I

Les lettres de rémission continuent à occuper une place prépondérante ; prises dans leur ensemble, on peut dire que leur caractère essentiel ne diffère pas sensiblement de ce qui a été remarqué à propos de celles qui ont été publiées dans les précédents volumes. Elles sont- dans celui-ci au nombre de quatrevingt-douze, dont près du tiers se rapporte à des gentilshommes ou à des personnages tenant un rang élevé dans la société, tels que Jean de Châteaupers, Mathurin Chappeau, écuyer, Jean d'Escoubleau, Pierre Berchou, Robert de Brilhac, Jacques Le Jude, écuyer, Mathurin d'Appelvoisin, chevalier, Jacques Jousseaume, sr de la Geffardière, Jean et Jacques de Puyguyon. Jean Beufmont, Pierre de Lugny, chevalier, Payen el Briand Boutou, ses neveux, Pierre Bonneau, sr de Saint-Michau, son gendre, Perrot de La Lande écuyer, Amaury de Liniers, Louis de Lestang, Jean de La Rochefaton, Guyon de Vaucelles, Jean de Pérusse des Cars, Jacques de Belleville, Renaud Chabot, sire de Jarnac, Louis, son fils, et Jacques Goulard, écuyer, tous coupables de meurtres, [X] les uns comme auteurs principaux, les autres comme complices1. On pourra constater que, dans beaucoup de cas, les violences commises, qu'elles soient préméditées ou accomplies dans un moment de colère, ont pour point de départ une question d'intérêt matériel. Le même mobile se retrouve dans les actes criminels qui nécessitèrent le recours de Jean de Vivonne et de Georges de La Trémoïlle à la clémence royale. Le premier avait fabriqué un faux en écriture publique, dans le but de rentrer en possession de la terre de l'Aublonnière qu'il avait été contraint, pour payer ses dettes, de céder à sa cousine germaine, Isabelle de Vivonne, dame de Thors et des Essarts. Le second était poursuivi pour séquestration de la personne de Péan de Valée, qui avait circonvenu Catherine de l'Isle-Bouchard, douairière de La Trémoïlle, s'était emparé de l'administration de ses biens et donnait des motifs de craindre que l'héritage attendu par ses enfants ne leur parvint pas intégralement.

D'autres homicides sont imputables seulement à la brutalité des mœurs et quelques-uns à des causes psychologiques. Jean de La Rochefaton, rentrant au milieu de la nuit en son hôtel de Montalembert, poussé par le soupçon d'une infidélité conjugale, trouva en effet sa femme et son frère Alexandre couchés ensemble. Voulant venger son honneur, ou plutôt obéissant à une impulsion naturelle et s'abandonnant à la colère aveugle, il frappa à coups d'épée les deux complices ; le frère succomba et la femme fut grièvement blessée. On peut noter une particularité d'ordre spécial dans le cas de Jacques de Belleville. Sous le coup de poursuites motivées par plusieurs crimes et délits mis à sa charge, il avait tué, en l'hôtellerie du Mouton à Poitiers, où il était descendu, le fermier de la prévôté de cette ville et un de ses officiers qui venaient le mettre en état d'arrestation. Rémission lui fut octroyée, mais à la condition d'aller combattre les infidèles. Dans cette catégorie d'actes, il en est un encore, intéressant à un autre point de vue, qui mérite de retenir l'attention : c'est l'abolition accordée, le 18 décembre 1463, à Jean Barbin, sr de Puygarreau, avocat du roi au Parlement, mari de Françoise Gillier. Il avait été privé de cet office dès le début du règne de Louis XI, jeté en prison et poursuivi judiciairement pour abus [XI] de pouvoir, dénis de justice, fraudes, contrats usuraires, etc., commis dans l'exercice de sa charge. Mais on lui reprochait surtout d'avoir tenu des propos injurieux contre le nouveau roi. Sa grâce dut être payée chèrement ; il ne l'obtint qu'en échange de la somme énorme de douze mille écus d'or2.

