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MCCCLXXI

Lettres d'amortissement d'une rente annuelle de cent livres tournois consacrée à la dotation d'une chapellenie fondée par Louis d'Amboise, vicomte de Thouars, en l'abbaye de Talmont.

  • B AN JJ. 198, n° 562, fol. 511 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.
D'après a.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de nostre très cher et amé cousin Loys d'Amboise, viconte de Thouars1 prince de Thalemond et [p. 377] seigneur d'Olonne, contenant que puis naguières il a esleu sa sepulture en l'eglise de l'abbaye et monastaire de Thalemond, en la chapelle de Nostre Dame estant hors le cueur en la croisée de ladicte eglise, et pour le salut et remède de son ame a fondé, pour luy, ses hoirs et successeurs et qui de lui auront cause, en ladicte eglise et abbaye de Thalemond2, et en ladicte chappelle où il a ainsi esleu sadicte sepulture, en l'onneur et reverance de la benoiste Trinité et de toute la court celestial de Paradis, et en especial de la glorieuse Vierge Marie, le divin service qui se fait, c'est assavoir par chacun jour de l'an perpetuellement, vigilles de mors à note de neuf seaumes, èsquelz sera dit « In te, Domine, speravi » et neuf lecçons, à la coustume et ordinaire dudit jour de l'an oudit moustier et abbaye, avecques les laudes, et le derrenier respond sera « Libera mey Domine, de morte eterna », avecques les versilles « Dies illa » « Tremens factus sum » et « Creator omnium » ; et après lesdictes vigilles une messe à note et à la fin d'icelle « Ne recorderis » et l'oroison des mors, sur la fosse où nostredit cousin suppliant sera ensepulturé ; laquelle messe sera dicte au dimanche, de la Trinité, au lundi, des anges, au mardi, de saint Jehan l'Euvangelistre, au mercredi, des mors, au jeudi, du saint Esperit, au vendredi, de la Croix, et au samedi, de Nostre Dame ; et aussi vespres de mors à note, et quatre anniversaires à quatre [p. 378] jours par chacun an, c'est assavoir l'un le mardi après Pasques, l'autre le second mardi après la Pentecoste, le tiers le landemain saint Michiel et le quart aujour saint Jehan l'Euvangelistre. Et seront tenuz les religieux de ladicte abbaye de dire, aux jours desdiz anniversaires, la messe à note, à diacre et soubzdiacre, avecques lesdictes vigilles, vespres, messe de mors, et, pendant le temps qu'ilz diront lesdiz anniversaires, tiendront six sierges ardans, c'est assavoir deux sur l'autier et quatre sur ladicte sepulture de nostre dit cousin suppliant, et les autres jours deux sierges seulement sur ledit autier ; et commanceront lesdictes vigilles entre six, sept ouhuict heures, et se continuera ledit service sans aucune intervalle jusques à la fin d'icellui. Et seront sonnées perpetuellement lesdictes vigilles, avant que les commancer, à ung clas de toutes les cloches de ladicte eglise, et durant les laudes d'icelles vigilles, ladicte messe sera sonnée de l'une des plus grosses cloches d'icelle eglise par troys foiz et intervalles ; et pareillement lesdictes vespres seront dictes comme dit est et se commanceront lesdictes vigilles avant les vespres ordinaires de ladicte abbaye. Lequel service lesdiz religieux, abbé et convent de ladicte abbaye de Thalemond ont promis et se sont obligiez, tant pour eulx que pour leurs successeurs, de dire et celebrer perpetuelment, par la manière et ainsi qu'il est cy dessus declairé. Et pour et en rescompense de ce et afin que ledit service soit continué et entretenu à perpetuité, nostredit cousin suppliant a donné, cedé, transporté et delaissé pour luy, sesdiz hoirs et successeurs et qui de lui auront cause, ausdiz religieux, abbé et convent et à leursdiz successeurs, la somme de cent livres tournois de rente, qui leur a assise et assignée sur les choses et en la manière qui s'ensuit : c'est assavoir le droit que nostredit cousin suppliant a ès complans et foulaiges des petiz fiefz assis près le chasteau d'Olonne, aveques les gardes et recepz d'iceulx, pour cinquante solz [p. 379] de rente ; item, demy marc d'argent en masse deu par ledit abbé de Thalemond à la recepte dudit lieu, à chascune feste de Toussains, pour raison des choses qu'il a ou bourg de la Chaume d'Olonne et environ, pour quatre livres tournoys de rente, sur lesquelles choses de la Chaume icellui nostredit cousin suppliant a donné ausdiz religieux, abbé et convent juridicion et droit d'assise, pour leur sensif demander seulement sur leurs hommes qui leur y doivent cens nobles ; item, trois mines de froment de rente deues par lesdiz religieux, abbé et convent à ladicte recepte de Thalemont, à chascune feste de my aoust, pour raison des jaloignes3 de Saint Vincent de Jart, pour soixante solz tournois ele rente ; item, trois moutons ou girez4 coulleiz et thoisonnages deuz à ladicte seigneurie de Thalemond, à chascune feste d'Ascension Nostre Seigneur, sur la reille (sic) pour cinquante solz de rente ; item, le droit que nostredit cousin suppliant a et prent ou fief Cantain assis en la guarenne de Thalemont, tant en terraige de blez que complans de vins, pour cent solz ; item, vint solz tournois de rente que doit et a acoustumé paier à ladicte recepte d'Olonne...5, appellé le pré de la Barbotinière et pour quarante solz de rente ; item, quatre solz de tailles deuz à ladicte recepte de Thalemond sur certains massicaulx6 assis ou villaige de la Broullère. Et la recepte7 desdictes cent livres de rente, montant quatre vings livres tournois ou environ nostredit cousin suppliant l'a assise et assignée ausdiz religieux, abbé et convent sur ses receptes dudit lieu de Thalemond et de et sur chacune d'icelles par telle condicion que, quelque paiement qu'il en ait esté faict ausdiz religieux, sur l'une desdictes receptes, et ilz sont [p. 380] aucunement empeschez, ilz se pourront faire paier sur l'autre recepte par les quatre quarterons de l'an, qui sera par chacun quartier vint livres tournois. Et affin que la fondacion ait lieu et que icelluy nostre cousin ne soit fraudé de son entencion, il nous a humblement supplié et requis qu'il nous plaise avoir agreables lesdiz don, cession et transport desdietes cent livres de rente. Et d'abondant voulons que iceulx religieux, abbé et convent et leursdiz successeurs aient et preignent lesdictes cent livres tournois de rente et les tiengnent et possident comme admorties et à Dieu dediées,et icelles avons admorties et admortissons de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par cesdictes presentes, sans ce qu'ilz puissent estre contrains, ores ne pour le temps avenir à les mettre hors de leurs mains ne à en paier aucune finance, laquelle, à la requeste et en faveur d'icelluy nostre cousin suppliant, nous leurs avons donnée et quictée, donnons et quictons par ces mesmes presentes. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx gens de noz comptes et tresoriers, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d'eulx, si comme à luy appartendra, que de nostre presente ratifficacion, admortissement et don facent, seuffrent et laissent lesdiz religieux, abbé et convent de ladicte abbaye de Thalemond et leursdiz successeurs joir et user à tousjours perpetuellement, plainement et paisiblement, sans leur faire ne donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun destourbier ou empeschement au contraire ; et par rapportant ces presentes, signées de nostre main, ou vidimus d'icelles fait soubz seel royal, pour une foiz seulement, et recongnoissant desdiz religieux, abbé et convent sur ce souffisant, nous voulons le changeur de nostre tresor estre tenu quicte et deschargé de ladicte finance en ses comptes, nonobstant quelconques mandemens ou deffences à ce contraires. Et affin que ce soit chose ferme et estable à [p. 381] tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l'autruy en toutes. Donné à Tours, ou moys de septembre l'an de grace mil cccc. soixante et deux, et de nostre règne le second8 Ainsi signé : Par le roy, le sire du Lau et autres presens.

