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DXLV

Confirmation du traité de soumission au roi Charles V conclu avec les habitants des îles de Ré et d'Aix, sujets des sires de Craon et de Thouars et de l'abbé de Saint-Michel-en-l'Herm, par Jean de Rye et Morelet de Montmor.

  • B AN JJ. 103, n° 379, fol. 183
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 19, p. 243-251
D'après a.

Charles, par la grace de Dieu, roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, que, comme en la prise ou rendue des yles de Ré, d'Ays et de Leis du pays de Xantonge, qui nagaires, par la grace de Dieu et l'ayde de noz bien amez Jehan de Rie, seigneur de Balençon1, [p. 244] nostre chevalier et conseiller, de Morelet de Montmor2, et d'autres leurs alliez noz. bien vueillans, sont revenuz et ramenez à nostre obeissance et subjection, certaines promesses aient esté faictes par les diz nostre dit conseiller et Morrelet de Montmor, pour nous, aus habitans des dites yles, ou aucuns d'eulx pour touz, par la manière que plus à plain est contenu en unes lettres scellées soubz les seaulx du dit nostre conseiller et du dit Morrelet, des quelles la teneur s'ensuit :

[p. 245] A tous ceulx qui ces presentes lettres verront et orront, Jehan de Rie, seigneur de Balençon, chevalier et conseiller duroy nostre sire, et Morrelet de Montmor, salut. Savoir faisons que en nostre venue ès parties de Xaintonge pour conquerre, au plaisir de Dieu, le païs par fait de guerre ou autrement, et ycellui elle peuple illec habitant convertir et mettre à la subjection et obeissance du roy nostre sire, ainsi comme par raison estre doivent, nous sommes arrivez et descenduz ès ysles de Ré, d'Ais et de Leis, du dit païs de Xaintonge, et après ce que nous et les habitans ès dites ysles eusmes eu assez debaz, par fait de guerre et autrement, les diz habitans requirent avoir parlement à nous, et nous distrent que l'une partie d'iceulx des dictes ysles estoient subgez de noble homme messire de Craon et de madame de Touars3 sa femme, et les autres estoient subgez de l'abbé et convent de Saint Michau en Lers4, [p. 246] et à eulx, ou autres personnes aiant povoir souffisant d'eulx et de chascun d'eulx, selon ce que à lui appartenoit, avoient fait foy et serement de leur estre bons, vraiz et loyaux subgez, soubz l'obeissance du roy d'Engleterre et du [p. 247] prince, son aisné filz, sens eulx en departir en aucune maniere ne rendre les forteresses de la dicte ysle à quelconques personnes, fors à eulx, ou à leur certain commandement, selon ce que à un chascun d'eulx appartenoit, sans leur congié et licence et especial commandement, et que dure chose leur seroit eulx vertir et tourner en autre obeissance, sans autre provision et dispensacion avoir sur ce des diz sire et dame de Craon et du dit abbé. Et pour ce, après les diz debaz, nous et les diz habitans et biens aians ès dites ysles, avons fait les convenances et accordances qui s'ensuivent :

Premierement, les diz habitans et biens aians, pour eschever toute guerre et le peril qui, pour raison de la guerre, leur povoit ensuir, se sont mis et renduz en l'obbeissance du roy nostre sire, et ont juré et promis aux sains ewangilles de Dieu en noz mains, nous prenans et recevans le serement, pour et ou nom du roy nostre dit seigneur, que ils seront et demourront perpetuelment doresenavant bons, vrais et loyaux françois et subgez du roy, nostre dit seigneur, et en son obbeissance, et en nostre presence ont prins la voix du roy, nostre dit seigneur, et mis ses penons et bannieres ès forteresses des dites ysles, parmi ce que nous leur avons promis, convenancié et accordé, promettons, convenançons et accordons les choses qui s'ensuient. Et premierement, que le dit serement par eulx fait aus diz seigneur et dame de Craon et au dit abbé, comme dessus est dit, nous leur ferons quictier entierement par le roy, nostre dit seigneur, et leur ferons quittier et remettre toute peine corporele, criminelle et civille que, pour cause du dit serement non gardé, ils pourroient avoir encouruz vers le dit seigneur et dame de Craon, et vers le dit abbé et vers chascun d'eulx, en tant comme il lui touche et puet toucher et appartenir.

