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MCCCXLVII

Rémission en faveur de Jean Ripault, Grégoire, son frère, et Huguet Prevost, leur voisin, lesquels, poursuivant André Bouju qui avait volé une jument audit Jean Ripault, l'atteignirent et le frappèrent de telle sorte qu'il succomba quelques jours après.

  • B AN JJ. 192, n° 5, fol. 2 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.
D'après a.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Jehan Rippault1, Gregoire, son frère, et [p. 293] Huguet Prevost, povres gens de labour, chargez de femme et enffans, contenant que trois sepmaines a ou environ, ainsi que ledit Jehan labouroit en ses terres, survint en ses pastureaux feu André Bouju, qui illec print furtivement et embla une jument appartenant audit Jehan, suppliant, qui pasturoit, et mist dessus ung bast qui estoit sur une autre jument qu'il avoit illec amenée, toute lasse et deffaite qu'il laissa oudit pasturau et emmena celle dudit Jehan Ripault, suppliant, et assés tost après on lui dist que ung larron s'en fuioit avec sa jument, dont il fut bien dolent. Et tout incontinant, lui esmeu, print ung gros baston en sa main et se tira par devers lesdiz Gregoire et Huguet, ses frère et voisin, supplians, et leur dist ledit larrecin, en leur priant qu'ilz lui voulsissent aider à recouvrer sadicte jument, et s'en ala devant tout hativement, suivant au mieulx qu'il povoit par où avoit [passé] ledit larron, et de fait fist tant qu'il eut aucune congnoissance qu'il estoit en ung bois appellé le bois des Pilliers, loing dudit pasturau de trois quars de lieue ou environ ; et pour ce qu'il estoit seul et qu'il doubtoit que ledit larron feust embastonné et acompaigné d'autres, attendit lesdiz supplians, ses frère et voisin, et eulx venuz, pour ce qu'ilz ne savoient bonnement le lieu et place où estoit ledit larron, environnèrent ledit bois et firent tant qu'ilz trouvèrent en icellui ledit André, et mesmement ledit Jehan suppliant le trouva le premier en ung lieu où il s'estoit mussé ; et incontinant qu'il l'apperceut, lui esmeu et courroucé de ce que ladicte jument lui avoit esté ainsi emblée, de chaude colle lui courut sus avec un forche de fer qu'il avoit trouvée en son chemin et l'avoit prinse à ung enffant qui la portoit, et de ladicte fourche poussa fort ledit André, et puis la print par le manche et en donna audit larron par les espaules et par le visaige, et aussi lui donna des souffïés de sa main oudit visaige, et pour lors n'y avoit que eulx deulx ; mais ainsi qu'il le tenoit, survindrent lesdiz supplians et eulx estans [p. 294] tous ensemble, prindrent conclusion de mener ledit larron à justice. Mais il leur requist, en joingnant les mains, que pour Dieu ilz ne le menassent à ladicte justice, et dist audit Jehan qu'il reprint sadicte jument et qu'il lui donnoit la sienne qui estoit demourée oudit pasturau, et aussi lui donnoit le bast, la sengle et le licol et ung estrief qui estoit audit bast, et avec ce lui donna sa bourse et trois deniers qui estoient dedans, laquelle bourse avoit esté rompue par ledit Jehan oudit debat ; et lui dist ledit André qu'il estoit bien marry qu'il n'y avoit cinq francs dedans ladicte bourse, pour le récompenser du dommaige et desplaisir qu'il lui avoit fait. Et ne lui fut fait autre mal, sinon que ledit Gregoire, en le voulant mener à justice le poussa d'un baston qu'il avoit et lui en donna ung cop par derrière. Et peu après ledit Jehan et ledit André Boujon (sic) se requirent pardon l'un à l'autre, et le laissèrent en aller. Et s'en vint icellui Jehan avec sadicte jument et apporta lesdiz sangle, liecol, estrief et bourse, et lui laissa ledit bast dont il n'avoit cure, et ledit Prevost aporta ung sac que ledit Boju lui avoit donné. Et ce fait, s'en ala ledit André coucher à demye lieue d'ilec, et depuis s'en ala au lieu et parroisse de la Mote2 où trois jours après ou environ, par faulte de bon gouvernement ou autrement, ii ala de vie à trespassement. A l'occasion duquel cas, lesdiz supplians, doubtans rigueur de justice, se sont absentez du païs, ouquel ilz n'oseroient jamais converser ne demourer, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce impartyes, humblement requerant que, attendu ce que dit est, qu'ilz sont simples gens de labour, chargez de femmes et d'enffans et sont bien famez au païs, etc., il nous plaise sur ce leur impartir nosdictes grace et misericorde. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, ausdiz supplians [p. 295] ou cas dessus dit avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poitou ou à son lieutenant et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Bourges, ou mois de avril l'an de grace mil cccc. soixante et ung après Pasques, et de nostre règne le xxxixme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. De Thoucy. — Visa. Contentor. Chaligaut.


1 Nous citerons, à propos de ce personnage, un acte donné le 14 avril 1458, par Regnaut Le Monayer, procureur de Faye, qui reconnaît avoir reçu de Jean Ripaut, fils de Jean Ripaut, dit de la Parrelière, un aveu de fief rendu par celui-ci à la châtellenie de Faye (cne de Nanteuil) pour une pièce de pré contenant journée de trois faucheurs, sise en la rivière de Fontperron, tenue à hommage plain, à dix sous de devoir et cinq sous de service, toutefois que le cas de mortemain y advient. (Invent. des Arch. du château de la Barre, par A. Richard, t. II, p. 116.) La date et la région où se trouvait le pré autorisent le rapprochement que nous faisons, sans affirmer qu'il s'agit d'un seul et même personnage.
2 Sans doute la Mothe-Saint-Héraye.