École des chartes » ELEC » Correspondance active des duc d'Angoulême, comte de Béthune et abbé de Préaux avec l'autorité royale » Présentation des différentes copies

Présentation des différentes copies

De nombreuses copies de la correspondance issue de cette ambassade ont été effectuées: il s'agit de compilations de toutes les pièces écrites lors de celle-ci, hormis les lettres écrites par un seul ambassadeur (la lettre de Préaux dans le manuscrit Dupuy 205 fait figure d'exception). Le contenu des différents manuscrits est globalement identique. Outre l'instruction donnée aux trois ambassadeurs par le roi lors de leur départ, on y trouve également les diverses instructions données aux divers messagers et agents envoyés par l'ambassade aux princes allemands et hongrois, une copie du traité d'Ulm ainsi que diverses pièces annexes (mémoires, relations, ...). L'essentiel des manuscrits n'en reste pas moins constitué par la correspondance active et passive des ambassadeurs que ce soit en direction de la France ou de leurs interlocuteurs allemands,impériaux ou hongrois. Ce travail de compilation n'a nul but d'érudition mais pour servir d'exemple mais de mémorandum diplomatique. Deux de ces manuscrits ont par ailleurs été constitués par Loménie de Brienne. Ils servent ainsi à renseigner sur le déroulement de cette négociation.

Les copies manuscrites s'éloignent peu des originaux, hormis les passages chiffrés (retranscrits sans mention d'un quelconque chiffrement) et les formules de politesse qui sont quelques fois abrégées, principalement dans le manuscrit français 3972. Toutes les copies hormis cette dernière sont manuscrits et sont conservés à la Bibliothèque nationale de France.

Toutes les copies ne s'appuyent pas sur les lettres originales. Aussi peut-on peut dresser le tableau de la tradition suivant:

  • fr. 3972: première copie, ou du moins la moins fautive. Hormis pour la tranche, en basane marron, il ne s'agit pas de reliure d'origine. Les plats du manuscrit ont été cartonnés à l'aide d'une page de garde de couleur avec motif de caillou. La tranche est décorée, outre le titre apposé sur un morceau de veau fauve, avec les lettres LP surmontées d'une couronne fermée. La reliure étant en très mauvais état, le manuscrit a été classé incommunicable en juin 2012.
  • NAF 7064: copie faisant partie de la collection Brienne constituée de papiers diplomatiques recueillis par Antoine de Loménie, secrétaire d'État sous Henri IV et Louis XIII. Elaborée à l'origine pour servir à l'éducation de son fils Henri-Auguste, elle réunit les documents les plus utiles aux hommes publics voulant étudier les affaires étrangères ou l'administration intérieure du royaume. Il a été aidé dans cette tâche par Pierre Dupuy, parfait connaisseur du Trésor des Chartes et des principaux dépôts d'archives de Paris et par Vallier, responsable de la transcription. Cette collaboration avec Pierre Dupuy permet d'expliquer les nombreuses correspondances avec le manuscrit Dupuy 205. Dès la mort d'Antoine de Loménie, son fils doit se séparer de cette collection; elle entre ainsi successivement dans la bibliothèque de Richelieu, dans celle de Mazarin puis dans celle du roi. Le manuscrit a été relié par Le Gascon en maroquin rouge aux armes de la famille de Loménie (un arbre de sinople, posé sur un tourteau de sable au chef chargé de trois losanges d’argent); deux lions servent de support et un heaume, surmonté d'une tête de lion, timbre l'écu. Le papier est orné d'un filigrane en forme de raisin orné au-dessus de la lettre D, et parfois en dessous des lettres S et C. Le manuscrit a été paraphé postérieurement (en 1652) par Petau et Pithou, conseillers d'Etat: «Paraphé par nous conseillers du roy en sa cour de Parlement, commissaires en cette partie suivant nostre proces verbal du quinziesme janvier mil six cent cinquante deux». Mais peu de traces de ces paraphes peuvent être trouvés au sein du manuscrit. Ces paraphes s'inscrivent dans le contexte de la Fronde: en janvier 1652, le roi mande au procureur général de ne pas vendre la collection Brienne comme tous les autres livres du cardinal, en raison de son intérêt historique et historiographique mais de la conserver chez le comte de Brienne pendant toute la durée des troubles. Les paraphes datent de ce séjour chez le comte de Brienne.
  • Dupuy 205: manuscrit constitué en 1630 par Pierre Dupuy. C'est vers 1630, même si certains le datent de 1635, que Pierre Dupuy, en charge de la bibliothèque royale, commence à mettre en ordre les pièces fugitives qu'il a sauvé de la destruction, la plupart du temps en réalisant des copies. Dans le cas du manuscrit 205, il peut s'agir d'un simple travail de copie soit depuis le dépôt d'archives où les lettres sont conservées soit à partir de documents donnés par Antoine de Loménie comme récompense pour son aide à la constitution de la collection Brienne. La reliure, constituée d'une tranche en maroquin rouge et de plats cartonnés, date de la fin du XIXe comme en atteste la mention en bas de la tranche: «J. Weber, 1873».
  • fr. 23560: constitué à partir du manuscrit NAF 7064. Ce manuscrit s'inscrit dans un ensemble plus grand (fr. 23559 à 23562) constitué d'instructions, pièces et lettres relatives à l'ambassade menée par le duc d'Angoulême: les trois copies présentes dans cet ensemble ne présentent que peu de différences entre elles. Cette copie a été réalisée sous la direction de Henri Auguste Loménie de Brienne: en cédant les volumes de son père (notamment le manuscrit NAF 7064), il en a profite pour retranscrire pour sa collection personnelle les volumes ljugés es plus intéressants. Relié en veau fauve, il est aux armes de Loménie de Brienne (six quartiers: lion des Brienne (2e et 3e quartiers), deux bœufs (1er et 4e quartiers), trois bandes (5e quartier), une croix alésée (6e quartier) et au coeur l'arbre de sinople, posé sur un tourteau de sable au chef chargé des trois losanges d’argent des Loménie). L'écu est surmonté par la couronne comtale et entouré par le collier de l'ordre du Saint-Esprit. La tranche de la reliure est décorée avec de nombreux entrelacs dorés. Sur le premier feuillet a été aposé le tampon du séminaire des missions étrangères, marque du passage du manuscrit dans leurs archives. La date d'entrée dans les archives du séminaire n'est pas précisée sur le manuscrit.
  • fr. 23561-23562: copie issue de l'ancien fonds des Minimes, très probablement ceux de Vincennes. Elle dispose d'une préface et d'un inventaire de toutes les pièces contenues dans le volume. La préface et les deux inventaires (un par volume) sont tous deux d'une autre main que la copie des lettres. Des changements d'écriture peuvent être observés au sein des lettres, notamment entre les pages 540 et 548. On retrouve cette écriture dans un autre groupe de feuillets, preuve que cette copie n'a pas été réalisée par un même copiste et surtout sur une même lancée. Les manuscrits sont reliés en veau fauve, sans armes sur le plat de la reliure; seule la tranche, fortement marquée par les nervures apparentes, est décorée avec des motifs dorés. La pagination est suivie entre les deux volumes.
  • fr. 7097-7098: copie assez fautive. Elle adopte la même partition en deux volumes que les manuscrits 23561 et 23562. Elle est reliée en maroquin rouge, sans armes sur le plat de la reliure. Elle s'inscrit dans un ensemble plus large de recueils et d'instructions diplomatiques (manuscrits français 7072 à 7119) issus de l'ancien supplément français. Elle contient également une table des matières (sans pagination cependant) ainsi qu'une préface retraçant les troubles qui ont conduit à l'envoi d'une ambassade.
  • fr. 23559: copie la plus incomplète et la plus fautive. Les dix-neuf premières lettres du corpus en sont absentes ainsi que d'autres lettres. Cette copie ayant été achetée par Du Bouchet en 1646, elle a été réalisée également dans la première moitié du XVIIe siècle. Elle est reliée en parchemin avec des nervures apparentes sur la tranche sur laquelle une partie du titre a été reportée sur un morceau de veau fauve en lettres d'or. Le manuscrit comporte de nombreuses annotations: elles corrigent le plus souvent les orthographes fautives mais elles ajoutent parfois des informations, notamment l'identification de certains personnages. Plus rarement elles essayent d'améliorer le style de rédaction des lettres. Enfin elle reprend la préface contenue dans les manuscrits français 7097 et 23561.

