École des chartes » ELEC » Correspondance active des duc d'Angoulême, comte de Béthune et abbé de Préaux avec l'autorité royale » Instructions » Instruction donnée à monseigneur le duc d'Angoulême et messieurs de Béthune et de Préaux, ambassadeurs extraordinaires pour Sa Majesté vers l'empereur, princes et potentats d'Allemagne

Instruction donnée à monseigneur le duc d'Angoulême et messieurs de Béthune et de Préaux, ambassadeurs extraordinaires pour Sa Majesté vers l'empereur, princes et potentats d'Allemagne

. — Fontainebleau

1. Intervention française placée sous le signe de la défense de la foi. 2. Justification de l'entremise française pour faire comprendre le péril que représente un tel conflit. 3. Introduction des ambassadeurs et de leur mission: présenter aux deux parties les dangers du conflit pour la paix et pour la foi. 4. Solutions provisoires pour pouvoir venir à une paix durable. 5. Mission favorisant le parti catholique. 6. Volonté d'utiliser les dissensions entre luthériens et calvinistes pour tenter un rapprochement entre l’électeur de Saxe et l’empereur. 7. Itinéraire et personnalités à rencontrer lors de l’ambassade. 8. Médiation auprès de l’empereur: prévention des difficultés qui pourraient se rencontrer. 9. Question de l’électeur palatin. 10. Instructions à l’égard des princes protestants. 11. Bonne disposition des princes allemands à l’égard de la médiation. 12. Recommandation auprès de Baugy, résident français auprès de l’empereur.

Copies XVIIe siècle
  • l-I-B . BnF, fr. 3972: fol. 3r-23r.
  • l-I-C . BnF, NAF 7064: fol. 3r-17r.
  • l-I-D . BnF, Dupuy 205: fol. 2r-9v.
  • l-I-E . BnF, fr. 23560: fol. 2r-18r.

[1.] Ayant pleu à Dieu benir le regne du roy d'un soin continuel que Sa Majesté a heureusement employé pour bien faire au public et à ses amis et alliez en diverses occurrences qui se sont presentées en la chrestienté, nonobstant celles qui sont survenues dans le royaulme au grand desplaisir de Sadite Majesté que la bonté divine luy a fait la grace de surmonter avec la fidelle assistance de ses bons serviteurs et subjectz, jouissant à present d'un repos en apparence aussy certain et profond qu'aucun autre de ses voysins, elle a estimé ne pouvoir mieux reconnoistre un benefice tant signalé du ciel qu'au subject urgent et important qui s'offre aujourd'huy en Allemagne où il s'agist non seullement de la tranquilité et seureté publicque mais bien avant de la religion catholicque et par consequent du service et de la gloire de Dieu que Sa Majesté comme roy tres chrestien, premier filz de l'Eglise, digne imitateur de ses glorieux ancestres nay1, nourry et zeléa zelé, corrigé en elevé D à la vraye pieté desire maintenir et accroistre par les moyens de la creance et puissance qu'il luy a mis en main.

[2.] Sadicte Majesté a rendu preuve de ceste sienne affection et sollicitude royalle au fait qui se presente aub en E mesme temps qu'elle a preveu dès le commancement qu'il en estoit besoing ayant fait toutes sortes d'offices et d'effortz envers les antiens etc C D E Omis alliez de sa couronne pour prevenir les accidens divers que les apparences donnent juste cause d'apprehender, leur faisant remonstrer à tous comme pareillement à leurs fauteurs et adherens l'interest notable qu'ilz avoient d'estouffer le mal à sa naissance dans lequel ceux mesme qui soubz des esperances vaines de proffict se laissoient emporter à la passion des autres se trouveroient en fin enveloppez et compris au grand regrés de Sadicte Majesté pour la consideration de la concorde generalle et le benefice de ses amis et confederez.
Mais les affaires ont esté poussées sy avant par la jalouzie et l'd C D Omis alteration des espritz cultivées et accreues e si avant E de l'artifice d'aucunes que jusques icy toutes raisons et remonstrances ont esté peu fructueuses. Touteffois Sa Majesté pour satisfaire à elle mesme et à la cause commune ne se contente pas de n'y avoir obmis aulcun soin etf et de ce C ; ne D debvoir par la voye de ses amis et serviteurs ordinaires residents sur les lieux, elle a delliberé aussy sagement que charitablement d'y employer encor l'entremise de son nom royal par des ambassadeurs extraordinaires pour leur faire comprendre à tous avec plus d'eficace le trouble et peril certain et inevitable auquel la paix de la Germanie est preste à tomber sy par une prevoyance generalle un concert prompt et unanime les interessez ne s'efforcent de pourvoir à ce desordre et deposans les considerations privées n'embrassent vivement les publicques pour esviter de bonne heure un sy grand desastre et malheur.

