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DLIX

Confirmation des lettres de sauvegarde octroyées par le roi Philippe de Valois à l'abbaye de Saint-Jouin-de-Marnes.

  • B AN JJ. 104, n° 138, fol. 63 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 19, p. 300-302
D'après a.

Karolus, Dei gratia Francorum rex. Notum facimus universis, modernis et posteris, nos litteras carissimi et dilectissimi domini ac avi nostri Philippi, quondam Francorum regis, predecessoris nostri, vidisse sub hiis verbis :

Philippes, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que comme nous de nostre auctorité royal et puissance, en ensuians les fais et les euvres, etc. Donné à Poissy, l'an de grace mil ccc. trente trois ou moys de novembre1.

Quas quidem litteras ac omnia et singula in eis contenta prefati religiosi, abbas et conventus monasterii Sancti Joyni de Marnis2, qui per tempus aliquod domino Eduardo [p. 301] de Anglia, vel principi Walliarum, filio suo, hostibus nostris et regni3 subfuerunt, superioritate tamen erga nos omnimode reservata, per regiam celsitudinem, pro se et suis successoribus, in eodem monasterio graciose ratificari et confirmari nobis humilime supplicarunt ; nos autem animavertentes maximum dilectionis fervorem, quem nobis iidem supplicantes de facto quamplurimum dicuntur ostendisse, [p. 302] gravamina incompassiva guerrarum nostrarum occasione innumerabiliter supportando, in tantum quod nimia egestate de presenti cogi prospiciuntur, tenorem integrum litterarum ipsarum superius insertarum, auctoritate nostra regia et speciali gracia, nostreque plenitudine potestatis, ratificamus, laudamus, approbamus, ac presencium serie perpetuo confirmamus, ipsaque volumus inviolabiliter teneri et observari temporibus successuris ; baillivo Exempcionum et ressortorum nostrorum in comitatu Pictavensi ceterisque justiciariis, officiariis et subditis nostris vel eorum loca tenentibus, modernis et futuris, et eorum cuilibet, prout ad eum pertinuerit, firmiter injungendo, mandantes quatinus prefatos religiosos, presentes et successuros in eodem monasterio, nostra presenti gracia et confirmacione uti pacifice faciant et gaudere permittant, contradicionibus quibusvis penitus cessantibus et rejectis. Quod ut firmum et stabile perpetuo perseveret, presentes litteras sigilli nostri caractere jussimus communiri. Nostro in aliis et alieno in omnibus jure salvo. Datum et actum Parisius, mense aprilis, anno Domini millesimo ccco septuagesimo secundo, et regni nostri nono, ante Pascha4.

Per regem, ad relacionem consilii. J. Chesnel.


1 Ces lettres sont publiées dans le premier volume de notre recueil, sous le n° CLXXXII, p. 430.
2 L'abbaye de Saint-Jouin-de-Marnes, de l'ordre de Saint-Benoît, existait déjà au vie siècle. Son origine est controversée. Elle était située près de Marnes, bourg du Mirebalais, en allant vers Thouars, entre deux rivières, le Thouet et la Dive. Jean, moine de Montmajour, prieur de Notre-Dame de Cherlieu, fut institué abbé de Saint-Jouin par bulle du pape Urbain V, la première année de son pontificat, c'est-à-dire en 1362. Il est encore mentionné aux années 1375 et 1383. (Gallia christ., t. II, col. 1273.) Sous les abbés qui le précédèrent, au milieu du xive siècle, l'abbaye eut d'importants procès au Parlement. Il a été question déjà des poursuites qu'elle dirigea contre Guillaume de Craon, vicomte de Châteaudun, en réparation des dommages qu'il lui avait causés (vol. précédent, p. 252, note). En 1342, un différend avec le vicomte de Thouars portait sur le ressort du temporel de l'abbaye de Saint-Jouin. Ses causes devaient-elles être portées à Poitiers, à Thouars, comme le voulait le vicomte, ou à Loudun, comme le prétendaient les religieux ? En attendant le jugement de la cour et le procès pendant, le sénéchal de Saintonge reçut ordre de la comprendre dans son ressort, par mandement du 24 juillet 1342 (X1a 9, fol. 255 v°), renouvelé le 13 août 1343. (Id., fol. 396.) On ne connaît pas l'issue de cette affaire, quoique un arrêt favorable sur certains points aux religieux ait été rendu le 4 mai 1342. (Id., fol. 302.) Les mêmes parties étaient en cause, à la même époque, touchant le prieuré de Saint-Georges près Montaigu. Le vicomte de Thouars était appelant d'une sentence de Jean Du Port et de Guillaume Beutin, commissaires délégués du sénéchal de Poitou. Une commission donnée par le Parlement à deux conseillers, Artus de Pommeure et Ferry Briard, contient des renseignements importants sur cette affaire (actes des 22 déc. 1340, 23 et 25 juin 1341, X1a 9, fol. 155 r° et v°, 156). Il s'agissait aussi du ressort du temporel de ce prieuré que le vicomte de Thouars revendiquait. Le procureur du roi se joignit aux religieux de Saint-Jouin et au prieur ou prévôt de Saint-Georges. Plusieurs arrêts rendus furent favorables à ceux-ci, quoique non définitifs, le 4 mai et le 28 juin 1342 (X1a 9, fol. 301, 303, 334 v°). Olivier de Clisson et Jeanne de Belleville, sa femme, avaient émis aussi des prétentions sur le ressort du temporel de Saint-Georges. L'abbé de Saint-Jouin et le procureur du roi maintenaient qu'il devait ressortir sans moyen au siège de Fontenay-le-Comte ; Jeanne de Belleville prétendait que le prieuré avait toujours relevé au temporel de son château de Montaigu. Olivier de Clisson ayant été justicié et ses biens, ainsi que ceux de sa femme, confisqués, le roi, ou plutôt son fils aîné, Jean duc de Normandie, à qui avaient été donnés ces biens, avec le comté de Poitou, reprit le procès pour son compte, mais il le perdit. Lacour, par arrêt du 10 mars 1348, décida que les religieux seraient du ressort de Fontenay-le-Comte (X1a 12, fol. 100 v°). — On trouve encore un mandement du Parlement dans une affaire de l'abbé de Saint-Jouin-de-Marnes contre Jean Lesvin. Le premier était appelant d'une sentence de Jean de Rumilly, assesseur du sénéchal du duc d'Anjou. Il y est question de Jean Janvre, sergent de ce prince. Acte du 9 juillet 1380. (X1a 29, fol. 85 v°.)
3 Le texte fautif porte : « Qui per tempus aliquod domino Eduardi de Anglia, vel principis Walliarum, filii sui, hostium nostrorum et regni, subfuerunt.
4 Cette confirmation a été imprimée dans le recueil des Ordonnances des rois de France, d'après la même source, t. V, p. 610.