[p. 130]

ML

Rémission octroyée à Rolland Raulete, homme d’armes de la compagnie du bâtard de Beaumanoir, prisonnier pour avoir rançonné plusieurs marchands de Notre-Dame de Beauchêne en Poitou.

  • B AN JJ. 176, n° 385, fol. 270
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 130-131
D'après a.

Charles etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Roulant Raulete, homme d’armes de la compagnie du bastard de Beaumanoir1, aagié de xl. ans ou environ, natif du païs de Bretaigne, contenant que le xxiie jour du mois d’octobre derrenier passé, le dit suppliant et plusieurs autres compaignons de guerre se transporterent ès hostelz ou maisons de ung nommé Benoist Ussault, Anthoine Bonnet, Colas Guillebaut et Pierre Riviere, marchans, demourans à Nostre Dame de Beauchesne en Poictou, et illec prindrent six draps de Moilleron, trois jumens et ung cheval, en entencion d’iceulx draps et choses raençonner pour avoir des vivres tant seulement, en passant le païs. Pour occasion du quel cas, jasoit ce que les diz marchans ayent esté [p. 131] satisfaiz et restituez des dictes choses, les chevaulx et biens du dit suppliant ont esté prins et saisiz, et son corps mis et detenu prisonnier en noz prisons au lieu de Chinon, et se doubte que, soubz umbre du dit cas l’en le vueille traicter ou condempner à paier aucune amende ou à souffrir peine corporele, humblement requerant que, attendu que dès le temps de son enfance il se soit continuelment emploié corps et biens en nostre service ou fait de la guerre, et a esté en plusieurs voiages, entreprinses armées et sieges à l’encontre de noz anciens ennemis et adversaires les Anglois, et mesmement au siege derrenierement par nous tenu devant nostre ville de Pontoise2, et aussi que les diz marchans ont esté restituez des dictes choses, et que oncques mais il ne fut actaint d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, nous lui vueillons sur ce impartir nostre grace. Pour quoy nous, les choses dessus dictes considerées et mesmement les bons et agreables services que le dit suppliant nous a faiz en nos dictes guerres, comme dit est, et esperons que encores face ou temps avenir, à icellui suppliant, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, avons pour les causes dessus dictes et autres à ce nous mouvans, quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces dictes presentes au bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d’Anjou et du Maine, et à tous noz autres justiciers et officiers, etc. Donné à Chinon, ou mois de decembre l’an de grace mil cccc. xli, et de nostre regne le xxme.

Ainsi signé : Par le roy, l’admiral3, messire Jehan de Jambes4 et autres presens. D. Budé. — Visa. Contentor. E. du Ban.


1 On ne trouve, dans les généalogies de la maison de Beaumanoir, aucun renseignement sur ce personnage dont le nom figure assez fréquemment dans les textes de l’époque. Pendant la Praguerie, la compagnie du bâtard de Beaumanoir tenait garnison au château d’Airvault, pour les princes rebelles, et se rendit coupable de pillages et d’excès. Pierre Ruffault, sergent de Richemont, sr de Parthenay, au bailliage d’Autin, et chargé du recouvrement des amendes, fut détroussé quatre fois par ses gens d’armes, qui le battirent et mutilèrent « très enormement » et lui volèrent trois chevaux. (Acte du 20 avril 1443, Arch. nat., R1 192.)

2 Le siège de Pontoise, où Charles VII fut présent en personne, commença dans les premiers jours de juin et se termina, le 19 septembre suivant, par l’assaut et la prise de cette place.

3 Prégent de Coëtivy était amiral de France depuis deux ans.

4 Ou plutôt de Chambes, chevalier, seigneur de Montsoreau, plus tard premier maître d’hôtel du roi. Il apparaît, vers 1440, comme membre du conseil privé, dont il fit partie jusqu’à la fin du règne de Charles VII, et fut capitaine de la Rochelle, Niort et Talmont. En juin 1454, il fut employé en diverses ambassades à Rome et en Turquie. Jean de Chambes épousa, le 17 mars 1445, Jeanne Chabot, seconde fille de Thibaut IX, seigneur de la Grève, et de Brunissende d’Argenton ; elle était, en 1473, dame d’honneur de Charlotte de Savoie, femme de Louis XI.