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DXII

Restitution à Jeanne de la Grésille, femme de Guillaume Flory, de Poitiers, de la terre et des biens qui lui avaient été confisqués et donnés précédemment au sire de Maulévrier, à Guy Odart et à Jean de la Haye.

  • B AN JJ. 102, Musée AE II* 391, n° 296, fol. 96
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 19, p. 106-109
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, de la partie de Jehanne de la Gresille1, auctorisiée de Guillaume Flory2, son mary, nous avoir esté exposé que, [p. 107] comme la dite exposante, la quelle et ses devanciers sont nez du pais d'Anjou et en ycellui a tous ses amis, biens et chevance, eust pieça pris par mariage le dit Guillaume Flory, qui est du païz de Poitou, et pour ce ait convenu la dite exposante demourer ou dit pais de Poitou par aucun temps avec son dit mary, soubz umbre de la quelle demeure et de ce que l'en nous avoit donné à entendre que le dit Guillaume tenoit le parti de noz ennemis et que il estoit rebelle à nous, nous avons donné les biens de la dite Jehanne et de son dit mary, c'est assavoir au sire de Maulevrier3 à feu Guy Oudart4, chevalier, à Jehan de la Haye5 et à autres, si comme l'en dit ; et pour ce, la [p. 108] dite Jehanne, ou nom que dessus, nous a fait humblement supplier que nous, eu consideration ad ce que le dit Guillaume Flory, son mari, ne fu onques armé contre nous ne nos subgiez, ne ne leur ait porté dommage en quelque maniere que ce soit, et ad ce aussi que la dite Jehanne a delaissié le dit païz de Poitou, pour venir, estre et demourer du tout nostre vraie subgecte et obeissante ou païs d'Anjou, et que elle a fait serement à nostre amé chevalier et chambellent, Jehan de Bueil. de estre et demeurer vraie obeissante à nous, senz esperance de retourner au dit païs de Poitou, nous lui vousissions rendre et restituer la dite terre et biens pour vivre soubz nous et tenir son estat, et revoquer et mettre au neant les dons et octrois fais d'iceulx biens aux dessus nommez et chascun d'eulx. Nous, eu regart aux choses devant dictes, inclinans à la supplication de la dicte Jehanne, à ycelle, de nostre certaine science et grace especial, avons rendu et delivré et par la teneur de ces presentes, ou cas dessus dit, rendons et delivrons à plain la dite terre, possessions et biens quelconques que eulz tenoient et possidoient avant les dons et octroiz faiz aux dessus diz, comme dit est, non obstant yceulz dons, les quelz nous, ou dit cas, rappellons et mettons du tout au neant par ces presentes. Si donnons en mandement par ces mesmes lettres au bailli des exemptions de Tourainne, d'Anjou et du Maine, au seneschal des diz païs et à tous les autres justiciers et officiers de nostre royaume, ou à leurs lieux tenans, presens et avenir, et à chascun d'eulz, si comme à lui appartendra, en commettant, se mestiers est, au dit bailli des dites exempcions que de nostre presente grace et restitucion acent et laissent joir et user paisiblement la dite Jehanne, en la remettant de nouvel royaument et de fait en saisine et possession de ses diz biens, heriages et possessions, ostez tous empeschemens, et que ad ce contraingnent viguereusement les detenteurs d'iceulz, et que dores en avant ne seuffrent [p. 109] estre troublée ou empeschiée la dite Jehanne en aucune maniere au contraire, mais tout ce qui seroit fait au contraire mettent et ramenent au premier et deu estat. Et pour ce que ce soit ferme, etc. Sauf, etc. Donné en nostre hostel lez Saint Pol à Paris, Tan de grace mil ccc.lixxi. et de nostre regne le viii, ou mois d'aoust.

Ainsy signé : Par le roy. J. de Remis.


