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MCLXXXV

Confirmation du traité passé, le 20 septembre 1443, entre Maurice Claveurier, sieur de la Tour-Savary, lieutenant en Poitou, d’une part, et Jean comte d’Harcourt, vicomte de Châtellerault, d’autre part, touchant le guet et la garde de la place forte de la Tour-Savary en Châtelleraudais.

  • B AN JJ. 180, n° 52, fol. 23 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 32, p. 157-163
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, [p. 158] nous avoir receu l’umble supplicacion de nostre amé et feal conseillier, maistre Maurice Claveurier, demourant à Poictiers et seigneur de la Tour Savary en Chastelleraudais1, contenant que nostre chier et amé cousin le conte de Harecourt, viconte et usufruictier seigneur de Chastellerault2, considerant les bons et aggreables services que ledit suppliant lui avoit faiz et pour autres causes justes et raisonnables à ce le mouvans, lui a baillé, cedé et transporté à perpetuité, à lui et aux siens, certain nombre de guetz pour la garde de la place fort dudit lieu de la Tour Savary3, comme appert par certaines lettres sur ce faictes et passées soubz les seaulx de Poictiers, desquèles l’en dit la teneur estre tele :

A tous ceulx qui ces presentes lettres verront et orront, Jehan Trenchant, garde du seel aux contratz estably à Poictiers pour le roy nostre sire, salut. Saichent tous que, presens en droit en la court dudit seel et personnelment estably très hault et très puissant seigneur monseigneur [p. 159] Jehan, conte de Harecourt et d’Aubmalle, viconte de Chastellerault, d’une part, et honorable homme et saige maistre Maurice Claveurier, conseillier du roy nostre sire et son lieutenant en Poictou, d’autre part, lesquelx, de leur bon gré et bonne voulenté, sans nul parforcement, ont congneu et confessé, congnoissent et confessent avoir fait entre eulx les cessions, bailz et transportz des choses qui s’ensuivent : c’est assavoir ledit monseigneur le conte, recognoissant les bons, louables et grans services que ledit maistre Maurice lui a faiz le temps passé et fait de jour en autre, en plusieurs et maintes manières, desquelx services il s’est tenu et tient pour content, en le relevant de toute charge de preuve, que aussi que pour ce que très bien lui a pleu et plaist, à icelui honnorable [homme], pour lesdictes causes et autres qui à ce l’ont meu, avoir baillé, cedé, laissé et transporté, baille, cède, laisse et transporte à perpetuité, pour lui, ses hoirs et successeurs et qui cause auront de lui ou temps avenir, ses hommes et subgiez en souveraineté et faisant le guet et garde en sa ville de Chastellerault, qui cy emprès sont nommez et declarez : premierement Jehan Lisembois le clerc, Jehan Lisembois, charpentier, Perrot Picart, Perrot Villefaulx, Jehan Peletier, Guion Texier et Perrot Remugneau, Perrot Corrichart et son filz, Perrot des Vaulz, Colas son filz, Mery Chesnault, Jehan Chesnault, Perrot Chesnault, Jehan Baudry, Jehan Boisson le jeune, Jehan Tarin, Perrot Girart, Jehan Hameteau, Perrin Barbotin, Jehan Leignart, Jehan Portois, Perrot Grantvillain, Perrot Boisson, de Palu, Jehan Savary, de Palu, Jehan Chasseport, Jehan Damé et le mestaier demourant en la maison feu Premeillac, Regnault le Maçon, Colas Savary, Pierrot Guibert, tous les dessusdiz levans et couchans, hommes, subgiez et justiciables dudit maistre Maurice, tant à cause de sa place et forteresse de la Tour Savary que de l’Aubue autrement dicte la Pleigne, et leurs successeurs, et aussi ceulx qui pour le [p. 160] temps avenir vouldroient demourer ès maisons à eulx appartenans par heritaige, situées et assises èsdictes jurisdictions, facent et soient tenuz faire guetz et garde par nuyt audit lieu et forteresse de la Tour Savary, appartenant audit honnorable homme, ainsi qu’il leur sera commandé et ordonné par lui, ses gens et officiers à ce commis, et que en ce faisant ilz soient quictes et francs de plus doresenavant faire guet et garde en la ville de Chastellerault ; et les dessusdiz avecques toutes et chacunes les compulsions et contrainctes, droiz, prouffiz et emolumens, qui à cause de ce povoient et devoient competter et appartenir audit monseigneur le viconte, icelui seigneur a cedé, quictié, delaissié et transporté, quicte, cesse, delaisse et transporte audit honnorable et aux siens et qui cause auront de lui, sans ce que lui ne ses heritiers et successeurs et qui cause auront de lui y puissent jamais aucune chose exigier, querir ne demander ; et a donné et donne ledit monseigneur le viconte en commandement aux dessus nommez et à chascun d’eulx, et à leurs successeurs, de faire doresenavant ledit guet et garde audit lieu et forteresse de la Tour Savary, en defendant au cappitaine dudit lieu de Chastellerault, qui à present est ou qui pour le temps avenir sera, que doresenavant il ne contraigne ne face contraindre les dessusdiz ne leurs successeurs, subgiez et justiciables dudit honnorable homme, à faire guet ne garde en ladicte ville de Chastellerault. Et en oultre a voulu et consenty, veult et consent ledit monseigneur le conte que tous autres qui vouldront demourer èsdictes juridictions facent doresenavant guet et garde audit lieu et forteresse de la Tour Savary, pourveu qu’ilz ne soient subgiez ne justiciables sans moien de mondit seigneur le conte à cause de sa viconté de Chastellerault, lesquelx sont tenuz et feront lesdiz guet et garde audit lieu de Chastellerault ou à ses chasteaulx de Gironde et de Pu Millereou, nonobstant qu’ilz viennent demourer ès dictes juridictions [p. 161] d’icelui Claveurier. Et parmy ce ledit honnorable, pour lui et les siens dessusdiz, sera tenu et a promis rendre, paier, parfaire et continuer à mon dit seigneur le viconte et aux siens susdiz et qui cause auront de lui, chascun an en chascune feste saint Jehan, six livres en deniers tournois de rentes, desqueles icelui honnorable ou les siens susdiz pourront baillier assiète audit seigneur de Chastellerault ou aux siens susdiz, bonne et suffisant en ladicte ville ou viconté de Chastellerault, toutesfoiz qu’il leur plaira. Toutes lesqueles choses susdictes et chascune d’icelles lesdictes parties et chascune d’elles ont congneues et confessées estre vrayes et icelles, avecques le contenu en ces presentes, ont promis et promettent, pour elles et les leurs susdiz, par la foy et serement de leurs corps et soubz l’obligacion de tous et chascuns leurs biens meubles et immeubles, presens et futurs quelxconques, tenir et garder de point en point, sans jamais aler, faire ne venir encontre en aucune manière, et amander l’une partie à l’autre, et aux siens susdiz, tous coustz, mises, dommaiges, interestz et despens, qu’ilz auront et soustendront ou temps avenir, l’un par faulte de l’autre, par default de l’accomplissement du contenu en ces presentes, à en ester et croire sur ce au simple dict et serement de la partie endomaigée pour toute preuve. Renonçans sur ce lesdictes parties et chascune d’icelles, pour elles et les leurs susdiz, à toutes et chascunes excepcions et decepcions tant de droit que de fait quelxconques, à ces presentes contraires, à tout droit canon et civil, escript et non escript, et au droit disant generalle renonciation non valoir, de et sur ce que par dessus est dit perpetuelment tenir et garder ont esté lesdictes parties et chascune d’icelles, de leurs consentemens, jugées et condempnées par le jugement de ladicte court, et le seel d’icelle à ces presentes, originallement doublées, mis et apposé, en tesmoing de verité. Donné et fait ès presences de honnorables hommes Jehan des [p. 162] Hayes4, juge de Chastellerault, maistre Jehan Martin, advocat audit lieu, Jehan Lucas5, licencié en loix, Jehan de Morry, lieutenant du seneschal de Chastellerault, et plusieurs autres presens, le vintiesme jour de septembre l’an mil cccc.xliii. — Ainsi signé : Rivière et G. Dorin.

