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DCCCXCVIII

Confirmation d’un accord conclu entre le procureur général et Pierre d’Amboise, vicomte de Thouars1, terminant un procès [p. 43] pendant au Parlement au sujet de la mouvance de l’île de Ré, le vicomte de Thouars, qui en était seigneur, prétendant la posséder en franc alleu, sans être tenu à foi et hommage, ni autre devoir ou redevance, le procureur du roi maintenant au contraire que c’était un fief de la mouvance du château et de la châtellenie de [p. 44] la Rochelle, relevant du roi. Pierre d’Amboise accepte de faire désormais foi et hommage au roi pour ladite île. « Datum et actum Parisius in Parlamento nostro, xxi die julii anno Domini millesimo ccccmo quarto et regni nostri xxiiiito. — Concordatum in curia, Baye2. »

  • B AN JJ. 158, n° 451, fol. 260
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 26, p. 42-44
D'après a.


1 Pierre II, seigneur d’Amboise et de Montrichard, fils aîné d’Ingelger II d’Amboise, mort en 1373, et de sa seconde femme, Isabelle de Thouars, deuxième fille de Louis vicomte de Thouars et de Jeanne comtesse de Dreux, succéda a la vicomté de Thouars et à toutes les seigneuries qui en dépendaient après la mort de la vicomtesse Pernelle (1397), sa tante maternelle, ce qui fit de lui l’un des barons les plus puissants du royaume. C’est ainsi que s’expriment tous les généalogistes. Cependant la question de la transmission de ce riche héritage ne paraît pas avoir été étudiée d’une façon approfondie. On ne donne même point la date exacte du décès de Pernelle ; on ne dit pas si sa sœur Isabelle, la mère de Pierre II d’Amboise, qui s’était remariée avec Guillaume d’Harcourt, seigneur de la Ferté-Imbaut, était morte avant la vicomtesse de Thouars, point qui ne manque pas d’importance en l’espèce. Charles VI, par lettres du 18 janvier 1402, disent encore les généalogistes, renouvela le don qu’il avait fait, en octobre précédent, à Pierre d’Amboise de 4,000 livres par an sur les terres de la feue vicomtesse, sa tante. Il y avait donc contestation et, en attendant l’arrêt, l’héritage litigieux était donc sous la main du roi, et administré par les commissaires du domaine. On ne pourrait expliquer le fait autrement. Deux textes du Parlement, qui n’ont pas été produits encore, peuvent aider à résoudre ce petit problème. Pernelle de Thouars vivait encore le 9 mai 1397 ; un arrêt rendu à cette date entre elle et Jean de Craon, seigneur de la Suze, le prouve. (Arch. nat., X1a 44, fol. 154.) Dans des lettres du 17 juin 1398, on la dit décédée depuis peu de temps et ayant laissé pour héritier principal Pierre d’Amboise. Donc sa sœur Isabelle était morte avant elle. Le décès de Pernelle laissait en suspens plusieurs procès qu’elle avait soutenus, soit en demandant, soit en défendant, contre Guy VI de La Trémoïlle, puis contre la veuve de celui-ci, Marie de Sully, comme tutrice de leurs enfants mineurs. Pierre d’Amboise fit savoir au premier président, Guillaume de Sens, et au président Pierre Boschet, arbitres désignés, qu’il reprenait pour son compte les actions intentées par la vicomtesse. D’autre part, la veuve de Guy de La Trémoïlle fit ajourner non seulement le principal héritier, mais encore tous les autres héritiers de Pernelle, c’est-à-dire Ingelger d’Amboise, sr de Rochecorbon, Pernelle d’Amboise, mariée à Olivier Du Guesclin, comte de Longueville, frère et sœur de Pierre d’Amboise, et Marguerite de Thouars, alors femme de Guy Turpin de Crissé, la seconde sœur de la défunte vicomtesse de Thouars. (Actes des 17 juin et 23 juillet 1398, X1a 45, fol. 38 et 39.) Cette assignation collective démontre implicitement que la succession de Thouars donnait lieu à un partage et que ce partage n’avait pas encore eu lieu. Les lettres de Charles VI du 18 janvier 1402, citées plus haut, permettent de conclure que cette affaire fut définitivement réglée postérieurement à cette date.

