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MCCXXVI

Lettres ratifiant la cession faite par Charles d’Anjou, comte du Maine, vicomte de Châtellerault, à Huguet de Billy, écuyer, son maître d’hôtel, et à la femme de celui-ci, des terres et seigneuries de Thuré, Saint-Christophe-sous-Faye et la Tour-d’Oiré.

  • B AN JJ. 181, n° 159, fol. 99
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 32, p. 289-293
D'après a.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre très chier et très amé frère et cousin le conte du Maine, viconte de Chastelleraut1, contenant que, ou mois de janvier l’an mil cccc. quarante et sept2, nostre dit frère et cousin et l’evesque de Poictiers, qui lors estoit3, firent certaine permutacion et eschange par lesquelz nostre dit frère et cousin bailla et transporta audit evesque et à ses successeurs evesques de Poictiers, les chastel et chastellenies, terres et seigneuries de Harecourt en Chauvigny, appartenances et appendances d’icelles, tenues et mouvans en fief dudit evesque de Poictiers, à cause de son chastel de Chauvigny, et en recompensacion de ce ledit deffunct evesque de Poictiers bailla et transporta à nostre dit frère et cousin, ses heritiers et successeurs, les terres et seigneuries de Thuré, Saint Christofle soubz Faye et la Tour d’Ouairé, lesquelles sont situées et assises au dedans des fins et mettes et près et joignant de ladicte viconté de Chastelleraut, sans ce que ledit evesque y reservast ne retenist aucune chose pour lui ne ses successeurs [p. 290] en aucune manière. Auquel nostre dit frère et cousin, pour certaines causes et consideracions à ce nous mouvans, nous octroiasmes ja pieça qu’il tenist de nous lesdictes terres et seigneuries de Thuré, Saint Christofle et la Tour d’Ouairé soubz les foy et hommaige et devoirs qu’il nous doit et est tenu de faict à cause de sa dicte viconté de Chastelleraut, et icelles terres et seigneuries unismes et joingnismes avec ladicte viconté, ainsi que plus à plain appert par noz autres lettres sur ce faictes, desquelles la teneur s’ensuit :

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre très chier et très amé frère et cousin Charles d’Anjou, conte du Maine et viconte de Chastelleraut, etc… Donné au Boys Sire Amé, ou mois de juing l’an de grace mil quatre cens quarante et sept, et de nostre règne le xxve4.

Et après lesquelles obtenues et avant qu’elles feussent expediées ne veriffiées en nostre court de Parlement ne ailleurs, nostre dit frère et cousin, par certains justes tiltres et moiens ceda et transporta lesdictes terres à Huguet de Billé, escuier5, maistre de son hostel, et Jehanne [p. 291] Rouaude, damoiselle, sa femme, et à leurs hoirs et aians cause d’eulx, à les tenir de nostre dit frère et cousin, ses hoirs et aians cause de lui, à foy et hommaige et certains autres devoirs, à cause de sa dicte viconté de Chastelleraut, comme l’en dit plus applain apparoir par lettres autentiques sur ce faictes et passées. Et doubte nostre dit frère et cousin que, attendu qu’il n’a requis l’enterinement de nos dictes lettres dessus transcriptes avant le transport qu’il a fait des dictes terres audit Huguet de Billé et sa femme, que nostre procureur et autres noz officiers le vueilent troubler et empescher en la joyssance des dictes foy et hommaige et devoirs, à cause des dictes terres et seigneuries, et aussi le empescher en l’expedicion et verifficacion de nos dictes lettres dessus transcriptes, et sur ce le tenir et enveloper en grans procès, qui seroit et pourroit estre en son grant prejudice et dommaige, si comme il dit, requerant humblement que sur ce lui vueilons pourveoir de nostre gracieulx et convenable remède. Pour quoy nous, eue consideracion aux choses dessus dictes et aux grans et louables services que nostre dit frère et cousin nous a faiz en maintes manières, et esperons que face ou temps advenir, et que nostre dit frère et cousin, par le moien dudit eschange, nous a remises lesdictes terres et seigneuries de Thuré, Saint Christofle et la Tour d’Ouairé, qui estoient admorties, subgectes à rachapt et ausdiz foy et hommaige, et à plusieurs autres proufiz, que nous et noz successeurs en pourrons avoir ou temps avenir, et pour autres raisonnables causes à ce nous mouvans, nous, de nostre certaine science, plaine puissance et auctorité royal, avons octroié et de grace especial octroions par ces presentes, à nostre dit frère et cousin, voulons et nous plaist [p. 292] que il joysse de nos dictes lettres dessus transcriptes et qu’elles lui soient d’autel effect et valeur, comme se elles lui eussent esté enterinées par avant le transport par lui fait desdictes terres et seigneuries audit Huguet de Billé et sa femme. Et de nostre plus ample grace, voulons, ordonnons et nous plaist, et avons octroié et octroions à nostre dit frère et cousin que icelles terres et seigneuries de Thuré, Saint Christofle et la Tour d’Ouairé soient doresnavant tenues et mouvans, de lui en fief et à foy et hommaige, et autres droiz et devoirs qui y appartiennent, et de ses heritiers et successeurs vicontes de la dicte viconté de Chastelleraut, à les tenir de nous soubz les diz foy et hommaige qu’il nous doit et est tenu de faire à cause de sadicte viconté de Chastelleraut. Et en tant que mestier est, avons donné et par la teneur de ces presentes, donnons à notre dit frère et cousin les foy et hommaige et autres devoirs, s’aucuns nous estoient ou pourroient estre deuz à cause des dictes terres et seigneuries par le moien dudit eschange ou autrement, sans ce que à cause de foy et hommaige, ou autres droiz et devoirs non faiz et paiez à nous, l’en puisse aucunement inquieter ne traveiller nostre dit frère et cousin, les diz Huguet de Billé et sa femme, leurs hoirs, successeurs et aians cause. Et quant à ce nous imposons scilence perpetuel à nostre procureur et à tous noz autres officiers. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx conseillers les gens tenans et qui tendront nostre Parlement, gens de noz comptes et tresoriers, au seneschal de Poictou ou à son lieutenant, et à noz advocat, procureur et receveur, et autres officiers en nostre païs de Poictou, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de noz presens grace, don et octroy facent, seuffrent et laissent nostre dit frère et cousin, et ses successeurs vicontes de Chastelleraut, joïr et user plainement et paisiblement, sans en ce leur donner ne mettre, ne souffrir [p. 293] leur estre mis ou donné aucun empeschement ou destourbier au contraire, ores ne pour le temps avenir, ains, se mis ou donné leur avoit esté ou estoit, reparent et remettent, ou facent reparer et remettre incontinent et sans delay au premier estat et deu. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes, sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Saint Aignen en Berry, ou mois de juing l’an de grace mil cccc. cinquante et deux, et de nostre règne le xxxe6.