Item, que les prouffis et emolumens, revenues et drois. [p. 248] qui appartenoient et appartiennent aus diz seigneur et dame de Craon et au dit abbé, et à chascun d'eulx en droit soy, leur demourront enterinement, toutevois en faisant les diz seigneur et dame et le dit abbé l'omage et le devoir qu'il sont tenuz de faire au roy nostre seigneur pour raison des dictes yles, chascun endroit soy, de la seignourie qui lui appartient.

Item, et que nous ferons les diz habitans et bien aians estre tenuz et traictiez par le roy nostre dit seigneur, et les tendrons et traicterons comme ses bons, vrais et loyaux subgez, sans ce que pour la rendue que ils ont fait au roy nostre sire des dictes ysles, ou pour ce que ils se sont mis en sa subjection et obeissance, ne pour autre cause quelconques, l'en leur prengne leurs corps ne leurs biens, ne leur face aucun grief ou prejudice, en aucune maniere.

Item, que se les diz habitans et biens aians, ou aucuns d'eulx ont fait, perpetré ou commis ou temps passé aucuns crismes ou autres deliz, pour occasion des quelz eulx ou aucuns d'eulz eussent encouru aucune peine corporelle, criminele ou civille, tant pour raison de crime de lese majesté, de murtre, de larcin, d'encendiment et de ravissement, de violence ou de rapine, comme de autres cas quelconques, criminelz ou civilz, des quelz il eussent eu remission, ou temps passé, du roy nostre sire ou d'autres seigneurs quelconques, aians povoir à ce, que nous leur ferons les dictes remissions estre confermées par le roy nostre dit seigneur, et se remission n'en avoient eu, nous les leur ferons estre données de nouvel plainnieres par nostre dit seigneur, sauf le droit d'autrui à poursuir civilement tant seulement.

Item, que eulx et chascun d'eulx demourront et seront gardez en touz les previleges, franchises, possessions, saisines et observences [qui] leur seront gardeez entierement, sens aucune chose enfraindre, muer ou innover, pour raison de ce que il ont esté en l'obbeissance du dit prince [p. 249] et contre le roy nostre sire, ne par puissance desordonnée ne autrement, pour quelconques raison que ce soit, mais se aucune chose a esté faicte, attemptée, muée ou innovée au contraire, nous leur ferons estre ramené au premier estat et deu, sans ce que en aucune maniere il leur puist estre tourné à consequence.

Item, que conjointement et deviseement ils seront en la protection et sauvegarde especial du roy nostre sire, seellée en laz de soye et cire vert, sans ce que de la dicte sauvegarde ils se puissent aidier l'un contre l'autre en aucune maniere.

Item, que l'en ne pourra mettre aucun capitaine ou capitaines, ou gens d'armes ès forteresses des dictes ysles ne en aucune d'icelles, sans la voulenté et consentement des diz habitans et bien aians, toutevoies se ce n'estoit pour raison de neccessité, pour la garde et deffense des dictes ysles et du pays d'environ, selon la coustume ancienne.

Item, que l'en ne contraindra les diz habitans ne aucun d'eulz à faire ost ne chevauchée, ne à issir hors du pays par mer ne par terre, sinon selon la coustume encienne des dictes ysles.

Item, que l'en ne mettra ès dictes ysles aucune imposicion ou subvencion, sens le consentement des diz habitans et bien aians, se la dicte imposicion n'estoit accordée par tout le royaume de France ou en la seneschaucie de Xanctonge, tenuz et gardez sur ce les previleges, usaiges et anciennes coustumes des ysles.

Item, que l'en ne fera aucune provision estre faicte ès dictes ysles par nulz capitaines, seneschaux ou autres officiers ou commissaires du roy nostre sire, ne par autres personnes quelconques par mer ne par terre, se non en paiant comme de marchant à marchant, et selon la coustume ancienne des roys de France.

Item, que se aucuns des diz habitans et bien aians, de quelconques estat ou condicion que ils soient, estoient ou [p. 250] sont absens des dictes ysles, et ne aiant esté presens à ces presentes convenances, que pour ce il ne leur tournera à aucun prejudice, mais seront compris ès dictes convenances et auront licence de retourner ès dictes ysles jusques au terme de Noel prouchain venant et que, durant le dit temps, ils et chascun d'eulx pourront aler seurement par les dictes ysles et par touz les autres lieux du royaume de France, sans ce que pour ce l'en leur puist arrester leurs corps ne leurs biens en aucune maniere, ne que pour l'absence d'eulz ès dictes ysles, leurs biens puissent estre confisquez et acquis au roy nostre sire, ne à autres quelconques.

