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CCXXXVII

Mandement au bailli de Touraine de faire observer le contrat passé entre le roi et Isabelle de Clermont-Nesle, veuve d'Hugues Larchevêque1. En échange des châteaux et châtellenies de Sainte-Gemme et de Bonneuil, elle avait obtenu le péage de Tours et d'autres rentes et domaines dans le bailliage de Touraine.

  • B AN JJ. 66, n° 242, fol. 37
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 13, p. 99-101
D'après a.

Philippes, par la grace de Dieu, roys de France. Savoir faisons à touz, presenz et avenir, que, comme par certain [p. 100] eschange et permutacion faiz entre nous et nostre amée et feal Ysabeau de Neelle, dame de Samblançay, des chastiaus et chastellenies de Sainte-Genme et de Boneyli2(sic), et en recompensacion d'iceuls nous aions baillié et assigné à la dite dame et à ses hoirs et successeurs le paage de Tours avec toutes ses appartenances et pluseurs autres rentes et domaines assis ou bailliage de Tourainne avec toute juridicion et justice haute et basse, grant et petite, tant en yaues comme en terre, toute teile comme nous l'i avions, avec tout droit, retenu à nous et à noz hoirs et successeurs le ressort et la souveraineté tant seulement. Toutes les quelles choses et chascune d'icelles nous avions mises, avant que nous les li baillissions, aus usages et aus coustumes de nostre viconté de Paris, quant en successions et ès amendes et fourfetures, ès quelles la dite dame, ses hoirs ou successeurs pourroient encheoir envers nous ou noz successeurs, ou temps avenir, si comme en nos lettres seellées en cire verte est plus à plain contenu. Et pour ce que nous voulons que les dites choses et chascune d'icelles soient [p. 101] fermement gardées sans fraude, ou temps avenir, nous mandons et enjoignons au baillif de Touraine, qui est à present et à ses successeurs baillif, qui seront pour le temps, que toutes fois qu'il en seront requis par la dite dame ou par ses hoirs ou successeurs, ou par leur genz, ils jurent que toutes les dites choses et chascune d'icelles, selonc la forme et la teneur de noz dites lettres, il garderont et feront tenir et garder fermement de point en point, et ce meismes il feront jurer aus prevoz de Tours, de Loches et de Lengès, que il garderont et feront garder les choses dessus dites, en la forme et en la maniere dessus dite. Et enjoignons aus diz baillif et prevoz et à leur successeurs que en droit de successions il ne receveront à jurer feauté en nulle maniere, quelle que elle soit, ne par applegement ne autres personnes, fors celles qui receues feussent à la succession, possession et saisine des diz chastiaus et chastellenies, selonc la coustume de la viconté de Paris, ne aus foiz et homages d'iceuls, non obstant la coustume de Touraine contraire. Et se par aucune aventure, ou temps avenir, par nous ou par nos hoirs et successeurs estoit fait au contraire en aucune maniere, ou par nostre baillif de Touraine, qui hore est, ou qui sera pour le temps avenir, ou par aucuns de noz autres officiers, nous voulons que soit de nulle value et le tenons pour nul et que il ne puisse porter prejudice à la dite dame ou à ses hoirs ou successeurs ; ainçoys voulons que touz jours soient remenées à l'estat, tenour et substance de noz dites lettres, et touz ceuls qui feront le contraire soient puniz comme inobediens à nous et à noz ordenances. Et afin que ce soit ferme et estable à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel en ces presentes lettres. Donné au Guey de Mauny, l'an de grace mil trois cenz vint et nuef, au moys de septembre.

Par le roy, à la relacion dou tresorier de Reins. Feauz.


1 C'est ici le lieu de rectifier une erreur commise par tous les historiens et reproduite dans le tome Ier de ce recueil, p. 93, note. Hugues Larchevêque, le mari d'Isabelle de Nesle, était non pas de cadet, mais le fils aîné de Guillaume VI Larchevêque et de Jeanne de Montfort. En cette qualité, il s'était attribué toute la succession de sa mère. L'une de ses sœurs, Marie, femme de Gérard Chabot, l'attaqua à ce sujet et lui réclama une part de cet héritage. Le procès, commencé en 1302, ne fut jugé définitivement que le 19 décembre 1332, près de quinze ans après la mort d'Hugues. Le Parlement décida que, suivant la coutume du pays où les biens litigieux étaient situés, l'aîné ne devait avoir que les deux tiers de l'héritage, et que le tiers restant devait être partagé entre les puînés. En conséquence, Jean Larchevêque, seigneur de Parthenay, héritier universel de son frère aîné, mort vers 1318, fut condamné à payer à sa sœur une rente annuelle de cinq cents livres, avec les arrérages depuis le commencement du procès (Arch. nat. X1a 6, fol. 271).
2 Le revenu annuel des deux châtellenies de Sainte-Gemme et de Bonneuil fut estimé à 658 livres 14 sous 7 deniers obole tournois, pour laquelle somme la dame de Semblançay obtint le péage de Tours avec ses annexes et dépendances, tant de terre que d'eau, sur la Loire et le Cher, des rentes dues au roi par des particuliers à Parçay, à Chanceaux, à Monnaie, à Saint-Barthélemy, dans la paroisse Saint-Ouen de Marmoutiers, les terrages de Loches, le moulin de Chedigny, et beaucoup d'autres menus cens et droits en divers lieux du bailliage de Touraine. La charte d'assignation de ces rentes en contient une très longue énumération. Août 1329 (JJ. 66, n° 273, fol. 102 v°).