1 On trouve ce nom écrit tantôt Lugné, Luigné, Leugné, tantôt
Lugny, Luigny, Leugny. La localité dont cette famille poitevine a pris
le nom paraît être Leugny. Aux XIVe et XVe siècles, on la trouve établie
entre Thouars et Niort. Guillaume de Lugny, écuyer, prêta serment
de fidélité à Jean Chandos, à Saint-Maixent, le 28 septembre 1361.
(Bardonnet, Mém. de la Soc. de statistique des Deux-Sèvres, 2e série, t. VI,
1866, p. 241.) Le même (son nom est écrit Luigné) rendit au prince
de Galles, le 30 août 1364, l'aveu de ses hébergement, maison, verger, etc., sis à Faye, mouvant de Saint-Maixent. (Arch. nat., P. 1145,
fol. 107 v°.) Le Bois-Berthier (commune d'Echiré) où Pierre de Luigné
faisait sa plus habituelle résidence, fut, ce semble, dès la fin du XIVe
siècle, le principal fief des Lugny. Beaucoup d'aveux nous en ont été
conservés pour le XVe siècle. Le 20 avril 1407, Jean de Luigné, chevalier,
rendit aveu à Jean duc de Berry et comte de Poitou de son hébergement de Boisbertier et autres fiefs mouvant de Niort. (Arch. nat.,
R1* 2172, p. 1024.) Sa veuve Marguerite Chauvereau, le 8 juin 1414,
procéda à la même cérémonie, en qualité de tutrice de leurs enfants,
Aubert, Pierre et Jeanne (P. 1145, fol. 6 v°) ; le 23 avril 1420, autre
aveu à Charles dauphin, comte de Poitou, par Aubert, fils aîné de Jean.
(Id., fol. 8.) Celui-ci mourut sans doute sans postérité, et Bois-Berthier passa à son frère cadet Pierre, qui en fit hommage au roi le 23 novembre 1451 (P. 5661, cote 2812); il était d'ailleurs qualifié déjà seigneur
de Bois-Berthier, le 12 juillet 1432, lorsqu'il rendit à Artur de Richemont,
seigneur de Parthenay, l'aveu de différents petits fiefs sis en la ville et
paroisse d'Echiré, parmi lesquels le Champ Ravart, contenant trois sexterées de terre, le Champ de la Barre, d'une contenance de trois minées,
trois autres sexterées de terres sises à la Couture-d'Echiré, un hébergement et ses appartenances, appelé les Champs, le fief de la Sablière
consistant en terre arable et en vignes. (Acte passé à Benet, Arch. nat.,
R1* 190, fol. 160 v°.) Comme il est dit ci-dessous que Payen et Briand
Boutou étaient ses neveux à cause de sa femme, il est à présumer que
Pierre de Lugny avait épousé Marguerite, fille de Jean Boutou et de
Sibille Voussard. C'est sans doute son fils, aussi prénommé Pierre, qui
donna, le 7 novembre 1483, le dénombrement de la seigneurie du
Bois-Berthier, comprenant le « Chaigneau, Pouligné et Pousaus ».
(P. 5543, cote 359.)
2 La généalogie de la famille Boutou, imprimée dans la nouv. édit,
du Dictionnaire des familles du Poitou, contient de graves erreurs en ce
qui concerne les personnages nommés ici et leurs parents. La vérité
est que Pierre Boutou, seigneur de la Baugissière, qui servit sous
Richemont et fut capitaine de Maillezais, avait épousé Louise de Payré,
fille de Hugues, seigneur de Payré-sur-Vendée, qu'il en eut trois fils :
Payen, l'ainé (nommé quelquefois Poinsonnet), Pierre et Briand, et
qu'il était mort avant le mois de septembre 1467, époque où sa veuve
et ses enfants furent victimes de sauvages agressions et de violences
sanglantes de la part de leurs voisins, Pierre Rincent (Raincent ou
Rainxent), sr de la Vergne, de ses trois fils et d'une bande de vingt
des plus mauvais sujets de la région. Après le décès de leur père,
Payen s'était fixé a la Baugissière, dont il était devenu seigneur, et suivait la carrière des armes; Pierre et Briand résidaient à Payré, auprès
de leur mère, dont ils surveillaient les intérêts. Le dimanche 6 septembre 1467, les Rincent, y compris le bâtard Philippe et leurs complices, armés de pied en cap, se transportèrent de bon matin en l'église
de Payré, où Pierre Boutou, écuyer, 2e fils de Louise de Payré, avec
un serviteur du sr de la Grève, nommé Pierre Pellisson, se proposaient
d'entendre la messe. Ils les firent sortir, les entraînèrent dans le cimetière et commencèrent à les assaillir et à les frapper à coups d'épée.
