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MCCXXIX

Rémission accordée à Martin Linart, et à sa femme Jeanne Malmaud, qui, s’étant disputée et battue avec la femme de Jean Chameau, de la Villedieu, avait été accusée par celle-ci de l’avoir fait avorter, et avait été pendant quelque temps détenue à la Mothe-Saint-Héraye.

  • B AN JJ. 181, n° 190, fol. 118
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 32, p. 299-301
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Martin Linart et de Jehanne Malmaude, sa femme, contenant comme ladicte Jehanne Malmaude ait tousjours esté tenue preude femme, paisible et de bonne fame, vie, renommée et honneste conversacion, sans faire ne pourchacer mal ne ennuy à autruy, et sans estre actainte ne convaincue d’aucun vilain cas, blasme ou reprouche, et soit ainsi que à ung jour de dimenche qui fut neuf mois a ou environ, que ladicte Malmaude se trouva avecques la femme d’un nommé Jehan Chameau de la Villedieu en ung masureau appartenant à Pierre Arnault, pour ce que icelle femme dudit Chameau, qui avoit esté malade bien deux mois ou environ, avoit dit et proferé à pluseurs de ladicte Villedieu contre raison que ladicte Malmaude l’avoit fait ainsi malade, icelle Malmaude demanda à ladicte femme dudit Chameau, comme marrie et desplaisante desdictes parolles par elle ainsi indeuement dictes et proferées, se sa teste qu’elle avoit tant plainte n’estoit point guerie. A quoy ladicte femme d’icellui Chameau lui respondi en la injuriant, et à ceste occasion et des autres parolles et injures dessus dictes, se print à elle et lui donna du poing sur le visage quatre ou cinq cops, et par ce qu’elle avoit certaines roignes en son dit visaige, il en sailli sang ; et comme elle qui estoit boiteuse et foible femme se cuida lever, pour ce qu’elle estoit assise, et s’en aler, elle chey le visaige contre terre et incontinent se releva ; et atant se deppartirent [p. 300] ladicte Malmaude et elle, et demoura son chapperon en la place, que ladicte Malmaude lui gecta, et elle le print et recueilli et s’en ala à son hostel et ailleurs où bon lui sembla ; et dès lors s’en ala et vint plainement comme paravant à ses besongnes, negoces et affaires, sans estre plus malade qu’elle avoit paravant esté, et jusques au second lundi ensuivant, auquel jour de lundi pour ce qu’elle avoit fait adjourner ladicte Malmaude par devant le juge de la prevosté de la Mote Saint Eraye, pour lui donner asseurement, elle ala de son pié appertement jusques audit lieu de la Mote Saint Eraye, demander ledit asseurement devant ledit juge de la prevosté d’ilecq. Et pour ce qu’elle estoit partie tart, elle, doubtant n’y estre pas à heure, y ala hastivement et s’eschauffa très fort à ce faire, et le lendemain, elle qui estoit ensainte et avoit esté malade, comme dessus est dit, bien l’espace de deux mois ou environ, et s’estoit eschauffée, comme dit est, se delivra d’enfant mort né. Et peu après, la dicte femme dudit Chameau se plaigny et clama à la justice dudit lieu de la Mote Saint Eraye, disant que ladicte Malmaude l’avoit tant batue qu’elle en estoit avortée. Au moien de laquelle plainte et clameur, icelle Malmaude fut prinse et emprisonnée ès prisons dudit lieu de la Mote Saint Heraye, et ilec detenue par aucun temps ; et depuis a esté eslargie. Mais elle doubte que, pour occasion desdiz copz par elle donnez à ladicte femme d’icellui Chameau et de ladicte chaeste, on la voulsist tenir coulpable dudit cas et pour occasion d’icellui proceder rigoreusement contre elle, qui pourroit estre à sa desercion totale, se nostre grace et misericorde ne lui estoit sur ce prealablement impartie, si comme dient lesdiz supplians, humblement requerant iceulx. Pour ce est il que nous, ces choses considerées, voulans misericorde estre preferée à rigueur de justice, à ladicte Malmaude oudit cas avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces [p. 301] mesmes presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Croiset, ou mois de septembre l’an de grace mil cccc. cinquante deux, et de nostre règne le xxxe.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Machet. — Visa. Contentor. P. Audé.