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MCCCCVIII

Rémission en faveur de Louis Catus, écuyer, détenu prisonnier à Parthenay pour le meurtre d’un prêtre nommé Jean Prochau, donnée à l’occasion de la première entrée du roi en cette ville.

  • B AN JJ. 199, n° 514, fol. 323 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 38, p. 29-32
D'après a.

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amis charnelz [p. 30] de Loys Catus1, escuier, aagé de xxiiii. ans ou environ, natif du lieu des Granges près Thalemont sur Jart en Poictou, à present detenu prisonnier ès prisons de ceste ville de Partenay, contenant que environ la feste Nostre Dame Chandeleur l’an mil iiiic lxi, ledit Loys Catus et feu Jehan Procha, en son vivant prebstre, eurent certaines grans parolles ensemble, pour occasion de ce que ledit feu Procha avoit fait desplaisir à Charles Catus2, chevalier, frère dudit Loys, et qu’il l’avoit menacé et oultragé de parolle, et depuis ne se firent ne dirent mal ne desplaisir jusques environ la feste de Noel mil iiiic lxii, que ledit Loys, qui estoit deliberé de soy en retourner veoir son ayeule, avecques laquelle il avoit longtemps demouré [p. 31] ou pays de France, se party à ung soir après souper dudit lieu des Granges pour aler audit lieu de Thalemont, qui n’est que à ung quart de lieue d’ilec, acompaigné d’ung sien frère et de deux varlez, pour aler veoir ung sien frère, qui estoit serviteur de nostre cher et bien amé cousin le viconte de Thouars, et luy dire adieu. Et pourtoit icelluy Loys son espée soubz son braz, sans penser audit Prochau ne estre deliberé de faire mal à luy ne à autre. Et advint, quant il fut en ladicte ville de Talemont, qu’il estoit nuyt ; ilz rencontrèrent ledit Prochau, et quant ledit Loys le vit, il luy souvint desdictes parolles et injures, et dist audit Procha : « Demoure, ribault prebstre. Est il heure d’aler maintenant parmy la ville ? » Lesquelles choses oyes par ledit Prochau, combien que ledit Loys ne tirast son espée ne fist semblant de le frapper, s’aproucha incontinent dudit Loys et saisy son espée et s’efforça de la luy oster. A quoy ledit Loys obvia, doubtant qu’il ne luy en feist oultrage, mais fist tant qu’il la tira et en la tirant, ledit Prochau, qui la tenoit fort, se coppa la main. Et quant icelluy Loys eut sa dicte espée au delivre, il en donna audit Prochau deux coups sur la teste tellement qu’il cheut à terre, et, ce fait, s’en fouyt. Et depuis oyt dire que ledit Prochau, pour occasion desdiz cops ou autrement, ala de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas, ledit Loys a tousjours esté depuis absent du pays et à present s’est trouvé èsdictes prisons, en esperance que sur ce luy eslargirons nostre grace et misericorde, comme nous ont fait dire lesdiz supplians, requerans humblement que, attendu que ledit Loys est jeune escuier, de noble lignée, bien famé et renommé en tous autres cas et est pour nous servir ou fait de noz guerres, il nous plaise, à nostre première entrée en ceste dicte ville depuis nostre advenement à la couronne, luy impartir benignement nostre grace et misericorde. Pour quoy, etc., voulans, etc., audit Loys Catus avons quicté, remis et pardonné, quictons, remettons et [p. 32] pardonnons, etc., avec toute peine en quoy, etc., et l’avons restitué, etc., satisfaction faicte, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc., que de noz presentes grace, quictance, remission et pardon ilz facent, etc. ledit Loys joir et user plainement et paisiblement, sans luy faire, etc. Et affin, etc. Sauf, etc. Donné à Partenay, ou moys de mars l’an de grace mil iiiic lxiiii, et de nostre règne le iiiie.

Signé : Par le roy, le sire du Lau3, Guillaume de Varye4, general, et autres presens. J. de La Loère. — Visa. Contentor. P. de Fontaines.


