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MCIX

Lettres d’abolition octroyées à Jean de Vivonne, sr de Bougouin, chambellan du roi, pour les pillages, violences et tous autres excès dont il avait pu se rendre coupable pendant les guerres.

  • B AN JJ. 177, n° 224, fol. 148 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 331-333
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons, etc. nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre amé et feal chevalier et chambellan, Jehan de Vivonne, seigneur de Bougouyn1, [p. 332] aagé de xxxiiii. ans ou environ, contenant que dès xx. ans a ou environ il a frequanté les armes et a esté à plusieurs sieges qui ont esté tenuz, raencontres, exploiz et bonnes besongnes qui touchant le fait de noz guerres ont esté faictes de par nous sur les Anglois, noz anciens adversaires, sans avoir fait guerre à l’encontre de nous ni tenu autre parti que le nostre, et en lui voulentiers exposant en icelles guerres, soubz plusieurs noz chiefz. Et aucunes foiz estant avec noz capitaines de guerre, a frayé et despendu du sien largement et tant que souvent il n’eust peu bonnement entretenir son fait et estat, et aucuns compaignons sur les champs, [sinon] aux despens de nostre peuple et subgiez, pour ce qu’il n’avoit aucun aide, souldée ou bienfait de nous. Et en vivant ainsi sur les champs que dit est, ont fait ses diz compaignons de guerre, en sa presence et absence, et lui mesmes, en plusieurs parties et contrées de nostre royaume et sur nostre dit peuple et subgiez, plusieurs courses, pilleries, larrecins, roberies, destrousses, raençonnemens de biens, bestiaulx, gens, grains et labours, et ont prins et osté de fait et par force à plusieurs de noz diz subgiez leur or, argent, monnoyé et à monnoyer, et autres leurs biens quelzconques, qu’ilz ont peu trouver et apprehender, et fait d’aultres maulx et dommaiges, dont le dit suppliant ne se sauroit recorder, et [p. 333] pour ce il doubte que, à l’occasion des diz cas, malefices, crimes et deliz perpetrez par lui et ses diz gens, on lui puisse faire ou donner en son corps ou biens, ores ou pour le temps avenir, à requeste ou poursuite de partie, par rigueur de justice ou autrement, griefz, dommaiges, molestes, destourbiers ou empeschemens, et que miserablement il peust finer ses jours, se nostre grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, en nous humblement requerant, etc. Pour quoy nous, ayans regard aux services à nous faiz par le dit suppliant, en nos dictes guerres, et esperons qu’il fera ou temps avenir, avons quicté, remis, pardonné et aboly, etc., excepté toutesvoyes meurdre d’aguet apensé commis, boutemens de feux, violence et ravissement de femme et de filles et crime de sacrileige, que ne voulons en ce estre comprins, etc. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx conseillers les gens de nostre Parlement, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Chinon, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. xlvi, et de nostre regne le xxiiiie, après Pasques.

Ainsi signé : Par le roy, vous et autres presens. Chaligaut. — Visa. Contentor. E. Duban.


1 Second fils de Jean de Vivonne, seigneur de Bougouin et d’Iteuil, et de Marquise de la Rochandry. Son père vivait encore au milieu de l’année 1420. Il fut en procès au Parlement contre Guillaume seigneur de la Rochandry (ou de la Rochechandry), touchant le quart par indivis des terres d’Iteuil, Bougouin, la Jarrie, Mairé, etc. (Arrêt du 3 décembre 1412, Arch. nat., X1a 59, fol. 380), et plus tard contre Jean Larcher, bourgeois de Poitiers, et contre sa femme, Jeanne Sperlinton, au sujet d’une rente qu’il avait vendue à cette dernière, lorsqu’elle vivait avec son premier mari, Jean Guerin, dit Nau. (Arrêt du Parlement de Poitiers, le 25 mai 1420, X1a 9190, fol. 102.) Le fils aîné du sr de Bougouin et d’Iteuil était Antoine de Vivonne, qui fut décapité avec André de Beaumont, le 8 mai 1431, en conséquence d’un arrêt du conseil du roi rendu à l’instigation de Georges de La Trémoïlle. Ses biens, qui avaient été confisqués, furent rendus par Charles VII à ses deux frères, Jean seigneur de Bougouin (à qui sont octroyées les présentes lettres d’abolition) et François, par lettres du 7 octobre 1434, entérinées au Parlement de Poitiers, le 22 janvier 1435 n.s. (X1a 9194, fol. 88 v°). Le 5 mai 1434, Jean de Vivonne, chevalier, sr de Bougouin, Jean de Nozières, écuyer, et Jean Massart, poursuivis en matière criminelle par le procureur général et ajournés à comparaître en personne devant la cour, obtinrent d’être admis par procureur, à condition de se représenter à toute réquisition sub pena convicti, et, pour faire tous exploits et ajournements, ils firent élection de domicile à Poitiers, en l’hôtel de Pierre Desfriches. (X2a 21, à la date.) Le registre n’est pas plus explicite. On retrouve la trace de Jean de Vivonne en 1459. Il épousa Marie, fille de Laurent Vernon, seigneur de Montreuil-Bonnin, dont il eut Laurent, sr de Bougouin, Jean, sr d’Iteuil, et Nicole, mariée à Artus de Vivonne, seigneur de Fors.