[3.] C'est le seul subject qui meut le roy d'envoyer presentement en Allemagne le sieur d'Angoulesme collonel general de lag sa C D cavallerie legere et les sieurs de Bethune et de Preaux conseillers en son conseil d'estat qui l'ont ja utillement servy en plusieurs occasions où ilz ont esté honorablement emploiez pour y faire entendre à tous en general et à chasque electeur et prince en particulier catholicques et protestans les bonnes et droictes intentions de Sa Majesté eth et, corrigé en à D leur commung advantage et bien eti E Omis à la conservation de leur repos et liberté leur representer les disgraces infaillibles qu'ilz encoureront tous par la durée de ces dissentions: aux catholicques que la religion est en danger de s'y perdre s'ilz ne secourent la cause avec l'ardeur j et C D E l'union et la puissance qui sont jugées necessaires, aux autres qu'ilz donneront occasion ausditz catholiques tant dedans que dehors l'empire par la continuation de ce dessein de contribuerk continuer D avec leurs volontez et courages leurs forces et moyens pour garentir et deffendre l'estat et la religion ensemble; que tout ce jeu se jouera sur le theatre de leur patrie à leur confusion qui les jettera en misere et en mespris avec leurs voysins et amys; qu'il ne faut douter qu'aucuns d’iceux portez de considerations differentes ne prennent part à l'affaire, les uns par amtyé, les autres par creance, plusieurs par intherest qui les conserne ce qui sera tousjours accroistre leur calamité au lieu d'y mettre fin; que l'ennemy du nom chrestien profittera seul de ceste division lequel Sa Majesté est desja bien advertie se resjouir d'icelle l et C D y conforter le prince de Translvanye pour faire plus grand progrez, que s'il est tel qu'il ym C D E Omis puisse laissser espoir au grand seigneur d'y advancer ses affaires tout concoure en ce jugement qu'il n'en laissera perdre l'opportunité luy estant sy advantageus par l'asseurance qu'il a du costé de Perse que non seulement la cause de Dieu en celan C Omis les doit reveiller et faire penser à un accord raisonnable mais leur propre fait et l'esgard qu'ilz doivent avoir singulier à leurs biens, estats et fortunes qui partironto pattiront C E esgalement soit par une dissenssion civille ou par la fureur d'un sy puissant adversaire sy Dieu afflige tant la Germanie et les potentats d'icelle que de persister en cet aveuglement; que Sa Majesté ne doute point que tout cecy ne procedde d'une mesinteligence plustost que de cause aulcune qui ayt fondement certain mais laquelle volontiers est accreue et fomentée de ceux qui prennent plaisir et evident proffiter de leur affoiblissement; que c'est à ceux tous de se reveler eux mesmes et de considerer attentifvement (sans estre guide de la passion d'autruy) le fond et la veritép C D Omis de l'affaire, y apportans leur prudence et equanimité essayer par le moyen de leurs vraiz amis et les expediens qui seront proposez de se tirerq se retirer C D E de cet ambarras qu'aussy bien la necessité fera un jour ce que la raison et l'utilité publicque doivent maintenant operer qu'il en faudra venir à l'accord apres que les parties auront esté affoiblies, leurs moyens espuisez, leur creance descheue et leurs peuples las et recreuz de la longueur et misere d'une guerre civile; que toutes considerations divines et humaines doibvent à present desconseiller; que s'ilz souffrent les choses passer plus avant, il y a danger que les remedes qui sont jugez necessairesr salutaires C D E s ne C D deviennent inutilez par l'aigreur des espritz et la condition des affaires qu'il semble qu'elles ayent esté plustost portez à ces termes par malheur et impetuosité que par jugement out et C D consideration des motifz de ce trouble; que plusieurs se voyans par exemple se laissent engager à des effectz qui peuvent avoir une suitte perilleuse, partant qu'il est besoing d'entrer en connoissance du fait et l'examinant d'un sens rassis2 embrasser volontiers les moyens raisonnables qui peuvent conduire à l'accomodement en faisant que chacun se contente de la raison et donne ses pretentions et interests à la paix publicque de la chrestienté etu ce D qui ne doit et ne peut estre cogneu et consideré plus equitablement que par eux tous exhortez et aydez à ce faire par leurs sinceres amis non interressez qu'à leur bien, repos et conservation pour leur dessiller les yeux de ce que l'interest et l'artifice d'aucuns peuvent avoir imprimé en leurs espritz; qu'en la cause dont il s'agist il sera difficile à persuader que la religion et l'estat ne soient conjoinctz quoy que plusieurs pour desguiser leur dessein ne couchent3 que du dernier, deux puissants ressortz pour remuer la machine de l'Empire et luy faire esprouver des accidens calamiteux dont l'experience ne peut estre frequente; que Sa Majesté qui a tousjours eu soin de la cause publicque et a porté ces voeux et conseilz pour appaiser le trouble par tout où son credit a peu estre employé les prie et exhorte pour eux mesmes de rechercher avec autant de candeur que d'affection et celerité les voyes d'accord qu'ilz adviseront ensemble les plus convenables ou leur seront proposées par ceux qui interviennent en leurs differends avec ceste seule intention de les pacifier.

