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MLXIV

Rémission en faveur d’Etienne Garnier, de l’île de Bouin, qui, intervenant dans une rixe suscitée à Jamet Caillon, par Thomas Lassours, avait frappé ce dernier d’un coup de bâton mortel.

  • B AN JJ. 176, n° 211, fol. 156 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 175-177
D'après a.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Estienne Garnier, de l’Isle de Boign, contenant que le jour saint Laurens derrenier passé, environ trois heures après mi [p. 176] jour, le dit Garnier et Jamet Caillon laisserent en la maison de Jehan Sauvaige aucuns avirons en garde, et en yssant de l’ostel dudit Sauvaige et ainsi qu’ilz s’en voulloient aler chascun en sa main1, survindrent Thomas Lassours et sa femme, lequel Lassours ala au devant des diz Caillon et Garnier, et dist au dit Caillon telles parolles ou semblables : « Dictes a vostre [frere2] qu’il garde bien mon bateau, et se garde que je ne le treuve point dedens, car se je lui trouve, je lui feray mauvaise compaignie ». Auquel le dit Caillon respondit qu’il se donnast garde qu’il diroit, et que cellui qui lui avoit vendu le dit bateau estoit bien souffisant de lui garentir. Lequel Thomas Lassours dist de rechief au dit Caillon et jura le sang de Nostre Seigneur que, s’il trouvoit le frere du dit Caillon dedens ledit bateau, qu’il le tueroit tout plat. Après lesquelles parolles dictes, ledit Caillon dist à ceulx qui illec estoient presens, qu’ilz feussent tesmoings des parolles que disoit le dit Lassours. Lequel, en perseverent en ses parolles aigres et menaces, dist de rechief audit Caillon telles parolles ou semblables : « Tu t’en mesles ! » et non content de ce, frappa le dit Caillon du poign en la poictrine, dont le dit Caillon appella de rechief à tesmoings ceulx qui illec estoient presens ; et s’efforça de rechief le dit Lassours frapper le dit Caillon. Et lors le dit Garnier, le quel tenoit ung baston en sa main, veant que le dit Lassours voulloit frapper le dit Caillon, lequel ne lui meffaisoit en aucune maniere, frappa le dit Lassours du dit baston ung cop sur la temple, tellement qu’il cheut à terre. Et oncques puis ne parla et vesquit depuis aucuns jours, et après ala de vye à trespassement. A l’occasion du quel cas le dit Garnier, doubtant rigueur et pugnicion de justice, s’est absenté du païs et n’y oseroit jamais revenir, ne retourner, ne converser, se nostre grace [p. 177] et misericorde ne lui estoit sur ce impartie, humblement requerant que, attendu qu’il est homme de bon fasme, renommée et honneste conversacion, non actaint ou convaincu d’aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, que le dit Lassours fut agresseur de parolles et par voye de fait et frappa le dit Caillon et le dit Garnier, et le dit Garnier n’avoit pas entencion de le tuer, et n’avoit de par avant aucune hayne contre lui, que le dit cas fut et advint de chaude cole et de cas d’aventure, et par desplaisir que le dit Garnier vit que, sans cause, le dit Lassours avoit frappé le dit Caillon et s’efforçoit encores faire, il nous plaise sur ce lui impartir icelle. Pour quoy nous, attendu ce que dit est, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit Garnier ou cas dessus dit avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces presentes aux seneschaulx de Poictou et de Xaintonge, gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Tours, ou moys de may l’an de grace mil cccc. quarante et quatre, et de nostre regne le xxiime.

Ainsi signées : Par le conseil. Charretier. — Visa. Contentor. P. Le Picart.


1 Sic. Il faudrait lire sans doute « maison ».

2 Ce mot a été omis par le scribe.