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DCCCLXIX

Rémission accordée à Jean Mauduit et à Huguet Suyre, frères utérins, de la Fontaine près Chassignolles, qui, pour venger leur autre frère Jean Jouffrion, frappé et maltraité par Jean Baron, avaient assommé ce dernier à coups de bâton.

  • B AN JJ. 155, n° 366, fol. 219
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p. 378-380
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, à nous avoir esté humblement exposé de la partie des amis charnez de Jehan Mauduit, dit Cadet Fainsné, chargié de femme et de six enfans, et de Huguet Suyre, son frere de par mere, chargié de femme et de quatre enfans, povres laboureurs demourans à la Fontaine près du village de Chasseignolles en Poitou, que, le samedi après Pasques l'an de grace mil CCC IIIIXX et XIX, Jehan Jouffrion, dit Cadet le joeune, frere des dessus nommez, gardoit ses beufs ès prés ou dit village de Chassignoles, et en les gardant vint à lui un appellé Jehan Baron, lequel de son propre mouvement et volenté se print au corps du dit Joffrion, sans ce que ycellui Jouffrion lui fist aucune chose, et le bati tant qu'il lui fist sanc et plaie, et encores s'efforçoit de plus faire, [p. 379] mais le dit Jouffrion s'en fouy aux diz Mauduit et Suyre, ses freres, lesquelx lui demanderent qui le avoit ainsi plaie et navré ; le quel respondi que ce avoit fait le dit Baron, sans ce que il lui eust aucune chose meffait. Et lors les diz freres, meus d'amour naturele et courrouciez et esmeuz de la bateure faicte à leur dit frere, prindrent chascun un baston et alerent après le dit Baron, lequel ilz trouverent en un champ près du dit village de Chasseignolles, environ l'eure de soleil couchant ; lequel Baron ilz abatirent à terre et le batirent de leurs bastons, et après le laisserent ou dit champ et s'en retournerent. De la quelle bateure le dit Baron ala de vie à trespassement, le dimanche ensuivant, heure de vespres ou environ. Pour occasion de la quelle chose, les diz Jehan Mauduit et Huguet Suiere (sic), doubtans rigueur de justice, se sont absentez du païs et n'y oseroient jamais retourner, se sur ce ne leur estoit impartie nostre grace et misericorde, si comme leurs diz amis dient, en nous humblement suppliant que, comme les diz Mauduit et Suyre freres en autres cas aient touz jours esté de bonne vie, renommée et honeste conversacion, sans avoir esté repris ne convaincus d'aucun autre villain blasme ou reprouche, attendu aussi que le dit fait advint de chaude cole, et que le dit feu Baron fu invaseur et bati premierement le dit Cadet le joeune, leur frere, et pour compacion des femmes et enfans des diz freres et aussi de leur mere, qui est ancienne femme, les quelx seroient en voie d'estre du tout desers et mendians à touz jours, se les diz freres ne les sustentoient, et que desjà ilz ont fait satisfacion à aucuns des amis du dit feu Baron et sont près de faire aux autres, si comme ilz dient, et consideré aussi le long temps qu'ilz ont esté absens pour le dit cas, nous sur ce leur veuillons impartir nostre dicte grace et misericorde. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans en ceste partie misericorde estre preferée à rigueur de justice, aux diz Jehan Mauduit, dit Cadet [p. 380] l'ainsné, et Huguet Suyre, freres, et à chascun d'eulx, ou cas dessusdit, avons quictié, remis et pardonné, etc., parmy ce toutesvoies que ilz demourront un mois en prison fermée. Si donnons en mandement par ces presentes au bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d'Anjou, du Maine et de Poitou, et à touz noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, le XXIIIIe jour de janvier l'an de grace mil CCCC, et le XIXe de nostre regne.
Par le roy, à la relacion du conseil. Fortement.