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MXL

Lettres confirmant la donation faite par le roi à Artur de Bretagne, comte de Richemont, de la terre et seigneurie de Parthenay et des autres domaines de la succession de Jean Larchevêque, nonobstant les procès pendants au Parlement touchant ladite succession.

  • B X1a 8604, fol. 125 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 90-100
D'après a.

Charles, par la grace de Dieu, etc. Oye l’umble supplicacion et requeste à nous faicte, en la presence de plusieurs seigneurs de nostre sang et lignage et des gens de nostre grant conseil, par nostre très chier et amé cousin Artur de Bretaigne, conte de Richemont, connestable de France, disant que, à certains et justes tiltres et par plusieurs et divers moyens et transpors raisonnablement fondez et cy après declairez, à lui appartiennent et doivent appartenir les terres et seigneuries de Partenay, Voulvent, Mervent, le Couldray Salbart, Secondigny, Chastelaillon, Matefelon, et autres terres appartenans et appendans à ycelles terres et seigneuries, qui jadiz furent et appartindrent à feu Jehan Larcevesque, en son vivant chevalier ; et que d’icelles choses il a jà longuement joy, tant par vertu de certain don et transport, que feu nostre oncle Jehan, derrenier duc de Berry et conte de Poictou, lui fist d’icelles terres et seigneuries, comme à luy forfaictes et confisquées, au moins ce que tenu en estoit de sadicte conté de Poictou, pour cause de la felonnie et rebellion que ledit Larcevesque, qui estoit son vassal et subgect, commist à l’encontre de luy, ainsi que plus à plain est contenu et peut apparoir [p. 91] par lettres d’icellui nostre oncle, faictes et données le sixiesme jour de may l’an mil quatre cens quinze, comme aussi par autre don et transport que feu nostre très chier frere, Loys duc de Guyenne, par ses lettres données le xxiiie jour dudit mois de may, fist d’icelles terres et seigneuries à nostre dit cousin et connestable1, lesquelles nostre dit frere disoit lui appartenir par vertu du don que fait lui en avoit feu nostre très chier seigneur et pere, cui Dieu pardoint, par certaines ses lettres données le xiiiie jour dudit mois de may, par la forfaicture et confiscacion dudit feu Larcevesque, qui s’estoit constitué et par effect demonstré son rebelle et desobeissant, en lui faisant et à ses vassaulx et subgiez toute guerre et tenant à l’encontre de lui le party de Bourgoigne, et par ce commettant envers lui crime de leze majesté. Lequel nostre cousin le connestable, pour prandre et apprehender la possession des dictes terres et executer les dictes lettres de nostre dit pere, selon leur forme et teneur, se feust par leur bon plaisir et ordonnance, tantost après ces choses, tiré ou dit païs de Poictou et tant feist que par puissance de main armée, à ses grans fraiz et mises, mist en obeissance de nostre dit seigneur et pere toutes les places dessus dictes, excepté seulement les ville et chastel dudit Partenay, qui pour lors demeurerent en leur estat2, parce que icelui [p. 92] nostre dit cousin, en obeissant au mandement de nostre dit seigneur et pere, pour lui faire greigneur service, ala en ce temps à la journée de Giencourt3, où il fut prisonnier des Anglois, noz ennemis, qui longuement l’ont detenu et empeschié de sa personne ou païs et royaume d’Angleterre. Pendant lequel empeschement et prison de nostre dit cousin, et après nostre partement de nostre ville de Paris, pour ce que ledit Jehan Larcevesque continua en ses rebellions et desobeissances, nous feismes assieger les diz ville et chastel de Partenay, et après feismes certain contract avec ledit Larcevesque, par lequel il nous transporta la proprieté de toutes les dictes terres, moyennant certaine somme de deniers que paier lui devions, à plusieurs et divers termes et payemens, par tele condicion que, se faulte avoit en aucuns d’iceulx payemens, le dit contract seroit reputé pour nul et demourroient les deniers payez pour les termes escheuz au dit Jehan Larcevesque comme siens, franchement et quictement, sans ce que tenu fust d’aucune chose en restituer ; et fut dit, parlé et accordé, en faisant ledit contract, que les dictes terres et seigneuries estans en la dicte conté de Poictou demourroient unies et annexées oudit conté de Poictou, sans ce que separer les en deussions ne peussions. Et, pour ce que, en ensuivant et continuant les termes et condicions dessus dictes, eussions faiz plusieurs payemens des sommes promises audit Larcevesque, à cause du dit contract, mais depuis, obstans plusieurs grans charges que avions à soustenir, eussions cessé de payer, par aucuns termes, les sommes que, pour raison des diz contraz, devions et estions tenuz paier4.

