1 Louis, seigneur de Crussol et de Beaudiner,
chevalier, fils de Géraud Bastet, seigneur de Crussol, et d'Alix de Lastic, était déjà en 1447
attaché à la personne du dauphin, fils de Charles VII, en qualité d'écuyer d'écurie ; il ne tarda pas à devenir conseiller et chambellan du
même prince, qui lui fit épouser, par contrat du 22 juillet 1452,
Jeanne de Lévis, dame de Florensac, fille unique de Philippe de Lévis
et d'Isabeau de Poitiers. Possesseur d'une grande fortune, il prêta au
dauphin une somme considérable pour payer une partie des frais de
deux expéditions de Louis, l'une en Italie pour faciliter l'entrée de ce
pays à l'année de son oncle René d'Anjou, l'autre en Bresse et en Bugey, pour contraindre le duc de Savoie, son beau-père, à renoncer à
l'hommage du marquis de Saluces. En paiement de la somme de 16.360
écus qu'il devait à Louis de Crussol, le dauphin lui inféoda, par acte du
23 février 1455 n. s., la terre d'Etoile, qu'il venait de recouvrer sur le
seigneur de Saint-Vallier. Il dut accompagner son maître dans sa retraité en Flandre, car le 31 octobre 1459 celui-ci ordonna de lui payer
200 écus, montant de divers prêts et de rachat de deux chevaux.
En récompense de ses nombreux services, Louis de Crussol devint,
aussitôt après l'avènement de Louis XI au trône, grand panetier de
France et bailli de Chartres, puis, peu de temps après, sénéchal de
Poitou, capitaine des châteaux de Poitiers et de Niort, et gouverneur
de Marans. M. Ledain dit qu'il succéda à Louis de Beaumont comme sénéchal du Poitou au mois de mars 1462 (Hist. de Bressuire, p. 306) ; mais l'on va voir que cette date doit être avancée de cinq mois, et, d'autre
part, il semble que Joachim Rouault doive prendre place entre Louis de
Beaumont et Louis de Crussol, et qu'il exerça les fonctions de sénéchal de Poitou pendant quelques mois seulement, bien qu'on ne puisse
invoquer qu'un seul témoignage à l'appui de cette assertion. C'est un
recueil d'analyses et extraits des anciens mémoriaux de la Chambre
des comptes, où l'on voit qu'à l'avènement de Louis XI, ledit Rouault
était de novo senescallus Pictavensis (anc. mém. L, fol. 165), et en même
temps que Crussol fut nommé ou confirmé en qualité de bailli de
Chartres (août 1461, id. fol 164). Puis, au fol. 167 du même mémorial,
qui nous reporte au mois de novembre de la même année, on
trouve le don à François de Surienne dit l'Aragonais de l'office de bailli
de Chartres. (Bibl. nat., ms. fr. 21405 ) Les mêmes mentions sont reproduites, sans plus de précision, sur tous les anciens répertoires des
mémoriaux de la Chambre des comptes (voy. notamment Arch. nat.,
PP. 110, 118 et 135). On en peut conclure avec une quasi-certitude que,
en même temps que Surienne prenait la place de Crussol au bailliage
de Chartres, ce dernier était nommé en Poitou au lieu de Joachim
Rouault. D'autre part, le plus ancien acte daté que l'on connaisse
où Louis de Crussol figure avec son titre de sénéchal de Poitou est du 11 novembre 1461; ce sont des lettres patentes de Louis XI, données à
Montrichart, lui permettant de nommer ou présenter « telles personnes
souffisans et ydoines que bon lui semblera aux offices royaux dudit
pays et conté du Poictou qui doresenavant y seront vacans,... lesquelz
offices à ladicte nomination ou presentacion nous donnerons et confermerons à ceulx qu'il nous aura ainsi nommez ou presentez » Ces
lettres sont transcrites dans un vidimus daté de Niort, le 9 mars 1474
n. s., avec des lettres dudit de Crussoi nommant en conséquence Jean
Rousseau, bourgeois de Niort, à l'office de procureur du roi dans cette
ville (15 mai 1468), dans lesquelles, visant les lettres du roi du 11 novembre 1461, il déclare qu'elles lui furent octroyées « tantost après »
qu'il eut été pourvu de l'office de sénéchal de Poitou (Bibl. nat , ms.
fr., 27432, Crussol, 21); viennent ensuite, dans l'ordre chronologique,
l'acte de vente à Louis xi par Louis d'Amboise de la vicomté de
Thouars, où Louis de Crussol figure en cette qualité, (P. 2299, p. 284)
puis une commission du 2 mars 1462 n. s., par laquelle il ordonné le renvoi par-devant lui ou ses lieutenants de causes dont certains juges se sont
attribué la connaissance, au préjudice des privilèges et exemptions de
Tabbayede Sainte-Croix de Poitiers (Invent. de lad. abbaye, Arch. nat.,
F2 I. 350.) ; un mandement du 2 septembre suivant, pour le paiement
des frais d un voyage à Bordeaux de Michau Dauron, valet de chambre
du roi et receveur en Poitou, chargé de prendre des informations sur
une expédition delà flotte d'Angleterre. (Bibl. nat., ms. fr. 20436, fol. 4.)