Pour la plupart des textes publiés dans le volume, nous n'avons rien à ajouter ici aux faits qui y sont relatés, ni aux éclaircissements biographiques ou juridiques dont ils sont accompagnés. Nous nous contenterons de quelques observations d'ordre général. Tout d'abord nous ferons remarquer le nombre relativement considérable de rémissions délivrées à des francs-archers. Anciens hommes de guerre et le plus grand nombre n'ayant servi que dans des bandes de routiers, ils avaient conservé des habitudes d'indiscipline, de violence et de pillage, et n'avaient pu se plier à une vie régulière. Dans la nouvelle milice, ils avaient beaucoup de loisirs ; au lieu de les employer à l'exercice d'un métier honnête, ils s'enquéraient de tous les mauvais coups à faire et étaient toujours disposés à y prêter la main, beaucoup plus redoutables à leurs concitoyens qu'aux ennemis du royaume. Ce grave inconvénient de l'institution des francs-archers, qui a déjà été signalé ailleurs3 est mis en lumière dans une douzaine d'endroits de ce volume, mais plus particulièrement dans des lettres de rémission, très justifiées celles-là, données au mois d'avril 1459, en faveur de Jean Dousset, sergent du roi à Poitiers, qui avait frappé mortellement Jean Michau, parce que celui-ci s'opposait par la force à un exploit de justice qui lui avait été confié4, voici dans quelles circonstances. Après la déposition de Pierre Troillon, abbé de la Colombe, Philippe de La Fa, élu par les moines, avait été pourvu canoniquement de cette dignité par l'abbé de Cîteaux, du consentement du chapitre général de Tordre. D'autre part, Jean Brachet, qualifié de protonotaire du Saint-Siège, prétendait que le précédent abbé l'avait résignée à son profit entre les mains du Légat et que celui-ci lui avait baillé l'abbaye en commende et l'en avait mis en possession régulière. De là conflit et long procès, sur lequel il n'y a pas lieu de revenir5. Brachet s'était en effet rendu maître de l'abbaye de la Colombe, mais par la force armée, avec l'aide d'une troupe de trois cents [XII] hommes, parmi lesquels il avait enrôlé beaucoup de francsarchers, au nombre desquels se trouvait Jean Michau. Lorsque Jean Dousset se présenta pour exécuter le mandement qu'il avait reçu de prendre au corps plusieurs des partisans et complices de Brachet et de les amener prisonniers à la Conciergerie, il fut reçu à coups de couteau, et c'est en se défendant qu'il blessa mortellement Jean Michau.

Le procès entre Philippe de La Fa et Jean Brachet, ainsi qu'un second dont il est longuement question dans un autre endroit6, à propos de la commanderie de Saint-Antoine de La Lande, dont un moine nommé Pierre Faure s'était emparé par violence, dans des conditions identiques, en l'absence du légitime possesseur, Aimery Ségaud, offre de très curieux exemples des conflits en matière bénéficiale, qui furent si fréquents à cette époque, sous le régime de la Pragmatique-Sanction de Bourges et depuis sa révocation par Louis xi, entre les juridictions royales et la curie romaine.

Dans une note consacrée à Louis Chabot, sr de Jarnac, à l'occasion de la part qu'il avait prise au meurtre de Gilles de Quatrebarbe, neveu du sr de La Tour-Landry, à Clairvaux en Châtelleraudais, dont Renaud, son père, et le sr de La Tour étaient coseigneurs, nous avons dit quelques mots d'un fait particulièrement intéressant par ses conséquences pour l'histoire économique7, et sur lequel d'autres renseignements de même nature et de même source nous permettent d'insister. Le Parlement en effet fut saisi de plusieurs procès semblables à celui que des sujets de Louis Chabot ; soutenus par le comte d'Angoulême, intentèrent à leur seigneur. A chacune de ces causes, les registres de la cour, se répétant dans les mêmes termes, nous font connaître que, aussitôt après la réduction du duché de Guyenne et des pays voisins occupés par les Anglais, les trois états de Poitou, de Saintonge et d'Angoumois, d'un commun accord, avaient fait appel aux laboureurs de bonne volonté, quels qu'ils fussent et d'où qu'ils vinssent, pour remettre en culture les terres demeurées en friche et abandonnées par suite des guerres. Ces terres devenaient leur propriété et l'on n'exigeait d'eux, comme redevance, que le dixième ou le neuvième, suivant les lieux, des grains et fruits qu'ils y récolteraient, grâce à leur travail et à leur industrie.

