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MLXI

Lettres d’amortissement, en faveur de l’abbaye de Notre-Dame du Pin, des lieu et hôtel de Bourg-Versé et du tiers du moulin Bourreau, [p. 165] en la châtellenie de Montreuil-Bonnin, le tout d’un revenu annuel de quinze livres, légué aux religieux par Geoffroy Bonin, bourgeois de Poitiers.

  • B AN JJ. 176, n° 212, fol. 157 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 164-168
D'après a.

Karolus, Dei gracia Francorum rex. Ad perpetuam rei memoriam. Cunctorum nobis subditorum potissime benemeritorum justis supplicacionibus inclinata, nostra regia majestas consuevit se reddere liberalem, maxime dum ad divina obsequia augmentanda et continuenda devota cordis intencione procedunt. Sane nobis expositum extitit per dilectos nostros religiosos, abbatem et conventum ecclesie et monasterii seu abbacie Beate Marie de Pino1, Pictavensis diocesis, regalis fundacionis existentis, quod nuper deffunctus Gaufridus Bonini2, civis Pictavensis, de [p. 166] propria salute cogitans, cupiens terrena in celestia et transitoria in eterna felici commercio commutare, eidem ecclesie et monasterio, pro certis divinis obsequiis ibidem celebrandis, ad sue et predecessorum suorum animarum salutem, locum et hospicium de Burgo Reverso in castellania de Monsterolio Bonini cum tercia parte unius molendini nuncupati de Bourreau, inter dictos exponentes et ipsum deffunctum, dum vivebat, communi, una cum juribus justicie et juridicionis, deveriis, revenutis et redditibus, pertinenciisque et appendenciis universis eorundem, legavit et donavit, ad valorem et extimacionem quindecim librarum turonensium annui et perpetui redditus. Quas quidem res sic legatas per dictum deffunctum ipsi ecclesie, dicti exponentes devotam intencionem ipsius deffuncti adimplere et in securitatem perpetuam observare cupientes, et in hoc quamplurima servicia per deffunctum ipsi ecclesie in vita sua facta recognoscere volentes, eidem ecclesie admortisare peroptant, ipsam admortisacionem, humiliter implorando, et cum hoc financiam que nobis, racione dicte admortisacionis, in Camera compotorum nostrorum vel alibi taxata atque moderata fuerit, super summa quingentarum quinquaginta duarum librarum turonensium aut alia ipsis exponentibus in recepta nostra ordinaria senescallie Pictavensis debita, propter arreragia quadraginta duarum librarum decem solidorum [p. 167] turonensium annui et perpetui redditus ecclesie dicte per predecessores nostros in dicta nostra recepta ordinaria jamdiu ordinata et assignata, capiendam et solvendam eisdemque deducendam et defalcandam requirentes.

Notum igitur facimus universis, presentibus et futuris, quod nos dictorum exponentium hujusmodi pium et devotum propositum in Domino commendantes, cupientesque piorum et sanctorum operum cooperantes existere, dictorumque divinorum serviciorum effici participes, dictum locum et hospicium de Burgo Reverso in prefata castellania predictamque terciam partem prefati molendini de Bourreau, cum juribus, possessionibus, deveriis, revenutis, redditibus, pertinenciis et appendenciis universis eorumdem, memorate ecclesie de Pino, de nostra certa sciencia, gracia speciali et auctoritate regia, admortisavimus et per presentes admortisamus usque ad dictam valorem et extimacionem quindecim librarum turonensium annui et perpetui redditus ; volentes et concedentes ut res et possessiones predicte et earum quelibet à dictis exponentibus et eorum successoribus tamquam admortisate et ad manum mortuam posite, usibusque divinis redditate à modo teneantur ac in perpetuum pacifice possideantur, solvendo tamen nobis semel propter hoc financiam moderatam. Quam quidem financiam, premissorum intuitu et consideracione volumus et ordinamus, et dictis exponentibus concessimus et concedimus, per dictas presentes, fore capiendam et per ipsos solutam in et super arreragiis predictis, sibi in dicta Pictavensi recepta nostra, ad causam dicti redditus annualis quadraginta duarum librarum decem solidorum turonensium jamdictarum debitis, ad exoneracionem et acquitacionem nostram ipsorum arreragiorum. Quocirca dilectis et fidelibus nostris gentibus compotorum nostrorum et thesaurariis, senescallo nostro Pictavensi ceterisque justiciariis et officiariis nostris, aut eorum locatenentibus, presentibus et futuris, et cuilibet [p. 168] ipsorum, prout ad eum spectaverit, mandantes quatinus nostris presentibus gracia, admortisacione, concessione, ordinacione et voluntate dictos exponentes et eorum successores uti et gaudere perpetuo pacifice et libere faciant et permittant, ordinacionibus, statutis, editis, revocacionibus, mandatis, deffensionibus et restrinctionibus, factis aut fiendis, ad hoc contrariis nonobstantibus quibuscunque. Quod ut firmum et stabile perpetuo remaneat, sigillum nostrum, in absencia magni ordinatum, presentibus litteris duximus apponendum. Salvo tamen in aliis jure nostro et in omnibus quolibet alieno. Datum Montisculis propè Turonis, in mense aprilis anno Domini millesimo quadringentesimo quadragesimo quarto, et regni nostri vicesimo secundo3.