[p. 93] Pour lesquelles causes et aussi que le dit Jehan Larcevesque nous fit savoir qu’il estoit bien content que icelles terres et seigneuries venissent ès mains de nostre dit cousin, eussions à icelui nostre cousin donné, cedé et transporté la proprieté de toutes les dictes terres et seigneuries, et tout le droit, cause, poursuite et action que, par le dit contract et autrement, avoir y pouvions, pour en joir et user, par lui et ses heritiers masles, procreez et descenduz de sa char, en loyal mariage, et, se aucuns n’en avoit, eussions en ce donné icelles terres et appartenances à nostre très chier et amé neveu, Pierre de Bretaigne, second filz de nostre très chier et amé frere le duc de Bretagne5, [p. 94] pour semblablement en joir après le trespas de nostre dit cousin, par nostre dit neveu et ses hoirs masles, procréez en loyal mariage, non obstant les reservacions ou condicions apposées oudit contract, faisans mencion de l’union ou adjonction des dictes terres au demaine dudit conté de Poictou, lesquelles nous ne voulons aucunement nuyre ne prejudicier aus diz don, cession et transport par nous faiz à nos diz cousin et neveu, moyennant que nostre dit cousin payeroit au dit Jehan Larcevesque le reste de ce que lui devions, à cause dudit contract, pourveu toutesvoies que de ce feust d’accord ledit Jehan Larcevesque. Lequel, après ces choses, y donna son consentement et, qui plus est, en faveur de nostre dit cousin, ledit Jehan Larcevesque, après le transport par nous fait d’icelles terres et seigneuries à nostre dit cousin, fut content que le contract d’entre nous et lui, qui, comme dit est, estoit par defaut de payement, rompu et adnullé, demourast entier et en sa force et valeur, et sur ce receut argent et nouveaux payemens de nostre dit cousin, comme toutes ces choses et autres peuvent apparoir, tant par noz lettres comme par celles dudit feu Larcevesque6 ; lequel, à greigneur confirmacion, ratifia et approuva d’abondant par son testament ledit contract, voulant et ordonnant qu’il eust et [p. 95] sortist son plain effect. Et, tout nonobstant et sans avoir regart aux choses dessus dictes, nostre procureur general a de ce mis en procès, en nostre court de Parlement, nostre dit cousin et connestable, tandiz que, par le moyen et pourchaz d’aucuns ses malveillans, qui lors avoient grant gouvernement et auctorité entour nous, il a esté, à sa grant deplaisance, esloigné de nous et de nostre service, soy efforçant nostre dit procureur de debatre et impuner ledit don et transport7, que ainsi fait avons à ycelui nostre [p. 96] dit cousin, et par ce empescher qu’il ne joysse de ses dictes terres. Sur quoy a esté tant procedé que les parties ont esté appoinctées à bailler leurs causes et raisons par escript, d’un costé et d’autre. En quoy icelui nostre dit cousin a esté et est grandement damnifié et aussi desplaisant de ce que, à l’encontre de nous, on le veult ainsi mettre et tenir en procès, si comme ces choses nous a dictes et remonstrées ; requerant humblement que, consideré ses droiz et tiltres dessus diz, dont il offroit faire prompte foy, nous plaise lui pourveoir sur ce que dit est, par maniere que nostre dit don et transport lui soit fructueux et valable et sortisse son plain effect, selon la teneur de nos dictes lettres sur ce faictes, en le faisant [p. 97] mettre hors dudit procès et imposant sur ce silence à nostre dit procureur, en le recevant, à cause des dictes terres et seigneuries, en nostre foy et hommage.