[4.] Mais d'autant que le plus asseuré moyen pour parvenir à ceste heureuse fin est la surceance d'armes et la cessationv C D E Omis de tous actes d'hostilité pour diminuer les occasions d'aigreur et donner loisir aux uns et aux autres de recognoistre avec plus de maturité le subject de ceste discorde en prevoyant les douteux evenements y cercherw rechercher C D E les remedes plus certains et propres, ce qui sera facile par le moyen d'une conference amiable de deputez des partyes principalles avec autres interessez et amis communs qui s'entremettent en leurs contentions. Lesdits sieurs ambassadeurs apres avoir desduit où il y aura lieu les inconveniens du contraire leur feront ouverture de cet expedient tant ausditz catholicques que aux protestans mettront peyne de la bien faire recevoir et advancer le plus tost qu'il leur sera possible, confereront avec eux des moyens de la faciliter et faire reussir afin que la disposition se trouvant en chacun particulier, elle soit plus aysée à moyenner pour le general ce qui sera un grand prejugé et acheminement à l'accord desiré d'autant que sy les partyes, comme elles doivent par interestz, y peuvent estre induites par raison, fortiffiées et conseillées dex par C D leurs alliez, il y a apparence d'en esperer un bon succez car non seullement la chaleur des courages sera alentie en ceste premiere pointe de leurs animositez, esmoussée durant ladicte suspention partant plus susceptibles de leur propre advantage, mais les moyens avec la volonté de se nuire seront restranchez que confortera cellecy à recevoir plus volontiers les propositions qui seront mises en avant.
Au moyen de quoy lesdictz ambassadeurs essayeront de toute leur industrie et pouvoir de faire agreer et juger par les partyes ce remede utile voire quasy necessaire pour porter les choses à l'accommodement à quoy faire ilz s'ayderont des autres entremetteurs en la cause qui font le devoir d'amis, les rendant capables eux mesmes du merite de cet expedient tant pour par ceste confiance les retenir de traverser ladicte ouverture comme ilz pourroient faire autrement poussez de jalousie que le roy acquist trop de gloire en ceste occasion que pour advancer plus commodement l'effect de ce dessein en le rendant agreable et commun aux mediateurs de ce differend car tant que les partyes disputeront par armes leurs droitz et griefz ne pourront esclairciry estre esclairciz C D E , les affaires empirent et ceux qui par exemple ou amityé se joignent à la cause sans estre informez du merite d'icelle estiment par honneur devoir continuer et ainsy se trouvent engagez et interressez à pousser les choses à l'estreme dont ensuivent les accidens difficiles à reparer. D'ailleurs encore que le moyen d'assemblée d'amis soit jugé propre par l'une des partyes et qu'elle ayt bonne volonté par ceste voye de sortir d'affaires, souvent elles sont retenues par reputation et autres considerations qui accompagnent les querelles de le mettre en avant voire l'approuver sy la proposition n'en est faicte par un tiers non interessé qu'au bien des partyes.