1 Louis Catus, écuyer, seigneur de Lassy en la vicomté de Paris, capitaine de Talmont, né en 1441, était le fils puîné de Jean, seigneur des Granges-Catus, Saint-Généroux, etc., et de Robinette du Plessis, sa seconde femme. On voit, quelques lignes plus bas, que son aïeule vivait encore en 1462 et habitait l’Île-de-France. Le Dictionnaire des familles du Poitou dit que le grand-père de Louis, Hugues Catus, seigneur du Bois-Catus, vivant en 1443, eut de sa seconde femme, Jeanne Jousseaume, Jean, sr des Granges, et Françoise, femme de Pierre des Cloudis. Ce doit être une erreur. Car Jeanne Jousseaume mourut en 1412, entre juillet et novembre. (Cf. Arch. hist. du Poitou, t. XXVI, p. 223, note.) Il faut admettre que Hugues Catus contracta un troisième mariage, que sa troisième femme, dame de Lassy, lui survécut plusieurs années et que c’est elle qui fut mère de Jean Catus et grand’-mère de Charles, nommé plus loin, et de Louis. Celui-ci est dit aussi seigneur de la Brunetière, paroisse de Vautebis, dans un acte de 1482 ; au ban de 1488, il présenta pour le remplacer Jean Vaslon, en qualité de brigandinier. Il épousa Catherine de Coudun, fille de Guy, écuyer, seigneur de Chaillé, et de Catherine Poussard, qui lui donna un fils, Jean, chevalier, sr des Granges-Catus, et trois filles. (Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., t. II, p. 139.) Louis Catus eut, à cause de sa femme, de violents démêlés avec Jean Legier, seigneur de la Sauvagère, au sujet des droits de justice à Vautebis, et du droit de sépulture en l’église du lieu, comme nous l’apprennent de curieux actes judiciaires des 18 décembre 1486, 16 février 1487 et 16-20 novembre 1493. (A. Richard, Archives du château de la Barre, t. I, p. 135-140 ; t. II, p. 156, 165, 181, 494.)

2 Charles Catus, chevalier, seigneur des Granges, Saint-Généroux et des Lineaux-Jousseaume, fils aîné de Jean, sr des Granges, et de Marguerite Voyer, sa première femme. Il servit comme homme d’armes du seigneur de Soubise aux bans des nobles du Poitou de 1467, 1488, 1491 et 1492. Marié d’abord à Marie Maynard, puis, le 11 septembre 1470, à Jeanne Chasteigner, dame de Guigneffolle, il eut de cette dernière, veuve en 1503, Jean, sr des Granges, mort sans postérité.

3 Antoine de Châteauneuf, chevalier, seigneur du Lau, sénéchal de Guyenne et des Lannes. Aux documents relatifs à ce personnage, mentionnés dans notre précédent volume, on peut ajouter les lettres patentes, datées de Beauvais, au mois d’avril 1471, octroyant à Jean Aubin, seigneur de Malicorne, chambellan de Charles duc de Guyenne, la terre et seigneurie de Blanquefort en Médoc, confisquée sur le sr du Lau, parce qu’il s’était rendu coupable de désobéissance envers le roi. (Arch. nat., X1a 8606, fol. 247 v°.)

4 Guillaume de Varie, ou Varye, qui avait été facteur et secrétaire de Jacques Cœur (A. Thomas, Revue historique, mai-juin 1908, p. 81), exerçait depuis le commencement du règne de Louis XI la charge de général des finances de Languedoc, qui lui donnait entrée au conseil. (Vaësen, Lettres de Louis XI, t. II, p. 125, 136, note.) Il n’était plus vivant à la date du 7 août 1469, à laquelle Louis XI nommait Pierre du Refuge pour lui succéder en qualité de général des finances. (Catalogue des archives de M. de Joursanvault. Paris, 1838, in-8°, t. Ier, n° 175.)