Savoir faisons que, après ce que bien au long avons fait veoir et visiter par les gens de nostre dit grant conseil les droiz et tiltres de nostre dit cousin touchant le fait dessus dit, et que d’iceulx et de son donné à entendre nous est suffisamment et bien à plain apparu, nous, eu à ce regart et consideracion, et aussi aux très grans, louables et prouffitables services que nous a longuement faiz et que de jour en jour s’efforce, de toute affection, de plus encore nous faire nostre dessus dit cousin et connestable, tant ou fait de noz guerres comme autrement, en toutes manieres à lui possibles ; voulans pour ce le traicter en toutes ses affaires favorablement et en toute doulceur, avons, de nostre certaine science, plaine puissance et auctorité royal, en tant que besoin en est, et par l’advis et meures deliberacions des diz seigneurs de nostre sang et des diz gens de nostre grant conseil, pour ce assemblez en grant nombre, declairé et declairons, par ces presentes, les dictes terres et seigneuries à lui competer et appartenir, aux tiltres et moyens dessus declairez, et nostre dit don et transport ainsi fait des dictes choses à nostre dit cousin et connestable estre bon et valable, et icelui avons confermé, ratifié et approuvé, confermons, ratifions et approuvons, en tant que besoin en seroit, par ces dictes presentes, en voulant et ordonnant icelui nostre cousin et ses diz heritiers masles paisiblement, et aussi nostre dit neveu de Bretaigne et ses diz heritiers masles, en la condicion dessus dicte, joir et user doresenavant des dictes terres et seigneuries contenues et declairées ou dit transport, tout selon la forme et teneur d’icelui, et tous empeschemens et procès au contraire faiz et commanciez par noz procureur, advocaz et autres noz justiciers et officiers, voulons estre ostez ; et tout ce qui auroit esté fait ou prejudice de [p. 98] nostre dit cousin et connestable adnullons et voulons cesser et estre mis au neant. A tous lesquelx avons de ce imposé et imposons perpetuel silence, en decernant oultre que nostre dit cousin, à cause des dictes choses, sera par nous receu, toutes fois que par lui requis en serons, en nos diz foy et hommage. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx conseillers les gens tenans nostre Parlement et qui tendront ceulx à venir, les gens de noz comptes et tresoriers, et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre dit don et transport et de nostre presente declaracion, ordonnance et ratificacion facent, seuffrent et laissent nos diz cousin et neveu et leurs diz hoirs masles joir et user plainement et paisiblement, en tant que à nous touche et peut toucher, par la forme et maniere que dessus est dit, sans leur faire ne souffrir estre fait ne donné, ores ne pour le temps à venir, aucun destourbier ou empeschement au contraire, en quelque maniere ne soubz quelle couleur que ce soit, et que tous empeschemens qui de par nous ont esté mis ès dictes terres et seigneuries ostent et facent cesser. Mandons aussi à nos diz procureur et advocas, et à chascun d’eulx, estroictement enjoignans que dudit procès par eulx commancié, comme dit est, se desistent et departent du tout, sans plus aucunement y proceder ne tenir, à cause de ce, nostre dit cousin en procès, car ainsi nous plaist il et voulons estre fait, de grace especial, se mestier est, non obstant le dit procès et tout ce qui s’en est ensuy, non obstant aussi l’interdiction par nous faicte de non alienner ne mettre les dictes choses hors de noz mains, ne de les separer hors des terres et seigneuries ausqueles elles furent annexées par le contract fait entre nous et le dit Larcevesque, et quelxconques lettres surreptices impetrées ou à impetrer, à ce contraires. En tesmoing de ce, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Donné à Tours, [p. 99] le ixe jour d’avril l’an de grace mil cccc. xxxiiii. avant Pasques et de nostre regne le xiiie8.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil, auquel messeigneurs le duc de Bourbon9 et Charles d’Anjou10, vous, le conte de Vendosme11, l’arcevesque de Vienne12, les evesques de Poictiers13, de Magalonne14 et de Maillezays15, le bastart d’Orleans, les marechaulx de Rieux16 et de la Fayette17, le maistre des arbalestriers18, les sires de Bueil19, de Gaucourt20 et de Treves21, messires Bertrant de Beauvau22, Hugues de Noer23 et Loys de Tromagon, maistres [p. 100] Renier de Boulligny24, Jehan Chastenier25 et Jehan Fournier et plusieurs autres estoient. Budé.


1 Sur le don fait à Artur de Bretagne, comte de Richemont, par le dauphin Louis, duc de Guyenne, des biens confisqués de Jean Larchevêque, sr de Parthenay, cf. notre volume précédent, p. 307, note.

2 L’on a vu dans notre volume précédent (p. 286 note) que Jean Larchevêque ne se laissa pas dépouiller sans résistance et que le comte de Richemont fut envoyé en Poitou, avec le titre de capitaine général et la mission de réduire à la soumission le sire de Parthenay et ses alliés. Il s’empara promptement des places secondaires ; celle de Vouvant lui fut livrée par la dame de Parthenay elle-même. Mais Parthenay, une des plus fortes villes du Poitou, avait été mise en état de défense et pouvait tenir longtemps. Richemont en faisait le siège, quand il fut rappelé par des lettres pressantes du roi et du dauphin, au commencement d’octobre 1415. (Sur ces opérations, voy. Ledain, La Gâtine historique, p. 193-194, et E. Cosneau, Le connétable de Richemont, p. 39, 40.)

