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MCLXXXIII

Rémission en faveur de Jean Trilhault, demeurant au Bouchage en la châtellenie de Charroux, qui, pour se payer des dépenses qu’il avait faites en cautionnant, ainsi que son père et son frère, Guillaume du Breuil, fait prisonnier à Beauvais par des gens de guerre qui tenaient la campagne en Poitou, avait volé audit du Breuil vingt-cinq brebis et moutons.

  • B AN JJ. 180, n° 16, fol. 7
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 32, p. 152-155
D'après a.

Charles par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Trilhault, povre simple homme de labour, filz de Jehan Trilhault, demourant au Boucaige en la chastellenie de Charrotz, contenant que au temps que feismes mettre le siège devant Vertueil1, pluseurs capitaines et gens de guerre estoient en nostre païs de Poictou et entre autres les gens de Galias2, lesquelz estoient [p. 153] logiez à Nantueil en Valée à deux lieus près ou environ dudit Vertueil, auquel lieu de Nantueil ledit suppliant et son dit père estoient retraiz, et y eut aucuns desdiz gens de guerre de la compaignie dudit Galias qui alèrent courir au lieu et parroisse de Beauvaiz, et prindrent et enmenèrent Guillaume du Bruilh, filz de Blayve du Bruilh, et enmenèrent et tindemt icellui Guillaume prisonnier audit lieu de Nantueil, où ilz estoient logiez. Et pour les maulx et durtez qu’ilz lui firent, le contraingnirent à soy raençonner à la somme de quarante royaulx d’or. Et pour yssir hors de leurs mains et subgection, requist à Pierre Trilhault, frère dudit suppliant, lesquelz demouroient ensemble avecques Jehan Trilhault, leur père, qu’il le voulsist pleger et respondre pour lui d’icelle somme de quarante reaulx ausdiz gens de guerre, ce que fist ledit Pierre Trilhault, et leur promist paier icelle somme dedans certain brief temps lors avenir, ou cas que ledit Guillaume du Bruilh ne les auroit paiez. Et par ainsi fut ledit Guillaume du Bruilh delivré et s’en ala des mains et subjection desdiz gens de guerre ; mais il ne retourna point ne n’envoya paier icelle somme et passa ledit terme, sans ce que paiement leur en fut fait. Et quant iceulx gens de guerre virent que ledit terme estoit passé et qu’ilz n’avoient point ledit paiement, se prindrent audit Pierre Trilhault, leur pleige et le molestèrent très fort, lequel ne sceut bonnement que faire, fors qu’il se constitua leur prisonnier, pour ce qu’il n’avoit de quoy les paier si promptement qu’ilz le demandoient et vouloient avoir ; et fut et demoura grant temps leur prisonnier. Durant lequel emprisonnement, il et ses diz père et frère eurent et endurèrent et supportèrent grans peines, pertes, despens et dommaiges, et leur fut force de paier ausdiz gens de guerre icelle somme de quarante royaulx ; pour lesquelz finer leur convint vendre et vendirent grant quantité de leurs biens. Et après ce qu’ilz eurent paiée ladicte somme, ledit suppliant se tira par [p. 154] devers ledit Guillaume du Bruilh et Blayve du Bruilh, son père, et leur requist par pluseurs foiz qu’ilz voulsissent rendre et restituer à lui et à ses diz père et frère ladicte somme de quarante reaulx avecques les despens, dommaiges et interests qu’ilz avoient euz et soustenuz par le deffault de ce que il ne son dit père n’avoient pas paiée ausdiz gens de guerre ladicte somme de quarante reaulx audit terme ; lesquelz despens, dommaiges et interests ilz estimoient à la somme de trente livres tournois. Lequel Guillaume du Bruilh leur paia ladicte somme de quarante reaulx, mais desdiz despens, dommaiges et interests ne leur voult riens rendre ne restituer, dont ilz furent grandement endommaigiez et apovriz. A laquelle cause ledit suppliant, voiant que ledit Guillaume du Bruilh ne leur vouloit riens rendre et restituer desdictes pertes, dommaiges et interests et despens, qu’ilz avoient ainsi soustenuz et supportez par la faulte d’icellui du Bruilh et dudit Blayve, son père, et pour leur avoir fait le plaisir de ladicte pleigerie, et qu’ilz n’en povoient ne n’eussent peu riens avoir, sans plait et procès et à grans fraiz et cousts qu’ilz n’avoient de quoy faire, icellui suppliant, de ce marry et desplaisant, par mauvais conseil et temptacion de l’ennemy, une certaine nuit, se transporta en ung touet ou estable, où lesdiz Guillaume du Bruilh et Blayve, son père, avoient et tenoient leur bestiail, et ilec print et enmena environ vint cinq chefz, tant brebiz que moutons, qui bien povoient valoir dix ou douze livres tournois, non cuidant mal faire, mais bien pour soy recompenser desdiz pertes, despens et dommaiges. Et depuis, furent lesdiz du Bruilh advertiz que ledit suppliant avoit ainsi furtivement prins et enmené leur dit bestiail, et en sorty debat entre ledit Guillaume du Bruilh et ledit suppliant. Lequel, pour appaisier la chose et eviter plus grant inconvenient, composa de ce avecques ledit Guillaume du Bruilh à la somme de unze royaulx d’or, qu’il paia à icellui Guillaume du [p. 155] Bruilh et Blayve, son père. Mais ce non obstant, il doubte rigueur de justice et qu’on le voulsist repputer et tenir pour larron, et que nostre procureur et autres voulsissent proceder rigoureusement à l’encontre de lui et de ses biens, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce prealablement impartiz, si comme il dit, humblement requerant, etc. Pour quoy nous, etc., audit suppliant avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces presentes aux seneschaulx de Poictou et de Lymosin, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Rouen, ou mois de novembre l’an de grace mil cccc. quarante neuf, et de nostre règne le xxviiie.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Tribole. — Visa.


1 Le château de Verteuil appartenait à Guy de La Rochefoucault, frère de Jean de La Roche, sénéchal de Poitou. Guy ayant repris les armes contre l’autorité du roi, malgré le serment qu’il avait fait de le servir fidèlement, et au mépris de l’amnistie dont il avait bénéficié après la Praguerie, Charles VII, qui se trouvait à Ruffec dans les premiers jours d’avril 1442, fit mettre le siège devant la place défendue par deux cents hommes de guerre. Les troupes royales commandées par l’amiral Prégent de Coëtivy, le maréchal Philippe de Culant et Pierre de Brézé, sénéchal de Poitou, s’en emparèrent après une attaque en règle ; le château fut détruit et rasé. (Le héraut Berry, Chronique de Charles VII, édit. Godefroy, in-fol., p. 417, 418.)

2 Sur une liste des capitaines de gens d’armes qui accompagnèrent le dauphin Louis dans son expédition en Suisse et en Alsace, liste dressée le 5 septembre 1444, ce personnage figure sous la même désignation imprécise : Dominus Galiaz et Bonifacius de Valperge ; isti habent Lombardos. (A. Tuetey, les Écorcheurs sous Charles VII, t. II, p. 517) Est-ce le même que Jacques Galeotto, que l’on retrouve chef de soudoyers lombards au service de Charles le Téméraire, puis de Louis XI ?