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DCCLX

Rémission octroyée à Héliot de la Vergne pour le meurtre de Simon Pallardi, commis dans une rixe.

  • B AN JJ. 141, n° 298, fol. 170 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p. 60-62
D'après a.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, que de la partie des amis charnelz de Heliot de la Vergne nous a esté exposé que comme, le jour de Penthecouste l'an mil CCC IIIIXX et cinq, pluseurs personnes des habitans de la ville de Segondré1 feussent alez esbatre et dancer environ heure de vespres, avec eulx un appellé Symon Pallardi2, en un pré appartenant [p. 61] au pere dudit Heliot, et quant l'en commença à sonner vespres, ledit Heliot eust dit au dit Pallardi et à autres qui là estoient avecques lui, qu'ilz se partissent dudit pré et qu'ilz y avoient assez esté. Lequel Pallardi et autres de sa compaignie eussent respondu qu'ilz n'en feroient riens, et que en despit de lui ilz y danceroient assez. Après lesquelles paroles, ledit llelyot eust dit que, puis que l'en sonnoit vespres, qu'ilz n'avoient nul droit de dancer ou dit pré. Sur quoy le dit Pallardi lui eust dit qu'il mentoit, avec pluseurs autres injures et villenies, pour les quelles ledit Helyot lui eust respondu que le dit Pallardi mentoit aussi. Et lors le dit Pallardi s'en feust venu audit Heliot et l'eust pris par le chaperon, secoux et fait tout son povoir de le geter à terre, et le dit Heliot se eschappa ou estry du dit Pallardi et tira un coustel qu'il avoit, du quel il donna un cop seulement audit Pallardi, dont assez tost après mort s'ensuy en sa personne. Pour occasion du quel fait, le dit Helyot fu prins et detenu prisonnier ès prisons de nostre bien amé l'evesque de Maillesaiz3, où il a esté à grant povreté et misere par l'espace de quatre ans et plus, et depuis par le joyeux avenement de nostre très chiere et [p. 62] très amée tante la duchesse de Berry4, et en faveur d'elle qui nagaires est alée en la dicte ville de Mallesaiz, fu le dit Helyot mis hors des dictes prisons. Neantmoins, ce nonobstant, ledit Heliot, pour doubte de rigueur de justice n'oseroit seurement retourner ne converser ou pays, se par nous ne lui estoit sur ce impartie nostre grace, si comme dient les diz exposans, en nous humblement suppliant que d'icelle lui vueillons pourveoir. Pourquoy nous, inclinans à leur supplicacion, etc., au dit Helyot ou cas dessus dit avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces presentes au bailli des Exempcions de Tourainne, d'Anjou, du Mainne et de Poitou, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou moys de décembre l'an de grace mil CCC IIIIXX et onze, et de nostre regne le douziesme.

Par le roy, à la relacion du conseil. J. Bertaut.


1 Sic. Il faut lire sans doute Secondigné (pour Secondigny). Sur un registre contenant l'état des hommages et devoirs seigneuriaux dus au seigneur de Parthenay, en 1428, on lit : « Helyot de la Vergne, pour ung quarteron de terre appelé la Chasteigneroie en la parroisse de Secondigné, tenu par hommage plain à un cheval », et plus loin: « Heliot de la Vergne, pour le peschage ou pescherie et deffens ès ayves qui descendent dès le moulin de l'estang de la Petitiere jusques au moulin de Rigace, et dès la fontaine de Rigoys jusques au moulin de Rigace et dès le moulin de Benaut jusques au moulin de Rigace, estans les dictes choses en la parroisse de Secondigné, tenues à hommage plain, I cheval, LX solz ». (Arch. nat., R1* 190, fol. 244, 247.) Sur le même registre est mentionné plusieurs fois Jean de la Vergne, écuyer, fils d'Héliot de la Vergne, vivant en 1447, et particulièrement à propos de l'hommage de son hébergement de la Vergne, situé en ladite paroisse de Secondigny. On y voit qu'il possédait aussi beaucoup de petits fiefs dans les paroisses d'AIonne, Pamplie et Pressigny. (Id., fol. 75, 82, 253, 268 v°, 269.) Guillaume de la Vergne, écuyer, sr du Breuil-Bertin et de Sérigny en Aunis, appartenait sans doute à la même famille. Il s'était fait délivrer, en mai 1379, des lettres de rémission parce qu'il avait laissé échapper une prisonnière confiée à sa garde à Sérigny. (JJ. 115, fol. 8 v°.) Cf. aussi un petit tableau généalogique des ancêtres probables d'Héliot de la Vergne, depuis Hélie Ier jusqu'à Hélie IV, seigneurs en partie de Lussac-les-Cnâteaux (1216 à 1323), dans la remarquable étude de M. le baron d'Huart, intitulée : Persac et la châtellenie de Calais, Mém. de la Société des Antiquaires de l'Ouest, 2e série, t. X (année 1887), Poitiers, in-8°, 1888, p. 140.
2 A cette époque il existait, du côté de Gençay, une famille noble de ce nom, dont le chef Jean Palardit (alias Pelardit), écuyer, seigneur de Châtillon, de Vernon, de la Rouère, rendit aveu de ces deux premiers fiefs ou hébergements au duc de Berry, le 10 juillet 1404 (Arch. nat., copie du Grand-Gauthier, R1* 217, p. 534 et 549), puis à Charles dauphin et comte de Poitou, fils de Charles VI, en 1418 (P. 1144, fol. 30 v°). Le même était en procès au Parlement contre Hugues de Verrue, chevalier, en 1412. Le 13 avril de cette année, prisonnier à la Conciergerie, il obtint son élargissement et l'autorisation de se présenter par procureur (X2a 17, à la date).
Au milieu du XVIIe siècle, vivait à Niort Louis Pallardy, sieur de Montigny, assesseur en la maréchaussée, qui chercha à se faire passer pour gentilhomme, lors de la vérification de la noblesse faite par M. de Barentin; il produisit une généalogie qui le faisait remonter à un Simon Pallardy, sieur des Fournis, dont le fils Bonaventure aurait été conseiller au Parlement de Paris, et se serait marié à Puybéliard avec Marie de la Coussaye, par contrat du 20 septembre 1379. Les prétentions de Louis Pallardy furent rejetées, et il fut condamné en 250 livres d'amende; mais les pièces fabriquées par lui existent encore et font partie du dossier de sa famille, conservé aux Archives de la Vienne, ES 99, 103, 104, 105.
3 Jean Le Masle fut évèque de Maillezais de 1384 à 1421, suivant la Gallia christ., (t. II, col. 1373). Pendant plusieurs années il remplit les fonctions de chancelier de Jean duc de Berry. (Voir ci-dessous le n° DCCLXXVII.)
4 Il s'agit de la seconde femme du duc de Berry, Jeanne comtesse d'Auvergne et de Boulogne, fille unique de Jean II, comte d'Auvergne et de Boulogne, et d'Eléonore de Comminges, mariée par contrat passé à Riom, le samedi 5 juin 1389. Quelques mois après la mort du duc, le 19 novembre 1416, elle épousa en secondes noces Georges de La Trémoïlle, le célèbre favori de Charles VII, et mourut sans postérité en 1423 ou 1424.