Ce moyen de repeupler le pays et de rendre à l'agriculture son [XIII] ancienne prospérité réussit à souhait et donna en très peu de temps les plus heureux résultats. Dès l'année 1459, les campagnes avaient repris un si bel aspect, les terres cultivées à nouveau donnaient un si bon rendement que plusieurs seigneurs commencèrent à regretter d'avoir consenti des conditions aussi avantageuses aux défricheurs. Dans le but de rentrer en possession des domaines concédés de cette façon ou d'en tirer, en attendant, un profit plus grand, beaucoup n'hésitèrent pas à recourir à des moyens déloyaux, comme de faire payer aux nouveaux tenanciers des droits de terrage supplémentaires, en dehors des redevances portées dans les traités. Ainsi les exactions de plus en plus abusives de Jean de La Rochefoucauld, leur seigneur, obligèrent les immigrés des châtellenies de Montignac et de Marcillac à se syndiquer et à s'adresser au Parlement pour obtenir l'exécution stricte des conventions. Le 15 juillet 1460, le procureur du roi proposa une transaction qui fut ratifiée par la cour. Le sr de La Rochefoucauld s'était primitivement engagé à laisser les laboureurs jouir de leur récolte, sauf le dixième sillon qui serait laissé sur pied à son profit ; désormais cette dîme lui serait livrée. « siée et abattue », et il éviterait ainsi les frais de moisson. Il parut se contenter de cette concession. Jusqu'en 1465, on s'en tint de part et d'autre à cet arrangement qui fut accepté, dans les pays voisins, par tous ceux qui à l'origine avaient traité aux mêmes conditions. Mais depuis, les exigences excessives des seigneurs reparurent et ne firent que s'accroître. En 1472 les procès recommencèrent et durèrent plusieurs années, comme on l'apprend par une plaidoirie prononcée au Parlement, le 4 décembre 1478, pour Pierre et François Salles, frères, contre Jean seigneur de Montignac et Pierre de Barbezières, qui leur avaient baillé desterres à défricher et, non contents de leur réclamer-des redevances qui n'avaient pas été prévues au contrat, leur faisaient subir toute sorte de mauvais traitements.

Pour les contestations de même nature entre Louis Chabot et ses sujets, les actes que nous avons cités sont du 4 mars 14778 c'est-à-dire d'une époque très voisine. Nous ne connaissons pas la solution de ces différentes affaires. Quoique, au moment de la transaction proposée par le procureur général et acceptée par [XIV] Jean de La Rochefoucauld, on parût prévoir la promulgation d'un règlement général, il est plus probable que chaque litige fut l'objet d'un arrêt spécial, lequel pouvait d'ailleurs avoir force de loi pour tous les cas semblables. Les registres du Parlement mentionnent un assez grand nombre d'autres faits qui se rapportent à cette intéressante question ; nous n'en avons pas entrepris le relevé et nous ne voulons que les signaler à l'attention des chercheurs.

