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DCCCCLXXXIII

Lettres d’abolition pour les barons, seigneurs et autres habitants du Poitou qui avaient pris les armes avec le sire de Parthenay contre l’autorité du roi1.

  • B AN JJ. 169, n° 387, fol. 258
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 26, p. 306-311
D'après a.

Charles, etc. A tous presens et avenir. Comme pour [p. 307] trouver et adviser voyes et manieres, moiennant et parmi lesqueles certains debas, discors et divisions estans ou païs de Poictou, entre le sire de Partenay et aucuns autres barons [p. 308] et seigneurs d’icellui, puissent estre appaisiez, et pour faire cesser les très grans maulx, griefs, pertes et dommages que à cause des dis discors et divisions, et durant icelles ont eu et sueffert nos subgiez du dit païs et de païs voisins, et obvier à ceulx qui encores à la dicte occasion ilz pourroient avoir ou temps avenir, nous par nos lettres patentes eussions nagaires commis, ordonnez et deputez nos amez et feaulx conseillers le cardinal de Reims2, l’evesque de Clermont3, et le viconte de Thouars4, et pareillement eust nostre très chier et très amé filz le daulphin de Viennois, duc de Berry et conte de Poictou, commis, ordonné et deputé par lui nos amez et feaulx maistres Guillaume Thoreau et Guillaume de Lucé, nos conseillers et les siens, et pour mettre à execucion leur dicte commission et mettre paix et union ou dit païs et entre iceulx barons et nos autres subgiez d’icellui se soient les diz commissaires, tant de nous comme de nostre dit ainsné filz transportez ou dit païs de Poictou5, et ilec aient jusques à la feste de [p. 309] Noel prouchainement venant, donné et ordonné astinence et souffrance de guerre entre les gens d’armes et autres gens de guerre qui y estoient de par nous et de par nostre dit ainsné filz, et les autres gens d’armes et gens de guerre du dit sire de Partenay et des autres barons et seigneurs du dit païs, afin que, pendant le dit temps, aucuns bons traictiez et accords, par les dessus nommez commissaires de nous et de nostre dit ainsné filz jà advisez, se puissent au plaisir de nostre Seigneur parfaire et acomplir, parmi certainnes modificacions plus au long specifiées et declairées ès lettres d’iceulx commissaires sur ce faictes, desqueles [p. 310] nous est souffisanment apparu. Savoir faisons que nous, ces choses considerées, desirans à nostre povoir nourrir et mettre bonne paix et union entre nos subgiez et les preserver et garder de tous discors et debas et divisions, et afin que plus de legier ilz soient enclins à passer et consentir les diz traictiez et accords, et pour autres causes et consideracions à ce nous mouvans, au dit sire de Partenay et autres barons, seigneurs et quelxconques autres qui ou fait de sa guerre l’ont soustenu, aidié, conseillié ou favorisé, en quelque maniere que ce ait esté, avons par l’advis de nostre grant conseil, de nos certaine science, grace especial, plaine puissance et auctorité royal, aboli et mis, abolissons et mettons du tout au neant par ces presentes tous crimes, malefices, offenses et mespreneures par eulx et chascun d’eulx commises et perpetrées, durant la dicte guerre, en quelque maniere que à l’occasion d’icelle et des discors, debas et divisions qui ont esté entre ledit sire de Partenay et ses complices, aidans, conseillans, confortans et favorisans, et autres quelz qu’ilz soient, les diz crimes et malefices aient esté commis et perpetrez, sans ce que ores ou pour le temps avenir on en puist au dit sire de Partenay ne aus diz autres barons et autres quelxconques, ne aucun d’eulx, aucune chose reclamer ou demander par justice ne autrement, comment que ce soit. Et imposons sur ce scilence perpetuel à nostre procureur, present et avenir. Si donnons en mandement à nos amez et feaulx les gens tenans et qui tendront nos Parlemens avenir, au seneschal de Poictou et à tous nos autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans, que de nos presentes grace et abolicion facent, sueffrent et laissent le dit sire de Partenay et ses dis aidans, conseillans, confortans et favorisans quelxconques, joir et user plainement et paisiblement, sans contre le teneur de ces presentes les travaillier, molester ou empeschier, ne souffrir estre travailliez, molestez ou empeschiez, ne aucun d’eulx, à l’occasion [p. 311] dessus dicte, en corps ne en biens, en quelconque maniere que ce soit ; ainçois, se au dit sire de Partenay ou à ses dis aidans, conseillans, confortans et favorisans, aucuns de leurs biens avoient esté ou estoient prins, saisis, arrestez, mis à nostre main ou en autre maniere empeschiez, ou son corps ou d’aucuns d’eulx detenus pour ce prisonniers, si leur mettent ou facent mettre, incontinent ces lettres veues, à plaine delivrance. Et voulons que au vidimus de ces presentes fait soubz seel royal foy soit adjoustée comme à l’original. Et afin que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, ou mois de septembre l’an de grace mil cccc. et seize, et de nostre regne le xxxviie.