[5.] C'est pourquoy Sadicte Majesté se persuade volontiers qu'estant recogneue avoir les qualitez susdictes envers le publicq pour en avoir rendu tesmoignages frequens et notables, le party, comme il est raisonnable et salutaire, sera bien recu et agreable à plusieurs de la disposition desquelz lesditz ambassadeurs se serviront pour y porter les autres afin que les faisant unir et rencontrer en ce mesme dessein, ilz soient aussy plus preparez et enclins à celuy de l'accord que Sa Majesté recherche avec tant de solicitude. Mais d'autant que la diversité de religion, outre les raison susdites qui peuvent estre applicquées à tout requiert des considerations plus speciales pour ceux qui font profession de la religion catholicque, ilz auront soin pour les eschauffer davantage de leur faire comprendre le prejudice et danger qu'encourt ladicte religion catholicque par l'entreprise et le progrez trop prompt et heureux desditz protestansz potentats, corrigé en protestants D dont l'usage est commun apres avoir renversé le temporel s'addresser au spirituel qu'ilz ne peuvent maintenir et deffendre qu'en faisant contenance suivye d'effect s'il en sera besoin de repousser la viollence par la force secondez des autres amis interessez en l'affaire en cas que lesditz protestants conviez d'en venir à ladicte conference fissent refuz de s'y ranger ou y estans de s'accomoder à un party raisonnable. Et toutesfois ilz leur declareront franchement que tant s'en faut que l'intention de Sa Majesté soit d'yaa de C D E les engager à la guerre comme possible aucunes voudroient malicieusement soubçonner et leur faire accroire tant pour diminuer la creance de Sa Majesté que pour les tenir par ce moyen plus longuement en trouble qu'elle recherche par ceste voye le vray expedient de la faire cesser, n’y ayant aulcun doute tant que leurs adversaires les verront desarmez et irresolus ou foibles qu'ilz ne poursuivent leur pointe avec plus de chaleur et ne feront rien en cela que Sadite Majesté ores que4 moins proche du peril et des accidens apprehendez ne face le chemin et ne leur en montre l'exemple comme il parroist desja pour la consideration de la religion catholicque. Sur quoy ilz leur feront valloir la favorable declaration du roy en benefice de l'empereur et de la cause des catholicques en l'empire de laquelle ilz leur conseilleront de se prevaloir comme des offices que Sa Majesté employe pour advancer l'effect desiré par le moyen de ladite conference laquele sera d'autant plus aysement embrassée des autres que ceux cy sont en estat de se deffendre et d'empescher leurs attentats. Ilz y adjousterons aussy comme elle ne s'est pas contentée de cooperer de soin et de fait mais solicitée encores vivement le pape et les autres princes d'Italie d'accourir à la cause, elle y exhorte pareillement le roy d'Espagne et les autres princesab D Omis potentats catholicques d'accelerer leur ayde et assistance pour par telles demonstrations remettre au plustost les choses en une paissible assiette où estre en puissance non seullement de retenir lesditz protestans et ceux qui leur adherent, ains de rompre les entreprises d'iceux à leur dommage s'ilz refusent d'accepter des conditions equitables.

[6.] Mais Sa Majesté, qui ne veut rien oublyer qui puisse servir à l'affaire ayant eu advis que les lutheriens ne sont pas tous d'accord avec les calvinistes, ceux cy estans poussez avec plus de violence et qui ont porté les choses aux termes qu'elles se retrouvent, mesme que l'electeur de Saxe duquel les estatz et la personne sont considerez en l'empire fait plustost contenance d'estre favorable à l'empereur qu'à ses adversaires5, estime que telle occasion peut estre utillement mesnagée tant envers ledit electeur qu'à l'endroit deac qu'envers C D E ceux qui professent la religion lutherienne en essayant de les separer de l'Union et consert desdits calvinistes par les raisons de leurs propre intherest, ceux cy en tout le reste leur estans sy contraires et dead de, corrigé en à D la concorde publicque quiae qu'ilz C D se trouveront engagés insensiblement et sans dessing en une guerre civile dont les malheurs ne laisseront de leur estre communs avec les principaux autheurs et fauteurs de ce desordre. C'est pourquoy Sa Majesté estime les devoir prevenir par amityé, non pour laisser les autres en proye par ladicte separation qui seroit contre la bonne intention de Sa Majesté qui tend à les reunir tous pour leur commun benefice ains pour faciliter l'advancement de la paix qui leur est utile à conditions qui soient trouvées raisonnables. Aussy s'ayderont ilz du credit desdits lutheriens apres qu'ilzaf qui, corrigé en qu'ilz D leur auront representé ce qui conserne leur intherest pour induire lesditz calvinistes d'aggreer ladicte conference laquelle une fois accordée peut produire le fruict qui est souhaitté au bien et soulagement des uns et des autres. Mais devant que s'addresser à aulcuns desdits princes calvinistes ou lutheriensag D Omis , ilz mettront peyne d'estre esclaircis de sa religion comme de ses sentimens sur les affaires presentes afin de mieux reigler et faire recevoir les advis et conseilz de Sa Majesté, laquelle a entretenu sa creance avec les princes de l'union expres pour lesah ces C occurrences generalles pouvoir estre plus utille à elle et à ses amis comme à la cause publicque.

