MCCXLVI
Rémission octroyée à Guillaume Siet, d’Ambière (Saint-Genest), en la vicomté de Châtellerault, qui s’était évadé par deux fois de la grosse tour de Châtellerault, où ses ennemis l’avaient fait enfermer, malgré une première rémission qui n’avait été entérinée, et le menaçaient de le faire pendre.
- B AN JJ. 184, n° 397, fol. 291 v°
- a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 32, p. 355-359
Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble [p. 356] supplicacion des femme et enfans de Guillaume Siet, povre homme, paroissien d’Ambière en la viconté de Chasteaulerault, contenant que l’an mil cccc. li, etc…, pendant lequel deux de ses enfans alèrent de vie à trespassement1. Et depuis se tray devers nous ou nostre chancellerie à Paris, et ou mois d’aoust l’an mil iiiic lii, obtint noz lettres de remission en laz de soye et cire vert desdiz cas et routure de prisons, soubz umbre desquelles lettres de remission, lesquelles n’ont esté veriffiées ne enterinées, ledit suppliant s’est tiré au païs et en ladicte parroisse, et illec et ou païs d’environ a tousjours labouré, residé et demouré, jusques environ la Toussains derrenière passée que nostre amé et feal maistre François Guerinet2, soubz couleur de ce que ses haineux ont fait faire certaine informacion aposté et maintenu contre ledit suppliant qu’il a receu certains deniers des aides, laquelle chose, si l’a faicte, a esté ou nom de Jehan de Giffose, fermier des aides, et de son commandement, et qu’il n’avoit requis l’enterinement de la dicte remission, envoya en l’ostel [p. 357] dudit suppliant deux laboureurs ou marchans incongneuz audit suppliant…,3 ledit suppliant, le lièrent à cordes, comme s’il feust larron ou meurtrier, et le menèrent audit lieu de Chasteaulerault, le misdrent en prison en fers et sep, et lui estant ainsi, vint devers lui ledit maistre François, acompaigné de maistre Jehan Lucas et plusieurs autres ennemis dudit suppliant, qui parlèrent à lui sans le delivrer, mais après qu’il eut esté illec par quatre jours, fut transporté de ladicte prison en la grosse tour du dit lieu de Chasteauleraut, dont est garde et capitaine Emery de Brisay4, qui est ennemi dudit suppliant, à l’occasion de certain procès que ledit suppliant avoit gaigné et obtenu sentence contre le mestaier de la mère dudit Brisay, et ilec convint que ledit suppliant consentist rendre l’argent [p. 358] qu’il avoit eu dudit mestaier par le moien de la dicte sentence ; et lui estant en la dicte tour inhumainement traicté, enferré et en sep, envoya devers sa dicte femme, suppliante, pour avoir pleiges de tenir loyal prison. Laquelle femme, afin que ledit suppliant eust aucun eslargissement, fist venir en ladicte prison trois hommes, lesquelz plegèrent le dit Guillaume suppliant de tenir loyal prison, à la peine de vc livres ou autre somme. Non obstant laquelle plegerie, le dit suppliant fut toujours detenu en ladicte grosse tour, en bien grant povreté et malaise. Et pour ce que les varlès et serviteurs dudit Brisay, quant lui apportoient à boire et mengier, lui disoient qu’il estoit en grant dangier de sa personne, doubtant que on le feist mourir, trouva moien de rompre ladicte prison et sortit en l’eaue, et s’en ala au long de la rivière, pour cuidier trouver ung vesseau pour passer ; et se rendit à certains molins èsquelz il trouva certains varlès, ausquelz il requist lui donner passaige, dont ne vouldrent riens faire, ains l’enfermèrent et alèrent querir les varlès dudit Brisay, qui le ramenèrent prisonnier en ladicte grosse tour. Et lui estant ilec, à l’occasion de ce que le filz dudit de Brisay5 lui dist qu’il seroit pendu, pour doubte que on procedast contre lui à la destruction de son corps et à le faire mourir, a trouvé moien de briser la dicte tour et s’en est fouy et absenté. Et ont esté prins et emportez tous ses biens et de ses diz pleiges. Et doubte ledit suppliant que, obstant ledit cas et de ce qui a ainsi rompu les dictes prisons, et n’a requis l’enterinement de la dicte remission par lui obtenue, que on vueille contre lui proceder à rigueur de justice, et qu’il n’osast retourner au pays, et aussi que ses diz pleiges perdeissent leurs biens, obstant ledit plegaige, se noz grace et misericorde ne lui estoient sur ce imparties, requerant [p. 359] humblement iceulx. Pour quoy nous, ces choses considerées, audit suppliant oudit cas, de nostre grace especial, avons quicté, remis et pardonné, etc. Et avec ce lui avons octroyé et octroyons qu’il puisse requerir l’enterinement de nos dictes autres lettres de remission, tout ainsi qu’il eust fait dedans l’an de la date d’icelles, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans, etc. Donné à Paris, ou mois de janvier l’an de grace mil cccc. liii, et de nostre règne le xxxiie.
Par le conseil. Cornu. — Visa. Contentor. Valengelier.