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CCCCXCIV

Confirmation du don fait à Guy Mauvoisin, huissier d'armes du roi, de deux cents livres de rente sur les biens confisqués de Jean Belon, chevalier, capitaine de la Roche-sur-Yon, condamné à mort et exécuté pour avoir livré par trahison cette ville aux Anglais.

  • B AN JJ. 102, Musée AE II* 391, n° 4, fol. 7
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 19, p. 53-57
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir veu unes noz lettres scellées de nostre seel et unes autres seellées du seel de nostre amé et feal chevalier et chambellan, Pierre d'Avoir, seigneur de Chastiaufremont1, contenans la fourme qui s'ensuit :

Charles, par la grace de Dieu roy de France. A nostre amé et feal chevalier et chambellan, Pierre d'Avoir, seigneur de Chasteaufroment, salut et dilection. Comme nous avons entendu que Jehan Belon2, chevalier, garde nagaires et [p. 54] capitaine de la tour ou chastel et de la ville de la Roche sur Yon, la quelle nostre très chier frere le duc d'Anjou li avoit bailliée, confians de sa loyalté et preudommie, a yceux chastel et ville baillés et livrés à noz ennemis pour proffit qu'il en a receu d'eulz, pour la quelle chose a esté prins et amené prisonnier à Angers et y est encores detenus et, par ce, s'il est ainsy, ait commis crime de lèse majesté et traison envers nous, par cry tous ses biens meubles et heritages, en quelque lieu, povoir et jurisdicion que il soient assiz en nostre royaume, nous doivent estre acquis et venus en commis, nous, confians de vostre senz, loyaulté et diligence, vous mandons et commectons que, si tost comme les diz biens du dit Jehan nous seront acquis et confisqués par l'execucion ou condempnacion d'icelluy Jehan, vous ou nom de nous et de par nous donnez et assignez iic livres de terre ou de rente, à prenre et avoir de et sur yceux biens, à nostre amé huissier d'armez Guiot Mauvoisin3, auquel nous lez avons donnez et octroyez et donnons dès maintenant pour lors, de nostre grace especial, certaine science et auctorité royal, pour consideracion des bons et loyaulz services que il nous a faiz en noz guerres, ès quellez il a esté autrefoiz prins de noz ennemiz et autrement, à tenir par li, ses hoirs et successeurs, ou ceulx qui auront cause de li perpetuelment, et dès lors l'en mettez ou faictes mettre en possession et saisine. De ce faire vous donnons et commettons nostre povoir et auctorité, voulans et octroianz que le don que vous li en ferez, ou nom de nous et pour nous, comme [p. 55] dit est, tiengne et ait aussi grant vertu comme se nous mesmes le lui faisions, et le confermerons par noz lettres, si tost que requis en serons, et decernons tout autre don que nous en ferions à autre estre de nulle valeur. Si donnons en mandement à tous les justiciers, officiers et subgiez de nostre royaume, que en ces choses et en leurs dependances vous obeissent et entendent diligeanment. Donné à Paris, le xiie jour de janvier l'an de grace mil ccc. lxix, et le vie de nostre regne.

Item la fourme des lettrez de nostre dit chambellan s'ensuit :

Pierre d'Avoir, sires de Chastiaufremont, chambellan du roy nostre sire et de monseigneur le duc d'Anjou, à tous ceux qui ces presentes lettres verront, salut. Savoir faisons nous avoir veu les lettrez du roy nostre dit seigneur à nous adrecies, contenans la fourme qui s'ensuit4... Par vertu des quelles lettres, parce que nous sommez acertenez que le dit Jehan Bellon a esté jugié, condempné et miz à execucion de mort pour la traison qu'il avoit faicte à nostre dit seigneur du dit chastel ; par la quelle condempnacion et execucion, tous ses biens meubles et immeublez ont esté et sont confisquiés à nostre dit seigneur, sur yceulz biens et d'iceux, en quelque lieu et jurisdicion qu'il soient ou royaume de France, avons donné et donnons au dit Guiot iie livrées de terre ou rente, selon la fourme et teneur des lettrez dessus dites et par le povoir dessus dit à nous donné, à tenir par le dit Guiot, ses hoirs, successeurs, ou ceux qui auront cause de li perpetuelment. Si donnons en mandement et commettons à Pierre Sevin5, [p. 56] chastellain de Tours, qu'il aille et se transporte en propre personne là où sont les biens qui furent du dit Jehan Belon, ou temps qu'il vivoit, et yceux tant meubles comme heritages prengne et tiegne en la main de nostre dit seigneur, et ce fait, en baille, delivre et assigne au dit Guiot, ou à son procureur pour li, iic livrées de terre ou rente, comme dit est, et l'en mette, ou son procureur pour li, en bonne possession et saisine paisibles, selon le contenu des lettres du roy nostre dit seigneur et de ces presentes, et l'en face et laisse joir et user paisiblement. Mandons et commandons à touz les justiciers et officiers du roy nostre sire et de mon dit seigneur, prions et requerons touz autres que, en faisant les choses dessus dites et chascune d'icelles, obeissent et entendent diligenment à vous prester conseil, confort et aide, si mestier en avez et vous les en requerez. En tesmoing de ce, nous avons fait mettre nostre seel à ces lettres. Donné au Chastel du Loir, le ixe jour de fevrier l'an de grace mil ccc. lxix.

