[p. 191]

DCCCCXLVIII

Rémission accordée à Jean, fils de Pierre Bouhet, écuyer, de Saint-Mars-la-Réorthe, prisonnier à la Flocellière, pour avoir forcé un coffre et pris dedans 80 livres tournois appartenant à Maurice Guilloteau, prêtre, par dépit et vengeance contre ledit Guilloteau qui avait séduit la sœur de son père.

  • B AN JJ. 164, n° 292, fol. 153 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 26, p. 191-195
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Jehan Bouhet, filz de Pierre Bouhet1, escuier, [p. 192] contenant que comme estant le dit Pierre à Paris, pour la poursuite de certaines besongnes, où il a demouré longuement, ledit Jehan son filz qui estoit et est jeune de l’aage de xviii. ans ou environ, par mauvais conseil et pour ce que Morice Guilloteau, prestre, combien qu’il se deist grant ami dudit Pierre Bouhet et conversant souvent avec lui en son hostel, avoit faulcement et mauvaisement deceue et deflorée et congneue charnelment une sienne suer, tante du dit Jehan, icellui Jehan fut meu et ot propos de injurier et dommagier icellui Guilloteau, et en procedant en son propos, le xviiie jour d’avril derrenierement passé ou environ, il print chiez un mareschal de la ville de Saint Mars de la Rorte en Poitou, et à son deceu, unes truquaises2 et s’en ala au moustier dudit lieu de Saint Mars, et ouvri des dictes truquaises un coffre du dit Guilloteau estant en icellui moustier et en prist la somme de iiiixx livres tournois ou environ, qui estoient d’icellui Guilloteau, et les emporta avec lui, et rapporta secretement les dictes truquaises chiez le dit mareschal. Et depuis retourna oudit moustier pour cuidier en emporter le dit coffre avec pluseurs lettres du dit Guilloteau estans dedens icellui ; et pour ce qu’il vit oudit moustier un appellé Pierre de Gasté, prestre, il s’en retourna sans prendre et emporter icellui coffre et lettres. Et après ce, il et un autre de la dicte ville de Saint Mars partirent le dit argent, dont chascun ot la moitié, et laissa icellui Jehan la moitié qui lui en escheut en garde à son dit parçonnier. Pour le quel cas le dit Jehan a esté prins et est detenu prisonnier ès prisons de nostre amé et feal chevalier et chambellan, Jaques de [p. 193] Surgieres, seigneur de la Floceliere3, au dit lieu de la Floceliere, et se doubtent les diz supplians que icellui chevalier ou ses officiers ne lui tiengnent rigueur de justice en ceste partie, qui seroit ou grant prejudice et dommage dudit Jehan Bouhet, se nostre grace et misericorde ne lui est sur ce impartie, si comme il dit, requerant humblement [p. 194] icelle. Pour quoy nous, ces choses considerées et que le dit Jehan Bouhet, qui est extrait de noble lignée et est jeune de l’aage de xviii. ans ou environ, ne fut onques mais accusé d’aucuns mauvais cas et a esté meu de commettre le cas dessus dit par induction d’autrui, et pour le grant courroux qu’il avoit de ce que le dit Guilloteau avoit ainsi [p. 195] et mauvaisement injuriée et villenée sa dicte tante, et que les parens d’icellui Jehan nous ont bien et loyaument servi en noz guerres, audit Jehan Bouhet ou cas dessus dit avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement au bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d’Anjou, de Poitou et du Maine, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou moys de juillet l’an de grace mil cccc. et dix, et de nostre regne le xxxe.

Par le roy. Marcade.