3 Sic. Lisez « Azincourt ».

4 C’est par contrat passé à Bourges, le 19 novembre 1419, ratifié le 21 janvier suivant, que le sire de Parthenay vendit définitivement ses domaines au dauphin Charles, régent du royaume, moyennant la somme de 141.000 écus d’or, réserve faite de l’usufruit au vendeur, sa vie durant. (Arch. nat., J. 183, n° 135.) Le dauphin s’était engagé à lui verser, jusqu’au parfait paiement, chaque année, aux termes de saint Jean-Baptiste et de la Toussaint, une somme de 6500 livres, tant pour le principal du transport des terres de Poitou et provinces voisines, que pour le revenu des terres de Mervent, Châtelaillon et le Coudray-Salbart. Les villes, châteaux et forteresses de Vouvant, Mervent, Secondigny, le Coudray-Salbart et Châtelaillon restaient provisoirement en la possession du régent ; mais il était obligé de les rendre à Jean Larchevêque, trois ans après la date des lettres de ratification, ou quatre ans après seulement, mais, dans ce dernier cas, en payant une indemnité supplémentaire, le tout sous peine de nullité du contrat. Les échéances furent régulièrement payées jusqu’à la Toussaint 1422. A la Saint-Jean suivante, Charles, devenu roi, ne put verser que 1500 livres au lieu de 6500. L’évêque de Béziers, Hugues de Combarel, qui devint, peu de mois après, évêque de Poitiers, et Jean Rabateau, furent chargés de remettre cette somme au sire de Parthenay, de lui remontrer en même temps les grandes affaires et nécessités du roi, et de lui demander en conséquence des délais pour les termes à venir. Par acte passé au château de Parthenay, le 26 juin 1423, Jean Larchevêque consentit que les 5000 livres restant dues à cette date ne lui fussent payées qu’à la Saint-Michel suivante, et pour les 6500 livres à verser à la Toussaint 1423, il accorda délai jusqu’à Noël de la même année. De plus, en ce qui touchait la restitution des villes et châteaux de Vouvant, Mervent, le Coudray-Salbart, Secondigny et Châtelaillon, il en prorogeait d’un an l’échéance, c’est-à-dire au 21 janvier 1425. Le même acte donne quittance des 1500 livres reçues le jour même. (X1a 8604, fol. 64 v°.) Ce document avait échappé aux recherches de M. Ledain. Par lettres du 24 octobre 1425, le roi renouvela en faveur du comte de Richemont la donatien des domaines du sire de Parthenay, à condition de parfaire les paiements de la somme stipulée en 1419, puis Jean Larchevêque, par son testament et malgré les sollicitations de ses héritiers naturels, ratifia les dispositions prises pour que son héritage fût transmis à sa mort, sans difficulté, au connétable. (E. Cosneau, op. cit., p. 87.)

5 Le second fils de Jean V duc de Bretagne (1399-1440) et de Jeanne de France, fille de Charles VI, était né le 7 juillet 1418. Il devint duc de Bretagne sous le nom de Pierre II, à la mort de son frère aîné François Ier, le 18 juillet 1450, et décéda lui-même, sans enfants, le 22 septembre 1457, c’est-à-dire avant son oncle Artur, comte de Richemont, de sorte qu’il ne jouit point de la succession de Parthenay. Il avait épousé, en 1431, Françoise d’Amboise, fille aînée de Louis d’Amboise et de Marie de Rieux, qui vécut jusqu’en 1485. Le comte de Richemont succéda à son neveu Pierre, comme duc de Bretagne, sous le nom d’Artur III, et mourut au château de Nantes, le 26 décembre 1458, dans sa soixante-sixième année.

6 Il a été dit que Jean Larchevêque mourut au commencement de 1427 ; il serait plus exact de dire vers la fin de cette année. En tout cas il n’était pas encore décédé le 25 juillet 1427, date des plaidoiries prononcées pour lui au Parlement, contre Jean Harpedenne, sr de Belleville, auquel il réclamait pour son château de Vouvant le guet dû, affirmait-il, par les habitants de la Chapelle-Thémer, les Oulières et autres lieux. (Arch. nat., X1a 9198, fol. 290 v°.) Son décès coïncida donc à peu près avec la disgrâce de Richemont.