Et combien que ledit suppliant et ses heritiers et successeurs après lui puissent licitement et raisonnablement joir et user desdiz guetz, selon la teneur desdictes lettres cy dessus transcriptes, veues les causes contenues en icelles, toutevoies pour ce que à nous et à noz officiers compette et appartient la cognoissance, interpretacion et declaracion des matières de fait de guet, se lesdiz bail, cession et transport desdiz guetz ainsi à lui faiz par nostre dit cousin lui estoient par nous ratiffiez, loez et approuvez, lui seroient et aux siens pour le temps avenir de plus grant seureté, et lui en pourroit on mettre moins d’empeschement, et en seroit la chose de plus grant valeur et auctorité, nous a ledit suppliant fait humblement supplier et requerir que vueillons lesdiz bail, cession et transport desdiz guetz, ainsi faiz à lui et aux siens par nostre dit cousin, louer, ratiffier et approuver et sur ce lui impartir nostre grace. Pour ce est il que nous, attendu ce que dit est et les bons, louables et notables services que nostre dit conseillier [p. 163] nous a faiz en plusieurs et maintes manières, voulons iceulx lui recongnoistre et aucunement l’en remunerer, et pour certaines autres causes et consideracions à ce nous mouvans, à icelui nostre conseillier, suppliant, avons oudit cas les diz bail, cession et transport desdiz guetz, ainsi à lui faiz par nostre dit cousin, louez, ratiffiez et approuvez, louons, ratiffions et approuvons, et en tant que mestier seroit, les lui avons donnez et donnons par ces presentes. Et voulons et nous plaist que lui et ses hoirs et successeurs après lui en joyssent selon la forme et teneur desdictes lettres cy dessus transcriptes, et tout ainsi et par la forme et manière que les seigneurs chastellains du pays joyssent de leurs guetz et qu’il en pourroit joïr, s’il avoit chastel ancien et droit de chastellenie audit lieu de la Tour Savary. Si donnons en mandement en commettant par ces presentes à nostre seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de noz presentes grace, ratifficacion et approbacion, ensemble des autres choses dessus dictes facent, seuffrent et laissent lesdiz suppliant et ses diz hoirs et successeurs et ayans cause, et chascun d’eulx, joir et user plainement et paisiblement, sans en ce leur mettre ou donner, ne à aucun d’eulx destourbier ou empeschement aucun au contraire, ains se mis ou donné leur estoit, ou à aucun d’eulx, l’ostent et mettent ou facent oster et mettre sans delay à estat deu. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Jumièges, ou mois de janvier l’an de grace mil cccc. quarante et neuf, et de nostre règne le xxviiie.

