DCCCCXLVI
Rémission accordée à Jean Benoist pour le meurtre de Pierre de Lagrée, prêtre, qui avait débauché sa femme.
- B AN JJ. 164, n° 241, fol. 132
- a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 26, p. 186-189
Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Jehan Benoist, demourant ou païs de Poitou, chargié de femme et de pluseurs petiz enfans, contenant comme le dit Jehan Benoist tout le temps de sa vie ait esté de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sanz estre attaint ne convaincu d’aucun mauvaiz cas, et pour ce que on lui rapporta qu’il estoit commune renommée que Pierre de Lagrée, prestre, estoit amoureux de sa femme et l’avoit cogneue charnelment, et encores faisoit souvent, le dit Benoist, meu de douleur, lui defendi d’aler et converser en son hostel ; mais ce non obstant le dit prestre ne s’en volt abstenir et y conversa comme il faisoit paravant la dicte defense, et exigoit la chevance du dit Benoist par la main de la dicte femme, à son desceu ; et que après ycelle defense, x. ou xv. jours avant la feste de Noel derrenierement passé, le dit Benoist trouva en son dit hostel en un plancher le dit prestre et sa dicte femme seul à seul ; le quel prestre, si tost qu’il apperceut le dit Benoist, sailly du dit hostel à terre par une fenestre et s’en ala. Et depuis il, en perseverant en son dampnable propos, se transporta encores, le vendredi après la dicte feste de Noel, ou dit hostel et ylecques ycellui Benoist trouva lui et sa dicte femme, à laquelle ycellui prestre tensoit et l’appelloit très orde putain, en la voulant batre. Pour la quelle chose, grant ryote et noise se meut entre ledit Benoist et le dit prestre, et telement que ycellui prestre frappa le dit Benoist par le visage d’un coustel jusques à efusion de [p. 187] sang, pour quoy ycellui Benoist volt soy revanchier et frapper le dit prestre, mais il s’en fouy hors du dit hostel. Et le dit Benoist qui estoit meu de deux doleurs, l’une de sa dicte femme et l’autre de ce que le dit prestre l’avoit ainsi blecié, couru après lui, accompaignié de deux hommes de son amitié qu’il trouva d’aventure, et le poursuirent jusques à un hostel assez près d’ilecques, où ilz le batirent et frapperent telement que mort s’en ensuy en sa personne. Pour lequel cas le dit suppliant est detenu prisonnier ès prisons de nostre amé et feal chevalier et chambellan, Jehan Harpedenne, seigneur de Belleville et de la Lende1, et ses biens mis en la main du dit Harpedenne, [p. 188] et se doubte de rigueur de justice, se par nous ne lui est sur ce impartie nostre grace et misericorde, si comme dient les diz supplians, en nous humblement suppliant que, comme le dit Benoist en touz ses autres faiz, ait tousjours esté homme de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sanz avoir esté attaint ne convaincu d’aucun autre villain cas, crime ou blasme, nous lui vueillons sur ce impartir nostre dicte grace. Pour quoy nous, [p. 189] ces choses considerées, etc., au dit Jehan Benoist ou cas dessus dit avons quictié, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement au bailli de Touraine, des ressors et Exempcions d’Anjou, du Maine et du Poitou, et à touz noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou moys de may l’an de grace mil cccc. et dix, et de nostre regne le xxxe.
Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Marcade. — Marcade.