7 La donation de Parthenay au connétable fut attaquée tout d’abord par Marie Larchevêque, comtesse de Tonnerre, sœur de Jean, et par les petits-enfants de son autre sœur Jeanne, femme de Guillaume d’Harcourt, comte de Tancarville. Jacques d’Harcourt, baron de Montgommery, qui avait épousé Marguerite, fille de Jeanne de Parthenay et du comte de Tancarville, avait été mis à mort en 1424 au château de Parthenay, dont il avait voulu s’emparer par trahison. Il laissait un fils et une fille mineurs, qui furent représentés, dans le procès contre Richemont, par leur oncle et tuteur, Christophe d’Harcourt, souverain maître des eaux et forêts de France. Le procureur général intervint pour le roi, aussi bien contre les demandeurs que contre le défendeur. Le connétable, qui avait la saisine et la jouissance des biens litigieux, avait tout intérêt à faire traîner les choses en longueur et à éviter qu’un arrêt définitif fût rendu, tant que le roi lui tiendrait rigueur. Il n’y manqua pas. Après plusieurs ajournements successifs, il demanda encore, le 3 février 1429 n.s. et obtint que sa cause fut maintenue en l’état. Les plaidoiries eurent lieu le 3 janvier 1430 et le 17 mai 1431. Elles sont curieuses, mais extrêmement développées. Nous ne pouvons que les signaler en quelques mots. A ces dates, Richemont n’était pas rentré en grâce. Le procureur général fit valoir contre lui cet argument que c’est au profit du roi que la vente de Parthenay avait été consentie et que Jean Larchevêque étant mort, son héritage devenait ipso facto partie intégrante du domaine de la couronne ; or le domaine est inaliénable. D’autre part, la réunion avait été réclamée dans l’intérêt de l’état du comté de Poitou, par les trois États du pays, et une partie de la somme stipulée par l’acte de vente avait été payée des deniers votés par les États. Ce serait donc aller contre l’intention du roi et du pays que de laisser Richemont en possession de ces importants domaines. D’ailleurs, les lettres de don du 14 octobre 1425 ne pouvaient être considérées comme valables ; elles avaient été obtenues par surprise. A la fin d’une séance du conseil, au moment où les membres s’étaient levés et commençaient à se retirer, le connétable avait exposé sommairement au roi l’objet de sa requête et personne n’avait entendu de quelle affaire il était question. A la mort de Jean Larchevêque, le procureur général avait impétré des lettres royaux enjoignant au sénéchal de Poitou de prendre « reaument et de fait » possession de Parthenay, au nom du roi. Celui-ci commit à cet effet Me Jean Arembert, qui se transporta aux faubourgs de Parthenay et demanda à parler au châtelain, réclamant de lui « obeissance pour faire aucuns exploiz de par et pour le roy ». Le châtelain fit répondre qu’il était malade, ce qui était faux, et ne voulut pas le recevoir. Un sergent de la ville, que Jean Arembert renvoya vers lui, ne revint plus. Alors survinrent trois compagnons « de diverses langues », qui usèrent de « grosses et dures paroles » et déclarèrent qu’il fallait que « Arembert et sa compaignie se partissent et alassent droit à Chinon sans arrester, et que là estoit le conte de Richemont, et de la haste que faisoient les diz compaignons à painne eut Arembert loisir de compter à son hoste ; et de fait fut contraint à prendre le chemin de Chinon, et puis per devia s’en revint à Poictiers ». C’est au mois d’octobre 1427 que ces choses se passaient, car on sait de bonne source que le connétable passa plusieurs jours à Chinon, à cette époque, après sa rupture avec Charles VII et La Trémoïlle. On voit que d’ailleurs Richemont avait bien pris ses mesures et avait eu soin de mettre en temps utile des gens à lui dévoués dans les châteaux de Jean Larchevêque. D’après son récent et consciencieux biographe, c’est dans les premiers jours de novembre, en quittant Chinon, qu’il vint prendre en personne possession de sa seigneurie de Parthenay. Dans sa longue réponse au procureur général, le 17 mai 1431, l’avocat du connétable déclara, entre autres choses, que son client avait payé aux exécuteurs de feu Larchevêque ce qui restait dû de la somme stipulée dans le contrat de vente. Quand Arembert vint à Parthenay, Richemont étant à Chinon, comme il lui fut dit, ses officiers voulurent le faire entrer au château ; mais il s’y refusa, craignant de ne point y être en sûreté, et préféra rester dans les faubourgs. S’il avait été victime de quelque excès, le connétable désavouerait ceux qui s’en seraient rendus coupables, car il ne voulait procéder que par voie de justice, etc., etc. (Arch. nat., X1a 9199, fol. 121, 212 et suiv., 393 v°, 396.) Ces détails inédits sur la transmission de l’héritage de Parthenay nous ont paru mériter d’être mis au jour.