1 Dans un arrêt du Parlement du 11 août 1397 on trouve quelques renseignements d’alliances touchant un membre de cette famille noble du Bas-Poitou, qui est bien peu connue. Jean Bouhet, chevalier, à cause de Marguerite du Plessis, sa femme, était demandeur, ainsi que Hugues de Vaux, chevalier, Jeanne de Vaux, dame du Perron, Jean Du Pois et Cécile de Vaux, sa femme, Pierre Robert, Pierre Bigot, Jeanne et Catherine du Plessis, leurs femmes, Isabelle de Forges, comme tutrice de Jean et Catherine du Plessis, enfants d’Hugues du Plessis, contre Jean Raboteau, curateur d’Hugues de Saint-Amand, fils de feu Poinsonnet de Saint-Amand, et Jeanne Bertrand. Il s’agissait de la succession de Marguerite de Chabreville, dame du Breuil-Bertin et d’autres terres et fiefs, fille non mariée de Maynard de Chabreville et de Jeanne Pasquaut ou Pascaut. (Arch. nat., X1a 44, fol. 359 v°.)

2 Truquoises, aliàs turquoises, terquoises, etc., signifiait tenailles. (Godefroy. Dict. de l’anc. langue française.)

3 Jacques II, chambellan de Charles VI, puis de Charles VII, fils de Jacques Ier de Surgères, seigneur de la Flocellière, Cerisay, Saint-Paul, etc., et de Marie de Laval (sur lesquels voy. notre tome V, p. 146 note). Jean duc de Berry, comte de Poitou, lui fit remise, par lettres du 22 septembre 1396, de 87 francs d’or que devaient payer les habitants de ses terres de la Flocellière et de Saint-Paul, pour leur quote-part des aides imposées sur le Poitou, en considération des services qu’il avait rendus au roi dans l’expédition de Flandre, avec dix hommes de sa compagnie, montés, armés et entretenus à ses frais. Le 23 mai 1421, le dauphin Charles, régent du royaume, l’exempta, sans tirer à conséquence pour l’avenir, d’aller au recouvrement de la Normandie occupée par les Anglais, ainsi que Pierre du Puy-du-Fou, Guillaume Boussart et Jean Bouscher, gentilshommes employés à la garde de ses places fortes de la Flocellière, Cerisay et Saint-Symphorien, qu’il importait de défendre. (Coll. dom Fonteneau, t. VIII, p. 171.) Il obtint de Charles VII, le 5 août 1430, des lettres de sauvegarde, pour lui, sa femme et sa famille, dans lesquelles il est qualifié de conseiller et chambellan du roi. Son testament est du 2 décembre 1435 ; il mourut entre cette date et le 21 mai 1437. Jacques II avait épousé : 1° le 2 décembre 1392, Marguerite de Vivonne, fille de Renaud, sire de Thors, sénéchal de Poitou ; 2° le 23 janvier 1416, Marie de l’Isle-Bouchard ; 3° Marie de Sillé, veuve de Jean de Champagne. De son premier mariage il eut deux filles, Jacquette et Marie, et du troisième, un fils et deux filles. (Voy. Vialart, Généalogie de la maison de Surgères, 1717 ; Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 1re édit., t. II, p. 682.)