Par le roy. E. de Mauregart.


1 Ces lettres d’abolition furent octroyées à Jean Larchevêque, en conséquence d’une convention conclue le 12 août précédent, entre le roi et ce seigneur, suivant M. Ledain, pour mettre fin à la guerre qui désolait la Gâtine. Par ce traité, le sire de Parthenay recouvrait ses biens confisqués en 1415, mais à condition de les vendre au roi et au dauphin pour 141,000 écus d’or, en se réservant toutefois l’usufruit. Le roi s’engageait, de son côté, à lui faire rendre les places occupées par les gens du comte de Richemont. (La Gâtine historique, gr. in-4°, p. 195.) Celui-ci en effet avait obtenu, le 23 mai 1415, de Louis dauphin, duc de Guyenne, la confiscation de Jean Larchevêque, et au moment où il fut appelé à rejoindre l’armée qui devait se faire battre à Azincourt, il était occupé à conquérir les places dont le sire de Parthenay se montrait résolu à ne pas se laisser dépouiller sans la plus vive résistance. (Voy. ci-dessus, p. 286, note.) Obligé de quitter la Gâtine avant d’avoir soumis J. Larchevêque, Richemont avait laissé des troupes dans les villes fortes qu’il avait occupées, sous le commandement de son frère, Richard de Bretagne. Prisonnier en Angleterre depuis la bataille d’Azincourt, il fut grandement irrité que l’on profitât de son absence pour le déposséder sans compensation. Il protesta contre la convention du 12 août, invoqua les droits que lui conféraient les lettres de mai 1415 et maintint ses garnisons dans les places qu’elles tenaient pour lui. Malgré l’intervention des commissaires royaux chargés de faire cesser les hostilités, la guerre continua dans la Gâtine et le pays fut cruellement ravagé par les Bretons de Richemont et par les Picards que le duc de Bourgogne avait envoyés au secours de J. Larchevêque. Cette situation se prolongea jusqu’à ce que la reine de Sicile, Yolande, qui négociait le mariage de son fils aîné, Louis III d’Anjou, avec Isabelle, fille aînée du duc de Bretagne, profitât de cette circonstance pour obtenir de Richemont, par l’entremise du duc Jean V, les concessions dont on avait besoin. Artur de Bretagne consentit à traiter avec le dauphin Charles et donna pleins pouvoirs au duc, son frère. « Par une convention conclue le 2 juillet 1417, à Angers, entre le dauphin et Jean V, il fut stipulé que Richemont garderait en toute propriété la seigneurie de Châtelaillon, mais qu’il renoncerait à tous les autres domaines confisqués sur Jean Larchevêque en 1415 ; qu’il retirerait ses garnisons des forteresses où elles étaient et que le sire de Pouzauges en prendrait possession, au nom du roi ou du dauphin, excepté les places de Mervent et du Coudray-Salbart, pour lesquelles le statu quo était maintenu ; enfin qu’une amnistie pleine et entière serait accordée aux partisans du comte de Richemont et de son frère Richard, ainsi qu’à leurs adversaires. » (E. Cosneau, Le connétable de Richemont, p. 47-49 ; voy. aussi B. Ledain, op. cit.) Toutefois le dauphin, comte de Poitou, n’accorda pas le bénéfice de cette amnistie au sire de Parthenay qui, toujours partisan du duc de Bourgogne, était comme tel traité en rebelle. Les hostilités recommencèrent ; seulement ce n’était plus contre Richemont, mais contre le dauphin, que Jean Larchevêque soutenait la guerre ; elle dura jusqu’au mois de juillet 1419. (Voy. ci-dessous, à cette date, un extrait du traité qui mit fin aux hostilités.)