Toutes les quelles choses dessus escriptes et chascunes d'icelles nous leur avons promis et juré, promettons et jurons de leur estre tenues et faire estre gardées à nostre povoir, sans enfraindre par le roy nostre dit seigneur et de leur en faire estre données, à nostre povoir, lettres seellées en laz de soye et en cire vert, si bonnes et si prouffitables comme faire se pourront à leur prouffit. Et ainsi nous et chascun de nous, en tant comme à lui appartient ou puet toucher et appartenir, toutes les choses dessus dictes et chascune d'icelles tendrons et garderons bien et loyaument, et ferons estre gardées par ceulx des dictes flotes et par chascun d'eulx inviolablement, sans enfraindre. En tesmoing de ce, nous avons fait mettre noz seaulx à ces lettres. Donné en l'Isle de Ré, le xxvie jour d'aoust l'an de grace mil ccc. soixante et douze.

Nous, pour consideracion des promesses que yceulx nostre conseiller et Morlet ont faites pour nous aus diz habitans, et la vraye obeissance que yceulx habitans nous ont demonstrée, en ce que si begninement sont retournés par devers nous, voulans pour ce les dictes promesses estre gardées et tenues, afin que les habitans des dictes ysles soient plus estrains et enclins de demourer touzjours en nostre subjection et obeissance, icelles voulons, loons, [p. 251] approuvons, accordons, greons et ratifions et, par ces presentes, de nostre certaine science et grace especial, confermons. Donnans en mandement au seneschal de Xantonge et à touz noz autres justiciers, officiers ou commissaires, qui ad present sont et pour le temps avenir seront, et à leurs lieuxtenans et à chascun, pour tant comme à lui appartiendra, que les diz habitans des dictes ysles, ou aucun d'eulx ne contraignent ou seuffrent estre contrains en aucune maniere contre la teneur du dit traictié et promesses, ores ne ou temps avenir, mais de ce les facent et seuffrent joir et user paisiblement, sens empeschement aucun, en remettant au premier estat et deu tout ce qui fait seroit ou auroit esté au contraire. Et que ce soit chose ferme et estable à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l'autrui en toutes. Donné à Paris, en nostre chastel du Louvre, l'an de grace mil ccc lxxii. et de nostre regne le ixe, ou moys de decembre5.

Par le roy, en ses requestes. Hannequin.


