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MCCCCXLIII

Rémission accordée à Jacques Mauclerc, natif de Champagne, hôtelier à Colombiers près Lusignan, poursuivi devant le sénéchal de Poitou, parce que dans une dispute il avait frappé du poing Pierre Texeron, alors qu’il y avait assurement entre eux.

  • B AN JJ. 194, n° 281, fol. 159
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 38, p. 116-117
D'après a.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplication de Jacques Mauclerc, natif du pays de Champaigne et hostellier, demourant à Colombiers près Lezignan, contenant que, le quinsiesme de ce present moys de may, lui estant audit lieu, devers le soir amprès souper, le chien dudit suppliant et le chien d’ung nommé Pierre Texeron se bastoient l’ung l’autre, et lors ledit suppliant voiant que le chien dudit Texeron et autres qui estoient survenuz bastoient le chien dudit suppliant, icelui suppliant dist audit Texeron qu’il les vouloit despartir, et ledit Texeron lui dist qu’il les laissast faire et qu’il vouldroit qu’ilz se fussent tuez l’un l’autre ; et lors ledit Texeron en soy esmouvent et courroussant, gecta des pierres après le chien dudit suppliant et le poursuivit jusques à l’uys dudit suppliant, et pour ce que la femme d’icelui suppliant et son gendre blasmoient ledit Texeron de gecter lesdictes pierres contre leur huys, icelui Texeron lui dist plusieurs injures, en appellant la femme dudit suppliant vielle truende et leur disant plusieurs autres grans injures, tellement que ledit suppliant dist audit Texeron qu’il estoit meschans homs de prendre noise à ses gens pour sesdiz chiens. Et lors ledit Texeron lui dist qu’il s’alast chier et qu’il alast en son pays ; lequel suppliant lui dist telles parolles ou semblables : « Et pour quoy n’y oseroie ge aller ? » Lequel Tixeron lui dist telles parolles : « Nennil vroiement tu n’y oseroyes aller, villain picart banny que tu es ». Lesquelles parolles dictes, icelui suppliant, esmeu et courroucié d’icelles, bailla ung cop ou deux de la main seulement sur la joue [p. 117] dudit Tixeron, qui estoit en suretté envers ledit suppliant bien deux ans et demy avoitou environ. Et combien que de ladite asseuretté ledit suppliant ne fust pour lors recors, pour la grant longueur dudit temps, pendant lequel lesdiz suppliant et Tixeron avoient plusieurs foiz beu et mengé ensemble, par quoy icelui suppliant n’en estoit souvenant et la tenoit pour toute extaincte et delaissée, neantmoins lesdiz Tixeron et nostre procureur audit lieu de Luzignen, à l’occasion desdiz corps et infraction d’asseuretté, ont fait convenir et tiennent en procès ledit suppliant par devant nostre seneschal de Poictou ou le juge ou commis à la prevosté dudit lieu de Lezignen, et ilec l’ont fait emprisonner et s’efforcent de faire sur ce de luy pugnicion ou avoir quelque autre grant amende ou proffit contre ledit suppliant, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties. Requerant humblement que, attendu le long temps qu’il a que ladicte asseuretté avoit esté donnée audit Texeron, par quoy ledit suppliant n’en povoit pas estre souvenable, ainçois avoit cause de la tenir pour extainte et delaissée, veue la communicacion et conversacion qu’il avoit depuis eue, et mesmement en boyre et menger, avec ledit Tixeron, aussi que ledit suppliant en tous autres cas a tousjours esté de bonne vie, renommée, etc., il nous plaise nostre grace et misericorde lui impartir. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant audit cas avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc., que desdiz quictance, remission et pardon facent, seuffrent et laissent ledit suppliant joir et user, etc. Donné à Amboise, ou moys de may l’an de grace mil cccc. soixante huit, et de nostre règne le septiesme.

Ainsi signé : Par le Conseil. J. Leroy. — Visa. Contentor. J. Duban.