2 Renaud de Chartres, depuis chancelier de France, qui était alors archevêque de Reims (du 2 janvier 1414 à avril 1444), ne fut revêtu de la pourpre qu’en 1439 ; son prédécesseur immédiat Pierre Trousseau ne fut point cardinal. Il ne peut donc être question de ces deux prélats. Nous pensons qu’il s’agit du cardinal Simon de Cramaut (voy. notre t. V, p. 319, note), alors administrateur de l’évêché de Poitiers, qui avait occupé le siège archiépiscopal de Reims du 15 décembre 1409 au 2 mai 1413, et l’avait ensuite échangé par convenance personnelle avec P. Trousseau contre celui de Poitiers. On a vu précédemment qu’il était souvent désigné aussi par son titre de patriarche d’Alexandrie.

3 Martin Gouge de Charpaigne, évêque de Clermont-Ferrand de 1415 au 25 novembre 1444. (Voy. ci-dessus, p. 137, note.)

4 Pierre d’Amboise, vicomte de Thouars (ci-dessus, p. 42, note).

5 M. Cosneau cite des lettres du 10 septembre 1416, par lesquelles le roi ordonna à Pierre d’Amboise, à Guillaume Thoreau et à Guillaume de Lucé d’aller en Poitou pour y faire cesser les hostilités entre le sire de Parthenay et ses adversaires. (Arch. de la Loire-Inférieure, cass. 38, E. 104 ; Le connétable de Richemont, p. 48.) Une assemblée des trois États du pays de Poitou fut réunie à Thouars par ces commissaires, pour examiner la situation et prendre de concert les mesures nécessaires pour y remédier. La ville de Poitiers y députa Jean Guischart, maire, et Jean Larcher, bourgeois, comme nous l’apprend un compte intitulé : « Depense faicte par Perrotin Collet, commis à ce par messeigneurs les maire et commune de la ville de Poitiers, pour sires Jehan Guischart, maire, et Jehan Larcher, bourgeois, et leurs varlets et chevaux, tant en allant de Poitiers à Thouars que pour leur retour, lesquelz furent commis de par lad. ville pour aller aud. lieu de Thouars obeir et comparoir par devant monseigneur le viconte de Thouars, monseigneur l’évesque de Clermont, Me Guillaume Toreau et Me Jehan (sic) de Luché, commissaires au païs de Poitou pour monseigneur le dauphin, duc de Berry, conte de Ponthieu et de Poitou, sur le fait du gouvernement d’icellui pays, auquel lieu de Thouars mes dits seigneurs avoient fait une convocation et assemblée des gens des trois estatz dud. pays de Poitou, pour le faict, traictié et accort de monseigneur de Partenay. » (Arch. de la ville de Poitiers, J. 546-547.) Cette assemblée eut lieu du 17 au 22 novembre 1416 ; le dauphin n’était pas alors Charles comte de Ponthieu (depuis Charles VII), comme l’ont dit quelques auteurs, mais son frère Jean duc de Touraine, qui mourut le 4 ou le 5 avril 1417, et avait eu en don le duché de Berry et le comté de Poitou par lettres du 16 juin 1416, le jour même de la mort de Jean de France, duc de Berry. Cette assemblée d’ailleurs ne produisit aucun résultat, et les hostilités reprirent de plus belle. (Voy. B. Ledain, La Gâtine historique, p. 196.)

Guillaume de Lucé fut promu quelques années plus tard à l’évêché de Maillezais, en remplacement de Jean Le Masle. Sa nomination doit être du commencement de 1421 ; on conserve sous la date du 22 mars de cette année des acquits de dépenses pour les présents offerts par la ville de Poitiers à Guillaume de Lucé, évêque de Maillezais, et à Me Jean Tudert, doyen de Paris. (Arch. de la ville de Poitiers, J. 652-653.) Le 11 mai 1422, il fut pourvu de la charge de conseiller et premier maître clerc des comptes, au premier rang après les présidents. Le registre de la Chambre des comptes où étaient transcrites ses provisions le qualifie évêque de Maillezais. (Bibl. nat., ms. fr. 21405, p. 89, d’après l’anc. mém. J, fol. 4 bis.) Au mois d’avril 1423, Guillaume de Lucé obtint de Charles VII des lettres d’amortissement au sujet de l’abonnement du droit de rachat fait entre lui et le seigneur de Mervent, pour la terre et seigneurie de Chaillé, qui était dans la mouvance du château de Velluire et relevait par arrière-fief de celui de Mervent. (Coll. dom Fonteneau, t. XXV, p. 259.)