Le bâtard Philippe Rincent en particulier porta à Pierre Boutou un
coup de vouge à la tête jusqu'à effusion de sang. Sur ces entrefaites, des
gens revenant de la procession séparèrent les combattants et empêchèrent les agresseurs de poursuivre leur mauvais dessein. Le jour même,
à quatre heures après midi, la bande des Rincent quitta une seconde
fois l'hôtel de la Vergne, distant d'une demi-lieue de Payré, et revint
à la charge contre Pierre Boutou, qui jouait à la paume non loin de
l'église, criant à travers le village : « A mort, à mort! tuez, tuez! »
frappant tous ceux qu'ils trouvaient sur leur passage, et entre autres
Briand Boutou et un nommé Moreau. Briand reçut des blessures sur
la tête, au cou, à la face, eut une main coupée et resta sur la place plus
mort que vif. Deux de ses serviteurs, Jean Robin fut blessé en deux
endroits de la tête, et Jean Roy eut une joue enlevée et un œil arraché.
Les jours suivants, les forcenés promenèrent leurs ravages dans le
voisinage, s'attaquant aux biens de Louise de Payré, détruisant de
fond en comble un de ses colombiers.
Le dimanche après la Saint-Michel, 3 octobre, une nouvelle agression se produisit dans les mêmes conditions. Pierre Boutou, accompagné
de Pierre Pellisson, entendait la messe à Payré, sans armes. Les Rincent et leurs complices se jettent sur lui et vont l'entraîner hors du
cimetière, pour le tuer hors lieu saint. L'arrivée de plusieurs paroissiens les empêche une seconde fois d'exécuter leur criminel projet.
Ils revinrent en force dans l'après-midi, trouvèrent Pierre Boutou
jouant à la paume et l'assaillirent sur-le-champ. Heureusement pour
lui, il eut le temps de se réfugier avec les autres joueurs dans l'hôtel
de sa mère. A ce moment, Briand rentrait de voyage, ne se doutant de
rien. Ce fut lui encore qui reçut le choc; les misérables l'abattirent
sur le soi et le transpercèrent de vingt-sept coups d'épée, de dague, de
vouge, etc. Puis ils tentèrent d'envahir l'hôtel de Louise de Payré;
mais les gens qui y étaient entrés avec Pierre les repoussèrent. Le
lendemain, sur le bruit que le seigneur de Bressuire, cousin des
Boutou, s'était mis en route pour s'emparer des coupables, ceux-ci
trouvèrent moyen de se mettre en sûreté. Cependant des poursuites
furent exercées contre eux par le sénéchal de Poitou. Pierre Rincent,
sr de la Vergne, le père, n'avait pas pris une part effective aux lâches
agressions; mais il fut convaincu de les avoir favorisées et condamné à
de fortes amendes envers les victimes. Il en appela au Parlement, et
les procédures devant la cour durèrent plus de quatre ans. Le 9 mai
1468, Pierre Rincent était déchu de sa cause d'appel par défaut de
comparoir; mais il trouva moyen de se faire relever de cette déchéance. Ce fut seulement le 16 mars 1471 que Louise de Payré,
Briand Boutou et leurs serviteurs obtinrent un arrêt confirmant la
sentence du premier juge : Rincent était condamné à payer à Briand
Boutou 50 livres de rente perpétuelle, plus 400 livres de dommagesintérêts audit Briand, 200 livres à Louise de Payré, 200 livres à Jean
Roy, 100 à Jean Bobin, et 400 livres d'amende envers le roi. Les plus
coupables, c'est-à-dire Briand, Pierre et Philippe Rincent (ce dernier
bâtard), Jean Laurenceau et Raoul Legendre, avaient réussi à échapper
à la juste punition de leurs forfaits. Condamnés par défaut en la cour
du sénéchal, ils avaient aussi relevé appel de cette sentence. Un décret
de prise de corps avait pu être mis à exécution (8 février 1471), au
moins contre Briand et Philippe Rincent; mais, enfermés à la Conciergerie, ils avaient encore trouvé moyen de s'évader. Un nouveau mandat
était décerné, le27 février 1472, pour les appréhender, mais sans succès.
