DCCCCXXXIX
Rémission accordée à Jean Brouart et à Jean Malet, de Maillé en la châtellenie d’Angles, coupables de meurtre sur la personne de Philippon Chappeau, qui avait débauché la femme dudit Malet.
- B AN JJ. 164, n° 10, fol. 5 v°
- a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 26, p. 166-167
Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Jehan Brouart, le jeune, et de Jehan Malet, le jeune, parroissiens de Maillé en la chastellenie d’Angle, povres laboureurs, contenant que comme ilz feussent et soient marié et aient conversé en leurs diz mariages par long temps en tenant leurs femmes en leurs hostelz et domiciles, et conversant avec elles bien et paisiblement, ainsi que on doit faire en tel cas, sans ce que ilz eussent voulenté ne entencion de mesdire ne meffaire à aucun ; avec lesquelx supplians et en leurs diz hostelz et domiciles aloit et frequentoit souventes foiz un leur voisin appellé Phelippon Chappeau, faignant estre leur ami ; lequel Phelippon, durant le dit temps, fist et procura tant par ses mauvaises induces et paroles avec la femme du dit Malet, que il l’enmena hors du pays, et laquelle il congnut et fist congnoistre charnelment à autres, et la tint par long temps. Et après ce retourna au dit pays et y amena la dicte femme, et en venant passa par une esglise appellé Saint Aignen, près dudit lieu d’Angle ; ou quel lieu avoit une veille de saint Jehan Baptiste, où estoient deux bessons, ausquelx il vendi et livra icelle femme pour deux escuz qu’ilz luy en baillerent, et la tindrent et firent d’elle ce que leur pleut par l’espace de huit jours ou environ, et jusques à ce que le chastellain d’Angle, le pere d’elle et autres l’alerent querir et la menerent au dit Malet, son mary. Mais après ce qu’elle fu retournée à son dit mary, le dit Phelippon se ventoit de [p. 167] jour en jour que, de rechief il l’enmeneroit avec la femme du dit Brouart, et que, s’ilz en parloient ne sonnoient mot, il les batroit et feroit batre telement que jamaiz ne feroient leur prouffit et que il leur feroit copper les jambes. Et en oultre, dist à icellui Brouart que il enmeneroit sa dicte femme et qu’elle lui avoit convenancié de s’en aler avec lui. Et pour ce iceulx supplians, esmeuz et courrouciez de ce que dit est, se assemblerent avec autres et alerent à un soir, après jour couchié, au pertuys ou trou d’une haye ou cloison où devoit passer ledit Phelippon, en venant à son hostel, et illecques l’assaillirent et le batirent et navrerent telement que, dedens deux ou trois jours après, la mort s’en ensuy. Pour laquelle chose ilz seroient en adventure d’eulx absenter du pays et d’en estre exilliez à tousjours, se par nous ne leur estoit sur ce extendue nostre grace et misericorde, si comme ilz dient, requerans humblement que, comme en tous autres cas ilz soient de bonnes vies et renommées, non convaincus ou attains d’aucuns villains cas ou blasme, et n’avoient pas voulenté de tuer icellui Phelippon, fors seulement de le batre et mutiler telement qu’il n’alast plus sur ses piez, affin que il n’enmenast leurs dictes femmes, nous sur ce leur vueillons impartir nostre dicte grace. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde estre preferée à rigueur de justice, avons ou cas dessus dit à iceulx supplians et chascun d’eulx remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d’Anjou, de Poitou et du Maine, etc. Donné à Paris, ou moys de juillet l’an de grace mil iiiic et neuf, et de nostre regne le xxixe.
Par le roy, à la relacion du conseil. Lagarde.