Quoi qu’il en soit, Pierre d’Amboise prenait le titre de vicomte de Thouars dès l’an 1399, dans les actes officiels. Un accord fut passé à Poitiers, le 17 juillet de cette année, devant le sénéchal de Poitou, qui était alors Jacques Poussart, chevalier, seigneur de Peyré, entre le duc de Berry et le sr d’Amboise, vicomte de Thouars et comte de Benon, au sujet des droits dus au suzerain pour la terre et seigneurie de Benet, mouvant de Niort. Cet acte porte que le duc de Berry aura, à mutation de vassal, le tiers des revenus de ladite terre pour une année, et à mutation de seigneur, ce que porte la coutume du pays en la châtellenie de Niort. (Original, Arch. nat., J. 182, n° 119.) Par lettres du 1er février 1400 n.s., Pierre d’Amboise ordonne à son receveur de payer aux chanoines réguliers de Saint-Hilaire de la Celle de Poitiers la somme de cent sous accordée autrefois en aumône par les anciens vicomtes de Thouars à ce monastère. (Dom Fonteneau, t. XII, p. 675.). La succession de Thouars comprenait un certain nombre de charges de cette nature, car la vicomtesse Pernelle et ses ancêtres avaient été les bienfaiteurs de presque toutes les églises du pays. Parfois le nouveau vicomte refusait de reconnaître le bien fondé des demandes, et il en résultait des procès. Ainsi il fut poursuivi en Parlement par les chartreux d’Oyron qui lui réclamaient l’accomplissement d’une fondation promise par sa tante à leur couvent. (Arrêt du 9 décembre 1402, X1a 50, fol. 78.) Le 20 février 1406 n.s., Pierre d’Amboise dut encore donner soixante setiers de froment à l’abbaye de l’Absie, pour demeurer quitte des legs que ses prédécesseurs y avaient faits. Le Grand-Gauthier contient les aveux que le neveu de la vicomtesse Pernelle rendit à Jean duc de Berry, pour Thouars, le 25 mai 1405, pour Mauléon le 26 mai, pour Talmont le 18 octobre 1407, pour Benet le 24 août 1411 ; et le 6 juin 1416, en qualité de tuteur de Louis d’Amboise, son neveu et héritier, et de ses nièces mineures, il s’acquitta du même devoir, en leur nom, pour la seigneurie de Sainte-Soline et pour quatorze cents arpents de bois en la forêt de Chizé. (Arch. nat., R1* 217, fol. 2 v°, 5 v°, 219, 1056, 1141 et 1913.) En 1418, il renouvela ses hommages et rendit de nouveaux aveux au dauphin Charles, comte de Poitou (P. 1144, fol. 45 v° et 48.) Le dernier acte que nous connaissions de Pierre d’Amboise, vicomte de Thouars, est un traité qu’il conclut, le 20 février 1421, avec l’abbé et les religieux de Saint-Jouin de Marnes, portant qu’à l’avenir ladite abbaye et ses dépendances seront soustraites à toute juridiction ou suzeraineté du vicomte de Thouars, à l’exception d’Availles et de Jeu ; ledit accord confirmé par arrêt du Parlement séant à Poitiers. (Coll. dom Fonteneau, t. XXVI, p. 347). Le sr d’Amboise mourut l’année suivante, sans laisser d’enfants. Il avait été marié deux fois : 1° à Jeanne de Rohan, veuve en premières noces de Robert d’Alençon, comte du Perche, dont le testament, daté du 20 janvier 1408, a été enregistré au Parlement (Arch. nat., X1a 9807, fol. 217) ; 2° à Isabelle de Goyon, qui lui survécut et dut soutenir au Parlement de Poitiers un procès contre le neveu et successeur de son mari, Louis d’Amboise, vicomte de Thouars, au sujet de son douaire qu’elle prétendait lui avoir été assigné sur les châteaux, terres et châtellenies de Talmont, la Chaize-le-Vicomte, Olonne, Benet, Curzon, Brandois, etc. (Arrêt du 16 septembre 1424, X1a 9190, fol. 315 v°.)

2 Dans cet acte est insérée la procuration donnée le 30 janvier 1402 n.s., par le vicomte de Thouars, à maîtres Jean Rabateau et Maurice Hubert, procureurs au Parlement, tous deux originaires du Poitou.