On ne les revit plus. Le 14 août suivant, la cour déclara les contumaces
définitivement déchus de leur appel, et la sentence par défaut du sénéchal de Poitou exécutoire. En attendant, l'arrêt du Parlement contre
Pierre Rincent, le père, n'était pas encore exécuté au milieu de l'année
1472; il était mort avant le mois de mai 1471 ; Louise de Payré succomba
à son tour dans les derniers mois de cette année. Le 30 janvier et le 24
août 1472, Payen et Briand Boutou, écuyers, se faisaient délivrer par la
cour des mandements adressant à Jean Laidet, lieutenant du sénéchal
de Poitou à Niort, pour la mise à exécution de l'arrêt du 16 mars
1471, à défaut de Pierre Rincent décédé, contre sa veuve, Guillemette
Beschade. (Arch. nat., X2a 36, fol. 26, 107, 239 v°; X2a 37, plaid. aux
dates des 10 juillet 1470, 19 février et 4 avril 1471 ; X2a 38, fol. 10, 23,
24 v°, 27 v°, 33 v°, 50 v°, 59, 63, 147 v°, 156 v°, 201.)
3 Pierre Bonneau, écuyer, seigneur de Saint-Michel-le-Clou, sur
lequel cf. ci-dessus, p. 28 note. Guillaume Bonneau, nommé deux lignes
plus bas, était sans doute son parent; nous n'avons pu déterminer à
quel degré.
4 On retrouve plus tard Mathurin Viault exerçant à son tour des
poursuites au Parlement contre frère Pierre de Vernou, abbé de
Mauléon, André Vignerot, religieux de ladite abbaye, Pierre Herpin,
écuyer, et Pierre Galland, sergent royal, pour raison de certains cas
criminels. Le 22 août 1485, après interrogatoire par eux subi devant
les conseillers commis à l'instruction de leur procès, sur le rapport de ceux-ci et conformément aux conclusions du procureur général, les
intimés furent élargis partout, à condition de se représenter à toute
réquisition sub pena convicti et sous les autres peines accoutumées. Ils
firent élection de domicile à Paris, en l'hôtel de Me Jean Nontron,
procureur. (Arch. nat., X2a 48, la date.) Cette affaire se termina sans
doute à l'amiable.
5 Jacques de Dercé, chevalier, seigneur de Saint-Loup et de Dercé,
fils de Jean de Dercé, tué à la journée des Harengs, et de Marquise
Goulard. La nouvelle édition du
Dictionnaire des familles dit Poitou
cite un très grand nombre d'actes relatifs à ce personnage et à ses
sept enfants, trois fils et quatre filles, et dit qu'il avait épousé Catherine Rouault (t. III, p. 74, 75). Or il semble résulter d'un passage du
plaidoyer prononcé au Parlement, le 31 janvier 1460 n. s., pour obtenir l'entérinement de la rémission accordée à Pierre de Lugny et à
ses complices, que la femme de celui-ci s'appelait aussi Catherine
Rouault, et que c est à elle qu'appartenait la terre et seigneurie de
Belleville, dont il est question ici. (Arch. nat., X2a 28, à la date.) La
phrase n'est du reste pas claire et il se peut que ce soit une erreur
commise par le clerc du greffe, et qu'il faille corriger « femme dudit
Jacques de Dercé ».
