ vuersſ mahumet9 e versſ meiı́ .
  7. ciıl te cunfundδe en la kiı leiı jıo creiı,
  8. e tuz cesſ altresſ quiͥ sſuñt enviıruñ teiı́
  9. e ton nevuu rRollañt que jıo ciı́ veiı́ .
  10. sSiı uncore un jıor le truiı́sſ eñ turneiı́,
  11. ke muñ dδesſtrer puiısſsſe acursſer vuer͛sſ sſeiı́,
  12. dDe m'esſpee le quiͥdδ faiıre uvn esſpeiı́10 :
  13. par miı le corsſ .multml̃t ert fort sſiı nel pleiı́ .
  14. rRollañt sſe riıt,sſiı reguardδe le reiı .
  1. sSaAraziıñ frere,fet rRollañt l'alosſez,
  2. tu poez biıen dδiıre tutesſ tesſ vuoleñtez,
  3. jJa pur françeiısſ ne sſerrasſ atuchez .
  4. nNun,ço dδiıt charlesſ,puiısſ ke vuus le volez
  5. dDe meiıe part esſt iıl biıen afiı̈ez
  6. dDe huiı́ en cesſt jıor dδesſk'a uviıt jıursſ pasſsſez
  7. dDiısſt otüel :dδe foliıe parlez !
  8. nNe redδut hum̃me quiͥ dδe mere sſeiıt nez
  9. tañt cum̃ avuer͛aiı cesſt esſpee a muñ leez,
  10. ço esſt curçusſe11 dδuñt jıo sſuiı adδubez :
  11. nN'en at miı́e uncore nef meiısſ pasſsſez
  12. k'a miıl fraͣnceiısſ en aiı lesſ chefsſ colpez .
  13. uv fu ço,frere ?fet charlesſ liı remem̃brez12 .
  14. dDiıt otiınel :jıo vuus dδiırra asſsſez .
  15. oOre at uviı́t meiısſ,el nefme sſuiı eñtrez,
  16. dDesſtruiıte iıert rRom̃me ta vaiıllañte ciıtez
  17. dDe la quele esſtesſ em̃perere clamez .
  18. lLiı reiısſ gGarsſiıe la priͥsſt e sſiısſ barnez :
  19. viı́nt mMiıl hum̃mesſ tut a cuñte num̃brez,
  20. hum̃mesſ que fem̃mesſ uncore plusſ asſsſez,
  21. iJ avuiı́um mort,n'13 esſt un esſchapez .
  22. e jıo iı feriı tañt14 dδe m'esſpee dδe lez
  23. ke uviıt jıursſ plenersſ oiı lesſ poiıñz eñflez15 .
  24. dDiıeñt fraͣnceiısſ :mar fusſtesſ unquesſ nez !.
  25. esſtult dδe lengresſ esſt16 en piıez levuez ;
  26. tiı́nt un basſtun que dδevuañt fu quaͣrrez :
  27. [ fol. 211v ] [ col. 211c ]
  28. jJa le feriısſt,ço sſavuum nus asſsſez,
  29. mMeiısſ liı niı́ésſ charlesſ,en17 eñcuntre alez,
  30. sSe liı́ a dδiıt :sſiıre esſtult,reposſez
  31. pur meiı́e amur,sſiı dδe riıen m'amez,
  32. kar liı paen esſt dδe meiı afiı̈ez .
  33. lLaiısſsſez luiı́ dδiıre tutesſ sſesſ vuoleñtez .
  34. uvn chevualer iı sſiısſt que fu mal sſenez,
  35. provueñcel iıert,dδe sſeiı́nt gGiıle fu nez .
  36. aAl mesſsſagier͛ esſt dδe rere alez,
  37. aAmdδuiı́ sſesſ puiı́nz liı at el chiıef mellez :
  38. traiıt le a ter͛re,kar ciıl ne sſ'esſt gardδez .
  39. mMeiısſ otiınel esſt multml̃t tosſt relevuez,
  40. traiıt curçusſe18 dδuñt le puñz fu dδorrez ;
  41. feriır le veiıt,ne sſ'esſt pasſ ubliı̈ez,
  42. k'asſ piıez le reiı eñ esſt le chef colpez .
  43. fFraͣnceiısſ sſ'esſcriıeñt :baruñ,kar le pernez !

  • 1. le fol. 210 (r et v), qui précède le début d'Otinel dans ce cahier contient la fin de Gui de Warewic Les signatures sont dues au folioteur moderne. La réclame De moiı puiısſ figure au fol. précédent.