8 Ce fut près d’un an après seulement, c’est-à-dire le 5 mars 1436 n.s., que le Parlement, sur l’ordre formel du roi, enregistra cette troisième donation. Le comte de Richemont, qui avait obtenu pour la première fois les terres de Parthenay, en mai 1415, put enfin jouir sans conteste de cette riche succession. Les lettres du 9 avril 1435, dont il existe une autre copie, peu correcte, aux Arch. nat., K. 184, n° 21, et une troisième aux Arch. de la Loire-Inférieure (E. 105, cass. 38), ont été publiées in extenso par M.E. Cosneau, Le connétable de Richemont, in-8°, 1886, p. 489.

9 Charles Ier, né en 1401, fils aîné de Jean Ier, duc de Bourbon de 1434 au 4 décembre 1456, date de sa mort.

10 Charles, troisième fils de Louis II d’Anjou, roi de Naples, né au château de Montils-lès-Tours, le 14 octobre 1414, devint comte du Maine en 1440 et mourut le 10 avril 1473.

11 Louis de Bourbon, second fils de Jean de Bourbon et de Catherine de Vendôme, né vers 1376, succéda en 1412 à sa mère dans le comté de Vendôme, et mourut à Tours, le 21 décembre 1446.

12 Jean de Norry fut archevêque de Vienne de 1417 à 1437.

13 Hugues de Combarel, évêque de Poitiers de 1424 à 1440.

14 Robert de Rouvres, évêque de Maguelonne du 4 mars 1433 à décembre 1453. (Ci-dessus, p. 23, note 3.)

15 Guillaume de Lucé était probablement évêque de Maillezais à cette époque.

16 Pierre de Rieux, dit aussi le maréchal de Rochefort, né à Ancenis le 9 septembre 1389, mort en 1438.

17 Gilbert de La Fayette, maréchal de France depuis l’an 1420, mort le 23 février 1462.

18 Jean Malet, sire de Graville et de Marcoussis, grand maître des arbalétriers (1427-1449).

19 Jean V de Bueil, comte de Sancerre, amiral de France en 1450. (Ci-dessus, p. 67, note 4.)

20 Raoul VI de Gaucourt, chambellan du roi. (Cf. le vol. précédent, p. 285, note.)

21 Robert Le Maçon, seigneur de Trèves, mort le 28 janvier 1443. (Vol. précédent, p. 298, note 2.)

22 Bertrand de Beauvau, sr de Precigné ou Pressigny, nommé fréquemment dans la suite de ce volume.

23 Hugues de Noer, aliàs de Noyers, ou de Noé, ainsi que le nomme M. de Beaucourt, appartenait à une famille de Languedoc. Il remplit d’abord auprès du dauphin Charles, comte de Poitou, les fonctions de premier écuyer du corps et de maître de l’écurie. Fait chevalier en 1429, pendant la campagne du sacre, il conserva toujours la faveur de Charles VII et résida à sa cour constamment, avec la charge de conseiller et maître d’hôtel jusqu’à sa mort survenue postérieurement au 25 juillet 1447. (Hist. de Charles VII, t. Ier, p. 60-61.) Nous avons dit précédemment que Hugues de Noer fut seigneur de Sainte-Néomaye en Poitou, dont il rendit aveu au dauphin à Lusignan, le 12 juin 1420. (Voir notre précédent volume, p. 58, note.) Les héritiers de Guillaume de Lodde, chambellan du duc de Berry, qui avait joui de cette terre, en disputaient la possession au nouveau seigneur et le poursuivaient au Parlement pour cette cause, à la date du 2 septembre 1423. (Arch. nat., X1a 9197, fol. 248 v°.)

24 Voy. ci-dessus, p. 22, note 2.

25 Jean Chastenier, secrétaire du roi Charles VII et à partir d’octobre 1425 greffier de la chambre des aides au Palais de Poitiers. (Cf. vol. précédent, p. 408, note.)