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DCCCCXCIV

Lettres de Charles VI confirmant, en vertu du traité de Pouilly, les arrêts du Parlement de Poitiers et les actes expédiés audit lieu, en la chancellerie du dauphin, et évoquant au Parlement de Paris les procès encore pendants devant la cour de Poitiers.

  • B AN JJ. 171, n° 154, fol. 93 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 26, p. 341-344
D'après a.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, que, comme à l’occasion des discors, divisions et debaz qui longuement ont eu cours en nostre royaume, et mesmement depuis que derrenierement nostre très chier et très amé filz le dalphin de Viennois a esté absent de nous, plusieurs de noz subgiez estans durant le dit temps soubz la puissance de nostre dit filz n’aient pas bonnement osé ester ne comparoir en nostre court de Parlement, venir ne avoir recours à nostre chancelerie, à l’occasion dessus dicte, et se soient traiz par devers lui pour avoir et obtenir droit et justice en leurs causes et querelles, et aussi en sa chancelerie pour obtenir lettres de justice et de grace, de finances et autres ; et avecques ce, durant le dit temps, par nostre dit filz et son ordonnance aient esté levées et distribuées pour les dictes causes grant quantité de finances. Et il soit ainsi que nostre dit filz, voulant pourveoir à iceulx noz subgiez de bonne justice, grace et autres choses necessaires au bien commun d’iceulx, et à plusieurs affaires de nostre royaume, eust ordonné, soubz tiltre de notre lieutenant ou en autre qualité, certains noz conseillers en nostre dicte court de Parlement et autres, les quelz estoient pour lors, à cause des dictes divisions, absens de nostre ville de Paris, et retraiz par devers lui, a oïr et determiner les debaz et procès meuz entre nos diz subgiez et à iceulx faire droit et administrer justice, en [p. 342] la maniere et selon ce qu’il est acoustumé faire en nostre dicte court de Parlement ; lesquelz aient tenu et excercé court et juridicion à Poictiers par maniere de court souveraine, et ilec donné plusieurs arrestz, sentences, adjudicacions, appoinctemens et explois en plusieurs et divers procès, tant finiz comme encommenciez en icelle court ; et semblablement ait nostre dit filz passé, commandé, ordonné et expedié, et fait expedier par sa chancelerie plusieurs lettres de grace, de justice, de dons, de finances, remissions et autres. Nous, aprez ce que nous avons ordonné bonne paix et union ferme et estable estre et demourer en nostre royaume, entre ceulx de nostre sang et autres noz subgiez, voulans icelle paix et union tousjours continuer et entretenir, et oster toute occasion de renouvelement de discension et de guerre ; confians à plain que les choses faictes en ce par nostre dit filz et les diz conseillers et commis aient procedé de bonne entencion, pour pourveoir à nos diz subgiez et aus diz affaires, et par grant et meure deliberacion de conseil, avons voulu et ordonné, voulons et ordonnons de nostre plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, que toutes les dictes sentences, arrestz, adjudicacions, appoinctemens et explois faiz et donnez, parties oyes ou souffisanment appellées, qui auront peu avoir seur accez audit lieu de Poictiers, et ce qui s’en est ensuy, qui ne touchent point les dictes divisions, aient et sortissent leur plain et entier effect, comme se par nostre dicte court de Parlement et avant les dictes divisions eussent esté fais, et que les parties en ce touchées soient tenues d’y obeir pareillement que à nostre dicte court, sans estre receues à aucunes contradicions au contraire ; et semblablement que toutes les lettres de grace, de justice, de finance et autres qui desjà ont sorty leur effect et qui ne seroient contraires ou prejudiciables à l’ordonnance de la dicte paix, expediées par la chancelerie de nostre dit filz soient vallables, et s’en puissent [p. 343] aidier ceulx à qui ce pourra touchier et appartenir, comme se elles feussent passées et expediées par nostre chancelerie. Et en oultre voulons et ordonnons que ce qui auroit esté levé des amendes tauxées au dit lieu de Poictiers par les diz conseillers et commis de nostre dit filz, et semblablement le prouffit et emolument qui est yssu du seel et expedicion des dictes lettres en la chancelerie d’icellui nostre filz soit et demeure à nostre dit filz, à sa chancelerie et à ceulx qui l’ont excercée, ou à ceulx aus quelz nostre dit filz l’a ordonné prendre et percevoir, sans ce que aucune chose leur en puist estre demandée ores ne pour le temps avenir ; et que les procès encommenciez audit lieu de Poictiers soient apportez en nostre dicte court de Parlement, pour estre jugiez et en estre ordonné par nostre dicte court ainsi qu’il appartendra par raison, selon l’usaige d’icelle. Et afin que les parties puissent proceder en leurs causes, nous advoquons en nostre dicte court de Parlement toutes les causes et procès pendans en la dicte court de Poictiers, en l’estat qu’elles sont, pour y estre procedé selon raison, aux jours ordinaires des parties de nostre prouchain Parlement advenir. Sy donnons en mandement par ces presentes à nostre amé et feal chancelier, aux gens tenans et qui tendront nostre dit Parlement, aux gens de noz comptes, au Prevost de Paris et à touz bailliz, prevostz et autres noz justiciers et officiers, presens et advenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que ceste presente ordonnance et declaracion ilz entretiennent, enterinent et acomplissent desormais perpetuelment, sans enfraindre en aucune maniere, et à icelle obeissent et facent estre obey par nos diz subgiez plainement et paisiblement, sans aucun contredit ou difficulté au contraire ; et icelles facent publier par tout où il appartendra, affin que nul n’en puisse pretendre aucune ignorance. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. [p. 344] Donné à Pontoise, le xixme jour du moys de juillet l’an de grace mil cccc. et dix neuf, et de nostre regne le xxxixme1.

Par le roy. J. de Rinel.


1 Ces lettres sont imprimées dans le recueil des Ordonnances des rois de France, in-fol., t. XI, p. 15. Le Parlement de Poitiers n’en continua pas moins à rendre la justice comme par le passé, avec le titre de « Cour supérieure siégeant ou ordonnée à Poitiers », même pendant la période de trêve qui s’écoula entre le 19 juillet et le 10 septembre. Les arrêts rendus dans cet intervalle sont transcrits sur le registre X1a 9190, fol. 39 à 51.