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MCCCLXXXII

Rémission accordée à Guillaume Sarregoule, de Fors, marchand de drap, détenu dans les prisons dudit lieu parce qu'il avait acheté d'un inconnu des étoffes volées à Tristan Vauguion.

  • B AN JJ. 198, n° 548, fol. 499
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.
D'après a.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Guillaume Sarregoule, demourant à Fors en Poictou, contenant que, ou moys de may derrenier passé ou environ, ledit suppliant estant à Beauvoir sur Nyort où il vendoit des draps, vint par devers lui ung homme, que ledit suppliant avoit oncques congneu ne veu, et lui demanda s'il vouloit acheter des draps, lequel lui respondy que oy, mais qu'il les vist ; lequel homme lui dist qu'il ne les pouvoit veoir jusques au lendemain qui estoit jour de [p. 415] dimenche, et pour ce faire il convenoit qu'il se rendist à lui environ menuyt en ung certain lieu, qu'il lui declaira, dont ledit suppliant qui desiroit gaigner, fut content, et de fait en alant audit lieu entrepris, il rencontra en uns carreffour ledit homme qui leramena audit lieu de

Beauvoir, en lui disant, que les draps estoient chez ung nommé Toussains, dont il lui monstra la maison et qu'il convenoit qu'il lui aidast à les oster dudit hostel ; lequel suppliant dist que non feroit et ne lui aideroit point, mais que s'il les lui vouloit apporter jusques audit carrefour où ilz s'estoient, trouvez, il seroit content de les attendre, et s'en retourna à icellui carrefour ; et quant il eut esté par aucun temps, ledit homme apporta certaine quantité de draps où ledit suppliant l'attendoit et gardant ceulx qu'il avoit apportez. Et après ledit homme lui dist qu'il mist à part tous ceulx qu'il vouldroit avoir et achetter, ce qu'il feist ; et après lui demanda-combien ilz lui cousteroient, et ledit homme lui dist qu'il lui en vouloit faire bon marchié et qu'il les lui donneroit pour vint escus. Lequel suppliant lui dist qu'il n'avoit que douze livres dix solz tournois et les bailla audit homme, qui lui dist que s'il eust plus largement d'argent,.il lui eust baillé le demeurant desdiz draps ; lequel demeurant il emporta ou en fist ce que bon lui sembla, et dist audit suppliant qu'il s'en aloit à Xaintes. Et ledit suppliant emporta ceulx qu'il avoit acheté. Et depuis Tristan Vauguion, auquel appartenoient lesdiz draps, a fait grant diligence de les recouvrer, et a trouvé que ledit suppliant en estoit coulpable, et s'en plaigny à justice. Et à ceste cause fut icellui suppliant constitué prisonnier ès prisons de Fors1 dont il est subgect, et peu de temps après, [p. 416] nostre procureur en nostre païs de Poictou ou son substitut, adverty dudit cas, obtint certaines lettres de nostre seneschal de Poictou ou son lieutenant, par vertu desquelles et informacions precedens il fist convenir et adjourner ledit suppliant à comparoir en personne, sur peine de bannissement, par devant icellui nostre seneschal ou son lieutenant, et avec ce l'executeur desdietes lettres voult proceder à mettre [en nostre] main les biens du père d'icellui suppliant avecques ceulx dudit suppliant, dont icellui père appella une foiz ou plusieurs, tant pour lui que pour sondit filz ; lesquelles appellacions n'ont encores aucunement esté relevées. Toutesvoyes ledit suppliant doubte que, soubz umbre dudit cas, on vueille proceder contre lui à pugnicion corporelle, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, en nous humblement requerant que, attendu que, alors que ledit homme qu'il ne congnoissoit et encores ne congnoist, vint par devers lui, il cuidoit qu'il eust des draps à vendre, ainsi que marchans ont acoustumé d'avoir et qu'il ne fut point en la maison dudit Toussains où estoient iceulx draps et ne fist seulement queles garder, quant ledit homme les apportoit, que depuis il a satisfait à partie au moins en manière qu'il est content de lui, et que en tous autres cas, etc., il nous plaise nostre dicte grace et misericorde lui impartir. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant ou cas dessusdit avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Xaintes, ou moys de janvier l'an de grace mil cccc. soixante et deux, et de nostre règne le deuxiesme. [p. 417] Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Bouton. — Visa. Contentor. J. Duban.


1 Le seigneur de Fors était alors Thomas de Vivonne, fils ainé de Hugues, seigneur dudit lieu, de Saiut-Gouard, etc., et de Marie de Vivonne, fille de Guillaume, sr de la Tour-Chabot. Il avait épousé Denise, fille de Jean Rabateau, président au Parlement, qui lui apporta les seigneuries d'Auzance, de Cloué et autres, pour lesquelles il rendit divers hommages et aveux au roi, les 11 et 30 novembre 1451 et le 15 janvier 1462 n. s. Il fit aussi les aveux de la seigneurie de Fors, le 25 janvier 1462 n. s., et de celle de Venours, à la même date. (Arch. nat., P. 5661, cotes 2810, 2811 et 2819 ; P. 1145, fol. 89 v°, 121 v°, 122, 142 v°.) Voy. aussi l'hôte de Jeanne d'Arc à Poitiers, maître Jean Rabateau, par H. Daniel-Lacombe, in-8°, 1895, p. 164 et suiv.