6 Bien que son nom se trouve écrit ailleurs Fumée, il n'appartenait
pas à la famille Fumée (des Roches-Saint-Quentin, en Touraine), dont
quelques membres s'allièrent à des familles poitevines, mais à une famille d'Anjou, établie au XVe siècle en Poitou, confirmée dans sa noblesse en 1475, et dont plusieurs membres ont figuré dans l'échevinage
de Poitiers et dans la magistrature. (Maintenues de noblesse, etc., publ.
par M. A. de la Bouralière, Arch. hist. du Poitou, t. XXII, p. 330; Dict.
des familles du Poitou, 2e édit., t. III, p. 627.) Louis Fumé, licencié ès
lois, avocat au Parlement de Paris, était le second fils de Colin Fumé,
seigneur de la Pierrière, et de Jeanne Le Bascle. Il partagea noblement
avec son neveu Pierre, fils de Nicolas, son frère aîné, le 13 avril 1463,
et rendit aveu en 1469 au sr de Parthenay pour le fief des Bazilières ou
Bazières. Sa veuve, Jeanne Bruère, fit le même aveu en 1476. (B. Ledain,
La Gâtine historique, p. 368.) Le 25 octobre 1475, Louis obtint une sentence contradictoire des commissaires du roi pour le fait des francsfiefs et nouveaux acquêts en Poitou, par laquelle il fut déclaré qu'il
avait justifié suffisamment de sa noblesse. En 1443, on le trouve châtelain de Bressuire, où il avait été nommé par Louis d'Amboise,
vicomte de Thouars, pour tenir les plaids de la châtellenie pendant
le temps que dura le rachat advenu audit vicomte par la mort de Guy
de Beaumont. (Arch. des Deux-Sèvres, chartrier de Saint-Loup,E. 1641.)
Après avoir été longtemps au service du vicomte de Thouars, longo
temporis spatio, il se brouilla avec son maître et fut obligé de demander protection au Parlement contre lui. Louis d'Amboise lui reprochait
de n'avoir pas défendu ses intérêts dans un procès qu'il soutenait
contre le duc et la duchesse de Bretagne, et dans une contestation que
la vicomtesse de Thouars avait eue avec son frère, le sr de Rieux, au
sujet de la succession de leur père; il l'accusait même d'avoir suborné
des témoins, qui auraient fait, à son instigation, une déposition mensongère en faveur du duc de Bretagne. Aussi il l'avait pris en haine et
à plusieurs reprises l'avait fait menacer par ses officiers. Pour se
soustraire aux projets de vengeance de son ancien maître, Louis Fumé
était resté trois ans sans oser paraître à Thouars ni aux environs, où
se trouvaient sa femme, ses enfants et ses possessions. Faute de surveillance, ses domaines tombaient en ruine. Il obtint, le 4 septembre 1456,
des lettres de sauvegarde du roi et un sauf-conduit de la cour, qui
furent signifiées par un sergent royal au vicomte et à ses officiers.
Celui-ci, de son côté, se fit délivrer une commission, adressée aux
sénéchaux de Poitou et de Limousin, et au bailli de Touraine, leur
enjoignant d'exercer des poursuites pour subornation de témoins
contre son adversaire, de saisir ses biens et de l'incarcérer à Poitiers.
