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DCCCCLXXIII

Rémission accordée à Colin Baudet, poursuivi avec Simon Baudet et Simon Hugueteau, pour le meurtre de Martin Maignan qui les avait attaqués de nuit, après une dispute, au Chiron près le Bois-de-Céné.

  • B AN JJ. 167, n° 482, p. 650
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 26, p. 273-277
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des amis charnelz de Colin Baudet, povre laboureur, chargié de jeune femme et de six petiz enfans, contenant que un jour de dimenche, environ la feste saint Lucas l’an iiiic et huit, le dit Colin Baudet et Simon Baudet alerent à Boys de Cenné, chieux un nommé Jehan Choetri, qui illec tenoit vin à vendre, ouquel lieu ilz burent et eulx accorderent avecques un [p. 274] nommé Jehan Peron, comme tuteur des enfans mineurs d’ans de feu Yonnet Peron, de certaine rente que le dit tuteur leur demandoit, et en parlant et faisant le dit accord, demourerent ou dit hostel jusques au soir bien tart, et y soupperent avecques Symon Hugueteau, Perrot Luminois et autres, et ainsi qu’ilz souppoient, survint ou dit hostel Martin Meignan, lequel faisoit demande au dit Colin de certaine rente qu’il disoit lui estre deue par le dit Colin. Sur quoy lui et icelui Colin avoient eu paravant paroles contencieuses ensemble, par ce que le dit Colin disoit non estre tenu en la dicte rente, et dist le dit Meignain au dit Colin qu’il le feroit adjorner à Paris, et seroit vengié de lui. A quoy icelui Colin respondi qu’il yroit aussi bien ou mieulx à Paris comme le dit Meignan. Et lors le dit Meignan, comme esmeu et par maniere de menasses, dist au dit Colin qu’il pourroit bien fondre ou chemin en un tay ou boue, et illec demourer. Et sur ce se distrent l’un à l’autre pluseurs paroles injurieuses et telement qu’il convint que les gens estans illec les gardassent d’eulx entrebatre, en leur disant qu’ilz ne faisoient pas bien d’eulx ainsi tancer. Après les queles paroles et choses ainsi faictes et dictes, le dit Meignan se parti du dit hostel et les diz Colin, Hugueteau, Luminois et Simon Baudet demourerent en icelui hostel et y burent et s’esbatirent, une heure après ou environ ; et ce fait s’en departirent environ heure de jour couchant, pour eulx en aler à leurs maisons qui estoient hors de la dicte ville, sans batons, couteaux ne autres defenses quelzconques, fors tant que aucuns d’eulx avoient petiz cousteaux à trancher pain, et mesmement le dit Colin, cuidant que le dit Meignan s’en feust alé à son hostel. Et quant ilz furent hors de la dicte ville, le dit Colin, qui aloit derriere avecques le dit Perrot Lumoys (sic), et les diz Hugueteau et Simon aloient ensemble bien paisiblement, oyrent chiens abbayer en un villaige estant à costé d’eulx, appellé le Chiron, et lors le dit Hugueteau dist au dit Colin [p. 275] Baudet que c’estoit aucune personne du dit villaige qui venoit de la dicte ville, que icelui Colin avoit oy marcher après eulx. Et quant ilz furent avancez de deux traiz d’arc ou environ, en alant leur droit chemin, le dit Martin Meignan sailli d’un fossé auquel il s’estoit mucié, joignant du dit chemin, et assailli le dit Colin Baudet, et d’un grant bazelaire qu’il tenoit tout nu en sa main, lui voult fendre la teste ; mais le dit Colin mist le braz au devant, lequel il ot coppé jusques à l’os du cop que feri le dit Maignan. Et incontinent le dit Colin crya : « A l’aide, je ne sçay qui me veult tuer » ; car aussi ne savoit il point à l’eure qui c’estoit, pour ce qu’il faisoit moult obscur, saisi et prist au corps le dit Meignan et le gecta à terre ; et quant il fu à terre, il cuida saicher une dague qu’il avoit pour en ferir le dit Colin. Et lors icelui Colin, pour resister à la malice et mauvaise voulenté du dit Meignan, saicha un petit coustel à trancher pain qu’il avoit et en fery trois fois le dit Meignan, c’est assavoir deux fois ès cuisses, si comme il croit, et un autre en la poictrine. Et ce fait, se leva le dit Colin Baudet, et pour ce qu’il faisoit obscur, comme dit est, et qu’il cuidoit du dit Perrot Luimoys (sic) qui estoit de sa compaignie que ce feust un autre qui feust de l’aliance et compaignie du dit Meignan, et qu’il lui voulsist courir sus, le fery du dit petit coustel en l’espaule, dont il fu après moult courroucié. Pendant les queles choses, le dit Meignan se leva aussi et se retourna, ainsi que s’il voulsist aler à la dicte ville de Boys de Cenné, et les dessus nommez s’en retournerent à icelle ville, en alant après le dit Meignan, le quel ilz trouverent assis sur l’eurée du chemin, assez près du lieu où il avoit esté navré. Au quel le dit Hugueteau dist qu’il n’avoit pas bien fait de les poursuir pour les cuider tuer, et lui donna un cop du pié parmi les jambes, et ce fait alerent à la dicte ville, pour faire appareillier les diz Colin et Lumoys, et raconterent tout le dit fait au barbier d’icelle ville, present pluseurs personnes. Et [p. 276] ce fait, en eulx retournant à leurs dictes maisons, trouverent que le dit Meignan estoit trespassé pour cause de la bateure et navreure dessus dicte, au lieu où ilz l’avoient laissié tout vif, dont le dit Colin fu moult doulent et courroucié. Et lors eulx doubtans de ce estre poursuis, le porterent et getterent en un puis où il n’avoit point d’eaue, et illec le laisserent l’espace d’une nuyt et d’un jour. Et encores pour doubte qu’il feust trouvé oudit puys, ilz l’en mistrent hors et l’enterrerent en un champ, ouquel champ il fu trouvé. Pour occasion du quel fait, les diz Colin, Symon et Hugueteau se absenterent du dit pays et s’en alerent ou pays de Xanctonge, ouquel ilz furent poursuis par aucuns des parens et amis du dit defunt, et pris et emprisonnez en la ville de Saugeon ; desqueles prisons, pour doubte de rigueur de justice, veu qu’ilz estoient loing du lieu ou quel ledit fait estoit avenu, et par ce n’eussent peu promptement monstrer leurs justifications et defenses, rompirent les dictes prisons et s’en alerent. Et s’est depuis icelui Colin Baudet absenté du dit pays et n’y oseroit jamais retourner, ainçois en seroit exillé à tousjours, dont ses diz femme et enfans seroient en voye de devenir povres mendiens, se par nous ne leur estoit sur ce impartie nostre grace et misericorde, si comme il dit, suppliant humblement que, comme en touz autres cas il ait esté et soit homme de bonne fame, vie, renommée et honneste conversacion, sans ce que oncques mais il feust actaint ne convaincu d’aucun villain cas, blasme ou reprouche, que icelle nostre grace lui vueillions impartir. Pour quoy nous, attendu ce que dit est, et aussi en faveur des diz six petiz enfans, au dit Colin Baudet, ou cas dessus dit, avons quictié, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces dictes presentes au bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d’Anjou, du Maine et de Poictou, et à touz noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou mois de septembre l’an de grace mil cccc. et quatorze, et de nostre [p. 277] regne le xxxve, soubz nostre seel ordonné en l’absence du grant.

Par le conseil. Thoroude.

Item, semblable pour Simon Baudet, nommé en ceste precedente, signée et donnée pareillement.