Les documents du nouveau volume, qui viennent s'ajouter aux rémissions, présentent une assez grande variété ; il en est qui peuvent encore être groupés par espèce et d'autres qui échappent à toute classification. Parmi ces derniers, quelques-uns méritent une mention particulière. Par lettres du 22 octobre 1458, Charles VII fit don à Jean bâtard d'Orléans, comte de Dunois, des villes, terres et châtellenies de Parthenay, Secondigny Vouvant, Mervent, le Coudray-Salbart, Châtelaillon, Matefelon et autres, pour en jouir après le décès d'Artur de Richemont, devenu duc de Bretagne9. Dunois ne tarda pas à entrer en possession de ce riche héritage, le comte de Richemont étant mort le 26 décembre suivant. De 1456 à 1463, des lettres d'anoblissement furent accordées à sept Poitevins, de familles plus ou moins connues : Guillaume Chauvin, licencié en lois, sans doute le même qui fut lieutenant du bailli de Gâtine ; Michel Darrot, sieur de Beaufou et de la Poupelinière ; Jean Doucereau, Henry de Gouys, Jean Malescot, Hélionnet Vidalvin et Pierre Ségaud, de Champdeniers. Les lettres en faveur de ce dernier mentionnent deux notables personnages, de sa parenté, qui remplirent, hors de leur patrie, des fonctions éminentes et sur lesquels nous avons pu recueillir des renseignements biographiques intéressants. Le premier, Aimery Ségaud († 1470), son oncle paternel, évêque de Bellay en 1438, transféré, vers la fin de cette année, à l'évêché de Mondovi, médiateur de la paix entre Louis Ier, duc de Savoie, et François Sforza, duc de Milan, fut en même temps commandeur de Saint-Antoine de la Lande, non loin de Champdeniers. Son éloignement facilita l'intrusion d'un compétiteur sans scrupule, qui, après s'être emparé de force de la commanderie, lui suscita de graves ennuis et un procès interminable dont nous avons relaté toutes les péripéties. Le second, Jean Bretonneau, appelé aussi Jean de Champdeniers, oncle de la femme de Pierre Ségaud, était à la [XV] tête de la commanderie de Saint-Antoine de Viennois d'Issenheim en Alsace. Accrédité par le duc Sigismond d'Autriche auprès de Charles VII, il fut chargé d'importantes négociations et tenta de réconcilier le dauphin Louis avec son père10.

Des permissions d'élever des fortifications furent octroyées à François de Vendel, chevalier, pour son hôtel de l'Ebaupinaye, mouvant d'Argenton (février 1459) ; à Jean de Montournais, chevalier, avec droit de guet et de garde, pour la place de Puymorin, dont il était seigneur (mai 1459 et 22 septembre 1462) ; à Jean de Mondon, écuyer d'écurie du comte du Maine, pour son château des Coutaux (novembre 1460) ; à Jean Mourraut, conseiller du roi, conservateur des privilèges de l'Université de Poitiers, pour son hôtel de la Motte-sur-Croutelle (novembre 1461) ; les mêmes lettres lui accordaient tous droits de haute et moyenne justice en ladite seigneurie. Jacques Rataut, écuyer, obtint aussi, par lettres de mai 1462, l'autorisation de clore de murs et de fortifier Curzay et, par un autre acte de même date, d'ériger en ce lieu des fourches patibulaires11. Le roi fit don enfin à Mathurin Arembert, son procureur en la sénéchaussée de Poitou, de la haute justice de la seigneurie de Sepvret12. Un marché hebdomadaire fut institué à Vouillé, par lettres de décembre 1460, à la requête et au profit du chapitre de Sainte-Radegonde de Poitiers, seigneur du lieu13.

On peut citer encore trois lettres de légitimation, données, en faveur : 1° de Guillaume Lemaire, fils naturel de Guillaume, sr de Fontaines, et de Jeanne Cantereau ; 2° de Bernard Morinet, fils de feu frère Jean Mauclaveau, prieur de l'église Saint-Hilaire de

