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DVIII

Don à Louis de Maillé de la forteresse du Puy-Milleroux qui appartenait à Louis d'Harcourt, vicomte de Châtellerault, partisan de l'Angleterre. Le sieur de Maillé s'était emparé lui-même de cette forteresse.

  • B AN JJ. 102, Musée AE II* 391, n° 259, fol. 86
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 19, p. 97-99
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, que nous, considerans les bons et agreables services, les quelz nostre amé et feal Loys de Mailly1, chevalier, nous a faiz en [p. 98] pluseurs manieres, et par especial en ce qu'il a pris nagaires et miz à nostre obeissance la forteresce appellée le Peu Millerou estant ès frontieres de Guyenne, la quelle estoit de Loys de Harcourt, chevalier, nostre ennemi et rebelle, en la quelle prise le dit Loys de Mailly a grandement fraié et despendu du sien, et s'est mis en grant aventure de son corps et fait mettre ceulz de sa compaignie, eu aussi regart à la grant loyaulté et affection qu'il a monstré lui avoir envers nous et esperons qu'il monstre ou temps avenir, à ycellui de Mailly avons donné et donnons, de nostre auctorité royal et grace especial, par ces presentes, la dite forteresce et toutes les rentes, revenues, droiz, proffiz et emolumens qui à icelle appartiennent, en quelque maniere que ce soit, à avoir et tenir ycelle forteresce et toutes les appartenances dessus dictes par lui, ses hoirs, et successeurs perpetuelment. Toutesvoies il n'est pas nostre entencion que, se le dit Loys de Harecourt venoit à nostre obeissance et que la dite forteresce lui fust rendue et restituée par nous en aucune maniere, nous doions ou soions tenus faire recompensacion aucune pour ceste cause au dit Loys de Mailly. Et encores d'abondant avons voulu et octroyé, voulons et octroions, de nostre auctorité royal et grace especial dessus dite, que pour aidier à garder, maintenir et defendre la dite forteresce contre nos ennemis, et la tenir à nostre dite obeissance, que le dit Loys de Mailly puisse avoir, lever et recevoir, jusques à la Toussainz prochaine venant tant seulement, les raençons du païz, qui estoit raençonné à la dite forteresce. Si donnons en mandement par ces presentes au seneschal de Tourainne et à tous noz autres seneschalz, bailliz, officiers, justiciers et subgiez, ou à leurs lieux tenans, presens et avenir, et à [p. 99] chascun d'eulx, si comme à lui appartendra, que le dit Loys de Mailly il mettent et instituent de par nous, se mestiers est, en possession et saisine pour lui, ses hoirs et successeurs, de la dite forteresce, rentes, revenus et appartenances dessus dites, et en ycelle les gardent et maintiennent et de nostre presente grace les facent, laissent et sueffrent joir et user paisiblement, senz les molester ou empescher ou souffrir estre empeschez ou molestez en aucune maniere, en remettant et faisant remettre au premier estat et deu tout ce qui pour le temps avenir aura esté fait, comment que ce fust, au contraire. Et afin que ce soit ferme chose, etc. Sauf, etc. Donné à Paris en nostre chastel du Louvre, l'an de grace milccc. lxxi. et de nostre regne la viiie, le derrenier jour du mois d'avril.

Ainsi signé : Parle roy. J. Tabari.


1 Au début de la guerre, Louis de Maillé avait obtenu du roi le don de tout ce qu'il pourrait conquérir sur les Anglais en Guyenne, sauf les villes fermées (voy. la première pièce de ce volume). Froissart raconte la part qu'il prit à un fait d'armes important, vers la fin de l'année 1371. Guillaume de Longval, Alain de la Houssaye et Louis de Maillé, à la tête d'une troupe de Bretons, s'emparèrent de la forteresse de Montpont (Dordogne), « un castel merveilleusement fort ». Ils furent, quelque temps après, obligés de le rendre, à la suite d'un siège de plus de onze semaines dirigé par le duc de Lancastre, où ils firent preuve d'une grande bravoure. Maillé, grâce à son attitude énergique, obtint une capitulation honorable de Guichard d'Angle, chargé par le duc, irrité de cette longue résistance, de traiter de la remise de la place entre les mains du sire de Mussidan, qui en fut nommé capitaine. (Édit. Kervyn de Lettenhove. t. VIII, p. 63, 64, 66, 74 et 75.) La Chronique normande, qui rapporte le même fait, dit que la garnison française composée de Bretons était commandée par Foulque Boules, sire d'Assi (lisez Riboule, seigneur d'Assé, vol. précédent, p. 239 note) et Silvestre Budes (édit. A. et E. Molinier, p. 200). Elle ne parle pas de Louis de Maillé. Ce personnage était vraisemblablement un cadet de l'illustre maison tourangelle de Maillé, bien que l'on ne sache à quelle branche le rattacher. Le P. Anselme fait précéder la généalogie de cette famille de personnages isolés portant ce nom, parmi lesquels on trouve Louis de Maillé, chevalier, qui donna quittance à Limoges, le 14 juillet 1380, à Pierre Couchon, trésorier des guerres, de 270 livres pour ses gages et ceux de deux autres bacheliers de sa compagnie. Elle est scellée en cire rouge d'un sceau « anté et fascé de six pièces, brisé d'une bande ». (Acte du cabinet Clairambault, cité dans l'Hist. généal de la maison de France, t. VII, p. 498.)