[7.] Lesdits sieurs duc et ambassadeurs seront chargez de lettres pour eux et seront quasy les premiers qui se rencontreront en leur chemin dont les noms leur seront baillez en un memoire à part aussy bien que le chemin qu'ilz doivent faire devant que visiter l'empereur lesquelz par la confiance que Sa Majesté a en leur affection et prudence, elle se persuade qu'ilz seront portez à la douceurai douleur D à terminer ces fascheuses contentions par la voye d'aimable communication, toute autre estant douteuse et dommageable à eux et à leur patrie que Sa Majesté affectione à l'exemple louable des roys ses predecesseurs et speciallement du feu roy son tres honnoré seigneur et pere qui a grandement travaillé pour les unir ensemble en intention d'empescher et non pour nourrir le trouble et faire en sorte que chacun demeure en possession de ce qu'ilaj qui C D luy peut appartenir avec justice et raison y adjoustant les autres considerations cy dessus desduites pour les rendre capables en cela de leur propre advantage.
Ils commenceront leur visiteak leurs visites C D E par monsieur de Lorayne auquel en luy presentant la lettre que le roy luy escrit et pareillement à monsieur de Vaudemont. Ilz diront le sujectal le faict D de leur envoy, sauront d'eux s'ilz sont recerchez par la ligue catholicque, ce qu'ilz prentendent y contribuer et leur exposant les declarations favorables de Sa Majesté pour la cause d'icelle prendront leurs bons advis et les inviteront am à C D E y apporter des effectz avec leur credit et offices pour le dessein projecté.
Ilz continueront leur chemin et s'il y a peu de distance pour visiter quelque autre prince en passant ilz le feront ensemble s'il est de telle consideration, sinon l'un d'eux accomplira seul cest office en la maniere prescripte par Sa Majesté et qu'eux mesmes sur les lieux jugeront estre la meilleure affin que par cest honnorable souvenir de la part de Sa Majesté, ilz prennent plus de creance en elle et aux siens pour faciliter l'execution de ladicte ambassade.
Ilz n'obmettrons semblablement passant par les villes imperialles qui favorisent le party desdits protestants et ont pouvoir à cause de leurs moyens et contributions de les visiter au nom de Sa Majesté et les asseurant de sa royalle bienveillance leur remonstreront les inconveniens de ceste dissention pour les convier de porter leurs voeuz et pouvoir au benefice de leur pais que Sa Majesté essaye de moyenner avec toute sorte de vigilance.
Le Roy de Dannemarck non plus que les villes ansiatiques ne se sont declarez jusques à present et non seullement peuvent estre retenues de ce faire. Mais il y a apparence que recerchées par leur interest elles voudront ayder à ce dessin d'accord par ladicte conference pour n'avoir part au danger ou à ce qu'il leur conviendra donner pour leur propre conservation. Mais d'autant qu'en peu de temps en semblables occurances les affections et affaires peuvent facilement changer, lesditz sieurs en prendront lumiere plus particuliere à mesure qu'il escherra des sieurs de Baugy et de Saincte Catherine residentz en Allemagne pour les servicesan le service C D du roy de la constitution d'icelles et de leurs presentes inclinations affin de mieux conduire les conseilz et intentions de Sa Majesté avec plus de reputation pour elle et de fruict pour ses amis.

