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MCXXII

Rémission accordée à Gilles Chevaleau, écuyer, de Niort, pour avoir frappé Pierre, fils de Jean Isambert, avec lequel il avait assurement.

  • B AN JJ. 178, n° 18, fol. 11 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 389-391
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre bien amé Gilet Chevaleau1, escuier, ayant ses terres et possessions à Nyort, à Chisy et ailleurs ou païs d’environ, contenant que je pieça ledit suppliant donna en justice et en forme de droit asseurement à Jehan Ysambert, demourant en la parroisse de Secondigné en la chastellenie de Chisy et à sa famille, droiz, choses, possessions et biens quelzconques, comme par lettre sur ce faicte puet plus à plain apparoir ; et soit ainsi que, le jour de la feste saint Estienne en ce present mois d’aoust, Pierre Ysambart, filz dudit Jehan Ysambart, lequel menoit et conduisoit une charette atellée de beufz et chargée de bois, voult passer par dessus certain pont que ledit suppliant avoit fait faire de cloyes et de menues pieces de bois sur une petite riviere qui passe à Secondigné, pour passer du foing, et pour doubte que ledit [p. 390] pont ne feust rompu ou trop folé, en maniere que la besoingne dudit suppliant n’en feust retardée, icellui suppliant se mist au devant des beufz qui menoient ladicte charette, et les garda de passer par dessus le dit pont. Et lors le dit Pierre Ysambart print son chemin et voult passer par les prez dudit suppliant, et de fait passa par aucuns et s’efforçoit passer par autres, qui encores estoient à faucher, ès quelz prez n’avoit ne n’a aucun chemin. Et adonc ledit suppliant voyant que ce lui portoit et povoit porter grand interest et dommaige, pour obvier à ce, se mist derechief au devant desdiz beufz et charrette, oultre le gré et vouloir dudit suppliant, et de fait après plusieurs paroles et manieres de faire, ledit Ysambart, meu de mauvaiz et felon couraige, frappa ledit suppliant très durement et malicieusement du gros bot d’un aguillon sur la teste, et ce fait, se print à courre et fouyr tant qu’il peut, et ledit suppliant après, et en courant ledit Pierre Ysambart se abucha et chey à terre, et en cheant le dit suppliant qui le suivoit de près et qu’il le cuidoit frapper d’un baston sur la teste, le frappa sur la queue de sa robe seulement ; et lors ledit Pierre Ysambart ainsi cheu se retourna et print ledit suppliant par les jambes et le fist cheoir sur lui. Adonc ledit suppliant qui estoit fort esmeu et courroucié de ce que ledit Ysambart l’avoit ainsi frappé, doubtant que icellui Ysambart eust aucun cousteau ou autre ferrement, dont il le grevast en sa personne, le print par la gorge et le esgratigna ung peu, et ce fait, se leverent et departirent sans plus proceder l’un contre l’autre. Et combien qu’il n’y ait eu mort ne meshaing, et que ledit Pierre Ysambart ait esté premier invaseur, toutesvoies pour ce que ledit Pierre Ysambart est de la famille dudit Jehan Ysambart, et que ledit suppliant ne pourroit prouver que ledit Pierre Ysambart le frappast premierement, icellui suppliant doubte que noz procureur et justiciers vueillent, pour cause de l’infraction dudit asseurement, rigoureusement [p. 391] proceder à l’encontre de sa personne et de ses biens, si comme il dit, humblement requerant nostre grace lui estre sur ce prealablement impartie. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans preferer misericorde à rigueur de justice, audit suppliant ou cas dessus dit avons quicté, pardonné et remis, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Saint Martin de Candé, ou mois d’aoust l’an de grace mil cccc.xlvi, et de nostre regne le xxiiiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Charlet. — Visa. Contentor. E. Duban.


1 La généalogie des Chevaleau, seigneurs de la Tiffardière et de Boisragon, publiée dans la nouv. édit. du Dictionnaire des familles du Poitou (t. II, p. 423), ne commence qu’à Jean qui épousa, vers 1460, Jeanne Rogre. Suivant toute vraisemblance, Gilles appartenait à cette famille.