Sur une nouvelle requête de Louis Fumé, la cour commit un de ses
membres pour faire défenses expresses, sous des peines sévères, au
vicomte et à ses gens, de no rien entreprendre au préjudice des procès
pendants devant elle et des lettres octroyées à son adversaire, et en
même temps pour s'informer secrètement si les accusations du vicomte paraissaient avoir quelque fondement. (Mandement du 23 juillet
1457, Arch. nat., X2a27, fol. 271.) Louis Fumé attribuait à la vengeance du vicomte de Thouars les mauvais traitemements dont il
avait été victime de la part de Pierre de Lugny et de ses complices ;
du moins il le donne formellement à entendre dans une plaidoirie, dont il sera question quelques pages plus loin, qui fut prononcée en
son nom, le 31 janvier 1460, pour s'opposer à l'entérinement des présentes lettres de rémission.
7 Jacques Rouault, chevalier, était le 2e fils de Jean Rouault, seigneur de Boisménart, chambellan du roi, tué à la bataille de Verneuil,
et de Jeanne Du Bellay, dame du Colombier, sa femme, et le frère cadet
de Joachim, sr de Gamaches, créé maréchal de France au début du
règne de Louis XI. Jacques était seigneur de Riou, de Greffier et du
Pressoir-Bachelier, bailli de Caux en 1461. Aux dates du 3 et du 26
août 1482, il était poursuivi au Parlement, ainsi que ses deux fils,
Louis et Jacques Rouault, Jean Bérault et autres leurs complices, par
François d'Aubigné, écuyer, seigneur du lieu, en cas d'excès et attentats. Jean de Canlers, conseiller, fut chargé par la cour d'instruire
cette affaire. (Arch. nat., X2a 45, aux dates susdites.) Le 10 septembre
1485, Jacques Rouault fit une fondation de messe et élection de sa
sépulture dans l'église des Cordeliers de Thouars, à l'exemple de son
épouse, Anne de Châteaubriant, de Tristan vicomte de Thouars, de
Joachim son frère, et de Jeanne Du Bellay, leur mère.
8 Perceval d'Appelvoisin, 5° fils de Louis d'Appelvoisin, chevalier,
seigneur de Chaligné et de Pugny, et de sa 3
e femme Perrette Mignot,
veuve de Jean Gendrot. Nous avons parlé dans notre précédent volume, p. 90-91, note, de ses démêlés avec Jean Gendrot, de Thouars,
qu'il accusait d'avoir détourné la riche succession de sa sœur utérine,
Colette Gendrot, veuve sans enfants de Jean Labbé. Perceval était seigneur de Sceaux, la Roche de Maupertuis, dont il rendit aveu au seigneur d'Airvault, le 23 novembre 1445, de Pugny, de Pierrefitte, de
Bournezeaux, de Marnay et du Bouchet, qu'il tenait du vicomte de
Thouars, auquel il en rendit hommage le 14 juillet 1470. (Cf. Beauchet-Filleau,
Dict. des familles du Poitou, 2
e édit., t. I
er, p. 87.)
9 Jean Chiché est mentionné en 1439 comme seigneur de Garsay
en Chanteloup, de la Touche-Barré et des Roches-Guiton, arrière-fief
relevant de Noireterre. (Bélisaire Ledain,
Hist. de la ville et baronnie
de Bressuire, in-80, 1866, p. 412.)
10 Sur le registre du Parlement (X
2a 28, à la date du 31 janvier
1460 n. s.), ce nom est écrit Guenyau. Dans leur plaidoirie, Lugny et
ses complices citent aussi parmi leurs adversaires « M
re Guy Gueniau,
aussi armé d'une voulge ». A cette époque, les Guyneau étaient seigneurs
de Riparfond. Cf. l'aveu rendu, en 1447, au seigneur de Bressuire par
Nicolas Guyneau d'un quarteron de terre desherbergée, appelée les
Sourdis, faisant partie des terres de la métairie de la Basse-Givre.
(Arch. des Deux-Sèvres, chartrier de Saint-Loup, E. 1566.)
11 En 1446, Jean Martineau et, en 1493, Colas Martineau rendaient
aveu du fief de la Salle-Guibert, paroisse de Tessonnières, près Saint-Loup. (
Id., E. 1616, 1650.)
