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MCCLXXVII

Rémission accordée à Thomas Rioteau, de Saint-Michel-le-Cloucq, prisonnier audit lieu pour un vol commis au préjudice de son oncle maternel, Jean Liet, auquel d'ailleurs il avait fait restitution.

  • B AN JJ. 187, n° 33, fol. 20
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receue l'umble supplicacion de Thomas Ryoteau, povre homme de labour, fils de Jehannin Rioteau, natif de Saint Michau le Clou, jeune homme de Faage de xxii. ans ou environ, contenant que, ou mois d'avril derrenierement passé, à l'occasion de certaines parolles et injures verballes à lui dictes par Jehan Lyet, son oncle maternel, demourant audit lieu ele Saint Michau, il dolent et courrocié des dictes injures, contre [lui par] sondit oncle [proferées], conceut haynne contre lui, et à ceste cause fut esmeu de faire desplaisir à son dit oncle en ses biens meubles ; lequel suppliant, pour acomplir son propos et volunté à Fencontre de son dit oncle, se transporta en l'ostel d'icellui son oncle, ouquel il ne trouva personne et entra oudit hostel qui n'estoit point fermé à la clef. Et après ce qu'il fut entré oudit hostel, d'une serpe qu'il avoit rompit le morteul d'un forcier ou coffre qui estoit en icelluy, ouquel il trouva certaine quantité de linge comme linceulx, thouailles, lettres et autres choses, dessoubz lesquelles il trouva une poche ou sachet de linge, en laquelle avoit certaine quan- [p. 27] tité de monnoye, autrement n'en scet le compte, parce qu'il ne le compta point. Et aussi trouva en une escuelle d'estaing la monnoye de deux escuz ou environ, et en unes burletes quatre escuz d'or ; lesquelz quatre escuz et monnoye il mist en son bonnet avecques ladicte poche où estoit ledit or, et le tout en son sain. Et ce fait, s'en ala hors dudit hostel et ferma la dite porte après lui, ainsi qu il l'avoit trouvée, et d'ilec s'en ala ou village de la Freslerie, et en soy retournant dudit village, il mist ladite poche où estoit ledit or, excepté certaine partie qu'il mist en sondit bonnet, où estoient encores lesdiz quatre escuz et partie de ladicte monnoie des diz deux escuz, qu'il enterra au pied d'un chesne en l'arbrière ou haye de boys de Ponsinière près dudit lieu de Saint Michau ; et le surplus dudit or et aussi lesdiz quatre escuz et monnoie enterra autre part au pié d'un cormier appellé le Cormier Robert, assis près de l'ostel de la Louherie. Et incontinant qu'il fut arrivé audit lieu de Saint Michau, survint en l'ostelde sondit père, où il estoit, Pierre Le Jay, sergent de Pierre Bonnea, escuier, seigneur dudit Saint Michau le Clou1, laquelle seigneurie de Saint Michau ledit escuier [p. 28] tient noblement à foy et hommage de nostre très chier et amé cousin le conte de Richemont, à cause de son chastel et chastellenie de Mairevent. Auquel Rioteau, suppliant, le dit Rioteau2 dist que ledit Liet, son oncle, estoit tout enragié de son argent qui lui avoit esté emblé, et s'en estoit alé et que l'on ne savoit qu'il estoit devenu, et que s'il avoit eu ledit argent et biens meubles, qu'il lui conseilloit qu'il les rendist et restituast audit Liet, son oncle. Et lors ledit suppliant fist response audit sergent qu'il n'avoit point eu les dites choses et que par ce il n'en departiroit point le païs. Après laquelle response faicte par ledit suppliant audit sergent, icellui sergent s'en ala d'avecques ledit suppliant. Et après ce que le dit sergent s'en fut alé, le dit Ryoteau, suppliant, fut très dolent de ce que son dit oncle s'en estoit ainsi alé, et delibera en soy de rendre et restituer ledit or et argent, et ce qu'il avoit ainsi prins, appartenant à son dit oncle. [p. 29] A l'occasion desquelles choses ainsi emblées par ledit suppliant ou autrement, il fut prins prisonnier par ledit sergent et mis et constitué ès prisons dudit seigneur de Saint Michau, où il est encores detenu. De laquelle prinse et emprisonnement il appella, lui estant èsdites prisons, pour empescher qu'il ne fust aucunement interrogué des cas dessus diz, combien qu'il eust tousjours vouloir et entencion de rendre et restituer à sondit oncle les dites choses par lui prinses furtivement comme dit est. Et depuis a renoncé à son dit appel, lui estant èsdites prisons, et enseigné lesdites choses par lui prinses et ravyes ; lesquelles ont esté rendues et baillées à son dit oncle ou à autre pour lui, et en est content dudit suppliant. Non obstant laquelle restitucion ainsi faicte que dit est, ledit suppliant est detenu prisonnier ès dites prisons dudit seigneur de Saint Michau, èsquelles il est en avanture de finer ses jours miserablement, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties ; en nous humblement requerant que, attendu ce que dit est, et que ledit suppliant a rendues et restituées les dites choses, etc., et que ce qu'il l'a meu à embler lesdites choses à son dit oncle, fut à l'occasion desdites parolles et injures qu'ilz eurent lui et son dit oncle, il nous plaise sur ce lui impartir nostre dite grace. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans grace et misericorde preferer à rigueur de justice, audit Thomas Rioteau, prisonnier, avons oudit cas quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces presentes à nostre seneschal de Poictou, ou à son lieutenant à son siège de Nyort, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Monbrison en Forestz, ou mois de juing, soubz nostre seel ordonné en l'absence du grant, l'an de grace mil cccc. lvii, et de nostre règne le xxxvme.