Ces renseignements sur le seigneur de la Flocellière peuvent être complétés à l’aide des registres du Parlement, où il soutint un grand nombre de procès. Nous ne pouvons ici qu’en donner la nomenclature : 1° Contre plusieurs personnes, se disant commissaires du duc de Berry ou d’Étienne Daniel, son receveur en Poitou, qui avaient prononcé à son détriment, au profit d’Olivier de Clisson, connétable de France. (Arrêt du 31 août 1386, X1a 35, fol. 47.) — 2° Contre Louis et Élie Buffet (affaire se rattachant à la succession de son père). Jacques leur réclamait les comptes d’administration de la terre de la Pelousière en Aunis. (Jugés du 9 février 1398 n.s., X1a 45, fol. 246 ; du 26 mars 1404 n.s., X1a 51, fol. 319 v° ; du 13 février 1406 n.s., X1a 53, fol. 177 ; long arrêt du 28 mai 1406, idem, fol. 221.) — 3° Contre Joachim de Clermont, seigneur de Surgères, et Isabeau de Surgères, sa femme, auxquels il demandait de faire l’assiette d’une rente de 500 livres à lui due. (Jugés des 3 avril 1400, X1a 47, fol. 117 v° ; et 1er décembre 1400, X1a 48, fol. 12 v°.) — 4° Contre Jamet Nicoleau, touchant des biens litigieux en Aunis (4 juin 1400, X1a 47, fol. 281 v° ; 30 juin 1403, X1a 50, fol. 263 v°.) — 5° Action intentée au nom de ses deux filles mineures, Jacquette et Marie, touchant la succession de Marguerite de Vivonne, leur mère, contre les enfants de feu Savary de Vivonne, frère aîné de celle-ci, et ses autres frères vivants. (Ajournement du 16 janvier 1414 n.s., X1a 60, fol. 19 ; long arrêt du 24 novembre 1414, id., fol. 410 v°.) — 6° Contre le vicomte de Rohan et sa femme, Béatrix de Clisson, et Marguerite de Clisson, comtesse de Penthièvre, héritiers d’Olivier IV de Clisson. Procès commencé du vivant de ce dernier, auquel Guy de Surgères, grand-père de Jacques, réclamait une rente annuelle de 200 livres, assise sur les terres de Belleville, comme appartenant à la succession de sa grand’mère maternelle, Jeanne de Châteaumur, femme de Geoffroy de la Flocellière (9 mai 1416, X1a 61, fol. 199 v° ; 21 juillet 1431, X1a 9192, fol. 245). — 7° Contre la comtesse de Penthièvre. Demande d’exécution d’un arrêt antérieur (29 juillet 1418, X1a 4792, fol. 56 v°). — 8° Contre Jean Jarrouceau, qui avait été receveur de ses terres de Montnoblet et du Pâtis, pendant la minorité de sa fille Marie (Jacquette était sans doute décédée à cette époque, car il n’en est plus question). Il s’agit d’un règlement de comptes. (Arrêt du 31 mars 1423 n.s., X1a 9190, fol. 224 v°.) Dom Fonteneau a recueilli, sous la date du 26 juillet 1425, le contrat de mariage de cette Marie avec Bertrand de Dinan. (Tome VIII, p. 173.) — 9° Long et intéressant procès criminel contre Tristan Chabot et ses trois frères ; Jacques II sr de la Flocellière les accusait de graves excès et attentats, entre autres d’avoir battu et mutilé plusieurs de ses serviteurs, d’avoir fait saccager et mettre le feu à son hôtel de la Coudraye, sis en la ville de Luçon, dont Tristan était capitaine pour Georges de La Trémoïlle. Les premières plaidoiries eurent lieu le 2 août 1423 (X2a 18, fol. 5), et malgré un arrêt du 6 septembre 1427, condamnant les frères Chabot à une réparation pécuniaire et à une amende envers le roi (X2a 19, fol. 28 v°), les procédures continuèrent encore plusieurs années ; on en retrouve la trace jusqu’au 2 avril 1431 (X2a 18, fol. 216, 261 v°. Voir aussi X2a 20, fol. 15 v° ; X2a 21, fol. 2 v°, 72 v°.) — 10° Autre procès criminel contre Richard de Bretagne, comte d’Étampes, seigneur de Châteaumur, et autres (19 novembre 1431, X2a 21, fol. 170 v°), et les poursuites, se rattachant à la même affaire, contre Olivier de Beaulieu, capitaine de Châteaumur, Jean de Beaulieu et autres de la garnison de cette place (9 et 13 septembre 1434, X2a 20, fol. 73, 74 ; X2a 21, deux arrêts du 9 septembre. Voir aussi le même registre, aux dates des 31 mai et 5 septembre 1435, et 26 septembre 1436). — 11° Poursuites contre Perrin Fournier, André Le Breton, Guillaume Yver et Guillaume Gautereau, coupables de dégâts et vols dans les bois de la Brosse et de la petite Gaudrière. (Acte du 24 mars 1434, X1a 9193, fol. 12 ; X1a 9194, fol. 64.)