12 Louis Fumé et les héritiers des deux victimes, Thomas Martineau
et Pierre Guesdon,formèrent opposition à l'entérinement de ces lettres
de rémission et s'inscrivirent en faux contre la façon dont les faits y
étaient rapportés. D'autre part, Pierre de Lugny et ses complices
avaient des intelligences parmi les officiers de la sénéchaussée de
Poitou qui devaient examiner les lettres royales et se prononcer au
sujet de leur mise à exécution. N'étant pas absolument sûrs que le
lieutenant général Hugues de Conzay, qui devait occuper le siège, leur
fût favorable, ils avaient réussi à faire commettre à sa place Claveurier, l'un des fils sans doute de Maurice Claveurier, lui-même lieutenant général du sénéchal, décédé à la fin de mai 1455. Le procureur du roi était absent; « n'y avoit que son substitut qui n'en
faisoit pas grant compte, et l'avocat du roy, qui est en même temps
seneschal de Thouars, et avoit esté en partie cause de faire avoir ladite
remission ausdiz Luigny et complices ». Aussi Fumé, qui était avocat
en Parlement, usa de son crédit pour se faire délivrer des lettres d'anticipation portant que la cause serait déférée à la cour.
Les plaidoiries eurent lieu les 31 janvier et 7 février 1460 n. s.
Fumé, d'après Popaincourt, son avocat, était un homme notable, très
occupé comme avocat au Parlement, ayant comme clients plusieurs
grands seigneurs de Poitou et d'autres pays, possédant, tant à cause
de lui que du chef de sa femme, de quatre à cinq cents livres de rente
annuelle et diverses seigneuries, parmi lesquelles Belleville, voisine
d'une terre de Pierre de Lugny. Des contestations s'étaient élevées
autrefois déjà entre eux, à cause de ces terres, et, à l'occasion d'excès
commis par Lugny et ses gens contre Louis Fumé, ses serviteurs et
biens, celui-ci avait obtenu des lettres royaux ordonnant une enquête, puis la comparution personnelle de Lugny devant le lieutenant du
bailli de Touraine à Chinon. De son côté, sous prétexte que le fief
occupé par Fumé à Belleville lui appartenait, ou du moins était tenu
de lui, Lugny intenta des poursuites contre celui-ci. Quant aux faits
qui nécessitèrent les lettres de rémission, voici comment Popaincourt
les rapporte. Une première fois, Pierre de Lugny, accompagné de
quelques hommes, se rendit sur une pièce de terre dépendant du
fief litigieux et voulut en emporter la récolte. Guillaume Aubry, fils
d'un premier lit de la femme de Fumé, avec quelques autres personnes,
s'y opposa et, esquivant un coup de dague que lui portait l'agresseur,
il parvint à l'empêcher de mettre son dessein à exécution. Lugny
s'éloigna en jurant qu'il reviendrait une autre fois mieux accompagné.
En effet, quelques jours plus tard, la femme de Fumé, qui se trouvait
à Thouars, fut avertie que Lugny avait rassemblé environ dix-huit
hommes armés et qu'il venait l'attaquer. Elle se rendit immédiatement à Belleville et envoya Pierre Martineau, son neveu, pour parlementer. Celui-ci ne parvint qu'avec beaucoup de peine à échapper
à la fureur des compagnons de Lugny et s'en revint en grande hâte.
