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MXC

Lettres d’abolition en faveur de Jean Guilloton, marchand de Mareuil-sur-Lay, pour sa participation en qualité d’arbalétrier à [p. 264] la guerre privée et aux entreprises faites par les garnisons de Mareuil et de Sainte-Hermine contre les places de Mervent et autres, et contre les Bretons qui les défendaient.

  • B AN JJ. 177, n° 180, fol. 122
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 263-266
D'après a.

Charles, etc. Savons faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Jehan Guilloton, aagé de xxxiii. ans ou environ, marchant demourant à Marueil en Poictou, chargié de jeune femme et d’un enfant, contenant que, xiiii. ou xv. ans a ou environ que le dit suppliant estoit jeune compaignon, lui fut fait commandement à grosse peine par le capitaine et les gens de guerre qui lors estoient en la dite place de Marueil, qu’il se armast pour la deffence1 de la dicte place, pour ce que lors il y avoit plusieurs cappitaines bretons et autres qui faisoient très forte guerre au dit lieu de Marueil, Saint Hermine et ou païs d’environ2, et y vouloient logier, prendre les dictes places et faire plusieurs maulx. Lequel suppliant qui, comme dit est, estoit lors jeune, chault et bouillant, et cuidant bien faire en obeissant aus diz cappitaines et gens de guerre, se habilla et fut arbalestier et ala, avec les dictes gens de guerre de la dicte place de Marueil, Saint Hermine et autres, à l’encontre des diz Bretons et autres qui vouloient porter mal ès dictes places, et fut en plusieurs courses avecques eulx et à plusieurs raencontres. Et depuis a esté avec d’autres gens de guerre, en la compaignie desquelz il a esté à prendre plusieurs gens qui tenoient le party [p. 265] des diz Bretons et autres, et aussi leurs bestiaulx, et à les en enmener au dit lieu de Marueil prisonniers, et leur faisoient pareille guerre ou aussi forte et plus que lesdiz Bretons et ceulx de leur party et autres ne leur faisoient. Pendant et durant le temps de laquelle guerre, les diz gens de la dicte place de Marueil, lui estant en leur compaignie, entrerent en l’eglise de Mairevant qui tenoit le party des diz Bretons, où ilz blecierent aucunes gens, toutes voyes n’en y eut il aucuns mors, au moins qu’il ait sceu, et n’entra point dedans la dicte place, et d’icelle emmenerent plusieurs prisonniers audit lieu de Marueil et autre part où ilz furent raençonnez. Et a esté le dit suppliant en d’autres courses, tant avecques les diz gens d’armes dudit Marueil que autres, où ont esté faiz plusieurs autres grans maulx, èsquelz toutesvoyes n’a point esté fait, qu’il ait sceu, de meurdre, ravy de femmes, bouté feux ne fait aucun sacrilege autre que de la dicte eglise de Mairevant, où il ne entra oncques dedans, comme dit est, ne ne fut en cause principale de le faire ne de l’entreprendre, ne aussi ne en amenda qui vaulsist point plus de deux escuz, qui ne valoient pas plus de lx. solz tournois ou environ ; qui lui furent donnez par le dit cappitaine de Marueil. Et a le dit suppliant depuis vescu par aucun temps sur les champs et fait des maulx, comme gens d’armes ont acoustumé de faire, pour avoir des vivres et les neccessitez de lui et de ses compaignons. Et combien que en tous autres cas le dit suppliant soit bien famé et renommé, et n’ait jamais esté actaint d’aucun autre vilain cas, blasme ou reprouche, neantmoins il doubte que aucuns ses hayneux et malveillans ou autres ne le vueillent à l’occasion de ce accuser vers justice, et que justice à cause de ce ne le vueille aucunement vexer ou travailler, qui seroit en son très grant dommaige et prejudice. Et pour ce nous a le dit suppliant humblement supplié et requis que, les choses dessus dictes considerées, et qu’il a ferme propox et voulenté de non [p. 266] jamais retourner à la guerre, mais de soy en retraire du tout et vivre doresenavant en son mesnaige, nous lui vueillons sur ce impartir nosd. grace et misericorde. Pour ce est il que nous, les choses dessus dictes considerées et les temps divers qui ont couru en nostre royaume et mesmement en nostre dit païs de Poictou, où les diz cas sont avenuz, et eu pitié et compassion de ses diz femme et enfant, nous à icellui suppliant ou dit cas les faiz et cas dessus declairez, lui avons aboliz, remis, quictez et pardonnez, etc. Si donnons en mandement à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois de avril l’an de grace mil iiiic xlv, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, vous et autres presens. Chaligaut. — Visa. Contentor. Charlet.


1 Le texte porte par erreur « descente ».

2 Les places fortes de Mareuil-sur-Lay et de Sainte-Hermine appartenaient à Georges de La Trémoïlle. Les gens d’armes qu’il y entretenait furent, de 1428 à 1432, en guerre perpétuelle avec les garnisons bretonnes de Vouvant, Mervent, Fontenay-le-Comte et autres qui tenaient pour le connétable de Richemont, sr de Parthenay. Il est question de cette lutte en plusieurs autres endroits de ce volume. Lors de la Praguerie, ces deux villes furent occupées par les rebelles et elles ne rentrèrent en l’obéissance du roi qu’au mois de janvier 1442. (Berry, Chronique de Charles VII, édit. Godefroy, in-fol., p. 417.)