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DCCCCXLVII

Rémission accordée à Nicolas Mosnier, qui avait tué d’un coup de couteau Perrot Micheau, à Olonne, dans une rixe survenue après boire, parce que ledit Mosnier refusait de payer son écot. Toutefois il est condamné à rester quatre mois en prison fermée, au pain et à l’eau.

  • B AN JJ. 164, n° 257, fol. 139 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 26, p. 189-191
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des amis charnelz de Nicolas Mosnier, povre homme, laboureur, contenant comme le dit Nicolas Mosnier, Perrot Micheau, Guillaume Pasiot et autres venans ensemble, la veille de la feste de saint Nicolas de may derrenierement passé, en la ville d’Olonne en Poictou, en un lieu ou taverne où il avoit [p. 190] vin à vendre, et à heure de soleil couchant ou environ, et après ce que ilz eurent bien beu et tant que le dit Nicolas Mosnier estoit bien yvre, debat se meut entre eulx sur le paiement du vin qu’ilz avoient beu ; et dist le dit Guillaume Pasiot au dit Nicolas Mosnier qu’il paiast son escot, et il lui respondi, ainsi yvre comme il estoit, qu’il n’en paieroit point, et le dit Pasiot lui respondi que si feroit, en despit de lui, et le dit Mosnier respondi encores que non feroit, ou paroles semblables eurent entre eulx. Et à ceste response, le dit Mosnier frappa ou bouta le dit Pasiot de la main par la poitrine et ledit Pasiot le refrappa, et lors lui et ledit Mosnier et aussi ledit Micheau se leverent tous drois pour eulx vouloir entrebatre, disant le dit Micheau audit Nicolas Mosnier par grant despit qu’il paiast son escot de par Dieu ou de par le deable, ou paroles semblables, et le dit Pasiot cuidant refrapper ycelui Mosnier ; et en ycelui conflit et mouvement, ycelui Nicolas Mosnier, ainsi yvre comme dit est et veant en son yvrais qu’ilz estoient deux contre lui, sur ce trait ou sacha son cousteau à trancher pain et en frappa le dit Pierre Micheau un seul cop par le costé, au dessus des flans ; et dit l’en que, pour occasion du dit cop, mort s’en est ensuye, quatre jours après ou environ, en la personne du dit Perrot Micheau ; et ne se pot le dit Nicolas remuer ou absenter, tant estoit yvre. Et pour ce fu tantost pris et mené prisonnier ès prisons de noz amez les religieux, abbé et convent de Talemont1, et doubte moult sur ce rigueur de justice, si comme dient ses diz amis charnelz, en nous humblement suppliant que, comme de la mort du dit feu Perrot Micheau lui desplaist de tout son cuer, ne n’ot oncques entencion de le blecier, dont mort se deust ensuir, et fu tout par yvresse et de chaude meslée, et que [p. 191] en tous ses autres fais il a esté et est de bonne vie et renommée, et ne fu oncques mais attaint ne convaincu d’aucun autre vilain blasme ou reprouche, et soit povres homs, laboureur, chargé de femme et de trois petis enfans, et aussi de son pere vielz et decrepit, qui ne peut gaigner ne labourer, ne n’ont tous de quoy vivre, se non du labour et travail du dit Nicolas Mosnier, nous lui vueillions sur ce impartir nostre dicte grace et misericorde. Pour quoy nous, inclinans à la dicte supplicacion, etc., au dit Nicolas Mosnier avons oudit cas remis, quicté et pardonné, etc., parmi ce qu’il demourra quatre mois en prison fermée, au pain et à l’eaue. Si donnons en mandement au bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d’Anjou, de Poictou et du Maine, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou mois de may l’an de grace mil cccc. et dix, et de nostre regne le xxxe.

Par le roy, à la relacion du conseil. Chaligaut.


1 Sur l’abbé et l’abbaye de Talmont vers cette époque, cf. ci-dessus, p. 68 note.