[p. 57] Le quel don fait par nostre dit chambellanc au dit Guiot des biens du dit feu Jehan Belon jusques aus dictes iic livrées de terre ou rente à tournois, comme plus à plain est contenu en ses dites lettres ci dessus transcriptes, nous, aians ferme, estable et aggreable, yceli volons, greons, loons, ratiffions, approuvons et par la teneur de ces presentes confermons, et, se mestier est, ycelles iic livres de terre ou rente à tournois sur les biens du dit feu Jehan Belon li donnons et octroyons, de nostre grace especial et auctorité royal, pour li, ses hoirs, successeurs et qui de li ont ou auront cause. Si donnons en mandement par ces presentes à nostre seneschal de Touraine et au seneschal d'Anjou et du Maine, et à nostre bailli de Chartres, et à tous noz autres justiciers, officiers, sergens et subgiez, presens et avenir, ou à leurs liextenans et à chascun d'eulz, si comme à li appartient que des dites iic livres de terre ou rente à tournois, selon l'aissiete que le dit Pierre Sevin li en fera ou a faicte, laisse et face joir et user le dit Guiot, ses hoirs, successeurs et ceus qui de li auront cause paisiblement et à tousjours mes, comme de sa propre chose, et tout en la fourme et maniere que faisoit d'icelles le dit feu Jehan Belon, en son vivant. Et pour ce que ce soit, etc. Sauf, etc. Donné à Paris en nostre hostel lez Saint-Pol, le xiie jour d'avril l'an de grace mil ccc. lxix, et de nostre regne le vie.

Par le roy. J. de Vernon, — Collation est faicte des lettres ci dedens incorporées par moy. J. de Vernon.


1 Pierre d'Avoir, seigneur de Véretz et de Châteaufromont, est qualifié de lieutenant en Touraine, Anjou et Maine dans des lettres de Du Guesclin, données au mois de mai 1371, en faveur des religieux de Vaas, après la reprise de cette abbaye sur Robert Knolles (JJ, 100, n° 853, fol. 252). Il est encore cité avec les qualifications de lieutenant général, puis gouverneur et bailli de Touraine, dans des titres de 1383, 1386 et 1387. Il était aussi chambellan de Louis Ier d'Anjou, duc de Touraine et roi de Sicile, et avait épousé Jeanne, fille de Bouchard viii de l'Isle-Bouchard. Décédé en février 1390, il fut enterré dans l'église Saint-Maurice d'Angers, près du tombeau de Hardouin de Bueil, son oncle. (Carré de Busserolle, Dict. géographique d'Indre-et-Loire, t. I, p. 93 ; — C. Port, Dict. hist., biogr. et géogr. de Maine-et-Loire, t. I, p. 171.)
2 Voy. la notice que nous avons consacrée à ce personnage dans le volume précédent (p. 387, note 1), à propos de sa trahison et de l'occupation de la Roche-sur-Yon par les Anglais. Un Guillaume Belon, chevalier, avait épousé Jeanne de Dercé et possédait une terre à Poix en 1389. (E. de Fouchier, La baronnie de Mirebeau, p. 173.)
3 C'est ainsi que Guy Mauvoisin devint propriétaire, entre autres domaines ayant appartenu à Jean Belon, du manoir de Renoué près Loudun. Il le vendit peu de temps après à Louis, duc d'Anjou, et celui-ci le céda, par acte du 22 mai 1375, à l'abbaye de Fontevrault pour se libérer d'une rente annuelle de cent livres tournois qu'il devait aux religieuses. (Arch. nat., P. 1340, n° 477).
4 Répétition du mandement du 12 janvier qui précède.
5 Par lettres publiées ci-dessus, page 10, Charles V fit don à Pierre. Sevin, capitaine de Tours, le 30 novembre 1369, des biens situés en Anjou et en Touraine, confisqués sur le sire de Bressuire, Guillaume du Plessis et Pierre Aymer. La feuille qui contient cet acte était tirée, quand nous avons trouvé un document curieux sur cette affaire. Il s'agit d'un accord conclu le 16 avril 1375 n. s., entre Pierre Sevin, écuyer, et le sire de Bressuire, encore mineur. Il y est dit que le premier, étant châtelain de Tours, avait reçu du roi entre autres terres celles de Morains et de Souzay, appartenant aux Beaumont-Bressuire, et que les baillistres du sire de Bressuire, alors Jean d'Avaugour, et Jeanne d'Harcourt, sa femme, avaient, quelque temps après, attaqué la validité de cette donation. Depuis, Jeanne d'Harcourt, devenue veuve, s'était remariée avec Guillaume Paynel, seigneur de Hambuye, et ayant conservé le bail du mineur de Bressuire, elle avait poursuivi cette affaire. Mais un article du traité de paix stipulant la restitution des biens confisqués, le débat entre son pupille et Pierre Sevin ne pouvait plus porter que sur les fruits et revenus des terres de Morains et de Souzay perçus par celui-ci, depuis le jour où il en avait pris possession. Les parties conviennent d'en partager le produit par égales portions, et Pierre Sevin s'engage à restituer au sire de Bressuire la moitié de ce qu'il avait perçu. (Arch. nat., X1c 30, à la date ) Cet acte est assez important en ce qu'il permet de rectifier plusieurs points des généalogies d'Avaugour et de Beaumont-Bressuire. Le P. Anselme donne Jeanne d'Harcourt, dame de Morgon, pour femme à Henri IV d'Avaugour, et non à Jean, et passe sous silence le second mariage de cette dame avec Guillaume Paynel. D'autre part, il n'est pas sans intérêt de constater que le sire de Bressuire (Louis de Beaumont, suivant MM. Ledain et Beauchet-Filleau, aurait succédé à son père Jean en 1361 et aurait vécu jusqu'en 1387) était encore mineur le 16 avril 1375.