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MCCCXXIV

Rémission accordée à Guillaume Brisart, laboureur, détenu dans les prisons du commandeur de Coudrie pour le meurtre de sa première femme, dont il s'était rendu coupable vingt-quatre ans auparavant.

  • B AN JJ. 188, n° 196, fol. 99
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p.
D'après a.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion des parens et amys charnelz de Guillaume Brisart, laboureur, demourant en la terre et seigneurie de Cousdrie ou bas païs de Poictou, à present detenu prisonnier ès prisons de ladicte terre et seigneurie, appartenant au commandeur dudit lieu1 contenant que dès pieça ledit Guillaume Brisart fut conjoinct par mariage avecques feue Hylaire, en son vivant fille de deffunct Estienne Gougeau, ouquel mariage ilz furent par aucun temps et d'eulx yssit ung enfant nommé Pierre, encores vivant. Et advint, xxiiii. ou xxv. ans a, environ le mois d'avril, que ainsi que ledit Guillaume Brisart entroit en sa maison estant ou villaige de la Benestre, il trouva que Cathin Lanberte, sa [p. 200] mère, avee laquelle il demouroit lors, et ladicte feue Hylaire, sa femme, tensoient ensemble, et en ce faisant, ainsi que ladicte Hylaire estoit sur le bers dudit Pierre, lors estant oudit bers, sadicte mère amonnestoit ladicte feue Hylaire qui estoit fort pesant et negligent d'aler tirer le lait de leurs bestes et lesdictes bestes mettre ès champs, parce qu'il estoit sur l'eure de deux heures après midy, dont ladicte feue Hylaire tint peu de compte, comme il sembla audit Brisart ; et à ceste cause ledit Brisart en fut contre elle indigné et courroucé, et en esperance de la corriger et afin qu'elle fust plus diligente une autres foiz et obeist à sadicte mère, frappa ladicte Hylaire, sa femme, deux ou trois coups du pié, environ le flanchet du cousté. Et lors ladicte Hylaire se print à crier : « A l'aide ! bonnes gens », et d'ilec se leva et s'en ala ou jardin estant derrière ladicte maison. Lequel Brisart suivi lors en celle chaleur sadicte femme qu'il ramena dudit jardin en sadicte maison, en luy donnant de la main sur la joue, et en entrant en ladicte maison, trouva une cuillier de boys de laquelle il frappa ladicte Hylaire ung coup sur la joue et l'autre sur les espaules. Et ce fait, ledit Brisart, desplaisant de ce qu'il avoit batu sadicte femme, s'en ala au lieu de la Ganache querir du blé qu'il avoit retraict, pour les gens d'armes qui lors couroient par le païs. Et après qu'il fut retourné ledit jour en sadicte maison, il trouva sadicte femme très fort malade, avec laquelle estoient plusieurs autres femmes du villaige qui l'estoient venu veoir, et ledit jour mesmes que ledit suppliant donna à sadicte femme lesdiz coups, icelle femme, à l'occasion desdiz coups ou autrement, ala de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas, ledit Brisart a puis naguères esté constitué prisonnier èsdictes prisons, èsquelles il est de present detenu à grant povreté et misère, et doubtent sesdiz parens et amys supplians que contre luy on voulsist à ceste cause rigoureusement proceder, se noz grace et [p. 201] misericorde ne luy estoient sur ce imparties, et pour ce nous ont humblement supplié et requis que, attendu que ledit Brisart, en donnant lesdiz coups à sadicte femme n'avoit aucun propos ne entencion de la tuer ne mutiler, ains seulement de la corriger de ses faultes et l'admonnester d'estre une autresfoiz plus diligente qu'elle n'estoit et obeir à ladicte mère dudit Brisart, et faire ce qu'elle luy ordonneroit, à laquelle elle ne vouloit obeir, dont ledit Brisart estoit fort desplaisant; aussi le longtemps qu'il y a que ledit cas advint, que de ladicte mort il a esté et est très desplaisant, et est en tous autres cas homme bien famé et renommé, sans jamais avoir esté actaint ne convaincu d'aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, et que les premiers mouvemens ne sont pas en puissance de homme, et que paravant ledit Brisart luy avoit par plusieurs fois remonstré par parolles doulces et benignes de obeir à sadicte mère et avoir en soy diligence ; et que depuis ledit cas advenu, a esté ledit Brisart et encores est à present marié avec une autre femme, dont sont yssus ung filz et neuf filles, qui encores sont à marier, et sadicte femme preste d'avoir enfant, il nous plaise en préférant misericorde à rigueur de justice nosdictes grace et misericorde audit Brisart impartir. Pour quoy nous, ces choses considerées, audit Guillaume Brisart, etc., avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois de novembre l'an de grace mil cccc. cinquante neuf, et de nostre règne le xxxviiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. P. de Fontaines. — Visa. Contentor. Chaligaut.

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1 Coudrie, commanderie de l'ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem du grand prieuré d'Aquitaine, antérieurement commanderie du Temple, en la paroisse de Challans. C'était, au point de vue judiciaire, une châtellenie qui s'étendait sur les paroisses de Coudrie et des Habites et sur partie des suivantes : Froidefont, Falleron, la Garnache, Challans, Sallertaine, Saint-Gervais, Beauvoir, Bois-de-Céné, le Perier, Soulane, Notre-Dame de Rié, Saint Hilaire de Rié, Saint-Christophe-du-Ligneron, Apremont, Aizenay, Commequiers et Vairé. Le cartulaire de la commanderie de Coudrie a été publié par M. de la Boutetière. (Arch. hist. du Poitou, t. II, 1873.)