La femme de Fumé alors sortit de son hôtel et se porta au-devant
des agresseurs, accompagnée de son fils, de Jean Guesdon, prêtre, son
cousin, et de quelques autres. Le bordier de Pierre de Lugny faisait
le guet sur la route et alla prévenir son maître, qui se mit en route
avec sa troupe, marchant à couvert, si bien qu'il arriva tout près de la
femme de Fumé, sans en avoir été aperçu. Celle-ci, aussitôt qu'elle
les vit, se jeta à genoux devant Lugny, disant : « Monseigneur, souviengne vous de vostre honneur ! » Alors l'un des agresseurs tira son
épée et allait la frapper au ventre, quand ledit Guesdon détourna heureusement le coup. Au cri qu'elle poussa, plusieurs gens de labour
sortirent de l'hôtel de Fumé et parmi eux un sergent de Thouars, qui
venait d'y arriver par hasard. « De par Monseigneur de Thouars, je
défends la voie de fait », s'écria le nouvel arrivant. Pierre Martineau
et Jean Guesdon déposèrent aussitôt leurs bâtons. Mais Pierre de
Lugny, furieux, frappa le sergent jusqu'à effusion de sang, puis toute
sa bande, dont faisaient partie un anglais prisonnier qui devait sa
rançon, un écossais et des inconnus, se rua sur les parents de Fumé
et les cerna. Martineau, désarmé, fut frappé mortellement par Pierre
Bonneau, malgré les efforts de sa tante, qui cherchait à le protéger; Jean
Guesdon fut pareillement tué sur la place, et plusieurs autres furent
navrés et mutilés. Pierre de Lugny et ses complices, par la bouche
de Poignant, leur avocat, se défendirent en reproduisant la version
contenue dans leurs lettres de rémission et accusant les amis et parents de Louis Fumé d'avoir été les premiers agresseurs. Ils prétendaient en outre avoir combattu à force égale, douze contre douze,
et demandaient simplement leur renvoi devant le sénéchal de Poitou,
conformément au texte des lettres, qui le commettaient à en assurer
l'exécution. Popaincourt ayant fait cette objection que le sénéchal de
Poitou était parent des intimés, ceux-ci demandèrent alors que le
lieutenant du bailli de Touraine à Chinon fût saisi de l'affaire. Mais la cour en retint la connaissance. Aux 6 et 8 mai 1460, il est question
d'un incident soulevé par Lugny, que le Prévôt de Paris fut appelé à
juger, et dont la sentence fut portée en appel devant la cour.
Le registre des arrêts criminels du Parlement n'existe pas pour
cette époque, de sorte que l'on ne peut connaître l'issue exacte du
procès.
Les réparations réclamées de la partie adverse par Fumé et les parents des victimes sont curieuses, et en admettant même qu'elles
ne leur furent pas accordées intégralement, elles méritent de n'être
pas passées sous silence. Elles consistaient à amender lesdits attentats
et, en attendant, à aller tenir prison en la Conciergerie ; à faire amende
honorable aux demandeurs, à composer une représentation ou épitaphe,
où serait reproduite la forme dudit cas ; à baiser par figure en la
bouche lesdits trépassés, à prendre habit de deuil et à offrir chacun
une torche de cire ardente du poids de deux livres au lieu de la sépulture, et par chacun d'eux aussi à offrir aux pauvres, de leurs propres
mains, six chevaux chargés de blé, pour le salut des âmes des défunts ;
à fonder deux chapelles, chacune de 100 livres de rente amortie,
garnies d'ornements d'église convenables ; à ériger une croix sur le
lieu du meurtre, avec une inscription relatant le crime et énumérant
les coupables ; à payer des amendes profitables, montant à 4000 livres
pour chacun des intimés, et à tenir prison jusqu'au parfait payement;
à assigner au père de Pierre Martineau et à ses hoirs 100 livres de
rente perpétuelle, et autant à Pierre Guesdon, neveu de Jean Guesdon,
prêtre. En ce qui touche ledit feu Guesdon, comme il était chargé de
l'administration des biens de Louis Fumé et de sa femme, ceux-ci
demandaient aussi que les inculpés fussent condamnés à payer tout ce
dont il leur pouvait être redevable au moment de sa mort ; de plus,
s'il était trouvé que Fumé et sa femme tiennent aucun fief de
Pierre de Lugny ou que celui-ci tienne aucune chose dudit Fumé,
qu'il soit déclaré l'avoir forfait et que ledit fief soit confisqué au profit de Fumé. (Voir Arch. nat., X2a 28, aux dates des 31 janvier, 7 février,
6 et 8 mai 1460.)