MCV
Lettres de rémission en faveur des deux frères Germain et Léon Chabot, écuyers, coupables de complicité dans le rapt d’Annette de Chaunay et dans divers autres crimes pour lesquels Jacques Chabot, leur frère, avait été condamné à mort et exécuté.
- B AN JJ. 177, n° 213, fol. 141 v°
- a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 317-323
Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receu l’umble supplicacion de Germain Chabot et Lyon Chabot1, freres, escuiers, contenant que, neuf ou dix ans a ou [p. 318] environ, soubz umbre ou couleur de ce que feu Jaques Chabot, leur frere, disoit et maintenoit que feu Guillaume Barbastre2, en son vivant escuier, lors estant à la Roche sur Yon, avoit congneue charnellement une leur parente et à cause de ce lui vouloit mal de mort, ledit Lyon, estant lors avec et en la compaignie dudit feu Jaques, son frere, voulant lui complaire et de ce le vengier, donna, en hayne de ce que dit est, en la ville de la Roche sur Yon, ung coup de dague audit Barbastre, par le moyen duquel il ala pou d’ilec après de vie à trespassement. Et aussi furent les diz Germain et Lyon, supplians, à certaine assemblée que ledit feu Jaques, leur frere, fist, ung an et demy a ou environ, audit lieu de la Roche sur Yon, de xx. à xxv. hommes de guerre, armez et embastonnez d’espées, d’arcs et javelines, qui furent par eulx menez à la Mote de Bauçay ou païs de Lodunoys, et eulx saichans que François de Chaunoy3, escuier, seigneur dudit lieu de la [p. 319] Mote, estoit absent dudit chastel de la Mote de Bauçay, entrerent de nuit par eschielles en la basse court dudit chastel, et en icelle s’embuscherent et au matin, au point du jour, après l’ouverture faicte dudit chastel, se bouterent dedans ; et illecques print et ravy ledit feu Jaques par force et violence Agnette de Chaunoy, fille dudit François et de Katherine de la Rochefoucault, sa femme, lors estant couchée en son lict avecques ladicte Katherine, sa mere, et icelle par force et violence, oultre le gré et voulenté d’icelle Agnette et de sa dicte mere, la fist monter sur son cheval derriere lui, et la mena audit lieu de la Roche sur Yon, et oudit lieu, cinq ou six jours après l’espousa. Et le jour meismes desdictes espousailles, la mena ou chastel de Bran sur la mer en nostre païs de Poictou, où il la detint par aucun temps ; et depuis la transporta [p. 320] de lieu en autre, pour doubte qu’elle feust trouvée et sur lui recouvrée par justice ou par les parens et amis d’icelle Agnette. Ausquelles choses faictes par ledit feu Jaques Chabot, les diz Germain et Lyon, supplians, furent presens et l’acompaignerent, conforcerent et favoriserent, soubz umbre de ce que le dit feu Jaques disoit que entre lui et le dit de Chaunoy, pere de la dicte Agnette, avoit eu paroles et traictié de mariage desdiz feu Jaques Chabot et Agnette, et que depuis lui avoit esté rapporté que le dit de Chaunoy, pere de la dicte Agnette, vouloit icelle marier à ung autre homme, et le fruster dudit mariage. Et avecques ce furent lesdiz supplians, certain temps a, en la compaignie de François de Montcatin, capitaine dudit lieu de la Roche sur Yon, dudit feu Jaques Chabot et autres armez et embastonnez, à courir sus par voye de [p. 321] fait et main forcée à nostre amé et feal Guy d’Auxigny, chevalier, lors nostre lieutenant ou païs de Poictou, ès marches de deça la riviere de Loire, et à ses gens qui là estoient venuz requerir nostre amé et feal Geffroy Le Ferron, l’un de noz tresoriers, lors prisonnier ou dit chastel de la Roche sur Yon, et que ou conflict avoient esté tuez deux hommes des gens dudit d’Auxigny4. Pour [p. 322] occasion desquelz cas et autres grans et enormes excès et deliz, plus à plain declairez en certaine sentence, puis nagueres donnée par les gens laiz de nostre grand conseil et aucuns des gens de nostre court de Parlement, le dit Jaques Chabot a esté executé par justice5. Et pour ce, les diz supplians, ses freres, doubtans que, pour avoir esté avecques et en sa compaignie à faire et commettre les choses dessus dictes, on vueille semblablement contre eulx rigoureusement proceder par justice, se sont absentez du païs, ou ilz faisoient leur demeure et n’y oseroient jamais retourner, converser ne repairer, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, humblement requerans que, attendu qu’ilz ne firent pas les dictes assemblées, noises et debas dessus diz, ne n’estoit pas pour leur fait, et que ce qu’ilz en ont fait et commis a esté pour complaire audit feu Jaques Chabot, leur frere, qui de ce les requist, ce que autrement ilz n’eussent jamais fait, qu’ilz sont gens nobles et de bon hostel, et nous ont long temps servy, eulx et leurs parens ou fait de noz guerres et autrement, en diverses manieres, que en tous autres cas ilz ont tousjours esté gens de bon gouvernement et honneste conversacion, sans [p. 323] oncques mais avoir esté actaint ou convaincuz d’aucuns autres villains cas, blasmes ou reprouches, il nous plaise leur impartir icelles. Pour quoy nous, ces choses considerées et les bons et agreables services que les diz supplians nous ont par long temps faiz ou fait de noz guerres et autrement entour nous, en plusieurs et maintes manieres, voulans pour ce misericorde estre preferée en ceste partie à rigueur de justice, à iceulx Germain Chabot et Lyon Chabot, freres, supplians, et à chascun d’eulx, avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc.xlvi, et de nostre regne le xxiiiie.
Ainsi signé : Par le roy, les sires de la Varenne, de Precigny et de Blainville6, messire Regnault du Dresnay7 et autres presens. De La Loere. — Visa. Contentor. P. Le Picart.