[p. 200]

DCCCCLI

Rémission accordée à Thomas Brouart, de Fontaines en Poitou. Jean Brouart, son frère, et Jean Chamaillart luttaient pour jouer dans un pré ; Thomas les ayant vus et croyant qu’ils se battaient sérieusement, vint au secours de son frère et frappa d’un coup de bâton l’adversaire de celui-ci, qui en mourut au bout de trois jours.

  • B AN JJ. 165, n° 142, fol. 88 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 26, p. 200-201
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Thomas Brouart, contenant que, troys ans a ou environ, ou moys d’avril, Jehan Brouart et Jehan Chamaillart, jeunes hommes estans en certain pré appellé le pré des Boys des Hastes en la parroisse de Fontaines en Poitou, où ilz gardoient les beufz qui y pasturoient, se prindrent ensemble au corps bras à bras, et que, après ce que ilz se furent aucunement demenez, cheurent tous deux ensemble à terre, et que, quant Thomas Brouart, frere du dit Jehan Brouart, lequel estoit assez loings du lieu [p. 201] où les diz Jehan Chamaillart et Jehan Brouart estoient cheuz, vit son dit frere ainsi cheu, cuidant que le dit Jehan Chamaillart feust courroucié à lui et le voulsist tuer, il de ce meu de chaleur et de courroux se avança et d’un baston qu’il tenoit en sa main, appellé forchie, frappa hastivement et sanz autre chose dire le dit Jehan Chamaillart un cop sur la teste tellement que le sang en sailli, et fist le dit Thomas Brouart au dit Jehan Chamaillart une grant plaie en la teste. Et lors le dit Jehan Brouart dist au dit Thomas Brouart ces mos : « Pourquoy as tu feru Jehan Chamaillart ? en verité je aimasse mieulx que tu m’eusses feru que lui, car nous ne nous faisions que jouer. » Et que après ce le dit Jehan Chamaillart se leva de terre et s’en ala en l’ostel de son pere, disant ces parolles : « Thomas Brouart, tu m’as feru, mais je t’en feray adjourner et paieray bien ». Pour lequel cop la mort s’est ensuye, troys jours après ou environ, en la personne du dit Chamaillart. Et pour ce icellui Thomas Brouart, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du pays, et n’y oseroit jamaiz retourner, habiter ne converser, et en seroit exillié à tousjours, se par nous ne lui estoit sur ce impartie nostre grace et misericorde, si comme dient les diz supplians, en nous humblement suppliant, comme le dit Thomas Brouart en tous ses autres faiz ait tousjours esté homme de bonne vie, renommée et honneste conversacion, et sanz aucun reprouche, et soit le dit caz advenu par chaleur et mocion naturelle de ainsi avoir veu abatu son dit frere à terre, que sur ce lui vueillons impartir nostre grace et remission. Pour quoy nous, ces choses considerées, etc., à icellui Thomas Brouart ou caz dessus dit avons remis, quictié et pardonné, etc. Si donnons en mandement, en commettant, se mestier est, au gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres juges et justiciers, etc. Donné à Paris, ou moys d’avril l’an de grace mil cccc. et dix, et de nostre regne le xxxie.