Ainsi signé : Par le roy, maistre Jehan Le Picart6 et Jaques Cuer7 presens. E. Chevalier. — Visa. Contentor. Chaligaut.


1 Maurice Claveurier, lieutenant général de la sénéchaussée de Poitou, conservateur des privilèges de l’Université de Poitiers, a été l’objet d’une longue note biographique dans notre précédent volume, p. 40-42. Il n’y a pas lieu d’y revenir ici.

2 Sur Jean VII d’Harcourt, vicomte de Châtellerault, voy. id., p. 302, note, et ci-dessus, p. 12, à propos de la cession qu’il fit à Charles d’Anjou, comte du Maine, de la vicomté de Châtellerault.

3 La Tour-Savary était tenue de la vicomté de Châtellerault à 60 sous d’aide, avec la haute, moyenne et basse justice. Ce fief appartenait aux cadets de la maison de Châtellerault, et fut vendu, l’an 1375, à Jacques Phelippon, suivant l’abbé Lalanne. La tour fut bâtie, dans la première moitié du xve siècle, d’après les ordres du roi et du consentement de Jean VII comte d’Harcourt, avec autorisation d’y réunir les fiefs de l’Aubue, de la Pleigne, de l’Île-Gandouart et de Puy-Gacher, et droit de guet sur un certain nombre de personnes. Le même auteur dit que c’est par échange du mois d’avril 1437, que Jean d’Harcourt céda tous les droits, cens et rentes qu’il possédait dans les limites de la juridiction de la Tour-Savary à Maurice Claveurier, qui lui transporta dix royaux d’or de rente, estimés à dix livres vendus par messire Jean de Cramaud, chevalier, à Nicolas de Montlouis, et plusieurs autres rentes s’élevant ensemble à 15 livres, 140 boisseaux de froment, huit de seigle, douze chapons et deux poules. Michel Claveurier succéda à son père dans la seigneurie de la Tour-Savary ; il en prend le titre dans un acte de 1458. (Histoire de Châtellerault, t. I, p. 331, 470.)

4 Jean des Hayes était déjà juge de Châtellerault le 14 octobre 1427 ; la mainlevée d’une saisie faite sur la dîme de Naintré, portant cette date, est scellée de son sceau en cette qualité. (Arch. de la ville de Poitiers, F. 66.) Compromis en 1432, avec d’autres officiers de la vicomté, dans l’affaire de séquestration de Guillemette Berland, fille de Turpin Berland et de Jacquette Boilesve, il fut décrété de prise de corps, le 17 février, pour refus d’obéissance aux mandements de la cour de Parlement. Il est question de lui encore dans un acte du Parlement en date du 2 octobre de la même année. (Arch. nat., X2a 21, à la date du 17 février 1432, et X1a 9192, fol. 217.) Cf. aussi, sur cette affaire, une note de notre précédent volume, p. 301.

5 Un Jean Lucas, poursuivi comme complice de Renaud de Montléon, chevalier, par Simon de Cramaud, Jean de Cramaud et Orable de Montléon, sa femme, pour avoir expulsé de force ces derniers du château de Touffou, fut condamné à des dommages intérêts et à l’amende par arrêt du Parlement de Poitiers, en date du 13 avril 1429. (Arch. nat., X1a 9191, fol. 125.)

6 Jean Le Picart, général des finances en exercice dès 1444, trésorier de France par ordonnance du 12 avril 1445, maître des comptes et membre du grand conseil de Charles VII.

7 Jacques Cœur, le célèbre argentier du roi.