1 Un de ses parents, Jean de la Grésille, possédait en 1376 le fief de Puyraveau, dans la paroisse de Saint-Jean-de-Sauves ; il portait pour armes de gueules fretté d'argent. (E. de Fouchier, La baronnie de Mirebeau, in-8°, 1877, p. 228 et 272.) Un autre, Pierre de la Grésille, chevalier, qui avait été fait prisonnier à plusieurs reprises et avait éprouvé des pertes considérables au service du roi, obtint en dédommagement, par lettres de juillet 1369, les biens confisqués sur Regnaut Bar et Jean de Rotoy, chevaliers, Jean Fouchère, Hurtaut de Lapopinaye et Hugues de la Forêt, écuyers, rebelles au roi et combattant dans les rangs anglais ; ces biens étaient situés en Anjou et en Touraine (JJ. 100, n° 527, fol. 162 v°). Cf. aussi sur Pierre de la Grésille, Delaville Le Roulx, Comptes municipaux de la ville de Tours, t. II, p. 340.
2 Ce personnage appartenait à une famille notable de Poitiers, dont plusieurs membres avaient été honorés des premières fonctions municipales. A la notice que nous lui avons consacrée dans notre précédent volume (p. 384, note 1), nous ajouterons quelques mots relativement à un procès qu'il soutint, quelques années plus tard, contre Pierre de Saint-Perey, chevalier, ce dernier agissant en son nom et comme ayant le bail, à cause de sa femme, de Jean Doré, sieur de Riou. Guillaume Flory demandait à être maintenu en possession et jouissance d'un bois nommé la Chenaie de Coussay et d'une pièce de terre sise audit lieu de Coussay. Ledit chevalier y avait fait couper et appliqué indûment à son usage une grande quantité de bois. Le 2 juin 1374, le Parlement ordonna de remettre les choses en l'état jusqu'à nouvel ordre (X1a 23, fol 315 v°) et par sentence du 24 novembre 1375, il fut décidé que les parties produiraient vingt-quatre témoins et non plus, et qu'ils seraient examinés par des commissaires délégués par la cour (X1a 25, fol. 3 v°). Nous n'avons plus trouvé, au delà de cette date, d'autres traces de cette procédure.
3 Renaud, sire de Maulévrier, était en procès en 1377 contre Miles de Matha, seigneur de Saint-Vivien, et Mabile de Maulévrier, sa femme, touchant la justice de Trèves (Trèves-Cunault, Maine-et-Loire). Arrêt du 29 août au Parlement (X1a 26, fol. 201 v°). M. Demay cite une quittance de gages de ce Renaud, pour services rendus dans les guerre de Bretagne, donnée à Pontorson, le 22 octobre 1379. Le sceau représente un écu portant un chef timbré d'un heaume, cimé d'un levrier dans un vol, supporté par deux lions sur champ réticulé. (Invent. des sceaux de la coll. Clairambault, t. I, p. 620.) Ce sont les armes du dernier représentant de la famille feodale de Maulévrier, qui remontait à Foulques Nerra, comte d'Anjou. En effet, Renaud (que M. Célestin Port nomme Raoul) n'eut de sa femme, Béatrix de Craon, qu'une fille, Marie, laquelle porta la terre de Maulévrier, avec celle de Trèves et d'Avoir, à Jacques de Montbron, son mari, sénéchal d'Angoulême (1386), lieutenant-général pour le roi en Touraine, Maine et Anjou (1413), mort en 1422. (C. Port. Dict. hist., géogr. et biogr. de Maine-et-Loire, t. II, p. 621 ; le P. Anselme, Hist. généal., t. VIII, p. 571.)
4 Guy Odart, seigneur de Mons et de Baslon, était mort déjà en mars 1370, suivant des lettres de cette date publiées ci-dessus (n° CCCCXCIII) ; il vivait encore et était chambellan du duc d'Anjou, le 24 août 1369, époque où Charles V lui fit don, entre autres, d'une maison confisquée sur Guillaume Flory (vol. précédent, p. 384-386).
5 Jean de la Haye avait eu du roi une rente annuelle de 20 livres sur des biens confisqués, par lettres du 23 novembre 1369. (Id, ibid., p. 430.) Nous le retrouverons plus loin, à l'occasion d'une rémission qui lui fut octroyée en mars 1376.