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Lettres d’abolition en faveur d’Olivier Harpedenne, dit de Belleville, seigneur de Mirambeau, pour tous ses excès de guerre, et particulièrement pour sa complicité dans la rebellion de Jean de La Roche, sénéchal de Poitou, contre l’autorité royale.
- B AN JJ. 177, n° 196, fol. 132 v°
- a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 280-286
Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre amé et feal chevalier et chambellan, Olivier de Harpedenne, dit de Belleville1, [p. 281] seigneur de Mirambeau, contenant qu’il nous a, ou temps [p. 282] passé, servy ou fait de noz guerres à l’encontre de noz [p. 283] anciens ennemys et adversaires les Anglois, tant en la frontiere de Xanctonge et de Bourdeaux, que autre part, en plusieurs lieux et voiages, acompaigné de plusieurs gens de guerre qui estoient soubz lui et soubz son gouvernement, tant en la compaignie de feu Jehan de la Roche, en son vivant nostre seneschal de Poictou, que d’autres ; depuis lequel temps, il a tenu aussi plusieurs gens de guerre en la dicte ville de Mirambeau, laquelle est en la frontiere de nos diz ennemys et adversaires les Anglois et une des villes et places de nostre obeissance plus prouchaine de la ville de Bourdeaux. Durant lequel temps, qu’il a tenu gens d’armes et qu’il s’est armé, les dictes gens de guerre qu’il a tenuz avecques lui ont fait plusieurs courses, destrousses et pilleries sur noz subgiez, pillé, robé et destroussé gens d’eglise, nobles, marchans et autres de divers estaz, et les ont mis à pié et osté leurs chevaulx, or, argent, et ce qu’ilz avoient avec eulx, vendu et butiné leurs chevaulx et biens, aguettez chemins et couru foires et marchiez, pillé, robé, destroussé et raençonné marchans et autres manieres de gens qu’ilz povoient raencontrer, fait logeiz sur noz hommes et subgiez, prins bestial et raençonné nos diz subgiez à argent, vivres et autres choses, prins et emmené bestial et autres biens qu’ilz trouvoient sur les champs et ès lieux où ilz estoient logiez, raençonné nos diz subgiez, et partie dudit bestial et biens mengié, vendu et butiné, et l’argent applicqué à leur prouffit. La quelle chose ledit suppliant a souffert et toleré à ses dictes gens et autres qui estoient avecques lui, et des dictes choses prinses a eu sa part, et à icelles ou partie d’elles faire a esté present en sa personne. Et que, durant certaine division d’entre nous et aucuns de nostre sang et lignage, pieça appaisée, durant laquelle ledit feu Jehan de la Roche et aucuns autres tindrent nostre ville de Nyort en desobeissance envers nous, ledit suppliant fut avec ledit Jehan de la Roche, duquel ledit suppliant estoit cousin [p. 284] germain2 et parent prouchain, en la dicte ville de Nyort, et aussi en celle d’Angolesme3 et autres lieux et places le suivy, l’acompaigna et favorisa, et fut durant ledit temps ledit suppliant cause de faire prendre, courir et pillier plusieurs villes et lieux qui obeissoient à nous. Et a, depuis qu’il tient ladicte ville de Mirambeau, prins appatiz et abstinence de guerre, sans nostre congié et licence, avec nos diz ennemys et adversaires les Anglois, pour sa dicte terre de Mirambeau et autres. Et aussi a depuis aucun temps ença esté devant la place de Maconville4, appartenant à nostre amé et feal chambellan le viconte d’Aunoy5, duquel ledit suppliant a espousé la [p. 285] fille6 ; et pour ce que ledit viconte avoit audit suppliant donné la capitainerie et baillié le gouvernement de ladicte place et autres, et que les habitans dudit lieu de Maconville ne vouloient faire ouverture de ladicte place, à lui et à ses dictes gens qui estoient avecques lui, il print et entra dedans ladicte forteresse, et y furent faictes aucunes pilleries, lesquelles il souffry et fist faire. Et avec ce print et emprisonna pieça ledit suppliant le prieur de Saint Sauveur de Maillié7, et aussi ung nommé Michau Le Vannier, et les tint par aucun temps prisonniers, et après les raençonna à certaine somme de deniers. Et plusieurs autres pilleries, roberies, courses, destrousses et raençonnemens a fait et souffert faire par ses gens et autres, en tenant les champs et vivant sur iceulx, et autrement, en plusieurs manieres. A l’occasion desquelz cas ledit suppliant, qui de tout son povoir a voulenté de soy [p. 286] retraire et nous servir, comme il a fait le temps passé, et vivre paisiblement comme homme de bien doit faire, doubte que noz gens et officiers vueillent contre lui proceder rigoureusement et tendre à pugnicion, si nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce impartie, humblement requerant, etc., icelles. Pour quoy nous, etc., audit suppliant, en faveur des bons et agreables services que son pere et ses predecesseurs nous ont faiz, le temps passé, en plusieurs et maintes manieres, avons quicté, remis, pardonné et aboly, etc., tous et chacuns les faiz, cas, crimes, deliz et malefices dessus diz et autres qu’il a et puet avoir faiz, commis et perpetrez le temps passé, ou qui ont esté commis en sa compaignie, lui present ou consentant, pendant ce qu’il suivoit nos dictes guerres et durant le temps d’icelles, et autrement, tout ainsi comme s’ilz estoient non faiz et non advenuz, et lesquelz voulons ici estre tenuz pour exprimez, exceptez et reservez toutesvoyes meurdre d’aguet apensé, boutement de feux, ravissement de femmes et de filles et violer eglises, lesquelz cas ne voulons y estre comprins ne entenduz, avec toute peine, amende et offense corporelle, criminelle et civile, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, aux seneschaux de Poictou et de Xanctonge, gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. xlv, et de nostre regne le xxiiiie.
Ainsi signé : Par le roy, ès requestes par lui tenues. Pichon. — Visa. Contentor. Charlet.