Sic signatum : Per regem in suo consilio. Courtinelles. — Visa. Contentor. P. Le Picart.


1 Suivant la Gallia christiana, un Jean du Puy fut abbé de Notre-Dame du Pin, monastère de l’ordre de Cîteaux, en 1416, 1418, 1424, 1430 et 1446, sans renseignements plus précis ni indication de sources. (Tome II, col. 1351.) Ce qui est certain, comme on le verra plus loin, c’est que le 5 septembre 1445, l’abbé du Pin se nommait Jean. Les registres du Parlement de Poitiers contiennent quelques arrêts relatifs à cette abbaye. Un différend qu’elle avait avec l’abbé et les religieux de Saint-Cyprien de Poitiers, au sujet de certains droits à Bonneuil-Matours, fut réglé en sa faveur le 15 juillet 1419. (Arch. nat., X1a 9190, fol. 30.) Mentionnons encore un procès de l’abbaye du Pin contre Jean Berthonneau, marchand de Poitiers, touchant le droit de minage des blés vendus et mesurés dans la banlieue de Poitiers (Acte du 31 mars 1423 n.s., id. ibid., fol. 221 v°), et un autre contre frère Jean Tue, religieux de Saint-Jean-de-Jérusalem, précepteur de la commanderie de la Vausseau, auquel elle réclamait une rente de vingt setiers de blé, à la mesure de Montreuil-Bonnin. (Arrêt du 22 juin 1426, X1a 9191, fol. 33 v°.)

2 L’existence, dans la première partie du xve siècle, d’un notable bourgeois de Poitiers de ce nom est constatée par plusieurs documents authentiques. Dans un acte du 22 avril 1414, on voit que Geofroy Bonin était alors sénéchal du Bois-Pouvreau. (A. Richard, Arch. du château de la Barre, t. II, p. 30.) Le livre des hommages et aveux dus au dauphin Charles, comte de Poitou, dressé en août et septembre 1418, contient l’énumération des devoirs qui incombaient à ce personnage pour les menus fiefs qu’il possédait à Béruges et aux environs. (Arch. nat., P. 1144, fol. 20.) A cette époque, Geoffroy prenait le titre de procureur général pour Mgr le dauphin en la cour ordinaire de Poitiers. Une quittance de lui en cette qualité, datée de Poitiers le 2 janvier 1419 n.s., est conservée à la Bibl. nat. Il reconnaît avoir reçu de Jean Mérichon, receveur général de toutes finances tant en Languedoil qu’en Languedoc, une somme de 40 livres tournois dont le dauphin lui avait fait don pour les causes contenues dans ses lettres patentes du 22 décembre précédent. (Original, coll. des Pièces orig., vol. 404, v° Bonin, n° 6.) Il fut échevin de Poitiers en 1421. Un arrêt du Parlement du 6 mars 1423 n.s. nous fait connaître une contestation que Geoffroy Bonin avait eu à soutenir contre l’abbé et les religieux de N.-D. de Fontaine-le-Comte, et contre Guy Doucet, infirmier de cette abbaye, au sujet des arrérages d’une rente de seigle et des réparations qu’il était tenu de faire à l’hôtel du lieu de la Barbarière (s.d. les Bourballières), appartenant à l’infirmerie de ladite communauté. (Arch. nat., X1a 9190, fol. 213 v°.) Le 15 mars 1427 n.s., il était en procès avec les chanoines de Sainte-Radegonde de Poitiers. (Arch. de la Vienne, G. 1381.) Enfin, le 8 août 1430, il est nommé parmi les témoins qui furent présents au testament d’Herbert de Taunay, maire de cette ville. (Arch. nat., X1a 8604, fol. 98.)

3 En conséquence de cet amortissement, par acte passé en chapitre le 5 septembre 1445, Jean, abbé de Notre-Dame du Pin, en son nom et au nom des religieux, déclara que, par suite de conventions conclues avec la Chambre des comptes, il paierait pour toute finance, ou plutôt ferait abandon au roi des arrérages dus à l’abbaye d’une rente de 42 livres 10 sous tournois par an, qui lui était assignée sur la recette ordinaire de la sénéchaussée de Poitou. En outre, il se reconnaissait tenu à l’hommage lige pour l’hôtel du Bourg-Versé et le tiers du moulin Bourreau, mouvant du roi à cause de son château de Montreuil-Bonnin, et dont le revenu est estimé à 15 livres par an. Dans cet acte, rédigé en latin, les lettres du mois d’avril 1444 sont relatées avec précision et le nom du donateur est écrit Gaufridus Bonini très lisiblement. (Original scellé du sceau de l’abbé et de celui du monastère, Arch. nat., J. 426, n° 33.)