Deux autres copies manuscrites des pièces concernant l'ambassade du duc d'Angoulême ont été retrouvées mais n'ont pas été, pour l'instant, collationnées. La première se trouve aux archives du ministère des Affaires Etrangères (Correspondance politique, Autriche 12), la seconde aux National Archives (PRO 30/41/11).

Enfin, une copie imprimée a été effectuée. Mais au delà d'une compilation, elle s'apparente davantage à une réécriture des sources éditées. Ce travail éditorial a été mené par Henri de Béthune, petit-fils d'un des ambassadeurs, sous le titre de Ambassade extraordinaire de messieurs les duc d'Angoulesme, comte de Béthune et de Preaux Chasteau-neuf: envoyez par le roy Louis XIII vers l'empereur Ferdinand II et les princes et potentats d'Allemangne, en l'année MDCXX publié en 1667 par F. Preuveray à Paris avec privilège royal. La présente édition a été réalisée à partir de l'exemplaire conservé à la Bibliothèque nationale de France. Cependant de nombreux autres exemplaires sont conservés dans la plupart des bibliothèques européennes: österreischiche Nationalbibiothek, British library, bayerische Staatsbibliothek, Bodleian Library, bibliothèque vaticane et bibliothèque municipale de Lyon. L'ouvrage reprend dans l'ensemble les documents contenus dans les copies manuscrites, toujours sans mentionner la présence de chiffrement et y ajoute même certaines pièces dont la lettre n° 46. Une analyse approfondie des variantes privilégie les manuscrits français 23561-23562 comme points de départ, soit un des manuscrits les plus tardifs et peut-être les plus accessibles à Henri de Béthune lors de son travail d'édition. Certes les lettres 71 à 76 sont absentes de ces manuscrits alors qu'on les retrouve dans la copie imprimée, cependant toutes les variantes proposées par les manuscrits français 23561-23562 se retrouvent dans la copie imprimée. À ces nombreuses variantes, les deux manuscrits étant assez fautifs, la copie imprimée en ajoute de nombreuses de nature plus sémantique qu'orthographique ou grammaticale. Cette pléthore de variantes incite à les considérer non plus comme de simples variantes mais comme de véritables témoins d'une réécriture.