1 Jean III de Rye (telle est l'orthographe la plus ordinaire de son nom), fils de Jean II et d'Antoinette de Salins, appartenait à une des plus anciennes maisons de Bourgogne. La terre de Balançon, qu'il tenait de sa mère, resta dans sa famille jusqu'au milieu du xviie siècle que s'éteignit la branche aînée. Jean III avait épousé Yolande de Bel voir, dont il eut deux fils, et fit son testament en 1384. (Voy. sa généalogie dans Moréri, Le grand Dictionnaire hist., t. IX, p. 445 ) Parmi les actes qui le concernent, nous citerons deux, quittances de gages, l'une datée d'Amiens, le 11 novembre 1355, pour services de guerre non spécifiés, l'autre, d'Autun, le 16 mars 1376 n. s., à la poursuite des routiers. (Bibl. nat., ms. Clairambault, reg. 95, p. 7377, 7379 ;. Dans un autre acte du 12 novembre 1380, il est question d'un voyage qu'il venait de faire en Espagne. (Id. ibid, p. 7381.) Sur cette mission, cf. le Religieux de Saint-Denys, t. I, p. 427, 441. Les sceaux apposés au bas de ces trois actes représentent un écu à l'aigle, penche, timbré d'un heaume cimé d'un vol. Les supports sont tantôt deux lions, tantôt deux aigles.
Jean de Rye était, avec Jacques et Morelet de Montmort, l'un des principaux chefs de la flotte française placée sous le commandement d'Owen de Galles, et dont les exploits pendant les mois de mai, juin, juillet et août 1372 et jusqu'à la prise de la Rochelle (8 septembre), sont rapportés par Froissart et son savant commentateur M. Luce (voy. t. VIII, p. xxvii-xxxii). La prise de Ré, dont la date (26 août) est fournie par le traité publié ici, forme un épisode de cette expédition maritime, épisode que notre chroniqueur a passé sous silence. Jean de Rye rendit encore des services d'un autre ordre aux rois Charles V et Charles VI. M. Douët d'Arcq a publié dans son Recueil de pièces inédites sur le règne de Charles vi (tome I, p, 6), les instructions données à l'évêque de Langres et à Jean de Rye, envoyés en 1380 en ambassade vers le comte de Foix. En 1384, ce dernier était chambellan de Philippe le Hardi et gouverneur du comté de Bourgogne. Selon Froissart, il fut tué en Espagne à la bataille d'Aljubarrota, 1385. (Edit. Kervyn de Lettenhove, XI, p. 180, 316.)
2 Le 19 juillet 1372, le nom de Morelet de Montmor figure, dans une quittance de gages d'hommes d'armes. Le 12 mai 1387, on le retrouve qualifié de chevalier, capitaine du château et bastide du Louvre, et le 1er juillet 1388, châtelain et concierge du château du Louvre. Les sceaux apposés au bas de ces trois actes portent exactement les mêmes armoiries : écu parti de plains à la bordure engrélée, penché, timbré d'un heaume cimé d'une tète d'homme coiffé d'un bonnet, supporté par deux lions ; dans le champ deux M. (G. Demay, Invent, des sceaux de la coll. Clairambaull, t. I, p. 674.) Morelet était le frère de Jacques de Montmor qui fut capitaine et gouverneur de la Rochelle, de 1374 à 1380. La mention de son institution en qualité de gouverneur de la Rochelle et des pays d'Aunis, de Saintonge et d'Angoumois est consignée, à la date du 27 juillet 1374, dans les Mémoriaux de la Chambre des comptes. (Arch. nat, P. 2295, p. 193.) Le même registre contient la donation de l'île d'Oléron faite par le roi, le 23 mars 1373 n. s., à Jacques et à Morelet de Montmor. (Id. p. 117.)
M. S. Luce a découvert aux Archives nat. le compte détaillé des dépenses des deux frères, depuis le 2 juillet jusqu'au 16 décembre 1372. Ce document important permet de contrôler le récit de Froissart en ce qui touche l'expédition maritime d'Owen de Galles, le combat de Soubise (23 août) où furent pris le captal de Buch et Thomas de Percy, victoire à laquelle Jacques et Morelet de Montrnort prirent une large part, et les difficultés auxquelles donnèrent lieu la garde de Jean de Grailly que les Espagnols disputaient aux Français. Les deux frères tinrent le captal enfermé dans une galée mouillée à Oléron, du 23 août au 12 septembre, puis ils le conduisirent à Paris sur l'ordre du roi ; mais ils restèrent avec leur prisonnier environ six semaines à Saint-Maixent, en attendant le connétabl. Ils arrivèrent à Paris le 11 décembre, et gardèrent encore Jean de Grailly pendant dix jours (Luce, édit. de Froissart, t. VIII, p. xxviii, note 1, p. xxxvii, note 2, xlvi, note 2, et Arch. nat., J. 475, n° 100).
Jacques de Montmor accorda, en qualité de gouverneur de la Rochelle, des lettres de rémission à Jean le Saulnier, qui furent confirmées par Charles V, en juin 1376 (JJ. 109, fol. 37 v°). Il eut à soutenir un procès au Parlement contre Nicolas Gaillard, bourgeois de la Rochelle, qui l'accusait de l'avoir tenu en prison sans motif. (Actes à ce sujet des 26 août 1376, 21 juillet 1377, 29 février et 14 mars 1380, X2a, fol. 46, 61 v°, 62, 190 v°, 192 v°.)
