[p. 80]

DCCCCXI

Rémission accordée à Guillaume Audoin, laboureur, âgé de soixante ans, devenu idiot à la suite d’une chute, prisonnier à Parthenay à cause du meurtre de sa femme.

  • B AN JJ. 160, n° 91, fol. 70 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 26, p. 80-82
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir esté exposé de la partie des amis charnelz de Guillaume Audoyn, povre homme laboureur, aagé de lx. ans ou environ, chargé de deux petis enfans, demourant en la chastellerie de Partenay en Poictou, comme, deux ans a ou environ, le dit Guillaume Audoyn feust monté en un perier pour cueillir des poires, duquel perier il chut à terre et se estonna la teste telement qu’il fu par long temps sans parler, et des lors il devint sourt et perdi son sens et sa memoire, et depuis a tousjours esté et encores est homme [p. 81] insensible et ydiot ; et il soit ainsi que, le vendredi après la feste saint Mathieu derrenierement passée, le dit Guillaume et Jehanne Brangiere, sa femme, chargassent du fumier en une charette pour mener en leurs terres, et ainsi que la dicte femme besuchoit le dit fumier, ycelui Guillaume, auquel sembla qu’elle ne faisoit pas bien sa besongne, et se moquoit et desrisoit de lui en lui faisant la moe, pour ce qu’il estoit sourt et ydiot par non sens, yré et courroucé de ce, frappa sa dicte femme par le costé au travers des flans d’une espendouere de bois, dont il chargoit le dit fumier en la dicte charette, et la fist cheoir à terre ; et quant elle fu cheue, illa frappa pluseurs fois sur les rains, sur son ventre et sur ses jambes, et puis la laissa et s’en ala mener le dit fumier qu’il avoit chargé en leurs dictes terres, et quant il retourna, trouva sa dicte femme morte de la dicte bateure qu’il lui avoit faicte, dont il fu moult doulent et courroucé, jassoit ce qu’elle eust esté et feust diffamée de son corps, ainsi qu’il estoit voix et commune renommée au païs. Pour lequel fait et cas, ycelui Guillaume a esté pris et mené prisonnier ès prisons de nostre très chier et amé cousin le sire de Partenay, audit lieu de Partenay, èsquelles il est detenu à grant povreté et misere et est en voie de finer briefment ses jours par la justice de nostre dit cousin et de laisser povres orfelins ses deux enfans dessus diz, se par nous ne lui est sur ce impartie nostre benigne grace et misericorde, requerans humblement que, comme le dit Guillaume ait esté le cours de sa vie homme de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans avoir esté actaint ne convaincu d’aucun autre villain blasme ou reprouche, nous lui vueillons nostre dicte grace impartir. Pour ce est il que nous, eue consideracion à ce, à l’aage et à l’estat de la personne du dit Guillaume Audoyn, et pour pitié et compassion de ses deux petis enfans dessus diz, voulans misericorde estre preferée à rigueur de justice, à ycelui Guillaume ou dit cas avons quicté, remis et pardonné, etc. [p. 82] Si donnons en mandement au bailli de Touraine et des ressors et Exempcions de Poictou, d’Anjou et du Maine, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, le xiiie jour de novembre l’an de grace mil cccc. et cinq et de nostre regne le xxvie.

Par le roy, à la relacion du conseil. Charron.