Ainsi signé : Par le conseil. G. de Thoucy. —Visa. Contentor. Briçonnet.

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1 Il était fils d'autre Pierre Bonneau, écuyer, et de Marie de Saint-Micheau, qui avait eu la terre de Saint-Michel-le-Clou, comme héritière de son frère Gillet, mort jeune. Ce fief qui relevait du roi ou des comtés de Poitou, à cause de Fontenay-le-Comte, jusqu'en 1419 au moins, était dès 1428 dans la mouvance de Mervent, domaine des seigneurs de Parthenay. Lancelot de Saint-Micheau en était seigneur à la fin du XIVe siècle. Peu de temps après sa mort, sa veuve Jeanne Brisson, tutrice de Gillet, leur fils mineur, en rendit l'aveu à Jean duc de Berry, le 2 mai 1403 ; elle fit de même, le 16 juin suivant, pour les terres que possédait son mari à Gourgé, mouvant de Lusignan, et le 19 mai 1404, pour le fief de Beaumont à la Meilleraye près Fontenay, aujourd'hui commune de Saint-Michel-le-Clou. (Voir Arch. nat., R1* 2171 p. 296; R1* 217 2, p. 1084, 1086-1094.) Sur le livre des aveux et hommages rendus, en 1418, au dauphin Charles, comme comte de Poitou, on trouve la mention d aveux fournis alors pour les mêmes seigneuries, et particulièrement pour « la Mothe Saint-Michaule Clôuq, où souloit avoir anciennement chastel ». (Id., P. 1144, fol. 22 v°, 46 v°, 48 v°.) Le 15 octobre 1419, Pierre Bonneau en fit hommage au même prince, à cause de sa femme, Marie de Saint-Micheau (P. 1145, fol. 47 v°), et le 2 octobre 1428, il en rendit l'aveu à Richemont, sr de Parthenay, Vouvant et Mervent, ainsi que du fief de la Chapelle-Béraud (même paroisse de Saint-Michel). Le Dict. des familles du Poitou cite d'autres aveux pour Saint-Michel-le-Clou, des 20 août 1447, 10 septembre 1460 et 14 janvier 1469 (nouv. édit., t. I, p. 605). Ces derniers furent rendus par Pierre Bonneau le fils, celui dont il est question ici, qui, le 26 septembre 1447, dans un aveu de ses terres de Courgé, est dit « sous le bail de Pierre Boutou, chevalier, sr de la Baugissière ». (Arch. nat., P. 1145, fol. 71.) L'aveu du 20 août 1447 pour Saint-Michel-le-Clou, hôtel, hébergement et dépendances, daté de Benet, rendu au comte de Richemont, comme seigneur de Mervent, donne les noms des possesseurs d'arrière-fiefs tenus à foi et hommage plein dudit Saint-Michel. Ce sont : Jean de Blavetes, pour son lieu de la Mothe, en ladite paroisse ; Louis de Baugis, pour son hôtel de la Girardière, sis près dudit lieu de la Mothe ; Guillaume du Berrot, pour raison d'un fief appelé la Quintaine, assis en la paroisse de l'Orberie ; les hoirs de feu Jean Voyer, chevalier, à raison d'une dîmerie et autres choses en la paroisse de Cezais ; Geoffroy Pasquet, pour son hôtel et appartenances de Malevoisine, en la paroisse de Vouvant ; et Pierre Boutou, chevalier, à raison d'un fief de vignes appelé le Rouil, en ladite paroisse de Saint-Michel-le-Clou. (Arch. nat., R 1* 204, fol. 27.) Pierre II Bonneau épousa, avant 1457, la fille de Pierre de Leugny, chevalier, seigneur du Bois-Berthier près Niort, comme on le voit dans des lettres de rémission accordées, en août 1459, audit sr de Leugny, à son gendre et à plusieurs autres, dont un Guillaume Bonneau, frère ou cousin de Pierre, coupables de meurtre. (Ci-dessous, n° MCCCXVII).
2 Sic. Il faut sans doute lire « sergent » au lieu de « Rioteau ».