[8.] Sa Majesté entend apres qu'ilz auront accomply les offices requis ès lieux où leur passage l'ordonneraao s'adonnera C D E et à l'endroit des personnes qu'ilz trouverons plus propres pour advancer ce dessein affin de les disposer quant ilz en seront recerchez à y condescendre, qu'ilz s'acheminent en la cour de l'empereur pour en premier lieu ainsy qu’il est accoustumé se conjouir au nom de Sa Majesté de son heureuse assomption à l'Empire laquelle bien qu'à present acocmpagnées d'espines et difficultez elle espere devoirap D Omis estre converties en contentement quand Dieu avec l'ayde de ses amis dedans et dehors la Germanie luy aura fait la grace de terminer ceste contention par voye d'amiable et honorable composition que Sa Majesté propose paraq pour C D E le moyen plus propre et promp et à son advantage qu'ilz ont charge de luy faire aggreer et en faciliter l'advancement, expedient qu'il sera conseillé d'embrasser et poursuivre pour se servir plus utilement tant de la demonstration de bonne volonté et forces de Sa Majesté que de celles des autres amys qui l'assistent en laar sa C D cause lesquelz auroient quelque occasion de degoust et refroidissement si Sa Majesté Imperiale resistoit à ceste ouverture et perdroit par consequent le temps opportun de s’advantager par une voye aussy commune en telles occurrences qu'utile à ceux qui en scavent sagement mesnager les effectz pour l'advenir.
Sa Majesté estime debvoir user de ceste precaution et conseiller ceste sage prevoyance sur ce qu'il peut advenir que les ministres d'Espagne qui ont grand pouvoir esloignez de leur maistre ou autre de sa maison mesme aulcuns des princes esclesiasticques et catholiques d'Allemagne cuidans par le concours de leurs associez estre puissants assez pour assailir lesdits protestants, se ressentir des choses passées et reffrener leur audace pour n'estre plus subjectz à sembables entreprises voudroyent employer lesdites forces avec celles de leurs amis en rejectant les ouvertures de la douceur. Ilz feront connoistre comme telz conseilz seroient hazardeux et dommageables à la cause publicque aussy bien qu'à la sienne; que Sa Majesté en est aussy aliéné et qu'elle le conforte à se prevalloir de syas des C D E favorables apparences pour moyenner un accord par la voye de ladicte surceance et conference, le fruit principal duquel sera tousjours que dellivré de tant d'anxietez et peines. Il pourra apres avoir restably son auctorité et remis les affaires en l'assiette qu'il convient prendre avec plus de loisir et maturité les conseilz sur le subject qui se presente que la qualité du temps et des rencontres luy dictera.
Lesdits sieurs duc et ambassadeurs l'informeront de la disposition en laquelle ilz auront trouvé lesdits electeurs et princes pour ce regard et conserterons avec Sadicte Majesté Imperiale ouat et C D E les siens comme ilz auront fait auparavant avec les autres princes catholiques et protestans des moyens de parvenir à la cessation d'armes pour donner lieu à ladite assemblée, devant la tenue de laquelle le roy sera adverty par eux de l'inclination dudit empereur, de celles des autres princes comme, s'il se peut, des expediens que l'on entendau attend D proposer pour plus facilement et justement pouvoir reigler les bons conseilz que Sa Majesté leur veut departir en ceste occurrence, sinon elle aura tousjours agreable ceux qui connoistront avec les autres amis les pouvoir mettre en paix et seront approuvez et bien receuz des parties puisqu'elle entreprend cette affaire simplement pour leur bien faire à tous.

[9.] Il est vray qu'elle prevoit qu'il sera difficile par douceur de faire desister monsieur l'electeur palatin de la possession qu'il a prise du royaulme de Boheme accompagnée dez honneurs et marques souveraines de la royauté. Aussy lesdits ambassadeurs n'entreront en ce particulier devant ladicte conference, crainte que les obstacles qui s’y rencontrent soient cause de retarder ceste action. Ains sy l'empereur ou ses ministres refusent d'entrer en pourparler devant que ledit electeur ait remis toutes choses en leur premier estat pretandant ses droitz et sa dignité y avoir esté notoirement blessées ilz luy en remonstreront les inconveniens et le priant de donner cela au public et à luy mesme luy feront cognoistreav recognoistre C D l'advantage qu'il en recueillera tant par l'assistance des associez que par ce qu'il justiffira ses intentions et desseins à la confusion de ses adversaires.
Et d'autant que Sa Majesté a fait refus de donner le tiltre de roy audit sieur electeur nonobstant qu'il luyaw ayt C escript plusieurs fois en ceste qualité et que d'autres de la religion catholique n'ont pas esté sy considerez à l'endroit de l'empereur et par consequent qu'elle ne peut trouver bon qu'ilz l'aillent visiter pour ne luy laisser ce desgoust ne luy donnant ce tiltre et d'ailleurs ne faire ce desplaisir et prejudice à Sa Majesté Imperiale, de quoy Sainte Catherine a eu charge d'exposer les raisons aux conseillers dudict electeur. Ilz se feront informer de luy de l'etat des affaires de Boheme, de la disposition dudit Pallatin et par son organe luy feront porter ce qu'ilz estimeront devoir estre representé sur le subject de leur commission pour en advancer les effectz ou et ainsy qu'ilz jugeront convenir.