Par lettres du Pont-de-l'Arche du 10 janvier 1465, Louis XI fit don à
Louis de Crussol, son chambellan et sénéchal de Poitou, de la garenne
appelée « le Pied Peleu » (anc. mém M., fol. 309 v°). Une quittance
de gages du 22 novembre 1466, scellée de son sceau, se trouve dans la
collection Clairambault à la Bibl. nat. (reg. 156, pièce 4143). Il s'intitule
Louis, seigneur de Crussol et de Florensac, chambellan du roi, grand
panetier de France, sénéchal de Poitou, dans un mandement daté de
Poitiers, le 5 octobre 1467, adressé à Michel Dauron, receveur ordinaire pour le roi en Poitou, lui ordonnant de payer ll livres tournois à
Richard Thibault, Pierre de Cherzay, Pierre de La Roche et Jean de
La Croix, sergents du roi, pour les indemniser des frais qu'ils ont eus
en allant faire afficher les assignations des montres des nobles de
Poitou, qui devaient avoir lieu audit mois d'octobre, savoir : le premier
dans toutes les localités du siège de Poitiers, le deuxième à Niort et
partout le siège, le troisième à Fontenay-le-Comte et dans la circonscription, et le quatrième partout le siège de Thouars. (Bibl. nat., ms. fr.
27692, Pièces orig. 1208, n0 3.) Le roi lui fit don de la terre et seigneurie de Bouzon, confisquée sur le comte d'Armagnac, par lettres datées
des Montils-lès-Tours, octobre 1470, enreg. au Parlement (Arch. nat.,
X1a 8606,fol. 245) et à la Chambre des comptes (anc. mém. N, fol. 275 v°,
ms. fr. 21405, p. 168). Citons encore une curieuse lettre qu'il écrivit de La Rochefoucauld, le 9 janvier 1472, à Louis XI, au sujet de la
guerre contre Charles, duc de Guyenne, et de la maladie de ce
prince. (Bibl. nat., ms. fr. 20428, fol. 36.)
L'acte le plus récent donné par Louis de Crussol, en qualité de
sénéchal de Poitou est un mandement du 29 avril 1473, adressé à
Etienne de Bonney, receveur ordinaire du roi en Poitou, pour payer
à Pierre Ragot, Jean Delacroix et Bertrand Gaillard, sergents royaux
dans le comté, cent sols à chacun, pour voyages dans les principales
localités de la sénéchaussée, tant pour convoquer le ban et l'arrièreban, que pour prendre certaine quantité de blé et de farines, destinés
à l'avitaillement de l'année du roi étant alors à Ancenis, etc. (Bibl.
nat., ms. fr. 27432, pièces orig. 948, n° 17.) Nous n'en connaissons pas
de postérieur.
Crussol, qui avait servi en 1462-63 dans la guerre de Roussillon,
comme en témoigne l'acte précédent (MCCCXCII), fut en 1472 l'un des
défenseurs de la ville de Beauvais. Grand maître de l'artillerie par
lettres données au Plessis du-Parc, le 9 mars 1473, il fut enfin pourvu
du gouvernement du Dauphiné, le 15 juin 1473, en remplacement de
Jean, bâtard d'Armagnac, comte de Comminges, décédé. C'est-à ce moment-là, croyons-nous, bien que nous n'en ayons pas la preuve,
que Charles d'Amboise, seigneur de Chaumont, succéda comme sénéchal de Poitou à Louis de Crussol, qui, avant d'avoir pu prendre possession du gouvernement de Dauphiné, mourut le 21 août de la même
année, près de Vezins (Aveyron), alors qu'il se rendait à la tête d'une
armée dans le Roussillon, pour y réprimer une révolte et y faire le siège
de Perpignan. Son corps rapporté en Dauphiné fut inhumé dans l'église
des Cordeliers de Valence. (Pilot de Thorey, Catalogue des actes du dauphin Louis II, 1899, 2vol. in-8°, passim, notamment t. I, p. 435.)
2 Il a été question, dans notre tome VIII, de cet Olivier Perceval qui,
ayant pris part aux excès de la bande commandée par Jean de La
Rochefoucauld, puis à la rébellion de Guy, seigneur de Verteuil, avait,
ainsi que plusieurs autres, ses complices, été condamné au bannissement et à la confiscation, par arrêt du 24 janvier 1442 n. s., et depuis
s'était fait comprendre nominalement dans les lettres d'abolition octroyées, en juin 1446, au chef des rebelles et à une douzaine de ses
compagnons (p. 364-378). Dans une note du même volume, nous avons
établi que Perceval est un autre nom de la famille de Monferaut ou
Montferaut, qui habitait la région de Melle, et que Guillaume Perceval, écuyer d'écurie de Charles VII en 1446, et Guillaume de Montferaut, seigneur de Lusseray, en 1459, étaient un seul et même personnage (p. 253-254, note). Depuis, nous avons trouvé un aveu du 5 août
1443, rendu au seigneur de Melle, alors Charles d'Anjou, comte du
Maine, par Guillaume « de Montferault », écuyer, pour son lieu et hôtel
vulgairement appelé la « Cour de Lusseray ». (Arch. nat., P. 5203, fol.
35 v°.) Un bâtard de ce Guillaume, désigné ainsi dans le texte latin :
«
Leo de Monteferraudo, aliàs Perceval », obtint à son tour de Louis XI
des lettres de légitimation, datées de l'abbaye de la Victoire près Senlis,
juin 1474. (JJ. 204, n° 79.) Ajoutons que trois métayers d'Olivier Perceval,
écuyer : Guillaume Béraut, de son hôtel de Champraimbault, paroisse
de Sainte-Soline, Guillaume Bauçoy, de Saint-Léger, et Simon Marchant, de la Charrière, furent taxés à dix, vingt et trente sous en 1438,
par Pierre de Tuillières, conseiller au Parlement, commissaire et réformateur « sur le fait de plusieurs exemptions, faultes et abuz faiz par
aucuns des habitans du pays de Poictou ». (Bibl. nat., ms. fr. 24160,
fol. 13, 15 et 28.)