3 Amaury IV de Craon avait épousé Pernelle de Thouars, fille aînée et héritière de Louis, vicomte de Thouars, qui était décédé en janvier 1370, et il porta après son beau-père le titre de vicomte de Thouars. Le présent acte où il est mentionné comme vivant encore, le 26 août 1372, prouve que nous avions raison de tenir pour suspecte la date du 30 mai 1371 assignée par le P. Anselme à la mort du sire de Craon. (Voy. notre vol. précédent, p. 351 note.) Parmi les autres titres postérieurs à cette époque, relatifs à Amaury IV, nous citerons les suivants. Le 7 juillet 1371, une transaction fut passée entre lui, agissant comme vicomte de Thouars, à cause de sa femme, d'une part, et Thomas, seigneur de Chemillé et de Mortagne, au nom de Marguerite de Thouars, sa femme, sœur de Pernelle, au sujet de la succession de Louis, vicomte de Thouars, père desdites dames. (Collection dom Fonteneau, t. XXVI, p. 291.) Le 11 novembre 1372, Amaury assigna à Guillaume de Craon, seigneur de Marcillac, la châtellenie de Jarnac-sur-Charente. (Archives de M. le duc de La Tremoille, fonds de Craon.) Un autre acte, conservé clans le même fonds, nous apprend qu'il était décédé avant le 17 août 1373. Ménage dit que la mort d'Amaury IV arriva le 30 mars 1373 (Hist. de Sablé, p. 258). On voit que cette date est très admissible ; elle est d'ailleurs empruntée à l'Obituaire des Cordeliers d'Angers, suivant un extrait de ce manuscrit fait au xvie siècle, et touchant divers membres de la maison de Craon, extrait qui est aujourd'hui en possession de M. le duc de La Tremoïlle. Le sire de Craon ne laissait aucune postérité. Sa veuve, Pernelle de Thouars, épousa en secondes noces Tristan Rouaut, comme nous l'avons dit ailleurs (ci-dessus, p. 217, note 1.)
4 A cette date, l'abbé était sans doute Hugues Ier que le Gallia christ. mentionne d'après deux actes, l'un de 1366, l'autre de 1377 (t. II, col. 1420). L'abbé, non nommé, de Saint-Michel-en-l'Herm et l'abbaye étaient en procès, quelques années plus tard, contre Raymond d'Aubefort, prieur de Loix, de Legibus, et son frère, Pierre d'Àubefort, au sujet de certaines redevances. Le 3 août 1378, le prieur et son frère, qui étaient appelants d'une sentence du gouverneur de la Rochelle, obtinrent leur élargissement ; le 1er septembre 1379, deux conseillers au Parlement furent commis pour procéder à une enquête (X1a 27, fol. 73 ; X1a 28, fol. 104, 105). L'affaire paraît terminée par un long arrêt de la cour, daté du 14 avril 1380 (X1a 29, fol. 247).
On nous pardonnera de retourner de plusieurs années en arrière pour dire quelques mots d'un autre procès en matière criminelle intenté, l'an 1356, par l'abbaye de Saint-Michel contre Catherine Fortin, dame du Puy-du-Fou, et Pierre du Puy-du-Fou, son fils, rendus responsables d'une attaque à main armée contre un religieux de l'abbaye, attaque accomplie par une bande dirigée par Jean du Puy-du-Fou, écuyer. La cause avait été portée d'abord devant le sénéchal de Poitou, aux assises de Fontenay-le-Comte, puis dévolue au Parlement, sur mandement du roi. Voici l'exposé des faits, extrait de l'arrêt rendu par la cour en faveur de l'abbaye, le 25 juin 1356. Jean du Puy-du-Fou, ou plutôt une troupe composée de ses familiers et gens de sa suite, armés comme pour le combat, s'étaient mis en embuscade sur la route royale, tout près de l'hébergement du Puy-du-Fou, le jour des Cendres de l'année 1355 a. s., guettant le passage de frère Jean d'Oireval, moine et procureur de Saint-Michel. Ils l'assaillirent traîtreusement, le jetèrent à bas de sa monture, l'accablèrent de coups et de blessures, et le laissèrent pour mort sur la place, la main gauche totalement tranchée. Non contents de cela, ils lui volèrent son cheval, sa ceinture, une mallette contenant 25 florins d'or à l'écu de divers coins, son épée du prix d'un écu et divers autres objets qu'il portait avec lui. Une circonstance aggravante, c'est que le religieux était sous la sauvegarde du roi qui protégeait spécialement l'abbaye. Le sénéchal de Poitou, chargé de l'information, fit arrêter un nommé Jean Deschevaux (de Equis) qui était, lors du crime, de la suite de Jean du Puy-du-Fou (ce dernier était en fuite ou décédé, car il n'est point partie au procès), l'envoya sous bonne garde à Paris, où il fut enfermé dans les prisons du Châtelet. Le Parlement instruisit son procès. Il avoua avoir participé au meurtre, et il lut condamné à restituer l'épée du moine ou sa valeur, sept florins d'or à l'écu et trente livres tournois pour sa part envers l'abbaye, aux frais du procès, à deux cents livres de dommages-intérêts, et enfin à être pendu au gibet de Paris, sentence qui fut exécutée. Les religieux de Saint-Michel-en-l'Herm étaient en outre reconnus bien fondés à poursuivre les autres auteurs de ce crime et à demander une réparation pécuniaire à Catherine Fortin et à son fils, Pierre du Puy-du-Fou (X2a 6, fol. 308 v°).
5 Le texte de ces lettres a été publié dans la collection des Ordonnances des rois de France, t. V, p. 564.