[10.] Sa Majesté se persuade facilement que plusieurs princes de la religion protestante ne prendront plaisir à l'accroisement dudit electeur. Celuy de Saxe en est des premiers et d'autres qui comme electeurs favorisoientax favorisent C D ses desseins pour tenir les affaires en balance ne le feront sy volontiers en qualité de roy tant par emulation et jalousie de son pouvoir, que pour crainte que la creance des calvinistes odieuse à ay d' E aulcuns s'estende à leur detriment, ce qu’estant recognu dudit electeur comme il a jaaz il y a D E quelque suject de s'en deffier le rendra plus enclin à consentir ladicte communication et aux conditions qui seront en icelles trouvées raisonnable. Il ne faut douter pareillement que les appretz des princes et estats catholiquesba esclesiastiques E en mesmes temps dedans et dehors l'empire, la trefve faicte naguere avec le prince de Transilvanye et les estats du royaulme de Hongrie, la declaration de Sa Majesté de laquelle ilz ont desja le ventbb le bien E sinon l'entiere asseurance avec la monstre de ses forces ne soit bon argument pour le persuader joint qu'il ne recognoist point encore par effect que tous ceux qui pour l'embarquer à ceste entreprise luy avoient promis assistance l'ayent departie telle qu'il en a besoin pour soustenir l'effort et la duréebc le pouvoir, corrigé en duréee et l'effect E d'une guerre contre le pouvoir et les armes de ceux qui se tiennent offencez. Celuy sur lequel il avoit fait son fondement principal est le roy de la Grande Bretagne, son beau pere6, lequel plus ouvertement qu'aucun autre a blasmé son dessein mesmes nagueres au baron Daune7 que ledit electeur luy a deputé pour le rendre favorable soit qu'ilbd qui C E ne sebe le D trouve juste ou que par l'approbation d'iceluy il craigne d'estre engagé d'honneur à le seconder et prendre labf sa D part des peynes et despences qu’il en prenoit sagement. Tant y a que jusques à present quelques efforts d'industrie qu'il ayt emploiez, il n'a peu l'induire à aulcune declaration en sa faveur. Sa Majesté d'ailleurs luy fait donner part de cest sienne deliberation de porter les choses à un traicté amiable ce qu'elle estime qu'il fera contenance d'approuver comme il s'en est laissé aucunementbg librement E entendre Vtant pour avoir ce prextexte honneste et specieux de n'y engager sa reputation et moyens que pour l'apprehension qu'il aura quant il feroit le contraire de n'estre puissant assez pour empescher desbh les C D bonnes et sages deliberations de Sa Majesté et par consequent de l'honneur et advantage qui luy en reviendrontbi reviendroit C D . Ce n'est pas que le roy pour cause de religion et l'intherest de son gendre n'est bien agreable la prosperité dudit electeur et qu'en ce cas il ne luy donne la main couvertement et possible à descouvert s'il est inquiété par d'autres en sa nouvelle possession. Mais d'ailleurs il y a apparence pour les considerations susidctes qu'il embrassera plustost les expediensbj l'expedient C D d'un accord amiable.

[11.] Les autres princes, estatz et republicques de la Germanie dont plusieurs ont à desplaisir de veoir leur repos troublé comme aulcunes ont ja publié pour contenter les intherests privez seront bien ayse qu'un tiers puisant en dignité et creance s'entremettre d'accorder ces differends et luy presteront plus volontiers la main qu'il ne traverseront son entreprise quant avec cela ilz seront rendus capable par raisons publicques et celles de leur intherest comme lesdits ambassadeurs s'estudiront de faire avec soin et vigilance pour les destromper des impressions malignes que les factieux et brouillonsbk malins C D E s'efforcent de leur donner du dessein des catholicques comme sy s'estoient eux qui eussent meu la noise8 pour attaquer lesditz protestans et procurer leur ruyne; que s'ilz peuvent estre persuadez d'approuver ladicte suspention àbl et C la conference ensuitte, ceux bm de C D E dehors l'empire portez maintenant à la deffence des affaires de Boheme s'en pourront retirer doucement tant pour ne pouvoir soustenir seulz tout le fais de la guerre que pour ne s'exposer à la hayne publicque et à la revanche que la maison d'Autriche et ses adherans pourroient prendre avec opportunité de ladite assistance. Et comme lesdits princes unis ont ja prins allarme des preparatifs de guerre que fait Sa Majesté cebn et C D E qu'ilz pourront comme ilz ont faict de çabo de ça, corrigé en desja D par leur dernier envoyé s'enquerir desditz sieurs ambassadeurs de la cause etbp de C D ces amas de force, ilz pourront leurbq luy C D E faire entendre qu'il est decent et utile à un grand roy d'armer quant ses voisins sont en armes en intention de les employer où la justice et l'intherest public luy conseilleroit et sans leur declarer que ce n'est contre eux pour rendre plus proffitable son entremise, ne se mettront aussy en peyne de leur enlever le soubçon affin de les conduire plus facilement par quelque sorte d'apprehention au but que sa Majesté se propose de leur propre bien.
Monsieur le duc de Savoye a fait proposer au roy sa delliberation de servir l'empereur de ses forces, mesmes de sa personnes pourveu que Sa Majesté Imperiale le veuille honorer du tiltre de Roy et encore de son allience priant Sa Majesté de favoriser son desir et dessein envers ledit empereur. Elle l'a conforté en ceste resolution asseuré que pour ce qu'il l'a fait requerir, elle y employera volontiers ses offices par ses ambassadeurs partant sy ceux dudit duc s'addressent à ceux de Sa Majesté ilz luy departirontbr repartiront E avec la discretion qu'il convient toute bonne assistance principallement au fait dudit mariage9 s'ilz recognoissent ledit empereur en l'estat qu'il se retrouve avoir inclination à se marier et que ladite ouverture ne luy bs soit D desagreable et pour le regard debt du C D tiltre du Roy, ilz s'y rendront plus considerez sans toutesfois que les autres ayent subject de se douloirbu doubter D en cela de leur retenue.