Bourré. — Visa. Contentor. J. Du Ban.


1 Louis d'Amboise, vicomte de Thouars, comte de Benon, etc. (Voir notre tome VIII, p. 60, note 3, et ci-dessus p. 330, note.)
2 L'abbé de Sainte-Croix de Talmont était alors François Ier du Puydu-Fou ; déjà mentionné en cette qualité l'an 1455, il mourut très âgé, après avoir résigné cette dignité au profit de son neveu, Guillaume VI Meschin, vers 1474. Ce dernier était encore abbé de Talmont en 1494. On trouve quelques renseignements relatifs à cette transmission dans un procès entre frère Guillaume Racodet et ledit Meschin, au sujet delà possession d'un prieuré à la collation de l'abbé, dont Racodet s'était fait pourvoir en cour de Rome et qu'il revendiquait, procès plaidé en Parlement les 5 et 9 juin 1478. (Arch. nat., X2a 42, aux dates.) Le prédécesseur de François du Puy-du-Fou, que la Gallia christiana nomme Jean III et mentionne aux années 1445, 1447, sans autre renseignement, fut Jean Pison, qui était en procès au Parlement de Poitiers, le 5 septembre 1436, contre Jean Fleury, évêque de Luçon. (Id., X1a 9194, fol. 147 v°.) Voy. aussi Gallia christ., t. II, col. 1424.
3 Mesures de grains.
4 Béliers, dans le dialecte poitevin.
5 Sic. Le copiste a omis ici un ou plusieurs membres de phrase, auxquels il n'est pas possible de suppléer.
6 Péages levés sur les vins.
7 Sic. Sans doute devrait-on lire « reste » au lieu de « recepte ».
8 A la même date de septembre 1462, Louis d'Amboise vendit à Louis XI la vicomté de Thouars et les seigneuries de Berrie et de Mauléon. (Voy. ci-dessus, p. 330, note.).