Ainsi signées : Par le roy en son conseil. Chaligaut. — Collation est faicte. Visa.


1 Charles d’Anjou, comte du Maine et de Mortain, vicomte de Châtellerault, etc., beau-frère de Charles VII, sur lequel voy. le vol. précédent, p. 146, note, et ci-dessus, p. 12, note.

2 Cette date n’est pas exacte. C’est le 21 mai 1447 que l’échange en question eut lieu. (Cf. ci-dessus, p. 14, note.)

3 L’évêque de Poitiers était alors Guillaume Gouge de Charpaignes, auquel nous avons consacré une notice dans notre précédent volume, page 116.

4 Le texte de ces lettres patentes est imprimé au commencement du présent volume, page 12.

5 Huguet de Billy, écuyer, d’une famille ancienne du Mirebalais, paraît être le second fils de Léonnet de Billy, qui rendit aveu pour son hôtel de Billy, le 29 août 1385, à la baronnie de Mirebeau, et de Perrette de Marconnay. Il assistait, le 30 septembre 1443, au mariage de Simon de Marconnay avec Jeanne Chaperon. Sa femme Jeanne Rouault était fille de Jean, seigneur de Boisménart, chambellan du roi, tué à Verneuil, et de Jeanne Du Bellay, dame du Colombier, et par conséquent sœur de Joachim Rouault, chevalier, qui devint maréchal de France à l’avènement de Louis XI. Nous avons vu, quelques pages plus haut, que leur fille Isabeau avait épousé, vers 1450, Prégent Frotier, baron de Preuilly. On ignore si Pierre de Bilhé (Billy), écuyer, seigneur de Faviers et de Limalonges, qui rendit aveu de son hébergement de Limalonges et autres fiefs mouvant de Civray aux comtes de Poitou, le 9 février 1410 n.s. et en 1418, et Jeanne de Billy, à cette dernière date, dame d’un hébergement à Fontfroide, tenu du château de Montreuil-Bonnin (Arch. nat., P. 1144, fol. 20 et 66 v° ; R1* 2172, p. 1322), étaient parents des Billy du Mirebalais. D’autres familles du même nom, et plus connues, ont existé dans le Soissonnais, la Beauce, la Lorraine et la Bourgogne. M.A. Richard fait remarquer à ce sujet que plusieurs auteurs ont confondu des membres de ces dernières avec les Billy du Poitou. (Note sur quatre abbés poitevins du nom de Billy, Extr. du Bulletin de la Société des Antiquaires de l’Ouest, 1886, 3e trimestre.)

6 Le texte de ces lettres est imprimé dans le recueil des Ordonnances des Rois de France, in-fol., t. XIV, p. 228.