Leigné-sur-Usseau, et de feu Jeanne Morinet ; 3° de Louis Perceval, homme d'armes de l'ordonnance dans la compagnie du sire de Crussol, sénéchal de Poitou, enfant naturel d'Olivier de Monferaut, dit Perceval, connu pour avoir pris part aux excès de la bande de Jean de La Roche, sr de Barbezieux, et à la rébellion de Guy, sr de Verteuil14. Terminons cette énumération par les lettres de naturalisation qui furent délivrées à deux Ecossais établis en-Poitou, Job Henzell et Robin Vernon, et à Pierre de Sainte-Marthe, commis de Jean Hardouin, sr de Nozay, trésorier de France15. Ces dernières, portant la date de septembre 1460, sont adressées, [XVI] entre autres officiers royaux, au bailli de Touraine. Rien de ce qui peut avoir trait, de près ou de loin, à la famille de Sainte-Marthe, dont tant de membres se sont fait un nom illustré dans l'histoire littéraire aux XVIe et XVIIe siècles, ne saurait nous laisser indifférent. Aussi croyons-nous devoir insister ici sur l'importance possible d'un texte qui paraît avoir échappé jusqu'à présent à la critique. On sait que les Sainte-Marthe, possessionnés dès la fin du XVe siècle dans le Loudunais, qui faisait alors partie du bailliage de Tours, ont émis la prétention de se rattacher à une famille féodale de même nom, sur laquelle du reste on n'est que fort peu renseigné, car on n'en connaît que deux membres : Guillaume-Raimond de Sainte-Marthe, sr de Roquebert, chevalier, qui servit le roi Philippe de Valois, et Nicole de Sainte-Marthe, qui fut, paraît-il, armé chevalier par le comte de Foix au siège de Bayonne, l'an 1451. Dreux du Radier et les historiens qui, à la suite de l'auteur de la Bibliothèque historique et critique du Poitou, se sont occupés de nos Sainte-Marthe, ont admis cette prétention sans la discuter. Elle ne s'appuie cependant sur aucune preuve et il y a peu d'apparence qu'elle soit justifiée. A partir du moment où sa filiation peut être établie avec certitude, la famille poitevine fournit des médecins, des magistrats, des avocats, des historiens, des poètes et des théologiens ; il est donc plus vraisemblable qu'elle était simplement d'origine bourgeoise, et il serait très possible qu'elle eût pour fondateur ce Pierre de Sainte-Marthe, commis d'un trésorier de France, lequel était un personnage considérable, possédant à Tours un hôtel où il donna plus d'une fois l'hospitalité à Charles VII. Ses lettres de naturalisation ne disent malheureusement pas de quel pays il était originaire, mais seulement qu'il était « estranger et natif de hors nostre royaume, où il a commencé à fréquenter il y a vingt ans et plus ». Ces renseignements peu précis ne permettent que des conjectures. On peut supposer que Pierre de Sainte-Marthe fut le père de Louis, sr de Villedan (près de Beuxe en Loudunais), le premier dont l'identité et la descendance soient certaines, et même qu'il épousa Marie, fille naturelle de Jean Hardouin, laquelle fut légitimée le même jour. Les recherches que nous avons faites, dans l'espérance de changer cette présomption en certitude, n'ont point donné de résultat. D'autres seront peut-être plus heureuses. En tout cas, nous persistons à croire que cette piste ne doit pas être négligée16. [XVII] Les premiers actes de Louis XI relatifs au Poitou que nous ayons rencontrés dans les registres de la grande chancellerie sont donnés en faveur de la ville de Niort. Il n'avait pas oublié que, lors de la Praguerie, les habitants de cette ville lui avaient fait un bon accueil, et il voulut les en récompenser non seulement en confirmant leurs anciens privilèges et franchises17 ce qui au début d'un règne n'était guère qu'une formalité ordinaire, mais en leur en octroyant de nouveaux. Nous publions le texte des lettres de noblesse qu'il accorda, en novembre 146118, au maire, aux douze échevins et aux douze conseillers jurés de la commune, comme, près d'un siècle auparavant, Charles V l'avait fait en faveur des magistrats municipaux de Poitiers et de la Rochelle. On sait, d'autre part, qu'à la même date il rétablit à Niort le siège et auditoire des élus, qui avaient été transférés par son père à Saint-Maixent, et qu'il y institua en outre un siège royal et cour ordinaire, dispensant par cette création les habitants d'attendre, pour le jugement de leurs procès, les assises du sénéchal ou d'aller plaider à Poitiers.

Le nouveau roi confirma aussi les lettres patentes des comtés de Poitou et des rois de France, particulièrement celles de Charles VII, les unes instituant la commune de Poitiers, les autres accordant aux habitants et aux officiers municipaux divers privilèges, libertés et franchises ; les statuts donnés aux barbiers de cette ville, en août 1410, par Jean duc de Berry ; le règlement et les statuts du métier de tailleur et pourpointier ; les lettres d'amortissement obtenues du comte de Poitou, en 1405, par le chapitre et l'église collégiale de Saint-Hilaire-le-Grand, pour des biens acquis ou à acquérir pouvant s'élever jusqu'à 200 livres de revenu annuel19, etc. On trouvera, en tète du prochain volume (année 1465), d'autres confirmations du même genre, en faveur de plusieurs établissements poitevins. Citons encore des lettres de sauvegarde de février 1462, octroyées à l'évêque et au chapitre de l'église de Maillezais20 ; des lettres portant exemption, au profit des vingt-cinq échevins nobles de Poitiers, de tout service militaire en dehors de la ville21 ; un acte de cession en toute propriété à Jean Mourraut, conseiller du roi, du Bois de la [XVIII] Marche, sis en la châtellenie de Lusignan, en échange de sa maison de Poitiers qu'il louait antérieurement à la Monnaie établie dans cette ville22. On voit, par ces quelques exemples, que ce nouveau volume fournit encore à l'historien des matériaux aussi variés qu'intéressants.