[12.] Le sieur de Baugy est employé depuis vingt ans en Allemagne pour le service du Roy, y a acquis bonne cognoissance des affaires enbv de D l'empire et pourra utillement assister de ses bons advis et conseilz lesdit sieurs ambassadeurs en toutes occurrences qui se presenteront. Aussy quand il se trouvera en lieu avec eux où ilz negocieront suivant leur pouvoir et commission, il y sera admis et pour la confiance que Sa Majesté a en sa loyauté et capacité ilz luy communicqueront sesbw les E intentions et commandements desquelz bx ils C D E sontby seront D chargez afin qu'il les sache mieux et plus seurement secourir de ce qui est de son intelligence car comme Sa Majesté a entrepris cet ouvrage soubz l'espoir que Dieu qui cognoist son coeur et son zele aussy ardent que sincere en benira le succez, aussy se repose elle fidellement sur l'affection, vigilence et sage conduicte de ceux qu'elle a choisis pour la servir en ceste occasion aussy importante à la gloire du tout puissant et au repos public de la chrestienté comme à la grandeur et reputation de Sa Majesté et qu'ilz sauront tellement menager avec jugement et addresse les sainctes intentions et conseilz salutaires de Sa Majesté; que le publicq luy sera redevable de ce devoir chretien, ses amis et alliez d'un office aussy cordial qu'utile, eux de l'honneur et de la grace qu'ilz en auront receue soubz son nom et auctorité qu'elle accompagnera encore volontiers où il eschevra d'une favorable recognoissance digne de leurs qualitez et services.

Louis

Brûlart


a zelé, corrigé en elevé D. b en E. c  C D E Omis. d  C D Omis. e si avant E. f et de ce C ; ne D. g sa C D. h et, corrigé en à D. i  E Omis. j et C D E. k continuer D. l et C D. m  C D E Omis. n  C Omis. o pattiront C E. p  C D Omis. q se retirer C D E. r salutaires C D E. s ne C D. t et C D. u ce D. v  C D E Omis. w rechercher C D E. x par C D. y estre esclairciz C D E. z potentats, corrigé en protestants D. aa de C D E. ab  D Omis. ac qu'envers C D E. ad de, corrigé en à D. ae qu'ilz C D. af qui, corrigé en qu'ilz D. ag  D Omis. ah ces C. ai douleur D. aj qui C D. ak leurs visites C D E. al le faict D. am à C D E. an le service C D. ao s'adonnera C D E. ap  D Omis. aq pour C D E. ar sa C D. as des C D E. at et C D E. au attend D. av recognoistre C D. aw ayt C. ax favorisent C D. ay d' E. az il y a D E. ba esclesiastiques E. bb le bien E. bc le pouvoir, corrigé en duréee et l'effect E. bd qui C E. be le D. bf sa D. bg librement E. bh les C D. bi reviendroit C D. bj l'expedient C D. bk malins C D E. bl et C. bm de C D E. bn et C D E. bo de ça, corrigé en desja D. bp de C D. bq luy C D E. br repartiront E. bs soit D. bt du C D. bu doubter D. bv de D. bw les E. bx ils C D E. by seront D.

1 Comprendre: né.
2 Examiner d'un sens rassis: examiner sagement et avec connaissance.
3 Coucher: mettre en jeu.
4 Ores que: quoique, même si.
5 Si le duc de Saxe, luthérien, a tenté à plusieurs reprises, déjà pendant le règne de Matthias, de mettre en place une médiation entre les différents partis, il tend désormais à pencher du côté de l'empereur, notamment en obtenant lors de l'assemblée de Mülhausen la garantie que les électeurs catholiques ni l'empereur ne chercheront à reconquérir les domaines ecclésiastiques sécularisés dans les cercles de Basse et Haute Saxe.
6 L'électeur palatin est marié depuis 1613 à Elisabeth Stuart, première fille de Jacques Ier d'Angleterre.
7 Personnage non identifié.
8 Noise: démêlé, querelle.
9 Victor-Amédée, fils du duc de Savoie, a épousé Christine de France, soeur de Louis XIII, le 10 février 1619.