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MDXXVIII

Lettres affranchissant de toute taille et imposition les moulins que Louis de Beaumont, seigneur de la Forêt-sur-Sèvre, a fait édifier à Missé, près Thouars, ainsi qu’un pavillon servant de résidence au roi, quand il vient chasser dans le pays, et exemptant du guet et de toute garde le meunier qui est ou sera à l’avenir fermier desdits moulins.

  • B AN JJ. 194, n° 360, fol. 201 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 38, p. 400-403
D'après a.

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et advenir, que, considerans la plaisance et deduit qui est environ les moulins que nostre amé et feal conseiller et chambellan, Loys de Beaumont, chevalier, seigneur de la Forest1, a fait ediffier en [p. 401] la parroisse de Missé près Thouars, où il a garanne à lièvres, perdriz et autres bestes, et le logeis qu’il y a fait ediffier, en esperance de nous y logier, quant iryons ou pays, ce que ayons ja fait2 et avons encores entencion de faire cy après, et pourront aussi faire noz successeurs roys de France, nous, pour ces causes et afin que le mosnier qui doresenavant prendra et tiendra à ferme de nostre dit conseiller ou des siens lesdiz molins, ait mieulx de quoy et puisse plus honnestement recueillir nous et les nostres en iceulx moulins, quant nostre plaisir sera d’y aler, avons quicté, exempté et affranchy, quictons, exemptons3 et affranchissons, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, icelluy mosnier, qui à present tient et qui doresenavant perpetuellement tiendra et aura à ferme d’icelluy nostre conseiller, ou de ses hoirs, successeurs et ayans cause, lesdiz molins, de toutes les tailles, impostz et subcides quelzconques, [p. 402]qui sont et seront doresenavant mis sus et imposez, de par nous ou noz successeurs, en nostre royaume, soit pour le fait et entretenement de noz gens de guerre, francs archiers ou autrement, pour quelque autre cause ne en quelque manière que ce soit, et aussi de guet et garde porté quelque part ou parroisse que ledit mosnier face sa demourance en nostre royaume. Si donnons en mandement, par ces dictes presentes, à noz amez et feaulx les generaulx conseillers par nous ordonnez sur le fait et gouvernement de toutes noz finances, aux esleuz sur le fait des aides ordonnez pour la guerre ou pays de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans, presens et advenir, et à chacun d’eulx, si comme à luy appartiendra, que de noz presens grace, quictance, exempcion et affranchissement ilz facent, seuffrent et laissent icelluy mosnier, qui à present tient et qui tiendra pour le temps advenir à ferme de nostre dit conseiller et chambellan lesdiz molins, joyr et user paisiblement, perpetuellement et à tousjours, sans l’asseoir ne souffrir estre assiz ne imposé ausdictes tailles et autres subsides quelzconques, ne pour raison d’iceulx luy faire ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun destourbier ou empeschement au contraire ; ainçois se fait, mis ou donné luy avoit esté ou estoit en aucune manière, si l’ostent ou facent oster et mettre sans delay à plaine delivrance. Car ainsi nous plaist il estre fait, non obstant que par noz lettres de commission qui sont et seront, le temps advenir, par nous ou nosdiz successeurs données, pour mettre sus et imposer les dictes tailles, soit mandé icelles imposer sur toutes manières de gens, exemps et non exemps, previllegiez et non previllegiez, en quoy ne voullons ledit mosnier qui tient ou tiendra, pour le temps advenir, à ferme de nostre dit conseiller ou des siens lesdiz moulins, comme dit est, estre comprins ne entendu en aucune manière, et quelzconques ordonnances, mandemens ou deffences à ce contraires. [p. 403] Et afin que ce soit chose ferme, etc. Sauf, etc. Donné à Sablé, ou mois de septembre l’an de grace mil cccc.lxxiii, et de nostre règne le xiiie.

Ainsi signé : Par le roy. Thillart. — Visa.


1 Sur Louis de Beaumont, chevalier, seigneur de la Forêt-sur-Sèvre, du Plessis-Macé, de Vallans, etc., voy. deux notices dans nos volumes précédents (Arch. hist., t. XXIX, p. 135 ; t. XXXII, p. 378-379), et ci-dessus, p. 54, note. Nous y ajouterons que, par lettres patentes datées d’Amboise, le 10 mai 1470, enregistrées au Parlement de Paris, le 4 décembre suivant, Louis XI lui avait déjà fait don de la haute et moyenne justice dans ses seigneuries de Missé et de Riblaire, mouvant de la vicomté de Thouars, et dans celle de la Gorinerie, tenue du seigneur d’Airvault, et lui cédait en outre tous les fromentages que feu Louis d’Amboise, vicomte de Thouars, avait et prenait èsdites terres de Riblaire, Missé et la Gorinerie, à cause de la châtellenie de Thouars. (Arch. nat., X1a 8606, fol. 223 v°.) Dans une missive adressée des Ponts-de-Cé à la Chambre des comptes, le 17 juillet 1470, par laquelle il la presse d’entériner cette donation, il donne pour raison de cette libéralité « que led. seigneur de la Forest nous a bien et loyalement servi et sert chascun jour en noz grans et principaulx affaires et est de noz plus prouchains et principaulx serviteurs. » (J. Vaësen, Lettres de Louis XI, t. IV, p. 129.) En effet, quoiqu’il l’eût remplacé à la sénéchaussée de Poitou, quelques mois après son avènement, Louis XI ne paraît pas lui avoir retiré, sauf peut-être pour un moment, ses bonnes grâces et ne cessa depuis de le traiter comme un de ses conseillers de prédilection, admis dans sa plus intime familiarité ; les présentes lettres en fournissent une nouvelle preuve. Sous le règne précédent, Louis de Beaumont avait été déjà en grande faveur. Louis XI fit de lui successivement l’un des trente-six commissaires chargés de veiller à l’exécution des réformes promises à la suite de la guerre du Bien public, l’un des premiers chevaliers de Saint-Michel, lors de la fondation de cet ordre, et l’un des douze confidents qui accompagnèrent le roi, lors de son entrevue avec Charles, duc de Guyenne, à Coulonges-les-Royaux, au mois de septembre 1469. (Op. cit., t. III, p. 85.) On connaît la curieuse et précise relation de cette entrevue et de la réconciliation des deux frères qui a été publiée, parmi les preuves des Mémoires de Commynes. (Edit. de Mlle Dupont, pour la Société de l’Hist. de France, t. III, p. 260-268.) Le même volume montre, d’après un interrogatoire de Commynes du 23 juillet 1487, dans le procès qui lui fut intenté sous Charles VIII, que le sr de la Forêt fut l’un de ses accusateurs. (Id. ibid., p. 143.) Il devait être âgé d’environ soixante-quinze ans à cette époque. Les généalogies n’indiquent pas la date de sa mort.

2 Louis XI était, dans le courant de janvier précédent, à Missé, d’où sont datées les lettres publiées ci-dessus, sous le n° MDXV, p. 343-345.

3 Le texte porte « remettons ».