Au cours des quatre premières années de son règne, Louis XI traversa à plusieurs reprises le Poitou, mais sans y faire de longs séjours. Au mois de janvier 1462, se rendant de Touraine en Guyenne, il passa par Poitiers, Beauvoir, Marans, la Rochelle, etc., et à son retour, en mai et juin, il s'arrêta à Ruffec, Lusignan, Châtellerault, Champigny, d'où il alla se reposer pendant un mois à Chinon. La même année, au mois de septembre, on trouve des actes royaux datés de Bressuire et de Thouars. Puis, lors d'un second voyage à Bordeaux, en janvier 1463, le roi séjourna à Sepvret23 et ensuite à l'abbaye de Celles. La Guyenne et le Languedoc le retinrent pendant six mois, et ce ne fut que dans les premiers jours de juillet qu'il repassa par le Poitou, notamment à Chauvigny. Postérieurement, on ne rencontre pas d'actes de la grande chancellerie datés de localités poitevines avant les mois de février et de mars 1465 ; à cette époque, Louis XI fit un assez long séjour à Poitiers ; on peut citer plusieurs lettres patentes et missives qui furent expédiées de cette ville, du 21 février au 9 mars. Il fut ensuite à Parthenay et à Thouars, où il demeura une dizaine de jours environ, suivant les indications fournies par quatre actes signés de lui, les 16, 20, 22 et 24 mars. Le 28, il était à Saumur, où il résida jusqu'au 18 avril.


1 Il a paru inutile de répéter ici les références aux numéros et aux pages du volume où se trouvent les lettres relatives à ces personnages et à d'autres qui seront rappelés ci-dessous, la table alphabétique fournissant toutes les indications nécessaires.
2 Ci-dessous, n° MCCCLXXXIX, p. 435.
3 Cf. le vol. précédent, Introduction, p. XXII, et p. 182, note.
4 N° MCCCIV, p. 114 et suiv.
5 Pour les détails de cette affaire, voy. ci-dessous, p. 115 note.
6 Ci-dessous, p. 110 et 111, note.
7 Cf. p. 405, note 1.
8 Consulter, pour l'affaire des habitants des châtellenies de Montignac et de Marcillac contre Jean de La Rochefoucauld, le registre X2a 28, aux dates des 3 et 15 juillet 1460 ; pour la plainte des frères Salles contre Pierre de Barbezières, X2a 43, date du 4 décembre 1478 ; et pour les contestations entre Louis Chabot et ses sujets, X2a 41, à la date du 4 mars 1477.
9 N° MCCXCIII, p. 73 et suiv.
10 Sur ces deux personnages, cf. ci-dessous, p. 109, note, et 112, note.
11 Voy. p. 94, 121, 269, 305, 356, 358 et 381.
12 N° MCCCLXXXI, p. 411.
13 N° MCCCXLV, p. 271.
14 Voy. p. 190, 295 et 449.
15 Ci-dessous, p. 64, 65 et 262.
16 Cf. p. 262, note, ci-dessous.
17 Lettres de novembre 1461, n° MCCCXL1X, p. 297 et note 2.
18 N° MCCCL, p. 299.
19 3 Les textes en question sont imprimés sous les nos MCCCLV, MCCCLXI, MCCCLXXXIII et MCCCLXXXVII.
20 Ci-dessous, n° MCCCLVII, p. 314.
21 Décembre 1463, n0 MCCCLXXXVIII, p. 432.
22 Le 26 décembre 1463, n° MCCCXCI.p. 444.
23 Entre Amboise et cette localité l'itinéraire royal n'est pas connu.