  • 2. ce terme, propre à B, semble généralement désigner des rimes suffisantes, par opposition aux rimes léonines (cf. TL). Si l'on examine en effet les finales des vers, on constate généralement qu'à l'homophonie de la dernière voyelle tonique s'ajoute l'identité des consonnes qui la suivent. Toutefois (et cette question méritera un examen plus approfondi), on note des entorses à cette tendance générale: dans des laisses en -ieGarsile plutôt que Garsie figure souvent dans A ( 93, 109, 812) en fin de vers , (voir aussi B 1187, naïve), et A (114) comme B (163) y présentent mile, B y ajoute sire (164), vile (175). On y trouve aussi bautestire (A 549), denise (A 550, BM 649), henissent (B 652). Dans une laisse en -ez, on note également ber (B 853) ou bres (M). En outre, la laisse [LXVIII] de B, dont on peut certes supposer qu'elle est interpolée, fait alterner finales en -(i)é et -(i)er. De plus, les laisses en -ez demandent d'admettre des entorses à la déclinaison. Enfin, ces finales demandent également d'admettre des consonnes implosives, devant s, avec sarrasins (A 161, 165) ou sarazins (B 204) cusins (B 208 et A 168), gentilz (B 212 = A 172 gentis), dans une laisse en -is; briefs (BM 622), chiés (BM 636), dans une laisse en -iers. Certains de ces traits peuvent renvoyer à une réalité phonologique (la chute de r final devant s, par exemple, peut être un trait de l'Est, comme la chute de n implosif ou final, ou la chute de l devant s, que l'on rencontre également dans le Nord; voir l'étude linguistique).
  • 3. comme nous l'indiquons dans l'introduction linguistique, le e svarabhaktique entre /v/ et /r/ ne compte presque jamais dans la mesure du vers dans B. Nous n'indiquons pas systématiquement ce fait dans l'édition.
  • 4. ce vers est de douze syllabes, et il est difficile de savoir s'il a été pensé comme un alexandrin, ou s'il s'agit d'une hypermétrie. La première laisse de B présente ainsi une alternance entre décasyllabes et quelques alexandrins, tandis que la laisse II est composée d'alexandrins et la laisse III majoritairement. La suite du texte est composée régulièrement de décasyllabes, laissant l'impression d'un début de remaniement. Ce mélange n'est toutefois pas extraordinaire: dans l'édition d'OgDanO, M. Ott note (p. 79) que La Chevalerie Ogier est composée de décasyllabes a minori, parmi lesquels se sont glissés, dans tous les manuscrits, quelques alexandrins, tandis que, dans leur édition de HuonR, fondée sur le ms. P, W. W. Kibler et F. Suard constatent (p. xxxviii) que les premiers 79 vers de notre manuscrit sont des alexandrins, mais à partir du vers 80 le texte du ms. P rejoint celui de M.
  • 5. la construction n'est pas claire et peut-être fautive (le vers est d'ailleurs hypermétrique). Faut-il comprendre et chantant au sujet d'un autre?
  • 6. en l'état le vers n'est ni un décasyllabe ni un alexandrin, mais pourrait être ramené à cette seconde forme en supposant que il.
  • 7. contrairement aux autres, ce vers et le suivant n'ont pas été transformés en alexandrin et demeurent sous la même forme que dans le ms. A (voir aussi le v. 40)
  • 8. lire envers (haplologie?)
  • 9. Il est aisé de corriger l'hypermétrie en supposant vers Mahum e vers mei ; la source de l'erreur pourraît être une dittographie (et).
  • 10. nous comprenons qu'il souhaite, avec son épieu, le transformer en brochette (sur ce sens possible d'espiet/espoi, que TL rattache au même lemme, voir par ex. MonRaincB, la nuit menga Rainuars ii. lardes et .ii. capons en un espoi boutés); cela supposerait peut-être un jeu sur deux formes du lemme, mais permettrait de rétablir le premier hémistiche sous la forme De mon espiet. Le fait qu'il s'agisse bien d'un épieu et pas de l'épée semble soutenu par le vers suivant, qui évoque le fait de le plier, formule qui revient plutôt pour les épieux (cf. par ex., B 392 ou 1119), ainsi que le genre utilisé. Si nous avons raison, l'erreur peut être assez haute dans la tradition, puisque WOt donne, «lui [Rolland], si je le rencontrais au combat, ou en tout lieu où mon cheval pourrait courir à sa rencontre, je le transpercerais de mon épée, si bien qu'elle serait une broche à travers lui. », et ne traduit pas le vers suivant.
  • 11. on note la chute de e entre r et c à plusieurs reprises dans le nom de l'épée, qui est compensée de diverses manières, ici vraisemblablement par l'emploi de la forme non élidée du démonstratif neutre.
  • 12. lire membrez
  • 13. lire nen pour rétablir la mesure
  • 14. en l'état, le vers tend vers l'alexandrin; il pourrait être corrigé, selon la formule usuelle Tant i feri (cf. A 718, ainsi que, sous une forme ou une autre, GuibAndrM, MortAymC, CharroiSch_D, PriseCordD, AdenBuevH, AliscW, MonGuill1C1, Aiol12N)
  • 15. la césure 5/5 laisse supposer un vers fautif, avec peut-être une omission dans le second hémistiche (en oi?).
  • 16. lire s'en est (?), comme au v. 107.
  • 17. une hypométrie dans le second hémistiche accompagnant l'emploi de cette formule récurrente se retrouve aux v. B 1242, 1392, tandis qu'au v. B 1699, elle prend la forme li est encuntre alez, que l'on pourrait éventuellement rétablir ailleurs. A 1000 en connaît la forme est a l’encontre alez. GuiBourgG connaît si est ancontre alez comme RCambr2M, et MonRaincB, li est encontre alé. Dans ChGuillM, on trouve, si li est encuntre alé.
  • 18. lire Cureçuse